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26 mars 2020 4 26 /03 /mars /2020 22:24

La Conversion de saint Hubert (kersanton, v. 1525, Maître de Cast)  de l'église de Cast.

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Voir dans ce blog 

— Sur cette église Saint-Jérôme de Cast :

 

— Sur la Conversion de saint Hubert :

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Sur la famille Le Gentil , dont les armoiries pleines  se trouvent sur le calvaire de la chapelle Sainte-Barbe en Ploéven et sur les murs de l'église de Ploéven, tandis que les armoiries écartelées se trouvent sur la maîtresse-vitre de Notre-Dame de Quillidoaré en Cast :

 

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PRÉSENTATION.

Le groupe dit "Chasse de saint Hubert" fait à juste titre  la fierté de la commune de Cast, et la mairie place sa photo en bandeau de son site, avant d'en donner  l'excellente description d'Y-P. Castel.

Nous n'en connaissons ni le commanditaire, ni l'auteur, ni la date, mais les auteurs ont proposé Jehan de Gentil comme commanditaire, tandis qu'Emmanuelle Le Seac'h a désigné sous le nom de Maître de Cast le sculpteur anonyme, actif vers 1525 sur la pierre de Kersanton et reconnaissable aux "crevés" de ses costumes, tant pour cette Chasse que pour deux Dépositions de Locronan. Ces costumes peuvent être datés de 1525-1530.

Ce groupe mérite donc notre intérêt à  plusieurs titres : son sujet, unique en Bretagne et introduisant à l'iconographie de la Conversion de saint Hubert ; son style, dans le cadre de la découverte des ateliers de sculpture de la kersantite de Basse-Bretagne ; son apport documentaire, avec ses nombreux détails vestimentaires et d'harnachements ; et enfin son intérêt historique, précisant l'influence de la famille Le Gentil, déjà décrite dans ce blog à Cast en la chapelle de Quillidoaré.

Mais cette Chasse satisfera d'abord notre plaisir esthétique.

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 VUE GÉNÉRALE. LA LÉGENDE DE LA CONVERSION DE SAINT HUBERT.

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 Le monument de la Chasse de Saint Hubert (et non "châsse" comme sur Pop.culture) est un groupe en kersanton à six éléments qui se trouve depuis 1950-1960 sur le placître de l’église (à l'angle sud-ouest de l'enclos) était auparavant contre le mur extérieur du presbytère. Vient-il d'un ancien calvaire remonté, comme le suggère  Débidour in Dilasser 1979 p. 539-540 ? Ou d'un manoir seigneurial et de sa chapelle ? Il est classé monument historique depuis 1914.

 

Devant un cerf ayant sur sa tête, entre ses deux cornes, l'image du crucifix, un chasseur, descendu de cheval, est agenouillé, les mains jointes et la tête découverte. Sa chevelure est gracieusement bouclée, son costume très riche et très souple semble être de l'époque d'Henri II : bas et hauts-de-chausses à deux rangs de bouffantes et de crevés, manches de dessous avec bouffantes et crevés ; manches plus amples du pourpoint, également tailladées à deux rangs, et descendant en pagode de la hauteur du coude ; surcot largement échancré pour laisser passer les bras ; épée et cor d'ivoire suspendus au côté. Devant lui, sont ses deux chiens, un lévrier et un basset, en arrêt et en contemplation devant le cerf. Derrière est son cheval, richement harnaché, tenu par son écuyer au visage et au costume gracieux.(selon Abgrall)

Le seigneur et chasseur mesure 1,04 m de haut, l'écuyer 1,20 m, le cerf 1,05 m, le lévrier 43 cm et le basset aux oreilles tombantes 34 cm. L'ensemble est présenté sur un soubassement maçonné (*) avec, sur la face sud, un blason muet sans-doute récent et de fantaisie.

(*)" soubassement rectangulaire de 3 m de longueur sur 1,80 m de largeur et 1,30 m de hauteur. Deux bandeaux de schiste soulignent les faces du monument entièrement en granite, y compris la large corniche en doucine droite qui la couronne." Castel

L'écuyer, le cerf et le cheval sont uniquement sculptés d'un seul coté, l'autre (flanc gauche du cerf par exemple) étant simplement équarri pour donner une forme générale aux corps : cette chasse était peut-être destinée à être placée contre un mur (Debidour)

 

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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La légende.

"Depuis le XVe siècle on dit que le seigneur Hubert était si passionné de chasse qu'il en oubliait ses devoirs. La légende rapporte qu'il n'avait pu résister à sa passion un Vendredi Saint, et n'ayant trouvé personne pour l'accompagner, était parti chasser sans aucune compagnie (pourtant, ici, il est accompagné de son écuyer). À cette occasion, il se trouva face à un cerf extraordinaire. En effet, celui-ci était blanc et portait une croix lumineuse au milieu de ses bois.

Hubert se mit à pourchasser le cervidé mais celui-ci parvenait toujours à le distancer sans pour autant se fatiguer. Ce n’est qu’au bout d’un long moment que l'animal s’arrêta et qu’une voix tonna dans le ciel en s’adressant à Hubert en ces termes :

—Hubert! Hubert! Jusqu'à quand poursuivras-tu les bêtes dans les forêts? Jusqu'à quand cette vaine passion te fera-t-elle oublier le salut de ton âme ?

