Les bas-reliefs des douze sibylles de l'église Notre-Dame de Brennilis, étudiés à la lumière des Heures de Louis de Laval.
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Sur l'église Notre-Dame de Brennilis, voir :
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Sur les Sibylles :
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Présentation.
Dans les boiseries néo-gothiques de l'autel latéral sud , sous le vitrail de la baie n°2, ont été encastrés douze petits panneaux de bois en bas-relief, de 44,5 cm de haut et 24 cm de large, sans polychromie, représentant les douze Sibylles,et datant du XVIe siècle. Les Sibylles sont toutes habillées à la mode de Catherine de Médicis. Dans l'Antiquité gréco-romaine, les sibylles passent pour avoir reçu d'une divinité le don de prédire l'avenir. À l'époque de la Renaissance, des théologiens leur prêtent la prédiction des mystères de l'Incarnation et de la Rédemption, d'où leur représentation dans l'art chrétien. Chacune d'entre elles est identifiable grâce à des attributs.
Les douze sibylles en un coup d'œil :
Les douze Sibylles de Brennilis. Photographies lavieb-aile.
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L'étude iconographique d'Émile Mâle.
Le thème iconographique des Sibylles a été étudié de manière exemplaire par Émile Mâle, qui lui a consacré sa thèse en latin (Quomodo Sibyllas...1899), et un important chapitre de L'Art religieux de la fin du Moyen-Âge (1922). C'est au milieu du XVe siècle qu'en Italie autour de Cosme de Médicis et de son Académie de Florence se développa la pensée néoplatonicienne et la tentative par Marcile Ficin d'une synthèse du Christianisme et du Platonisme dans son Traité de la religion chrétienne (De Christiana religione), paru en 1474. Marsile Ficin invoque alors l’autorité des sibylles et élève Platon au rang des prophètes. En effet, dans ce courant de traduction des textes grecs et latins de l'Antiquité et de revalorisation de la profondeur de la pensée antique, il parut nécessaire de montrer que Dieu n'avait pas réservé aux Prophètes hébreux les préfigurations annonçant la venue de son Fils, et que les Sibylles, prophétesses de la Grèce, de l'Italie et de l'Asie Mineure avaient annoncé aux païens la venue du Sauveur et les épisodes de sa Vie : le paganisme, lui aussi, avait été inspiré et prophétique. "La sibylle est en effet pour le moyen âge un profond symbole. Elle est la voix du vieux monde. Toute l’antiquité parle par sa bouche."
Varron, au 1er siècle av. J.-C., avait décrit dix Sibylles, et après Isidore de Séville au VIIe siècle, (Etymologies VIII,8), puis le Pseudo-Bède, Raban Maur, Vincent de Beauvais les avaient nommées au XIIIe siècle au chapitre C-CII du Speculum historiale ; mais les artistes n'en représentaient que deux : la terrible Érythréenne qui avait annoncé le Jugement Dernier ; et la Sibylle de Tibur.
Dans la seconde moitié du XVe siècle, après la publication en 1465 en Italie de l’édition princeps des Institutions divines de Lactance (250 – vers 325), apologiste chrétien du temps de l’empereur Constantin, et les nombreuses rééditions qui suivront (en 1468, 1470, 1471, 1474 et 1478) , on voit les dix Sibylles apparaître dans toute l'Europe. A chacune est attribué un oracle, tiré des Institutions Divines de Lactance (vers 321), qui a lui-même puisé dans les Livres Sibyllins.
Les prophétesses apparaissent sur les murs du palais Orsini avant 1438, puis dans un Mystère de l'Annonciation joué à Florence en 1471, puis/et sur les gravures de Baccio Baldini vers 1470-1480.
Puis, en 1481, un dominicain nommé Filippo Barbieri fit paraître un livre (Discordantiae nonnullae inter sanctum Hieronymum et Augustinum) proposant d'autres oracles que ceux de Lactance, et rapprochant chaque oracle des Sibylles d'un verset d'un Prophète hébreu. C'est lui qui fixe à chaque sibylle un âge, un attribut et un costume propre. Mais il fait passer le nombre des Sibylles à douze de sorte que leur nombre corresponde au nombre de prophètes mineurs : la sibylle Agrippine et la sibylle Européenne se sont alors ajoutées à la liste. Dès lors, les 12 Sibylles apparaissent partout en Italie, comme dans le pavement de la cathédrale de Sienne en 1483, ou dans les Appartements Borgia (1492-1494) peints par Bernardino Pinturicchio. Et de 1508 à 1512, Michel-Ange les peint au plafond de la Chapelle Sixtine.
En 1506, 8 d'entre elles apparaissent à la cathédrale d'Amiens, fidèles aux textes et aux descriptions de Filipo Barbieri, mais ailleurs en France, les artistes vont combiner les oracles des Sibylles de Lactance et celles de Barbieri . Et dès avant 1489, on trouve ces 12 Sibylles "françaises" dans un livre d'Heures, celui de Louis de Laval Bnf latin 920.
"On voit maintenant en quoi les Sibylles françaises diffèrent des Sibylles italiennes. Les Sibylles de Filippo Barbieri n'annoncent qu'une chose : l'avènement d'un Sauveur qui doit naître miraculeusement d'une Vierge. Les Sibylles françaises en savent davantage : elles ne parlent pas seulement de la naissance surnaturelle du Fils de Dieu, elles parlent encore de son enfance, de ses souffrances, de sa mort, de sa résurrection". Lactance complète Filippo Barbieri. Les attributs que portent nos Sibylles ont un sens : ils racontent en abrégé la vie de Jésus-Christ. Elles-mêmes ne sont pas placées au hasard, mais rangées dans un ordre savant : en tête se voient celles qui annoncent qu'un Sauveur va naître; puis viennent celles qui parlent de sa naissance, de son enfance; puis celles qui décrivent sa Passion, sa mort, sa résurrection. Les Sibylles françaises l'emportent donc sur les Sibylles italiennes : elles témoignent de cet amour de la méthode, de la clarté, qui, dès le XIIIe siècle, est la marque de nos artistes " (Émile Mâle, )
Elles sont désignées par leur lieu d’origine : la Cimmérienne est née au bord de la Mer Noire (Crimée ?), la Persique en Perse et la Phrygienne en Anatolie. La Samienne est née sur l'île de Samos, l'Erythréenne, de la cité disparue d'Erythrées, sur la côte Ionienne en face de Chio. L'Hellespont est une ancienne province romaine d'Asie Mineure. D'Afrique venaient la Libyenne et l'Agrippa, une déformation probable d'Aegypta, selon Emile Mâle. Quant aux Sibylles d'Europe, la Delphique est la Pythie de Delphes en Grèce, , la Cuméenne et la Tiburtine, viennent respectivement de Cumes près de Naples et de Tivoli près de Rome, en Italie ; et Europa était une province romaine en Thrace.
Le Livre d'Heures de Louis de Laval.
Il nous intéressera à plus d'un titre. D'abord, sa date (antérieure à 1489) est proche de celle de la fondation de la chapelle de Brennilis en 1485. La série des Sibylles date de "peu de temps après 1470-1475". Surtout, il accompagne chaque enluminure des Sibylles de descriptions (latines) et d'une page d'enluminure typologique avec trois références à l'Ancien et au Nouveau Testament. Enfin, dans une double page (folio 50v et 51r), Louis de Laval y est peint agenouillé devant la Vierge à l'Enfant et l'inscription répétée deux fois sancta et immaculata virginitas, témoignant de l'importance du culte marial et de la thèse immaculiste pour Louis de Laval.
" Le manuscrit a été réalisé en plusieurs campagnes de décorations, entremêlées de manière complexe : la première grande campagne vers 1470-1475 : 96 miniatures en pleine page marquant le début de chaque grand chapitre du livre d'heures (f.30 à 342) ainsi que les miniatures situées dans les marges latérales du texte. Ces décorations sont réalisée d'abord par le Maître du Missel de Yale (f.300 à 312) et son atelier puis par le peintre de Bourges Jean Colombe, aidé de deux collaborateurs de style fouquetien pour les visages des personnages. Très peu de temps après, est ajouté le cycle des sibylles (f.17-29v : cycle de miniatures en pleine page), par Jean Colombe en compagnie d'un des deux collaborateurs qui est intervenu encore une fois sur les visages des personnages. Cette campagne est fortement marquée par l'influence de Jean Fouquet, plusieurs composition du maître tourangeau étant reprises, du Livre d'heures d'Étienne Chevalier notamment".
Entre 1490 et 1500 a été réalisé en quasi copie Sibyllae et prophetae de Christo Salvatore vaticinantes .
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Les Sibylles de Notre-Dame de Brennilis, expression d'un culte marial de la Sainte Conception ?
Il faut re-situer ces Sibylles de Brennilis dans le programme de décor de l'église pour en percevoir le sens. Dans un sanctuaire voué à Notre-Dame, et témoignant de l'influence franciscaine, la Vierge à l'Enfant foulant la Démone (niche à volets du chœur) affirmait l'importance du culte de Marie triomphant du Péché, tandis que les volets illustraient l'Annonciation et les mots Ave gratia plena. La baie n°1 (vers 1498) montrant la Vierge dans le ventre de sa mère sainte Anne à coté de la mention "Chaste Mariage" et "Sainte Conception" insistait de manière spectaculaire sur la croyance en la conception immaculée (indemne du Péché Originel) de la Mère du Sauveur. La maîtresse-vitre (vers 1500) montrait 8 scènes de la Vie de la Vierge. Le maître-autel portait un retable dont les sept panneaux reprennent également les épisodes de la Vie de la Vierge. Chacune de ces œuvres mettait en pleine lumière des décors peints que les paroissiens (notamment les membres de la Fabrique), les recteurs et les seigneurs (famille de Berrien puis de Quélen-Vieux-Chastel) pouvaient retrouver dans leurs livres de prières, les bréviaires, missels et livres d'Heures sous forme d'enluminures : notamment les huit enluminures du Petit Office de la Vierge. En un mot, la chapelle devenait elle-même le cadre permanent de cet Office.
Or, le culte marial s'appuie, dès le XIIe siècle mais avec une vigueur plus forte au XVe siècle, sur une lecture typologique qui démontre que la virginité, la royauté (couronnement), la conception immaculée, et la maternité d'un Fils Sauveur du Monde sont annoncés dans l'Ancien Testament. Ces relations entre l'Écriture et le culte de Marie sont développés dans des textes, des oraisons, des litanies, des œuvres artistiques comme les Arbres de Jessé, les Annonciations à la Licorne, les Vierges aux symboles bibliques (litanies), les Vierges en Ève nouvelle foulant la Démone, les Vierges sur un croissant de lune en femme de l'Apocalypse, les Vierges allaitantes et Vierges couchées etc., avec une forte densité en Finistère. Cette pensée typologique est déjà présente dans l'Évangile de Matthieu, qui fourmille de citations de versets bibliques. Les 12 prophétesses antiques ont été associées par Lactance des oracles concernant (Mâle, p. 257) Dieu, le Christ, le Christ considéré comme Rédempteur, les miracles du Christ, la Passion du Christ, la mort du Christ, sa Résurrection, et le Jugement dernier. Mais dans un livre publié en 1481, mais dont le manuscrit circulait depuis une date antérieure, Filippo Barbieri (1426-1487) va introduire à coté de ces thèmes christiques des prédictions concernant le rôle de la Vierge et on peut considérer que dans son livre, les Sibylles sont reliées pour 7 d'entre elles à la Vie de la Vierge, et pour les 5 autres à la Passion du Christ. L'importance de cette redistribution des vaticinations en faveur de Marie n'a pas été soulignée par Émile Mâle. Elle apparaît évidente dans les double-pages des Heures de Louis de Laval , qui suivent un ordre chronologique, qui était peut-être celui des Sibylles de Brennilis avant leur réaménagement.
Mon catalogue de la typologie des douze Sibylles (Filippo da Barbieri, XVe siècle) complété en italique d'après J-M. Roessli :
— Vie de la Vierge :
1. La Persique tenant la lanterne et foulant un serpent : annonce la Vierge foulant le serpent. Immaculée Conception : Incarnation : la Vierge donne naissance à celui qui se dira Lumière du Monde.
2. La Libyque tenant un cierge: la Vierge et l'Enfant apportant cette Lumière. Manifestation aux Gentils.
3. L'Erythréenne tenant la fleur: Annonciation. Conception virginale.
4. La Cuméenne tenant un bol (une boule) : Virginité (ou Venue d'un enfant). Naissance dans une crèche
5. La Samienne tenant un berceau : Nativité / Annonce aux Bergers.
6. Cimmérienne tenant une corne (biberon) : allaitement de l'Enfant par la Vierge
7. L'Européenne tenant une épée : Fuite en Égypte pour fuir le Massacre des saints Innocents.
— Passion et Christologie :
8. La Tiburtine tenant une main : Passion (Jésus giflé par les bourreaux)
9. L'Agrippine : Flagellation.
10. La Delphique tenant une couronne : Couronnement d'épines de la Passion. Incarnation.
11. L'Hellespontine tenant une croix : Crucifixion. Incarnation et Passion
12. La Phrygique tenant un étendard crucifère : Résurrection
Autrement dit, comme les 7 volets de l'autel, comme les 8 panneaux de la maîtresse-vitre, les 12 panneaux de Sibylles illustrent, rappellent ou commentent les textes évangéliques, les textes liturgiques de l'Office divin et du Petit office de la Vierge tout en rappelant les vérités de la Foi chrétienne.
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Je donnerai pour chaque Sibylle son nom, son attribut, l'événement qu'elle a annoncée, son âge (selon les textes de référence), son origine géographique, puis les inscriptions latines qui la concernent dans les gravures de Baldini, le livre de Barbieri, les Heures de Louis de Laval (selon la description d'Émile Mâle), et les relations typologiques que ce manuscrit développe, avec notamment le prophète biblique qui lui est associé.
Je suggère de porter une attention spéciale aux très nombreuses mentions de la virginité de Marie et au thème de la conception ou de la petite enfance.
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Retable des 12 Sibylles, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
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I. LA PARTIE BASSE OU COFFRE D'AUTEL.
8 panneaux.
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1. La Sibylle Lybique portant une torche (ressemblant à trois clous). Sur le coté nord (gauche) de l'autel :
— Description : la Sibylle est coiffée d'un bonnet pointu dont la base est un turban ou rouleau torsadé. Visage joufflu, cheveux longs. Manteau long et à manches très amples mais courtes. Robe plissée sous la ceinture, à bustier à encolure carrée. Chemise sans col. Manches d'avant-bras à crevés et fraises aux poignets. La main gauche retient le pan du manteau. Attribut : une gerbe de trois objets prismatiques pointus.
