Un soubassement triangulaire à deux degrés en granite porte un socle triangulaire en granite orné d'un blason. Puis vient un fût rond à écots, toujours en granite, sur lequel a été scellé une croix à fleurons-boules en kersantite et son beau Christ sculpté par Roland Doré, vers 1630 selon l'estimation d'Y.-P. Castel.
Yves-Pascal Castel, 1980, croquis du calvaire et de son blason.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
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Le blason.
On y a reconnu les armes des Hirgarz (d'or à trois pommes de pin d'azur) en alliance avec celle d'une autre famille. Sur son schéma, Y.-P. Castel a représenté les armoiries Hirgarz en plein.
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Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
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LES CROSSETTES.
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Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
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L'inscription de 1675 au dessus de la porte nord, Alain Roignant étant fabricien.
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Chapelle Saint-Côme et saint Damien à Saint-Nic. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Le calvaire actuel du placître de Sainte-Anne-la-Palud est un ensemble composite réunissant autour du calvaire de Roland Doré (1618-1663) diverses statues dont l'une du XVe siècle.
Il n'occupe sans doute pas son emplacement d'origine, puisque la chapelle néogothique actuelle a été construite entre 1858 et 1864 en remplacement d'une chapelle construite vers 1630 (suite à "l'apparition de sainte Anne" à Nicolazic à Auray en juillet 1624), elle-même en remplacement d'une chapelle romane qui portait dit-on les dates de 1230 et de 1419.
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THOMAS (Jacques), 1946, Sainte-Anne-La-Palud, illustrations Jos le Doaré Librairie celtique Paris)
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THOMAS (Jacques), 1946, Sainte-Anne-La-Palud, illustrations Jos le Doaré Librairie celtique Paris)
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THOMAS (Jacques), 1946, Sainte-Anne-La-Palud, illustrations Jos le Doaré Librairie celtique Paris)
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Une fontaine de dévotion avait été édifiée en 1642 avec une statue de sainte Anne éducatrice par Roland Doré. Cette fontaine a été détruite et remplacée en 1870, tandis que la statue a été préservée et on peut penser que les statues du calvaire et de la fontaine ont été sculptées en même temps : la date "vers 1642" peut être proposée pour le calvaire.
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Léon Gaucherel, Fontaine de Sainte-Anne-la-Palud à Plonévez-Porzay (Nodier et Taylor, Voyages pittoresques et romantiques dans l'ancienne France, 1844), Paris, BnF.
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Il a été placé au XIXe siècle dans une enfilade visuelle discutable réunissant une porte de l'enceinte (ré-emploi de l'arc de triomphe du presbytère de Saint-Jean-Trolimon, déplacée en 1955) et une baie sud entre deux contreforts. Cet axe visuel n'est pas très heureux puisque le calvaire n'est plus orienté : le crucifix, qui devrait être tourné ver l'ouest (relation traditionnelle entre le couchant et la mort du Christ), est désormais tourné vers le sud.
Trois degrés de granite forment une plateforme supportant au centre le socle, et du coté sud une statue du XVIe siècle de saint Pierre, assis, couronné de la tiare papale.
Sur le socle cubique aux arêtes supérieures chanfreinées s'élève le fût à pans, encadré à gauche de sainte Catherine, une statue de kersanton du XVe siècle.
Tout le reste est en kersanton et sort de l'atelier landernéen de Roland Doré, et d'abord, à droite du fût, la statue de Marie-Madeleine. Mais elle n'est plus tournée, comme elle l'était surement jadis, vers la croix, car on a voulu se tenir au projet de tourner les œuvres vers le regard du fidèle qui pénètre vers la chapelle.
C'est un calvaire à un seul croisillon. Sur le culot de gauche, la statue géminée de la Vierge, et de saint Pierre au verso. Sur la culot de droite, la statue géminée de Jean, couplé au verso à saint Jacques. Le Crucifié est sur une croix à branches rondes et fleurons-boules, sous le titulus.
En faisant le tour, le visiteur découvre une Vierge de Pitié, entre les statues de Pierre et Jacques déjà mentionnées.
Une précieuse inscription indique les noms des commanditaires : le recteur et (sans doute) le fabricien.
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Remarque :
J'ai multiplié, selon mon habitude, les clichés. On comprend vite, en fréquentant les œuvres d'art, qu'elles sont vivantes, en ce sens qu'elles sont différentes (parfois radicalement) selon l'heure du jour et ses ombres portées, selon la lumière, le temps gris ou ensoleillée (il faudrait faire voir les statues de kersanton sous la pluie, qui révèle cette pierre), et bien sûr selon l'angle de vue adoptée, l'appareil photo choisi, son objectif, et ses réglages , ou encore par le travail de traitement de l'image numérique qui a été choisi. En outre, observer une œuvre de loin est une chose, et la scruter avec de bonnes jumelles ou avec le pinceau de son téléobjectif en est une autre, comme deux mondes différents.
Photographier une œuvre en un seul cliché, c'est, dans mon cas, la trahir. Pour un photographe de talent, cela peut aussi être la recréer. Mais comme ce n'est pas mon cas, je préfère donner un petit aperçu des diverses facettes, pour vous inciter à venir vous-même découvrir le visage que, ce jour là, elle vous offrira.
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La chapelle de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Le calvaire de la chapelle Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Le calvaire de la chapelle Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Le calvaire de la chapelle Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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L'INSCRIPTION GRAVÉE.
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Alain Pouchous aurait lu la date de 1653, on ne la retrouve plus aujourd'hui.
Elle est gravée en lettres capitales, avec 2 lettres conjointes, sur le croisillon et sur le nœud, et on lit, débutant par la face principale et se poursuivant au verso, le texte suivant :
MISSIRE GVILLOME LE VERGOZ RECTEVR
LVCAS BERNAR[D]
(la lettre finale D se trouverait selon Le Seac'h au recto du nœud ; je ne l'ai pas trouvée).
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1°) Le recteur Guillaume le Vergoz.
Il est bien identifié, car il a fait inscrire son nom sur divers monuments. Il succéda à Guillaume AVAN, qui était encore en exercice en 1633, et selon Alain Pouchous son successeur Jean Feburier aurait été nommé en 1657. Une cloche de Kerlaz (une trève de Plonévez-Porzay) portait son nom avec la date de 1644. Et il a fait une fondation à l'église de Plonévez le 9 août 1653.
Bien que le patronyme LUCAS soit attesté à Plonévez-Porzay au XVIIe siècle au même titre que celui de BERNARD, il semble plausible de considérer que Lucas est ici le prénom. Il semble aussi plausible d'y voir la mention du fabricien, comme c'est généralement le cas.
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Le calvaire (kersanton, v. 1642) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, v. 1642) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, v. 1642) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Saint Pierre. Kersanton, XVIe siècle.
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Le premier évêque de Rome est sculpté assis sur une cathèdre, tenant sa clef, coiffé de la tiare papale et vêtu d'une chape sur une tunique longue. Il n'est pas pieds nus comme tout apôtre, mais chaussé de solides chaussures à bouts ronds.
Il est en kersantite d'un grain fin et homogène, qu'on ne retrouvera pas sur la statue de Marie-Madeleine.
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Saint Pierre (kersanton, XVIe siècle) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Saint Pierre (kersanton, XVIe siècle) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Saint Pierre (kersanton, XVIe siècle) de la chapelle Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Saint Pierre (kersanton, XVIe siècle) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
On la comparera à deux autres statues de la sainte, au XVe siècle également, soit sur le portail sud de la cathédrale de Quimper, soit dans la collégiale du Folgoët ; et on la jugera peut-être, comme moi, moins belle, avec un visage plus ingrat au nez trop fort, un port de tête trop baissé, des accessoires et vêtements de facture trop épaisse. Mais le contraste entre le bustier et le plissé de la robe sous la ceinture, ou la projection en avant du ventre, me touchent néanmoins.
La statue est en kersantite de grain plus fin et plus lisse que la précédente.
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Sainte Catherine, Kersanton, XVe siècle, Porche sud de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.
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Sainte Catherine d'Alexandrie, Kersanton, Atelier du Maître du Folgoët (1423-1433) , angle sud-ouest de la chapelle de Coëtivy, Collégiale du Folgoët, photographie lavieb-aile avril 2017
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Sainte Catherine (kersanton, XVe siècle) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Sainte Catherine (kersanton, XVe siècle) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Sainte Catherine (kersanton, XVe siècle) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Sainte Marie-Madeleine.
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Le grain de la kersantite est ici moins fin, plus grenu que dans les statues précédentes, avec des éclats jaunes.
Roland Doré sculpte Marie-Madeleine dans la même posture et avec les mêmes détails vestimentaires que ses prédécesseurs, les Prigent de Landerneau (1527-1577) et le Maître de Plougastel (1570-1621), car la figure de la sainte agenouillée mains jointes face à la Croix où ruisselle le sang des plaies est un véritable leitmotiv de la dévotion christique du Finistère, tant sur les vitraux que sur les calvaires extérieurs, très habituelles dans nos paroisses, même si cette dévotion au Sang, aux Plaies et aux souffrances de la Passion s'enracine dans la mystique monastique, et dans l'art bourguignon ou italien.
L'un de ces traits propres aux sculpteurs du kersanton est le manteau tombé à l'arrière du bassin sur les jambes où il vient se gonfler en plis bouffants spectaculaire.
Un autre trait est le bandeau occipital, cette étoffe pliée retenant les cheveux derrière le haut de la nuque avant de les laisser se répandre en flots devant les épaules et dans le dos ; et, parfois, continuant à s'enrouler en spires autour de ces nattes. Ici, il se contente de deux tours derrière la nuque avant de libérer les longues mèches bouclées.
On trouve ce modèle stéréotypée dans les calvaires des Prigent à Pencran, à Lopérec (v.1552), à Sainte-Marie-du-Ménez-Hom, à Dinéault, ou au Tréhou, à Commana, et à Saint-Ségal au pied du calvaire du bourg et de celui de la chapelle Saint-Sébastien sans doute par les Prigent. Ou sur les calvaires monumentaux de Plougonven et de Pleyben également par les Prigent. Voir mon commentaire sur le calvaire de Lopérec.
On le trouve même, déplacé de son calvaire d'origine, au dessus d'un contrefort de la chapelle Saint-Tugen de Primelin, sans doute par le Maître de Plougastel qui est l'auteur des statues des apôtres et évangélistes.
Mais Roland Doré apporte à ce poncif sa marque personnelle, ce bon sourire et ces bonnes joues si reconnaissables, et qui, par leur volume, creusent deux fossettes aux commissures des lèvres. Et cette façon d'incliner la tête comme si le personnage était saisi en instantané d'une relation personnelle avec un interlocuteur.
On peut décrire aussi le chapelet passé à la ceinture, ou le flacon d'aromates posé devant le genou droit et qui est l'attribut le plus spécifique de la sainte.
J'aime beaucoup cette statue, et je ne me lasse pas de la photographier.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Le calvaire proprement dit.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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La Vierge (kersanton, Roland Doré, vers 1644).
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Saint Jean.
Parmi les 3 ou 4 modèles que Roland Doré propose pour Jean l'évangéliste au pied de la croix, celui qui a été retenu ici est celui à longs cheveux bouclés en perruque triangulaire, aux bras croisés devant la poitrine, et aux plis de manteau symétriques. On retrouve les caractéristiques du maître, les profonds plis naso-labiaux, le fin sourire, le menton à la pointe adoucie,
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Le Christ en croix.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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LA FACE POSTÉRIEURE.
C'est celle qui devrait être la face orientale. Elle est centrée par une Pietà, surhaussée pour être à peu près à la même hauteur que le Christ en croix dans une séquence opportune, tandis que les bras du croisillon montre à droite saint Pierre, et à gauche un saint dans lequel l'abbé Castel a reconnu saint Jacques (ce que je discuterai).
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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La Pietà.
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C'est encore une pièce très émouvante. On la comparera aux Pietà de Roland Doré à Cast, à Brennilis, à Commana, à Loc-Eguiner ou à Plougastel, chapelle Saint-Claude.
La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Calvaire (Kersanton, 1630, Roland Doré) de la chapelle Saint-Claude à Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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J'avais écrit à propos de la chapelle Saint-Claude :
"La Vierge est émouvante par sa tendre inclinaison en arc au dessus de la tête de son Fils. Ses yeux sont ouverts, graves et pensifs ; les pupilles sont creuses, un procédé typique de Roland Doré. La bouche également caractéristique (presque souriante, arc de la lèvre supérieure droit, dilaté aux commissures par deux fossettes, petite lèvre inférieure charnue faisant — mais à peine —la moue) est encadrée par les parenthèses tristes des rides naso-labiales.
Les cheveux sont cachés par un voile-manteau formant une coque rectangulaire dont les strictes plis verticaux contrastent avec ceux, plus animés, de ceux en coups d'ongle de la guimpe .
Elle soutient son Fils assis par une main sous l'aisselle droite, près de la plaie du flanc, et elle ramène près d'elle son bras gauche.
Les cheveux longs du Christ répondent aux plis du voile, et la grille de ses côtes sont aussi un écho de ceux de la guimpe.
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Roland Doré a sculpté 4 autres Pietà, (à Brennilis , c'est une Déposition à 4 personnages), mais à Loc-Éguiner-Saint-Thégonnec, à la chapelle Sainte-Marie-du Ménez-Hom à Plomodiern,et à la chapelle de Lantis au Passage à Plougastel-Daoulas, le corps du Christ est allongé en diagonale sur le genou droit.
Il n'y a qu'à la chapelle Sainte-Anne-la-Palud de Plonévez-Porzay, que nous trouvons cette disposition, mais avec moins de grâce."
Je peux tout reprendre, sauf ma dernière phrase, puisque mes visites successives m'ont révélé le profonde beauté de la Pietà de Sainte-Anne-la-Palud.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Saint Pierre.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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Un saint apôtre : saint Paul.
J'ignore pourquoi l'abbé Castel y voit, dans son Atlas des calvaires du Finistère, un saint Jacques. La statue n'a aucun des attributs jacobéen. Cet apôtre est barbu, sa calvitie frontale épargne un petit rouleau, et son seul attribut est une épée, dont la lame, quoique un peu confondue avec les plis du manteau, est bien visible, oblique, dans l'axe de la poignée.
Certes, selon Emile Mâle, saint Jacques est représenté au XIIIe siècle à Chartres, mais il se distingue alors néanmoins par une besace et par des coquilles.
Je propose donc de reconnaître ici saint Paul, avec l'épée de sa décapitation, formant un couple logique avec saint Pierre.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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LA STATUE DE SAINTE ANNE ÉDUCATRICE (1642, KERSANTITE, ROLAND DORÉ) DE LA FONTAINE DE PÈLERINAGE .
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"A une centaine de mètres au sud du sanctuaire est la fontaine de sainte-Anne. L'ouvrage actuel a remplacé, en 1871,, un édicule de 1664 sur le fronton duquel on lisait X. Kermaïdic, f. (Christophe Kermaïdic, fabricien). La, niche contient deux statues en pierre de sainte Anne et de la Vierge; fort anciennes et bien gracieuses. La niche a été gravement endommagée et la Vierge décapitée par les occupants le 23 janvier 1944." (J. Thomas)
"La fontaine porte "1642. X. Kermaïdic, f.. (A. Pouchous)
"De la fontaine de 1642 on n'a conservé que le douet et la statue ancienne de sainte Anne, œuvre également de Roland Doré. Cette statue a été décapitée par des soldats allemands le 23 janvier 1944." (R. Garrec)
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La fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
La fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Sainte Anne éducatrice (kersanton, 1642, Roland Doré) de la fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Sainte Anne éducatrice (kersanton, 1642, Roland Doré) de la fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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La Vierge enfant nous offre un superbe exemple du doux sourire et des bonnes joues des œuvres de Roland Doré. Son voile est retenu par une guirlande.
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Sainte Anne éducatrice (kersanton, 1642, Roland Doré) de la fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Sainte Anne éducatrice (kersanton, 1642, Roland Doré) de la fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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De loin, sainte Anne me semblait peu gracieuse, mais le cliché zoomé la dégage de la cage formée par le voile et le guimpe pour montrer son sourire timide.
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Sainte Anne éducatrice (kersanton, 1642, Roland Doré) de la fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Sainte Anne éducatrice (kersanton, 1642, Roland Doré) de la fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
Sainte Anne éducatrice (kersanton, 1642, Roland Doré) de la fontaine de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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ANNEXE
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ROLAND DORÉ ET SES 50 CALVAIRES.
Le sculpteur landernéen dont l'atelier de taille du kersanton est le plus renommé du XVIIe siècle a travaillé pour 82 paroisses (Finistère, Côtes d'Armor) essentiellement pour la sculpture religieuse (et 9 gisants). Il a réalisé les séries d'apôtres de 4 églises, partiellement de 4 autres et quantité de statues isolées. Selon E. Le Seac'h, il a réalisé 97 croix, calvaires ou vestiges dont 21 croix, 50 calvaires, 26 vestiges. Seuls 12 croix et 15 calvaires sont encore complets. 41 croix et calvaires sont datés, entre 1618 à Penmarc'h et 1662 à Saint-Thégonnec.
Voici une liste de 75 croix et calvaires (en gras : décrits dans ce blog)
Brennilis : croix de calvaire du cimetière (vers 1625) . Ange, Crucifix, Pietà,
Briec de l'Odet, Croix de la chapelle de Trolez (Seul le crucifix est de Roland Doré)
Cast, calvaire de l'église Saint-Jérôme : (1660), GLINEC, recteur, Jacob CROISSANT, fabricien. Vierge, Madeleine, crucifix, Jean, saint au livre. Pietà.
Châteaulin, calvaire (1639) de la chapelle de Kerluan : Vierge, crucifix, Jean (et sur le fût saint Sébastien et saint Roch, hors atelier).
Cléden-Cap-Sizun : calvaire (1630) de la chapelle Saint-They. Vierge, Jacques le Majeur en haut du fût .
Cleder, croix de Kerzuoc'h (1625), Messire PRISER, procureur
Commana : calvaire du cimetière (1624), signé. Vierge/saint Hervé et son guide ; crucifix ; moine au livre ; Jean/moine, écu martelé
Crozon, presbytère, vestige de calvaire, saint Pierre.
Dinéault,calvaire (1648 et 1650), A. LE BUILLER, L. GARO,fabriciens. Crucifix, Christ aux liens.
Dirinon, calvaire de la Croix-Rouge, Jean/saint Roch ; crucifix, Vierge/Sébastien
Douarnenez, calvaire de la chapelle Saint-Vendal (1655), GAVRANT, recteur de Pouldregat, I. LE BIAN. Vierge/Corentin ; crucifix ; Vierge à l'enfant/Jean ; évêque
Douarnenez-Tréboul, vestige de calvaire, Jean/Corentin, Vierge/Nicolas
Esquibien : calvaire de Landrevet Jean/ saint indéterminé ; crucifix /Vierge à l'Enfant ; Pierre/Vierge
Le Folgoët, croix du Champ de Foire. Crucifix
Guiclan, croix de Kerizamel
Guiclan, calvaire de Kerlaviou (1622)
Guiclan, calvaire de Pen-ar-Feuteun (1642), [Jean/Yves par Yan Larhantec 1889] ; crucifix ; Vierge/Catherine.
Hanvec : croix de la forêt du Cranou (1627), vestige. Il appartenait à la chapelle Saint-Conval mais il ne subsiste que le fût portant l'inscription : « R. Dore : ma : faict : 1627 ».
Hanvec, Croas-ar-Huré (1621-1622) M. MICHEL, P. BRIS CVRE. Crucifix, écu au calice, anges à phylactères.
Hanvec, calvaire de Quillafel (1638), NICOLAS JACQUES, prêtre
Hanvec, croix de Lanvoy ; seul le crucifix /Vierge à l'enfant est de Roland Doré
L'Hôpital-Camfrout, Croix du Run (1627), Crucifix/Vierge à l'Enfant
L'Hôpital-Camfrout, Calvaire du Troan, vestiges : anges au calice
Irvillac : calvaire (1644) avec deux bras courbes situé devant la chapelle Notre-Dame-de-Lorette au lieu-dit Coatnan. Larrons, Vierge/Yves ; Jean/Pierre
Irvillac, calvaire de Clénunan (1640), Messire Jean LIDOU.
Irvillac, calvaire (1628) de la chapelle de Locmélar : Jean/Pierre ; Vierge/évêque
Kersaint-Plabennec, calvaire de Laven , crucifix. (En complément du travail du maître de Plougastel qui a réalisé les couples Vierge/Yves ; Jean/Etienne).
Lampaul-Guimiliau, calvaire (1621) de Cosquer-Bihan dit Croaz-Kernevez : crucifix/Vierge à l'enfant.
Lampaul-Guimiliau, calvaire de Kerjaffrès (1626), Mathieu LIVINEC fabricien, Y. KERBRAT, fabricien
Lannilis, calvaire de Kerosven. Vierge ; crucifix/Jean-Baptiste, Jean
Lantic, calvaire de l'église Notre-Dame-de-la-Cour. Crucifix/Vierge à l'enfant. Armoiries des Rosmadec et Gouarlot.
Loc-Éguiner-Saint-Thégonnec, calvaire du cimetière , crucifix (en complément du travail du Maître de Plougastel :Vierge/sainte Femme Pietà/Madeleine ;
Logonna-Daoulas, Croix de Cléménéhy (?), SALOMON PIERRES DE PORS AN . Crucifix/Vierge à l'enfant.
Logonna-Daoulas, calvaire de Rulivet. Crucifix. [Saint Nicodème sur le fût, saint Jean, blason des Rosmorduc, hors atelier.]
Loqueffret, calvaire de Bilirit (1625), Y. et Louis BELERIT, fraires. Crucifix/Vierge à l'Enfant ; [et Yves ; Geneviève ; Edern, hors atelier].
La Martyre, vestige (fût) du calvaire de Kerlavarec (?), Béatrice CABOUN.
Penmarc'h, croix de Lescors (1618), crucifix.
Plabennec, calvaire de Scaven, crucifix.
Pleyber-Christ, calvaire de Kervern (1647), Yvon INISAN et Marie MADEC. Vierge/Marguerite
Plogonnec : calvaire (1644) de la chapelle Saint-Pierre. Vierge/Paul ; Jean/Pierre
Plogonnec: calvaire (1641) de la chapelle Seznec, Guillaume TOULGUENGAT, recteur de 1624 à 1642, René SEZNEC, recteur de 1643 à 1697.
Plomodiern calvaire de la chapelle Sainte-Marie-du Ménez-Hom, tête de la Vierge de la Pietà et Vierge à l'Enfant, tout le reste étant hors atelier.
Plonévez-Porzay : calvaire de la chapelle Sainte-Anne-la-Palud [1630-1656], Guillaume VERGOZ, recteur de 1630 à 1656, lucas BERNARD, fabricien ?. Vierge/Pierre, Crucifix/Pietà ; Jean/Jacques
Ploubazlanec, calvaire de l'ancienne chapelle de Loguivy-de-la-Mer. Vierge et Jean
Ploudiry, calvaire (1633) de l'église : Crucifix et Marie-Madeleine
Plougastel-Daoulas, Le Passage, calvaire (1622), Jean GUIGORUS, fabricien. François d'Assise/Vierge ; crucifix/Pietà ; évêque/Jean.
