Le calvaire monumental de Pleyben fait la réputation de cet enclos paroissial. Il appartient aux sept calvaires monumentaux de Bretagne, avec par exemple celui de Plougastel sculpté par le Maître de Plougastel vers 1602. Celui de Plougonven a été sculpté en 1554 par Bastien et Henry Prigent "en l'honneur de Dieu et Notre Dame de Pitié et monseigneur saint Yves).
Ils commencèrent en 1555 celui de Pleyben "en l'honneur de Dieu et Notre Dame et Monsieur Saint-Germain". À Pleyben, la mention "Notre-Dame de Pitié" n'est pas explicitement développée, sa présence de cette précision à Plougonven indique l'importance du culte rendu à la Vierge de douleur tenant dans ses bras le corps de son Fils après sa déposition de la Croix. Sa statue est, à Plougonven, au pied de la croix centrale, c'est un déploration à quatre personnages, et la Vierge est représentée par Bastien Prigent avec les trois larmes caractéristiques sous la paupière inférieure. On sait que son atelier très productif taillé et sculptait la pierre de Kersanton (kersantite) extrait de la rade de Brest en leur atelier de Landerneau.
À Pleyben, l'importance de la Vierge de Pitié est réelle, puisque deux autres statues de la Vierge de Pitié, dont l'une en larmes, sont placées sur l'arc de triomphe ou porte monumentale du côté ouest, daté de 1725. Mais la Vierge de Pitié du calvaire n'est pas due aux Prigent, et il a été réalisé en 1738. En effet, de 1738 à 1743, le calvaire a été déplacé vers le sud-ouest sous le rectorat de Julien Le Bornic : sur les contrefort sont inscrits les noms du prêtre et des fabriciens des années correspondantes.
Notamment, sur le contrefort nord-ouest, sous la Pietà, l'inscription qui amène E. Le Seac'h à la dater de 1738 : H.I. LE BORGNE 1738 H.I.B. LE MOULIN F[abricien] 1739.
On lit sur les autres contreforts H.G. POSTEC. F. 1740, H.M, H.N FRABOLOT . 1741, et, , H.H. BAVT. F 1742.
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N.B : le calvaire des Prigent était-il dépourvu de Vierge de Pitié ou de Déploration ? Cela semble surprenant. Le groupe sculpté par les Prigent a-t-il été placé sur l'arc de triomphe de 1725, ce qui aurait conduit les restaurateurs de 1738 à en sculpter un nouveau? Ce qui est sûr, c'est que le dais de la niche est de la main des Prigent.
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Le soubassement (ou "mace") en granite du calvaire de Pleyben a la forme d'un tétrapyle, soit quatre portes cintrées, comme autant d'arches de triomphe appuyées sur de solides contreforts. Les scènes de la Vie de la Vierge (Annonciation, Visitation) de la vie de Jésus (Nativité, Mages, Fuite en Egypte etc.) et de sa Passion y occupent soit sur les bords verticaux du soubassement, soit sur la plate-forme, sans souci de l'ordre chronologique du récit. C'est sur le contrefort nord-ouest qu'est placée la Vierge de Pitié, et la couleur gris sombre du kersanton contraste agréablement avec la teinte jaune du granite.
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L'un des intérêts remarquables de cette sculpture est qu'elle est placée sous un dais, également de kersanton. Celui-ci est parfaitement représentatif du style et des habitudes de l'atelier Prigent, et, par ses trois personnages, de leur sensibilité aux apports de la Renaissance.
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1. La Vierge de Pitié de 1738.
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Sa composition, la position en diagonale du Christ, celle de ses bras, la façon dont la Vierge soutient la tête de son Fils, le voile ou la guimpe de la Mère sont assez proche de la Vierge de Pitié du côté ouest de l'arc de triomphe, et l'artiste du XVIIIe siècle s'en est sans doute inspiré, sans toutefois reproduire les fameuses trois larmes qui restent ainsi une sorte de signature des Prigent. Le kersanton est d'un beau faciès, à grain fin et lisse. Le visage est idéalisé, dégagé de cette mise en scène de la douleur, et du sang versé par le Rédempteur. De même, les plaies des mains et des pieds ne sont pas représentées.
Mais les auteurs officiels et patentés (Le Seac'h en particulier) n'ayant pas étudié les pietà de l'arc triomphal, et mon attribution de la Vierge de Pitié ouest aux Prigent restant de l'ordre de l'hypothèse, cette comparaison entre la sculpture du XVIe siècle et celle du XVIIIe, reflet des spiritualités contemporaines, n'est développé ici que sur la pointe des pieds...
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La Vierge de Pitié (1738) et le dais (Prigent, 1555) du calvaire de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2022.
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En comparaison, la Vierge de Pitié de l'arc triomphal :
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Vierge de Pitié (kersanton, XVIe siècle ?) du cotè ouest de la porte ouest de l'enclos. Photo lavieb-aile.
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La Vierge de Pitié (1738) et le dais (Prigent, 1555) du calvaire de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2022.
La Vierge de Pitié (1738) et le dais (Prigent, 1555) du calvaire de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2022.
La Vierge de Pitié (1738) et le dais (Prigent, 1555) du calvaire de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2022.
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LE DAIS (Kersantite, Bastien Prigent, 1555).
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Le tambour à niches de ce dais est orné de trois bustes dont les regards convergent vers la Vierge.
Au centre, un buste masculin, barbu, coiffé d'un bonnet à plume, et vêtu d'une cape, a la tête légèrement inclinée vers sa gauche.
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À sa droite, une femme dont l'élégance est extraordinaire, avec sa coiffe laissant s'échapper quelques mèches, ses pommettes saillantes et son petit menton, le ruban qui entoure son cou, et sa robe à décolleté carré.
À sa gauche, une autre femme est plus jeune, c'est peut-être la fille du couple. Sa tenue est plus simple, mais sa coiffe est néanmoins recherchée, formant sur le côté des volutes.
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On notera aussi les contreforts sculptés de losanges fleuris, les rosaces des écoinçons, mais surtout, au dessus et au dessous, les rubans noués entre eux au centre par un anneau, et que crachent, à droite et à gauche, des mascarons. C'est un véritable plaisir de retrouver ici toutes ces façons de faire, répétées d'œuvre en œuvre, des Prigent, que ce soit sur les dais des apôtres de leurs porches, sur les dais de bénitier de La Roche-Maurice, Landivisiau et de Saint-Houardon à Landerneau, voire sur l'enfeu de La Martyre.
L'homme au bonnet à plume est constant sur le tambour des dais des bénitiers.
1477. Pleyben,enclos no 2, grand calvaire, g. k. 7 m. 1555, 1742. Par l’atelier des frères Henry et Bastien Prigent, auteurs du calvaire de Plougonven (1550) et par Ozanne (1650). Grand massif architecturé, arcades, avec contreforts: IA.I. LE BORGNE 1738/H.I.B.LE. MOVLIN. F. 1739/H.G. POS 1740. H.M./H.H. BAVT. R. 1742. Massif postérieur aux groupes qui, la plupart, datent de 1550, selon l’inscription de la statue de saint Germain au porche de l’église: EN L’HONNEUR DE DIEV ET (NOTRE) DAE ET MONSIEUR S GERMAIN CESTE CROIX FVST COMECE 1555. Les groupes se suivent sur la frise basse, de gauche à droite, de manière chronologique: Annonciation, Visitation, Nativité, Adoration des Mages, Fuite en Egypte, Jésus au milieu des Docteurs, Entrée à Jérusalem: OSANNA FILII DAVID. Cène: FAIST A BREST PAR M I V OZANNE ARCHETECTE. Lavement des pieds: TV MIHI LAVAS PEDES 1650, Marché de Juda, Agonie, Arrestation, Jésus emmené, Jugement de Pilate, Christ aux outrages, Repentir de Pierre, Flagellation, Couronnement d’épines. La séquence est interrompue par une Vierge de Pitié. La série des groupes supérieurs commence à l’opposé de l’Annonciation et va dans le sens inverse, de droite à gauche: Pilate se lave les mains, Jésus conduit au supplice, Portement de croix, Soldats au calvaire, Crucifixion, Mise au tombeau, Descente aux enfers et Résurrection. Sur les contreforts, se mariant avec la scène des trois croix, cavalier et personnage au phylactère: TOLLE TOLLE CRVCIFIGE EVM. Les larrons portent leurs noms GISMAS et DISMAS, le premier en caractères gothiques, le second en capitales romaines, différence que l’on constate dans les inscriptions de Plougonven; leurs âmes sont emportées par un ange et par un démon. Fût central orné d’écots. Croisillon, culots feuillagés, statues: Vierge, Jean. Croix, branches rondes, écot, fleurons-boules, crucifix, anges aux calices. Un ange au sommet prend l’âme de Jésus, au revers, Christ ressuscité. [YPC 1980]
— CASTEL (Yves-Pascal), 2001, Les Pietà du Finistère.( Revue bilingue breton-français Minihy-Levenez n°69 de juillet-août 2001)
— COUFFON (René), LE BARS (Alfred), 1988, Notice de Pleyben, Diocèse de Quimper et de Léon, nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, Association diocésaine, 1988, 551 p.
—— COUFFON R., 1961, "L'évolution de la statuaire en kersanton" Mémoires de la Société d'émulation des Côtes-du-Nord, Saint-Brieuc t. LXXXIX, 1961 p. 1-45.
À l'entrée ouest de l'enclos paroissial, à gauche de l'ossuaire, l'arc de triomphe ou "porte triomphale" est une porte monumentale datée de 1725. Elle est surnommée en breton porz ar maro "porte de la mort" car c'est par elle que pénétrait le cortège funéraire, pour accéder au cimetière : elle s'intègre au mur de l'enclos entourant le cimetière.
L'arc monumental est en plein cintre surmontée d'un fronton courbe avec une niche sur chacune de ses faces. Sur la face est, on peut admirer une Vierge de Pitié ou Pietà encadrée de deux anges, et sur la face ouest, une sainte Trinité dont la colombe du saint Esprit a disparu (plus exactement, elle se retrouve de l'autre côté, indice précieux de la recomposition).
L'arc est surmonté d´une croix qui présente sur sa face est, un Christ en croix, et sur sa face ouest, une Vierge de Pitié.
Cet arc Triomphal" porte une inscription datée : "Nouel Favennec Fabrique 1725". Mais la date indiquée est celle d'une reconstruction, ou d'une recomposition, incluant des éléments du XVIe siècle, ce qui explique la présence de deux Pietà sur le même édifice. On rapprochera cette date de celle de la restauration de l'ossuaire ou chapelle funéraire en 1733.
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Si l'objet principal de mon article est l'étude comparative de ces Vierges de Pitié avec celles des sculpteurs de kersanton de Landerneau, l'examen des autres éléments sculptés réserve de passionnantes surprises.
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I. LA PORTE MONUMENTALE, CÔTÉ OUEST, VUE DE L'EXTERIEUR. LA VIERGE DE PITIÉ AUX TROIS LARMES.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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L'inscription de 1725.
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Je lis :
H : NO/VEL-FAVENN
EC. FAB/RIQVE 1725 (avec une hésitation avec 1705)
Soit : "Honorable Nouel Favennec, fabrique (fabricien) pour l'année 1725".
Il s'agit vraisemblablement de Noël FAVENNEC, né le 7 juillet 1668 à Kermenguy, Pleyben (le prénom de l'acte de baptême est "Nouel"), fils de , et décédé le 8 décembre 1735 à l'âge de 67 ans.
Kermenguy (graphie de la carte de Cassini à la fin de l'Ancien Régime) devient Kerminguy sur la carte d'Etat-Major puis aujourd'hui Kervingui, à 1 km au nord du bourg. Il est amusant de constater que la carte Maps indique pour ce lieu "Favennec Sabrina, fermé temporairement."
Noël Favennec est le fils de Guillaume (1642-1714) et de Marie Goff (1643-1696). Il a comme parrain son oncle le prêtre Nouel Favennec, décédé en 1716 . Il épousa Marie GUILLOU en 1685. Leur fils Germain est né en 1703.
