Zoonymie (étude du nom) du papillon l'Azuré de la luzerne Leptotes pirithous.
La zoonymie (du grec ζῷον, zôon, animal et ónoma, ὄνομα, nom) est la science diachronique qui étudie les noms d'animaux, ou zoonymes. Elle se propose de rechercher leur signification, leur étymologie, leur évolution et leur impact sur les sociétés (biohistoire). Avec l'anthroponymie (étude des noms de personnes), et la toponymie (étude des noms de lieux) elle appartient à l'onomastique (étude des noms propres).
Elle se distingue donc de la simple étymologie, recherche du « vrai sens », de l'origine formelle et sémantique d'une unité lexicale du nom.
Résumé.
— Leptotes Scudder, 1876. Du grec λεπτός, leptós signifiant "délicat, mince". Dans sa description originale, Scudder qualifie les ailes de "very delicate", les antennes de "exceedingly slender", (extrêmement minces) les palpes et les pattes de "slender". Il s'agit réellement de l'aspect morphologique remarquable de cette espèce, qui a incité Scudder à traduire "slender" par leptos. Parmi les autres noms de genre de lépidoptères de Scudder, Leptotes forme une série rimée avec Phaedrotes et Philotes.
— pirithous, Linnaeus, 1767. Selon la mythologie, Pirithous fils d'Ixion, roi des Lapithes est l'ami de Thesée, avec qui selon Hyginus il participa à l'expédition des Argonautes. En 1758, Linné avait donné à ses Barbari (espèces exotiques) des noms d'argonautes ; et parmi ceux-ci figurait Pinthous, version fautive de Pirithous, les lettres -ir- passant facilement pour un-n-. Mais dans son Systema Naturae de 1767, la sixième Phalange des Barbari disparaît ; les espèces qui la composaient sont supprimées, ou bien sont replacées dans d'autres phalanges (voir P. idas). Pinthous se retrouve dans celle des Plebejus, sous la forme rectifiée de pirithous. Mais lorsqu'en 1790 Gmelin publia la 13ème édition du Systema Naturae, il changea le nom du papilio pirithous pour celui de papilio Barbarus, avec le même numéro 235 et la même description. L'espèce linnéenne fut comme escamotée, et son nom ne fut plus utilisé juqu'à la seconde moitié du XXe siècle. Auparavant, le nom utilisé était Tarucus (ou Lycaena, ou Cupido, ou Syntarucus) telicanus.
— synonyme papilio telicanus Lang, 1789 : cette espèce a été décrite par Heinrich Gottlob Lang, diamantaire d'Augsburg, mécène de Jacob Hübner, et possesseur d'une collection de papillon dont il publié le Catalogue en 1782 puis en 1789. Le nom telicanus viendrait du nom latin du fleuve Telis dont l'embouchure, si on l'identifie au Têt, se trouve à Canet-en-Roussillon. Lang signale effectivement que son spécimen provenait du sud de la France.
— Les noms vernaculaires furent "Le Polyommate telicanus" (Latreille, 1819), puis, en 1986, "L'Azuré de la Luzerne" créé par Gérard Luquet. "Azuré", commun à 62 des 73 Polyommatinae français, souligne la couleur bleu-azur des mâles (bleu-violet pour L. pirithous), alors que la "Luzerne" est le Genre d'une des nombreuses Fabacées dont se nourrit la chenille, Medicago sativa. En 2008, Leraut a employé le nom "L'Azuré de Lang". Les anglo-saxons parlent du "Lang's Short-tailed Blue" .
1. Famille et sous-famille.
a) Famille des Lycaenidae, William Elford Leach, 1815. Les Lycénides ou Lycènes.
Leach, William Elford, 1790-1836 "Insecta" pp. 329-336."Entomology". pp 646-747 in D. Brewster éditeur, Brewster's Encyclopaedia Edinburgh, [Edinburgh, volume 9, 1, 04/1815 pp. 57-172 : selon Sedborn 1937] [Philadelphia, E. Parker,1816? selon BHL Library] page 718. [ Article publié anonymement et attribué à Leach, qui avait annoté son propre manuscrit]
La famille Lycaenidae tient son nom du genre Lycaena de Fabricius (1807). Elle comprend les Blues ou Azurés, les Coppers ou Cuivrés et les Hairstreaks ou Thécla, et nos Argus :
- Sous-famille des Theclinae Butler, 1869 : [Thiéclines : Théclas ou Thècles et Faux-Cuivrés].
- Sous-famille des Lycaeninae [Leach, 1815] : [Lycénines : Cuivrés].
