Zoonymie des Odonates. Le nom de genre Lestes Leach, 1815.
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Voir sur la zoonymie (étude du nom) des Odonates (Libellules) :
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Zoonymie pré-linnéenne des Odonates : origine du nom de genre Libellula, Linnaeus, 1758.
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Zoonymie des odonates. Le nom de genre Aeshna Fabricius 1775.
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Zoonymie des Odonates. La période pré-linnéenne. Le nom "Demoiselle" (1682).
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Résumé.
Genre Lestes, Leach, 1815. Entomology, in Brewster's Edinb. Encycl. 9(1): 137. Le nom vient du grec λῃστής = "voleur, brigand, pirate". La seule espèce décrite en 1815 étant Agrion barbara de Fabricius, et celle-ci devant son nom à sa provenance du nord-ouest de l’Afrique, région géographique où vivaient les Berbères et dénommée alors Barbarie ou Etats barbaresques, on pouvait penser que Leach avait donné le nom de genre Lestes , "pirate" par référence aux pirates et corsaires barbaresques basés à Alger.
En juin 2023, Matti Hämäläinen et Heinrich Fliedner ont pu démontrer que Leach n'avait pas pu avoir accès au spécimen de Fabricius, ce qui invaliderait l'explication précédente.
Dans sa description originale, Leach décrit comme caractère distinctif, outre les ptérostigmas rectangulaires des ailes transparentes, les appendices anaux des mâles, en forme de forceps. M. Hämäläinen suggère que c'est la forme de ces appendices qu'il compare aux coutelas des pirates, qui a pu évoquer à Leach le choix de son nom. (Cf Addenda infra)
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I. LA PUBLICATION ORIGINALE. LEACH 1815.
En 1813, William Elford Leach (1791-1836), diplômé en médecine de l'université St-Andrews (Ecosse) après avoir étudié à Edimbourg, devint responsable des collections zoologiques du British Museum. En 1815, il rédigea la première bibliographie, extraordinairement détaillée, de l'entomologie, dans la partie historique d'un article "Entomologie" de l'Edinburgh Encyclopaedia de D. Brewster. Il publia entre 1814 et 1817 ses Zoological Miscellany, mais en 1822, atteint de dépression et de surmenage, il démissionna de son poste pour voyager.
— LEACH , W.E. (1815). "Entomology". In Brewster, David. Edinburgh Encyclopaedia. Vol. 9. Edinburgh: William Blackwood. pp. 57–172 [137] (in 1830 edition) – via Biodiversity Heritage Library.
FAMILY II. ÆSHNIDES.
482. Cordulegaster
483. Gomphus
484. Anax
FAMILY III. AGRIONIDA.
485. Agrion
486. Lestes
487. Calepteryx.
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486. GENUS CCCCLXXXVI. LESTES. Leach.
Wings membranaceous, with an oblong quadrate stigma. Abdomen of the male armed with a forceps-like appendage.
Obs. We have three indigenous species.
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Leach décrivait son genre Lestes ainsi : "ailes nervurées, avec des stigma longs et rectangulaires. L'abdomen des mâles est armé d'appendices en forme de forceps."
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II. ÉTUDE DU NOM.
Le nom du genre Lestes vient du grec λῃστής = "voleur, brigand, pirate". Pour D'Antonio et Vegliante, "Lestes - ληστησ , ον [sic= maraudeur . Fait allusion au comportement prédateur des espèces de ce genre". Pour H. Fliedner repris par Endersby, Il n'y a pas d'explication pour ce nom puisque tous les Odonates sont des prédateurs [prédateur = autre sens du mot grec] (Fliedner 2009, Endersby 2012).
Leach n'accompagne ce nom, après la description, que de la mention "Obs. We have three indigenous species".
Néanmoins, seule l'espèce que Fabricius avait décrit en 1798 est antérieure à 1815, et il l'avait nommé Agrion barbara. Elle provient, comme l'indique Fabricius dans son Supplementum Entomologiae Systematicae (Agrion barbara ...Habitat in Barbaria Dom. Rehbinder [et, pour d'autres spécimens "Habitat in Algier", etc]) de la collection du baron Johann von Rehbinder (1751-1825), qui avait été consul du Danemark à Alger et avait écrit ses Notices et remarques sur Alger, Altona 1798 Nachricten und Bemerkungen ûber den Algierischen Staat (von J.-Ad.-Frhn. von Rehbinder). Altona, Hammerich, 1798-1800 , 3 vol. Il est donc possible de valider l'affirmation de l'Association Poitou-Charentes Nature : "Lestes (gr) = brigand, pirate ; barbarus (gr/lat) = barbare. Cette espèce a été décrite du nord-ouest de l’Afrique, région géographique où vivaient les Berbères et dénommée Barbarie ou Etats barbaresques jusqu’au début du XIXe siècle." Le nom de genre Lestes , "pirate" lui est donné par son espèce, Lestes barbarus, par référence aux pirates et corsaires barbaresques basés à Alger (cf la captivité de Cervantes).