Hubert, saisi d'effroi, se jeta à terre et humblement, il interrogea la vision :

— Seigneur ! Que faut-il que je fasse ?

La voix reprit :

—Va donc auprès de Lambert, mon évêque, à Maastricht. Convertis-toi. Fais pénitence de tes péchés, ainsi qu'il te sera enseigné. Voilà ce à quoi tu dois te résoudre pour n'être point damné dans l'éternité. Je te fais confiance, afin que mon Église, en ces régions sauvages, soit par toi grandement fortifiée.

Et Hubert de répondre, avec force et enthousiasme :

— Merci, ô Seigneur. Vous avez ma promesse. Je ferai pénitence, puisque vous le voulez. Je saurai en toutes choses me montrer digne de vous!

S'ensuivit la conversion d'Hubert qui marcha à grands pas sur les voies de la sainteté, donnant l'occasion aux chasseurs de le choisir comme patron." (d'après Castel)

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Cet épisode du cerf crucifère, forme du Christ,  est apparu au XVe siècle seulement, dans la quatrième Vie de saint Hubert, tandis qu'on la trouve depuis le  VIIe siècle dans la Vie de saint Eustache, dont elle est un avatar. L'iconographie médiévale de cette légende est à rechercher exclusivement dans les Vies de saint Eustache  (cf. liens supra pour les vitraux et les enluminures)

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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ICONOGRAPHIE.

Les exemples retrouvés, que j'ai classé par ordre chronologique, permettent  de remarquer un regroupement autour de la fin du XVe et du début du XVIe siècle, ainsi qu'un lien avec Bruges (Arsenal Ms 639) ou/puis (via le bibliophile Louis de Gruuthuse, 1422-1492) avec l'entourage d'Anne de Bretagne et de sa fille Claude en Touraine.

Le thème de la chasse miraculeuse, suivie du pèlerinage, et du sacre à Rome est développé dans un des vitraux (1510) de l’église bourguignonne de Saint-Bris-le-Vineux (Yonne). Voir  aussi sur le site ndoduc les vitraux de la Baie 8 de la cathédrale de Paris, et de  la baie 20 de l'église Saint-Pierre de Monfort-Lamaury, 

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 Légende de saint Hubert par Hubert Le Prouvost, XVe siècle, manuscrit de Louis de Bruges (de Gruuthuse). BnF français 424 f.9, enluminure par le Maître de Marguerite d'York, Bruges vers 1470-1480

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"La Vie de saint Hubert est un texte compilé par Hubert le Prévost, originaire de Lille. Le prologue précise qu’il a, par dévotion pour son saint patron, collecté en 1459 des documents relatifs à la vie du saint en divers endroits : Saint-Hubert en Ardenne, Tirlemont, Bruxelles et Bruges (f. 2). Le prologue signale aussi qu’il fit traduire la légende du latin en français.
Parmi les quatre manuscrits dont l’existence est attestée, deux sont aujourd’hui perdus : l’exemplaire de l’auteur et un autre, richement illustré, qu’il donna à l’abbaye de Saint-Hubert et qui seul mentionnait Colard Mansion comme traducteur. Les deux exemplaires illustrés qui subsistent ont appartenu aux deux plus grands bibliophiles de l’ère bourguignonne. L’un fut commandité en 1463 par Philippe le Bon à David Aubert et illustré par Loyset Liédet de treize miniatures (La Haye, KB, ms. 76 F 10). L’autre fut réalisé quelques années plus tard pour Louis de Gruuthuse qui confia l’illustration au Maître de Marguerite d’York, l’un des principaux artistes ayant travaillé pour le seigneur brugeois. Ce volume, présenté ici, s’ouvre par une exceptionnelle scène de présentation où Louis de Bruges, portant le collier de la Toison d’or, est accompagné de sa femme Marguerite de Borselen et de leurs enfants (f. 1). L’auteur lui offre son ouvrage dont le contenu est explicitement évoqué dans une saynète peinte à l’arrière-plan montrant saint Hubert en prière devant la vision du cerf.
Cette scène de conversion est l’image la plus répandue de la légende du saint. Elle est amplement mise en valeur dans la miniature suivante (f. 9). Descendu de sa monture, le jeune seigneur, agenouillé au centre de l’image, est en adoration devant le cerf de couleur blanche qu’il poursuivait un instant auparavant. Une croix portant le Crucifié, dressée entre les bois de l’animal, envoie un faisceau de rayons dorés vers Hubert, converti par cette vision miraculeuse et déjà auréolé. Le cheval et les chiens restent indifférents à la scène.
Le cycle des miniatures relate d’autres épisodes de la Vita : l’apparition de l’ange au pape Serge pour lui remettre le bâton pastoral de saint Lambert auquel succédera Hubert (f. 14), l’ange apportant l’étole pour la consécration (f. 16 vo), le miracle de la guérison de possédés (f. 26), la mort de saint Hubert (f. 43), l’exhumation de son corps en présence de Charlemagne (f. 49), la translation de la châsse (f. 55 vo), l’adoration des reliques et la guérison des malades à l’aide d’une fibre de l’étole posée sur leur front (f. 60). Le choix des scènes reflète parfaitement le culte et la dévotion envers l’un des principaux évêques de Liège. Les hauts lieux de son culte (l’abbaye de Saint-Hubert, Liège ou Tervuren) conservent des témoignages d’une large et intense vénération du saint, devenu le patron populaire des chasseurs et qui prémunit de la rage.
Les armoiries du commanditaire étaient peintes dans l’initiale de la page frontispice (f. 1). Elles ont été grattées et remplacées au moment de l’arrivée de la collection brugeoise dans celle du roi de France, Louis XII. Seules quelques traces du collier de la Toison d’or subsistent." (BnF)

 

Ce manuscrit passa comme beaucoup de ceux de la bibliothèque de Louis de Gruuthuse, aux mains de Louis XII, époux d'Anne de Bretagne.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b105389110/f26.item.zoom

 

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Conversion de saint Hubert, in Hubert Le Prouvost, Vie de saint Hubert, copyright Gallica BnF fr.424 f.9v.