- Sous-famille des Polyommatinae Swainson, 1827 : [Polyommatines : Azurés, Argus et Sablés].
b) Sous-famille des Polyommatinae Swainson, 1827.
Elle tient son nom du genre Polyommatus créé par Latreille en 1804; "Tableau méthodique des Insectes" in Nouveau Dictionnaire d'Histoire naturelle appliqué aux arts, principalement à l'Agriculture et à l'Économie rurale et domestique, par une Société de naturalistes et d'agriculteurs ; avec des figures des trois Règnes de la Nature, Paris : Deterville, an XII [1804] 24 (6) p. 185 et 200, espèce-type: Papilio icarus Rottemburg.
Polyommatus vient du grec polus "beaucoup", et omma, ommatos, "œil" : c'est un qualificatif du géant Argos qui disposait de cent yeux, dont cinquante étaient toujours ouverts. C'est lui que la jalouse Héra envoya surveiller Io, transformée en génisse après ses amours avec Zeus.
Ce nom est en rapport avec les nombreux ocelles des ailes des papillons bleus.
Cette sous-famille contient, en France, 18 genres :
- Leptotes Scudder, 1876
- Lampides Hübner, [1819]
- Cacyreus Butler, 1897
- Cupido Schrank, 1801
- Celastrina Tutt, 1906
- Maculinea Eecke, 1915
- Pseudophilotes Beuret, 1958
- Scolitantides Hübner, [1819]
- Iolana Bethune-Baker, 1914
- Glaucopsyche Scudder, 1872
- Plebejus Kluk, 1780
- Aricia [Reichenbach], 1817
- Plebejides Sauter, 1968
- Eumedonia Forster, 1938
- Cyaniris Dalman, 1816
- Agriades Hübner, [1819]
- Lysandra Hemming, 1933
- Polyommatus Latreille, 1804.
2. Nom de genre : Leptotes, Scudder, 1870.
a) Description originale :
Leptotes Samuel Hubbard Scudder 1876 "Synonymic list of the butterflies of North America, North of Mexico". Part.2, Rurales. Bulletin of the Buffalo Society of Natural Science, Chicago. 3 page 124
— Description : je surligne en gras les indices concernant le nom Leptotes :
A group of very delicate winged, tropical butterflies, whose wings are completely covered with markings ; allied to the tailed Lampides. The antennae are exceedingly slender, but have a large, elongated, subcylindrical club, long and slender palpi with terminal joint longer than in our other genera, the fore wings proportionally long, though not to so great an extent as in Brephydium. The cell of the fore wings is more than half as long as the wing ; first superior subcostal nervule arising somewhat beyond the middle of the wing. Legs very slender and considerably shorter than usual ; fore and middle tibiae of equal lenght and four-fifths as longs as the hind tibiae.
Traduction : Un groupe de papillons tropicaux aux ailes très délicates, dont les ailes sont complètement couvert par des marques ; alliée aux Lampides qui portent une queue. Les antennes sont extrêmement minces, mais ont une grande extrémité allongée et sub-cylindrique , et des palpes longs et minces avec un article terminal plus long que dans nos autres genres, les ailes antérieures proportionnellement longues, mais pas dans une si grande mesure que chez Brephydium. La cellule des ailes antérieures est supérieure à la moitié de l'aile; la première nervure sous-costale supérieure dépassant peu le milieu de l'aile. Pattes très minces et considérablement plus courtes que d'habitude; tibias antérieurs et médians de longueur égale, et atteignant les quatre cinquièmes de la longueur des tibias postérieurs.
— Type spécifique: désigné par Scudder 1876 : Lycaena theonus Lucas 1857 in Sagra, Hist. fis. pol. nat. Cuba : 262, pl.16, figs 8-8b
b) caractéristiques. Eliot, 1973, Bull. Br. Mus. nat. Hist. (Ent.) 28 (6) : 446;
- Ailes antérieures à 11 veines et 12 espaces libres.
- Ailes postérieures caudées.
- Androconies « battledore » (en raquette) de forme ordinaire.
- Yeux et paples velus
- Genitalia cf.
- Extension holotropicale et à la limite de la région holartique.
c) Synonymie (Funet).
— Syntarucus Butler, [1901]; Proc. zool. Soc. Lond. 1900 (4) : 929, TS: Papilio telicanus Lang
= ; Vane-Wright & de Jong, 2003, Zool. Verh. Leiden 343: 155;
Origine du nom : Emmet, 1991 :
sun, with, allied to ; the genus Tarucus Moore, the blue pierrots", a mainly Indo-Malaysian genus of the lycaenidae : signifying affinity.
