Où il est le Guénolé ? Chasse-poursuite dans les jardins de l'abbaye.
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Voir aussi :
- "La bannière Le Minor de la paroisse Saint-Yves de la Côte Sauvage"
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Le buste-reliquaire en argent et les statues de saint Guénolé (Gwennolé) au Musée de Landévennec.
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Les blasons sculptés de quelques abbés de Landévennec.
et : Mes 150 articles sur la Presqu'île de Crozon.
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Le 1er mai se fêtait jadis la troisième fête religieuse de l'année celtique, Beltaine, où l'on passait de la partie sombre de l'année à sa partie lumineuse, et où les feux annonçaient le renouveau, et la reprise des travaux des champs et des vergers. Mais pour les moines de l'abbaye de Landévennec, c'est plutôt l'occasion de célébrer la fête de saint Guénolé, venu du pays de Galles au VIe siècle pour fonder, au fond de la rade de Brest et à l'embouchure de l'Aulne, l'abbaye dont il fut le premier abbé.
À 10h30, la messe a déjà attiré une foule importante, mais c'est à 15h que les amateurs du répertoire breton de l'ensemble choral du Bout du Monde sont venus écouter, autour des moines, les chants issus de leur dernier album, "Stér an Dour".
Mais le public qui a manifesté son enthousiasme par les applaudissements qu'on imagine, ne quitte pas l'église par sa sortie. Que se passe-t-il ? Chacun converge vers une porte étroite, à droite, et c'est en bon dernier (je laisse passer les femmes, les enfants, les poussettes et les personnes âgées) que je parviens au cloître. Là-bas, et déjà loin, se déroule l'apogée de la journée, la procession vers les ruines de l'ancienne abbaye.
Mais où sont-ils passés ?
Au pas de course, je parcours ces lieux augustes.
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Voilà les derniers devant les pommiers ! On voit la mer !
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Mais ces moines ont remplacé le fameux "pas de procession" pour le "pas de chasseur", ma parole ! Au loin, en tête du cortège, émergeant tel un phare devant les blancs manteaux d'écume, j'aperçois une statue : saint Guénolé !
Oh, combien de landaus, combien de poussettes me séparent-elles d'elle.
Donnez-moi des ailes !
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Enfin, le ciel m'a entendu : une pause, un changement d'équipe dans les brancards.
Et puis ça repart.
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Chacun chante le cantique en l'honneur de Guénolé, ou discute avec son voisin : le Père Abbé s'entretient avec Monseigneur Paul James, évêque de Nantes.
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La procession s'apprête à franchir la clôture qui la sépare de l'ancienne abbaye.
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Nous accédons à l'ancien monastère, où saint Guénolé fut enterré. Les vêpres y seront célébrées.
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Le saint est installé devant l'assemblée, puis la bannière de la paroisse "Saint-Yves de la côte sauvage" est placée dans l'absidiole axiale, entourée par les choristes de Bout du Monde.
Car s'élève le cantique à saint Guénolé :
"Da heul Jezuz or Zalver Guenole c'wi peus kezet deskit deom hent ar gerneur zelaou ar Spered " (À la suite du Seigneur jésus Gwénolé tu as marché. Apprends-nous le chemin de la maison en écoutant l'esprit.)
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Après les cantiques, la psalmodie des psaumes, l'épître, vient l'homélie de Monseigneur James et sa vibrante anaphore:
"l'Amour, c'est l'Amour qui a reconstruit cette abbaye [en ruine en 1810 et relevée par Kerbénéat en 1958] !
"l'Amour, c'est l'Amour qui va reconstruire Notre-Dame !,
"l'Amour, c'est l'Amour qui relèvera l'Église !,
"l'Amour, c'est l'Amour dans nos vies qui ...!"
etc...
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ANNEXE : OÙ L'AUTEUR FAIT LE TOURISTE.
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1°) La statue de saint Guénolé en habit de Père Abbé : kersanton, fin XVe-début XVIe.
Matériau : kersantite (roche magmatique au très beau grain extraite en rade de Brest près de l'Hôpital-Camfrout depuis le XVe siècle). Louis Chauris indique qu'au cours de son histoire, l'abbaye a fait appel aux trois principaux types (faciès) de kersanton : gris à grain moyen — église romane—, noir à gros grain blason au griffon d'Henri de Morillon abbé de 1425 à 1442 — et noir à grain fin, comme pour ce saint Guénolé, mais aussi pour le gisant de Jehan du Vieux-Chastel, dans la même variété.
Elle a été commandée par Jehan du Vieux-Chastel, dernier abbé régulier de Landévennec de 1496 à 1522 et restaurateur de plusieurs monastères relevant de l'abbaye.
La crosse est brisée (sauf l'implantation), mais l'Abbé porte la mitre à fanons, les chirothèques, les anneaux (chaque doigt long de chaque main porte une bague, alternativement sur la phalange ou sur la phalangine), la chape à orfrois, tandis qu'il tient le livre ouvert de la Règle.
À la base sont sculptées les armoiries fascées d'or et de gueules à six pièces de la famille du Vieux-Chastel, avec la crosse propre à l'abbé, mais aussi des sortes d'étoiles qui sont des hermines . Car ces armes sont :
" ... 3 fasces accompagnées de 10 hermines 4.3.2.1. « Ses armes se voient, dit Missirien, en toutes les vitres de l'église et du couvent, et sa tombe est élevée en belle pierre, en la chapelle, du costé de l'Evangile, hors du choeur ; on montre encore de vieux ornements de draps d'or qu'il avait donnés, et un très grand et très riche calice d'argent vermeil doré ». Il restaura, nous dit Dom Mars, plusieurs des prieurés du monastère, enrichit son église de chapelles, le choeur de stalles, et la sacristie de divers ornements et peintures. Il mourut le 19 Octobre 1522, laissant 11 livres à la chambrerie du monastère, et fut enterré devant l'autel qu'il avait érigé en l'honneur de sainte Barbe, et qui, au XVIIème siècle, était dédié à Notre-Dame. Ce fut le dernier Abbé régulier. Il dut faire restaurer la maison des Abbés, à Quimper, car on a trouvé, dernièrement, en démolissant la vieille aile du couvent des Dames Ursulines, un linteau de cheminée portant ses armes."
On peut voir le gisant de cet Abbé au Musée de Landévennec.
http://www.lavieb-aile.com/2019/05/le-gisant-de-jehan-du-vieux-chastel-abbe-de-landevennec.html
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2°) Les colonnes sculptées.
Les sculptures des embasements des colonnes datent du XIXe siècle. Mais ce chapiteau à entrelacs n'est-il pas plus ancien?
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Les fleurs de lys, les hermines, les épées, les ancres et les étoiles, les grappes ou les blasons à croissants sont trop polies pour être anciennes. Mais c'est bien beau tout de même.
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SOURCES ET LIENS.
— CHAURIS (Louis), 2011, Recherches lithologiques dans les ruines de l'abbaye de Landévennec ou "la leçon des pierres", Avel Gornog n°19, juillet 2011, pages 37 à 43.
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