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1 novembre 2016 2 01 /11 /novembre /2016 17:30

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Au Moyen Âge, et encore à la Renaissance, les paroissiens défunts cherchent à être inhumés au plus près du centre vital de leur église. Les nobles les plus puissants obtenaient d'être ensevelis dans le chœur, les seigneurs locaux dans l'enfeu de leur chapelle privative, et les autres étaient inhumés sous les dalles de la nef. Mais bientôt la place vient à manquer, et un cimetière fut créé, à l'extérieur de l'église, mais à l'intérieur d'une enceinte sacrée, l'enclos paroissial.

Les défunts avaient — enfin!— le privilège de pénétrer dans l'enclos par l'Arc Triomphal, la Porte des Morts, Porz ar maro : celle qu'on ne franchit que les pieds devant. 

Pour visiter cet ossuaire, je me suis adjoins l'aide du chanoine Jean-Marie Abgrall, qui a rendu compte de sa visite en 1910. Après l'avoir recopiée à la main, j'ai découpé sa description au gré de mes images. Voici ce qu'il dit du Credo apostolique de l'ossuaire de Sizun 

"Le second étage de cette façade est formé par une longue suite de douze niches, séparées par des pilastres, doriques cannelés, lesquelles enferment les statues de douze apôtres, tenant chacun une banderole avec un article du Credo. C'est ce qui fait la richesse de cet ossuaire, car aucun des autres monuments de ce genre ne possède ces statues, pas même celui de St-Thégonnec. "

 "Cet édifice forme une véritable chapelle comme à Lampaul, Landivisiau , Guililiau , Saint-Thégonnec et la plupart des paroisses de cette contrée. Il est situé dans la partie Ouest du cimetière, entre le clocher et la grande place du bourg", adossé à l'Arc de Triomphe.
 
Le voici, vu du placître :.

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Vue générale de l'arc de triomphe et de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Vue générale de l'arc de triomphe et de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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La façade ouverte vers l'est, et donnant sur le placître, est d'une ornementation très riche. Sur un soubassement décoré de cupules et habillement mouluré, se déploie une série de 7 baies à plein-cintre séparées par des pilastres à gaines, les uns cannelés, les autres taillés en cariatide. 

Elle est divisée en trois registres que viennent couper, entre les deux baies de gauche et les cinq baies de droite, la porte et son fronton triangulaire. C'est le troisième registre, sous la toiture, qui accueille les douze apôtres.

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L'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

L'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Le troisième registre : une photo pour lui tout seul :

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Le troisième registre de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Le troisième registre de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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"En tête de cette série d'apôtres, au contrefort sud-est, se trouve la state d'excellent style de saint Suliau, représenté en chasuble antique, tenant un livre de la main gauche et de la droite son faisceau de quatre verges ou houssines."

Le saint patron de l'église est fêté le 1er octobreSaint Suliac, appelé aussi saint Suliau ou Sulian ou Silio ou Sulien, est un moine gallois évangélisateur du pays de Galles et de l'Armorique au VI e siècle dont le culte est très localisé puisqu'on trouve, outre la paroisse de Sizun, une chapelle à Plomodiern ; une autre chapelle, à Pleyben, a disparu. Il est aussi le saint éponyme de Saint-Suliac. Voici comment le chanoine Abgrall décrit sa statue, et explique l'objet qu'il tient en main.

 

"Au fond du porche Midi de cette église nous trouvons sa statue en bois, drapée de la chasuble antique, aux plis souples et gracieux, ayant la figure jeune et imberbe, tenant un livre de la main gauche. La main droite a disparu ; si elle avait existé, nous y aurions constaté sans aucun doute le même emblème que l'on voit dans les trois autres statues du même saint. En effet, la statue en bois du chœur, celle en pierre qui se trouve au-dessus de la porte de l'ossuaire, et une autre plus petite, sur la face Sud de la sacristie, tiennent dans leur main droite quelque chose comme une petite botte d'asperges, quatre chevilles ou courtes brochettes. Pour en avoir le sens, il faut recourir à l'histoire du saint, qui nous en donne l'explication. Voici ce que nous lisons dans sa vie, par Albert Le Grand, édition de 1901, p. 434 :


« Ayant obtenu autant de terre qu'il luy en fallait pour bastir un Hermitage pour lui et pour ses confrères (au bord de la Rance, au lieu où l'on voit encore l'église de Saint-Suliac), il commença à travailler, et, en peu de jours édifia une petite Chapelle et quinze petites cellules pour se loger lui et ses religieux ; et ayant labouré de ses propres mains une pièce de terre qui luy restait dudit don, il y sema du bled, lequel crût fort beau ; mais le bétail qui d'ordinaire, paisait ès prochains marests, se jetta, une nuit, dans ce champ qui n'était pas fermé et en gâta une partie ; le matin on vint en avertir S. Suliau, lequel ne s'émût pas beaucoup ; seulement, il se mit en prière, et puis prit son bâton, dont il traça une ligne tout à l'entour du champ, et, aux quatres coins d'iceluy, planta quatre petites houssines pour toute haye et fossé ; priant Dieu de ne permettre que le bétail outre-passât ces bornes, pour endommager les semailles de ses serviteurs. Dieu exauça son Oraison, et, la nuit suivante, les mêmes animaux sortans des marêts et paturages, se voulurent jetter sur le dit champ ; mais (chose merveilleuse si-tost qu'ils touchèrent cette ligne que le Saint avait tracée tout à l'entour de son champ, ils devinrent tous immobiles, sans se mouvoir, n'y remuer, non plus que s'ils eussent été de marbre ou de bronze. Le matin, les païsans du voisiné, ne trouvans pas leur bestail dans les marêts, les trouvèrent en cette posture tout à l'entour du champ de S. Suliau ; et le bruit de cette merveille ayant couru par le pais circonvoisin, une grande multitude de peuple se rendit en l'hermitage pour voir une chose si étrange. Le S. Abbé, craignant que cette affluence de monde n'interrompit les exercices de ses Religieux, s'en allant devers le champ, donna sa bénédiction à ces animaux, et leur deffendit désormais de venir ravager son bled, ce qu'ils observèrent invariablement et se retirèrent dans les marêts ».

"Ce sont donc ces quatre houssines ou piquets plantés par saint Suliau au coin de son champ que les sculpteurs lui ont donnés comme caractéristique."

La statue montre aujourd'hui un saint vêtu d'une courte dalmatique aux clavi caractéristiques, à la chevelure frisée, tenant son livre de la main gauche ; mais ses "houssines" se comparent, non plus à des asperges comme en 1910, mais à deux petits pains ronds.

 

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Saint Suliau, ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Suliau, ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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LES APÔTRES.

Tous les apôtres ont les pieds nus comme il se doit, et sont tous barbus, sauf saint Jean comme il se doit également. Chacune des barbes est différente des autres, ce qui en fournit une jolie collection.  Ils portent tous un livre, fermé (sauf un). La plupart portent un habit à gros boutons,  parfois sous un manteau et nombreux sont dotés de ceintures, sangles ou baudriers. 

1. Saint Pierre.

Il tient la clef qui marque sa primauté, et un livre. Il est aussi identifiable au célèbre "toupet" qui fleurit sa calvitie frontale.

Pas de texte sur le phylactère. On devrait trouver Credo in Deum Patrem omnipotentem, creatorem coeli et terrae.

"Je crois en Dieu le Père tout-puissant créateur du ciel et de la terre".

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Saint Pierre ; Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Pierre ; Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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2.  Saint André.

Le livre et la croix ...de Saint-André. . 

[Et in ] JESVM CHRISTVM FILIVM EIVS VNICVM [Dominvm nostrvm]

"Et en Jésus Christ son fils unique notre Seigneur."

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Saint André. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint André. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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3. Saint Jacques le Majeur.

Livre ouvert. Pèlerine, chapeau, coquilles, bourdon, besace  .

QVI CONCEPVS EST DE SPIRITVO [sancto natus ex de Maria virgine].

"Qui a été conçu du Saint-esprit, est né de la Vierge Marie"

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Saint Jacques le Majeur. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Jacques le Majeur. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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4. Saint Jean.

Le calice et le livre. L'écritoire ?

Et passus SVB PONTIO PILATO CRVCIFIXVS Mortvvs .

"A souffert sous Ponce Pilate, a été crucifié, est mort"

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Sait Jean. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Sait Jean. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

 

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5. Saint Thomas.

La lance et le livre. Saint Thomas tient la lance dont il a été frappé dans le dos. C'est avec cet attribut qu'il est représenté dans le Compost et Calendriers des Bergers.

DESCENDIT AD INFEROS (tertia die resvrrexit a mortvis). 

" est descendu aux Enfers, le troisième jour est ressuscité des morts."

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Saint Thomas.  Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Thomas. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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6. Saint Jacques le Mineur.

Bâton (foulon), livre.

ASCENDIT AD COELOS SEDET AD [dexteram Dei patris omnipotentem]  

"est monté au ciel, est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant"

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Saint Jacques le Mineur. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Jacques le Mineur. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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7. Saint Philippe.

La croix à longue hampe. Le livre.

VNDE VENTVRVS EST IVDICARE  [vivos et mortvos ]

"d'où il viendra juger les vivants et les morts".

 

Saint Philippe. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Philippe. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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8. Saint Barthélémy.

Le coutelas (de son dépeçage)  et le livre.

CREDO IN SPIRITVM SANCTVM.

"Je crois en l'Esprit-Saint"

 

Saint Barthélémy. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Barthélémy. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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9. Saint Matthieu.

La balance et le livre

[Sanctam Eccles] IAM CATHOLICAM SANCTORVM [commvnionem]

"En la Sainte Église Catholique, en la Communion des Saints"

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Saint Matthieu. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Matthieu. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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10. Saint Simon.

La scie et le livre.

REMISSIONEM PECCATORVM

"En la rémission des péchés"

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Saint Simon. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Simon. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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11. Saint Jude.

Le coutelas à forme d'hallebarde et le livre.

CARNIS RESVRRECTIONEM

"En la résurrection dela chair"

 

Saint Jude. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Jude. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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12. Saint Matthias.

L'équerre et le livre.

VITAM AETERNAM AMEN

"En la Vie éternelle, amen".

Saint Matthias. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Matthias. Credo apostolique de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Commentaire.

Le texte latin est celui des douze articles du Symbole des apôtres.

L'identification n'est pas celle que propose le texte du site Infobretagne (source ?) , mais repose sur l'attribution, depuis le haut Moyen-Âge, d'un article à chaque apôtre selon un ordre précis. Le désaccord porte sur le n°5, Thomas,(Matthias pour Infobretagne) et le n°12, Matthias (Thomas pour Infobretagne). Certes Thomas est souvent porteur d'une équerre, comme ici pour le n°12,  mais la lance est un autre de ses attributs. Néanmoins, les attributions d'accessoires (comme dans le Calendrier des Bergers, figure infra), ou l'ordre de succession (comme sur la verrière de Quemper-Guezennec) sont souvent fantaisistes. 

1- St Pierre : Credo in Deum, Patrem omnipotentem, creatorem caeli et terrae. La clef.

2- St  André : Et in Iesum Christum Filium eius unicum , Dominum nostrum. La croix en X.

3 - St Jacques le Majeur : qui conceptus est de Spirituo Sancto natus est Maria Virgine. La tenue de pèlerin de Compostelle.

4 -St Jean : passus sub Pontio Pilato, crucifixius, mortuus et sepultus. Le calice.

5 -St Thomas : descendit ad inferos, tertia die ressurrexit a mortuos. La lance.

6 -St Jacques : ascendit ad caelos ; sedet ad dexteram patris Dei Patris omnipotentis. Le foulon.

7 -St Philippe : inde venturus est iudicare vivos et mortuos. la croix à grande hampe.

8 -St Barthélémy : Credo in Spiritum Sanctum. Le coutelas.

9 -St Matthieu : sanctam ecclesiam catholicam. La balance.

10 -St Simon : sanctorum communionem, remmisionem pecatoribus. La scie.

11 -St Jude : carnis resurrectionem. Le couteau.

12 -St Matthias : vitam eternam. L'équerre. 

Voir d'autres développements en Annexe.

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La porte de  l'ossuaire et son fronton.

 

 

"La ligne d'arcatures est coupé par une porte accostée de deux colonnes cannelées, coiffées de chapiteaux corinthiens écourtés, lesquels portent un entablement et un fronton triangulaire montant jusqu'à la corniche haute.

 

 

La porte de  l'ossuaire et son fronton. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

La porte de  l'ossuaire et son fronton. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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"Au dessus de l'entablement, dans la frise curant au dessus du cintre de la porte, on lit : MEMENTO. MORI ("Souviens-toi qu'il faut mourir").

Sur la petite frise d'entablement est une longue inscription en caractères très fins, dont la plupart des mots sont invisibles, empâtés qu'ils sont par la peinture. Sur la corniche faisant la base du fronton, est gravée cette sentence :

VOVS.NOS. ANFENS. QVI. PAR. CY. PASSÉS.

SOVVENES.VOVS.QVE.NOVS.SOMMES.TRÉPASSÉS.

"Vous nos enfants qui par ici passés, souvenez-vous que nous sommes trépassés". 