Traduction : [du grec] sun, "avec, réuni avec". Le genre Tarucus Moore, les "Blues Pierrots", un genre principalement Indo-malaisien de Lycaenidae. Témoignant de l'affinité.
— Syntarucoides Kaye, 1904; Trans. ent. Soc. Lond. 1904 (2) : 190, TS: Papilio cassius Cramer
— Langia Tutt, 1906; (preocc. Moore, 1872). (de Heinrich Gottlob Lang).
Origine et signification du nom Leptotes .
— A.M. Emmet (1991) : non traité.
— Hans A. Hürter (1998) : non traité.
— Perrein & al. (2012) page 216 :
"Étymologie : du grec leptotês, "minceur, finesse".
— Arrizabalaga & al. 2013 :
" Del grec: prim "
Discussion.
L'explication la plus simple de ce nom créé par Scudder est de faire appel au grec ancien λεπτός, leptós (« mince, ténu, délicat »). Dans sa description originale, Scudder qualifie les ailes de "very delicate", les antennes de "exceedingly slender", (extrêmement minces) les palpes et les pattes de "slender". Il s'agit réellement de l'aspect morphologique remarquable de cette espèce et il est parfaitement crédible que Scudder ait traduit "slender" par leptos.
Le Wiktionnaire cite 88 termes de botanique ou de science utilisant le composé lepto- dans ce sens de "mince". En Botanique, John Lindley a nommé en 1833 Leptotes un genre d'Orchidées Epidendroideae, en raison pense-t-on de l'aspect délicat de ces plantes.
Les autres noms de genre de lépidoptères de Scudder donnent une idée de son style : Speyeriaen 1872, puis en 1876 : Callypsyche, Calycopis, Eupsyche, Hyporautis, Brephidium, Leptotes, Phaedrotes, Philotes, Tharsalea, Chalceria, Gaeides, Epidemia.
Lors de mon analyse du nom Philotes, j'avais remarqué la série rimée Leptotes/Phaedrotes/Philotes. Il est possible qu'elle explique partiellement que Scudder ait ajouté ce suffixe -tes qui relève, sinon, de l'arbitraire. On notera aussi que cette espèce est rapprochée par l'auteur du genre Lampides (par la présence d'une queue) ce qui justifie aussi un effet de rime en -es.
Il reste à remarquer que le nom Leptote trouve une autre utilisation dans l'étude stylistique et esthétique des hymnes hellénistiques, où on oppose les leptotes et les semnotes : les premiers relève d'un style subtile et de finesse, alors que les seconds témoignent d'un style grand et majestueux. Ainsi, É. Prioux annonçait la parution en 2007 d'un article consacré à «Semnotes et leptotes, idéalisme et réalisme : des notions au service de l’histoire des styles».
Et enfin à indiquer qu'un auteur a fini par donner à un genre de papillons le nom de Semniotes : il s'agit de Diakonoff en 1973 pour des Tortricidae.
3. Nom d'espèce : Leptotes pirithous (Linnaeus, 1767).
a) Description originale
Papilio pirithous Linnaeus, C. 1767. Systema naturæ, Tom. I. Pars II. Editio duodecima reformata. Holmiæ. (Salvius). 533-1327, page 790.
— Description :
235 P[apilio] P[lebejus] alis ecaudatis caerulescentibus ; subtus undique fusco maculatis : ocellis posticis duobus
— habitat Algiriae. Brünniche*.
Minor Algiolo Alae fusco-caerulescentes ; subtus undique punctis fuscis fasciatis ; ad anum subtus ocelli duo caerulei.
* Brünniche est mentionné par Linné pour d'autres espèces algériennes comme n°269 P.P Oileus ou le n° 233 P.P. Philiasus. Morten Thrane Brunnich (30 Septembre 1737 - 19 septembre 1827) était un zoologiste danois et minéralogiste né à Copenhague, qui a contribué par ses observations d'insectes à l' Atlas d'Erik Pontoppidan (1763-1781). Après avoir été chargé de la collection d'histoire naturelle de Christian Fleischer, il s'est intéressé à l'ornithologie, et en 1764 il a publié Ornithologia Borealis, qui comprenait les détails de nombreux oiseaux scandinaves, dont certains étaient décrit pour la première fois. Brunnich correspondait avec de nombreux naturalistes étrangers, y compris Linné, Peter Simon Pallas et Thomas Pennant. Il a publié son Entomologia en 1764. Il a ensuite entrepris une longue tournée de l'Europe, en étudiant les poissons de la mer Méditerranée : il publia son Ichthyologia massiliensis sur le sujet en 1768. A son retour Brunnich a pris le poste de maître de conférences en histoire naturelle et de l'économie à l'Université de Copenhague. dans cette ville, il a créé un musée d'histoire naturelle et a écrit un manuel pour ses étudiants, le Zoologiae fundamenta. Le Guillemot de Brünnich est nommé d'après lui.
c) Localité-type et description.
