Enquête sur une femme Bellah, esclave et porteuse d'eau :
L'exposition
Anna Quinquaud, une sculptrice en Afrique
au Musée des Beaux-Arts de Brest (5 février-17 mai 2014).
En 1980, au terme de l'exposition Regards sur l'Afrique au Musée de Brest, Anna Quinquaud faisait donation d'une partie de son atelier (sculptures, dessins, photographies et documents) au musée des Beaux-Arts de Brest. Certaines de ces œuvres ont été prêtées pour être exposées à Gray, Mont-de-Marsan, Roubaix, La Rochelle, Quimper, et Gueret dont l'hôpital a été baptisé du nom de l'artiste. La ville de Brest a baptisé Rue Anna Quiinquaud une artère du quartier de l'Europe.
Anna Quinquaud est la fille du docteur et académicien Charles-Eugène Quinquaud et de Thérèse Caillaux, sculpteur, élève de Rodin et de Boucher. En 1924 elle obtient un deuxième grand prix de Rome en sculpture, mais aussi le prix de l'Afrique Occidentale Française. A la villa Médicis et à l'École de Rome, elle préfère l’aventure lointaine et solitaire en Afrique. Elle s’immerge dans la découverte du continent africain qui s’avérera être pour elle une puissante source d’inspiration. Son œuvre est un hymne à la beauté de l’Afrique et à ses traditions ancestrales.
Elle effectuera trois voyages :
1925-1926 Premier voyage en Afrique : Sénégal (Dakar), Soudan français [actuel Mali] (Djenné, Tombouctou), Niger et Mauritanie.
1930-1931 Deuxième voyage en Afrique. Choix de la Guinée française : Foutah-Djallon. Peuples Foulahs, Coniaguis et Bassaris
1932 : Troisième voyage : Somalie, Ethiopie, Madagascar.
I. Femme Bellah, esclave et porteuse d'eau.
Lors du premier voyage, elle observe près de Tombouctou une jeune esclave et elle en réalise un plâtre : c'est celui qui illustre l'affiche de l'exposition :
Cette œuvre est accompagnée du cartel suivant :
Femme bellah, captive de Touareg
(Tombouctou, Mali)
Plâtre, Musée des beaux-arts, Brest Métropole océane.
La femme captive dite Femme bellah est un plâtre qui introduit des lignes obliques et verticales, suggestives d'un abandon résigné et calme. Observée sans aucun doute, cette scène représente une de ces captives que les chefs de tribus foulah s'arrogeaient à la manière de l'esclavage comme l'atteste les fers qu'elle porte au pieds*.
* Je m'interroge sur la validité de cette interprétation : les esclaves africaines sont enchaînées par d'autres fers qui sont la tradition, les relations de pouvoir, la dépendance économique, l'absence de possibilité de survivre en cas de fuite, les réseaux d'allégeance, la complexité des relations de servage mélant intimité familiale, concubinage, servitudes domestiques, mais je n'ai pas trouvé confirmation qu'elles portent des fers aux pieds. Certes, René Caillé écrivait dans son Voyage à Tombouctou au sujet des Mandingues "dès qu'on soupçonne dans un esclave le projet de déserter, on lui met les fers aux pieds", mais je conserve un doute : peut-être s'agit-il sur cette sculpture seulement de bracelets de cheville.
Cette femme est torse nu, vêtue d'un pagne. Elle porte un bracelet — de cuivre ou d'argent— de bras à gauche et d'avant-bras à droite. La chaîne ou le bracelet qu'elle porte à la cheville passe facilement inaperçue. Les yeux clos, elle somnole, le bras gauche soutenu par une vasque ronde dont nous voyons le fond.
J'ignore, lors de ma visite, la nature de l'objet rond sur lequel elle s'appuie et je néglige de m'en préoccuper ; peut-être une meule, peut-être l'équivalent du boulet de nos forçats ?
Cette sculpture peut être rapprochée d'un détail d'un bas relief sculpté par A. Quinquaud pour la résidence Lucien Paye (pavillon de la France d'outre-mer) dans la Cité Internationale Universitaire de Paris (1951) : c'est ainsi que je comprends qu'il s'agit de la jarre d'une porteuse d'eau :
Poteries des femmes Songhay, Gorom-Gorom, Burkina Faso.