N.B. J'ai cherché en vain cette sentence décrite par J.M Abgrall "sur la corniche faisant la base du fronton".


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Inscription Memento Mori. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Inscription Memento Mori. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Fronton de l' ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Fronton de l' ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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"Au haut du champ du fronton, est une petite statuette minuscule de saint Suliau, tenant son faisceau de houssines ou de petites baguettes."


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Saint Suliau. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint Suliau. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Dans les écoinçons, ou triangles extérieurs, deux autres statuettes : Saint François d'Assise, montrant ses stigmates, et un autre saint franciscain tenant un ciboire ou calice, très probablement saint Pascal Bayon, populaire pour sa grande dévotion à l'eucharistie, et que l'on retrouve au églises de Bodilis, La Roche-Maurice, Brennilis, etc..."

 

Saint François d'Assise montrant ses stigmates, Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint François d'Assise montrant ses stigmates, Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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L'identité du franciscain tenant un calice est délicate à préciser. A Brennilis, où le même problème se pose, j'ai écrit :

  • Parmi les moines franciscains béatifiés, nous trouvons saint Fidèle de Sigmaringen (mort en 1622), prêtre et martyr souabe, mais le calice, témoignant de l'importance accordée à l'Eucharistie, correspond davantage à saint Pascal Baylon (1540-1592). On peut aussi penser à saint Antoine de Padoue (1195-1231), bien que son attribut soit le cœur enflammé ou le lys.

Les deux statues, l'une de saint François, l'autre d'un cordelier tenant un calice forment un duo qui  se retrouve à Bodilis, (église), à Sizun, (fronton de l'ossuaire,1588), à Lanneufret (église) et à La Roche-Maurice, témoignant de l'implantation des Franciscains dès le XIIIe siècle dans le Léon. L'identité du deuxième moine est régulièrement discutée dans chacun de ces sanctuaires.

Ce qui pose problème à Sizun, c'est qu'en 1585-1588, saint Pascal Bayon, le meilleur candidat en raison de son attachement à l'eucharistie, n'était pas encore mort,  et  bien loin d'être béatifié (1618) et a fortiori d'être canonisé (1690).

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Saint franciscain tenant un calice, Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Saint franciscain tenant un calice, Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Le fronton est centré par un cuir accueillant dans un blason carré les neuf macles (martelées mais distinctes) des Rohan, avec la date de 1588. Les armes du vicomte Jehan de Rohan comportaient sept macles, alors que les armes  de gueules à neuf macles d'or, posées 3, 3, 3 furent adoptées par Henri Ier , 19ème vicomte de Rohan entre 1552 et 1575. 

Juste au dessus, sur la corniche en bois, deux lions tiennent les mêmes armoiries, intactes.

Armes des Rohan. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Armes des Rohan. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Ces armoiries des Rohan et cette date de 1588 amènent à préciser ceci :

— Le 18ème vicomte de Rohan fut René Ier de Rohan-Gié (1516-1552), prince de Léon, comte de Porhoët, marquis de Blain, seigneur de Beauvoir et de La Garnache, chevalier de l'ordre du Roi et capitaine d'une compagnie d'ordonnance. Il  épousa Isabeau d'Albret, tante de Jeanne d'Albret, reine de Navarre. Isabeau d'Albret se convertit au protestantisme en 1558, qu'elle  introduisit  dans son château de Blain où s'organisa la première église protestante bretonne. Isabeau reçoit du roi, en 1560, la liberté de conscience pour elle et pour toute sa Maison.

 Le couple eut quatre enfants, Henri, Jean, Françoise et René qui résidèrent au château de Blain.

— Le 19ème vicomte de Rohan est Henri Ier de Rohan (1535-1575). Il épousa Françoise de Tournemine puis le titre passa  à son frère :

— Le 20ème vicomte de Rohan est René II  (1550-1586) dit Parthenay, du nom de sa seconde épouse l'humaniste Catherine de Parthenay d'une puissante famille protestante du Poitou

— C'est avec le 21ème vicomte de Rohan que nous arrivons à la date de 1588. En effet, il s'agit de Henri II de Rohan (Blain le 21 août 1579- 13 avril 1638), fils de René II. Mais il avait 9 ans à la date gravé sur le fronton de l'ossuaire.  Élevé dans la religion réformée par sa grand-mère Isabelle d'Albret et par son père René II de Rohan, instruit dans les humanités par sa mère, cousin germain de Henri IV,  il fut le chef de guerre des rébellions huguenotes contre le pouvoir royal catholique. En 1590 le Duc de Mercoeur et 4000 espagnols assiégea son château de Blain. Le roi  Henri IV érigea en 1603 la vicomté de Rohan en duché-pairie et lui fait épouser en 1604 Marguerite de Béthune, fille du futur duc de Sully. Il devient alors Henri Ier en tant que premier duc. Après l'assassinat du roi par Ravaillac, il est condamné à l'exil par l'hostilité de Richelieu, qui fait abattre une partie de son château de Josselin. 

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Armes des Rohan. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Armes des Rohan. Ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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LE DEUXIÈME REGISTRE.

Situé au dessus du registre inférieur appareillé en pierres en granit jaune alvéolé, c'est une série de fenêtres en plein cintre, séparées par des pilastres à gaines.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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A main droite de la porte, selon l'usage traditionnel de nos ossuaires, est un bénitier finement sculpté, surmonté d'une accolade de rubans aux extrémités enroulées en volutes."

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Les cariatides sont intéressantes, en ce qu'elles viennent confirmer la vogue populaire du décor en spirale ; l'une d'elles porte la date de 1585

 

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.
Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.
Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.
Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

Deuxième registre de la façade de l'ossuaire de l'enclos paroissial de Sizun. Photographie lavieb-aile.

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ANNEXE.

 

LE CREDO APOSTOLIQUE.

Cette iconographie s'est développée au XIIIe siècle à la suite de réflexions théologiques montrant que les articles du Credo trouvent leur fondement dans le Nouveau Testament, par des références à des textes des Évangiles, des Épîtres et des Actes des Apôtres, mais aussi dans l'Ancien Testament par des citations des Prophètes, ce qui fonde le Credo non pas sur tel ou tel Concile, mais sur la parole de Dieu.

 Le Symbole des Apôtres

Ce Symbole des apôtres, souvent appelé Credo comme celui de Nicée, était récité quotidiennement par les clercs dans la lecture de leur bréviaire, et, depuis le Missel Romain de 2002, il peut être récité à la place du Credo lors de la Messe.  

  Il est la traduction, latine puis française, d'un texte grec. On le reconnaît dès le premier article qui dit Je crois en Dieu le Père tout-puissant (Credo in Deum, Patrem omnipotentem) alors que le Credo énonce Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant (Credo in unum deum ).

Il s'agit  ici non pas du Credo à proprement parler, celui qui est récité à la messe et qui est le Symbole de Nicée-Constantinople, mais le Symbole des Apôtres, une profession de foi qui, selon la tradition, proviendrait directement des Apôtres et qui serait donc inspiré par l'Esprit-Saint. La légende développée dès le IVe au VIe siècle veut même qu'à la veille de leur dispersion, chacun des douze apôtres en ait récité un article : il compte donc douze articles de foi. On trouve cette tradition chez Ambroise de Milan (339-397) puis chez Rufin d'Aquilée (345-410), l'auteur qui donne le premier texte latin du symbole. celui-ci écrit dans Commentaire du symbole des apôtres (v.400) " Nos anciens rapportent qu'après l'ascension du Seigneur, lorsque le Saint-Esprit se fut reposé sur chacun des apôtres sous forme de langues de feu, afin qu'ils puissent se faire entendre en toutes les langues, ils reçurent l'ordre de se séparer et d'aller dans toutes les nations pour prêcher la parole de Dieu. Avant de se quitter, ils établirent en commun un règle de la prédication qu'ils devaient faire afin que, une fois séparés, ils ne fussent exposés à enseigner une doctrine différente à ceux qu'ils attiraient à la foi du Christ ; étant donc tous réunis, remplis de l'Esprit -Saint, ils composèrent ce bref résumé de leur future prédication, mettant en commun ce que chacun pensait et décidant que telle devra être la règle à donner aux croyants. pour de multiples et très justes raisons, ils voulurent que cette règle s'appelât symbole."

http://www.patristique.org/Historique-du-symbole-des-apotres.html

  Au VIe siècle, à la suite de deux sermons pseudo-augustiniens (Sermon 240 et 241) d'un prédicateur gaulois, chaque article fut attribué à un apôtre particulier : ce point est important , puisqu'il va nous aider à déchiffrer le texte du phylactère si nous identifions l'apôtre, et inversement. Voici la répartition selon le texte latin, celui qui nous intéresse :

1- St Pierre : Credo in Deum, Patrem omnipotentem, creatorem caeli et terrae

2- St  André : Et in Iesum Christum Filium eius unicum , Dominum nostrum

3 - St Jacques le Majeur : qui conceptus est de Spirituo Sancto natus est Maria Virgine

4 -St Jean : passus sub Pontio Pilato, crucifixius, mortuus et sepultus

5 -St Thomas : descendit ad inferos, tertia die ressurrexit a mortuos

6 -St Jacques : ascendit ad caelos ; sedet ad dexteram patris Dei Patris omnipotentis

7 -St Philippe : inde venturus est iudicare vivos et mortuos

8 -St Barthélémy : Credo in Spiritum Sanctum

9 -St Matthieu : sanctam ecclesiam catholicam

10 -St Simon : sanctorum communionem, remmisionem pecatoribus

11 -St Jude : carnis resurrectionem

12 -St Matthias : vitam eternam.

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Bibliothèque Municipale Angers Compost et calendrier des bergers, 1493  - BM - SA 3390, f. 039v-040

Les attributs des trois derniers apôtres sont ...inhabituels.

 

 

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 Ce Credo apostolique est représenté en Bretagne dans le porche ou sur le calvaire de très nombreuses chapelles et églises (je citerai le calvaire de Saint-Venec en Briec, l'ossuaire de Sizun, le porche de Saint-Herbot à Plonevez-du-Faou, saint-Mélaine à Morlaix, mais la rencontre de l'alignement de leurs niches est trop fréquente pour qu'une liste soit exhaustive.)

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SOURCES ET LIENS.

ABGRALL (Jean-Marie), 1910, « L´église paroissiale de Sizun et ses annexes », Bulletin de la Société archéologique du Finistère, Quimper, Société archéologique du Finistère, t. 28,‎ 1910, p. 129-138

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207696j/f176.image

— COUFFON (René), LE BARS ( Alfred), Diocèse de Quimper et de Léon : Nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, Association Diocésaine de Quimper, 1988, p. 416-420.

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/54730d797d70be488e00757c7d0fcef7.pdf

— Inventaire du Patrimoine :

— http://monumentshistoriques.free.fr/calvaires/sizun/sizun.html

— Topic-topos :

http://fr.topic-topos.com/ossuaire-sizun

— Infobretagne :

http://www.infobretagne.com/sizun.htm

http://www.infobretagne.com/enclos-sizun.htm

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Sur le Credo apostolique :

Site http://idlespeculations-terryprest.blogspot.fr/2014/02/the-apostles-creed.html

— Grant Kalendrier et compost des bergiers , 1529, imprimé à Troyes.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86095054/f89.item.zoom

 

 Émile Mâle http://patrimoine.amis-st-jacques.org/documents/000135_e_male_credo_des_apotres_2.pdf

—Denis Pichon Note sur les peintures murales de Notre-Dame-du-Tertre à Châtelaudren : présence d'un Credo prophétique Société d'émulation des Côtes-d'Armor, 2000, 130, p. 115-122

 Robert Favreau Les autels portatifs et leurs inscriptions, Cahiers de civilisation médiévale 2003 Volume   46 pp. 327-352 :http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ccmed_0007-9731_2003_num_46_184_2865

 — Baptistère de Sienne : http://www.viaesiena.it/fr/caterina/itinerario/battistero/articoli-del-credo/articoli-della-seconda-campata

 — Psautier de Jean de Berry, Enluminures de André Beauneveu 1380-1400 : gallica 

— RANSON (Lynn) 2002 A franciscan program of illumination Insights and Interpretations: Studies in Celebration of the Eighty-fifth .publié par Colum Hourihane  ..pp 84-89 En ligne

 

— GAY (Françoise) 1993, Le choix des textes des prophètes face aux apôtres au Credo", in Actes du Colloque Pensée, image et communication en Europe médiévale. A propos des stalles de Saint-Claude - Besançon 

 HASENORH (Geneviève), 1993 "Le Credo apostolique dans la littérature française du Moyen-Âge", Actes du Colloque Pensée, image et communication en Europe médiévale. A propos des stalles de Saint-Claude - Besançon 

 LACROIX (Pierre) , Renon, Andrée,  Mary, Marie-Claude, Vergnolle, Éliane [Publ.] Pensée, image et communication en Europe médiévale. A propos des stalles de Saint-Claude - Besançon (1993).Sommaire en ligne 

 — GAULTIER DU MOTTAY (Joachim) Répertoire archéologique du département des Côtes-du-Nord, Saint-Brieuc, 1883-1884, extrait des Mémoires de la Société archéologique et historique des Côtes-du-Nord, nouvelle série, T.I, 1883-1884.