Plougastel-Daoulas, calvaire (v.1630) de la chapelle Saint-Claude. Vierge/Yves, Pietà ; Jean/Pierre
Plougastel-Daoulas, calvaire (1654) de la chapelle Saint-Guénolé. Vierge/Guénolé, crucifix/Vierge à l'Enfant ; Jean/Pierre
Plougastel-Daoulas, calvaire (1639) du Tinduff : Le Seac'h p. 228. n. 78 et 79.
Ploumilliau (22), calvaire (1622) de Coz-Douar. Crucifix/Vierge à l'Enfant.
Plounéour-Ménez : le calvaire (1641) de l'église . Vierge/Pierre et Jean/Paul.
Plounéour-Ménez : croix de Kersimonnet. Vierge à l'Enfant
Plourin-les-Morlaix ? Vestiges d'un calvaire sur le mur de l'enclos
Port-Launay, calvaire (1651) de Lanvaïdic. Crucifix, culots vides.
Poullan-sur-Mer, calvaire (1640) de Kervignac vestiges
La Roche-Maurice, croix (1625) de Penmarc'h. Crucifix, macles des Rohan.
Rosnoën : calvaire (1648) de l'église Pierre/évêque ; Crucifix/Vierge à l'Enfant (hors atelier) ; Paul/évêque
Saint-Nic, calvaire de la chapelle Saint-Côme : crucifix.
Saint-Nic, calvaire de l'église Vierge/diacre ?; Crucifix ; Jean/diacre ?
Saint-Renan, croix de Quillimerrien ( ?), ADENOR AR COR et IVET AR COR, Vierge
Saint-Sauveur : croix de Kerbouzard Crucifix.
Saint-Ségal, calvaire du bourg : Vierge, Marie-Madeleine et Jean sur le socle
Saint-Servais, calvaire de l'église. Crucifix/Christ aux liens.
Saint-Servais, croix (1640) de Bréties dite Croas-Vossoc. Crucifix.
Saint-Thégonnec, grand calvaire de l'enclos paroissial ; Christ aux outrages
Saint-Thégonnec, calvaire de Bodéniry (1632), Anna BREST et Jean GUILLERM. Vierge/François d'Assise ; Jean/Yves
Saint-Thégonnec, croix du Broustou (1662); Crucifix
Saint-Thégonnec, croix de Coslen. Crucifix/Saint Joseph et l'Enfant
Saint-Thégonnec, croix de Hellin, 1638, Crucifix / Vierge à l'Enfant écu sur le nœud lion et calice
Saint-Thégonnec, croix (1629) de Pennalan. Crucifix/Vierge , écu au calice et M.H.C.P.
Saint-Thégonnec, croix du Keff, Vierge à l'Enfant de la niche.
Saint-Thégonnec, croix (1647) de Pennavern. Crucifix/Vierge à l'Enfant, écu avec fasces des Chastel en alliance avec des armoiries indéterminées.
Saint-Urbain : calvaire du Quinquis. Crucifix
Senven-Léhart : calvaire près de l'église Notre-Dame de Senven. Une douzaine de personnages.
Trézilidé, calvaire de l'église. Bon Larron, Pierre, Pietà, Mauvais Larron.
Roland Doré a sculpté uniquement dans le kersanton. Son style dépouillé, facilement reconnaissable et proche de l'épure, a contribué à établir sa réputation. Il se distingue par sin souci de replacer la réalité des formes dans l'espace en allant à l'essentiel. Sa virtuosité à sculpter les visages doux de ses Vierges ou à donner un tempérament à ses œuvres profanes en fait un sculpteur d'exception. Il a débuté comme compagnon dans l'atelier du Maître de Plougastel (1585-1617) puis a entrepris une carrière prolifique à Landerneau.
— Le Christ :
Les représentations du Crucifié sont caractérisés par des corps allongés, aux longs bras noueux et aux torses presque rectangulaires avec les muscles de l'abdomen en forme de poire. Les veines du cou sont saillantes. Les Christ penchent la tête du coté droit, les yeux clos. Leurs pagnes plats sont noués sur le coté gauche. Les visages sont presque émaciés, les joues creuses mangées par une barbe et une moustache aux mèches fines. Les crucifix courts dont le canon est à cinq têtes se différencient des crucifix longs à sept têtes (Y-P. Castel).
La couronne d'épines est caractéristique, aux deux brins entrelacés en forme de carré
— Les Vierges à l'Enfant : elles portent leur enfant sur le bras gauche, la main droite tenant une pomme. Elles ont le visage poupin , les yeux en amande au sillon palpébral bien dessiné. et arborent le fin sourire « doréen »
— Les personnages de Roland Doré se reconnaissent aussi à leurs yeux aux iris creusés.
— Saint Jean accompagne la Vierge sur les croix et calvaires. Sa gestuelle varie peu : les deux mains posées sur la poitrine, (Seznec à Plogonnec, N.D de Kerluan à Châteaulin, Commana, Saint-Nicodème à Ploéven (1637), Tinduff à Plougastel, Saint-Vendal à Douarnenez) ou simplement une seule main, l'autre étant caché sous sa tunique (Sainte-Anne-la-palud à Plonévez-Porzay). Plus rarement, il serre le pan de sa tunique et appuie un livre fermé contre sa poitrine (Coatnan à Irvillac) . Parfois il joint les mains, les doigts entrelacés (Plogonnec) ou il tient un livre dans le creux formé par sa main gauche (Cast, 1660). Sa physionomie est partout similaire. Le seul changement appréciable se voit dans sa chevelure lisse (Seznec ou Saint-Pierre à Plogonnec, Commana, Tinduff à Plougastel, à l'ouest de l'église de Plounéour-Ménez en 1641) ou bouclée (Saint-Nicodème à Ploéven en 1637, Coatnan à Irvillac en 1644, Saint-Vendal à Douarnenz (1655) , Sainte-Anne-la-Palud à Ploénevz-Porzay, Saint-Nic, Cast) comme sur les gisants mais d'une manière aléatoire sans que l'on puisse repérer une évolution chronologique.
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SOURCES ET LIENS.
—BOSSUS (H) THOMAS (J.) 1935, Sainte-Anne-La-Palud (Brest)Photos Jos le Doaré
— CASTEL (Yves-Pascal), 2001, Les Pietà du Finistère. numéro 69 de la revue Minihy-Levenez de juillet-août 2001. L'auteur y étudie une centaine de Pietà et de Déplorations.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1983, La floraison des croix et calvaires dans le Léon sous l'influence de Mgr Roland de Neufville (1562-1613), Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1983 90-2 pp. 311-319
— CASTEL (Yves-Pascal), 1985, Roland Doré, sculpteur du roi en Bretagne et architecte (première moitié du XVIIè siècle) , Bulletin de la Société archéologique du Finistère, Pages 97 à 156.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1996, Du nouveau sur Roland Doré
— COUFFON (René), LE BARS, (Alfred) 1988, Notice sur Plonévez-Porzay, extrait de Diocèse de Quimper et Léon, nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, Association diocésaine, 1988. - 551 p.: ill.; 28 cm.
"Calvaire de Roland Doré : sur le croisillon portant les statues géminées, inscriptions : "MISSIRE GVILLOME LE VERGOS RECTEVR." et "LVCAS BERNAR." Sur les degrés du soubassement, statues en pierre de saint Pierre, sainte Catherine d'Alexandrie, sainte Marie-Madeleine."
— COUFFON, René, 1961, L'évolution de la statuaire en Bretagne après la guerre de succession du Duché - In: Mémoires. Société d'Emulation des Côtes-du-Nord vol. 97 (1961) p. 1-16
— DANIEL, (Françoise), 1988, Roland Doré et les enclos paroissiaux : [exposition, Morlaix, Musée des Jacobins, juillet 1988] / [exposition conçue et réalisée par Françoise Daniel] Jacobins, juillet 1988] 1 vol. (56 p.) : ill. en noir et en coul., couv. ill. en coul. ; 30 cm
— DILASSER ( Maurice), 1979, Un pays de Cornouaille: Locronan et sa région
— GARREC (Roger), Plonévez-Porzay, un territoire du pays glazik.
"Ce calvaire est dû au ciseau du sculpteur landernéen Roland Doré, qui a beaucoup travaillé dans le Porzay ; on reconnaît son style sur le calvaire de Saint-Nicodème en Ploéven, 1637, et sur celui de l'église de Cast, 1666, entre autres. Des statues géminées, juchées sur les branches du croisillon, veillent sur le Christ en croix. Le nom du recteur Guillaume Vergoz est sculpté au revers, et sur le nœud du croisillon on déchiffre encore Lucas Bernar, le nom du fabrique de la chapelle. Au pied du calvaire, trois statues de pierre ont été regroupées tardivement : l'Apôtre saint Pierre, sainte Catherine d'Alexandrie avec l'épée et la roue, et sainte Marie-Madeleine. La statue de la Madeleine, reconnaissable à son vase de parfum et à sa chevelure tressée, est également l'œuvre de Roland Doré. A l'origine, elle occupait seule le piédestal de la croix, ce qui était conforme au type traditionnel des petits calvaires de chez nous."
"De la fontaine de 1642 on n'a conservé que le douet et la statue ancienne de sainte Anne, œuvre également de Roland Doré. Cette statue a été décapitée par des soldats allemands le 23 janvier 1944."
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne. Les ateliers du XVe au XVIe siècle. Presses Universitaires de Rennes. page 348
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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DESCRIPTION. Un oeuvre du XVe siècle, de 1593, de 1617, de 1891 et 1909.
Ce calvaire en granite (socle) et kersanton de 4,50 m de haut est un ensemble composite ou plusieurs fois modifié. Sur une base maçonnée à corniche de trois degrés, où est encastrée une table d’offrande, un socle à pans porte sur ses quatre faces l'inscription L’AN 1909 MISSION. L’AN 1891 MISSION. L’AN 1593 POSEE. L’AN 1891 RESTAUREE. Le fût octogonal, avec sa statue de saint Pierre en haut relief, serait du XIXe siècle. Sur le nœud ouest du croisillon se voient les armes de Jean Briant, abbé de Landévennec ( 1608-1632) qui témoignerait d'une autre époque encore, mais qui relève sans-doute d'une reconstitution de la fin du XIXe siècle. De l'autre coté, l'inscription date de 1617 : "IAN GVELMALC, Y. GAL 1617". Le croisillon porte les statues géminées de la Vierge/Vierge, et de saint Jean/ ange du Jugement. Au centre coté ouest, le Crucifié sous un dais sur une Croix fleuronnée. Au revers se trouve la partie la plus intéressante, avec au centre le Christ ressuscité sur un arc en ciel présidant au Jugement dernier surmonté d'une banderole de lecture hasardeuse GARDE QUIL FERA SELON ESTANT / JUGERA.
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L'attaque par les lichens est considérable et dénature les diverses parties de ce précieux témoin artistique : on peut en suivre les dégâts sur les cartes-postales et les photos prises en 2012 pour l'Inventaire. L'étude de l'inscription de la banderole en est pénalisée.
L'incurie à l'égard de cette œuvre est regrettable par le respect qui est dû à notre patrimoine, mais aussi car elle prive les visiteurs d'une satisfaction esthétique, et surtout car elle n'a pas encore livré tous ses secrets.
L'intérêt principal est de voir ici repris le même thème du Jugement dernier qui figure sur le coté oriental du calvaire de Châteaulin, à 20 km de là, datant du XVe siècle. On y trouve le même Christ au torse nu dans le manteau de la Résurrection, montrant ses stigmates, assis sur l'arc en ciel, les pieds nus posés sur le globe du Monde, tandis qu'un ange souffle dans une trompe pour annoncer le Jugement. La banderole est plus complète à Châteaulin, mais nous retrouvons une partie commune, GARDE QUIL FERA SELON --JUGERA.
J'ai discuté de ce motif iconographique dans mon article sur Châteaulin. Le texte reste opaque, mais rappelle les versets de Matthieu 7:1-2 Nolite judicare, ut non judicemini, in quo enim judicio judicaveritis, judicamini : et in qua mensura mensi fueritis, remetietur vobis. En gros, prends garde que tu seras jugé de la même façon que tu auras jugé.
C'est la comparaison avec Châteaulin qui me permet d'identifier l'ange sonnant de la trompe, identification qui a échappé à Yves-Pascal Castel et à Christel Douard. De même, la femme du coté droit ne peut être que la Vierge, dans son rôle d'intercession. Les autres personnages, ici manquant, sont les individus sortant de leur tombeau à l'appel de la trompette : ils permettent d'imaginer l'état initial avant les modifications successives.
Je fais donc avancer l'étude de ce calvaire, mais j'achoppe face aux inscriptions. Je passe le relais au suivant.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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LA FACE OCCIDENTALE : LE CRUCIFIX.
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Cliché Le Doaré, coll. Hamonic.
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Le socle.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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Saint Pierre sur le fût. 1891.
C. Douard suggère que le fût polygonal, et le haut relief de saint Pierre, datent "probablement du XIXe siècle" (et donc de la restauration de 1891 indiquée sur le socle). Un rapprochement s'impose alors avec le fût et le haut relief de saint Yves sur la place Saint-Yves de Plomodiern, datant de 1893 et qu'on attribue à Yan Larc'hantec, de Landerneau.
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Calvaire de 1893 de la place Saint-Yves de Plomodiern.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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Les armoiries du nœud.
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L'état de ce blason sur la carte postale (début XXe?), comparé à celui des mêmes blasons sur d'autres sites, incite à y voir une restitution datant vers 1891. Mais nous pouvons imaginer que ce blason a repris une figure comparable mais trop altérée.
Jean Briant, abbé de Landévennec de 1608 à 1630 portait d'azur (bleu) au pigeon portant dans son bec un rameau de sinople (vert). Avec la crosse en pal.
La façade de l'église ainsi que son arc de triomphe porte les armes d'autres abbés de Landévennec, ses successeurs les Tanguy, en affirmation de leurs droits sur cette paroisse.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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Le Crucifié sous un dais.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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La Vierge.
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Elle a la tête voilée par son manteau, et tient les mains croisées sous sa poitrine. Sa tête est fléchie vers sa gauche.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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Saint Jean.
Il tient le livre de ses écrits, et garde la main droite sur la poitrine. Sa tête est légèrement levée et tournée vers sa droite. Les yeux sont des amandes recouverts par les paupières.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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LA FACE ORIENTALE : LE CHRIST DU JUGEMENT DERNIER.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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Le Christ du Jugement, au torse nu dans le manteau de la Résurrection, montre ses stigmates, assis sur l'arc-en-ciel, les pieds nus posés sur le globe du Monde.
L'arc-en-ciel est particulier par sa forme de trapèze.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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L'inscription :
[GA]RDE QUIL FERA SELÕ FE
JUGERA
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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L'ange sonnant de la trompe.
Cette trompe est brisée. L'ange est vêtu d'un manteau dont le pan fait retour sur le bras gauche.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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La Vierge.
Elle présente les paumes de ses mains à la façon de son Fils montrant ses stigmates. Cela m'embarrasse un peu.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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L'inscription du croisillon.
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IANCVEVMALCY GAL 1617
Nous pouvons essayer Ian ou Jean GVEN et Yves GALL, mais en tordant un peu la réalité.
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Calvaire de l'église d'Argol. Photographie lavieb-aile.
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SOURCES ET LIENS.
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— ABGRALL, Jean-Marie. PEYRON, Paul. Notices sur les paroisses du diocèse de Quimper et de Léon. Quimper, 1904, vol. 1, p. 1-9.
"Elle porte cette date : LAN. 1593. A sa base est un petit autel en pierre, au-dessus duquel est une Notre-Dame-de Pitié, dont la robe et le manteau offrent des plis bien drapés. Deux anges debout soutiennent les bras de Notre Seigneur et deux autres plus petits, à genoux, recueillent le précieux sang coulant des plaies de ses mains. Sur les croisillons, de chaque côté de Notre-Seigneur en croix, sont les statues de la Sainte-Vierge et de saint Jean, auxquelles sont adossées deux Saintes Femmes, et au milieu, le Sauveur assis, triomphant."
— CASTEL, Yves-Pascal. Atlas des croix et calvaires du Finistère. Société archéologique du Finistère. Quimper, 1980.
http://croix.du-finistere.org/commune/argol.html
—COUFFON (René), Le Bars (Alfred), 1988, Eglises et chapelles du diocèse de Quimper.
"Dans le cimetière, croix dont le socle de granit porte la date de 1593, et le croisillon, en kersanton et timbré des armes de l'abbé Jean Briant, celle de 1617 ; elle a été restaurée en 1891. Statue de saint Pierre contre le fût."
—DOUARD (Christel), LE LU ( Stéphanie), 2012, Calvaire (Argol), Dossier IA29005029 réalisé en 2012
Œuvre hétérogène datant de plusieurs époques. Groupe de crucifixion, dais et phylactère avec inscription en lettres gothiques probablement début 16e siècle. Traverse datée 1617 portant les armoiries de Jean Brient, abbé de Landévennec (ouest) et le nom des fabriciens, peut-être Ian Guen et Marc Gall (est). Socle daté 1593 et 1891 (restauration). Fût (face ouest avec haut-relief figurant saint Pierre) probablement fin 19e siècle.
1593, porte la date
1617, porte la date
1891, porte la date
Base avec table d'offrande à l'ouest. Socle de 1593 remployée lors de la restauration de 1891. Fût monolithe en kersantite avec haut-relief figurant saint Pierre sur la face ouest. Statues géminées de la Vierge et de saint Jean (ouest), d'un apôtre ou saint Thomas (?) et d'une sainte femme (est). Dais gothique coiffant les statues géminées du Christ en croix (ouest) et du Christ ressuscité (est)
Il s'agit d'une oeuvre remaniée à plusieurs reprises. La lecture faite de l'inscription en lettres gothiques sur le phylactère (garde qu'il fera le roy estant jugera) demeure à être confirmée. Cette partie, la plus ancienne du calvaire, se distingue par sa structure encore médiévale dont le dais ouvragé et l'iconographie peu commune de la Résurrection du Christ. Il faudra sans doute rectifier la datation actuelle de cette oeuvre ; la date de 1593 qui figure sur la base semble correspondre à un remaniement et non à la création.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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DESCRIPTION.
La chapelle est située au nord de Plabennec, et juste au sud du manoir du Rest et de son moulin, sur une éminence (altitude 60 m.) entre l'Aber-Benoit au sud et un affluent au nord.
Le calvaire, en kersantite, haut de 6 mètres, forme un ensemble monumental intégré avec l’entrée du placître. Sur un haut massif en pierre de taille, à banc d'offrande, avec quatre degrés à l’arrière est érigé un fût à pans débutant par un socle à griffes. Un bénitier de l'entrée à droite de l'escalier porte l'inscription Y .MINGAM : en belles lettres gothiques. Ce patronyme est attesté à Plabennec depuis le XVIIe siècle (a priori à défaut d'archives antérieures).
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Photo lavieb-aile
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C'est un calvaire à deux croisillons mais qui n'est plus orienté, ce qui témoigne d'une restructuration, voire d'un déplacement. En effet, le crucifix n'est pas tourné vers l'ouest, mais vers le sud, en fait vers la route donnant accès au site.
Le premier croisillon accueille les statues géminées de Jean/Pierre et de Marie-Madeleine/Barbe, tandis que le nœud est occupé par des blasons martelés. Deux anges sont placés aux extrémités et présentent des écus muets.
Un peu plus haut, en étage intermédiaire, un culot tulipé sert d'appui à deux consoles rectangulaires où se tient au sud une Vierge de Pitié et au nord un Christ aux liens.
Sur le second croisillon, le crucifix et les deux larrons sur leur fût sont tournés vers le sud, avec deux blasons intacts aux nœuds, des anges aux extrémités, et une face nord délaissée.
Au-dessus du titulus, les macles des Rohan choquent chacun par l' affirmation de leurs droits — ici déplacée— sur tout édifice de leur vicomté.
Le fût comporte deux inscriptions de style différent, et c'est par leur étude que je débuterai.
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I. LES INSCRIPTIONS.
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1. Inscription datée 1527.
Elle est inscrite sur un cartouche imitant un parchemin aux bords enroulés sur le tiers supérieur du fût et dit :
CESTE . CROIX . FAISTE . PAR
MAISTRE . [nom bûché soigneusement]
LAN . MIL . VC . XXVII .
Cette formule "Cette croix (a été) faite par maître" annonce a priori le nom du sculpteur. Or, il est très rare au XVIe siècle que celui-ci soit mentionné. On trouve plus souvent le nom du commanditaire (généralement le fabricien) avec la formule "m'a fait faire". Mais sur la statue de sainte Apolline du porche de Pencran, la formulation "Cest ymage fut faicte et ceste chapelle" précède les noms d'un prêtre et de deux fabriciens suivie de la date de 1555.
Le Catalogue raisonné des ateliers de sculpture de Basse-Bretagne de Emmanuelle Le Seac'h permet l'étude regroupée des inscriptions de la sculpture monumentale religieuse en Basse-Bretagne.
On trouve sur un bénitier de la chapelle Saint-Guévroc à Tréflez en 1545 "Bastien Prigent ma faite 1545."
La première signature de calvaire apparaît en 1554 sur le calvaire de Plougonven avec la mention "Bastien et Henry Prigent estoiet ymageurs 1554".
Au XVIIe siècle, Roland Doré inscrivit son nom sur le calvaire de Commana en 1624 (R. Doré m'a fait) ou sur une croix de Hanvec en 1627, sur les fonts de Plouédern en 1641, etc.
Cette rareté de la pratique de signatures au XVIe siècle, liée au statut des ymageurs, doit inciter à la plus grande prudence. Un auteur comme René Couffon n'en témoigna souvent pas.
Si, avec Y.-P. Castel, nous postulons malgré tout que c'est bien un sculpteur qui venait après le titre de maître, nous pouvons y voir "une querelle de paternité entre artistes pas si anonymes qu’on ne le suppose souvent". [...] Ce monument portant une signature récusée qui a été "huchée", CESTE CROIX FA/STE PAR MAITRE ... , on suppose que le véritable sculpteur est S. COETDELEV dont on voit le nom au revers du fût. (Y.-P. Castel 1980).
Pour ma part, je présume plutôt qu'une querelle de prééminences, querelles dont les archives témoignent abondamment à propos des armoiries de vitraux.
Quoiqu'il en soit, le chronogramme 1527 ne prête pas à discussion, et fonde clairement la datation de ce fût. C'est précisément à cette date que débuta à Landerneau l'atelier de taille de kersanton de Bastien et Henry Prigent (1527-1577) dans un style bien différent.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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2. Inscription nominative S. Coetdeleu.
Nous lisons dans un cartouche très simple, en lettres gothiques taillées en réserve (et non en bas-relief comme la précédente) :
S. COETDELEV.
Je l'ai dit, Yves-Pascal Castel y a vu le nom d'un sculpteur.
