Les sculptures de pierre de l'église de Bodilis . I. Le portail intérieur (1570) du porche sud.
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Sur l'église de Bodilis, voir :
Les sablières de l'église de Bodilis. I. La scène des semailles et du labour (anonyme, 1567).
Les sablières de l'église de Bodilis. III. Le coté nord de la nef.
Les sablières de l'église de Bodilis. IV. Le coté sud de la nef. (Maître de Pleyben, 1567-1576).
Les entraits sculptés à engoulants (1567-1576) de la nef de l'église de Bodilis.
Les sculptures de l'église de Bodilis : la Déploration (Bois polychrome, XVIe siècle)
Les sculptures de l'église de Bodilis : les Fonts baptismaux (Roland Doré, XVIIe siècle).
Sur les porches du Léon réalisés par le même atelier (à mon avis celui des Prigent à Landerneau), voir :
- Le porche de l'église de Landivisiau VII. Le portail intérieur et son tympan (kersanton, Atelier des Prigent, 1554).
- Le porche sud et la porte sud de l'église Saint-Houardon de Landerneau. (vers 1560-1580)
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Ou plus généralement sur les porches de Basse-Bretagne, replacés dans l'ordre chronologique :
- La Collégiale Notre-Dame du Folgoët. III. Le Porche des Apôtres (vers 1423-1433) par le Grand Atelier ducal du Folgoët (1423-1509).
- L'église Saint-Salomon de La Martyre. I. L'Arc de Triomphe (vers 1520) et le Porche sud (vers 1450). Atelier du Maître du Folgoët.
- L'église Notre-Dame de Rumengol (29). III. Le porche sud (vers 1468). Atelier du Maître du Folgoët.
- L'enclos paroissial de Saint-Herbot en Plonévez-du-faou : l'extérieur du porche sud (1498-1509) par le second atelier du Folgoët.
- Le porche sud de Saint-Herbot : les Apôtres et le Credo apostolique. (1498-1509).
- Le Porche sud de Pencran (1553) par Bastien et Henry Prigent.
- L'église de Guipavas II. Le porche de 1563 : l'extérieur.
- L'église de Guipavas III : les Apôtres du porche nord (1563). par l'atelier Prigent
- L'abbaye de Daoulas : le Porche aux Apôtres (1560-1566)
- L'enclos paroissial de Brasparts. I. La Démone tentatrice du porche sud. (1592)
- Le porche de l'église de Saint-Houardon à Landerneau (1604).
- L'enclos paroissial de Dirinon X. Le porche sud (1618). Les apôtres et le Christ (après 1664).
- Le porche sud de l'église de Bodilis (1570 et 1601) par le Maître de Plougastel, (ou par l'atelier Prigent).
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PRÉSENTATION GÉNÉRALE.
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Nous devons à René Couffon la principale étude de l'église de Bodilis, parue dans le Bulletin Monumental en 1958.
"Dans le troisième quart du xvie siècle, en 1564, débuta la construction de l'édifice que nous voyons actuellement ; mais, à peine était-il achevé, que l'on commença à l'agrandir en élevant en 1574 sur son flanc sud une vaste chapelle. Quelques années plus tard, en 1583, les tréviens, désirant construire, comme leurs voisins de Landivisiau, un porche monumental, firent à ce sujet accord avec René de Kergorlay, seigneur de Crechgaribot et du Plessix, dont les armes timbraient le porche à démolir ; le nouveau fut terminé en 1601.
Le porche qui fait suite, construit de 1586 à 1601, est, au contraire, entièrement classique. C'est, avec ceux de Saint-Thégonnec et de Pleyben, le seul qui ait ses parois latérales extérieures sculptées. Ici, des colonnes ioniques posées sur un stylobate supportent un entablement surmonté d'un attique et d'une frise. L'arcade extérieure du porche a sa voussure interne reposant sur deux de ces colonnes cannelées et baguées, imaginées par Philibert Delorme, et sa clef est décorée d'une magnifique feuille d'acanthe. Deux colonnes extérieures supportent l'entablement portant la date de 1601, au-dessus duquel s'élève le gable décoré d'une niche qui abrite, sous un dais un peu lourd, une statue en kersanton de vierge mère. Les contreforts d'angle, un peu massifs, abritent les deux statues, également en kersanton, d'un groupe de l'Annonciation et un Sauveur du monde.
