Le gisant de Perronelle de Boutteville et Bertrand de Trogoff (église Notre-Dame-de-l'Assomption au Faouët par l'atelier du Folgoët. Début XVe, granite, h. 1,70, 1. 0,86. Gisants représentés sur un lit funéraire : à gauche, personnage masculin (Bertrand de Trogoff?), coiffé en calotte, vêtu d'une armure; à droite, personnage féminin (Perronnelle de Boutteville,?) portant une coiffure à cornes.
Ce gisant en pierre est placé dans l'angle sud-ouest de la nef, à droite de l'entrée, à l'angle de la tour, dans un endroit assez sombre et empoussiéré, et le recul nécessaire à son examen est limité par la présence d'une ancienne cloche conservée devant lui.
Il était placé jadis, selon Monnier, au centre du bas-côté sud ; un couple de seigneur y est représenté mais leurs visages ont été martelés à la Révolution, de même que tout indice d'identification. Les propositions n'ont pas manquées, et Benjamin Jollivet avait suggéré d'y voir le tombeau de Jean V et de sa femme Jeanne de France, tandis que J.-M. Luzel suggérait d'y voir les seigneurs de Lestrezec, ou Monnier ceux de Kerambellec. En 1936, René Couffon, toujours péremptoire, n'affirme y distinguer "encore nettement" les armes des du Parc de la Roche-Jagu. Puisque le tympan de la maîtresse-vitre porte les armes en prééminence de Henry du Parc d’azur au léopard d’or, brisé d’un lambel de gueules et et de Catherine de Kersaliou d’argent à trois fasces de gueules au lion brochant, cela lui permit d'affirmer, dans une publication aussi sérieuse que celle de la Société archéologique de France, qu'il s'agissait du gisant de ce couple, dont l'épouse est décédée en 1433. C'est ce qu'on retrouve aujourd'hui repris partout.
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Ou presque. Seven Lemaître, dans la 173e cession du Congrès archéologique de France de 2015, ne cite son prédécesseur devant le même Congrès qu'avec prudence et au conditionnel. Pas plus que moi, il ne semble avoir pu constater les armoiries des du Parc. Voici sa description :
"René Couffon a cru reconnaître l'écu de Henri du Parc seigneur de la Roche-Jagu, cité en 1421 comme garde de la foire de Saint-Barnabé en Runan. Il serait accompagné de sa femme Catherine de Kersaliou, décédée en 1433, dix ans après son mari. Elle est enterrée le 15 novembre 1433 à Runan (René Couffon, "La Roche-Jagu", Soc. d'Emul. des Côtes-du-Nord p. 38).
Leurs têtes reposent sur des coussins tenus par des anges. Henri du Parc, écimé, porte une armure de plates complètes aux genouillères bien tracées et Catherine de Kersaliou porte une longue robe au drapé lourd et ceinturée au dessus de la taille, selon la mode du XVe siècle."
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Pour respecter les conventions, j'adopte dans ma description, comme le fait S. Lemaître, l'hypothèse de René Couffon, qui reste plausible.
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Qui est Henry du Parc ?
Il est le fils de Maurice du PARC, seigneur du Parc ca 1321-1383..1390, Capitaine de Quimper, chambellan du duc de Bretagne, et de Catherine de TROGUINDY, dame de la Roche-Jagu ca 1340-1418. Catherine de Troguindy mourut en 1418 et son fils aîné , Henri du Parc , rendit au duc minu de sa succession le 25 juin de la même année.
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DU PARC d'azur au léopard d'or, au lambel de gueules. Et Morice du Parc, un escuier hardy. MAURICE DU PARC, seigneur du dit lieu, Paroisse de Rosnoën, Evêché de Cornouailles, ainsi qu'il le dit lui-même dans l'enquête pour la canonisation de Charles de Blois, en 1371 (D. Morice, T. II., Pr., col. 9), ne doit point être confondu, comme on l'a fait, avec une autre famille du Parc, sr. du dit lieu, Paroisse du Gouray, et de Locmaria, Paroisse de Ploumagoër, qui s'armait d'argent à trois jumelles de gueules.
Les du Parc de Rosnoën,, issus en ramage des vicomtes du Faou, portaient les armes de ceux-ci, brisées d'un lambel.
Maurice, l'un des champions du combat des 30, puis capitaine de Quimper pour Charles de Blois, contribua, en 1359, pour la somme de 5.000 écus, à la rançon de son maître prisonnier en Angleterre, et, à sa mort, passa au service de France. Suivant l'enquête susdite, il était âgé, en 1371, d'environ 50 ans, ce qui lui donne l'âge de 20 ans lorsqu'il fit ses premières armes au chêne de Mi-Voie. En 1372, il conduisait, avec Alain de Beaumont, l'aile gauche de l'armée du connétable à la déroute des Anglais devant Chisey, en Poitou, et était gouverneur de La Rochelle, en Aunis, en 1373 (Le Laboureur, p. 54). Les anciennes Réformations et Montres de Cornouailles mentionnent plusieurs membres de la même famille, savoir :
Henry, sr. du Parc, employé dans la Réformation de 1426, Paroisse de Rosnoën (*) ; Jean, archer en brigandine dans la Montre générale de 1481 ; autre Jean, sr. du Parc, Réformation de 1536, père de 1° Jean, mineur en 1562 et représenté à une Montre de cette année, par Jacques du Parc, son oncle paternel, en équipage d'arquebusier à cheval ; 2° Jeanne, Dame du Parc, après son frère mort sans hoirs, mariée, vers 1560, à Jean Troussier, sr. de la Gabetière. De ce mariage naquit une fille, Jeanne Troussier, Dame du Parc, mariée, en 1581, à Charles de Penmarc'h, sr. de Coëténez, Paroisse de Plouzané, dont la petite-fille, Marie-Françoise de Penmarc'h, Dame de Coëténez et du Parc, épousa, vers 1675, François Le Veyer, sr. de Kerandantec, Paroisse de Plouzané, et du Ster, Paroisse de Cléden-Poher.
Gabriel Le Veyer, fils des précédents, seigneur du Parc, de Coëténez et du Ster, mourut au Parc et fut enterré, en 1724, à Rosnoën, laissant de son mariage avec Marie-Perronnelle de Kerléan :
Roberte-Angélique Le Veyer, Dame du Parc, de Coëténez et du Ster, épouse de Claude-René de Guer, marquis de Pontcallec, frère de Clément décapité, en 1720, pour sa participation à la conspiration de Cellamare.
(*) Je n'ai pu vérifier cette information.
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Henry du Parc Sr de la Roche-Jagu épousa Catherine de Kersaliou. Il décéda en 1423 entre le 2 octobre et le 19 décembre. Certains auteurs indiquent qu'il décéda à Runan, ce que je n'ai pas pu confirmer et que je tiens comme douteux, ou basé sur la présence de ce gisant.
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Son nom apparait en 1495 dans un acte ducal qui concède à Runan l'établissement d'une foire le jour de la saint Barnabé (le 11 juin), et qui attribue la garde et le gouvernement de cette foire à Henry du Parc et à ses héritiers :
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1495 Concession d'une foire annuelle au bourg de Runan . Copie de 1683 ( Ar . paroissiales de Runan )
A Vannes, 1421, 19 mai. « Jehan. A tous, salut. Comme à nous de nos droicts royaux et ducheaux, souverainetez et noblesses appartiennent la creatiuon et institution des foires et marchez en nstre duché et non à aultre, et nous ayant suplié et requis les tresoriers et fabriques de l'eglise et chapelle de Nostre Dame de Runargan, en la chatellenie de Chateaulin sur Trieu, pour augmentation de lad. Chapelle et du service divin en icelle, et pour le bien de la chose publique, leur donner et octroyer une foire annuelle et perpetuelle, au jour et feste de la St Barnabé apostre, o les debvoirs, esmoluements et prerogatives y appartenances, Scavoir faisons que nous avons aujourd'hui creé et octroyé aud. Fabrique d'icelle chapelle une foire annuelleet perpetuelle aud. Lieu de Runargan, aud. Jour de St Barbabé, à en jouir avec des debvoirs, esmoluements et prerogatives appartenantz a droitct de foire ; et à ce qu'elle soit seure et en puisse mieux valloir, avons voullu e octroyé, voulons et octroyons que nostre bien amé et feal ch[evali]er et chambellan messire Henry du Parc, s[eigneu]r de la Roche Jagu, ait la garde, gouvernement et juridiction et seigneurye de lad. Foire avec les sequelles et deppandances d'icelle juridiction, à en jouir luy et ses heritiers en perpetuel. Sy mandons et commendons à nos seneschaux, allouez et procureurs de Treguier et du resotrt de Gouelo, etc. etc. En tesmoign de ce, nous avons fait sceller cestes nos presantes en las de soye et cire verte.
Signe, Par le duc. Par le duc, de son commandements et en son conseil, présents : l'evesque de Dol, l'abbé de St Mahé, le sire de Molac, Pierre Eder, chevalier et Jehan de Kermellec.
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Ses armes, et celle de Catherine de Keraliou, se trouvent dans le tympan de la maîtresse-vitre datée de 1423 par déduction héraldique, sous celle des du Perrier
"Au troisième rang, un écu aux armes des du Perrier et un autre losangé mi-parti : au I, du Perrier, au II, écartelé Gaudin et Brienne de Beaumont, armes de Jean du Perrier, sire de Quintin et du Perrier et de Constance Gaudin sa femme, fille de Péan et de Jeanne Riboule. Enfin au dessus des troisième et quatrième panneaux, un écusson losangé mi-parti du Parc de la Rochejagu et de Kersaliou et autre des armes pleines des du Parc, armes de Henry du Parc Sr de la Rochejagu et de sa femme Catherine de Kersaliou.
Ces grandes armoiries permettent de dater avec une très grande précision la verrière. En effet, l'on sait, d'une part, que c'est par contrat du 3 janvier 1423 que Jean du Perrier, veuf d'Olive de Rougé, épousa Constance Gaudin, et d'autre part, qu'Henry du Parc Sr de la Rochejagu décéda en cette même année 1423 entre le 2 octobre et le 19 décembre. L'on peut donc dater la commande de cette verrière de l'an 1423, les armes d'Alain du Parc, frère et héritier d'Henry, et de sa femme Miette de Tréal n'y figurant pas. Cependant les armes de Catherine de Kersaliou précédant les armes pleines des du Parc indiquent que lors de son exécution, Catherine était sans-doute veuve. Probablement était-elle même la donatrice de la verrière, comme semble l'indiquer la présence de sainte Catherine, elle mourut le 15 novembre 1433.". (R.C.)
Le plateau de granite clair (leucogranite ?) sculpté en haut relief des deux membres du couple est la réunion de deux pièces de pierre, au bord arrondi mais sans moulure, celle de Henri du Parc étant près de deux fois plus large que celle de son épouse. Elles sont posées sur un soubassement fait d'un appareillage de bloc maçonnées, et nous n'avons accès qu'à deux des côtés.
Du côté est, ces pierres sont de taille irrégulières.
Du côté nord, elles sont régulières et les quatre blocs font toute la hauteur du soubassement. La pierre la plus à gauche porte les traces d'un écu martelé, mais ces traces sont ininterprétables. Un nouvel examen à jour frisant y distinguerait peut-être le blason des du Parc , mais la photo que j'ai prise peine à m'en convaincre. Les autres faces, inaccessibles, seraient-elles plus parlantes?
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Armes de la famille du Parc, d’azur au léopard d’or, brisé d’un lambel de gueules .
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Les deux époux ont les mains jointes, et leur tête encadrée d'anges repose sur un coussin .
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Les pieds des époux reposent sur deux animaux opposés par l'arrière-train et dont la tête et le haut du tronc ont été martelés : cela souligne l'importance de ces animaux comme indice de privilège seigneurial. Il pourrait s'agir de deux lévriers pour Catherine de Kersaliou et de deux lions (ou deux chiens de chasse ?) pour Henri du Parc.
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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L'écu martelé.
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Henri du Parc.
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Il est figuré mains jointes, en armure de plates complète non recouverte d'un tabard mais sans casque, et deux anges de tendresse l'entourent. À sa droite comme à sa gauche, les anges, tournés vers lui, posent leurs mains sur le moignon de l'épaule et sur le bras.
La présence de ces anges entourant le défunt est presque constante sur les gisants des nobles bretons. On les voit déjà sur le gisant de Roland de Dinan, le plus ancien (1222).
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Il ne reste vraiment rien de la tête, et de la chevelure.
Les deux spalières (protection des épaules) ont trois lames articulées, et une forme très oblique, sans arrondi d'épaule.
Puis viennent les cubitières et les brassards, concernés par le martèlement.
Les mains jointes ont été martelées mais devaient être nues.
Sous les bras, se voit la sangle de fixation, bien détaillée, de la cuirasse.
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La tête des anges a été également martelée. Nous distinguons les ailes et leur plumes. Les anges sont vêtus d'une tunique qui descend jusqu'aux pieds, qui semblent nus.
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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L'armure décline ensuite la braconnière, les cuissardes, les grèves et les solerets, à bouts pointus.
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Le seigneur porte une épée courte le long de sa jambe droite, et une épée longue du coté gauche.
L'épée longue est dans son fourreau, et sa taille approche un mètre, si on la compare à la distance entre la ceinture et la cheville du défunt. Elle évoque donc l'épée de taille.
En Occident, le plus courant est l'épée de taille, longue (près d'un mètre) et plate, à deux tranchants. Au XIIe siècle, le pommeau rond se répand et remplace les pommeaux ovales ou lobés des épées normandes. Des modèles à la garde recourbée apparaissent. L'estoc (pointe) peu prononcé (bien que fonctionnel) tend à s'effiler : l'épée d'estoc, plus fine et plus courte (mesurant entre 60 et 75 cm du talon à la pointe), à l'extrémité acérée, plus adaptée aux coups de pointe, devient plus usitée dès la fin du XIIIe siècle de l'épée d'estoc. Son talon est large (jusqu’à 10 cm) et l'estoc très pointu permet de transpercer l'armure entre les plates qui apparaissent alors. À la fin du XIIIe siècle apparaissent les épées longues (à deux mains) telles que le brand d'arçon qui, comme son nom l'indique, est porté sur la selle et est utilisé par le chevalier démonté. Les épées bâtardes (dites à une main et demi) se développent au XVe siècle. Leur longueur et leur masse modérées ainsi qu'un excellent équilibrage (notamment grâce aux pommeaux en ampoule) en permettent l'usage à cheval et à pied, à une ou deux mains. Les épées très longues telles que les espadons restent d'usage au XVe siècle et jusqu'au début du XVIe (Zweihänder des Lansquenets)." (Wikipedia)
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L'épée courte va de la ceinture au genou, soit 50 cm environ. Elle n'a pas de fourreau, il s'agit plutôt d'une dague. Voir les deux épées et la dague de Jehan de Kerouzéré (1460) ou de son père Éon (mort en 1435) : la proximité des dates des deux gisants en rend la comparaison précieuse.
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Catherine de Kersaliou.
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Sa tête et ses cheveux, ses mains jointes, une partie de ses avant-bras, la tête des anges et celles de ses animaux emblématiques (lévriers ?) ont été martelés.
Elle est vêtu d'une robe descendant jusqu'aux pieds, à décolleté en V souligné par un épais revers, et dont la ceinture, une bande d'étoffe large, sépare un bustier d'une "jupe" plissée. L'ourlet inférieur forme une jolie courbe festonnée au dessus de l'extrémité des chaussures, qui sont pointues.
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Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le gisant (granite ?, après 1433 ?) de Henry Du Parc (?) et Catherine de Kersaliou (?) à l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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CONCLUSION.
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Il semble indispensable de soumettre ce gisant à un nouvel examen qualifié, afin de tenter de préciser si, oui ou non, les armes des du Parc, avec leur léopard et leur lambel, peut être découvert par un éclairage adapté ou par un examen plus attentif.
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SOURCES ET LIENS.
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—ALAIN (Agnes), 2020, Sortie fontaines et petits patrimoines
L'auteur cite Rolland 2016 : "À droite en rentrant, les gisants d'Henry Du Parc , seigneur de La Roche-Jagu (mort en 1 423), et de son épouse Catherine de Kersaliou (décédée en 1433). On devine à leurs pieds des corps de chiens qui sont le symbole de la fidélité. L’épée du seigneur Henry du Parc est située le long de son corps ce qui signifie qu’il est mort dans son lit et non pas au combat."
— COUFFON René Couffon, « Runan », Congrès archéologique de France, Société française d'archéologie « 107e session, 1949, Saint-Brieuc », 1950, p. 150-164.
Cette tombe, reléguée au bas de l'église a été extrêmement mutilée pendant la Révolution. L'on y distingue, cependant, deux gisants en ronde bosse portant les costumes du début du XVe siècle.
Quoique les écus qui la décorent aient été soigneusement martelés, on y distingue, cependant, encore nettement les armes des du Parc de la Roche-Jagu, ce qui permet d'affirmer que ce tombeau est celui d'Henry du Parc et de Catherine de Kersaliou, dont nous avons mentionné les prééminences [sur le tympan de la maîtresse-vitre].
— DURAND ( Gildas), 1999,, « Nouvelle théorie sur le retable de Runan. Ses conséquences pour la connaissance de l'art gothique breton », Les dossiers du Centre de Recherche et d'Archéologie d'Alet, no 18, 1999, p. 91-104.
—Infobretagne
http://www.infobretagne.com/runan-eglise.htm
— LEMAÎTRE (Stéven), 2015, « Runan, église Notre-Dame-de-Miséricorde », Congrès archéologique de France, Société française d'archéologie « Monuments des Côtes d'Armor, le « Beau Moyen Âge », 173e session, 2015 », 2017, p. 313-326.
—MONNIER (Louis), 1900, « L'église de Runan, ses origines, son histoire », Revue de Bretagne, de Vendée et d'Anjou, vol. 24, 1900, p. 195.
"Il y a quelques années s'érigeait au milieu de l'une des nefs latérales un sarcophage élevé, représentant un chevalier armé de toutes pièces, mains jointes, couché près de sa femme en habits de châtelaine, les pieds reposant sur des lévriers, la tête soutenue par des anges. M. Luzel (Revue De Bretagne 1868) assure reconnaître dans ces personnages des seigneurs de Lestrézec. Ou bien encore des seigneurs de Kerambellec, les restaurateurs de la chapelle du Rosaire ?. Ce tombeau, aujourd'hui placé à l'angle de la tour et des fonts baptismaux occupait jadis le centre de la nef méridionale.
Mais quelque mystère dont il demeure entouré, ce n'est certes pas là le monument funéraire de Jean V et de Jeanne de France comme le prétend, dans sa «Géographie des Côtes-du-Nord, M. B. Jollivet."
Ces sablières ornées et polychromes de la charpente sont contemporaines de la restauration de l'église de Runan en 1895. Elles sont signées de LE MERER sculpteur et réalisées sur commande de la fabrique paroissiale. Elles n'ont jamais fait l'objet de descriptions détaillées et monographiques, malgré leur intérêt, bien que la thèse de référence sur les sablières bretonnes par Sophie Duhem les mentionnent. L'hypothèse souvent reprise d'une description des péchés et des vices a été réfutée par S. Duhem pour la raison (discutable ?) qu'il ne s'agit pas d'une production médiévale, mais moderne. Ces animaux de bestiaire restent inséparables de leur valeur allégorique traditionnelle.
Jean-Paul Rolland, en 2016, les analyse avec soin, les illustre de 12 photographies, en propose une interprétation allégorique du bestiaire, mais il les date du XVIe siècle ; son interprétation séparant les représentations négatives, au nord, orientés vers le fond de la nef, et positives, au sud, orientés vers le chœur n'est pas validée par la réalité, puisque ces orientations sont opposées à celles qu'il décrit.
Le site Infobretagne en présentait jusqu'à présent le relevé photographique le plus complet.
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Depuis le chœur vers le fond de la nef, nous trouvons :
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I. Du côté sud :
1 à 4 : Les quatre éléments du Tétramorphe caractérisant les quatre évangélistes : Taureau, Lion, Aigle, Ange.
5. Un cheval
6. Un dragon couronné à 7 têtes et à queue étoilée (bête de l'Apocalypse)
7 à 19 : dix des douze signes du Zodiaque (en désordre), les deux autres étant supposés cachés par la tribune. Et un intrus, le homard!!
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II. Du côté nord :
1. Un éléphant
2. Un dromadaire
3. Un perroquet
4. Un mouton
5. Un pélican nourrissant ses petits de son sang
6. Un aigle
7. Un coq
8. Un chien
9. Un dauphin
10. Une tortue.
11. Un cochon
12. Un serpent
13. Un bouc
14. Une grenouille
15. Un paon
16. Une inscription de signature
17. Un crocodile
18. Un bœuf (?).
19 et 20 : cachés.
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Le sculpteur Le Mérer.
François-Marie Luzel mentionne dans son Journal de route un artiste de ce nom cà qui il rend visite à Lanvellec (au sud de Lannion) en mai 1865 :
"Nous allons voir un menuisier artiste du pays, nommé Le Mérer. Il travaille assez habilement le bois, restaure les vieux meubles, fait des chaires à prêcher et des confessionnaux sculptés pour les églises du pays, et généralement tout ce qui concerne son état. Son père, Phulupic ar Mérer, était aussi un menuisier renommé et, en outre, tournait assez agréablement une chanson bretonne."
Le site Patrimoine.bzh recense plusieurs pièces de mobilier religieux attribués à Philippe Le Merer de Lannion (vers 1870) et ses fils. Parmi ceux-ci, un Philippe Le Mérer, toujours de Lannion, effectue des boiseries d'un couvent de Tréguier en 1890, tandis qu'un Le Merer de Lannion travaille en 1902 et en 1923 à Ploubezre.
Enfin, une exposition de 2002 apporte toutes les données nécessaires à la synthèse de ces informations :
"En créant l'exposition Le Mérer, les bénévoles, réunis autour de Joël Vandenberghe, ont voulu faire connaître une grande famille d'ébénistes qui a oeuvré à Lannion pendant un siècle, de 1848 à 1950.
Jean-Philippe Le Goareguer, descendant direct de Philippe Le Mérer, a mis à disposition plans, photos, documents sur la famille et les ateliers Le Mérer, situés à Brélevenez. Cette histoire commence aux alentours de la fin du XVIIe siècle, à Plestin-les-Grèves, où est installée la famille Le Mérer, meunier de son état. Elle va se poursuivre au moulin du Roudour, à Plouzélambre, où va naître Philippe 2, fils du meunier Philippe 1, qui abandonnera le moulin pour se consacrer à la menuiserie et aux poèmes. C'est aux environs de 1780 que les premiers Le Mérer s'installent à Lanvellec, avec le mariage de Philippe 2.
Ebénistes sculpteurs au service de l'église
Vers 1848, Philippe 4, petit-fils de Philippe 2, abandonne ses deux frères Jean-Baptiste et Pierre-Marie, menuisiers sculpteurs à Lanvellec, et part s'installer à Lannion où il se mariera. Il remporte le premier prix de sculpture à Saint-Brieuc, en 1846, et se fait remarquer par l'évêque de Saint-Brieuc - Tréguier, Mgr David, qui va lui passer commande de plusieurs mobiliers d'église. En effet, à cette époque (1865-1900), les constructions d'église sont importantes et le style néo-gothique inspiré par les travaux de Viollet-Le Duc est principalement utilisé. Les ateliers vont ainsi construire bon nombre d'autels, de chair à prêcher, de stalles que l'on retrouvera un peu partout, en Trégor mais aussi à l'étranger, et même au Vatican, puisque Philippe 4 offre, en 1888, un porte-missel au pape Léon XIII, à l'occasion de son jubilé sacerdotal. Un présent qui lui vaudra une médaille d'argent à l'exposition vaticane.
Une oeuvre qui subsiste au travers de l'orgue
Toute l'oeuvre de la famille Le Mérer subsiste et l'on peut la découvrir dans bon nombre d'églises des Côtes-d'Armor (Paimpol, Lannion, Bégard, Tréguier, Ploubezre, Yvias, Bulat, etc.). Bien entendu, l'église Saint-Brendan, de Lanvellec, abrite quelques-unes de leurs réalisations, dont la plus fameuse, la chair qui a vu la participation de toute la famille à sa fabrication. La Première Guerre mondiale et la séparation du Clergé et de l'Etat ont mis à mal l'atelier, qui fermera ses portes dans les années 1950, après avoir employé pas loin d'une cinquantaine de personnes. La famille Le Mérer est étroitement liée à l'orgue de Dalham, qui fait les beaux jours du festival de musique ancienne, car ils ont été pendant des années organistes de l'église Saint-Brendan. Constance Le Mérer publiera même quelques vers acides sur le démantèlement de l'orgue." Le Télégramme 10 juillet 2002
Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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DESCRIPTION : LE CÔTÉ SUD DEPUIS LE CHOEUR.
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Tous les éléments sont reliés par un rinceau à larges feuilles.
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Les quatre emblèmes des évangélistes, issus du Tétramorphe.
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Ils montrent plus de souci de vérité naturaliste que de référence à l'iconographie chrétienne, et les deux premiers ne sont pas ailés.
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1. Le taureau de saint Luc.
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Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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2. Le lion de saint Marc.
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Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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3. L'aigle de saint Jean.
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Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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4. L'ange de saint Matthieu.
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Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Le cheval, et la Bête de l'Apocalypse.
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5. Le cheval.
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Je ne sais comment l'insérer dans cette séquence à thématique chrétienne, à moins d'y voir une figure métonymique des quatre Cavaliers de l'Apocalypse.
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Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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6. La Bête de l'Apocalypse.
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Sa queue, dardée en flèche, est entourée de quatre étoiles. Les sept têtes sont couronnées.
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Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Les douze signes zodiacaux.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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7. Le Verseau.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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8. Les Poissons.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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9. Le Bélier.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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10. Le Taureau.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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11. Les Gémeaux.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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12. Le homard.
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Il n'est mentionné ni dans la description de Jean-Paul Rolland ni dans celle de Michel Lascaux. J'ai hésité avec la langoustine, en raison de sa couleur. On fera comme on voudra. Mais ce n'est pas la langouste, qui n'a pas de grosses pinces.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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13. Le Lion.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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14. Le Sagittaire.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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15. La Balance.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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16. Le Cancer.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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17. Le Centaure.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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18 et 19 : la Vierge et le Capricorne ? On admettra qu'ils sont cachés par la tribune.
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On voit en effet le début d'une figure zodiacale, qui montre que la sablière se poursuit jusqu'au fond de la nef.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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DESCRIPTION : LE CÔTÉ NORD DEPUIS LE CHOEUR.