 

— RENON F, relevé du Credo du chœur de la cathédrale de Cambray en 1404 Revue de l'art chrétien: recueil mensuel d'archéologie religieuse, Volume 8 Arras ; Paris 1864 page 262.

—  RITZ-GUILBERT, Anne 1993 ; "Aspects de l'iconographie du Credo des apôtres dans l'enluminure médiévale", Pensée, image & communication en Europe médiévale : à propos des stalles de Saint-Claude; Besançon; Asprodic L'auteur analyse les Credo typologiques apparus dans l'enluminure du 13e siècle, puis la version originale qu'en donne Jean Pucelle dans le Bréviaire de Bellevill (Paris, B. N., ms lat. 10483) aux environs de 1323-1326. Le peintre a utilisé le Credo des apôtres comme attribut de la vertu personnifiée de la Foi

SCHMITT (Jean-Claude), 1989  "Les images classificatrices", in Actualité de l'histoire à l'Ecole des chartes: études réunies à l'occasion publié par Société de l'Ecole des charte 1989 pp.311-341.

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Published by jean-yves cordier - dans Sizun Credo Rohan
13 octobre 2016 4 13 /10 /octobre /2016 19:07

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Résumé de l'épisode précédent.

Ayant constaté la présence d'un A couronné entouré de macles sur une pierre de fondation par le vicomte de Rohan Jehan II du pont de Landerneau datant de 1510, j'ai appris que ce A résumait le cri de guerre de la famille de Rohan, "A PLUS ROHAN". Mon enquête m'a révélé que les macles qui formaient le meuble de cette famille depuis le XIIIe siècle venaient d'une pierre caractéristique des terrains entourant la motte féodale d'Alain Ier de Rohan , à Sainte-Brigitte, dans le Porhoët. Ce château "des Salles de Rohan" contrôlait un site très riche en fer, et les Rohan développeront la métallurgie bretonne, sous forme de "forges à bras" mobiles dans la forêt, ou, au XVIIe siècle, avec la construction en 1621-1623 des Forges de Salles par le duc Henri II de Rohan.

Si bien que j'en suis venu à considérer que le A couronné, fait de branches écotées et dessinant dans une boucle de la barre transversale une macle, était un emblème de cette pierre emblématique au cœur de la forêt de Quénécan, ou du rôle du charbon de bois dans l'exploitation économique du sous-sol du fief ancestral.

J'ai eu donc envie de rechercher d'autres traces lapidaires de Jean II de Rohan. Le château de la ville de Rohan est détruit, celui de Pontivy ne se visite pas actuellement (courtine sud écroulée), je me rendais donc au château de Josselin. Justement, sa reconstruction par Jehan de Rohan s'acheva en 1510. Peut-être y trouverais-je un "A couronné" ?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que je ne revins pas bredouille.

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Château de Josselin vu depuis le parc. Photographie lavieb-aile.

Château de Josselin vu depuis le parc. Photographie lavieb-aile.

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Je devais d'abord connaître un peu l'histoire de ce château. 

 

En 1008, Guéthenoc, Vicomte de Porhoët, fils du Comte de Rennes, décide d’édifier sur ce promontoire rocheux dominant la vallée de l’Oust, un château adossé à ce système défensif, une construction en bois, comme à l'époque. Goscelinus, fils de Guéthenoc, donne son nom au château et à la localité qui s'installe peu à peu tout autour.  Rasée une première fois par Henri II Plantagenêt vers 1170, la forteresse  fut relevée dès 1173 par le vicomte de Porhoët, Eudes II, allié du roi de France. En 1370, elle passe entre les mains d'Olivier de Clisson, grand connétable (chef des armées) de Charles V. A partir du château existant, Clisson fait édifier  la forteresse la mieux armée de Bretagne  : une enceinte féodale de 4500 mètres carrés, avec un châtelet-résidence et des remparts de 25 mètres jalonnés de neuf tours et un énorme donjon de 26 mètres de diamètre et de 32 mètres de haut.

Les ducs de Bretagne, Jean IV et Jean V, vont s'acharner contre Olivier de Clisson. Emprisonné, puis relâché, Clisson est assiégé dans Josselin par Jean IV en 1393. C'est à Josselin qu'il meurt en 1407 après une brillante carrière militaire et politique. Il est enterré aux côtés de son épouse Marguerite, à Josselin dans l'église Notre-Dame du Roncier, où l'on peut encore aujourd'hui admirer leur gisant en marbre blanc.  A sa mort en 1407, le château revint à son gendre, Alain VIII de Rohan, qui a épousé sa fille Béatrix. La forteresse demeure dans la famille depuis six siècles.
La lutte sourde entre les ducs de Bretagne et les rois de France reprend en 1488. François II, duc de Bretagne, veut punir Jean II de Rohan de son soutien au parti français. Il fait démanteler partiellement la forteresse dont l'un de ses capitaines vient de s'emparer. Peu après, Jean II, sans toucher aux défenses qui viennent d'être abattues, fait reconstruire le manoir d'habitation et sa belle façade sur la cour nord-est. 
En 1629, Le puissant donjon qui ferme le château au Sud est démoli sur ordre du cardinal de Richelieu. 

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les Rohan vivent à Paris et le château est laissé à l'abandon. . Vers 1835, Charles-Louis Josselin, duc de Rohan, décide d'engager une restauration en bonne et due forme de sa demeure, très largement délabrée et où le toit s'écroule par endroits. Le chantier débute vers 1855, sous la direction de l'architecte Jules de la Morandière, élève du célèbre Viollet-le-Duc.   L'extérieur est remis en état, l'intérieur est presque totalement réaménagé. Le chantier est dirigé par Jules de La Morandière jusqu'en 1880, par Henri Lafargue de 1880 à 1904 et par Alain Lafargue en 1917, avant d'être ouvert au public vers 1930.
 Le château de Josselin est une demeure privée. Le règlement interdit les photos à l'intérieur de l'habitation. 

 

 

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Les travaux de Jehan II de Rohan.

Jean II de Rohan (1452-1516) récupère son château et entreprend, en 1490, une campagne de restauration du château de Josselin, qui va durer près de vingt ans (la restauration se termine vers 1510). Le grand logis de style flamboyant datent de 1495-1506 : il a été construit pour Jean II de Rohan. Il ne reste que quatre tours, à l'origine plus élevées et couronnées de mâchicoulis, puis abaissées au début du XVIème siècle par Jean II de Rohan. Ce dernier fit percer sur la façade extérieure Sud des fenêtres plus grandes et ajouter six grandes lucarnes. La grande longère, en surplomb de l'Oust, a été construite à la fin du XVème siècle et rénovée vers 1505 par Jean II de Rohan : la longère mesure 70 mètres de long sur 7,5 mètres de large et 16 mètres de haut. Les dix lucarnes, situées sur la façade intérieure Nord, datent du XV-XVIème siècle. Les lucarnes incrustées dans la toiture, la galerie ainsi que les cheminées sont parsemées de sculptures : hermines, lis, macles des Rohan, arabesques, animaux fabuleux, etc ... En 1504 et 1505, Jean de Rohan paye encore des sommes importantes à Rolland Crenn, son connétable de Josselin pour les employer à "l'œuvre et édifice de son château". 

 

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Façade nord-est du Château de Josselin depuis le parc à la française . Photographie lavieb-aile.

Façade nord-est du Château de Josselin depuis le parc à la française . Photographie lavieb-aile.

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Quelques images anciennes (Gallica).
Quelques images anciennes (Gallica).
Quelques images anciennes (Gallica).
Quelques images anciennes (Gallica).

Quelques images anciennes (Gallica).

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Mais la façade ajourée  est si foisonnante et sa décoration si luxuriante que je sent bien que ma description va être assez ardue. Dix lucarnes à angles aigus et gâbles à crochets se succèdent, séparées par des galeries. Je me décide à désigner chaque lucarne et chaque galerie par un numéro porté sur ma photographie.

T1 à T3 : les trois tours féodales surplombant l'Oust.

L1 à L10 : les dix lucarnes.

G1 à G11 : les onze galeries ajourées.

P1 à P5 : les cinq portes.

Pour m'y retrouver également, je me déplacerais de gauche à droite de la façade.

Suivez le guide !

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Façade nord-est du Château de Josselin depuis le parc à la française . Photographie lavieb-aile.

Façade nord-est du Château de Josselin depuis le parc à la française . Photographie lavieb-aile.


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De la première à la troisième lucarne.

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Partie gauche de la façade du château de Josselin, photographie lavieb-aile.

Partie gauche de la façade du château de Josselin, photographie lavieb-aile.

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Corniche à double encorbellement sous la galerie G1.

Le balcon G1 est décoré par une rosace à 5 mouchettes centrée par un soleil. Ces galeries ne sont pas accessibles et ne permettaient donc pas aux propriétaires d'y apparaître. Il conviendrait de parler de fausses galeries à usage décoratif, et de leur (vraies) balustrades. 

Toutes les balustrades sont taillées dans des dalles de granit.

 Les moulures de la corniche  se prolongent par un dragon ailé  dont la queue est nouée. Ce monstre semble faire office de gargouille, mais l'eau de la toiture n'est pas évacuée par sa gueule, mais par des tuyaux qui empruntent des descentes d'eaux ouvragées plaquées contre la façade.

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Galerie G1 et trumeau de la lucarne L1, Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

Galerie G1 et trumeau de la lucarne L1, Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

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Corniche à double encorbellement sous la galerie G1.Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

Corniche à double encorbellement sous la galerie G1.Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

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La lucarne L1 et le premier A couronné (A1).

Ah ! Le voici donc ce A qui avive ma hâte ! Il est exactement semblable à celui que j'ai décrit sur la pierre de fondation de Landerneau, avec ses fûts diagonaux en branches écotées et le macle formé par l'entrecroisement de barres transversales. Mais ici, où il ne s'inscrit pas comme à Landerneau dans un carré d'1 centimètre, sa grande taille permet au sculpteur de dessiner des racines à la base de chaque bout de bois, de tresser deux tiges pour en coiffer l'angle de la lettre, et de tailler une macle parfaitement géométrique. Le contraste est donc franc entre la macle relevant de l'ordre minéral et les bâtons relevant du végétal. Cet A  symbolise les richesses de la terre ancestrale associant la valeur économique de la forêt et celle du sous-sol. La macle qu'il intègre en fait indubitablement le "chiffre" de Jean II de Rohan. Je rappelle que ses armoiries comportent sept macles (losange évidé) d'or sur fond de gueules (rouge).

Roger de Gaignières (1642-1715) a fait relever (par Louis Boudan ?) les vitraux du couvent des Cordeliers de Nantes représentant en vis à vis  Jehan II du nom, vicomte de Rohan et son épouse Marie de Bretagne. Les macles sont bien visibles sur le tabard et le prie-dieu de Jean II et sur la robe de la vicomtesse. Le nombre de macles (neuf) n'a pas de valeur héraldique.

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Marie de Bretagne & Jean II de Rohan

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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La couronne est peu visible, car détruite (par dégradation volontaire lors de la Révolution ?). Pourtant, je remarque un détail fort précieux : une frise de macles, ou du moins de losanges (dont on ne voit que le premier élément) devait courir à sa base.

Remarquez sur la photo les choux très frisés du gable. Et, dans l'angle de l'arcature de la fenêtre, l'ange présentant les armoiries de Rohan, aux macles martelées.

Faut-il en venir dès maintenant aux sujets qui fâchent ?  Voici l'extrait que je découvre sur le site patrimoine-histoire.fr :

La polémique sur l'initiale A. 

"L'interprétation des faits historiques et des créations artistiques a toujours été un art difficile. On en trouve une nouvelle preuve dans une petite polémique qui surgit là où on ne l'attendait pas vraiment : dans les lettres en granit garnissant la galerie de la façade Renaissance du château. La lettre A, d'ailleurs très souvent surmontée d'une couronne, y apparaît en de multiples endroits. Voir la série des cinq lettres A consécutives. Jusqu'au XIXe siècle, les historiens y ont vu l'initiale de la devise des Rohan «A Plus», c'est-à-dire «sans plus», donc «sans supérieur».

"En prenant pour acquit le fait que la façade a bien été reconstruite à l'initiative de Jean II Rohan, l'historien Roger Grand, dans son article du Congrès archéologique de France tenu à Brest et à Vannes en 1914, avance une explication assez déroutante. Il constate d'abord que cette lettre A est partout surmontée d'une couronne, ce que personne ou presque n'a remarqué. Il signale ensuite que la couronne, faite de huit fleurons égaux, n'est autre que la couronne ducale. Roger Grand poursuit : «Or la seigneurie des Rohan était alors une vicomté. En 1505, Jean II s'intitule lui-même vicomte de Rohan. L'A surmonté d'une couronne ducale ne désigne donc pas le seigneur de Josselin. Il faut l'appliquer, sans doute possible, à Anne, duchesse de Bretagne.» Et l'historien rappelle que la décoration de la façade est composée d'emblèmes rappelant les Rohan (devise «A Plus»), la duchesse de Bretagne (A couronné) et la reine de France (fleurs de lys). Comme on le sait, à la fin du XVe siècle, Anne de Bretagne, fille de François II, duc de Bretagne, était l'enjeu de toutes les chancelleries d'Europe. Épouser Anne, c'était hériter de la Bretagne. Le roi de France Charles VIII, l'empereur allemand Maximilien Ier, Louis d'Orléans (le futur Louis XII) et le duc de Buckingham sont sur les rangs. L'est aussi Jean II Rohan qui voudrait bien voir l'un de ses fils épouser la jeune fille, ce qui aurait uni définitivement les maisons de Rohan et de Bretagne.
Le mariage d'Anne et de Charles VIII à Langeais, en 1491, mit fin au rêve du vicomte qui restait bel et bien le premier vassal de la duchesse en Bretagne. Pour Roger Grand, Jean II prit en quelque sorte sa revanche en traduisant dans la pierre ce rêve de grandeur et d'ambition avortées."