"Les calvaires bretons n'ayant pu naître de génération spontanée, il faudra bien y voir des oeuvres sorties d'ateliers. Et qui dit atelier dit direction magistrale, programmes concertés, modèles définis, transmission de traditions tout autant qu'ouverture aux courants contemporains. En deçà des envolées lyriques pour qui l'art des tailleurs de pierre serait d'autant plus émouvant qu'il serait anonyme, au-delà des paresses intellectuelles qui se refusent à donner un visage aux créateurs d'un art qui continue de fasciner, il y a place au repérage d'artistes aux noms connus, et dont les autres pourront être classés sous le nom de "Maîtres de ... ". Dans cette recherche, l'observation patiente des styles et des apparentements palliera le silence désespérant des sources archivistiques. De l'atelier médiéval de Dinan, repéré vers 1350, à celui de Roland Doré, actif autour de 1630, trois siècles d'une grande sculpture étonnamment typée méritent qu'on essaie d'y voir clair. L'on placera les balbutiements d'une investigation relativement neuve sous le patronage de Jean Discalcéat, le saint minime qui avant d'entrer en religion, travailla, vers 1300, à construire des ponts et, est-ce un hasard, a faire des croix [?]. Plus près de nous, on rendra justice au perspicace abbé Jean Feutren qui découvre en 1970, au noeud du calvaire de Plougonven la signature de deux "ymageurs", Bastien et Henry Prigent. On saura aussi gré à Madame Françoise Daniel, d'avoir eu l'audace de monter au Musée municipal de Morlaix, l'exposition de 1988 qui mit en lumière l'oeuvre attachante de Roland Doré et qui, demandée par le Louvre, fut accueillie à Chaillot au Musée des Monuments Français. Certes les artistes qui ont signé leurs oeuvres sont rares. Mais dans l'impossibilité d'épingler des noms qui les authentifieraient à coup sûr, il sera légitime de regrouper sous le nom d'un même maître des oeuvres stylistiquement apparentées : Maître de Tronoën, Maître de Quilinen, Maître de Châteaulin ... Ainsi se constitue une galerie cohérente de sculpteurs non anonymes à laquelle les pages qui suivent, si rapides soient-elles, montrent qu'il n'est pas tout à fait insensé de rêver.
Anonyme, il refusait de l'être S. Coetdeleu, qui grava son nom au revers du calvaire de Locmaria-Lan à Plabennec, alors qu'une main furtive bûchait soigneusement celui d'un probable usurpateur étalé sur le fût : CESTE CROIX FAISTE PAR MAISTRE--- L'AN MIL VCC XXVII. Protestation de l'individu conscient de sa valeur ? On est en 1527, aux heures où l'artiste de la Renaissance réclame d'être reconnu en tant que tel »" (Y.-P. Castel)
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L'abbé Castel a fait entrer dans son Dictionnaire des artistes, artisans (1987), et en a rapproché le style de celui du calvaire de Lesquelen (Plabennec), dont il ne reste que le fût et les anges du croisillon, et une statue de La Roche-Maurice.
E. Le Seac'h a repris ces attribution et a décrit "S. Coetdeleu" comme l'un des petits sculpteurs paroissiaux de la Renaissance Bretonne (1511-1589)".
Pourtant, Michel de Mauny (Le Pays de Léon, 1977) écrivait que ce nom ne peut être considéré comme le nom de l'auteur du calvaire. C'est également mon avis.
Personne ne semble s'être avisé que ce nom de Coetdeleu n'existe sous cette graphie ni sur la base geneanet, ni dans le Dictionnaire des noms de famille d'A. Deshayes, ni ailleurs, que ce soit comme anthroponyme ou comme toponyme. C'est un hapax, un unicum.
Il faut mettre à mon sens ce nom en relation avec celui de Sébastien COETELLEAU, qui, selon les archives de la chapelle, établit par testament du 20 juin 1410 une messe à note le jour de l'Ascension à Locmaria. Une messe chantée suppose quelques moyens, et a priori une noblesse d'extraction. Je rapproche ce nom de celui des seigneurs de COETELEZ, titre d'Hervé (1411) puis de Thomas du Chatel ? Le manoir de Coetelez (Coëtelez, Coatelez) se trouve au Drennec, paroisse de Plabennec. On connaît Guillaume de Coetelez ca 1446 puis son fils Jean ca 1471-1494. Le rameau des Coetelez s'est fondu dans LE NY (François Le Ny de Coatelez en 1503, Jean Le Ny de Coetelès). Les graphies sont variables.
Le toponyme (et site du manoir) est indiqué Coatelez sur la carte de Cassini, Coadélès (avec un D) sur la carte de 1820-1860, et Coat Elez sur la carte IGN. On notera la proximité des lieux ; la chapelle est située entre Plabennec et Le Drennec
Mais on trouve aussi au XVIIe siècle les mentions des patronymes COETELEAU, COATELEAU, CATELLEAU, COATHELEAU notamment dans cet échange du forum CGF concernant une famille du Drennec :
La base Geneanet est renseignée pour COATELEAU, Le Drennec, à partir de 1570.
Notons aussi que la Croas ar Priol de Kerfergar, Plabennec, porte l'inscription M HERVE COET DE - - AVR FIT FAIRE CETTE CROIX 1584. RESPICE FINEM.
En résumé, nous ne pouvons valider l'hypothèse d'Y.P. Castel de voir en S. COETDELEU la signature d'un sculpteur et nous préférerons y voir la marque d'un donateur ou commanditaire, sans doute d'une famille du Drennec.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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II. HÉRALDIQUE.
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1. Armoiries des Rohan à neuf macles en sommité au dessus du titulus INRI (en lettres gothiques à fûts perlées aux enjambements bifides.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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2. Écartelé Lesquelen-Carman.
Nœud du croisillon supérieur, face principale (sud).
Je noterai le blasonnement des pièces avec leurs émaux. En 1 et 4, d'azur à la tour d'argent portée par une roue de même (famille de Lesquelen). En 2 et 3 d'or au lion d'azur (famille de Carman.
Note : le nom Carman est une forme du nom plus ancien Kermavan. Le château fortifié de Kermavan (Kermarvan) ou Carman, est implanté au lieu-dit Kermaguam (Kervaon en breton) sur la rive droite de l'Aber Wrac'h,à Kernilis. En 1409, Aliette de Quelen, dame du Vieux-Chastel, épouse Tanguy de Kermarvan, originaire du château de Kermarvan en Kernilis ; désormais propriété de la famille de Kermarvan, le château de Lesquelen en Plabennec prend progressivement le nom de Kermarvan (ou Kermavan), nom qui se transforme au xvie siècle en Kerman et au xviie siècle en Carman. (M. Mauguin) .Les armoiries de la famille de Carman sont représentées sur un vitrail de la chapelle de Saint-Jean-Balanant à Plouvien et sur leur tombeau de l'église de Plounévez-Lochrist.
-C'est en 1409 qu'Aliette de Quelen dame du Vieux-Chastel épousa Tanguy de Kermavan sieur de Kermavan 1453, chambellan du Duc Jean V, capitaine de Brest en 1423. Les enfants de Tanguy et d'Aliette de Quelen prendront les armes de Lesquelen et de Kermavan.
-Leur fils : Tanguy II de Kermavan, épousa Marguerite du Chastel ; il est fait prisonnier à Saint Aubin de Cormier en 1488.
-Leur fils : Tanguy III de Kermavan, épouse en 1510 Louise de la Forêt.
-Leur fils : Tanguy IV de Kermavan, épouse Catherine de Rohan-Guéméné (décédée en 1556), mort sans postérité, laissant ses biens à sa sœur Françoise de Kermavan, qui épouse en 1541 Jean de Plusquellec, seigneur de Bruillac, qui abandonne son nom pour relever celui des Kermavan.
Les armoiries des Rohan sont peut-être en rapport avec Catherine de Rohan : elles auraient alors été placées postérieurement, ce que pourrait suggérer l'appareillage du sommet du calvaire.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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Le même blason sur la première arche nord de la chapelle.
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chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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3. Écartelé Carman-La Forest.
Les armoiries précédentes restaient imprécises sur la datation. Celles-ci sont en rapport avec le couple Tanguy III de Kermavan / Louise de la Forêt dont le mariage date de 1510 ; Louise de la Forêt est morte en 1551. Elles sont donc cohérentes avec la datation du fût en 1527.
Voir les armoiries de La Forest, seigneur d'Armaillé : d'argent, au chef de sable : "Les généalogistes n'ont pas manqué de chercher à rattacher la famille de la Forest d'Armaillé à une famille de la Forest, éteinte au XVIème siècle, qui portait exactement les mêmes armoiries et qui appartenait à la noblesse du diocèse de Vannes, en Bretagne. Cette famille avait pour nom primitif celui de Grignon. Henri Grignon, Sgr de la Forest, en la paroisse de Languidic, rendit hommage au vicomte de Rohan en 1396. Sa descendance figura de 1427 à 1536 aux réformations et montres de la noblesse du diocèse de Vannes et s'éteignit avec Louise de la Forest, décédée en 1544, qui avait épousé Tanneguy de Kermavan."
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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Le calvaire à double croisillon.
"Au cours du XVIe siècle, l'audace des sculpteurs de petits calvaires ne cesse de grandir. Multipliant les prouesses techniques ils font porter au même fût, non plus un, mais deux croisillons. S'y placent les larrons, s'y juchent les saints, s'y campent de robustes cavaliers aussi fiers que ceux des Crucifixions aux vitraux des églises. Merveilles d'équilibre à Locmaria-Lan de Plabennec, à L'Hôpital-Camfrout, à Quimerch, à Locmélar, à Loqueffret ... Aux calmes heures vespérales, lecture directe abolie, les contours précis de ces portiques à étages se découpent en beaux contre jours. Pour vaincre les lois de la pesanteur, les tailleurs de pierre savent le secret d'assemblages destinés à affronter les gels et les tempêtes. Ils coulent le soufre fondu dans le trou sur le flanc taluté des noeuds. Pour être pleinement efficaces ils laissent aux liaisons de l'' élasticité." (Y.P. Castel)
Au schéma adopté ici, avec le Christ entre les deux larrons, succédera pour l'atelier des Prigent celui du Christ entre les deux cavaliers, tandis que le tandem Pietà/Christ aux liens sera largement repris.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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Le croisillon supérieur : le Crucifié entre les deux larrons.
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"Le Crucifié a le visage ridé d'un vieillard édenté, un sourire satisfait aux lèvres. Les deux larrons, installés chacun sur une croix en tau ont le corps dans des positions identiques. Le bon larron a un visage inexpressif tandis que son compagnon porte une moustache.La console du coté du mauvais larron est formé d'un démon aptère. La forme des ailes triangulaires des anges est une marque stylistique de S. Coëtd que l'on retrouve sur le calvaire de Lesquelen" (Le Seac'h)
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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On remarquera facilement les pagnes aux formes généreuses, serrées par un lacet noué en rosette. Les thorax sont dilatés par cette forme de supplice où les jambes sont privées de l'appui qui permettrait de respirer. Elles sont d'autant plus privées de cet appui que les soldats les ont brisées, ce qui explique leur flexion orthogonale.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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C'est la première fois que je rencontre ce détail du mauvais larron dont l'absence de foi est exprimée par un bandeau sur les yeux. Il serait intéressant d'en trouver d'autres exemples.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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Le croisillon inférieur.
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1. Saint Jean.
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Le plus souvent, nous trouvons au pied de la croix la Vierge à gauche et saint Jean l'évangéliste à droite.
Saint Jean est bien présent ici, avec la main sur la poitrine, l'autre main retenant le pan du manteau. La tête est inclinée en signe d'affliction.
Les caractères stylistiques de ce sculpteur peu commun apparaissent clairement avec des sourcils épais, les pommettes saillantes, les sillons naso-géniens accentués, la petite bouche en arc concave. Les cheveux (comme ceux de saint Pierre qui se voient à l'arrière) sont formés d'épaisses mèches en boucles,régulièrement striées.
Les yeux sont très reconnaissables , ils seront plus caractéristiques encore sur les autres statues.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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2. Sainte Marie-Madeleine portant le flacon d'aromates.
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Autant les visage de saint Jean et de saint Pierre sont expressionnistes, aux personnalités accentuées, autant ceux des deux saintes sont d'un ovale très pur, un front large contrastant avec un étage inférieur triangulaire et étroit, dans une recherche de se conformer à l'idéal de beauté féminine de l'époque. Les pommettes restent néanmoins saillantes.
Venons-en aux yeux. Ils sont comme enfouis sous des paupières dépourvus de plis ; on sait que l'absence de pli palpébral est la caractéristique des yeux asiatiques, conférant au visage un aspect lisse peu expressif que les jeunes femmes japonaises chinoises ou coréennes corrigent par une intervention de chirurgie plastique sur la paupière supérieure. Ici, la paupière supérieure n'est pas plissée à l'européenne, mais encore la ligne supérieure de l'œil est presque droite et horizontale, tandis que la ligne inférieure est en arc de cercle. Les deux lignes forment un coin de l'œil très pointu.
On pourrait résumer cela en disant que la caractéristique des yeux de ce sculpteur est une paupière supérieure très large : ce sera encore plus le cas pour la Vierge de pitié.
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Sainte Marie-Madeleine est souvent figurée par les peintres et sculpteurs du XVIe siècle comme un parangon de beauté, avec un front épilé et donc large, une chevelure souple et longue, et une élégance vestimentaire affirmée. Ici, la sainte porte une robe serrées par une ceinture, avec un corsage ajusté et une jupe plissée. Les manches rapportées sont bouffantes. Le manteau, ou cape, est tenue par un fermail fait d'anneaux de chaîne tenus par deux boucles plus travaillées.
On profite de ce cliché pour voir la chevelure de sainte Barbe, qui atteint les reins.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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On ne s'étonnera pas de trouver au pied de la croix de ce calvaire Marie-Madeleine, puisqu'elle y est omniprésente au XVIe siècle, le plus souvent agenouillée et les mains tordues par le chagrin, sur toutes les enluminures, les peintures et les vitraux de la Passion.
Et on ne commettra pas l'erreur pourtant commune de qualifier son attribut de "flacon de parfum", par contamination avec le parfum versé sur les pieds du Christ par Marie de Béthanie ou par la femme chez Simon le pharisien.
Dans le contexte de la Passion, il s'agit bien du vase contenant les "aromates" nécessaires à l'ensevelissement et à l'embaumement du Christ par Marie de Magdala, celle qui est présente à la Déposition, puis qui se rend au Tombeau.
Marie de Magdala, devenue par amalgame Marie-Madeleine, est, après la Vierge éplorée, le personnage premier de la Passion. Or, c'est dans l'évangile de Jean qu'elle est présentée d'abord sur le Golgotha (Jn 19:25) puis comme le premier témoin de la Résurrection, en Jean 20 . La signification de sa présence sur ce calvaire est donnée par la représentation de Jean l'évangéliste à droite, comme une citation.
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Elle est, par ce rôle dans la Mort et la Résurrection, LE personnage emblématique non seulement de la Passion, mais aussi de la pensée chrétienne sur la mort en Bretagne à la Renaissance. Or, le personnage auquel elle est adossée et accouplée est sainte Barbe, dont le principal motif d'invocation est la protection contre la mort subite, foudroyante, sans le secours des Sacrements.
Marie-Madeleine est la sainte non seulement liée à la mort, mais aussi aux soins donnés aux mourants et aux indigents, si bien que tous les lieux-dits "La Madeleine" correspondent à des lieux de réclusion des lépreux et autres contagieux.
Je me suis demandé si cette présence se justifiait par l'existence d'une chapelle ou d'un site éponyme, sans résultat. Puis, si cette date de 1527 correspondait à un contexte d'épidémie. La réponse ne peut être précise.
Il nous reste à constater la cohérence du programme iconographique autour du double thème de l'affliction de la Mort , et du Soin.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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3. La Vierge de Pitié.
"La Pietà à deux personnages repose sur une console moulurée Renaissance. La Vierge tient son Fils dans ses bras, la main reposant sous la nuque. Son voile, qui forme des plis en serviette sur le coté, est agrémenté d'une séparation au milieu de la tête." (Le Seac'h) .
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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La Vierge a la tête inclinée vers la droite et tournée vers la gauche : elle ne regarde pas son Fils, et son visage inexpressif témoigne de l'anéantissement psychique du deuil. Ce visage est caricatural, avec les pommettes saillantes, les paupières supérieures en rideau dissimulant presque les yeux réduits à un croissant, et la couche minuscule.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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La face nord : saint Pierre et sainte Barbe. Le Christ aux liens.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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1. Le Christ aux liens.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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2. Sainte Barbe.
Elle est accompagnée de ses attributs, la palme de martyre et la tour à trois fenêtres (ici, à trois étages) témoignant de son attachement au dogme trinitaire. Elle est habillée en princesse, avec les privilèges dues à ce rang, le surcot ouvert, largement doublé de fourrure, brodé et doté de pierreries, la robe à manches larges et plissées, le manteau dont elle retient le pan de la main gauche, et la chaîne en guise de collier. Ses cheveux longs sont retenus par une couronne de grosses perles. Les chaussures sont à bouts ronds.
On sait que son culte est très répandu, notamment par les femmes des familles nobles, et que dans les livres d'Heures, elle est aussi invoquée que sainte Catherine et sainte Marguerite.
Les deux faces de la statue géminée rivalisent de finesse dans les détails et de raffinement.
On les comparera à la statue en kersanton de sainte Catherine ornant le portait ouest de Rumengol :
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Sainte Catherine. Façade occidentale de l'église Notre-Dame de Rumengol. Photographie lavieb-aile.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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Détail de la tour : la porte, ses gonds et son loquet (face sud).
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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3. Saint Pierre et sa clef.
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Calvaire (kersantite, 1527) de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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LES STATUES ADJACENTES :
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1. Saint Eloi en évêque, avec les emblèmes professionnels des maréchaux-ferrants. Blason martelé .
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Calvaire de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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2. Saint Fiacre en coule monastique, son livre et sa bêche.
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Calvaire de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
Calvaire de la chapelle de Locmaria-Lann à Plabennec. Photographie lavieb-aile.
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SOURCES ET LIENS.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1980, Atlas des croix et calvaires du Finistère.
massif, quatre degrés à l’arrière. Socle à pans. Fût de même: CESTE CROIX FAISTE PAR MAISTRE [nom bûché soigneusement] LAN MILVCXXVII au revers du fût: S. COETDELEV.
Premier croisillon aux anges tenant des écus, statues géminées: Jean-Pierre, Madeleine-Barbe, au milieu Vierge de Pitié, Christ lié. Second croisillon, fût des larrons, écus au centre sur face et revers. Croix de section octogonale, crucifix, au-dessus du titulus, macles des Rohan. (Oeuvre intéressante par le fait que le nom du maître sculpteur a été supprimé, témoignant d’une querelle de paternité entre artistes pas si anonymes qu’on ne le suppose souvent. [YPC 1980]
— CASTEL (Yves-Pascal), La grande Pietà de Yvon Fichaut à Laz , 1527.
— PÉRENNÈS (Henri), 1938, « Notices sur les paroisses du diocèse de Quimper et de Léon. Plabennec », Bulletin diocésain d’histoire et d’archéologie, 1938, p. 175-179, 193-199.
— LE GUENNEC (Louis), 1981, Le Finistère monumental, t. II, Brest et sa région, Quimper, 1981, p. 324, 327-330.
2. Il comporte un motif rare : le Jugement dernier.
3. Un calvaire semblable se trouve devant l'église d'Argol.
4. Il porte une belle inscription qui reste à élucider.
5. Il est en kersantite.
6. Il permet de découvrir l'ancienne chapelle Notre-Dame, dont les plus anciennes parties dateraient du 13e ou 14e siècle et qui porte les dates de 1722 et 1753.
Quinze calvaires de l'atelier de Tronoën (granite, 1470) à Guengat, Quéménéven, Châteauneuf-du-Faou, Saint-Hernin-Kerbreudeur , Laz, Saint-Goazec, Collorec, Gourin, Guiscriff, Langonnet, Le Moustoir, Plusquellec et Peumerit-Quintin).
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Il comporte un motif rare : le Jugement dernier.
Le Christ ressuscité lève les bras et montre les plaies de ses paumes. Il est assis sur un arc-en-ciel ; ses pieds reposent sur le globe terrestre. À sa gauche, la vierge implore. À sa droite un ange sonne la trompe du Jugement au son de laquelle les morts ressuscitent. Ils sont symbolisés par trois petits personnages nus qui sortent de la terre : deux hommes au centre, une femme à droite.
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Un calvaire semblable se trouve devant l'église d'Argol.
Le calvaire d'Argol résulte dans son état actuel de plusieurs restaurations successives puisqu'il porte les dates de 1593, de 1617, et le blason de Jean Briant abbé de Landevénnec de 1608. à 1632. À son revers, le Christ du Jugement Dernier est assis sur un arc-en-ciel (en forme de trapèze), présentant les paumes de ses mains, les pieds reposant sur la boule terrestre, tandis qu'un ange aptère joue du cor et qu'à sa gauche une femme lève les mains devant la poitrine.
Il porte une belle inscription qui reste à élucider.
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La banderole qui surmonte le tout porte une inscription qui à ce jour n'est pas totalement déchiffrée : « GARDE... QU'IL FERA SELO(N) SES... JUGERA" (Selon YP Castel, à rapprocher du texte de la banderole du calvaire d'Argol qu'il comprend comme : « Garde qu'il fera, le roy estant jugera », que l'on peut traduire en français moderne : « Prends garde à ce qu'il fera, celui qui est le roi te jugera » ; un rappel aux fidèles catholiques bretons que leur véritable roi n'est pas Henri de Navarre, suspect à leurs yeux, mais le Christ qui les jugera). Le calvaire serait donc contemporain à Henri de Navarre qui abjura le catholicisme en 1576."
Si nous préférons la leçon SELON à celle LEROI, cette hypothèse ne tient pas.
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Il est en kersantite, ou pierre de kersanton, un matériau remarquable par son grain serré, sa teinte gris sombre et sa résistance à l'altération. Elle doit son nom à l'un de ses sites d'extraction en rade de Brest. Les principaux ateliers qui l'ont sculptée étaient installés à Landerneau.
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PRÉSENTATION.
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Au Xeme siècle, les seigneurs de Châteaulin érigèrent un château fort sur la butte dominant de 35 mètres les premiers gués sur l'Aulne et le Hent Haès, le chemin menant de Carhaix à Camaret, dont ils contrôlaient l'accès.
Une impressionnante forteresse de schiste était entourée d'une enceinte de 544 mètres par des murs atteignant 2 mètres d'épaisseur.
L'église Notre-Dame, construite à flanc de coteau sur la face sud-ouest de la butte, doit son origine, comme chapelle seigneuriale, à la construction de ce château fortifié au sommet de la butte et à l'établissement d'une bourgade au lieu-dit Le Vieux-Bourg.
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Sur cette photo satellite, la croix rouge correspond à l'église (cliquez).
