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30 juin 2016 4 30 /06 /juin /2016 22:50

Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Sens, II : les deux lancettes centrales ; la Vierge et la Licorne.

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Voir d'abord :

Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Sens. I. Relevé et étude des inscriptions.

L'Annonciation à la licorne de Martin Schongauer à Colmar.

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Voir dans ce blog lavieb-aile les articles consacrés aux Arbres de Jessé de Bretagne:

Les sculptures :

Et les vitraux (ordre chronologique):

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Et en comparaison avec les œuvres bretonnes :

— Les cathédrales du XII et XIIIe siècle :

— Les vitraux et sculptures Renaissance du XV et XVIe siècle :

— Les vitraux contemporains :

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PRÉSENTATION.

 

La baie n°116, fenêtre haute du transept sud, mesure 12,4 m de haut sur 4,20 de large et comporte 4 doubles lancettes trilobées et un tympan à 21 ajours. Elle a été ouverte  sous l'épiscopat (1474-1519) de Tristan de Salazar. La voûte du transept s'éleva vite à 27 mètres, et les fenêtres furent vitrées par les peintres verriers qui avaient travaillé à la cathédrale de Troyes : Lyévin Varin ou Voirin, Jehan Verrat et Balthazard Godon ou Gondon. L’engagement vis-à-vis du Chapitre date du 12 novembre 1500 et comprenait les quatre grandes verrières et les rosaces du bras sud. Les vitraux sont posés entre 1502 et 1503. L'Arbre de Jessé de Sens porte les armoiries parlantes du donateur, le chanoine Louis La Hure.

Depuis le premier vitrail consacré à ce thème à Saint-Denis, conçu par Suger, les Arbres de Jessé suivent un schéma semblable : au dessus de Jessé endormi ou songeur, un arbre se développe à partir de son corps, portant les rois de Juda (jusqu'à 12) puis le Christ entouré des colombes des Dons de l'Esprit, ou, plus tard, la Vierge portant l'Enfant. Latéralement, les Prophètes témoignent par leur présence ou leurs citations du fait que l'avènement du Christ a été annoncé tout au long des Écritures. Chacun des vitraux des premières cathédrales du XII et XIIIe siècle répondent à ce souci de témoigner des rapports entre l'Ancien Testament et les Évangiles avec des particularités qui font leur intérêt, puis le thème est repris à la Renaissance, dominé alors par le culte marial et la foi dans la virginité et la conception immaculée de Marie.

 

 

Parmi ces Arbres de la Renaissance, l'Arbre de Jessé de Sens répond globalement à cette disposition et à cette double préoccupation, typologique (annonce par les textes bibliques) et mariale. Sur les panneaux centraux, directement lisibles sur un fond rouge, se reconnaissent vite Jessé allongé en bas, l'Arbre portant les 12 rois sur ses branches, et la Vierge à l'Enfant en haut à gauche. Sur les panneaux latéraux, à fond bleu, 8 vignettes réunissent au total 12 personnages bibliques tenant sur leur banderole la citation annonçant (ou préfigurant) l'Annonciation, la Nativité, l'Incarnation et la Passion rédemptrice de la théologie chrétienne.

Pourtant, cet Arbre de Jessé de Sens est exceptionnel parce qu'il comporte, au dessus de Jessé endormi, non pas d'abord les Rois de Juda échelonnés, mais, en premier lieu, l'Annonciation (Gabriel face à la Vierge), et, en second lieu, la réunion énigmatique d'une jeune femme (au dessus de Gabriel) en face d'une licorne (au dessus de la Vierge). Pour comprendre le sens de la présence de cette licorne, il faut connaître l'iconographie à laquelle elle se rapporte.

Une autre originalité du vitrail de Sens est le choix des personnages latéraux, et surtout du texte de leurs phylactères. On trouve 8 Prophètes dont 4 Petits Prophètes avec les textes suivants  "Voici sur les montagnes les pieds du messager qui annonce la paix! ". Nahum 1:15 "Car voici, je viens, et j'habiterai au milieu de toi, dit l'Éternel." Zacharie 2:10 ; "car je suis moi-même avec vous, déclare l'Éternel, le maître de l’univers."Aggée 2:5 ; " Prépare-toi à la rencontre de ton Dieu "Amos 4:12. Ils témoignent de la venue (pieds, messager, annonce, je viens, rencontre) et de l'établissement de Dieu sur Terre, ou dans le sein de la Vierge (j'habiterai au milieu, je suis avec vous). Enfin, quatre scènes typologiques font appel au Buisson ardent de Moïse, à l'autel de Melchisédech, à la Toison de Gédéon, et à la Porte Close d'Ézéchiel.