Classiquement, la Libyque, âgée de 24 ans, porte la torche flamboyante, symbole de la Lumière qui vient en ce monde repousser les ténèbres, et qui annonce la naissance du Sauveur. Mais ici, à Brennilis, différents auteurs ont cru reconnaître dans l'objet qu'elle tient trois clous semblables à ceux que présentent les anges honorant les instruments de la Passion du Christ. Je pense qu'il s'agit d'une erreur d'interprétation, certes répétée partout, et je suggère de penser que l'artiste a maladroitement sculpté ici les trois flammes du flambeau habituel. Je note que tous les textes associent la Lybique à la Lumière, et jamais aux trois clous de la Crucifixion. Émile Mâle ne les mentionnent jamais.
— Fille du dieu Zeus et de la fille de Poséidon, la Sibylle libyque est une prêtresse et une prophétesse qui présidait l'oracle de Zeus et Ammon dans l'oasis de Siwa dans le désert de Libye. Elle aurait été mentionnée par Euripide.
— Baccio Baldini (1470-1480) : SIbILLA·LIbICA· (S à rebours). Assise dans un jardin, coiffée d’un chapeau conique à plumes, elle tourne les pages d’un livre posé sur ses genoux. Un cartouche porte l'inscription Ecce venientem diem et latentia aperientem tenebit gremio gentium regina
Tentative de traduction "Voici venir le jour ou sera révélé celui que la reine des nations tiendra en son giron"
Le poème est le suivant :
Di Verra chellet terno signore
Lume dara all cose nas cose
Elegami iscora del nostro errore
Fara le sinagoge luminose
E solera belabra al pechatore
Efie stadira di tute le chose
Engendrenbo alla reina delle gente
Se bra questore santo evivente
— Filippo Barbieri (1481) : Sibylla Libyca ornata serto viridi et florido in capite, vestita pallio honesto et non multum juvenis sic ait : Ecce veniet dies et illuminabit condempsa [sic] tenebrarum et solventur nexus Sinagogae et desinent labia hominum et videbunt regem viventium ; tenebit illum in gremio virgo domina gentium et regnabit in misericordia et uterus matris erit statua [ou statera] cunctorum. "Elle porte une guirlande verte et fleurie sur la tête, elle est vêtue d'une belle robe et elle n'est plus toute jeune." A défaut de pouvoir donner une traduction claire de la suite, je remarque que la Libyque est associée à la venue de la Lumière dissipant l'obscurité de la Synagogue, mais aussi à celle d'un Roi régnant dans la miséricorde et issu de l'utérus d'une Vierge . cf in gremio virgo, "dans le giron d'une vierge" et uterus matris.
— Prophète associé par Barbieri : Jérémie 23:5 Ecce dies veniunt dicit Dominus et suscitabo David germen iustum et regnabit rex et sapiens erit et faciet iudicium et iustitiam in terra "Voici, les jours viennent, dit l'Éternel, Où je susciterai à David un germe juste; Il régnera en roi et prospérera, Il pratiquera la justice et l'équité dans le pays."
— Livre d'Heures de Louis de Laval folio 18v: "La Sibylle Libyque tient à la main un cierge allumé. L'inscription qui l'accompagne est ainsi conçue : « Sibylla Libyca, XXIV annorum, cujus meminit Euripides. Videtur clare vaticiriari de adventu Salvatoris cum prophetis. Ecce veniet deus et illuminabit condensa tenebrarum et solvet nexus Synagogœ... », etc. — La prophétie est empruntée au livre de Filippo Barbieri et l'auteur de l'inscription nous en explique le sens : la Sibylle, dit-il, annonce avec clarté l'avènement du Sauveur. C'est pourquoi l'artiste, voulant faire entendre que la prédiction de la Libyque était plus claire que celle de la Persique, lui a mis à la main, non pas une lanterne, mais un cierge allumé dont rien ne voile l'éclat." (E. Mâle)
Je lis : Sibila Libica . XXIV annorum, cujus meminit Euripides. Videtur clare vaticinari de adventu Salvatoris cum prophetis. Ut infra/ Ecce veniet deus et illuminabit condensa tenebrarum, et solventur nexus Synagoge, et deficient labia hominum videbunt Regem viventuum et tenebit virgo illum in gremio domina gentium et regnabit in omnia et uterus matris eius erit statera cunctorum.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f47.vertical
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 19r : le prophète Isaïe et saint Jean.
--L'enluminure supérieure montre dans une trouée du ciel la Vierge à l'Enfant présentée par la Sibylle (turban) à une foule de personnes à genoux. L'Enfant porte un phylactère où est inscrit le verset de Jean 8:12 Ego sum lumen mundi "Je suis la lumière du monde. [Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres.]"
-- L'enluminure sous-jacente présente deux personnages tenant des phylactères : Isaïe 63 Venit lumen tuum Jerusalem et saint Jean 1:9 Erat lux quae inluminat omnem hominem venientem in mundum " "Cette lumière était la véritable lumière qui en venant dans le monde éclaire tout homme".
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La Sibylle Lybique, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle Lybique de Baldini, Barbieri, des Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard), et Léonard Limosin vers 1535.
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2. La Sibylle de Phrygie portant un étendard. Sur le devant d'autel, à gauche :
— Description : cette Sibylle est assez semblable par sa coiffure et ses vêtements à la Lybique, malgré l'existence d'un gland à l'extrémité du bonnet, d'une fraise courte autour du cou, un corsage plissé et une ceinture plus large et d'un col montant sur le manteau. Elle tient une longue croix tréflée où s'enroule une bannière frappée d'une croix pattée : on reconnaît là l'étendard de la Résurrection, que tient, en iconographie, le Christ au sortir du tombeau.
Son nom lui vient de la Phrygie, région d'Anatolie.
— Baccio Baldini (1470-1480):
Assise sur des nuages ignés, elle porte un bonnet conique avec un turban, d’où s’échappe sa chevelure. Elle tient une banderole : Veniet desuper filius dei et firmabitur in celo consilium et virgo annunciabitur.
Le poème est à peu près le suivant :
Vidilo excelso iddio che fragellare
Havea disposito lagente otinata
Neisecol nostro che ciertomipare
Sipossa dirpelle fatte peccata
Ondadisposto suo figlio mandare
I Virgine per voce annuntiata
Pepla sua humilita sara posato
E questa fiecagion torviel pechato
— Filippo Barbieri : Sibylla Frigia, nata apud Phrygios, mediocris aetatis, habitu et mantello rubeo, in modum mulieris nuptae, licet virgo, de Christo sic dicit : Flagellabit dominus potentes terrae, et Olympo excelso veniet, et firmabit concilium in cœlo, et annuntiabitur virgo in vallibus desertorum.
N.B On lit dans le manuscrit de l'Arsenal n° 243 : Sibylla Phrigia, induta veste rubea, nudis brachiis, antiqua Saturnina facie, crinibus sparsis, digito indicaus, dicens sic : « Flagellabit dominus... »
"La Sibylle Phrygienne, née en Phrygie, d'âge moyen, porte un costume et un manteau rose, comme il convient aux femmes mariées. "
— Prophète associé Malachie 3:1-2 : Ecce ego mittam angelum.
— Heures de Louis de Laval folio 28v
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f64.item.zoom
"La Sibylle de Phrygie porte aussi une croix, mais c'est la longue croix ornée d'une bannière, qu'on appelle croix de résurrection. C'est cette croix triomphale que porte Jésus vainqueur de la mort, au moment où il s'élance hors du tombeau. Aux mains de la Sibylle de Phrygie elle ne peut donc rappeler que la Résurrection. Voici, en effet, le texte qui explique l'attribut : « Sibylla Phrygia, vetusta, hec vaticinata est de Christi resurrectione ut infra . Nascetur Christus in Bethléem, annuntiabitur in Nazareth, régnante Tauro pacifico . Suspendent illum in ligno, et occident, et nihil eis valebit, quia tertia die resurget et ostendet [se] discipulis suis, et ipsis videntibus, ascendet in cœlum et regni ejus non erit finis. » — Prophétie arrangée comme les autres, où l'on trouve un texte de Filippo Barbieri et des souvenirs de Lactance." (É. Mâle)
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 29r :
L'enluminure supérieure montre la Résurrection : le Christ sort du tombeau vêtu de pourpre et tenant l'étendard. Une banderole porte le verset suivant : David Psaume 3:6 : Ego dormivi [et soporatus sum ] exsurrexi. "Je me couche [je m'endors et ] je me réveille".
L'enluminure inférieure confronte, sur un fond de colonnes, le prophète Joël et saint Matthieu La banderole de gauche indique : In die ressurectionis meae congregabo gentes avec la mention Joelis tertio mais cete citation associe Joël 3:2 congregabo omnes gentes et Sophonie 3:8 In die ressurectionis meae in futurum quia iudicium meum ut congregem gentes. "le jour où je me lèverai comme témoin à charge puisque j'ai rendu mon arrêt: j'ai décidé de réunir les peuples". La banderole de droite porte le verset de Matthieu 20:19 Et tertia die resurget, "Et le troisième jour il ressuscitera".
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La Sibylle de Phrygie, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle de Phrygie selon Baccio Baldini, Filippo Barbieri, les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard)
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3. La Sibylle de Samos tenant un berceau.
— Description : Même coiffure, même visage, même fraise, même chemise que la précédente. Pas de manteau, mais une robe à la coupe très élégante, aux manches bouffantes, resserrée à la taille par une ceinture. Son col à bord découpé se prolonge par un élément en pointe, noué à son extrémité sur un gland frangé, et décoré d'une fleure en rosette, de pastilles et de boutons. Sous la ceinture, la courbe de l'abdomen est soulignée par une sangle perforée ou poinçonnée à laquelle est suspendu deux glands et nœuds en bouton. La Sibylle tient contre son épaule un berceau qui a la forme d'une petite boîte rectangulaire à pietement arrondi en patin permettant le bercement.
Cette Sibylle de 23 ans tient son nom de l'île de Samos, où elle donnait ses oracles. Elle porte un berceau parce qu'elle avait entrevu la Vierge couchant l'enfant dans une crèche.
— Baccio Baldini (1470-1480) :
Assise dans un jardin, coiffée d’un chapeau conique à plumes, elle tourne les pages d’un livre posé sur ses genoux. Ecce veniet et dives et pauper nascetur et bellue adopabunt
Le oème est le suivant :
Echo che presto neverra quel die
Che lucera le tenebre serrate
Escoglerassi no die profetie
Della gran sinaghoga rilascate
Saran le labbradelle gente pie
Vedrassi ere deviventi e palpate
El venir suo ingrenbo averginvera
Che cosi mostra el cielo eogni spera
— Filippo Barbieri (1481) Sibylla Samia a Samo insula, nudum ensem sub pedibus, formosum pectus, subtileque velim capiti habens, sic ait : Ecce veniet dies et nascetur de paupercula et bestiae terrarum adorabunt eum et dicent «laudate eum in atriis cœlorum ». La Samienne, de l'île de Samos, l'épée nue sous ses pieds, à la poitrine généreuse, ayant un fin voile sur la tête, disait ceci : "Voici que viendra le jour où naîtra un enfant d'un pauvre et toutes les bêtes de la terre l'adoreront et elles diront "louez-le au plus haut des Cieux".
— Prophète associé : David, Psaume 71:11. — Adorabunt eum omnes reges terrae ; omnes gentes servient ei. "Tous les rois se prosterneront devant lui, toutes les nations le serviront".
—Les Heures de Louis de Laval folio 21v : "La Sibylle de Samos porte une crèche. L'inscription est ainsi conçue : Sibylla Samia, annorum XXIII . Videtur vaticinari de hoc quod virgo reclinavit puerum in praesepio. Ecce veniet dies et nascetur puer de paupercula, bestiae terrae adorabunt eum. " L'artiste et son collaborateur ont interprété ingénieusement le texte de Filippo Barbieri. Il est évident qu'ils ont voulu voir, dans « ces bêtes de la terre qui adoreront l'enfant », le bœuf et l'âne de la Nativité, Cette interprétation les amena tout naturellement à mettre une crèche aux mains de la Sibylle de Samos.
Je lis : Sibyla Samie. annorum XXIII. De qua Erasthoves scribit videtur vaticinari de hoc quod virgo reclinavit puerum in presepio. Ut infra.
/ Ecce veniet dies et nascetur puer de paupercula, bestiae terrae adorabunt eum clamabunt et dicent "laudate eum in atris celorum.
"La Sibyle de Samos. Age XXIII ans. Décrite par Eratostène.[ Eratosthène trouva, dit-il, un oracle dans les anciennes annales des Samiens]. Elle a prophétisé qu'une Vierge placera un enfant dans un berceau".
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 22r :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f51.item
L'enluminure supérieure montre une Nativité : la Vierge est penché vers l'Enfant couché sur la paille de la crèche, sous le regard de Joseph, du bœuf et de l'âne. Des bergers, de l'autre coté du mur, tendent la main vers l'enfant. Banderole David Psaume 68:30 Ego sum pauper dolens "Moi je suis malheureux et souffrant".
L'enluminure inférieure confronte Isaïe et saint Luc (taureau), tandis que les banderoles portent les versets d'Isaïe 1:3 Cognovit [bos possessorem suum et] asinus praesepe domini sui [Israhel non cognovit populus meus non intellexit] "Le bœuf sait bien à qui il appartient et l'âne connaît la mangeoire où le nourrit le maître .." / et de Luc 2:7 Reclinavit eum in praesepio "Elle le coucha dans une mangeoire".
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La Sibylle de Samos, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
Sibylle de Samos de Baldini, Barbieri, des Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard)
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4. La Sibylle Europa tenant une épée nue à la main, Le Massacre des Innocents. Au milieu du coffre de l'autel.
— Description : On retrouve ici le bourrelet (turban, balzo) au dessus de cheveux mi-longs, le visage rond, la fraise très courte autour du cou, le manteau dont le pan gauche revient en croisant vers le poignet gauche, la jupe plissée, une ceinture ornée d'une fleur, et un bustier . ce dernier est échancré en V, les deux pans étant réunis par deux pattes. La main droite tient verticalement une épée alors que la main gauche est ramenée vers la poitrine.
— Baccio Baldini :
Assise dans l’herbe, la sibylle regarde un livre. Ses cheveux sont relevés en deux torsades fixées sur le sommet de sa tête couverte d’un voile. L'inscription dit Veniet colles et montes transiens et in paupertate regnans eum silentio dominabitus et e virginis vase exiliet.
Le poème est le suivant :
Verra quel verbo eterno inmaculato
E del vergine vaso uscira pora
Perchui icholi emonti fia passato
Chosi lasonmita dolinpo anchora
Sotto gran poverta nel mondo nato
Singnio regiando chon silensio omniora
Chosi credo ecchonfesso echonoschio
Vero figlioi diddio e duomo eddio
— Philippo Barbieri : Sibylla Europa, decora, juvenis, facie rutilans, velo subtilissimo capite ligata, induta veste aurea, de Christo sic ait : Veniet ille et transibit montes et colles et latices sylvarum Olympi ; regnabit in paupertate et dominabitur in silentio et egredietur de utero virginis." La Sibylle européenne, jeune, d'allure élégante et le visage rayonnant, porte un léger voile noué autour de sa tête, et est vêtue d'une robe dorée. Elle a dit ceci au sujet du Christ: [...] Je traduis approximativement : "Voici qu'il viendra, traversant les monts et les bois et les ruisseaux des forêts de l'Olympe ; il règnera dans la pauvreté, gouvernera dans le silence et sortira de l'utérus d'une vierge".