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Retable de l'abbaye bénédictine de Werden près de Cologne, atelier du Maître de la Vie de la Vierge, 1485-1490 :

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National Gallery.

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Dans les monuments :

Le linteau de la chapelle royale Saint-Hubert du chateau d'Amboise (1493).

Voir mon article 

Ce linteau est placé sous les statues de Charles VIII et d'Anne de Bretagne en donateurs. 

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Chasse de saint Hubert, Portail de la Chapelle Royale, château d'Amboise, photo lavieb-aile.

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Dans les Livres d'Heures :

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a) Livre d'Heures de la Bibliothèque d'Amiens Ms 0200 folio 159v  au début du suffrage de saint Hubert (vers 1460) :

 

 

 

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b) Bibliothèque d'Amiens Ms 206 Livre d’Heures selon l’usage de Sainte-Waudru de Mons entre 1474 et 1501.

 

c) Livre d'Heures du Maître-aux-fleurs Arsenal ms 638-639,  par un artiste flamand sans-doute pour un commanditaire breton ( le calendrier contient 14 saints bretons) : L'illustrateur est actif à Bruges à la fin du XVe siècle. Dans le ms 639 on trouve, après les oraisons aux deux saints Jean et à Pierre et Paul, les suffrages  à neuf saints et saintes dont l'intercession est jugée particulièrement précieuse : ce sont saint Christophe folio 103v / saint Antoine folio 105r  / Saint Hubert folio 106r, saint Georges, saint Fiacre, sainte Catherine, sainte Barbe, sainte Madeleine et sainte Marguerite, sur laquelle s'achève le volume. .

Le jeune seigneur Hubert porte un chaperon, une tunique au col et aux manches fourrées, il tient dans ses deux mains l'étole  mauve, et l'ange est absent.

 

 

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b55008564m/f215.image

http://blog.pecia.fr/post/2011/03/10/Les-Heures-du-%22Ma%C3%AEtre-des-Fleurs%22-%3A-un-commenditaire-breton

 

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Conversion de saint Hubert, Livre d'heures dit du Maître aux fleurs, Bibliothèque de l'Arsenal. Ms-639 réserve f.106r

 

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d) Livre d'heures de Louis de Roncherolles, en latin et en français, 1495-1500. Bibliothèque de l'Arsenal. Ms-1191 réserve, enluminé par le Maître du Terrier de Marcoussis. Folio 103r.

Ce document a un intérêt majeur pour plusieurs raisons. D'une part, Louis de Roncherolles a fondé en 1507 une chapelle de Saint-Hubert en son manoir de Grand-Roncherolles dans l'Eure. D'autre part, il est le commanditaire (cf. infra) en 1522 d'un vitrail de la cathédrale de Beauvais où figure la Conversion de Saint-Hubert. Ensuite, les armoiries qui figurent au folio 103r ci-dessous  sont celles de Louis d'Halewyn et de Jeanne de Ghistelles, parents de son épouse Françoise d'Halluin. Or, Louis d'Halewyn est apparenté à Louis de Gruuthuse (supra). Enfin, Louis de Roncherolles est le père de deux jumeaux né le 17 décembre 1510 et prénommés Françoys et Hubert. 

  Au total, on peut suggérer que Louis de Roncherolles (1472-1538) a été initié au culte de saint Hubert par son épouse Françoise d'Halluin et surtout par son beau-père Louis d'Halluin ou de Hallewyn, seigneur de Piennes, (v.1450-1519), lui-même apparenté par son père à la famille de Bruges-La-Gruthuse, et donc à Louis de La Gruuthuse (c.1422-1492), commanditaire du manuscrit de la Légende de saint Hubert.

 

 

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Conversion de saint Hubert, Livre d'heures de Louis de Roncherolles, 1495-1500. Bibliothèque de l'Arsenal. Ms-1191 réserve Folio 103r

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— e) Les Grandes Heures d'Anne de Bretagne (1503-1508), folio 191v. Ce  livre d'heures, commandé par la reine Anne de Bretagne à l'enlumineur Jean Bourdichon, dans les premières années du XVIe siècle   est conservé au département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France à la cote Ms lat. 9474.  

 

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52500984v/f391.item.zoom#

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f) L'enluminure de la Vision de saint Hubert est aussi présente dans un autre manuscrit enluminé d'Anne de Bretagne , le Livre de prière d'Anne de Bretagne, Pierpont Morgan Library, New-York, Ms M.50 folio 29, enluminure de Jean Proyer, actif à Tours. L'intérêt de ce manuscrit est que sa datation (1492-1495) précède celle du Groupe de Cast et témoigne que la dévotion à saint Hubert était déjà présente dans l'entourage religieux de la reine. Ce livre de prières a été commandé par Anne de Bretagne, pour l'éducation chrétienne de son fils, le dauphin Charles-Orland (1492-1495) en guise de catéchisme. La Vision de saint Hubert est l'une des dernières enluminures, et la dernière des invocations des saints et saintes, ce qui lui donne une place singulière. La prière est la même que celle du Grand Livre d'Heures, et son texte confirme que le saint est invoqué spécifiquement contre la rage : pestifera rabie.

