Zoonymie des Odonates : les noms de Boyeria irene Fonscolombe 1838, l'Aeschne paisible, le Spectre paisible.
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Zoonymie ? L'étude des noms des animaux (zoo). Comme dans Toponymie, Oronymie, Hydronymie, ou Anthroponymie, mais pour les bêtes.
Voir aussi :
GÉNÉRALITÉS
Zoonymie des Odonates : l'épopée de Atra-Hasis (XVIIIe siècle av. J.C).
Zoonymie des Odonates. La période pré-linnéenne. Le nom "Demoiselle" (1682).
ANISOPTÈRES
Zoonymie pré-linnéenne des Odonates : origine du nom de genre Libellula, Linnaeus, 1758.
Zoonymie des Odonates : le nom Libellula fulva Müller, 1764.
Zoonymie des odonates. Le nom de genre Aeshna Fabricius 1775.
Zoonymie des Odonates. Le nom d'Aeshna cyanea Müller, 1764, l'Æschne bleue.
Zoonymie des Odonates : le nom Anax ephippiger Burmeister, 1839, l'Anax porte-selle.
Zoonymie des Odonates : le nom Anax parthenope, Selys, 1839, l'Anax napolitain.
Zoonymie des Odonates. Le nom de genre Brachytron Evans, 1845.
Zoonymie des Odonates : le nom de Brachytron pratense Müller, 1764.
Zoonymie des Odonates: le nom de genre Cordulia, Leach, 1815.
Zoonymie des Odonates : le nom Cordulia aenea Linnaeus, 1758.
Zoonymie des Odonates : le nom de genre Cordulegaster Leach 1815.
Zoonymie des Odonates. Le nom de genre Orthetrum, Newman 1833.
Zoonymie des Odonates : le nom du genre Oxygastra Sélys-Longchamps, 1870.
Zoonymie des Odonates. Le nom du genre Somatochlora, Sélys-Longchamps 1871.
Zoonymie des Odonates. Le nom de genre Sympetrum, Newman, 1833.
Zoonymie des Odonates. Le nom de genre Crocothemis Brauer, 1868.
Zoonymie des Odonates : le nom de genre Leucorrhinia Brittinger, 1850.
ZYGOPTÈRES
Zoonymie des Odonates. Le nom de genre Calopteryx, Leach, 1815.
Zoonymie des Odonates : le nom Calopteryx virgo Linnaeus, 1758.
Zoonymie des Odonates: Le nom Calopteryx splendens, Harris, 1780.
BIBLIO :
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Résumé :
— Boyeria, Mac Lachlan 1896. En 1883, de Sélys avait créé pour ce genre le nom de Fonscolombia en écrivant "J'ai dédié ce genre à feu Boyer de Fonscolombe, qui le premier en France (1837) a étudié sérieusement les Odonates, et découvert l'irene et d'autres espèces." L'entomologiste londonien Robert Mac Lachlan, président puis trésorier de la Société Entomologiste de Londres, à qui de Selys avait dédié l'espèce japonaise Fonscolombia maclachlania, a du modifier le nom générique, qui avait déjà été utilisé par Lichtenstein en 1877 pour une cochenille. Il utilisa alors la première partie, Boyer, du nom d'Étienne de Fonscolombe. Ce dernier avait décrit l'espèce-type du genre Aeschna irene en 1838.
C'est le seul nom de genre des Odonates de France qui se réfère à un nom propre ; pour les Odonates d'Europe, il est rejoint par Selysiothemis Ris, 1897.
— Nom d'espèce : Boyeria irene, Fonscolombe, 1838 : Ann. Soc. ent. France 7:93. Du prénom Irène (dérivé du grec εἰρήνη (Eiréné), signifiant « paix »), celui de la fille d'Étienne Boyer de Fonscolombe, et non d'un tempérament prétendument "paisible" auquel l'auteur ne fait nullement allusion dans sa description originale. Le spécimen a été capturée à Saint-Zacharie (Var), où Irène de Fonscolombe avait hérité de sa mère le domaine du Moulin Blanc.
— Les noms en français : 1) "L'Aeschne Irène", de Sélys 1840. L'habitude de Sélys-Longchamps est de traduire littéralement le nom scientifique, qui était alors Æshna irene. Le fait qu'il ait placé un accent sur le É indique qu'il interprète bien l'épithète comme un prénom, et non comme un adjectif. 2) "L'Aeschne paisible" d'Aguilar et Dommanget 1985, introduit le contre-sens sur la compréhension de irene. 3° "Le Spectre paisible" Dijkstra 2007 enfonce le clou. Il faudrait aujourd'hui, par respect pour Fonscolombe, revenir à l'Æschne d'Irène de Sélys.