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1. L'éléphant.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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2. Le dromadaire
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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3. Le mouton.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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4. Le Perroquet.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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5.Le Pélican.
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Comme dans le symbole chrétien du Christ et de l'Eucharistie, il se blesse la poitrine avec son bec pour nourrir ses petits.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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6. L'aigle.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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7. Le coq.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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8. Le chien.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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9. Le dauphin.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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10. La tortue.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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11. Le cochon.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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12. Le serpent.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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13. Le bouc.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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14. La grenouille.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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15. Le paon.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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16. L'inscription.
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LE MERER SCULPTEUR FAIT PAR LE SOIN DE LA FABRIQUE.
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Je rappelle que la "fabrique" désigne les administrateurs (souvent au nombre de deux) désignés pour l'année pour gérer les biens et revenus de la paroisse et décider des travaux à effectuer.
L'inscription est sculptée, en lettres gothiques peintes en rouge, sur un phylactère blanc dont l'extrémité de gauche se fond ou se superpose avec la gueule d'un animal (évoquant une belette par exemple). Celui-ci mord la queue du dragon qui suit.
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17. Le crocodile.
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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18. Le bœuf (ou chien ??).
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Les sablières ornées (bois polychrome, Le Merer, v.1895) de l'église de Runan. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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19 et 20. Il nous reste à deviner les deux animaux cachés par la tribune.
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Note : cette tribune date de la fin du XIXe siècle, elle est donc contemporaine des sablières, mais légèrement postérieure.
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SOURCES ET LIENS.
— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne (XVe-XVIIe s.), Presses universitaires de Rennes, 1997 - 385 pages, pages 2, 19, 39, 46, et 265.
— WIKIPEDIA
"L'ensemble de l'église est couvert par une voûte lambrissée. Dans le vaisseau central, les sablières qui portent le lambris sont sculptées et représentent, côté nord [sic ], les signes du Zodiaque, côté sud, des animaux symbolisant les vices, tirés d'un bestiaire. Cette voûte de bois, ainsi que celles qui la contrebutent dans le bas-côté sud, date de la restauration du xixe siècle "
— COUFFON René Couffon, « Runan », Congrès archéologique de France, Société française d'archéologie « 107e session, 1949, Saint-Brieuc », 1950, p. 150-164.
— DURAND ( Gildas), 1999,, « Nouvelle théorie sur le retable de Runan. Ses conséquences pour la connaissance de l'art gothique breton », Les dossiers du Centre de Recherche et d'Archéologie d'Alet, no 18, 1999, p. 91-104.
—Infobretagne
http://www.infobretagne.com/runan-eglise.htm
— LASCAUX (Michel), 1987, Runan l'église des Chevaliers de Malte.
— LEMAÎTRE (Stéven), 2015, « Runan, église Notre-Dame-de-Miséricorde », Congrès archéologique de France, Société française d'archéologie « Monuments des Côtes d'Armor, le « Beau Moyen Âge », 173e session, 2015 », 2017, p. 313-326.
— MONNIER (Louis), 1900, « L'église de Runan, ses origines, son histoire », Revue de Bretagne, de Vendée et d'Anjou, vol. 24, 1900, p. 195.
Senven-Léhart est un démembrement de l’ancienne paroisse primitive de Plésidy . Le nom de la localité est attesté sous la forme Saint Neven en 1543 : Senven-Léhart vient du breton Néven (vieux breton Numin) et de Léhart, nom du fief des seigneurs de Léhart, eux-mêmes juveigneurs de la maison d'Avaugour.
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Le calvaire de Senven-Léhart est un calvaire en granite et kersantite datant du milieu du XVIIe siècle. Il est classé monument historique depuis le 12 octobre 1964.
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Avec le calvaire de Senven-Léhart, Roland Doré réalise une œuvre importante sans renouer avec la tradition du grand calvaire monumental (Plougonven, Pleyben, Plougastel, ...) dont l'époque est révolue. "Il peut, avec ses 18 personnages, être qualifié de calvaire de taille moyenne" (Le Seac'h) ; on le comparera aux vestiges du calvaire de Plourin-lès-Morlaix, dont 15 statues sont conservées.
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Premières descriptions : deuxième moitié du XIXe et début du XXe.
— JOLLIVET (Benjamin ) 1856, Les Côtes-du-Nord: histoire et géographie, Page 221
« On admire, dans le cimetière, un magnifique calvaire en pierre de Kersanton, sur lequel sont sculptés dix-huit ou vingt personnages d'une assez grande dimension. On a eu la malencontreuse idée de badigeonner de rouge ce calvaire, de telle sorte que vu à quelques pas seulement, il semble fait de bois peint, ce qui détruit évidemment tout l'intérêt qui s'attache à ce monument. Nous conseillons de le faire gratter par un ouvrier intelligent ; ce sera une opération peu coûteuse, dont la paroisse ne refusera certainement pas de faire les frais."
— Société archéologique et historique des Côtes-du-Nord, Saint-Brieuc · 1884, Mémoires de la Société archéologique et historique des Côtes du Nord.. - Page 48
"Ajoutons que le nombre des statues qui décorent le calvaire de Senven-Lehart est exactement de 12 et non de 18 ou 20, comme dit Jollivet. « Quant au badigeon dont il est question chez cet auteur, m'écrit M. l'abbé Le Febvre, les morsures du temps lui ont bien fait perdre de sa crudité... En 93, craignant pour leur calvaire, les habitants détachèrent Christ, larrons, chevaliers et statues et les enterrèrent dans un champ près de la chapelle. Le monument, quoique fort beau, ne porte que trop de traces de cet enlèvement . précipité: les deux chevaux et quatre des statues ne tiennent que par le ciment qui relie leurs parties brisées; l'un des chevaux est littéralement noyé jusqu'au ventre dans le ciment ".
— DESPORTES (P. ), 1914, Ma Bretagne: de la Rance au Douron - Page 72
"Après le calvaire de Lanrivain , le plus monumental des Côtes - du - Nord , il faut citer celui de Senven-Léhart que décorent une douzaine de personnages , dont deux statues équestres . En 1793 , les habitants enlevèrent eux - mêmes les statues de leur calvaire, pour les mettre à l'abri des démolisseurs. Mais il reste des traces malheureuses de cet de cet enlèvement trop hâté ."
— STANY-GAUTHIER (Joseph) 1950, Les calvaires bretons - Page 26.
"SENVEN - LÉHART Conçu suivant un parti différent , il présente un soubassement très simple avec trois croix aux fûts cylindriques portant d'intéressantes figures mais le morceau sculptural capital est la Pietà placée au pied du fût central. A la base des croix des larrons il y a, d'un côté la Madeleine, de l'autre une Sainte-Femme [sic]. Aux deux extrémités du socle se dressent les cavaliers."
— La description la plus complète est celle des pages 212-214 d'Emmanuelle LE SEAC'H dans son ouvrage sur les sculpteurs en pierre de Basse-Bretagne paru en 2014, et illustré de plusieurs clichés détaillés.
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Décompte des 18 personnages.
Il est écrit partout, y compris dans les articles officiels, ou de référence (Le Seac'h) que le calvaire ne conserve que 11 , ou 12 (C. Le Goffic) statues contre 19 à l'origine. Mais personne ne cite la source de ce décompte initial ("Seules onze statues demeurent sur les dix-neuf qu'il comporte à l'origine. La disposition actuelle des personnages sculptés serait due à une reconstruction après la Révolution." Wikipedia). D'autre part, je compte aujourd'hui (juin 2022) 17 personnages. 13 sur la face ouest (ne pas oublier les deux anges) et quatre sur la face est. On peut ajouter un ange au calice agenouillé placé sous les pieds du Christ sur un culot sur la face occidentale du fût. Lors de ma visite, et donc sur mes clichés, le culot était vide, comme sur le cliché du site monumentum.fr. Mais il est décrit par Le Seac'h p. 212), et on le voit sur les CPA et autres documents photographiques récents dont celui de Le Seac'h. Si on compte ce personnage, cela porte le total à 18. Donc proche du chiffre donné par le premier descripteur, Jollivet, qui indiquait 18 à 20 personnages.
L'ange au calice, actuellement manquant, avait été scellé par un procédé sensible au gel et sa fixation n'était plus assuré : le maire de la commune, monsieur Gilbert Burlot, l'a placé en lieu sûr et le fera remettre en place avant la fin 2022 (communication personnelle).
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Reconstitution.
Ce calvaire adoptait-il jadis la composition, habituelle, d'un calvaire à un croisillon ( avec Marie et Jean de chaque côté) ou à deux croisillons (les deux cavaliers occupant le second) ? On peut objecter que, dans ce cas, les statues de la Vierge et de Jean seraient géminées respectivement à celle des saints Pierre et Yves.
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Commanditaire.
Le commanditaire pourrait être selon Le Seac'h (*) Maurice de Perrien de Crénan qui a érigé la chapelle de Léhart [celle de Saint-Tugdual en Pen Léhart ?] en église tréviale en 1614. La seigneurie de Léhart appartenait aux Nepvou, une branche lointaine des ascendants des Perrien, depuis 1565 environ.
(*)Le Noir de Tournemine (H.), Aperçu de l'histoire de Crénan, Saint-Brieuc 1911, réimp. Paris 2003 p. 250.
Pourquoi ne pas penser plutôt à Pierre de Perrien (1616-1670), son fils, seigneur de Léhart et marquis de Crénan ? Grand échanson du roi et maréchal de camp en 1649, gouverneur de la Bretagne, il épousa en 1644-1645 Madeleine du Bueil.
En effet, c'est probablement lui qui commanda à Roland Doré (après 1645) les quatre sculptures en kersanton conservées dans la cour du château de Trécesson à Campénéac, où le comte Henri de Pontbriant, descendant de la famille de Perrien de Crénéan les installa. Elles provenaient du parc du château de Crénan au Fœil près de Quintin. Les quatre statues en pied seraient celles de Pierre de Perrien et de son épouse, ainsi que de ses parents Maurice, et Anne d'Urvoy. Les visages aux pupilles creusées sont typiques du sculpteur, au même titre que les statues de ce calvaire.
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Le sculpteur.
Je ne reviens pas sur la biographie et le corpus des œuvres de Roland Doré, installé à Landerneau et actif de 1618 à 1663, puisque ce blog s'attache à en découvrir les sculptures si caractéristiques les unes après les autres et a déjà donné toutes ces précisions. J'ai l'habitude de le surnommer le Michel-Ange du kersanton, certes avec exagération mais pour souligner l'importance, dans l'art monumental de Bretagne, de celui qui, obtint le sculpteur royal, et a travaillé, uniquement en kersantite extrait en Rade de Brest, pour plus de 82 paroisses une centaine de croix et de calvaires, 54 apôtres et une kyrielle de statues de saints et de saintes.
Je renvoie à CASTEL et à LE SEAC'H.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Roland_Dor%C3%A9
Ici, seuls les personnages sont en kersantite, les fûts, leurs socles et le soubassement étant en granite.
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Présentation.
Édifié sur le placître de l'église paroissiale, le calvaire est constitué d'un massif en pierre de granite local avec un autel ou table d'offrande sur le côté ouest. Trois croix jaillissent de la plateforme, celles du Christ entouré des Larrons. Sur le socles au pied des fûts des Larrons, les statues de Jean et de la Vierge encadrent une Déploration adossée au fût central. Les deux cavaliers de la Passion (Longin et le Centenier) sont placés sur le dernier degré du soubassement.
"Les expressions des personnages varient, passant de la sérénité pour le Christ, à l'affliction pour les saintes Femmes, sans oublier la caricature grotesque pour le mauvais larron. Le sculpteur fait preuve ici d'un indéniable talent dans la représentation des sentiments humains.
Les traits fins des personnages et la maîtrise des drapés font de ce calvaire une œuvre majeure dans le catalogue du sculpteur." (Le Seac'h p.213)
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DESCRIPTION.
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— LE CÔTÉ OUEST.
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Sur la croix principale dont il manque le sommet (et le titulus INRI) depuis le XXe siècle (elle est intacte sur les CPA), le Christ est entouré de deux anges au calice, taillés dans le même bloc, ou du moins solidaire de celui-ci. Un autre ange au calice était posé plus bas sur la console du fût. L'ange à la droite du Christ tient deux calices, l'un pour le sang de la main droite, l'autre pour l'eau (aqua lateris) du flanc droit.
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Les croix des larrons en forme de tau encadrent le crucifié. Le Bon Larron, les bras liés à la traverse, regarde vers le centre du calvaire. Il est vêtu de chausses plissées et dont la braguette proéminente est dotée de deux ou trois languettes arrondies et de deux boutons ronds . Le Mauvais Larron, lié de la même façon, détourne le regard et tire la langue. Ses chausses sont à crevés (*), la braguette est à trois boutons. Tous les deux sont barbus et ont les cheveux longs, mais le Bon Larron porte une barbe peignée à moustache horizontale alors que le Mauvais Larron a une barbe Louis XIII ou Richelieu (moustache et barbichette pointue) portée vers 1635. L'une des jambes est fléchie, —mais moins que sur les calvaires du XVIe siècle — pour rappeler que selon les évangiles les soldats leur brisèrent les jambes pour mettre un terme à leur agonie.
(*) La mode des crevés est propre au XVIe siècle (François Ier, Henri II) et témoigne d'un anachronisme délibéré de la part du sculpteur et du maintien des traditions hérités des calvaires bretons des ateliers landernéens du XVIe siècle, celles des Prigent (1527-1577) et du Maître de Plougastel (1570-1621) notamment, mais aussi de l'atelier de Brasparts (fin XVe), de Saint-Thégonnec (1550-1610) et de Guimiliau (1575-1589).
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La statue de la Vierge est placée contre le fût du gibet du Bon Larron, et celle de Jean contre celui du Mauvais Larron. Entre eux, contre le fût de la croix, une Déploration à quatre personnages (le terme de "pietà" sera évité, et réservé à la Vierge portant le corps de son Fils, sans autre personnage) associe à Marie une Sainte Femme et Marie-Madeleine, selon le thème des "trois Marie".
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Le cavalier de notre gauche, devant la Vierge, tient en main droite le manche d'une lance, dont la hampe est perdue (mais son trou de fixation atteste de son existence). Il porte l'index de la main gauche sous sa paupière. C'est donc Longin, le cavalier et lancier de l'évangile Jean 19:34, promu centurion dans la tradition médiévale et qui transperça le flanc droit du Christ pour s'assurer de sa mort en faisant jaillir de la plèvre le liquide ("eau" mêlé de sang) d'un épanchement.
Selon la tradition, ce liquide, en s'écoulant le long de la lance ou par projection, vint atteindre l'œil du lancier, qu'il guérit d'un trouble de la vision (taie ?), métaphore de sa conversion à la foi chrétienne : il fut considéré comme un saint : voir Jean de Vignay, traduction (1348) de la Légende dorée de Jacques de Voragine chap. 50 :
Le cavalier à notre droite n'est pas Stéphaston, comme on le lit trop souvent, mais le Centurion converti, celui qui s'est écrié lors de la Passion Vere filius Dei erat iste, "vraiment celui-ci était le fils de Dieu", la première déclaration de foi cité par les évangiles après la mort du Christ Mt 27:54. On le trouve représenté, en symétrie de l'axe de la croix avec Longin, dans les enluminures et les verrières peintes de la Passion, avec souvent le visage et le doigt levé vers le Christ, et un phylactère qui cite ses paroles. Dans Marc ou Luc il s'écrie Vere hic homo justus erat :
Matthieu 27 :54 A la vue du tremblement de terre et de ce qui venait d'arriver, l’officier romain et ceux qui étaient avec lui pour garder Jésus furent saisis d'une grande frayeur et dirent: «Cet homme était vraiment le Fils de Dieu.» Centurio autem, et qui cum eo erant, custodientes Jesum, viso terraemotu, et his quae fiebant, timuerunt valde, dicentes: Vere Filius Dei erat iste. (Vulgata)
Luc 23 47 Le centenier, voyant ce qui était arrivé, glorifia Dieu, et dit: Certainement, cet homme était juste. Videns autem centurio quod factum fuerat, glorificavit Deum, dicens: Vere hic homo justus erat. (Vulgata).
Marc 15:39 : Le centenier, qui était en face de Jésus, voyant qu'il avait expiré de la sorte, dit: Assurément, cet homme était Fils de Dieu. Videns autem centurio, qui ex adverso stabat, quia sic clamans expirasset, ait: Vere hic homo Filius Dei erat.
Malgré la constance de cette figure du cavalier au phylactère qui l'identifie avec certitude, je ne parviens pas à lutter contre Stéphaston, que des auteurs éminents reconnaissent ici. Je pourrais produire les liens vers touts mes études des Passions du Finistère que je serai impuissant contre ce virulent virus, ce mème qui contamine les mémoires, les livres et la toile.
Un seul exemple : sur le calvaire monumental de Plougonven (Prigent), les mots vere filius dei erat sont sculptés sur le côté gauche du cavalier.
Je clame en vain dans le désert. Seule une projection divine saurait laver les yeux des savants prompts à reproduire les dires de leurs pairs.
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Notre cavalier est bien un officier : son armure et son manteau en atteste. Mais, et c'est là encore une tradition iconographique médiévale très établie, des détails suggèrent qu'il ne s'agit pas d'un militaire romain, mais d'un soldat Juif : son scapulaire, mais surtout sa barbe et ses cheveux longs, et plus encore son turban (détail qui, en iconographie de l'époque, indique aux contemporains une origine orientale) sur un chapeau vaguement conique, mais bien différent d'un casque. Il associe les traits d'un centurion et ceux d'un grand prêtre.
Le texte grec, donc originel, utilise le terme hekatontarches, "chef d'une centaine", un officier romain, un centurion. Il n'y a pas d'ambiguïté dans le texte évangélique sur l'appartenance de cet officier à l'armée romaine.
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Les pièces de harnachement des chevaux sont rendus avec un goût moins prononcé pour ces détails que sous le burin des Prigent. L'extrémité de la queue des chevaux est tressée.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Le Christ sur la croix.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Les anges hématophores.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Le bon Larron .
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Le Mauvais Larron .
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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La Vierge au calvaire .
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Saint Jean au calvaire.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Longin tenant sa lance et portant son index sous l'œil gauche.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Le Centenier convaincu de la divinité du Christ.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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La Déploration à quatre personnages.
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Voir les Déplorations de Bretagne (classé par ordre chronologique approximatif) :
De Roland Doré, on retiendra la Déploration, bien différente, du calvaire de Brennilis, et celle, plus proche, de l'église de Châteaulin (avec saint Jean et Marie-Madeleine). Ses Vierges de Pitié (ou pietà) sont plus fréquentes, à Cast, Sainte-Anne-la-Palud, Saint-Claude en Plougastel, Plourin-lès-Morlaix.
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La Déploration (kersanton, Roland Doré, milieu XVIIe siècle) de l'église Saint-Idunet de Châteaulin. Photographie lavieb-aile août 2021.
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Ici, la construction générale est plus proche d'un trapèze que d'un triangle, et le Christ est presque allongé, le tronc cambré sur le chevalet du genou droit de Marie. Les deux bras forment avec le corps une croix. La Sainte Femme soutient la tête et le bras gauche, la Vierge a les mains croisées, et Marie-Madeleine, qui tient le flacon d'aromates de l'embaumement, a la tête baissée vers les pieds de son Maître (Rabouni) : on sait le lien privilégié qu'elle a, dans les évangiles ou la tradition iconographique, avec les pieds du Christ.
Les visages (surtout les deux premiers) sont figés, inexpressifs, intériorisés : le groupe est comme plongé dans le silence du chagrin inexprimable.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Une Sainte Femme (Marie Salomé ou Marie Cleophas).
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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La Vierge Marie.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Marie-Madeleine.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Le Christ.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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II. LE CÔTÉ EST.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Saint Yves, le livre-ceinture et le signe d'argumentation juridique.
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a. Le costume.
Saint Yves porte la "barrette" ou bonnet carré (de recteur ou de docteur), le camail dont la capuche est rabattue, et le surplis au dessus de la cotte talaire.
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b. Le livre-ceinture.
Un livre (l'ouvrage de droit canon, condensé des Décrétales, qu'il doit posséder comme Official, c'est à dire comme juges aux affaires ecclésiastiques du diocèse de Tréguier) est suspendu à son poignet droit) car il est enveloppé dans un étui de transport dont il est relié, et suspendu par un lien s'achevant par une boule.
Cet accessoire est désigné aujourd'hui en histoire de l'art sous le terme de "livre ceinture".
Voir mes commentaires sur celui-ci ici :https://www.lavieb-aile.com/2020/07/le-calvaire-de-motreff.html
On trouve aussi ce livre-ceinture parfois sur les statues de saint Jean (Mellac, Motreff, Quilinen), sur les figures des apôtres (saint Philippe sur le Calendrier des Bergers 1498), et, porté par Yves, sur le calvaire de Pencran, sur celui de Saint-Thégonnec et sur des vestiges d'un calvaire de Guipavas. Entre autre.
On le trouve également, sculpté par Roland Doré, sur le calvaire de Plourin-lès-Morlaix.
Yves de Kermartin pose la pulpe de l'index sur celle du pouce, geste précis, qui est repris dans de nombreuses représentations du saint, si bien qu'il devient un véritable attribut, le symbole de ses compétences dans la défense juridique et de sa maîtrise de la rhétorique et de l'éloquence.
Roland Doré a représenté saint Yves sur les calvaires d'Irvillac (Coatnan), de la chapelle Saint-Claude à Plougastel, de Plourin-lès-Morlaix et de Bodeniry à Saint-Thégonnec. La statue de la chapelle Saint-Claude (v.1630) est très proche de celle-ci, mais les pouvoirs publics y laissent prospérer les lichens.
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Calvaire (Kersanton, 1630, Roland Doré) de la chapelle Saint-Claude à Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Vue sur le positionnement de la pulpe de l'index sur celle du pouce.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Gros plan sur les iris aux pupilles creusées.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Un roi couronné tenant la main de justice. Saint Louis ? Un saint roi breton (Mélar, Judicaël ou Salomon)?
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Il est impossible de départager les tenants des différentes hypothèses face à ce roi, couronné, tenant la main de justice et vêtu d'une armure et d'une cape.
On se souvient, en admirant la précision avec laquelle sont détaillées les pièces des jambières, que Roland Doré excelle aussi dans l'art funéraire des gisants. Les plaques articulées superposées et rivetées des cuissots, genouillères, grèves et solerets (à bouts ronds) est remarquable.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Le Christ de dérision (Ecce Homo).
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Le Christ, dont les soldats se moquent d'une prétention à être "roi des Juifs" a les poignets liés devant la poitrine, la main gauche tient le roseau dont les bourreaux l'ont affublé en guise de sceptre, et on lui fait porter, sur le corps ensanglanté par la flagellation, un manteau "royal" tandis qu'on l'a couronné d'épines. Les pieds nus témoignent de son dénuement. C'est dans cette tenue que, selon Jean 16:5, Pilate l'a présenté au peuple en s'écriant Ecce Homo, "Voici l'homme!".
Il est très fréquent de voir, sur les calvaires bretons, une Vierge de Pitié (ou une Déploration) placée du côté ouest, et en correspondance du côté est, un Christ aux liens, ou un Ecce Homo.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Saint Pierre tenant sa clef et le livre (Acte des Apôtres).
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Saint Pierre se reconnaît à sa clef, mais aussi à son "toupet", touffe de cheveux isolés sur la calvitie frontale, que les sculpteurs n'omettent jamais de figurer. Comme tous les apôtres (Roland Doré en a sculpté un grand nombre aux porches des églises), il est barbu (seul Jean est imberbe), il tient un livre, ses pieds sont nus, et il porte une robe boutonnée de boutons ronds.
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Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire (kersantite et granite, v. 1630-1650, Roland Doré) de Senven-Léhart. Photographie lavieb-aile juin 2022.
ANNEXE
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ROLAND DORÉ ET SES 50 CALVAIRES.
Le sculpteur landernéen dont l'atelier de taille du kersanton est le plus renommé du XVIIe siècle a travaillé pour 82 paroisses (Finistère, Côtes d'Armor) essentiellement pour la sculpture religieuse (et 9 gisants). Il a réalisé les séries d'apôtres de 4 églises, partiellement de 4 autres et quantité de statues isolées. Selon E. Le Seac'h, il a réalisé 97 croix, calvaires ou vestiges dont 21 croix, 50 calvaires, 26 vestiges. Seuls 12 croix et 15 calvaires sont encore complets. 41 croix et calvaires sont datés, entre 1618 à Penmarc'h et 1662 à Saint-Thégonnec.
Voici une liste de 75 croix et calvaires (en gras : décrits dans ce blog)
Brennilis : croix de calvaire du cimetière (vers 1625) . Ange, Crucifix, Pietà,
Briec de l'Odet, Croix de la chapelle de Trolez (Seul le crucifix est de Roland Doré)
Cast, calvaire de l'église Saint-Jérôme : (1660), GLINEC, recteur, Jacob CROISSANT, fabricien. Vierge, Madeleine, crucifix, Jean, saint au livre.
Châteaulin, calvaire (1639) de la chapelle de Kerluan : Vierge, crucifix, Jean (et sur le fût saint Sébastien et saint Roch, hors atelier).
Cléden-Cap-Sizun : calvaire (1630) de la chapelle Saint-They. Vierge, Jacques le Majeur en haut du fût .
Cleder, croix de Kerzuoc'h (1625), Messire PRISER, procureur
Commana : calvaire du cimetière (1624), signé. Vierge/saint Hervé et son guide ; crucifix ; moine au livre ; Jean/moine, écu martelé
Crozon, presbytère, vestige de calvaire, saint Pierre.
Dinéault,calvaire (1648 et 1650), A. LE BUILLER, L. GARO fabriciens. Crucifix, Christ aux liens.
Dirinon, calvaire de la Croix-Rouge, Jean/saint Roch ; crucifix, Vierge/Sébastien
Douarnenez, calvaire de la chapelle Saint-Vendal (1655), GAVRANT, recteur de Pouldregat, I. LE BIAN. Vierge/Corentin ; crucifix ; Vierge à l'enfant/Jean ; évêque
Douarnenez-Tréboul, vestige de calvaire, Jean/Corentin, Vierge/Nicolas
Esquibien : calvaire de Landrevet Jean/ saint indéterminé ; crucifix /Vierge à l'Enfant ; Pierre/Vierge
Le Folgoët, croix du Champ de Foire. Crucifix
Guiclan, croix de Kerizamel
Guiclan, calvaire de Kerlaviou (1622)
Guiclan, calvaire de Pen-ar-Feuteun (1642), [Jean/Yves par Yan Larhantec 1889] ; crucifix ; Vierge/Catherine.
