Zoonymie (étude du nom) du papillon le Moyen Nacré Argynnis adippe (Denis & Schiffermüller, 1775).
La zoonymie (du grec ζῷον, zôon, animal et ónoma, ὄνομα, nom) est la science diachronique qui étudie les noms d'animaux, ou zoonymes. Elle se propose de rechercher leur signification, leur étymologie, leur évolution et leur impact sur les sociétés (biohistoire). Avec l'anthroponymie (étude des noms de personnes), et la toponymie (étude des noms de lieux) elle appartient à l'onomastique (étude des noms propres).
Elle se distingue donc de la simple étymologie, recherche du « vrai sens », de l'origine formelle et sémantique d'une unité lexicale du nom.
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Résumé. Argynnis adippe ([Denis & Schiffermüller],1775).
— Argynnis, Fabricius, 1807 : cet auteur danois ami de Linné a créé 49 noms génériques, dont, selon la règle qu'il s'était fixé, près de la moitié sont des épithètes de Vénus (Aphrodite en Grèce) : c'est le cas pour l'épiclèse Argynnis Argunnis ´Αργυννίς «D'Argynnos (toponyme et anthroponyme)» , épiclèse d'Aphrodite (´Αφροδίτη ) du nom de son temple Argyneion bâti selon la légende par Agamemnon roi de Mycènes sur les bords du fleuve Céphise en souvenir de son amant le jeune Argynnus qui s'y était noyé. Le rapprochement lointain et fortuit avec le grec arguros "argent" a sans-doute été inspiré bien plus tard à Emmet (1991) par les taches argentées des ailes.
— adippe (Denis & Schiffermüller, 1775) : Dans sa Fauna Suecica de 1761, Linné a d'abord appelé cette espèce cydippe, du nom d'une nymphe marine, une Néréide. Ce nom avait toutefois déjà été attribué en 1759 par Clerck à une autre espèce exotique et dans son Systema Naturae de 1767, Linné crée le nom adippe pour son ancienne cydippe en écrivant "in Fauna Suecica Cydippe perperam pro Adippe legitur" (Dans Fauna Suecica, Cydippe est lu par erreur pour Adippe). L'incertitude sur le statut taxonomique de ce nom a finalement pris fin en 1958 par une décision de l' IC.Z.N qui supprimait le nom cydippe et validait adippe, mais avec Denis & Schiffermüller comme auteurs. Adippe semble être un nom inventé pour rappeller cydippe tout en le reniant. (d'après Emmet, 1991).
— En 1762, Geoffroy ne décrit que le Grand et le Petit Nacré (aglaia et lathonia). En 1779, Engramelle donne au papilio adippe le nom de "Grand Nacré". Godart le nomme "l'Argynne Adippé" en 1821, puis Gérard Luquet crée "Le Moyen Nacré" en 1986. Le substantif "Nacré" s'applique à 21 espèces dont la face inférieure des ailes est ornée de taches argentées.
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I. NOM SCIENTIFIQUE.
I. Nom scientifique.
1. Famille et sous-famille.
a) Famille des Nymphalidae Rafinesque, 1815.
Cette famille comporte (je suivrai Dupont & al. (2013) ) 8 sous-familles en France :
Sous-famille des Libytheinae Boisduval, Rambur, Dumesnil & Graslin, [1833]
Sous-famille des Danainae Boisduval, [1833]
Sous-famille des Limenitidinae Butler, 1870
Sous-famille des Heliconiinae Swainson, 1822
Sous-famille des Apaturinae Boisduval, 1840
Sous-famille des Nymphalinae Swainson, 1827
Sous-famille des Charaxinae Doherty, 1886
Sous-famille des Satyrinae Boisduval, [1833]
b) Sous-famille des Heliconiinae Swainson, 1822
Selon Dupont & al., Pelham & al. (2008), se référant aux travaux de Koçak (1981), considèrent Heliconiinae Swainson, 1827, comme invalide, au motif que le nom donné par Swainson est fondé sur le nom générique Heliconius Latreille, 1804, qui est un homonyme d’Heliconius Kluck, 1780. Ces auteurs préconisent l’utilisation d’Heliconiinae Swainson, 1822 (planche 92, « Heliconiae »).
c) Tribu des Argynnini Swainson, 1833 : les Argynnes.
