Les six carvelles sculptées sur la façade de l'église Notre-Dame de Croas-Batz à Roscoff, de son ossuaire et de la chapelle Saint-Nicolas.
.
Voir aussi sur les carvelles et autres embarcations sculptées :
- à L'église Saint-Nonna à Penmarc'h et ses navires sculptés
- à l'église Saint-Raymond d'Audierne
- à la chapelle Saint-Yves et à l'église Saint-Collodan de Plogoff ; ou sur les murs de la tour carrée de Saint-Guénolé.
- à l'église de Confort-Meilars
.
Voir aussi sur Roscoff :
http://www.lavieb-aile.com/2017/07/les-six-sibylles-de-la-tribune-1606-de-l-orgue-de-l-eglise-n-d.de-croas-batz-a-roscoff.html
.
.
Un patrimoine mis en valeur par les services de la Région et de la Ville à destination des touristes.
.
Roscoff, avant-port de Morlaix à l'entrée sud-ouest de sa Baie, conserve de son passé maritime du XV et XVIe siècle un témoignage précieux : les sculptures en bas-relief de sept navires sur les murs de l'église, de l'ossuaire et d'une chapelle, commandées en témoignage de donation par leurs riches armateurs.
Un cartel apposé devant l'église en donne une présentation précieuse sous le titre "Les vaisseaux de pierre", accompagnée d'une liste et d'un schéma.
On y lit :
"L'église Notre-Dame de Croas-Batz est l'un des rares édifices religieux du Nord-Finistère à posséder des vaisseaux taillés dans la pierre, témoins d'une prospérité remarquable au XVIe siècle.
Cette décoration extérieure de l'église confirme ainsi la vocation maritime des Roscovites, recommandant leur vaisseaux à la protection divine contre les "périls et fortunes de mer"
Puis vient une description, extraite de Choses et gens de Bretagne, de Louis Le Guennec (1937), des quatre vaisseaux de l'église, de celui de l'ossuaire et de celui de la chapelle Saint-Nicolas. J'en donnerai le texte plus bas.
Enfin, le schéma annote sur le plan de l'église la localisation des sculptures et donne le relevé des quatre premières.
.
Je reprendrai ici l'ordre de description de ce panonceau.
.
.
.
Ces six navires ont des caractéristiques communes : ce sont tous des bâtiments à trois-mâts (mats de misaine, grand-mât, mât d'artimon) sans compter le mât de beaupré, à fort château arrière (et un discret gaillard), faisant voile sous voilure réduite car seule est établie la voile carrée d'avant (misaine). Ils sont donc représentés en manœuvre, soit de départ, soit d'atterrissage et d'entrée de port. À Roscoff, cela correspondrait au moment où ils passent devant la Pointe Sainte-Barbe.
Au sommet de chaque mât se voit une sorte de chapeau soit en demi-tonneau, soit conique, qui correspond moins à une hune, (plate-forme intermédiaire du bas-mâts des navires pour servir de fixation et de renvoi pour les haubans de mât de hune, ou de plate-forme pour l'équipage pour exécuter des travaux dans la mâture), qu'à une gabie, position dominante aménagée en poste d'observation pour la vigie par un grand panier ou gabion. C'est cette cage qui adopte, sur certaines illustrations de l'époque, une forme conique.
.
.
Dans un manuscrit du XIVe siècle, Tractatus de Sphaera de Johannes de Sacrobosco, (Bibl. Mazarine Ms 0643 f. 009), représentant une nef entrant dans un port, on voit une vigie (ou plutôt un pilote) effectuant le relèvement d'un amer du haut d'un nid-de-pie.
.
.
A la différence du bordé à clins de la cogue de cette enluminure, à un seul mât, au gaillard d'avant plus haut que le château arrière, au gouvernail d'étambot suspendu, la coque des navires roscovites est lisse ("à carvel, cf. infra), mais renforcée par deux forts listons.
Le mât d'artimon porte un espars oblique (parallèle aux étais des mâts) dont il est difficile de dire s'il s'agit de l' antenne ou vergue d'une voiles latine (permettant de bien remonter au vent, et équipant souvent l'artimon) ou de la vergue d'une voile carrée, fort efficace par vent portant.