—Localité-type : "in Algiriae" : Algérie
— Selon Dupont et al. 2013, cette espèce migratrice a une répartition sub-tropicale.
— Selon Wikipédia :
C'est un petit papillon de couleur violine tirant sur le bleu ardoisé chez le mâle, tirant sur le marron chez la femelle et possédant une queue en n2. Le revers est beige foncé zébré de lignes blanches et orné à l'aile postérieure de taches marginales orange centrées de noir à l'angle anal. Le dessin zébré des ailes de l'Azuré de la luzerne peut le faire confondre avec Lampides boeticus et Cacyreus marshalli. Il vole en plusieurs générations, de février à octobre. C'est un migrateur. Ses plantes hôtes sont de très nombreuses Fabacées et aussi entre autres des Indigofera, Vigna, Melilotus Crataegus, Quercus suber, Plumbago capensis, Medicago sativa, Trifolium alexandrinum, Arachis hypogaea, Lythrum, des Ulex, Calluna dont Calluna vulgaris, Lythrum salicaria, Onobrychis viciifolia, Melilotus alba.
Il est présent dans toute l'Afrique, et à Madagascar, dans la partie sud de l'Espagne, de la France, en Italie, dans les il,es et sur les côtes méditerranéennes, en Asie Mineure et dans l'Himalaya. En Europe il est migrateur sur le reste de l'Espagne, de l'Italie, les 2/3 sud-est de la France, en Suisse, dans le sud de l'Allemagne, et dans tous les Balkans. En France métropolitaine il serait présent dans les départements qui bordent la Méditerranée et en Corse et migrateur dans les 2/3 sud du pays. Son habitat est varié friches, cultures, jardins d'agrément.
d) Synonymes.
- Papilio pirithous Linnaeus, 1767
- Papilio telicanus Lang, 1789 : Le papilio telicanus a été décrit en 1789 par Heinrich Gottlob Lang[s] dans Verzeichniss seiner Schmetterlinge in Gegenden um Augsburg Kletts, page 47-48 n° 387-389.
- Syntarucus pirithous (Linnaeus, 1767)
- Syntarucus telicanus (Lang, 1789) Lang, H. G. 1789. Verzeichniss seiner Schmetterlinge in den Gegenden um Augsburg gesammelt : und nach dem Wiener systematischen Verzeichniss eingetheilt, mit den Linneischen, auch deutschen und französischen Namen, und Anführung derjenigen Werke, worinn sie mit Farben abgebildet sind. Augsburg. 226 pp. page 47.
e) Origine et histoire du nom pirithous.
Le nom a été peu étudié car il n'est employé que depuis 1947 ; auparavant, le nom utilisé était Tarucus (ou Lycaena, ou Cupido, ou Syntarucus) telicanus.
— Emmet (1991) page 149 :
"Pirithoüs, son of Ixion, King of Lapathae in Thessaly and bosom friend of theseus."
— Hans A. Hürter (1998) page 314-316.
Hürter ne donne pas ses conclusions, mais fait une recension des ouvrages mythologiques allemands (Rose, Roscher, Pauly) concernant Pirithoos, fils d'Ixion, roi des Lapithes, père de Polypoites et ami de Thésée
— Perrein & al (2012) page 216 :
"Étymologie : de Pirithoüs, fils de Jupiter ou d'Ixion, roi des Lapithes en Thessalie, ami intime de Thésée."
— Arrizabalaga & al. 2013 :
"Pirítous, fill d’Àrtemis i Ixió "
Discussion sur le nom pirithous.
On peut commencer par consulter l'encyclopédie Wikipédia :
"Dans la mythologie grecque, Pirithoos ou Pirithoüs (en grec ancien Πειρίθοος / Peiríthoos, Περίθοος / Períthoos ou Πειρίθους / Peiríthous), fils de Zeus selon Homère Iliade, chant XIV, 320 ou d'Ixion selon d'autres auteurs et de Dia, est roi des Lapithes. Il tente d'envahir l'Attique mais est repoussé par Thésée. Une franche amitié se noue ensuite entre les deux héros. Lors de son mariage avec Hippodamie, les centaures ivres, menés par Eurytion, enlèvent et abusent de la jeune épousée. Pirithoos leur fait la guerre, assisté par Thésée, et les vainc. L'épisode est conté par le prétendant Antinoos, comme illustration des méfaits du vin, dans l’Odyssée XXI, 195-305. On en trouve une autre version dans les Métamorphoses d'Ovide XII, 210 et suiv..
