Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
17 décembre 2015 4 17 /12 /décembre /2015 15:43

Jean Antoine Coquebert de Montbret (1753-1825), illustrateur et  entomologiste.

Le séjour à Paris  de Jean-Chrétien Fabricius, entomologiste.

.

Jean-Antoine Coquebert de Montbret (1753, Paris- 6 Avril 1825) est un entomologiste et illustrateur établi à Reims , et qui est peu connu,  car on ne lui doit qu'un seul ouvrage, les  Illustratio iconographica insectorum de 1797  par lequel il rend compte par ses dessins en couleurs des insectes  que l'illustre danois Fabricius, disciple de Linné, avait observés et décrits comme inédits dans les collections de Paris. Ajoutons à cela quelques articles qu'il avait donné pour le Bulletin des Sciences de la Société Polymatique de Paris, dont il était membre depuis mars 1793, et voilà tout.

J'ai placé ici les 30 planches de ses Illustratio, telles qu'elles sont proposées en ligne par Biodiversitaty Library (afin d'en diffuser la réputation), ainsi que les articles du Bulletin des Sciences, et j'ai fait précédé cela d'une synthèse des informations que j'ai pu glâner.

Je donne en outre des informations biographiques et bibliographiques sur Fabricius et sur son séjour à Paris.

Alors qu'un de ses neveux a donné son nom à une superbe fleur à bulbe, la Montbretia, lui-même n'est l'auteur que de trois noms zoologiques, ou zoonymes  : deux ascidies,  Ascidia scutata (Coquebert, 1797) et Ascidia glandiformis, (Coquebert 1797), et une mouche Myennis octopunctata (Coquebert, 1798). En cherchant bien, on trouve aussi une guèpe vespiforme, une Chrisidae Chrysis ardens ou Hedichridium ardens  ( Coquebert 1801).  C'est certes dérisoire, mais je pense que, lorsqu'on aura passé en revue les planches qu'il a peintes, la précision des organes de manducation, mais aussi d'autres détails reproduits avec une précision hallucinante, on s'écriera :

Chapeau, Monsieur Coquebert !  Vous êtes digne de votre prédecesseur Claude Aubriet :

 

Claude Aubriet et les papillons : les Vélins du Roy (Muséum d'Histoire naturelle), 1710-1735. Claude Aubriet, premier illustrateur français de papillons, passionné par leurs métamorphoses : les Vélins du Roy (Muséum d'Histoire naturelle) volume 86, 1710-1735.

.

La première chose que l'on constatera, c'est que l'article Wikipédia qui concerne Jean-Antoine Coquebert de Montbret est en anglais, et qu'aucun entomologiste français n'a pris la peine d'écrire une notice biographique dans cette encyclopédie dans notre langue. Nul n'est prophète en son pays.

 

La seconde chose, c'est que cet amateur d'insecte avait un frère, Charles-Etienne, avec lequel on peut parfois le confondre car il est beaucoup plus connu, et qu'il dispose, lui, de sa notice Wikipédia en français. Et d'un livre récent sur sa vie.

 

Commençons donc par les présentations généalogiques.

 

I. GÉNÉALOGIE .

 

La famille Coquebert, originaire de Reims, a pris en s'établissant à Paris puis Amiens le nom de Monbret, un village de Champagne.

1. Antoine Jean Coquebert, chevalier, seigneur de Montbret, est né le 6 mars 1753 à Paris , et décédé le 6 avril 1828 à Amiens, à l’âge de 75 ans. Il était le fils de Jean-Francois Coquebert de Montbret 1713-1789,Correcteur en la chambre des comptes de Paris, et de Geneviève Eugénie Hazon 1729-1787.

Marié en 1788 avec sa cousine Simone-Rose Coquebert, puis le 15juillet 1800 avec la sœur de sa première épouse, Marie Henriette Coquebert de Crouy, (née le 16 novembre1766 - Reims 1766 -Reims 1827) , il eut en 1790 un fils, Auguste Romain, puis en 1801 et 1802 deux filles, Bathilde-Charlotte et Charlotte-Octavie.

Il fut Conseiller-auditeur en la Chambre des comptes (1774), et après la Révolution, Conseiller à la cour impériale puis royale d'Amiens (1811) et Conseiller honoraire en 1818.

Son fils Auguste-Romain, avocat en 1815 et Conseiller-auditeur près la cour royale d'Amiens, s'intéressa à la botanique. A ne pas confondre avec son oncle Antoine-Romain (1767-1829), frère d'Antoine-Jean et de Charles-Etienne.

 

2. Son frère Charles-Étienne Coquebert de Monbret (3 juillet1755, Paris - 9 avril1831, Paris) fut consul de France à Hambourg sous l'Ancien Régime et devint, après la Révolution, professeur de statistique minière à l'École des Mines. Il fut chargé par Napoléon du recensement des langues parlées en France sous le Premier Empire. Ce travail fut publié en 1806 sous le nom d"’essai d’un travail sur la géographie de la langue française ». L'un de ses fils, (Antoine-François) Ernest Coquebert de Montbret , né à Hambourg le 31 janvier 1780, est un botaniste français. Membre de la campagne d'Égypte, Il étudia la flore de l'Égypte à Rosette, au Caire, à Suez et dans la Haute-Égypte. Bibliothécaire de l'Institut du 8 septembre 1800 au 20 février 1801, il meurt à l'age de vingt ans de la peste au Caire le 7 Avril 1801. Le «Montbretia» porte son nom. Un autre fils, Eugène Coquebert de Montbret, sourd, orientaliste, travailla avec son père au ministère de l'intérieur jusqu'à 1810, et y resta ensuite après le départ de son père. Plus tard, il aida son père à classer sa vaste bibliothèque, et fit don en 1847 à la bibliothèque de Rouen d'une vaste collection de documents et de cartes.

La fille de Charles-Étienne,Cécile Coquebert de Montbret , née en 1782, épousa en 1800 Alexandre Brongniart . De cette union naîtront 3 enfants : Mathilde (1797-1848), Hermine (1800-1885) qui épouse le 2 mai 1825 le célèbre chimiste Jean-Baptiste Dumas, et Adolphe Brongniart,le fondateur de la paléontologie végétale.

Un ouvrage d'Isabelle Laboulais-Lesage, "Lectures et pratiques de l’espace, l’itinéraire de Coquebert de Montbret (1755-1831), savant et grand commis d’Etat " , paru en1999, est consacré à Charles-Étienne.

3. Le troisième frère est Antoine-Romain (1767-1829), dit  "le Chevalier de Montbret"

On trouve dans le  Bulletin des Sciences de la Société Philomatique de Paris des articles signés et co-signés par Romain (dès 1791), Charles et Romain, ou Romain et Alexandre Brongniart (1793) ou Vauquelin, Romain et Charles Coquebert et  Alexandre Brongniart,  à coté de ceux plus tardifs d'Antoine (Antoine-Jean), que nous allons détailler.