Enfin, ces navires portent de longs étendards, qui flottent vers l'avant puisque ces nefs naviguent vent arrière. On y lisaient peut-être autrefois des marques d'armement, ou le nom du bateau.
Ils doivent déplacer de 30 à 50 tonneaux, et sont destiner au "roulage", transport de marchandise vers Bordeaux et l'Aunis-Saintonge pour y chercher du vin, vers Cadix ou Bilbao, ou vers l'Angleterre et l'Europe du Nord.
Ces navires sont décrits comme des carvelles. Mais la définition de ce terme est floue. Augustin Jal, dans son Glossaire nautique de 1848, définit les mots Carveel, Carveille, Carvelle Carvel-work ou "bordage à carvelle", Carveil-ship, Clou à carvelle, et Karveel.
Augustin Jal illustre le terme en citant Antoine de Conflans (Les faits de la marine et navigaiges, vers 1515) , dans un sens bien approprié aux navires de Roscoff : "sont navires à carvelles, allant en marchandises à Bordeaux et à La Rochelle, etc."
Le dictionnaire Godefroy donne : Caruelle "bateau" (1438).
Caravelle 2 : http://micmap.org/dicfro/search/dictionnaire-godefroy/caravelle
"A Calais arriva une petite carvele, non sachans ceulz de dedens que le duc de Warvick y fust "(Wavrin, Recueil des croniques et anchiennes istories de la Grant Bretaigne, a present nommé Engleterre, II, 203, vers 1455-1475)
La première attestation absolue du substantif « caravelle » remonte à 1439. Le mot apparaît sous une forme probablement populaire, avec syncope du /ə/, dans un document conservé à Lille, qui concerne la comptabilité des ducs de Bourgogne. Il s'agit des dépenses faites pour une caravelle, construite à la manière portugaise, commandée par Philippe le Bon, laquelle était sortie d'un chantier près de Bruxelles en 1439 (Degryse 228-229) : À Jehan Perhouse et ses compaignons, maistre de faire vaisseaulx de mer des pays de Portugal, pour don à eulx faits par MS [Philippe III le Bon, duc de Bourgogne] quant ils ont eu parfait une caruelle, qu'ils ont faite par l'ordonnance d'icellui S, après ce qu'ils l'ont boutée en l'eaue, xviij francs, et au maistre des escluses de Brouxelles, pour avoir tenu l'eaue de la rivière haulte durant ce que ladite caruelle y a esté........xlviij sols (Comptes Lille L., volume 1, page 356, in DMF2 = Jal 2 = Gdf s.v. caruelle). http://micmap.org/dicfro/search/dictionnaire-godefroy/caravelle
Jacques Paviot donne tous les détails sur cette commande de plusieurs carvelles par le duc de Bourgogne Philippe le Bon à un maître-charpentier portugais nommé Joao Afonso a Bruxelles en 1438-1439. Elles furent construites dans un chantier de Bruxelles et gréées à L'Écluse.
Par ailleurs, la construction " à carvel " définit un principe de construction "membrure première " pour un assemblage à franc-bord, opposée à l'assemblage à clins. Au Moyen Âge, les coques étaient construites à partir d'un assemblage de bordés renforcé ensuite de membrures. À la fin du XVe siècle, une nouvelle technique est apparue, accompagnant le développement des caravelles, celle qui consiste à procéder dans l'ordre inverse. Les membrures assemblées en premier dans la quille, les bordés venaient les garnir ensuite.