Ayant négligé cet élément, c'était la coiffure qui avait attiré mon attention. En 1996, Madeleine Joret décrivait, dans les enclos des Bellah, dans des cases de bancos ou de vannerie couvertes de paille, une femme en train de tresser en une multitude de nattes fines la toison crépue d'une jeune maman : "scène paisible d'une séance de coiffure qui dure plusieurs heures, se fait en famille, demande patience et habileté, se renouvelle tous les deux à quatre semaines.". Les cheveux sont parfois lustrés au beurre de karité.
Rentré chez moi, ayant identifié la jarre, ce ne fut encore qu'après une longue observation que je constatais l'essentiel : la taille énorme et disproportionnée du récipient, qui, une fois rempli, doit être beaucoup trop lourd pour cette (très) jeune femme ; peut-être s'épuise-t-elle à puiser à longueur de journée l'eau afin de faire boire les dromadaires ?
Par ce détail, cette sculpture d'une femme Bellah rejoint la série des Porteuses d'eau d'Anna Quinquaud, observées tant au Soudan que lors de son second voyage.
Il suffira de cette sculpture pour nous faire ressentir l'empathie du regard de l'artiste observant combien cette jarre pleine est excessivement pesante :
Porteuse d'eau songoï (Tombouctou, Mali), Bronze. Collection Pierre et Dohti Dumonteil.
1. Comme l'empire Mandingue l'empire Songoï (Songhaï, Songhay) a été puissant jusqu'au XVIe siècle autour de Gao, sa capitale, et Tombouctou, sa capitale culturelle. Il s'est opposé aux Peuls et aux Touaregs. Depuis, le peuple sanghaï constitue un groupe ethnique important du Mali et du Niger, pratiquant l'agriculture et l'élevage, ou la pêche sur le Niger. Quoiqu'il existe des classes privilégiées (noblesse, classe maraboutique), on trouve aussi des classes serviles, les tyindikata et les gabibi. Les Songhaï ayant été souvent rassiés par les Touaregs, beaucoup de Bellah sont d'origine songhaï.
2. La collection Pierre et Dohti Dumonteil a été constitué par les propriétaires de la célèbre galerie Dumonteil (Paris, New-York, Shangaï) spécialisée en bronzes animaliers ; Dohti Dumonteil, ambassadrice de l'art et de la haute-couture d'origine vietnamienne, ancienne égérie d'Yves Saint-Laurent, s'est éteinte en 2013.
Le visage exprime la souffrance, la poitrine plate témoigne de l'âge, le pagne autour des reins et l'absence de tout bijou disent le dénuement. Le pied cambré pour soulever le genou gauche fait physiquement ressentir la lourdeur du fardeau. Les tresses des cheveux sont la seule concession, si ce n'est à la coquetterie, du moins à la préoccupation de soi.
II. Autres femmes porteuses d'eau du Soudan par Anna Quinquaud :
1. Femme songoï. (Tombouctou, Mali). Bronze, 1926.
Cachet Grandhomme-Andro* fondeur. Collection particulière.
*Paris (1924-1929).
Le récipient à col étroit semble moins lourd, mais le visage de la jeune fille la montre à peine sortie de l'enfance. Elle porte des bracelets épais et plats (cuivre ?) au poignet et aux chevilles, et sur sa longue tunique, un pectoral en dessous d'un collier de billes ; La tête, aux cheveux réunis en chignon, est ceinte d'un cerceau de métal à trois masses rondes.
La pénibilité du travail n'apparaît pas ici, au profit d'une certaine fraîcheur juvénile, ou de la conviction de ses charmes, et de la supériorité relative de sa condition. On sentirait presque ce "Cœur à l'ouvrage" qu"évoque le sociologue Jean-Paul Kaufmann dans son analyse des tâches domestiques, où la répétitivité et les charmes de "l'habitude" atténue la rudesse du travail.
Les collections de Sèvres — Cité internationale de la céramique— possèdent sous le titre Négresse à l'amphore ou femme porteuse d'eau songoï une version en plâtre peint et patiné de 1925, H. 49 cm,
2. Laveuse du Niger, (Soudan) Bronze. Collection Pierre et Dohti Dumonteil :
Pagne, collier de grosses perles, bracelet rond, bracelet de cheville, coiffure rassemblée à l'apex en chignon torsadé sur un crâne rasé. Charme de la petite main aux doigts écartés, image de la confiance et de l'abandon d'un enfant dans son sommeil.
Le Musée de Brest possède un plâtre patiné qui porte le même titre :
Laveuse du Niger (Soudan).
Plâtre patiné. Musée des beaux-arts, Brest métropole océane.. Cette figure féminine associant deux attributs de la femme en Afrique, l'enfant et l'eau est l'une des premières d'une longue série de maternités qui passionnent Anna Quinquaud.