J'ai un moment envisagé l'hypothèse séduisante que ce nom trouve son explication dans les "forceps-like appendage", les cerques des mâles recourbés en pinces ou en forceps, par assimilation du crochetage des femelles avec la technique d'abordage des pirates. Mais, outre le coté un peu farfelu de cette solution, on peut lui opposer le fait que ces tenailles ne soient pas caractéristiques du genre, puisqu'on les retrouve dans la description des "Calepteryx" de l'auteur.
En 1958, Paul-André Robert, auteur qui est à l'origine d'une majeure partie de nos noms vernaculaires publiés dans Les Libellules (Odonates), interprète mal la signification du genre Lestes en écrivant page 75 :
" Lestes = "leste" (d'après les anciens auteurs français). Synonyme Anapetes (Charpentier, 1825), "s'envoler rapidement".
"Ces deux noms s'appliquent très bien à ces insectes, qui se posent légèrement sur des objets bien dégagés, avec les pattes tendues, le corps obliques, les ailes à demi-ouvertes, semblant toujours prêts à s'envoler. Lorsqu'ils le font, la rapidité de leurs mouvements, leurs ailes transparentes et leur corps fin les font bien vite disparaître aux regards."
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— Réception du genre : voir
http://addo.adu.org.za/pdf/Pinhey_1980_African_Lestidae.pdf
ou plutôt :
https://books.google.fr/books?id=JMR-HkoVtvAC&pg=PA109&lpg=PA109&dq=lestes+type-species+lestes+sponsa%22&source=bl&ots=RgdDtgMcMv&sig=qzRJhD3rzgQ9-BU_4Y0d_oU8g8c&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwj3v6GYpMjYAhUGJ1AKHW-SBW8Q6AEIZzAM#v=onepage&q=lestes%20type-species%20lestes%20sponsa%22&f=false
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ADDENDA L'article de Matti Hämäläinen et Heinrich Fliedner en juin 2023.
Ces deux auteurs sont bien connus pour leurs travaux en zoonymie. Ils ont publiés en juin 2023 l'article suivant :
"Why did William Elford Leach call a small damselfly a ‘pirate’? – Revisiting the etymology of the genus Lestes (Odonata: Lestidae)," Notulae odonatologicae 10(1), 8-16, (1 June 2023). https://doi.org/10.5281/nodo.v10i1.a2
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Le résumé est le suivant :
"We present evidence supporting the widely accepted interpretation that the genus name Lestes Leach, 1815, is based on the Greek masculine word λῃστής [lēstēs] meaning ‘robber or pirate’. Comparison of Leach’s brief definition of Lestes with that of the genus Agrion Fabricius, 1775, from which the new genus was split, suggests that W.E. Leach selected the piratical name because the males of species in this genus are armed with pincer-shaped appendages; hence the name is an allusion to the edged weapons carried by pirates. The common view that the name was suggested by the voracious predatory behaviour of lestids, as well as the interpretation that the genus name is based on the French word leste [= nimble] are both rejected."
Dans celui-ci, ils citent mon article et en examinent l'hypothèse zoonymique (ils n'emploient pas ce terme bien-sûr), qu'ils qualifient de tirée par les cheveux (rather fat-fetched), et qu'ils rejètent comme invalides pour "plusieurs" raisons.
La première est que dans les années 1810, il n'y avait pas de spécimens de Lestes barbarus disponibles à Leach dans les collections en Angleterre.
In the early 1810s there were no specimens of Lestes barbarus available for Leach in the collections in England. Selys (1846: 225) wrote of this species: "Not described by English authors". Even in the unlikely case that Leach recognized from Fabricius’ description (of the colour pattern) that Agrion barbara resembles a Lestes species, he could not have known the shape of its male appendages, since the description does not include any information on the appendages of the type specimen. It is not even possible to identify the sex from Fabricius’ brief description."
La description de Leach repose sur trois "espèces indigènes" et donc britanniques reconnues actuellement comme trois spécimens de Lestes sponsa. Et, les auteurs soulignent que chez cette espèce, les appendices supérieurs du mâle portent des épines intérieures acérées, donnant l'impression que les appendices en forme de pince sont "semblables à une arme". Mais Leach écrit , tant pour son genre Agrion que pour celui de Lestes , que les collections du British Museum possèdent plusieurs spécimens de ces genres "We have of this genus several indigenous species" ,"We have three indigenous species", ce qui ne veut nullement dire qu'il ne connait pas les spécimens des autres collections.