— Les noms dans d'autres langues :
- Allemand "Die Westliche Geisterlibelle" : H. Schiemenz 1953. la Libellule fantôme occidentale. " À cause de sa "tenue de camouflage", ou de son comportement furtif et crépusculaire.
-Néerlandais "De schemerlibel" : la libellule crépusculaire.
-Anglais "Western spectre" Le Spectre occidental.
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NOM SCIENTIFIQUE.
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I. LE NOM DE GENRE BOYERIA, MAC LACHLAN 1896.
Zoonymie des Odonates : le genre Boyeria, Mac Lachlan 1896.
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II. LE NOM D'ESPÈCE BOYERIA IRENE FONSCOLOMBE, 1838.
Boyer de Fonscolombe M. 1838 - Monographie des Libellulines des environs d'Aix. - Ann. de la Soc. Entomol. de France, 7 : 75-106 + 547-575 page 93.
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https://www.biodiversitylibrary.org/item/53389#page/97/mode/1up
Description originale :
6. Æshna irene, Nobis. ,
Æ. brunneo viridique variegata, thorace subgloboso ; abdomine maris foeminae que post basin coarctato, macula marginali alarum brunneâ; nervis aliquot flavis; membranulâ accessoriâ parvâ, cinerascente, Nob.
Long. 0,060. Enverg. o,o85.
La tête est gris-verdâtre ; la bouche un peu noire. Le chaperon est d'un jaune pâle. Le vertex ou sommet de la tête est marqué d'un point bleuâtre allongé dans le sens du corps. Le petit triangle, derrière et entre les yeux, est jaune.
Les yeux sont d'un gris-verdâtre un peu vif, un peu jaunâtre à leur côté postérieur.
Le corselet est presque globuleux , d'un brun-grisâtre plus brun à ses côtés inférieurs, avec deux taches allongées, un peu courbes, très-prononcées sur le devant; aux côtés, deux taches ou bandes de la même couleur; la postérieure moins marquée; les lignes noirâtres entre les deux. L'espace dorsal entre l'origine des ailes est gris-cendré avec une très-petite ligne jaune en chevron brisé, entre chaque paire d'ailes; les points tuberculeux de la base des ailes sont alternativement bruns et jaunes.
L'abdomen est très-globuleux à sa base , très-rétréci au milieu du troisième segment, dans la femelle comme dans le mâle; puis s'élargissant insensiblement, et ensuite diminuant encore un peu de diamètre après le milieu; le dos est un peu en arête, avec les côtés bien carénés. Sa couleur est mêlée de brun de poix et de vert-grisâtre. La base et les côtés du premier segment sont gris-verdâtre , et le bord postérieur brun. Le second est vert à sa base, brun postérieurement, avec une tache ou nuance bruns sur la partie verte; cette tache brune est coupée longitudinalement par l'arête dorsale, qui est jaunâtre; le bord postérieur est légèrement jaune, suivi de deux lignes fines, noires, transverses, qui le terminent; les côtés sont jaunes en avant, bruns postérieurement : ces deux couleurs séparées par une bande noire, oblique, très-remarquable; il y a de chaque côté de ce même segment, un peu en bas, un petit appendice ou oreillette bien marquée et saillante qui paraît être le rebord d'un stigmate ordinaire plus grand en cet endroit. Le troisième segment est verdâtre, avec une tache triangulaire brune vers la base. La moitié postérieure du segment est brune, avec deux ou quatre points d'un vert tirant quelquefois sur le roussâtre dans le mâle, plus verts dans la femelle ( on voit ces mêmes points aussi sur le brun du deuxième segment). Le bord postérieur est marque, comme dans le précédent, de deux lignes noires, fines, très-rapprochées; et un peu au-dessus de ce bord il y a encore deux points très-marqués, plus grands et plus verts que les autres; l'arête est noire dans ce même segment et les suivants, excepté les trois derniers où elle n'est pas sensible. Les taches et les couleurs des quatrième, cinquième, sixième et septième segments sont comme celles du troisième; le huitième est gris-verdâtre, avec des taches brunes aux deux côtés du dos. Les deux derniers sont verts, sans tache, bordés seulement de noir postérieurement. Les appendices caudaux supérieurs sont ovale-allongés, obtus à l'extrémité, avec une arête longitudinale assez élevée dans le milieu, un peu ciliés intérieurement, de la longueur des deux derniers segments; l'appendice inférieur est court, triangulaire, obtus à son sommet, verdâtre , légèrement liséré de noir. Le ventre est vert-grisàtre, avec des taches brunes.