Pourtant, la présence de la macle inclus dans le A , et d'un losange sur le cercle de la couronne s'opposent "sans-doute possible"  à l'idée d'en faire la couronne de la duchesse Anne. Je continue ma lecture :

"Dans le livret sur le château de Josselin paru aux éditions Ouest-France en 2000, Antoinette de Rohan remet en question cette explication un peu poussée. «(...) comment expliquer, écrit-elle, la présence de l'initiale A, couronnée ou non, que l'on retrouve à de nombreuses reprises dans la décoration de la façade? On a longtemps cru qu'il s'agissait du A désignant la duchesse-reine Anne de Bretagne, comme l'affirmait Roger Grand.» Et Antoinette de Rohan avance une autre explication : «On peut se demander s'il ne s'agit pas plutôt du chiffre de Jean II. Olivier de Clisson avait un chiffre du même type, l'initiale M, que l'on retrouve à Blain, ainsi que dans son hôtel parisien.»

Voir ici sur le M de Clisson apposé sur un acte du 21 juillet 1370.
"À la représentation du rêve avorté, idéal bien romantique, proposé en 1914, par Roger Grand, il semble qu'on ne puisse opposer que l'hypothèse du chiffre du constructeur. Dans l'un et l'autre cas, ce ne sont que des conjectures et il faut bien avouer que le mystère reste entier. 
Sources : 1) Congrès archéologique de France, Brest et Vannes, 1914 ; 2) Le château de Josselin, éditions Ouest-France, 2000."

Ah ! Le A couronné, "chiffre" de Jean II de Rohan ! Merci Antoinette, voilà bien mon hypothèse partagée . Et par une duchesse !  Voir son portrait dans mon article sur les blochets de Sizun : 

http://www.lavieb-aile.com/2016/09/les-sablieres-de-la-charpente-de-l-eglise-de-sizun-apres-leur-restauration-par-l-atelier-le-ber-en-2012.html

Néanmoins, la guide, par ailleurs excellente, qui nous a fait visiter le château a décrit ces A couronnés comme l'initiale d'Anne de Bretagne. 

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Lucarne L1 et son A couronné. Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

Lucarne L1 et son A couronné. Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

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 A couronné de la Lucarne L1 . Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

A couronné de la Lucarne L1 . Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

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Les galeries G2 et G3  et les lucarnes L2 et L3.

— La galerie G2 comporte 4 fleurs de lys. 

— La cheminée au dessus de G2 porte en couronnement deux hermines.

— La lucarne L2 porte un écu à sept macles entouré du collier de l'ordre de Saint-Michel. Je rappelle que les armoiries comporteront 7 macles jusqu'à Henri de Rohan Ier en 1552-1575. L'ordre de chevalerie de Saint-Michel a été institué en 1469 par Louis XI ; les 36 chevaliers portaient un collier d'or fait [de] coquilles lassées, l'une avec l'autre, d'un double las » auquel était suspendu un médaillon représentant l'archange terrassant le dragon. Ce dernier est bien visible sur la façade.

Quel est le seigneur de Rohan qui a été admis dans l'Ordre de Saint-Michel ? La liste des chevaliers ne mentionne que Pierre et Charles de Rohan-Gié. Je ne trouve pas d'abord pas d'indication formelle concernant Jean II de Rohan, hormis celles-ci :

1°) la  chapelle de Cuburien, Saint-Martin-des-Champs (29). renferme un Vitrail début 16ème siècle montrant le portrait de Jean II de Rohan portant le collier de l’ordre de Saint-Michel.

http://www.rohan.fr/histoire_bruits2.html

2°) Hervé du Halgouet écrit en 1911 (cf. Annexe) que Jean II de Rohan avait "reçu ce collier par faveur spéciale de Charles VIII en 1469". Or, l'Ordre a été fondé à Amboise le 1er août 1469, mais... par Louis XI.

Enfin, je découvre la page 351 de Les chevaliers bretons de Saint-Michel depuis la fondation de l'Ordre, par J.F. d'Hozier et G. de Carné, ouvrage écrit en 1884 : d'après ce texte,    Louis IX remit le collier de l'Ordre à Jean II, en 1472, d'après une lettre du 31 juillet 1472 au grand-maître Antoine de Chabannes sollicitant son avis

Je lis aussi qu'une lucarne du château de Pontivy "est décorée des armes de Rohan, inscrites dans un collier de l'ordre de Saint-Michel. Cette décoration se rapporte à René I, vicomte de Rohan (1527-1552). "

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Lucarne L2 : écu des Rohan et collier de Saint-Michel. Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.
Lucarne L2 : écu des Rohan et collier de Saint-Michel. Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

Lucarne L2 : écu des Rohan et collier de Saint-Michel. Château de Josselin. Photographie lavieb-aile.

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— La longue galerie G3 est formée de six panneaux à arcades entrelacées. Le motif reprend celui décorant le dessous de la fenêtre haute de la lucarne L1 .

Ce dessin  peut être rapproché de celui que Viollet-le-Duc a donné en illustration des articles Fenêtre et Balustrade de son Dictionnaire de l'architecture et qui représente une fenêtre du premier étage de l'hôtel de la Trémoille à Paris.

Balustrade de l'hôtel de la Trémoille à Paris, Viollet-le-Duc, Dictionnaire...tome 2 fig. 28 page 96. (1867)

Balustrade de l'hôtel de la Tremoille in Viollet-le-Duc, Dictionnaire...t.2 fig. 28 p..

 

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L'hôtel de la Trémoille, nommé plus tard hôtel de Bellièvre, fut détruit en 1841. Il occupait l'espace entre les rues de Bourbonnais et Tirechape. Ancienne propriété en 1398 de Guy de la Trémoille, était estimé dater entre le dernier tiers du XVe et le tout début du XVIe  siècle ; il aurait été construit par Louis II de la Trémoille, mort à Pavie en 1525. Yvonnig Gicquel décrit dans son ouvrage les nombreuses occasions de rencontre entre Jehan II de Rohan et Louis de la Trémoille.

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Hôtel  dit de la Trémoille, ou maison de la couronne d'or, 31 rue des Bourdonnais (gravure de la France historique et monumentale de Jean-Abel Hugo - 1836). https://fr.wikipedia.org/wiki/Rue_des_Bourdonnais#/media/File:Maison_de_la_couronne_d%27or,_rue_des_Bourdonnais_%C3%A0_Paris.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Galerie G3 et son motif repris de la fenêtre de L1. Photographie lavieb-aile.

Galerie G3 et son motif repris de la fenêtre de L1. Photographie lavieb-aile.

 

— La cheminée au dessus de G3 porte en couronnement deux A couronnés .

—La lucarne L3 porte aussi un A couronné semblable à celui de la lucarne L1.

 

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Les lucarnes L2 et L3. Photographie lavieb-aile.

Les lucarnes L2 et L3. Photographie lavieb-aile.

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De la quatrième à la septième lucarne.

 

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Cinq d'un coup ! La galerie G4.

 — La galerie G4 aligne cinq " A  couronnés" , tous plus beaux les uns que les autres et que nous allons détailler.

 

Les cinq "A couronnés" de la galerie G 4. Photographie lavieb-aile.

Les cinq "A couronnés" de la galerie G 4. Photographie lavieb-aile.

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La première chose que je constate, c'est qu'ils sont dotés chacun de leur couronne. Le cercle des trois premières est trop usé pour y discerner d'éventuels losanges. Par contre, les deux dernières couronnes montrent clairement leur cercle alternant un losange et un bouton. Le losange peut, comme 

 La partie supérieure de la couronne montre clairement trois fleurons centrés par une perle. Peut-on, comme le suggère Roger Grand, parler ici d'une couronne ducale ? Et cette couronne stylisée  répond-elle aux codes de l'héraldique ?

"Les ducs, en France, portent leur couronne, d'or, rehaussée de huit fleurons et enrichis de pierreries et de perles. Celle des marquis est surmontée de quatre fleurons, séparés chacun par trois perles qu'on posait autrefois sur une même ligne, mais qui sont réunis aujourd'hui en forme de trèfle. La couronne des comtes n'a point de fleurons; elle est rehaussée de seize grosses perles dont neuf visibles, portées chacune sur une pointe. La couronne de vicomte n'est rehaussée que de quatre perles, dont trois visibles."

Les trois premiers "A couronnés" de la galerie G 4. 

Le premier A est très semblable à celui de la lucarne L1 : branches écotées munies de racines, traverse du A formant une macle géométrique .

Le deuxième A n'est plus fait de bouts de bois, mais de monstres à peau couverte de verrues, à gueule aux longues dents et à langue protruse, à oreilles longues et pointues, et à queue fine. En un mot,des dragons. Si c'était un hommage à la reine Anne de Bretagne, voici qui manque d'élégance. S'il s'agit au contraire de mettre en avant les forces très anciennes, souterraines, les forces vitales qui animent le fief des Rohan, avec ses forêts, ses fontaines, rivières et étangs, alors, cela fait sens. Après avoir affirmer leur alliance  avec les forces végétales (bois) et minérales (macles),  les Rohan revendiquent qu'ils relèvent aussi des forces animales profondes, mystérieuses et maléfiques. Classiquement, le dragon est le gardien des lieux souterrains (grottes, cavernes) et son double aquatique est le gardien des trésors. Mais ces puissances animales sont aussi les allégories de la fécondité sexuelle. Et donc de la vitalité de la lignée familiale.

Le troisième A est purement graphique ou architectural, comme construit avec des barres métalliques, des jambes de force aux extrémités pattées. La macle naît de l'entrecroisement de ces jambages.
Au dessous de la galerie, on remarque la corniche à double encorbellement embellie
d'entrelacs, de feuilles et de petits animaux, malheureusement très usés par le temps.

Couronne ducale. https://fr.wikipedia.org/wiki/Couronne_(h%C3%A9raldique)

Couronne ducale. https://fr.wikipedia.org/wiki/Couronne_(h%C3%A9raldique)

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Les trois premiers "A couronnés" de la galerie G 4. Photographie lavieb-aile.

Les trois premiers "A couronnés" de la galerie G 4. Photographie lavieb-aile.

Les deux derniers  "A couronnés" de la galerie G 4.

Il reprennent sous forme de variations le thème des deux premier "A", et du couple végétal-animal. Mais le quatrième A est fait d'osier tressé, comme dans un plessis, ces clôtures de rameaux de bois vert et vivant. La barre transversale est brisée, mais devait former là encore une macle. A la notion de force végétale s'ajoute dans cette version celle de la force de l'union, et celle de la vigueur.

Le cinquième A, dont la barre transversale est également brisée, est dessiné par le corps de deux vouivres, dont les longues queues s'entremêlent et se nouent.

Notez sur cette image les losanges des couronnes.

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Les deux derniers  "A couronnés" de la galerie G 4. Photographie lavieb-aile.
Les deux derniers  "A couronnés" de la galerie G 4. Photographie lavieb-aile.

Les deux derniers "A couronnés" de la galerie G 4. Photographie lavieb-aile.

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La quatrième lucarne L4.

Puisque L3 portait un "A couronné", l'alternance se poursuit et L4 porte un écu  inscrit dans un losange. J'ai négligé de le photographier. 

En dessous, la baie à meneaux est ornée de deux anges porteurs de blasons, et, au centre, d'un A couronné avec sa macle suspendue sous la traverse. Comme d'habitude.

Sous la fenêtre, le délicat motif en arcades inversées et croisées "de la Trémoille"

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Façade du château de Josselin de L3 à L5.  Photographie lavieb-aile.

Façade du château de Josselin de L3 à L5. Photographie lavieb-aile.

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Façade du château de Josselin de L3 à L5.  Photographie lavieb-aile.

Façade du château de Josselin de L3 à L5. Photographie lavieb-aile.

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LA GALERIE G5 : LES MACLES.

Cette galerie rythmée par quatre balustres pourrait passer pour être simplement ajourée de motifs en losanges, mais il s'agit bien entendu de véritables macles, qui se retrouvent aussi alignées sur la partie supérieure.

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La cinquième galerie G5 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

La cinquième galerie G5 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Les galeries G5 et G6 encadrent la partie la plus noble de la façade, qui, dans le prolongement de l'allée principale et de son puits,  inclut l'entrée d'honneur dotée de deux portes, et de deux fenêtres à meneaux et surplombée par la lucarne L5. 