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Il appartient à une famille dont les membres sont très souvent cités sur les inscriptions de Pleyben, soit comme fabriciens, soit comme prêtres (Hierosme Le Favennec en 1595, Nouel Favennec entre 1695 et 1724), soit comme architectes et maçons ( maîtres François et son frère Germain Favennec, tous deux de Pleyben en 1718, reconstruisirent le croisillon sud du transept , puis Paul), soit comme habitants. Un François Favennec demeurait à Lelesguen. Le nom de la famille FAVENNEC apparaît souvent dans les inscriptions lapidaires de l'église ( l'inscription du pignon Sud énonce "JAN FAVENNEC GRAND FABRICE 1718") et de la chapelle Saint-Laurent ("FAIT FAIRE PAR I. FAVENNEC F[abricien]. 1731."). En 1694, la partie haute du clocher de l'église, frappée par la foudre s'écroula sur le croisillon sud, qui fut reconstruit par François et Germain Favennec.
Le calvaire du XVIe siècle de Garsaliou (Atlas n° 1465) porte une inscription avec le nom FAVENNEC, et un écu au calice identifiant ici un prêtre .
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Note : remarquez la colombe du Saint-Esprit de la clef de voûte de la porte. Elle n'a ici aucun sens, mais provient vraisemblablement de la Trinité souffrante de la niche intérieur. L'Arc actuel a dû succéder à un arc d'entrée antérieur dont les éléments ont été réemployés.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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Le buste d'ange (kersanton, v.1725 ?)
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Il répond à une tête ailée identique du côté intérieur, et il est semblable à de nombreux autres angelots de l'église. Il une chevelure très abondamment frisée, et un amict à deux replis au dessus d'une collerette. Les pupilles sont creusées (comme le fait aussi Roland Doré)
Une analyse pétrographique des différents faciès de kersantite permettrait peut-être de remettre de l'ordre dans ce puzzle.
Ma proposition de datation tient compte du fait qu'un ange identique se retrouve, non seulement sur le côté est de cette porte, mais aussi sur la sacristie (1680-1690).
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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La Vierge de Pitié du côté ouest. Prigent ?, kersantite, XVIe siècle.
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Elle occupe une niche à coquille pas parfaitement adaptée à son volume.
Elle est assise et tient le corps de son Fils sur ses genoux et soutient la tête de la main droite et le bras gauche de la main gauche. Les jambes du Christ se croisent; une jambe a été refaite.
Comme c'est très souvent le cas, le corps forme une diagonale et le bras droit, vertical, contraste avec le bras gauche horizontal.
Le corps de Marie est droit, hiératique, et ses traits sont figés.
Le détail émouvant est de retrouver ici les trois larmes si souvent rencontrées dans les Pietà de Bastien et Henri Prigent. Ces sculpteurs de Landerneau réalisèrent en kersanton le calvaire monumental en 1555, ainsi que la statue de saint Germain, et les deux personnages de l'Annonciation du porche sud. À la chapelle Saint-Laurent de Pleyben, ils sont l'auteur du calvaire (avec les trois larmes sous les paupières de Marie et de Jean).
Un autre élément stylistique des Prigent est le voile épais formant des plis cassés au dessus et autour du visage.
Néanmoins, dans son catalogue raisonné des sculpteurs sur pierre de Basse-Bretagne, E. Le Seac'h ne s'est pas prononcée sur l'attribution de ces deux Vierges de Pitié de l'arc triomphal, qu'elle ne mentionne pas.
La kersantite est d'un faciès assez médiocre, gris clair, de grain fin mais ponctué d'éléments minéraux altérés qui laissent par leur départ une miliaire de trous. Cela se retrouve sur la Trinité souffrance de la niche opposée.
Un deuxième article présentera la Vierge de Pitié sculptée par les Prigent pour le calvaire monumental.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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II. LA PORTE MONUMENTALE VUE DE L'EXTERIEUR : LE CALVAIRE. SAINT SEBASTIEN (?) ET SAINT GERMAIN-L'AUXERROIS.
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Au dessus du fronton, un calvaire d'1,20 m de haut, daté du XVe siècle par Yves-Pascal Castel, a été placé ici par ré-emploi. La Vierge et Jean, placé de profil, sont agenouillés au pied de la croix.
Les deux personnages appartiennent au même bloc de kersanton, tout comme la Vierge de Pitié de l'Est et les deux saints des côtés.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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Saint Sébastien.
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Le saint protecteur de la peste était particulièrement honoré à Pleyben, puisqu'il figure, sous saint Laurent, sur la bordure gauche de la chape de la statue de Saint Germain placée au dessus du porche sud.
On le reconnait à sa posture, les bras noués dans le dos à une colonne, à son pagne, à sa carrure athlétique, mais ici, aucune flèche, — ou aucun orifice de flèche— n'est visible. Son pied droit est, curieusement, posé sur une sphère, tandis qu'une tête joufflue voisine son pied gauche.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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Saint Germain l'Auxerrois.
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C'est du moins un saint évêque, mitré, bénissant et tenant la crosse, qu'on assimile de manière logique au saint patron de l'église. Les chaussures (ou pantoufles) sont à bout pointues.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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III. LA PORTE MONUMENTALE VUE DE L'INTÉRIEUR : LE TRÔNE DE GRÂCE DU FRONTON.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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Le buste d'ange identique à celui du côté ouest.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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Le Trône de grâce (ou Trinité souffrante).
On désigne ainsi la représentation de Dieu le Père assis sur une cathèdre et tenant entre ses genoux son Fils crucifié. Il manque ici la colombe (parfois sculptée entre la bouche du Père et la tête du Fils). Mais nous l'avons vue sur le côté ouest.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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III. LA PORTE MONUMENTALE VUE DE L'INTÉRIEUR : LA VIERGE DE PITIÉ DU CALVAIRE, ET SES ANGES DE TENDRESSE.
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La Vierge assise est encadrée par deux anges debout, de trois quart, dont l'un soutient la tête du Christ tandis que l'autre pose tendrement la main sur son genou.
Ces anges entourant la Vierge de Pitié trouvent leur origine dans les quatorze pietà du Maître du calvaire de Tronoën (Saint-Jean-Trolimon, en Cornouaille) vers 1470. Sur ce calvaire, deux anges aptères soulèvent le voile de Marie dans un geste de tendresse qui a conduit Emmanuelle Le Seac'h à les qualifier d'anges de douceur. Ces 14 pietà du XVe siècle sont en granite.
Sept autres Pietà également recensées par Le Seac'h reprennent ce motif des anges autour de la Vierge et du Fils, cette fois-ci au XVIe siècle. Cinq se trouvent en Finistère, et j'ai décrit dans ce blog celle de la chapelle Saint-Herbot en Plonévez-du-Faou (en calcaire polychrome), ou celle de l'église Saint-Sauveur du Faou (à 3 anges et en granite polychrome). Aucune des sept n'est en kersanton.
L'inventaire de ces anges apportant leur aide et leur tendresse à la scène de la Vierge de Pitié n'est pas clos ; on peut citer ainsi le calvaire de Plovan, non loin de Saint-Jean-Trolimon. (Atlas Plovan 2449), et sa Pietà de kersanton.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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Un gros plan permet de s'assurer de l'absence de larmes sur ce visage.
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Arc de triomphe ouest de l'enclos de Pleyben. Photographie lavieb-aile.
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Note.
L'Atlas des croix et calvaires du Finistère signale également une autre Vierge de Pitié sur la commune de Pleyben, sur le calvaire de Le Drevers, datant du XVIè siècle (atlas n°1463).
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SOURCES ET LIENS.
— ABGRALL (Jean-Marie), 1904, L'Architecture bretonne, Quimper, de Kerangal éditeur
" A quelque distance de cet ossuaire, une porte monumentale ou une sorte d'arc-de-triomphe formait l'entrée du cimetière. Sur la face Ouest, une niche abrite la statue de N.-D. de Pitié, et le fronton courbe qui en forme le couronnement est surmonté d'un Christ en croix accosté des statues de la Sainte-Vierge et de saint Jean. Une inscription donne la date de ce petit monument : NOVEL. FA VENNEC. FABRIQVE. 1725."
—ABGRALL (Jean-Marie), et Le Coz Y., 1908 “Pleyben : église, ossuaire, calvaire,” A. de Kerangal, Quimper, 31 pages
"1476. Pleyben, enclos no 1, sur la porte de l’ouest. k. 1,20 m. XVè s. Croix à fleurons carrés, crucifix, Vierge et Jean agenouillés au pied de la croix. Au revers, groupe de N.-D. de Pitié, sur les côtés, saint Germain et saint Sébastien."
— CASTEL (Yves-Pascal), 2001, Les Pietà du Finistère.( Revue bilingue breton-français Minihy-Levenez n°69 de juillet-août 2001)
— COUFFON (René), LE BARS (Alfred), 1988, Notice de Pleyben, Diocèse de Quimper et de Léon, nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, Association diocésaine, 1988, 551 p.
—— COUFFON R., 1961, "L'évolution de la statuaire en kersanton" Mémoires de la Société d'émulation des Côtes-du-Nord, Saint-Brieuc t. LXXXIX, 1961 p. 1-45.
"Arc de triomphe, dit "Porz-ar-Maro" : il porte l'inscription : "H. NOVEL. FAVENN/EC. FABRIQVE. 1725." Sur la face ouest du fronton cintré, dans une niche, statue en pierre d'une Pietà encadrée de deux anges aptères. Sur le sommet du fronton, groupe de la Crucifixion."
Dans la paroisse de Plougasnou, Saint-Jean-du-Doigt était un lieu de pèlerinage très renommé en raison de la possession depuis 1437 d'une relique de l'index de saint Jean-Baptiste. L'affluence était telle, notamment lors du grand Pardon de juin, qu'il fallut construire un oratoire, ouvert sur trois côtés et doté d'un autel, au haut du cimetière pour que les fidèles puissent assister à la messe.
La construction, décidée le 26 août 1576, fut confiée en 1577 à l'architecte Michel Le Borgne : elle se fit sous sa direction et celle de Pierre Guyader, en français Pierre Texier, l'un et l'autre qualifiés tailleurs de pierre. Elle fut terminée en 1577 quant à la maçonnerie de granite. La charpente et les sculptures furent alors confiées à Yvon Le Lavyec, qui en dressa le devis, et à Raoul Begyvin, ouvrier du pays.
À l'est, un oculus éclaire l'autel jadis orné des statues du sculpteur morlaisien Jacques Chrétien.
Les qualités architecturales de cet édifice Renaissance furent soulignées par de nombreux auteurs (cf. Sources et liens).
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Les sablières elles-mêmes, qui font le tour de l'oratoire sur ses quatre côtés, furent elles aussi décrites, mais de façon générale :
"Les fermes sont entretoisées par deux entraits engoulés et dissimulés par un lambris en berceau brisé, cloué sur quatre aisseliers dans la partie droite, six arêtiers au chevet, cinq du côté de l'entrée et une lierne centrale. Les sablières sculptées, qui font à l'intérieur le tour du monument, sont interrompues par des bustes saillants d'anges portant des écus ou les instruments de la Passion et sont traitées avec cette fantaisie si répandue dans le pays à cette époque." (De Kergrist 1896)
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"Les sablières sculptées, qui font à l'intérieur le tour du monument, sont interrompues par des bustes saillants d'anges portant des écus ou les instruments de la Passion et sont traitées avec cette fantaisie si répandue dans le pays à cette époque.
L'artiste a figuré au chevet des petits personnages arrachant la langue ou mordant la gueule de dragons, marchant sur la tête ; ailleurs, un ivrogne, des personnages allongés dans le sens de la poutre, dont l'un se tient le pied, un homme luttant avec un chien, deux autres se battant entre eux et, çà et là, des motifs décoratif, tels que monstres, chimères, « rencontres » d'animaux (bœuf, lion) dans des cartouches." (De La Barre de Nanteuil)
"A l'intérieur, petit autel en pierre, deux entraits à gueules de dragon et sablières sculptées à cinq blochets." (Couffon 1988)
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La description de Sophie Duhem, dans l'ouvrage de 1997 qui rend compte de sa thèse sur les sablières de Bretagne est plus détaillée :
"Les sablières de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt sont tout à fait intéressantes et uniques dans leur genre. L'ensemble présente des motifs isolés, dont des masques, des végétaux, et des cuirs alternant avec des saynètes sculptées à l'intérieur de médaillons. L'état de conservation rend malaisée l'identification des personnages : on reconnaît cependant Hercule qui étrangle le lion de Némée. (figure 116)(*)
(*) Curieusement, la photographie n° 116 page 184, où figure le médaillon qui débutera ma présentation côté sud, est légendée ainsi: « Plougasnou,. Oratoire. Anonyme, 1er quart XVIIe siècle. Décor de style renaissant. Samson et le lion. »
"Sans doute est-ce le héros qui apparaît sur la scène suivante, dans un combat à bras nus l'opposant à un autre personnage, peut-être Diomède, à moins qu'il s'agisse de Cacus, l'être monstrueux.