.

 ANTOINE-JEAN COQUEBERT DE MONTBRET ET L'ENTOMOLOGIE.

 

Que sait-on de l'intérêt d'Antoine-Jean pour l'entomologie ? Rien d'autre que ses deux articles dans le Bulletin de la Société Philomathique de Paris, et son ouvrage de 1799. Et la manière dont il a repris les illustrations de son exemplaire du Locupletissimi rerum naturalium thesauri de Seba, un des plus beaux ouvrages d’histoire naturelle de l’époque, pour remédier à son absence de présentation méthodique des espèces en entreprenant un travail colossal de reclassification, découpant minutieusement les figures , les regroupant par thème et les collant en notant à la plume leur l’emplacement exact dans l’œuvre de Seba. Disposant d’un exemplaire en noir blanc, Antoine Jean Coquebert de Montbret entreprend lui-même la mise en couleur des figures et ajoute à la plume toutes les informations dont il dispose permettant d’identifier et de caractériser l’animal ou la plante. Un travail de dingue. Voir : Livia Rapatel Le Cabinet d’Albert Seba interprété par Antoine Jean Coquebert de Montbret, BU de Lyon.

 

 

 

1°) Les articles dans le Bulletin de la Société Philomathique de Paris.

Ils concernent deux Ascidies, et une "mouche à huit points"

 

a) Bulletin des sciences par la Société philomathique de Paris , n°1 Germinal, an 5 de la République (avril 1797) Mémoire sur deux espèces d'ascidies.

 

Mémoire sur deux espèces d'ascidies, par le C.Antoine Coquebert.

Antoine Coquebert a lu un mémoire sur deux espèces d'ascidies, qu'il a observées sur les bords de la Méditerranée , et qu'il regarde comme différentes de toutes celles que les auteurs systématiques ont alléguées. Il nomme la première ASCIDIA SULCATA, cortice obscure luteo tuberculato, aperturis conicis , strialis (1). Son enveloppe est allongée, ridée, inégalement tuberculeuse, d'un jaune brun en dehors, blanchâtre en dedans , longue de six pouces, plus large à sa base qu'à son extrémité. Ses deux ouvertures sont cylindriques et sillonnées ; l'une est placée au sommet, et l'autre sur le côté. Le corps ou le petit sac est ovale et roux. Cette espèce est connue à Toulon , sous le nom de Vichet. Onen mange l'intérieur assaisonné d'un peu de vinaigre ou de jus de citron. Elle est représentée de grandeur naturelle, fig. 1 ; l'enveloppe coupée, fig. 2; le corps à part , fig. 3 ; l'ouverture supérieure , fig 4-

La deuxième espèce est nommée par le C. Coquebert, ASCIDIA GLANDIFORMIS coccinea lœtis , aperturis, plants, dissectis , ciliatis. Son enveloppe est coriace , rouge en dehors et en dedans , lisse et égale. Sa forme est celle d'un gland. Les deux ouvertures sont creusées en entonnoir; leurs bords sont découpés en lanières aiguës, et ciliés par des poils courts. Grand, nat. fig. 1 ; le corps, fig. 2 ; enveloppe coupée, fig. 5 ; bouche , fig. 4- C. V.

Note sur l'anatomie des ascidies.

Le C. Cuvier s'est aussi occupé des ascidies dans son huitième mémoire sur l'anatomie des animaux à sang blanc, ce sont les analogues nuds , des testacées bivalves. Leur enveloppe extérieure , coriace, homogène et sans organisation apparente, remplace la coquille. Le corps est beaucoup plus petit que cette enveloppe à laquelle il n'est attaché que par ses deux ouvertures, dont l'une conduit l'eau entre les branchies jusqu'à la bouche , et l'autre est l'anus. L'estomac et le canal intestinal sont enveloppés dans la masse du foie. Il n'y a point d'organe de mouvement. C. V.

 

Animalbase reconnaît à Coquebert la paternité des noms de ces deux Platelminthes Ascidia sulcata Coquebert, 1797 et Ascidia glandiformis Coquebert, 1797 . Worms réfute le nom d'Ascidia sulcata au profit de celui de Microcosmus vulgaris, Heller 1877, un Tunicier de la famille des Pyuridae, mais A. glandiformis est ignoré.

 

 

 

b) — Bull. Société Polymatique Vendémiaire An 7 (sept. 1798) n° 19 page 331.

 

BULLETIN DES SCIENCES, PAR LA SOCIÉTÉ PHILOMATIQUE. PARIS. Vendémiaire , an 7 de la République. N°19 . HISTOIRE NATURELLE.

Sur une nouvelle espèce de Mouche , par le C[itoyen]. Ant. Coquebert.

Mouche à huit points. Musca octopunctata.

M. antennis setariis, subpilosa thorace macula dorsali grisea quadrata, punctis octo nigris.

Desc. Parva , grisea nigro maculata, subpilosa. Caput oculis fusco-rubris palpis clavaque antennarum ferrugineis. Thorax antice linea recta utrinque brevi, nigra ; macula grisea quadrata in area nigra , punctis octo nigris in lineas duas transversas , parallelas dispositis. Scutellum nigrum nitidum prominulum rotundalum. Pectus . Alae magnœ hyalinœ fasciis tribus transversis lutescentibus fusco marginatis , puncto marginali apiceque fuscis. Abdomen breve basi, fascia média anoque nigris. Pedes pallide testaceis, femoribus suprà nigris infrà cinereis geniculis pallidis.

Le C. Ant. Coquebert a trouvé cette jolie mouche aux environs de Reims, sur le tronc d'un arbre mort. Elle vit en société. Elle tient étendues ses grandes ailes à bandes roussâtres, et leur donne un mouvement de vibration ; tantôt elle les place à recouvrement l'une sur l'autre , et en cache son abdomen. Elles marchent de côté avec assez de légèreté. Explication de la figure. — a, grandeur naturelle; 4, la mouche grossie; c, antenne séparée.

Cette Musca octopunctata fut jugée semblable avec Scatophaga fasciata de Fabricius 1805 avant que cette Ulidiidée ne fut honorée du nom de Myennis octopunctata (Coquebert, 1798).

On peut l'admirer sur la figure 17 de la planche XXIV.

.

2°) L' Illustratio iconographica de 1799-1804.

 

La meilleure introduction à cet ouvrage est la notice qui en présentait la parution du premier volume (première Décade) dans le n° 26 du Bulletin Scientifique de la Société Philomathique de Paris, "Floréal An VII" soit 1799 , page 15, par Alexandre Brongniart. Note reprise dans le Journal général de la littérature de France de 1799 Volume 2 page 153.