Si chaque galerie est desservie par une gouttière, un tuyau à l'intérieur d'une colonne de pierre sculptée, les deux colonnes verticales qui encadrent les deux portes sont particulièrement soignées. En les décrivant, nous ne sortirons pas de notre sujet puisqu'on y retrouve les vouivres, ou dragons-serpents, des A couronnés précédents. Ce choix d'ornementation souligne bien la nature aquatique de ces créatures.

La créature monstrueuse qui se situe sous la galerie aux macles (G5) a la gueule épatée, le corps marqué de larges écailles, doté d'ailes de chauve-souris, et la queue entortillée autour de la conduite.

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Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G5, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G5, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G5, château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Celle qui draine la galerie G6 a le corps couvert de verrues, des courtes ailes ou ailerons à nervures, des pattes de reptile et une queue qui, après avoir contourné la colonne, forme par sa pointe un beau nœud en huit.

Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G6, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G6, château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G6, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G6, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Vouivre sur la descente d'eaux pluviales sous G6, château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Les portes d'entrées P2 et P3. 

L'arcature gothique qui surmonte P2 se termine par deux anges présentant les blasons des Rohan (à sept macles). Celle de P3 s'achève sur des animaux.

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Portes d'entrée P2 et P3, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
Portes d'entrée P2 et P3, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Portes d'entrée P2 et P3, château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La quatrième cheminée.

Avant de parler de la lucarne L5, il faut examiner la cheminée qui la précède . Elle porte deux A couronnés, encadrant le blason des Rohan.

Le A  supérieur est végétal, du type de la lucarne L1, mais aux bâtons simplifiés, et sans la macle centrale. Toujours le même type de couronne, à fleurons, et à cercle orné de perles et de losanges.

Le blason est simple, à sept macles.

Le A inférieur est strictement identique à son jumeau supérieur.

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Quatrième cheminée du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
Quatrième cheminée du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Quatrième cheminée du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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LUCARNE L5

Comme sous l'effet d'une règle d'alternance, nous trouvons ici la version animale du A couronnée. 

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La cinquième lucarne du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

La cinquième lucarne du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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A y regarder de près, le A est formé de six animaux identiques : deux pour les fûts, deux pour la traverse et deux pour la barre horizontale entourant la pointe. La macle est absente ... ou plutôt elle est formée par l'entrecroisement des fûts et des traverses. La couronne, rongée par la corrosion, est l'épanouissement des queues de deux dragons. 

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A couronné du fronton de la lucarne L5, château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

A couronné du fronton de la lucarne L5, château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Galerie G6 et G7 encadrant la lucarne L6.

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Galerie G6 et G7 encadrant la lucarne L6. Château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Galerie G6 et G7 encadrant la lucarne L6. Château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La sixième galerie : A PLUS.

 Jean II de Rohan y exprime clairement sa détermination à  faire de son château une vitrine de la volonté de domination et de la fierté de sa famille, mais aussi de témoigner des forces animales qui bouillonnent en son sang. En effet, chaque lettre est tracée par les cabrioles et les contorsions de dragons ailés et couverts de pustules vénéneuses. Les forêts ne sont pas oubliées, par la présence d'une branche de chêne. L'élément végétal se retrouve aussi sur la partie supérieure, constituée d’une dentelure présentant des couronnes et des fleurons alternés.

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La sixième galerie : A PLUS. Château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

La sixième galerie : A PLUS. Château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La sixième galerie : A PLUS. Château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
La sixième galerie : A PLUS. Château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

La sixième galerie : A PLUS. Château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Viollet-le-Duc a représenté le A et le P  de cette devise dans l'article "Balustrade" de son Dictionnaire ; néanmoins, on note des différences importantes entre le dessin (avec des lettres de bois écoté), et la galerie G6 (avec des dragons) :

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Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonné tome 2 page 96, https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Viollet-le-Duc_-_Dictionnaire_raisonn%C3%A9_de_l%E2%80%99architecture_fran%C3%A7aise_du_XIe_au_XVIe_si%C3%A8cle,_1854-1868,_tome_2.djvu/99

Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonné tome 2 page 96, https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Viollet-le-Duc_-_Dictionnaire_raisonn%C3%A9_de_l%E2%80%99architecture_fran%C3%A7aise_du_XIe_au_XVIe_si%C3%A8cle,_1854-1868,_tome_2.djvu/99

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La sixième lucarne L6.

Elle reçoit le blason des Rohan entouré du collier de l'ordre de Saint-Michel.

Pas de photo.

 

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La septième galerie aux huit hermines.

Marie de Bretagne (1446-1511) est la fille du duc François Ier et d'Isabelle d'Écosse, et l'épouse de  Jean II de Rohan depuis 1462. 

De leur union  naissent sept enfants :

  • François, tué à 18 ans dans le parti breton à la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier, proposé au duc François II comme époux de la duchesse Anne de Bretagne
  • Jean, né en 1476 et mort en 1505
  • Georges, mort en 1502
  • Jacques de Rohan, vicomte de Rohan, chef de la maison de Rohan.
  • Claude de Rohan, évêque de Cornouaille
  • Anne, vicomtesse de Rohan après son frère, épouse Pierre de Rohan, fils de Pierre de Rohan-Gié dit le maréchal de Gié.
  • Marie, épouse de Louis IV de Rohan Guémené

Ses armoiries familiales sont d'hermines plain, adopté par le duc Jean III en 1316. Comme épouse, elles sont mi-parties de Bretagne et de Rohan. 

Il est donc logique que les hermines figurent à droite de l'entrée principale, au dessus de la porte P4.

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Galerie G7 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Galerie G7 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.


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Elles sont répétées huit fois, très joliment stylisées, alors que des hermines passantes affrontées deux à deux figurent sur le montant supérieur, alternées avec des fleurons pour répondre à l'alternance couronne/fleuron de la galerie G6.

Galerie G7 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Galerie G7 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La septième lucarne L7.

Elle a été relevée par Viollet-le-Duc qui illustre l'entrée "Lucarne" de son Dictionnaire raisonné avec la gravure suivante.

https://upload.wikimedia.org/wikisource/fr/thumb/3/30/Illustration_fig4_6_198.png/440px-Illustration_fig4_6_198.png

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mais on gagnerait vite au jeu des sept différences, tant celles-ci abondent, dans la forme du A du fronton, celle du A de la devise, ou dans les motifs des deux galeries !

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Lucarne L7 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Lucarne L7 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Lucarne L7 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Lucarne L7 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La galerie G8 : huit rosaces.

Elles on été décrites comme des triskels celtes...

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La lucarne L8 : quatre A.

Sous la fenêtre haute sont sculptés quatre A reprenant les motifs précédents : on trouve successivement un A animal à quatre dragons à queue nouée, un A végétal en bois écotés et à racines, un A en osier tressé, et un A animal à deux dragons à queue nouée.

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Lucarne L8 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Lucarne L8 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Lucarne L8 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Lucarne L8 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Lucarne L8 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Lucarne L8 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Le fronton de la lucarne L8.

Il comporte un écu carré, vide ou martelé, entouré d'une moulure qui porte quatre macles et quatre éléments ovoïdes non identifiés.

Notez, au dessus de la fenêtre, le A couronné en bois écotés.

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Lucarne L8 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
Lucarne L8 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Lucarne L8 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

A couronné, lucarne L8 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

A couronné, lucarne L8 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La galerie G9 : quatre rosaces.

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La lucarne L9 : A PLUS.

La lucarne L9 est placée au dessus de la porte P5. 

 

 

lucarne L9 et porte P5 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

lucarne L9 et porte P5 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Lucarne L9 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La lucarne  est surmontée d'un gâble très aigu dont le tympan est orné d'un A couronné. Ce gâble est lui-même «surmonté d'un fleuron à cinq rangs de choux frisés superposés et bordé de rampants à crochets très fouillés.» (Congrès archéologique de France, Brest et Vannes, 1914).

Fronton de la lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Fronton de la lucarne L9 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Fronton de la lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Fronton de la lucarne L9 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 : A PLUS / idem en miroir.

Le A est créé par l'entrelacement que six dragons. Les corps et les queues tracent au centre un losange.

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L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Notez la couronne à fleuron qui entoure la colonne. 

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L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Le L et le V sont en branches écotées, le S est formé par un reptile à tête de serpent qui se mord, et dont la queue forme un nœud.

Notez les deux animaux (un sanglier et un cerf), que nous retrouverons sur le dessus de cheminée intérieure, intégrés cette fois à une scène de chasse. Ils sont présents aussi au dessus de l'inscription A PLUS du coté droit. 

 

L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

L'encadrement des fenêtres de la lucarne L9 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La porte P5.

En anse de panier, elle est soulignée par une arc gothique s'appuyant sur des culots ornés de deux personnages allongés.

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Porte P5 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
Porte P5 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Porte P5 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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Ces deux personnages ne portent pas d'ailes ; ils sont coiffés de bonnets ou toques et leur coupe de cheveu est celle des seigneurs durant le règne de Louis XII

Celui de gauche est vêtu d'une jupe plissée qui doit correspondre à son tabard. Il tient dans la main droite un poisson et dans la gauche une dague. 

Celui de droite porte une robe ou un manteau long.

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Porte P5 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.
Porte P5 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Porte P5 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La galerie G10 : la lettre S.

La galerie G10 possède deux panneaux différents. le premier représente un S dessiné par un reptile à tête et bec d'oiseau (comme sur la lucarne L9 ou la cheminée intérieure).  Cette lettre appartient bien sûr à une devise A PLUS . L'autre panneau est géométrique mais il est surmonté d'une rangée de macles, qui sont brisées au dessus du S. 

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Galerie G10 du château de Josselin .  Photographie lavieb-aile.

Galerie G10 du château de Josselin . Photographie lavieb-aile.

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La lucarne L10.

La galerie G11.

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LES CHEMINÉES DES APPARTEMENTS.

Les photographies ne sont pas autorisées à l'intérieur des appartements. De mémoire, trois cheminées sont décorées sur leur devant de la devise A PLUS, mais certaines datent de la restauration du XIXe siècle. 

L'internaute pourra néanmoins trouver des photographies en ligne :

http://lapassiondupatrimoine.fr/monuments/ressources/files/demeures/aa22d77b7ac90c1209ae95d1f01378d3.jpeg

http://www.tout-sur-google-earth.com/t10008-chateaux-et-manoirs-de-bretagne

http://www.odile-halbert.com/Paroisse/Cartes/Cartes_56/56_Josselin.htm

La cheminée monumentale la plus intéressante est sans doute celle dont la photographie (autorisée) a été publiée dans le  Bulletin monumental 1911 vol . LXXV page 495 (Gallica) http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k31101f/f650.vertical.r=%22jehan%20II%20de%20rohan%22

Elle porte la devise A PLUS en bas-relief doré sur fond rouge (les couleurs d'or et de gueules des armoiries). La graphie reprend celle de la lucarne L9. La lettre A est en branches écotées munies de leurs racines, elle est bien sûr surmontée de la couronne à fleurons. Le fût du  P est perlé par une virole strié et ses empâtements sont crénelés. Surtout,  un portrait est placé dans sa boucle. C'est celui d'un homme jeune, dont la coupe de cheveux associe une frange droite et des cheveux longs et bouclés en deux masses latérales. 

Au dessus du P est représentée une scène de chasse avec un seigneur à cheval et son veneur à pied. Le cerf et la biche se retrouvent à l'extrémité droite.

La lettre L a les mêmes caractères que la précédente. une branche se loge dans sa concavité, s'élève en donnant des feuilles ; un oiseau est venu s'y percher.

La lettre V, également perlé de deux viroles cannelées, et aux empâtements également édentés, voit sa pointe s'enfoncer dans une barre transversale qui crée une symétrie en miroir avec le A.

La lettre S est, comme sur la façade, formée par le corps verruqueux d'un reptile à tête d'oiseau.

Les rinceaux qui encadrent cette devise  complètent le tableau cynégétique.

Le linteau porte un A couronné en bois écoté, entre le blason à sept macles de Jean II de Rohan et celui mi-parti de Bretagne et de Rohan  de son épouse Marie de Bretagne.

Comme le laissait présager le choix ornemental  de la façade, le propriétaire fait preuve d'insistance à honorer le cri de guerre de sa famille, "A plus, Rohan" et son chiffre personnel le "A couronné"  d'une référence aux forêts et aux animaux sauvages, et donc aux forces primitives de la nature. En tout début de la Renaissance, l'ornementation du château de Josselin ignore  les valeurs humanistes et la culture de cour qui vont se développer ultérieurement (le Livre du Courtisan, il cortegiano de Baldassare Cortiglione ne sera publié qu'en 1528) , et ignore également les références à l'antique et à la mythologie gréco-latine. Elle reste médiévale dans son esprit et gothique flamboyant dans son style.

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CONCLUSION.

J'ai souhaité diffuser en ligne une riche iconographie sur la façade du château de Josselin, tout en étant conscient de n'en avoir pas épuisé les richesses. Je conseille aux visiteurs de se munir d'une paire de jumelles pour dénicher de nouvelles surprises.

Ma conviction est que la présence de macles à l'intérieur de nombreux "A couronnés" exclut l'hypothèse proposée par Roger Grand : ces A  ne sont pas des hommages à Anne de Bretagne, mais le chiffre personnel du vicomte Jehan de Rohan, et une citation abrégée du cri de guerre A plus, Rohan de son lignage.