Les ailes sont blanches, avec leur extrémité lavée de brun ; cette teinte y forme une tache distincte, obscurément arrondie; l'angle de l'anus est coupé à peu près à angle droit
dans le mâle , mais arrondi dans la femelle; la nervure costale est roussâtre; plusieurs nervures courtes, qui forment les premières cellules des quatre ailes, sont jaunes. Le stigmate est peu allongé, roussâtre plus ou moins foncé; la membranule accessoire est assez petite, transverse, grisâtre.
Les pattes sont d'un brun roux, avec les cuisses gris-roussâtre.
La femelle diffère très-peu du mâle que je viens de décrire. Je ne noterai que les différences , autres que celles déjà notées plus haut : le point noir du vertex est à peine marqué; les yeux sont d'un vert moins vif et un peu jaunes postérieurement. Le corselet est plus grisâtre, et les taches ou bandes jaunes des côtés, moins prononcées. On ne voit pas les oreillettes aux côtés du deuxième segment de l'abdomen. Les deux points verts plus gros ne se voient point avant le bord postérieur des segments; les autres points verdâtres sont plus verts, mais sur les quatrième, cinquième, sixième et septième segments , ils sont moins marqués : le neuvième a deux points, et le dernier est coloré comme le huitième. La couleur verte de l'abdomen est plus terne. Le bout des ailes n'a pas d'ombre noire. Les cuisses sont grises et les jambes d'un gris un peu roussâtre.
Rare. A Saint-Zacharie, département du Var, au milieu de juillet.
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ÉTUDE DU NOM.
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La première constatation est que l'auteur ne donne aucune explication sur le nom qu'il a choisi. Le recours à un dictionnaire latin-français, le Gaffiot, indique : "Irene, es, f. (Εἰρήνη), Irène, nom de femme." Ce mot est suivi par "Ireneus, i, saint Iréné, évêque de Lyon."
Un dictionnaire grec nous apprend que le grec ancien Εἰρήνη, Eirếnê signifie « Paix, Clémence »).
Bien que rien n'indique que l'épithète dérive du grec, et bien qu'il soit délicat de ne pas respecter le dictionnaire et la grammaire, l'hypothèse de comprendre cet irene comme un qualificatif du comportement de cette libellule est très tentante, mais, dans ce cas, l'auteur en aurait fait mention dans son texte, soit en reprenant un terme latin équivalent dans sa diagnose, soit en signalant ce comportement dans sa longue description. Or, ce n'est pas le cas, et toute la description est morphologique.
Le seul passage qui s'écarte de cette précision des différentes parties de l'insecte est la dernière mention :
Rare. A Saint-Zacharie, département du Var, au milieu de juillet.
Ni l'adjectif "rare", ni l'apparition en juillet" ne peut expliquer cet épithète.
Si nous nous intéressons au lieu nommé Saint-Zacharie, nous apprendrons qu'il s'agit d'un endroit très souvent fréquenté par Etienne de Fonscolombe, situé au nord du massif de la Sainte-Baume, et au sud d'Aix-en-Provence. Et nous découvrirons que Zacharie fut le troisième évêque de Lyon, en succession de saint Irénée.
Pourquoi Fonscolombe aurait-il donné à son espèce le nom d'Ireneus plutôt que celui de Zacharias ? Et pourquoi aurait-il écrit irene et non ireneus?
Nous apprenons ensuite que si Fonscolombe fréquentait tant ce lieu, c'est que son épouse, Marie Ursule Aglaé CATELIN, y possédait un domaine, Le Moulin Blanc. Mais en 1838, date de rédaction de la description de la libellule, ce domaine avait été transmis à la fille d'Etienne de Fonscolombe et d''Aglaé Catelin ... qui se prénommait Irène.
C'est du moins le chemin que j'ai suivi pour parvenir à ce prénom. J'aurais été plus vite en partant de la définition du Gaffiot, "latin irene : Irène, nom de femme", et si j'avais cherché ensuite une Irène dans l'entourage immédiat de l'entomologiste.