Les auteurs écartent ensuite l'hypothèse des nombreux auteurs anglosaxons qui voient dans le nom Lestes (voleur, pirate) une description des mœurs voraces de ce genre, car il est pour eux "peu probable" que Leach, bien qu'il ait été très tôt un collectionneur d'insectes, et notamment de libellules en Ecosse, ait pu avoir une appréciation du comportement des Lestes suffisante pour la qualifier par ce nom de genre.
Ils ajoutent que la comparaison des appendices des mâles Lestes avec des armes a été plus tard remarquée par deux auteurs, Hansemann et Charpentier :
"Our ‘pirate armed with forceps-like appendages’ hypothesis as the base of the name Lestes may be supported by the fact that two other early 19th century authors also considered male appendages as ‘weapons’ of some kind. In the original description of Agrion [= Lestes] sponsa, Hansemann (1823: 159-160) wrote (translated from German) as follows: »If this species wanted to mix [= copulate] with the above [= females of various species of Coenagrionidae], which never occurs, the sharp pincers on the male abdomen would prevent it.« Charpentier (1840: 164) gave the species epithet armatum [= armed] for his new species Agrion [= Coenagrion] armatum from Lüneburg (Germany), as reference to the exceptionally long inferior appendages of the male: »appendicibus caudalibus inferioribus magnis, compressis, latis [with large, flat, broad inferior appendages]"
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Discussion.
L'hypothèse envisagée par Matti Hämäläinen et Heinrich Fliedner reprend celle que j'avais évoquée en 2018 en la qualifiant de séduisante (cf supra) :"J'ai un moment envisagé l'hypothèse séduisante que ce nom trouve son explication dans les "forceps-like appendage", les cerques des mâles recourbés en pinces ou en forceps, par assimilation du crochetage des femelles avec la technique d'abordage des pirates. "
Mais dans leur texte, ils ne comparent par les appendices à des crochets ou grappins d'abordage, mais à des armes, qualifiés de "coutelas"
"Since in former times pirates were usually armed with edged weapons, such as cutlasses [short, slightly curved swords], we believe that Lestes males being ‘armed’ with forceps-like superior appendages (Fig. 2) inspired Leach to give them an epithet referring to pirates or armed robbers."
Cela rend la démonstration moins convaincante, car aucun coutelas, fut-ce de pirate, n'a une forme de "forceps" (pour reprendre le terme de la description originale de Leach). Cet accessoire d'obstetrique se compose de deux cuillères articulées en pince. La comparaison de Leach avec les cerques des Lestes est tout à fait convaincante, mais celle de Hämäläinen et Fliedner avec une arme de pirate ne l'est pas.
Le Gomphe à forceps avait déjà inciter Linné à utiliser cette image dans sa dénomination de 1758.
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Au total, s'il pouvait être démontré que Leach n'a pas parcouru les collections européennes et n'a pu examiner les spécimens de la collection de Fabricius, et qu'il ignorait les caractères de l'Agrion barbara de Fabricius 1798 qui le classent désormais comme un Lestes (ses ailes transparentes, ses longs ptérostigmas rectangulaires et ses appendices anaux en pinces), cela affaiblirait l'explication que j'ai suggéré.
En tout cas, il est établi que l'action de William Elford Leach au British Museum a été de diffuser Outre-Manche les idées nouvelles de classification des naturalistes français ou continentaux, avec lesquels il échangea une riche correspondance. Or, à partir de 1790, Fabricius séjourne tous les étés à Paris et devient ainsi l'ami de Pierre André Latreille (1762-1833). Son intérêt pour Paris est en partie dû aux portes que lui ouvrent des savants français, et aux collections qu'ils lui font voir.
N.B Une collection nommée "Fabricius 1793" est conservée au Musée-aquarium de Nancy, inv. 8357, avec un spécimen de L. sponsa étiqueté postérieurement.
Néanmoins, cela ne justifierait pas la thèse qui explique le nom Lestes comme étant inspiré à Leach par la forme des appendices en forme de forceps, car les pirates n'utilisent pas d'armes en forme de cuillère articulé en pinces. En outre, le choix d'un nom de genre met l'accent sur un caractère distinctif de ce genre, or Leach signale que les mâles de son genre Calepteryx possède également a forceps-like appendage. Le fait qu'il écrive "armed with a forceps-like appendage" pour les Lestes et " furnished with a forceps-like appendage" pour les Calepteryx ne peut valoir comme argument distinctif.
