Vierges couchées (3) :
chapelle de Kergrist à Paimpol.
Voir aussi :
A. LES VIERGES COUCHÉES. 6 articles.
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Vierges couchées de Bretagne : Le Yaudet, Guiaudet et Kergrist. Les trois Vierges couchées de Bretagne. http://www.lavieb-aile.com/article-les-trois-vierges-couchees-de-bretagne-le-yaudet-guiaudet-et-kergrist-105600979.html
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Vierges couchées de Bretagne (1) : Chapelle Notre-Dame-du-Guiaudet à Lanrivain :La chapelle Notre-Dame-du Guiaudet à Lanrivain: http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-de-bretagne-1-chapelle-notre-dame-du-guiaudet-a-lanrivain-105147696.html
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Les Vierges couchées de Bretagne (2) : Chapelle du Yaudet à Ploulec'h (22). 14 mai 2012 .
http://www.lavieb-aile.com/article-les-vierges-couchees-de-bretagne-2-chapelle-du-yaudet-a-ploulec-h-105555217.html
http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-3-chapelle-de-kergrist-a-paimpol-105604068.html
http://www.lavieb-aile.com/article-vierge-couchee-calvaire-de-tronoen-a-saint-jean-trolimon-29-110465874.html
http://www.lavieb-aile.com/article-la-vierge-couchee-dans-les-nativites-des-livres-d-heures-113263711.html
http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-la-cathedrale-de-chartres-112103311.html
LES VIERGES ALLAITANTES. 12 articles.
http://www.lavieb-aile.com/article-virgo-lactens-ou-miss-nene-5-candidates-du-finistere-les-vierges-allaitantes-96615012.html
GROUPE DE SAINTE ANNE TRINITAIRE.
Groupes dits de Sainte-Anne Trinitaire : l'ensemble de la vallée de l'Aulne
http://www.lavieb-aile.com/article-anne-trinitaire-de-la-vallee-de-l-aulne-102034812.html
Anne trinitaire de l'église de Guimaëc.
Anne trinitaire de l'église de Plougasnou.
Sainte-Anne trinitaire du Musée départemental de Quimper.
L'église du Vieux Bourg à Lothey : Anne trinitaire.
La chapelle Sainte-Anne à Daoulas.
Anne trinitaire de la cathédrale de Burgos
http://www.lavieb-aile.com/article-sainte-anne-trinitaire-de-burgos-118711405.html
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I. Présentation.
Le grand pardon est célébré en mai.
La chapelle est connue des lecteurs de Pierre Loti puisqu'au chapitre XVII de Mon frère Yves, Loti, officier de La Sibylle, accompagne un ami matelot, Yves Kermadec, qui rentre chez lui à Plounez : sa chaumière est voisine de la chapelle de Kergrist : " Quand on est à la chapelle, disait-il, c'est tout près. On n'a plus qu'à tourner à gauche, deux cent pas, et on est chez nous".
La chapelle de Kergrist en Plounez, ancienne commune actuellement rattachée à Paimpol, date du XVe siècle mais elle a été restaurée en 1603, date où elle fut consacrée par l'évêque de Saint-Brieuc et l'abbé de Beauport, puis modifiée au XVIIIe siècle. Vendue à la Révolution, rendue au culte en 1807, bénéficiant d'une restauration importante en 1868, encore très endommagée à la fin de la guerre de 14-18, elle est alors remise en état par les paroissiens. En 1944, après avoir été touchée lors d'un raid aérien, elle doit être reconstruite. De son plan d'origine, elle a perdu son transept sud, ce qui explique en partie l'aspect encombré et mal agencé du retable que je viens visiter ici, celui de la Vierge couchée. En effet, les trois autels initiaux, ceux de Sainte Philomène, de N.D de Kergrist et de N.D du Yaudet, doivent trouver place sur la largeur de la nef et du transept nord, dont l'extrémité donne encore accès à la sacristie.
Elle est entourée d'un placître doté d'un calvaire du XVIe siècle, et dispose d'une fontaine au nord-ouest
II. La Vierge couchée.
Dans l'espace exigü qui lui est concédé, pas de retable monumental, pas de niche pour sainte Anne ou Joachim, tout juste un dais à guirlande et à deux pots-à-feu, trois angelots en couronnement, et dans l'ouverture de discrets rideaux de mousseline, deux blocs de bois sculptés aux couleurs blanches : l'un représente "la Vierge en gésine sur son lit d'accouchée", appuyée comme de coutume sur son coude droit et tournée (mais d'un quart) sur le coté dans la position des premiers allaitements, tandis que l'Enfant-Jésus ne nous montre que ses cheveux noirs afin de pouvoir téter. L'allaitement lui-même n'est pas visible, mais seulement nous voyons le beau geste de Marie prenant le menton de l'enfant et le guidant vers elle.