O quam magnificandus et domine  deus omnium creator fortis et iustus et misericors qui solus rex bonus sanctificasti confessorem tuum electum hubertum custodi populum tuum a pestifera rabie ut sciant gentes quia tu es deus noster.

(Dans le Grand Livre d'Heures : -- qui magnificandus et : domine deus omnium creator : fortis iustus et misericors. qui sanctificatsti confessorem tuum hubertum custodi populum tuum a pestifera rabie : ut sciant gentes quia tu es deus noster.)

L'étole rose a coiffé la tête du saint et enveloppé sa gorge.

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http://www.themorgan.org/collection/prayer-book-of-anne-de-bretagne/25

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Conversion de saint Hubert,  Livre de prière d'Anne de Bretagne, Pierpont Morgan Library, New-York, Ms M.50 folio 29

 

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g) Le Livre d'Heures de Claude de France. Morgan MS M 1166 folio 41r daté de  1517, par le Maître de Claude de France à Tours.

On y retrouve la cordelière d'Anne de Bretagne et de son père, déjà présente, avec ses nœuds de capucin, dans l'ouvrage précédent. 

https://www.themorgan.org/collection/Prayer-Book-of-Claude-de-France/41

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Conversion de saint Hubert, Le Livre d'Heures de Claude de France. Morgan MS M 1166 folio 41r .

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La baie 25 de la cathédrale de Beauvais, commandée par Louis de Roncherolles en 1522 à Engrand Leprince : la Conversion de saint Hubert.

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Conversion de saint Hubert. 1522, par Engrand Leprince. Vitrail dit "de Roncherolles" Baie 25 de la cathédrale de Beauvais : v

 

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Saint Hubert agenouillé.


"Le genou en terre, il a les mains jointes dans l'attitude de la prière. Il a déposé devant lui son bonnet de chasseur au bord retroussé garni de cabochons. Encadré d'une chevelure gracieusement bouclée dans un visage aux traits fins, le regard extatique d'Hubert se lève vers le ciel." Castel

Hubert a été saisi de stupeur  en pleine poursuite de chasse. Frappé par l'apparition de la croix entre les bois du cerf, il est tombé de son cheval, a déposé son bonnet devant lui et a posé un genou à terre (l'attitude "du chevalier servant". Il joint les mains dans l'attitude de la prière, et, comme pétrifié,  fixe du regard le crucifix  .

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Pour Le Seac'h, "il est richement vêtu de chausses bouffantes à découpes et d'une chamarre, sorte de veste longues avec des galons cousus sur les coutures (Camille Enlart, Manuel  d'archéologie). Les chausses et les manches à crevés forment des ballons. L'épée à la poignée torsadée pend à son coté, retenue par un baudrier, ainsi que son cor. Ses bottes sont munies d'éperon. Ses cheveux mi-longs coiffés au carré  cachent ses oreilles. Un casque à pompons  sur la cime est posé à ses pieds. Le rebord à crevés est décoré de formes géométriques rondes et à losanges."

On voit que le travail descriptif a déjà été fait, et qu'il est difficile d'y ajouter quoique ce soit. Aucune enluminure ne montre ces crevés ou taillades François Ier, alors que pour les chaussures, les bout ronds remplacent les extrémités pointus dans les Grandes Heures d'Anne de Bretagne ou les Heures de Louis de Roncherolles.

Emmanuelle Le Seac'h s'appuie sur le tome III du Manuel de Camille Enlart (1902), page 114: c'est un ouvrage qui mérite d'être consulté:

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10532597d/f70.item.zoom

 

"Sous François Ier, l'habillement masculin comprend bas de chausses de drap de diverses couleurs et quelquefois différents entre eux ; chemise à encolure très dégagée et froncée; haut de chausses, appelé désormais chausses, soit bouffant et assez court, soit collant et descendant jusqu'au-dessus du genou ; braguette proéminente en forme de coquille, attachée par deux boucles ou agrafes ; pourpoint décolleté comme le corsage des femmes, et, sur le pourpoint, un vêtement de dessus, appelé la casaque, le saie, la chamarre.

Le saie, depuis Charles VIII, s'était porté au-dessus de l'armure. C'était originairement un paletot court et sans manches ; le saie du costume civil s'ouvrit par devant et s'augmenta de manches très larges.

La chamarre était une veste ample et longue, composée de bandes d'étoffes variées avec des galons appliqués sur les coutures. Ce vêtement pouvait être serré par une ceinture. La casaque, qui apparut vers 1530, se distinguait de la chamarre par ses manches ouvertes et boutonnées, qui pouvaient se porter fermées ou pendantes. La casaque à manche unique fut de mode quelque temps. Une autre particularité de ce vêtement consistait à être fait d'une seule étoffe.