Hanvec : croix de la forêt du Cranou (1627), vestige. Il appartenait à la chapelle Saint-Conval mais il ne subsiste que le fût portant l'inscription : « R. Dore : ma : faict : 1627 ».
Hanvec, Croas-ar-Huré (1621-1622) M. MICHEL, P. BRIS CVRE. Crucifix, écu au calice, anges à phylactères.
Hanvec, calvaire de Quillafel (1638), NICOLAS JACQUES, prêtre
Hanvec, croix de Lanvoy ; seul le crucifix /Vierge à l'enfant est de Roland Doré
L'Hôpital-Camfrout, Croix du Run (1627), Crucifix/Vierge à l'Enfant
L'Hôpital-Camfrout, Calvaire du Troan, vestiges : anges au calice
Irvillac : calvaire (1644) avec deux bras courbes situé devant la chapelle Notre-Dame-de-Lorette au lieu-dit Coatnan. Larrons, Vierge/Yves ; Jean/Pierre
Irvillac, calvaire de Clénunan (1640), Messire Jean LIDOU.
Irvillac, calvaire (1628) de la chapelle de Locmélar : Jean/Pierre ; Vierge/évêque
Kersaint-Plabennec, calvaire de Laven , crucifix. (En complément du travail du maître de Plougastel qui a réalisé les couples Vierge/Yves ; Jean/Etienne).
Lampaul-Guimiliau, calvaire (1621) de Cosquer-Bihan dit Croaz-Kernevez : crucifix/Vierge à l'enfant.
Lampaul-Guimiliau, calvaire de Kerjaffrès (1626), Mathieu LIVINEC fabricien, Y. KERBRAT, fabricien
Lannilis, calvaire de Kerosven. Vierge ; crucifix/Jean-Baptiste, Jean
Lantic, calvaire de l'église Notre-Dame-de-la-Cour. Crucifix/Vierge à l'enfant. Armoiries des Rosmadec et Gouarlot.
Loc-Éguiner-Saint-Thégonnec, calvaire du cimetière, crucifix (en complément du travail du Maître de Plougastel :Vierge/sainte Femme Pietà/Madeleine ;
Logonna-Daoulas, Croix de Cléménéhy (?), SALOMON PIERRES DE PORS AN . Crucifix/Vierge à l'enfant.
Logonna-Daoulas, calvaire de Rulivet. Crucifix. [Saint Nicodème sur le fût, saint Jean, blason des Rosmorduc, hors atelier.]
Loqueffret, calvaire de Bilirit (1625), Y. et Louis BELERIT, fraires. Crucifix/Vierge à l'Enfant ; [et Yves ; Geneviève ; Edern, hors atelier].
La Martyre, vestige (fût) du calvaire de Kerlavarec (?), Béatrice CABOUN.
Penmarc'h, croix de Lescors (1618), crucifix.
Plabennec, calvaire de Scaven, crucifix.
Pleyber-Christ, calvaire de Kervern (1647), Yvon INISAN et Marie MADEC. Vierge/Marguerite
Plogonnec : calvaire (1644) de la chapelle Saint-Pierre. Vierge/Paul ; Jean/Pierre
Plogonnec: calvaire (1641) de la chapelle Seznec, Guillaume TOULGUENGAT, recteur de 1624 à 1642, René SEZNEC, recteur de 1643 à 1697.
Plomodiern calvaire de la chapelle Sainte-Marie-du Ménez-Hom, tête de la Vierge de la Pietà et Vierge à l'Enfant, tout le reste étant hors atelier.
Plonévez-Porzay: calvaire de la chapelle Sainte-Anne-la-Palud [1630-1656], Guillaume VERGOZ, recteur de 1630 à 1656, lucas BERNARD, fabricien ? Vierge/Pierre, Crucifix/Pietà ; Jean/Jacques
Ploubazlanec, calvaire de l'ancienne chapelle de Loguivy-de-la-Mer. Vierge et Jean
Ploudiry, calvaire (1633) de l'église : Crucifix et Marie-Madeleine
Plougastel-Daoulas, Le Passage, calvaire (1622), Jean GUIGORUS, fabricien. François d'Assise/Vierge ; crucifix/Pietà ; évêque/Jean.
Plougastel-Daoulas, calvaire (v.1630) de la chapelle Saint-Claude. Vierge/Yves, Pietà ; Jean/Pierre
Plougastel-Daoulas, calvaire (1654) de la chapelle Saint-Guénolé. Vierge/Guénolé, crucifix/Vierge à l'Enfant ; Jean/Pierre
Plougastel-Daoulas, calvaire (1639) du Tinduff : Le Seac'h p. 228. n. 78 et 79.
Ploumilliau (22), calvaire (1622) de Coz-Douar. Crucifix/Vierge à l'Enfant.
Plounéour-Ménez : le calvaire (1641) de l'église . Vierge/Pierre et Jean/Paul.
Plounéour-Ménez : croix de Kersimonnet. Vierge à l'Enfant
Plourin-les-Morlaix Vestiges d'un calvaire sur le mur de l'enclos. 15 personnages dont Yves, Marie-Madeleine, les 4 évangélistes, saint Grégoire, une Piétà et une Fuite en Égypte
Port-Launay, calvaire (1651) de Lanvaïdic. Crucifix, culots vides.
Poullan-sur-Mer, calvaire (1640) de Kervignac vestiges
La Roche-Maurice, croix (1625) de Penmarc'h. Crucifix, macles des Rohan.
Rosnoën : calvaire (1648) de l'église Pierre/évêque ; Crucifix/Vierge à l'Enfant (hors atelier) ; Paul/évêque
Saint-Nic, calvaire de la chapelle Saint-Côme : crucifix.
Saint-Nic, calvaire de l'église Vierge/diacre ?; Crucifix ; Jean/diacre ?
Saint-Renan, croix de Quillimerrien ( ?), ADENOR AR COR et IVET AR COR, Vierge
Saint-Sauveur : croix de Kerbouzard Crucifix.
Saint-Ségal, calvaire du bourg : Vierge, Marie-Madeleine et Jean sur le socle
Saint-Servais, calvaire de l'église. Crucifix/Christ aux liens.
Saint-Servais, croix (1640) de Bréties dite Croas-Vossoc. Crucifix.
Saint-Thégonnec, grand calvaire de l'enclos paroissial ; Christ aux outrages
Saint-Thégonnec, calvaire de Bodéniry (1632), Anna BREST et Jean GUILLERM. Vierge/François d'Assise ; Jean/Yves
Saint-Thégonnec, croix du Broustou (1662); Crucifix
Saint-Thégonnec, croix de Coslen. Crucifix/Saint Joseph et l'Enfant
Saint-Thégonnec, croix de Hellin, 1638, Crucifix / Vierge à l'Enfant écu sur le nœud lion et calice
Saint-Thégonnec, croix (1629) de Pennalan. Crucifix/Vierge , écu au calice et M.H.C.P.
Saint-Thégonnec, croix du Keff, Vierge à l'Enfant de la niche.
Saint-Thégonnec, croix (1647) de Pennavern. Crucifix/Vierge à l'Enfant, écu avec fasces des Chastel en alliance avec des armoiries indéterminées.
Saint-Urbain : calvaire du Quinquis. Crucifix
Senven-Léhart : calvaire près de l'église Notre-Dame de Senven. 18 personnages.
Trézilidé, calvaire de l'église. Bon Larron, Pierre, Pietà, Mauvais Larron.
Roland Doré a sculpté uniquement dans le kersanton. Son style dépouillé, facilement reconnaissable et proche de l'épure, a contribué à établir sa réputation. Il se distingue par son souci de replacer la réalité des formes dans l'espace en allant à l'essentiel. Sa virtuosité à sculpter les visages doux de ses Vierges ou à donner un tempérament à ses œuvres profanes en fait un sculpteur d'exception. Il a débuté comme compagnon dans l'atelier du Maître de Plougastel (1585-1617) puis a entrepris une carrière prolifique à Landerneau.
— Le Christ :
Les représentations du Crucifié sont caractérisés par des corps allongés, aux longs bras noueux et aux torses presque rectangulaires avec les muscles de l'abdomen en forme de poire. Les veines du cou sont saillantes. Les Christ penchent la tête du coté droit, les yeux clos. Leurs pagnes plats sont noués sur le coté gauche. Les visages sont presque émaciés, les joues creuses mangées par une barbe et une moustache aux mèches fines. Les crucifix courts dont le canon est à cinq têtes se différencient des crucifix longs à sept têtes (Y-P. Castel).
La couronne d'épines est caractéristique, aux deux brins entrelacés en forme de carré.
— Les Vierges à l'Enfant : elles portent leur enfant sur le bras gauche, la main droite tenant une pomme. Elles ont le visage poupin , les yeux en amande au sillon palpébral bien dessiné. et arborent le fin sourire « doréen ».
— Les personnages de Roland Doré se reconnaissent aussi à leurs yeux dont l' amande presque losangique est soulignée d'un trait creux et aux pupilles creusées. Les visages sont ronds au dessus d'un étage inférieur triangulaire à petit menton rond. La bouche, très caractéristique, est fine, figée en demi-sourire énigmatique, avec des commissures creusées en fossettes.
— Saint Jean accompagne la Vierge sur les croix et calvaires. Sa gestuelle varie peu : les deux mains posées sur la poitrine, (Seznec à Plogonnec, N.D de Kerluan à Châteaulin, Commana, Saint-Nicodème à Ploéven (1637), Tinduff à Plougastel, Saint-Vendal à Douarnenez) ou simplement une seule main, l'autre étant cachée sous sa tunique (Sainte-Anne-la-Palud à Plonévez-Porzay). Plus rarement, il serre le pan de sa tunique et appuie un livre fermé contre sa poitrine (Coatnan à Irvillac) . Parfois il joint les mains, les doigts entrelacés (Plogonnec) ou il tient un livre dans le creux formé par sa main gauche (Cast, 1660). Sa physionomie est partout similaire. Le seul changement appréciable se voit dans sa chevelure lisse (Seznec ou Saint-Pierre à Plogonnec, Commana, Tinduff à Plougastel, à l'ouest de l'église de Plounéour-Ménez en 1641) ou bouclée (Saint-Nicodème à Ploéven en 1637, Coatnan à Irvillac en 1644, Saint-Vendal à Douarnenez (1655) , Sainte-Anne-la-Palud à Ploénevz-Porzay, Saint-Nic, Cast) comme sur les gisants mais d'une manière aléatoire sans que l'on puisse repérer une évolution chronologique.
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SOURCES ET LIENS.
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— CASTEL (Yves-Pascal), 1983, La floraison des croix et calvaires dans le Léon sous l'influence de Mgr Roland de Neufville (1562-1613), Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1983 90-2 pp. 311-319
— CASTEL (Yves-Pascal), 1985, Roland Doré, sculpteur du roi en Bretagne et architecte (première moitié du XVIIè siècle) , Bulletin de la Société archéologique du Finistère, Pages 97 à 156.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1996, Du nouveau sur Roland Doré
— COUFFON, René, 1961, L'évolution de la statuaire en Bretagne après la guerre de succession du Duché - In: Mémoires. Société d'Emulation des Côtes-du-Nord vol. 97 (1961) p. 1-16
— CASTEL in DANIEL, (Françoise), 1988, Roland Doré et les enclos paroissiaux : [exposition, Morlaix, Musée des Jacobins, juillet 1988] / [exposition conçue et réalisée par Françoise Daniel] Jacobins, juillet 1988] 1 vol. (56 p.) : ill. en noir et en coul., couv. ill. en coul. ; 30 cm D'après les travaux d'Yves-Pascal CASTEL .
"Doré s'est forgé un style si reconnaissable que certains amateurs se refusent à y déceler ces variations, subtiles mais réelles, qui font d'un simple praticien un artiste véritable qui s'attache à renouveler sa manière.
Les anatomies des personnages se cachent sous des étoffes lourdes, les mains sont stylisées, les pieds nus dépassant la tombée des plis des tuniques se réduisent à un rang de billes inégales... Tout cela pourrait faire illusion sur le talent de l'artiste encore que nous le verrons, on repère des exceptions.
Mais il y a les visages !
Fronts bombés, lisses ou creusés de rides, selon l'âge ou le sexe des personnages, ligne des arcades sourcilières larges et franches, pommettes pleines et arrondies, un visage de Doré se reconnaît presque toujours.
Les yeux, où se réfugient la manière et les intentions de l'artiste, tout comme ses manies et ses tics, sont particulièrement typés. Les paupières en amande ont le sillon palpébral toujours indiqué. En ceci, Doré se démarque franchement du maître du calvaire de Plougastel-Daoulas, qui , supprimant tout sillon, donne toute l'importance au globe oculaire. Au contraire, dans une option naturaliste
, Doré concentre l'intérêt sur l'iris. Il marque la pupille d'un creux expressif, dont la direction invite le regard de l'observateur à une mobilité qui participe à la vie de ces faces minérales.
Le sillon naso-labial est creusé, plus ou moins, s'articulant sur des lèvres relativement fines.
L'étonnant, dans ce traitement des visages, est qu'il contraste, mis à part les traits incisifs des chevelures et des barbes, avec l'agencement des drapés des vêtements et de leurs plis.
Des étoffes opaques qui masquent les corps, nous l'avons dit, dissimulant les anatomies, en quoi Doré s'engage dans un hiératisme qui l'éloigne du style de l'époque dans laquelle il s'insère. Encore que certaines grandes pièces, telle la Vierge de l'Annonciation de Saint-Thégonnec, invitent à tempérer ce jugement.
Les drapés, calmes et amples, se déploient en pans sculpturaux soulignant la majesté des volumes, tels ceux de la Madeleine du groupe de Notre-Dame-de Pitié si fascinant de Senven-Lehart.
Si les drapés sont stylisés, l'origine de leurs plis n'en demeure pas moins naturelle, structurant, en les animant tout à la fois, les silhouettes. Les plis, formés sur des étoffes épaisses et fermes, captent avec vigueur les ombres d'une sculpture destinée à vivre en plein vent, plus qu'à habiller des corps qui se font oublier.
Plis en becs caractéristiques sur les flancs des blocs sculptés. Plis en volutes, simples ou composés, aux lisières latérales. Plis en volutes simples à queue d'aronde, à étages et bouillonnants dans les pans des manteaux rebrassés. Plis couchés et repassés se chevauchant les uns les autres. Plis en accordéon, sur les manches ajustées. Plis en éventail sur les bras qui portent le manteau."
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne. Les ateliers du XVe au XVIe siècle. Presses Universitaires de Rennes.
Le beau calvaire de Plourin-lès-Morlaix, de mémoire d'homme, n'a jamais été connu que sous la forme des diverses statues qui le composaient, d'abord éparpillées, puis regroupées pour six d'entre elles (qui ont conservées leur polychromie) dans l'ancien ossuaire, et pour les autres, sur le mur d'enceinte de l'enclos. Il avait été détruit à la Révolution, et le crucifix "a été soustrait par un particulier" (Castel).
Mais le style du sculpteur est si facilement identifiable (notamment sur les deux Vierges) qu'on peut l'attribuer au meilleur sculpteur breton de kersantite (une roche remarquable par la finesse de son grain et sa résistance à l'altération), Roland Doré, actif de 1618 à 1663, et auteur d'une petite centaine de croix et calvaires des paroisses de Léon, de Cornouaille et du Trégor.
Nos calvaires ne font presque jamais l'objet d'études monographiques, si on excepte les calvaires monumentaux comme ceux de Pleyben, Plougonven ou Plougastel. A fortiori lorsque ces calvaires sont réduits à l'état de vestiges.
C'est bien dommage, puisqu'à Plourin-Lès-Morlaix sont conservées de très belles pièces : trois des quatre groupes géminés, soit six personnages, qui occupaient les croisillons (la Vierge / saint François d'Assise, Marie-Madeleine / saint Paul, et saint évêque / saint Yves [groupe qui n'est pas signalé par Le Seac'h 2014 mais qui est décrit par Castel :les personnages ont été désunis, saint Yves étant conservé dans la nef et l'évêque (?) dans l'ossuaire], six statues en ronde-bosse (les quatre évangélistes, saint Grégoire et un saint évêque), deux groupes qui occupaient sans doute les nœuds des croisillons (la Vierge de Piété et la Fuite en Égypte).
Soyons juste, Yves-Pascal Castel consacre 4 doubles pages de son catalogue d'exposition Roland Doré et les enclos paroissiaux aux photographies de ces statues, et y signale leurs mensurations en légende.
C'est bien dommage que ces œuvres n'aient pas été étudiées et décrites une par une, mais cela m'a permis d'apporter mon grain de sel (ou de sénevé), et de découvrir un détail truculent sur la Fuite en Égypte. Et il faut bien que mon blog ait un peu de grain à moudre, non ?
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Les deux cartels explicatifs (pléonasme?) sont néanmoins remarquables, et fournissent de précieux renseignements.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Le père Y.-P. Castel avait publié une proposition de reconstitution, avec deux croisillons (afin de placer les statues géminées) et une console pour la Fuite en Égypte, tandis qu'il imaginait que les quatre évangélistes encadraient le piètement du fût . Il signale des "corrections" auxquelles je n'ai pas eu accès.
Le Seac'h indique une reconstitution dessinée par Jean-Michel Le Goff, et en donne une illustration partielle, qui ne diffère pas du schéma de Castel.
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CASTEL (Yves-Pascal) 1985, La reconstitution du calvaire de Plourin-Lès-Morlaix, . articles du Progrès de Cornouaille / Courrier du Léon 2 11 85.
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I. SUR LE MUR D'ENCEINTE, À DROITE DU MONUMENT AUX MORTS.
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1. LA FUITE EN ÉGYPTE À LA VIERGE ALLAITANTE.
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Kersanton . H= 67 cm, l = 67 cm, pr = 25 cm.
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La Vierge est assise transversalement sur le bât de l'âne, les pieds appuyés sur un repose-pieds. Elle est recouverte d'un manteau très couvrant, laissant à peine voir l'extrémité des chaussures, et formant entre les jambes des plis en V. Elle est coiffée de ce qui semble être une couronne.
Son visage très rond et les fossettes des commissures labiales, sont caractéristiques de Roland Doré, et on retrouve cela sur le visage de l'Enfant. Le hiératisme de l'ensemble rappelle de l'artiste est un élève du Maître de Plougastel.
La Mère ne regarde pas son enfant, mais chacun d'eux fixe le lointain, devant eux. Pourtant, le geste de la main droite, qui présente le mamelon du sein dénudé entre index et majeur, permet de constater qu'elle s'apprête à allaiter son Fils.
Ce thème, un épisode de la Fuite, est connu depuis le XVIe siècle, et répond au titre de "Le Repos pendant la Fuite en Égypte".
On peut créer une sous-division de ce thème sous le titre : "La Vierge allaitant pendant le Repos (la Halte) de la Fuite en Égypte". Il est très représenté en peinture, et le dossier Wikipédia réunit 71 fichiers en rapport avec ce sujet.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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2. LA VIERGE AU PIED DU CALVAIRE (Géminée avec Saint François d'Assise).
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Kersanton . H= 67 cm, l = 24 cm, pr = 24 cm.
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La Vierge, qui occupait un croisillon à la droite du crucifix, est voilée, et porte la guimpe. Sa tête est légèrement inclinée vers la droite, et ses mains sont croisées sur la poitrine (mais la main gauche n'est pas sculptée).
Son manteau forme un pan qui tombe horizontalement du côté droit, tandis que le pan gauche est repliée en dessinant un S.
La robe est plissée et serrée par une ceinture.
Le visage est typique du style de Roland Doré, très rond malgré un menton pointu, avec un nez dont la crête acérée s'achève par des narines dilatées, et des yeux en amande dont la paupière inférieure est ourlée. Les iris sont comme des cerises, et les pupilles en sont creusées, ce qui est un trait stylistique vraiment caractéristique du maître sculpteur.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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3. SAINT FRANÇOIS D'ASSISE (géminé avec la Vierge).
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Kersanton . H= 67 cm, l = 24 cm, pr = 24 cm.
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Le saint est identifié par sa bure franciscaine, sa ceinture en corde à nœuds "de capucin", et surtout par sa posture présentant les paumes trouées par les stigmates.
Nous retrouvons les caractéristiques du visage rolandéen , les yeux sont ici ourlées s'un double trait sur les deux paupières. Le creusement des pupilles est bien apparent. La bouche a ce demi-sourire crispé caractéristique, qu'encadre des sillons naso-géniens accentués, permettant d'indiquer la masculinité de son personnage.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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II. SUR LE MUR D'ENCEINTE, À GAUCHE DU MONUMENT AUX MORTS.
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4. LA VIERGE DE PITIÉ (FRAGMENT).
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Kersanton . H= 65 cm, l = 35 cm, pr = 20 cm.
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Ce groupe est très curieux. Il est difficile de dire si la Vierge est debout, ou plutôt assise comme à la chapelle Saint-Claude de Plougastel, dont la Pietà attire la comparaison. Par contre, il est clair que le Christ est assis sur le genou gauche de sa mère (la chaussure gauche apparaît sous la jambe de la Vierge, qui est bizarrement assimilable à une colonne, un montant). Marie le tient ainsi, appuyé flanc contre flanc, en le soutenant sous l'aisselle par sa main gauche. Elle soutient avec une tendre sollicitude le bras droit du Christ par une élégante prise du poignet.
Cette disposition verticale du Christ, contraire à la tradition où la Mère tient le cadavre du Fils entre ses bras, se retrouve, je l'ai dit, à la chapelle Saint-Claude, ainsi qu'à la chapelle de Sainte-Anne-La-Palud de Plonévez-Porzay. Les trois œuvres sont de Roland Doré, et sont datés par estimation vers 1630, ou vers 1642 pour Sainte-Anne-la-Palud. Également de Roland Doré, la Vierge de Pitié de Cast reprend la même disposition, mais elle pose un genou à terre, et la tête de son Fils est placée plus bas que dans les autres exemples.
Dans tous les cas, la Vierge est penchée sur son Fils, qu'elle entoure dans l'arc de son buste et de sa tendresse.
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Calvaire (Kersanton, 1630, Roland Doré) de la chapelle Saint-Claude à Plougastel. Photographie lavieb-aile.
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Le calvaire (kersanton, vers 1642, Roland Doré) de Sainte-Anne-la-Palud. Photographie lavieb-aile juin 2020.
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La Pietà (kersantite, Roland Doré, 1660) du calvaire de Cast. Photographie lavieb-aile mars 2020.
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Le Christ diffère des autres groupes (et de nombreuses Pietà) car il est placé à la gauche de sa mère. En outre, il présente ici une particularité intrigante.
Sa main gauche repose sur un volume rectangulaire qui pourrait en abuser pour un livre. C'est en réalité l'extrémité du pan du pagne, noué à gauche.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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5. SAINTE MARIE-MADELEINE TENANT LE FLACON D'AROMATES.
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Kersanton . H= 67 cm, l = 22 cm, pr = 27 cm.
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On remarquera l'élégance du manteau, dont l'épaisse étoffe est presque palpable, et dont les pans descendent en plis symétriques sous la manche droite.
Mais on remarquera aussi le bandeau occipital, ici large et à deux plis, cette coiffure assez propre aux sculpteurs de Basse-Bretagne au XVe-XVIIe siècle, sculpteurs qui la réservent sauf exception à la Vierge et à Marie-Madeleine, en équivalent de nos "chouchous".
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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6. SAINT PAUL ET SON ÉPÉE.
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Kersanton .
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Chacun appréciera selon son point de vue la propagation des lichens sur nos statues. Quand à moi, je continue à être choqué par la manière dont ces dartres (c'est l'étymologie de "lichen") défigurent les saints personnages de notre patrimoine.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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III. DANS L'ANCIEN OSSUAIRE.
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Six des statues de kersanton polychromes (on corrigera le texte du cartel qui parle de granite) ont été placées dans chacune des arcades de l'ancien ossuaire, derrière des vitres, excellente protection contre les lichens et autres dégradations, et belle idée d'animation de l'ossuaire. Mais cela ne fait pas l'affaire du photographe, qui doit ruser et fractionner ses clichés.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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7.UN SAINT ÉVÊQUE.
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Kersanton polychrome. H= 85 cm, l = 26 cm, pr = 18 cm. Revers sculpté, trou de fixation.
Comme tous les personnages suivants, ce saint est en train d'écrire un livre. Si on pense aux Pères de l'église, dont les textes sont fondateurs, on peut suggérer saint Augustin ou saint Ambroise. Si on veut y voir un des grands saints évêques bretons (Corentin, Pol-Aurélien), peu sont réputés être l'auteur d'ouvrages notables.
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Les six personnages de l'ossuaire. Photo Castel, in Daniel 1988.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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8.L'ÉVANGÉLISTE SAINT MATTHIEU ET SON ANGE.
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Kersanton polychrome. H= 84 cm, l = 39 cm, pr = 20 cm. Revers sculpté, trou de fixation.
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Chaque évangéliste est représenté en train d'écrire avec un crayon sur un phylactère. Ceux-ci portent des inscriptions peintes, qui ne correspondent peut-être pas aux textes initiaux, mais parfois à l'incipit (premiers mots) de leur évangile.
Chacun est accompagné de son attribut, l'un des quatre éléments du Tétramorphe.
Ici, Matthieu est accompagné de l'ange. On lit : PASIO DOMI[NI], renvoyant à la Passion selon saint Matthieu, (Passio Domini nostri Jesu Christi secundum Evangelistam Matthaeum).
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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9.L'ÉVANGÉLISTE SAINT MARC ET SON LION.
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Kersanton polychrome. H= 83 cm, l = 35 cm, pr = 23 cm.
Le texte correspond à Sequentia sancti Evangelii secundum [Marcum. In illo tempore..]., "Suite de l'évangile selon saint [Marc. En ce temps là].
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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10.L'ÉVANGÉLISTE SAINT LUC ET SON TAUREAU.
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Kersanton polychrome. H= 85 cm, l = 40 cm, pr = 20 cm. Revers sculpté, trou de fixation.
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Sur le phylactère : IN ILLO TEMP [ORE].
In illo tempore (En ce temps-là) n'est pas l'incipit de Luc, qui est Quoniam quidem multi conati. Mais on trouve la formule dans les évangiles, notamment de Luc, notamment dans la séquence "En ce temps là Jésus dit à ses apôtres".
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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11.L'ÉVANGÉLISTE SAINT JEAN ET SON AIGLE.
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Kersanton polychrome. H= 82 cm, l = 34 cm, pr = 20 cm. Revers sculpté, trou de fixation.