Photo satellite de Châteaulin.
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Vue de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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La chapelle fut l'église de Châteaulin jusqu'au début du XVIIIe siècle en concurrence avec l'église prieurale de Saint-Idunet, située sur l'autre rive de l'Aulne, et dépendant du prieuré de Landévennec.
Au XIXe siècle, on pénétrait dans l'enclos après avoir gravi un grand escalier, qui fut détruit pour aménager une route. Il laissait à gauche la porte monumentale, (Pors ar Maro, la Porte des morts) datant — comme le calvaire — de la seconde moitié du XVe siècle. Sa grille ne s'ouvrait que pour laisser passer le convoi funéraire.
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Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Le calvaire de 6 mètres de haut, placé entre la porte monumentale et le porche sud , date de la seconde moitié du XVe siècle. Le fût à pans, posé sur les trois degrés en granite (le premier à large corniche moulurée) et le socle à griffes feuillagées, porte un croisillon à nœud tronçonique.
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Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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LA FACE OCCIDENTALE.
On y voit la croix des larrons et au centre le crucifix sous un dais et le titulus, la Vierge et Jean.
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Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile juillet 2020.
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LA FACE ORIENTALE : LE JUGEMENT DERNIER.
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Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Le Christ (cheveux courts, visage imberbe) est torse nu dans le manteau de gloire : c'est le Christ de la Résurrection, qui présente au monde les plaies de ses mains. Il est assis sur un arc-en-ciel , et ses pieds reposent sur le globe terrestre.
À sa gauche, la Vierge, mains croisées, la tête recouverte de son manteau-voile qui forme un large auvent, semble implorer le Sauveur. Elle n'est guère différente des Vierges des calvaires, mais saint Jean est remplacé ici par un ange (sans ailes) qui sonne de la trompe et annonce ainsi le Jugement et la Résurrection des morts.
Trois petits personnages nus se dressent et lèvent leurs bras vers le Ressuscité : deux hommes au centre, une femme à droite.
Il illustre la doctrine exposée par Paul dans la première épître aux Thessaloniciens :
"Nous ne voulons pas, frères, que vous soyez dans l'ignorance au sujet de ceux qui dorment, afin que vous ne vous affligiez pas comme les autres qui n'ont point d'espérance.
Car, si nous croyons que Jésus est mort et qu'il est ressuscité, croyons aussi que Dieu ramènera par Jésus et avec lui ceux qui sont morts.
Voici, en effet, ce que nous vous déclarons d'après la parole du Seigneur: nous les vivants, restés pour l'avènement du Seigneur, nous ne devancerons pas ceux qui sont morts.
Car le Seigneur lui-même, à un signal donné, à la voix d'un archange, et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel, et les morts en Christ ressusciteront premièrement.
Ensuite, nous les vivants, qui seront restés, nous serons tous ensemble enlevés avec eux sur des nuées, à la rencontre du Seigneur dans les airs, et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur.
Consolez-vous donc les uns les autres par ces paroles." (1 Thess 4:13-18)
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Le thème est rare sur nos calvaires, mais il est très répandu en peinture, en enluminure et en sculpture de retable. Je pourrais donc multiplier les exemples, mais en voici cinq, dont deux en Bretagne.
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Sous les lys le texte écrit en blanc : « venite benedicti Patris mei possidete paratum vobis regnum a constitutione mundi » (venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la fondation du monde ")
Rogier van der Weyden, Polyptyque du Jugement Dernier (1445_1450), panneau 4, Hospices de Beaune, photographie lavieb-aile.
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Le retable d'Hagueneau (1496), photo André Wagner.
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Missel à l'usage d'Amiens, BM Amiens ms 0163 f.156, avant 1481, par le Maître d'Antoine Clabault
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Jugement Dernier, début XIVe, chapelle de Locmaria er Hoët, Landévant. Photographie lavieb-aile.
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Baie 2, du Jugement dernier ( vers 1500) de l'église de Plogonnec. Photo lavieb-aile.
Paris, Bibl. Sainte-Geneviève, 0246 Cité de Dieu (vers 1475) f. 371v Inscriptions "Surgite mortui. Venite ad judicium""Nolumus vos ignorare de dormientibus""Mortui resurgent et qui in sepulcris erunt suscitabuntur" "Ecce dominus noster omnipotens veniet, et quis sustinebit diem adventus ejus".
et sur le site Mandragore :
Arsenal 593 [ff. 1-42], fol. 34,
Arsenal 1186, fol. 170,
Arsenal 3516, fol. 154v
Français 19, fol. 190
Français 179, fol. 236
Français 403, fol. 40v
Latin 511, fol. 40v
Latin 688, fol. 44
Nouvelle acquisition française 16251, fol. 52
Nouvelle acquisition latine 3226, fol. 48
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Le texte du phylactère est parfaitement agaçant ; il y a d'abord, il y a surtout ces lichens qui prospèrent ici comme les vrillettes sur un vieux mobilier. L'œuvre n'est-elle pas classée ? N'est-ce pas une relique du passé ? Ne mérite-t-elle pas d'être protégée et restaurée ? Ne mérite-t-elle pas d'être étudiée, afin d'en élucider le message ?
Je compare les photos prises par E. Le Seac'h, celles que j'ai prises en 2012 et celles que j'ai prises en 2019. L'attaque par les lichens s'aggrave d'année en année.
Malgré tout le phylactère est en trois parties. La partie en bas à droite, qui se termine en rouleau serpentin, semble la plus facile; mais elle résiste à ma lecture : MRLT ? MRDT ? Elle n'a pas été incluse dans les lectures des auteurs précédents.
Au dessus, la bande horizontale n'est pas moins aisée. Au dessus de la tête, on peut lire FERATELORE, qui peut être agencé comme FERA SELON (avec un N abrégé).
La partie en bas à gauche résiste également. Ne se termine-t-elle pas par un N ?
Au total, je reprendrai volontiers la leçon de Y.-P. Castel GARDE... QU'IL FERA SELO(N) SES... JUGERA, si les lectures de cet auteur n'avaient jamais été prises à défaut (mais qui, parmi les meilleurs épigraphistes, pourrait avoir cette prétention ?), si il avait indiquer sur un schéma la correspondance avec les trois parties de la banderole, si cette inscription avait un sens, et mieux, si elle renvoyait à un texte contemporain similaire. Ce n'est pas le cas.
En examinant les Jugements derniers des enluminures et autres supports peints, (site Mandragore, site Enluminure de l'IRHT, etc), je ne retrouve aucune inscription ressemblant à celle-ci.
On attendrait plutôt SURGITE MORTUI/ VENITE AD JUDICUM.
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Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Les saints personnages.
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Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Les morts sortant de leur tombeau.
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Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Calvaire (kersantite, XVe siècle) de l'église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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LES INSCRIPTIONS ET ÉLÉMENTS REMARQUABLES DE L'EXTÉRIEUR DE L'ÉGLISE.
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Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Le porche méridional porte une inscription dont la première partie se trouve à gauche du gable :
"CE. TEMPLE. QVA/SI. RVINE. E. RED/
[RESSÉ] LAN. 1720."
"Ce temple quasi ruiné est redressé l'an 1720" (date d'une restauration).
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Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Du coté droit du gable :
LESRIJ :
IAMET. F.
En 1720, il doit s'agir de Louis JAMET (ca 1695-1760), fils de Guillaume (1672-1705), lui-même fils de Louis, un marchand poillier né à Saint-Fleury-sur Coutances (à l'ouest de Villedieu-les-Poêles, grand centre dinandier) et venu s'établir à Châteaulin où il épousa le 10 janvier 1763 Gabrielle LE VILLAIN. Ce grand-père est décédé le 10 octobre 1665 ; il s'est marié et fut inhumé à Saint-Idunet.
Louis JAMET, le petit-fils du marchand de poêle, fut inhumé au cimetière Notre-Dame : il appartenait donc bien à cette paroisse. Il épousa le 24 février 1721 Yvonne SALAUN.
Bien que la ligne supérieure LESRIJ: ne soit pas facile à comprendre, la proximité de la date de ce mariage avec celle de sa fonction de fabricien plaide en faveur de cette hypothèse.
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Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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La face sud de la tour du clocher.
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MRE JEANLECARRER (*)
ME ALLAIN SANQVER
FAB LAN 17-3
(*) fleur de lys
Pour Couffon : "Mre IEAN LE CARRE. R/Me ALLAIN SANQVER/FAB. LAN. 1753".
Soit "Messire Jean Le CARRE recteur, Maître Alain Sanquer fabricien l'an 1753".
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Le clocheton à dôme et ses masques.
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Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Les cloches.
Elles portent les inscription :
LES SOINS DE MM LES [TRESORIERS
IN : DURAND CURE DU REST
JEAN FONDEUR A QUIMPER
PAULINE-HENRIETTE
APPARTENANT A LA FABRIQUE DE CHATEAULIN
EN 1885 PAR VIEL-TETREL ---
ET
NOMMEE
PAR MR HENRI GASSIS
ET MME PAULINE COTTES.
Henri GASSIS (1868-1929) était avoué licencié à Châteaulin, directeur du Crédit-Agricole du Finistère, fils d'Armand-Gabriel-Marie Gassis, architecte et maire de Châteaulin, époux de Marie-Louise-Amélie DOUGUEDROIT
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
Église Notre-Dame de Châteaulin. Photographie lavieb-aile.
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Photographie lavieb-aile.
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SOURCES ET LIENS.
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— ABGRALL (Jean-Marie), PEYRON (Paul), 1905, "[Notices sur les paroisses] Châteaulin",Bulletin de la commission diocésaine d'histoire et d'archéologie , Quimper, 5e année, 1905, p. 132-144, p. 153-167.
— COUFFON (René), LE BARS (Alfred), 1988, Paroisse de Châteaulin, Notice extraite de : Diocèse de Quimper et Léon, nouveau répertoire des églises et chapelles, par René Couffon, Alfred Le Bars, Quimper, Association diocésaine, 1988.
"Taillé dans la pierre noire de Kersanton, le calvaire une œuvre curieuse et rare. Sur la face ouest, le Christ en croix est entouré de saint Jean et de la Vierge. De part et d’autre, les deux larrons en croix complètent la scène.
La face exposée à l’est est plus étonnante. La scène représentée est le jugement dernier. Le Dieu du jugement lève les bras dans un signe d’apaisement. Il est assis sur un arc-en-ciel qui sort d’un nuage ; ses pieds reposent sur une boule qui représente le Monde. À sa gauche, la vierge implore. À sa droite un ange sonne la trompette du jugement au son de laquelle les morts ressuscitent. Ils sont symbolisés par trois petits personnages nus qui sortent de la terre. Deux hommes au centre, une femme à droite. La banderole qui surmonte le tout porte une inscription qui à ce jour n'est pas totalement déchiffrée : « GARDE... QU'IL FERA SELO(N) SES... JUGERA" (Selon YP Castel, à rapprocher au texte de la banderole du calvaire d'Argol : « Garde qu'il fera, le roy estant jugera », que l'on peut traduire en français moderne : « Prends garde à ce qu'il fera, celui qui est le roi te jugera » ; un rappel aux fidèles catholiques bretons que leur véritable roi n'est pas Henri de Navarre, suspect à leurs yeux, mais le Christ qui les jugera). Le calvaire serait donc contemporain à Henri de Navarre qui abjura le catholicisme en 1576."
2°) Sur les calvaires du Finistère : utilisez l'onglet "rechercher".
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PRÉSENTATION.
Le calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré n'a pas fait l'objet de publication ou d'étude spécifique. Emmanuelle Le Seac'h ne le cite pas dans son très complet catalogue des ateliers de sculpture sur pierre de Basse-Bretagne. Yves-Pascal Castel le décrit ainsi dans son Atlas (je développe les abréviations et le texte):
Chapelle de Quillidouaré, calvaire en kersanton de 6 mètre de haut, datant du milieu XVIe siècle, peut-être par l'atelier Fayet (?). Le fût à pans est dressé sur une base octogonale à trois étages, et un socle cubique portant la date de 1781. En lettres gothiques : G LE GAC F.. À la base du fût, un groupe N.-D. de Pitié du coté est et un Christ attendant le supplice à l'ouest. Un croisillon mouluré porte les statues géminées: Jean/un apôtre, et de Vierge/Madeleine. Croix à branches rondes, fleurons à godrons, crucifix, un ange au sommet [tenant le titulus].
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Schéma relevé par Y.-P. Castel en 1980
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Je peux vérifier la validation de cette description pour les données objectives, mais je m'interroge sur celle de la datation, et de la suggestion d'attribution à l'atelier Fayet.
On sait que Y.-P. Castel a donné ce nom à l'auteur du calvaire de Lopérec daté de 1552 (?). Ce sculpteur est en tout point assimilable à l'atelier de Bastien et Henry Prigent, actif à Landerneau entre 1527 et 1577. Il s'en distinguerait par l'introduction d'anges recueillant le sang du Christ dans des calices tout en volant. Fayet aurait été actif de 1552 à 1563 comme compagnon de l'atelier des Prigent, réalisant, outre le calvaire de Lopérec, la partie haute de celui du cimetière de Laz (1563), le Christ mutilé de Coat-Nan à Irvillac, les vestiges de crucifié du Doyenné du Folgoët, les vestiges de crucifié du calvaire de Notre-Dame de Lorette à Irvillac, les vestiges de crucifié du pignon de l'école du Tromeur de Landerneau et 8 scènes en grès feldspathique du calvaire de Pleyben (catalogue E. Le Seac'h).
Si le Christ (avec ces cheveux en mèches décollées des épaules, par exemple), peut évoquer ceux de l'atelier des Prigent, les statues géminées m'apparaissent d'un raffinement relevant d'avantage du XVIIe. Mais je suis confiné dans la solitude de mes recherches en ligne ou dans ma bibliothèque, sans rien trouver d'autre sur ce calvaire.
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L'inscription.
L'inscription en lettres gothiques LE GAC F. (pour "fabrique"), (que je n'ai pas remarquée lors de ma visite) peut-elle nous aider ?
Si on suppose que le G. correspond au prénom Guillaume, nous pouvons rechercher Guillaume Le GAC en généalogie à Cast. La recherche est fructueuse, précisant l'existence d'un individu né vers 1610 et mort en 1662. Après un premier mariage à Briec, il épousa à Cast vers 1652 Adelice Bihan. Mais il existe d'autres candidates, et la datation ne peut s'appuyer sur cet indice.
Ce qui est toujours étonnant, c'est de constater que le calvaire ne respecte pas la règle d'orientation, qui est plus exactement une règle d'occidentation : le Christ en croix entouré de la Vierge à sa droite et de Jean à sa gauche devrait être tourné vers le couchant, vers l'ouest, symbole de sa mort annonçant, comme pour l'astre solaire et son lever après la nuit, sa résurrection. Le nombre de calvaires qui ne respectent pas, pour au moins l'un des trois personnages, ce principe très simple, est confondant.
Ici, en effet, c'est toute la croix et le croisillon qu'on voudrait faire pivoter de 180° sur le fût pour tourner le crucifix vers l'ouest ; mais alors, la Vierge serait à gauche du Christ. Il faudrait alors plutôt tourner chaque statue géminée, et la croix, de 180°, et tout irait bien. Et hop !
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Comme le calvaire de l'église de Cast, celui-ci est défiguré par les serpentins, moires et les efflorescences des lichens blanchâtres.
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Chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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LA FACE OCCIDENTALE. MARIE-MADELEINE ET JEAN ; LE CHRIST AUX LIENS.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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Marie-Madeleine.
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La statue est géminée avec celle de la Vierge.
La sainte tient le flacon d'aromates de la main droite et soutient le pan droit de son manteau de la main gauche.
Son visage, aux traits délicatement sculptés, est d'une beauté remarquable. Le front est dégagé, le regard volontaire, le nez droit, la bouche esquissant une moue.
L'un des critères stylistiques repose sur les mèches de cheveux, qui descendent devant les épaules en volutes successives : une manière qui ne se retrouve pas sur les productions des divers ateliers de Basse-Bretagne, sous réserve d'un inventaire plus complet que celui que j'ai mené. Aucun bandeau, aucun voile n'est visible.
Le manteau est retenu au dessus de la poitrine par une sangle de tissu. La robe à l'encolure ras du cou est ajustée au niveau du buste, et plissée sous la ceinture.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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Saint Jean.
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Y.-P. Castel ne précise pas son identité et dit : "un apôtre". C'est en effet un apôtre car il a les pieds nus et qu'il tient un livre. Mais le seul apôtre qui soit imberbe est Jean.
Les réticences à lever son anonymat vient du fait qu'il est géminé ... avec lui-même. Mais c'est également le cas à l'église de Cast, sous le ciseau de Roland Doré.
L'évangéliste le dispute en beauté et en caractère avec Marie-Madeleine. Sa prestance vient sans doute de sa façon d'incliner la tête à gauche en levant le menton.
Sous le menton, la tunique plissée, serrée par une ceinture, montre ce petit détail d'une fente brève à l'encolure. Mais ce n'est pas celle, à deux languettes et deux boutons, du Maître de Plougastel, ni celle en huit à deux ou trois boutons des Prigent.
Les cheveux ont tout autant bénéficié du fer à lisser que celle de la Madeleine ; les bouclettes du front semblent ruisseler en cascade.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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Le Christ aux liens.
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La combinaison du Christ aux liens d'un coté, invitant le fidèle à la compassion pour le Christ souffrant, et de la Vierge de Pitié de l'autre face, est très courante dans les calvaires bretons.
Le Christ est assis, vêtu du manteau qui se moque de sa royauté, couronné d'épines, et les mains liées. La bouche entrouverte témoigne de ce qu'il endure.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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LA FACE ORIENTALE. LE CHRIST CRUCIFIÉ ENTRE LA VIERGE ET JEAN ; LA PIETA.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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Le Christ en croix.
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Il a, je l'ai dit, les caractères des crucifiés de l'atelier Prigent.
Au dessus de lui, un ange dont la tête s'encadre dans le coude de ses ailes, tient le titulus ; son sourire est charmant.
Les quatre lettres INRI sont d'une élégance rare : le fût des I sont perlés et les courbes du R sont parfaites;
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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La Vierge.
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Elle est voilée et porte la guimpe, comme toujours C'est peut-être la statue plus banale, bien que la courbe du manteau, qui descend d'un seul pan à droite et fait retour sous le poignet droit, est très graphique.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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Je tente de vérifier que l'artiste n'a pas sculpté des larmes sous sa paupière.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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Saint Jean.
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La main sur la poitrine, le livre tenu par la main gauche qui retient aussi le pan du manteau, la robe et sa fente en ampoule à l'encolure, c'est, presque, le sosie du saint Jean auquel il est adossé. Pourtant, le sculpteur a commis sept erreurs en copiant son modèle ; la plus évidente est que le manteau recouvre complètement l'épaule droite. Mais l'allure générale est celle d'un homme inquiet et souffrant ; notamment car le regard est dirigé vers la gauche.
La chevelure est toujours wavy et s'aère dans son tiers inférieur.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
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La Pietà.
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Les Vierges de Pitié en kersanton sont nombreuses, avec des attitudes variées pour le personnage du Christ.
Ici, le Christ est assis, très bas, le dos très cambré appuyé sur le genou et la jambe de sa Mère, avec les jambes tendues et horizontales. Les pieds sont croisés.
Le bras droit descend vers le pied chaussé de Marie, mais il n'est pas, comme ailleurs, tendu, mais au contraire fléchi au coude.
Le bras gauche, le long du corps, est soutenu par la Vierge. Celle-ci se penche vers son Fils.
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Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
Calvaire de la chapelle Notre-Dame de Bonne-Nouvelle à Quillidoaré, Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020 .
— CASTEL (Yves-Pascal), 2001, Les Pietà du Finistère. numéro 69 de la revue Minihy-Levenez de juillet-août 2001. L'auteur y étudie une centaine de Pietà et de Déplorations.
J'ai tenté de montrer que le grand calvaire de Plougastel, réalisé 4 ans après la fin d'une épidémie de peste de 1598, mais aussi d'une situation de guerre (la Ligue) et de pénurie, a été une salutaire aventure de refondation des identités individuelles et collectives. La première partie présentait le soubassement, avec ses frises de personnages hiératiques aux visages défaits, comme une image de l'expérience traumatique. La deuxième partie décrivait une plate-forme aux personnages hauts en couleur, multipliant les marques identitaires par leur costume, leur postures expressives et théâtrales, comme la réponse résiliente des habitants, habilement traduite par le même sculpteur qui avait changé de style.
Néanmoins, sur le visage de trois saints personnages, Véronique, Jean et Marie, le sculpteur anonyme, dénommé "Maître de Plougastel" au XXe siècle, avait repris la marque de fabrique de l'atelier Prigent de Landerneau (1527-1577): trois larmes en stalactite sous chaque œil.
La troisième partie décrira les trois croix du Calvaire : les deux croix simples des deux larrons, et la croix à deux croisillons du Crucifié. J'y rechercherai quelle est la part d'originalité et d'innovation du Maître, et quelle est la part de fidélité à l'atelier des Prigent.
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Les calvaires à deux croisillons.
Nous pouvons d'emblée remarquer que le schéma du Christ entouré, sur le croisillon supérieur, de deux cavaliers, et sur le croisillon inférieur, des statues géminées de Jean et Marie, avec la Pietà au centre, se retrouve en Finistère sur de nombreux calvaires antérieurs à deux croisillons. Par exemple à Pencran en 1521(?), Lopérec en 1542-1552, Plomodiern en 1544, Saint-Ségal vers 1550, et sur les deux calvaires monumentaux de Plougonven en 1554 et Pleyben en 1555. Chacun de ces monuments est soit clairement attribué aux Prigent, ou comportent leurs marques stylistiques, comme les fameuses trois larmes (culte des larmes) ou à Lopérec notamment les anges aux calices culte du Précieux Sang).
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Pencran nord, (1521 par inscription). Trois fûts. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. Deux cavaliers, Madeleine/ Yves, Jean/Pierre. Pietà, Vierge à l'Enfant . Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix.
Plomodiern, chapelle Sainte-Marie-du-Ménez-Hom (1544, Prigent). Jean/Pierre et Madeleine/Yves. Pietà, Christ aux liens, Vierge à l'Enfant. Ange aux calices. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. Trois larmes.
Lopérec (1552) par l'atelier des Prigent. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. Trois fûts . Deux cavaliers, Christ aux liens, Jean ?/Marie-Madeleine / et Vierge/Pierre, Christ ressuscité. Les trois larmes.
Plougonven, (1554), Henri et Bastien Prigent. Calvaire monumental. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. les larrons sur des croix séparées (mais depuis le XIXe), saint Yves, Vierge et Jean non géminés.
Pleyben (1555) par Henri et Bastien Prigent. Calvaire monumental. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. Vierge et Jean non géminés.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Une remarque s'impose. La composition de cette partie du grand calvaire est strictement la même que le calvaire de Lopérec, à un détail près. Mêmes statues Vierge/Pierre et Jean-Madeleine, même Pietà et même Christ aux liens, même couple de cavalier, mêmes anges au calice au pied. Mais les deux anges voletant pour recueillir, à Lopérec, le sang des plaies des mains sont absents ici. Or, ceux-ci sont attestés à Plougastel, car on voit autour du pagne du Christ les deux consoles qui les portaient.