Le détail le plus typique du costume de cette époque est la mode des crevés: on appelle ainsi de petites fentes formant des ouvertures en forme d'ellipses aiguës, par lesquelles bouffe une étoffe de doublure, qui, par le tissu et la couleur, diffère de l'étoffe tailladée. Le pourpoint et ses manches, le haut de chausses et les souliers sont les parties du vêtement qui se tailladent de crevés, généralement disposés en lignes régulières, séparés par des galons. Les bandes dans lesquelles ils sont pratiqués sont verticales ou biaisées dans le corps du pourpoint; verticales, horizontales ou biaisées dans les manches et dans le haut de chausses. Les manches du pourpoint, les jambes du haut de chausses et les souliers pouvaient, comme les bas, être de deux dessins différents

Une grande quantité de galons, soutaches et cannetilles ornaient les entre-deux et les ourlets des crevés.

Comme manteaux, on porta soit le petit mantelet, soit la robe sans ceinture et se confondant avec le saie, longue pour les clercs, demi-longue, jusqu'au genou pour les autres . Ces divers vêtements de dessus pouvaient avoir un collet à angles droits, détaché des revers par deux échancrures suivant la coupe qui est restée en usage jusqu'à nos jours.

A la ceinture se portaient un poignard et une épée."  https://archive.org/details/manueldarcholo03enlauoft/page/120/mode/2up/search/crev%C3%A9s

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BnF fr 864 folio 32v. Ovide, Héroïdes , traduction d'Octavien de Saint-Gelais XVIe siècle (vers 1505-1510) Paris. Enluminé par Jean Pichore. Folio 32v

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BnF fr 864 folio 32v. Ovide, Héroïdes , traduction d'Octavien de Saint-Gelais XVIe siècle (vers 1505-1510) Paris. Enluminé par Jean Pichore. Folio 82v

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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"Les visages sont délicats, le contour des yeux est creusé en amande, la lèvre inférieure de la bouche plus charnue que l'autre. Les mains sont grandes avec des doigts effilés, alors que la majorité des sculpteurs bas-bretons peinent sur ce détail anatomique." (Le Seac'h)

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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On remarquera que le cornet (huchet, grêlier, trompe de chasse) est porté à gauche avec l'épée, alors qu'il est porté à droite sur les enluminures.

 L'épée est fine et son fourreau garni de bagues à perlés. 

Le cor, d’abord corne creuse d’un animal domestique a ensuite été façonné en bois, en métal, en ivoire. Il était utilisé à la chasse pour appeler ses compagnons.

Durant tout le moyen âge, on trouve ces instruments sous diverses appellations: corne, cor, huchet, graile, araine, trompe… Mais quels qu’ils aient été, ils ne pouvaient produire qu’un ou deux sons. Pour différencier les signaux, on faisait des suites de notes brèves ou longues.

Le cor métallique utilisé sous François Ier permettait d’obtenir deux notes : le grêle et le gros ton. Le huchet était un petit cor utilisé pour la chasse au lièvre . Aujourd’hui, le maître d'équipage ou le piqueur qui dirige la meute sont les seuls à porter un cor (ou trompe) de chasse, pour communiquer avec les chiens et les valets.

Le "cor de chasse" en mi bémol renvoie le son vers l'avant et est utilisé en musique militaire, tandis que la trompe de chasse, en ré, est recourbée vers l'arrière et fait un tour et demi (1680), puis deux et trois tours et demi (1814). Sous François Ier, il n'existe ni l'un ni l'autre.

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Le "casque" est plutôt un bonnet, retroussé à l'arrière, orné d'une attache antérieure et largement orné de pierreries, et de crevés en partie haute.

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Les chaussures à bout ronds et la fixation de l'éperon.

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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L'écuyer.

On le voit aussi sur l'enluminure des Grandes Heures d'Anne de Bretagne. Debout, "il pose la main sur la selle du cheval et de l'autre il saisit le troussequin. Il porte un pourpoint à la collerette à coques et un chapeau cloche à double cordon sur le bord plat."  (Le Seac'h).

Il est plus avantageusement sculpté encore que son maître, et on y verrait volontiers un portrait du commanditaire.

Il tient contre son épaule gauche un épieu ferré. Le rabat de ses bottes s'orne d'un lacet à gland à franges.

 

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Le cheval.

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"L’écuyer s'occupe du cheval dont les nécessités techniques ont contraint le ou les artiste(s) à réduire les proportions de celui-ci par rapport à celles des hommes et des chiens, ainsi qu'à orner les pattes postérieures d'un motif végétal.  Dans un franc réalisme, il le montre hennissant, et exécute le harnachement avec précision " (Castel)

"Le cheval mâche tranquillement son mors. Comme ses propositions ont été réduites, il apparaît petit et trapu. La bride est maintenue d'une manière assez courte sur son coup et tout son harnachement est représenté." (Le Seac'h)

La crinière est peignée. La sous-croupière est présente. Les étriers sont brisés ainsi qu'une partie distale des étrivières.  Je retrouve ici le mors à filets aux branches en S (brisée à gauche) si fréquemment présent sur les montures des deux cavaliers des calvaires du sculpteur Prigent entre 1527 et 1577 du Finistère (Pencran, Lopérec, Sainte-Marie du Ménez-Hom, Saint-Sébastien en Saint-Ségal). Donc  quelques années après ce groupe.

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Les chiens.

"Entre Saint-Hubert et le cerf se situent deux chiens au large collier fixant le cervidé. Le basset à l'arrêt a le museau levé tandis que la chienne est accroupie la queue en spirale." (Castel).