Ces images sont associées à des figures chrétiennes, notamment à Isaac et Abraham, et à Lucrèce étendue, le couteau planté dans la poitrine. Ce tableau est complété par l'image d'un personnage allongé dans une position lascive, que nous n'avons pas identifié.
Malgré la diversité des scènes et motifs sculptés, cet ensemble original présente un programme relativement élaboré, peu commun dans la décoration des charpentes. Mais comment interpréter les choix du sculpteur ? Doit-on considérer ces figures comme les représentations allégoriques des combats et sacrifices qui attendent le chrétien dont la foi est mise à l'épreuve, ou l'artisan s'est-il simplement contenté de recopier quelque modèle en sa possession, peut-être sur la demande du commanditaire ?" (S. Duhem p. 184-185)
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Enfin, le site Infobretagne propose 22 photographies des sculptures de la charpente par Roger Frey, soit un relevé presque exhaustif, mais sans description ou interprétations.
Je propose dans cet article un relevé complet des pièces de sablières de l'oratoire.
a) Je décrirai ces pièces les unes après les autres, mais je suis confronté au même embarras que Sophie Duhem pour décrire les sujets. Je serai même plus prudent dans mon interprétation, et je n'ai su reconnaître (les sculptures se sont peut-être dégradées en trente ans, et mes conditions d'éclairage étaient médiocres) ni Abraham, ni Isaac. Je découvre bien une femme allongée tenant un poignard, et l'hypothèse d'y voir Lucrèce est plausible. Je proposerai une hypothèse pour le "personnage allongé dans une position lascive".
Quand à l'interprétation des choix du sculpteur, je penche vers l'hypothèse que l'artisan, ou le commanditaire, a puisé dans un catalogue thématique : en effet, le recours à un tel catalogue est manifeste dans le choix du décor.
b) C'est l'examen du décor qui m'apparaît riche d'enseignement. En effet, il occupe une place majeure, bien plus importante en surface occupée que les sujets eux-mêmes, et il reprend tous les motifs ornementaux de la Renaissance, ce qui prouve que le sculpteur d'origine locale (Plougasnou ou Saint-Jean-du-Doigt) connaît parfaitement ce vocabulaire, soit par sa formation en France ou du moins en Bretagne, soit par les catalogues qui lui ont été fournis. Mais il le traite de façon originale, et avec une maîtrise très sûre.
On trouve ici en effet des médaillons, des masques crachant des végétaux, des rubans marqués de hachures en I, des entrelacs géométriques, des volutes, mais surtout, avec profusion, des cartouches à cuirs découpés à enroulement.
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Rappel : un cartouche est un cadre destiné à recevoir une inscription, des armoiries ou un motif. Il imite souvent un rouleau de papier déployé (une carte) aux bords encore enroulés. Il est en vogue en France dans les ornements ( boiserie, stucs) depuis la Grande Galerie de Fontainebleau.
Un cartouche à cuir découpés et enroulement imite, en Italie où il apparaît, une peau de tanneur dont les bords s'enroulent sur eux-mêmes, puis il s'enrichit de découpes périphériques géométriques ou en volutes, puis de découpes centrales, souvent traversées par des rubans qui semblent servir à les suspendre.
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Ces cartouches, sous forme de simples encarts rectangulaires à "poignées" latérales, apparaissent dans les sablières du Finistère réalisées par le Maître de la nef de Plomodiern (Sophie Duhem le nomme Jean Brélivet, tandis que je considère que c'est là le nom du fabricien) au milieu du XVIe siècle notamment à Plomodiern, Saint-Nic, Pont-Croix.
Mais les cartouches à cuir découpé à enroulement apparaissent plus tard dans les sablières de Basse-Bretagne, associés aux autres motifs Renaissance, dans les réalisations du Maître de Pleyben, à l'église de Pleyben vers 1571, à la chapelle Sainte-Marie-du-Ménez-Hom en Plomodiern en 1575, à Saint-Divy entre 1570 et 1580, et, avec splendeur, dans la chapelle seigneuriale du château de Kerjean à Saint-Vougay. On les retrouve aussi à Bodilis vers 1567-1576, à la chapelle Saint-Sébastien de Saint-Ségal, ou à Roscoff.
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Autrement dit, la présence de cartouches à cuir découpés à enroulement sur les sablières de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt, dans des formes très complexes plus élaborées encore qu'au château de Kerjean, incitent à envisager les liens et influences entre le charpentier-sculpteur local et l'équipe de charpentiers active à Kerjean, à 45 km au sud-ouest.
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Le sculpteur Raoul Begyvin.
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Les archives fournissent des renseignement précis sur les comptes du chantier de l'oratoire, et nous indiquent le nom du charpentier-sculpteur qui fut choisi par le charpentier Yvon Le Layec : Raoul BEGYVIN. Il faut rapprocher cette graphie de celle du nom BEGUIVIN, parfaitement attesté en Bretagne et tout particulièrement à Plougasnou et, plus tard, à Saint-Jean-du Doigt. (Geneanet). Nous pouvons donc être certain que cet artisan était local.
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Je place ici deux calques essayant de faire mieux visualiser les cartouches, leurs découpes et leurs enroulements. Mais il y a presque autant d'enroulement que de bigoudis sur une mise en plis des années 1950. Ou 60.
En rouge, le motif : qui ne prend pas vraiment toute la place.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt.
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt.
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Vue générale du côté est de l'oratoire.
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On voit la charpente partiellement lambrissée, l'un des entraits à engoulants, trois blochets (des anges dont l'un présente la couronne d'épine), et six pièces de sablières. Celle par laquelle je débute ma description est à l'extrême droite.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Je débute ma description par le milieu du côté sud, et je ferai le tour de l'oratoire jusqu'à mon retour au point de départ.
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Première pièce, côté sud.
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Avant de s'interroger sur le contenu du premier médaillon, nous pouvons constater l'importance données aux volutes dont les spires répondent aux enroulement des cartouches. Malgré l'usure, nous voyons le nombre des petits rouleaux ou cornets formés par les découpes du "cuir".
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Dans le médaillon, un personnage debout affronte un lion dressé sur ses pattes arrières, et dont l'arrière-train semble cerné par une ceinture. La tête du lion se confond avec celle du lutteur. On peut y voir Hercule et le lion de Némée, ou bien Samson tuant un lion à mains nues dans Juges, 14:6.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Dans cette scène, deux hommes luttent. L'un est à terre et repousse son adversaire en plaçant son pied dans l'entre-jambe. L'autre, qui domine pour l'instant, repousse du pied, jambe tendue, l'épaule de son petit camarade. On ne peut dire s'ils sont nus, je crois qu'un pied est chaussé.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Dans ce médaillon, ce sont peut-être des serpents qui s'enroulent en formant des huit. Ouroboros ??
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Malgré la virulente attaque des vrillettes, je devine, au centre, une tête dont le front est ceint d'un bandeau noué de chaque côté, et qui fait ensuite le tour du menton. C'est un thème extrêmement fréquent de l'ornementation Renaissance.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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L'angle sud-ouest.
Sur un départ de poutre d'angle, qui a été sciée, un entrelacs.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Ce médaillon est pour moi un vrai test de Rorschach : je ne me hasarde pas à rendre public mon interprétation.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Les cuirs découpés, encore et toujours, foisonnants, et tous différents.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Un visage peut-être au centre de ce très beau cartouche ?
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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L'angle nord-ouest.
Un nouveau poteau d'angle aux entrelacs, surmonté d'un ange.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Un personnage allongé.
Il est coiffé d'un bonnet, peut-être barbu, et vêtu d'une tunique, de hauts de chausses bouffants et plissés et de bas au dessus de bottines.
Il tient dans la main gauche un objet semblable à un maillet, dont le manche est de section carré.
Mon hypothèse, purement intuitive, est d'y voir un musicien. Il tiendrait dans la main droite un objet identique au "maillet". Et j'identifie la calebasse qui est entre ses jambes comme un tambour.
La position en forme rotation de ses pieds témoignerait de ses trémoussements rythmiques.
Et pourquoi pas ?
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt.
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Ensemble de cartouches aux trois lions.
Au centre, un masque de lion, encadré par deux lions de profil, gueule ouverte et langue tirée.
De tels masques sont présents sur les sablières du "Maître de Pleyben" (que je désigne, pour mon usage interne, comme "Maître de Kerjean")
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Quatre personnages : l'un est allongé, puis vient un enfant agenouillé mains jointes, puis un homme courant, le bras levé (tenant une arme), et enfin une femme allongée tenant un poignard pointé sur son ventre.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Lucrèce ? Admirez les cartouches !
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt.
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Femme (?) faisant le grand écart, et tenant dans ses mains écartées les extrémités des langues de deux dragons.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Deux blochets : anges tenant les instruments de la Passion (couronne d'épines et ?).
L'ange tenant la couronne est dans l'axe médian de l'oratoire. Les sablières qui l'encadrent, et qui dominent l'oculus éclairant l'autel, sont de thème profane faisant appel au bestiaire fantastique.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Masque de lion entre deux dragons.
Le lion tient un anneau dans la gueule.
Ces "dragons" au nez retroussé sont proches des "dauphins" Renaissance. Ils portent un collier.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Créature hybride tête en bas, crachant les queues de deux dragons ailés à tête anthropomorphe, et maintenant leur longue langue dans ses mains écartées.
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On peut comparer la créature hybride à un crapaud, et son épine dorsale est hérissée de nodosités. Elle était peut-être velue. Mais ses jambes aux pieds nus, ses bras sont presque humains, tandis que sa tête est vultueuse et bestiale.
Les dragons ailés ont le corps couvert d'écailles (coups de gouge en C et en I) et sont dotés d'un appendice en forme de feuille.
Bien que ces dragons n'ont pas leur équivalent ailleurs, ils reprennent les façons de faire des prédécesseurs, et notamment de l'atelier du Maître de la nef de Plomodiern".
Cette pièce est parfaitement représentative du courant qui, depuis l'introduction de l'art de la Renaissance en Bretagne, illustre par ses chimères et ses hybridations l'attachement pour les métamorphoses entre les règnes végétal, animal et humain par contamination réciproque et dissolution des frontières.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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Tête de bouc en masque au centre d'un cartouche à évidement carré.
On admirera la façon dont les éléments humain (le cartouche = artéfact), animal (la tête) et végétal (les appendices foliaires) s'intriquent. Ainsi des langues sortent de la gueule, se transforment en larges feuilles, mais ces feuilles sont marquées de I comme des rubans et s'enroulent en cornets : ils se sont transformés en cartouches. Par la découpure de ces rouleaux de cartouche s'échappe une tige à deux feuilles et un fruit, élément totalement végétal.
De même, le cartouche central est percé de trous bien carrés (excluant une origine naturelle), traversés par les tiges de feuilles ... qui pourraient évoquer des palmes emblématiques.
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Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
Les sablières (bois, Raoul Begyvin, 1578) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt. Photographie lavieb-aile octobre 2022 .
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CONCLUSION.
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Les éléments de charpente sculptés (engoulant, blochets et sablières) de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt ont un décor associant un encadrement Renaissance à médaillons et cuirs découpés à des personnages aujourd'hui trop énigmatiques pour qu'on puisse les interpréter (thème mythologique ? Biblique ?) et à des créatures hybrides et fantastiques.
Elles sont de première importance dans l'histoire de la sculpture de Basse-Bretagne au XVIe siècle, pour plusieurs raisons :
Par la connaissance précise de leur auteur, de la date et du contexte de leur commande.
Par les rapports qu'elles entretiennent avec les autres ensembles de sablières contemporaines, et en premier lieu avec celles du château de Kerjean, à peine antérieures, même si elles sont trop originales pour être attachées à un atelier extérieur.
Par la richesse extraordinaire de l'utilisation des cartouches à cuirs découpés, dont la première apparition en Finistère est peut-être le cartouche héraldique du château de Maillé, vers 1545.
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SOURCES ET LIENS.