Autre différence : à Lopérec (et à Pencran, aux chapelles de Ste-Marie du Ménez-Hom et de St-Sébastien), sainte Marie-Madeleine est agenouillée au pied de la Croix. Or, Flaubert décrit lors de sa visite à Plougastel en 1847, au pied de la Croix, "La Madeleine en pleurs [qui] répand sa belle chevelure tressée".
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Le calvaire de Lopérec est daté de 1542 ou 1552 (avec un doute sur la lecture du chronogramme). Il est attribué à un certain Fayet par Y.-P. Castel, et ce "Fayet" serait un compagnon des Prigent de Landerneau, tant les styles sont proches ou identiques.
Nous ne pouvons pas assimiler le Maître de Plougastel avec ce "Fayet", mais je peux souligner la filiation entre les œuvres. Comme je ne peux dresser un parallélisme photo après photo avec ce calvaire, je renvoie à mon article :
Le coté principal , tourné vers l'ouest, montre la Vierge à droite et Marie-Madeleine à gauche et la Pietà au centre.
Les statues latérales sont géminées, portant un second personnage au dos : nous avons les couples Marie/Pierre et Marie-Madeleine/Jean.
La disposition actuelle relève d'une erreur au remontage car nous devrions trouver face à l'ouest, entourant le Crucifié et donc au pied de la croix Marie à gauche et Jean à droite. La statue Jean/Marie-Madeleine a subi une rotation de 180°. Le chanoine Abgrall, en 1904, a observé la disposition correcte, avec la Pietà entre la Vierge et Jean.
Je n'ai photographié que la face occidentale.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La Vierge.
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Bizarrement, E. Le Seac'h décrit celle-ci sous le nom de Marie-Cléophas
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Marie-Madeleine.
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Elle tient le flacon d'aromates de l'embaumement (Luc 24:1 "elles se rendirent au sépulcre de grand matin, portant les aromates qu'elles avaient préparées") .
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Le très habituel bandeau occipital de la sainte se transforme en un linge qui enrubanne les cheveux en deux nattes. C'était déjà le cas dans la Mise au Tombeau de la plate-forme. Mais Marie-Madeleine ne porte plus le voile à pans cassés.
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Mise au Tombeau, calvaire de Plougastel. Photo lavieb-aile.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La Pietà.
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La Vierge porte le corps de son Fils sur son genou droit fléchi et sur son genou gauche abaissé, si bien que le corps est presque couché horizontalement. Les pieds sont croisés. La Vierge ne soutient pas la tête de la main droite, ou le bras de la main gauche, comme ailleurs, mais elle prie, mains croisées.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Ma photo ne permet pas de dire qu des larmes sont présentes, mais pas non de l'exclure. Il faudrait revenir.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LE CROISILLON SUPÉRIEUR. LES DEUX CAVALIERS.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Longin le lancier guéri de son trouble de la vue.
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Il tient dans la main droite la poignée de la lance (en bois, brisée) et place l'extrémité de l'index sous la paupière gauche. Le sang qui a jailli de la plaie qu'il a causé au flanc droit du Christ a atteint son œil et instantanément, il a été guéri d'un trouble visuel.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Comparez avec le même cavalier à Lopérec (cliquez si besoin). La différence principale provient de la profusion des lichens à Lopérec. Le harnachement du cheval, la coiffure du cavalier (un bonnet conique entouré d'un turban) sont identiques.
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Calvaire (kersantite, 1552, Prigent) de l'église de Lopérec. Photographie lavieb-aile 2020.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Le Bon centenier convaincu que le Crucifié est le Fils de Dieu.
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Il ne serait pas d'origine, et pourrait être (Le Seac'h) dû à Millet après 1944.
Son homologue était présent sur la plate-forme, en tête du portement de Croix.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LE CHRIST EN CROIX.
Notez les "bosses" du fût, rapprochés des bosses de la peste.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Les quatre anges.
Deux anges joignent les mains à l'extrémité du bras de la croix. Deux anges tiennent en commun un calice qui recueille le sang s'écoulant des pieds du Christ. Les deux mêmes anges sont présents sur le calvaire de Lopérec.
Les consoles vides près du pagne accueillaient les deux autres anges au calice.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LE BON LARRON. UN ANGE CONDUIT SON ÂME AU CIEL.
Ses jambes sont fléchies en grenouille car, selon les évangiles, on leur brisa les jambes des larrons pour précipiter leur mort en les privant de cet appui qui, seul, leur permettait de respirer.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LE MAUVAIS LARRON. LE DIABLE S'EMPARE DE SON ÂME.
Il grimace et tire la langue, et détourne son regard du Christ. Tout faux.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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SOURCES ET LIENS.
— ABGRALL (Jean-Marie), 1904, "Le calvaire de Plougastel-Daoulas", Bulletin de la Société archéologique du Finistère t. XXXI p. 182-189
— CASTEL (Yves-Pascal), 2005 (trad. Lorañs Stefan, Job an Irien, photogr. Jean Feutren), « Guide des sept grands calvaires bretons / Ar seizh kalvar braz », Minihi-Levenez, août 2005, p. 0-106 (ISSN 1148-8824)
— CASTEL (Yves-Pascal), articles du Progrès de Cornouaille / Courrier du Léon
“0484 Plougastel-Daoulas, le Calvaire au péril de son grand âge... 0485 Pedenn An Deiz... 14.01.89.,” Collections numérisées – Diocèse de Quimper et Léon, consulté le 8 avril 2020, https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/items/show/1972
-CASTEL 1336 Auscultation des Calvaires à Plougastel et Guimiliau par la CGG... 18.10.97.
— COUFFON (René), 1988, Couffon, Répertoire des églises : paroisse de PLOUGASTEL-DAOULAS, notice extraite de : Diocèse de Quimper et Léon, nouveau répertoire des églises et chapelles, par René Couffon, Alfred Le Bars, Quimper, Association diocésaine, 1988.
— PÉRENNÈS Henri, “Plougastel-Daoulas,” Collections numérisées – Diocèse de Quimper et Léon, consulté le 6 avril 2020, https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/items/show/9785.
Sortir d'une épidémie de peste (1598) et sortir d'une guerre (1598 ET 1944) : le calvaire monumental (microdiorite de Logonna et kersantite, Maître de Plougastel, 1602-1604) de Plougastel-Daoulas. Deuxième partie : la plate-forme.
Les habitants de Plougastel ont édifié en 1602-1604 un grand calvaire pour commémorer la fin d'une épidémie de peste en 1598, et la fin des guerres de la Ligue. Autour d'une niche obscure contenant saints Sébastien et Roch, recours réputé contre les épidémies, le sculpteur a placé en soubassement diverses scènes de la Vie de Jésus, dans un style non seulement hiératique (digne, stricte et dépouillé) mais aussi désincarné, comme s'il témoignait de la perte des repères identitaires et temporels propre aux traumatismes.
Va-t-il, sur la plate-forme à quatre faces, témoigner de la ré-animation d'une collectivité éprouvée et sortir de sa réserve ? Les habitants ont tenu à inscrire les noms de leurs représentants (les "fabriques") ; vont-ils y jouer leur rôle?
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LA FACE EST DE LA PLATE-FORME (SUITE).
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— La Comparution devant Anne.
Puisque la Comparution devant un grand prêtre, disons Caïphe, a déjà été présentée, les auteurs considèrent que cette deuxième scène correspond à la comparution devant Anne, autre grand prêtre et beau-père de Caïphe. C'est, en réalité, dans les évangiles, la première comparution : voir Jean 18:13. C'est là que se place le reniement de Pierre. Anne renverra Jésus devant Caïphe, le "souverain sacrificateur cette année là". Peu importe en fait.
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Le Christ, mains liées derrière le dos, est présenté par un garde à Caïphe, qui, raide comme la Justice, reste de marbre. Ou de kersantite. Nous sommes encore dans la veine "hiératique" du sculpteur.
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Mais ce qui est intéressant, c'est de voir le soldat qui derrière, nous fait un coucou avec sa main libre (en réalité, il s'apprête à donner un soufflet au Christ). Ce grand dadais nous regarde, il est présent et vivant. Derrière lui, les deux autres gardes discutent. Les tenues vestimentaires s'individualisent puisque l'un porte une tenue de soldat romain composée d'un casque, et d'une armure légère à lames. Il tient l'extrémité de la corde qui ceinture le prisonnier. Son visage grimaçant sort de la stéréotypie avec ces rides frontales et naso-labiales.
Son interlocuteur est un officier (épée au coté), Juif (chapeau conique), aux gestes animés.
Oui, nous sommes sortis du silence blanc du soubassement.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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C'est à ce moment que je commence à imaginer les Plougastelois qui sont montés sur les planches. Je les entends, le film muet devient parlant. Ils ont en tête le texte de leur Passion en breton :
An Test: Goude e quempret ez voe dereet affet da quentaff digracc diffaeczon da annas felon da questionaff ouz e blasfemaff hac ouz e canaff cals a gouzafus palamour hep quen da caret map den louen en prenas. Pan oa oar he stat questionet mat esz deuz vn flater goude bout graet salu ha gant quil palu a scoaz hon saluer oar h guen tener precius ha guer hac en eurhas goude a deury ez stlegat gant cry da ty cayphas.
Je vous le traduis, mais il fallait d'abord entendre l'accent, et les rimes en -et, en -aff , et le rythme des vers.
"—Le Récitant : Après son arrestation, il fut mené en tout premier lieu, sana ménagement, avec brutalité, chez le cruel Anne afin d'être interrogé. Des injures qu'on lui fit, et des coups qu'il reçut, il souffrit beaucoup, seulement à cause de son amour pour l'humanité ; il la racheta pleinement.
Tandis qu'on l'interrogeait en détail sur sa condition, vint un faux-témoin qu'il avait guéri et qui frappa Notre-Seigneur du revers de la main sur sa tendre joue précieuse et chérie et il l'insulta. Ensuite, rudement, il fut traîné sous les huées chez Caïphe." (Le Berre 2011 p.186)
C'est tout autre chose maintenant que l'ambiance devient celle d'un match de catch, que nous entendons les hou ! hou !, que nous savons que le grand dadais est un ingrat, un faux-témoin (breton flater "mensonge") qui avait été guéri par Jésus.
Et c'est tout autre chose lorsque nous apprenons que le garde qui présente Jésus à Caïphe se dénomme Dragon (ça veut tout dire) et que nous l'entendons dire (chacun reconnaît la voix de Jo Kervella, le marchand de poisson qui joue ce rôle) :
—Dragon : "Monseigneur Anne, comme vous le voyez, le grand charlatan [dans le public : hou, hou !] vient comparaître devant vous. Examinez son cas sur-le-champ."
[Anne l'interroge.]
— Jésus : Je n'ai en vérité rien prêché secrètement à personne. Au contraire, c'est tout à fait publiquement qu'à la synagogue et dans votre ville j'ai toujours pris la parole, incontestablement chacun le sait en cette cité"
Et l'officier Juif qui se tient à gauche, nous comprenons que c'est Malchus, le serviteur du grand prêtre, et le voilà qui donne sa réplique (c'est Vigouroux, le bedeau) :
"—Malchus : Dis-donc, imposteur, c'est comme ça que tu réponds au pontife ? Attends un peu ! Pour ta sotte réponse tu vas avoir droit illico à une gifle." Vlan ! Paf !
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Changement de plateau :
LA FACE NORD DE LA PLATE-FORME.
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La Flagellation et le Couronnement d'épines. 15 personnages.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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La Flagellation.
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À gauche (car ça commence à gauche), Jakez, le fils à Dédé Le Gall, qu'on surnomme Lost Krank (queue de crabe) est monté sur scène avec son père. Ils font les bourreaux, Dantart an tirant et son compère Bruyant.
Jakez a repéré sa belle amie Marig an Ajou et lui dit un p'tit bonjour avec son faisceau de genêt. "Tiens ton rôle" bougonne le papa, ça va être à toi."
—Bruyant : Stagomp ennhaf dezrouomp de fustaf affo. (Mettons-nous y, commençons à les fouetter !)
— Dantart : Gant ma scourgez en deuezo Dalet a me sco a tro mat! (Il va tâter de mon fouet, Tenez ! L'ai-je-bien administré ?)
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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À droite, le bourreau porte le turban retenant un mouchoir qui couvre la nuque : c'est le dress-code des artistes pour le désigner comme Juif. Mais sa tunique et ses chausses à taillades sont celles des soldats du XVIe siècle.
À gauche, la tenue est celle des seigneurs Renaissance, avec le bonnet à bords relevés, les cheveux bouclés, la tunique et les chausses plissées.
Il y a donc apparition sous le burin du sculpteur des vêtements des habitants de Plougastel : ils peuvent s'y reconnaître, ou même, se voir représentés jouant le Mystère de la Passion, adoptant quelques accessoires orientalistes (turban) pour mieux jouer leur rôle. Ils ne sont pas venus comme ça, ils se sont mis beaux, mais dans les armoires, ils n'ont trouvé que les habits d'avant la guerre. Un peu démodés mais beaux.
Le meunier Alain Le Goff, qui est musclé, a fait le Jésus.
Et puis, à droite, on a toujours celui qui se penche pour être sur la photo.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Ensuite, ils jouent le Couronnement d'épines.
Mais c'est cette fois Guillaume Calvez (qui n'a pas encore de poil au menton), le vieux Jacques Lagathu et Jean Thomas, le cordonnier moustachu, qui feront les bourreaux.
— Bruyant : Ne croyez-vous pas qu'il lui faut une belle robe, afin qu'il soit vêtu de pourpre ?
— Dantart : C'est tout à fait certain ! La voici ; elle ne vaut plus rien !
— Dragon : Donnons-lui aussi un sceptre ; ce roseau, par exemple !
Et le petit Xavier Le Du, qui n'est pas bien beau, s'agenouille en lui tirant la langue : "Dieu vous sauve, Aliboron, assurément roi des Juifs!"
— Dantart "Mettons-lui donc sur la tête une couronne fait avec une ronce qu'on tresserait, bien serrée tout autour."
— Gadifer : "Voilà une grande couronne d'épines, placez là en force sur son crâne, qu'elle perce carrément les os sans ménagements ; ça lui fera passer son rhume" (hac a toullo fresq e esquern Hep espern maz disifferno.)
— Dragon : "Faisons tous cercle autour de lui ; nous allons maintenant le couronner, et lui rendre l'hommage dû à son rang.
— Bruyant : "Tenez ! cette couronne est rude et acérée, et elle sied à votre visage ; Je suis sûr qu'elle va maintenant vous transpercer.
— Dantart : "Appuie avec ce bâton. Voilà comme ça ! On va lui écraser le crâne." (Trad. Y. Le Berre)
Et ainsi de suite, une réplique entraînant la suivante, dans le grand plaisir d'épater la galerie en improvisant sa répartie. Ah, ils se donnent du plaisir. Pensez ! Depuis le temps !
Sous l'épais manteau rouge du Christ, Hervé Le Moal proteste de temps en temps : doucement quand même !
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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À coté d'eux, un garçon s'est approché avec une cruche et une cuvette.
"Qu'est-ce que tu fais là, petit ! Tu joue dans la Comparution devant Pilate, le studio à coté !"
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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La Comparution devant Pilate.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Au dessus du contrefort : Christ aux outrages.
La scène trouve naturellement place en surélévation de la plate-forme. Jésus, assis, les yeux bandés, les bras liés, toujours revêtu du manteau de pourpre, reçoit les moqueries et les gifles des gardes et des bourreaux.
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Je coupe la bande-son, qui n'est pas pour vos chastes oreilles.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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LA FACE OUEST DE LA PLATE-FORME.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Le Diable tenant des pains. La Tentation au Désert.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Nouvelle Comparution.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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La Sortie du Tombeau.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Jésus face aux Docteurs de la Loi.
Finalement, le réalisateur de ce Mystère est d'avant-garde, car il a découvert la technique de flashback, et il nous fait revivre une scène qui, dans une technique narrative linéaire complètement dépassée aujourd'hui, viendrait après la Circoncision. Dans l'évangile de Luc, c'est le chapitre 2.
Jésus, âgé de 12 ans, tient la dragée haute aux Docteurs de la Loi du Temple de Jérusalem. Il porte cette tunique à deux boutons que nous avons vu sur (presque) tous les protagonistes du soubassement, mais par contre l'un des docteurs est bien en phase avec les nouvelles règles qui régissent la plate-forme : des habits contemporains, plaisants, le temps confiné c'est fini ! Il porte le bonnet carré des docteurs du XVIe siècle en France (et non le bonnet conique hébraïque), et son manteau est impeccablement coupé, tout comme sa barbe. La scène se passe aujourd'hui !
Du coup, nous retrouvons ici des éléments de l'iconographie de saint Yves patron des avocats, comme le rouleau de papier dans la main et, surtout, le geste d'énonciation et d'argumentation, index sur le pouce (contact pulpo-pulpaire pollici-digital, quoi!).
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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La Descente du Christ aux Limbes.
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Entre le Vendredi Saint et le jour de Pâques, le Christ descend aux Limbes où sont enfermés les âmes de tous les morts d'avant sa Résurrection, et il les libère. Traditionnellement, il ouvre une porte ou la gueule d'un Leviathan, et tend la main à Adam et Ève qui sont les premiers à y être entrés.
Ici, portant le manteau rouge et l'étendard de sa victoire sur le Mort, il accompagne deux personnages de petite taille. Dont sans doute Adam. Mais où est passée Ève ?
Dans la scène voisine, le Léviathan, ou la bouche des Enfers, attisée par des diablotins, ouvre une large gueule et, sous les cris horrifiés d'un démon, laisse échapper ses proies.
Parmi celles-ci, une femme, qu'un autre démon tente de retenir. Ce serait, pour moi, Ève.
Mais les guides aiment raconter qu'il s'agit de Katell Gollet, une servante pervertie qui avait cachée ses péchés en confession : le diable la retient ici aux Enfers. Ce qui est bien plus séduisant, mais impossible, puisque la confession n'existait pas avant Jésus-Christ...
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Voir sur ce thème des Limbes, et l'illustration des démons attisant le feu tandis que les âmes sortent:
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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LA FACE SUD DE LA PLATE-FORME.
Quatorze personnages... et un cheval.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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C'est Marie-Jo Le Gall qui joue an Veronic. Elle prend une voix triste mais elle est toute contente de jouer ce rôle, d'autant qu'elle a peint elle-même le visage sur un drap brodé ; et c'est celui de son père, qui est mort de la peste il y a 4 ans; il avait quoi ? Même pas quarante-cinq.
— La Véronique
"Hélas ! c'est bien Jésus que je vois Passant par cette rue ; On le conduit au terrible supplice (dan maru garu du : "à la rude mort noire"). L'angoisse le fait transpirer ; Je vais aller tout de suite essuyer . Délicatement et affectueusement, si je puis arriver jusqu'à lui."
Marie-Jo respire un grand coup, lève le linge qui se déroule, et lève les yeux aux Cieux comme une vraie tragédienne.
E facc diuin ha luminer
Dam maestr crist mab doe ma croer
Seder gant an couricher man.
Ach iesu glan croet an bet
Seul a anquen hac a penet
A gouzafuer oar an bet man.
"La face divine et rayonnante, De mon maître, le Christ, le fils de Dieu, mon créateur, Avec ce linge, respectueusement, Ô Jésus saint, créateur de l'univers,Que de peines et de tourments Vous aurez subis ici-bas !"
C'est beau ! Dans le public, son amie Marité Merdy essuie ses larmes dans son tablier.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Juste après elle, ceux qui jouent Jean et Marie font leur entrée. Jean soutient la Vierge. Ils gardent les yeux baissés.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Sur cette photo, je vois clairement trois larmes couler des yeux des trois personnages. Or, le sculpteur, notre Maître de Plougastel, n'a pu apprendre cela que chez Bastien Prigent, dont c'est l'une des caractéristiques stylistiques majeures. C'est pour moi la preuve qu'avant d'être Maître, il a été apprenti à Landerneau chez les Prigent.
Nous retrouverons ces larmes ailleurs.
Un autre caractéristique des Prigent, c'est le voile "en coque", dont la toile raide fait des plis en pince. Comme ici.
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Le Portement de Croix.
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Tous les jeunes voulaient y participer. On a pris les plus beaux (pour leurs moustaches) et les riches ( pour leur garde-robe aux chausses à crevés comme à Quimper). Ils ont conservé leurs chapeaux ronds.
Deux veneurs encadrent la procession, avec leur épieu et leur trompe : un à l'avant, l'autre à l'arrière.
Un costaud a été requis pour aider discrètement le Christ à porter la croix ; c'est Jehan Guergoz, dit Monot : le forgeron. Car il faut de la force pour soulever la croix toute en chêne. Il porte un costume de centurion romain. Et celui qui fait le Simon de Cyrène, c'est Guillaume Calvé, de Sainte-Christine, le fossoyeur. Qui a eu beaucoup de travail avec cette épidémie.
Broustail, le maître-maçon, est en train de faire l'andouille en prenant la pose, armé de son fouet, avec ses camarades, devant le public qui l'acclame. Sa réplique "au naturel", qui lui vaut ce succès, explique la position de sa jambe :
—Dalet a treux an quil bilen
Da crisquif certen hoz penet
Querzet .
"Prends ça dans les cul, maraud, ça te fera encore plus mal ! Avance !" (trad. Y. Le Berre)
Et son collègue surenchérit :
— Sus sus hastet na fellet tro. "Allez, allez, dépêche-toi, ne traîne pas !"
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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En tête, le cortège est mené à la baguette par un tambour (c'est bien-sûr le garde-champêtre) et par un cavalier. Ce dernier, coiffé du bonnet conique et drapé d'un manteau d'officier, est peut-être un réemploi du Centenier, car il lève la tête vers le sommet de la croix et tend le doigt comme celui qui s'écrie "Cet homme était vraiment le Fils de Dieu".
Observez la minutie des détails vestimentaires. C'en est bien fini de la grise uniformité de la frise du soubassement et de la dissolution identitaire qu'elle signifiait. Chaque costume est différent, et haut en couleurs. Ici les crevés, là les rangées de boutons, là les chapeaux ronds et là les bonnets plats ou les casques.
La vie est revenue !
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Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
Calvaire monumental (kersantite, 1602-1604, Maître de Plougastel), Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Conclusion.
Qu'en pensez-vous ? N'assistons-nous pas, sur la plate-forme, à un spectacle qui a perdu, dans un joyeux désordre narratif, toute sévérité sacrée, et dont les acteurs, loin de s'absorber dans le chagrin de la Passion, se préoccupent plutôt de se montrer au public dans une pose avantageuse ?
Ne dirait-on pas que le sculpteur a abandonné son registre de lugubres fantômes assoupis (plutôt commémoratif de l'épidémie) pour prendre comme modèle chacune des personnalités d'un village soucieux de retrouver sa fierté, son "orgueil" breton ?