"Menant la troupe, deux chiens de petite taille font face à ce dernier. Il s'agit d'animaux dressés pour la chasse car ils sont mi=unis de colliers. Assis sur son train-arrière, le premier, un basset aux oreilles tombantes, fixe le cerf. Un second, un lévrier, le museau effilé et le corps allongé, est à l'arrêt attendant un ordre de son aître. Ses oreilles sont creusées, sa queue est en tire-bouchon." (Le Seac'h)

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Les colliers sont noués par une faveur aux extrémités en papillote.

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Le cerf.

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"Le cerf, solennel et fièrement dressé, domine la scène. Dans la ramure bien droite, les bois écornés montrent que la bête est inoffensive. Un crucifix y est suspendu. Il plaît à remarquer que dans la culture celte, le cerf symbolise la médiation entre la terre, le ciel et la vie éternelle." (Castel)

"Des arbres miniaturisés sont placés en bouquet contre le cerf. Entre les bois du cerf, le Crucifié repose sur le front de l'animal. La vélocité du cerf avec ses jambes légères et musclées, la finesse de son museau sont bien rendues par le sculpteur." (Le Seac'h)

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Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

Conversion de saint Hubert (kersanton, 1525-1530, Maître de Cast), enclos de l'église de Cast. Photo lavieb-aile 2020.

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Le commanditaire.

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Nous disposons de deux avis :

Les commanditaires de ce groupe sculpté attachant et peu s'en faut magistral, ne sont pas connus avec précision. Suggérons simplement que parmi les seigneurs de Cast, les Tréouret devaient être des passionnés de cynégétique. Ils blasonnaient en effet "d'argent au sanglier de sable en furie..." comme on le voit sur une croix dressé, justement à Tréouret, un des lieux-dits de la commune. Férus de chasse, ils ont pu commander cette chasse pour la placer dans la chapelle de leur manoir. Les visages de notre St Hubert et de son valet pourraient être dans ce cas des portraits de famille." (Castel)

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"L'on s'accorde à dire que le commanditaire du beau monument en kersanton du xvie siècle dédié à saint Hubert et situé près de l'église fut messire Jehan le Gentil, grand-bailli de Cornouaille en 1524. Il est représenté debout, en tenue de grand-bailli, tenant le cheval de saint-Hubert en prières. Jehan le Gentil, seigneur de Barvédel et de Pontlez, appartenait à une famille d'ancienne extraction d'ascendance chevaleresque de Cornouaille. Il était le fils de Yves et de Louise de Tréanna et détenait les manoirs nobles de Boulvern et de Quillavon, en Cast. Son frère Geoffroy, chanoine de saint Corentin, était recteur de Cast en 1517 et leur sœur Louise était dame d'honneur de la duchesse Anne de Bretagne, reine de France. Jehan le Gentil signa la tutelle des enfants mineurs de messire Jehan de Rosmadec et de Jehanne de La Chapelle. Il épousa Louise de Tyvarlen et présida la Montre de la noblesse tenue à Quimper en 1536. La famille le Gentil appartenait à la noblesse de Cornouaille et était fortement établie dans le Porzay." (Wikipédia, article Cast)

Le contributeur anonyme mais qualifié de l'article Wikipédia n'indique pas ses sources, et je serai curieux de savoir qui sont ceux qui "s'accordent à" attribuer la commande de cette œuvre à Jehan le Gentil, ... car j'arrive aux mêmes conclusions. Son argumentation est remarquable ...puisque ce sont ces données qui m'avaient convaincu.

a) L'un des arguments le plus percutant est que Geoffroy Le Gentil (*) était/aurait été recteur de Cast en 1517 (ou plutôt en 1512, pour Abgrall). Mais en 1532-1538, notons que le recteur était Nicolas de Tyvarlen (*) [nommé Jean de Tyvarlen dans la généalogie boisgarin]. Ce Jean de Tyvarlen, dont l'existence est mieux renseignée, était le frère de Louise, épouse de Jehan III le Gentil. Il était recteur de Cast et de Plogonnec, chanoine à la cathédrale de Quimper, vicaire général de l'évêché de Cornouaille en 1552, et, en 1544, il était le garde des trois enfants juveigneurs de Jehan Le Gentil (décédé en 1543) et de Louise (décédé en 1544). ["sûrement le maistre Ian du Tivoarlen, garde de trois enffents juveigneurs de Jean Le Gentil et de Louis de Tivoarlen le 02/10/1544" B.Yeurc'h (arrêt Le Gentil 30/08/1669) ] Le recteur Jehan de Tyvarlen est un autre commanditaire possible de la Chasse.

(*) n.b source des info  : Abgrall 1905.

b) l'autre argument est que  Louise Le Gentil était dame d'honneur de la duchesse Anne de Bretagne. Cette information se vérifie indirectement puisque Louise, fille d'Yves le Gentil et de Louise de Tréanna, épousa en 1507 à Blois Charles d'O. de Mailleboys, leur contrat de mariage étant fait en présence de la reine Anne. Cette appartenance à la cour royale d'Anne de Bretagne. Source : Tudchentil et Généalogie Guillaume de Wailly

Elle se vérifie aussi sur la liste des dames et demoiselles d'honneur d'Anne de Bretagne publiée par Infobretagne : Louise Le Gentil avait ce titre en 1508.