Irène BOYER de FONSCOLOMBE 1799-1879 épousa en 1821 Adolphe de Saporta, et son fils Gaston de Saporta (1823-1895), né à Saint-Zacharie, devint un naturaliste célèbre. "Fille unique, Irène recevra les propriétés de son père lui-même aîné de sa génération: le château de Fonscolombe au Put Sainte-Réparade, un hôtel particulier à Aix-en-Provence, 21 rue de la grande horloge (devenue la rue Gaston de Saporta en 1895). De sa mère lui vient aussi le domaine de Moulin-Blanc à Saint-Zacharie (83)" (d'après ruedaix-ag13.pagesperso-orange.fr).
Voir sur MAPS la situation de Saint-Zacharie et de Fonscolombe
Voir sur Géoportail la carte de Saint-Zacharie sur une carte d'Etat-Major de 1820-1866.
Voir la généalogie de Boyer de Fonscolombe
Voir la notice nécrologique de Gaston de Saporta (1823-1895) : R. Zeiller, Notice nécrologique. Revue Générale des Sciences pures et appliquées N°7 — 15 avril 1895
Etienne Laurent BOYER de FONSCOLOMBE, Né en 1772, décédé en 1853 , à l’âge de 81 ans, Entomologiste
Conclusion : inutile d'aller chercher bien loin, l'épithète irene se réfère au prénom de la fille unique de l'entomologiste, propriétaire d'un domaine sur le lieu de capture de la nouvelle espèce, à Saint-Zacharie dans le Var. En consultant le Calendrier de faune et de flore pour les environs d'Aix ou première apparition des principaux insectes et première floraison des végétaux qui s'y trouvent, mémoire de l'Académie des sciences d'Aix-en-Provence, tome V, Aix 1845, publié par Etienne Boyer de Fonscolombe, on y lit cette déclaration : "Le rayon de mes observations comprend principalement les environs d'Aix. Je l'ai étendu souvent jusqu'aux limites de notre département, et Marseille m'a fourni beaucoup d'insectes et de plantes. Il en est de même des parties du Var assez voisines et même limitrophes des Bouches-du-Rhône, telles que Saint-Zacharie et la Sainte-Baume, où j'ai souvent prolongé mes excursions." |
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LES AUTEURS PRÉCÉDENTS EN ZOONYMIE.
Ces auteurs ont tous considéré le sens grec du mot irene, sans rechercher le sens latin renvoyant au prénom Irène :
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POITOU-CHARENTE NATURE
http://www.poitou-charentes-nature.asso.fr/aeschne-paisible/
"Boyeria en l’honneur de Boyer de Fonscolombe, descripteur de l’espèce en 1838 ; irene du grec eirênê (gr) = paix, pacifique, paisible du fait du caractère peu craintif de cet odonate."
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KRIEG-JACQUIER (Régis) et DELIRY (Cyrille), Groupe de recherche et de protection des libellules "Sympetrum" (GRPLS) dit Groupe Sympetrum, site de l'Observatoire de la biodiversité de Savoie. Sans date, consulté le 15/10/2018.
https://www.biodiversite-savoie.org/ressources/article_2014-02
"Aeschne paisible, Spectre paisible, Aeschne Irène… Gardons plutôt son beau nom scientifique, Boyeria irene (Fonscolombe, 1838)… Le nom du genre honore Étienne Laurent Joseph Hippolyte Boyer de Fonscolombe (1772 - 1853), entomologiste et collectionneur, issu d'une vieille famille établie à Aix-en-Provence, qui fit la détermination de cette espèce en 1838 sous le nom d’Aeshna irene. Il avait choisi l’épithète spécifique d’après Irène, fille de Zeus et Thémis, l'une des trois Heures et qui incarne la Paix dans la mythologie grecque. (Εἰρήνη / Eirếnê) aux cotés d’Eunomie et Dicé, c'est-à-dire le Bon Ordre ou la Législation et la Justice. C’est sans doute le caractère peu craintif de cet odonate qui a orienté le scientifique vers ce choix. De Selys-Longchamps créé ensuite le genre Fonscolombia Selys, 1883 pour l’animal, avant que Robert McLachlan remplace ce nom de genre par Boyeria en 1896. Outre Boyeria irene qui nous intéresse, Boyer de Fonscolombe (dont la famille est l'ancêtre, côté maternel, d'Antoine de Saint-Exupéry, un autre fana des bolides ailés !) aura laissé son nom associé à Orthetrum brunneum, Coenagrion caerulescens... et, sous la plume de Selys, à Sympetrum fonscolombii."