Illustratio îconographica Insectorum quee in musœis Parisinis observavit et in lucem edidit J. Ch. Fabricius, pramiissis ejusdem descriptionibus ; accedunt species plurimee vel minus uni: nondum cognitœ, Auctore Ant. J Coquebert,; sociec. Philom. et Hist. JYat. Par. socio. Decas I , Parisiis , an 7. Fuchs.

M. Fabricius a fait connoître dans son Entomologie systématique et son supplément, plusieurs insectes nouveaux qu'il avait vus dans différentes collections de Paris. Mais ses descriptions n'étant pas toujours assez comparatives , sont quelquefois insuffisantes pour déterminer l'espèce qu'il a eu en vue. De bons dessins, faits sur les originaux étiquetés de sa main , lèveront ces difficultés. Ils multiplieront et perpétueront d'ailleurs , en quelque sorte , des objets qui, une fois détruits, peuvent ne plus se retrouver. Il est donc de notre devoir , d'après ces motifs., de rendre hommage au zèle du C. Antoine Coquebert , auteur de l'ouvrage que nous annonçons. Donner en figures coloriées , d'après ses propres dessins , les insectes que M. Fabricius a observés et décrit comme inédits dans les collections de Paris, y joindre les phrases, les descriptions et la synonymes de ce naturaliste , publier d'autres espèces ou nouvelles, ou qui ne sont connues qu'imparfaitement, telle est son entreprise. Il fait paroître aujourd'hui la première Décade de cet ouvrage important, dont il ne tardera pas à donner la suite. Des artistes fameux, le C. Malœuvre , pour la gravure, le C. Didot pour la partie typographique , ont secondé le pinceau d'un homme qui savoir, observer, étudier la nature, avant de chercher à la copier. Ces dix premières planches sont composées d'environ 120 figures, dont un grand nombre présente beaucoup de détails. Il commence par des insectes plus exposés à être détruits, et qui appartiennent à des classes moins abondantes que les autres en dessins. Les Sinistates, les  Piésates, les Ryngotes de M. Fabricius. L'Amérique septentrionale, Cayenne , les Etats Barbaresques, la France méridionale sont les lieux principaux d'où ont été tirées les espèces qu'il a figurées. Des genres nouveaux de M. Fabricius , Delphax , Oryssus . Psocus , etc. se voient ici , avec le détail curieux de leurs organes de la manducation , et dans ces recherches délicates, il a appellé à son secours le C. Latreille. Il lui doit sur-tout la planche consacrée aux insectes du genre Psocus, très-peu connu, et dont les espèces échappent à la vue, par. leur petitesse et leur fugacité. D'autres observations anatomiques, des synonymes nouveaux, des remarques particulières donnent à cet ouvrage un nouveau prix, et nous, sommes convaincus qu'il recevra des naturalistes et des amateurs l'accueil le plus favorable. A.B [Alexandre Brogniart ]

On comprend qu'il faut d'abord s'intéresser au séjour que l'entomologiste danois Johan Christian Fabricius fit à Paris.

.

PRÉALABLE : JEAN-CHRÉTIEN FABRICIUS (1745-1808) A PARIS (1768 puis 1790-1807).

 

  Je débuterais par une biographie et une bibliographie générale de Fabricius, empruntée à Walckenaer :

 Charles A. Walckenaer, "Vies de plusieurs personnages célèbres des temps anciens et modernes, Volume 2 pages 148.

https://archive.org/details/viesdeplusieursp02walc

 

Jean- Chrétien Fabricius, le plus célèbre entomologiste du 18e siècle, naquit à Tundern , dans le duché de Sleswick, en 1742. Après avoir terminé ses études à l'âge de vingt ans, il se rendit à Upsal pour y suivre les cours de Linné. On ne peut se dissimuler qu'aucun disciple ne fut plus que Fabricius redevable aux leçons de son maître.

 

 

 

"Tous ses ouvrages sur l'entomologie, qui lui ont valu une réputation justement méritée, nous montrent les préceptes, la méthode, et même les formes de style de Linné appliqués au développement d'une seule idéeneuve, heureuse et féconde. Fabricius était bien loin de déguiser les obligations qu'il avait à son maître : il a décrit avec beaucoup de charmes les moments heureux qu'il avait passés auprès de lui ; et peut-être est-il celui qui nous a transmis sur ce grand homme les détails biographiques les plus intéressants et les plus propres à lefaire bien connaître. Le souvenir qu'il en conservait ne s'affaiblissait point avec l'âge, et nous ne l'avons jamaisentendu prononcer sans attendrissement le nom de son bon Linné. Ce fut en étudiant sous lui, qu'il conçut leprojet de ses travaux sur les insectes et l'idée de son système. Il nous a souvent dit que la première bouched'insecte qu'il disséqua, fut celle d'un hanneton; il la montra à Linné, avec la description qu'il en avait faite,et il lui proposa de faire usage des organes de la bouche pour établir les caractères des insectes dans la nouvelleédition du"Systema naturae, que Linné préparait. Celui- ci encouragea son élève à poursuivre cette marche ; maisil refusa de s'y engager, parce que, disait-il, il était trop âgé pour changer de méthode.

 

"Fabricius, forcé de choisir un état , étudia la médecine , et fut reçu docteur à l'âge de vingt-cinq ans ; mais, bientôt nommé professeur d'histoire naturelle à l'université de KieI, il se livra entièrement à ses études favorites, et fit paraître, en 1775, son système d'entomologie. Cet ouvrage donna une nouvelle face à la science. Swammerdam et Ray avaient classé les insectes d'après leurs métamorphoses; Lister, Linné, Geoffroy, d'après les organes du mouvement; quelques entomologistes, Réaumur, Scopoli, Linné lui-même, s'étaient servi de la considération des organes nutritifs pour caractériser quelques genres; mais avant Fabricius, personne n'avait songé à coordonner ces principes à une classification générale. Cette idée était à la fois philosophique et hardie, et l'auteur l'exécuta avec beaucoup d'habileté. Deux ans après il développa, dans un second ouvrage, les caractères des classes et des genres : dans les prolégomènes de cet ouvrage il montre les avantages de sa méthode,et en excuse les inconvénients. Enfin il publia, en 1778, une Philosophie entomologique, à l'exemple de la Philosophie botanique de Linné.

