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23 février 2011 3 23 /02 /février /2011 08:44

 

Du noir, et caetera...

 

Je l'ai rencontré sur mon chemin , il était noir, il était beau, il sentait bon le panicaut, c'était un scarabée tout à fait commun pour quelqu'un qui, déjà satisfait de reconnaître l'ajonc du genêt, ne s'aventure pas à distinguer le hanneton de la scarabosse.

 

 

  DSCN2694c

 

 

   Il me plaisait, avec ses pattes en réglisse haribo ; mais je me méfiais. N'était-ce pas quelque forme du Chevalier Noir, quelqu' avatar du Dark Knight, quelque métamorphose semblable à celle qui, un jour, transforma Kafka en cloporte, mais qui me confrontrait au noir Méléagant, cavalier sans peur ni conscience qui eut l'impiété de déranger le roi Arthur en sa Cour et lui dérober sa tendre Genièvre ?

   Ne rencontrais-je pas le sinistre gardien de la fontaine magique qui, dans Yvain ou le Chevalier au Lion, combattit Calogrenant et lui vola son cheval ? Certes j'étais venu à pied., et je m'étais bien gardé de verser de l'eau sur la margelle du lavoir, mais ces gens-là sont ombrageux...

 

 

   Non, ce n'était qu'un noir scarabée franc d'allure, paisible de moeurs et de plaisante compagnie, qui me procura la bile noire, le pied sombre, l'humeur saturne et ce tempérament  doucement chagrin qui caractérisent, selon le problème XXX du Pseudo-Aristote, les grands esprits.

 

   Mais parmi les princes ténébreux qui hantent les chemins et les pelouses, il n'en est qu'un à ne pas attendre les temps  de Pentecôte et d'Ascension des Perceval et des Gauvain, et qui affrontent les déchaînements glacés de l'hiver : le Crache-sang.  Ne pensez-pas que ce nom désigne une phtisique étique et décharnée, une hémoptysique Dame aux Camélias, une sidéenne rongée de consomption et  que sa contagion condamne à errer tels les  cacous de jadis dans la poussiére des route.

                                                                      Si vous la rencontrez bizarrement parée

                                                                 Trainant dans le ruisseau un talon déchaussé

                                                                 Et la tête et l'oeil bas comme un pigeon bléssé

                                                                 Messieurs ne crachez pas de jurons et d'ordures

                                                                 Au visage fardé de cette pauvre impure 

                                                                 Que Déesse Famine a par un soir d'hiver

                                                                 Contrainte de relever son jupon en plein air....

... car il y aurait méprise et ce serait ce Chrysoméle qui, pour se défendre, vous cracherait un jus écarlate d'hémolymphe par la bouche et par les articulations. Ce Timarcha tenebricosa Fabricius, 1775 serait un hidalgo, un aristocrate puisque son nom de timarque lui assigne la sprezzata desinvoltura flégmatique et la démarche nonchalante et distinguée des notables grecs, selon l'étymologie proposé par Wikipédia. C'est un coléoptère remarquable par sa grande taille ( 12 à 19 mm), son incapacité à voler en raison de ses élytres soudées et de son caractère aptère, son attirance pour les milieux nitrophiles où poussent le gaillet et l'ortie, et surtout pour la précocité de ses apparitions dés le mois de mars ( mon observation le 20 février sur le sentier côtier de Tréfeuntec est donc une primeure). Quand à ce que j'ai nommé ses pattes en réglisse haribo, ce sont ses tarses particuliérement élargies fonctionnant comme des ventouses, dont le mâle se sert pour aggriper la lisse carapace de sa tendre épouse lors de l'acte de chair.

 

 

 

 

 

  Mais si j'aime le noir en son plein, je l'aime aussi en  mi-partie : j' entendais que l'appartement du 5 bis, rue de Verneuil avait été décoré par Serge Gainsbourg avec un pavement de carrelage blanc rompu de carrés noirs, et s'il adorait ces affrontements de contraires, je faisais aussi mes délices, à l'âge où ces jeux se tolèrent, de sauter à cloche-pied sur des alternances de cases noires et de cases blanches, sur ces marelles opportunes que les trottoirs, parfois, nous réservent.

 

   Le Noir et le Blanc en partition? J'en appelais à un chevalier digne de clamer kérigmatiquement ces couleurs : Fuligule morillon.

 

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Published by jean-yves cordier

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  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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  • jean-yves cordier
  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)

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