A l'intérieur, voûté sur arcs ogives avec liernes, court, sous les statues des apôtres, une frise comportant en fort relief une série de cartouches séparés de cariatides empruntées aux ouvrages de Du Cerceau, Le Pautre et Dorigny. La porte unique donnant accès à l'église est celle du porche primitif. En kersanton, elle porte la date de 1570, est naturellement inspirée de celle de Landivisiau, et due, sans nul doute, au même atelier landernéen. Comme dans cette dernière, son archivolte, amortie par un galon plat en accolade, est décorée de statuettes de saints, mais d'un canon supérieur à celui du modèle. La porte en bois, datée de 1669, fut exécutée par Christophe Le Merdy, maître menuisier ; elle a été restaurée en 1906."
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Depuis cette date, une contribution majeure fut la thèse d'Emmanuelle Le Seac'h sur les Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne (publiée en 2004). Pour le porche sud de Bodilis, elle y attribue le portail intérieur (0), l'ange de l'Annonciation de la niche gauche du contrefort droit (1) et la Vierge à l'Enfant de la niche centrale du fronton (2) à celui qu'elle nomme le Maître de Plougastel, actif entre 1570 et 1621. Le Christ Sauveur du contrefort gauche (3) est attribué au "Valet du Maître de Plougastel", une deuxième main de cet atelier. Roland Doré actif entre 1618 et 1663 dans son atelier de Landerneau, a sculpté la Vierge de l'Annonciation du contrefort gauche (4), le Christ Sauveur du fronton intérieur (5) (et les statues des Fonts baptismaux). Enfin, un "autre sculpteur influencé par la Seconde Renaissance" est l'auteur de la série des douze Apôtres de l'intérieur du porche, vers 1601.
En rouge sur mon cliché, le cartouche du chronogramme 1601.
Je débuterai, pour suivre l'ordre chronologique, par le portail intérieur du porche, encore très marqué par les réalisations de l'atelier des frères Prigent (1527-1577) au porche nord de Guipavas (1563), au porche sud de Pencran (1553), au porche sud de Landivisiau (1554) ou à Saint-Houardon de Landerneau. Au terme de cette étude, l'attribution au Maître de Plougastel plutôt qu'à l'atelier des Prigent me semble discutable.
Mon deuxième article décrira les parois ouest et est du porche sud, qui ne sont pas décrites ni attribuées directement par Le Seac'h, mais qui sont sans doute de 1601, et illustrent magistralement tout le vocabulaire de la Seconde Renaissance Bretonne, inspirée par la construction en 1570 du château de Kerjean, à 7 km au nord de Bodilis. Etc.
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"L'architecture et les sculptures du porche sud de Bodilis, daté de 1601 sont caractéristiques du style du Maître de Plougastel avec ses Apôtres. Pourtant le portail intérieur, qui témoigne de l'existence d'un bâtiment plus ancien, est daté de 1570 par deux anges tenant une petite banderole au dessus de l'accolade. Simple dans sa conception, l'arc brisé de l'entrée est décoré dans sa gorge intérieure de feuilles trilobées et de tigelles qui restent encore bien médiévales avec une petite tête barbue penchée et un oiseau au dessus de l'entrée. Pour l'accolade, on passe à des formes géométriques avec une arête saillante dont les cotés sont décorés de marguerites stylisées et d'un galon plat dont les rubans se terminent en volutes. Le motif de pampres et feuilles de vignes revient pour souligner un second arc brisé, avec quelques masques humains et un délicat angelot cueillant des raisins." (E. Le Seac'h p. 177)
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LES PERSONNAGES DE LA GORGE EXTÉRIEURE DE L'ARC DU PORTAIL.
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— À gauche de bas en haut :
1. saint Côme.
2. saint Antoine.
3. saint Dominique.
4. Un saint céphalophore (saint Denis ou saint Miliau).
— À droite de bas en haut:
1. saint Damien.