III. La femme et l'eau, deuxième et troisième voyages d'Anna Quinquaud.
1. Femme à la fontaine.
Bronze à patine brun-clair ; Cachet « Susse fondeurs ». Collection Pierre et Dohti Dumonteil.
La fonderie Susse-Fondeur, créée en 1758, est toujours en activité à Paris.
2. Sur les route du Sud.
Bronze à patine brune, 1934, Musée d'Art et d'Archéologie, Guéret.
3. Jeunes antandroy (Madagascar).
Les Antandroy – « ceux qui vivent dans les épines » – sont un peuple de Madagascar présent dans l’extrême sud de l'île, dans une région aride couverte de ronces.
Les Bellah, "anciens" esclaves des Touaregs.
Wikipédia m'apprend que
"Les Bellas (Bella ou bela en songhaï, Bouzou en haoussa, Ikelan en tamasheq) sont un groupe ethnique ou une caste issu du statut servile dans la société touareg. Affranchis depuis l'époque coloniale, les Bellas sont parfois encore victimes d'esclavage au Mali et au Niger, sans qu'il existe de statistiques à ce sujet."
J'apprends aussi que les Touaregs ont souvent razzié les Songhaïs, peuple métissé de la vallée du fleuve Niger, et la plupart des esclaves touaregs, les bellah, sont d'origine Songhaï.
Lors du voyage d'Anna Quinquaud, Tombouctou appartenait, comme colonie, au Soudan français, mais l'esclavage préexistait à la colonisation. En 1892, le Commandant Réjou écrivait (Huit mois à Tombouctou) ceci :
BELLAHS. - La condition du bellah vis-à-vis du Touareg rappelle celle du captif de case chez les noirs du Soudan. Le bellah est un métis touareg et indigène. Il cultive pour l'Echaggaren auquel il est attaché, surveille ses troupeaux, exerce les différents métiers nécessaires au bien-être de son seigneur, l'accompagne à la guerre, et combat à son côté. CAPTIFS. - La condition du captif chez les Touaregs est la même que partout ailleurs au Soudan. Le captif doit son travail à son maître; mais le maître est tenu à remplir certaines obligations vis-à-vis de son captif . La Case de l'oncle Tom et quelques romans ont faussé nos idées en France sur l'esclavage, tout au moins sur ce qu'il est au Soudan. La liberté vaudrait certainement mieux pour le captif, cela n'est point douteux ; mais il n'est pas malheureux. La loi musulmane le protège, et c'est un capital que le maître conserve avec soin.Le maître doit au captif le logement, la nourriture, les vêtements, et est contraint de lui accorder à certains jours de la semaine le droit de travailler pour lui. Le Coran défend les mauvais traitements; et, s'il est avéré qu'un maître a maltraité son captif, le conseil des anciens qui fonctionne dans chaque village le lui retire. Le captif peut toujours se racheter.
Plus tard, en 1955, Henri Lhote écrivait dans Les Touaregs du Hoggar, Paris, Payot à propos des iklans (Les Touaregs utilisent pour désigner leurs esclaves le terme d' iklan,ou aklids.) que "Le Touaregs ont rendu une semi-liberté à un certain nombre d'entre eux. Ce sont les Iklan-n-Egef, ou captifs de dune. Au Soudan, on les désigne souvent sous le nom de Bellah ou de Bouzous."
Aujourd'hui, la persistance de l'esclavage chez les Touaregs reste un sujet très discuté mais aussi très actuel. Un article paru dans l'Express le 17 mai 2013 sous le titre Mali, La révolte des esclaves sous la plume de Boris Thiolay signalait ceci :
Dans un pays accablé de tant de maux, la tradition séculaire de l'esclavage, officiellement interdit, reste un fléau. Avec courage, une association lutte pour rendre la liberté à au moins 300 000 personnes et traîner leurs "maîtres" en justice. Un combat sans relâche. [...] Au Mali, l'esclavage est un tabou absolu, un abcès qui ronge la société. A l'exception de quelques ethnies du Sud, il se pratique encore dans quasiment toutes les communautés. Les chiffres sont effarants. "Il y a au moins 300 000 esclaves à part entière dans le pays, assure Naffet Keïta, anthropologue à l'université de Bamako et directeur de l'ouvrage L'Esclavage au Mali (L'Harmattan, 2012). Mais, en incluant les descendants et les affranchis, méprisés en raison de leurs origines, la question concerne plus de 850 000 personnes, soit près de 7 % de la population (14,5 millions d'habitants)." Au terme de plusieurs mois d'enquête de terrain, Naffet Keita est parvenu à esquisser une géographie régionale de l'ampleur du problème : de 30 à 35 % de la population autour de Tombouctou (nord du pays), 30 % à Mopti (centre), 20 % à Gao (nord-est), de 12 % à 15 % à Kayes (ouest).