Pour la systématique des Argynnini Dupont & al. suivent les travaux de Simonsen & al. (2006).
d) Sous-tribu des Argynnina Swainson, 1833
Genre Issoria Hübner, [1819]
Genre Brenthis Hübner, [1819]
Genre Argynnis Fabricius, 1807
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2. NOM DE GENRE Argynnis, Fabricius, 1807:
Origine et signification du nom du sous-genre Fabriciana Reuss, 1920
Ce sous-genre est dédié à Johann Christian Fabricius (1745 Tønder 1808 Copenhague).
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3. NOM D'ESPECE : Argynnis adippe ([Denis & Schiffermüller,] 1775).
a) Description originale
Papilio adippe [Denis, J. N. C. M. & Schiffermüller, I.] 1775. Ankündung eines systematischen Werkes von den Schmetterlingen der Wienergegend, herausgegeben von einigen Lehrern am k. k. Theresianum.. Vienne. 322 pp. page 177 . [http://gdz.sub.uni-goettingen.de/dms/load/img/PPN=PPN574458115&DMDID=DMDLOG_0006&LOGID=LOG_0008&PHYSID=PHYS_0178]
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b) Localité-type et Description :
— Localité-type : "Umbegung von Wien" environs de Vienne, Autriche.
Selon Dupont & al. (2013) "Denis et Schiffermüller (1775 : 177) figurent ce taxon, mais n’en donnent aucune description. Les auteurs se réfèrent à « (P. Berecynthia Poda) ». Rappelons ici que l’opinion 501 de la Commission Internationale de Nomenclature Zoologique a établi le rejet des noms berecynthia Poda, 1761, cydippe Linnaeus, 1761 et adippe Linnaeus, 1767 (nomina rejecta), stipulant qu’adippe [Denis et Schiffermüller], 1775, représente le nom valide ayant préséance pour désigner ce taxon (ICZN, 1958)".
Selon Dupont & al.(2013) cette espèce est présente dans toute la région paléarctique sauf en Afrique du Nord. Elle est signalée dans toute la France. Les chenilles se nourrissent sur diverses espèces de Violettes.
— Description Wikipédia :
"C'est un papillon de taille moyenne de couleur orangé vif, ornementé de taches formant des festons marginaux puis une ligne de taches rondes et d'une ornementation de larges traits. Le revers des antérieures est orange orné de taches rondes et de traits marron, celui des postérieures est orné de taches nacrées et d'une ligne de taches marron roux centrées de blanc.Le Moyen nacré présente la même couleur orange sur le dessus que les autres nacrés Grand nacré, Nacré de la ronce... et le Tabac d'Espagne mais avec des dessins différents et au revers des taches nacrées spécifiques.Le Moyen nacré vole en une génération entre juin et août suivant la localisation.
Il hiverne au stade de chenille formée dans l'œuf. Les plantes hôtes sont des violettes, en particulier Viola canina, Viola odorata, Viola hirta, Viola tricolor, Viola riviniana Les œufs sont pondus sur les feuilles de la plante hôte. La chenille possède une tête marron et un corps marron roux orné d'une ligne dorsale blanchâtre entre des dessins noirs et de scoli rosâtres à roux.
Il est présent dans toute l'Europe sauf sa partie la plus nordique (nord de l'Angleterre et de la Scandinavie), dans toute l'Asie (sauf la partie la plus au sud, et jusqu’au Japon En France métropolitaine, il est présent dans tous les départements sauf en Corse, mais sa présence n'a pas été notée depuis longtemps en Bretagne et sur la côte de la Manche. Il réside sur les prairies humides et les pentes herbues."
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c) Synonymes INPN (Muséum) et sous-espèces.