 

C'est en faisant appel à deux thèmes de spiritualité chrétienne en faveur au XVe siècle, ceux de la Chasse mystique (ou « Annonciation à la Licorne »), et aux textes du Procès en Paradis que cette licorne de Sens se comprend. Je les rappelle très brièvement.

Les Chasses mystiques trouvent leur origine dans les bestiaires décrivant la chasse à la licorne. Cet animal fabuleux est connu pour rester invincible et échapper aux chasseurs sauf s'il est attiré par le parfum d'une jeune fille vierge à la poitrine dénudée. La licorne vient alors sur ses genoux et incline sa corne vers son sein : le chasseur peut alors la blesser et la capturer. Cette description relevant de l'Histoire naturelle est vite lue comme une métaphore de l'amour profane, l'amant étant la licorne, le chasseur le dieu Amour, et la jeune vierge la femme désirée. Parallèlement, la scène est aussi interprétée comme une allégorie de l'Incarnation, la licorne étant le Christ, le chasseur l'ange Gabriel, Marie la jeune fille dont les vertus et la virginité permettent la venue du Christ en son sein.

Le Procès en Paradis, qui trouve son origine dans la mystique de saint Bernard et des franciscains, puis dans  le prologue du Mystère de la Passion dû à Eustache Marcadé, joué à Arras vers 1420-1430 , développe l'idée d'une discussion dans les Cieux : Paix et Miséricorde plaident la cause de l'humanité déchue depuis le péché originel afin de les arracher à la mort. Au contraire, Justice et Vérité soutiennent que Dieu a damné les hommes et qu'il ne saurait se contredire et qu'il doit rester intransigeant.. Miséricorde et Justice partent en vain à la recherche d'un homme juste sur Terre, prêt à mourir pour sauver les hommes, et Dieu décide d'envoyer son Fils.

Dans la fusion des deux thèmes, Gabriel armé en chasseur est guidé par quatre chiens, Paix, Miséricorde, Justice et Vérité.

Le thème connaît de nombreuses illustrations  (à la cathédrale d' Erfurt dès 1420, au monastère de Dambeck en 1474) mais sa forme la plus remarquable se trouve à Colmar dans le retable des Dominicains peint par Schongauer vers 1480 (23 ans avant la verrière de Sens). La Vierge à la licorne est entourée d'une dizaine de références bibliques de sa virginité, comme le jardin clos, la verge d'Aaron, mais aussi  le Buisson Ardent de Moïse, Gédéon et sa toison, Ézéchiel et la Porte Close : trois références qui se retrouvent à Sens. 

Néanmoins, à Sens, nous n'avons pas affaire à une Chasse mystique à proprement parler : l'Annonciation répond aux formes habituelles, Gabriel n'est pas un chasseur sonnant de la trompe, la Vierge n'accueille pas la licorne, et cette scène est seulement mise en parallèle avec celle, au dessus, d'une licorne attirée par une jeune fille (non nimbée). La Chasse mystique est simplement évoquée par citation métonymiques de ces deux personnages, alors que le Procès en Paradis l'est, en périphérie, par toutes les citations parlant de la descente de Dieu sur Terre. Pour les chanoines de la cathédrale de Sens, parfaitement rompus à la pensée allégorique et aux textes mystiques, ces clins d'œil étaient suffisant.

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LES LANCETTES CENTRALES B ET C DE LA BAIE N° 116.

Rappel : les 4 lancettes sont désignées de gauche à droite par les lettres A à D.

Ces lancettes accueillent 18 personnages  (Jessé, 12 rois de Juda, Gabriel et la Vierge, la jeune vierge, la Vierge et son Fils, ...), un arbre,  et une licorne. L'arbre serpente alternativement à droite et à gauche du meneau central, et distribue ses branches aux larges  fleurs servant de siège ou de socle aux personnages répartis deux par deux jusqu'au sommet. 