Ceci dit, l'un des privilèges des chiffres et des monogrammes est de laisser plâner une ambiguïté, comme le monogramme HC d'Henri II et de son épouse Catherine de Médicis, dans lequel la maîtresse du roi Diane de Poitiers pouvait lire un D et les deux croissants qui la caractérisaient.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_II_(roi_de_France)#/media/File:Monogram_HC_on_colonne_Medicis_(close-up).jpg Détail du monogramme HC (du roi Henri II et sa femme Catherine de Medicis) sur la colonne Médicis, Paris 1er arr.

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ANNEXE.

Hervé du HALGOUET , 1911, Discussion sur la date de la façade nord du château de Josselin,

"L'année dernière MM. Chappée et Aubert ont remis en discussion; dans le Bulletin Monumental (LXXIV, 1910, p. 489), l'époque de la construction de la façade nord du château de Josselin, en contestant la date que lui attribue l'opinion courante. Depuis notre travail sur le Porhoet, où nous adoptions les vues de M. Cayot-DeIandre, l'archéologue le plus autorisé du Morbihan, l'étude des domaines des Rohan en Bretagne et notamment de la vicomte de Rohan. nous a mis à même de faire des observations sérieuses sur les monuments de cette seigneurie, qui conduisent à des conclusions utiles à connaître.

Pour plus de clarté. donnons ici l'opinion de Cayot-Delandre sur Josselin « Le chiffre d'un A et d'un V entrelacés, dit-il, qui se trouve répète plusieurs fois dans la devise de Rohan A PLUS, et dans les autres ornements de la façade, révèle le nom d'Alain VIII, vicomte de Rohan; mais l'hypothèse qu'il est l'auteur de cette construction ne peut être admise qu'a la condition d'en attribuer une part a son fils Alain IX, comme le font supposer les macles et hermines souvent répétées dans l'intervalle des ornementations et qui ne sont autres que les armes Rohan-Bretagne d'Alain IX. Alain IX épousa Marguerite de Bretagne en 1407, l'année même où mourut Clisson, son grand-père Alain VIII devint donc à cette époque propriétaire du château de Josselin, du chef de sa femme Beatrix de Clisson, et il put entreprendre, en continuation des travaux du connétable, la reconstruction de la façade intérieure. Il mourut en 1429, et son fils, Alain IX, dut achever ce grand et beau travail, sur lequel il mit son écusson.Il faut donc placer cet achèvement dans la période de 1429 à 1462. » 

Les objections faites à ce raisonnement par MM. Chappée et Aubert sont de valeur différente et non absolue. II est très juste que le V ne tient pas à l'observation minutieuse et qu'il faut simplement voir dans la figure légèrement angulaire qui accompagne la lettre A une forme ornementale de la barre transversale. La majuscule représente-t-elle l'initiale du nom d'Alain, ou de la devise A PLUS ? Nous le verrons plus loin. 

L'aménagement des fossés n'était pas terminé en 1497, le vicomte faisait encore à cette date des acquisitions de  Rohan, en 1505 et 1500, pour « l'œuvre et édiffice » du châtel de Josselin, ils sont simplement significatifs de travaux à cette époque. 

Les critiques de Cayot-Delandre ne se sont pas arrêtés aux semis d'hermines que l'on rencontre soit dans la façade, soit a l'intérieur du château: personne n'ignore que les Rohan prétendaient se rattacher à la maison de Bretagne et qu'ils se plaisaient à regarder les hermines comme un symbole de leur glorieuse origine. Mais l'écusson mi- partie Rohan et Bretagne révèle une alliance qui doit être considérée comme une indication essentielle cependant, pour que celle-ci fut précise, il faudrait qu'il n'y eût point plusieurs alliances de Bretagne or, à un demi-siècle d'intervalle, deux Rohan ont épouse des héritières de la maison ducale. Quant aux paiements prescrits par le vicomte de  Rohan, en 1505 et 1500, pour « l'œuvre et édiffice » du châtel de Josselin, ils sont simplement significatifs de travaux à cette époque. 
 

Il est donc difficile, d'après ces données, de formuler mieux que des hypothèses, mais ces hypothèses pourront se transformer en probabilités très sérieuses lorsqu'on aura vu que plusieurs motifs décoratifs de la façade septentrionale de Josselin se retrouvent sur deux édifices de la vicomté de Rohan, dont l'un est d'une époque parfaitement déterminée, et l'autre est daté. 

L'an 1427, Alain, vicomte de Rohan, désirant fonder dans sa ville de Pontivy un monastère de frères mineurs observantins, leur donna le lieu et emplacement du premier châtel de cette ville, appelé les Salles. Son fils, Jehan II, ne voulut pas laisser le chef-lieu de sa principale seigneurie sans forteresse, et, pour assurer la défense, construisit un château sur la limite nord de l'enceinte. Fondation ou reconstruction, nous ne saurions trop nous prononcer sur ce point; toujours est-il que le 16 décembre 1480, le duc François II accorda au vicomte de Rohan l'autorisation de fortifier ce château de Pontivy et d'y établir le guet. Ces lettres furent confirmées le 23 décembre 1491 par le roi Charles VIII . 

L'aménagement des fossés n'était pas terminé en 1497, le vicomte faisait encore à cette date des acquisitions de terrains au pied du château « pour meptre et employer os douffves". D'ailleurs le caractère architectural de la forteresse ne laisse aucun doute sur l'époque de la construction, elle porte toutes les transformations que subirent les places fortes à la fin du XV" siècle, par suite des progrès de l'artillerie. Le logis seigneurial est encore de nos jours un bâtiment de faible élévation, rehaussé de lucarnes à gables élances couronnant les fenêtres. Les gâbles ont été remaniés depuis la construction, mais ils ont conservé sur leur face ou tympan des motifs d'ornementation très caractéristiques, qui changent d'une fenêtre a l'autre; c'est, d'une part,l'écusson de Rohan à sept macles, encadre dans le collier de Saint- Michel. que par faveur  spéciale Jehan II avait reçu du roi en 1469 : d'autre part, un A couronné, qui ne peut être à coup sûr que le rappel de la fière devise A PLUS. 

Ce cri n'aurait pas déjà été consacré comme devise par la maison de Rohan, que Jehan Il l'eut imaginé et adopté pour lui et les siens. On sait les querelles dont souffrit la Bretagne quand s'ouvrit la question de la succession de François II. Jehan de Rohan.qui avait épouse Marie de Bretagne. fille de François voulut être « plus grand que oncques seigneur de Roban n'avait été » et se laissa entraîner à des intrigues fâcheuses. Le roi ayant promis de le faire duc de Bretagne, il courut à lui, abandonnant la province où il eût réussi à rallier le vieux parti breton qui aurait peut-être triomphé des étrangers. 

La proie lui échappa pour l' ombre. Cependant, renonçant à ses prétentions de souveraineté en faveur de ses enfants, il chercha à obtenir l'union de ses deux fils avec les deux héritières du duché. Anne et Isabeau. La devise A PLUS semble bien incarner la pensée dominante de Jehan II de Rohan. On trouve également à Pontivy, dans la même façade du logis, d'élégantes colonnes de pierre servant à l'écoulement des eaux pluviales, terminées par des têtes d'animaux fantastiques formant gargouilles. Une superbe rampe de perron et des balustrades en fer forgé y rappellent le XVIe siècle. Jehan II fut un grand constructeur; outre les châteaux de Pontivy et de Corlay qu'il édifia à la fin du XV siècle, c'est à la même époque qu'il rebâtit la plus grande partie de son château de Blain et qu'il travailla à La Garnache. Mais restons dans la vicomte et quittons Pontivy pour aller à peu de distance de là, au siège de la forteresse qui donna son nom à cette maison illustre sortie des Porhoët. Le châtel de Roc'han ou Rohan, sur les rives de l'Oust, était encore debout au commencement du XVIe siècle, mais sans doute déjà fort endommagé par les guerres; en 1628, il n'en restait rien, si ce n'est des ruines. Des fenêtres de sen château de Rohan Jehan II pouvait voir, au flanc de la colline rocheuse formant le versant oppose de la vallée, une modeste chapelle dont l'état lamentable lui rappela les obligations dues à une fondation ancestrale et les devoirs à la Vierge invoquée en ce lieu sous le nom de Notre-Dame-de-Bonne-Rencontre. Elle faisait partie du temporal du prieuré de Rohan ou de Notre-Dame fondé par un seigneur de Rohan. Il vit la une nouvelle occasion d'affirmer sa piété et peut- être aussi chercha-t-il devant le Tout-Puissant un palliatif à ses fautes . 

Sur l'emplacement même de l'ancienne chapelle prieurale, Jehan II construisit un sanctuaire de style flamboyant, digne cette fois de la mère de Dieu. Une inscription gothique gravée au-dessus de l'entrée principale porte le millésime 1510 et le nom de Jehan de Rohan. Sur les deux contreforts qui soutiennent la chapelle de ce côte, se remarquent des A couronnés, exactement semblables à ceux de Pontivy. et même l'un de ces contreforts était orné dans sa partie supérieure de l'écusson a sept macles avec le collier des ordres du roi. Ces motifs ne frappent pas à première vue; ils ont été martelés par les vandales de la Révolution et fortement mutilés. L'écusson est presque entièrement effacé, mais la trace en reste encore visible. 
En 1505 et 1506 d'après les documents publiés par MM. Chappée et Aubert, d'importants travaux étaient en cours au château de Josselin, travaux qui semblent même avoir rendu la demeure seigneuriale inhabitable, puisque ces ordres de paiements ont été signes aux châteaux de  Rohan et de Blain. 

La façade nord de Josselin est un joyau d'architecture gothique; les détails d'ornementation, où le ciseau du sculpteur s'est exercé dans le granit avec une délicatesse, une patience, un caprice d'imagination incroyables, sont aussi souples et légers que variés et artistiques. Cependant certains motifs reviennent fréquemment: ce sont l'écu de Rohan encadré du collier de Saint-Michel et l'initiale A couronné, identiquement les mêmes que ceux déjà rencontres à Pontivy et a Rohan. De plus. ici comme là on trouve les mêmes colonnes pour l'écoulement des eaux pluviales. 
Subsiste-t-il encore quelque doute sur la signification de l'initiale ? Entrons à l'intérieur du logis : la cheminée principale, qui offre en relief la devise A PLUS, donne le type du grand A couronné qui orne les cheminées et les gâbles de la façade. On ne peut mettre en question Alain VIII ni Alain IX de Rohan, et par ailleurs, puisque la cordelière traditionnelle de la veuve de Charles VIII n'accompagne pas le motif, il faut écarter l'idée du chanoine Le Menée qui. à propos de la chapelle de Rohan, rapporte l'initiale à Anne de Bretagne. Sur la même cheminée l'écu de Rohan-Bretagne indique l'alliance de Jehan II de Rohan  avec la fille de François II. Cette alliance, nous le pensons, doit à plus d'un titre avoir sa place à Josselin; Jehan II possédait une fortune considérable en terres, mais, par suite des voyages, des prises d'armes, des séjours à la Cour, où il put, à Amboise comme à Blois, prendre le goût des habitations luxueuses et le sentiment, des beautés artistiques, ses biens suffirent difficilement à ses dépenses excessives et peut-être ne put-il entreprendre la restauration de Josselin que grâce à la dot de Marie de Bretagne qui, après un très long procès, fut définitivement payée par la duchesse Anne. 
Quand se fut accompli le mariage de l'unique héritière de Bretagne, ayant vu, malgré toutes les promesses royales, ses plus chères espérances anéanties, Jehan II se retira dans sa province d'origine. Alors, dit Dom Morice, il employa ses revenus à réparer ses châteaux et à les embellir (*) . C'est dans cette occupation qu'il termina ses jours à Blain. le 1er avril 1516. Son corps fut transporté à Bon-Repos et placé avec ceux de ses ancêtres. » (*) : Pierre de Rohan, connu dans l'histoire sous le nom de maréchal de Gié, lui donna l'exemple en édifiant le fameux château du Verger, « le plus somptueux de tous ceux d'Anjou )', célèbre par sa galerie vitrée « renfermant tout ce que l'art d'alors avait de plus merveilleux ». Les possesseurs du Verger ne péchaient pas non plus par modestie. Leur devise Duc ne daigne, roi ne puis, Rohan suis-je figura en bonne place dans leur demeure. Rohan-Porhoet et Rohan-Gié n'eurent rien a s'envier. 

Après ce qui vient d'être dit, il semble que la façade septentrionale du château de Josselin doive être datée des dernières années de Jehan II de Rohan, et nous sommes heureux ici d'être d'accord avec un savant inspecteur des Monuments historiques, Mérimée, qui reconnut que ce travail architectural ne pouvait être antérieur au XVIe siècle. Avant lui Viollet-le-Duc l'avait classé dans les dernières années du XV siècle. Si Louis II s'est plu à favoriser en France l'influence de l'architecture classique, à la fin de son règne l'art gothique est en pleine vie.