Ce phénomène, ancré depuis des siècles, est qualifié d'"esclavage par ascendance" : "La condition servile se transmet par la mère, poursuit l'anthropologue. Tout enfant né d'une femme esclave le sera à son tour, quel que soit le statut de son père." Ainsi, de génération en génération, ces enfants deviennent les serviteurs des descendants du maître. Ils sont leur propriété, à l'instar d'un animal ou d'un objet. Certes, ils sont assimilés culturellement - les Bellahs parlent tamacheq, la langue touareg ; les Harratines sont arabophones ; les Dyons connaissent le bambara... - et vivent auprès de leurs maîtres, mais ils n'ont aucun droit. "L'esclave ne possède rien, n'hérite de rien, reprend Intamat ag Ikadewan, le "sauveur" de Bellahs. Il ne peut pas se marier librement et ses enfants peuvent lui être pris à tout moment." Il y a aussi les brimades, les humiliations, les mauvais traitements. Sans compter les coups, parfois mortels, le droit de cuissage et les viols. Face à cette réalité insoutenable, Intamat, le "Spartacus" touareg, a sonné, en lien avec Temedt, l'heure de la révolte des esclaves. Une fronde encore balbutiante, mais qui commence à rallier des partisans. Créée en 2006 par des militants et des notables originaires du Nord malien, l'association est à la pointe du combat, revendiquant aujourd'hui 38 000 membres. Dans ses antennes ouvertes à Gao, Kidal, Mopti, Ségou ou Sikasso, des correspondants locaux mènent des campagnes de sensibilisation auprès des esclaves, mais également des chefs traditionnels de différentes ethnies. Une tâche ardue. "Nous avons mis deux ans avant de simplement faire admettre aux autorités publiques l'existence du problème", explique Ibrahim ag Idbaltanat, le président, qui reçoit au siège de l'association, à Magnambougou, un quartier populaire de Bamako. "Nous devons aussi être prudents pour ne pas éveiller la suspicion des maîtres. Car le plus compliqué reste d'approcher les personnes réduites en esclavage."
En dépit de ces craintes, entre octobre 2011 et mars 2012, 22 personnes ont accepté de porter plainte auprès des tribunaux de Tombouctou, de Gao et de Menaka. Une première dans l'histoire du Mali. Leur demande, jugée recevable par la justice, a été soutenue par Temedt et des avocats locaux. Chaque dossier dont L'Express a eu connaissance révèle une vie bafouée, une litanie de souffrances venues d'un autre âge...
Dans un document très complet édité en 2007 par Abdoulaye Macko et la Coopération Allemande sous le titre "Etude de la communauté Bellah de Gourmah Rharous" ( région au sud-est de Tombouctou, l'auteur donne les éléments suivants :
"On peut dire sans exagération que les Kel Tamacheq représentent près de 80% de la population dont 55% sont des Bellahs ou Kel Tamacheq noirs.
-Présentation des Bellahs
L’histoire des Bellahs est l’une des plus méconnues du fait de l’absence d’écrits spécifiques. Dans les ouvrages consacrés aux Tamacheq et aux Touareg les Bellahs sont toujours dépeints comme des esclaves des Touareg. Bien que fondée sur des faits établis, cette affirmation n’est pas toujours vérifiée. Par le passé, en milieu Tamacheq, l’esclave ou « Akli » est la propriété de son maître. Ce dernier a le droit de vie ou de mort sur lui. Il est taillable et corvéable à merci. Il peut être vendu à volonté par son maître. Il a le droit de posséder des biens. Une fois mort, les biens de l’esclave reviennent non pas à sa descendance mais à son maître. L’esclave s’occupe des travaux domestiques, du gardiennage des troupeaux. L’esclave femme peut aussi allaiter les enfants de son maître, ce qui crée des liens de fraternité entre les enfants de la femme et ceux du maître. La femme esclave est souvent une concubine.
Les Bellahs sont aujourd’hui organisés en fractions ou villages issus de l’éclatement des tribus.
Les différentes tribus sont :
- Les tribus des Touareg guerriers
- Les tribus des Touareg vassaux
- Les tribus du clergé musulman ou tribus marabouliques
A ces tribus Kel Tamacheq on peut ajouter les deux groupes Kounta d’origine maure .
