Mes Izidors.
Izidor en breton (sant Izidor, labourer), Isidore en pays gallo, Isidoro Labrador en Espagne, Isidro en Catalogne, Isidor von Madrid en Allemagne, Isidoro l'agricoltore en Italie, Isidorus matritensis pour le Vatican, Isidre el Llaurador en catalan, Isidro, o Lavrador en portuguais, Izidor Oracz en Pologne, Isidhoros en Grèce, les statues des Isidores sont partout. Patron des paysans, on en recense le culte en Bretagne selon Wikipédia dans 33 églises et chapelles du Morbihan, 17 du Finistère, 8 des Côtes d' Armor, 3 en Loire-Atlantique et une seulement en Ille-et-Vilaine.
Izidor ou Isidore, cela sonne comme Théodore, Dorothée, Dorian, Dorine, Pandore, issus du grec δωρον, dôron, "don" et signifiant pour les premiers "don de dieu", et pour le dernier "tous les dons".
Pour l'origine du prénom Isidore, il nous faudrait demander au plus savant expert en étymologie, à l'un de ses pionniers, à l'auteur de l'ouvrage princeps de la discipline, l'Etymologiae de 630 de notre ère, au digne évêque de Séville, j'ai nommé ... saint Isidore ! Mais non pas Isidore le laboureur (1082-1130), qui est de Madrid, mais Isidore de Séville (560 ou 570-636), dont la science étymologique éclaira comme un phare tout le Moyen-Âge. Isidore se pencha-t-il sur l'origine de son nom, ou préféra-t-il planer une ignorance prudente sur ses origines, je l'ignore ; car comment interroger une base de donnée sur l'étymologie d'isidore dans l'Étymologie d'Isidore ?
Mais le Professeur Achille-Cléophas Lavieb, autre puits sans fond de la science, connaît la réponse : isidore vient de l'association du radical -dôron avec le nom de la déesse égyptienne Isis : Izidor, c'est "le don d'Isis", et comme le culte d'Isis fut très répandu jusqu'au IVe siècle, Isis étant alors La déesse, la Mère primordiale, Isis lactans prodiguant à tous le lait originel de la vie, on peut comprendre Isidore comme la forme parèdre de Théodore. Très fréquent dans les premiers siècles de la chrétienté, il se répand ensuite en Italie et en Espagne, où Saint Isidore de Séville lui assura un regain de popularité. Le saint étymologiste ayant oeuvré pour faire bénéficier les juifs espagnols de la conversion au christianisme, les petits enfants des cristaos novos furent, par reconnaissance, baptisés Isidore. Le prénom fut aussi fréquent en France, jusqu'aux années 1910.
Saint Isidore le laboureur est bien différent de son illustre et éruditissime prédécesseur, et je l'imagine souvent comme notre Salaun ar Fol du Folgoët ; c'était un ouvrier agricole très assidu à la prière, beaucoup trop selon l'avis de son patron Juan de Vargas qui le suspectait de faire de chaque jour des dimanches; mais c'est que les anges passaient la charrue à sa place.
Les isidore-de-séville à la petite semaine penseront que son qualificatif espagnol de "Labrador" est issu aussi du grec -dorôn, "don", mais non : le terme signifie en espagnol "laboureur, agriculteur", (mais aussi "propriétaire terrien"). La province canadienne du même nom aurait été nommée Lavrador (comme le Groenland découvert auparavant) par le portuguais Joao Fernandes Lavrador, "Jean Fernand le propriétaire terrien", et la race de chien aurait hérité du nom de la province, qui est aussi celle de Terre-Neuve.
L'amusant, avec les statues de sant Izidor, c'est le costume ; car il nous renseigne sur les habits portés par les paysans autochtones, qui sont, jusqu'à la Révolution, les mêmes pour toute la France. Je recopie ici ce que l'abbé Castel en a écrit sur son site Chemins de bretagne :http://chemins-bretagne.com/art/index.php?art=ypc_st_isidore
"Jusqu'au début du 18e siècle il n'y a pas de particularisme breton: le justaucorps est court et boutonné du haut en bas, la culotte est bouffante, la chevelure n'est ni longue ni courte (voir la statue du 17e siècle de l'église Sainte-Tréphine de Pontivy). A partir de 1675, sous l'influence de Louis XIV, le justaucorps se portera long et la culotte serrée. Au début du 18e siècle, on voit apparaître une tendance nouvelle: à la place du justaucorps on porte une veste et un gilet .Les premiers costumes dits "bretons" apparaissent vers 1800., Il n'y a plus de justaucorps mais une veste et un gilet, le chapeau est petit, les cheveux sont longs .C'est à cette époque que le costume commence à se diversifier, chaque région adopte le sien: bragou braz ou bragou berr, veste plus ou moins ample, gilets croisés ou non."
Bréles (Finistère)
Logonna-Daoulas (Finistère).
Saint-Mériadec , Stival (Morbihan)
Saint-Nicodème en Pluméliau (Morbihan).
Chapelle N.D de Quelhuit à Melrand (Morbihan).
église de Bieuzy-les-Eaux (Morbihan).
Eglise de Saint-Thuriau (Morbihan)
Guern, église paroissiale (Morbihan).
Sainte-Tréphine (Morbihan)
(Mon préféré)
Comparaison avec les costumes présentés au Musée de la fraise et du Patrimoine de Plougastel.
J'ai saisi l'occasion d'une visite à ce musée pour regarder les costumes des plougastelois, et notamment les guêtres : on retrouve des détails très proches des statues anciennes :