Liste des synonymes :
Argynnis adippe adelassia Fruhstorfer, 1910 :Fruhstorfer, H. V. 1910. Neue palaearktische Argynnisrassen. Entomologische Zeitschrift, 24(7): 37. [http://biodiversitylibrary.org/page/31939391]
Argynnis adippe adippe (Denis & Schiffermüller, 1775)
Argynnis adippe chlorodippe Herrich-Schäffer, 1851 Herrich-Schäffer, G. A. W. 1843-1856. Systematische Bearbeitung der Schmetterlinge von Europa, zugleich als Text, Revision und Supplement zu Jacob Hubnerâs Sammlung europaischer Schmetterlinge. Sechster und letzter Band. Regensburg.: 5. [http://biodiversitylibrary.org/page/42585701]
Argynnis adippe cleodoxa Ochsenheimer, 1816. Die Schmetterlinge von Europa. Fleischer, Leipzig. 4: 212 pp. Page 118. http://biodiversitylibrary.org/page/34451193#page/122/mode/1up
Argynnis adippe magnaclarens Verity, 1936 Verity, R. 1936. The lowland races of butterflies in the upper Rhône valley. The Entomologist's record and journal of variation, 48: [77-90 ] : 85.. [http://biodiversitylibrary.org/page/30053273]
Argynnis adippe semiclarens Verity, 1936 Verity, R. 1936. The lowland races of butterflies in the upper Rhône valley. The Entomologist's record and journal of variation, 48: [77-90 ].: 85. [http://biodiversitylibrary.org/page/30053273]
Fabriciana adippe adelassia (Fruhstorfer, 1910)
Fabriciana adippe adippe (Denis & Schiffermüller, 1775)
Fabriciana adippe chlorodippe (Herrich-schaffer, 1851)
Fabriciana adippe cleodoxa (Ochsenheimer, 1816) Ochsenheimer, F. 1816. Die Schmetterlinge von Europa. Fleischer, Leipzig. 4: 212 pp.: 118.
Fabriciana adippe magnaclarens (Verity, 1936)
Fabriciana adippe semiclarens (Verity, 1936)
Fabriciana adippe (Denis & Schiffermüller, 1775)
Papilio cydippe Linnaeus : 1761. Fauna Svecica sistens animalia Sveciæ Regni: mammalia, aves, amphibia, pisces, insecta, vermes. Distributa per classes & ordines, genera & species, cum differentiis specierum, synonymis auctorum, nominibus incolarum, locis natalium, descriptionibus insectorum. Editio altera, auctior.. Stockholmiæ. (L. Salvii). 578 pp. page 281. http://biodiversitylibrary.org/page/32170750#page/339/mode/1up
ICZN 1958. Opinion 501. Validation under the Plenary Powers of the specific name adippe as published in the combination Papilio adippe in 1775 in the anonymous work by Denis & Schiffermüller commonly known as the Wiener Verzeichniss to be the specific name for the hight brown fritiilary and validation under the same powers of a neotype species (Class Insecta, Order Lepidoptera).Opinions and declarations rendered by the International Commission on Zoological Nomenclature,18(1): 1-64. [http://www.biodiversitylibrary.org/page/34986710]
Sous-espèces :
Tshikolovets retient trois sous-espèces en Europe et le bassin méditerranéen :
- adippe [Denis & Schiffermüller], 1775.
- taurica Staudinger, 1878. Localité-type : Taurus, Anatolie, Turquie.
- chlorodippe Herrich-Schäffer, 1851
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c) Origine et signification du nom (Zoonymie)
— Gustav Ramann (1870-1876) page 78 :
"Ob vielleicht der Name Adippe von adipiscor, sich anfügen, also ein Falter, der sich den Vorigen angefügt, herzuleiten sein dürfte ?" : "Sans-doute du latin adipiscor "s'attacher à", et alors le nom de ce papillon suit-il le précédent en s'y rattachant ?"
— L. Glaser (1887) page page 126 :
"eig-, "Satt-", oder "Lustpferd", Nam einer Waldnymphe"
— Anton Spannert (1888) page 39 :
"Name einer Nymphe, auch sonst ein gebräuchlicher Frauenname im alten Griechenland" : nom d'une Nymphe, et aussi nom féminin courant dans la Grèce antique"
— Arnold Spuler (1901-1908) :
— August Janssen (1980) page 41 :
"Naam van een nimf" : "Nom d'une nymphe".
— Hans Hürter (1988) page 257 : cite seulement ses prédécesseurs puis étudie Cydippe.