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I. LES LANCETTES INFÉRIEURES B et C.

Ce sont celles où Jessé donne naissance à son arbre, sur les branches duquel s'installent la scène de l'Annonciation, celle de la Chasse à la licorne, puis deux rois de Juda. Elles s'organisent en quatre registres.

 

 

Lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

1. Partie inférieure des deux lancettes centrales. Jessé allongé.

Note : certaines photographies ont été prises le matin, au moment où une ombre en diagonale venait obscurcir la base du vitrail. 

Jessé est allongé sur sa couche, dans la posture la plus traditionnelle et qui indique qu'il n'est pas endormi, mais qu'il songe : ses épaules sont légèrement surélevées par un coussin pourpre à glands dorés, sa main gauche à l'index dressé soutient son front. Son visage barbu indique son âge vénérable. Son manteau bleu à revers or et ses bas rouges témoignent de sa richesse, car c'est un gros propriétaire de troupeaux à Bethléem. Le tronc de son Arbre (généalogique) naît de son bassin et il s'y appuie de la main droite comme s'il le bénissait.

En bas, l'inscription ARBOR VNA NOBILIS SILVA TALEM NVLLA PROFERT , "arbre unique, noble entre tous; nulle forêt n'en produit de tel par ses feuilles". (voir première partie de cet article).

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Jessé, partie basse des Lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Jessé, partie basse des Lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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Jessé, partie basse des Lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Jessé, partie basse des Lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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2. Annonciation.

Le tronc de Jessé va se diviser rapidement en diverses branches sinueuses, portant des fleurs en corolles servant de sièges aux membres de sa descendance. Mais sur  la première branche, c'est l'archange Gabriel  qui occupe la fleur aux pétales bleus. Il tient un bâton fleuri en signe du pouvoir divin dont il est investi, et il bénit la Vierge de la main droite. Son phylactère porte les paroles de l'Annonciation faite à Marie : Ave gratia plena dominus tecum, "Je te salue, pleine de grâces, le Seigneur est avec toi".

A droite, sur une fleur blanche, la Vierge surprise dans sa pieuse lecture  par l'arrivée de l'ange se détourne  et le regarde. Elle est vêtue d'un manteau bleu et d'une robe rouge.

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Annonciation, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Annonciation, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Gabriel, Annonciation, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Gabriel, Annonciation, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Marie, Annonciation, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Marie, Annonciation, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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3. La jeune fille à la licorne.

On ne peut imaginer une citation plus sobre du vaste sujet iconographique et scripturaire de la Chasse Mystique que cette jeune fille faisant face à la licorne. Cette sobriété est parfaitement adaptée à un vitrail placé à plus de 25 mètres du sol du transept sud, et destiné non aux chanoines (qui ne peuvent le voir des stalles du chœur) mais aux fidèles des premiers rangs de la nef. Pour un profane du XXIe siècle, rien ne permet de comprendre que cette jeune fille est l'alter ego de la Vierge, si ce n'est sa robe bleue (la couleur mariale), et ses cheveux longs dénoués (ceux d'une femme mariée sont attachés) semblables à ceux de Marie représentée en dessous. Pas de nimbe qui aiderait à en préciser la sainteté, pas d'accessoire, pas d'inscription. Ses gestes d'accueil (main droite) ou d'indication ou injonction (main gauche) s'adressent sans-doute à la licorne, son regard est dirigé vers elle, mais le meneau de séparation trouble cette compréhension. 

De même, la licorne (typique par sa couleur blanche,  son encolure et sa crinière de cheval et son museau à barbiche et ses sabots de chèvre) semble se dresser in abstracto, vignette découpée d'une enluminure, sans que sa posture ne soit tournée vers la jeune fille ni que sa corne ne soit dirigée vers son sein. 

Si on essaye un sens de lecture verticale, cela ne marche pas non plus, et l'animal mythique n'est pas plus relié à la Vierge qu'elle surmonte qu'au roi David placé au dessus. 

Il faut donc comme un pure allégorie suspendue telle une enseigne, et que seul le raisonnement, et surtout la familiarité avec la Chasse mystique, permettra de déchiffrer. 