La vaticination de la Sibylle évoque les déclarations de l'Épouse dans le Cantique des cantiques 2:8 vox dilecti mei ecce iste venit saliens in montibus transiliens colles : "J'entends mon bien-aimé, oui, le voici, il vient, sautant sur les montagnes et bondissant sur les collines." Puis elle évoque le verset de Zacharie annonçant un roi humble et monté sur un âne, et enfin le verset d'Isaïe 11:1 Egredietur virga de radice Jesse. Il est donc difficile de ne pas voir dans le texte de Barbieri une volonté de faire de la prophétie d'Europa une préfiguration de la Vierge donnant naissance au Christ Sauveur.
— Prophète associé : Zacharie 9: 9-10 : Exulta satis filia Sion iubila filia Hierusalem ecce rex tuus veniet tibi iustus et salvator ipse pauper et ascendens super asinum et super pullum filium asinae . " Sois transportée d'allégresse, fille de Sion! Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem! Voici, ton roi vient à toi; Il est juste et victorieux, Il est humble et monté sur un âne, Sur un âne, le petit d'une ânesse."
— Livre d'Heures de Louis de Laval folio 23v
"La Sibylle Europe tient à la main une épée nue. « Sibylla Europa, dit l'inscription, annorum XV, inter ceteras pulcherrima. Videtur vaticinari de fuga pueri cum maire ejus in Aegipto. Veniet ille et transiliet colles et montes et latices Olympi, regnabit in paupertate et dominabitur in silentio ». Rien de plus vague, il faut le reconnaître, que ces paroles prêtées par Filippo Barbieri à la belle Sibylle Europe. Elle parlait d'un Sauveur qui vivrait dans la pauvreté : cela suffisait à l'Italien. Mais notre théologien français était plus exigeant ; il lui fallait de la précision, même au prix de la subtilité. Il imagina que ce passage: « Il franchira les collines », se rapportait à la fuite en Egypte. Il décida donc que la Sibylle Europe aurait à la main une épée pour rappeler le massacre des Innocents et le danger auquel l'enfant échappa par la fuite. "(E. Mâle)
— Lien typologique des Heures de Louis de Laval folio 24r :
Enluminure supérieure : Fuite en Égypte. Banderole David Psaume 1:8 :Ecce elongam fugiens "Je me suis éloigné par la fuite".
Enluminure inférieure : Osée confronté à saint Matthieu (ange) avec les banderoles Osée 11 : Ex egypto vocavi filium meum. / Matthieu 2:13-15 Accipe puerum [et matrem eius] et fuge in Egyptum.
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La Sibylle Europa, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
Sibylle Europe selon Baldini, les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard), et Léonard Limosin vers 1535.
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5. La Sibylle Érythrée tenant une branche fleurie. L'Annonciation.
— Description.
Elle est coiffée du balzo ou turban, et porte un manteau mi-long au dessus d'un gilet à encolure carré et disposant, sous la ceinture, d'une poche plissée. La robe à encolure ronde retombe en plis arrondis. Les chaussures, à bout pointus, sont recouverts par un pan ondoyant. La Sibylle tient un rameau fleuri (trois fleurs à quatre ou cinq pétales) dans la main droite et lève la main gauche en un signe de bénédiction ou d'énonciation.
la sibylle d'Érythrée, aussi appelée Hérophilé, vient de la ville d'Ionie. C'est la fille de Théodoros et d'une nymphe de l'Ida de Troade. Hérophilé a la particularité de donner ses prédictions en vers. Elle a vécu au temps des Argonautes et de la guerre de Troie. Elle est décédée à l'âge de cent-dix ans et est enterrée à Troade. Mais certains disent que cette Sibylle d'Érythrées serait la même que celle de Cumes…
"Parmi les nombreuses sibylles du monde antique, deux prophétesses vont acquérir auprès des premiers chrétiens un statut tout à fait privilégié : la Sibylle de Cumes, en raison de la prophétie “messianique” que ces mêmes premiers chrétiens ont voulu voir dans la quatrième Églogue de Virgile, et la Sibylle d’Érythrées, parce que c’est elle qui aurait chanté la parousie du Christ et le Jugement Dernier dans un célèbre acrostiche grec, qui a fait une entrée en force dans la chrétienté latine grâce à la traduction citée par Augustin dans la Cité de Dieu, XVIII, 23 travers les âges, puisqu’il est entré dans la liturgie du haut Moyen Âge par l’intermédiaire d’un sermon pseudo-augustinien qui le cite à la suite d’autres témoignages sur la divinité de Jésus, et qui a également inspiré des représentations théâtrales sacrées, ainsi que des compositions musicales du IXe au XVIe siècles. C’est sans doute à cette même Sibylle d’Érythrées que fait aussi allusion le Dies iræ attribué à Tomaso a Celano au XIIIe siècle, dans les fameux vers : « Dies iræ, dies illa, / Solvet sæclum in favilla, / Teste David cum Sibylla. »
" Selon Joachim du Bellay (Défense et Illustration..), un évêque grec, Eusèbe prétendait que la Sibylle Érythrée avait prophétisé la naissance du Christ en plaçant au début des vers dans lesquelles elle rendait ses oracles chacune des lettres qui composent le nom du futur sauveur : J E S U S C H R I S T US SERVATOR CRUX.
— Baccio Baldini (1470-1480). SIbILLA, ERITEA.
Assise sur des nuages ignés, les pieds dans un cercle étoilé, elle porte un voile noir ; elle tient une épée et une banderole qui indique une phrase de Lactance : Et morte morietur tribus diebus somno suscepto et tunc ab inferis regressus ad lucem veniet primus.
— Filippo Barbieri : Sibylla nobilissima Erythraea, in Babylonia orta ; de Christo sic ait : In ultima autem aetate humiliabitur Deus et humanabitur proles divina, jungetur humanitati divinitas. Jacebit in feno agnus et officio puellari educabitur Deus et homo. Signa praecedent apud Apellas. Mulier vetustissima puerum praemium corripiet. Boetes orbis mirabitur, ducatum prœstabit ad ortum. . " La très noble Sibylle Erythrée est née à Babylone. Elle a dit du Christ: ..." ..."
Selon Émile Mâle : Il est possible qu' Apellas désigne les juifs (Cf. Horace, Sat. /, IV. v. 100 : a credat Judaens Apella »), Quant à la femme âgée, c'est peut-être la prophétesse Anne. Dans le manuscrit, la Sibylle Erythrée tient à la main une épée nue, ce qui mérite d'être noté".
— Prophète associé : Ézéchiel 44:2.: Porta haec clausa erit.
— Heures de Louis de Laval : folio 19v http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f57.vertical
" La Sibylle Érythrée tient une fleur. Au-dessus de sa tête on lit cette inscription : « Erithrœa [XV] annorum, dicta Eriphila. Videtur vaticiriari de Christi anriuntiatione per angelum facta. De excelso cœlorum habitaculo prospexit Deus humiles et nascetur in diebus novissimis de Virgine hebraea...», etc. L'oracle emprunté à Filippo Barbieri peut se rapporter en effet, si l'on veut, à l'Annonciation. C'est ce que l'artiste a exprimé en donnant pour attribut à la Sibylle Érythrée une fleur. Car la fleur est, comme nous l'avons expliqué ailleurs , une sorte de symbole de L'Annonciation : entre la Vierge et l'ange Gabriel, les peintres, depuis le XIII e siècle, ne manquaient jamais de mettre un beau vase plein de roses blanches ou de lis." (Émile Mâle)
Ma lecture : Sibila erithea. annorum dicta erophyla. Horta in Babilonia videtur vaticinari de Christi annunciacione per angeli facta ut infra / De excelso celorum habitaculo prospexit Deus humiles suos. Et nascetur in diebus novissimis de virgine hebraea . Filius in cunabulis terre
(même inscription pour la Sibylle de Pinturicchio)
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 20r :
Enluminure supérieure : l'Annonciation. Banderole de l'Ange Luc 1:28 Ave gratia plena dominus tecum ; banderole de Marie Luc 1:38 Ecce ancilla domini fiat [mihi] secundum verbum tuum
Enluminure inférieure : Isaïe confronté à saint Luc (bœuf), avec les banderoles Isaïe 7:14 Ecce virgo concipiet et pariet filium et vocabitur nomen eius Emmanuel et Luc 1:31 Ecce concipies in utero et paries filium et vocabis eius Iesum.
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La Sibylle Erythrée, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La sibylle Erythrée selon Baldini (1470-1480), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard), et Léonard Limosin vers 1535.
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6. La Sibylle Delphique et la couronne .
— Description.
Elle est semblable aux précédentes par la coiffure, le visage, le manteau, la courte fraise, les manches à crevés. Un bracelet au poignet droit. La main et le bras gauche ne sont pas visibles, et il faut les imaginer tenant la couronne de deux torons tressés et le linge qui y passe. Ce n'est en aucun cas une couronne d'épines (mais un trophée de vainqueur); par contre, le linge peut être comparé à celui dans lequel les anges présentent, en signe de respect, la couronne de la Passion.
— Baccio Baldini (vers 1470) : La Sibylle est sur une île : elle tient une très longue corne. elle est vêtue d'un manteau noir. On lit sur le Phylactère : "Nascetur propheta e virgine absque humana corruptione". : Le prophète naîtra d'une vierge sans "corruption humaine", sans acte sexuel."
Le Poème est le suivant :
Non e da eser lenta ma tranquilla
Averta lopera e chonsiderare
Dov el profeta grande a incharnare
Lavenimento che alta villa
Nel ventre verginal d'uman ancilla
sanza congiunto d'uom mortal sa fare
Eccho tal chosa fie sopra Natura
Fatta per chuel chepuo che idio da ra
— Filippo Barbieri : Sibilla Delphica vestita veste nigra et capillis circumligatis capiti, in manu cornu tenens et juvenis, quae ante Trojana belia vaticinata est, de qua Chrysippus ; ait : Nascetur propheta absque matris coitu ex virgin ejus. (le manuscrit de l'Arsenal contient jus.)
"La Sibylle Delphique est vêtue d'une robe noire et porte ses cheveux attachés autour de sa tête ; elle tient une corne et paraît jeune; elle a parlé avant la guerre de Troie, comme Chrysippe le dit. Elle a dit : " Un prophète naîtra d'une vierge, d'une mère sans accouplement ".
La sibylle de Delphes tenait dans cette description une corne. Vers 1471, Baldini la représenta tenant une longue corne évoquant une corne d'abondance. La corne se transforme en couronne dans les Heures de Louis de Laval.
— Prophète associé : Jérémie 31:21 : Revertere virgo Israhel revertere ad civitates tuas istas "Reviens, vierge d'Israël, Reviens dans ces villes qui sont à toi!"
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— Livre d'Heures de Louis de Laval folio 26v
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f60.item.zoom
"La Sibylle Delphique tient à la main une couronne d'épines. Voici l'inscription : « Delphica, XX annorum. Vaticinatur de Christi coronatione . Nasci débet propheta absque maris coitu de femina nomine Maria ex stirpe Judaeorum, filius Dei, nomine Jésus, qui videbitur in manibus infidelium et corona spinea coronabitur. "Nous rencontrons encore ici une prophétie composite, née de la combinaison d'un texte de Filippo Barbieri avec un texte de Lactance. La première partie de l'oracle se rapporte, comme tous ceux que donne Filippo Barbieri, à la naissance du Sauveur. Mais il fallait à notre théologien une phrase qui put s'appliquera la Passion: il la trouva dans Lactance qui fait prédire par la Sibylle le couronnement d'épines. Dès lors l'attribut de la Sibylle Delphique était tout indiqué." (E. Mâle)
Ma lecture : Sibila Delphica, XX. Hec autem bellum troyanum vaticinatur de Christi coronacione. Ut infra. / Huius prophecia est hec : Nasci debet prophetat absque maris coitu de femina nomine Maria ex stirpe Judaeorum, filius Dei, nomine Jesus, qui videbitur in manibus infidelium et corona spinea coronabitur. "Celle-ci prédit pendant la guerre de Troie le couronnement du Christ. Sa prophétie est la suivante : "Il naîtra un prophète par une mère fécondée sans accouplement d'une femme nommée Marie et d'origine Juive, le fils de Dieu, du nom de Jésus, qui sera livré aux mains des infidèles et sera couronné d'épines".
Émile Mâle passe sous silence les éléments concernant la virginité de la mère du "prophète" annoncé par cette Sibylle, alors que celle-ci est au centre des textes de Baldini, de Barbieri et des Heures de Louis de Laval.
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 27r :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f61.item.zoom
Enluminure supérieure : Le couronnement d'épines avec sur la banderole le Psaume 2:6 de David ego autem constitutus sum ab eo rex "C'est moi qui ai établi mon roi sur Sion"
Enluminure inférieure : le prophète Jérémie confronté à saint Jean, avec les banderoles Jérémie 20:7 Factus sum in derisum tota die omnes subsannant me "A longueur de journée je suis un objet de risée, tous se moquent de moi". / Matthieu 27:29 Milites plectentes coronam de spinis posuerunt super caput eius. "Les soldats tressèrent une couronne d'épines qu'il posèrent sur sa tête".
Comparer avec la Sibylle de Delphes du Pinturicchio (1492-1494), associée au prophète Osée.
https://it.wikipedia.org/wiki/Appartamento_Borgia#/media/File:Borgia_Apartment_019.jpg
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La Sibylle Delphique, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La sibylle Delphique selon Baldini (1470-1480), Baldieri (1481), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard), et Léonard Limosin vers 1535
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7. La Sibylle de Tibur tenant un gantelet. flanc sud du meuble.
— Description : Elle est coiffée d'un bonnet conique terminé par un gland et s'évasant en larges bords découpés autour de la tête. La robe est plissée , serrée par une ceinture et orné de deux bandes de tissus circulaires à fleurs, losanges et boutons. L'encolure en V du bustier très ajusté se termine par une broche en fleur. Les manches sont bouffantes et plissées aux bras, longues avec plis en accordéon aux avant-bras. La femme tient un gant (ou une main coupée) dans la main droite.
La sibylle Tiburtine ou Albunéa tient son nom de Tibur, aujourd’hui Tivoli où se situent les ruines de son temple. La main qu'elle tient symbolise la main du garde qui a souffleté le Christ au cours de la Passion.
— Frères Limbourg ; Riches Heures du duc de Berry 1410-1411. Folio 22r, La Vierge à l'Enfant, la Sibylle et l'empereur Auguste, illustrant l'Oraison à la Vierge.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Tr%C3%A8s_Riches_Heures_du_duc_de_Berry#/media/File:Folio_22r_-_The_Virgin,_the_Sibyl_and_the_Emperor_Augustus.jpg
— Feo Belcari (1471) :
Sara palpato l'invisibil verbo,
E poi germinera come radice
Seco sarai siccome il foglio acerbo
E non apparira bello e felice :
Gremio materno ne fara riserbo
Dipoi piangera Dio come infelice
E nascera di madre come Dio
Poi tra gli altri usera com' uomo pio.