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—COUFFON (René), Le Bars (Alfred), 1988, "Saint-Jean-du-Doit", Nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper.
Oratoire du cimetière (Couffon)
"Sa construction fut décidée par les paroissiens le 26 août 1576. Il fut exécuté par l'architecte Michel Le
Borgne en 1577 (millésime au-dessus de la porte). C'est un charmant édicule ouvert sur trois côtés permettant de célébrer la messe en plein air les jours d'affluence. Les petits piliers en gaine, posés sur un soubassement, soutiennent une toiture à quatre pans couronnée d'un clocheton. A l'intérieur, petit autel en pierre, deux entraits à gueules de dragon et sablières sculptées à cinq blochets."
— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne (XVe-XVIIe s.), Presses universitaires de Rennes, 1997 - 385 pages, pages 36,44, 72, 109, 184.
—KERGRIST (François de), 1896, L'église de Saint-Jean-du-Doigt (S.F.A. - C.A., 1896). -L'église de Saint-Jean-du-Doigt, histoire et description (Caen, 1899).
Oratoire. — Le cimetière renferme un monument dont l'histoire est élucidée grâce à M. de La Rogerie. C'est une petite chapelle ouverte sur trois côtés, qui permettait aussi de célébrer les offices en plein air les jours d'affluence tout en mettant le prêtre à l'abri des intempéries. Ce avantage expliquerait assez l'abandon et la destruction consécutive de la plate-forme de l'entrée.
Palustre pensait qu'on n'y disait la messe que le jour des morts. M. Le Guennec a justement conclu d'une appellation ancienne, « l'oratoire du sacre », qu'elle servait de reposoir le jour de la Fête-Dieu [Note : M. de la Rogerie a fait remarquer qu'à Plouzelambre, un oratoire du XVIIème siècle, analogue, quoique plus simple, est appelé le reposoir]. Il est probable qu'on l'utilisait, en outre, chaque fois qu'il était utile, et notamment les jours de pèlerinage.
L'honneur de la fondation en revient aux paroissiens, qui résolurent, le 26 août 1576, d'ériger un oratoire au bout « susain » du cimetière. Maître Michel Le Borgne, architecte, que nous retrouvons à la tour Saint-Mathieu de Morlaix, fit le « pourtraict et prothocole » de l'œuvre. La construction se fit sous la direction dudit Le Borgne et de Pierre Guyader, en français Pierre Texier, l'un et l'autre qualifiés tailleurs de pierre, et fut terminée en 1577 quant à la maçonnerie. Le granit employé provenait des carrières de l'île Grande et de Trevezvor.
La charpente et les sculptures furent alors confiées à Yvon Le Lavyec, qui en dressa le devis, et à Raoul Begyvin, ouvrier du pays.
La couverture, remplacée depuis, se fit d'un mélange habile de grosses ardoises de la région et d'ardoises fines d'Angleterre. Enfin maître Aubin Morin, pintier, couvrit le clocheton, « l’aiguillon » de lames de plomb, qui furent transportées par terre « à cause de la dorure ». Une cloche y fut pendue et une croix, avec une girouette en forme de croissant, en termina la pointe. Un peintre-verrier, nommé Salaun Geffroy, vitra l'oculus du chevet et Jacques Chrétien, statuaire à Morlaix, meubla l'oratoire de « deux imaiges » dorées de la Vierge et de saint Jean-Baptiste.
Les consoles qui supportaient ces statues, à droite et à gauche de l'autel de pierre, en conservent le souvenir. Le mur plein du chevet, auquel cet autel s'adosse, sous un oculus profilé en doucine, dessine un hémicycle. Les trois autres côtés rectilignes qui ferment le monument sont à jour et se composent d'un bahut mouluré où s'appuient les sept balustres en gaîne de section carrée qui supportent l'entablement aux quatre angles et au milieu de chaque face. Cette dernière particularité n'a pas permis à l'architecte de placer son entrée dans l'axe. Une simple interruption du soubassement à gauche du balustre central en tient lieu.
Au-dessus, un cartouche, portant la date de 1577, coupe la torsade le long de l'entablement qui supporte la charpente du toit pyramidal. Les fermes sont entretoisées par deux entraits engoulés et dissimulés par un lambris en berceau brisé, cloué sur quatre aisseliers dans la partie droite, six arêtiers au chevet, cinq du côté de l'entrée et une lierne centrale. Les sablières sculptées, qui font à l'intérieur le tour du monument, sont interrompues par des bustes saillants d'anges portant des écus ou les instruments de la Passion et sont traitées avec cette fantaisie si répandue dans le pays à cette époque.
L'artiste a figuré au chevet des petits personnages arrachant la langue ou mordant la gueule de dragons, marchant sur la tête ; ailleurs, un ivrogne, des personnages allongés dans le sens de la poutre, dont l'un se tient le pied, un homme luttant avec un chien, deux autres se battant entre eux et, çà et là, des motifs décoratif, tels que monstres, chimères, « rencontres » d'animaux (bœuf, lion) dans des cartouches.
A droite de l'autel se creuse une petite-piscine, flanquée de pilastres gaînés et amortie par deux doubles volutes affrontées."
— LA ROGERIE (H. Bourde de la), 1909 : L'église de Saint-Jean-du-Doigt (B.S.A.F., 1909).
_ Oratoire. Tous les écrivains qui ont étudié Saint-Jean du-Doigt ont décrit le joli oratoire du cimetière : c'est une construction gracieuse et très originale : un soubassement de granit orné de quelques reliefs dans le goût de la Renaissance porte des piliers en gaine qui eux-mêmes soutiennent une frise sculptée et le toit . On célébrait probablement la messe dans cet édifice les jours de grande fête : les fidèles qui, n'ayant pu entrer dans l'église s'entassaient dans le cimetière, pouvaient ainsi assister au Saint Sacrifice.( D'après PALUSTRE, l'oratoire n'aurait servi qu'un jour pal' an: «c'est tout simplement un oratoire destiné à célébrer la messe le jour des morts.)
Les comptes donnent les renseignements les plus complets sur la construction de ce charmant monument.
—Compte de 1576-1577. Dépense de 20 sols pour frais d'un acte notarié constatant que le dimanche 26 août 1576, les paroissiens résolurent de fonder un oratoire au bout "susain" du cimetière.
7-1 s. 8 d. « payé à Me Michel Le Borgne, architecte, pour salaire d'avoir, luy et Yvon Tanguy, son compaire, esté par deux jours l'un visiter le lieu de l'œupvre et délivrer ausdits paroissiens en leur prosne le pourtraict et prothocole que ledit Borgne avait faict dudit œupvre .
50 s. au même Le Borgne, architecte, à raison de 12 s. 6 d. par jour, « pour avoir été quatre jours, tant à prendre la
place dudit oratoire, que donner instruction et pourtraicture aux autres ouvriers pour y besoigner .
. 118 s. 11 d. « pour ce que dès le ... jour de mars dernier lesdits comptables par l'advis de certains apparans personnaiges de ladite paroisse firent marché vers lesdits Mes Michel Le Borgne et Pierre Texier pour parachever l'oratoire susdit. pour 200 1. - monnoie, laquelle somme auraient lesdits paroissiens, ayant agréable ledit marché, ordonné estre payée aux ouvriers. _. payèrent en despens ausdits personnages et ouvriers , tant en concluant le marché et en dressant l'acte d'icell uy ... que en vins et despens ausdits ouvriers le jour qu'ils commencèrent et mirent les pierres fondamentales d'i cellui oratoire la somme de 118 s. 11 d.
—Comptes de 1577-1578. Le maître architecte Michel Le Borgne n'est plus appelé que tailleur de pierre, ainsi que son compagnon Pierre Guyader, dont le nom avait été traduit en français (Pierre Texier) par les comptables de l'année précédente. Les marguilliers demandèrent qu'une indemnité de 20 1. fut accordée à Le Borgne et Guyader « parce qu'il fut trouvé par les députés à voir le renable du dit œuvre que iceux ouvriers avaient fait plusieurs honnêtes décorations entour icelluy oratoire oultre leur marché . La gratification qui avait été d'abord accordée fut plus tard réduite à 101. Le renable (procès-verbal de réception de l'ouvrage) fut dressé en présence du scholastique de Tréguier, de trois gentils hommes Penanguern, Thoumelin et Kerlaziou, et de deux tailleurs de pierre Paul Bégal et Yvon Guillesser (Guillesser travailla à la construction de la tour de Plougasnou, en 1604; un de ses parents, Jean Guillasser, était menuisier et sculpteur.). La maçonnerie de l'oratoire était terminée: on dépensa 55 sous« en despens ausditz Le Borgne et Guyader et leurs compaignons après la perfection d'icelle maçonnerie pour leur vin de parachèvement ».
Yvon Le Lavyec vint dresser le devis de la charpente qui fut adjugée à un ouvrier du pays, Raoul Bégyvin.
Les sablières et les poutres de l'oratoire ont grandement souffert de l'humidité ; les frises sculptées par Le Lavyec et Bégyvin ont en partie disparu : ce qui subsiste est cependant encore fort remarquable et donne une haute idée du talent de ces imagiers .
L'édifice fut couvert en ardoises et comme la couverture est très haute, on eut soin de d'orner en employant des ardoises de forme et de natures diverses et de les disposer de façon agréable à l'œil. Il reste quelque chose de cette recherche ornementale mais aujourd'hui toute la couverture est formée de grosses ardoises du pays. En 1578, on employa aussi des ardoises bretonnes tirées de la perrière de Jehan Henry au Dourdu, mais les dessins et les imbrications furent formés d'ardoises beaucoup plus fines apportées d'Angleterre (La pierre nécessaire à la construction fut extraite des carrières de l'ile Grande et de Trévezvor ; la chaux fut apportée de Roscoff, le bois fut acheté il. l{eranCl'as, à Kerlémareè et à Kerm'ldeza: l'ardoise d'Angleterre, achetée à Morlaix, coûta 50 sous le mille, celle du Dourdu valait ...).
— Compte de 1578-1579. Sur le sommet du toit s'éleva un clocheton. Maître Aubin Morin, pintier, couvrit « l'aiguillon avec des lames de plomb qui furent en partie dorées, ce qui coûta environ 80 livres plus quelques frais accessoires: on paya dix sous pour le transport des « timbres et plomb doré que Aubin ne voulait être porté par mer à ca use de la dorure" .
Une cloche payée 18 livres, fut placée dans le clocheton, qui ne fut jamais destiné, comme on l'a dit, à abriter un fanal. Un chaudronnier vendit pour deux réaux (8 s. 4 d.) une croix et un e girouette en forme de croissant. Salaun Geffroy, peintre-verrier, plaça une vitre dans la petite fenêtre circulaire qui est au fond de l'oratoire coût 5 livres 5 sols. Une somme plus importante 36 1. 5 s. fut versée à Jacques Chrétien, statuaire à Morlaix, tant pour deux imaiges mis audit oratoire, l'une de Notre-Dame, l'autre de Saint-Jean Baptiste, que pour avoir doré lesdits imaiges, timbres ou autres choses dudit oratoire .
Quelques détaillés que soient les comptes il est impossible de savoir de façon précise ce que coûta la construction de l'oratoire. Le total ne dut guère dépense r 1100 livres ' Le revenu annuel de la chapelle était à cette époqu e d'environ 900 livres . Ce petit monument fut sans doute fort admiré dans ce pays; ca r peu après les paroissiens de Plougasnou construisirent un oratoire près de leur église et en 1611, Jeanne de Kerédan fit bâtir dans le champ des Méjou le petit oratoire de Notre-Dame de Lorette qui est encore plus élégant et plus original que celui de Saint-Jean-du-Doigt ( Un oratoire beaucoup plus simple fut construit à Plouzelambre au XVIIe siècle: on l'appelle le Reposoir. En Cornouaille et en Léon nous ne connaissons aucun édifice de ce genre : la chapelle de Notre-Dame des Fontaines à Daoulas qui s'en rapproche un peu n'est ouverte à l'air libre que d'un seul côté. - L'oratoire de Saint-Jean fut reproduit en 1900 au) .
Il est heureux que les comptes nous aient conservé les noms des auteurs de ce petit chef-d'œuvre, l'architecte Michel Le Borgne, le tailleur de pierre, Pierre Le Guyader, les charpentiers-sculpteurs, Yvon Le Lavyec et Raoul Bégyvin.