 

"Depuis cette époque jusqu'à sa mort , ou pendant plus de trente ans, Fabricius s'est occupé sans relâche à étendre son système, et à le reproduire sous diverses formes dans des ouvrages qui portent des titres différents. Possédant à fond plusieurs langues anciennes et modernes, il parcourut, dans ce but, chaque année, les états du nord et du centre de l'Europe , fréquentant les musées d'histoire naturelle, formant des liaisons avec les hommes instruits de tous les pays, et décrivant partout avec une infatigable activité les insectes inédits. Mais à mesure que le nombre des espèces s'accroissait sous sa plume laborieuse, les caractères des genres, et même des classes, devenaient de plus en plus incertains et arbitraires ; et. sous ce point de vue fondamental, ses derniers écrits sont peut-être inférieurs aux premiers. La base qu'il avait prise était excellente; seulement, elle ne devait pas servir à renfermer la science dans les limites étroites d'un système, mais à lui donner pour fondement la méthode naturelle. C'est pour avoir méconnu cette vérité, que Fabricius a trop négligé les autres considérations qui lui auraient fourni des moyens plus exacts de classification. Il ne faut pas cependant dissimuler qu'il a eu le sort de tous les hommes qui ont le bonheur de fournir une longue carrière, après avoir, par leurs travaux, imprimé un grand mouvement à la science qu'ils cultivent : l'âge et la lassitude les empêchent de suivre les progrès dont on leur est redevable, tandis que d'autres, plus jeunes et plus actifs, partant du point où ils se sont arrêtés, marchent en avant et les surpassent. Cependant Fabricius a encore l'avantage d'avoir présenté le catalogue le plus complet d'insectes décrits d'après nature : tant qu'il a vécu, il a tenu le sceptre de la branche importante d'histoire naturelle dont il s'était emparée; et, bien loin d'être jaloux des succès de ceux qui couraient la même carrière , il les a encouragés par ses éloges. Après avoir pris connaissance d'un premier travail que nous avions fait sur les Aranéïdes, il eut, l'année suivante, la complaisance de nous apporter de Kiel toutes les araignées exotiques de sa collection; et lorsque nous lui eûmes communiqué les observations critiques que l'intérêt de la science nous forçait de faire sur ce qu'il avait écrit relativement à cette classe d'insectes, il les approuva , et fut le premier à nous engager à les imprimer. Loué avec franchise, mais critiqué aussi avec sévérité, par M. Latreille, Fabricius se plût à rendre justice aux travaux de l'entomologiste français; il se montra docile à quelques-unes de ses critiques, et resta toujours son ami. N'oublions pas cependant de dire que, par des raisons que nous ignorons, Fabricius s'est écarté de cet esprit de justice qui le caractérisait, en inscrivant dans un de ses derniers ouvrages au nombre des figuristes, le nom d'Olivier, qui , certainement, mérite d'occuper une autre place.

"Fabricius avait des connaissances très étendues en botanique et dans toutes les parties de l'histoire naturelle. Il avait été nommé conseiller-d'état du roi de Danemark, et professeur d'économie rurale et politique; en cette qualité il a publié, dans les langues allemande et danoise, plusieurs ouvrages utiles, quoique moins célèbres que ceux qu'il fit paraître sur l'entomologie. Tous ces travaux littéraires, ses fréquents voyages, les soins qu'il donnait à ses élèves, remplissaient sa vie, qui paraissait devoir être longue ; sa santé était robuste et son tempérament vivace : mais les désastres de sa patrie, qui eurent lieu en 1807, l'affectèrent douloureusement.

"Il était alors en France, pays où il aimait à séjourner, et qui était pour lui une seconde patrie. Nous l'engageâmes à y rester : les papiers publics annonçaient le bombardement de Copenhague par les Anglais, «Mon roi est malheureux , disait-il , et il faut que je retourne auprès de lui. » Il partit, et peu de temps après nous apprîmes que cet homme illustre avait succombé à la mélancolie qui le consumait : il avait alors soixante-cinq ans.

"Fabricius était de petite taille; sa physionomie était vive, gaie, expressive ; elle avait un caractère de bonhommie qui, lorsqu'on le considérait avec attention, contrastait avec la finesse de son regard. L'étendue de ses connaissances, ses liaisons avec les hommes les plus illustres de son siècle, sa modestie, sa douceur et son enjouement, tout contribuait à rendre sa conversation intéressante et instructive. M. Latreille a fait paraître, dans les annales du muséum d'histoire naturelle pour 1808, une notice sur Fabricius ; c'est la seule dont nous ayons eu connaissance. Si nous avions pu nous procurer celles que l'on a dû publier en Allemagne, et l'ouvrage où il a lui-même consigné des détails sur sa propre vie, cet article eût été moins imparfait et plus complet. Il nous reste à faire connaître les nombreux écrits de Fabricius; nous commencerons par ceux qui sont relatifs à l'entomologie :

I. Systema entomologiae, Flensburg, 1775, in- 8.° Ce livre renferme non-seulement l'exposition des caractères essentiels des classes et des genres du nouveau système que l'auteur voulait établir, mais encore toutes les espèces alors connues;

II. Genera insectorum, Chilonii (Kiel), 1 vol. in° sans date et sans nom d'imprimeur ; la préface est datée du 26 décembre 1776. Cette exposition détaillée des classes et des genres est suivie d'une Mantissa ( ou Supplément ) d'espèces nouvellement découvertes qui font suite au Systema;

III. Philosophia entomologica, Hambourg, in-8.°, 1778. C'est encore le meilleur ouvrage de ce genre.

IV . Species insectorum, ibid. , 1781, in-8.°, 2 vol. L'auteur, dans la préface, avoue qu'il n'a pu discerner les caractères génériques de la bouche d'un grand nombre de petites espèces dans les genres des phalènes, des charançons, des carabes, des mouches, des ichneumons, des tenthrèdes, et il invite les entomologistes à s'occuper de monographies sur ces insectes : déjà il voyait qu'il ne pouvait seul achever l'édifice dont il n'avait que posé les bases;

V. Mantissa insectorum, Hafniae( Copenhague ), 1787, in-8. 2 vol. C'est un supplément à l'ouvrage précédent, presqu'aussi volumineux que l'ouvrage même ;

VI. Nova insectorum genera dans les Mémoires de la Société d'histoire naturelle de Copenhague, tome 1, première partie. L'auteur établit sept genres nouveaux dans ce mémoire;

VII. Entomologia systematica, Copenhague, 1792 à 1796, 7 vol. in-8.°, en y comprenant l' lndex alphabeticus ; mais les six premiers volumes ne forment que quatre tomes, le premier et le dernier étant divisés en deux parties : tous les Species précédents sont refondus dans ce grand ouvrage, où l'auteur a, pour la première fois, introduit les classes des Piezates , des Odonates et des Mitosates, qui, auparavant, étaient réunis dans une seule et même classe, sous le nom de Synistates : de sorte qu'il mettait dans une même division les abeilles et les cloportes , les éphémères et les araignées, les libellules ou demoiselles et les scolopendres ;

VIII. Supplementum entomologia systematicae, Copenhague, 1798, in-8. avec de nouveaux genres et de nouvelles espèces dans toutes les classes. L'auteur a donné, dans cet ouvrage, un travail entièrement neuf sur la classe des agonates ou crustacés, qu'il fit disparaître de son système et qu'il subdivisa en trois, les Polygonates, les Kleistagnates et les Exochnates.