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Inscription : IN ILLO TEMP[O]RE CUM ESS[ET]
Il s'agit d'une citation de l'évangile de Matthieu 3: In illo tempore. Cum esset desponsata Mater Jesu Maria Joseph. Ou de Luc In illo tempore cum esset Iehsu in una civitatum. Ou, plutôt ici, de Jean : In illo tempore cum esset sero die illo una sabbatorum.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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12.SAINT GRÉGOIRE PÉRE DE L'ÉGLISE EN PAPE.
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Kersanton polychrome. H= 85 cm, l = 40 cm, pr = 20 cm. Revers sculpté, trou de fixation.
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Le pape Grégoire Ier (vers 540-604) est l'un des quatre pères de l'église d'Occident avec saint Amboise, saint Augustin et saint Jérôme. Le chant grégorien a été nommé en son honneur
Il est également figuré, comme les évangélistes, en train d'écrire. Le livre qu'il tient ouvert dans sa main gauche ne porte pas de titre ; je choisis son Moralia in Job.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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IV. STATUES CONSERVÉES DANS L'ÉGLISE
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13. SAINT YVES ET LE GESTE D'ARGUMENTATION.
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— Voir sur les groupes de Saint Yves entre le Riche et le Pauvre :
Kersanton polychrome. Statue géminée avec une sainte femme : h = 66 cm, l = 27 cm, pr = 20 cm.
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a. Le costume.
Saint Yves porte la "barrette" ou bonnet carré (de recteur ou de docteur), le camail noir à revers rouge dont la capuche est rabattue, et le surplis au dessus de la cotte talaire.
b. Le livre-ceinture.
Un livre (l'ouvrage de droit qu'il doit posséder comme Official, c'est à dire comme juges aux affaires ecclésiastiques du diocèse de Tréguier) est suspendue à sa ceinture ou à son poignet gauche car il est enveloppé dans un étui de transport dont il est relié.
Cet accessoire est désigné aujourd'hui en histoire de l'art sous le terme de "livre ceinture".
Voir mes commentaires sur celui-ci ici :https://www.lavieb-aile.com/2020/07/le-calvaire-de-motreff.html
On trouve aussi ce livre-ceinture parfois sur les statues de saint Jean (Mellac, Motreff, Quilinen), sur les figures des apôtres (saint Philippe sur le Calendrier des Bergers 1498), et, porté par Yves, sur le calvaire de Pencran, sur celui de Saint-Thégonnec et sur des vestiges d'un calvaire de Guipavas. Entre autres.
Yves de Kermartin pose la pulpe de l'index sur celle du pouce, geste précis, qui est repris dans de nombreuses représentations du saint, si bien qu'il devient un véritable attribut, le symbole de ses compétences dans la défense juridique et de sa maîtrise de la rhétorique et de l'éloquence.
— Saint Yves et le geste de l'argumentation, etc. :
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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Cliché Castel in Daniel 1988 p.13
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Photo (éclaircie) Y.-P. Castel in Daniel 1988 p. 13.
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14. SAINTE FEMME.
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Kersanton (sans polychromie). Statue géminée avec saint Yves . Photo d'Yves-Pascal Castel dans Daniel 1988 page 13, où la légende indique "saint évêque".
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Cliché Castel in Daniel 1988.
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Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile juin 2022.
Le calvaire démantelé (kersanton, Roland Doré, vers 1630) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile juin 2022.
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15. SAINT ANNE TRINITAIRE.
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Kersanton polychrome. H= 79 cm, l = 30 cm, pr = 18 cm. Revers évidé, trou de fixation.
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Je ne reviens pas sur ce thème iconographique que j'ai largement développé dans ce blog. Ici, nous avons sainte Anne, de taille "vraisemblable", qui tient dans ses bras et assise sur le berceau de son coude gauche sa fille Marie, couronnée, mais de la taille d'une poupée. Celle-ci tient sous les aisselles le petit Jésus, seulement vêtu d'un pagne, et dont les pieds sont soutenus par la grand-mère.
Les visages, et notamment les yeux, sont à nouveau parfaitement représentatifs du style de Roland Doré.
2319. Plourin-lès-Morlaix, église, mur d’enclos et intérieur de l’église, k. Vers 1630, par Roland Doré. Ensemble de statues dont Vierge de Pitié, statues géminées: Madeleine-Paul, Vierge-François d’Assise (mur d’enclos). Statue géminée: Yves-évêque, statues: quatre évangélistes, sainte Anne, saint Grégoire (niches dans le haut du mur de la nef, intérieur église). De cet ensemble, le crucifix a été soustrait par un particulier. [YPC 1980]
— CASTEL (Yves-Pascal) 1985, La reconstitution du calvaire de Plourin-Lès-Morlaix, . articles du Progrès de Cornouaille / Courrier du Léon 2 11 85.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1983, La floraison des croix et calvaires dans le Léon sous l'influence de Mgr Roland de Neufville (1562-1613), Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1983 90-2 pp. 311-319
— CASTEL (Yves-Pascal), 1985, Roland Doré, sculpteur du roi en Bretagne et architecte (première moitié du XVIIè siècle) , Bulletin de la Société archéologique du Finistère, Pages 97 à 156.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1996, Du nouveau sur Roland Doré
— COUFFON, René, 1961, L'évolution de la statuaire en Bretagne après la guerre de succession du Duché - In: Mémoires. Société d'Emulation des Côtes-du-Nord vol. 97 (1961) p. 1-16
— DANIEL, (Françoise), 1988, Roland Doré et les enclos paroissiaux : [exposition, Morlaix, Musée des Jacobins, juillet 1988] / [exposition conçue et réalisée par Françoise Daniel] Jacobins, juillet 1988] 1 vol. (56 p.) : ill. en noir et en coul., couv. ill. en coul. ; 30 cm D'après les travaux d'Yves-Pascal CASTEL .
"Doré s'est forgé un style si reconnaissable que certains amateurs se refusent à y déceler ces variations, subtiles mais réelles, qui font d'un simple praticien un artiste véritable qui s'attache à renouveler sa manière.
Les anatomies des personnages se cachent sous des étoffes lourdes, les mains sont stylisées, les pieds nus dépassant la tombée des plis des tuniques se réduisent à un rang de billes inégales... Tout cela pourrait faire illusion sur le talent de l'artiste encore que nous le verrons, on repère des exceptions.
Mais il y a les visages !
Fronts bombés, lisses ou creusés de rides, selon l'âge ou le sexe des personnages, ligne des arcades sourcilières larges et franches, pommettes pleines et arrondies, un visage de Doré se reconnaît presque toujours.
Les yeux, où se réfugient la manière et les intentions de l'artiste, tout comme ses manies et ses tics, sont particulièrement typés. Les paupières en amande ont le sillon palpébral toujours indiqué. En ceci, Doré se démarque franchement du maître du calvaire de Plougastel-Daoulas, qui , supprimant tout sillon, donne toute l'importance au globe oculaire. Au contraire, dans une option naturaliste
, Doré concentre l'intérêt sur l'iris. Il marque la pupille d'un creux expressif, dont la direction invite le regard de l'observateur à une mobilité qui participe à la vie de ces faces minérales.
Le sillon naso-labial est creusé, plus ou moins, s'articulant sur des lèvres relativement fines.
L'étonnant, dans ce traitement des visages, est qu'il contraste, mis à part les traits incisifs des chevelures et des barbes, avec l'agencement des drapés des vêtements et de leurs plis.
Des étoffes opaques qui masquent les corps, nous l'avons dit, dissimulant les anatomies, en quoi Doré s'engage dans un hiératisme qui l'éloigne du style de l'époque dans laquelle il s'insère. Encore que certaines grandes pièces, telle la Vierge de l'Annonciation de Saint-Thégonnec, invitent à tempérer ce jugement.
Les drapés, calmes et amples, se déploient en pans sculpturaux soulignant la majesté des volumes, tels ceux de la Madeleine du groupe de Notre-Dame-de Pitié si fascinant de Senven-Lehart.
Si les drapés sont stylisés, l'origine de leurs plis n'en demeure pas moins naturelle, structurant, en les animant tout à la fois, les silhouettes. Les plis, formés sur des étoffes épaisses et fermes, captent avec vigueur les ombres d'une sculpture destinée à vivre en plein vent, plus qu'à habiller des corps qui se font oublier.
Plis en becs caractéristiques sur les flancs des blocs sculptés. Plis en volutes, simples ou composés, aux lisières latérales. Plis en volutes simples à queue d'aronde, à étages et bouillonnants dans les pans des manteaux rebrassés. Plis couchés et repassés se chevauchant les uns les autres. Plis en accordéon, sur les manches ajustées. Plis en éventail sur les bras qui portent le manteau."
— LE GUENNEC(Louis), 1979, l'église de Plourin-lès-Morlaix, in Morlaix et sa région, p.60
" On remarque, en outre, plusieurs curieuses statues anciennes, dont un groupe triple de sainte Anne, saint Yves argumentant, saint Sébastien, les Evangélistes, saint Fiacre en jardinier, sainte Marguerite, etc. Le cimetière, dont les piliers d'entrée sont surmontés des statuettes mutilées d'un ancien calvaire, possède une petite chapelle, ancien ossuaire, dont la façade est percée d'une porte et d'une série d'arcades. A l'intérieur, on remarque les statues de sainte Barbe avec sa tour et de saint Mathurin, costumé en prêtre."
Louis Le Guennec (1878-1935) a signalé le premier ces fonts aux visiteurs, mais en qualifiant le décor de la cuve de "feuillagée". C'est Yves-Pascal Castel qui en a donné la première description attentive en 1991, dans l'un de ses passionnants articles du Courrier du Léon, en y découvrant les masques de sept personnages aux coiffures variées "médiévales" et en tentant de les interpréter comme autant de portraits des âges de la vie, ou de différentes conditions sociales.
Il en précisait le matériau, le granite, et la datation au début du XVIe siècle.
Il remarquait la présence d'un huitième personnage, celui qui, allongé, présente un écu dont le motif a été bûché à la Révolution : il pourrait s'agir des armes des Coatanscour, puisqu'en 1501, Yves de Coatanscour, sieur du dit lieu en Plourin, épousait Jeanne de Kersulguen (*). Yves-Pascal Castel indique que ces armoiries intactes ornent le baldaquin en bois , mais celui-ci est plus tardif.
(*) Les armoiries de Kermerc'hou, seigneur des Salles à Plougasnou, en alliance avec celles des Kersulguen (d'or au lion de gueules couronné, armé et lampassé d'azur ; au franc-canton écartelé d'or et de gueules) se trouvaient sur le blason des fonts de Plougasnou.
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Ces Coatanscour étaient seigneurs de Plourin, de Kermorvan, de Rozalec, de Kerbuzic en la paroisse de Locquémeau, de Kerduff en Ploumilliau, du Rest, de Launay en Ploubezre, du Roscouët, de Kervény et de Tromelin en Plougasnou. Leurs armes sont d'argent au chef endenché de gueules à cinq pointes. Elles figuraient sur un vitrail de l'Annonciation (daté de 1400??) où ils étaient présentés (J.P. Le Bihan) agenouillés en donateurs : "Jacques De Coatanscour et son fils Yvon, près de leurs femmes, Marguerite de Kerbuzic et Jeanne Barbier, avec leur blason mi parti timbrant l’armure du chevalier comme le surcot de la châtelaine." De même, et toujours selon Le Bihan, "Au-dessous un saint Yves présente un donateur en orant portant sur sa cotte d’arme d’azur à la fasce d’or et sur le tout, parti au premier d’argent au chef endenché de gueules au deuxième fretté d’or et de sable."
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Après Le Guennec et Castel, Emmanuelle Le Seach, autrice d'une thèse sur la sculpture sur pierre en Basse-Bretagne, s'intéresse en 2004 aux fonts de Plourin-lès-Morlaix, pour les regrouper stylistiquement avec ceux, porteurs de masques, de Plougasnou (11 masques dont 5 sur la piscine et 6 sur le bras de vidange), Saint-Jean-du-Doigt (28 masques dont 20 sur la piscine), Plouezoc'h (7), Plouégat-Guerrand (7), Plougonven (7), Guimaëc (3) et Morlaix-Ploujean (1). Ceux de Plougasnou portaient selon Abgrall une inscription A MA VIE. A MA VIE. J. ALBI FECIT ISTVM, mais le nom J. Albus, transcription possible d'un Jean Le Guen, qui peut indiquer le nom du sculpteur avec la formule x fecit, "m'a fait", pourrait aussi être le patronyme du commanditaire ou fabricien (mais on aurait alors la précision F. ou FAB).
Selon E. Le Seac'h, les motifs floraux sont omniprésents sur ces fonts de Plougasnou, qui sert de type pour la série : grains de raisins, boutons de rose, feuilles de lierre ou de chou, de hêtre, de chêne séparant, les 5 mascarons et les 2 écus, feuilles de marronnier ou de feuillage inconnu séparant les 6 masques du bras de vidange. Les mascarons sont marqués par les yeux tirés en amande, au contour tracé en méplat. Les visages sont pointus avec un front rétréci. Le tout donne un air oriental aux masques. Les lèvres sont dessinées avec une légère ouverture, les nez sont droits et épatés. Les coiffures varient d'un masque à l'autre : mitre, couettes soulignées d'une calotte, frange monacale lisse ou à mèches. L'un des masques esquisse un sourire énigmatique, et un autre tire la langue.
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Définition
Fonts baptismaux : cuve qui sert à recevoir l'eau du baptême.
Les fonts baptismaux furent d'abord des cuves larges et profondes, enfoncées dans le sol pour le baptême par immersion. Vers le XIe s., l'usage de baptiser les enfants par infusion prévalut ; ils furent alors placés sur des supports de formes variées. La bénédiction des fonts au cours de la veillée pascale est plus exactement une bénédiction de l'eau baptismale.
Les actes de baptême devinrent obligatoire par l'ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 qui institua l'état-civil religieux : les actes signés par les parents, parrain et marraine permirent le recensement de la population.
Les fonts étaient placés à l'ouest, et souvent, comme ici, dans la première chapelle nord.
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Datation.
Les 8 fonts de la série sont datés par estimation de la fin du XVe ou début du XVIe : "la forme et le modelé des visages sont traités de manière simple et schématique qui se rapprochent d'une technique de sculpture de l'époque romane caractérisée par son dépouillement, des traits justes et économes dans la ligne pour un rendu précis et sans fioritures. On est malgré tout bien ici en présence de sculptures médiévales comme on en rencontre énormément dans le Finistère servant d'ornementations décoratives dans les chœurs, l'appareillage des murs, sur les consoles à l'intérieur des églises et des chapelles mais aussi à l'extérieur, sur les crossettes, les gargouilles, les fleurons à personnages, les acrotères..." (Le Seac'h)
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Six sculpteurs différents.
Pour E. Le Seac'h, les six sculpteurs ont un style différents, même si celui de Saint-Jean-du-Doigt est le plus doué, suivi de celui de Plourin-lès-Morlaix pour sa maîtrise des chapeaux, alors que ceux de Plouégat-Guerrand et Plouezoc'h, les deux "naïfs" viennent en queue de peloton et que celui de Plougasnou, "l'oriental" à cause des yeux de ses masques, se place au milieu.
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Le sculpteur chapelier de Plourin-lès-Morlaix.
Les visages du sculpteur de Plourin-Lès-Morlaix sont plus aboutis qu'ailleurs.. Il organise les volumes avec facilité : fossettes rondes, mentons creusés au milieu, yeux avec une paupière. Les coiffures sont élaborées : capuchon, cagoule, aumusse et faluches (*) médiévaux incitent Le Seac'h à le surnommer « le sculpteur chapelier ». Les sexes des personnages peuvent êtres distingués.
n.b : le mot "faluche" ne désigne une coiffure d'étudiant que depuis la fin du XIXe siècle.
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Description.
La cuve est octogonale (comme c'est la règle depuis le XVe siècle) et posée sur un fût lui-même octogonal. L'une des 8 faces est occupée par le bras de vidange, également soutenu par un fût octogonal plus fin. Chacune des 7 autres faces est ornée d'un masque haut d'une vingtaine de centimètres. La pierre conserve les traces d'une peinture rouge foncée dont il semble douteux qu'elle puisse relever de la polychromie d'origine. (on retrouve des restes de polychromie bleu-clair à Plouégat-Guerrand, marron à Guimaëc et rouge à Plouézoc'h.
Il n'y a ici aucun décor végétal, mais de simples moulures et rebords droits. Cette exception par rapport au type se retrouve à Plouégat-Guerrand.
Le bras de vidange vers la petite cuve accolée, également octogonale, est taillée dans le même bloc de pierre, et elle est sculptée d'un ange (?) allongé et horizontal pour présenter entre ses deux mains un écu. La tête de ce personnage est bûchée, au moins partiellement, tout comme l'écu qu'il tient.
N.B Selon Le Seac'h, "les fonts baptismaux (de son étude) possèdent huit cotés dont un est occupée par la piscine qui renferme le conduit d'évacuation de l'eau". Mais la définition et l'usage de ce terme de piscine m'ont semblé imprécis et variables dans la littérature spécialisée (cf. biblio) et j'ai préféré celui de "petite cuve", accostée à la grande cuve.
"C’est vraisemblablement à la fin du XIVe siècle, que l’on prend l’habitude de juxtaposer à la cuve principale une seconde cuve de plus petite taille destinée à conserver l’eau lustrale utilisée pour le baptême par infusion, si la cuve principale n’est pas divisée en deux bassins. Cette réserve d’eau bénite peut être portée par un support accolé à celui de la cuve principale ; son décor s’inscrit alors dans la continuité du support principal comme à Nointel (60) (fig. 38). Mais chacune des cuves peut être posée sur un support différent comme à La Baussaine (35) où un petit héraut en bas-relief réunit les deux cuves hexagonales décorées d’une double torsade entourant une frise végétale. Ces fonts sont de plus intéressants à un deuxième titre : ils sont un des 4 fonts baptismaux du XIVe siècle à conserver les armoiries de leurs commanditaires, la famille de Tinténiac, pratique qui deviendra plus courante au siècle suivant." (source)
La grande cuve est fermée par un couvercle en bois de forme octogonale.
Un baldaquin est porté par quatre piètements en pierre et quatre colonnes galbés en bois polychrome sculptés de vignes en spirales. Le toit octogonal est coiffé d'un Baptême du Christ. La base Palissy indique que ces fonts (seul le baldaquin est décrit par la notice) sont classés MH au 24-12-1924, datent du XIXe siècle et mesurent 3,60 m de haut et 2,30 m de diamètre.
Il faut dire encore que les fonts, et les masques en particulier, ne sont pas très accessibles et que les photographies sont de réalisation difficile à l'amateur non équipé pour vaincre l'obscurité et le manque de recul.
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Vue générale
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Le baldaquin.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Les deux cuves et le couvercle en bois fermé et ouvert .
Vestige d'un gond en plomb sur la petite cuve, la seule à être équipée d'un orifice de vidange.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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La polychromie ocre rouge.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Vestige de peinture murale dans une niche.
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Le premier masque, à l'ouest, après la petite cuve, est féminin.
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Il ne porte pas de chapeau, et les cheveux, libres, encadrent le visage ; une mèche est arrêtée par un simple nœud.
La bouche esquisse une moue. Le nez est droit . Les yeux sont moins schématiquement ourlés en amande que les suivants.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Le deuxième masque porte un chaperon à larges plis regroupés vers sa droite.
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Ces plis partent d'un bourrelet frontal en "turban".
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Le troisième masque porte également le chaperon à bourrelet frontal, dont un pli couvre l'oreille gauche, alors que trois plis partent vers sa droite.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Le quatrième masque porte un chaperon dont les plis forment un panache au dessus du bourrelet.
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Il est plus jeune, avec un menton bifide, et un regard étonné.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Le cinquième masque porte un mince bandeau frontal, et ses cheveux sont ramassés sur le côté en deux coques ou macarons : ce serait une femme.
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Le menton est triangulaire et pointu, sous une bouche petite et des pommettes saillantes.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Le sixième masque porte un chaperon dont les plis forment un panache vers la gauche au dessus du bourrelet.
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Sa coiffure est retenue par une sangle sous la mâchoire. Il ou elle a une lèvre supérieure épaisse (ou une moustache ?), au dessus d'un petit menton rond.
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Les fonts baptismaux (granite, vers 1500 ?) de Plourin-lès-Morlaix. Photographie lavieb-aile mai 2022.
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Les photos et l'illustration de l'article d'E. Le Seac'h.
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L'article d'Y-P. Castel.
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SOURCES ET LIENS.
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— CASTEL (Yves-Pascal) 1991, Plourin-Lès-Morlaix, les masques des Fonts Baptismaux... articles du Progrès de Cornouaille / Courrier du Léon 11.05.91.
"Fonts baptismaux, première chapelle nord : cuve de granit à décor de mascarons et de feuillages sculptés, baldaquin en bois sculpté portant le groupe du Baptême du Christ, XIXè siècle."
" Le baptistère. Sur la cuve des fonts baptismaux, visages sculptés de sept personnages portant de grandes coiffes du XVème siècle. Cette cuve est surmontée d'un baldaquin de type Renaissance, aux armes de la famille de Coatanscour, qui serait bienfaitrice de l'église. Une colombe, symbole de l'Esprit Saint, domine l'ensemble. Sur le pilier, de l'autre côté de l'allée, statue polychrome, en chêne, de saint Fiacre (XVIème siècle). "
— LE GUENNEC (Louis), 1979, l'église de Plourin-lès-Morlaix, in Morlaix et sa région page 60.
"L'écusson des Coatanscour, un chef endanché, est sculpté sur l'un des piliers. On le retrouve sur une dalle tumulaire mi-parti d'un lion. Ce sont sans doute les armes d'Yves de Coatanscour, sieur dudit lieu en Plourin, et de sa femme Jeanne de Kersulguen, mariés en 1501. Une autre dalle offre le blason de la famille de la Boixière, un buis arraché. On remarque, en outre, plusieurs curieuses statues anciennes, dont un groupe triple de sainte Anne, saint Yves argumentant, saint Sébastien, les Evangélistes, saint Fiacre en jardinier, sainte Marguerite, etc. L'arbre de Jessé, qui existe dans une des chapelles latérales, n'est qu'une copie moderne plus ou moins fidèle d'un autre arbre de Jessé du xvie siècle que, sous prétexte de vétusté, un ancien recteur de Plourin crut devoir céder à un antiquaire à condition qu'on lui en fabriquât une réplique toute neuve. Les cuves feuillagées des fonts baptismaux sont surmontées d'un baldaquin aux armes des Coatanscour, que couronne un groupe du baptême de Notre-Seigneur. Sur les panneaux de la chaire, figures des quatre Evangélistes et bas-reliefs de l'Annonciation, de la Nativité et de l'Assomption. Le cimetière, dont les piliers d'entrée sont surmontés des statuettes mutilées d'un ancien calvaire, possède une petite chapelle, ancien ossuaire, dont la façade est percée d'une porte et d'une série d'arcades. A l'intérieur, on remarque les statues de sainte Barbe avec sa tour et de saint Mathurin, costumé en prêtre."
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Au sud de la commune, à cinq kilomètres du bourg, on trouve le vieux manoir de Coatanscour, massive construction du XVIe siècle, convertie en ferme. Elle domine un joli étang entouré de verdure, en un frais paysage qui forme contraste avec les croupes dénudées de l'Arrée. Le manoir, édifice du xvie siècle, flanqué d'une tourelle tronquée, est fort délabré, mais son moulin seigneurial conserve encore fort bon air, avec sa lucarne Renaissance. A l'intérieur du manoir, il faut voir quelques belles cheminées sculptées. Celle d'une salle, au premier étage, est ornée de deux diaboliques cariatides de granit, taillées en grandeur naturelle, complètement nues et portant, en guise de feuille de vigne, un masque humain appliqué sur le bas-ventre. Une motte féodale existe à l'est du manoir. La famille de Coatanscour portait pour armes : d'argent au chef endanché de gueules. Sa devise était : A galon mad (de bon cœur). Cette maison a possédé par alliance, au XVIIIe siècle, le marquisat de Kerjean, en Saint-Vouguay; elle s'est éteinte tragiquement en Mmes Suzanne-Augustine et Marie-Anne de Coatanscour, veuves de Kersauzon et Launay de l'Estang, arrêtées en 1793 à Saint-Pol-de-Léon. Conduites à Brest et traduites devant le tribunal révolutionnaire, pour incivisme, elles périrent sur l'échafaud, à l'âge de 70 et 65 ans, le 27 juin 1794. La terre de Coatanscour avait droit de haute et basse justice. On voit encore, dans Goarem arlustiçou, sur une colline de 240 mètres d'altitude, le soubassement en pierre des fourches patibulaires. De ce point se découvre au nord le magnifique panorama de la fertile campagne morlaisienne, fermée à l'horizon par la mer et l'île de Batz, dont le phare s'aperçoit à peine le jour, mais qui, la nuit venue, projette ses éclats intermittents jusqu'aux crêtes déchiquetées des Cragou, dans la montagne d'Arrée."
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2004, "Un art original : les fonts baptismaux sculptés du Trégor finistérien autour de 1500", Bulletin de la Société archéologique du Finistère pages 109-118.
Baptismal font. Wellen, Limburg, Belgium, 1155–70. Bluestone . The Metropolitan Museum of Art, The Cloisters Collection
— FAVREAU (Robert), 1995, Les inscriptions des fonts baptismaux d'Hildesheim, Baptême et quaternité Cahiers de civilisation médiévale Année 1995 Volume 38 Numéro 150 pp. 116-140
Raija Jokinen expose ses œuvres de lin au château de Trévarez (Saint-Goazec) : les esprits du lieu.
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AH NON, PAS TROP VITE !
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Raija Jokinen passa trois séjours à Trévarez, en octobre 2020 puis juin et septembre 2021, avant de revenir durant trois semaines au domaine pour terminer la création de ses œuvres et les installer au château et dans le parc.
Elle s'était imprégnée des éléments végétaux du parc à l'anglaise de 85 hectares, célèbre pour ses 160 camélias centenaires, ses azalées, ses rhododendrons ou ses hortensias. Elle avait suivi le fil de l'eau d'une fontaine à l'autre, remarqué les mousses qui tapissent les troncs des arbres et les pierres, et examiné les réseaux de nervures des feuilles géantes des Gunnera.
Dans les masques feuillus des bassins, elle avait retrouvé le tissage des éléments humains et non-humains qui lui est cher ; sur les plantes et les petits ruisseaux, les réseaux qui conduisent la vie comme nos veines et nos artères. Et partout, les fleurs dont elle mêle les couleurs à ses personnages.
Il faut donc parcourir nous aussi les allées du parc.
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UNE SECONDE ENCORE !