DRAGONFLYPIX
http://www.dragonflypix.com/etymology.html
"probably after Εἰρήνη, the Greek goddess of peace"
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D'ANTONIO & VEGLIANTE.
https://www.researchgate.net/publication/316791278_Derivatio_nominis_libellularum_europaearum
"irene (Boyeria) - Ειρενε, νσ = divinità della pace."
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H. FLIEDNER, 2009
https://www.entomologie-mv.de/download/virgo-9/Virgo%200902%20Die%20wissenschaftlichen%20Namen%20der%20Libellen%20in%20Burmeisters.pdf
http://dominique.mouchene.free.fr/libs/docs/GENE_Burmeister_Fliedner.pdf
Non décrit
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VAN HIJUM, 2005.
http://natuurtijdschriften.nl/download?type=document&docid=555521
non décrit
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NOMS VERNACULAIRES (*)
(*) Common names, nom en langue officielle du pays concerné .
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III. LES NOMS FRANÇAIS DE BOYERIA IRENE.
1°) Æschne Irène Sélys, 1840.
ÆSCHNA IRENE (B. de FONSCOLOMBE) L'ÆSCHNE IRÉNE.
"Diagnose. — Variée de brun et de verdâtre. Abdomen renflé à sa base, ensuite très-étranglé. Ailes hyalines (leur extrémité brune chez le mâle). Membranule accessoire courte, cendrée. Parastigma brun.
Dimensions. — (Voyez le tableau.)
Synonymie. —AESCHNA IRENE. B. de Fonscolombe, 1858. Pl.
♂. Tête gris-verdâtre. Vertex d'un jaune pâle, marqué d'un point bleuâtre allongé dans le sens du corps. Yeux d'un gris verdâtre brillant; le petit triangle en arrière jaune. Thorax brun-foncé avec deux taches longitudinales en dessus et deux bandes obliques confluentes de chaque côté verdâtres. Espace interalaire cendré. Les attaches des ailes brunes, tachetées de jaune. Abdomen très-globuleux à la base, très-étranglé au troisième segment ; ensuite plus large, puis atténué à son extrémité. Les oreillettes du deuxième segment très-prononcées. Sa couleur est d'un vert grisâtre avec des marques brunes réparties ainsi qu'il suit : premier segment brun postérieurement; deuxième de même avec une nuance dorsale brune sur le vert, et une tache transverse verdâtre sur le brun ; les côtés d'un jaune vif en avant, bruns en arrière ; ces deux couleurs séparées par une tache oblique très-noire sur l'oreillette. Les 5e, 4e, 5e, 6e et 7e segments avec une petite tache basale et la moitié postérieure brunes; cette dernière marquée de deux points latéraux verts ou roussâtres ; huitième vert avec deux taches oblongues latérales brunes en dessus ; les 9me et 10me verts sans taches, finement bordés de noir en arrière. Appendices anals supérieurs bruns, ayant au moins deux fois la longueur du dernier segment, lancéolés, atténués à la base qui est munie en dessous d'une dent aiguë, élargis à leur extrémité ; leur bord interne très - poilu ; ils finissent en une petite pointe aiguë et sont marqués en dessus d'une ligne longitudinale élevée. Leur extrémité est relevée en haut. Appendice inférieur court, triangulaire, verdâtre, à pointe tronquée et un peu échancrée. Pieds d'un brun roussâtre. Cuisses roussâtres. Ailes hyalines, leur extrémité lavée de brun-noirâtre (à peu près comme chez la Libellula conspurcata). Nervure de la côte jaune en dehors, ainsi que quelques-unes des petites nervures transversales. Parastigma médiocre, brun-ferrugineux. Le bord anal des secondes ailes très-anguleux. Membranule accessoire petite, courte, d'un gris blanchâtre.
♀. Diffère du mâle en ce que le point du vertex est presque nul ; les ailes n'ont pas de petites marques brunes à leur extrémité et sont un peu salies uniformément. Yeux d'un vert moins vif, jaunes en arrière. Thorax plus gris, à bandes latérales moins prononcées.Abdomen d'un vert plus terne, pas de points verts sur le bord postérieur des segments ; les 8e, 9e et 10e semblables, bruns sur les côtés, avec une tache oblongue dorsale verdâtre et deux points médians sur le neuvième de la même couleur. Appendices anals lancéolés. Jambes d'un roux grisâtre. Cuisses cendrées.