L'aspect pittoresque des lucarnes flamboyantes de Josselin nous remet de suite en mémoire le palais de justice de Rouen, les hôtels de ville de Compiegne et de Saumur, l'hôtel de Cluny à Paris. Les constructeurs accordent alors aux lucarnes une importance qu'elles n'ont jamais eue en d'autres temps: elles deviennent parfois la partie principale de la décoration et prennent la physionomie de véritables pignons masquant les combles, agrémentes de sculptures, de chiffres, devises et armoiries. Outre les édifices remarquables qui viennent d'être cites, on peut rapprocher le château des Rohan. par les détails comme par le style, d'un grand nombre d'autres monuments du commencement du XVIe siècle, caractérisant la dernière période gothique: les châteaux de Nantes en Bretagne, de Meillant et d'Ainay-leViel en Berry, l'hôtel de Bourgtheroulde à Rouen. le logis du roi à Loches, etc. 

D'ailleurs, il est bon de faire remarquer ici que le style gothique n'a cessé généralement d'être en usage en Bretagne qu'un demi-siècle après que la plupart des autres provinces. et surtout celles du centre de la France, l'avaient abandonné. Cependant, si les traditions de ce style persistaient ainsi, les artistes n'étaient pas insensibles a certaines tendances ni à certaines inspirations qui laissent deviner l'esprit des débuts de la Renaissance. Josselin, d'une si belle exécution d' ensemble contribue à en fournir la preuve. 

Les travaux qui s'effectuaient au château de Josselin les années 1505 et 1506 n'étaient que la continuation d'une œuvre importante, nous en avons aujourd'hui la preuve par de nouveaux documents découverts pendant l'impression de notre article. MM. Chappée et Aubert ont cité deux ordres de paiement pour ces travaux, mais les archives particulières des châteaux de Lanouée et de Kerguehennec nous fournissent d'autres lettres missives du même genre. L'une, datée du 27 mai 1503, porte mandement à Guillaume Le Kerme, receveur des bois et forêts dè Loudeac et Branguilly, de paier soixante et onze livres monnoie au charpentier Guillaume Le Bailly, pour le marché de la charpenterie du corps de maison que a present faisons faire de nostre chastel de Jocelin.  Une autre, du 17 avril 1504, porte mandement de verser deux cent cinquante cinq livres monnoie au connétable de Jocelin, pour employer au fait de l'œupvre et edifice de nostre chastel de Jocelin ". On peut donc définitivement admettre que Jehan II de Rohan exécutait pour Josselin un plan vaste de reconstruction, d'autant que différentes déductions nous portent à croire que les travaux étaient commencés dès 1500.
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Vicomte Hervé du HALGOUET 

 

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SOURCES ET LIENS.

—L'excellent site http://www.patrimoine-histoire.fr/P_Bretagne/Josselin/Josselin-Chateau.htm

—Le site officiel du château http://www.chateaudejosselin.com/fr/

— L'article Infobretagne http://www.infobretagne.com/josselin.htm

—Un historique complet sur le site Mon Finistère :

 https://www.facebook.com/MonFinistere/posts/589389514491642

— CHAPPÉE (Julien) & AUBERT (Marcel) 1910, La date de la façade septentrionale du château de Josselin. Bulletin monumental publié sous les auspices de la Société française pour la conservation et la description des monuments historiques ; et dirigé par M. de Caumont  Vol. LXXIV page 489-493

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k311003/f676.vertical.r=josselin

—GICQUEL (Yvonig), 1994, Jean II de Josselin (1452-1516) ou l'indépendance brisée de la Bretagne, Jean Picollec Coop Breizh.

— GRAND (Roger), 1954 Le château de Josselin, monographie de 64 p. Henri Laurens ed. 

—  HALGOUET (Hervé du), 1911, Discussion sur la date de la façade nord du château de Josselin, Bulletin monumental publié sous les auspices de la Société française pour la conservation et la description des monuments historiques ; et dirigé par M. de Caumont  Vol. LXXV page 489-497

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k31101f/f650.vertical.r=%22jehan%20II%20de%20rohan%22

—MUSSAT ( André), 1983,  Le château de Josselin présenté pendantCongrès archéologique de France. 141ème session. Morbihan. 1983.

— VIOLLET-LE-DUC (Eugène-Emmanuel), 1867, Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle,Ed. Bance-Morel, tome 2 : "Balustrade" page 99.

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/collection/11496-dictionnaire-raisonne-de-l-architecture/

ou Wikisource : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Viollet-le-Duc_-_Dictionnaire_raisonn%C3%A9_de_l%E2%80%99architecture_fran%C3%A7aise_du_XIe_au_XVIe_si%C3%A8cle,_1854-1868,_tome_2.djvu/99

— VIOLLET-LE-DUC (Eugène-Emmanuel), 1868, Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle, Ed. Bance-Morel, tome 6 : "Lucarne" page 190.

https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Viollet-le-Duc_-_Dictionnaire_raisonn%C3%A9_de_l%E2%80%99architecture_fran%C3%A7aise_du_XIe_au_XVIe_si%C3%A8cle,_1854-1868,_tome_6.djvu/193

— VIOLLET-LE-DUC (Eugène-Emmanuel), 1867, Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle, Ed. Bance-Morel, tome 3 : "Chiffre" page 190. https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_raisonn%C3%A9_de_l%E2%80%99architecture_fran%C3%A7aise_du_XIe_au_XVIe_si%C3%A8cle/Chiffre

 

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Published by jean-yves cordier - dans Josselin Rohan
8 octobre 2016 6 08 /10 /octobre /2016 22:19

Sur la piste du "A couronné" de Jehan II de Rohan : I. L'inscription de fondation du pont habité de Landerneau.

 

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Voir :

 

Sur la piste du A couronné de Jehan II de Rohan. II : la façade du château de Josselin.

Le duc et la duchesse de Rohan dans les sablières de l'église de Sizun (29).

 

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Le pont de Landerneau est l'un des rares ponts habités d'Europe.

Les ponts habités étaient très répandus au Moyen Âge, puisque chaque pont, dans toutes les villes d'Europe, était surmonté d'habitations. Les incendies, fréquents sur ces ponts en bois, les nombreux accidents de transport fluvial, les crues, les restructurations des centres-villes et la construction de ponts en pierres ont causé la disparition quasi totale de ces ponts. Seule une poignée de ces ponts habités subsiste aujourd'hui en Europe et répondent encore à la définition du pont habité (habitations, rue passante).

Il existe 35 ponts bâtis en Europe, dont six son toujours habités. Le Finistère en compte deux (Landerneau et Pont-L'Abbé). Le troisième exemple français se trouve à Narbonne. On en trouve trois en Allemagne : La Krämerbrücke (« pont des Épiciers ») à Erfurt, Der Heilig Geist Spital à Nuremberg, et le Vieux Pont sur la Nahe à Bad Kreuznach.

Le Ponte Vecchio, à Florence, n'est pas habité à proprement parler (lieu de résidence). On cite aussi, au Royaume-Uni, le Pulteney Bridge à Bath (Angleterre). Le pont de Lovetch en Bulgarie,s'apparente plus à un pont couvert.

Le pont de Rohan, à Landerneau existe sans-doute dès le XIIe siècle, et certainement en 1336, probablement en bois. Il réunit deux régions du Finistère, le Léon au nord, et la Cornouaille. Il joue donc un rôle économique majeur, et son contrôle, pour un pouvoir politique, est crucial. Tombé en ruine, il  a été reconstruit en pierre en 1510 par Jean II, vicomte de Rohan et de Léon, comte de Porhoët, arrière-petit-fils du connétable Olivier de Clisson, immensément riche et immensément puissant, mais qui ne put jamais réaliser son rêve, devenir duc de Bretagne. Afin de remplir les caisses de sa trésorerie, le pont portait alors un moulin et une pêcherie des saumons remontant la rivière. Les habitations ne s'y  installèrent qu'au XVIIe siècle.

Ce pont, situé à l'embouchure de l'Élorn, est soumis aux marées.  Il repose sur six arches, dont la troisième est la plus ancienne. Les maisons couvertes d'ardoises sur les deux façades sont endommagées par des incendies au XVIIe siècle, puis agrandies par des constructions sur pilotis.

 

 

Le pont habité de Landerneau, photographie lavieb-aile.

Le pont habité de Landerneau, photographie lavieb-aile.

Panneau affiché sur le pont de Landerneau, et exposition extérieure 2016,  photographie lavieb-aile.
Panneau affiché sur le pont de Landerneau, et exposition extérieure 2016,  photographie lavieb-aile.
Panneau affiché sur le pont de Landerneau, et exposition extérieure 2016,  photographie lavieb-aile.
Panneau affiché sur le pont de Landerneau, et exposition extérieure 2016,  photographie lavieb-aile.
Panneau affiché sur le pont de Landerneau, et exposition extérieure 2016,  photographie lavieb-aile.

Panneau affiché sur le pont de Landerneau, et exposition extérieure 2016, photographie lavieb-aile.

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L'inscription de fondation (1510).

 

Cette pierre de fondation du pont se trouvait jadis au dessus de la porte  du moulin que le vicomte Jehan II avait fait bâtir. Elle a été démontée en 1897, après la destruction du moulin.  Longue de 1,50 m et large de 0,40 m, elle est en kersanton, célèbre roche de la rade de Brest qui comporte plusieurs variétés. ici, c'est la variété noire, à grain fin, la plus estimée, celle des plus beaux calvaires sculptés par Roland Doré,  qui a été choisie.  Son inscription en lettres gothiques se déchiffre ainsi:

« : Lan mill VCC X [1510], hault + puissant jehan, viconte de rohan, comte de porhoët / signeur de leon, de la garnache, de beauvoir sur mer et de bleign fist fa[i]re : / ces pontz + mouli~s au devis de m[aître] saget p[rocureur], et jehan le guiryec rece[veur] de ceste ville ».

Ou pour simplifier : « L'an de grâce 1510, hault et puissant Jehan, Vicomte de Rohan, Comte de Porhoët, seigneur de Léon, de la Garnache, de Beauvoir-sur-mer et de Bleing fit faire ces pont et moulin au devis de maître Saget procureur, et Jehan Le Guiryec receveur de cette ville ». 

Marc Saget, le procureur fiscal, et Jehan Le Guiriec (ou Le Guirieuc), le receveur domanial, étaient deux des personnages en vue  de l'administration seigneuriale locale, et le second percevait les revenus locaux et s'occupait du financement du nouveau pont. Jehan II , en échange de la construction du pont et de son entretien, avait fait établir un péage (perçu par le meunier) pour tout bétail, tout cheval et toute charretée qui l'empruntait. 

Une frise constituée des macles de Rohan encadre ce texte. Ces macles (losanges percés en leur milieu d'un autre losange) sont les meubles héraldiques des armoiries des seigneurs de Rohan,  De gueules [rouge] à sept macles d'or, posées 3, 3, 1. Ces armoiries furent adoptées par Geoffroy de Rohan entre 1216 et 1222, puis l'écu de gueules sera bordé d'argent par  Pierre de Rohan dit « Pierre de Quintin » (1456-24/06/1491), baron de Pontchâteau, baron consort de Quintin, seigneur de La Garnache. Ce n'est qu'à partir de 1552 et 1575 que Henri Ier de Rohan portera le nombre de macles à  à neuf (de gueules à 9 macles d'or, posées 3, 3, 3).

 

Sur l'inscription, j' en compte 32 1/2 en frise continue en bas, 3 de chaque coté entre des rinceaux, mais la ligne haute est constituée de 5 macles /un A / 4 macles / un A / 4 macles / un A / 4 macles / un A / 4 macles / un A / 5 macles. Au total, 64 macles 1/2.

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Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

Panneau affiché sur le pont de Landerneau, photographie lavieb-aile.

Panneau affiché sur le pont de Landerneau, photographie lavieb-aile.

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C'est l'un des plus beaux exemples de paléographie gothique. Le texte débute par un deux-points, élégamment inclus dans une sorte de clef.  J'admire l'élégance du X correspondant au chiffre 10, la finesse avec laquelle est sculptée la double barre des-a-, la queue du jambage du -n- , le sigle ressemblant à un + qui remplace par élision la conjonction -et- ; je remarque,  sur la seconde ligne, les lettres conjointes (et), ou encore, à la troisième ligne, pour le mot moulins, le tilde qui remplace le-n- et qui est placé entre le -i- et le  -s- .

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Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

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Je poursuis ce petit jeu d'observation sur la suite du texte. Tous les -a- ne se ressemblent pas, et celui de "puissant- est remarquable. Dans les mots "de la garnache", le -e- de "de" est conjoint au -d-, mais sa boucle vient joliment se fondre avec le -l-. Et cetera.

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Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

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Mais c'est le moment de remarquer le A couronné qui sépare les groupes de 4 macles.  Quelle est sa signification? Je trouve vite la réponse : c'est le "chiffre" ou monogramme du vicomte de Rohan, qui résume en une lettre la fière devise de la famille : "A PLUS". Autrement dit, "Toujours plus haut", une incitation à un surpassement de soi (ou de sa fortune).  C'est plus exactement son cri d'armes : "A plus Rohan". Le cri diffère de la devise par sa brièveté. "Le cri d'armes n'est autre chose qu'une clameur conçue en deux ou trois paroles prononcées au commencement ou au fort du combat ou de la mêlée, par un chef ou par tous les soldats ensemble, suivant les rencontres et les occasions ; le cri était personnel au général de l'armée ou au chef de chaque troupe." (source).