2. Saint Yves.
3. Saint François d'Assise.
4. Saint Sébastien.
— 12 anges dans l'archivolte.
Au total, nous trouvons ici trois fondateurs d'ordres monastiques (les Antonins, les Dominicains et les Franciscains), deux saints bretons (Miliau et Yves), et trois saint thaumaturges protecteurs des maladies (Côme, Damien et Sébastien). La triade Yves, Côme et Damien est commune aux trois porches de Landivisiau, Landerneau et Bodilis, et François et Miliau se retrouvent sur deux des 3 porches.
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LE PIÉDROIT DE GAUCHE.
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Piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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1. Saint Côme tenant l'urinal.
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Saint Côme, patron des médecins, élève devant ses yeux l'urinal ou matula ( alias "pot à pisser", E. Guichard 1606) afin d'en examiner la sédimentation et de se prononcer sur le diagnostic ou le pronostic. Comme à Landivisiau, ou à Landerneau, ou dans les Grandes Heures d'Anne de Bretagne.
(C'est par erreur que E. Le Seac'h le décrit tenant une fiole à onguent).
Il est coiffé du bonnet des docteurs, dont l'arête centrale est parfaitement rendue, donnant l'impression d'un chapeau à trois pointes. Le bonnet porté par saint Côme ou plus généralement par les médecins du Moyen-Âge est décrit comme "rond" (cylindrique) et fourré de vair, ou bien comme "carré". Le bonnet carré (la "barrette" des clercs) était portée par les avocats, les juges, les médecins et les maîtres en théologie. Elle était, pour les médecins, de couleur écarlate. Elle se porte, si on en juge par la barrette des religieux, avec l'une des pointes en position strictement médiane, ce qui donne l'aspect que nous voyons ici.
Il est vêtu, comme à Landivisiau, d'une robe, descendant ici très bas et ne découvrant que le bout des chaussures. Les manches en sont plissées jusqu'au poignet où apparaissent les petites plissures de la chemise. La robe n'est ouverte que par une courte fente thoracique dont les bords se rejoignent sans doute par un bouton, non visible mais responsable d'une boucle terminale très caractéristique de ce sculpteur.
Un manteau, tout aussi long, recouvre la robe, avec un large col rabattu, et un pan retenu par la main gauche.
Le visage est ovale, d'abord très rond jusqu'au menton, court et pointu.
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Saint Côme, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Côme, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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L'éclairage vient souligner les yeux en amande au contour ourlé, et les cheveux peignés en lignes verticales, divisés par une raie au milieu en deux masses bouclant sur les oreilles.
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Saint Côme, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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2. Saint Antoine.
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E. Le Seac'h décrit "un moine avec un chapelet autour du cou qui pourrait être saint Hervé l'aveugle, s'appuyant sur son bâton en tau du coté droit". J'ai identifié l'un des personnages du porche de Landerneau comme saint Hervé, car il est guidé par le jeune Guicharan, mais ici, le chapelet à 22 gros grains et le bâton en tau sont les attributs de saint Antoine l'ermite, tout comme le livre de la règle de l'Ordre monastique qu'il fonda. Son chapelet n'est pas passé autour du cou, mais à la ceinture, comme c'est l'usage.
Comparez avec les trois statues de saint Antoine que j'ai présenté dans ce blog, et notamment celle de la chapelle de Trévarn à Saint-Urbain par Henry Prigent. Les points communs entre cette dernière, et le moyen relief de Bodilis, sont suffisamment nombreux (malgré l'absence de couvre-chef à Bodilis) pour amener de l'eau à mon moulin : cette partie du porche de Bodilis doit être attribuée à l'atelier Prigent (1527-1577), comme celui de Landivisiau. Je note en particulier la moustache en V inversé naissant des ailes du nez. Par contre, l'artiste n'a pas su renoncer ici à sa chère tunique à fente antérieure formant un médaillon en creux sous la patte et son bouton. Les yeux en amande au contour doublé, et les cheveux peignés, sont identiques à ceux observés pour saint Côme.