Les critères de répartition sociologique de la communauté Bellah sont très variés. Aussi pour la compréhension du texte nous avons choisi de repartir les Bellahs en 3 groupes : les Bellahs libres, les Bellahs affranchis et les Bellahs esclaves.
1-Les Bellahs libres. [...]
2-Les Bellahs Affranchis : Le statut d’affranchis s’acquiert de plusieurs manières :
- religieuse : certains marabouts Touareg affranchissent des esclaves pour se conformer aux règles et préceptes de l’islam,
- politique : les chefs des tribus ou de fractions affranchissent des esclaves et leur confèrent ainsi un rang supérieur à leurs frères. Ces affranchis seront chargés de la gestion des biens et intérêts de leurs chefs (contrôle des troupeaux et des champs, récupération des impôts). Fidèles et redoutables à la tâche, ces hommes de paille sont craints par les esclaves et les métayers.
3-Les Bellahs esclaves :
Chaque fraction Touareg possède ses esclaves. Certains Bellahs libres ont eux-mêmes des esclaves. L’esclavage par ascendance fait que même émancipé l’ancien esclave continue à porter le nom de la fraction de son maître. Ainsi le statut d’esclave se perpétue de génération en génération bien que cela ne correspond à aucune réalité aujourd’hui. Aussi nous pouvons répartir les esclaves en deux groupes : les anciens esclaves et les esclaves.
3-1-Les anciens esclaves
Les Diambouratanes usités surtout à Menaka pour désigner les habitants Bellahs des quartiers de liberté créés par les colons français qu’on trouve dans tous les chefs lieu de cercle du Nord du Mali. A Rharous il existe un quartier nommé « diambourou » : il s’agit d’esclaves des Imghads (vassaux) qui ont été affranchis par les Français. Ce sont les premiers habitants de la ville.
Les Bellahs esclaves qui se sont émancipés d’eux-mêmes sont nombreux.
On a :
- des Bellahs qui ont créé des hameaux de culture ou qui ont profité de hameaux de culture créés pour eux par leurs maîtres pour s’émanciper. Le hameau de culture ou « Dabaye » est transformé par la suite en village dirigé par un Bellah. C’est le cas de plusieurs villages dont Dabaye Foumba et Koro Bellah dans la commune de Bambara Maoudé, de Djérel dans la commune de Fifo et de la ville de Gossi ;
- des esclaves qui se sont affranchis après la maîtrise du coran.
Il existe plusieurs fractions Bellahs créées par d’anciens esclaves. Plusieurs familles Bellahs ont abandonné la fraction de leur maître pour s’installer dans des villes et des villages, ce qui explique la croissance rapide des villes commeGossi, Bambara Maoudé, Rharous.
3-2-Les Bellahs esclaves
Dans la plupart des campements Imochagh (guerriers), des Inesleman (clergé musulman) et des Imghad (vassaux) nous avons aujourd’hui encore des Bellahs esclaves. Dans les campements, on reconnaît leur présence par leurs petites huttes situées à la périphérie. Ces esclaves généralement démunis dépendent entièrement de leurs maîtres. Ils s’occupent des travaux domestiques et des animaux. Lors du mariage de la fille du maître, celle-ci est accompagnée de jeunes esclaves filles et garçons qui se mettent à son service. Le ou la jeune esclave peut être affecté selon les besoins au fils ou à un parent du maître. Ces esclaves qu’ils soient esclaves de tente (Eklane-n-han) ou esclaves de dune (Eklane-n-edjef) font partie intégrante de la famille du maître. Ce sont des biens qui sont transmis par héritage. Leur sort est le plus préoccupant. Au moment où le cercle de l’esclavage se rétrécit, les maîtres veillent sur ceux qui leur restent fidèles. Il existe dans le Gourma de nombreux esclaves qui vivent indépendamment du maître mais qui restent toujours soumis à sa volonté. Ils demeurent à la fois esclaves et tributaires."
Sources et liens :
http://www.brest.fr/uploads/tx_pmpresse/CP_Quinquaud.pdf
http://www.quimper.co/docs/itinerairesafricains.pdf
Mont-de-Marsan :file:///C:/Users/jean-yves/Downloads/Dossier%20presse%20expo%20Anna%20Quinquaud.pdf
La Rochelle : http://www.alienor.org/musees/var/storage/original/application/4bf9be30a0d3c2515f55dcbbc5ed5ca9.pdf
Roger Botte, "Les habits neufs de l'esclavage", Cahiers d'études africaines, 2005 pp.651-666.