Il faut joindre à ce volume un Index alphabeticus de cinquante-deux pages, qui ne parut qu'un an après, ibid., in-8.° Enfin , Fabricius voulut refondre encore tous les ouvrages précédents en un seul, en publiant successivement un Species pour chaque classe d'insectes en particulier, et il fit paraître:

IX. Systema Eleutheratorum, Kiel, 1801 , 2 vol. in-8°, avec un Index in-4 imprimé à Brunswick;

X. Systema Rhyngotorum Brunswick, 1800, in-8.°, avec un Index in-4. , publié en 1805 ;

XI. Systema Piezatorum , ibid., 1804? m-8.°, et un Index in-4. ;

XII. Systema Antliatorum, ibid. 1805 , in- 8.°, et un Index in-4° La mort surprit Fabricius au moment où il venait de finir le premier volume du Systema Glossatorum, qui n'est connu que par l'extrait qu'en a donné Illiger, et ce volume fut le dernier qu'il écrivit sur les insectes.

XIII.Description de la Tipula sericea, et de sa larve, dans le recueil de la Société des scrutateurs de la nature, de Berlin , tom. V ;

XIV. De Systematibus entomologicis, dans le même recueil, deuxième partie, page 98. Le professeur Giseke a publié , d'après les notes manuscrites de Fabricius et les siennes propres, les leçons de Linné sur l'ordre naturel des plantes, Hambourg, 1792, 1 vol. in-8.°

XV. Considérations sur L'ordre général de la nature, Hambourg, 1781, in-8. °;

XVI. Traité de la Culture des plantes à l'usage des cultivateurs;

XVII. Observations sur l'engourdissement des animaux durant l'Hiver, insérées dans lenouveau Magazine de physique et d'histoire naturelle, ( tom. IX, part. IV, pag. 79-82 );

XVIII. Résultat des leçons sur l'Histoire naturelle, Kiel, 1804, 1 vol. in-8. c ;

XIX. Sur l'accroissement de la population , particulièrement en Danemark. Cet ouvrage occasionna une petite guerre littéraire, et fut critiqué par Geo, Bruyn, Ambrosius et deux anonymes ( Voyez, à ce sujet, la bibliothèque statistique de Meusel) ;

XX. Élémens d'économie politique, à l'usage des étudiants, Flensbourg , 1775, in-8.° L'auteur donna une nouvelle édition de cet ouvrage à Copenhague, 1785, in-8.°;

XXI. Renseignement historiques sur le commerce du Danemark, dans le Journal politique, 1796, tom. 11, pag. 502-516, 583 et 401 ;

XXII. Hvori bestaaer Borgerdyd besvaret (en quoi consiste la vertu civique?), Copenhague, 1786, in-8.°de 16 pages ;

XXIIl. Sur les finances et la dette en Danemark, inséré dans le Magasin de Keltpar Heinze, tome 11, pag. 1-29, 1791;

XXIV. Recueil d'écrits sur l'administration, Kiel, 1786 et 1790, 2 vol. in-8.° Fabricius a reproduit, dans ces deux volumes, tous ses traités détachés publiés séparément sur l'économie politique , et en a ajouté de nouveaux sur la mendicité, la salubrité publique , etc.;

XXV, Sur les Académies, particulièrement en Danemark, Copenhague, 1796, in-8.« C'est dans la préface de cet ouvrage, que Fabricius a donné sa propre biographie. M. Latreille , à la fin de sa notice , semble dire qu'il en avait composé une en danois, plus étendue, qui est restée manuscrite. XXVI.Voyage en Norvège, Hambourg, 1779, in- 8.° Il en a paru une traduction française par MM. Millin et Winckler, 1805,in-8.°;

XXVII. Lettres sur Londres , Leipzig, 1784 , in-8.°;

XXVIII. Lettres au sujet d'un voyage fait en Russie, insérées dans le Porte-feuille historique de 1786, tom. 11 , n.° 11 , et de 1787, tom. 11, n.° 4;

XXIX. Remarques minéralogiques et technologiques dans l'ouvrage de Ferber, intitulé :"Description des fabriques chimiques observées durant un voyage dans diverses provinces d" Angleterre; Halberstad, 179, in- 8.° Les i5 derniers ouvrages sont en allemand, excepté le n.° xxn , qui est en danois.

XXX. Remarques sur le Danemark, écrites en anglais, et publiées par Pinkerton dans sa Géographie moderne, édition de 1807, tom. 1, pag. 553; et tom. 1, édition de 181 1 , pag. 302."

 

Document complémentaire sur Fabricius :

 

On trouve dans Pickard & al. 1858 des biographies de différents entomologistes. La notice sur Fabricius cite abondamment l'autobiographie de ce dernier, écrite en danois et traduite anglais. J'ai tenté de traduire à mon tour le texte anglais :

 

An accentuated list of the British Lepidoptera, with hints on the derivation of the names. Published by the Entomological Societies of Oxford and Cambridge. By Oxford University Entomological Society.Cambridge Entomological Society, Cambridge, Eng.London,J. Van Voorst, 1858, pages 16 à 21

https://archive.org/stream/accentuatedlisto00oxforich#page/n19/mode/2up

Autobiographie de Fabricius, traduite du danois par F.W. Hope et publiée dans Trans. Entom. Soc. Lond.vol. IV(1845).

 — Fabricius, Johann Christian, né en 1745 à Tondern, dans le Schleswig: en 1761, son père a été nommé médecin de l'un des hôpitaux de Copenhague, et par conséquent le jeune Fabricius est devenu un étudiant de l'Université dans la capitale danoise, mais il fut ensuite envoyé, en compagnie de Zoéga, à Upsala.

  «Je repense toujours à cette période avec grand plaisir et de chaleureux sentiments de gratitude envers mon grand maître, Linnaeus, qui était pour nous comme un père .... Linné connaissait dans ses conférences l'art d'encourager les jeunes dans l'étude de la science, et dans ses propos et dansla conversation, il était inépuisable sur toutes sortes d'anecdotes et d'observations. Il nous a rendu visite quotidiennement, tant à la campagne qu'à la ville, et a enrichi nos esprits pendant plusieurs heures d'instruction délicieuse, ce qui était pour lui une récréation, tout en parlant à nous de sa science favorite, la botanique. Il a correctement jeté les bases de nos connaissances, et a imprimé sur nos esprits l'ordre systématique avec laquelle l'étude des sciences devrait être poursuivi, ainsi que la précision de l'expression qui distingue si particulièrement l'école linnéenne; Zoéga (*)se consacra à l'étude des différents types de mousses, à celle des insectes, et Linné se réjouissait toujours quand on lui apportait quelque chose de nouveau, ou quand il pouvait nous communiquer de nouvelles informations sur ces sujets. Sa mémoire sera à jamais vénérée et chérie par moi "

(*)Johan Zoéga (1742 Ravsted, Schleswig-1788 ) était un entomologiste et botaniste danois, ami de Johan Christian Fabricius et un élève de Carl von Linné, qui se spécialisa dans les mousses. Il a écrit la Flora Islandica Soroe, 1772, Kopenhagen et Leipzig 1775. Son cousin était l'archéologue Jörgen Zoéga.