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Saint Antoine l'ermite, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Antoine l'ermite, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Je profite du cliché suivant pour faire remarquer les reste de polychromie ocre rouge de la coquille de la niche, et le dais où un couple hilare pointe son nez.
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Saint Antoine l'ermite, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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3. Saint Dominique.
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E. Le Seac'h écrit "Il est suivi par un autre moine non identifiable ouvrant son livre". Mais je propose de reconnaître ici saint Dominique, par le détail de la bande de tissu tombant verticalement sous le livre, et qui appartient au scapulaire monastique des Dominicains (mais aussi des Bénédictins et des Carmes). Le livre renvoie, comme pour saint Antoine, à la règle monastique de l'Ordre des Prêcheurs.
Un autre argument est la présence, de l'autre coté, de saint François, fondateur de l'Ordre des Frères mineurs.
La tête est à demi couverte par le capuchon de l'habit, mais laisse voir une couronne de cheveux. La sculpture occupe une place trop élevée pour que je puisse vérifier la présence de la tonsure.
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Saint Dominique, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Dominique, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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4. Un saint céphalophore. Saint Denis ou saint Miliau.
À Landivisiau, nous trouvons également un saint tenant sa tête, et j'ai présenté la discussion à laquelle engage toute représentation identique : rien ne permet d'affirmer qu'il s'agit du plus connu, saint Denis, notamment l'absence de mitre. Il est donc logique, vu la proximité de Guimiliau, de penser à saint Miliau.
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Saint Miliau céphalophore, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Miliau céphalophore, (kersanton, 1570), gorge extérieure gauche du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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LE PIÉDROIT DE DROITE.
De bas en haut.
Partie droite du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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1. Saint Damien tenant le pot à onguent.
Il se tient dans une niche à coquille dont le dais à rubans pointés et volutes accueille la tête d'un putto.
Il tient de la main gauche le pot à onguent, son attribut de patron des apothicaires. La main droite bénit, à moins qu'elle ait perdu la spatule souvent associée au pot.
Nous trouvons une représentation très semblable à Landivisiau par les frères Prigent en 1554, et à Landerneau à peu près à la même époque.
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Saint Damien (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Damien (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Dais de la niche de saint Damien (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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2. Saint Yves.
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Il est présent sur les porches de Landivisau (en bas à gauche) et de Landerneau (en bas à droite juste au dessous de saint Côme).
Son dais est chevauché par un ange. Il est coiffé du bonnet carré (il est docteur en théologie et en droit), mais ce bonnet est recouvert par une capuche. Ses épaules sont couvertes d'un camail frappé d'hermines, emblème du saint breton, official de Tréguier, recteur de Trédrez puis de Louannec. Ces hermines se retrouvent entre les plis de sa robe.
Il porte, suspendu à son poignet gauche, un sac qui contient soit son livre, soit les pièces d'un procès. Il fait le geste de l'argumentation juridique. Son visage est tourné vers le bas et la droite, et il semble porter sur le spectateur un regard plein d'attention.
Tous ces traits se rencontrent aussi à Landerneau et à Landivisiau.
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Saint Yves, (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Yves, (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Yves, (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Dais de saint Yves, (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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3. Saint François d'Assise.
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Il est présent, dans la même posture de présentation des stigmates, à Saint-Houardon de Landerneau, du même coté droit du porche.
E. Le Seac'h remarque que "ss présence juste au dessus de saint Yves n'est pas fortuite puisque ce dernier reçut une formation chez les Franciscains à Rennes. Dans la seconde moitié du XVe siècle, son message de défenseur des pauvres et des opprimés séduit l'ordre, qui diffuse son culte." Mais cette remarque perd de sa force puisque qu'à Landerneau, saint Yves est placé du coté gauche.
Nous remarquons aussi la corde à trois nœuds "de capucin", témoignant de l'attachement des Franciscains ou Cordeliers, au dogme de la Trinité. Et les orteils sortant des sandales.
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Saint François d'Assise, (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint François d'Assise, (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Saint Sébastien.
Il est lié à un arbre par la taille, le bras droit levé, la main gauche dans le dos. Les marques des flèches que tirèrent les archers dont il était l'officier sont bien visibles sur les bras, les jambes et le tronc.