Ces verrières du transept ont été commandés en 1500 aux verriers de Troyes, et le choix de leur sujet a donc été fait moins de 20 ans après que Martin Schongauer ait peint pour les Dominicains de Colmar les deux panneaux de l'Annonciation à la licorne. Ceux-ci sont donc bien utiles pour comprendre le vitrail de Sens, car tout y est, au contraire, explicite. Non seulement la licorne de Sens semble, à la direction de la corne près, la copie de celle de Schongauer et la jeune fille (la "pucelle") très proche également de sa Vierge par la robe, la chevelure, et la posture, mais on voit que , si on découpait la silhouette de la Vierge de Colmar, on retrouverait exactement les gestes des mains de la jeune fille, et on les comprend.

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Jeune fille à la licorne, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Jeune fille à la licorne, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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De plus, les objets et scènes qui entourent la Vierge à la licorne de Colmar sont ceux qui sont placés dans la moitié haute des lancettes latérales de Sens : la Toison de Gédéon , le Buisson ardent de Moïse et la Porte close d'Ézéchiel. A Colmar, la Verge d'Aaron n'est pas étrangère à l'autel de Melchisédech, car Aaron et Melchisédech préfigurent le Christ dans sa fonction sacerdotale.

 

 

Marie et la licorne, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Marie et la licorne, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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Dès lors, les quatre motifs de l'Arbre de Jessé de Sens (l'ange Gabriel, la Vierge, la pucelle, et la licorne) peuvent être considérés comme une forme éclatée et dédoublée de l' Annonciation à la licorne de Colmar, bien que l'ange messager ne soit nullement représenté ici comme un chasseur, et que ses quatre chiens Misericordia, Justicia, Pax et Veritas soient dès lors absents. 

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L'absence de ces chiens, dont on sait qu'ils témoignent de l'influence du débat des quatre Vertus lors du Procès en Paradis, ne signifie pas que cette pensée mystique soit absente de la verrière de Sens, puisque, dans les lancettes latérales, l'inscription tenue par Moïse Obsecro mitti quem misi renvoie dans la pensée typologique à l'idée de Dieu envoyant sur Terre un messager (et/ou un rédempteur), et de façon plus précise à une enluminure du Bréviaire de René de Lorraine, où ce verset de l'Exode 4:13 figure dans une illustration du Procès en Paradis.

L'ange Gabriel placé sous la jeune fille à la licorne de Sens doit donc être vu comme le Chasseur de la Chasse mystique, et la Licorne y est bien une figure du Christ : comme la licorne perd son invulnérabilité par l'attirance qu'exerce pour elle la virginité de la pucelle utilisée comme appât, le Christ est devenu vulnérable en endossant, pour sauver l'humanité du Péché, la nature humaine face à la Virginité et la Conception Immaculée de Marie, et qu'il est mort sur la croix (licorne succombant à ses blessures)  si je tente de mettre maladroitement en mot  une pensée mystique dont tout le charme, toute la puissance est d'être indicible.

Cette mystique est déjà d'une richesse inépuisable dans l'Annonciation à la licorne de Schongauer. On y trouve le thème de l'Amant chassant la "rose" de la virginité dans le Roman de la Rose ("moralisé" dans une lecture christique par Jean Molinet vers 1500), on y trouve toute la pensée typologique des Pères de l'Église, on y trouve toute la  mystique mariale de Bernard de Clairvaux, toute celle de la chasse (légende de saint Hubert et de saint Eustache où le Christ est un cerf blanc poursuivi par le chasseur), celle du Christ blessé (Serviteur Souffrant),  etc, etc... Mais à Sens, sous cette forme très concise, elle s'intègre à un autre fleuve théologique, celui de l'Arbre de Jessé. Les perspectives offertes par cette rencontre sont si considérables alors que je reste à leur seuil. 

L'essentiel est donné par la contemplation de la lumière traversant la verrière.

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Gabriel et la jeune vierge, Jeune fille à la licorne, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Gabriel et la jeune vierge, Jeune fille à la licorne, lancettes inférieures B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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4. Deux rois de Juda, David et Salomon.

On reconnait à droite grâce à sa harpe  David, fils de Jessé, roi de Juda, deuxième roi d'Israël après Saul, auquel on attribue la composition de la moitié des 150 chants du Livre des Psaumes. Il porte un turban bleu et une couronne, tient son sceptre, et est tourné, par sa posture et par le regard, vers la Vierge à l'Enfant qui "accomplit" l'Arbre. Il porte en sautoir au bijou en or, de forme carrée mais qui évoque l'étoile à six branches nommée étoile de David.