Michel Le Borgne fut en HiSI et 1582 « maître de l'œuvre de la tour de Saint-Mathieu de Morlaix. Le dessin de ce monument avait été donné en 15~8, par Yve!i. Croazec . qui dirigea la construction pendant quelques années seulement. Les maîtres qui lui succédèrent modifièrent son plan de façon fâcheuse; Michel Le Borgne paraît avoir été particulièrement mal inspiré: la construction de l'oratoire montre que cet architecte était cependant un homme de talent.
Le charpentier, Yvon Le Lavyec ou Le Layec qui vint donner le dessin de la charpente, était probablement un
Morlaisien ou un Trécorrois. On doit cependant remarquer qu'il portait le même nom que le charpentier-sculpteur Jehan Le Layec, auteur de remarquables sculptures exécutées de 1524, à 1545 pour la chapelle de Saint-Nicolas-des-Eaux en Pluméliau, de Notre-Dame de Burgo en Grandschamps et de Saint-Yvi en Moréac (1) . Layec ne donna peut-être que le dessin général de la charpente; Raoul Bégyvin fut en grande partie chargé de l'exécution matérielle; il appartenait à une famille qui est encore représentée dans le pays.
Le sculpteur J. Chrétien sera plusieurs fois cité au cours de cette étude, car de 1562 à 1581 il ne cessa d'être employé par les marguilliers de Saint-Jean-du-Doigt. Nous retrouverons aussi plus loin le nom du peintre-verrier Geffroy,
(1) On trouve la description détaillée de l'oratoire, de la fontaine, de l'arc de triomphe, dans les ouvrages de MM. DE KERGRIST, P ALUSTRE, A BG IULL, cités supra. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉO. - TOME XXXVI (Mémoires 22)
La Crucifixion de 1573 de la maîtresse-vitre de l'église Saint-Paban de Lababan à Pouldreuzic.
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Voir les 29 Passions des verrières du Finistère au XVIe siècle dont beaucoup sont dues à l'atelier Le Sodec à Quimper. Le Corpus Vitrearum VII permet d'en dresser une chronologie :
3e quart XVIe siècle (vers 1560), Quéménéven église Saint-Ouen : Attribuable à l'atelier Le Sodec . Cartons communs (Le Bihan) avec Guengat, Gouezec et Guimiliau, ou La Martyre et La Roche-Maurice (Gatouillat).
3e quart XVIe siècle Tréguennec ; Attribuable à l'atelier Le Sodec. 5 lancettes dont une Grande Crucifixion centrale.
3e quart XVIe siècle : Ploudiry. 3 lancettes consacrées à une Grande Crucifixion, proche de celles de La Roche-Maurice, La Martyre, etc.
4e quart XVIe : Pont-Croix. Attribuable à l'atelier Le Sodec. 6 lancettes de la Vie du Christ à un couple de donateurs (Rosmadec).
"Le chevet de cette église de la fin du XIIIe siècle a été rebâtie au XVIe siècle. Sa maîtresse-vitre de la Passion datée de 1573 présente un écho lointain des verrières du groupe qui s'articule autour de celle de La Roche-Maurice, en particulier celle du Juch." (Gatouillat et Hérold)
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Parmi les Passions finistériennes il faut distinguer les verrières comportant des scènes de la Vie du Christ dont la Passion, ou bien des scènes successives de la Passion, ou bien de Grandes Crucifixions occupant toute la vitre. La maîtresse-vitre de Lababan appartient à ces dernières.
On la comparera donc avec intérêt aux verrières de La Roche-Maurice, La Martyre et Tourc'h — et Saint-Mathieu de Quimper qui en est la copie—, mais surtout avec celles du Juch, de Guengat, Guimiliau, Gouezec, Quéménéven et Ploudiry. Tous ces vitraux sont attribués à l'atelier Le Sodec de Quimper. Ils ont, outre cette composition, et leur proximité géographique, des points communs temporels (entre 1535 et 1560 environ) et stylistiques.
On notera en particulier la fréquence des inscriptions de lettres, souvent dépourvues de sens, sur les galons des vêtements et les harnachements, et d'autre part, la représentation de larmes sous les yeux de Marie, Jean et Marie-Madeleine au pied du calvaire.
A Lababan, "lointain écho" de ce dernier groupe, la composition est semblable, les personnages sont le mêmes, avec les mêmes postures, et on retrouve, au même endroit (harnachement du cavalier à l'extrême droite) les mêmes inscriptions à lettres aléatoires. Les chevaux si caractéristiques de cet atelier y sont très semblables, tout comme les détails de l'harnachement. La peinture des visages y est remarquable, et de nombreuses photos de détail tenteront de le démontrer. Des verres rouges gravés sont employés, témoin de la maîtrise technique du verrier.
Mais je remarque que les larmes si spécifiques de plusieurs Passions du groupe de référence sous les paupières de la Vierge, de Jean et de Marie-Madeleine y sont absentes. D'autre part, le visage de Marie-Madeleine au pied de la Croix s'écarte, par des yeux très effilés, des cartons souvent repris des Passions antérieures.
On peut aussi classer ces Crucifixions en deux catégories : celles où le ciel est rouge, et celles, comme ici, où le ciel est bleu.
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Description.
Cette baie axiale à trois lancettes et un tympan à 6 ajours mesure 3,30 m. de haut et 2,20 m. de large. Les lancettes sont consacrées à une grande Crucifixion , assez bien conservée bien que la partie inférieure d la lancette centrale (lancette B) soit moderne. Des compléments ont été ajoutés en bas des lancettes B et C en 1934.
"L'œuvre était, au début du XXe siècle, mutilée dans sa partie inférieure. En 1934, grâce au mécénat de l'industriel local Corentin Hénaff, elle fut restaurée et complétée par l'atelier Gaudin pour figurer à l'exposition La Passion du Christ dans l'art français, organisée à Paris la même année.
Mis à l'abri en 1942, ce vitrail subit une autre restauration en 1947 chez Jean-Jacques Gruber, qui l'a reposé en 1950 : la plus récente, due à Michael Messonnet, date de 2000." (Gatouillat et Hérold)
L'intervention de Michael Messonnet (formé aux ateliers HSM à Quintin) se remarque par la suppression des plombs de casse grâce à un collage bout à bout des fragments brisés.
Au tympan, l'atelier Gaudin a représenté les instruments de la Passion.
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On peut discerner une composition à trois étages. En haut, le ciel bleu sert de fond aux trois croix, chacune entourée de lances, (ou d'une hallebarde, d'une oriflamme et de l'éponge de vinaigre), et où se détachent les corps, en verre blanc, des suppliciés.
Au milieu, la troupe des soldats, en verre bleu clair, des chevaliers, en verre coloré, et des chevaux, en verre blanc.
En bas, les quatre saints personnages éplorés, dont les visages en verre blanc contrastent avec les vêtements de couleur vive.
Tous ces verres, blancs, bleu clairs, et de couleurs vives, sont peints à la grisaille, rehaussée au jaune d'argent et à la sanguine.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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LA LANCETTE A (première à gauche).
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Le bon larron entouré de cavaliers. Un ange emporte son âme au Paradis.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Technique.
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La chevelure et la ceinture de l'ange sont peints au jaune d'argent, de densité plus ou moins soutenue.
Les traits du visage du larron sont dessinés à la grisaille concentrée et noire, d'un pinceau plein d'élan et de souplesse. Les nuances sont apportés par des aplats de grisaille diluée, et (rides) par des traits à la sanguine. La grisaille de la chevelure et de la barbe est animée par des mèches en "enlevé" par le manche du pinceau ou un autre outil. Le peintre n'a pas recours aux modelés par hachure.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Un verre bleu clair (rehaussé au jaune) rend compte des reflets métalliques de l'armure et du casque de ce soldat romain, mais le visage est aussi englobé dans cette teinte.
Les chevaux de l'atelier quimpérois ont toujours une allure bien reconnaissable, avec leur harnachement et leurs mors à balancier crénelé.
Le reflet cornéen des yeux des personnages et des chevaux est punctiforme, à peine marqué.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Ce cavalier vue de dos, en verre bleu clair, contraste avec la croupe de sa monture, en verre blanc circonscrit par un plomb circulaire faisant écho aux cercles de la cuirasse et de la rondache. Ces portraits de chevaux, et notamment cette vue de dos, évoque les travaux et dessins d'après nature de Pisanello, ainsi que son Saint-Georges et la Princesse (1433-1438) et la Bataille de San Romano (v.1440) de Paolo Ucello.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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La Vierge soutenue par Jean et une sainte femme.
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Les trois visages, nimbés, sont alignés sur le même niveau. La Vierge en manteau bleu et robe rouge à ceinture jaune, croise ses mains sur la poitrine, et ces mains blanches répondent à celles, sur l'épaule droite et sur les hanches, de Jean et de la sainte Femme. Celle-ci, qui essuie ses larmes, pourrait être Marie-Madeleine, car il est fréquent qu'elle apparaisse deux fois, autour de Marie, et au pied de la Croix, dans d'autres vitraux où son identité est assurée.
Les photos de détail des visages permettent d'étudier la technique de cet artiste, l'absence de reflet cornéen mais l'existence d'un cercle blanc péri-cornéen. Ces gros-plans m'ont permis aussi de m'assurer de l'absence de larmes, bien que sous la paupière que la sainte femme essuie, une tache blanche, mal discernable des artefacts de l'usure, soit présente.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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L'inscription de 1573 .
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EN L'AN 1573 FUT FAIT CESTE VITRE.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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LA LANCETTE B (au centre).
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Le Christ en croix.
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Le nimbe est en verre rouge gravé.
La partie supérieure du visage et sa couronne est restaurée.
L'éponge imbibé de vinaigre se trouve à droite.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Longin perçant de sa lance le flanc droit du Christ pour s'assurer de sa mort.
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Longin est représenté à la fois comme officier romain (armure des jambes), et à la fois comme un notable (barbe fournie, cheveux longs, manteau fourré et doublé).
Les inscriptions dépourvues de sens indiquent :
N---
MRZP--
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Le Bon Centenier.
Le cavalier romain en armure qui est figuré en vis à vis de Longin et qui lève les yeux vers le Christ, la main en visière, pourrait être le Centenier converti, conformément aux deux cavaliers représentés sur les croisillons des calvaires bretons, ou sur les enluminures.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Dans ces Crucifixions finistériennes, Marie-Madeleine est figurée constamment, agenouillée au pied de la Croix dont elle étreint le fût, élégamment vêtue et coiffée d'un bonnet perlé, alors que son manteau est rejeté derrière ses épaules et tombe au sol. Le même motif est fréquemment présent sur les calvaires contemporains, notamment ceux sculptés par l'atelier Prigent de Landerneau.
Mais sur un grand nombre des verrières du groupe prototype, des larmes s'écoulent de ses yeux. D'autre part, à Lababan, l'artiste (ou un restaurateur ultérieur ?) a donné à la sainte un visage fort singulier, aux yeux asymétriques très effilés, aux narines peu gracieuses et avec une bouche entrouverte très petite.
Des hachures accentuent les ombres du modelé, simples ou entrecroisées.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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LA LANCETTE C (à droite).
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Le mauvais larron dont l'âme est emportée par un diable. Le gibet est entouré de cavaliers et soldats.
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Comme le bon larron, le mauvais larron est vêtu d'une culotte à taillades (fentes qui laissent voir la doublure), propre au style vestimentaire Henri II, bien qu'elle se retrouve déjà sous François Ier et, avec des fentes plus larges, sous Henri IV. Ce qui est particulier, c'est que ce motif, associé à la braguette volumineuse au rabat fixé par des lacets, est présent dans toutes les verrières de l'atelier quimpérois, dès le prototype (La Roche-Maurice en 1539) : il est repris tel quel sur les Grandes Crucifixions pendant 35 ans, plutôt que de s'adapter aux variations de la mode contemporaine.
Dans tous les cas les bras sont liés au dessus de la traverse du T du gibet, et les deux jambes sont liées séparément, afin d'indiquer qu'une des deux jambes a été brisée (et donc repliée à angle droit), comme l'indique le texte évangélique.
De même, il est de règle que le mauvais larron détourne le visage et le regard dans la direction opposée au Christ, signifiant ainsi son refus d'être sauvé : un démon s'empare de son âme vers l'Enfer.