Saint Sébastien est vénéré car il protège de la "peste", c'est à dire des maladies épidémiques.
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Saint Sébastien, (kersanton, 1570), gorge droite extérieure du piédroit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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LES DOUZE ANGES DES VOUSSURES DE LA GORGE EXTÈRIEURE.
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Tympan (kersanton, 1570), du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Ange orant (kersanton, 1570) du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Anges orants (kersanton, 1570) du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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LES GORGES ET MOULURES INTÉRIEURES : RINCEAUX ET PAMPRES.
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Les départs des nervures sont amorcés par de petits animaux fabuleux ou réels, le corps placé à la verticale et la gueule libérant le décor. Cette tradition se retrouve dans les porches de Basse-Bretagne au Folgoët, à Daoulas, à Landivisau, Pencran, Guipavas, Landerneau, etc...
Masque et feuillages, base des gorges et moulures du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Du coté droit : un cerf et un monstre anthropoïde.
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Départ des gorges et moulures du coté droit du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Première gorge à droite : un cerf.
Quadrupède (kersanton, 1570), base des gorges et moulures du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Monstre à tête humaine (kersanton, 1570), base des gorges et moulures du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Du coté gauche : un lion et un dragon ailé.
Départ des gorges et moulures du coté gauche du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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La seconde gorge porte un dragon ailé, l'épine dorsale constellée de grosses écailles rondes.
Dragon ailé, base des gorges et moulures du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Les animaux et personnages habitant les pampres.
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Oiseau picorant les raisins, (kersanton, 1570), gorge interne du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Enfant goûtant aux raisins, (kersanton, 1570), gorge interne du portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Homme barbu et oiseau, à l'extrémité des rinceaux, (kersanton, 1570), portail intérieur du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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LE TYMPAN DU PORTAIL.
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Il est divisé horizontalement par une corniche délimitant, au dessus, un espace occupé par le Christ Sauveur dans une niche et entouré d'anges à phylactères, et en dessous, deux triangles à décor Renaissance.
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Les deux triangles inférieurs.
"Des masques circulaires ou feuillus, au même niveau que le cartel avec la date, seront repris plus tard sur les stylobates des contreforts extérieurs." (E. Le Seac'h)
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a) du coté gauche : trois médaillons aux personnages joufflus, portant peut-être des couronnes.
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b. Du coté droit : le cartouche 1570 présenté par deux anges.
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Le Christ Sauveur entouré de 10 anges.
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Le Christ Sauveur.
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La niche centrale abrite, comme c'est souvent le cas, une statue du Christ bénissant et tenant le globe selon le motif du Christ Sauveur du monde. Il est barbu, vêtu d'une longue robe, il avance légèrement le genou gauche, trace une bénédiction et tient le globe, une simple sphère dépourvue de croix.
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"Au tympan, une statue du Dieu Sauveur est installée dans une niche surmontée d'un dais dans le style Renaissance. La niche est décorée de trois têtes du style du Maître de Plougastel : une masculine au milieu, coiffée d'un chapeau à plume, et deux têtes féminines. sur les cotés. Le Dieu Sauveur, de la main d'un Roland Doré débutant, est posé sur une console à feuilles plates stylisées et un masque-feuille renaissant. Il est entouré d'une cohorte d'anges agenouillés, cinq de chaque coté, déployant des banderoles sur lesquelles il reste des traces de polychromie bleue mais dont toute lecture est désormais impossible." (E. Le Seac'h page 177)
Note : Les premières œuvres du sculpteur Roland Doré, compagnon et successeur du Maître de Plougastel, datent de 1618-1621 : ce serait donc la période de datation de cette statue, qui ne serait pas, selon cette spécialiste, contemporaine du porche intérieur.
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Le Christ Sauveur (kersanton, Roland Doré, ca 1618-1621) sur le tympan du portail du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Le Christ Sauveur (kersanton, Roland Doré, ca 1618-1621) sur le tympan du portail du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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La console de la niche.
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Console de la niche, sur le tympan du portail du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Le dais renaissance à trois têtes.