— Baccio Baldini 1470-1478 :
La Sibylla Tiburtina Assise est dans un jardin, les épaules couvertes d’une peau de bête, et coiffée d’un chapeau aux bords en forme de feuillage. Elle tient un livre ouvert d’où s’échappe une banderole où on lit Nascetur in bettelem in nasaret annum Tivbitur regnante quieto tauro. Le poème en italien est le suivant :
Il gusto ddio alt tal mestier ma bito data
Chi vabbl col mie dir manifestato
Duna vergine cheffie nunsiata
E nasaret te per lei abitata
En bettalem sara manifestato
La carne dove dio fie humanato
E ben sara La sua mare filicie
Che di tal figlo si sara p[er] notricie.
— Filippo Barbieri : Sibylla Tyburtina (sic), quam Lactantius Tyburtem vocat, nomine A[l]bunea, quae Tyburi colitur ut dea juxta ripas amnis, in cujus gurgite simulacrum ejus inventum dicitur tenens in manu librum ; haec de Christo prophetavit : Nascetur Xristus in Bethleem et annunciabitur in Nazareth, regente Tauro pacifico, fundatore quietis : O felix mater cujus ubera illum lactabunt ! — Haec tunica crocea veslietur, violato mantello superimposito . "La Sibylle de Tibur, que Lactance nomme Tyburtem, nommée Albunéa, vivait près du Tibre et a été adoré comme la déesse de la rivière, dans les eaux de laquelle on dit qu'une statue d'elle, portant un livre, a été trouvée. Elle est vêtu d'une tunique dorée, recouvert d'un manteau pourpre. Elle dit ceci du Christ : " Il naîtra à Bethléem et sera révélé au taureau pacifique, fondateur calme. Ô heureuse la mère qui a allaité un tel fils ! ."
— Prophète associé selon Baldieri : Michée 5 :2 Et tu Bethleem Ephrata parvulus es in milibus Iuda ex te mihi egredietur qui sit dominator in Israhel et egressus eius ab initio a diebus aeternitatis. " Et toi, Bethléhem Éphrata, Petite entre les milliers de Juda, De toi sortira pour moi Celui qui dominera sur Israël, Et dont l'origine remonte aux temps anciens, Aux jours de l'éternité. "
—Livre d'heures de Louis de Laval folio 24v:
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f56.item.zoom
"La Sibylle de Tibur tient une main coupée. L'inscription est assez longue ; en voici d'abord la première partie : « Sibylla Tiburtina, XX annorum, quae prophetavit Romanis et vaticinata est de Christi alapatione. Flagellabit homines potentes, excelsus veniet et firmabit consilium in coelo, annuntiabitur virgo in vallibus desertorum... » Ce texte emprunté à Filippo Barbieri est obscur et, à vrai dire, n'offre à l'esprit aucun sens précis. C'est pourquoi notre théologien, désespérant d'en rien tirer, y ajouta ce passage de Lactance : « In manibus infidelium postea veniet, dabunt Domino alapas, accipiens tacebit, ne quis agnoscat. » Au moins cette seconde partie de la prédiction est claire : il s'agit du commencement de la Passion et des soufflets que Jésus reçoit sans se plaindre. Aussi est-ce le passage de Lactance qui a déterminé le choix de l'attribut : cette main coupée, que la Sibylle de Tibur porte comme un trophée barbare, c'est la main sacrilège qui a frappé le Christ '. Voilà pour la jeune Sibylle une étrange parure. Mais quoi ! nous sommes encore au temps où l'on coupe la main du parricide et du profanateur. " (E. Mâle)
— Lien typologique : Livre d'heures de Louis de Laval folio 25r :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f57.item.zoom
Enluminure supérieure : La Passion : sous le regard du grand prètre, trois hommes lèvent la main sur le Christ qui est assis, les yeux bandés. Banderole Isaïe 50 :6 Ego faciem non averti ab conspuentibus (faciem meam non averti ab increpantibus et conspuentibus in me)
Enluminure inférieure : David face au Christ (?). Banderole David psaume 69(68) :[quoniam propter te sustiniu obprobium] operuit confusio faciem meam "Car c'est pour toi que je porte l'opprobe, que la honte couvre mon visage". / Marc 14:65 : [Et coeperunt quidam conspuere eum et velare faciem eius et colaphis eum caeder et dicere ei prophetiza et] ministri alapis eum caedebant " Et quelques-uns se mirent à cracher sur lui, à lui voiler le visage et à le frapper à coups de poings, en lui disant : Devine ! Et les serviteurs le reçurent en lui donnant des soufflets".
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La Sibylle de Tibur, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle de Tibur selon Baccio Baldini (1470-1480), Filippo Baldieri (1481), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard).
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II. LE RETABLE POSÉ AU DESSUS DE L'AUTEL.
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8. La Sibylle Agrippa. Un fouet à deux lanières. Annonce la flagellation du Christ.
— Description : Sa coiffure est un bonnet divisé en oves et cerclé d'un rang de grosses perles. Elle porte une cape à fermail (une languette et deux losanges) dont le pan gauche revient sur l'avant-bras, et une robe au col ras-du-cou et au bustier ouvert sur le devant. La ceinture, ou baudrier, est très particulier, par sa largeur, ses découpures en larges feuilles, ses poinçons et boutons, mais surtout parce que de larges lanières y sont suspendues, terminées par des glands en boutons. La Sibylle porte dans la main droite un bâton où sont accrochées deux cordes, réalisant un fouet.
Le nom d' Agrippa est une déformation probable d'Aegypta, "l'égyptienne".
— Baccio Baldini 1470-1478 :
Assise sur un trône, elle montre de la main gauche le texte latin d’un livre grand ouvert sur ses genoux. On y lit : Hoc verbum invisibile tangi permittet et tan quam radices germinabit.
—Filippo Barbieri : Sibylla Agrippa sic ait de Christo : Invisibile verbum palpabitur et germinabit ut radix et siccabitur ut folium, et non apparebit venustas ejus et circumdabit eum alvus maternus et flebit Deus laetitia sempiterna et ab hominibus conculcabitur et nascetur ex matre ut Deus et conversabitur ut peccator.
Selon Mâle, "le manuscrit donne quelques détails sur l'aspect et le costume de la Sibylle Agrippa : Sibylla Agrippa, rosea vesta, cum chlamyde rosea, non multum juvenis, manum tenens in gremio quasi admirans et deorsum respiciens.
— Prophète associé par Barbieri : Isaïe 53, 2-3. Et ascendet sicut virgultum [...]
— Heures de Louis de Laval folio 25v:
"La Sibylle Agrippa porte un fouet. Au-dessus de sa tête on lit cette inscription : Agrippa, XXX annorum. Vaticinatur de flagellatione. Invisibile verbum palpabitur. .. et conversabitur ut peccator. Cette fois notre auteur a pensé que la phrase de Filippo Barbieri offrait un sens raisonnable. Il voulait y découvrir une nouvelle allusion à la Passion : il l'y a trouvée; mais il y a mis de la complaisance. Il est clair qu'il a traduit « verbum palpabitur » non pas par : « on pourra toucher le Verbe », mais par : « on frappera le Verbe ». Ce sens admis, il était tout naturel de donner un fouet comme attribut à la Sibylle Agrippa." (Émile Mâle)
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 26r :
Enluminure supérieure : Flagellation du Christ lié à la colonne. Banderole Psaume 37:18 de David Ego in flagella paratus "Je suis prêt au châtiment du fouet"
Enluminure inférieure : David (avec sa harpe) confronté au Christ (?) avec les banderoles Ps 128:3 Supra dorsum meum fabricabantur peccatores "Sur mon dos des laboureurs ont labouré" / Matthieu 27:26 Iesum autem flagellatum tradidit eis " Après avoir fait battre de verges Jésus".
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La Sibylle Agrippa, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle Agrippa selon Baccio Baldini (1470-1480), Filippo Baldieri (1481), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard), et Léonard Limosin vers 1535.
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9. La Sibylle Cimmérienne : une corne (un biberon) : annonce l'allaitement de Jésus.
— Description.
Le bonnet est relevé autour de la tête en larges bords découpés en feuilles. Le manteau, aux pans rassemblés par un bouton sous le menton, dégage les manches bouffantes et à crevés. L'élément le plus notable est un foulard noué devant la poitrine, et la boucle d'oreille en fleur. La corne tenue de la main droite est longue, évoquant un olifant et ressemblant à celle que tient la Sibylle Delphique de Baldini..
— Baccio Baldini 1470-1478 :
Assise sur des nuages ignés, elle tient un livre ouvert sur ses genoux. Sa tête est ornée de deux ailes maintenues par un ruban se terminant en deux volutes. SIbILLA CHIMICHA.Sa banderole dit In pueritia sua cum facie pulcherrima puerum nutriet suo lacte i lacte celitus misso
Le poème est le suivant :
Una vergina santa in pueritia
Cholla sua faccia gloriosa ebelle
Notrira re delelt terna milisia
Eber dellat te suo glidara puella
Perla chui siuedra lacta laetitia
Sopra avittoriale lasanta istella
E sara vicitata da choloro
Heglio ferranno incensio mira eoro
—Filippo Barbieri :
Sibylla Emeria (lire « Cimmeria) in Italia nata, Chimica, vestita cœlestina veste deaurata, capillis per scapulas sparsis, et juvenis, de qua Ennius ; ait : In prima facie virginis scendet puella pulchra facie, prolixa capillis, sedens super sedem stratam [nutrit puerum] , dans ei ad comedendum vis proprium, id est lac de cœlo missum.
"La sibylle Cimmeria, née en Italie, où on la nomme "Chimica" , est vêtue d'une robe bleue et or, avec les cheveux retombants sur les épaules. Ennius en parle. Elle a dit ceci : ".???????????
— Prophète associé par Barbieri : Joël 2, 29.: In diebus illis effundam spiritum meum "En ces jours je répandrai mon esprit"...
— Les Heures de Louis de Laval folio 22v
"La Sibylle Cimmérienne a pour attribut un vase en forme de corne, qui n'est pas autre chose qu'un biberon. L'inscription dit en effet : « Sibylla Cymeria, (annorum) XIIII Vaticinatur quo modo Virgo lacte t puerum. In prima facie virginis ascendit virgo quaedam... nutriens puerum, dans ei ad comedendum lac...» C'est donc l'allaitement d'un enfant par une vierge qu'annonce la prophétie. Il faut avouer qu'il n'était pas facile de trouver un attribut pour la Sibylle Cimmérienne : avec une naïveté qui fait sourire, l'artiste imagina de lui faire porter un biberon." (Émile Mâle)
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 23r :
Enluminure supérieure : Marie allaite Jésus dans la crèche en présence de Joseph. Banderole David Psaume 101:10 Potum meum cum fletu miscebam "Je mêle des larmes à ma boisson"
Enluminure inférieure : le prophète Isaïe confronté à saint Luc (taureau), avec les banderoles Isaïe 7:15 butyrum et mel comedet "Il mangera de la crème et du miel" / Luc 11:27 Beata ubera quae suxisti "Heureuse les mamelles qui t'ont nourri".
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La Sibylle cimmérienne, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle Cimmérienne selon Baccio Baldini (1470-1480), Filippo Baldieri (1481), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard).
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10. Sibylle Hellespontique tenant une grande croix. la Crucifixion. Sur la porte du tabernacle.
— Description.
Son costume est proche de celui de la Sibylle Persique. Son turban s'orne d'une fleur ou d'un nœud frontal. Même chevelure en mèches désordonnées. Courte fraise au ras du cou. Le manteau au col relevé n'est porté que sur le coté gauche, alors que le pan droit passe derrière l'épaule et est retenu par le bras opposé. Il dégage ainsi la robe bouffante sous l'épaule, se poursuivant par une manche rapportée cerclée d'anneaux d'étoffe et aux fins crevés. L'encolure de cette robe, carrée, est très basse, mettant en évidence la chemise plissée au col ornée de boutons. Sous une ceinture très haute, la robe aux plis ogivaux se mêle au pan du manteau. La croix est tenue de la main droite et repose sur l'épaule.
La sibylle hellespontine officiait à Dardanie, sur l'Hellespont. Née à Marpessos près de Troie, elle s’exprimait, selon Héraclite, « d’une bouche délirante, sans sourire, sans ornements, sans fards et sa voix parvenant au-delà de mille années grâce au dieu ». Elle rendait ses oracles sous la forme d'énigmes et les inscrivait sur des feuilles.
— Baccio Baldini (1470-1480) : SIbILLA / ·ELISPONTICA.
Assise sur un trône fait de branchages, elle tient un livre fermé et une banderole. Elle est coiffée d’un turban. La banderole dit Ex excelso habitaculo. Respexit deus humiles et in terris novissimis diebus ex hebrea virgine nascetur
Le poème est le suivant
Nella miescola stando vidi fare
Tanto nuna fantina grand onore
Qual en verginita sivvol salvai
E per divina gracia esso valore
Discendllei evienan carnare
Figlioi cheffia ditanto splendore
Effie diddio svo figli volvercie
Chettut tols econostro porranpacie
— Filippo Barbieri : Sibylla Hellespontica, in agro Trojano nata, vetusta et antiqua, veste rurali induta, ligato velo antiquo [capite] sub gula circumvoluta usque ad scapulas quasi despectu de qua scribit Heraclides ; dicens : De excelsis cœlorum habitaculo prospexit Deus humiles suos. Et nascetur in diebus novissimis de virgine hebraea in cunabulis terrae. "Née dans la campagne troyenne, vieille et très ancienne, vêtue d'une robe simple, un voile antique noué sous le menton et tombant sur les épaules. ainsi que dit Héraclite. Elle a dit : "Du plus haut des cieux Dieu a regardé vers le bas l'humble demeure. Et il naîtra d'une vierge juive dans un berceau ".
— Prophète associé "Jonas". (En réalité ce sont les paroles prononcées par Gédéon dans Juges 6:37) Ponam vellus hoc lanae in area, si ros in solo vellere fuerit, et in omni terra siccitas, sciam quod per manum meam, sicut locutus es, liberabis Israe Factumque est ita : de nocte consurgens et, expresso vellere, concham rore implevit. "Voici ce que je te demande: j'étendrai une toison de laine sur le sol de l'aire où l'on bat le blé. Si la rosée se dépose seulement sur la toison, et si tout le sol autour reste sec, je saurai que c'est par mes soins que tu veux délivrer Israël, comme tu l'as déclaré."
On sait que ces versets sur la toison de Gédéon ont été considérés par la tradition comme préfigurant la virginité de Marie.