"La seconde moitié du XVIe siècle correspond, en matière d’architecture navale, à la fin d’une phase de transition débutant au milieu du XVe siècle. Cette période, au cours de laquelle sont apparus les voyages océaniques, voit en premier lieu l’apparition du “ navire ” à trois mâts, succédant à la “ nef ” médiévale à mât unique. Par ailleurs, les régions bordant l’océan Atlantique connaissent un bouleversement dans les méthodes de construction des navires avec le passage d’une construction à clin “ bordé premier ”, d’origine scandinave, à une construction à franc-bord “ membrure première”, d’origine méditerranéenne ; les modalités de l’adoption de cette technique ne sont pas précisément connues, mais donnent naissance à une tradition de construction dite “ ibéro-atlantique ” conforme aux principes généraux de la construction méditerranéenne, mais qui s’en distingue cependant par quelques caractéristiques architecturales." Anne Gérardot 2004 http://theses.enc.sorbonne.fr/2004/gerardot
Au total, les différences avec les caravelles destinées aux traversées de l'Atlantique ne sont pas évidentes pour moi, et j'ai consulté avec intérêt le site qui les décrit :
http://www.mandragore2.net/dico/lexique2/lexique2.php?page=caravelle
Ou bien cette description d'un "Model of a Hanseatic League carvel-built ship de 1470 :
http://www.modelships.de/Verkaufte_Schiffe/Hanse_Schiff_1/Hansa_ship.htm
.
.
1. LE PORCHE OCCIDENTAL.
Le porche à la base de la tour fut édifié vers 1550.
"La carvelle se trouve entre deux niches surmontées d'une accolade au-dessus du porche Ouest. Elle est dominée par un petit personnage - l'armateur peut-être - dont on croit qu'il tient dans sa main gauche une bourse d'écus. La coque est dépourvue de tonture, c'est-à-dire que le pont est bien droit. La tonture est l'arrondi du pont de façon à ce que les paquets de mer s'échappent du bateau. Elle porte deux bordés en forte saillie, ce sont peut-être les préceintes de bordé "est à francs bords ". Les préceintes sont des pièces de bois qui renforcent la structure du bateau longitudinalement. Elles sont bien visibles. La guibre à l'avant est une pièce de bois reliée à la pièce d'étrave et qui supporte le beaupré (ou bout dehors) et la figure de proue. Ici, la guibre porte une petite tourelle dissimulant partiellement le beaupré. L'arrière légèrement relevé et peu voûté se termine par un tableau. Un safran maintenu par des fermetures aux dimensions exagérées est fixé sur l'étambot qui est un morceau de bois fixé à la voûte et à la quille. La mâture est constituée par un beaupré, un mât de misaine portant un phare carré, un grand mât et un mât d'artimon (ou mât de tape-cul) avec une vergue apiquée. C'est sur la vergue que la voile est gréée - le phare carré est une voile carrée. Les haubans munis d'enflêchures sont fixés sur le porte-haubans en légère saillie sur les flans sur tribord. Le "porte-haubans" s'appelle aussi "cadene de haubans". Les haubans soutiennent le grand mât, le mât de tape-cul et le mât de misaine. Entre le grand mât et le mât de misaine, sous le hunier (nid de pie) un étais soutient le grand mât sur l'avant et l'empêche de cabaner vers l'arrière. Des rides d'étais du mât de misaine sont bien visibles sur le beaupré. Une hune coiffe chaque mât. On l'appelle aussi "nid de pie". On aperçoit une flamme au haut du mât de misaine." (?, sur Infobretagne)
"Surmontant le porche, un vaisseau cingle, misaine tendue. Un petit personnage tenant une bourse est campé sur la hune centrale. Maître après Dieu de son navire, l'armateur voulait-il ainsi indiquer qu'il ferait volontiers largesse de ses écus au profit de l'église si la protection d'En-Haut gardait nef et cargaison de toute mésaventure." (Le Guennec, 1937)
.
Porche et clocher-tour de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Sur la corniche sont alignées les deux niches de chaque coté, avec leurs accolades à crochets et retombant sur des masques, et la nef centrale.
Les niches accueillent des anges scutifères, aux cheveux en boules.
.
Porche et clocher-tour de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Carvelle du porche occidental de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Le personnage perché sur la gabie du grand-mât est peut-être l'armateur tenant une bourse, comme le pensait Le Guennec, Il tiendrait alors aussi son chapeau.Mais c'est peut-être aussi le pilote car la forme triangulaire qu'il tient dans la main gauche peut correspondre à un instrument de navigation (comme sur l'enluminure montrée plus haut). Ou bien un matelot qui fait des signaux.
.