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Dans une vidéo, Raija Jokinen déclare à propos du château de Trévarez :
"Ce bâtiment est fascinant, son histoire aussi. La première fois que je suis venue ici, j'ai ressenti une forme de mélancolie. Il y a des choses tristes qui se sont passées ici, mais beaucoup de joie aussi. Alors j'ai essayé d'interroger cela."
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Parce qu'il n'est pas encore entièrement restauré, et que les pièces sont ouvertes au public au fur et à mesure de leur rénovation, il reste de nombreux témoignages d'un lieu en souffrance, délabré, avec ses tissus en lambeaux, ses plinthes et baguettes de bois arrachés dont les traces de clous rouillés indiquent le passage, avec des plafonds béants vers les étages supérieurs, qui nous parlent du passé avec cette poésie du fané, de l'abandon, et de la peine comme autant de cicatrices sur la peau de la demeure dont les tatouages apparaissent encore.
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Tout château nous plonge dans notre imaginaire, tout château nous fait parcourir un chemin à rebours vers un lieu de notre âme rempli de mystères et de parfums secrètement pénétrants.
C'est en m'ouvrant à cette esthétique du passé blessé, mais réparé que je me suis préparé à découvrir les créatures de Jokinen.
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Les cheminées.
L'une d'elles, celle du grand salon, a été restituée par le groupe Villemain et réinstallée en 2018.
Elles portent dans un chapeau de triomphe les armoiries de Kernezne (d'or à trois coquilles de gueules) pleines ou en alliance, entre des trophées d'armes, sous des masques et guirlandes Renaissance.
Mais le feu des fêtes passées est éteint, comme ont disparu le luxe des toilettes, la musique des danses, le bruissement des conversations galantes, l'éclat des rires et celui des dorures.
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Les moulures en stuc Renaissance. Masques et rinceaux.
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Le plafond.
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LES ŒUVRES DE RAIJA JOKINEN EXPOSÉES À L'INTÉRIEUR.
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I. LES ÉCURIES. SEPT ŒUVRES.
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Les titres sont de moi, lorsque je n'ai pas pu trouver les titres originaux.
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L'artiste Raija Jokinen est née en 1960 en Finlande et a reçu une formation de tisserande avant d'obtenir une maîtrise d'art textile à Helsinki en 1990. Elle compose avec des fibres de lin, du fil et de l'amidon de riz des personnages en suspension, animés de veines-nervures, ou d'artères-racines qui soulignent les liens d'appartenance de nos corps —et de nos esprits— avec l'environnement naturel.
"Je suis fascinée par la façon dont les formes de la nature, les racines, les branches, les brindilles, les différentes formes organiques peuvent ressembler à celles du corps humain." Raija Jokinen.
Ces êtres-peau qu'elle tisse en entremêlant les fibres et en les cousant ressemblent, lorsqu'on la voit les rouler, les plier, puis ensuite les dérouler et les suspendre, à des vêtements, mais étrangement, ces passe-murailles sans épaisseur ont une profonde intériorité, et une présence convaincante.
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Le lin. "J'utilise des fibres de lin. C'est très important pour moi parce que ce matériau a une histoire majeure : l'humanité l'utilise depuis plusieurs milliers d'années, et dans quantité de domaine de manière incroyable, bien-sûr pour tisser des vêtements, mais aussi pour entretenir les maisons, nourrir les animaux, et j'ai même découvert qu'on pouvait l'utiliser à la guerre, en protection, comme une armure. Quand on superpose les fibres de lin cela devient très solide.
Et à la fois les caractères des fibres sont très différentes selon les cas, certaines sont très robustes et certaines sont très fines comme de la soie.
D'une certaine manière il y a des similitudes avec notre peau. Je pense que notre épiderme exprime ce que nous ressentons, ce que nous éprouvons dans notre corps. Le lin traduit bien cela, parce qu'il ressemble à notre couche protectrice, notre peau.
J'aime l'idée que je suis un maillon dans l'histoire de l'utilisation du lin. C'est super de penser qu'il y a des milliers de générations qui ont utilisé le lin, le même que j'utilise moi. De plus, c'est une fibre naturelle, et je ne veux pas produire de mauvaises choses avec mon travail ou créer des problèmes aux gens ou à moi. " Raija Jokinen
Élément mince et allongé souvent flexible, rarement isolé, constitutif d'un tissu organique, d'une substance minérale ou d'une matière artificielle. Fibre élastique; fibre discontinue; faisceau de fibres. (Quasi-)synonymes. fibrille, fil, filament.
A.− ANATOMIE. Élément filamenteux composant certains tissus et organes. Fibre conjonctive, cristallinienne, nerveuse, musculaire, fibre myocardique.
B.− BOTANIQUE. Filament souple composant un tissu végétal, en particulier le bois, la tige ou les racines de certaines plantes. Fibre textile :Fibre d'origine végétale, animale, minérale ou artificielle pouvant être tissée. Fibre de chanvre, de laine, de lin; fibre synthétique. Fibre de bois.
− AU FIGURÉ, souvent au singulier : Fond secret d'un être, où est supposée se manifester une sensation, une transformation physique, symptôme d'un état psychique. Lieu supposé d'une manifestation de la sensibilité affective. [Avec un déterminant. adjectif ou substantif : Tendance profonde personnelle et particulière à s'intéresser à quelque chose ou à quelqu'un. Fibre paternelle; fibre de la probité; fibre républicaine.
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1. "Kukinto (A Flourish)", 2021.
Personnage fleuri 1.
Lin, fil à coudre, amidon de riz.
Tête baissée, les mains réunies devant le ventre dans un geste d'embarras, il serait l'image d'un introverti inhibé si son costume de fibres et de fleurettes n'affirmait au contraire qu'il savoure un puissant sentiment d'être nourri du renouveau printanier et des joies de la floraison.
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2. Personnage fleuri 2.
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C'est le jumeau du précédent. Des photos de détail montrent la mise en œuvre, et la minutie du travail de couture.
Le gros-plan sur le visage montre que ce travail relève tout autant de la sculpture que de la réussite picturale.
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CLIQUEZ SUR L'IMAGE.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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3. Personnage sur fond de brique.
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Une fois encore, cet être de lin est plongé dans ses pensées, les bras sont ballants, les traits sont graves et le regard dirigé vers le bas : mais par contraste les mouvements grouillants du réseau intérieur justifient cette attention à la vie organique en soi, qui est une forme de la joie de vivre.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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4. Personnage de dos, sur fond de brique.
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Deux flux, l'un vert et l'autre rouge naissent du bassin (bien nommé) et nourrissent les bras et la tête.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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5. "Kiire" ou " A Rush", 2008.
Personnage de dos et arborescence rouge. Lin, fil à coudre, amidon de riz.
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Le titre signifie en finnois "hâte, précipitation. Ainsi mihin sinulla on kiire ? signifie "où court tu si vite?"
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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6. "Yhtäsamaa 2 " (The Same 2), 2021.
Personnage assis à terre entourant ses genoux.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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7. Visage coiffé de feuillage.
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Fasciné, je scrute le détail de la confection.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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II. DANS LA CHAMBRE DES INVITÉS. "DEDICATION TO A PLACE II", 2022. TROIS ŒUVRES.
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Comme son titre l'indique, cette composition à trois personnages a été conçue pour cette "chambre des invités".
Le personnage principal se tient avec les mains sur le ventre, sous un réseau centripète de fibres rouges .
"Ici il y a une personne qui est centrée sur le haut de son corps, sur sa poitrine. On parle souvent du cœur comme le lieu où nous ressentons toutes les choses, comme le centre de nos émotions" Raija Jokinen
Les nervures rouge-sang partent loin autour de lui, comme si, avec sa tête bien droite mais son regard rêveur, il se concentrait sur les perceptions qu'il recevait des murs, des fenêtres, de la cheminée ou du mobilier pour se relier aux êtres qui, depuis des siècles, ont vécu ici.
"Donc il y a cette personne au centre. Je suis fascinée par la texture des murs ici, il y a différents types de pierre, de briques, on distingue différents procédés de fabrication de ces murs très épais. Je peux ressentir une sorte d'écho des gens qui ont vécu dans cette chambre. Ils sont des sortes de relais, des ponts entre le passé et le présent." Raija Jokinen.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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Un deuxième personnage, en buste, est relié au premier par un fil rouge : comme pour le mot "fibre", polysémie du mot "lien".
Il ouvre les bras en signe de réception. À la différence des personnages de la série précédente, ceux-ci ont un regard droit, éveillé et attentif à l'autre.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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Le troisième est également relié au premier, et émerge du mur en esquissant un geste de parole. Ou bien tend-il la main : dans les deux cas, il établit une relation.
C'est donc une réunion amicale ou une conversation qui est mise en scène entre ces trois personnages, qui n'appartiennent peut-être pas tous au même temps. Et le reflet du miroir vient brouiller les limites entre réalité, fiction, double, rêve et échos sensibles.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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III. DANS L'ESCALIER D'HONNEUR. "BIOLOGICAL MESSAGE", 2022.
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1. Personnage en buste levant les yeux vers une boule dense et rouge comme un peloton capillaire.
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J'ignore l'intention de l'artiste, mais cela ne me gêne pas pour ressentir de l'émotion. Et dans le jeu associatif qui se déclenche, se glisse le souvenir des séances d'enroulement des pelotes de laine, complicité entre l'enfant et sa mère.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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2. Sur le palier. Personnage vêtu de plumes vertes devant la fenêtre.
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C'est peut-être le personnage qui m'a le plus ému, suscitant des souvenirs d'oisiveté et d'ennui devant les fenêtres d'après-midi pluvieux, ou d'élan suspendu, les ailes pendantes, par une attente inquiète, mais cet être-oiseau enfermé derrière les barreaux de sa cage vitrée dit aussi la puissance qui se condense lors de la réflexion.
Il attend peut-être le retour impossible d'un être passionnément aimé. Ou mille autres choses.
Toute la poésie vient de l'étroite connivence créée entre ce lieu et la créature de lin. Parce que ce palier ne mène à rien, qu'il est vétuste, encore figé dans un passé que la lumière extérieur et les verdures du parc n'abolissent pas.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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3. Personnage grave.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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4. Devant la balustrade de l'escalier. Personnage au réseau rouge.
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Depuis le début me vient l'évocation des planches anatomiques des Écorchés de la Renaissance (ici : Vesale) et des schémas de la circulation sanguine, avec leurs artères très rouges et leurs veines très bleus. Ce sont les mêmes silhouettes tragiques et le même rappel de la finitude humaine.
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Bien qu'il s'agisse ici, exclusivement, d'humains, le lien s'impose aussi à moi du concept japonais de mono no aware , empathie devant l'impermanence des choses, dont le spectacle nous frappe par surprise et au delà des mots.
Ou plutôt du concept du wabi-sabi reliant wabi, l'impression de solitude mélancolique (la posture des personnages) et sabi, le goût pour la décrépitude des choses vieillissantes.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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IV. DANS LA SALLE D'HONNEUR. "DEDICATION TO A PLACE", 2022.
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Personnage devant la fenêtre, trainant une rivière de branchages habités de nids.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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V. DANS LE GRAND SALON. "FORCES OF NATURE", 2022.
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Deux personnages devant les baies donnant sur le jardin.
Lin, fil à coudre, amidon de riz, métal.
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Il ? Elle ? NOUS.
Île ? Aile ? JEU.
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"Je ne veux pas représenter des groupes de personnes en fonction de leur âge ou de leur genre, parce que finalement nos sentiments sont plus ou moins les mêmes, et nous avons besoin à peu près des mêmes choses : communiquer avec les autres, satisfaire nos besoins vitaux. Et donc ce n'est pas si important pour moi de différencier les personnes pour parler des sentiments. Parce que nous ressentons tous ces sentiments." Raija Jokinen.
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Les boiseries peintes font de ces deux personnages des fantômes des chatelains ou de leurs invités, d'autant que le premier laisse voir par transparence ses vertèbres, son bassin, ses fémurs et ses tibias. Relié à la terre par un réseau de radicelles rouges, il esquisse un mouvement vers la deuxième personne, comme le montre ses jambes et ses bras écartés. Il est en tension entre le sol, et l'autre.
Cet autre, cette autre, est plongé.e dans la contemplation du jardin et de ses visiteurs. Mais le bas de son corps, tout en racines vertes, ne touche pas terre, et ses fibres vibrent intensément de cet appel vers l'extérieur végétal. Il n'est pas complètement isolé dans son monde intérieur, puisque des fibres rouges provenant de son compagnon palpitent d'un flux vivifiant.
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Lorsqu'on reste suffisamment longtemps devant cette scène, l'atmosphère change, et d'autres interprétations surviennent. Âmes du passé, regrettent-ils les vivants qui marchent dans le parc ? Sont-ils reclus ici par quelque maléfice, dans ce château du Bois Dormant ? Sont-ils les Esprits de ce lieu, chargés de l'animer en puisant dans le substrat du terroir ?
Sont-ils nos semblables, écartelés entre Nostalgie et Espérance ? L'un est Attente, l'autre Élan.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
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VI. AU FUMOIR. "BIOLOGICAL MESSAGE", 2022.
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Cinq personnages marchant en cercle.
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"Dans mes œuvres, je représente des personnes qui ont l'air de se sentir un peu seules. Je veux également que cette solitude s'exprime dans un groupe de personnes. À la fin, nous sommes toujours un peu seules dans notre corps" Raija Jokinen.
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Ma première évocation fut celle des "promenades" en maison d'arrêt. Puis me vint, en raison des fils soutenant chaque silhouette, et des pieds qui ne touchent pas tous le sol, l'image de pendus en camp de concentration.
Le fumoir est une pièce assez exigüe, d'où l'impression de claustration, accentuée par le délabrement des murs et châssis des baies.
À la différence des trois personnages de la Chambre des invités, ces cinq personnages n'ont aucun lien entre eux, ni par leurs réseaux de flux vitaux, ni par les gestes (les bras sont ballants), les postures (dos tourné, têtes fléchies ou inclinées) et les regards.
Il règne pour moi dans cette scène le silence, l'absence de communication entre les êtres mais aussi entre ceux-ci et la nature extérieure.
Mais si on veut échapper à cette ambiance lourde, on peut se concentrer sur les éléments colorés, qui apportent la vie à ces corps évanescents.
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Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
Exposition Raija Jokinen, château de Trévarez 2022. Photographie lavieb-aile 2 mai 2022.
"Filmée au cœur de l’hiver dans sa maison du sud de la Finlande, Raija Jokinen crée des œuvres, dont certaines pour l’exposition de Trévarez. Sous ses doigts, les personnages en fibre de lin prennent forme étape après étape, depuis le dessin, le brossage, l’entremêlement et le collage des fibres de lin avec de l’amidon de riz, puis la couture, le mouillage et la recomposition de la forme. | "Dans l’atelier de Raija Jokinen" | Janvier 2022 | Film réalisé par Iris Kärkkäinen (tournage) et Sylvain Huet (montage), 2022 | Durée : environ 8 min."
—Rencontre avec Raija Jokinen - Regard d'artiste, Raija Jokinen - Domaine de Trévarez 2022
"Après trois séjours à Trévarez, en octobre 2020 puis juin et septembre 2021, Raija Jokinen passe trois semaines au domaine pour terminer la création de ses œuvres et les installer au château et dans le parc. Elle raconte sa découverte du lieu, partage ses émotions et ses inspirations et revient sur son parcours d’artiste. | "Rencontre avec Raija Jokinen" | Mars 2022 | Film réalisé par Sylvain Huet, 2022 | Durée : environ 10 min."
L'emblématique de l'hôtel de Bourgtheroulde (1506-1532) à Rouen et les bas-reliefs Première Renaissance de la Galerie d'Aumale (Jean Delarue, 1520-1532). L'Entrevue du Camp du Drap d'Or et les Triomphes de Pétrarque.
Sources principales : Lettéron et Gillot 1996 et Wikipédia 2022.
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PRÉSENTATION.
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Les corps des bâtiment est, nord, ouest et la tourelle polygonale ont été construits après 1506 (ou dès 1501, Lettéron) pour Guillaume II le Roux et Jeanne Jubert. La galerie d'Aumale (au sud) fut construite pour Guillaume III le Roux, vraisemblablement par Jean Delarue, entre 1520 et 1532. Le décor sculpté de la tourelle et du corps de bâtiment ouest a été ajouté vers 1530. Le corps de bâtiment nord a été détruit par un incendie en 1770. Reconstruit par François Gueroult de 1770 à 1772. Tourelle d'angle en encorbellement sur la place détruite en 1824. Jardin et fontaine détruits avant 1840. Restauration générale de 1886 à 1895. Restauration du portail d'entrée en 1899. Tourelle détruite par les bombardements de 1944. Reconstruite en 1952.
Il s'agit d'une des rares demeures rouennaises construites au début du XVIe siècle en pierre de taille, avec l'hôtel Romé rue des Carmes et l'hôtel de Jubert de Brécourt, rue de l'Hôpital. C'est là un signe de distinction et d'opulence.
La pierre provient des carrières du Val de Seine (Vernon ou environ) : c'est un calcaire très fin et dur, légèrement ocre à l'extraction et qui blanchit ensuite. Mais la pierre est gélive et se détériore en cas d'humidité et de ruissellement.
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"L'hôtel de Bourgtheroulde (prononcé « bourtroude ») est un ancien hôtel particulier datant en grande partie du xvie siècle, situé place de la Pucelle, dans le centre historique de Rouen.
Guillaume II le Roux, seigneur de Bourgtheroulde et membre de l'Echiquier de Normandie, décida à la fin du xve siècle de se faire construire un hôtel en pierre digne de son rang, dans le style Louis XII, transition entre le gothique flamboyant et le style de la Première Renaissance française1.
Son fils, Guillaume III, continua les travaux d'embellissement et compléta l'œuvre de son père. Dans la cour intérieure, sur la gauche, la galerie d'Aumale présente un décor sculpté Renaissance d'une rare qualité. Guillaume III y a fait représenter l'entrevue du camp du Drap d'Or entre François Ier et Henri VIII d'Angleterre. Au niveau de la toiture, une seconde série de bas-reliefs illustre le poème allégorique des triomphes de Pétrarque.
Cet ancien hôtel particulier fut occupé jusqu'à fin 2006 par une banque, le Crédit Industriel de Normandie. Il est ensuite restructuré en hôtel de luxe ; son ouverture date d'avril 2010.
Il fait l'objet d’un classement au titre des monuments historiques pour ses façades et toitures, depuis le 11 janvier 19242. Une première fois ravagé le 19 avril 1944 lors du bombardement dit de la « semaine rouge », c'est le bombardement du 26 août, précédant la libération de la ville qui provoqua le plus de dégâts, anéantissant une partie des décors du corps de logis3.
Son architecture est à rapprocher de celle du Palais de Justice et du bureau des Finances contemporains.
L'hôtel de Bourgtheroulde donne sur la place de la Pucelle. Anciennement appelée place du Marché aux veaux, elle a pris ce nom à l'issue d'une méprise. On a longtemps pensé que c'était sur cette place que Jeanne d'Arc avait été brûlée.
Ce remarquable hôtel de style Louis XII et Renaissance a été construit par un personnage éminent : Guillaume II le Roux, seigneur de Bourgthéroulde. Il semble que les travaux s'engagèrent dès 1501. À la mort de Guillaume II, en 1520, il devint la propriété de Guillaume III, abbé d'Aumale. C'est à cette époque que fut construite la galerie d'Aumale (ou de François Ier), représentant l'entrevue du camp du Drap d'Or. En 1532, c'est le frère de Guillaume III, Claude Le Roux qui hérita du bien.
L'hôtel servit a accueillir des personnages importants comme le cardinal Alexandre de Médicis en 1596. Il resta dans la famille Le Roux jusqu'à la fin du xviie siècle. Victime d'un grave incendie en 1770, qui détruisit l'aile nord, il fut restauré. Il traversa la période révolutionnaire. À partir de 1848, il devint le siège d'une banque, le Comptoir d'Escompte puis le siège du Crédit industriel de Normandie, banque régionale du groupe CIC jusqu'à fin 2006.
Au terme de la rénovation complète de l'édifice par la société lilloise d'investissement hôtelier (SLIH), l'hôtel de Bourgtheroulde est devenu en avril 2010 un hôtel cinq étoiles affilié au groupe hôtelier américain Marriott International.
L'hôtel de Bourgtheroulde a une longue histoire ; il en a subi les vicissitudes. L'intérieur de l'hôtel a pratiquement disparu. La façade sur la place de la Pucelle et les façades sur la cour ont été profondément modifiées : la façade nord a été reconstruite après l'incendie de 1770. La tourelle sud, touchée de plein fouet par un obus en 1944 a été entièrement reconstruite sans son décor sculpté. Les jardins ont été remplacés par des locaux modernes.
Ce qui reste place toutefois l'hôtel comme l'un des premiers monuments d'intérêt de la ville de Rouen." (Wikipédia)
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La façade principale sur la Place de la Pucelle.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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"L'hôtel de Bourgtheroulde donne sur la Place de la Pucelle, anciennement appelée Place du marché aux veaux. La façade avait été grandement défigurée avec le temps.
La tourelle en échauguette qui formait l'encoignure à gauche de la façade avait été détruite en 1824. De forme polygonale, elle était jadis entièrement recouverte de sculptures Renaissance dont la plupart ont disparu avec sa destruction quasi complète par les bombardements de 1944. Cette tour fut reconstruite de 2009 à 2010 sans pouvoir restituer ses précieux bas-reliefs qui figuraient des scènes pastorales. En revanche, on a pu redonner à la toiture son aspect initial avec son épi de faîtage. Une autre petite tourelle en encorbellement en forme échauguette flanquait la porte cochère au nord de la façade. Menaçant ruine, elle disparut avant 1682.(Wikipédia)
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L'extérieur a subi de nombreux remaniements aux XIXe et XXe siècles. La disposition du rez-de-chaussée avait été altérée par la transformation en magasins. Il ne subsistait que la porte cochère, quelques pilastres et les fenêtres de l'étage. Le décor sculpté avait disparu. Il a été reconstitué par Jean-Baptiste Foucher en 1893. Le porche d'entrée est décoré aujourd'hui des deux léopards normano-angevins soutenant les armes de la famille de Bourgtheroulde et du porc-épic symbole du roi Louis XII. Cette restitution ne s'appuie sur aucune trace archéologique." (Wikipédia)
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Je présenterai néanmoins l'emblématique de cette façade, dont les éléments sculptés apparaissent sur le dessin du projet de restauration de L. Sauvageot daté de 1891.
Sur le dessin de 1524 de la façade, dans le Livre des fontaines de Jacques Le Sieur , on remarque à gauche un panneau sculpté qui peut témoigner de la présence d'armoiries ou d'emblème.
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La maison monseigneur du Bourtoulde", détail du Livre des Fontaines (1524), in Létteron et Gillot p. 64, coll. D. Tragin et C. Lancien copyright.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Portail d'entrée en anse de panier à festons surmontés des deux lions normands et des armoiries des LE ROUX, seigneurs de Bourgtheroulde. Sculpteurs Maurice et Jean-Baptiste Foucher, 1893-1895.
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Guillaume Ier LE ROUX, fils de Denis LE ROUX et Guillemette DU BUISSON, épousa vers 1450 Alison Du FAY (Du FAY : De gueules à la croix d'argent, cantonnée de quatre molettes d'éperon du même), fille de Guillaume DU FAY, lieutenant-général du bailli de Gisors et de Philippote ROUSSEL, nièce de Raoul Roussel, archevêque de Rouen.
Il était vicomte d'Elbeuf pour Marie comtesse d'Harcourt et baronne d'Elbeuf, de 1450 à 1490. environ. Les LE ROUX furent étroitement liés à la maison d'Harcourt puis aux ducs de Lorraine.
Guillaume Ier est le mécène de l'église Saint-Jean d'Elbeuf, et ses armes apparaissent sculptées aux clefs de voûte et de la chapelle Saint-Nicolas. Il est représenté, ainsi que plusieurs membres de sa famille, sur des vitraux de la chapelle de la Vierge. Lui et son père Denis furent enterrés dans l'église Notre-Dame de Louviers Guillaume fonda la chapelle Saint-Claude en 1500, et la chapelle Saint-Nicolas.
Il est le père de Guillaume II Le Roux, lieutenant-général du vicomte d'Elbeuf vers 1476 jusqu'en 1495 et tient les plaids de Boissey-le-Châtel (1485) et La Haye-du-Theil (1491), vicomte d'Elbeuf (1495), conseiller à l'Échiquier (1499) puis au Parlement de Normandie. C'est lui qui commença la construction de l'hôtel de Bourgtheroulde à Rouen.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Deux fenêtres à meneaux de la façade.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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L'emblème d'Anne de Bretagne, reine de 1491 à 1514 : l'hermine colletée, couronnée, sur fond d'hermines, dans une guirlande présentée par deux putti ailés sur un fond semé de fleurs de lys. Sculpteurs Maurice et Jean-Baptiste Foucher, 1893-1895.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Blason de Guillaume I LE ROUX et Alison DU FAY. Sculpteurs Maurice et Jean-Baptiste Foucher, 1893-1895.
Blason de Claude Ier Le Roux et de Jeanne de Challenge
Claude I Le Roux († 1537), seigneur de Tilly (1515) et de Bourgtheroulde (1532), vicomte d'Elbeuf (1507-1520), conseiller au Parlement de Normandie (1520), il se marie en 1515 avec Jeanne de Challenge († 1530, de gueules à trois soleils d'or), dame de Cambremont et d'Infreville.
Il est le fils de Guillaume II LE ROUX et de Jeanne JUBERT.
-LE ROUX : D'azur au chevron d'argent accompagné de trois mufles de léopard d'or
-DE CHALLENGE : de gueules à trois soleils d'or.
Le blason, dans un cuir découpé à enroulement, est situé dans une guirlande tenue par des putti ailés.
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Blason de Guillaume II LE ROUX et Jeanne JUBERT. Sculpteurs Maurice et Jean-Baptiste Foucher, 1893-1895.
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-Le Roux : D'azur au chevron d'argent accompagné de trois mufles de léopard d'or
-Jubert : Écartelé : d'azur à une croix alésée d'oret d'azur à cinq fers de lance d'argent 3 et 2.
Le blason est soutenu par un nœud de ruban et de guirlandes présentées par deux putti ailés.
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Guillaume II LE ROUX, conseiller à l'Échiquier (1499) puis au Parlement de Normandie, seigneur de Becdal, Acquigny, Saint-Aubin-d'Ecrosville et Bourgtheroulde, vicomte d'Elbeuf, serait l'auteur de l'hôtel de Bourgtheroulde. Il a épousé Jeanne JUBERT, d'une famille de parlementaires normands, fille de Guillaume Jubert, seigneur de Vesly, lieutenant-général du bailli de Gisors. De leur union est né 15 enfants (dont Guillaume, Claude et Nicolas). Il est décédé le 12 juillet 1520 et fut enterré avec sa femme dans l'église de Bourtheroulde.