—Heures de Louis de Laval folio 27v
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f62.item.zoom
"La Sibylle Hellespontique porte une grande croix. Et voici comment l'inscription justifie cet attribut : « Sibylla Hellespontica. L annorum. Vaticinata est de futur a Christi crucifixione. Jésus Christus nascetur de casta. Félix ille Deus ligno qui pendet ab alto. » Ici encore notre auteur a trouvé Filippo Barbieri trop peu significatif. La première phrase est de lui ; elle se rapporte, comme d'ordinaire, à la Nativité du Christ et à la virginité de la mère. Mais cette prophétie dix fois répétée ne pouvait suffire. Notre théologien, qui voulait raconter par la bouche des Sibylles toute la Passion, avait besoin d'un texte se rapportant à la mort de Jésus-Christ sur la croix. Lactance n'en parle pas. Il eut donc recours à un passage de Sozomène, qui devait être fameux, puisqu'on le trouve également inscrit sur les stalles d'Ulm. Par cet artifice, la Sibylle Hellespontique, qui n'annonçait jusque-là que la naissance de Jésus-Christ, put encore prédire sa mort sur la croix. " (E. Mâle)
Ma lecture : Sibilia aspontia. Annorum , L, nata in agro troyano temporibus tyu troyami~ vaticinata est de futura Christi crucifixione. Ut infra. / Ihs Xps nascetur de casta Flelix ille Deus ligno qui pendet ab alto.
— Typologie : Heures de Louis de Laval folio 28r
Enluminure supérieure : la Christ crucifié entre les deux larrons. Marie et Jean au pied de la Croix. Banderole Jean 12:32 Ego si exultatus fuero a terra omnia traham ad me. "Moi, quand j'aurais été élevé au dessus de la terre, j'attirerai tous les hommes à moi".
Enluminure inférieure : David devant saint Jean (sic). Banderole David Psaume 21:17 foderunt manus et pedes meos : "Ils ont percé mes mains et mes pieds" / Luc 23:33 In loco calvariae crucifierunt : "à l'endroit appelé "le Crâne" ils le crucifièrent."
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Sibylle Hellespontique, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle Hellespontique selon Baccio Baldini (1470-1480), Filippo Baldieri (1481), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard).
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11. Sibylle de Cumes : un petit bassin ou un pain rond.
— Description : Ses cheveux sont couverts par un voile mainten par un balzo au dessin soigné. Ce voile descend sur les épaules et croise devant la poitrine. Un manteau (notez la manche large terminé par un gland ou pompon) recouvre une robe au bustier ajusté et à la jupe plissée. La ceinture est ornée de découpures en forme de feuilles. La main droite retient le pan droit du manteau, et la main gauche tient une boule plus large qu'elle.
Cette boule n'est ni le coquillage de type Porcelaine, aussi nommé "Pucelage" ou "vulve de vierge" (Louis Réau) et qui représente la virginité de la Vierge et qui est parfois l'attribut de la Cuméenne. Ce n'est pas non plus la coupe d'or (cf. Louis de Laval), mais cela pourrait être la pierre de la prophétie de Daniel chap. 2 (cf infra). Émile Mâle note "qu'à Saint-Bertrand de Comminges (comme d'ailleurs dans le manuscrit de l'Arsenal enluminé par Jean de Montluçon, la Sibylle de Cumes, qui annonce un nouvel ordre de choses, porte à la main une sphère. Cette sphère symbolise sans doute le monde. Il se pourrait que le bassin rond (si difficile à expliquer) de la Sibylle de Cumes se soit transformé en sphère. "
Cette Sibylle tient son nom de la ville de Cumes, près de Naples. "Elle est aussi appelée Amalthée. Elle a vécu en même temps qu’Énée et on lui accorde une vie de mille ans. Le poète Ovide raconte dans ses Métamorphoses (XIV) qu’Apollon, épris des charmes de la sibylle de Cumes, offrit de réaliser son vœu le plus cher en échange de ses faveurs. Feignant d'accepter sa proposition, elle lui demanda autant d'années de vie que sa main contenait de grains de sable. Cependant, elle n'honora pas sa promesse. Or elle avait omis de formuler son vœu de manière à conserver toujours la fraîcheur de ses vingt ans et sa main contenait un millier de grains au moment de son vœu. Apollon l'exauça à la lettre, changeant ainsi le souhait en malédiction. Elle se mit à vieillir progressivement au fur et à mesure de son interminable existence, jusqu'à demeurer toute recroquevillée dans une bouteille suspendue au plafond de sa cave. Aux enfants qui lui demandaient ce qu'elle désirait, elle répondait : « je veux mourir ». Virgile décrit la descente d'Énée aux Enfers accompagné de la sibylle de Cumes (Enéide Livre VI : 1-42-263) ; elle lui avait montré où cueillir le rameau d'or, dans les bois sur les bords du lac d'Averne, rameau qui devait lui permettre de pénétrer dans le royaume d'Hadès."
La Cuméenne est évoquée dans les Bucoliques de Virgile (Bucolique IV 1-4), considéré comme le chantre de l'âge d'or et de l'accomplissement des siècles où le Ciel suscite sur terre une progéniture nouvelle.
— Baccio Baldini (1470-1480) : SIbILLA·CVMANA.
Assise sur des nuages ignés, elle porte un bijou sur son front ; ses cheveux torsadés, entrelacés de rubans, tombent sur ses épaules. Un voile passe au dessus de son épaule droite. Elle tient un livre ouvert portant une inscription. Iam redit et Virgo redeunt saturnia regnia... Iam nova progeimes celode muttit vr alto. sur une banderole au-dessus de sa tête .
Le poème est le suivant :
Lutimo mie parlar pie e veracie
Pero che giunt son gli utimi canti
Del venimento dello re di pacie
Dichicci salvera noi tutti quanti
E prendrera carn umana si gli placie
E mosterrassi umil at tutti chuanti
Per madre prende lumil verginella
la chual sara sopr ogni donna bella
— Filippo Barbieri :
Sibylla Cumana fuit tempore Tarquinii Prisci, scripsit de Christo haec, referente Virgilio in lib. Bucolic. in hunc modum "La Sibylle de Cumes, qui vivait à l'époque de Tarquin l'Ancien, et dont parle Virgile dans ses Bucoliques ainsi : " :
Ultima Cumaei venit jam carminis aetas ;
Magnus ab integro saeclorum nascitur ordo.
Jam redit et virgo, redeunt Saturnia regna,
Jam nova progenies cœlo demittitur alto.
Casta, fave (sic), Lucina, tuus jam regnat Apollo.
"Les Temps sont révolus qu'a prédits la Sibylle :
Les siècles, dans leur course immuable et tranquille,
A leur point de départ sont enfin revenus,
Et le dernier de tous, l'Age de fer, n'est plus.
Déjà revient Saturne, et la Vierge immortelle
Abandonnant les cieux reparaît parmi nous ;
Et les dieux, des humains cessant d'être jaloux,
Envoient sur notre Terre une race nouvelle.
Un Enfant doit bientôt au jour ouvrir les yeux ;
Souris, chaste Lucine, à sa venue au monde :
L'Age d'or va renaître et sur terre et sur l'onde ;
Déjà règne Apollon, ton frère glorieux." (Bucolique IV trad. Henri Laignoux 1939)
— Prophète associé par Barbieri Daniel Dan 2, 34-35. Abscissus est de monte lapis videbas ita donec abscisus est lapis sine manibus et percussit statuam in pedibus eius ferreis et fictilibus et comminuit eos tunc contrita sunt pariter ferrum testa aes argentum et aurum et redacta quasi in favillam aestivae areae rapta sunt vento nullusque locus inventus est eis lapis autem qui percusserat statuam factus est mons magnus et implevit universam terram. "...lorsqu'une pierre se détacha sans le secours d'aucune main, frappa les pieds de fer et d'argile de la statue, et les mit en pièces. Alors le fer, l'argile, l'airain, l'argent et l'or, furent brisés ensemble, et devinrent comme la balle qui s'échappe d'une aire en été; le vent les emporta, et nulle trace n'en fut retrouvée. Mais la pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne, et remplit toute la terre."
—Livre d'Heures de Louis de Laval folio 20v :
"La Sibylle de Cumes porte un petit bassin couleur d'or. « Sibylla Cumana, dit l'inscription, XVIII annorunm. Videtur vaticinari de nativitate Christi in Bethleem. Ultima Cumaei venit jam carminis aetas...», etc. On reconnaît les vers de Virgile cités par Filippo Barbieri. Ces vers, nous dit l'inscription, se rapportent à la Nativité de Jésus-Christ. Mais comment cette sorte d'écuelle d'or que tient la Sibylle peut-elle symboliser la Nativité ? C'est là une véritable énigme que les contemporains eux- mêmes n'entendaient guère. Car j'ai vu souvent les artistes du XVIe siècle donner à la Sibylle de Cumes, au lieu d'une écuelle, quelque chose qui ressemble à un pain rond, fendu par le milieu. S'il fallait proposer une hypothèse, je dirais volontiers que le bassin de la Sibylle est une réduction du cuvier où les sages-femmes lavent les nouveau-nés — épisode qui, au XVe siècle encore, accompagne parfois la Nativité."
Je lis Sibila Cumana in ytalia nata XVIII annorum que fuit tempere terquini de qua Virgilius prophetavit videtur vaticinari de nativitate Christi in Bethleem. / Ultima Cumaei venit jam carminis aetas Magnus ab integro saeclorum nascitur ordo. Jam redit et virgo, redeunt Saturnia regna, Jam nova progenies cœlo demittitur alto. Te duce si que manent sceleris vestigia mea. Irrita perpetua soluet formidine terras. Tu modo nascenti puero que fervea primum. Desmet et toto surget gens aurea mundo.
— Typologie des Heures de Louis de Laval folio 21r :
Enluminure supérieure : la Nativité et l'Adoration des Bergers, avec les banderoles de Luc 2:14 : Gloria in excelsis Deo et du Psaume 25:1 de David : Ego in innocentia mea ingressus "Je marche dans l'intégrité"
Enluminure inférieure : Isaïe face à saint Luc avec les banderoles portant le verset d'Isaïe 9:6 : parvulus enim natus est nobis filius datus est nobis "Car un enfant nous est né, un fils nous est donné". / Luc 2:7 : Peperit filium suum primogenitum : "elle enfanta son fils premier-né."
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Sibylle de Cumes, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle de Cumes selon Baccio Baldini (1470-1480), Filippo Baldieri (1481), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard), les émaux de Léonard Limosin..
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12. La Sibylle Persique tenant sa lanterne .
— Description : Même coiffure à balzo, même visage rond, mêmes cheveux en mêches mi-longues, même fraise courte autour du cou, même chemise à col rond et serré que beaucoup de ses consœurs. L'ample manteau fait retour vers le poignet droit. Un bustier à décolleté carré sur une jupe plissée. La Sibylle tient une lanterne dans la main gauche et foule un serpent sous le pied gauche.
La Sibylle Persique est la fille de Berosos et d’Erymanthé et on la nomme parfois Sabbé
— Baccio Baldini 1470-1478 :
Assise dans un jardin, coiffée d’un hennin, elle tient un livre ouvert sur ses genoux et fait un geste de la main droite. L'inscription indique Ecce filius dei bellua equitans dominus universi cuiusque gentium salutis virgine erit et fiet nobis hoc verbum palpabile.
— Filippo Barbieri (1481) : Sibylla Persica vestita veste aurea cum vélo albo in capite dicens sic : Ecce bestia conculcaberis et gignetur Dominus in orbe terrarum, et gremium virginis erit salus gentium et pedes ejus erunt in valitudine [sic] hominum. "La Sibylle Persique est vêtue d'une robe dorée avec sa tête couverte d'un voile blanc, et elle proclame : ".Voici que le serpent sera foulé sous ton talon, que le Seigneur sera enfanté sur le globe de la terre, et le sein de la Vierge deviendra le salut du monde ; le verbe invisible sera palpable ."
— Prophète associé par Barbieri : Osée 13:14. De manu mortis liberabo eos de morte redimam eos ero mors tua o mors ero morsus tuus inferne consolatio abscondita est ab oculis meis "Je les rachèterai de la puissance du séjour des morts, Je les délivrerai de la mort. O mort, où est ta peste? Séjour des morts, où est ta destruction? Mais le repentir se dérobe à mes regards!"
— Heures de Louis de Laval folio 17v :
"On va voir clairement ce que l'artiste (aidé sans aucun doute d'un lettré) a emprunté à Lactance, ce qu'il a emprunté à Filippo Barbieri, et enfin ce qu'il a imaginé. Au-dessus de la Sibylle Persique on lit une inscription ainsi conçue : « Sibylla Persica, XXX annorum, cujus mentionem facit Nicanor. » — Et d'abord nous reconnaissons que cette indication précise : « la Sibylle Persique, dont Nicanor fait mention », est empruntée à Lactance. Sous les pieds de la Persique il y a une autre inscription. Cette fois c'est la Sibylle qui parle et elle dit : « Ecce bestia conculcaberis et gignetur Dominus in orbe terrarum et gremium virginis erit salus gentium... » Il ne nous faudra pas longtemps pour nous apercevoir que ce sont les propres paroles que Filippo Barbieri assigne à la Sibylle Persique. — Mais voici quelque chose de tout nouveau : la Persique porte à la main une lanterne et foule aux pieds un monstre. D'où viennent ces attributs? — Ils sont une invention de l'artiste, ou plutôt de son collaborateur le théologien. On lit, en effet, au-dessus de la tête de la Sibylle cette explication : Videtur [Persica) vaticinari de futuro salvatore gentium sub nubilo. « La Persique semble annoncer le Sauveur sous un nuage. » L'oracle est obscur, en effet, et, pour exprimer que la lumière en est comme voilée, l'artiste a remis aux mains de la Sibylle une lanterne d'où filtre une vague lueur. Quant au monstre que la Persique foule aux pieds, c'est la bête dont parle l'oracle : « Ecce bestia conculcaberis. » Un dernier détail semble encore de l'invention de notre théologien. L'inscription, en effet, donne à la Sibylle un âge précis : elle a trente ans. Il n'y a rien de pareil ni dans Lactance ni dans Filippo Barbieri. Ce dernier, toutefois, pouvait mettre sur la voie de cette bizarre imagination. Il dit, en effet, à deux ou trois reprises, que telle Sibylle est vieille et telle autre jeune; mais jamais il n'a eu l'idée d'assigner à ses prophétesses un âge déterminé. "(E. Mâle)
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52501620s/f47.vertical
— Typologie des Heures de Louis de Laval : folio 18r.
Enluminure supérieure : la Vierge à l'Enfant apparaissant à Abraham et à la sibylle de Perse. L'Enfant tient la banderole du verset Jean 8:58 Antequam Abraham fuit ego sum : " Jésus leur dit: En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu'Abraham fût, je suis.".
Enluminure inférieure : David confronté à saint Jean. David tenant sa harpe tient la banderole du verset 5 du Psaume 82 Intellexerunt in tenebris ambulant. "[Ils n'ont ni savoir] ni intelligence. Ils marchent dans les ténèbres.". Jean tenant le calice de poison présente la banderole de Jean 1 Lux in tenebris lucet. "La lumière luit dans les ténèbres, [ et les ténèbres ne l'ont point reçue]".