Cet argument nous procure le lien avec les modèles évidents de cette Chasse de Cast, modèles fortement liés à Anne de Bretagne ; et, en premier lieu, le linteau de la chapelle Saint-Hubert du château d'Amboise, lieu de résidence d'Anne de Bretagne avec Blois et Tours. En effet, ce linteau est, plus que les enluminures, un modèle privilégié par ce que c'est une sculpture (la seule de mon corpus iconographique. De plus, la composition est la même, la posture du chasseur, celle de ses chiens, la position du chapeau, et même les bosquets miniaturisés.
c) un autre argument est qu'il possédait bien des manoirs à Cast , puisque l'auteur signale que Jehan le Gentil détenait les manoirs nobles de Boulvern et de Quillavon, en Cast. ( C'est aujourd'hui, à Quillavon, le manoir de Tréouret.). Je n'ai pu vérifier cela, mais il est au moins aussi important de signaler que Jehan le Gentil est seigneur de Barvedel et de Pontlez.

À ce titre, ses armoiries apparaissent  sur le calvaire de la chapelle Sainte-Barbe en Ploéven et sur les murs de l'église de Ploéven, (paroisse voisine de Cast) tandis que ses armoiries écartelées se trouvent sur la maîtresse-vitre de Notre-Dame de Quillidoaré en Cast . 

La famille Le Gentil jouit donc de prééminences notables dans un court rayon autour de l'église de Cast.

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Il est temps de présenter Jehan III  le Gentil, Jean III le Gentil, grand Bailli de Cornouaille (1524-1537), seigneur de Bardevel en Ploéven, sieur de Pontlez en Quéménéven, , né vers 1480 décédé en 1537, à l'âge d'environ 57 ans. Fils d'Yves le Gentil et de Louise de Tréanna, il épousa Louise de Tyvarlen dont il eut 4 enfants. Il présida la Montre de la noblesse de Cornouaille tenue à Quimper en 1536 en qualité de grand bailli. 

 

Généalogie Marie-José COAT 

https://gw.geneanet.org/mjcoat?lang=fr&pz=olivier&nz=coat&p=jean+iii&n=gentil+le

Généalogie boisgarin

https://gw.geneanet.org/boisgarin?lang=en&n=de+tyvarlen&oc=1&p=alain

 

CONCLUSION.

 


Un faisceau d'arguments converge pour désigner la famille Le Gentil comme commanditaire, et la famille de Tyvarlen qui lui est liée, peut-être pour une chapelle privative sur le modèle d'Amboise, certainement sous l'influence des modèles de la vallée de la Loire à la cour d'Anne de Bretagne puis de Claude de France, et on ne peut privilégier un membre plutôt qu'un autre puisque tant le recteur de Cast Jean de Tyvarlen, par ses fonctions, que Louise de Tyvarlen par sa proximité d'Anne de Bretagne, ou que Jehan III le Gentil, par l'importance de son poste de grand bailli,  sont de bons candidats à ce rôle.  

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SOURCES ET LIENS.

ABGRALL (Jean-Marie), 1905, Notice sur Cast, Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie du diocèse de Quimper.

https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/5ae9108578870bb6ca4958aedb0d9a8d.pdf

"-Sur le mur du presbytère, la représentation très belle et très artistique de l'épisode miraculeux de saint Hubert, patron des chasseurs. Devant un cerf ayant sur sa tête, entre ses deux cornes, l'image du crucifix, saint Hubert, descendu de cheval, est agenouillé, les mains jointes et la tète découverte. Sa chevelure est gracieusement bouclée, son costume très riche et très souple semble être de l'époque d'Henri II : bas et hauts-de-chausses à deux rangs de bouffantes et de crevés, manches de dessous avec bouffantes et crevés; manches plus amples du pourpoint, également tailladées à deux rangs, et descendant en pagode de la hauteur du coude; surcot largement échancré pour laisser passer les bras; épée et cor d'ivoire suspendus au côté. Devant lui, sont ses deux chiens, un lévrier et un basset, en arrêt et en contemplation devant le cerf. Derrière est son cheval, richement harnaché, tenu par son écuyer au visage et au costume gracieux. Tout ce groupe forme un ensemble admirable comme art et comme correction."

— CASTEL (Yves-Pascal), 1997, Saint Hubert à l'honneur, in Chasseur en Bretagne hiver 1997 pages 38-39.

http://bibliotheque.idbe-bzh.org/data/cle_132/Chasser_en_Bretagne_1997_nA_5_.pdf

"Le monument appelé la Chasse de saint Hubert à Cast représente l'épisode célèbre connu sous le nom de Vision du cerf miraculeux », ou de « Conversion de saint Hubert. »

Saint Hubert, né en 665, succéda vers 705 à saint Lambert sur le siège épiscopal de Tongres et de Maastricht d'où il transféra sa résidence à Liège dont il fut le premier évêque en 722. Il évangélisa les Ardennes et mourut en 727 d'un accident de pêche qui lui fit une blessure au doigt. C'est tout ce que nous en dit l'histoire à proprement parler.

Quant à la légende du chasseur converti, qui n'est que fort tardivement apparue, elle fut calquée au XVe siècle sur celle de saint Eustache. Puis, ayant pratiquement détrôné cette dernière la légende de saint Hubert devint populaire partout en Europe suite aux représentations que firent les artistes pour illustrer la légende qu'il faut brièvement rappeler.