À la mort d'Hippodamie, Thésée enlève Hélène de Sparte avec l'aide de Pirithoos. Ce dernier quant à lui projette d'enlever Perséphone elle-même, épouse d'Hadès. Les deux amis descendent aux Enfers mais sont capturés par Hadès et entravés par un rocher. Héraclès parvient ensuite à délivrer Thésée, mais échoue à aider Pirithoos, qui reste à jamais scellé à la pierre."
fils d'ixion, roi des Lapithes et ami de Thesée
Puis, il faut rappeler que Pirithous est mentionné par Virgile dans l' Éneide VI, 390 : car on connaît l'importance de cet auteur pour les naturalistes de la fin du XVIIIe et notamment pour Linné : Nec uero Alciden me sum laetatus euntem accepisse lacu, nec Thesea Pirithoumque, dis quamquam geniti atque inuicti uiribus essent.
Mais il me paraît beaucoup plus important de constater que Pirithous appartient à la liste des Argonautes telle qu'elle est donnée par Hyginus dans ses Fabulae chapitre XIV . (Cela est mentionné au XVIIIe dans l' Abrégé de la mythologie universelle: ou, Dictionnaire de la fable de Fr. J. M. Noël p.76).
Theseus Aegei et Aethrae Pitthei filiae filius, a Troezene; alii aiunt ab Athenis.
Pirithous Ixionis filius, frater Centaurorum, Thessalus.
C'est bien de Pirithous fils d'Ixion qu'il s'agit, l'ami de Thésée qui fait aussi partie de l'équipage.
En 1758, Linné avait donné à ses Barbari (espèces exotiques orientales) des noms d'argonautes ; et parmi ceux-ci figurait Pinthous, version fautive de Pirithous, les lettres -ir- passant facilement pour un-n-. Mais dans son Systema Naturae de 1767, la sixième Phalange des Barbari disparaît ; les espèces qui la composaient sont supprimées, ou bien sont placées, comme Idas, dans la cinquième Phalange. C'est aussi dans cette Phalange des Plebejus que nous retrouvons Pinthous, sous la forme rectifiée de pirithous. Alors que dans le cas d'idas, l'ICZN avait été obligé de prononcer l'invalidation solennelle en séance plénière de "papilio idas Linnaeus 1758" au profit de "papilio idas Linnaeus, 1761", la coquille initiale a permis d'admettre la validité de papilio pirithous Linnaeus,1767 sans supprimer la validité du nom pinthous : ce nom sert à designer Moschoneura pinthous Linnaeus, 1758, une Piéride sud-américaine.
De 1788 à 1793, Gmelin publia la 13ème édition du Systema Naturae. Son Volume I est consacré aux Animaux, et les parties 4 et 5 de ce livre, parues en 1790, aux Insectes : mais à la page 2352 il change le nom du papilio pirithous au "profit" de celui de papilio Barbarus, avec le même numéro 235 et la même description P[apilio] [Plebejus] alis ecaudatis caerulescentibus ; subtus undique fusco maculatis : ocellis posticis duobus — Habitat Algiriae. Minor Algiolo.
Richard Irwin Vane-Wright suggère que Gmelin avait voulu préserver le nom du papilio pirithous d'"Amérique boréale" décrit par Fabricius 1775 : Fabricius, J. C. 1775. Systema entomologiae, page 483 n°179.
En 1826, Brongniart & al. décrivent un Papilio Pirithous aux ailes noires et venant de Cuba. En 1836, Boisduval et Guenée décrive un Papilio Pirithous Roger, aux ailes noires : cela prouverait que le pirithous de Linné n'est plus connu de naturalistes pourtant chevronnés.
En 1890, W.F. Kirby, dans son article Linnean Butterflies, le mentionne en écrivant :
253 Papilio pirithous. (Polyommatus) Not improbably the ♂ of P. philiasus n°251. It is papilio barbarus Gmel S.N p. 2352. (See Tr. Ent. Soc Lond. 1869 p. 360) and it is fully described by Godart as Polyommatus pirithous, Ent. meth. IX. p. 682.
.