Guillaume II est le mécène de l'église Saint-Laurent de Bourgtheroulde, qu'il érigea en collégiale .
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LES ENFANTS DE GUILLAUME II.
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—Parmi leurs enfants, l'aîné, Guillaume III Le ROUX dit l'abbé d'Aumale fut ecclésiastique. Georges d'Amboise, archevêque de Rouen le fait un des chanoines de sa chapelle de Gaillon. Georges II d'Amboise lui obtient du roi l'abbaye d'Aumale ( entre Rouen et Amiens) . Il en devient en 1517 le premier abbé commendataire, y fait élever le logis abbatiale et reconstruire de nombreux bâtiments dont la grande porte de l'abbaye. François Ier aurait utilisé ses services dans la négociation du Concordat de 1516. Il aurait participé à l'Entrevue du Camp du Drap d'Or.
En 1515, il transmet ses droits d'ainesse sur le fief de Bourgtheroulde à son frère Claude, car il considérait "qu'il estoit assez bien pourvu à l'église pour soi entretenir aux études et à vivre bien honorablement selon son estat".
Il fait casser en 1520 un acte dressé avec l'accord de son père en 1515 et recouvre l'année suivante son droit d'aînesse après arrangement avec son frère Claude.
L'abbé d'Aumale est [dès 1506] le propriétaire de l'hôtel, comme l'atteste un acte de la succession de son père, datant de 1528, excluant du partage l'hôtel qui est alors "appartenant en propriété et succession" "au seigneur d'Aumalle".
Il poursuit les travaux d'embellissement et achève l'œuvre de son père, l'hôtel de Bourgtheroulde à Rouen. Dans la cour intérieure, sur la gauche, la galerie d'Aumale présente un décor sculpté Renaissance d'une rare qualité. Il y a fait représenter la fameuse entrevue du Camp du Drap d'Or entre François Ier et Henri VIII d'Angleterre, à laquelle il participe.
Il décède en 1532 et est inhumé dans la collégiale Saint-Laurent de Bourgtheroulde.
—Claude I Le Roux, né en 1494,, eut sans doute lui aussi une part non négligeable dans l'édification de l'hôtel de Bourgtheroulde dont il hérita à la mort de Guillaume III le 4 juin 1532. Il avait acquit en 1521 un hôtel voisin , donnant aussi sur la place du Marché-aux-Veaux.
Seigneur de Tilly (1515) et du Bourgtheroulde (1532), vicomte d'Elbeuf (1507-1520), il fut un magistrat français, conseiller au parlement de Normandie (1520) qui succéda à son père comme conseiller au Parlement de Normandie grâce à l'appui du roi François Ier. Il se rendit à Saint-Germain-en-Laye le 23 août 1520 et obtient des lettres du roi pour son introduction au Parlement. Il fut reçu conseiller le 12 novembre suivant. Il épousa Jeanne de Challenges, qui décéda en 1531, puis Madeleine Payen à qui il laissa l'hôtel en douaire.
En 1520, son frère Guillaume cassa un acte dressé en 1515 par leur père. En 1521, après arrangement, Guillaume regagna son droit d'aînesse et Claude gagna la propriété de la seigneurie de Bourgtheroulde. Il dut attendre le décès de son frère aîné en 1520 pour en prendre pleine possession et jouissance.
Il mourut en 1537 et fut inhumé auprès de sa première épouse à l'église Saint-Étienne-des-Tonneliers à Rouen, au financement des travaux de laquelle il avait participé.
Voir Claude Ier en donateur d'un vitrail de 1525 dans la baie 24 de Louviers :
Quatre verrières de Saint-Vincent de Rouen, remontées à l'église Sainte-Jeanne-d'Arc (baie 9), portent les armes des Le Roux, en alliance avec les Du Four, des Legras, des Blancbaston et des Bonshoms.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Emblème de Louis XII : le porc-épic couronné. Sculpteurs Maurice et Jean-Baptiste Foucher, 1893-1895.
Il est présenté sur un fond semé de fleurs de lys dans un chapeau de triomphe.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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L'envers de la porte cochère de l'aile est avec accolade à crochets, pinacles à candélabres et deux médaillons à l'antique. Blason des Le Roux à droite.
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Les initiales GLR (monogramme de Guillaume Le Roux) portées sur la gravure de E.H. Langlois et de sa fille Espérance sont toujours visibles sur place. Elles se retrouvent ailleurs (cf. infra). Ce serait (Létteron et Gillot) celles de Guillaume III.
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Sur la droite, les armoiries des Le ROUX présentés par deux angelots qui soutiennent l'écu, est une copie du décor retrouvé en 1888-1892 par les restaurateurs, qui en ont donné le relevé ("détail d'une allège"). L'original ayant disparu, il n'est pas possible de le dater avec précision
J'ai omis de le photographier en vue de détail. J'emprunte un cliché sur Flickr.
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I. Létteron indique que les angelots tiennent une large guirlande de feuillages nettement inspirée de l'Italie et qui se retrouve dans le décor Renaissance des clôtures de chapelle de l'abbaye de Fécamp. C'est le modèle qui a été repris pour les éléments héraldiques de la façade donnant sur le rue.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Les chapeaux de triomphe (couronnes de feuilles et de fruits) à personnages en costume François Ier.
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On a voulu y voir les portraits de François Ier et de Henri VIII, ou ceux de Guillaume II et III Le Roux, mais il s'agirait plutôt de médaillons décoratifs fréquents en Normandie dans la première moitié du XVIe siècle.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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L'aile ouest. La façade de la cour d'honneur.
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"Le logis se composait de deux ailes perpendiculaires. L'aile ouest est conservée en grande partie. Elle était cantonnée de deux tourelles. Seule la tourelle sud a été conservée (bien que reconstruite après la Seconde Guerre mondiale). La tourelle nord n'a pas été reconstruite après l'incendie de 1770 et fut remplacée par un corps néoclassique doté d'un comble à la Mansart. Elle contenait une chapelle au premier étage.
Marquant une nouvelle étape par rapport au Palais de justice de Rouen, l'élévation principale de style Louis XII qui conserve encore des éléments de l'art gothique tardif (pinacles, arcs en anse de panier) et des fenêtres à meneaux, présente déjà des motifs, en forme de rinceaux d'influence lombarde, inédits pour l'époque médiévale : elle se développe sur deux étages surmontant une cave coiffée d'un comble doté de deux grandes lucarnes à gables flamboyants qui annoncent déjà la Première Renaissance par leurs formes. Une sorte de claire-voie d'arcatures ou de petits arcs-boutants relie le fronton aux deux pinacles qui les accostent. Typique du style Louis XII, l'élargissement des fenêtres véhicule une notion de luxe tandis que leur abondance participe de la féerie de l'édifice. Déjà à la fin du XIVe siècle, cette propriété quasi-magique du palais largement ouvert était apparue lorsque Guillebert de Mets évoquait la fastueuse demeure parisienne de Jacques Ducy, alors clerc à la chambre des Comptes. Outre l’entrée de la clarté, ces ouvertures élargies permettent désormais une aération plus importante des pièces dans un souci nouveau d'hygiène de vie tandis que la superposition des fenêtres en travées reliées entre elles par des moulures organise de façon plus régulière le rythme des façades, annonçant ainsi le quadrillage des extérieurs de la Première Renaissance.
Sur l'aile Ouest, la sculpture est abondante et de conservation incomplète. Entre les croisées du rez-de-chaussée, un médaillon est maintenant effacé. Il aurait représenté Diane de Poitiers.
Entre les croisées du premier étage se trouve la salamandre, armes de François Ier et, à droite, le Phénix de sa seconde épouse, Éléonore de Habsbourg.
D'autres panneaux représentent des chars triomphaux (le panneau supérieur à gauche, près de la tourelle a disparu en 1944). Il s'agit peut-être de l'illustration de l'entrée solennelle de la reine en 1532 qui vit pour la première fois un cortège de chars." (Wikipédia)
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Deux licornes présentent l'écusson royal. La couronne fleurdelysée est tenue par un ange.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Deux cerfs aux bois corail présentent les armes des Le Roux, seigneurs de Bourgtheroulde. La couronne ducale est tenue par un ange.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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La salamandre, emblème de François Ier. Après 1530.
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Lucarnes de Style Louis XII, mêlant motifs flamboyants et pinacles à rinceaux de la Première Renaissance.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Le Phénix renaissant de ses cendres, emblème d'Éléonore de Habsbourg, seconde épouse de François Ier. Après 1530.
Sœur de Charles Quint, elle fut reine de Portugal de 1518 à 1521 et reine de France de 1530 à 1547.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Deux Triomphes mythologiques de la façade ouest.
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1. Au deuxième étage. Allégorie féminine sur un char tiré par trois à cinq lions. Cybèle ?
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Elle tient un attribut ressemblant à un sceptre perlé de trois sphères ; ses cheveux sont emportés par le vent vers l'avant.
Une roue du char est visible.
Elle est précédée par trois hommes vêtus à l'antique, jambes et pieds nus, torses nus sous une tunique à manches flottantes et plissées. L'un joue de la flûte traversière, l'autre du tambour long, tandis que le dernier , de dos, brandit un flambeau.
Des arbres et la silhouette d'une ville, mais aussi des fruits forment l'arrière-plan.
On a proposé de voir ici Cybèle. Le culte de cette déesse phrygienne, patronne des animaux, dont le culte est originaire d'Asie Mineure fut introduit par les Romains dans leur cité en 205 av. J.C., lors de la deuxième guerre punique, sur l'injonction de la Sibylle, rapportant de son sanctuaire de Pessinonte une météorite noire. Mantegna a représenté l'introduction de Cybèle à Rome dans un tableau intitulé Le Triomphe de Scipion. Dans les allégories des éléments, Cybèle représente la Terre.
Un modèle possible (sans les musiciens) est la fresque du Triomphe de Jupiter et Cybèle du palais Schifanoia de Ferrare, peint par Cosimo Tura vers 1470, où la scène illustre le signe astrologique du Lion, et le mois de Juillet. (ici).
Sur le Triomphe de Cybèle de Paolo Farinati (1524-1606), une femme coiffée d'une tour est assise sur un char tiré par deux lions, précédée de putti et joueurs de tambourins et tambours:
La source indirecte la plus probable de ce triomphe, et de celui qui suit, me semble être le Songe de Poliphile de Francesco Colonna, imprimé par Alde Manuce à Venise en 1499, et qui sera traduit en français en 1546. Son influence fut considérable sur l'aménagement des jardins de Florence (villa de Castelo, villa Francesco de Medici, jardin de Boboli), de de Frascati et de Bomarzo.
Certes, les Trionfi de Pétrarque par leur composition en six chars triomphaux, ont exercé une influence sur le Songe de Poliphile, mais nous ne trouvons sur ces deux bas-reliefs aucune des allégories propres à Pétrarque.
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En 1522-1524, Jean et Engrand Leprince réalisèrent pour l'église Saint-Vincent la verrière dite "des Chars".
Trois chars s'y succèdent : celui d'Adam et Ève, celui du Mal, et celui de la Vierge. Autre application du schéma narratif de Pétrarque à un sujet religieux, celui du plan du Salut et de la Vierge comme co-rédemptrice.
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Enfin, il est impossible de ne pas penser aux sept chars mythologiques du semainier du Gros Horloge, dont les cadrans datent de 1527-1529 et sont donc contemporains de cet hôtel. Les chars de chaque jour de la semaine sont ceux de Diane, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne et Phoebus-Apollon, tirés respectivement par des cerfs, des louves, des coqs, des aigles des cygnes, des griffons et des chevaux.
Voir ainsi Vénus :
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Vendredi : le char de Vénus tiré par des cygnes. Photo lavieb-aile 2020.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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2. Au premier étage. Allégorie féminine sur un char tiré par des dauphins. Amphitrite ?
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Une allégorie assez identique, cheveux au vent et tenant un sceptre, est entourée de trois porteurs de flambeaux. Les dauphins orientent vers une divinité de la Mer, soit Amphitrite.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Le décor en bas-relief : pastorales.
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"La décoration extérieure était luxuriante. Les étages supérieurs étaient couverts de sculptures représentant des scènes pastorales. Seul un fragment a été récupéré. Heureusement, ces décors avaient été relevés par Eustache-Hyacinthe Langlois. Les registres inférieurs sont consacrés à la pêche et à la moisson. Les scènes supérieures sont consacrées aux bergers. Ces pastorales étaient très à la mode au xvie siècle." (Wikipédia)
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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La galerie sud, dite d'Aumale ou de François Ier. (Après 1520)
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La galerie sud en rez-de-chaussée est l'élément le mieux conservé de l'hôtel, miraculeusement épargné par le bombardement aérien du 19 avril 1944, qui rasa la partie sud-est et sa tourelle.
La façade nord est relativement bien conservée, malgré l'orientation au nord et le ruissellement des eaux de pluie d'un toit plat jusqu'en 1950.
Elle est percée de six arcades en anse de panier au dessus d'un solin haut d'environ deux mètres soixante et est accessible par un perron adossée à la tourelle ouest. Les arcades sont ornées de colonnes à candélabres typiques de la Renaissance rouennaise.
Des pilastres et des corniches délimitent des compartiments rectangulaires que je décris en trois registres :
Le registre supérieur accueille les six panneaux sculptés des Triomphes de Pétrarque.
Le registre placé sous les baies reçoit cinq panneaux consacrés à l'Entrevue du Camp du Drap d'Or entre François Ier et Henri VIII d'Angleterre.
Le registre inférieur est découpé de cinq panneaux purement décoratifs.
"C'est la partie la plus spectaculaire de l'hôtel. En forme de loggia, l'aile marque l'arrivée de la Première Renaissance à Rouen. La plupart des hôtels particuliers de l'époque possédaient de telles galeries qui mettaient en contact le corps de logis principal et les communs. Il n'y avait pas de fenêtres. En dessous se trouvaient les écuries et les remises, ouvrant vers le sud, dans la rue du Panneret. Elle a été édifiée à l'époque de Guillaume III le Roux qui était abbé d'Aumale (d'où son nom). La date ne peut être antérieure à 1520 du fait de la représentation de l'entrevue du camp du Drap d'Or." (Wikipédia)
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Les baies sont séparées par des pilastres à candélabres et rinceaux, animaux fantastiques, bucranes etc. encadrés par des rangs de perles et d'oves.
Sur le côté, on découvrirait des colonnes aux chapiteaux abritant des personnages variés, des faunes et des musiciens.
Les armoiries des Le ROUX qu'on découvre sur un dé de pilastre à droite de la porte, mais aussi dans la même emplacement entre les panneaux du registre inférieur des baies, sont celles de Guillaume III, puisqu'elles sont timbrées de la crosse d'abbé.
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In Létteron et Gillot page 38.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Remarquez les initiales GLR , monogramme de Guillaume III Le ROUX, finement gravées sur le cartouche encadré par deux masques de profil, en bas.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Sur un dé de pilastre : Homme sauvage armé d'une lance et d'une targe.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Les bas-reliefs du registre supérieur : les Chars de Triomphe, inspirés des Trionfi (1473) de Pétrarque.
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Présentation.
Dans l'Antiquité romaine, les héros des conquêtes étaient acclamés, monté sur un char, lors de défilés.
En 1374, Pétrarque avait publié I Trionfi, suite de six poèmes, où chaque personnage allégorique défilait dans un char triomphal au sein d'un cortège. Dans un songe où il revit son célèbre amour cruel pour Laure à Avignon, la première allégorie figure sur son char le Triomphe de l’Amour, qui se trouve ensuite vaincu par le Triomphe de la Chasteté dont le visage est celui d’une Laura inaccessible. Pour le grand malheur du poète, la Chasteté est à son tour vaincue par le Triomphe de la Mort. Mais le Triomphe de la Renommée rassure le poète : par son œuvre, il garde en vie à celle qu'il a aimé. Mais la Renommée ne peut résister au Triomphe du Temps qui dévore tout. Le Temps lui-même n’aura pas le dernier mot, puisqu’il est supplanté par l’Éternité, belle promesse d’un paradis où le poète retrouvera sa bien-aimée.
L'œuvre va avoir un immense succès et va susciter de très nombreuses illustrations sous formes d'enluminures, de tapisseries ou de sculptures.
En 1502, une femme commande pour illustrer le poème de Pétraque le superbe vitrail des Triomphes pour l'église d'Ervy-le-Châtel (Aube).
L'engouement pour le thème des Chars va être considérable à la Renaissance, y compris sous la forme d'entrées triomphales des princes dans leurs villes, des spectacles mis en scènes par les plus grands artistes qui se chargeaient aussi de la réalisation des décors.
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Le thème des Triomphes à Rouen au début du XVIe siècle.
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a) Le cardinal Georges d'Amboise fit réaliser en 1500-1505 pour l'offrir à Louis XII, un luxueux manuscrit d'une traduction, par un rouennais, des Triomphes de Pétrarque : BnF fr. 594. Il le fait enluminer par un artiste (nom de convention Maître des Triomphes de Pétraque) sous forme de sept doubles pages. On pense que cet artiste (rouennais ou parisien ?) appartenait à l'atelier parisien de Jean Pichore, et on lui attribue les Petites Heures d'Anne de Bretagne BnF NAL 3027, daté vers 1500-1505 et vraisemblablement offert par Georges d'Amboise à Anne de Bretagne. On lui attribue aussi le Livre d'Heures de Henri IV, manuscrit également lié à Georges d'Amboise.
b) A la mort de Guillaume II, en 1520, l'hôtel de Bourgtheroulde devint la propriété de Guillaume III, abbé d'Aumale. C'est à cette époque que fut construite la célèbre galerie d'Aumale (ou de François Ier), représentant l'entrevue du Camp du Drap d'Or. En 1532, c'est le frère de Guillaume III, Claude Le Roux qui hérita du bien.
L'abbé d'Aumale fit sculpter le registre supérieur de la galerie de six panneaux en bas-relief consacré aux chars des Triomphes de Pétrarque.
Les chars vus de profilent se dirigent vers la droite, selon la convention iconographique générale.
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I. LE CHAR DE L'AMOUR.
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Le premier bas-relief, le plus abîmé, nous montre les vestiges de quelques figures et les traces d’un char surmonté d’un dais porté par des colonnes. On ne peut que deviner l'inscription de l'entablement : AMOR VINCIT MVNDVM, "L'Amour est le vainqueur du Monde". Au dessus, l'a trace d'une aile signalerait l'emplacement d'Eros.
Le char est suivi des victimes d'Amour, hommes et femmes les mains liées. Les plus connus sont, dans le poème de Pétrarque, Tristan et Isolde, Dante et Béatrice, César et Cléopâtre, mais aussi Hercule, Phèdre ou Jason et Médée. Impossible de les reconnaîtr ici.
Au devant, deux personnages semble converser : ils pourraient correspondre à Pétrarque conversant avec son ami qui le guide.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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II. LE CHAR DE LA CHASTETÉ.
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La partie supérieure est complètement détruite, mais la partie inférieure subsiste encore ; on y reconnaît fort bien un char traîné par des animaux mutilés mais carapaçonnés, qui pouvaient paraître être des chevaux mais qui ont des sabots fendus. Il pourrait s'agir de licornes, symbole de virginité.
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À l'avant, marchent des personnages richement habillés, dont l'un vêtu de chausses à crevés et d'une brayette, selon la mode Henri II. C'est un seigneur ou écuyer, tenant de la main gauche le fourreau de son épée. Autour de lui, les restes de deux femmes élégamment vêtues. Si on se réfère au texte de Pétrarque, cela pourraient être des héroïnes de l'antiquité que le poète cite en exemple de leur chasteté (Lucrèce, Judith, etc.)
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Deux personnages suivent le char. Le dernier porte un long et lourd manteau frangé et à aux manches larges et ouvertes. Un prélat ? L'autre porte l'épée.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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III. LE CHAR DE LA MORT.
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La Mort est figurée debout, drapée dans un suaire, sur un char traîné par des bœufs, sous les roues duquel sont écrasés tous les personnages qu’il rencontre.
Le char décoré d'ossements et de crânes porte l'inscription MORS VINCIT PVDICITAM, "la Mort est vainqueur de la Chasteté".
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IV. LE CHAR DE LA RENOMMÉE.
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Le char est attelé de deux éléphants richement harnachés ; sur le devant se tient une figure allégorique de la Mort, dont la tête seule est décharnée ; au sommet, une Renommée ailée embouche une trompette ornée d’un pennon à fleurs de lys.
Le centre du char est décoré d’une sculpture représentant un homme écrivant sur un pupitre, figure très inhabituelle de Pétrarque rédigeant son poème.
Sur le côté et derrière le char, un cavalier monte un cheval lancé au galop et soutient de la main droite une femme nue, assise en croupe; il foule aux pieds de sa monture un guerrier nu avec son cheval ; une troupe d’hommes, armés de lances et d’épées, précède et suit la Renommée.
Inscription : FAMA.VINCIT .MORTEM
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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V. LE CHAR DU TEMPS, TEMPUS.
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Un homme à longue barbe est assis sur le devant d’un char couronné d’un dais. Il conduit un attelage de quatre chevaux, que précèdent deux personnages, dont l’un porte sur l’épaule gauche des rameaux chargés de fruits (l'Automne), et dont l’autre est chaudement habillé et s'appuie sur sa canne (l'Hiver) Sur le côté et derrière le char, on voit deux autres figures ; la première, presque nue, a la tête entourée d’épis de blé en forme de couronne; elle tient d’une main une gerbe d’épis, et de l’autre une faucille (l’Été) ; son compagnon, revêtu d’un costume de cour, brandit de la main droite un arbrisseau couvert de feuilles (le Printemps).
Sur l'entablement du temple à quatre colonnes cannelées se lit l'inscription TEMPVS . VINCIT . FAMAM., "le Temps est victorieux de la Renommée.
Des médaillons représentent les signes du Zodiaque (à gauche le Sagittaire, les Poissons, le Taureau et les Gémeaux). Ils sont dominés par des allégories des Heures répartis six par six dans les nuées.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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VI. LE CHAR DE L'ÉTERNITÉ : DIEU FIGURÉ PAR LA TRINITÉ.
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Sur le char de la Divinité, trônent, assis sous une sorte de dais, Dieu le père, une tiare sur la tête et tenant un sceptre surmonté d’une fleur de lis, et le Christ, portant une croix sur son épaule ; tous deux soutiennent d’une main les Evangiles, au-dessus desquels est le Saint-Esprit sous la forme d’une colombe.
Ce char, traîné par le Tétramorphe, — le lion de saint Marc, l'aigle de Jean, le taureau de Luc et l'ange de Matthieu, les quatre Évangélistes— écrase les acteurs des cinq autres triomphes, dont la Mort.
Immédiatement derrière lui, marchent un pape et un archevêque (ou les Pères de l'Église). Dans le fond de la composition, on voit un grand nombre de personnages, parmi lesquels on distingue un évêque coiffé d’une mitre, la croix à la main, et des anges qui, rangés par cinq à droite et à gauche du dais, encensent la Trinité.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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LE REGISTRE PRINCIPAL, AU MILIEU: LES CINQ PANNEAUX DE L'ENTREVUE DU CAMP DU DRAP D'OR.
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C'est en juin 1520 qu'eut lieu, non loin de Calais, la célèbre rencontre de François Ier et de Henri VIII. Cette entrevue avait pour but d'amener le roi d'Angleterre à s'allier avec la France contre Charles Quint, roi d'Espagne, élu empereur d'Allemagne en 1519 au détriment de François Ier.
Le camp était situé entre Ardres, appartenant à la France, et Guînes, alors anglaise, distantes de six kilomètres. L'entrevue avait été préparée entre le cardinal Thomas Wolsey, principal conseiller d'Henri VIII et Guillaume Gouffier, seigneur de Bonnivet, amiral de France.
La première entrevue, qui est illustrée ici, eut lieu le 7 juin 1520, jour de la Fête -Dieu, sous une tente dressée à cet effet. Ce fut, derrière des apparences de grande courtoisie et de gaieté, un simulacre d'entente. Quelques jours auparavant, le cardinal Wolsey avait accueilli à Douvres Charles Quint au nom de Henri VIII.
Les participants étaient vêtus avec tant de luxe et faisaient rivalité de tant de richesses que le lieu, dit Le Val Doré, reçut le qualificatif de "Camp du Drap d'Or. Et selon Martin du Bellay, les seigneurs français "y portèrent leurs moulins, leurs forest et leur prez sur leurs espaules.". Ce que les panneaux vont nous montrer.
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Description de gauche à droite.
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1. Sortie du cortège royal anglais du château de Guînes le 7 juin 1520.
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Le château est marqué par deux grosses tours rondes encadrant la porte. A noter, dans le château, quatre dames assistant au départ du cortège. Les seigneurs qui accompagnaient Henri VIII sont richement vêtus et leurs chevaux somptueusement harnachés.
Les troupes armées de chaque camp était composée d'environ 400 hommes : hallebardiers, lanciers et archers assurant la sécurité des monarques et de leurs hôtes.
Le départ des cortèges fut indiqué par une salve d'artillerie, tirée d'Ardres, à laquelle répondirent les canons de Guînes.
Le roi était accompagné de hauts dignitaires ecclésiastiques, des grands officiers royaux, et de certains représentant de la noblesse.
Depuis les galeries du château, des courtisans assistent au départ.
Nombreux sont les seigneurs dont le chapeau est orné d'une corolle de plumes, que portent aussi le chapeau des écuyers et le front des chevaux.
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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2. Milieu du cortège anglais.
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Thomas Wolsey est légèrement sur la gauche, de face avec un chapeau de cardinal. Il semble monter sa mule en amazone en vertu de son rang. Mais la pierre est beaucoup plus altérée aujourd'hui que sur la planche dessinée par G. Engelmann. Il est précédé de sergents massiers et d'un clerc portant une croix. Ce dernier, tête nue, est vêtu d'une très longue robe aux manches larges avec un capuchon rejeté sur ses épaules. Il est suivi de quatre laquais à pied aux coiffures luxueusement empanachés sont ceux des écuyers.
Les deux premiers cavaliers tiennent des masses. Ce sont les huissiers du cardinal ou "sergents massiers" tenant des masses d'or.
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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3. Les deux souverains se saluant : Henri VIII, à gauche et François Ier, à droite.