Cette espèce remarquable a été découverte à St-Zacharie, en Provence, par M. B. de Fonscolombe. Elle y est rare et vole au milieu de juillet.
Elle est facile à distinguer des deux autres espèces de la même section , à la couleur des ailes et de l'abdomen."
Trois remarques. D'abord, Sélys-Longchamps traduit Æshna irene par l'ÆSCHNE IRÉNE , avec un accent sur le premier E qui montre qu'il se rapporte au prénom féminin. Il n'existe d'ailleurs pas d'adjectif français capable de créer un doute. Le seul adjectif créé sur le grec ancien est "irénique", qui n'a aucune application ici.
D'autre part, Sélys-Longchamps ne fait nulle mention d'un éventuel "caractère peu craintif de cet odonate", pour reprendre les termes de Précigout, Prud'homme et Jourde dans Les Libellules de Poitou-Charente, ou ceux de Krieg-Jacquier et Deliry.
Enfin, l'auteur belge connaissait personnellement Boyer de Fonscolombe (et certainement dès lors également son épouse), puisqu'en 1838, lors de sa lune de miel, après avoir visité Paris et Lyon, il rencontra Fonscolombe à Aix-en-Provence le 11 et 12 mars, alors que celui-ci venait de publier sa monographie sur les Odonates des environs d'Aix. En 1840, Sélys lui dédicaça un nouveau Sympetrum, S. fonscolombii. (Wasscher et Dumont 2013).
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Le nom français d'Æschne Irène, toujours avec un accent sur le E, fut repris par Pierre Boitard en 1843, Nouveau manuel complet d'entomologie: ou Histoire naturelle des insectes, Volume 3 de Pierre Boitard
Sélys-Longchamps le reprit en 1850 dans sa Revue des Odonates ou Libellules d'Europe.
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2°) L'Aeschne paisible Jacques d' Aguilar, Jean-Louis Dommanget - 1985 -
Guide des libellules d'Europe et d'Afrique du Nord Page 229
"Boyeria irene (Fonscolombe, 1838) Pl. 9 Fr. L'Aeschne paisible. Identification En plus des caractères génériques signalés plus haut, la coloration générale brune et verdâtre, ainsi que les ailes portant à l'apex une teinte plus ou moins foncée,.."
Cyril Oswald Hammond, Richard Robinson Askew, Robert Merritt - 1983 - The Dragonflies of Great Britain and Ireland
"F - L'Aeschne paisible DESCRIPTION OF ADULT The presence of two to four crossveins in the median space distinguishes B. irene from all other species of European Aeshnidae with the exception of Caliaeschna microstigma, ."
Le nom est repris par Grand et Boudot :
GRAND, D. & BOUDOT, J.-P. (2006). Les libellules de France, Belgique et Luxembourg - Mèze : Biotope, 2006 Coll. Parthénope., 2006,
Il est également repris par l'INPN-MNHN https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/65412
Ou dans l'article 2018 de Wikipédia.
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3°) Le Spectre paisible, Dijkstra 2007, Libellules de Poitou-Charente 2009 (Précigout, Prud'homme et Jourde) .
— DIJKSTRA, K.-D. B. Guide des libellules de France et d'Europe, illustrations, R. Lewington ; traduction et adaptation française, Philippe Jourde, Delachaux et Niestlé, Paris : DL 2007. Réimpression 2011, 320 p. page 176. Les espèces du genre Boyeria sont nommées Spectres : B. irene est nommée Spectre paisible ou Aeschne paisible,, B. cretensis Spectre de Crète.
— Philippe JOURDE, Les Odonates. II / Insectes n° 158 - Inra
"par les chauves-souris. Les restes du Spectre paisible Boyeria irene s'observent souvent sous les gîtes de Grands Rhinolophes, mais aussi parfois d'oreillards .."
www7.inra.fr/opie-insectes/pdf/i158jourde.pdf
— Libellules de Poitou-Charente page 132 : Aeschne paisible. Syn. Spectre paisible.
Je trouve aussi sur la toile le nom de "libellule fantôme".
