Estrange estran II : la belle Gibbule mage Gibbula magus (Linnaeus, 1758).
PRÉSENTATION
.
La Gibbule mage est la reine, coiffée d'un turban blanc rayé de flammules violettes, des gibbules de nos côtes : c'est, avec ses 35 mm de large, la plus grande, et ses 7 à 8 spires sont nettement séparées par une suture avec un profil "en escalier".
Une consultation trop rapide du site DORIS m'avait d'abord incité à y voir la Gibbule ombiliquée Steromphala umbilicalis, plus commune, et en grand nombre, dans les mares de l'estran rocheux, mais celle-ci, qui est plus ronde, mesure tout au plus 20 mm de large, bien moins que les spécimens que j'avais découvert, un jour de grande marée, en dessous de la Pointe du Guern de la presqu'île de Crozon.
C'est Linnée qui l'a baptisée dans son Systema naturae de 1758, parmi ses Vermes testacea, dans le genre Conus : son Conus magus, page 716, et qui a décrit sa coquille subcylindrique aux bandes longitudinales à petits points blancs, qui l'a incité à la comparer à la tête d'un mage oriental. Plus vulgairement, toutes ces Troques ou faux bigorneaux, peuvent servir d'appâts de pêche.
En 1930 Coen la nomma Gibbula bellini (synonyme), j'ignore la raison de son choix, mais il fait peut-être référence au portrait du sultan Mehmed II par Gentile Bellini, avec sa belle coiffure :
.
.
https://doris.ffessm.fr/Especes/Gibbula-magus-Gibbule-mage-1606
https://doris.ffessm.fr/Especes/Steromphala-umbilicalis-Gibbule-ombiliquee-1358
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gibbula_magus;
Elles ont attiré mon attention car elles n'étaient pas attachées aux rochers , comme les bigorneaux perceurs Nucella lapillus de mon article précédent, mais grimpaient parfois sur des galets, ou occupaient plus souvent des petites mares où certaines progressaient en agitant leurs deux tentacules, munies chacune d'un œil à leur base .
.
.
.
"L'ouverture est ronde, oblique, et nacrée, et est fermée hermétiquement par un opercule corné visible sur l'arrière du pied quand l'animal est en mouvement. La base est plate, l'ombilic, en forme d'entonnoir rond et profond, est généralement large." (DORIS)
.
.
"Gibbula magus est herbivore. Grâce à sa langue râpeuse (la radula) elle racle inlassablement la pellicule vivante microscopique qui se développe à la surface de la roche, de tous les fucus et des algues rouges.
Les gibbules peuvent proliférer en l'absence d'un couvert végétal abondant car leurs talents de brouteurs s'exercent aux dépends d'une flore très discrète composée de cyanophycées, de diatomées ou de bactéries." (DORIS)
.
Quand la sage "gibbule mage" nage et fait le ménage ...
.
.
.
Je ramassais plus tard, dans les galets du haut de plage, leurs coquilles vides, et certaines étaient si usées par le ressac que la pointe de leur turban révélait la nacre sous-jacente. Ma collecte me montrait la diversité des colorations, ... mais je sélectionnais les plus vivement striées de flammes rouges ou pourpres.
.
.
.
Lorsque vous les retournez, vous avez l'heureuse surprise de découvrir leur vestibule nacré, et la couronne finement striée de leur base.
.
.
.
J'eus l'idée d'en fabriquer des luminaires pour maison de poupée. Des suspensions, des lampions, des abats-jours, des plafonniers, des lustres ou des appliques... Et les poupées s'en déclarèrent ravies : elles les prirent pour des petits-fours, des réductions de saint-Honoré à la framboise et de religieuses à la fraise, dans le palais de Dame Tartine et de la crème chiboutz.
.
Tous nos modèles :
.
.
.
Nos ancêtres les mangeaient...modérément.
Gibbula magus figure sur les listes des coquillages retrouvés sur les sites littoraux du Méso et Néolithique, mais en faible nombre :
https://www.etudesheraultaises.fr/wp-content/uploads/ael-art-2004-26-02-coquillages-lattes.pdf
Les gibbules sont parfois percées, indice d'une utilisation comme parure, comme à Bardouville :
https://www.persee.fr/doc/galip_0016-4127_1969_num_12_2_1346
En Bretagne à Locquémeau :
https://hal-inrap.archives-ouvertes.fr/hal-02295660/document
Sur les amas coquilliers mésolithiques de Téviec et d'Hoedic (gibbula umbilicalis) et le dépôt coquillier néolithique d’Er Yoc’h :
http://cath.dupont.free.fr/CV/Articles/2007DupontMelvan
Au Mont Saint-Aubin figure 7 :
https://journals.openedition.org/galliap/3042?lang=es