 

La devise de Rohan deviendra plus tard (j'ignore quand) la fameuse formule "Roi ne puis, Duc ne daigne, Rohan suis". 

La couronne fleuronnée qui coiffe la lettre A est crénelée par un certain nombre de perles, mais de façon trop imprécise pour dire s'il s'agit d'une couronne héraldique de comte ou de vicomte. 

La lettre A est formé par des morceaux de bois écotés. Ce n'est pas un hasard, une fantaisie décorative, comme nous le verrons dans l'article suivant. Et ce n'est certainement pas un hasard non plus si la barre transversale du A n'est pas droite, mais est cassée en V. En effet, elle forme ainsi une macle. 

Les macles.

 Les macles (du latin macula = tâche) sont, en minéralogie, une inclusion sombre de carbone ou d'argile formant un X ou une croix en section au sein d'une variété d'andalousite nommée chiastolite (du grec kiastos = marqué d'une croix) . 

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Lame mince de schiste à andalousite : http://espace-svt.ac-rennes.fr/applic/huelgoat/huelg-6.htm

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Voir l'image du blog de Pierre Jézequel provenant des Salles de Sainte-Brigitte http://rosquelfen-pj.blogspot.fr/2013_01_01_archive.html

 

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Il existe de très nombreux gisements dans le monde, mais particulièrement sur les terres du seigneur de Rohan, en Finistère, (Parc-au-Duc,  à Plourin-lès-Morlaix ;  Le Mur, Plouigneau) et en Morbihan, au lieu-dit "Salle de Rohan" (Sainte-Brigitte, Pontivy, Morbihan). Ce site célèbre pour ces grands cristaux de chiastolite développé dans les schistes ordoviciens par thermométamorphisme du granite de Rostrenen est si abondant en "pierre de macle" , prismes de section presque carrée, à tel point que les vicomtes de Rohan placèrent sept macles d'or sur leur blason (Louis Chauris, "Minéraux de Bretagne", Les éditions du Piat, 2014 ) (Marc Gilbert de Varennes a écrit en 1640 : « Vers le chasteau des Salles sont tous marquez de temps immémorial de ces figures de macles, et que ca esté de là que les premiers Barons de ces terres fort nobles ont chargé leurs armoiries ».) :

"Le château des Salles de Rohan, dit aussi Penret, ou encore Pen-Raithé, situé dans la forêt de Quénécan, à la limite de Sainte-Brigitte et Perret, édifié initialement sur les ruines d’une motte féodale par un vicomte de Rohan, Alain Ier de Rohan, en 1128, est reconstruit à la fin du XIVe siècle par Alain VIII de Rohan. Le terme « Salles » vient de l'ancien français et désigne un logis. Le château des Salles de Rohan appartient au réseau de forteresses des Rohan (Pontivy, Josselin, etc). Il contrôle un site connu très tôt pour la fabrication du fer : on voit encore, sur la plage de l’étang, des concrétions de cristaux d’oxyde de fer, les fameuses “macles” qui ornent le blason des Rohans. Minerai et charbon de bois issus de la forêt de Quénécan alimentèrent le premier haut fourneau de Sainte-Brigitte créé dès 1440 par Alain IX de Rohan. "

http://csem.morbihan.fr/dossiers/sigm/FicheSiteGeol18.htm

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https://fr.wikipedia.org/wiki/Macle_(cristallographie)

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Geoffroy de Rohan adopta entre 1216 et 1222, les armes  « De gueule à sept macles d’or, trois, trois, un ».

Le blason actuel  De gueule à neuf macles d’or, trois, trois, trois, aurait été adopté par Henri 1er de Rohan entre 1552 et 1575.

On peut penser, bien que j'ignore quelle raison a conduit Geoffroy a adopté les macles sur son écu, que ses descendants y ont vu une marque typique et emblématique du sous-sol de leur fief, et même, plus tard, de la richesse économique que leur confère le contrôle et le développement de la sidérurgie et de l'exploitation des fourneaux de fonte, et des forges. Selon Jean Ogée (1779), on compte 30 "grosses forges" ou "forges à bras" (parce qu'on les transportait d'un endroit à un autre) dans la Vicomté de Rohan et la forêt de Loudéac en 1460. Cette dernière comptait en 1400 plus de 40 000 arpents de terrains plantés en futaie et taillis.

Dès lors, le A en branches écotées autour d'un losange central peut être considéré comme une référence à cette activité économique, source de prospérité.

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Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

Inscription de fondation du pont de Landerneau (1510), photographie lavieb-aile.

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Une autre inscription de 1510 : la chapelle de Bonne Encontre à Rohan.

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 La chapelle Notre-Dame de Bonne-Encontre, édifiée par Jean II de Rohan sur le passage d'un pont pour remplacer l’ancienne chapelle du premier château fort des Rohan de 1104, fut commencée en 1510. Chapelle castrale, elle desservait la forteresse qui s’élevait sur l’autre rive de l’Oust.  Elle conserve, sur sa façade extérieure, une inscription gravée lors de sa fondation et, sur ses contreforts, des « A » majuscules faisant référence à la devise des Rohan. L’intérieur rappelle aussi la puissance des Rohan puisque leurs armoiries sont représentées sur les clefs de voûte.

Je n'ai pas pu visiter l'intérieur. Je me base sur les descriptions en ligne « les clefs de voûte sont ornées des armoiries maclées et du fameux A couronné ». Les consoles de pierre des piles est de la croisée sont agrémentées par des armoiries : l’une, « de gueules à 9 macles d’or », blason des Rohan, est confortée par une deuxième « mi-partie de Rohan, six macles et mi-parti de Bretagne, deux hermines (rappelant l’union de Jean II avec Marie de Bretagne) », Mussat, André, art. cit., 1997, p. 240-241 ; Gicquel, Yvonig, op. cit., p. 450-453.

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Chapelle Notre-Dame-de-Bonne-Encontre, Rohan. Photographie lavieb-aile.

Chapelle Notre-Dame-de-Bonne-Encontre, Rohan. Photographie lavieb-aile.

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"Cette chapelle en granit et en schiste, de style gothique, comprend une nef, un transept et une abside polygonale flanquée au nord d'une sacristie. Cette sacristie ouvre directement sur le chur par une large arcade qu'une clôture en bois de châtaignier coupe sur la moitié de sa hauteur. Dans celle-ci sont ménagées deux portes, l'une donnant accès à la sacristie, l'autre fermant l'escalier de la chaire. L'intervalle est rempli par deux panneaux ajourés et sculptés, qui en encadrent un autre en deux parties également ajourées et sculptées, au-dessous de ces panneaux, lambris de serviettes. Sur le transept nord, tourelle contenant un escalier à vis menant au comble. L'entrée principale est sur le côté sud de la nef et comporte un arc plein cintre mouluré accompagné d'une accolade concentrique avec fleuron et crochets. Les armoiries situées à l'extérieur sous les glacis supérieurs des contreforts, ont été bûchées à la Révolution." http://www.loomji.fr/rohan-56198/monument/chapelle-notre-dame-de-bonne-encontre-saint-samson-42385.htm

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Porte de la Chapelle Notre-Dame-de-Bonne-Encontre, Rohan. Photographie lavieb-aile.

Porte de la Chapelle Notre-Dame-de-Bonne-Encontre, Rohan. Photographie lavieb-aile.

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L'inscription de sa fondation est gravée en lettres gothiques et vers rimés sur une pierre de la façade sud, à gauche de la porte :

« Lan que dist fust mill cinq centz X 

 Jehan de Rohan me fist bastiz 

 Et rediffier a honneur

 Hucheloup en fust le miseur

Et affin que mon non ne celle 

 De bone encontre lon mapelle ». 

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Inscription de fondation de la Chapelle Notre-Dame-de-Bonne-Encontre, Rohan. Photographie lavieb-aile.

Inscription de fondation de la Chapelle Notre-Dame-de-Bonne-Encontre, Rohan. Photographie lavieb-aile.

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Le vicomte de Rohan possédait  le cinquième de la Bretagne, avec des revenus annuels de 7500 livres liés à ses fiefs  :

  • Le Porhoët, avec les châteaux de Pontivy, de La Chèze, de Rohan et de  et de Josselin, et l'enclave de Lohéac.
  • le Léon, avec les châteaux de La Roche Maurice et de la Joyeuse Garde (La Forest-Landerneau),
  • La Presque-île de Crozon (auparavant possédée par les seigneurs de Léon), ce dont témoigne encore les macles des armoiries de la commune,
  • le fief de Quemenet (autour de Pluguffan), en Cornouaille —également une ancienne possession des seigneurs de Léon—,
  • Le Goelo
  • la région de Bourgneuf en Finistère,
  • Les "Fiefs du Léon" (Brangolo, Inzinzac)
  • Fresnay et Blain, avec les chateaux du même nom,
  • Les Marches, en Vendée ou Bas-Poitou avec  le château de la Garnache, possession d'Olivier de Clisson, et la seigneurie de Beauvoir-sur-mer.

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Carte : Copyright Y. Guicquel P. Morvan, en ligne https://abpo.revues.org/63

 

 

 

"Jean II de Rohan est qualifié de « premier baron de Bretagne » par les États de Bretagne réunis en 1486 : il est donc le deuxième personnage du duché après le duc François II en personne. Non seulement ses domaines couvrent un cinquième du duché, outre quelques possessions dans le royaume de France, mais il est apparenté à la famille des Montfort, détentrice du trône de Bretagne depuis plus d’un siècle. En effet, son grand-père maternel n’est autre que le duc Jean IV ; quant à son épouse Marie de Bretagne, elle est elle-même la fille du duc François Ier et belle-sœur du duc François II. Jean II de Rohan n’était donc ni plus ni moins que le beau-frère du duc de Bretagne lorsque la guerre fut déclarée en 1487. Pourtant, les relations entre les deux hommes furent le plus souvent orageuses. Entre 1470 et 1488, François II confisque à quatre reprises les biens du vicomte et le détient même dans ses geôles, pendant plus de trois ans, pour complicité de meurtre. Il faut savoir que le grand projet de Jean II de Rohan est de faire accéder sa lignée à la couronne ducale et qu’en l’absence d’héritier mâle, il envisage un mariage entre son fils et la fille du duc, la jeune Anne. " D'autre part, Il était, avec Jean de Chalon, prince d'Orange, l'héritier présomptif de la duchesse Anne, jusqu'à ce que celle-ci mette au monde ses enfants. 

Lire : Jean Kerhervé Noblesses de Bretagne: du Moyen âge à nos jours page 106

Image L. Guitton 2007 https://abpo.revues.org/63

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En 1510, année de deux inscriptions lapidaires  étudiées, Jean II de Rohan a 58 ans, et les jeux sont faits.

Son fils aîné François, qu'il voulait unir à la duchesse, est tombé à la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier en juillet 1488. La même année, le duc s'empare du château de Josselin et le démolit

partiellement ; il ne lui sera rendu que par Anne de Bretagne, et il le transformera en château Renaissance entre 1490 et 1510.

Anne de Bretagne est devenue duchesse, puis a épousé le roi Charles VIII en 1491, et Louis XII en 1499, a donné naissance la même année à sa fille Claude, qui épousera en 1514 François Ier. En 1505, c'est Jehan II qui a accompagné la reine Anne dans la visite de son duché, notamment à Brest, Le Folgoat et Morlaix. En 1504, le roi lui octroie le renouvellement du droit de billot (produit d'une taxe sur les boissons) pour reconstruire ses villes et places-fortes (La Roche-Maurice  a été démantelé en 1489 par les troupes françaises). Après la mort de son second fils Jean en 1505, son principal héritier est alors Jacques de Rohan (qui se mariera mais décédera sans descendance). Son cinquième fils, simple d'esprit, devient malgré tout (et sous la tutelle effective de l'abbé de Daoulas Jean de Largez)  évêque de Cornouaille (Quimper) en 1501 mais sa consécration a lieu en avril 1510. C'est  en 1507 qu'il fait bâtir à Quimper le palais épiscopal (la Tour de Rohan et son escalier en palmier).

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SOURCES ET LIENS.

— Ponts habités :

https://www.youtube.com/watch?v=uyrdfSeN8Wk

http://www.skyscrapercity.com/showthread.php?t=1658562

http://fr.topic-topos.com/pierre-gravee-landerneau

— GICQUEL (Yvonig), 2014 Jean II de Rohan oul'indépendance brisée de la Bretagne, Coop Breizh, Jean Picollec Ed. 

— GUITTON (Laurent)  Un vicomte dans la cité : Jean II de Rohan et Dinan (1488-1516) p. 7-37

https://abpo.revues.org/63

—Site Découvrir Rohan-Histoire.

http://www.rohan.fr/histoire_machine.html

— Histoire de Rohan : http://www.rohan.fr/pdf/histoire_de_rohan.pdf

http://www.tourisme-pontivycommunaute.com/Fiche/Detail/340/Preparer-son-sejour~Patrimoine-et-decouvertes~Patrimoine-culturel/CHAPELLE-NOTRE-DAME-DE-BONNE-ENCONTRE/

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Published by jean-yves cordier - dans Rohan Landerneau

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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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