En réalité, si on considère la classification de la famille Agrionida de Leach, nous constatons qu'il distingue ses trois genres par les caractères des ailes, et non par leurs appendices : d'abord par la transparence (Agrion et Lestes) ou au contraire la couleur fauve —coriaceo— des ailes, puis la forme des ptérostigmas, rhomboïdale pour les Agrions, rectangulaire pour les Lestes, remplacés par une tache opaque irrégulière pour Calepteryx. La présence des appendices en forceps oppose les deux derniers genres au premier. Par conséquent, si Leach avait choisi ses deux noms de genre (Agrion existant déjà depuis Latreille) en fonction d'un caractère morphologique propre, il n'aurait surement pas choisi le seul caractère qu'ils ont en commun.
Je considère donc que la proposition zoonymique de Hämäläinen et Fliedner n'est pas entièrement convaincante.
On sait que la nomenclature de Leach était souvent personnelle - il nomma dix-neuf espèces et un genre d' après son employé et ami John Cranch , décédé lors de la collecte des espèces en Afrique lors de l'expédition du HMS Congo . Il a nommé neuf genres d'après une femme inconnue appelée Caroline, en utilisant des anagrammes de ce nom et la forme latinisée Carolina, par exemple : Cirolana , Conilera et Rocinela . Ceux-ci incluent le crustacé isopode marin Cirolana cranchi qu'il a nommé en 1818 d'après Caroline et Cranch. Le nom de genre Lestes peut-il être entièrement élucidé, ou bien nos travaux de zoonymies doivent-ils continuer à louvoyer par essais et erreurs autour de la vérité ?
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LA RÉPONSE DE MATTI HÄMÄLÄINEN.
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COURRIEL du 16 juin
Dear Mr Cordier,
From the immediate additions to your blog at
https://www.lavieb-aile.com/2018/01/zoonymie-des-odonates.le-nom-de-genre-lestes-leach-1815.html
I see that you were unconvinced by our paper on the etymology of the name Lestes. Firstly, I must emphasize that for the text which refers to your ‘Algerian Barbary pirates’ theory (which we dared to call ‘invalid’), you can blame me, and not Heinrich Fliedner.
In the ‘ATTENDA’ you write: > Au total, s'il pouvait être démontré que Leach n'a pas parcouru les collections européennes et n'a pu examiner les spécimens de la collection de Fabricius, et qu'il ignorait les caractères de l'Agrion barbarade Fabricius 1798 qui le classent désormais comme un Lestes (ses ailes transparentes, ses longs ptérostigmas rectangulaires et ses appendices anaux en pinces), cela affaiblirait l'explication que j'ai suggéré. < Here is some information which, in my opinion, greatly ‘weakens’ your theory.
According to the voluminous publication on the type material of Fabricius by Ella Zimsen (1964, p. 623)
https://archive.org/details/typematerialofic0000zims
there is only one type specimen of Agrion barbara, and it is preserved in the Zoological Museum in Kiel. Zimsen did not specify whether the holotype is a male or female. Neither can this be concluded from the original description (see attached, the Latin text was translated by Heinrich Fliedner). Later, all Fabrician odonate types have been transferred from Kiel to Copenhagen. The local museum curator informed me that the single type specimen (holotype) is a male with abdomen tip (including appendages) missing.
The detailed book on Leach’s life and scientific legacy by Harrison & Smith (2008) does not provide any information suggesting that Leach ever visited Kiel or Copenhagen. The information on his travels is quite extensive and nowhere is it suggested he ever visited Germany, although he was in contact with several scientists and a member of several German societies.
According to this source:
https://books.google.fi/books?id=TgUNAAAAIAAJ&pg=PA147&redir_esc=y#v=onepage&q&f=false
Leach’s first visit to France took place in 1815, followed by new visits in 1817 and 1818 . An earlier visit there was not possible due to the Napoleonic wars. There is no information in this source, or in Harrison & Smith, that he had visited any other foreign country before 1815.
In summary, it can be concluded that Leach never saw the holotype of Agrion barbara in Kiel.
- Since Leach did not visit any foreign museums while he was working on the manuscript defining the new odonate genera (or before that), he did not have an opportunity to study any other ‘Agrion barbara’ specimens. As stated by de Selys Longchamps (1846), no specimens of this species were in the collections in Britain. Actually, during Leach’s life-time, besides the holotype, there were no other lestid specimens identified as ‘barbara’ in any museums in the world. The few Lestes barbarus specimens (as known at present), collected in Europe in 1820s (or before), had been described or identified with different species names in the genus Agrion.
- When Leach introduced the name Lestes, he could not know (from Fabricius’ original description), how the male anal appendages of ‘Agrion barbara’ looked. [I admit that, in theory, if Leach had seen a male specimen of Lestes barbarus in some collection, he might have been able to recognize it as the same species as Fabricius’ barbara, because the colour pattern and the bicolorous pterostigma matches the original description. However, this did not happen.]