 

En 1765, Fabricius est allé à Leipzig pour entendre les conférences du professeur Schreber sur l'économie; en 1766 à Leyde, et l'année suivante il a voyagé à travers l'Ecosse et l'Angleterre: à Londres, il établit une amitié solide avec Solander :

"Le matin, nous étions tous les jours au British Museum; nous allions déjeunerensemble, et nous passionsnos soirées dans un cercle joyeux d'amis.Je lui suis redevable aussi bien du bénéfice que j'ai retiré de mon séjour en Angleterre que des bons moments que j'y ai connus."

Les bibliothèques et les collections de tous les naturalistes anglais furent ouvertes à Fabricius,qui détermina et décrivit lesinsectes,en classant les espèces des collections. A la fin de1768,

"Enfin, bien malgré moi je quittai Londres pour Paris ; mais j'étais devenu beaucoup trop anglais pour être en mesure d'apprécier la France, et Paris à plus forte mesure. Je fus, cependant, reçu avec beaucoup de gentillesse par Geoffroy mais j'étais encore trop conditionné alors pour ne pas mépriser tout ce qui n' était pas anglais. Mon mécontentement fou augmentait chaque jour; et comme j'avais été habitué dans mon enfance à me livrer à toutes mes fantaisies, je quittai Paris dès décembre, pour partir voyager à Lyon, Nîmes, Montpellier, Marseille, Antibes, en Italie, et continuer ensuite par Nice, Côme, Turin, Milan, Vérone, l'aride Padoue , jusqu'à Venise .... ANîmes je rencontré Séguier, et, plus particulièrement, à Turin, le célèbre naturaliste, Allioni; .... De Venise, je fisun court voyage à Bologne, afin d'examiner la collection d' Aldrovandi. . . . Très tôt au printemps je suis allé à Idria, en partie pour voir les mines de mercure et en partie pour faire connaissance avec Scopoli, qui était à cette époquel'un des premiers entomologistes vivant. De Idria je traversais les montagnes du Tyrol, je visitais Innsbruck, Halle, Swatz, et je traversais Munich, Regensburg, et Stuttgard, Tübingen. . . . De Tübingen je voyageais à travers une partie de la Suisse jusqu'à Strasbourg .... après être resté quelques semaines là-bas, je suis allé à Hambourg, et je revins enfin à Copenhague."

 

Pendant son absence Fabricius avait été nommé professeur d'économie de l'Institut d'histoire naturelle de Charlottenborg, et en hiver, après son retour il a commencé à donner des conférences sur l'économie politique; mais en 1771 l'Institut d'histoire naturelle a été fermé.

 

"De 1772 à1775, je passais les hivers à Copenhague, et les étés à Londres. Mes amis, M. (plus tard "Sir Joseph") Bank et Solander, étaient rentrés de leur voyage autour du monde, et avaient apporté avec eux d'innombrables spécimens d'histoire naturelle et d'insectes. [La Banksian Collection est en possession de la Société Linnéennede Londres, disposés selon les dernières œuvres de Fabricius.] Je vivais désormais très agréablement. Avec Bank, Hunter, et Drury je trouvais beaucoup d'occasion d'occuper mon temps, et je disposais de tout ce qui pouvait m'être utile. Ma situation était non seulement très agréable, mais elle offrait les moyens d'accumuler de nombreuses connaissances. En 1775, à Pâques, au cours de la grande foire de Leipzig, mon «Systema Entomologiae» est paru. L'Entomologie était à cette époque à ses débuts. Nous avions alors seulement le "Systema" de Linné, dont la classification, fondée sur les ailes des insectes, n'était pas la plus naturelle, et dont les espèces avaient été très imparfaitement définies. ... Dans mon "Système » je me suis servi des organes de manducation comme marques de distinction pour mes classes et espèces; et en dépit de tous leurs défauts, qui découlent de la petitesse de ces parties, mes classes étaient beaucoup plus naturelles, mes espèces étaient plus nombreuses et plus correctement définies, et le nombre de genres décrits était considérablement plus grand. Je développais en même temps l'Orismologie, je fixais ses significations avec plus de précision, et j'introduisais le langage concis de l'école Linnéenne dans cette branche de l'histoire naturelle. "

 

En 1775, Fabricius accepta le poste de professeur d'Histoire naturelle, d'Economie et des Finances, à l'Université de Kiel.

 

"Bien que mon séjour se passait agréablement, je vis bientôt que tous les moyens pour la poursuite de ma science favorite n'était pas réunis... J'allais bientôt rétrograder en entomologie si je ne recommençais pas à voyager. En 1776, je publiai le "Genera Insectorum"qui établissait la définition naturelle des espèces ; et en 1778 la "Philosophia Entomologica" dans laquelle je cherchai à déterminer les principes théoriques de l'entomologie avec plus de précision. Durant l'été de 1778, j'accompagnai le professeur Weber lors d'une tournée en Norvège qui a donné lieu à la publication du "Voyage en Norvège" qui est paru en 1779. ... En 1780, je suis allé à nouveau en Angleterre, où les différentes collections s'étaient considérablement enrichies depuis mon dernier séjour. Pendant ce séjour, j'ai écrit, pendant mes heures de loisirs, le petit volume intitulé «'"Ueber die Volksvermehrung, insonderheit in Danemarck"qui est paru en 1781. En 1782 est paru le "Species Insectorum » en deux volumes, comme une continuation du "Systema". En 1784, j'ai traversé avec ma femme et ma fille la plupart des provinces de l'Allemagne jusqu'à Vienne. L'objet principal de cette visite était de rencontrer les auteurs du «Verzeichniss der Schmetterlinge der Wiener Gegend" [ Denis et Schiffermüller] et d'examiner leurs collections, ce qui était pour moi très important. En 1786, je suis allé par bateau à Saint-Petersbourg, en espérant, afin d'y accroître mes connaissances, de pouvoir me rendre dans les collections de nombreux savants qui avaient voyagé à travers les provinces russes; mais j'y trouvais beaucoup moins que je m'y attendais. .... En 1787, je publiai le "Mantissa Insectorum" en deux volumes qui contenait plus particulièrement les corrections et ajouts que j'avais obtenu lors de mes voyages à Vienne et à Saint-Pétersbourg. En été, je suis allé à nouveau avec toute ma famille en Angleterre."