Gatouillat et Hérold font remarquer que le verre employé pour ce démon est un verre "plaqué pourpre brun". Un verre plaqué associe un verre coloré, fin, et un verre transparent. Le verre rouge dans sa partie basse a été éclairci. Il a été gravé à la molette pour le rendre transparent au niveau des yeux et de la langue.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Le cavalier de gauche .
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Le cavalier de gauche, qui tient une lance, n'est pas en armure et son turban vert à pompon rose, sa longue barbe et ses cheveux laissent imaginer qu'il s'agit d'un notable Juif.
Il tend la main gauche vers un deuxième cavalier qui porte une tenue vestimentaire analogue.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Le cavalier en bas à droite et les inscriptions. Le chronogramme 1573.
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Les inscriptions :
AMEN dans le dos du cavalier.
NOSPBR/NSRT sur l'harnachement.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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Un soldat.
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La Crucifixion de la baie axiale (atelier quimpérois, 1573, Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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LE TYMPAN (1934). LES INSRUMENTS DE LA PASSION.
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La Crucifixion de la baie axiale, tympan ( Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale, tympan ( Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale, tympan ( Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale , tympan ( Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
La Crucifixion de la baie axiale , tympan ( Gaudin 1934, Gruber 1947, Messonnet 2000) de l'église de Lababan. Photographie lavieb-aile 2022.
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SOURCES ET LIENS.
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— ABGRALL (Chanoine Jean-Marie) et PEYRON ( Chanoine ) , 1915, "Notice sur Lababan" Bulletin diocésain d'histoire et, Bull. Diocésain d'histoire et d'archéologie BDHA, pages 34 et suivantes.
Paroisse succursale du canton de Plogastel-SaintGermain, conservée quelque temps après le Concordat comme commune, mais annexée bientôt, vers 1808, à la commune de Pouldreuzic. Le Patron est saint Paban, d'où le nom de la paroisse Lan-Paban. Paban ne serait autre que saint Pabu ou saint Tugdual.
EGLISE PAROISSIALE À un kilomètre et demi, Nord-Ouest du bourg de Pouldreuzic, est la petite église de Lababan, blottie et presque cachée sur la déclivité, Nord d'un profond vallon ; et elle est là depuis longtemps, dans son humilité, puisqu'elle date en grande partie de la deuxième moitié du XIIesiècle.
Au mur absidal de l'église de Lababan, est une fenêtre à trois baies enfermant un vitrail daté de 1573, lequel est un peu délabré. Il représente une crucifixion. La Madeleine est au pied de la croix ; saint Longin tient sa lance ; un autre soldat tient une pique surmontée de l'éponge imbibée de vinaigre. Autour de la croix, d'autres soldats, les bourreaux, officiers et pharisiens à cheval. — Dans une des baies latérales, on voit la Sainte Vierge en pâmoison (spasimo), entre saint Jean et une des Saintes-Femmes.
— COUFFON (René), LE BARS (Alfred), 1988, Pouldreuzic, in Nouveau répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper
René Couffon est celui qui, en 1945, dans son article "La peinture sur verre en Bretagne. Origine de quelques verrières au XVIe siècle", a étudié et dénombré les Passions du Finistère où la Crucifixion occupe une superficie six fois plus importante que celle des autres scènes.
Il en décrit un premier groupe qualifié de prototype, associant la maîtresse-vitre de La Martyre, choisit comme type, de La Roche-Maurice (1535), de Saint-Mathieu de Quimper et de Tourc'h. Auquel il ajoute les vitres aujourd'hui perdues, mais connues par description, de l'abbaye de Daoulas (vers 1530), et de Trémaouezan (v. 1555).
Ces vitraux sont aujourd'hui attribués à un atelier quimpérois, celui des Le Sodec,.
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À ce premier groupe René Couffon associe d'abord les vitres "aux costumes rajeunies" de Ploudiry, Le Juch et La Véronique à Bannalec [malgré sa date de 1622], puis celles de Gouezec (1571), Guengat (1571), Lababan en Pouldreuzic (1573), Langolen (1575), Pleyben, et Tréflénevez (vers 1590).
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Depuis cet article de 1945, aucune étude critique et approfondie de cette trentaine de Crucifixions n'a été conduite, et aucun travail de synthèse sur l'atelier quimpérois qu'on s'accorde à nommer Le Sodec n'a été publié.
L'ensemble des articles de ce blog souhaite y contribuer, mais chaque découverte d'un site pas encore visité, ou chacune des re-visites d'un site déjà étudié, montre combien il faut approfondir l'examen, et, a contrario, combien il faut se laisser saisir par l'enthousiasme admiratif.
— GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2005, Les vitraux de Bretagne, Corpus Vitrearum, France VII, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, p. 183.
L'art de la Renaissance en Bretagne : les supports anthropomorphes et zoomorphes (vers 1559) du clocheton et de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre.
2. Cet article appartient à une série sur les Termes gainés, cariatides et atlantes (ou "supports anthropomorphes") , et, plus généralement, sur l'introduction de la Seconde Renaissance en Bretagne:
Le bénitier du porche de Guimiliau. (kersanton, traces de polychromie, Maître de Plougastel, v.1606) du porche sud de Guimiliau, son ange aux goupillons et ses termes gainés.
. INTRODUCTION GÉNÉRALE : LES TERMES GAINÉS, INDICE DE LA SECONDE RENAISSANCE.
Les Termes, cariatides et atlantes peuvent peut-être caractériser la pénétration en Bretagne de l'art architectural classique (Seconde Renaissance), apparu en France à partir de 1540 sous l'influence des traités d'architecture de Vitruve , de Serlio, d'Androuet du Cerceau et de Philibert Delorme. Ce motif architectural peut servir de marqueur facile à repérer, et on le trouve dans la traduction de Vitruve par Giovanni Giocondo (Venise 1511), dans les modèles architecturaux de Serlio ou encore d'Androuet du Cerceau qui lui consacre en 1549 une série de 12 planches (36 types de termes).
Puis on trouve en 1559, mais en Côtes d'Armor, les 4 Termes du campanile de Kerfons à Ploubezre. Ils coiffent la chapelle sud ou chapelle Saint-Yves rebâtie en 1559 par Claude de La Touche et dans laquelle repose Marquise de Goulaine (1500-1531), épouse de Renaud de La Touche-Limousinière et surtout fille de Christophe II de Goulaine.
Cette introduction précoce de l'art classique trouve ses modèles dans la Porte Dorée de Fontainebleau datée de 1528 (pour la porte à encadrement de colonnes et agrafe à l'italienne en forme de S), dans les termes gainés du frontispice de Serlio (Venise 1537), dans les niches à la Philibert Delorme. Or, Marquise de Goulaine est la demi-sœur de Louise de Goulaine, toutes les deux étant les filles de Christophe II de Goulaine (1445-1530).
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On peut suivre la trace de l'influence de cette famille de Goulaine dans la pénétration de la Renaissance en Bretagne dans le château de Maillé à Plounevez-Lochrist, puisque deux cartouches issus des modèles d'Androuet du Cerceau y montrent les armes de Maurice Carman (ou Kermavan) et de Jeanne de Goulaine, mariés en 1541. Mais l'aile Renaissance de ce château construit sous l'influence de Philibert Delorme ne présente pas, à ma connaissance, de cariatides.
Il était important de souligner le rôle de cette famille de la noblesse, dont les attaches en Touraine et Val-de-Loire sont notables, dans l'importation en Bretagne de la Renaissance, puisque, dans le Finistère et en particulier dans le Léon, c'est l'atelier du château de Kerjean (vers 1571-1590) qui introduisit, dans l'architecture religieuse, les décors inspirés de Serlio, Delorme et Du Cerceau.
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Après la chapelle de Kerfons, ce motif se retrouve, dans une pénétration d'est en ouest, en Finistère à l'entrée du château de Kerjean (v.1570-1595), puis au fronton du porche de Lanhouarneau (1582), puis nous admirons les cariatides de la porte d'entrée du manoir de Trebodennic (1584) en Ploudaniel, les termes de l'ossuaire de Sizun (1585), les 14 cariatides et atlantes de l'intérieur du porche de Bodilis (1570-1601), le couple cariatide-atlante de l'intérieur du porche sud de Saint-Thégonnec (1599-1605), celui en kersantite surmontant le porche sud de Saint-Houardon à Landerneau (1604), avant de découvrir les six termes de l'ossuaire de Landivisiau (1610-1620), le couple de termes et la cariatide de l'ossuaire de La Martyre (1619), et enfin le couple de la porte de l'ossuaire (1676) de Saint-Thégonnec. Entourant, comme à La Martyre, une statue de saint Pol-de-Léon, ce dernier a tant de points communs avec ce site qu'il semble en être une copie, inférieure à l'original.
On les comparera aussi, pour la sculpture en bois aux 14 cariatides et atlantes du jubé de La Roche-Maurice, et à ceux du jubé de Saint-Nicolas en Priziac.
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Glossaire
— SUPPORT ANTHROPOMORPHE.
Parmi les décors figurés des supports verticaux (colonnes, piliers, pilastres, fût), ce vocable inscrit au thésaurus réunit les cariatides et les atlantes, canéphores ou non. Il reste à introduire le vocable de "support zoomorphe" lorsque les sujets sculptés sont animaux.
Dans l'antiquité, borne qui marquait la limite d'un terrain, d'un champ, qui matérialisait une frontière. Terminus est une divinité romaine qui est le gardien des bornes. Il fut d'abord représenté sous la figure d'une grosse pierre quadrangulaire ou d'une souche puis, plus tard, on lui donna une tête humaine placée sur une borne pyramidale (un terme) qui servait de limite aux particuliers ou à l'État. Il était toujours sans bras et sans pieds, afin qu'il ne pût changer de place.
Architecture. Statue représentant un buste d'homme ou de femme dont la partie inférieure se termine en gaine et qui sert d'ornement.
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— ATLANTE.
En architecture, figure d'homme soutenant un entablement.
—CARIATIDE
Une cariatide est une statue de femme drapée et debout, dont la tête sert de support à un entablement, une architrave ou une corniche.
Dans un ensemble architectural ou dans un meuble, elle s'emploie à la place d'une colonne ou d'un pilastre.
Parfois leurs bras ne sont figurés que par des tronçons : le bas du corps se termine souvent en gaine. Lorsque les cariatides portent sur la tête une corbeille formant un chapiteau, on les appelle canéphores.
Lorsque le personnage est représenté par un homme, la cariatide prend le nom d'Atlante ou de Télamon, sorte d'Hercule soutenant l'architrave sur ses épaules courbées.
Le nom, féminin, apparaît dans notre langue en 1546 (Caryatide) comme substantif ou comme adjectif qualifiant des colonnes dans l'Hypnerotomachie ou Discours du Songe de Poliphile de J. Martin, folio 14r (Caryatides canelees). Ces colonnes encadrent une porte dont l'architecture est minutieusement décrite.
1. Ma venue à la chapelle de Kerfons faisait suite à sa réouverture après son importante restauration. L'un de mes buts était, on l'a compris, d'étudier le décor sculpté Renaissance de la chapelle Saint-Yves construite sous le mécénat de la puissante famille Goulaine entre 1553 et 1559. ["première Renaissance bretonne" selon Lécuiller : on notera que cela correspond sur le plan chronologique à la Seconde Renaissance française, 1540-1564, sous l'influence de Serlio, et à l'apparition des cariatides et atlantes dans le décor architectural].
"Bâtie pour la puissante famille de Goulaine, la chapelle de Kerfons illustre dans la pierre un vocabulaire décoratif d’avant-garde : porte en plein cintre encadrée de colonnes surmontée d’un fronton triangulaire, modernité et simplicité du dessin des fenestrages, contreforts en forme de tourelle, niches à statues ou original campanile carré flanqué de quatre personnages."
"Les gouverneurs étaient responsables de l’entretien et de la réparation des chapelles. A Kerfons, la chapelle dédiée à Notre-Dame était gérée par un gouverneur unique au cours d'un mandat d'un an non renouvelable. Fiacre Le Bihan et Rolland de Trongoff, tous deux gouverneurs, ont organisé le chantier de construction de l'aile sud à partir de 1553 : "ils emploient des carriers, des tailleurs de pierre, des forgerons, des vitriers et des peintres. Ils mettent en place un important charroi et fournissent la nourriture des gens et des bêtes"." (Lécuiller)
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L'extérieur de cette chapelle, et notamment les quatre cariatides et atlantes de son campanile, fera l'objet de la première partie de cet article.