— Voir aussi : Le Mistère du vieil testament, éd. J. de Rothschild, SATF, t. VI, 1891, p. 215 Cité par D. Hüe.
sibilla persica
Ung temps viendra que le serpent despit
Se mussera au centre de la terre;
Vaincu sera sans avoir nul respit;
Le Filz de Dieu luy viendra faire guerre. 49150
Lors le serpent sera tenu en serre,
Car la Vierge son filz germinera,
Puis descendra pour nostre salut querre;
En ce monde sa lumiére estandra.
Le lien qui unit cette Sibylle Persique avec la statue de la Vierge foulant la démone de l'église de Brennilis est évident.
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Voici d'à bord la Sibylle Persique(fig.i 34). On va voir clairement ce que l'artiste (aidé sans aucun doute d'un lettré) a emprunté à Lactance, ce qu'il a emprunté à Filippo Barbieri, et enfin ce qu'il a imaginé.
Au-dessus de la Sibylle Persique on lit une inscription ainsi conçue : « Sibvlla Persica, XXX annorum, cujus mentionem facit Nicanor. » — Et d'abord nous reconnaissons que cette indication précise : « la Sibylle Persique, dont Nicanor fait mention », est empruntée à Lactance 3 . Sous les pieds de la Persique il y a une autre inscription. Cette fois c'est la Sibylle qui parle et elle dit : « Ecce bestia conculcaberis et gignetur Dominus in orbe ter- rarum et gremium virginis erit salus gentium... » Il ne nous faudra pas long- temps pour nous apercevoir que ce sont les propres paroles que Filippo Barbieri assigne à la Sibylle Persique. — Mais voici quelque chose de tout nouveau : la Persique porte à la main une lanterne et foule aux pieds un monstre. D'où viennent ces attributs? — Ils sont une invention de l'artiste, ou plutôt de son collaborateur le théologien. On lit, en effet, au-dessus de la tête de la Sibylle cette explication : Videtur [Persica) vaticinari de futuro salvatore gentium sub nubilo. « La Persique semble annoncer le Sauveur sous un nuage. » L'oracle est obscur, en effet, et, pour exprimer que la lumière en est comme voilée, l'artiste a remis aux mains de la Sibylle une lanterne d'où filtre une vague lueur. Quant au monstre que la Persique foule aux pieds, c'est la bête dont parle l'oracle : « Ecce bestia conculcaberis. » Un dernier détail semble encore de l'invention de notre théologien. L'inscription, en effet, donne à la Sibylle un âge précis : elle a trente ans. 11 n'y a rien depareil ni dans Lactance ni dans Filippo Barbieri. Ce der- nier, toutefois, pouvait mettre sur la voie de cette bizarre imagination. Il dit, en effet, à deux ou trois reprises, que telle Sibylle est vieille et telle autre jeune; mais jamais il n'a eu l'idée d'assigner à ses prophétesses un âge déterminé. -
Voici d'à bord la Sibylle Persique(fig.i 34). On va voir clairement ce que l'artiste (aidé sans aucun doute d'un lettré) a emprunté à Lactance, ce qu'il a emprunté à Filippo Barbieri, et enfin ce qu'il a imaginé.
Au-dessus de la Sibylle Persique on lit une inscription ainsi conçue : « Sibvlla Persica, XXX annorum, cujus mentionem facit Nicanor. » — Et d'abord nous reconnaissons que cette indication précise : « la Sibylle Persique, dont Nicanor fait mention », est empruntée à Lactance 3 . Sous les pieds de la Persique il y a une autre inscription. Cette fois c'est la Sibylle qui parle et elle dit : « Ecce bestia conculcaberis et gignetur Dominus in orbe ter- rarum et gremium virginis erit salus gentium... » Il ne nous faudra pas long- temps pour nous apercevoir que ce sont les propres paroles que Filippo Barbieri assigne à la Sibylle Persique. — Mais voici quelque chose de tout nouveau : la Persique porte à la main une lanterne et foule aux pieds un monstre. D'où viennent ces attributs? — Ils sont une invention de l'artiste, ou plutôt de son collaborateur le théologien. On lit, en effet, au-dessus de la tête de la Sibylle cette explication : Videtur [Persica) vaticinari de futuro salvatore gentium sub nubilo. « La Persique semble annoncer le Sauveur sous un nuage. » L'oracle est obscur, en effet, et, pour exprimer que la lumière en est comme voilée, l'artiste a remis aux mains de la Sibylle une lanterne d'où filtre une vague lueur. Quant au monstre que la Persique foule aux pieds, c'est la bête dont parle l'oracle : « Ecce bestia conculcaberis. » Un dernier détail semble encore de l'invention de notre théologien. L'inscription, en effet, donne à la Sibylle un âge précis : elle a trente ans. 11 n'y a rien depareil ni dans Lactance ni dans Filippo Barbieri. Ce der- nier, toutefois, pouvait mettre sur la voie de cette bizarre imagination. Il dit, en effet, à deux ou trois reprises, que telle Sibylle est vieille et telle autre jeune; mais jamais il n'a eu l'idée d'assigner à ses prophétesses un âge déterminé. -
La Sibylle Persique, autel du bas-côté Sud, église Notre-Dame de Brennilis. Photographie lavieb-aile.
La Sibylle Persique selon Baccio Baldini (1470-1480), Filippo Baldieri (1481), les Heures de Louis de Laval (avec la page de typologie en regard).
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DISCUSSION. LES SIBYLLES ET L'IMMACULISME.
L'un des vitraux les plus singuliers de Brennilis représente sainte Anne portant en son ventre la Vierge sous forme d'une petite fille dorée et irradiante, avec les inscriptions Sainte Conception et Chaste Mariage : il s'agit d'un manifeste incontestable en faveur de la conception immaculée de Marie, point théologique qui n'est pas alors un dogme, mais fait l'objet d'âpres discussions entre "maculistes" (proche des Dominicains) et "immaculistes" (proches des Franciscains). Or, à bien y regarder, le développement de l'iconographie des Sibylles au XVe et XVIe siècle semble bien appartenir à un courant immaculiste. Dès lors, la présence des 12 Sibylles de Notre-Dame de Brennilis s'intégrerait dans un programme iconographique non seulement marial, mais aussi liée à ce courant. Voici quelques arguments.
1. Datation.
Une datation précise de ces 12 Sibylles de Brennilis serait utile pour ouvrir cette discussion. On sait (pierre de fondation) que l'église, alors chapelle tréviale de Loqueffret, a été fondé en 1485, que le chœur et le transept ont été vitrés vers 1492-1498 (baie 1 et 2), ou après 1500 (baie axiale), que la statue de Notre-Dame de Breac-Ellis a été datée vers 1575 par Christine Prigent. Le créneau vraisemblable pour les panneaux des Sibylles se situerait selon ces données d'activité d'aménagement de l'église entre 1500 et 1575.
Un autre indice concerne les autres Sibylles d Finistère (cf. Annexe). La poutre de gloire de Lampaul-Guimiliau date entre 1533 (fondation de l'église) et 1599. Les panneaux du chancel de Saint-Herbot datent "de la seconde moitié du XVIe siècle" (R. Couffon) .
Enfin les costumes portés par les Sibylles peuvent donner des informations. Les fraises qui entourent leur cou sont courtes, correspondant à la mode entre 1530 et 1550.
2. Source iconographique.
Si on admet un créneau de datation vers 1530-1550, les artistes menuisiers (huchiers) pouvaient s'inspirer des modèles développés à partir des gravures des livres d'heures de Simon Vostre, facilement disponibles. Ceux-ci reprennent eux-mêmes la systématisation mise en place par Jean Colombe pour Louis de Laval.
3. Influence des Sibylles florentines de 1471.
Comme Émile Mâle l'a souligné, le renouveau du thème des Sibylles, et l'augmentation de leur nombre à douze, est survenu en Italie et notamment à Florence à l'occasion de la représentation d'un Mystère de l'Annonciation (Sacre rappresentazioni dell'Annunciazione di Nostra Donna). Le texte avait été rédigé par l'écrivain pieux Feo Belcari, un membre de l'entourage de Laurent le Magnifique. Ce mystère fut joué à Florence, en 1471, à l’occasion de la visite du duc Galeazzo Maria Sforza. Dans le texte qui nous est parvenu, texte publié en 1872 par Alessandro d’Ancona , Rappresente della Annunziazione di Feo Belcari in Sacre rappresentazioni dei secoli xiv, xv, xvi, Firenze, 1872, t. I, p. 167-182, un ange invite les prophètes et les sibylles à dire ce qu’ils savent du Sauveur promis aux hommes par Dieu et à révéler sa miraculeuse naissance. C’est par des couplets de huit vers prophétiques qu’ils s’expriment, en alternance (deux prophètes, une sibylle). Puis l’ange Gabriel, envoyé par Dieu, annonce à la Vierge qu’elle enfantera le Sauveur. Les sibylles se nomment Eritrea, Sofonia, Persica, Pontica, Samia, Micchea, Osea, Cumana, Tiburtina, Zaccheria.
Le Mystère s'achève par les paroles de l'Annonciation (Ave Maria Gratia Plena Dominus Tecum ...) suivies par un chant entonné par Gabriel. Il débute par les mots Vergine santa immacolata e pia , "Vierge sainte, immaculée et pieuse".
La Sainte Représentation montre donc comment la virginité de Marie et son rôle dans le plan du Salut a été annoncé au peuple hébreu par les prophètes et aux païens par les Sibylles, pour se conclure par une affirmation de sa conception immaculée.
C’est ce mystère que le graveur florentin Baldini a « illustré » vers 1470-1480, gravant sous chaque personnage les vers correspondants. Ceux-ci font allusion à l’avènement du Verbe, Fils du Père, né d’une vierge juive, à sa mort, à sa résurrection. Ils qualifient le Messie de Soleil naissant, de Clef de David, de Miroir sans tache, d’Étoile divine, de Roi des rois, de Sauveur, de Roi de la paix, de Bon Berger, de Salut des nations, d’Emmanuel (« Dieu est avec nous »). Ils insistent sur la virginité de la Mère du Sauveur et évoquent le Démon vaincu. Mais dans les gravures de Baldini, le nombre des figures représentées est supérieur à celui des prophètes et des sibylles évoqués dans le texte, ce qui est expliqué par Gisèle Lambert ainsi : ce genre de spectacle s’enrichissant en effet au fur et à mesure de ses représentations, Baldini s’est probablement inspiré de sa forme définitive, postérieure à celle qu’a découverte Alessandro d’Ancone. Certains historiens ont également envisagé une autre source littéraire – qui reste à découvrir –, commune à Belcari et à Baldini.
Certaines sibylles sont communes au mystère et aux gravures : les sibylles de Perse, de Samos, de Cumes, de Tibur, de l’Hellespont et la sibylle d’Érythrée ; le texte est identique pour la sibylle persique, présente quelques variantes pour celles d’Érythrée et de Samos ; il diffère pour les sibylles de Cumes, de l’Hellespont, de Tibur.
En somme, à Florence vers 1470, une série de douze Sibylles a été définie, chacune avec son nom, sa présentation iconographique, et surtout sa prophétie fortement orientée vers l'annonce de la Vierge comme Mère du Sauveur.
4. Influence des Heures de Louis de Laval. Première organisation de la série sybilline.
Le concepteur des Heures de Louis de Laval-Châtillon (son chapelain Sébastien Mamerot ?) a organisé pour la première fois la série de 12 Sibylles italiennes (Baldini et Barbieri) dans une séquence cohérente déterminée par les épisodes de la Vie de la Vierge et de la Passion du Christ. La présentation en double page associe étroitement chaque prophétesse avec un événement évangélique, et offre à la dévotion individuelle (celle sur laquelle repose la lecture d'un livre d'Heures) un support mnémotechnique spatial et temporel (cf. Frances A. Yates 1987, L'Art de la mémoire ) aidé par le choix d'attributs simples, spécifiques (auparavant, les sibylles portaient indifféremment le livre de leur prophétie et levaient l'index vers le ciel) et expressifs. Les douze Sibylles traçaient ainsi un parcours de méditation et de participation émotionnelle (comme, plus tard, les 12 stations des Chemins de croix) et leur ensemble s'ajoutaient aux séries numériques énumérées dans les chapelles : 12 apôtres du Credo apostolique, 12 prophètes du Credo prophétique, 8 à 12 panneaux de la Vie de la Vierge ou des Passions des vitraux du Finistère, etc...
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5. Les Heures de Louis de Laval et leur postérité, et la thèse immaculiste.
J'ai déjà signalé que Louis de Laval s'est fait représenter dans ces Heures au folio 51r, sous l'inscription AVE MARIA GRATIA PLENA DOMINUS agenouillé devant la Vierge à l'Enfant elle-même sous l'inscription SANCTA ET IMMACULATA VIRGINITAS.
À la mort de Louis de Laval le 21 août 1489, les précieuses Heures furent léguées par ce dernier à Anne de Beaujeu, fille du roi Louis XI et épouse du duc Pierre II de Bourbon, dont il était un proche. Elles passérent ensuite en possession de la fille d'Anne, Suzanne de Bourbon et de son époux Charles III de Bourbon, connétable de France. Or, les Bourbons, et notamment Anne de Beaujeu et son époux sont bien connus pour leurs convictions immaculistes, comme en témoignent, dans leur Collégiale de Moulins, le triptyque de Jean Hey et le vitrail très particulier de l'Arbre de Jessé. Le culte de sainte Anne est, par l'intermédiaire de l'épisode du Baiser sous la Porte Dorée, étroitement lié à la défense de l'idée d'une conception sans relation charnelle, et donc sans tache, de la Vierge ; aussi les prénoms d'Anne et de Suzanne (fille d'Anne de Beaujeu) sont-ils à remarquer.
Dans la thèse de Julien Abed, "La Parole de la sibylle. Fable et prophétie à la fin du Moyen Âge", un ultime chapitre intitulé « La sibylle, la Vierge et la reine » étudie le lien qui a uni le personnage des sibylles aux reines de France.
" La communication politique propre au royaume de la fleur de lys a utilisé la sibylle pour propager l’image d’une vierge mère d’un héritier royal. On en trouve des traces dans l’Épître à Marie d’Orléans de François Villon datée de 1457, mais elle s’épanouit surtout à la fin du Moyen Âge avec Anne de Beaujeu [...] ou Louise de Savoie (mère de François Ier), qui ont toutes entretenu, par la commande de livres d’heures, de tapisseries ou d’ouvrages pro-féminins, l’écho des paroles sibyllines. Une rivalité de maternité royale entre ces deux dernières pourrait expliquer deux manuscrits de processions sibyllines trouvés à la Bibliothèque nationale, où l’annonce par douze sibylles de la naissance d’un enfant-Sauveur dans le sein d’une Vierge pourrait signifier l’apparition d’un héros dans la Famille de France, image terrestre de la Sainte Famille."