— A. Maitland Emmet (1991) page 154 :
"—in Fauna Suecica (Edn 2) (1761) Linnaeus called this species cydippe after a Nereid (a sea-nymph). This name however had already been allocated to another species and later (Linnaeus, 1767) he wrote "in Fauna Suecica Cydippe perperam pro Adippe legitur" (in Fauna Suecica, Cydippe is read in error for Adippe) Uncertainly over which name should be used was eventually ended in 1958 by a ruling of the I.C.Z.N. which suppressed the name cydippe and established adippe with Denis & Schiffermüller as the authors. Adippe appears to be invented name designed to be reminiscent of cydippe." : "Dans Fauna Suecica (éd 2) (1761) Linné a appelé cette espèce cydippe d'après une Néréide (une nymphe marine). Ce nom avait toutefois déjà été attribué à une autre espèce et, plus tard (Linnaeus, 1767), il a écrit "in Fauna Suecica Cydippe perperam pro Adippe legitur" (Dans Fauna Suecica, Cydippe est lu par erreur pour Adippe) L'incertitude sur la façon par laquelle le nom devrait être utilisé a finalement pris fin en 1958 par une décision de la ICZN qui supprimait le nom cydippe et établissait adippe avec Denis & Schiffermüller comme auteurs. Adippe semble être le nom inventé pour rappeller cydippe ".
— Luquet in Doux et Gibeaux (2007) page 106 :
"adippe : mot vraisemblablement forgé de manière arbitraire en s'inspirant du nom "cydippe" ; repris en 1775 par Denis & Schiffermüller, fixé par la C.I.N.Z. (1958) pour remplacer le cydippe de Linné (1761) qui avait lui-même corrigé en adippe dès 1767 (Emmet, 1991 :154). Adippe serait également un nom de femme, dans la Grèce antique (Spuler, 1901-1908 :30).
— Perrein et al. (2012) page 350 :
"de Cydippé, la belle jeune fille dont Aconthios devint de suite amoureux lors des fêtes de Délos, lequel usa d'un habile stratagème pour en obtenir la main selon le poète Ovide ; d'après une erreur de lecture reconnue par Linné en 1767 : in Fauna Svecica Cydippe [Papilio cydippe Linnaeus, 1761] perpetram pro Adippe legitur".
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Discussion.
Comme le mentionne les analyses qui précèdent, ce nom spécifique adippe a succédé à celui de cydippe et ne peut être interprété qu'après consultation d'un dossier, parfaitement établi par l'I.C.Z.N dans son Opinion 501 de 1958 et qui comprend les points suivants :
a) le Fauna suecica 2nde édition de 1761 page 281 n°1066 : Linné crée le nom Cydippe, précédé de ceux de Paphia et d'Aglaja et suivi de celui de Niobe. pour une espèce de Suéde ("fauna suecica", vivant dans les prairies (habitat in pratis) aux ailes jaunes tachées de noir en dessus, et portant en dessous 23 taches argentées. Il accompagne la diagnose d'une description précise des différences avec son Papilio aglaja ("Grand Nacré"). Dans la mythologie grecque, ce nom Cydippe peut désigner : Cydippe, une Néréide, mère d'Aristée (citée par Hygin) ; Cydippe, une Argienne prêtresse d'Héra et mère de Cléobis et Biton ; Cydippe, une Athénienne, liée à Acontios. Cettte dernière est la plus connue, notamment, parmi les hommes de lettre, à l'époque de Linné. La légende d'Acontios et de Cydippe est racontée par Aristénète, Lettres d'amour (I, 10) ; Callimaque de Cyrène, Cydippe ; mais surtout par Ovide dans son Art d'aimer (I, 455-456).
Ce nom de Papilio cydippe est employé ensuite par trois auteurs, Scopoli en 1763, Brünnich in Prontopiddan 1763, et Müller en 1764, mais a priori pour désigner Papilio niobe.
b) La 12ème édition du Systema Naturae de Linné en 1767 page 776 n° 212 : Linné nomme la même espèce du nom d'Adippe, en renvoyant à sa référence n°1066 du Fauna Suecica, mais en précisant "in Fauna Suecica Cydippe perperam pro Adippe legitur" (Dans Fauna Suecica, Cydippe a été lu par erreur pour Adippe). Cette modification est justifiée par la présence, page 776 de la même édition, d'un Papilio Cydippe, d'origine exotique (habitat in India) et nommé précédemment dans deux références données par Linné, amoen. acad. et Clerck tome 36 fig.1. Ce papillon est actuellement connu sous le nom de Cethosia cydippe L. Linné avait déjà décrit ce Cydippe exotique dans Centuria insectorum page 26 avec la même référence à Clerck. Cette dernière renvoie à Clerck, C. 1759. Icones insectorum rariorum cum nomibus eorum trivialibus, locique e C. linnaei. - Pp. [1-10], onglet. 1-16. Holmiæ. Il y a donc antériorité du nom Cydippe (India, Clerck 1759) sur Cydippe (Suède, Linné 1761) et Linné doit dé-baptiser son espèce.