La vigie de la carvelle du porche occidental de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
II. LE PIGNON DE LA CHAPELLE LATÉRALE SUD.
"Un trois-mâts orné à sa proue d'une grosse tête d'animal fait route vers l'Occident. Le négociant qui fonda cette chapelle n'avait pas oublié d'y joindre l'image de son navire, afin d'attirer l'attention du Tout-Puissant sur ses entreprises commerciales." (Le Guennec, 1937)
.
.
Il faut d'abord décrire trois éléments disposés sur une corniche à rinceaux. La niche centrale, à accolade sommé d'un fleuron, et rehaussée à son pied d'un écu. A sa gauche, un phylactère plié pour former une boucle autour d'un cercle central, orné peut-être d'un triskel. L'inscription de cette banderole n'est plus lisible. El enfin, à droite, la carvelle orientée avec la proue tournée vers la gauche.
Ce bâtiment armé de trois-mâts est sculpté en deux blocs de pierre, l'un rectangulaire et l'autre en trapèze. Il possède un château arrière, et des sabords. Une voile carrée, la misaine, semble double car elle est coupée par la ligne de jonction des deux blocs. Le beaupré, légèrement apiqué, sert de point d'origine à une forme en S dirigée vers l'angle de la voile : c'est cette forme qui a été interprétée comme une tête d'animal à la proue, par Le Guennec.
Carvelle du pignon de la chapelle sud de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Carvelle du pignon de la chapelle sud de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
III. LA CARVELLE DE L'ARRIÈRE DE LA FAÇADE ORIENTALE, MUR DE LA SACRISTIE.
"Cette carvelle est de construction plus récente, début du XVIIème siècle, quand le nouveau chevet de l'église a été construit (comprenant le chœur et la sacristie). Elle est très bien conservée. Ce peut-être un navire de convoi à cause des sabords visibles entre les préceintes qui suivent l'arrondi de la coque. Le château avant relevé se termine par une guibre dépouillée. Le château arrière présente une voûte importante. Le safran d'étambot est bien visible. La mâture est composé de mât de misaine avec phare, un grand mât avec enfléchures et un mât de tape-cul ou d'artimon portant une vergue apiquée. Trois hunes coiffent les mâts." (cité dans Infobretagne)
"Un de ces compères (de l'armateur du navire de la chapelle sud) imita ce pieux exemple et fit tailler la figure de son vaisseau d'un galbe admirable sur l'arrière de la sacristie. Ce navire devait avoir des dimensions supérieures à celles des autres bâtiments roscovites car il possède une galerie de poupe." (Le Guennec 1937)
.
Carvelle de la façade orientale du chevet, mur de la sacristie de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
IV. LA CARVELLE DE LA FACE NORD DU CLOCHER.
"Sur la face nord du clocher, un armateur, qui avait sans-doute notablement contribué aux frais de l'édifice, est représenté en costume de gentilhomme Henri II, bourse à la main, rappelant l'argent généreusement consacré à ce louable dessein. A ses cotés, un vaisseau à trois-mâts — le sien — fait route vers l'Est." (Le Guennec, 1937)
.
Carvelle de la face nord de la tour-clocher, l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Entre les deux fausses-gargouilles en canons, et sous une corniche cantonnée de masques, le navire est à la droite de deux personnages.
À gauche, un homme marchant vers l'ouest et coiffé d'un très large chapeau tient dans ses bras écartés deux objets verticaux. Je me plais à voir dans celui de sa main droite un poisson.
A sa droite, un acrobate fait un saut en grand écart, en empoignant ses chevilles dans cette posture pleine de jovialité qui est souvent retrouvée sur les ornementations sculptées du haut des églises, et qui est héritée des modillons romans.
Le vaisseau de pierre est semblable aux autres, et un ou plusieurs matelots se dissimulent peut-être dans la gabie principale qui est cylindrique.
Carvelle de la face nord de la tour-clocher, l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Carvelle de la face nord de la tour-clocher, l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Carvelle de la face nord de la tour-clocher, l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Carvelle de la face nord de la tour-clocher de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
V. LA CARVELLE DU PIGNON NORD DE L'OSSUAIRE.
Cet ossuaire étant daté du XVIIe siècle, cela précise la datation de ce vaisseau de pierre :
"Deux ossuaires forment les angles de l'enclos.