Even if Leach had known that there exists a Lestes species called barbara, collected in Algeria, I find it most unlikely that he would have named his new genus based on the reason that there were Barbary pirates in the same area. Since, all other Leach’s new genus names for odonates refer to morphological characters, why would this name be an exception? If it was, then one would expect that, instead of merely writing “There are three indigenous [= British] species”, Leach would have added some words on the existence of the species Lestes barbarus known from ‘Barbaria’.
In your critique you wrote:
> Mais dans leur texte, ils ne comparent par les appendices à des crochets ou grappins d'abordage, mais à des armes, qualifiés de "coutelas" < > "Since in former times pirates were usually armed with edged weapons, such as cutlasses [short, slightly curved swords], we believe that Lestes males being 'armed' with forceps-like superior appendages (Fig. 2) inspired Leach to give them an epithet referring to pirates or armed robbers." Cela rend la démonstration moins convaincante, car aucun coutelas, fut-ce de pirate,
n'a une forme de "forceps" (pour reprendre le terme de la description originale de Leach).
Cet accessoire d'obstetrique se compose de deux cuillères articulées en pince. La comparaison de Leach avec les cerques des Lestes est tout à fait convaincante,
mais celle de Hämäläinen et Fliedner avec une arme de pirate ne l'est pas. <>
Je considère donc que la proposition zoonymique de Hämäläinen et Fliedner n'est pas valide.<
Obviously, we could have written somewhat differently and with more details. While comparing the superior appendages with a cutlass, we referred to the general shape and structure of an individual (left or right) superior appendage of Lestes sponsa, not to the whole pincer-like ‘set’ at the abdomen tip. As seen from the attached image, (which we perhaps should have included, together with illustrations of a few different types of cutlasses), the curved shape of the superior appendage with sharp edges, gives (only with some imagination, of course) an impression of a sharp weapon resembling a curved cutlass (the shape and structure of which was rather variable) or an executioner’s axe. Of course, we did not mean to suggest that the shape of the appendage was exactly identical with pirate’s armature. Anyway, since the editor and three reviewers (all odonatologists) had no problems to understand our meaning, I presume, and sincerely hope, that other readers will do likewise.
Anyway, let the other odonatologists decide which one of these two ‘pirate’ theories they will keep more likely,
or whether they prefer to stick to the old ‘voracious behaviour’ theory.
Yours sincerely,
Matti Hämäläinen
Cher Monsieur Cordier,
Des ajouts immédiats à votre blog à
https://www.lavieb-aile.com/2018/01/zoonymie-des-odonates.le-nom-de-genre-lestes-leach-1815.html
Je vois que vous n'étiez pas convaincu par notre article sur l'étymologie du nom Lestes. Premièrement, je dois souligner que pour le texte qui fait référence à votre théorie des "pirates barbaresques algériens" (que nous avons osé appeler "invalide"), vous pouvez m'en vouloir, et non Heinrich Fliedner.
Dans l''ADDENDA' vous écrivez:
> Au total, s'il pouvait être démontré que Leach n'a pas parcouru les collections européennes et n'a pu examiner les spécimens de la collection de Fabricius, et qu'il ignorait les caractères de l'Agrion barbarade Fabricius 1798 qui le classer désormais comme un Lestes (ses ailes transparentes, ses longs ptérostigmas rectangulaires et ses appendices anaux en pinces), cela affaiblirait l'explication que j'ai suggéré. <
Voici quelques informations qui, à mon sens, « affaiblissent » grandement votre théorie.
Selon la volumineuse publication sur le matériel type de Fabricius par Ella Zimsen (1964, p. 623)
https://archive.org/details/typematerialofic0000zims
il n'y a qu'un seul spécimen type d'Agrion barbara, et il est conservé au Musée zoologique de Kiel. Zimsen n'a pas précisé si l'holotype est un mâle ou une femelle. Cela ne peut pas non plus être conclu à partir de la description originale (voir ci-joint, le texte latin a été traduit par Heinrich Fliedner). Plus tard, tous les types d'odonates de Fabricius ont été transférés de Kiel à Copenhague. Le conservateur du musée local m'a informé que le spécimen type unique (holotype) est un mâle avec la pointe de l'abdomen (y compris les appendices) manquante.
Le livre détaillé sur la vie et l'héritage scientifique de Leach par Harrison & Smith (2008) ne fournit aucune information suggérant que Leach ait jamais visité Kiel ou Copenhague. Les informations sur ses voyages sont assez détaillées et nulle part il n'est suggéré qu'il ait jamais visité l'Allemagne, bien qu'il ait été en contact avec plusieurs scientifiques et membre de plusieurs sociétés allemandes.