En raison de la Loi de Priorité et de la Loi d'Homonymie, l'I.C.Z.N. a décidé de ne valider ni Papilio cydippe Linné, 1761, ni Papilio adippe Linné, 1767.
c) Le "Verzeichniß" de Denis & Schiffermüller 1775 page 177 : il cite Papilio adippe L.[inné] en indiquant comme synonyme ou référence Papilio berecynthia de Poda 1761. L'I.C.Z.N. a supprimé la validité de ce dernier nom au motif de la Loi de priorité. (Linné 1761 étant antérieur à Poda 1761 ?).
d) La discussion qui suit l'Opinion 501 de l'I.C.Z.N. page 7-64 qui est simplement passionnante par les arguments qui y sont échangés et les pièces versées au dossier (Planches 1-3 : photographie du néotype et des genitalia d'adippe et de niobe). Elle a été préparée entre 1938 et 1939 entre les britanniques Francis Hemming, Warren, et N.D. Riley, et l'italien Ruggero Verity , rejoints après-guerre par les américains Gray, Klots et Dos Passos,
e) L'expertise de la collection de Linné par R. Verity en 1903 dans J. linn. Soc. Lond. (Zool.) 32 173-191 : elle révèle qu'outre deux mâles étiquetés Papilio niobe et conformes à notre Argynnis niobe dans sa forme sans taches argentées se trouve un spécimen femelle à dessous de l'aile argentée, étiquetée Papilio cydippe mais qui correspond à un A. niobe. Les auteurs de la Commission en conclue que les noms, se référant à des formes infra-spécifiques n'ont pas de statut taxonomique et que le nom cydippe Linné, 1761 ne correspond pas au Moyen Nacré (High Brown Fritillary pour ces auteurs), et, par voie de conséquence, que Papilio adippe Linné, 1767 n'y correspond pas non plus. Dés lors, d' autres noms retrouvent une validité possible, le Papilio berecyncia de Poda 1761 (Ins. Mus. graev. :75 n°38) et Papilio syrinx Borkhausen 1788, mais l'insuffisance de la description du premier, et l'inexactitude du second font qu'ils sont écartés. Il restait à considérer la validité de la publication du Papilio adippe par deux auteurs différents de Linné, soit Rotemburg (Naturforscher 6:13, 1775), soit Denis & Schiffermüller, et de celle de Esper qui en 1777 a donné la première description accompagné d'une illustration des trois Nacrés aglaja, adippe et niobe. Aujourd'hui, il est admis par l'I.C.Z.N. que la publication de Rottemburg est antérieure à celle des deux auteurs viennois, mais cette notion (Opinion 516) n'était pas encore validée. L'avantage fut donné aux viennois parce que leur Catalogue des environs de Vienne précise clairement la localité du type (Vienne), à la différence de Rottemburg et d'Esper.
Loin de faire consensus, l'ensemble de ces points ont été largement débattus comme d'épineux problèmes. Le représentant du Muséum d'Histoire Naturelle, G. Bernardi, plaisait pour sa part pour l'adoption du nom phryxa Bergsträsser.
Un point n'a pas été soulevé : il semble admis que Linné, ayant constaté son erreur d'un nom déjà attribué, ait écrit en 1767 : "Dans Fauna Suecica de 1761, j'avais écrit adippe, et cela a été lu par erreur cydippe" comme un subterfuge, une formule littéraire pour se justifier. Bref, Linné aurait commis un mensonge formel. Mais pourquoi ne pas le croire ? Il a pu créer initialement le nom Adippe, puis être victime d'une faute d'impression, et reprendre le nom Adippe dès la première occasion. Dans ce cas, l'interprétation du sens du zoonyme est différente.
Dans la première hypothèse, Adippe est une sorte de néologisme créé en 1767 pour résoudre le double emploi du nom Cydippe en en conservant la mémoire par un suffixe a- privatif qui équivaut à barrer ou rayer le nom de 1761.
Dans la seconde hypothèse, Linné connaissait le nom Cydippe créé par Clerck, et a utilisé d'emblée un nom différent. Hélas, ce nom n'est connu ni dans la mythologie ni ailleurs avant 1767, et cet Adippe n'a aucun sens s'il ne se réfère pas à un Cydippe préalable.