Et peut-on placer sous le signe du baroque, de la théâtralisation spéculaire des existences, cette érection d'un monument qui reste encore aujourd'hui l'emblème d'une "résilience" effrontée après une série de catastrophes déstructurantes ?
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SOURCES ET LIENS.
Cf article Ier.
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—LE BERRE (Yves), 2011, La Passion et la Résurrection bretonnes de 1530, texte établis et traduits du breton par Yves le Berre d'après l'édition d'Eozen Quillivéré. centre de Recherche Bretonne et Celtique Brest.
Sortir d'une épidémie de peste (1598) et sortir d'une guerre (1598 ET 1944) : le calvaire monumental (microdiorite de Logonna et kersantite, Maître de Plougastel, 1602-1604) de Plougastel-Daoulas .
En 1598, la population de Plougastel-Daoulas décida la construction d'un calvaire, probablement (ou selon la tradition) pour honorer un vœu si le fléau de la peste s'achevait.
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Le rôle de la peste. rumeur ou vérité ?
On peut en effet attribuer ce monument à la Peste, car dans la niche principale de son soubassement se voient les statues de saint Sébastien et de saint Roch, dont la peste est la spécialité, à coté de saint Pierre, patron de la paroisse. La chapelle Saint-Sébastien en Saint-Ségal a été bâtie dans la seconde moitié du XVIe siècle pour conjurer la peste. Saint Sébastien, tout comme saint Roch, sont invoqués contre les épidémies meurtrières regroupées sous le nom de "peste". On pense que la chapelle "Saint-Côme et Saint-Damien" de Saint-Nic fut aussi construite au début du XVIe siècle pour la même raison. À Plougasnou, la croix de Kergreis dite aussi "croix de la peste noire", est datée de 1598 ; elle a également été réalisée par le "Maître de Plougastel".
Un autre argument, discuté, est la présence de bosses sur le fût de la croix : ces croas ar bossen, comme celle de Kerzivez Huella à Plougastel témoigneraient des bubons de peste.
Surtout, Charles Le Goffic avance deux preuves.
La première, c'est la mention de cette peste de 1598 par le chanoine Moreau, auteur de référence sur les Guerres de la Ligue : « Après ce troisième fléau (la guerre, la famine, les loups), dit-il, s’ensuivit la peste, qui était le quatrième, qui fut l’année 1598, un an après la paix, qui commença par les plus pauvres, mais enfin elle attaqua, sans exception de personnes, aussi bien aux riches qu’aux pauvres et en moururent les plus huppés…, et ce en punition des péchés des hommes qui y étaient si débordés que l’on n’y savait plus prier Dieu que par manière d’acquit.[Histoire de ce qui s’est passé en Bretagne durant les guerres de la Ligue, ch. xliii. p. 340] Mais Le Goffic ne précise pas que Moreau parle ici de la ville de Quimper.
La seconde, c'est l'existence, sur une dalle funéraire de schiste du manoir de Kerérault, aujourd'hui bien connu à Plougastel pour abriter le Rocher de l'Impératrice et son site archéologique unique) portant l'inscription : CY GIST LE FEU SIEUR DE KERERAULT MORT DE LA PESTE LE DIMANCHE 27 SEPTEMBRE 1598. Le Goffic a vu cette dalle, même si il n'y a lu correctement que le mot PESTE. La dalle existe-t-elle toujours ? Parfaitement. Elle est signalée dans la chapelle (1780) du manoir de Kerérault et l'abbé Castel en a donné un relevé graphique et descriptif très précis et une analyse critique de l'inscription
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Castel, relevé de la pierre tombale (schiste, 1598) de Henri III de Kérérault, mort de la peste..
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Six autres calvaires monumentaux.
L'édification du calvaire a été entreprise de 1602 à 1604 selon un plan octogonal prolongé par des ailes, aménageant un escalier permettant aux prédicateurs d'accéder à la plateforme. Ce n'est pas, tant s'en faut, le premier "calvaire monumental" à "mace" associant aux calvaires à un ou deux croisillons les multiples personnages des scènes de la Passion, puisqu'il est précédé par celui — en granite— de Tronoën en 1450-1470, par celui de de Plougonven en 1554 par Bastien et Henri Prigent, par celui de Pleyben en 1555 par le même atelier, de Guimiliau en 1581-1588. Il sera suivi par celui de Saint-Thégonnec en 1610.
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Un atelier de Landerneau spécialisé dans la taille du kersanton.
Emmanuelle Le Seac'h a établi le catalogue raisonné d'un sculpteur anonyme qu'elle a nommé le "Maître de Plougastel". Ce catalogue est mis en ligne avec des photographies sur le site en.wikipedia
Elle divise la carrière de ce sculpteur en trois parties : 1) période de jeunesse de 1570 (porte d'entrée du porche de Bodilis) à 1588 (Croix de Kerangroas de Plougasnou et calvaire de Guimaec), 2) maturité jusqu'en 1602 (calvaire de Plougastel), puis 3) maîtrise avec l'arc d'entrée de Guimiliau (1606-1617). Voir plus de détails dans l'article sur Saint-Tugen.
Je suis tenté de voir dans ce Maître un élève de l'atelier, également de Landerneau, celui de Bastien et Henry Prigent, actif de 1527 à 1577.
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Style du Maître.
E. Le Seac'h le caractérise d'un mot : le hiératisme.
" Dans la plupart des cas, les personnages [du calvaire de Plougastel] respectent une frontalité rigoureuse. Une impression d'ordre et de rigueur se dégage de leurs attitudes. Ici, l'exubérance n'est pas de mise et les personnages défilent en scènes bien structurées. Le Maître de Plougastel, qui n'a pas souhaité exploiter la veine caricaturale de Guimiliau, n'a pas non plus basculé dans la candeur ou l'innocence. On est loin également du réalisme empreint de tristesse [cf. les trois larmes propres aux Prigent] des Prigent. Ici, tout est homogène et précis."
Pourtant, je pense que cet adjectif ne s'applique que pour une partie, certes conséquente, du calvaire.
Je peux décrire à ce monument quatre parties :
1. Au centre de la partie occidentale du soubassement, désigné par le terme de "mace"), une niche en demi-cintre avec les trois saints Pierre, Sébastien et Roch. Cela forme un petit sanctuaire : l'invocation ou l'expression de la gratitude des fidèles.
2. Un registre du soubassement, où les statues (ronde-bosse) occupent une bande aménagée sur fond des blocs jaune de pierre de Logonna. Ce registre est scandé aux angles par les quatre évangélistes. Les personnages sont regroupés par trois ou quatre pour illustrer la Vie de Jésus avant sa Passion ( Adoration des Rois, la Cène, le Lavement des pieds) puis le début de celle-ci : Comparution, Nuit à Gethsémani, Arrestation, .... Le hiératisme y règne.
3. Le registre supérieur, implanté sur la plateforme, où sont montrés les moments les plus tragiques de la Passion : Flagellation, Couronnement, Ecce Homo, Comparution, ainsi que la Descente aux Limbes et la Résurrection. Le changement est grand : les personnages sont sculptés pour la plupart de façon individuelle, ils s'animent de gestes expressifs. Ce que je vois alors, c'est l'immobilité de postures théâtrales, comme si les habitants, participant à jouer devant leur parvis le Mystère de la Passion, avaient posé, non sans humour et complicité, pour un photographe. Un caractère, très baroque, de distanciation et de théâtralisation que je n'éprouve pas devant d'autres calvaires monumentaux.
4. Le calvaire proprement dit, où le Christ crucifié entre les deux larrons est entouré des deux cavaliers (Longin et le Centenier), de Jean, de Marie et Marie-Madeleine. Le hiératisme s'impose à nouveau, en phase avec la gravité du moment.
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Cet ensemble, dont l'orientation principale se fait vers l'ouest, est centré de haut en bas par la Croix et l'inscription de son fût, par le Christ ressuscité / par l'inscription de son socle et l'inscription tout le long du bord supérieur du soubassement / la statue de Sébastien.
Ces trois inscriptions ne portent aucune oraison, aucun texte liturgique, mais exclusivement les noms des Plougastelois (fabriciens et recteur).
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Conclusion.
Après avoir connu l'épidémie, sa peur, ses décès, ses recherches de protection, les paroissiens qui ont survécu, et qui accèdent à la reprise de la Vie utilisent les figures du Martyre (Sébastien), de la Maladie (Roch), de la Mort et de la Résurrection du Christ pour sublimer en Récit, non dépourvue d'espérance chrétienne et de Foi bien-entendu, leur épreuve.
Toute épidémie est déstructurante pour le collectif, car elle rompt le ciment relationnel d'inter-dépendance ; et elle conteste la validité des Fictions qui l'anime vers l'avenir, lors d' un temps d'attente bloqué sur le Présent.
Toute épidémie est déstructurante pour l'individu, en lui faisant perdre sa construction identitaire.
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Je pose l'hypothèse que leur décision de se cotiser pour élever un monument grandiose est parfaitement judicieuse pour célébrer la Sortie d'épidémie, et qu'il est fructueux d'en comprendre les mécanismes pour passer d'une attitude d'inspection et d'émotion esthétique à une participation cathartique des mécanismes en jeu devant tout Traumatisme collectif.
Ces mécanismes sont pour moi les suivants :
1. Recentrer le territoire par un point crucial et refonder la cosmogonie du microcosme. (Cela s'associe à un autre impératif, celui de borner les frontières : il n'est pas en jeu ici mais ce serait amusant d'en rechercher les manifestations).
2. Revaloriser l'identité en inscrivant des patronymes sur l'axe spirituel de la Croix. Ces patronymes sont individuels, mais ces noms locaux sont ceux d'une constellation de familles solidaires.
3. Jouer ( au sens scénique) la Fiction qui s'impose à la collectivité pour la réunir. Je propose l'hypothèse de voir, dans les personnages de la Passion du registre supérieur, des portraits (ou des miroirs) des paroissiens, ce qui expliquerait leurs attitudes si théâtrales.
Autrement dit, je propose de voir dans le Calvaire monumental de Plougastel un Mystère de la Passion pétrifié permettant un double mouvement : de participation émotionnelle aux souffrances (Devotio moderna) , mais surtout de distanciation spéculaire par le jeu scénique. Un processus parfaitement baroque.
Yves Le Berre a traduit en 2011 une Passion Bretonne en vers qui parût d'abord en 1530, mais qui reparût en 1609 et 1622, au moment même, écrit-il dès les premières lignes de son Introduction, où "le baroque fleurit dans tous les arts". La Passion contient 50 rôles différents. La Résurrection ajoute 9 nouveaux rôles. Un Récitant (an test, "le témoin") intervient régulièrement. Les répliques sont hautes en couleurs, riches en interjection, en jurons, et le texte, truculent, hyperbolique, est très éloigné des versets évangéliques. Les paroissiens de Plougastel ont certainement participé à ces Jeux.
Le Maître de Plougastel a sculpté le registre inférieur et les croix à croisillons en respectant la retenue digne et sévère des saints personnages qu'il donne à voir, mais s'est inspiré pour le registre supérieur de la liberté de ton et d'action des Mystères, pour que les paroissiens s'approprie ce monument comme l'expression de leur propre jeu.
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Flaubert et son M. Genès avant moi.
Lors de sa visite, Flaubert se montre sensible au coté comique et très vivant des scènes, dont il ne décrit — ce n'est pas là hasard — que le registre supérieur. Mais c'est finalement leur guide et compagnon de route, un monsieur Genès de Brest "qui fait pour soixante mille francs d'affaire par an" et dont il écrit "rien n'est plus plat, plus nul, plus incolore et plus insipide que M. Genès. Il est bête comme un juge.", qui se montre le plus clairvoyant : "Ils jouent ! C'est farce !"
"A Plougastel cependant il s'arrêta comme nous, pour que nous puissions voir le calvaire, petit monument de granit, carré, dont chaque face représente un tableau de la vie de Jésus, et dont les quatre coins sont occupés par les évangélistes dans leurs attributions. Les personnages un peu lourds, n'en sont pas moins mouvementés, vivants, amusants : les hommes qui tiennent le Christ tirent de toute leurs forces, à faire éclater leurs muscles ; celui qui lui grimace au nez en tirant la langue grimace si bien qu'il fait rire ; l'âne qui porte Notre-Seigneur entrant à Jérusalem a une vraie mine d'âne, bonasse et pacifique ; les soldats qui le mènent au calvaire, en soufflant de la trompe et battant du tambour, sont précédés d'un officier chevauchant, la figure en l'air, avec une arrogance sublime : aux pieds (sic) de la croix la Madeleine en pleurs répands sa belle chevelure tressée. Mettez à tous ces personnages les costumes des tableaux de Teniers, les petits chapeaux ronds retroussés, les bons pourpoints serrant de grosses bedaines, de grandes manches, des hautes chausses, de larges visages, des yeux ouverts, et vous aurez un ensemble d'une fantaisie solide, quelque chose de très naïf, de très élevé et d'une poésie toute moyen âge, quoique le monument n'ait été construit qu'en 1602 en acquittement d'un vœu fait quatre ans auparavant à propos de je ne sais quel épidémie qui ravageait la Basse-Bretagne. Tout cela fut complètement perdu pour M. Genès [leur Monsieur touriste moyen]. Il ne se doutait même pas de ce que cela voulait dire ; en regardant la Cène, il prit les plats pour des cartes, les coupes pour des dés, et dit, fort ébahi : « Ils jouent. C'est farce! » " (Par les champs et les grèves)
Et dans ses notes : "Calvaire de Plougastel. — Amusant ; animaux lourds, chevaux et ânes ; mine d'un homme qui..... . le Christ en lui tirant la langue ; air raide de deux hommes qui vont le souffleter — Mr Genès prenait la Pâque pr une scène de jeu «ils jouent» — un tambour un joueur de [mot illisible] trompe, un cavalier la figure toute levée en l'air précédant Jésus allant au mont des Oliviers."
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Yves-Pascal Castel avant moi. Fantaisie ; théâtre médiéval.
L'abbé Castel conclut un passionnant articlesur la symbolique cachée du Calvaire (symbolique des nombres, nombre d'or, étoile de David etc...), en tempérant le qualificatif de "hiératisme" qui colle au Monument : "Fantaisies dans un ensemble hiératique. D'une manière curieuse, le calvaire de Plougastel, considéré par tous comme le plus hiératique des monuments du genre, fait place à des fantaisies de détail que ne manquent pas de faire observer les guides plus attentifs au piquant qu'au message profond" [ce sont les descendants de M. Genès...]. "De ces fantaisies, la plus remarquée est l'enfournement dans l'enfer de Katell Gollet, la catin punie de ses péchés. On signale volontiers dans la Montée au calvaire inspirée des Passions médiévales des trompes et des tambours. Et pour les guides en mal de détail piquant, je compte sept personnages, gardes et soudards un pied chaussé et l'autre nu, héritiers encore du théâtre."
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La Sortie de guerre.
Une inscription raconte un autre épreuve : car le Calvaire de Plougastel témoigne aussi du drame de la Seconde Guerre Mondiale et de la destruction de Brest, et, surtout, de la re-fondation du monde local par la re-construction de leur monument emblématique.
Il avait été restauré en 1860 par le sculpteur et marbrier Lapierre de Brest, et vous ne verrez pas facilement les chiffres qu'il a gravé au revers des statues de la plate-forme.
Le 23 août 1944, lors de l'avancée de l'armée américaine, le calvaire ainsi que l'église et le monument aux morts furent touchés par les obus. La partie supérieure fut sérieusement endommagée, plusieurs statues cassées et il ne restait plus que des moignons des trois croix. "Seule, la pietà, restée en place, semblait pleurer sur ce sinistre".
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Capture d'écran du Musée de la Fraise de Plougastel. Copyright.
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Heureusement, un officier américain, John D. Skilton, conseiller d'art aux Etats-Unis, et le maire Jean Fournier mirent en lieu sûr les pièce cassée. J. D. Skilton, rentré dans son pays, fonda la Plougastel Calvary restoration fund Inc et recueillit les fonds nécessaires à la réfection du calvaire.
Engagée pour une durée de quatre mois, la restauration s’est achevée en mars 2004, pour l’ouverture des célébrations du 400ème anniversaire du « Grand Calvaire » le 4 avril 2004. Elle a été réalisée par une entreprise bretonne spécialisée, sous la direction de l’Architecte en chef des Monuments Historiques, et a consisté en la dépose complète, le nettoyage et la restauration du socle et de toute la statuaire, notamment la réparation des pierres éclatées et la réfection des joints d’étanchéité. (gebete29)
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Mais cette restauration, ce sauvetage aux jours mêmes de la Libération rappelle que le Calvaire de Plougastel a été construit également juste après la fin des Guerres de la Ligue. Qui cessèrent ... en 1598. Cette après-guerre sous le roi Henri IV fut féconde pour de nombreuses chapelles de Plougastel, puisqu'à Saint-Trémeur s'observent les dates de 1581 et 1636, à Saint-Claude celles de 1574, 1630 et 1632, à Saint-Guénolé celle d'un calvaire de 1654, à Saint-Adrien la date de 1616, à Sainte-Christine celle de 1605, au Languis celle de 1603 et 1622, à Saint-Jean celle de 1607.
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VUES GÉNÉRALES.
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Mes schémas illustrent les 4 parties que j'ai décrit plus haut, avec au centre, l'inscription de fondation de 1604 et le Christ sortant du Tombeau.
De très nombreuses descriptions du calvaire sont disponibles en ligne, ainsi que de très belles photos. Je ne me livrerai pas ici à une description méthodique.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LES SAINTS PIERRE, SÉBASTIEN ET ROCH.
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Désolé pour les photos ! Si ces statues restent à l'ombre, au fond de cette niche-cave, ce n'est pas un hasard. Et c'est dans cette pénombre qu'il faut les découvrir.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LES INSCRIPTIONS.
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Le calvaire porte plusieurs inscriptions : sur la frise du massif en 1602, au dos de la croix en 1603 et sur la pierre du tombeau en 1604. Sept fabriques ( deux par année ?) et deux curés y ont leur nom. Devoir de mémoire après un trauma ? On comprend que je leur accorde toute l'importance nécessaire.
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Inscription de 1602.
Elle est placée sur la face occidentale (celle du couchant, celle de la Mort du Christ, la face principale comme pour tout calvaire), au dessus de la table d'offrande et des trois saints. Et sous le tombeau dont le Christ sort vainqueur.
Je transcris "Ce mace fut achevé à l'an 1602 les fabriques étant alors messieurs A. Corre, F. Periou, et I. Baod étant curé".
Le curé.
Je pense que la graphie BAOD doit renvoyer au patronyme (LE) BAOT, BAUD, BAULT, LE BOT, bien attesté à Plougastel sur geneanet, mais à partir du XVIIe siècle. L'initiale du prénom peut correspondre à Ian (Jean), ou à Yves. La liste des prêtres et curés de Plougastel donnée par Pérennès débute par un Yves Baod, curé, 1602, mais sans doute par référence à cette inscription.
En juillet 1657, parmi les quinze prêtres de Plougastel figure un Yves Le Baot et Alain Le Baot (H. Pérennès).
Les fabriciens ou fabriques.
A. CORRE : le nom est courant à Plougastel. Voir infra F. Corre 1616-1619. La chapelle Saint-Claude porte l'inscription "IAN CORRE fabrique 1632".
F. PERIOU. Le patronyme PERIOU est attesté en Bretagne vers 1084-1131 sur le cartulaire de Quimperlé, puis en 1427 avec la graphie PERRIOU à Ploumgoar et PERYOU à Ergué-Gabéric. Ses variantes sont (LE) PIRIOU, PERIO, PERRIO. Le site geneanet me procure un François PIRIOU, né en 1580 d'Yves PIRIOU, et marié à ... Catherine Corre.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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2. L'inscription de 1603 sur le dos de la croix.
H : ROLLANT : I : LE MO AL : 1603
Soit "H. Rollant et I. Le Moal 1603".
-Hervé ROLLAND, ou Henri ROLLAND ? À Plougastel nous connaissons bien Antoine Rolland, le facteur d'orgue né vers 1585, ou son fils Hervé, né en 1621. Mais je vois bien que les archives manquent pour la période antérieure à 1600. Les archives lapidaires comblent cette carence. La chapelle Saint-Adrien de Plougastel fut agrandie en 1616-1619, date d'une inscription portant le nom de Iac Davit, curé, H. ROLLANT et F. CORRE étant gouverneurs (de la fabrique).
-Quant I. LE MOAL, ce n'est pas Joseph LE MOAL de Plougastel, né vers 1600.
Si ce n'est lui, c'est bien quelqu'un des siens.
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Je n'ai pas photographié cette inscription. J'aurais dû.
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3. L'inscription de 1604.
C'est sur le tombeau, d'où sort le Christ ressuscité, que nous lisons une des inscriptions qui datent le calvaire :
1604
I : KGVERN :
L : THOMAS :
0 : VIGOV FAB
ROUX : CURÉ:
Soit "1604, I. Kerguern, L. Thomas (et) O. Vigouroux fabriques, Roux Curé."
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-I. KERGUERN : pour Jean Kerguern.
-L. THOMAS : là encore, le patronyme est renseigné vers 1600 mais je ne trouve aucun Louis, voire Luc dans cette famille. Par contre, une inscription lapidaire de la chapelle Sainte-Christine (porte sud) datant de 1605 porte le nom de FRANCES THOMAS, fabricien, tandis que le socle du calvaire porte A. THOMAS 1587.
-O. VIGOUROUX. Ah, les Vigouroux à Plougastel, c'est comme les Kervella et les Le Gall ! Mais les archives restent muettes sur ce fabricien.
Interrogez-moi sur la période d'après 1600, là je serai bavard !
Puisque les archives papiers sont muettes, il reste — c'est dire leur importance— les archives lapidaires.
Ainsi, la chapelle Saint-Trémeur porte l'inscription "Y. VIGOVROVX F.F: FAICT : FAIRE : CESTE CHA[PELL]E 1581".
- ROUX, curé.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Il y a plusieurs façons de visiter le monument, soit face par face en quatre étapes, soit, comme le suggère l'abbé Castel, en en faisant huit fois le tour. Mais pour suivre mon idée, je le découpe en tranche, comme les gâteaux quand j'étais petit.
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LA FRISE DU SOUBASSEMENT : LES QUATRE ÉVANGÉLISTES.
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On comparera ces évangélistes à ceux de la chapelle Saint-Tugen de Primelin.
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Matthieu et l'homme.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Marc et son lion.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Luc et son taureau. Pas de photo.
Jean et son aigle (qui tient le plumier dans son bec).
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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L'angle nord-ouest.
Une grille protège l'accès à la plate-forme par l'escalier.
Un évêque donne sa bénédiction : saint Corentin, patron du diocèse ?
À droite, saint Jean l'évangéliste.
En haut, la scène de la Flagellation.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LA FRISE DU SOUBASSEMENT .
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Le tour du monument débute par la face orientale.
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La frise Est.
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— La Vierge de l'Annonciation; La Visitation; pas d'image.