Selon cette source :
https://books.google.fi/books?id=TgUNAAAAIAAJ&pg=PA147&redir_esc=y#v=onepage&q&f=false
La première visite de Leach en France eut lieu en 1815, suivie de nouvelles visites en 1817 et 1818. Une visite antérieure n'était pas possible en raison des guerres napoléoniennes. Il n'y a aucune information dans cette source, ou dans Harrison & Smith, qu'il ait visité un autre pays étranger avant 1815.
En résumé, on peut conclure que
- Leach n'a jamais vu l'holotype d'Agrion barbara à Kiel.
- Comme Leach n'a visité aucun musée étranger pendant qu'il travaillait sur le manuscrit définissant les nouveaux genres d'odonates (ou avant), il n'a pas eu l'occasion d'étudier d'autres spécimens d''Agrion barbara'. Comme l'a déclaré de Selys Longchamps (1846), aucun spécimen de cette espèce ne figurait dans les collections en Grande-Bretagne. En fait, du vivant de Leach, à part l'holotype, il n'y avait aucun autre spécimen lestide identifié comme "barbara" dans aucun musée du monde. Les quelques spécimens de Lestes barbarus (tels que connus à l'heure actuelle), collectés en Europe dans les années 1820 (ou avant), avaient été décrits ou identifiés avec différents noms d'espèces dans le genre Agrion.
- Lorsque Leach a introduit le nom de Lestes, il ne pouvait pas savoir (d'après la description originale de Fabricius), à quoi ressemblaient les appendices anaux mâles de 'Agrion barbara'. [J'admets qu'en théorie, si Leach avait vu un spécimen mâle de Lestes barbarus dans une collection, il aurait pu le reconnaître comme la même espèce que la barbara de Fabricius, car le motif de couleur et le ptérostigma bicolore correspondent à l'original description. Cependant, cela ne s'est pas produit.]
Même si Leach avait su qu'il existe une espèce Lestes appelée barbara, collectée en Algérie, je trouve très peu probable qu'il aurait nommé son nouveau genre en se basant sur la raison qu'il y avait des pirates barbaresques dans la même zone. Puisque tous les autres nouveaux noms de genre de Leach pour les odonates font référence à des caractères morphologiques, pourquoi ce nom serait-il une exception ? Si c'était le cas, alors on s'attendrait à ce qu'au lieu d'écrire simplement "Il y a trois espèces indigènes [= britanniques]", Leach aurait ajouté quelques mots sur l'existence de l'espèce Lestes barbarus connue de "Barbaria".
Dans votre critique, vous avez écrit : > Mais dans leur texte, ils ne se comparent pas par les annexes à des crochets ou grappins d'abordage, mais à des armes, qualifiés de "coutelas" <
> "Puisque autrefois les pirates étaient généralement armés d'armes blanches, comme des coutelas
[épées courtes et légèrement incurvées], nous pensons que les mâles Lestes étant « armés » de forceps appendices supérieurs (Fig. 2) ont inspiré Leach à leur donner une épithète faisant référence aux pirates ou voleurs à main armée." Cela rend la démonstration la moins convaincante, car aucun coutelas,
fut-ce de pirate, n'a une forme de "forceps" (pour reprendre le terme de la description originale
de Leach). Cet accessoire d'obstétrique se compose de deux cuillères articulées en pince.
La comparaison de Leach avec les cerques des Lestes est tout à fait convai
Dans votre critique, vous avez écrit :
> Mais dans leur texte, ils ne se comparent pas par les annexes à des crochets ou grappins d'abordage, mais à des armes, qualifiés de "coutelas" <
> "Puisque autrefois les pirates étaient généralement armés d'armes blanches, comme des coutelas
[épées courtes et légèrement incurvées], nous pensons que les mâles Lestes étant « armés » de forceps appendices supérieurs (Fig. 2) ont inspiré Leach à leur donner une épithète faisant référence aux pirates ou voleurs à main armée." Cela rend la démonstration la moins convaincante, car aucun coutelas, fut-ce de pirate, n'a une forme de "forceps" (pour reprendre le terme de la description originale de Leach). Cet accessoire d'obstétrique se compose de deux cuillères articulées en pince.
La comparaison de Leach avec les cerques des Lestes est tout à fait avérée, mais celle-là
de Hämäläinen et Fliedner avec une arme de pirate ne l'est pas. <
> Je considère donc que la proposition zoonymique de Hämäläinen et Fliedner n'est pas valide.<
Évidemment, nous aurions pu écrire un peu différemment et avec plus de détails. En comparant les appendices supérieurs avec un coutelas, nous nous sommes référés à la forme générale et à la structure d'un appendice supérieur individuel (gauche ou droit) de Lestes sponsa, et non à l'ensemble en forme de pince à l'extrémité de l'abdomen. Comme on le voit sur l'image ci-jointe (que nous aurions peut-être dû inclure, ainsi que des illustrations de quelques types différents de coutelas), la forme incurvée de l'appendice supérieur avec des arêtes vives, donne (seulement avec un peu d'imagination, bien sûr) une impression d'une arme tranchante ressemblant à un coutelas courbe (dont la forme et la structure étaient assez variables) ou à une hache de bourreau. Bien sûr, nous ne voulions pas suggérer que la forme de l'appendice était exactement identique à celle de l'armature du pirate. Quoi qu'il en soit, puisque l'éditeur et les trois relecteurs (tous odonatologues) n'ont eu aucun problème à comprendre notre sens, je présume, et j'espère sincèrement, que d'autres lecteurs feront de même.