Son vis-à-vis est donc Salomon, 3eme roi d'Israël,   le  fils qu'il eut de ses amours  avec Bethsabée. Lui aussi se tourne vers le développement supérieur de l'Arbre, en une attitude presque prosternée. 

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Salomon et David, lancettes  B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Salomon et David, lancettes B et C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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Le roi David, lancettes  C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Le roi David, lancettes C, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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II. LES LANCETTES  B ET C, PARTIE SUPÉRIEURE.

L'Arbre de Jessé continue à s'y développer et à accueillir sur ses fleurs les rejetons de Jessé et du roi David, la dynastie davidique des rois de Juda: Roboam et Abia, Asa et Josaphat, Joram et Ozias, Joatham et Achaz, Ézéchias et Manassé, tels qu'ils sont énumérés dans la Généalogie de Jésus de l'incipit de l'Évangile de Matthieu. Néanmoins, ils ne sont pas dénommés sur le vitrail, l'artiste faisant se succéder des portraits tous différents mais stéréotypés du roi hébraïque tel qu'il est peint sur les Arbres de Jessé de la Renaissance, avec leur sceptre et leur turban, leur costume irréaliste et, surtout, leur gestuelle rendant hommage à leur divin successeur, le Christ "de la maison de David" . On notera que non seulement chaque tenue vestimentaire, chaque posture  et chaque visage est différent, mais aussi chaque fleuron, dans une palette associant deux valeurs de bleu, le pourpre et le lie-de-vin, le vert pâle, et le jaune.

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Lancettes  B et C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Lancettes B et C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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1. La lancette B.

Lancette  B, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Lancette B, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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La Vierge à l'Enfant.

Alors que les vitraux du XII et XIIIe siècle culminaient avec le Christ en gloire entourés des colombes des sept Dons de l'Esprit, au dessus de la Vierge et des Rois, ceux des XV et XVIe siècles placent au sommet la Vierge, couronnée. Paradoxalement par rapport à la Généalogie de Jésus de Mt 1:7-16 ou de Lc 3:23-31, qui mentionnent Joseph comme membre de la Maison de David, c'est Marie Reine des Cieux qui figure dans la filiation des fils de Jessé. C'est elle qui, ici, est couronnée. 

Ce changement de perspective des Arbres de Jessé est certes liè à la prédominance du culte marial mais surtout à l'importance donnée en théologie et dans la liturgie à la virginité de Marie et à l'Immaculée Conception.

Cette prévalence de l'intercession de  Marie comme Mère de Dieu, vierge et indemne du Péché Originel trouve , à Sens, une expression supplémentaire et exceptionnelle puisqu'elle figure trois fois dans l'Arbre de Jessé : directement comme Vierge de l'Annonciation et comme Mère de Jésus, et allègoriquement comme jeune fille à la licorne. La fusion des deux thèmes iconographiques de l'Arbre de Jessé et de la Chasse Mystique les renforcent mutuellement dans cette méditation sur l'importance de la virginité mariale dans le plan du Salut pour les chrétiens du XVI siècle. 

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Vierge à l'Enfant, Lancette B, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Vierge à l'Enfant, Lancette B, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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La lancette C.

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Lancette C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Lancette C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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Lancette C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Lancette C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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Lancette C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

Lancette C, partie supérieure, baie 116, Arbre de Jessé, cathédrale de Sens, photographie lavieb-aile.

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SOURCES ET LIENS.

BÉGULE (Lucien), 1929, La cathédrale de Sens: son architecture, son décor Société anonyme de l'imprimerie A. Rey, - 102 pages

— BROUSSE (Bernard), PERROT (Françoise), PERNUIT ( Claire),  Les vitraux de la cathédrale de Sens, Éditions À Propos, Garches, 2013 (ISBN 978-2-915398120) ;  223 pages

MÂLE (Émile), 1908,  L'art religieux de la fin du Moyen-Âge en France, Paris, Armand Colin, 540 p.

 

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Published by jean-yves cordier - dans Vitraux Arbre de Jessé.

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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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