Lieu : sablières de Bodonou.
Date : 15 septembre 2011
La chenille de Phalera bucephala (Linnaeus, 1758) la Bucéphale, la Lunule, le Porte-écu jaune.
C'est Linné qui décrit ce papillon dans la dixième édition du Systema Naturae, page 508 n° 61 sous le protonyme de Phalaena Noctua bucephala et avec la description de la chenille que voici : "larva pilosa nigra annulis lineisque luteis", chenille velue noire avec des anneaux et des lignes jaunes, et il donne comme plante-hôte le tilleul, le chêne, le saule et l'aulne.
Il donne en référence Lister, Mérian, Albin, Frisch, de Geer, Roesel, Wilks, mais en premier le plus ancien, Jan Goedart (1617-1668) le peintre et naturaliste hollandais qui décrit cette espèce dans ses Métamorphoses de 1662. C'est lui qui l'aurait nommé "le Porte-écu jaune", ou, plus exactement et selon Engramelle, "C'est la forme et la couleur de cette tache ( jaune de l'aile) qui a fait donner à ces phalènes en Hollande et en Allemagne le nom de Porte-écusson et de Coin jaune".
Le nom vernaculaire de La Lunule a été donné par Étienne-Louis Geoffroy en 1662 dans son Histoire abrégée des insectes qui se trouvent dans les environs de Paris, tome 2, page 123 n° 28. Il écrit : "ses ailes sont d'un gris de perle cendré [...] une grande tache jaune marbrée ovale en forme de lunule qui termine le bout de l'aile."
Le nom est repris par Charles de Geer dans Mémoires pour servir à l'histoire des insectes,(1752-1778) I, p. 317 sous la forme de Phalène lunule.
Le R.P Jacques Louis Engramelle reprend aussi ce zoonyme en 1786 dans Papillons d'Europe vol.4, p. 325, pl 185 n° 240. Voici sa description des moeurs de la chenille :
" On trouve ordinairement les oeufs de ces insectes au milieu de juillet sur le revers des feuilles des différents arbres qui servent de nourriture aux chenilles. Ils sont d'un blanc bleuâtre avec un point noir au milieu, et dix jours environ suffisent pour faire éclore lesjeunes chenilles. Elles ne dévorent point leurs coquilles comme beaucoup d'autres espèces ; mais dès qu'elles voient le jour elles se rassemblent sur les feuilles et en mangent la superficie en se tenant trés prés les unes des autres ; aussitôt qu'elles sont rassasiées, elles se mettent par tas les unes sur les autres. Après leur première mue, qui arrive au bout de huit jours environ, elles ne se contentent plus du parenchyme des feuilles, mais les rongent par les bords comme les autres chenilles. elles ont atteint toute leur croissance à la fin d'août. [...] Leur société ne dure que jusqu'à leur croissance parfaite." L'apparition du chevron jaune signe le terme de leur vie grégaire et l'acquisition de leur autonomie.
Jean-Baptiste Godart le nomme Bombyx bucéphale dans Histoire Naturelle des Lépidoptères et Papillons de France, vol. 4, p. 236 n° 66 pl 22 fig. 1 :
Boisduval, Rambur et Graslin utilise le nom scientifique de Pygaera bucephala dans leur traité sur les chenilles, Collections iconographiques et historiques des chenilles vol. 1, pl 17 fig 1 et 2.
Ce cliché montre la chenille dans une attitude qui lui est familière. Lisons encore Engramelle (ouvrage cité) : " Elles sont remarquables par l'attitude qu'elles prennent dans l'état de repos : elles tiennent alors le derrière élevé, et la dernière paire de pattes forme une espèce de queue fourchue. De Geer remarque qu'elles font peu usage de ces pattes en marchant, et que l'extrémité de leur corps est presque toujours relevé. Elles filent beaucoup, et tapissent de soie tous les endroits qu'elles parcourent ".
Un autre aspect remarquable est le chevron jaune de leur tête :
Iconographie :
Jan Goedart, Metamorphosis,p. 213, n° 95 : version numérisée de l'Université de Strasbourg, éditée à Londres en 1685 et complétée par Lister :
J.A Boisduval, P. Rambur, A.Graslin, Collections...chenilles, planche 17. (1832) (source : Google books) :
Le nom scientifique de genre Phalera Hübner, 1819 vient du grec Phaleros, "tacheté de blanc".
L'épithète bucephala attribué par Linné vient du grec boukephalos, "tête de boeuf", ce qui me paraît inspiré par la forme de la tête de l'imago, même si Bucéphale est aussi le nom fameux du cheval d'Alexandre le Grand.