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II. NOMS VERNACULAIRES.
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I. Les Noms français.
1."Le Grand et le Petit Nacré", Geoffroy (1762)
Geoffroy, E. L. 1762. Histoire abrégée des insectes qui se trouvent aux environs de Paris, dans laquelle ces animaux sont rangés suivant un ordre méthodique. Tome II. Durand, Paris. 690 pp. page 43 n°9 et 10. Cet auteur qui décrit sa collection 1 an après le Fauna suecica de Linné 1761 et sa description de son Papilio cydippe n'a sans-doute pas eu le temps d'intégrer cette notion récente et ne décrit que le Grand Nacré (P. aglaja) et le Petit Nacré (lathonia). Il trouve sa place ici puisque c'est lui qui initie la série des Nacrés et crée ce zoonyme.
2. "Le Grand Nacré", Engramelle, 1779.
Jacques Louis Engramelle 1779 Papillons d'Europe, peints d'après nature, Volume 1 page 51 Planche 16 fig. 13 c-d-g-h dessinée par J.J Ernst et Supplément page 259
Engramelle distingue le Grand Nacré (Adippe), le Nacré (Aglaia), et le Petit Nacré (Lathonia) et le Chiffre (Niobe). Il les décrit d'abord pages 51 à 53, puis corrige ces premières descriptions dans ses Suppléments page 238-244 :
— Le Grand Nacré page 51 Planche XIII n°16.
— Le Nacré page 52 Planche XIV n°17.
— Le Chiffre page 55 Planche XV n°19.
Le Petit Nacré page 60 Planche XVI n°24
"C'est ici le lieu de rectifier une erreur dans laquelle nous sommes tombés aux Planches XIII & XIV. Le grand Nacré Pl. XIII, est le papillon Adippe de Linnaeus, & le Nacré Pl. XIV, est celui qu'il appelle Aglaia. Or la chenille & la chrysalide qui se trouvent sur la Pl. XIII fig.16a et 16b appartiennent à l'Aglaia, c'est-à-dire au Nacré de la Planche suivante n°.17. Nous avons été entraînés dans cfette erreur par M. geoffroi (sic) qui fait la même confusion. Son grand Nacré, n°9 page 45, est bien l'Adippe de Linnaeus, quoiqu'il cite Linn. Aglaia, et la Chenille qu'il qu'il y décrit est celle de l'Aglaia. M. le Docteur Gruvel, de Brunswick, qui fait une étude particulière des chenilles, vient de nous envoyer le portrait de celle de l'Adippe ; mais comme il ne nous est parvenu qu'après la gravure de cette Planche et de celle LIX, nous le donnerons à la pl. LX. Cette chenille a &été longtemps méconnue. L'Admiral est le premier qui l'ait découvert. La plupart des anciens auteurs avaient confondus les papillons Adippe et Aglaia & ne les regardaient que comme variétés l'un de l'autre. De nouvelles observations, et surtout la découverte de leurs chenilles, ont prouvé qu'ils formaient deux espèces très différentes, & ils ont des caractères constants qui les distinguent l'un de l'autre, de manière à ne s'y pas méprendre. Les principaux sont 1°) L'Adippe, entre les deux bandes de taches nacrées des ailes inférieures en dessous, a quatre taches rougeâtres avec un point argenté en dessous. Voyez les P¨Fig.17b, 17d, Pl. XIV, au lieu que dans l'Adippe elles sont jaunâtres en totalité, à l'exception d'une légère teinte verdâtre qui se trouve quelquefois le long du bord d'en bas comme à la Fig. 16.f. Les auteurs qui ont décrits le Grand Nacré sont : Linné Syst. Nat. éd. XII. sp.212. Pag. 786. Adippe. Esper, tom. 1, tab. XVIII, fig.1. Pag.232, & tab. XXVI fig.4, pag 317. .. Fuesli ...Müller,... L'Admiral..."
"Ceux qui ont décrits le Nacré sont : Linné, Syst. nat. ed.XII, sp. 211. pag. 785. Aglaia."
— Supplément page 241. :
"Le Chiffre : … Cette espèce, est celle que Linnaeus décrit sous le nom de Niobe sp.215. Pag. 786. Quelques auteurs, entre autres M. de Geer, l'ont confondue avec l'Adippe, le Grand Nacré, dont ils la croyaient la femelle."