Quoi qu'il en soit, laissons les autres odonatologues décider laquelle de ces deux théories "pirates" ils vont garder plus probable, ou s'ils préfèrent s'en tenir à la vieille théorie du « comportement vorace ».
Cordialement,
Matti Hämäläinen
Ma réponse le 16 juin
Bonjour Monsieur,
j'apprécie beaucoup la qualité de votre réponse, qui engage, pour la première fois, un vrai débat sur le fond. Les arguments que vous fournissez sur la localisation du spécimen type de L. barbarus et sur les déplacements de Leach en Europe sont tout à fait convaincants et sont ceux qui me manquaient. Je reconnais la force de votre critique de mon hypothèse, sans abandonner totalement celle-ci.
Je reste sceptique néanmoins sur votre propre proposition 1°) parce que si Leach veut caractériser son genre en le nommant, il devrait éviter de choisir un qualificatif renvoyant aux appendices propres aux Lestes mais aussi aux Calepteryx, 2°) parce que malgré vos nouveaux et nécessaires arguments, ces appendices ne ressemblent nullement à des armes de pirates, ni à mes yeux, ni à ceux de Leach qui les comparent à des forceps.
Ce qui est certain pour moi, c'est que dans une discipline aussi peu développée que la zoonymie, nous devrions accueillir les propositions des auteurs et prendre contact avec eux avant de les critiquer par des formules définitives, — ou de pointer leurs fautes d'orthographe— et que c'est en échangeant respectueusement nos arguments que nous enrichirons les connaissances. C'est précisément le cas avec votre courtoise réponse et je vous en remercie. J'espère au moins que nous aurons contribué ensemble à remettre en cause the old "voracious behaviour" theory encore bien présente.
M'autorisez-vous à la reproduire dans mon article ?
Je dois dire aussi que je n'imaginais pas que la seule réaction des entomologistes à l'ensemble de mes travaux sur l'histoire des noms des Lépidoptères et des Odonates depuis plus de 10 ans soit une critique.
https://www.lavieb-aile.com/2015/11/zoonymie-origine-du-nom-des-papillons-diurnes-de-bretagne.html
En toute sympathie,
Jean-Yves Cordier
La reponse de M. HÄMÄLÄINEN le même jour :
Dear Mr Cordier,
Thank you for your kind response. Please, feel free to refer to the contents of my email, if you modify your blog article.
>parce que si Leach veut caractériser son genre en le nommant, il devrait éviter de choisir un qualificatif renvoyant aux appendices propres aux Lestes mais aussi aux Calepteryx<
Yes, both Lestes sponsa and Calopteryx virgo/splendens have forceps-like appendages, but only in L. sponsa are the superiors furnished with sharp extensions, which make them look more 'weapon-like'.
One more detail concerning Leach's travels. According to Harrison & Smith, his first visit to France took place in October 1815.
With kind regards,
Matti Hämäläinen
Traduction : Merci pour votre aimable réponse. S'il vous plaît, n'hésitez pas à vous référer au contenu de mon e-mail, si vous modifiez votre article de blog.
>parce que si Leach veut caractérisé son genre en le nommant, il devrait éviter de choisir un qualificatif renvoyant aux annexes propres aux Lestes mais aussi aux Calepteryx<
Oui, Lestes sponsa et Calopteryx virgo/splendens ont tous deux des appendices en forme de forceps, mais ce n'est que chez L. sponsa que les supérieurs sont munis d'extensions pointues, ce qui les fait ressembler davantage à des «armes».
Un détail de plus concernant les voyages de Leach. Selon Harrison & Smith, sa première visite en France eut lieu en octobre 1815.
Cordialement,
Matti Hämäläinen
Traduction : Merci pour votre aimable réponse. S'il vous plaît, n'hésitez pas à vous référer au contenu de mon e-mail, si vous modifiez votre article de blog.
>parce que si Leach veut caractérisé son genre en le nommant, il devrait éviter de choisir un qualificatif renvoyant aux annexes propres aux Lestes mais aussi aux Calepteryx<
Oui, Lestes sponsa et Calopteryx virgo/splendens ont tous deux des appendices en forme de forceps, mais ce n'est que chez L. sponsa que les supérieurs sont munis d'extensions pointues, ce qui les fait ressembler davantage à des «armes».