Grand veneur de Pépin d'Héristal, le seigneur Hubert chassait un Vendredi Saint. Ses chiens ayant lancé un cerf dix cors, la poursuite s'acheva à la nuit tombante par un face à face étonnant entre la bête dont les cornes encadraient un crucifix et l'homme qui tomba à genoux, ému par une voix venu d'en haut qui l'appelait : Hubert, Hubert, pourquoi me poursuis-tu, oublieux de ton salut ? Va à Maastricht chez mon serviteur Lambert il te dira ce que tu dois faire. » S'ensuivit la conversation d'Hubert qui marcha à grands pas vers la sainteté, donnant l'occasion aux chasseurs de le choisir comme patron.

La chasse de Saint-Hubert de Cast, après avoir été longtemps sur le mur du presbytère, a été transportée vers les années 50 dans l'angle sud-ouest de l'enclos paroissial. Pour la recevoir, on construisit un soubassement rectangulaire de 3 m. de longueur sur 1,80 m. de profondeur et 1,30m de hauteur. Deux bandeaux de schiste soulignent les faces du massif entièrement en granite y compris la large doucine droite qui le couronne de deux douzaines de tétons en matière plastique. Au centre de la face antérieure un cartouche à la bande contournée porte un écu muet. Sur la table reposent, indépendantes l'une de l'autre, six sculptures en pierre de kersanton. Leur socle pour saint Hubert, le cerf, et les deux chiens sont rectangulaires tandis que la base du groupe valet-cheval, grand bloc de pierre sectionné par le travers, n'est que grossièrement équarri. Le feutre du chasseur repose à même le sol.

Dans l'esprit des commanditaires, l'ensemble était destiné à être placé contre un mur, vraisemblablement dans le renfoncement d'une niche. Dans une telle présentation, le sculpteur n'avait pas à se préoccuper d'affiner les revers. Ainsi, exception faite du chapeau et des deux chiens, placés au milieu de la scène, ceux des grandes sculptures sont labourés d'éclats fort irréguliers. De n'avoir pas tenu compte de cela, donne à la présentation actuelle un aspect aussi peu convenable que celle du temps où la chasse trônait sur le mur du presbytère. Pour ce qui est de l'inachèvement des pièces, quelques volumes qui tout en étant moins frustes que les revers précités sont laissés sous le coup de l'outil qui ayant dégagé la masse correctement, n'a pas été poussé plus loin dans la vue d'une parfaite finition. Ainsi au coté gauche de la tête du cerf, l'œil,alors que l'autre a été tracée en amande, n'est guère creusé, et l'oreille gauche n'est elle-même qu'ébauchée. On observera en d'autres endroits ce procédé de non affinement qui faisait partie des manières en usage dans les ateliers de kersanton. Mais ceci n'a que peu à voir avec le dégrossissage brutal des revers signalés plus haut. Pour l'apprécier, il faut donc regarder la Chasse de face, et s'abstenir de tourner autour du monument. Il faut, de plus, faire abstraction des lichens gris et or envahissants qui empêchent une parfaite visibilité d'une œuvre dont la qualité est exceptionnelle.

Saint Hubert, le genou à terre, les mains jointes dans l'attitude de la prière, a déposé devant lui son bonnet de chasseur au bord retroussé garni de cabochons." etc...

COUFFON (René), LE BARS (Alfred), 1988, Cast, Notices.

http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/CAST.pdf

 

DILASSER ( Maurice), 1979, Un pays de Cornouaille: Locronan et sa région .

 

"Son auteur était un excellent animalier, le cerf, pattes fines, museau pointu, haute ramure encadrant harmonieusement la croix, contraste avec les formes lourdes du cheval, qui rappelle ce qu'étaient les célèbres étalons qu'o élevait tout près de Cast sur le territoire de Briec. 

Le costume des chasseurs, avec leurs tuniques à découpes et leur chapeau cloche, non moins travaillés, et le harnachement sont rendus avec habileté, mais tout ce soin pour l'accessoire ne fait pas oublier le grand accent religieux de la scène : le cerf porte-christ semble esquisser une génuflexion, comme s'il voyait la croix qui est planté sur son front. Si l'écuyer reste interdit devant le spectacle surnaturel qui le fige dans la stupeur, saint Hubert a déjà mis un genou en terre pour adorer à mains jointes la croix, toute semblable à celle des carrefours champêtres, qui lui barre miraculeusement la voix. Son regard levé se fige, comme en extase, sur l'apparition et une levrette accroupie, un petit roquet assis sur son derrière font de même : il y a là une sorte d'humour qui ne nuit pas à la dévotion. Cette chasse de Cast mérite d'être admirée à l'égal des scènes christologiques des plus célèbres calvaires. Si elle est sans analogue par son sujet, elle en est sœur par l'inspiration et le talent. "Victor-Henri Debidour in Dilasser 1979.

— DUCOURET (Jean-Claude), 1992, notice pour l'Inventaire Général

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/IM29000997

— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne. Les ateliers du XVe au XVIe siècle. Presses Universitaires de Rennes.page 211 et 

http://www.pur-editions.fr/couvertures/1409573610_doc.pdf

MAIRIE DE CAST.

https://www.mairie-cast.com/le-patrimoine/la-chasse-de-st-hubert/

WIKIPEDIA

https://fr.qwe.wiki/wiki/Roland_Dor%C3%A9_(sculptor)

http://www.bretagneweb.com/photos-29/29-cast.htm

 

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  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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