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Les deux souverains, à cheval, se saluent en soulevant leur chapeau. Alors qu'ils avançaient doucement, dans un scénario réglé comme papier à musique, au dernier moment ils éperonnèrent leur monture, comme s'ils allaient s'affronter, mais au lieu de mettre la main à l'épée, ils la portèrent à leur bonnet à plumes, dans un mouvement allègre et plein de panache. Les chevaux sont contrôlés par les écuyers. Chaque roi est escorté par sa garde de quatre cavaliers, faite d'archers pour Henri VIII et de lanciers pour François Ier.
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Henri VIII et sa garde d'archers.
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Ses archers portent la rose emblématique de leur roi sur la poitrine et sur le dos ( ce que nous ne voyons pas ici...).
Selon les chroniqueurs, ils étaient vêtus de hocquetons (longue casaque brodée à manches) aux couleurs de leur roi, de satin blanc et vert. D'autres portaient des pourpoints de velours cramoisi et chamarré de fin écarlate.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Henri VIII.
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Les deux rois portent la barbe et des cheveux longs, mais ceux de Henri VIII sont retenus par un bandeau. Il porte le collier de son ordre, et il est figuré avec une chaîne à laquelle est fixé le médaillon figurant saint Georges, patron de l'ordre de la Jarretière. Une autre chaîne plus longue passe en sautoir.
Il porte un large col au dessus d'une saie, retenue par une ceinture. Ses manches sont très larges et ouvertes.
Le caparaçon de son cheval est orné de roses de Tudor et de léopards, alternant en damier. Les glands de passementerie des extrémités battent alternativement le sol avec la foulée.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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François Ier et sa garde de lanciers.
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Au second plan, des gardes sont alignés et nous font face. Celui qui est au milieu porte un turban, en plus du chapeau qu'il porte rejeté derrière la tête comme une couronne radiante de plumes. Son pourpoint, ses manches et ses chausses sont tailladés de crevés verticaux alignés en bandes régulières. La braguette est un accessoire orné et ostensible, fixé par des lacets. Sa main droite est posée sur la garde de l'épée, sa main gauche sur la lance. Un personnage similaire se trouve immédiatement après Henri VIII.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Les lanciers à cheval porte l'emblème de leur roi : la salamandre couronnée, représentée dans le dos du premier lancier.
Le bas-relief illustre la façon de chevaucher de l'époque : les cavaliers sont assis très en avant et se tiennent presque debout sur leurs étriers réglés très bas : la pointe du pied est dirigée vers le bas.
Les mors de brides ont des branches très longues et courbes, en C ou en S, sous les bossettes finement ouvragées. Les rênes sont élargies par des bandes de tissus brodées de losanges et perles où pendent des successions de piécettes (ou peut-être de grelots) dont on imagine les effets sonores.
On comparera ces détails avec ceux des cavaliers des Passions du XVIe siècle, soit sur les vitraux ou enluminures soit sur les calvaires finistériens. Voir notamment ici :
Les costumes des cavaliers associent une saie (manteau court ne dépassant pas les genoux) à manches bouffantes, au dessus d'un pourpoint à crevés, et parfois une manteline (manteau long et enveloppant, généralement sans manches) à large col ou une chamarre (casaque longue) ouverte.
Leurs têtes sont ceintes d'un bonnet ou d'un chapeau à larges bords, maintenus relevés par une broche ou "affiquet".
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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François Ier.
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Il porte un pourpoint à crevés qui laisse voir la soie de doublure, et une saie assez courte. Sa manteline (qui était, selon les chroniqueurs, "de drap d'or battu, fort enrichi en pierreries") est repliée sur le bras gauche. On devine le collier de l'Ordre de Saint-Michel.
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Son couvre-chef est orné d'une broche. C'était "un bonnet noir, garny de grans plumailz bien riches auquel avoit une escarboucle".
La housse de son cheval porte, inscrites dans les losanges, des fleurs de lys. La gerbe de larges et hautes plumes est spectaculaire.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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4. Le cortège des prélats français.
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En tête se trouvent trois ou quatre officiers à cheval, qui précèdent le porteur de croix, à double croisillon. Puis vient le cardinal de Boissy, entouré de nombreux prélats (quatre chapeaux cardinalices au total). Le cardinal de Boissy avait été nommé légat du pape en 1519.
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Le dernier cavalier porte le collier de l'Ordre de Saint-Michel, très abîmé, mais dont le médaillon est saisi par la main droite. Il semble en train de s'entretenir avec un cardinal.
Le pourtour du caparaçon de son cheval, par ailleurs orné de losanges centrés par une fleur, porte une inscription en lettres romaines majuscules .
En bas : JE/AIN : GLORIA P
Sur le côté et en haut, dans un autre sens d'écriture : +RME .O.ETR.
Seul GLORIA est compréhensible, précédant la lettre P qui suggère "Gloria Patri", Gloire au Père.
Les autres lettres +RME .O.ETR. pourraient être (Lettéron p. 110) les initiales du verset 19 du psaume 71 Replebitur Majestate Ejus Omnia Et Regnabit "Tout sera rempli de sa majesté et il régnera".
Pour moi, l'énigme reste entière.
Isabelle Lettéron signale que dans le deuxième panneau, celui du cortège anglais, en position symétrique de celui-ci, on pouvait lire, remarquées par l'abbé Noël en 1726, quelques lettres inscrites sur la saie du cavalier chevauchant à droite du cardinal d'York : HO-----NCE.
L'hypothèse de l'abbé Noël est d'y voir la devise de l'Ordre de la Jarretière, "Honni soit qui mal y pense", avec la graphie pence. Dès lors, pour le cavalier français en position symétrique, la devise de l'Ordre de Saint-Michel devrait être "Immensi tremor oceani." Ce n'est pas le cas. On pourrait encore confronter l'inscription aux devises des officiers de l'Ordre, présents au Camp du Drap d'Or. Ce n'est ici pas la devise d'Artus Goufier de Boissy (Hic terminus haeret), ni celle de Galiot de Genouillac (Galiot aime fort une).
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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5. Le cortège royal français sortant de la ville d'Ardres.
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Au centre, un noble personnage met le pied à l'étrier. Notez les spectatrices aux fenêtres et sur les remparts. En bas, à droite, les canons au son desquels s'ébranla le cortège.
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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LE REGISTRE INFÉRIEUR : LES CINQ PANNEAUX DÉCORATIFS PREMIÉRE RENAISSANCE.
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Description partielle.
On y trouve le vocabulaire décoratif du château de Gaillon, ou du tombeau de Thomas James à Dol-de-Bretagne, avec des animaux et personnages fantastiques organisés en symétrie parmi des rinceaux atour d'un candélabre central.
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Deux putti assis sur des dauphins et tenant les extrémités d'un collier. Oiseaux fantastiques et rinceaux.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Putti debout tenant des cartouches. Rinceaux à personnages chimériques.
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On retrouve le principe décoratif de métamorphoses et chimérisme entre les éléments végétaux (rinceaux) et des têtes anthropomorphes mais feuillagées, et entre ces têtes et des attributs animaux (cornes et peut-être plumes).
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Femme nue dansant au milieu de rinceaux et d'oiseaux.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
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Putti debout tenant des cartouches. Rinceaux à personnages chimériques.
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L'Hôtel de Bourgtheroulde. Photographie lavieb-aile 2020 .
— ADELINE (Jules), 1893 L'Hôtel du Bourgtheroulde, in La Normandie Monumentale et Pittoresque, Seine-Inférieure, 1893, Le Havre, Lemale et Cie, imprimeurs, éditeurs, p. 33-36.
— ALLINE (M.) 1927, L'hôtel de Bougtheroulde, Congrès Archéologique de France Rouen 1926, p.178.
— CHALINE (Jean-Pierre), 2005, Tourisme et Patrimoine : L'hôtel de Bourgtheroulde. Du Camp du Drap d'Or au siège du CIN, 2005 Études Normandes Année 2005 54-3 pp. 77-78
— ESSLING, (Victor Masséna, prince d',) 1902, Pétrarque : ses études d'art, son influence sur les artistes, ses portraits et ceux de Laure, l'illustration de ses écrits page 252-253
— LÉTTERON (Isabelle), GILLOT (Delphine), 1996, L'hôtel de Bourgtheroulde, demeure des Le Roux. Cahiers du patrimoine n°44, ed. L'Inventaire.
— PALUSTRE (Léon (dir.), 1892, L'architecture de la Renaissance, Paris, 7 rue Saint-Benoît, ancienne maison Quentin, Libraires-Imprimerie réunies, 1892
— PAGAZANI, (Xavier) 2014. La demeure noble en Haute-Normandie : 1450-1600. Nouvelle édition [en ligne]. Tours : Presses universitaires François-Rabelais, 2014 (généré le 29 mars 2022). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/pufr/8052>. ISBN : 9782869065352. DOI : https://doi.org/10.4000/books.pufr.8052.
— RnBI, bibliothèque de Rouen, documents
-Voyages Pittoresques Et Romantiques Dans L'ancienne France. Ancienne Normandie. Vol.2 / Nodier, Charles -Cailleux, Alphonse De ; Taylor, Isidore Justin SéVerin. Paris : Impr. P. Didot
"Architecture Of The Middle Ages" (1)Apply Extr. De "Architecture Of The Middle Ages" r
"France Monumentale Et Pittoresque. Recueil De Vues Dessins
"L'Album Rouennais" (1)Apply Extr. De "L'Album Rouennais" Filter
"L'illustration" Du 16 Aout 1884, ; P118. Paris : J.-J. Dubochet
France Monumentale Et Pittoresque Recueil De Vues Dessin Nature / Chapuy, Nicolas Marie Joseph. Paris : Jeannin,
La France De Nos Jours / Asselineau, Léon-Auguste. Paris : F. Sinnett, 1853-1876 (1)Apply Extrait De : La France De Nos Jours / Asselineau, Léon-Auguste. Paris : F. Sinnett, 1853-1876 Filter
La Normandie Illustrée;E / Benoist,
La Normandie Monumentale Et Pittoresque ... Seine-Inférieure, 1e Partie / P. Dujardin, E. Letellier, ... Le Havre: Lemâle Et Cie, 1893. [N Atlas 5-9]
Le Moyen-Âge Monumental Et Archéologique / Ramée, Daniel. Paris : A. Hauser, 1840 (1)Apply Extrait De : Le Moyen-Âge Monumental Et Archéologique / Ramée, Daniel. Paris : A. Hauser, 1840
— Rouen, son histoire, ses monuments et ses environs (9e édition revue, annotée et augmentée d'une excursion de Rouen au Havre par la Seine) / par Th. Licquet et Éd. Frère 1878
Le calvaire de l'église de Rosnoën.Le calvaire (kersanton,1893), et les fragments de calvaire (kersanton, 1648, Roland Doré) intégrés au Monument aux morts, de l'église de Rosnoën.
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Voir sur ce blog d'autres calvaires du Finistère (liste en désordre et incomplète):
L'histoire des calvaires de la commune est mouvementée, et montre que l'attachement à ces monuments patrimoniaux et au respect de leur intégrité ou de leur emplacement n'a pas toujours été vif.
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1. L'ancien calvaire du cimetière (XVe-XVIe siècle, Maître de Brasparts).
On en connaît peu de choses : ses fragments auraient été enterrés dans le jardin du presbytère et découverts en 1920 par François-Marie Bramoullé, alors séminariste. Après la guerre, il fut restauré et transféré en 1947 à Vesly (Eure), dont F.-M. Bramoullé était devenu le curé depuis 1937
Un article de Paris-Normandie 2017 nous donne les informations suivantes, mais sujettes à caution car je ne parviens pas à les vérifier (notamment sur le site MemorialGenWeb) :
"Paris-Normandie 23/11/2017 à 23:12
Plus de 5,50m de haut, tout en granit breton, le calvaire, posté en marge de la commune de Vesly, est unique en son genre. Il attire de nombreux visiteurs et curieux de la région.
Ses origines bretonnes détonnent avec le paysage eurois. Ce monument religieux a fait couler beaucoup d’encre, tant par sa provenance que par les débats qu’il a suscités. Surnommé également «le calvaire de la peste», il a été construit au XVIe siècle. Il était censé protéger les habitants du fléau qui sévissait alors.
Découvert en 1920 par le futur curé de Vesly, il était à l’origine construit en bois et retravaillé par la suite en granit de Bretagne. Ce calvaire est disposé sur un pylône de même matière, avant d’orner la ville et de la symboliser.
François-Marie Bramoullé, curé emblématique de Vesly, de 1937 à 1971, est à l’origine de son implantation et de sa réfection, en 1947. Cet édifice chrétien, très visité de nos jours encore, sert également, fait incongru, de monument aux morts sur lequel sont inscrits les noms des Veslysiens tombés durant la Seconde Guerre mondiale.
Surnommé depuis le calvaire de la Libération, il se voit honorer chaque année et fait la fierté de la ville."
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Le père Yves-Pascal Castel, auteur de l'Atlas des croix et calvaires du Finistère, l'a peut-être examiné, puisqu'il l'attribue au Maître de Brasparts :
" Au maître de Quilinen, [auteur du calvaire éponyme] on attribuera Motreff, modeste, Mellac, fortement charpenté et Saint-Hernin, rafistolé comme on a pu.
Proche de Quilinen dans le temps, moins remarquée, la manière du Maître de Brasparts, sonne plus "breton" aux yeux des amateurs, comme si la manière des autres l'était moins. Sans doute issus du ciseau du maître de Brasparts, les calvaires de Loqueffret, de Plouénan, timbré des armoiries des Kersauzon et des Keranguen, et de Vesly, dans l'Eure, étonnant sous le ciel normand, où il a été transporté il y a seulement quelques décennies. » (Castel 1980 page 125)
Cette attribution, qui donnerait à ce monument une forte valeur iconographique, est adoptée par Emmanuelle Le Seac'h, mais apparemment par citation d'Y.-P. Castel sans qu'elle ne l'ait examiné.
Frédéric de Frias me communique les photos suivantes :
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Google maps. Calvaire de Saint-Divy (kersanton, fin XVe ?) déplacé à Vesly (Eure) en 1947.
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Calvaire de Saint-Divy (kersanton, fin XVe ?) déplacé à Vesly (Eure) en 1947.
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CP site Delcampe. Calvaire de Saint-Divy (kersanton, fin XVe ?) déplacé à Vesly (Eure) en 1947.
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Note : en 1901, le chanoine Abgrall décrivait 2 croix sur le placître, l'une à l'ouest (celle de 1562) et l'autre au nord datant de 1506 au dessus d'un petit ossuaire aujourd'hui disparu :
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2. Une croix de missionen bois de 1882...
... occupa ensuite le milieu du cimetière, mais dans les années 1960, "elle menaçait de s'écouler". (APEVE)
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3. Le calvaire de Kerdalaes transporté devant l'église de Saint-Divy en 1967.
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Ce calvaire était érigé jadis près du bourg de Kerdalaes à l'orée du manoir de La Haye.
Le manoir a été acheté en 1966 par Edouard Leclerc, et en 1967, la municipalité a, dans un contexte conflictuel, déplacé ce calvaire pour le placer au centre du cimetière de Saint-Divy, laissant sur place l'emmarchement de granite.
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Description.
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Le calvaire occupe le cimetière d’enclos de Saint-Divy, parmi les tombes.
Un socle cubique à chanfrein en kersanton est posé sur un emmarchement de granit à deux degrés. Ce socle porte la date 1.6.5.2. (avec des points de séparation losangique) sur le chanfrein de son côté est.
Le fût à pans en kersanton porte un croisillon à culots dont le nœud, côté est, est sculpté d'un écu, tandis que les bras portent l'inscription gravée en lettres romaines MATER ECCE FILIVS TVVS, "Mère, voici ton fils" (Jean 19:26).
Le croisillon porte les statues de Marie, à droite, et de Jean, à gauche.
La statue de la Vierge a été brisée en son milieu. La Mère du Christ est voilée, et porte la guimpe, ses mains sont jointes. Le visage est rond, peu expressif mais envahi par les inévitables lichens. Le corps est long et fin, la silhouette élancée est accentuée par le drapé essentiellement vertical et parallèle. Seul le bout rond des chaussures est visible.
La tête de la statue de Jean, au visage défiguré plus encore par les lichens que les autorités laissent prospérer, est brisée. Les cheveux sont longs et bouclés. Le raccord entre la tête et le tronc est singulier, marqué par une forme en biais devant la gorge.
La main droite est posée sur la cuisse, qui est fléchie. La main gauche rejoint la taille, tenant peut-être un livre ou un objet en pain de sucre. Là encore, le corps est élancé, le drapé sobre et parallèle.
La croix à branches rondes terminées par des fleurons-boules à godrons torsadés, porte le Christ à la tête fléchie et inclinée sur sa droite. Le titulus semble (lichens) porter les lettres INRI en caractères gothiques. Un crâne est sculpté au pied de la croix.
La face nord du croisillon porte l'inscription FRANCOIS TONCQVES.
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Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
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Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
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Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
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Le blason : Yves de la Marche et Marie Kersaintgilly.
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L'identification de ce blason longtemps mystérieux a été donnée par Frédéric de Frias (Association des Amis du manoir du Froutven), et confirmée par Michel Mauguin. Voir également le forum cgf.bzh de juin 2021, et les illustrations du site APEVE.
C'est un blason mi-parti, d'alliance entre deux familles. On peut commencer par la moitié droite (senestre en héraldique), côté de l'épouse, et si on parvient à y discerner des feuilles de trèfle, et non des ronds. Soit deux trèfles entiers et deux demi-trèfles. Les experts y ont reconnu les armes de Kersaintgilly de sable à six trèfles 3,2,1.
Le parti de gauche (à dextre) est plus complexe à déchiffrer. Une trangle le divise horizontalement, délimitant un "chef" en partie haute. Si on l'associe à la large séparation entre les deux partis, on y verrait alors la moitié d'une croix. Mais, à la différence du parti senestre, celui-ci est délimité par une bordure, signe de juveignerie.
Au total, Michel Mauguin reconnaît là le blason d'un cadet de la famille de la Marche, de gueules au chef d'argent.
Un couple répond à cette alliance, celui d'Yves de la Marche, écuyer, seigneur de Kerfors, fils cadet, marié le 22 novembre 1600 à Morlaix à Marie de Kersaintgilly. Son frère aîné est René de la Marche époux de Françoise du Plexis. Leur père est Guillaume de la Marche. La mère de René est Jeanne du Chastel de Kerlec'h, celle d'Yves Thébaude de la Bouexière.
Copyright M. Mauguin & Association des Amis du Froutven
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Le couple Yves de la Marche/Marie de Kersaintgilly eut un fils, également prénommé Yves (*), qui épousa Urbaine Thébaud et en 1652 Jeanne Frollo. (*) seigneur de Kerfors, du Squiriou, de Penhelen et de Coztymen Conseiller du Roi, Lieutenant civil et criminel au siège présidial de Quimper-Corentin.
Le fils d' Yves et d'Urbaine Thébaud, Jean de la Marche devint chef d'armes après que la branche aînée soit tombée en quenouille, et la bordure des armes d'Yves ne sera plus justifiée.
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la généalogie officielle fournie par Jean de La Marche lors de la réformation de la noblesse en 1670. BnF Dossiers bleus
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Le manoir de Kerdalaës, propriété de Kersaintgilly.
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Saint-Divy, La Haye, Kerdalaes, et les moulins (roue dentée).
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Le manoir appartient à Guillaume KERSAINTGILY dans cette réformation non datée :
En 1600, Maurice de Kersaintgilly, sieur du Faou, est sieur de Kerdalaes :
https://www.tudchentil.org/spip.php?article1242
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Alors qu'on insistait jusqu'à présent sur la proximité de ce calvaire avec le manoir de La Haye, propriété alors de Sébastien de Penfeutenyo et de ses descendants (René, sieur de Mesgrall), cette identification du blason amène à constater, grâce à une étude des archives, que Marie de Kersaintgilly possédait le manoir de Kerdalaës, et l'a apporté à la famille de la Marche. Les deux manoirs de Kerdalaes et de La Haye sont voisins, et leurs propriétaires sont parfois en conflit.
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En effet, on lit dans le compte facebook de l'AGIP un post de Miliau Kermarrec, signalant un procès du 26 août 1650 au sujet d’une franchise entre le moulin de Kerdalaës et la montagne (la motte) avec le vieux château. Les protagonistes de ces documents sont l’honorable François Toncques, négociant à Landerneau, propriétaire du manoir noble de Kerdalaës appartenant auparavant en 1633 à Marie de Kersaintgilly, et René de Penfentenyo, sieur de Mesgrall (Saint-Divy), au sujet d’une franchise entre le moulin de Kerdalaës et la montagne (la motte) avec le vieux château.
Au procès verbal du 26 août 1650, le litige porte sur la propriété du terrain situé près du moulin où d’anciens meuniers et paysans avaient fait abattre des arbres pour réparer le moulin et laissé pâturer des animaux. Tous affirment alors que la franchise appartient bien au manoir de Kerdalaës.
Un bail à terme de 1633 pour le manoir de Kerdallaiz est signé entre Marie de Kersaintgilly dame de Kerfors, et François et Michel Corre.
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En conclusion, le calvaire porte les armoiries d'une alliance datée de 1600 ; or selon M. Mauguin c'est généralement lors des noces que les monuments sont gratifiés des armoiries d'un couple noble.
Le calvaire ne peut être postérieur, au plus tard, à 1650, date à laquelle le manoir de Kerdalaës a changé de propriétaire.
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Donc, quatre conséquences :
1. Le calvaire n'a pas de rapport avec le manoir de La Haye (et avec sa chapelle dédiée à Jean-Baptiste)
2. La date de 1652 portée sur le socle n'est pas contemporaine de la réalisation du calvaire, qui peut dater de 1600.
3. L inscription FRANCOIS TONCQUES a été ajoutée dans un second temps à l'arrière du bras du croisillon , et sans doute en même temps que la date de 1652.
4. Ses caractères stylistiques sont à comparer à ceux des ateliers de sculpture du début du XVIIe siècle au lieu d'être abusé par la date du socle. Ce n'est évidemment pas une œuvre des Prigent (actifs de 1527 à 1577) ni de Roland Doré ( actif de 1618 à1663), au style si reconnaissable.
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Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
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L'inscription FRANCOIS TONCQVES au revers du bras du croisillon.
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On notera sur la photo que le nœud du bras forme un culot, godronné, susceptible de recevoir une statue. Selon des sources, il aurait pu s'agir d'un Christ aux liens, ce qui est parfaitement vraisemblable par référence aux autres calvaires de Basse-Bretagne, quand ce n'est pas une Vierge de Pitié
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L'acte de 1650 nous indique que l’honorable François TONCQUES , négociant à Landerneau, est alors le propriétaire du manoir noble de Kerdalaës appartenant auparavant en 1633 à Marie de Kersaintgilly : il a peut-être acquis ce manoir et son moulin en 1633, précisément ?
Le dossier 99 J 103 des Archives départementales est consacré aux terres de Kerdalaes, et François Toncques y est cité à de nombreuses reprises.
Deux actes de baptême de 1649 à Landerneau et Guipavas citent comme parrain "François DONCQUES, sieur de Kerdalaes".
On trouve aussi la graphie TOUCQUES.
Il épousa Marie DERIEN puis Marie BERNARD en1664. Il décède en 1670.
"Le paiement des droits suite à la succession de Francois TOUCQUES passera devant le parlement de Bretagne. Un avis d'époque est en ligne https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k ... f/f61.item Il mentionne ses deux mariages et un décès vers 1670 (avant le remariage de son épouse à Landerneau). Le manoir passera aux enfants LEON de celle-ci. Un héritier est nommé : Yves ABHERVE." (forum CGF)
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Le calvaire dit de 1652 du cimetière de l'église de Saint-Divy. Photographie lavieb-aile.
L'histoire des calvaires de la commune est faite d'une série de déplacements, réaménagements, appropriation par un prêtre pour sa nouvelle paroisse normande, démembrement des monuments, captation en "coup de main" et affrontement, et surtout méconnaissance et/ou désintérêt pour la recherche historique, artistique et d'archive.. Aucune équipe ne semble avoir été envoyée à Vesly pour dresser un inventaire détaillé du calvaire des années 1500, voire pour en négocier la restitution... ou en réaliser un précieux fac-similé.
L'inscription du calvaire de 1562 reste encore non déchiffrée, le Christ de ce calvaire a été installé orienté vers l'est en dépit des règles de base, et sa situation, dictée par des impératifs d'aménagement urbain, le rend très mal visible car très ombragé.
Un projet de "restauration" du calvaire de Kerdalaes.
Aujourd'hui (février 2022), la municipalité associée à l'AGIP (Association Guipavas Identité Patrimoine) a levé une souscription auprès de la Fondation du Patrimoine pour restaurer le "calvaire de Kerdalaes" (ou ce qui en reste), au printemps ou été 2022 :
"Le calvaire sera restauré afin de rendre son identité et son histoire au village de Kerdalaes à la limite Est de Guipavas et aux abords du manoir de la Haye à Saint-Divy. La statuaire reconstruite recevra sur la console Est une nouvelle statue dédiée à Saint Jean-Baptiste dont la chapelle du manoir de la Haye lui est dédiée. C’est la statuaire déplacée au cimetière de Saint-Divy qui servira de modèle à la nouvelle réalisation. Pour mettre en valeur ce patrimoine, une plaque avec QR Code rappelant l’histoire de ce calvaire sera fixée à son pied et un livre sur le patrimoine de la vallée de Mesgrall et des manoirs de Kerdalaes et de La Haye sera réédité en 2022. Le calvaire de Kerdalaes sera également inscrit dans le cadre des journées du patrimoine des communes. " (Fondation du Patrimoine)
C'est le sculpteur Joël Kerhervé qui réalisera la statue moderne.
On voit que l'appel au don fait état de données non historiquement fondées (référence au manoir de La Haye et non de Kerdalaes). On peut se demander quelles informations historiques seront proposées par le QR code, alors que les travaux de recherche n'ont pas été menées par la commune de façon approfondies concernant ce calvaire, et que les connaissances exposées ici proviennent de recherches privées, ou de l'association de Guipavas. Aucune évaluation stylistique et iconographique n'est disponible en ligne, ni signalée ou exposée par la Fondation.
2695. Saint-Divy, cimetière d’enclos, g. k. 1652. Degrés. Socle cubique, chanfrein: 1.6.5.2. Fût à pans. Croisillon à culots, écu: MATER ECCE FILIVS TVVS. FRANCOIS TONCQVES., statues: Vierge, Jean. Croix, branches rondes, fleurons-boules, godrons torsadés, crucifix, tête de mort sous les pieds. Le monument a été transféré en 1966 de Kerdalaës, limite des communes de Guipavas et de Saint-Divy. [YPC 1980]
— COUFFON (René), Le Bars (Alfred), 1988,,Nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, ,
A l'entrée du cimetière, semblable à celles de La Roche-Maurice et de Pencran, croix en kersanton timbrée des armes de Rohan : Marie Madeleine au pied de la croix, croisillon sans statues, Vierge de Pitié au revers du Crucifix, XVIè siècle.