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Il évoque immédiatement le dais des bénitiers de Landivisiau et de Saint-Houardon à Landerneau, ce qui est très intéressant d'une part car nous avons vu la multiplicité des points communs avec les porches de ces deux églises (notamment les statues de saints Côme et Damien et de saint Yves), et parce que le bénitier de Landivisiau est attribué à l'atelier des Prigent par E. Le Seac'h qui le décrit page 154.
À Landivisiau et Landerneau, nous trouvons au porche sud deux portes d'entrée séparées par un trumeau, sur lequel s'adosse le bénitier. À Bodilis, puisqu'il n'y a qu'une porte, sans trumeau, le dais Renaissance perd sa place au dessus du bénitier et monte quelques mètres plus haut, sans quitter la ligne médiane. (le bénitier de Bodilis est déporté sur la droite, c'est une simple cuve dépourvue de dais)
À Landivisiau et Landerneau, les cartouches sont sculptés de quatre hauts-reliefs : deux hommes coiffés de chapeaux à plume à la Henri II, alternent avec deux femmes, et ces couples tentent de s'observer en tournant la tête. Les cheveux des femmes sont retenus par un bandeau à l'arrière de la nuque.
À Bodilis, le sculpteur n'a placé que trois cartouches séparés de pilastres. Le cartouche central accueille une tête d'homme, à la courte barbe soigneusement taillée et au cou émergeant du col rond d'une chemise entourée d'un collier de maillons de chaîne. Nous ne voyons de son manteau qu'un large col relevé derrière la nuque. La plume du bonnet est moins ostensible que dans les deux autres paroisses, mais elle est bien présente.
Les deux têtes de femme sont bien différentes. Celle de gauche, assez joufflue, écarte ses cheveux des deux mains placées de chaque coté de la tête. Celle de droite, plus élégante, le cou enserré dans un col montant plissé, nous fixe d'un air sévère.
Hélas, ce dais est trop haut placé pour se laisser examiner tout à loisir.
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Dais de la niche, sur le tympan du portail du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Dais de la niche, sur le tympan du portail du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
Dais de la niche, sur le tympan du portail du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Dais de la niche, sur le tympan du portail du porche sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile mai 2018.
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Les dix anges encadrant la niche centrale.
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Tous agenouillés dans la même attitude, à peine tournés vers le centre, ils se caractérisent par des ailes verticales et resserrées, une aube longue, — dont les plis épais, en boudoir de charlotte pâtissière, viennent bouffer en godrons réguliers sous l'effet d'une ceinture ou d'un cordon de chœur caché, — une banderole tenue en arc juste au dessus de la taille. La couleur bleue des anges les plus hauts, sans doute rehaussée lors d'une restauration, laisse deviner parfois une inscription soit peinte récemment en lettres blanches ombrées (en haut à droite, ---corde tuo *), soit peut-être gravée un peu plus bas, mais leur déchiffrement nécessiterait un échafaudage et un éclairage adapté.
* : peut-être Deutéronome 6:4-6, soit le commandement reçu de Dieu par Moïse au Sinaï : audi Israhel Dominus Deus noster Dominus unus est, diliges Dominum Deum tuum ex toto corde tuo et ex tota anima tua et ex tota fortitudine tua eruntque verba haec quae ego praecipio tibi hodie in corde tuo, "Tu aimeras l'Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. Et ces commandements, que je te donne aujourd'hui, seront dans ton cœur.".
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CONCLUSION.
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1°) Attribution.
Pour E. Le Seac'h, page 179-180 :
"Les visages des anges reflètent le style débutant du Maître de Plougastel. Ils sont taillés légèrement en pointe avec des courbes plus douces au niveau des pommettes et du menton. Les yeux sont en amande avec les paupières supérieures et inférieures renflées. À la différence de ce qui se verra quelques années plus tard sur le calvaire de Plougastel, les nez sont épatés et les narines trop dilatées. Il en va de même des visages (Côme, Damien), ou d'un bras (Côme), plus allongés. Les visages perdront ensuite leur fossette mentonnière et seront de forme carrée avec un modèle plus long. Le bras gauche un peu trop long de Côme n'est pas seulement la marque d'un sculpteur à la recherche de son style, mais aussi le témoignage d'une méthode de fabrication où les blocs sont sculptés en atelier les uns après les autres sans être agencés immédiatement, ce qui donne ce rendu un peu maladroit après le montage sur place".