Un détail de plus concernant les voyages de Leach. Selon Harrison & Smith, sa première visite en France eut lieu en octobre 1815.
Cordialement,
Matti Hämäläinen
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Au total, j'admets que mon hypothèse est affaiblie au regard de cette brillante et solide argumentation par M. Hämämäilen du fait que Leach ne connaissait pas l'espèce A. barbarus de Fabricius. Je le félicite et le remercie des précisions apportées, et je suis convaincu qu'en matière de zoonymie, une collaboration entre auteurs ne peut être que très fructueuse. Je modifie mon "résumé".
— GRAND (Daniel), BOUDOT (Jean-Pierre), 2006 Les Libellules de France, Belgique et Luxembourg. Collection Parthénope, Biotope 479 pages
https://books.google.fr/books?id=cYwSCwAAQBAJ&dq=inauthor:%22Daniel+Grand%22&hl=fr&source=gbs_navlinks_s
— LEACH , W.E. (1815). "Entomology". In Brewster, David. Edinburgh Encyclopaedia. Vol. 9. Edinburgh: William Blackwood. pp. 57–172 [137] (in 1830 edition) –
https://www.biodiversitylibrary.org/page/17493627#page/145/mode/1up
— PRÉCIGOUT (Laurent), PRUD'HOMME (Eric), 2009, Libellules de Poitou-Charentes, Ed. Poitou-Charentes Nature, 255 pages,
— NATIONAL HISTORY MUSEUM
http://www.nhm.ac.uk/our-science/data/uk-species/species/calopteryx_splendens.html
— SELYS-LONGCHAMPS ( Michel Edmond, Baron de) 1840, Monographie des libellulidées d'Europe, Roret, 220 pages.
https://books.google.fr/books?id=8aBIt4TdIM0C&dq=AEschna&hl=fr&source=gbs_navlinks_s
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OUTILS ZOONYMIE.
— LSJ Site de traduction grec/anglais Liddell Scott Jones
https://lsj.translatum.gr/wiki/Main_Page
https://lsj.translatum.gr/wiki/LSJ:GreekEnglishLexicon
— ANTONIO (Costantino D’), VEGLIANTE (Francesca ) "Derivatio nominis libellularum europæarum"(PDF) (en Italien) Étymologie de 197 noms de Libellules européennes.
https://www.researchgate.net/publication/316791278_Derivatio_nominis_libellularum_europaearum
— ENDERSBY (IAN D. ), 2012, : Watson and Theischinger: the etymology of the dragonfly (Insecta: Odonata) names which they published Journal and Proceedings of the Royal Society of New South Wales, vol. 145, nos. 443 & 444, pp. 34-53. ISSN 0035-9173/12/010034-20 34
https://royalsoc.org.au/images/pdf/journal/145_Endersby.pdf
— ENDERSBY (IAN D., FRS ), 2012, Etymology of the Dragonflies (Insecta: Odonata) named by R.J. Tillyard, F.R.S. Proceedings of the Linnean Society of New South Wales 134, 1-16.
https://openjournals.library.sydney.edu.au/index.php/LIN/article/viewFile/5941/6519
— ENDERSBY (IAN D., FRS ), 2012, The Naming of Victoria’s Dragonflies (Insecta: Odonata, Proceedings of the Royal Society of Victoria 123(3): 155-178.
https://www.academia.edu/28354624/The_Naming_of_Victoria_s_Dragonflies_Insecta_Odonata_
— ENDERSBY (IAN D. ), 2015, The naming's of Australia's dragonflies.
https://www.researchgate.net/publication/283318421_The_Naming_of_Australia%27s_Dragonflies
http://dominique.mouchene.free.fr/libs/docs/GENE_origine_noms_odonates_Australie_Endersby_2015.pdf
— FLIEDNER (Heinrich), 2009, Die wissenschaftlichen Namen der Libellen in Burmeisters ‘Handbuch der Entomologie’ Virgo 9[5-23]
http://www.entomologie-mv.de/download/virgo-9/Virgo%200902%20Die%20wissenschaftlichen%20Namen%20der%20Libellen%20in%20Burmeisters.pdf
— FLIEDNER (Heinrich), MARTENS (Andreas ), 2008, The meaning of the scientific names of Seychelles dragonflies (Odonata) , Phelsuma 16 (2008); 49-57
https://www.researchgate.net/publication/228819379_The_meaning_of_the_scientific_names_of_Seychelles_dragonflies_Odonata [accessed Jan 04 2018].
— POITOU-CHARENTE NATURE (Association)
http://www.poitou-charentes-nature.asso.fr/cordulie-bronzee/
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