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2. Mais la visite de l'intérieur de la chapelle Saint-Yves révèle, non seulement un autel de style Renaissance à fronton triangulaire centré par un buste, mais aussi , dans la charpente, une série de 20 termes gainés, renforçant et ornant les nervures. Ce sont pour la moitié des supports zoomorphes à tête de lion et pour 4 d'entre eux, des supports anthropomorphes à type de cariatides.
Ces très belles sculptures en bois feront l'objet de ma deuxième partie.
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3. En clin d'œil, on remarquera les termes gainés en forme d'ange de l'autel du XVIIe siècle. D'où ma troisième partie.
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I. LES CARIATIDES ET ATLANTES DU CAMPANILE. LE DÉCOR RENAISSANCE.
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A. Préambule : Les Goulaine et la Renaissance.
1°) Louise de Goulaine (ca 1505-1567).
Si l'art de la Renaissance s'est introduit en Bretagne en 1507 avec le cénotaphe de Thomas James à Dol-de-Bretagne, puis en 1518-1535 à Guerche-de-Bretagne avec les stalles, suivi dans la même collégiale en 1536-1567 par les vitraux, sous l'influence de la famille d'Alençon, il faut ici donner toute son importance au chantier commandité à Champeaux (35) par Guy III d'Espinay et Louise de Goulaine.
En effet, Guy III d'Espinay épousa Le 17 septembre 1528 Louise de Goulaine, fille de Christophe II de Goulaine, gentilhomme ordinaire du roi Louis XII et de Renée Aménard. Le couple, qui éprouvait pour l'art nouveau de la Renaissance un véritable engouement (Christophe II de Goulaine a fait reconstruire l'aile de son château de Goulaine en Loire-Atlantique en style début Renaissance), s'attacha à embellir l'église de Champeaux de vitraux, d'un jubé, et vers 1530 de stalles, dont chaque dossier supérieur, chaque miséricorde étant sculptés avec goût et imagination . Louise commanda pour son mari un tombeau en 1553 dans le plus pur style Seconde Renaissance, et pour sa fille un monument de même style en 1554.
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Arbre Alain de Carné Geneanet
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Le même couple exerça son goût pour le style Renaissance à Louvigné-de-Bais (à 17 km au sud de Champeaux) entre 1536 et 1562.
2°) Marquise de Goulaine (vers 1500-1531) et sa fille Claude (ca 1525->1559.).
Marquise de Goulaine est la sœur aînée de Louise de Goulaine. Elle épousa en 1522 Renaud de la Touche-Louzinière, fils de François de la Touche et de Jeanne de Penhoët, dame héritière de Coëtfrec et Kerfons. Elle eut 2 filles Françoise et Claude ou Claudine
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Arbre Alain de Carné Geneanet
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Au XVe siècle, la chapelle de Kerfons appartenait à la famille de Penhoët.
"La branche des Penhoët-Coatfrec se fond en 1492 dans la famille de La Touche-Limousinière en Loire-Atlantique. Un des fils épouse en 1522 un membre d 'une des plus grandes familles bretonnes, Marquise de Goulaine qui meurt en 1531 et est enterrée dans la chapelle Saint-Yves de Kerfons, c'est-à-dire dans la chapelle sud du transept. En 1533, leur fille Françoise de La Touche est inhumée dans la même chapelle aux cotés de sa mère et leur deuxième fille Claude fera rebâtir en 1559 la chapelle funéraire de la famille. Ces travaux nécessitent la surélévation de la nef avec des modillons et l'aménagement d'une sacristie au bas de la nef.
Le rôle et la personnalité des fondateurs sont essentiels pour expliquer l'originalité de cette chapelle des Goulaine où repose Marquise, belle-sœur de Gui III d'Espinay, seigneur de Champeaux. On connaît depuis les travaux de René Couffon sur la collégiale de Champeaux le rôle primordial joué par les d'Espinay pour la diffusion des idées humanistes et des arts renaissants en Bretagne. Ils sont justement célèbres pour leur commande à l'architecte angevin Jean de l'Espine d'un tombeau érigé en 1553. Le goût pour la nouvelle expression artistique s'est ainsi répandu dans les parages de Coatfrec.
En effet la chapelle Saint-Yves n'a pas de parenté évidente avec d'autres monuments "Renaissance" de la région. Ici l'architecte a éliminé tout le décor si prisé à Notre-Dame de Guingamp ou à Notre-Dame de Bulat-Pestivien où s'épanouissent coquilles, rinceaux, arabesques, puni et candélabres, Kerfons est sans doute la première expression bretonne du classicisme naissant, affirmé par la pureté d'un style totalement épuré où seules apparaissent les grandes directrices architecturales. Le décor n'occupe en effet que les parties secondaires de l'ouvrage : un buste en costume Henry II, des angelots dans les écoinçons (réminiscences des bustes inscrits dans des médaillons), une niche d'inspiration florentine, des niches à coupoles sur les contreforts et un amortissement du pignon en forme de campanile orné de personnages à demi nus sur des termes imitant le tempietto italien.
Les références architecturales sont savantes et prestigieuses : Porte Dorée de Fontainebleau pour la porte à encadrement de colonnes et agrafe à l'italienne en forme d'S, gaines du frontispice de l'ouvrage de Serlio, niches à la Philibert de l'Orme, remplages comparables à ceux de Saint-Eustache de Paris de vingt ans son aînée. Cependant l'artiste n'a pas freiné sa fantaisie notamment dans les chapiteaux de la porte où l'inspiration corinthienne est totalement dépassée et recomposée. Seule note "locale" dans toutes ces références lointaines, les nervures rayonnantes de l'embrasure de la porte. Ces moulures qui n'ont aucune raison d'être architectonique, paraissent visualiser les sommiers de l'arc. Elles simulent un effet de perspective comme pour marquer une profondeur factice telle une voussure très profonde que l'on découvre sur les dessins d'arcs de triomphe des traités d'architecture de la deuxième moitié du 16e siècle. Cet artifice décoratif avait déjà été utilisé à Bulat-Pestivien dès 1522 et à Guingamp dès 1537. Plus au sud on les observe à Saint-Servais. En 1585, elles sont encore sculptées sur une porte de Saint-Jean-du-Baly à Lannion." (Le Louarn)
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B. La chapelle Saint-Yves (1553-1559).
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La date de 1559 sur un pilier de la chapelle Saint-Yves.
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Cliché Bernard Bègne Inventaire 2014.
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Le chronogramme est inscrit dans un cartouche à cuir découpé à enroulement, typique de la Seconde Renaissance bellifontaine.
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Contrefort du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Le bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2012.
Le bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile 2012.
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La porte et son fronton triangulaire centré par un personnage en buste.
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La porte elle-même, de plein-cintre, mais aux moulures baguées, est encadrée par deux colonnes soutenant un entablement et un fronton triangulaire, selon le modèle diffusé par le premier Livre de Serlio (1540) et repris par Androuet du Cerceau (1559-1561).
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La porte du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
La porte du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Le buste d'un seigneur en costume Henri II. On verra (en fin d'article) la correspondance avec l'autel-tombeau de l'intérieur de la chapelle, où c'est un homme âgé et nu qui est sculpté en buste sur un fronton analogue.
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La porte du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Blason et collier de Saint-Michel de l'élévation est ; masque et inscription énigmatique.
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Pignon sud du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Pignon sud du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Pignon sud du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Le campanile : ses deux atlantes et ses deux cariatides.
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Les termes soutiennent l'entablement entre deux colonnes corinthiennes. Les deux cariatides ont les bras croisés sous leur généreuse poitrine. Elles portent un turban. Les deux atlantes sont identiques, ont les bras croisés sur leur torse nu et portent la barbe pointue très fournie et bouclée, et une couronne. La base est tronquée, réalisée par un appareillage de pierres de granite.
On trouve des modèles de ces termes chez Agostino Veneziano (infra) dès 1536, ou chez Androuet du Cerceau.
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Agostino Veneziano,Maître de Die (graveur),deux hommes,série de Hermae,Budapest, Musée of Fine Arts, Inv 5215,figure à droite
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Le campanile du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Le campanile du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Le campanile du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Le campanile du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Le campanile du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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II. LES FIGURES ENGAINÉES DE LA CHARPENTE DE LA CHAPELLE SAINT-YVES. CARIATIDES, AMAZONES, ATLANTES ET LIONS.
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La charpente ancienne de la chapelle est remarquable par ses entraits à nœud central et engoulants, ses sablières, ses blochets sculptés, et ses nervures à "cerce" sculptés en termes gainés.
Note. On nomme Cerce ou cherche des "Courbe à plusieurs centres qui donne le profil de certaines parties cintrées d'une construction`` (Delorme, Archit., III, 4 ds Gdf.). Le terme est utilisé par Lécuiller en légende des figures correspondant à ces cariatides. Dans la littérature décrivant les charpentes anciennes, on trouve le terme "cerces moulurées" associé à celui de "liernes", ces nervures parallèles soutenant le lambris. Je n'ai trouvé aucun exemple de "cerces" à sculptures figuratives.
Un exemple de charpente. Celle de Kerfons est plus complexe, notamment pour la structure des liernes.
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Église de Mesnil-sous-Vienne. Charpente de la nef, XVIe s.
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Une vue générale de la charpente montre les deux poutres transversales ou entraits, les blochets des quatre angles, les dix arcs de nervures ("liernes" si on veut)... et les cariatides (au sens large). Sans compter les deux rangs d'abouts de poinçon.
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La charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Ici la partie nord en 2012, avant restauration.
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La charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2012.
La charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
La charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Au milieu de la poutre surplombant les deux arcs permettant l'entrée depuis le chœur, une sculpture de Dieu le Père, en tiare et tenant l'orbe, préside à l'ensemble ornemental.
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La charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Une paire d'abouts de poinçon : le décor est géométrique et non figuratif.
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La charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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IIA. LES DIX FIGURES DU CÔTÉ OUEST.
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A1. Support zoomorphe : un lion.
Débutons la description de ces fameuses figures engainées (on ne sait plus comment les nommer) en partant de l'angle nord-ouest. C'est un lion. Sa tête supporte, par l'intermédiaire d'une volute, la charpente. On constate des restes de polychromie, ici jaune ou blanche, ailleurs bleue ou rouge, qui laisse imaginer la splendeur initiale.
Seule la tête est animale, tout le reste du support forme une ample volute feuillagée.
On voit en dessous la tête de l'ange formant blochet.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A2. Support zoomorphe : un lion.
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On voit le talent du sculpteur pour varier son sujet, conservant une fidélité au modèle anatomique tout en l'intégrant aux formes géométriques d'une volute (en forme complexe de "perroquet" de traçage de courbes et contre-courbes) et d'un support à guirlande de fruits nouée d'un ruban et grille.
Le ruban sort d'un (faux) trou, comme dans les cartouches à cuir découpé alors en vogue.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A3. Support zoomorphe : une lionne.
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Ce motif est surprenant, puisque la tête de l'animal surplombe un sein, très généreux mais unique, qui coiffe le sommet de la courbe du support. Ce sein semble s'intégrer avec le buste de l'animal, et est clairement séparé de la partie sous-jacente, géométrique et feuillagée.
Comment l'interpréter ? Par volonté de symétrie avec les figures suivantes? Clin d'œil humoristique ?
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A4. Support zoomorphe : un lion.
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Un lion royal, à la belle crinière qui se transforme en plumage puis en deux larges feuilles formant la volute du support.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A5. Support zoomorphe : un lion.
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Ce lion indiscutable est ailé. Il domine la feuille formant la volute.
Le principe que je relève dans l'ensemble de la sculpture Renaissance et dont les termes engainés sont un parfait exemple est celui de la confusion des "genres" ou "ordres", humain, animal, végétal et géométrique, comme pour introduire le spectateur dans un monde déstabilisé, renversé, non-naturel et, sans doute, enchanté. L'univers de l'artefact artistique.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A6. Support anthropomorphe : une cariatide.
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Je veux bien que cela soit une charmante cariatide, aux longs cheveux bouclés, à l'ovale parfait et à la petite bouche qui esquisse un baiser, mais elle n'a qu'un seul sein (ici buché). Je l'ai associé d'abord aux amazones, dont on dit qu'elle se coupaient le sein droit pour mieux tirer à l'arc.
https://journals.openedition.org/pallas/14209
En réalité, les deux seins sont réunis, comme on va le voir, dans le volume d'une seule poitrine et ne se distinguent que par la petite saillie mamelonnaire.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A7. Support anthropomorphe : une cariatide.