Le nom synonyme telicanus Lang, 1789.
— Spannert (1888) page 21 :
"der Telier, die alten Telier wohnten am Flusse Telis, jetzt ruscino im französischen departement der Ost-Pyrenäen ; fliegt dort, wie überhaupt in Südeuropa, auch in Nordafrika und in Kleinasien"
— Spuler (1903-1908) page 59 :
"Bewohner von Telis, einer südfranz. Landschaft am gleichnam. Fluß, jetzt Ruscino ; oder von telos einer Sporadeninsel ?"
— Hans A. Hürter (1998) page 316-317 :
Deutung : Wenngleich das Vorkommen von S. pirithous L. 1767, den Lang 22 Jahre später, 1789, telicanus (Synonym) nannte, bis Kleinasien reicht, so hat ihn Lang wohl kaum nach der vergleichsweise kleinen, unbedeutenden Insel bei Rhodos benannt, sondern sicherlich nach der südfranzöchsischen landschaft um den Têt am Fuße der Ostpyrenäen.
Das adjektiv (Eigenschaftswort) canus -grau, alt war bei der Namensbildung sicher nicht beteiligt.
Traduction : "Interprétation: Ce fut 22 ans après la création du pirithous Linné, 1767 que Lang nomma son telicanus (synonyme), et bien qu'elle s'observe principalement en Asie Mineure, elle ne reçut pas ce nom de celui d'une petite île insignifiante près de Rhodes, mais certainement de celui d'un site du sud de la France aux environs de la Têt au pied des Pyrénées-Orientales.
L'adjectif (adjectif) canus -gris, n'intervient certainement pas dans cette dénomination."
Discussion sur telicanus.
a) L'auteur : Heinrich Gottlob Lang
Les éléments biographiques viennent de la publication de Friedrich Seidler Berichte des Naturwissenschaftlichen Vereins für Schwaben Vol. 110, 2006 :
Heinrich Gottlob Lang (1739-1809) est un diamantaire (Steinschneider) et orfèvre né et formé à Dresde et établi à Augsbourg, ville libre impériale où vivait aussi Jacob Hübner (1761-1826). Il a réuni une collection d'histoire naturelle, minéralogique et entomologique. Il n'eut pas le temps de publier la description de ses 1800 coléoptères, mais publia une première fois celle de sa collection de lépidoptères en 1782. Ce premier travail de 60 pages comporte 484 espèces récoltées aux environs d'Augsbourg. En 1789, il dédicaça à l'évêque de Constance Maximilien Christopher son catalogue de 230 pages riche de 500 espèces. Catalogue de Lépidoptères de sa collection, presque tous ramassés dans les environs d'Augsburg, et d'après le Catalogue systématique Viennois [Wiener Verzeichniss], avec les noms linnéens, allemands et français...avec 3 planches, in-8°. On remarque dans ce titre la référence au Wiener Verzeichniss de Denis et Schiffermüller, ce dernier étant devenu un ami d'Hübner qui en observa la collection. On remarque aussi la mention des noms en français, laissant supposer l'influence de l'Histoire des insectes de Geoffroy. Cet auteur n'étant pas cité ici, c'est sans-doute par le biais du Wiener Verzeichniss (où Geoffroy est très présent) que ces noms sont cités.
Les liens avec Hübner sont authentifiés par les références qu'en fait ce dernier naturaliste dans son Beiträgen zur Geschichte der Schmetterlinge : " de la collection de Mr Lang" ou bien "décrtit par Lang sous..." . Pourtant, le nom de Lang n'est pas cité dans la liste des contributeurs de la Sammlung europäischer Schmetterlinge. En 1977, Fisher écrivait que Lang était le plus fervent admirateur d'Hübner et un mécène important, car il possédait "une magnifique collection de minéraux, beaucoup d'oiseaux empaillés et même trois grandes boîtes sur le mur avec sa collection de papillons. Lang pouvait trouver seuls les noms de ses papillons, parce qu'il avait accès à la bibliothèque son étonnamment complète du Chevalier de Cobres". Le banquier Joseph Paul de Cobres, (1737 à Venise - 1825) avait une grande collection d'histoire naturelle et une bibliothèque scientifique importante à Augsbourg. Le catalogue de cette bibliothèque, spécialement imprimé en 1782, fait état de plusieurs milliers de périodiques et de livres avec notamment, concernant les papillons, les ouvrages de Denis & Schiffermüller, Esper, Merian, Rösel Rosenhof, et Kleemann. Un rapport de 1855 signale encore, après une vente partielle, 6500 livres.