—Supplément page 244 : Pl. LX Suppl. VI Suite du N° 16"
— Supplément page 317
3. Argynne Adippé, Latreille et Godart 1819
Latreille et Godart Encyclopédie méthodique, Paris : Vve Agasse tome 9, page 265 n°24
Cet article permet de disposer de l'ensemble des références bibliographiques sur cette espèce, notamment par les auteurs germaniques, autrichiens ou suisses.
4. "L'Argynne Adippé" , Godart 1821,
Jean-Baptiste Godart, Histoire naturelle des lépidoptères ou papillons d'Europe, Paris : Crevot 1821, page 57 n° XV
6. La revue des noms vernaculaires par Gérard Luquet en 1986, et le nom vernaculaire actuel.
Dans la révision des noms vernaculaires français des rhopalocères parue dans la revue Alexanor en 1986, Gérard Christian Luquet proposait comme nom principal "Le Moyen Nacré" et réfute l'usage de "Grand Nacré" employé par P.A. Robert en 1960 [mais aussi par Oberthür cf. infra] par sa note 72 :
Note [72] : "Robert a malencontreusement interverti les noms vernaculaires de Mesoacidalia aglaja ("Le Grand Nacré") et de Fabriciana adippe ("le Moyen Nacré")."
7. Étude du nom vernaculaire par les auteurs précédents:
— Luquet in Doux et Gibeaux, (2007) page 104 : "Nacré (Engramelle, 1779) : allusion à l'ornementation de la face inférieure". / page 106 : "F. adippe fut d'abord baptisé "Grand Nacré" par Geoffroy (1762) puis par Engramelle (1779)".
8. Noms vernaculaires contemporains :
Charles Oberthür et Constant Houlbert , dans leur Faune armoricaine de 1912-1921, utilisent le nom scientifique de "Arynnis adippe Linn. " puis nomme cette espèce "Le Grand Nacré" page 128.
—Bellmann / Luquet 2008 : Non décrit .
— Chinery / Leraut 1998 : non décrit
— Doux & Gibeaux 2007 : "Fabriciana adippe Le Moyen Nacré ".
— Lafranchis, 2000 : " Argynnis adippe Le Moyen Nacré" .
— Perrein et al. 2012 : "Fabriciana adippe Moyen Nacré ".
— Tolman & Lewington / P. Leraut 2009 : " Fabriciana adippe Le Moyen Nacré".
— Wikipédia : "Moyen Nacré ".
III. LES NOMS VERNACULAIRES dans d'autres pays.
Langues celtiques :
1. langues gaéliques : irlandais (gaeilge) ; écossais (Gàidhlig ) ; mannois ( gaelg : île de Man).
en irlandais
en mannois.
"" en gaélique écossais*
2. Langues brittoniques : breton (brezhoneg) ; cornique (kernevek); gallois (Welsh, cymraeg).
pas de nom en breton ;
"Britheg frown" en gallois.
*Liste des noms gaéliques écossais pour les plantes, les animaux et les champignons. Compilé par Emily Edwards, Agente des communications gaélique, à partir de diverses sources. http://www.nhm.ac.uk/research-curation/scientific-resources/biodiversity/uk-biodiversity/uk-species/checklists/NHMSYS0020791186/version1.html
Voir aussi :http://www.lepidoptera.pl/show.php?ID=70&country=FR
IV. LES NOMS VERNACULAIRES EN ANGLAIS ( d'après M. Salmon 2000).
Première description par Petiver ? 1699, 1717.
? "The greater silver-spotted Fritillary" : Petiver, 1699, (cf. A. aglaja)
"The High Brown or High-brown Fritillary" (Wilkes 1741-42 ; Haworth, 1803 ; Jermyn, 1824 ; Rennie, 12832 ; et tous les auteurs suivants.
"The High Brown Fritillaria" : Harris, 1766 ; 1775.
"The Violet Silver-spotted Fritillary" : Lewin, 1795.
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Bibliographie, liens et Sources.
—Funet :
— Inventaire national du patrimoine naturel (Muséum) :
Bibliographie générale de ces Zoonymies : http://www.lavieb-aile.com/article-zoonymie-des-rhopaloceres-bibliographie-124969048.html