 

En 1790, je me rendis avec ma femme et ma fille à Paris, en partie parce que je savais par des renseignements envoyés par Olivier que les cabinets parisiens contenaient un nombre considérable d'insectes queje ne connaissais pas, et en partie parce que je voulais être pleinement informés sur le nouvel ordre de choses, qui avait été introduit par la Révolution. Je fus reçu avec une attention distinguée et avec amitié . Desfontaines, Jussieu, Bosc, Parmentier, Riche, Sylvestre, Fourcroy, Brongniart, Olivier, Thouin, Billardière, Broussonet, et d'autres, m' ouvrirent toutes leurs collections, et par leur amitié et de gentillesse beaucoup contribuèrent à rendre mon séjour là-bas à la fois agréable et instructive. En outre, j'établis alors des relations étroites avec certains des dirigeants de la Révolution; Souvent, j'assistais aux séances de l'Assemblée Nationale et du club des Jacobins, et je fus le témoin de presque toutes les scènes de la Révolution qui s'y déroulèrent. Dans l'ensemble, mon séjour à Paris s'avérait intéressant pour moi. , , ,

 

De 1792-1794 est parue l'"Entomologia Systematica" en 6 volumes. : c'est une autre disposition, une augmentation et une amélioration de la «Systema Entomologiae". En 1798, je publiai un volume supplémentaire avec des ajouts et des améliorations . "Une partie de chacune de ces années qui ont passé dans un voyage à Paris." . De 1798 à 1804 je suis allé au printemps à Copenhague, spécialement pour décrire les nombreux nouveaux insectes que mes amis particuliers et anciens élèves, Chamberlain, Sehestedt et Lund, avaient recueillis dans leur zèle pour la science. "[Les collections Lund et Sehestedt sont conservés dans le Musée d'Histoire Naturelle à Copenhague, maintenant sous la responsabilité du Dr Schiodte. NDT] "Leur chaleureuse amitié m'a permis de les examiner et de les décrire en toute liberté. C'est la plus riche collection de ce type qu'il m'as été donné de découvrir, et il en découla un nombre extraordinaire de nouveaux genres, ce qui m'a incité finalement à traiter chaque classe dans son ensemble. Ce fut l'origine de mon '""Systema Eleutheratorum"en deux volumes, et donc de ""Syst. Rhyngotorum "et ""Syst. Piezatorum",chacun dans un vol., qui ont été publiés à cette époque.

En été, je suis allé chaque année à Paris, afin que je puisse voir les vastes collections qu'Olivier avait apporté de la Perse et de l'Est, les collections que Baudenavaient ramené des mers du Sud, et celles qui d'autres personnes avaient apporté d'Égypte, et cet été-là j'ai attendu le retour del'excellent Humboldt de l'Amérique du Sud.

En hiver, je restais à Kiel afin de remplir mes fonctions à l'académie, et de donner des conférences. sur l'Histoire naturelle, et sur l'économie ....

Telle a été ma vie, chéri par mes compatriotes, bien que certains de ceux-ci parmi les plus haut placésprirentombrage de mes écrits sur la politique. Apprécié par les savants à l'étranger, j'ai rencontré unaccueil le plus amical partout lors de mes voyages. Un corps sain, un cœur léger et un esprit solide m'épargnèrent de nombreux soucis. Me consacrer en permanence à ma science favorite, qui est elle-même inépuisable, mais que je cultive avec grand plaisir, et non sans succès, a préservé mon ardeur dans la suite, et m'a prodigué la paix et le bonheur sur l'ensemble du cours de ma vie."

 

"L'Autobiographie d'où proviennent ces extraits a été écrite en 1804 ou 1805. Puis, Fabricius a produit plusieurs autres œuvres, et son "Systema Glossatorum"paru dans le magazine d'Illiger en 1807. La classe fabricienne des Glossata est identique à celle des Lepidoptera de Linné, et son nom est dérivé de glossa, en allusion à la longue trompe en spirale des insectes, les organes de la bouche formant, comme cela a déjà été dit, la base de la classification Fabricienne. Swammerdam et Ray avaient classés insectes selon leurs métamorphoses ;Lister, Linné, Geoffroy selon leurs organes du mouvement ; Réaumur, Scopoli, et Linné lui-même a tenu compte des organes nutritifs pour caractériser certains genres, mais Fabricius fut le premier à appliquer ce principe à un classement général de tout l'ordre Insecta.Cet homme estimable et ce grand entomologiste est mort à Copenhague, en 1807, selon la plupart des biographies; mais M. Westwood, dans le «Manuel de Entomologiste donne, sur l'autorité du Dr Fabricius, le fils de l'entomologiste, 1747 comme date de sa naissance, en 1810, comme celle de sa mort. Il a été enterré dans le cimetière de Kiel, mais ses restes ne furent marqués par aucune pierre tombale."

 

c) le séjour à Paris 1790-1807.

 

Comme nous venons de le lire, à partir de 1790, Fabricius séjournatous les étés à Paris et devint ainsi l'ami de Pierre André Latreille (1762-1833) ; il connaît également Georges Cuvier. Pourtant, il ne cite pas ces deux noms dans sa biographie. Étienne-Louis Geoffroy, l'auteur des 2 volumes de l' Histoire abrégée des Insectes parue en 1762, et qui l'avait hébergé en 1768, n'est plus mentionné par la suite, sans-doute en raison des difficultés qu'il connut pendant la Révolution, et de son exil près de Soissons. Mais il cite Fourcroy, qui donna en 1785 l'édition latine de L'Histoire des insectes de Geoffroy.

Fabricius cite les noms de :

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume-Antoine_Olivier Guillaume-Antoine Olivier, (1756-1814) est l'auteur de l' Entomologie, ou Histoire naturelle des insectes, dont le 1er volume sur les Coléoptères sort en 1789. En 1792, il réalisa un voyage de six années au Moyen-Orient et visite l'Empire ottoman, la Perse et l'Égypte. Il rassemble une collection considérable et revient en France en 1798.Il est membre de l'Académie des sciences de Paris en 1800 et devient peu après professeur de zoologie à l'École vétérinaire d'Alfort.

Il est l'ami de Johan Christian Fabricius ainsi que le patron et le protecteur de Pierre André Latreille (1762-1833) notamment durant la période tourmentée de laRévolution.

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Desfontaines René Desfontaines (1750-1833), botaniste, titulaire de la chaire de botanique au Jardin du Roi en 1786, membre de l'Institut, a constitué une collection d'insectes lors d'un séjour à Alger et à Tunis (la "Barbarie" de 1783 à 1786.