En poursuivant les réflexions sur les relations privilégiées entre les Heures de Louis de Laval et le couple Anne de Beaujeu / Pierre de Bourbon, on ne peut manquer d'être frappé par le fait que ce couple est le commanditaire des vitraux réalisés entre 1507 et 1513 par Arnaud de Moles de la cathédrale d'Auch et qu'ils y figurent en médaillon en baie 4 :
http://www.mesvitrauxfavoris.fr/index_htm_files/Auch%20et%20les%20Sibylles.pdf
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b7741843h.r=&rk=386268;0
On trouve :
Baie 2 : Noé. L'Annonciation annoncée par une sibylle tenant un rameau fleuri. La sibylle d'Érythrée.
http://phototheque-peuriot-ploquin.com/piwigo/picture.php?/3253/categories
Baie 3 : la Sibylle de Samos tenant un berceau. Inscription « Sibyla Samie / Vingt et quatre ans eut quand elle dis." au dessus de la Nativité.
http://phototheque-peuriot-ploquin.com/piwigo/picture.php?/3258/categories
Baie 4 . Au tympan, Sibylle Persique tenant une lanterne face au prophète Elie. Anne de Beaujeu et son mari en médaillon.
Baie 6 : Sibylle Libyque tenant un cierge entre Moïse et Enoch. Registre inférieur : la sibylle de Tibur montrant la Vierge et l'Enfant à l'empereur Auguste.
http://phototheque-peuriot-ploquin.com/piwigo/picture.php?/3260/categories
Baie 8 : La Sibylle Europe tenant une épée entre Josué et et le prophète Amos. Registre inférieur : la Fuite en Égypte.
http://phototheque-peuriot-ploquin.com/piwigo/picture.php?/3262/categories
Baie 13 : la Sibylle Agrippa tenant un fouet, entre Jérémie et Nahum. Registre inférieur : la Flagellation.
http://phototheque-peuriot-ploquin.com/piwigo/picture.php?/3248/categories
Baie 14. Sibylle Cimmérienne tenant une corne entre Daniel et Saint Matthieu. Registre inférieur : Daniel dans la fosse aux lions.
http://phototheque-peuriot-ploquin.com/piwigo/picture.php?/3259/categories
Baie 16 : Sibylle de Tibur tenant une main coupée, avec l'inscription SIBILLE TIBURTINE. Esdras et Abacuc. Chapelle de la Passion.
http://phototheque-peuriot-ploquin.com/piwigo/picture.php?/3251/categories
Baie 17 Chapelle de l'Ascension Sibylle de Delphes tenant la couronne d'épines. Registre inférieur : le couronnement d'épines.
Baie 18 : inscription :Le 25 juin 1513 furent achevées les présentes vitres en l'honneur de Dieu et de Notre-Dame.
On retrouve donc non seulement les mêmes attributs que dans les Heures de Louis de Laval, mais aussi la même association aux épisodes de la vie de la Vierge et du Christ. Enfin, les époux de Beaujeu se sont fait représenter sous la sibylle Persique, la première de la série de Louis de Laval, celle qui foule le serpent et annonce la conception immaculée de Marie.
Jean Robertet, le duc et la duchesse de Bourbon.
Enfin, l'un des "Sibyllologues" du XVIe siècle fut le grand rhétoriqueur Jean Robertet (mort en 1502 ou 1503), qui rédigea Les Ditz prophétiques des Sibylles (ou "Ce sont les douze sibylles" ou "poeme des douze sebilles"), publié dans la Nef des Dames Vertueuses de Symphorien Champier paru en 1503 (Son nom est cité au au colophon f.58 :" Les Oracles sibyllins sont traduits du grec en latin par Lactance, traduits en français et commentés par S. Champier et J. Robertet." ) Voir les folio 14-15 où sont gravées les figures de quatre Sibylles, dont l'une avec sa corne et l'autre avec sa fleur. . Or, non seulement Jean Robertet est connu pour ses Heures, enluminées par Fouquet et par Jean Colombe (comme celles de Louis de Laval), mais aussi il fut notaire, bailli d'Usson secrétaire et conseiller du duc de Bourbon (en 1461) à la cour de Moulins puis secrétaire et valet de chambre du roi Louis XI, et greffier de l'Ordre de Saint-Michel. Margaret Zsuppàn, qui a publié les Oeuvres critiques de Robertet, pense qu'il a écrit les Douze Sebilles pendant qu'il était au service d'Anne de France (Anne de Beaujeu, duchesse de Bourbon). Les poèmes furent écrits après la parution du livre de Barbieri, et ils trouvent leurs sources dans Barbieri et dans Lactance. Voir Oeuvres, page 140-147. Chaque poème est suivi d'une longue glose et illustré par la gravure d'une Sibylle stéréotypée, soit l'index levé, soit tenant une corne dressée, soit tenant une fleur, sans distinction spécifique. Les Sibylles sont traitées page 14-15 et pages 58 à 73. Les poèmes de Robertet occupent les pages 70 à 71 et sont titrés Les dits prophetiques des sibilles tires du latin et composes par feu messire iehan robertet en son vivant notaire et secretaire du roy nostresire et de monseigneur de bourbon greffier de l'ordre et du parlement delphinal. En marge de chaque poème est copié le texte oraculaire de Barbieri. On trouve ensuite page 72-73 une liste nommée Cy après comencent les ditz des prophetes avec aultres ditz des sibilles concordans ausditz prophetes avec la citation des oracles selon Barbieri et la concordance Sibylle/Prophète de cet auteur : Osée, De manu fortis liberabo eos Persica Jérémie XIII. Libica Jérémie XXXI. Delphica -Joél II. Emeria -Ezéchiel XLIIII, etc...
En résumé cet ouvrage de 1503 montre 1) le rôle de la cour ducale de Moulins dans la diffusion du thème des Sibylles. 2). L'influence déterminante du livre de Filippo Barbieri. 3). Des relations probables entre Robertet et Louis de Laval, et des artistes (J. Colombe) et poètes (J. Robertet) sur les Heures de Louis de Laval.
:
Extrait :
Sebille Libie
Du pais fuz extraicte qui s'apelle Libie ;
Des choses advenir parlay moult en ma vie ;
Je diz que Jhesuscrist nostre jou osteroit
A noz colz importable, et nous delieroit
Des loix et des liens violens et iniques :
Ainsi le treuve l'en mes ditz prophétiques.
Sebille Erithrée
Je fuz dicte Sebille, par surnom Erithrée,
Par mes livres trouvez dedans celle contrée :
En Babillon fuz née où je feiz mainct dicté
Des choses à venir, selon la vérité
Du jugement le signe, terre en sueur madante ;
aussi diz que du ciel le Roy feroit descente
Et seroit à toujours par tous ciecles durable
Oncques aucteur n'escrist chose plus veritable.
Sibylle Cumane ou Almathée
De Cumes fuz native , cité belle en Champaigne ;
en Italie fuz aux Sibilles compaigne ;
Almathea mon nom estoit, ainsi se treuve.
A Tarquinus Priscus neuf livres feiz d'espreuve
Pour savoir gouverner Rome en choses doubtables,
Parquoy furent escriptz les decretz veritables.
Sibille Agrippe.
Je fus Sibille Agrippe nommée par droit nom :
De mes dis prophetaulx par tout est grand renom.
De l'Incarnation du verbe, dieu palpable,
En visibilité j'escripts mains mots notables.
Que mes livres a leu entendra le mistère
Comment je prédisoye que Dieu naistroit de mère
Joinct à humanité et aprés mainte peine
Requérant à tousjours en gloire souveraine.
.
5. Les Sibylles et la Fête aux Normands.
a) Le Triomphe des Normands de Guillaume Tasserie.
Si le culte de l'Immaculée Conception est chère au duc et à la duchesse de Bourbon, il l'est d'avantage encore aux Normands, qui les premiers ont institué en France une fête de la Conception de la Vierge Marie le 8 décembre, rapidement nommée "La fête aux Normands", et qui ont organisé à Rouen un concours (un "puy") de poésie de louange de cette conception sans tache. Ce sont les champions acharnés de cette cause. Il est donc significatif qu'en 1474 ait été composé et joué, sans-doute à Rouen, le Mystère de l'Incarnation et Nativité de Notre-Sauveur, où la Sibylle de Tibur apparaît dès les premières pages pour prédire la venue du Messie, mais bien plus encore que Guillaume Tasserie ait écrit et ait fait joué en 1499 le Le Triomphe des Normans composé par Guillaume Tasserie traictant de la Immaculée Concepcion Nostre Dame .
Ce Triomphe a été composé pour la Confrérie de l'Immaculée Conception ou Puy des Palinods de Rouen. Longtemps inédit, il a été publié en 1908 par Pierre Le Verdier à partir du manuscrit de la Bibliothèque Nationale, français, 24315. Son auteur Guillaume Tasserie obtint,en 1490, à Rouen, le prix du chant royal pour sa pièce à la palinode,
Belle sans si en sa conception, qui se termine par l'envoi
Gentilz Normans, soyés donc curieux
De festiver en grand devosion
Le sainct concept de la Royne des cieux,
Belle sans si.
Cette formule Belle sans sy (sans pareil) en sa conception se retrouve avec une variante (Seule en sy) comme un slogan de la cause immaculiste sur le vitrail (vers 1540) de Marie entourée des symboles bibliques de Conches. Elle dit de manière condensée que la Vierge fut la seule du genre humain à échapper au Péché Originel, fatalement transmis selon Saint Augustin à tout enfant né de la concupiscence des parents, du désir sexuel et de l'acte de chair.
Premier lauréat du chant royal aux concours de 1490 et 1491, Guillaume Tasserie n'eut que le second prix en 1493, 1495, et 1498. Couronné cinq fois, il fut élu prince, en 1499. C'est l'un des champions de l'Immaculée Conception.
Or, dans son Triomphe des Normans, 8 des 12 Sibylles sont citées par "Autorité", et les textes prophétiques latins qui leur sont attribués comportent quasiment tous le terme virgo "Vierge". Ces sibylles sont nommées Tiburema, Erichia, Libica, Samica, Eleponna, Delphica, Cumana, et Frigia. :
AUCTORITÉ.
0 tres elegant et tres sage,
Rendant justice en tout passage,
Roy erigé tres ardument,
En parler doy je aucunement ?
Enseigner si grand personnage
Non pensant enseigner Minerve !
Mais puis qu'il vous plaist que je serve
En bon et juste tesmoignage,
Je diroy touchant ce passage,
Sans estre a ce faire proterve.
La commune voix la renomme
Mere du Saulveur, Dieu et homme.
Saincte Eglise en chante Pulcra
Es et decora filia
Jerusalem; ainsi la nomme
Electa ut sol, toute belle,
Pulcra ut luna, elle est telle!
Oncques son corps ne macula,
Car elle est de mer clere estelle.
Dieu de toutes vertus l'arma,
Car plus que les aultres l'ama,
Qui sont polués en leurs conceptz.
Ezechiel en dit : princeps
ipse sedebit in ea.
Plus,Ysaïe a compilé
Quod lignum imputribile
Elegit suam. Pour quoy doncques
Qu'il n'y eust villainye quelconques
En l'âme, est impossible.
0 felix, namque es sacra
Piissima virgo Maria,
Beneuree sur toute femme,
Puis que saincte Eglise la fame
Omni laude dignissima.
Plus, Sibilla Tiburema
Prophetisant du temps futur
Escript ainsi Firmabitur
Consilium in celo
Et annuntiabitur virgo
in terris. Ainsi en parla
Item Sibila Erichia
In novissimis diebus
Nascetur Deus et agnus
De virgine hebraïca.
Item, Sibila Libica
Qui pleine de grace fut moult,
Escript en ce point videbunt
Omnes regem vinctum
Et virgo tenebit illum
Voire, in gremio domina
Gentium. Item Sibila
Samica, in hoc modo
Parlant d'elle sedit virgo
Pulcra nutriens puerum
Quem gentes vocabant Jhesum
Et Sibille Eleponna
Christus nascetur ex casta
Felix ille deus ligno
Vinctus qui pendet ab alto
Item, Sibila Delphica
A dit : Nascetur propheta
Absque mari et de sancta
Virgine Maria.
Item, Sibila Cumana,
Parlant comme les aultres font :
Jam redit virgo, redeunt
Que saturnia regna
Item Sibila Frigia
Christus annuntiabitur
In Nazaret et nascetur
In Betleem terra Juda
Felix mater, et cetera.
Aultrement voions en registre
De Genese le tiers chapitre
Ponam inimicicias inter te et mulierum Et ipsa conteret caput tuum
b) Les Heures de la tres sacrée Conception Nostre Dame de Guillaume Tasserie.
Encore un mot à propos de Guillaume Tasserie. Il est l'auteur d'Heures, dans lesquelles il traduit en poésie française les oraisons de l'office de la Conception de la Vierge. Ces Heures de 24 folio portent le nom de l'incipit : « Ensuit les Heures de la tres sacrée Conception Nostre Dame, composée par maistre Guillaume Tasserie ». Bibliothèque Sainte-Geneviève Ms. 2734 / 4 (fol. 24 vo) Début : « Domine, labia mea... » « Dame sans per, vierge tres pure et munde... » Fin :« Contre noz ennemys rebelles. » « Oroson : Toute belle dame, etc... »http://www.calames.abes.fr/pub/#details?id=BSGC10414
http://bvmm.irht.cnrs.fr/consult/consult.php?mode=ecran&panier=false&reproductionId=13492&VUE_ID=1362313&carouselThere=false&nbVignettes=4x3&page=1&angle=0&zoom=petit&tailleReelle=
Or, parmi les 4 enluminures de ce bref manuscrit, celle des folio 15 et 16 (double page) représente la Vierge, au centre de rayons dorés et foulant un dragon, entourée de banderoles proclamant ses louanges :
Ab initio et ante secula creata sum (Livre de la Sagesse XXIV)
Felix es, sacra virgo et omni laude dignissima
Tota pulchra es amica mea et macula non es in te
Ipsa conteret caput tuum (Genèse 3)
Omnes in Adam peccaverunt.
.Dans le registre inférieur, Dieu le Père portant la tiare et le sceptre est entouré d'un prophète(ou d'un clerc) et d'une femme qui ressemble à une Sibylle. Deux banderoles portent des textes illisibles par moi..
.
Heures de la tres sacrée Conception Nostre Dame de Guillaume Tasserie. Paris, Bibl. Sainte-Geneviève, ms. 2734, f. 025v-026
Heures de la tres sacrée Conception Nostre Dame de Guillaume Tasserie. Paris, Bibl. Sainte-Geneviève, ms. 2734, f. 025v-026
.
ANNEXE.
.
1°) Les gravures de Baccio Baldini (d'après Gisèle Lambert)
http://books.openedition.org/editionsbnf/1365
La suite de trente-six gravures de Baccio Baldini, Les Prophètes et les Sibylles, eut un large succès et une large diffusion, par des états, des interprétations, des copies. Les gravures sont accompagnées de textes : huit vers gravés dans la marge inférieure, auxquels s’ajoutent parfois des inscriptions indispensables à la compréhension de l’ensemble.