- Autre croix de l'enclos, transférée de Kerdalaës en 1966 : socle daté 1652, Vierge et saint Jean sur le croisillon.
— DOSSIERS BLEUS. BnF français 29970 ; mémoires, notes et documents généalogiques, classés par ordre alphabétique de noms de personnes, au Cabinet des titres, dans le cours du XVIIIe siècle. Marcellanges-Marck.
Mon but est de présenter mes photos de l'ornementation en bois sculpté et doré, splendidement restaurée. Et de souligner l'ingéniosité du dispositif de miroirs placés au plafond, et qui permettent une vision surplombante qui était jadis le privilège des mouettes et goélands de la rade.
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Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
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VU DANS LES MIROIRS.
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Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
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En inversant l'image :
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Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
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LES RAMES.
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Les deux rangs de 11 rames sont décorées de poissons. C'est un plaisir de les découvrir rame après rame.
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Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
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LES CARTELS EXPLICATIFS.
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Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le Canot de l'Empereur, Plateau des Capucins à Brest. Photographie lavieb-aile 2022.
Le tympan du portail central de la façade occidentale de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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PRÉSENTATION.
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Consacré à la Vierge Marie comme la cathédrale elle-même, le portail central est orné au tympan d’un Arbre de Jessé (arbre généalogique de la Vierge), œuvre de l'imagier et tailleur de pierre rouennais rouennais Pierre des Aubeaux ( parfois orthographié « Alobeaux » ou « Desobeaux » ). Il a souffert des mutilations de 1562 par les huguenots, mutilations qui ont été réparées tant bien que mal au siècle suivant par Nicolas Gugu ou Cucu en 1626. Le portail a été restauré en 2015.
À la suite de désordres liés à la construction de la tour de Beurre, Roulland Le Roux reconstruit le portail central de la cathédrale de Rouen entre 1508 et 1511. L' Arbre de Jessé du tympan a été commandé au sculpteur le 14 juillet 1512 . Il fut réalisé vers 1514.
Il est entouré d'une riche archivolte consacrée aux prophètes, aux sibylles et aux patriarches.
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Un thème iconographique ancien.
L'arbre de Jessé où figurent les Rois de Juda descendants du patriarche Jessé, père de David forme un tout thématique et typologique (liens génétiques entre l'Ancien et le Nouveau Testament), une démonstration théologique en deux points :
1. La naissance du Christ, et son sacrifice ont été annoncés par les Prophètes bibliques, selon une démonstration où une citation de chacun des douze prophètes est associée à sa réalisation par la vie de la Vierge et celle du Christ. La citation fondamentale est celle d'Isaïe 11:1, "Un rameau sortira du tronc de Jessé, et un rejeton naîtra de ses racines".
2. Le chiffre douze est mis en parallèle avec celui des douze rois de Juda, descendants généalogiques et monarchiques de David, dont la liste est donnée par l'incipit de l'évangile de Matthieu et qui conclut : "Jacob engendra Joseph, l'époux de Marie, de laquelle est né Jésus, qui est appelé le Christ." (Mt 1:16). Certes, Matthieu donne 28 générations entre David et Jésus, mais les auteurs médiévaux ne retiennent que 12 rois pour soutenir leur démonstration.
"les premières représentations datent de la fin du xie siècle alors que les Pères de l’Église et les théologiens du Haut Moyen Âge ont glosé à l’envi sur cette prophétie. Cette image devient, dès le xiie siècle, «l’illustration» choisie pour le début de l’évangile de saint Matthieu, la généalogie du Christ. Suger semble avoir été le premier à lui donner cette orientation en combinant l’idée de la prophétie (Jessé donnant naissance à une tige portant la Vierge et le Christ) avec celle de généalogie royale (ajout des rois de la tribu de Juda, dont le premier, David, fils de Jessé, occupe une place privilégiée), dans le vitrail de l’abbaye de Saint-Denis, créant ainsi un lien typologique évident. La formule eut du succès et c’est sous cette forme dans les vitraux, et au début de l’évangile de Matthieu dans les manuscrits, que l’Arbre de Jessé est diffusé pendant le xiie et le xiiie siècle français." (Lepape 2009)
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Un renouveau à la fin du XVe siècle.
Au XVe et XVIe siècle, sous l'influence d'un ouvrage qui diffuse la pensée typologique, le Speculum humanae salvationis, c'est la Vierge à l'Enfant qui culmine au sommet de l'arbre, en postulant que Marie est de la race de David. Les Arbres de Jessé, qui ont été plus rares au XIVe siècle, deviennent un thème majeur de l'ornementation des églises, et les vitraux qui le représentent occupent souvent une place centrale. Même si elle n'est pas exhaustive, la liste de mes liens (supra) montre bien cette réapparition des Arbres, sous la forme de vitrail aux cathédrales d' Évreux, Moulins en Alliers, Sens et Rouen de 1470 à 1506, ou au chœur des églises et chapelles normandes et bretonnes de 1475 à 1560, et sous la forme de sculptures monumentales sur pierre ou sur bois notamment à Rouen (ce tympan), puis à Gisors et Beauvais, ou Saint-Riquier.
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L'affirmation de la conception immaculée de Marie.
En Normandie en particulier, à la fin du XIVe et début du XVe siècle, l'Arbre s'intégra dans une dévotion à l'Immaculée Conception de la Vierge, lors d'une fête ou puy des palinods concours de poésie célébrée à Rouen.
L'Arbre illustre la foi en la naissance virginale du Christ, dont la typologie, ancienne, est fondée sur les versets 11:1-3 d'Isaïe : Et egredietur virga de radice Jesse, et flos de radice ejus ascendet "puis un rameau sortira du tronc d'Isaï [Jessé], et un rejeton naîtra de ses racines" associé au verset Isaïe 7:14 Ecce virgo concepiet, et pariet filium, et vocabitur ejus Emmanuel, "Voici, la jeune fille sera enceinte, elle enfantera un fils, et elle lui donnera le nom d'Emmanuel."
Un jeu de mot, qui devient un véritable leitmotiv liturgique, est fait entre virga "la tige, le rameau" et virgo "la vierge".
Enfin, il y a un passage entre cette notion de virginité, prophétisée par Isaïe, puis la notion de virginité d'Anne donnant naissance à la Vierge sous l'effet d'un chaste baiser ou même d'une simple rencontre avec son mari Joachim sous la Porte Dorée de Jérusalem, puis la notion, toute différente, d'une conception "immaculée", exempte du Péché originel.
Le motif iconographique nouveau qui sous-tend cette conviction chère aux Normands est la représentation de Marie comme Vierge de l'Apocalypse, debout sur le croissant de lune.
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L'affirmation de la royauté de Marie.
La généalogie de Jésus de l'évangile de Matthieu vise à souligner l'ascendance royale de Jésus, par David.
La nouvelle iconographie, normande ou rouennaise, honore la royauté de Marie, en plaçant une couronne sur sa tête ; parallèlement se développe le thème iconographique du Couronnement de la Vierge.
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La conjugaison du thème de l'Arbre et de celui des Sibylles.
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Très peu de temps avant la création de ce tympan, vers 1489, Louis de Laval fait réaliser un Livre d'Heures (BnF latin 920) dans lequel les premières enluminures (17r à 29v) mettent en parallèles les prophéties (on dit, pour les distinguer des annonces bibliques, les "vaticinations") de 12 femmes de l'antiquité gréco-latine (ou du moins non bibliques), les Sibylles, avec 12 épisodes de la vie de la Vierge et de la Passion du Christ.
On trouve ces Sibylles représentées sur les colonnes de l'Aître Saint-Maclou à Rouen en 1526-1529.
De même que les 12 prophètes et les 12 rois de Juda ont été associés aux 12 apôtres, les 12 Sibylles font être associées au thème de l'Arbre de Jessé, soit directement soit plus souvent indirectement.
Sur le portail de Rouen, la relation est directe entre les 12 Sibylles, les 12 Prophètes et 12 Patriarches, qui occupent les archivoltes, et l'Arbre de Jessé du tympan : chacun des 36 personnages périphériques annoncent la croissance verticale de l'arbre issu de Jessé et fleurissant en la Vierge et son Fils.
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Les Arbres de Jessé de Rouen et périphérie au XV et XVIe siècle.
— vers 1470 : verrière de Saint-Maclou (baie 113).
-Vierge à l'Enfant couronnée, dans une mandorle solaire, sur un croissant de lune. L'enfant joue avec un moulinet.
-16 rois tenant des sceptres
- Un prophète à la droite de Jessé (inscription), David à sa gauche. Tous les deux debout.
-Jessé assis, racine de l'arbre naissant du dessus de sa tête.
—1506 : verrière de Saint-Godard (baie 4) par Arnoult de Nimègue.
- Couronnement de la Vierge au tympan
-Vierge à l'enfant couronnée, sur un croissant de lune.
-12 rois, tenant des sceptres, autour de David placé entre Jessé et la Vierge.
-4 prophètes au registre inférieur, entourant Jessé.
-Jessé assis, racine de l'arbre au dessus de sa tête
-Un soubassement portant les inscriptions prophétiques (XIXe).
— 1500-1510, Bourg-Achard, église Saint-Lô, baie 7
-Vierge à l'Enfant couronnée, dans une mandorle solaire, croissant de lune peu ou pas visible.
-14 rois de Juda dont David et sa lyre, Salomon en Africain
-4 prophètes et leurs inscriptions citant Isaïe (mais restauré au XIXe)
-Jessé assis sous sa tente, dans l'attitude du songeur. Inscription Virga Jesse Florida.
— 1523, Elbeuf, église Saint-Etienne (baie 9).
-Vierge à l'Enfant nimbée, dans une mandorle solaire, sur un croissant de lune.
-10 rois tenant des sceptres, ou, pour David, sa lyre.
-4 prophètes autour de Jessé au registre inférieur.
-Jessé assis de face, sous son pavillon. L'arbre naît du sommet du pavillon.
-Nombreuses inscriptions sur les galons.
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Le chantier du grand portail de la cathédrale 1502-1515
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Le chapitre de la cathédrale est informé en 1502 que le grand portail (datant peut-être du XIIe siècle) menace de s'effondrer. En 1508 sont exposés à l'Hôtel de Ville les projets du maître maçon Jacques Le Roux et de son neveu Roulland Le Roux, qui allait lui succéder. Les premières assises sont posées en 1509, et les contacts avec des ymagiers (sculpteurs) sont établis. Le nom de Pierre Des Aubeaux apparaît en septembre 1511, assisté d'un puis deux "valets" ou assistants. Son salaire est le plus élevé, supérieurs à celui des autres ymagiers, Jean Théroulde et Jean Poulain notamment. Il est alors débattu de grandes statues d'archevêques de Rouen, financées par des souscriptions auprès des chanoines du chapitre, et du cardinal Georges II d'Amboise.
Le tympan avec son arbre de Jessé et ses voussures apparait aux comptes de 1512-1513. Le prix attribué à Des Aubeaux pour le tympan est considérable : 500 livres. Dans les voussures, les Prophètes sont de Pierre des Aubeaux, les Sibylles ainsi que les Anges et les Chérubins sont de Nicolas Quesnel, et les Patriarches, de Richard le Roux.
Un Cardin Jovise reçoit en juillet 1512 8 livres pour un "grand portrait" de l'arbre de Jessé, sans doute une mise au net de l'esquisse.
Pierre Des Aubeaux est un sculpteur rouennais alors suffisamment réputé pour qu'une confrérie de l'Assomption de Gisors lui commande en 1510 pour sa chapelle une grande hystoire à la louange de Notre-Dame. Il en persiste à la Collégiale de Gisors les litanies de la Vierge, inspirée de la composition identique placée au dessus de la Dormition de la Vierge à l'abbatiale de Fécamp, également attribuée à Des Aubeaux .
"Il réalise une statue de saint Étienne pour la chapelle éponyme, inaugurée à Noël 1512. Haute de 2 mètres, elle a été peinte et dorée par Louis Le Pilleur. Elle se trouve dans le « chapistrel » réalisé par Roulland Le Roux.
Il fait partie des 8 « ymagiers » engagés en 1519 pour la réalisation du tombeau du cardinal Georges d'Amboise. À partir de juin 1521, il est chargé de la réalisation du portrait du défunt à partir de deux portraits venus de Gaillon pour l'aider dans son exécution. Il est ensuite chargé, avec l'aide de Chaillou et Therouyn, de la réalisation d'un orant pour le neveu Georges II d'Amboise. " (Wikipedia)
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DESCRIPTION.
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Après ce long préambule, nous voilà très curieux de découvrir quel parti-pris a été décidé par les commanditaires du tympan du portail principal de la cathédrale. Il comporte 18 figures.
À la base du tympan, Jessé, à demi couché sur le côté dans l'attitude du songeur, est entouré des statues de grande taille de quatre Prophètes (ce serait Isaïe, Jérémie, Ezéchiel et Daniel).
De son flanc gauche s'élève un puissant rameau sur les branches duquel viennent s’étager les 12 Rois de Juda. Nous verrons que je pense reconnaître, à la meilleure place, le roi David grâce à sa lyre.
Marie trône au sommet du tympan, telle qu’elle apparaît dans la vision de l’Apocalypse, « nimbée de soleil », et jadis couronnée.
La principale différence avec les verrières normandes est la position allongée de Jessé. Elle sera largement reprise, par exemple à Gisors en 1589. Elle est déjà présente à Burgos en 1483-1486. Mais sur la tenture de N.D. de Nantilly à Saumur, datant de 1529 et donc contemporaine de ce tympan, Jessé est assis, accompagné de 12 prophètes et de 12 rois désignés par leur nom.
Une lithographie de ce tympan a été donnée dans les planches gravées des Voyages pittoresques de Nodier et Taylor en 1825. J'en présente ici le relevé.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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Planche 136 des Voyages pittoresques. Dessin de Fragonard 1823, lithographie de G. Engelmann.
On remarque que les deux prophètes de gauche, et la Vierge, conservent leur tête.
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LE REGISTRE INFÉRIEUR. LES HUIT PREMIERS PERSONNAGES.
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Jessé rêvant est semi-couché sur le côté droit, la tête appuyée sur la main accoudée.
C'est bien par un songe que Jessé a vu se dérouler sa descendance en une longue suite de rois.
Le riche propriétaire de troupeaux est figuré barbu, indiquant son grand âge. Il est vêtu d'une longue robe et chaussé de sandales à extrémités pointues dont la partie antérieure est marquée de "crevés" relevant de la mode des courtisans de François Ier et Henri II. Les manches, et les pans, forment des plis en rideaux successifs. Un pan est crénelé.
"Cette œuvre certaine nous permet de prendre connaissance d'un système de draperies que l'on rencontre chez Desobeaux beaucoup plus fréquemment que ce que j'appellerai sa draperie noble. C'est un système presque entièrement inorganique avec des paquets de plis par place, des sinuosités arbitraires, à l'extrémité inférieure, souvent des bords frangés et effilochés. " (M. Aubert)
Il porte deux larges colliers pectoraux, évoquant vaguement ceux des grands prêtres. La coiffure est un bonnet à rabats, non conique.
L'arbre prend racine dans le flanc gauche de Jessé, s'élève obliquement en une volute et donne toute de suite quelques feuilles.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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Droits Gallica BnF.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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LES DEUX PROPHÈTES DE GAUCHE.
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Rien ne permet de les identifier à défaut d'inscription. J. Le Maho indique les noms d'Isaïe et Jérémie, qui sont les prophètes de base des Arbres de Jessé.
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Leur tête a été brisée, ainsi que les mains, celles qui traditionnellement adoptent le geste de la prophétie; doigt levé, ou désigne la réalisation effective de celle-ci, la vierge enfantant. Mais ces gestes se devinent par leur esquisse par les avant-bras.
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Le premier, "Isaïe", garde une petite barbiche qui a échappé à la masse des iconoclastes. Il porte une robe et un manteau, et un mélange s'effectue entre le costume contemporain, et celui qui, dans l'iconographie, permet de faire reconnaître au spectateur qu'on a affaire à un personnage de l'Ancien Testament. Pour cela, le sculpteur a à sa disposition un vocabulaire codifié, soi-disant hébraïque (avec des franges, des glands de passementerie) ou exotique et oriental (comme, plus loin, les turbans). La ceinture frangée, ou la frise pectorale relèvent de ces codes. Certainement, bien que cela tient aussi des traits stylistiques du sculpteur, la surcharge des manches superposées est encore à mettre sur ce compte des codes hébraïsants, même si les crevés en ligne de I est aussi propre à la mode du temps.
Il porte, sur des pieds nus, des sandales plus spartiates, plus "romaines" à mes yeux, que celles de Jessé que j'imaginai fourrées comme des pantoufles. Une lanière passe entre le premier et le deuxième orteil avant de se nouer derrière la cheville.
Alain Rey (Dict. hist. langue franç.) signale que les sandales étaient jadis un signe d'élection, réservé aux prêtres ou à l'aristocratie.
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Son voisin, Jérémie, a les genoux dénudés, entre une tunique courte et des guêtres. Ses chaussures sont fines et enveloppantes, sans talon.
Son manteau pendouille, déborde, hésite entre l'oripeau et la tenture ; sa ceinture, à défaut d'être à pendeloques, s'orne de franges ou cannetilles, tandis qu'un gland de passementerie pend sous son camail.
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Tous les deux ont le genou droit en avant, dans la posture de l'orateur distingué.
On a vu pourquoi la référence à Isaïe est incontournable dans un arbre de Jessé. Celle faite à Jérémie se justifie par cette citation (Jérémie 33:14-17)
" Voici, les jours viennent, dit l'Éternel, Où j'accomplirai la bonne parole Que j'ai dite sur la maison d'Israël et sur la maison de Juda. En ces jours et en ce temps-là, Je ferai éclore à David un germe de justice; Il pratiquera la justice et l'équité dans le pays. En ces jours-là, Juda sera sauvé, Jérusalem aura la sécurité dans sa demeure; Et voici comment on l'appellera: L'Éternel notre justice. Car ainsi parle l'Éternel: David ne manquera jamais d'un successeur Assis sur le trône de la maison d'Israël."
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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LES DEUX PROPHÈTES DE DROITE.
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Ezéchiel et Daniel ? Pourquoi pas ?
On trouve Ézéchiel, au même titre que les onze autres prophètes, sur l'Arbre de Jessé de Chartres, mais pas au registre principal. Son verset 44:2 sur la porte close est reconnu comme une préfiguration de la virginité de Marie : et Porta Clausa figure parmi les Litanies sculptées par Pierre Des Aubeaux à Fécamp et Gisors, sous une porte fermée par une herse.
"Et l'Eternel me dit : Cette porte sera fermée, elle ne s'ouvrira point, et personne n'y passera ; car l'Eternel, le Dieu d'Israël, est passé par là. Elle restera fermée".
C'est à ce titre que le prophète figure sur l'Arbre de Jessé de Sens, devant une porte qu'il désigne du doigt.
Et dans le Speculum humanae salvationis, la miniature qui représente l'entrée close d'un temple porte l'inscription "Porta clausa significat Mariam".
Le personnage affiche les mêmes signes vestimentaires hébraïques, auxquels s'ajoute un bonnet conique à rabats perlés. Les pans du manteau sont festonnés, le bord inférieur de la robe porte sa série de franges réunies en bouquet, le camail est orné de plaques ou médaillons, tout comme le fermail du manteau. La main gauche est brisée. La pointe de chaussures fines et pointues dépasse du manteau.
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Son voisin, appelons-le Daniel. Ce prophète accompagne Ézéchiel sur l'Arbre de Jessé de Sens. S'il est convoqué sur les Arbres, c'est, depuis la Bible des Pauvres et le Speculum humanae, en raison du verset Daniel 2:34 Videbas ita donec abscissus est lapis sine manibus, "Pendant que tu étais plongé dans la contemplation, une pierre se détacha sans l'intervention d'aucune main". On le voit aussi sur l'Arbre de Saint-Denis et celui de Chartres.
On retrouve le bonnet conique à rabats, la robe, le manteau trop ample, aux plis multiples, fendus et festonnés.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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LES TROIS PREMIERS ROIS DE JUDA.
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Le tronc issu du flanc de Jessé se divise tris vite en une première branche qui part en volute pour produire une corolle de pétales servant de support à un premier roi.
Puis le tronc donne un deuxième rameau, mais qui est brisé et que nous récupérons un peu plus haut : lui aussi se termine par un petit bourgeon et une corolle, occupé par le deuxième roi.
Enfin, venant de plus haut, un rameau descend pour placer un troisième roi, plus petit, au dessus des pieds de Jessé.
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Commençons par le décrire, puisqu'il est le plus bas placé.
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Il porte une moustache et une barbiche, des cheveux longs, et un turban (c'est un roi oriental). Son sceptre, tenu en mai gauche, est brisé. Autre attribut notable, son collier, une chaîne dont je gage qu'elle était en or.
Mais le drapé exubérant est toujours là : le sculpteur ne l'a pas réservé aux prophètes.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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Le deuxième et le troisième roi.
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Gallica BnF
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Tous les deux s'accrochent aux branches pour ne pas tomber. Celui de gauche est peut-être assis, car son avant-bras droit est posé sur sa cuisse fléchie. La main devait tenir le sceptre.
Camail, robe, plis, replis et re-replis.
Celui de droite a gardé sa tête, ou bien cette dernière a été restaurée au XVIIe siècle, ou après 1825 ; on n'y voit pas de couronne. Le bras gauche et son sceptre sont brisés.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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LE REGISTRE MÉDIAN.
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Le groupe des trois rois du centre. David ?
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Gallica BnF.
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Le but de cet examen rapproché, on l'a peut-être deviné, est de rechercher des attributs permettant une identification.
Le roi du coté gauche tient un sceptre presque intact. Je remarque des bottes à rabats, un camail à gland frangé, un vaste manteau ouvert en corolle.
Celui de droite a perdu non seulement la tête, mais tout attribut, mais des franges et bords crénelés sont visibles sur le camail et la ceinture.
Le roi placé au centre pourrait être David, si on accepte mon hypothèse de reconnaître le montant d'une lyre, brisée vers le bas, mais portant encore l'attache de ses cordes.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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Les deux rois des branches latérales du côté droit.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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Les deux rois des branches latérales du côté gauche.
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L'un est debout mais prosterné, l'autre a un genou à terre.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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LE REGISTRE SUPÉRIEUR. LES DEUX DERNIERS ROIS , LA VIERGE À L'ENFANT .
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Les deux rois supérieurs se tournent vers la Vierge et l'Enfant, et fléchissent à moitié le genou. Ils portent des tuniques courtes sur des chausses ou des bottes à rabats. Les têtes ont été brisées, et aucun attribut n'est visible.
Les iconoclastes ont brisé l'Enfant, entièrement, et la tête de Marie : on ne peut postuler qu'elle était couronnée, comme sur la lithographie de 1825.
Elle est au centre d'une mandorle de rayons solaires, mais le croissant lunaire n'est pas présent.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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Droits Gallica BnF.
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L'Arbre de Jessé (P. des Aubeaux, 1514) du tympan du portail central de la cathédrale de Rouen. Photographie lavieb-aile 2020.
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ANNEXE.
L'ARBRE DE JESSÉ DU RECUEIL DE PALINODS DE JACQUES DE LIEUR.
Rouen BM Y.226a f. 34 :
Jacques de Lieur est échevin de Rouen et prince du Puy (concours de poésie) de l'Immaculée conception. Son recueil de poésie pieuses date de 1520 et s'accompagne de peinture sur velin ; il a été réalisé dans un atelier rouennais. Ces "palinods" précédés d'un calendrier forment une sorte de livre d'heures de l'immaculée conception.
L'arbre entoure une poésie : Jessé dans la marge inférieure est assis et donne naissance à deux tiges qui fleurissent en douze rois (dont Salomon à la peau noire et David à la lyre) montant jusqu'à la Vierge à l'Enfant.
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SOURCES ET LIENS
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—AUBERT (Marcel), 1927, " La cathédrale de Rouen par Marcel Aubert", Congrès archéologique de France, 1927, 89e session tenue à Rouen en 1926, article
"Tel qu'il nous apparaît aujourd'hui, avec les mutilations de 1562 et les restaurations du XVIIe siècle, dont la plupart, d'ailleurs, sont tombés à leur tour, l'Arbre de Jessé du tympan de Rouen donne l'impression d'une œuvre hybride et à demi manquée. Un réel effort vers la grandeur et la solennité dans les figures de Jessé et des quatre prophètes, contraste péniblement avec la mesquinerie, avec la fantaisie poussée, à mesure que les figures s'éloignent du regard, jusqu'à l'irrévérence, des Patriarches placés dans les rameaux de l'arbre et où on ne peut reconnaître que David avec un débris de harpe. Il en est notamment deux, au sommet, inclinés vers la Vierge mère, qui, avec leurs manteaux volants découvrant les chausses montantes, évoquent l'idée des bouffons de quelque mystère plutôt que d'ancêtres du Fils de Dieu.
Au point de vue monumental, c'est une grande nouveauté que cette composition embrassant toute la surface du tympan sans souci des divisions de l'appareil : il est évident du reste, que la conception même d'un arbre généalogique se prêtait mal à cette division et que Desobeaux a été plus influencé par les verrières contemporaines que par aucune œuvre de la plastique.
Cette œuvre certaine nous permet de prendre connaissance d'un système de draperies que l'on rencontre chez Desobeaux beaucoup plus fréquemment que ce que j'appellerai sa draperie noble. C'est un système presque entièrement inorganique avec des paquets de plis par place, des sinuosités arbitraires, à l'extrémité inférieure, souvent des bords frangés et effilochés. Muni de ces données, on s'attendrait à discerner au premier coup d'œil celle des voussures, la plus extérieure, qui lui est donnée par les textes."
— LEPAPE (Séverine), 2009, « L’Arbre de Jessé: une image de l’Immaculée Conception? », Médiévales, 57 | 2009, 113-136.
https://journals.openedition.org/medievales/5833
— LEPAPE (Séverine),2011 , "L’Arbre de Jessé normand et la question de l’Immaculée Conception", in Marie et la Fête aux normands, dir. Françoise Thelamon ; Presses universitaires de Rouen et du Havre , pages 195-209.
https://books.openedition.org/purh/10938
— NODIER (Charles), Taylor (J.), CAILLEUX (Alph. de ), 1825, Voyages pittoresques et romantiques de l'ancienne France, Normandie, Didot l'Ainé, Paris, vol. 2, planche 136, page 169.
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1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
"Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)