Lang est l'auteur aujourd'hui d'une seule espèce, Melitaea diamina (Lang, 1789), la Mélitée noirâtre .
b) le nom telicanus.
Outre la graphie de son nom, semblable dans le nom vernaculaire allemand que dans le nom scientifique Papilio Telicanus, Tagfalter Telicanus, Lang ne fournit qu'un seul indice : il écrit Aus dem südlichen Frankreich." Du sud de la France". Cet indice est à peu près suffisant pour que, face aux hypothèses formulées par Hans Hürter, celle d'une référence au Telis flumen de Mela soit retenue. Pomponius Mela, le plus ancien géographe romain, né à Algésiras, a décrit dans sa Description de la Terre, II,5, le fleuve Telis, petit fleuve voisin du Tichis (tech) sur le territoire des Sordones, non loin de Ruscino (Strabon, Ptolémée). La cité latine de Ruscino fut le chef-lieu des Sordes et correspond actuellement à Château-Roussillon, près de Perpignan. Ce petit fleuve des Pyrénées-Orientales pourrait être la Têt, fleuve de 110 km qui traverse d'ouest en est le département des Pyrénées-orientales, arrose Perpignan et a son embouchure dans la Méditérranée à Canet-du-Roussillon.
Lang n'indique pas s'il a reçu ce spécimen d'un correspondant, ou s'il l'a capturé lors d'un séjour en France ; et il ne précise pas non plus si le lieu de la capture dans le Midi correspondait au Roussillon. L'explication est peut-être autre. Il a décrit cette espèce après avoir décrit le papilio boeticus, et il écrit : er ist kleiner, als der boeticus , "il est plus petit, que le boeticus". S'il a considéré, comme on le fait couramment, que -boeticus désigne le fleuve Bétique , le Guadalquivir d'Espagne, il a peut-être cherché un nom de fleuve aus dem südlichen Frankreich dans les descriptions de l'Antiquité et aurait trouvé ce Flumen Telis. Mais comment expliquer le passage de Telis à Telicanus ? Pourquoi n'avons-nous pas la forme Teliscanus ? La finale -canus est-elle à rapprocher de la forme indo-européenne -can "montagne" que l'on retrouve dans les noms des communes du Canigou et de Canet-du-Rousillon, à l'embouchure de la Têt ?
Jacob Hübner représenta le telicanus de Lang dans Sammlung europäischer Schmetterlinge Planche 74 n°371-372 (mâle) et Planche 108 n°553-554 (femelle).
Hübner en donne la description page 56 n° 45 sous le nom de Silberäugigerfalter (papillon ocellé et argenté) Papilio Telicanus avec la mention : Synonyme : Papilio telicanus Lang's.
II. Noms vernaculaires.
I. Les Noms français.
1. Polyommate telicanus Latreille et Godart 1819
Latreille et Godart Encyclopédie méthodique, Paris : Vve Agasse tome 9, page 655 n° 128.
Cet article permet de disposer de l'ensemble des références bibliographiques sur cette espèce, notamment par les auteurs germaniques, autrichiens ou suisses.
2. Polyommate Pirithoüs Latreille et Godart, 1819
Latreille et Godart Encyclopédie méthodique, Paris : Vve Agasse tome 9, page 682 n° 206
Les auteurs décrivent, en même temps que le Polyommate Telicanus, le Polyommate Pyrithoüs avec la référence correcte de Linné 1767 n°235 et la mention, qui concerne leur spécimen de collection, "De la Barbarie, par Mr le Pr. Desfontaines".
3. Polyommate Telicanus , Godart 1821,
Jean-Baptiste Godart, Histoire naturelle des lépidoptères ou papillons d'Europe, Paris : Crevot 1822 tome 2 page 172 planche V Diurnes XXII fig. 3-4 , peinte par Dumenil et gravée par Perrot fils.
Le nom Polyommate Telicanus est utilisé en 1833 dans le compte-rendu de l'Expédition de Morée (Péloponnèse).
4. La revue des noms vernaculaires par Gérard Luquet en 1986.
Dans la révision des noms vernaculaires français des rhopalocères parue dans la revue Alexanor en 1986, Gérard Christian Luquet crée comme nom principal pour Syntarucus pirithous "L'Azuré de la Luzerne", mais réfute "l'Argus courte-queue" cité par Rappaz et "le Petit Argus porte-queue"
Parmi les 73 Polymmatinae ou Polyommatines français nommés par Luquet, on compte outre le Collier-de-Corail, 62 Azurés, 7 Argus, et 14 Sablés, tous construits sur la structure habituelle à cet auteur, Nom de groupe + Plante-hôte ou Nom de groupe + adjectif géographique ou descriptif. Ainsi, il existe plus de 40 "Azuré + Plante-hôte".