Les huit vers en italien correspondent à des extraits du texte d’une « Sacra rappresentazione » du mystère de l’Annonciation, attribuée au poète florentin Feo Belcari ; la première édition en parut à Florence, sans nom d’auteur, à la fin du XVe siècle.
https://archive.org/details/bub_gb_ZTjxnHHEHGgC
http://www-personal.usyd.edu.au/~nnew4107/Texts/Fifteenth-century_Florence_files/Belcari_Annunciation.pdf
Pour l’iconographie des sibylles, Baldini a dû s’inspirer des représentations mêmes (aspect, costumes, attributs) du mystère, dont les figures nous sont connues par un ouvrage de Filippo Barbieri, paru en 1481, les Discordantiae nonnullae. Cet ouvrage, consacré en grande partie aux sibylles, les décrit telles qu’on pouvait les voir sur scène à l’époque ; un manuscrit de la bibliothèque de l’Arsenal (Ms. 243) en fait une description encore plus proche des figures gravées par Baldini. E. Mâle, « Une influence des mystères sur l’art italien du xve siècle », Gazette des Beaux-Arts, 1906, 1, XXXV, p. 8994.
Ces ouvrages pourraient avoir pour source les fresques du palais Orsini où, peu avant 1438, le cardinal Orsini fit peindre une suite de sibylles maintenant disparue.
Quant à son inspiration artistique et technique, interprétant ou copiant partiellement les attitudes des personnages,(Citons, pour les prophètes, Jacob, Habacuc, Aggée, Isaïe, Ézéchiel, Amos, Obadia, Malachie) Baldini l’a trouvée en grande partie dans les séries des Apôtres (assis et debout) et dans la suite des Quatre Évangélistes du graveur allemand, le Maître E. S. Les expressions des visages, très variées, sont plus personnalisées et elles retiennent l’attention. On constate aussi des emprunts à Schongauer et une influence très marquée de l’art bourguignon. Baldini modifie parfois certains détails pour que ses compositions reflètent le goût florentin, ainsi par exemple remplace-t-il les sièges gothiques nordiques par des trônes. Plusieurs estampes ont cependant un caractère spécifiquement italien.
La suite des Prophètes et les Sibylles sera interprétée dans une série gravée au burin, « en manière large », attribuée à Francesco Rosselli, datée des environs de 1485-1490.
La série des sibylles fut copiée en contrepartie par un anonyme, dans une technique proche de la « manière fine », probablement à Florence, à la fin du XVe siècle (H. I, F. 7). Ces gravures, grossièrement exécutées, ne sont pas comparables à la série en manière large de Rosselli.
La série des Sibylles se compose de douze gravures d’un état unique. 181 x 111. Le Cabinet des estampes en possède une série complète.Elles sont datées vers 1470-1475, selon Hind, Levenson, Oberhuber ; vers 1475-1480, selon Zucker.
2°) Les plaques émaillées de Léonard Limosin.
Il s'agit d'un ensemble de 48 plaques de 22 cm sur 10 cm dont 21 sont conservées à Baltimore et 20 au Musée de la Renaissance du château d'Écouen. Représentant les apôtres, sibylles et prophètes, elles proviennent de l'église du couvent Santa Maria Della Celeste à Venise et ont été réalisées par Léonard Limosin ( Limoges 1505-1575) vers 1535. J'ai utilisé les images de la Réunion des Musées Nationaux :
http://art.rmngp.fr/fr/library/artworks?k=Sibylle+limosin
Voir les prophètes associés :
http://art.rmngp.fr/fr/library/artworks/leonard-limosin_le-prophete-jeremie_email-peint
http://art.rmngp.fr/fr/library/artworks/leonard-limosin_le-prophete-moise_email-peint
3°) Les sibylles dans les manuscrits et les livres imprimés.
"Ces Sibylles d'un aspect si nouveau, que nous avons rencontrées pour la première fois dans le livre d'Heures de Louis de Laval, ne tardèrent pas à se montrer dans d'autres manuscrits français." E. Mâle
- Livre de prières de l'Arsenal enluminé par Jean de Montluçon, qui eut peut-être sous les yeux les Heures de Louis de Laval .
- Sibyllae et prophetae de Christo Salvatore vaticinantes (Les sibylles et les prophètes annonçant le Christ sauveur). Ce manuscrit est probablement issu de l'atelier de l'enlumineur français Jean Poyer (1445-1504 environ) de Tours. Cette œuvre est composée de 25 grandes enluminures : une représentation de l'arche de Noé et des enluminures réparties sur 12 doubles-pages. Le côté gauche de chaque double-page représente une des sibylles associée, à droite, à une scène de la vie du Christ et l'histoire du salut qu'elle aurait annoncé. Les scènes sur la droite sont accompagnées d'un prophète de l'Ancien Testament et d'un évangéliste. Le manuscrit fut vraisemblablement acquis par l'électeur Maximilien Ier de Bavière (1573-1651), plus en tant qu'œuvre d'art qu'en tant qu'ouvrage. À ce titre, il fut conservé dans la collection d'art de l'électeur. Il n'intégra la BSB Bibliothèque nationale de Bavière qu'en 1785. Les 25 pages sont extrêmement semblables aux pages correspondantes des Heures de Louis de Laval. https://www.wdl.org/fr/item/8969/view/1/13/
- Le Missel à l'usage de Paris Bibliothèque Mazarine Ms 0412, daté vers 1492. Le folio 017 montre 12 médaillons des Sibylles en marge pour la messe de Noël et donc associées à la Nativité. Les Sibylles déroulent la banderole portant leur oracle. On y trouve "Sibilla helespontina" ('De excelso celorum habitaculo prospexit deus humiles suos et nascetur in diebus novissimis de virgine hebrea in cunabulis terre') ; "Sibilla cumana" ("Magnus ab integro seclorum nascitur ordo...",)."Sibilla phrigia" ("Ex olimpo veniet et firmabitur consilium in celo et annunciabitur virgo in vallibus desertorum"), "Sibilla tiburtina" ('Nascitur chritus in bethleem, annunciabitur in nazareth, regnante thauro pacifico fundatore quietis. O felix illa mater...') ; "Sibilla agrippa" ("Invisibile verbum palpabitur...") ; "europa" ('Veniet ille et regnabit in paupertate et dominabitur in silencio et egredietur de utero virginis') ; "Sibilla erithrea" ("In ultima etate humiliabitur deus... et iacebit in feno agnus"; "Sibilla samia" ('Ecce veniet dives et nascetur de paupercula et bestie terrarum adorabunt eum clamabunt et dicent laudate eum in atriis celorum') ; "Sibilla delphica" ("Nascetur propheta absque matris coitu ex virgine eius") ; "Sibilla chimica" ("In prima facie virginis ascendet puella..."); "Sibilla persica" ("Ecce bestiam conculcaberis et gignetur dominus in orbem terrarum et gremium virginis erit salus gentium") ; "Sibilla libica" ("Ecce veniet dies...") . Le Folio 151 en marge d'un cycle pour Pâques montre une représentation liée à la Résurrection avec l'inscription "Sibilla" ("Et morte morietur tribus diebus somno suscepto et cum resurrectionis principio revocatis ostenso").
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- Livre d'heures de la duchesse de Bourgogne, Adélaïde de Savoie » XVe siècle, Chantilly Musée Condé n°1362 folio 21r La Vierge et l'Enfant, en gloire et les sibylles . Six Sibylles : Persique, de Cumes, de Phrygie, Europe, Agrippa et Lybique , avec les oracles selon Barbieri (cf leur relevé par J. Bouissounouse page 27).
Copyright http://www.photo.rmn.fr/C.aspx?VP3=SearchResult&VBID=2CO5PCD0NLR2L
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- les Heures de René II de Lorraine, qui furent peintes dans les premières années du XVIe siècle
- les Heures de Vérard,
- et bientôt après dans les Heures de Simon Vostre : Heures a lusaige de Poitiers, 1508 .
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8408426/f46.item.r=Heures%20vostre.zoom
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8408426/f48.item.r=Heures%20vostre.zoom
Les Heures à l'usage de Rouen de Simon Vostre. Liste des sibylles et attribut et prophétie
https://books.google.fr/books?id=prcEAAAAQAAJ&pg=RA2-PA65&lpg=RA2-PA65&dq=sibylle+frigea&source=bl&ots=uaqIPDGrj2&sig=2gazRzQ1xZGBV0E69RJDW26ahv4&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjQz-mV7NLPAhXjIsAKHYDRAOIQ6AEIJzAC#v=onepage&q=sibylle%20frigea&f=false
En 1586, Jean Dorat a publié Sibyllarum duodecim oracula ex antiquo libro latine. / per Joan. Auratum,... ; et gallice per Claud. Binetum edita... / Les oracles des douze sibylles, extraicts d'un livre antique / mis en vers latins par Jean Dorat,... ; et en vers françois par Claude Binet...avec les figures tirés des vieux exemplaires par Jean Rabel Bnf Res. Y B 60
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k720315
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4°) Dans les vitraux, sculptures et peintures.
Les principales séries de Sibylles en France sont "toutes contemporaines de Louis XII ou de François Ier (É. Mâle):
- Clamecy (Nièvre), portail occidental de l'église
- Autun, retable dit Noli me tangere de la cathédrale
- Saint-Bertrand de Comminges, stalles en bois (1537) ;
- Beauvais, cathédrale (vantaux du portail nord ; claire-voie vitrée sous la rose du nord, orgue, 1532),
- Beauvais, église Saint-Étienne (boiseries);
- Dreux, portail (après 1524)
- Bordeaux, portail de l'église Saint-Michel.
- Aix, portes de la cathédrale commandées au sculpteur Guiramand en 1509 ;
- Auch, vitraux (1513) et stalles ;
- Saint-Mâurille-des-Ponts-de-Cé, stalles provenant de la Haye-aux-Bonshommes ;
- Gaillon, stalles, aujourd'hui à Saint-Denis (vers 1510) ;
- Noyon, cathédrale (sculpture d'une des chapelles) ;
- Château-Thierry, buffet d'orgues (avant 1538) ;
- Chambly (Oise), panneaux sculptés de la tribune
- Saint-Ouen de Rouen, vitraux de la nef (fin du XV° siècle).
- Sibylles du vitrail de Notre-Dame d'Étampes, baie 9, œuvre de l'école de Fontainebleau. Vers 1555. Elles n'ont pas d'attributs. Elles portent des cartouches qui contiennent les prophéties de Barbieri ou de Lactance. Seule la Sibylle de Tibur porte un texte dont l'origine est inconnue.
- église priorale Notre-Dame de Cunault (Maine-et-Loire), fresques accompagnées d'inscriptions tirées du Livre d'Heures de Simon Vostre
- Brou, tombeau de Philibert le Beau.
5°) Les sibylles du Finistère (d'après Y-P. Castel, 2000)
- Brennilis, autel au sud,
- Plonévez-du-Faou, église de Saint-Herbot, chancel, côté du chœur,
- Lampaul-Guimiliau,au revers de la poutre de gloire, de part et d'autre d'une Annonciation centrale. assises de face ou de profil chaque Sibylle porte à Lampaul un livre qui est ouvert pour cinq d'entre elles et fermé pour les sept autres. Il s'agit évidemment du livre de la prophétie émise par chacune d'entre elles. Les attributs des Sibylles de Lampaul sont dans la tradition française du Livre d'heures de Louis de Laval déjà cité.
- Roscoff, garde-corps de la tribune de l'orgue. Sept bas-reliefs : Cimmérienne, Européenne à allure d'homme, Tiburtine, Delphique, Persique, Agrippa, Hellespontique.
Pleyben, croisée de transept. Le couvre-joint des arêtes du lambris de la croisée porte, appliquées, seize statuettes diverses. Les Sibylles, au nombre de cinq sont l'Européenne, la Samienne, la Libyque, l'Erythréenne et Agrippa.
Guimiliau, 1. Aux angles de la chaire à prêcher, la présence de la Cimérienne reconnaissable au biberon en forme de corne laisse à penser que les quatre autres belles statuettes mutilées et désormais privées de leurs attributs distinctifs, la cinquième n'ayant d'ailleurs plus ni visage ni poitrine, représentaient des Sibylles.
Guimiliau, 2. Dans le choeur, derrière l'autel trois bas-reliefs Renaissance : Cimérienne ( ?), Erythréenne et Persique.
Irvillac, chapelle de Coatnan. Quatre Sibylles. Les attributs ne suivent la tradition de Lampaul que pour la seule Delphique (SI : DELPHICA). La Persique, (SI : PERSICA) prend la croix de la Résurrection. La Phrygienne (SI : PHRYGIA) porte l'épée. L'Hellespontique (SI : HELLESPONCA) tient le bouquet fleuri de l'Erythréenne.
Le Faou, église de Rumengol, stalles du chœur, trois Sibylles : " Sibie " (sic), " Delphiqua " et " Persica ".
La Martyre, au bas de la première colonne dans le chœur. On croit distinguer la Cimmérienne avec le biberon en forme de corne parmi les douze allégories féminines au milieu desquelles les vertus théologales.
Plabennec, chapelle de Locmaria-Lan, mur intérieur. Trois Sibylles, Cimérienne, Samienne, Libyque.
Plouzévédé, église Notre-Dame de Berven. Trois Sibylles en bas-relief, sur le rabat du volet gauche du retable de la Vierge : Cimérienne, Samienne, Erythréenne.
Toutes ces Sibylles sont ciselées dans le bois. La majorité est traitée en bas-reliefs.
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SOURCES ET LIENS.
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— Dans les vitraux :
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Baie 12 d'Ervy-le-Chatel (Aude), v1515 :
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— Article de Wikipédia
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Le Triomphe des Normans traictant de la Immaculée Conception Nostre Dame est un mystère qui fut joué en 1499. Une seule copie de ce texte nous est parvenue, dans un manuscrit ayant appartenu jadis au Duc de la Vallière. La mise en ligne et la mise en page ont été assurées par Denis Hüe à l’Université Rennes
2http://www.sites.univ-rennes2.fr/celam/cetm/triomphe/triomphe.html
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— Description des sibylles de la rosace de la cathédrale de Beauvais par Jean et Nicolas Le Prince 1537 :
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—Sur l'église de Brennilis :
— Topic-topos : http://fr.topic-topos.com/les-douze-sibylles-brennilis
— Site Infobretagne contenant les texte des chanoines Peyron et Abgrall :
http://www.infobretagne.com/brennilis.htm
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http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/71e51d7ff370034408d2b2e0ebdb6061.pdf
— ABGRALL, (Jean-Marie) 1904 Notice sur Brennilis, Bulletin Diocésain d'Histoire et d'Archéologie BDHA 1904 page 95-101 :
http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/af488ed0b5ac10edd2fb9441496254a9.pdf
— ABGRALL (Jean-Marie), 1904, Architecture bretonne, Ar. de kerangal, Quimper pages 283-284.
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— COUFFON , Le Bars, Nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, 1988
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—PEYRON, 1910, Eglises et chapelles, Bulletin Société archéologique du Finistère t. XXXVII pp. 293-294.