L'un est daté du 16e siècle, à droite en entrant dans l'enclos. Il est très sobre.
L'autre est daté du 17e siècle, à gauche en entrant dans l'enclos et retient notre attention.
Il est admirablement ajouré d'un double rang de balustres. L'accès bizarrement se fait par une porte cintrée située à l'extérieur de l'enclos.
Sur la seconde face extérieure on distingue un bas-relief représentant une caravelle qui illustre la prospérité du commerce maritime autrefois. C'est un ex-voto." (Petit patrimoine)
http://www.petit-patrimoine.com/fiche-petit-patrimoine.php?id_pp=29239_1
"Le bâtiment sculpté sur le pignon nord de l'ossuaire possède trois mâts sommé de hunes. Selon l'usage, seule sa voile de misaine est déployée, mais elle est surmontée d'une vergue et d'un drapeau, tandis qu'un second étendard est arboré au mât d'artimon." (Le Guennec, 1937).
.
.
La carvelle de l'ossuaire de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Cette carvelle fait route, à une allure portante, vers l'occident. Ce qui frappe, c'est la hauteur du mât de misaine, prolongé au dessus de la hune par un second mât, celui qui arbore le pavillon de l'armement. Mais surtout, nous sommes intrigués par la boule ovoïde posée, comme une pleine lune, sur le sommet du grand-mât, et qui est coiffée elle-même par une construction pyramidale que nous ne pouvons plus identifier.
Le plus curieux, ce n'est certainement pas ce gigantesque ballon, dont la taille dépasse la distance allant "de la quille à la pomme du mât", pour reprendre le titre du dictionnaire de Marine du capitaine Paasch (1885). Non, le plus curieux, c'est que cette énigme, proposée depuis plus de trois siècles par le sculpteur, n'ait pas excité d'avantage la curiosité des roscovites, ou des millions de visiteurs de la "Perle du Léon".
Est-ce une allusion au nom du navire ? A celui de son armateur ? Un renvoi aux circonstances d'un vœu, bien que rien n'affirme que, comme l'affirme le site du Petit patrimoine, ces vaisseaux de pierre ne soient des ex-voto ?
Cette sphère approximative portait-elle un blason ? Une inscription ?
Je l'observe longuement, assis, laissant le soleil faire jouer sa lumière sur ses doux volumes avant de gagner, lui aussi, l'occident. Mais cet œuf qui vire alors au rouge ne se décide pas à éclore.
Je reviens à zen le lendemain matin. Les goélands lancent leurs koan, koan dans le ciel tandis que les heures passent. Un vieux s'assied sur le même banc que moi ; il éternue : Hua tou !
La montgolfière chauffée à blanc par le fourneau de la hune refuse de décoller. Le télégraphiste qui fait l'équilibriste à son sommet refuse de tomber.
Le soir, c'est moi qui laisse tomber. Est-ce que je lui en pose, des questions, à ce citron, à cet oocyte, à cette bulle sans texte, à cette coquille pondue ici par un dinosaure antédiluvien ? Sait-il au moins où se trouve la virure d'hiloire des barrots de gaillard ? Et le Grand Vistemboir ?
.
La carvelle de l'ossuaire de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
La carvelle de l'ossuaire de l' église Notre-Dame de Croas-Batz. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
VI. LA CARVELLE DU PIGNON DE LA CHAPELLE SAINT-NICOLAS.
"La chapelle Saint-Nicolas est aussi ornée d'une superbe carvelle, fort bien taillée pour la course, aux mâts munis d'enflèchures, de dunes rondes, pourvue d'une galerie et d'une lanterne de poupe." (cartel d'information)
Le bas-relief occupe trois blocs de pierre différents.
Trois petits drapeaux flottent sur les trois gabies.
.
La carvelle du pignon de la chapelle Saint-Nicolas à Roscoff. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
La carvelle du pignon de la chapelle Saint-Nicolas à Roscoff. Photographie lavieb-aile juillet 2017.