Le terme "Azuré" souligne la couleur bleu-azur des mâles (bleu-violet pour L. pirithous), alors que la "Luzerne" est le Genre d'une des nombreuses Fabacées dont se nourrit la chenille, Medicago sativa.
Medicago signifie “de la région de Médie”, et sativus du latin signifiant “semé, cultivé”.
Quand à "luzerne", son étymologie vient du provençal moderne luzerno, ver luisant, du latin lucerna, lampe, parce que les graines de luzerne sont brillantes.
Le genre Medicago (les luzernes) regroupe de nombreuses espèces de plantes proches des trèfles, appartenant comme eux à la famille des Fabacées (ou Légumineuses). Ce sont des plantes annuelles ou vivaces, le plus souvent herbacées, à feuilles trifoliolées, dont plusieurs espèces sont cultivées comme plantes fourragères. La plus connue est la luzerne cultivée (Medicago sativa), mais on trouve, notamment en région méditerranéenne, beaucoup d'autres luzernes.
5. L'Azuré de Lang, Leraut, 2008.
Tom Tolman & Richard Lewington , trad. Leraut (2008) : "l'Azuré de Lang".
Mais ce nom est antérieur à cette publication puisqu'il est mentionné dans un numéro de 2001 de la revue Insectes de l'OPIE .
6. Noms vernaculaires contemporains :
Charles Oberthür utilise le terme de Lycaena telicanus dans ses Études de Lépidoptèrologie Comparée X (1915) page 375 sans faire appel à un nom vernaculaire.
— Luquet in Doux & Gibeaux 2007 : non décrit.
— Lafranchis, 2000 : "L'Azuré de la luzerne" .
— Perrein & al., 2012 : "Azuré de la Luzerne".
— Tom Tolman & Richard Lewington , trad. Leraut (2008) : "l'Azuré de Lang".
— Wikipédia : " Azuré de la luzerne ou Azuré de Lang".
III. Les noms vernaculaires dans d'autres pays.
- Lang's Short-tailed Blue en anglais* : le Bleu à queue courte de Lang.
- Kleiner Wanderbläuling en allemand :
- Klein tijgerblauwtje en néerlandais Petit Bleu migrateur
- Gris Estriada en espagnol : le Bleu strié.
- Blaveta estriada en catalan : le Bleu strié
- Modráčik južný
- Modrásek tažný
- Kratkorepi selac
- Trópusi boglárka
- Mavi Zebra
- Modrogończyk wędrowiec
- Piritoo en italien
- Голубянка пирифой en russe
*En Angleterre, le seul spécimen de cette espèce était un mâle capturé sur le bord d'un champ de trèfle à Bloxworth dans le Dorset, le 13 Juin 1938. Cette espèce est connue pour migrer et ce spécimen serait arrivé lors d'un afflux général d'espèces migrantes sur la côte sud de l'Angleterre. (UK Butterflies)
Langues celtiques :
1. langues gaéliques : irlandais (gaeilge) ; écossais (Gàidhlig ) ; mannois ( gaelg :île de Man).
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en irlandais
- en mannois.
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"" en gaélique écossais*
2. Langues brittoniques : breton (brezhoneg) ; cornique (kernevek); gallois (Welsh, cymraeg).
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pas encore de nom en breton ;
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" Glesyn cynffon fer Lang" en gallois.
*Liste des noms gaéliques écossais pour les plantes, les animaux et les champignons. Compilé par Emily Edwards, Agente des communications gaélique, à partir de diverses sources. http://www.nhm.ac.uk/research-curation/scientific-resources/biodiversity/uk-biodiversity/uk-species/checklists/NHMSYS0020791186/version1.html
Voir aussi :http://www.lepidoptera.pl/show.php?ID=70&country=FR
Bibliographie, liens et Sources.
— Funet : leptotes
— Inventaire national du patrimoine naturel (Muséum) : leptotes pirithous
— UK Butterflies : leptotes pirithous
— lepiforum : leptotes pirithous
— VANE-WRIGHT R. I. 1976 "The butterflies named by J. F. Gmelin (Lepidoptera : Rhopalocera)" Bulletin of the British Museum (National History) Entomology Vol. 32 London : 1976 17-65
http://archive.org/stream/bulletinofbritis32briti/bulletinofbritis32briti_djvu.txt