— Le Mariage de la Vierge.
Plougastel est le seul calvaire à traiter du Mariage de la Vierge et de Joseph, qu'on voit debout entre le prêtre coiffé d'une mitre et habillé comme un moine, d'une longue tunique, d'un rochet et d'un camail. Le prêtre, beaucoup plus grand que les époux, les tient par la main.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La Nativité
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La Circoncision.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La fuite en Égypte de la Sainte Famille ; L’Ange de l’Annonciation ;
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La frise Nord.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La description débute à gauche.
Jésus en prière au Jardin des Oliviers, alors que les trois apôtres qui devaient veiller avec lui, Pierre, Jean et Jacques, se sont endormis.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Puis viennent de gauche à droite huit personnages :
- Un garde retient saint Pierre qui vient de couper l’oreille de Malchus.
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- Jésus redresse le serviteur du grand prêtre Malchus, qui a dans la main son oreille coupée. Il est adossé à une lanterne (la scène se déroule la nuit). Judas s'approche de Jésus, tenant la bourse des trente deniers.
- Un officier et des soldats, ou des notables pharisiens.
Notez les culottes (chausses) à taillades, témoignant de la mode —lancée en Allemagne par les lansquenets suisses,— des crevés, ces petites fentes assurant à la fois assouplissement et aération (taillades d'aisance) et aussi décor, surtout lorsqu'on prenait soin d'y laisser passer la doublure, ou chiquetade. Ici, ces taillades sont plus modestes : bien attestée au XVIe siècle sous François Ier et Henri II, la mode en disparaît à partir du début du XVIIe siècle.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La comparution de Jésus devant Caïphe.
Notez l'apathie des gardes, qui semblent frappés par une indifférence lasse et nous fixent de leur regard absents. Rien à voir avec la vigueur musclée de la même scène sur les Passions des gravures de Dürer ou Schongauer, ou des verrières bretonnes du XVIe siècle. Et rien à voir avec ce qui va survenir sur la plate-forme. J'ai dû faire exprès de prendre des photos un peu floues, embuées dans une ombre triste.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Le grand prêtre Caïphe sur son trône.
Le Maître de Plougastel ne rigole pas et impose à ses modèles un frontalité impassible : inutile de tenter de les dérider, ils sont façonnés à la règle, par des traits exclusivement verticaux : mèches de la barbe, mèches des cheveux, plis de la tunique, pans de l'habit, geste du doigt et axe du sceptre, axe des jambes et plis à peine évasés au dessus des chaussures : ver-ti-cal. "J'veux voir qu'une seule ligne !".
Bon. Faire rire un grand prêtre, même chez d'autres artistes, c'est pas gagné.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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Sur la frise Ouest :
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Entrée de Jérusalem à gauche. Adoration des Mages à Droite.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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1. L'Entrée à Jérusalem.
Les remparts de la ville sont représentés par une petite tour crénelée. Jésus s’apprête à entrer dans la ville, accompagné de saint Jean (imberbe, devant), de saint Pierre et de trois autres apôtres. Les habitants (en échelle réduite) accueillent le Christ comme un roi en tendant leurs manteaux sous les pattes de l'ânon.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Avec les deux boutons ronds de leur robe, leurs moustaches tombantes, leurs mèches de barbe tombantes, leurs plis tombants, et leurs regards ... Ah, mais ces rudes pêcheurs de Tiberiade n'avaient pas encore eu la visite de l'Esprit Saint !
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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2. L'Adoration des Mages.
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L'ordre chronologique n'est pas respectée puisque cette scène devrait venir juste après la Nativité, et appartient à la Vie privée du Christ,, tandis que l'Entrée à Jérusalem appartient à la Vie Publique.
On veut l'expliquer par des théories théologiques. C'est peut-être simplement dû aux différents remontages des groupes en ronde-bosse sur cette corniche. Mais force est de constater que l'Ordre, celui de la Chronologie, est ici défait. Et que ça me parle.
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Enfin un peu de tendresse, grâce à l'âne qui frotte son museau sur celui du bœuf.
Les artistes s'ingénient d'habitude à souligner les différences entre les trois rois, du vieux Melchior agenouillé au jeune Gaspard et à Balthazar l'africain. À glisser une boucle à l'oreille de ce dernier. Et à conférer au petit Jésus une expression charmante de gratitude. Ou, du moins, à éclairer le visage de l'heureuse Mère d'un joli sourire.
Ce n'est pas le genre de la maison.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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La frise Sud :
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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1. La Cène. Elle est représentée par trois groupes de quatre personnages. Deux apôtres font un geste d'énonciation, l’index sur le pouce indiquant, ainsi, qu’ils discutent des paroles que Jésus vient de prononcer, annonçant sa trahison .
Les Apôtres et le Christ s'alignent à l'identique derrière une table à festons où l'agneau pascal disposé dans un plat est difficilement reconnaissable. Certains tiennent le couteau à la main, d'autres font le geste de l'argumentation, lèvent un verre ou un pain. Deux Apôtres sont assis en bout de table dont Judas, à droite, assis plus bas que les autres, la bourse à la main. La tête du disciple préféré de Jésus est couchée sur sa poitrine. Jésus tient un morceau de pain à la main : selon Matthieu 26, celui qui a mis la main dans le plat en même temps que lui est le traître. Ou bien chez Jean :
"Il y avait à table, appuyé contre Jésus, l’un de ses disciples, celui que Jésus aimait.
Simon-Pierre lui fait signe de demander à Jésus de qui il veut parler.
Le disciple se penche donc sur la poitrine de Jésus et lui dit : « Seigneur, qui est-ce ? »
Jésus lui répond : « C’est celui à qui je donnerai la bouchée que je vais tremper dans le plat. » Il trempe la bouchée, et la donne à Judas, fils de Simon l’Iscariote.
Et, quand Judas eut pris la bouchée, Satan entra en lui. Jésus lui dit alors : « Ce que tu fais, fais-le vite. » (Jean 13:23-27)
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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2. Le Lavement des pieds.
Le Lavement des pieds des Apôtres précède en fait la Cène. C'est un geste de purification et de sollicitude donné comme une métaphore aux Apôtres. Placé avant le repas, cela n'a plus de sens.
Jésus est à genoux devant Pierre. Trois groupes constituent la scène. Ils sont onze, puisque Judas a trahi .
Faut-il, devant cet excès de passivité atone, cet effacement de toute individualité des visages, parler encore de "hieratisme", cette digne raideur propre aux choses sacrées ?
Et si cet étage, ce registre enfoui sous la plate-forme exprimait quelque chose du vécu des bretons lors de l'épidémie et de la guerre ? Et s'il donnait à percevoir la perte identitaire, la pensée blanche, la parole désincarnée ou la froideur des sentiments propre à la sidération traumatique ? S'il témoignait d'un désinvestissement émotionnel ? D'un profond désintérêt ? D'une désertion des interactions? D'une interruption de l'élan temporel?
S'il était la couche psychique sous-jacente, que l'élaboration d'une plate-forme de projets collectifs se donnait le but de dépasser ?
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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LA PLATE-FORME.
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Le Récit, le Storytelling déjà bouleversé dans le soubassement va perdre d'avantage encore son Ordre. Mais l'abbé Castel, auteur de référence du lieu, nous incite à reprendre la visite par le coté oriental. Pourquoi pas ? Le fil narratif est brisé.
J'aurai pu le reconstituer en allant d'une face à l'autre. Remettre du bon sens. Mais le monument nous joue un théâtre de la perte provisoire et éprouvante de ce dernier.
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La plate-forme Est .
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La Mise au Tombeau (Jean 19:38-42) voisine le Baptême de Jésus (premier chapitre de l'évangile de Jean)....
Il est toutefois possible de justifier cette position de la Mise au Tombeau puisqu'elle est diamétralement opposée à la Sortie du tombeau qui centre la face occidentale, et qui est la fin glorieuse de ce récit : son Ouverture à la Vie.
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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—Le Baptême de Jésus, où un ange tient la tunique. Le Christ barbu se tourne légèrement vers Jean-Baptiste.
Pas de photo.
— La Mise au Tombeau
Elleest très ordonnée avec huit personnages autour du Christ dont la dépouille repose sur un linceul. Joseph d'Arimathie, levant la main droite vers la tête du Christ et tenant un linge, porte le bonnet conique à oreillette à glands des Juifs en tant que membre du Sanhédrin. Il est secondé par une femme coiffée d'un turban et qui tient un linge.
À coté, Jean soutient Marie qu'il entoure de son bras gauche. Il porte la robe à deux boutons sur une fente en S que le sculpteur fait revêtir à tous les apôtres. Je crois que des larmes s'échappent de ses yeux, mais mon cliché ne permet pas de m'en assurer.
Madeleine tient son flacon d'aromates pour l'embaumement. Son visage est encadré par le voile très rigide et à angles droits qui est l'un des traits stylistiques des Prigent. Ses cheveux sont torsadés par plusieurs tours d'un linge plissé.
Vient ensuite un homme dont le chapeau conique indique qu'il est Juif : c'est Gamaliel, un pharisien que la tradition iconographique place dans ces Mises au Tombeau. Voir tous les renseignements dans mon article :
Dès lors, je suis amené à rejoindre l'opinion courante qui voit dans le deuxième personnage un homme et non une sainte femme comme je l'ai fait. Cet homme jeune serait Abibon, fils puîné de Gamaliel.
Ensuite, nous voyons une sainte femme : Marie Cléophas ou Marie Salomé, comme on veut.
Enfin, Nicodème tend les mains protégées par un linge par respect vers les pieds du Christ. Curieusement, il n'est pas coiffé du bonnet conique, mais sa longue barbe et sa robe fendue latéralement depuis un bouton, comme Joseph d'Arimathie, indique qu'il appartient aussi aux pharisiens.
Le groupe est représentatif de l'art du Maître de Plougastel, et de son "hiératisme", de la sobriété de l'expression du chagrin, des visages graves penchés vers le cadavre, ou des gestes peu variés puisque toutes les mains ne s'éloignent pas de plus de 20 cm de la ceinture (sauf les mains croisées de Marie).
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Grand calvaire de Plougastel (1602-1604). Photographie lavieb-aile.
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J'interromps la première partie sur cette Mise au Tombeau. Je teste mon hypothèse image après image, et j'ai justifié à mes yeux son premier argument : dans le soubassement le sculpteur a mis en scène, par la pénombre, par son style désincarné et figé, son ton plus envoûtant, plus monocorde que le terpnos logos, par le regard éteint des personnages désindividualisés, dé-visagés, par le bris des repères narratifs, l'épreuve vécue par la population lors d'un temps de guerre, de peste, de famine et de carence. Une hantise.
Ma deuxième partie poursuivra la visite de la plate-forme : y montrerais-je un changement de style témoignant d'un réveil des habitants se libérant en jouant la Passion ?
La troisième partie sera consacrée aux trois croix du Christ et des Larrons, pour en comparer les figures avec celle des autres ateliers de sculpture de Basse-Bretagne.
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SOURCES ET LIENS.
— ABGRALL (Jean-Marie), 1904, "Le calvaire de Plougastel-Daoulas", Bulletin de la Société archéologique du Finistère t. XXXI p. 182-189
— CASTEL (Yves-Pascal), 2005 (trad. Lorañs Stefan, Job an Irien, photogr. Jean Feutren), « Guide des sept grands calvaires bretons / Ar seizh kalvar braz », Minihi-Levenez, août 2005, p. 0-106 (ISSN 1148-8824)
— CASTEL (Yves-Pascal), articles du Progrès de Cornouaille / Courrier du Léon
-thèse Michel Hamonic Plougastel-Daoulas 13.10.79,” Collections numérisées – Diocèse de Quimper et Léon, consulté le 6 avril 2020, https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/items/show/1479.
-CASTEL 1336 Auscultation des Calvaires à Plougastel et Guimiliau par la CGG... 18.10.97.
— PÉRENNÈS Henri, “Plougastel-Daoulas,” Collections numérisées – Diocèse de Quimper et Léon, consulté le 6 avril 2020, https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/items/show/9785.
Le calvaire (kersanton, 1660, Roland Doré), la Vierge à l'Enfant (kersanton, v.1660, Roland Doré), et Marc évangéliste (kersanton, v.1660, Roland Doré) de l'église de Cast.
Le calvaire de Cast est l'un des nombreux calvaires sculptés dans la kersantite par l'atelier landernéen de Roland Doré.
Nous y retrouvons inévitablement les mêmes Christ en croix avec tous les traits spécifiques à cet atelier, tels que je les ai présentés dans mes articles précédents, et que je rappelle ici en annexe. Ainsi que l'une des nombreuses Pietà de l'atelier, et une Marie-Madeleine aux cheveux retenus par le fameux bandeau occipital.
Alors, à quoi bon jouer au paparazzi pour multiplier les clichés de ce calvaire semblable à mille autres calvaires?
Pour un amateur, la question est presque sacrilège. En effet, toute œuvre d'art est unique. Surtout, parfois, par ses originalités.
a) La première originalité (si fréquente après tout qu'elle n'en n'est plus une), c'est le remontage fautif des statues géminées (à deux personnages dos à dos). La règle théorique est de trouver la Vierge à droite du Christ crucifié, et Jean à gauche. Mais l'ignorant qui a, (j'ignore quand, tant mieux pour lui) remis en place les éléments dispersés (Couffon indique que l'église conservait de son temps "débris de calvaire dont un Christ en croix de Roland Doré") a confondu la Vierge et Marie-Madeleine (pourtant facile à reconnaître avec son flacon d'aromates), et a inversé la statue géminée de ce groupe. Première singularité, bien que je souhaite que cette faute soit un jour régularisée.
b) Deuxième rareté : le groupe géminé du coté droit montre deux saints presque jumeaux : sont-ce deux saint Jean ? Lançons sur cette enquête les plus fins limiers du Patrimoine.
c) Autre chose : ce calvaire appartient, parmi les 98 croix et calvaires de Roland Doré au sous-groupe des 41 qui portent une date ; c'est même, avec sa date de 1660, l'un des plus tardif du corpus des calvaires (avec Saint-Thégonnec 1662), et également une œuvre de maturité dans la carrière de Roland Doré (1618-1663).
d) enfin, les inscriptions mentionnent les noms des commanditaires (environ 20 calvaires /98) . Il est possible de relier ces noms (le recteur Guillaume Le Glinec et le fabricien Jacques Le Croissant) avec des renseignements généalogiques qui ancrent cette œuvre dans son sous-sol humain.
e) le visiteur pourra admirer à l'église de Cast deux autres œuvres de Roland Doré : une Vierge à l'Enfant (niche du porche sud) et un Saint Marc évangéliste dans la niche de la façade occidentale.
g) L'attaque par les lichens est une des dix plaies de la statuaire monumentale dont il faudra bien qu'on se soucie un jour en Finistère, car elle défigure les trésors des enclos bretons. On restaure les vitraux attaqués par les micro-organismes et on les protège d'une nouvelle agression, on nettoie patiemment les peintures, on a procédé au ravalements des façades, mais on abandonne ces chefs-d'œuvres de sculpture du XVIe siècle aux conséquences de la pollution. Faut-il y voir "un biofilm protecteur" ? La conscience des effets secondaires de traitements mécaniques ou biocides trop agressifs doit-elle nous paralyser?.
— Geneviève Reille-Taillefert, 2010, Conservation-restauration des peintures murales: De l'Antiquité à nos jours Editions Eyrolles,
— M.R.D. SEAWARD and C. GIACOBINI, LICHEN-INDUCED BIODETERIORATION OF ITALIAN MONUMENTS, FRESCOES AND OTHER ARCHAEOLOGICAL MATERIALS STUDIA GEOBOTANICA 8: 3-11, 1988
Mais ici, les lichens incrustants blancs (peut-être la Lécanore des murs Protoparmeliopsis muralis , nitrophile) forment des lignes marbrées sur le gris sombre du kersanton, des moires et serpentins déstructurant la reconnaissance des formes, comme dans les meilleures techniques de camouflage. À défaut de pouvoir résoudre le problème, on en appréciera sur ces photos, en esprit curieux, la créativité graphique, tandis que le lichénologue complétera son inventaire de biodiversité, et préparera une Flore lichénologique de la kersantite du Finistère, ... Les botanistes et frères Crouan, gloires brestoises, avaient déjà décrit dans leur Florule de 1867 sur ce biotope Umbilicaria pulsulata (page 98) et Urceolaria scruposa (page 94) aujourd'huiDiploschistes muscorum, qui, comme son épithète l'indique, est muscicole (pousse sur les mousses) et choisit les dunes.
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VUE GÉNÉRALE.
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L'église Saint-Jérôme de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
L'église Saint-Jérôme de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Le calvaire de l'église Saint-Jérôme de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Le socle et l'emmarchement.
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Base octogonale à trois niveaux, moulures. Socle octogonal à large chanfrein:
L'inscription a été lue par le chanoine Abgrall en 1905 avec la leçon sur les 2 côtés du socle, "N : G : H : GLINEC : R - A. ROGNANT : F : 1660".
L'abbé Castel a lu en 1980 : M: G-G: IC GLINEC R. IAC: CROISSANT F 1660." (Castel, 1980)
L'inscription que je n'ai pu relever, doit se transcrire ainsi : "Messire Guillaume Le Glinec recteur, Jacques Croissant fabricien, 1660".
Les deux noms se retrouvent sur les croisillons, celui du recteur à l'ouest, celui du fabricien à l'est.
1. Le recteur Guillaume LE GLINEC.
Il a été recteur de Cast de 1648 à 1667. Son identité est précisée par une inscription des archives concernant une cloche de la chapelle Saint-Mahouarn ou Saint Magloire , chapelle disparue en 1787. Ce jour, 13 de Mai (1650), en l'église paroissiale de Cast, a été une cloche faicte et dédiée pour la chapelle de Monsieur de St Mahouarn, en la paroisse du dit Cast, baptisée par vénérable personne Missire Grégoire Blaise, prêtre de la dite paroisse, et nommée soulz et au nom de Monsieur St Louis par vénérable et discret Missire Guillaume le Glinec, recteur du dit Cast, et dame Louise de Moellien, dame douarière de Kerstrat, propriéteresse de Chef du Bois et autres lieux, présents les soussignants, à l'issue de la grand'messe, selon les formalités de notre mère Ste Eglise, Louise de Moelien, Quoetsquiriou, T. Le Louarn, Blaise prêtre, G. Glivec, Jouan, H. Le Queffellec, Guillerme". (in Abgrall 1905)
Selon villadesresedas, in genenanet, il serait né vers 1620, serait le frère de Marguerite GLINEC, née vers 1615 à Cast, et décédée en août 1660 à Poul ar Sarf, Cast. Sa seconde sœur est Anne GLINEC, née et décédée à Cast. Un parent, Alain GLINEC, était prêtre. Née au milieu du XVIIe siècle, on mentionne aussi à Cast Marie et Françoise GLINEC.
Là encore, les généalogistes peuvent retrouver la famille LE CROISSANT à Cast. Il y a ainsi un Jacques LE CROISSANT, (Jacques Croissant le vieux) né à Cast vers 1620 et décédé à Plogonnec en 1678. Il a épousé Jeanne JEZEQUEL (Cast v. 1630-Cast 1680) dont il eut deux filles et un fils, Jacques (Cast 1651-Cast 1713) et demeurant à Porzrichard, ou Porrichart Isellaff . Pors Richard se trouve à 2,7 km à l'est de l'église.
Jacques Le CROISSANT le vieux a 2 frères prêtres, Guillaume et Hervé. Son fils Jacques était peut-être, et son petit-fils Jacques surement, notaire royal.
Le calvaire de l'église Saint-Jérôme de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Le calvaire de l'église Saint-Jérôme de Cast. Photographie lavieb-aile mai 2020.
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LE COTÉ OCCIDENTAL. LA PIETÀ, LE CRUCIFIÉ ENTRE SAINTE MARIE-MADELEINE ET SAINT JEAN
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La Pietà.
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On en trouve d'autres exemples à Brennilis, Saint-Thégonnec, Sainte-Anne la-Palud de Plonévez-Porzay, Le Passage à Plougastel, la chapelle Saint-Claude de Plougastel, et à Trézilidé.
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Calvaire (Kersanton, 1630, Roland Doré) de la chapelle Saint-Claude à Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Nous retrouvons la composition de la Pietà de Saint-Claude en Plougastel, où la ligne courbe de la Mère enveloppe avec tendresse et affliction le corps aux lignes rompues de son Fils, assis sur son genou droit. Mais les deux œuvres diffèrent, et si je suis plus ému par la Vierge de Saint-Claude, le visage émacié du Christ de Cast, à l'humanité sublimée par la souffrance, me semble mieux réussi que la version plus réaliste de Saint-Claude.
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La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mai 2020.
La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mai 2020.
La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mai 2020.
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La croix et le croisillon.
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Le calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Le calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Le Christ en croix.
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Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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L'ange et le titulus INRI.
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Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Sainte Marie-Madeleine à gauche de la croix.
Sa main droite est posée à plat sur la poitrine (comme beaucoup de statues de saint Jean), et elle tient en main gauche un objet qui ne peut-être que le flacon d'aromates.
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Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Le bandeau occipital.
Sur ce bandeau, voir la Vierge à l'Enfant de Cast (infra), et pour l'iconographie :
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Saint Jean à gauche de la croix.
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Il tient par dessus et au dessous le livre de ses écrits (son évangile plutôt que l'Apocalypse). Il nous fait face, exactement comme Marie-Madeleine. Nous retrouvons la perruque bouclée triangulaire habituelle. Mais il a sa petite particularité.
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Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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En effet, une fine moustache dresse ses deux fines pointes au dessus de la lèvre.
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Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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L'inscription du croisillon.
Je n'ai pas bénéficié de la lumière parfaite pour la lire, mais elle a été relevée par Couffon qui a lu (avant la prolifération de lichens, mais ne revenons pas là-dessus) : "M. G. GLINEC. RECTEVR/DE CAST. M. R. CARIOV. C", et par Castel qui lit : M: L(?) GLINEC RETR DE CAST. M R CARCHEC (?).
Comme j'ai le choix, et parce que je lui ai fait parfois du tort par les critiques, je donne cette fois-ci ma préférence à René Couffon. Je transcris "Messire G[uillaume] [Le ] Glinec, recteur de Cast [et] Messire René Cariou curé".
Le recteur a déjà été présenté plus haut. Cariou n'est pas le fabricien, car l'inscription du socle nous avait révélé son nom, Jacques Le Croissant, et, si nous l'avions oublié, nous le retrouverons inscrit sur le croisillon, coté est. Cariou est donc vicaire, ou curé c'est pareil.
Ma puissance déductive se trouve confirmée à la lecture de la notice de Jean-Marie Abgrall, qui mentionne "le 29e Octobre 1673, ont été faites Ies cérémonies requises et nécessaires par vénérable et discrete personne Missire René Cariou, curé de la paroisse de Cast, pour la bénédiction d'une cloche pour servir dans la chapelle de Monsieur S^Mahouarn du Loc, située en la dite paroisse." Certes, Abgrall mentionne François CARIOU prêtre de Cast en 1661 : la date est plus proche de celle du calvaire. Citons aussi en 1673, un Guillaume CARIOU est qualifié de "prêtre promoteur" sur une cloche de la chapelle de Quillidoaré, et la même année,
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Face ouest du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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LE COTÉ ORIENTAL. JEAN ET LA VIERGE. UN SAINT ABBÉ.