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine-Laurent_de_Jussieu Antoine-Laurent de Jussieu (1748-1836), botaniste, neveu de https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_de_Jussieu Bernard de Jussieu, (1699-1777) botaniste, membre de l'Institut , et de https://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_de_Jussieu Joseph de Jussieu (1704-1779), botaniste. Il fut directeur du Muséum d'Histoire naturelle en 1794.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis-Augustin_Bosc_d%27Antic Louis-Augustin-Guillaume Bosc d'Antic (1759-1828) possédait en son Cabinet parisien une collection entomologique abondamment citée par Olivier.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine_Parmentier Antoine Parmentier, membre de l'Institut.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Claude_Antoine_Gaspard_Riche Claude-Antoine Gaspard Riche, (1762-1797) , naturaliste, fondateur de la Société Philomathique de Paris en 1788, il participa comme Billardière à l'expédition d'Entrecasteaux : "Il joua à bord de l'"Espérance" le rôle que joua La Billardière à bord de la "Recherche", c'est-à-dire se montra un révolutionnaire convaincu et un propagandiste ardent. Il fut donc débarqué par d'Auribeau à Java en février 1794" .

— https://fr.wikipedia.org/wiki/Augustin-Fran%C3%A7ois_Silvestre Augustin-François Sylvestre, (1762-1751), bibliothécaire, fondateur de la Société Philomathique de Paris en 1788, il en sera le secrétaire pendant 14 ans.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine-Fran%C3%A7ois_Fourcroy Antoine-François Fourcroy (1755-1809), chimiste, député de la Convention nationale, membre du Comité de Salut Public en 1794-1795, membre de la Société linnéenne en 1787,

— https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Brongniart Alexandre Brongniart, (1770-1847) minéralogiste et zoologiste,fondateur de la Société Philomathique de Paris en 1788 , membre de l'Institut, il épousa Cécile Coquebert de Montbret, nièce de Jean-Antoine.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%C3%A9_Thouin André Thouin, membre de l'Institut : jardinier en chef du Jardin du Roi, puis professeur administrateur en 1792 au Museum d'Histoire Naturelle. En 1789, député suppléant du tiers-état aux États-généraux.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques-Julien_Houtou_de_La_Billardi%C3%A8re   Jacques-Jullien Houtou de la Billardière (1755-1834), botaniste, élève de Joseph Banks, il participa sur la frégate La Recherche à l'expédition d'Entrecasteaux en Océanie sur les traces de La Pérouse (1791-1794) en réunissant de vastes collections.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Marie_Auguste_Broussonet Pierre-Marie-Auguste Broussonet (1761-1807), naturaliste, installé à Londres en 1780 : Aux côtés d’André Thouin, de Louis-Augustin Bosc d’Antic, d' Aubin-Louis Millin de Grandmaison (1759-1818) et de Pierre Willemet (1762-1824), il participe, en1787, à la fondation de la première société linnéenne du monde, la Société linnéenne de Paris.

 

Conclusion : on voit ici se dessiner le réseau de relations scientifiques et humaines indispensable à l'œuvre de taxonomie zoologique entreprise par Fabricius. Son projet lui impose des voyages à travers l'Europe et l'examen de la plupart des grandes collections entomologiques de l'époque, tant autochtones que provenant d'Orient et d'Amérique. Ses interlocuteurs appartiennent aux sociétés savantes (Royal Society, Léopoldina, Académie des sciences fermée en 1793 puis Institut, Société Polymathique de Paris crée en 1788 et Société d'Histoire naturelle de Paris, deux instances dont les réunions sont hebdomadaires, Société royale de médecine), aux structures nationales (Jardin du Roi puis Muséum d'Histoire naturelle), mais le réseau se fonde aussi sur les propriétaires de cabinet de curiosité et de bibliothèques d'histoire naturelle, sur les relations familiales, sur le rôle des femmes curieuses de sciences, et sur le partage des idées politiques, au sein d'une vaste communauté étroitement interconnectée.

 

 Voir : DURIS (Pascal), 1993, https://books.google.fr/books?id=hYBY3Fp6G3EC&dq=thouin+entomologie&hl=fr&source=gbs_navlinks_s Linné et la France, Droz.

.

 

 

SOURCES ET LIENS.

— LABOULAIS-LESAGE (Isabelle),1999 –Lectures et pratiques de l’espace. L’itinéraire de Coquebert de Montbret, savant et grand commis d’État (1755 1831) Paris, 1999, Honoré Champion, 753 p.

http://www.persee.fr/doc/ahrf_0003-4436_2000_num_322_1_2358_t1_0164_0000_1

— BIARD  (Michel)   Isabelle Laboulais-Lesage, Lectures et pratiques de l'espace. L'itinéraire de Coquebert de Montbret, savant et grand commis d'État (1755-1831) [compte rendu]

Annales historiques de la Révolution française  Année 2000  Volume 322  Numéro 1  pp. 164-166

— BIARD (Michel), 2000, « Lectures et pratiques de l’espace. L’itinéraire de Coquebert de Montbret, savant et grand commis d’État (1755 1831) », Annales historiques de la Révolution française [En ligne], 322 | octobre-décembre 2000, mis en ligne le 27 avril 2006, consulté le 01 décembre 2015. URL : http://ahrf.revues.org/1011

 

 

PLANCHES de l'Illustratio iconographica de Jean-ntoine Coquebert de Montbret.

 

Source :

http://www.biodiversitylibrary.org/item/132830#page/60/mode/1up

 

 

Planche II.

 

Planche III.

 

Planche IV.

.

Planche V.

.

.

Planche VI.

.

.

Planche VII.

 

.

Planche VIII.
.

.

Planche IX.

.

 

 

.

Planche X.

 

.

Planche XI

.

.

Planche XII.

 

.

.

Planche XIII.

 

.


.

Planche XIV.

.

 

.

Planche XV.

.

.

Planche XVI.

.

.

Planche XVII.

http://www.biodiversitylibrary.org/item/132831#page/67/mode/1up

.

.

Planche XVIII.
 

.

.

 

Planche XIX

.

 

.

Planche XX

 

.

.

 

Planche XXI

.

.

Planche XXII.

.

.

Planche XXIII.

.

.

Planche XXIV

.

.

Planche XXV.

http://www.biodiversitylibrary.org/item/132832#page/71/mode/1up

.

 

.

 

.

Planche XXVI

.

.

Planche XXVII

.

.

Planche XVIII.

.

.

Planche XXIX.

.

 

.

Planche XXX.

.

 

.

Partager cet article
Repost0
Published by jean-yves cordier - dans Zoonymie des Rhopalocères.

Présentation

  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
  • Contact

Profil

  • jean-yves cordier
  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)

Recherche