.
Annexe :
la carte des ports de Bretagne sur le Manuel de pilotage du cartographe du Conquet Guillaume Brouscon (1548).
La Bretagne compte au XVe et XVIe siècle 130 ports, dont certains sont mal abrités et d'autres peu commodes d'accès car situés au fond d'estuaires. On lit sur cette carte (ma flèche rouge) les noms de Morlaix (Morles) et de Saint-Pol-de-Léon, mais non celui de Roscoff, sans-doute assimilé au précédent.
Manuel de pilotage à l'usage des pilotes bretons par G. Brouscon, 1548. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b55002488s/f7.zoom
.
.
SOURCES ET LIENS.
Illustrations : https://fr.pinterest.com/pin/810155420437874869/
— Histoire maritime de la Bretagne
https://abp.bzh/histoire-maritime-de-la-bretagne-la-construction-navale.-10-11-27361
— ROSCOFF AU QUOTIDIEN. "La chapelle Saint-Nicolas."
http://www.roscoff-quotidien.eu/st-nicolas.htm
— Wikipédia "Carvelle" https://fr.wikipedia.org/wiki/Carvelle
— LE GUENNEC (Louis) 1979 - Morlaix et sa région - Page 345
Sous la Révolution, Roscoff fut un port de relâche important pour les corsaires, et aussi le centre d'une contrebande ... Des caravelles, des vaisseaux de haut bord à château d'arrière élevé sont sculptés au portail sur la tour et en divers
Des ports de Kerity-Penmarc'h et de Roscoff partaient pour de longs voyages des bateaux reproduits avec fidélité dans le granite des monuments: une caraque - trois-mâts de haut-bord ... 2); des caravelles sur celles de Poullan, Audierne.
— LE GUENNEC (Louis) 1937, Choses & gens de Bretagne, Edition de la Société "Les amis de Louis Le Guennec" , in 8°, 290 pages.
— PAVIOT (Jacques), La Politique navale des ducs de Bourgogne 1384-1482 page 107 https://books.google.fr/books?id=sXi4VtUdFCoC&pg=PA106&lpg=PA106&dq=%22carvelle%22&source=bl&ots=69Ye38owlt&sig=h7jYBCtNtWcnrhtPpu9sMRqKrgw&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjXx92I67jVAhXJ2hoKHRp2D604ChDoAQhUMAw#v=onepage&q=%22carvelle%22&f=false
— PORCHER ( Françoise), Histoire, Patrimoine et promenades de Roscoff à l'île de Batz
https://books.google.fr/books?id=r6wvpCo8AgIC&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q=carvelle&f=false
— TANGUY (Jean) 1975 Le port et havre de Roscoff: ou, Histoire d'une vocation maritime, Éditions des Paludiers, 1975 - 116 pages
https://books.google.fr/books?id=r6wvpCo8AgIC&pg=PT23&dq=caravelles+roscoff&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwi64Iuww7PVAhUESRoKHbsfCHgQ6AEIJzAA#v=onepage&q=caravelles%20roscoff&f=false
— TANNEAU (Georges), 2007, Les vaisseaux de pierre.
http://www.la-mer-en-livres.fr/vaisseaux.html
TOUCHARD (Henri) 1967. Le commerce maritime breton à la fin du Moyen Âge ; Annales littéraires de l'Université de Nantes, fascicule 1 ; Paris, Les Belles Lettres, 1967, XXXIX-451 p. (dont 27 pages pour les pièces annexes) : : Perrin Charles-Edmond. Le commerce maritime breton à la fin du Moyen Âge [Henri Touchard. Le commerce maritime breton à la fin du Moyen Âge ; Annales littéraires de l'Université de Nantes, fascicule 1]. In: Journal des savants, 1968, n° pp. 244- 254; http://www.persee.fr/doc/jds_0021-8103_1968_num_4_1_1183
— PÉRÉNNÉS (Henri), Roscoff, perle du Léon;
http://www.roscoff-quotidien.eu/roscoff-perle-leon.htm#ossuaires
— INFOBRETAGNE "L'église de Roscoff"
.