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Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Contre le fût : un saint abbé. Saint Guénolé ?
C'est un saint abbé car il tient une crosse en main droite, à extrémité pointue mais dont le crosseron est brisé. Il ne porte pas de mitre (bien que le haut de la tête semble manquer), et nous ne voyons pas de fanons derrière la nuque. Les cheveux sont courts, une tonsure pourrait être imaginé. Il ne porte ni gants ni anneau.
Il est vêtu, sous sa dalmatique ornée d'orfrois, d'une coule de moine, bien visible autour du cou.
Castel ne le mentionne pas. Couffon l'identifie comme moi en tant que saint abbé, et suggère "saint Gildas ?", peut-être en raison de l'existence d'une chapelle Saint-Gildas avec deux statues de pierre, "saint Gildas piétinant un dragon, autres saint Gildas en moine" . Ainsi qu'un vitrail, dans l'église Saint-Jérôme, de saint Gildas, mais du XIXe siècle.
À l'intérieur de l'église se trouvent plusieurs statues en pierre de saints portant une crosse à droite ; mais l'un est casqué, c'est saint Georges ; sa "crosse" est en réalité un étendard. L'autre (en chape, tenant un livre) est mitré. Le troisième, barbu, tête nue, pieds nus, place l'extrémité de la hampe dans la gueule d'un animal; ce serait saint Tugen maitrîsant un chien enragé.
Ici, en l'absence de tout indice, je conclue à saint Guénolé, abbé fondateur de Landévennec la plus haute et la plus ancienne autorité du diocèse de Cornouaille avec saint Corentin, qui est, lui, le premier évêque de Quimper.
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Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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La Vierge à droite.
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La tête voilée par son manteau et serrée dans la guimpe, les bras croisées devant la poitrine, le visage figé, anéanti, la chute dans la déréliction signifiée par les plis tubulaires de la robe et ceux en plis de serviette du manteau, elle est le prototype des Vierges au calvaire de Doré.
Je rappelle qu'elle devrait être orientée vers le couchant, autre symbole de la Mort avant le renouveau, et qu'elle retrouverait ainsi sa place à droite de la croix.
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Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Saint Jean.
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C'est le sosie du saint Jean du coté ouest, un sosie qui aurait rasé sa moustache et aurait déplacé sa main droite pour la placer sur la poitrine.
Comme il est très troublant d'avoir deux fois le même personnage sur une statue géminée, Abgrall, Castel et Couffon puis Le Seac'h ont contourné la difficulté en ne décrivant pas ces statues. Castel suivi par Le Seac'h mentionne un vague "saint au livre", mais la comparaison avec l'ensemble des Jean au calvaire de Roland Doré ne permet pas une autre identification. Est-ce au contraire le sosie moustachu qui doit être identifié comme un autre saint personnage? Rien ne permet de le dire.
On voit ici un des traits stylistiques du sculpteur landernéen : la bouche dont les commissures se creusent en fossettes, ce qui génère un demi-sourire caractéristique.
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Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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L'inscription des bras du croisillon .
On lit JACOB CROISS[ANT]. Nous savons qu'il s'agit de Jacques Le CROISSANT : la forme Jacob est la forme hébraïque, ou biblique de Jacques.
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Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Face est du calvaire (kersantite, Roland Doré, 1660) de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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L'évangéliste saint Marc sur la façade occidentale.
Il est placé dans la niche centrale du sommet du porche occidental, entre deux statues qui sont, elles, issus d'un Credo apostolique.
Nous ne quittons pas notre sujet principal, car il provient selon Le Seac'h du calvaire.
Le saint est assis et rédige son évangile ouvert sur ses genoux. Coiffé du bonnet carré de docteur et revêtu d'un camail à capuchon sur son surplis, il tient le calame en main droite et l'encrier en main gauche, alors que son lion l'accompagne allongé à ses pieds.
Il est comparable au saint Jean évangéliste du porche sud de Saint-Thégonnec, daté de 1625.
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Porche ouest de l'église de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Porche ouest de l'église de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Saint Marc (kersantite, Roland Doré, v.1660), porche ouest de l'église de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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La Vierge à l'Enfant.
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Il existe cinq Vierges analogues par Roland Doré, énumérées par Emmanuelle Le Seac'h : celle de la chapelle Saint-Sébastien en Saint-Ségal, de l'église de Plougourvest, de la chapelle de Locmaria-Lan de Plabennec, du fronton du porche de l'église de Trémaouézan, et de l'église de Penmarc'h.
En voici quelques exemples.
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Chapelle Saint-Sébastien en Saint-Ségal :
Vierge à l'Enfant, kersanton, Roland Doré. Chapelle Saint-Sébastien en Saint-Ségal. Photographie lavieb-aile juillet 2019.
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Chapelle de Locmaria-Lan de Plabennec
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Vierge à l'Enfant (kersanton, Roland Doré). Chapelle de Locmaria-Lan. Photo lavieb-aile.
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Penmarc'h. Croix de Lescors, conservée à l'église Saint-Nonna et datant de 1618, début de l'activité de Roland Doré.
Vierge à l'Enfant (kersanton, Roland Doré, H. 65 × L. 25 × P. 15 ) de l'église de Penmarc'h. Photographie lavieb-aile.
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La Vierge à l'Enfant de Cast est couronnée, et ses cheveux sont retenus derrière la nuque par le même bandeau occipital que j'ai signalé sur la statue de Marie-Madeleine au calvaire (et qui s'observe aussi à la chapelle Saint-Sébastien).
Son visage est plus allongé qu'à Plabennec et Penmarc'h, dans un canon semblable à celui de Plougourvest, mais on y reconnait les commissures labiales en fossettes et le menton rond pointé en avant. Sa robe au décolleté rond et timide, est vite dissimulée par le large pan du manteau qui revient en diagonale vers l'aisselle gauche.
Elle tient sous l'index et le majeur la tige d'un objet , que Le Seac'h décrit comme "une pomme piquée sur un bâtonnet", comme à Saint-Ségal. Je pourrai voir dans cet objet piriforme, non pas un cornet de glace, mais un hochet.
L'Enfant enlace tendrement de sa main droite le cou de sa mère, et sa main gauche, qui tient à Plougourvest une pomme, est ici brisée. Ses deux petites jambes sont nues, et non couvertes par une tunique plissée comme dans les autres exemples.
À propos de pommes, on ne peut que souligner la rondeur appétissante des joues, encadrant un sourire délicieux : Roland Doré, c'est ça!
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Porche sud de l'église de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Vierge à l'Enfant (kersantite, Roland Doré, v.1660) du portail sud de l'église de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Vierge à l'Enfant (kersantite, Roland Doré, v.1660) du portail sud de l'église de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
Vierge à l'Enfant (kersantite, Roland Doré, v.1660) du portail sud de l'église de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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ANNEXE
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ROLAND DORÉ ET SES 50 CALVAIRES.
Le sculpteur landernéen dont l'atelier de taille du kersanton est le plus renommé du XVIIe siècle a travaillé pour 82 paroisses (Finistère, Côtes d'Armor) essentiellement pour la sculpture religieuse (et 9 gisants). Il a réalisé les séries d'apôtres de 4 églises, partiellement de 4 autres et quantité de statues isolées. Selon E. Le Seac'h, il a réalisé 97 croix, calvaires ou vestiges dont 21 croix, 50 calvaires, 26 vestiges. Seuls 12 croix et 15 calvaires sont encore complets. 41 croix et calvaires sont datés, entre 1618 à Penmarc'h et 1662 à Saint-Thégonnec.
Voici une liste de 75 croix et calvaires (en gras : décrits dans ce blog)
Brennilis : croix de calvaire du cimetière (vers 1625) . Ange, Crucifix, Pietà,
Briec de l'Odet, Croix de la chapelle de Trolez (Seul le crucifix est de Roland Doré)
Cast, calvaire de l'église Saint-Jérôme : (1660), GLINEC, recteur, Jacob CROISSANT, fabricien. Vierge, Madeleine, crucifix, Jean, saint au livre.
Châteaulin, calvaire (1639) de la chapelle de Kerluan : Vierge, crucifix, Jean (et sur le fût saint Sébastien et saint Roch, hors atelier).
Cléden-Cap-Sizun : calvaire (1630) de la chapelle Saint-They. Vierge, Jacques le Majeur en haut du fût .
Cleder, croix de Kerzuoc'h (1625), Messire PRISER, procureur
Commana : calvaire du cimetière (1624), signé. Vierge/saint Hervé et son guide ; crucifix ; moine au livre ; Jean/moine, écu martelé
Crozon, presbytère, vestige de calvaire, saint Pierre.
Dinéault,calvaire (1648 et 1650), A. LE BUILLER, L. GARO,fabriciens. Crucifix, Christ aux liens.
Dirinon, calvaire de la Croix-Rouge, Jean/saint Roch ; crucifix, Vierge/Sébastien
Douarnenez, calvaire de la chapelle Saint-Vendal (1655), GAVRANT, recteur de Pouldregat, I. LE BIAN. Vierge/Corentin ; crucifix ; Vierge à l'enfant/Jean ; évêque
Douarnenez-Tréboul, vestige de calvaire, Jean/Corentin, Vierge/Nicolas
Esquibien : calvaire de Landrevet Jean/ saint indéterminé ; crucifix /Vierge à l'Enfant ; Pierre/Vierge
Le Folgoët, croix du Champ de Foire. Crucifix
Guiclan, croix de Kerizamel
Guiclan, calvaire de Kerlaviou (1622)
Guiclan, calvaire de Pen-ar-Feuteun (1642), [Jean/Yves par Yan Larhantec 1889] ; crucifix ; Vierge/Catherine.
Hanvec : croix de la forêt du Cranou (1627), vestige. Il appartenait à la chapelle Saint-Conval mais il ne subsiste que le fût portant l'inscription : « R. Dore : ma : faict : 1627 ».
Hanvec, Croas-ar-Huré (1621-1622) M. MICHEL, P. BRIS CVRE. Crucifix, écu au calice, anges à phylactères.
Hanvec, calvaire de Quillafel (1638), NICOLAS JACQUES, prêtre
Hanvec, croix de Lanvoy ; seul le crucifix /Vierge à l'enfant est de Roland Doré
L'Hôpital-Camfrout, Croix du Run (1627), Crucifix/Vierge à l'Enfant
L'Hôpital-Camfrout, Calvaire du Troan, vestiges : anges au calice
Irvillac : calvaire (1644) avec deux bras courbes situé devant la chapelle Notre-Dame-de-Lorette au lieu-dit Coatnan. Larrons, Vierge/Yves ; Jean/Pierre
Irvillac, calvaire de Clénunan (1640), Messire Jean LIDOU.
Irvillac, calvaire (1628) de la chapelle de Locmélar : Jean/Pierre ; Vierge/évêque
Kersaint-Plabennec, calvaire de Laven , crucifix. (En complément du travail du maître de Plougastel qui a réalisé les couples Vierge/Yves ; Jean/Etienne).
Lampaul-Guimiliau, calvaire (1621) de Cosquer-Bihan dit Croaz-Kernevez : crucifix/Vierge à l'enfant.
Lampaul-Guimiliau, calvaire de Kerjaffrès (1626), Mathieu LIVINEC fabricien, Y. KERBRAT, fabricien
Lannilis, calvaire de Kerosven. Vierge ; crucifix/Jean-Baptiste, Jean
Lantic, calvaire de l'église Notre-Dame-de-la-Cour. Crucifix/Vierge à l'enfant. Armoiries des Rosmadec et Gouarlot.
Loc-Éguiner-Saint-Thégonnec, calvaire du cimetière , crucifix (en complément du travail du Maître de Plougastel :Vierge/sainte Femme Pietà/Madeleine ;
Logonna-Daoulas, Croix de Cléménéhy (?), SALOMON PIERRES DE PORS AN . Crucifix/Vierge à l'enfant.
Logonna-Daoulas, calvaire de Rulivet. Crucifix. [Saint Nicodème sur le fût, saint Jean, blason des Rosmorduc, hors atelier.]
Loqueffret, calvaire de Bilirit (1625), Y. et Louis BELERIT, fraires. Crucifix/Vierge à l'Enfant ; [et Yves ; Geneviève ; Edern, hors atelier].
La Martyre, vestige (fût) du calvaire de Kerlavarec (?), Béatrice CABOUN.
Penmarc'h, croix de Lescors (1618), crucifix.
Plabennec, calvaire de Scaven, crucifix.
Pleyber-Christ, calvaire de Kervern (1647), Yvon INISAN et Marie MADEC. Vierge/Marguerite
Plogonnec : calvaire (1644) de la chapelle Saint-Pierre. Vierge/Paul ; Jean/Pierre
Plogonnec: calvaire (1641) de la chapelle Seznec, Guillaume TOULGUENGAT, recteur de 1624 à 1642, René SEZNEC, recteur de 1643 à 1697.
Plomodiern calvaire de la chapelle Sainte-Marie-du Ménez-Hom, tête de la Vierge de la Pietà et Vierge à l'Enfant, tout le reste étant hors atelier.
Plonévez-Porzay : calvaire de la chapelle Sainte-Anne-la-Palud [1630-1656], Guillaume VERGOZ, recteur de 1630 à 1656, lucas BERNARD, fabricien ?. Vierge/Pierre, Crucifix/Pietà ; Jean/Jacques
Ploubazlanec, calvaire de l'ancienne chapelle de Loguivy-de-la-Mer. Vierge et Jean
Ploudiry, calvaire (1633) de l'église : Crucifix et Marie-Madeleine
Plougastel-Daoulas, Le Passage, calvaire (1622), Jean GUIGORUS, fabricien. François d'Assise/Vierge ; crucifix/Pietà ; évêque/Jean.
Plougastel-Daoulas, calvaire (v.1630) de la chapelle Saint-Claude. Vierge/Yves, Pietà ; Jean/Pierre
Plougastel-Daoulas, calvaire (1654) de la chapelle Saint-Guénolé. Vierge/Guénolé, crucifix/Vierge à l'Enfant ; Jean/Pierre
Plougastel-Daoulas, calvaire (1639) du Tinduff : Le Seac'h p. 228. n. 78 et 79.
Ploumilliau (22), calvaire (1622) de Coz-Douar. Crucifix/Vierge à l'Enfant.
Plounéour-Ménez : le calvaire (1641) de l'église . Vierge/Pierre et Jean/Paul.
Plounéour-Ménez : croix de Kersimonnet. Vierge à l'Enfant
Plourin-les-Morlaix ? Vestiges d'un calvaire sur le mur de l'enclos
Port-Launay, calvaire (1651) de Lanvaïdic. Crucifix, culots vides.
Poullan-sur-Mer, calvaire (1640) de Kervignac vestiges
La Roche-Maurice, croix (1625) de Penmarc'h. Crucifix, macles des Rohan.
Rosnoën : calvaire (1648) de l'église Pierre/évêque ; Crucifix/Vierge à l'Enfant (hors atelier) ; Paul/évêque
Saint-Nic, calvaire de la chapelle Saint-Côme : crucifix.
Saint-Nic, calvaire de l'église Vierge/diacre ?; Crucifix ; Jean/diacre ?
Saint-Renan, croix de Quillimerrien ( ?), ADENOR AR COR et IVET AR COR, Vierge
Saint-Sauveur : croix de Kerbouzard Crucifix.
Saint-Ségal, calvaire du bourg : Vierge, Marie-Madeleine et Jean sur le socle
Saint-Servais, calvaire de l'église. Crucifix/Christ aux liens.
Saint-Servais, croix (1640) de Bréties dite Croas-Vossoc. Crucifix.
Saint-Thégonnec, grand calvaire de l'enclos paroissial ; Christ aux outrages
Saint-Thégonnec, calvaire de Bodéniry (1632), Anna BREST et Jean GUILLERM. Vierge/François d'Assise ; Jean/Yves
Saint-Thégonnec, croix du Broustou (1662); Crucifix
Saint-Thégonnec, croix de Coslen. Crucifix/Saint Joseph et l'Enfant
Saint-Thégonnec, croix de Hellin, 1638, Crucifix / Vierge à l'Enfant écu sur le nœud lion et calice
Saint-Thégonnec, croix (1629) de Pennalan. Crucifix/Vierge , écu au calice et M.H.C.P.
Saint-Thégonnec, croix du Keff, Vierge à l'Enfant de la niche.
Saint-Thégonnec, croix (1647) de Pennavern. Crucifix/Vierge à l'Enfant, écu avec fasces des Chastel en alliance avec des armoiries indéterminées.
Saint-Urbain : calvaire du Quinquis. Crucifix
Senven-Léhart : calvaire près de l'église Notre-Dame de Senven. Une douzaine de personnages.
Trézilidé, calvaire de l'église. Bon Larron, Pierre, Pietà, Mauvais Larron.
Roland Doré a sculpté uniquement dans le kersanton. Son style dépouillé, facilement reconnaissable et proche de l'épure, a contribué à établir sa réputation. Il se distingue par sin souci de replacer la réalité des formes dans l'espace en allant à l'essentiel. Sa virtuosité à sculpter les visages doux de ses Vierges ou à donner un tempérament à ses œuvres profanes en fait un sculpteur d'exception. Il a débuté comme compagnon dans l'atelier du Maître de Plougastel (1585-1617) puis a entrepris une carrière prolifique à Landerneau.
— Le Christ :
Les représentations du Crucifié sont caractérisés par des corps allongés, aux longs bras noueux et aux torses presque rectangulaires avec les muscles de l'abdomen en forme de poire. Les veines du cou sont saillantes. Les Christ penchent la tête du coté droit, les yeux clos. Leurs pagnes plats sont noués sur le coté gauche. Les visages sont presque émaciés, les joues creuses mangées par une barbe et une moustache aux mèches fines. Les crucifix courts dont le canon est à cinq têtes se différencient des crucifix longs à sept têtes (Y-P. Castel).
La couronne d'épines est caractéristique, aux deux brins entrelacés en forme de carré
— Les Vierges à l'Enfant : elles portent leur enfant sur le bras gauche, la main droite tenant une pomme. Elles ont le visage poupin , les yeux en amande au sillon palpébral bien dessiné. et arborent le fin sourire « doréen ».
— Les personnages de Roland Doré se reconnaissent aussi à leurs yeux aux iris creusés.
— Saint Jean accompagne la Vierge sur les croix et calvaires. Sa gestuelle varie peu : les deux mains posées sur la poitrine, (Seznec à Plogonnec, N.D de Kerluan à Châteaulin, Commana, Saint-Nicodème à Ploéven (1637), Tinduff à Plougastel, Saint-Vendal à Douarnenez) ou simplement une seule main, l'autre étant cachée sous sa tunique (Sainte-Anne-la-Palud à Plonévez-Porzay). Plus rarement, il serre le pan de sa tunique et appuie un livre fermé contre sa poitrine (Coatnan à Irvillac) . Parfois il joint les mains, les doigts entrelacés (Plogonnec) ou il tient un livre dans le creux formé par sa main gauche (Cast, 1660). Sa physionomie est partout similaire. Le seul changement appréciable se voit dans sa chevelure lisse (Seznec ou Saint-Pierre à Plogonnec, Commana, Tinduff à Plougastel, à l'ouest de l'église de Plounéour-Ménez en 1641) ou bouclée (Saint-Nicodème à Ploéven en 1637, Coatnan à Irvillac en 1644, Saint-Vendal à Douarnenez (1655) , Sainte-Anne-la-Palud à Ploénevz-Porzay, Saint-Nic, Cast) comme sur les gisants mais d'une manière aléatoire sans que l'on puisse repérer une évolution chronologique.
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SOURCES ET LIENS.
— ABGRALL (Jean-Marie), 1905, Notice sur Cast, Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie du diocèse de Quimper.
"Dans le cimetière, une croix ou calvaire dont le croisillon porte la Ste Vierge et St Jean avec 2 autres statues adossées, au pied, une N.D. de Piété, et sur les 2 côtés du socle, on lit ces inscriptions, "N : G : H : GLINEC : R - A. ROGNANT : F : 1660"."
— CASTEL (Yves-Pascal), 1980, Atlas des croix et calvaires du Finistère. Photo Gilbert Lemoigne.
194. Cast no 1, église, k. g. 7 m. 1660. Atelier Doré. Base octogonale à trois niveaux, moulures.
Socle octogonal à large chanfrein: M: G-G: IC GLINEC R. IAC: CROISSANT F 1660.
Groupe de N.-D. de Pitié. Fût à pans. Croisillon à culots feuillagés, portant inscriptions: M: L(?) GLINEC RETR DE CAST. M R CARCHEC (?), au revers.. JACOB CROISS- - - A,
statues géminées: Madeleine-Vierge, saint au livre-Jean l’Evangéliste.
Croix à branches rondes, fleurons-boules, crucifix, un ange au dessus. [YPC 1980]
198. Cast no 5, vers 1630. Vestiges divers. Crucifix mutilé (jardin du presbytère). Vierge à l’Enfant (église). Saint Luc, évangéliste (église). Atelier de Roland Doré. [YPC 1980]
— CASTEL (Yves-Pascal), 1983, La floraison des croix et calvaires dans le Léon sous l'influence de Mgr Roland de Neufville (1562-1613), Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1983 90-2 pp. 311-319
— CASTEL (Yves-Pascal), 1985, Roland Doré, sculpteur du roi en Bretagne et architecte (première moitié du XVIIè siècle) , Bulletin de la Société archéologique du Finistère, Pages 97 à 156.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1996, Du nouveau sur Roland Doré
EGLISE SAINT-JEROME (C.) Calvaire du placitre, oeuvre de Roland Doré (C.). Statues géminées sur le croisillon ; Pietà et un saint abbé (Gildas ?) au pied du fût ; sur le socle, inscription : "P.O. 1660", - "M. G. LE. GLINEC. R/A. ROGNANT. F. 1660", - et, sur le croisillon : "M. G. GLINEC. RECTEVR/DE CAST. M. R. CARIOV. C".
— COUFFON, René, 1961, L'évolution de la statuaire en Bretagne après la guerre de succession du Duché - In: Mémoires. Société d'Emulation des Côtes-du-Nord vol. 97 (1961) p. 1-16
— DANIEL, (Françoise), 1988, Roland Doré et les enclos paroissiaux : [exposition, Morlaix, Musée des Jacobins, juillet 1988] / [exposition conçue et réalisée par Françoise Daniel] Jacobins, juillet 1988] 1 vol. (56 p.) : ill. en noir et en coul., couv. ill. en coul. ; 30 cm
— DILASSER ( Maurice), 1979, Un pays de Cornouaille: Locronan et sa région .
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne. Les ateliers du XVe au XVIe siècle. Presses Universitaires de Rennes.page 211 et
:
1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
"Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)