À mon sens, cet effort stylistique pour attribuer au sculpteur du calvaire de Plougastel, en 1602-1604, et dont le style se caractérise par son hiératisme, le portail intérieur de Bodilis, réalisé 32 ans auparavant, me semble ne pas tenir compte de l'évidence iconographique : l'organisation générale du tympan, les gorges extérieures des moulures accueillant des saints, de bonne taille, plutôt que des scènes bibliques de petite taille (Pencran, la Roche-Maurice, Guimiliau, etc.), et surtout la similitude des saints Côme, Damien et Yves, et des couples des cartouches des dais , affirment que ce portail de Bodilis est sorti du même atelier que ceux de Landivisiau et de Landerneau. C'est déjà ce qu'observait Couffon en 1958.
"La porte unique donnant accès à l'église est celle du porche primitif. En kersanton, elle porte la date de 1570, est naturellement inspirée de celle de Landivisiau, et due, sans nul doute, au même atelier landernéen. Comme dans cette dernière, son archivolte, amortie par un galon plat en accolade, est décorée de statuettes de saints, mais d'un canon supérieur à celui du modèle."
"La porte est donnant accès à l'église a ses voussures décorées de pampres ; et, au bas du piédroit gauche, l'on voit un petit marmouset (*) très semblable à ceux du porche de Landivisiau (1554- 1559) et montrant l'identité de l'atelier."
(*) C'est sans doute le monstre à visage humain décrit au départ de la seconde gorge du piédroit droit.
Puisque le portail de Landivisiau a été attribué par E. Le Seac'h à Bastien et Henry Prigent, et puisque la sculpture de saint Antoine à Bodilis se rapproche fort de la statue par H. Prigent à Saint-Urbain, il ne me reste plus qu'à conclure que ce portail du porche sud de Bodilis doit être attribué à l'atelier landernéen des Prigent, actif de 1527 à 1577.
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2°) Saint Côme et saint Damien.
La présence des deux frères, l'un médecin et l'autre apothicaire se différenciant par leurs attributs, est singulière, témoignant d'un culte très limité dans le temps (vers 1554-1570) et l'espace (Bodilis-Landivisiau- Landerneau ne sont séparés que d'une vingtaine de kilomètres), même s'il se retrouve en Finistère à Saint-Nic (chapelle Saints Côme et Damien, XVIe-XVIIe) et à Plomeur (chapelle Saint-Côme). Je consacrerai à ce sujet d'iconographie un article particulier.
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SOURCES ET LIENS.
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— ABGRALL (Chanoines Jean-Marie) et PEYRON (Paul), 1903, "[Notices sur les paroisses] Bodilis", Bulletin de la commission diocésaine d'histoire et d'archéologie, Quimper, 3e année, 1903, p. 192-208.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k109982z/f180.image
https://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/bdha/bdha1903.pdf
http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf_notices/bodilis.pdf
— APEVE, Association pour la promotion des enclos paroissiaux de la vallée de l'Elorn
http://www.bodilis.org/patrimoineetsites.php
http://www.apeve.net/spip/spip.php?article127
— COUFFON (René), 1958, Notre-Dame de Bodilis. In: Bulletin Monumental, tome 116, n°2, année 1958. pp. 121-133; doi : 10.3406/bulmo.1958.3832 http://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1958_num_116_2_3832
http://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1958_num_116_2_3832
— COUFFON (René), LE BARS (Alfred) 1988, Nouveau répertoire des églises et chapelles, : paroisse de Bodilis,” Collections numérisées – Diocèse de Quimper et Léon,
http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/fdf52c93c4ad292cf14cbf5068677c87.pdf
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne. Les Ateliers du XVe au XVIIe Siècle. Presses Universitaires de Rennes. ISBN 978-2-7535-3309-7.
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