"Spectre paisible" serait inspiré du nom anglais "Western Spectre", qui figure sur la liste rouge de l'IUCN :
http://www.iucnredlist.org/details/165472/20
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Conclusion :
nom vernaculaire français : 1) "L'Aeschne Irène", de Sélys 1840. L'habitude de Sélys-Longchamps est de traduire littéralement le nom scientifique, qui était alors Æshna irene. Le fait qu'il ait placé un accent sur le É indique qu'il interprète bien l'épithète comme un prénom, et non comme un adjectif. 2) "L'Aeschne paisible" d'Aguilar et Dommanget 1985, introduit le contre-sens sur la compréhension de irene. 3° "Le Spectre paisible" Dijkstra 2007 enfonce le clou. Il faudrait aujourd'hui, par respect pour Fonscolombe, (et malgré Aragon!) revenir à l'Aeschne d'Irène de Sélys.
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LES NOMS DANS D'AUTRES LANGUES.
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— Allemand "Die Westliche Geisterlibelle" : Schiemenz 1953. la Libellule fantôme occidentale. "Le site libelleninfo (qui reprend les commentaires de Schiemenz ?) explique le nom ainsi : [nach ihrer graugrünen bis graubraunen Färbung] . À cause de sa "tenue de camouflage" (Grand et Boudot) ?
K-D.B.Dikstra décrit les longues et furtives patrouilles du mâle, volant bas au dessus de l'eau et suivant les berges, se tenant souvent dans les zones ombragées , les rassemblements fréquents au crépuscule dans les zones de chasse et le vol rapide et zigzagant qui se poursuit souvent après la tombée de la nuit.
— Néerlandais "De schemerlibel" : la libellule crépusculaire. Cf supra.
— Anglais "Western spectre" http://www.iucnredlist.org/details/165472/20
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SOURCES ET LIENS.
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Bibliographie générale de ces articles de zoonymie des Odonates : voir ici :
http://www.lavieb-aile.com/2018/01/la-bibliographie-de-mes-articles-de-zoonymie-des-odonates.html
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OUTILS DE ZOONYMIE.
— http://www.dragonflypix.com/etymology.html
— PRÉCIGOUT (Laurent), PRUD'HOMME (Eric), 2009, Libellules de Poitou-Charentes, Ed. Poitou-Charentes Nature, 255 pages,
— POITOU-CHARENTE NATURE (Association) / Philippe JOURDE & Olivier ALLENOU
http://www.poitou-charentes-nature.asso.fr/leucorrhine-a-front-blanc/
— ANTONIO (Costantino D’), VEGLIANTE (Francesca ) "Derivatio nominis libellularum europæarum"(PDF) (en Italien) Étymologie de 197 noms de Libellules européennes.
https://www.researchgate.net/publication/316791278_Derivatio_nominis_libellularum_europaearum
— ENDERSBY (IAN D. ), 2012, : Watson and Theischinger: the etymology of the dragonfly (Insecta: Odonata) names which they published Journal and Proceedings of the Royal Society of New South Wales, vol. 145, nos. 443 & 444, pp. 34-53. ISSN 0035-9173/12/010034-20 34
https://royalsoc.org.au/images/pdf/journal/145_Endersby.pdf
— ENDERSBY (IAN D., FRS ), 2012, Etymology of the Dragonflies (Insecta: Odonata) named by R.J. Tillyard, F.R.S. Proceedings of the Linnean Society of New South Wales 134, 1-16.
https://openjournals.library.sydney.edu.au/index.php/LIN/article/viewFile/5941/6519
— ENDERSBY (IAN D., FRS ), 2012, The Naming of Victoria’s Dragonflies (Insecta: Odonata, Proceedings of the Royal Society of Victoria 123(3): 155-178.
https://www.academia.edu/28354624/The_Naming_of_Victoria_s_Dragonflies_Insecta_Odonata_
— ENDERSBY (IAN D. ), 2015, The naming's of Australia's dragonflies.
https://www.researchgate.net/publication/283318421_The_Naming_of_Australia%27s_Dragonflies
http://dominique.mouchene.free.fr/libs/docs/GENE_origine_noms_odonates_Australie_Endersby_2015.pdf
— FLIEDNER (Heinrich), 2009, Die wissenschaftlichen Namen der Libellen in Burmeisters ‘Handbuch der Entomologie’ Virgo 9[5-23]
http://www.entomologie-mv.de/download/virgo-9/Virgo%200902%20Die%20wissenschaftlichen%20Namen%20der%20Libellen%20in%20Burmeisters.pdf
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