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La mono-mamelle peut-être bi-mamelonnée déborde ou dégorge d'une sangle qui délimite, comme les ceintures portées jadis très haut, le support feuillagé.
Les cheveux sont rassemblés par une perle.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Stop ou encore ? Au point où nous en sommes, je crois discerner un unanime "Encore !".
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A8. Support anthropomorphe : une cariatide.
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Amazone ou victime d'une malformation, arrangez-vous comme vous voudrez avec ces difficultés mammaires. Mais c'est une bien belle femme.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A9. Support anthropomorphe féminin (cariatide) très détérioré.
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Support feuillagé.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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A10. Support anthropomorphe féminin très détérioré.
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L'ovale du visage, l'amorce d'une chevelure et le volume mammaire permettent de voir ici une cariatide.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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IIB. LES DIX FIGURES DU CÔTÉ EST.
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B10. Support anthropomorphe féminin très détérioré.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B9. Support anthropomorphe : une cariatide.
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Le sculpteur semble avoir progressé dans sa connaissance de l'anatomie féminine, mais ce n'est pas encore tout à fait ça. Le volume mammaire est divisé en deux par une sangle verticale.
La chevelure soigneusement peignée est retenue par un médaillon frontal, d'où part un ruban qui se faufile sous des mèches, revient sur les côtés, passe derrière la nuque avant de se nouer : c'est une variante de "mon" "bandeau occipital".
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B8. Support zoomorphe : un lion (ailé).
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B7. Support zoo-anthropomorphe : tête d'homme moustachu dans la gueule d'un lion.
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Cet homme aux yeux bleus est encapuchonné par la tête de lion. Son buste se projette en avant, faisant saillir ses pectoraux (gynécomastiques) et le ventre.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B6. Support zoomorphe : un lion.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B5. Support zoomorphe : un lion.
tête de lion sur un buste féminin à robe de feuillages ?
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B5. Support anthropo-zoomorphe : la tête d'un homme barbu dans la gueule d'un lion.
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je m'y perds un peu. Est-ce un homme coiffé d'une tête de lion ? D'un homme croqué par un lion, mais où est la mandibule? Peut-être derrière?
Est-ce une lionne, à la poitrine humaine ? Ou bien ce relief bi-mamelonné est à attribuer à la lèvre inférieure de l'animal ?
Le but de l'artiste est clair : nous faire perdre la tête, et nos repères.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B4. Support zoomorphe : un lion .
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B3. Support zoomorphe : un lion à barbiche pointue.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B2. Support zoomorphe : un lion à barbiche ronde.
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Sur le support, isolé de la tête animale par un "collier", une poitrine féminine, puis, à nouveau séparé par une sangle-ceinture, une feuille.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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B1. Support anthropomorphe : une cariatide canéphore.
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Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Les cerces de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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III. LES QUATRE BLOCHETS.
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Blochet n°1. Angle sud-est.
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Cliché Bernard Bègne 2014 pour l'Inventaire.
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Blochets de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Blochets de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Blochet n°2. Angle sud-ouest.
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Blochets de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Blochets de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Blochet n°3. Angle nord-ouest.
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Cliché Bernard Bègne pour Inventaire général.
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Blochet n°4. Angle nord-est.
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Cliché Bernard Bègne 2014 pour Inventaire général.
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Blochets de la charpente du bras sud (chapelle Saint-Yves, 1559 ) du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Blochets de la chapelle latérale nord de la chapelle de Kerfons.
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Ils se caractérisent par des ailes multicolores.
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Blochet n°1.
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Blochets de la charpente du bras nord du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Blochets de la charpente du bras nord du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Blochet n°2.
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Blochets de la charpente du bras nord du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Blochets de la charpente du bras nord du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Blochet n°3.
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Blochets de la charpente du bras nord du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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Blochet n°4.
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Blochets de la charpente du bras nord du transept de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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IV. QUELQUES SABLIÉRES.
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Sablières de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Sablières de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Sablières de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Sablières de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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V. LES NOEUDS DES ENTRAITS DE LA CHAPELLE SAINT-YVES. DEUX ANGES PRÉSENTANT UN BLASON ? UN CARTOUCHE ?
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Nœud d'un entrait de la chapelle Saint-Yves (1559) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Nœud d'un entrait de la chapelle Saint-Yves (1559) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Nœud d'un entrait de la chapelle Saint-Yves (1559) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Nœud d'un entrait de la chapelle Saint-Yves (1559) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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V. LES ANGES-CARIATIDES DE L'AUTEL DU XVIIe SIÈCLE.
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Autel (XVIIe) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Autel (XVIIe) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Autel (XVIIe) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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À L'INTÉRIEUR DE LA CHAPELLE SAINT-YVES (1559), L'AUTEL RENAISSANCE AU FRONTON TRIANGULAIRE.
Nous y trouvons de nombreux éléments du nouveau vocabulaire Renaissance : les colonnes à chapiteaux corinthiens, la niche à coquille et à masques, et le buste d'homme décharné et âgé sculpté au milieu du fronton.
Cet autel est-il un monument funéraire des Goulaine, avec son tombeau à godrons ?
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Autel-tombeau (?) de la chapelle Saint-Yves (1559) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Autel-tombeau (?) de la chapelle Saint-Yves (1559) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
Autel-tombeau (?) de la chapelle Saint-Yves (1559) de la chapelle de Kerfons en Ploubezre. Photographie lavieb-aile août 2022.
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SOURCES ET LIENS.
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—COUFFON, René, 1939, « Répertoire des églises et chapelles de Saint-Brieuc et Tréguier. Second fascicule », Société d’émulation des Côtes-du-Nord. Bulletins et mémoires, 71, 1939, p. 141.
— COUFFON (René), 1948, l'architecture classique au pays de Léon, l'atelier de l'Elorn, l'atelier de Kerjean, Mémoires de la Société d'Histoire et d’Archéologie de Bretagne. 1948, 28.
— JOUBERT (Solen), 2003, Audace et renommée : un réseau de la noblesse bretonne, vecteur d'échanges culturels et artistiques pendant la Renaissance. SHAB pages 205-
— LE LOUARN, Geneviève. 1983 "La chapelle Notre-Dame de Kerfons". Rennes, Mémoires de la Société d'Histoire et d'Archéologie de Bretagne, t. 60, 1983, p. 301-305.
—ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), 1559 Livre d’architectvre de Jaques Androvet du Cerceau, contenant les plans et dessaings de cinquante bastimens tous differens : pour instruire ceux qui desirent bastir, soient de petit, moyen, ou grand estat. Auec declaration des membres & commoditez, & nombre des toises, que contient chacun bastiment, dont l’eleuation des faces est figurée sur chacun plan..., Paris, s.n., 1559.
—ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), Second Livre d’architecture, par Iaqves Androvet Du Cerceau. Contenant plusieurs et diverses ordonnances de cheminées, lucarnes, portes, fonteines, puis et pavillons, pour enrichir tant le dedans que le dehors de tous edifices. Avec les desseins de dix sepultures toutes differentes, Paris, André Wechel, 1561.
—ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), 1582, Livre d’architecture de Jaques Androuet Du Cerceau, auquel sont contenues diverses ordonnances de plants et élévations de bastiments pour seigneurs, gentilshommes et autres qui voudront bastir aux champs ; mesmes en aucuns d’iceux sont desseignez les bassez courts... aussi les jardinages et vergiers..., Paris, pour Iaques Androuet du Cerceau, 1582. de l’Orme (Philibert), Le Premier tome de l’architecture, Paris, Frédéric Morel, 1567.
— DELORME (Philibert), 1567 Le premier tome de l'architecture de Philibert de L'Orme conseillier et aumosnier ordinaire du Roy, & abbé de S. Serge lez Angiers , Paris, Federic Morel
— DE GRANDE (Angelo), 2014, "De Fontainebleau vers la Lorraine: l’ordre anthropomorphe de la maison «des Sept Péchés capitaux» à Pont-à-Mousson" in Gravures d'architecture et d'ornement au début de l'époque moderne : processus de migration en Europe (sous la direction de S, Frommel et E. Leuschner), pp.205-218, 2014.
— FROMMEL (Sabine), 2018 Supports anthropomorphes peints de la Renaissance italienne, in Frommel, Sabine – Leuschner, Eckhard – Droguet, Vincent – Kirchner, Thomas (dir.) Construire avec le corps humain/ Bauen mit dem menschlichen Korper. Les ordres anthropomorphes et leurs avatars dans l'art europèen de l'antiquité à la fin du XVIe siècle/ Antropomorphe Stùtzen von der Antike bis zur Gegenwart, Campisano Editore 2 volumes pp 618, 40 ill.
"Rares sont les motifs architecturaux qui témoignent d'une persistance telle que les ordres anthropomorphes, depuis l'Antiquité jusqu'à la période actuelle, en passant par le Moyen Âge. Leur évolution s'articule par de subtiles interactions entre les domaines sculptural, architectural et pictural, alors qu'une fortune théorique durable a été instaurée par la description détaillée par Vitruve des "Perses" et des "Caryatides" dans son traité De architectura libri decem. Contrairement aux ordres architecturaux canoniques, ce " sixième ordre " invite à des interprétations et des variations plus souples et plus personnelles. Il put ainsi assimiler des traditions locales très diverses lors de son parcours triomphal dans toute l'Europe. Si la signification originelle de soumission et de châtiment de ces supports reste valable, les valeurs narratives ne cessèrent de s'enrichir et de s'amplifier, en faisant de ce motif un protagoniste abondamment présent dans de multiples genres artistiques, des meubles aux monuments les plus prestigieux, et qui révèle les mutations typologiques et stylistiques au fil du temps. Les contributions réunies dans ces deux volumes fournissent un large panorama européen de ces occurrences, offrant un large éventail de synergies et d'affinités révélatrices."
—SAMBIN ( Hugues), 1572 Oeuvre de la diversité des termes dont on use en architecture reduict en ordre : par Maistre Hugues Sambin, demeurant à Dijon, publié à Lyon par Jean Marcorelle ou par Jean Durant. Bibliothèque municipale de Lyon, Rés 126685.
—SERLIO (Sebastiano ), 1551 Liure extraordinaire de architecture, de Sebastien Serlio, architecte du roy treschrestien. Auquel sont demonstrees trente Portes Rustiques meslees de diuers ordres. Et vingt autres d’oeuvre delicate en diverses especes, Lyon, Jean de Tournes, 1551.
Le premier livre d’architecture et Le second livre de perspective de Sebastiano Serlio furent publiés par Jean Martin pour la première fois à Paris en 1545; le troisième livre, fut publié à Anvers, en 1550 chez Pieter Coecke qui en 1542 avait publié une version pirate du Quatrième livre. Le quinto libro d’architettura traduit en françois par Jean Martin fut édité à Paris en 1547 par Michel de Vascosan ; le Livre extraordinaire le fut àLyon par Jean de Tournes en 1551.
—SERLIO (Sebastiano ), 1540 Il terzo libro ... Venise F. Marcolini
La Regola delli cinque ordini d’architettura de Vignole sans cesse ré-éditée depuis 1562, fut publiée en édition quadrilingue in-folio (italien, néerlandais, français et allemand) en 1617 par Willem Jansz Blaeu à Amsterdam et, ensuite, en français en très nombreuses éditions parisiennes : Regles des cinq ordres d’architecture de Vignolle / Reveuee (sic) augmentees et reduites de grand en petit par le Muet , Paris, chez Melchior Tavernier, 1631-1632 ; chez Pierre Mariette en1644-55 ; 1702 ; chez Nicolas Langlois, s.d. ; Seconde édition, 1657,1658, 1684 ;Reigle de cinq ordres d’architecture éd.par Pierre Firens,s.d. [1620-1630] ; chez Pierre Mariette, 1662, 1665 ; chez Nicolas Bonnart, 1665 ; éd. Jean Le Pautre, chez Gérard Jollain, 1671, 1691,1694.
— VITRUVE, 1511, De architectura M. Vitruvius per Jocundum solito castigatior factus cum figuris et tabula, traduit par Fra Giovanni Giocondo en 1511 à Venise chez G. da Tridentino avec 136 gravures sur bois