L'autre bloc sculpté représente un personnage très proche de celui du Yaudet, mais ici dépourvu de couronne et de sceptre. Son manteau n'est plus peint en rouge et, en d'autres termes, saint Joseph (car c'est bien lui) n'est plus déguisé en roi ; il tourne son beau visage vers le ciel et semble rendre grâce, d'un geste de la main, pour cette naissance.
Le naturel de cette posture, le joli mouvement des plis, la simplicité bonhomme des visages, l'absence de cette literie qui choquait, au Yaudet, par son coté kitch, l'absence même des fastes des retables, le dépouillement cistercien de la monochromie blanche confèrent à cette Nativité un charme émouvant. Inutile d'évoquer Isis, Cybèle ou la Virgo parturita gauloise pour comprendre que le mystère chrétien de l'avènement, dans une crèche de Béthléem, d'un Enfant-Dieu croise aussi, pour chaque être humain, l'émotion bouleversante de chaque naissance d'un petit d'homme, et la conviction qu'il se joue alors un évènement fabuleux qui le dépasse infiniment.
On trouve dans l'article de Georges Provost http://abpo.revues.org/1428 la reproduction d'une photographie qui montre une disposition des lieux très différente :
III. Les statues et ex-voto.
L'autel consacré à sainte Philomène.
Il porte des plaques votives avec la mention Merci à N.D. de Kergrist, témoignant de la confusion de l'ordonnancement. Ses niches reçoivent les statues d'un moine ou abbé et de saint Yves.
Ex-voto :
Cette goélette morutière de Paimpol (comme l'Étoile et la Belle Poule) porte l'inscription Kergrist PL.
Saint François ( selon l'inscription du socle)
Sainte Philomène :
Le culte de cette jeune vierge et martyre des premiers siècles s'est développé grâce à la dévotion du saint Curé-d'Ars en 1837, après que ses reliques aient été découvertes dans les catacombes de Priscilla puis transférées à Mugnano del Cardinale près de Naples. Son nom est issu d'une plaque qui portait la mention qualificative philomena theou, "aimée de Dieu".
Sa présence dans cette chapelle est peut-être due au fait qu'elle soit la patronne du Rosaire Vivant et des Enfants de Marie Immaculé ; mais j'ignore la datation attribuée à cette oeuvre.
Saint Yves :
Notre-Dame de Kergrist.
Le maître autel qui prolonge la nef est encadré par la statue de N.D. de Kergrist, vraie patronne de la chapelle, et de saint ? à gauche, alors que la statue de sainte Marguerite est posée sur le coté gauche de l'autel.
Sainte Marguerite .
Elle sort de son dragon par la seule force de sa prière ; Shrek fait semblant de ne pas être dans la combine.
Déploration :
Saint Sébastien :
Statues dans la nef :
Saint Éloi :
Dans sa tenue de maréchal-ferrant avec la tenaille et les clous.
Saint Julien.
Cette statue, ainsi que d'autres, proviennent d'une ancienne chapelle Saint-Julien actuellement détruite.
Les lecteurs des Trois Contes de Flaubert connaissent la Légende de saint Julien l'Hospitalier, ce fils de seigneur qui s'adonnait à la chasse :
"Il aimait, en sonnant de la trompe, à suivre ses chiens qui couraient sur le versant des collines, sautaient les ruisseaux, remontaient vers les bois ; et quand le cerf commençait à gémir sous les morsures, il l'abattait prestement, puis se délectait à la furie des mâtins qui le dévoraient, coupé en pièces sur sa peau fumante".
Ils savent comment le chasseur, poursuivant un cerf, une biche et son faon, tue les deux derniers, puis enfin le grand cerf qui le maudit avant de succomber en disant "Maudit, maudit, maudit! Un jour , coeur féroce, tu assassineras ton père et ta mère !" Et comment, comme dans le mythe d'Oedipe, l'oracle se réalisera alors que Julien aura tout organisé pour le déjouer.
La statue montre un homme vêtu d'une cuirasse et d'un manteau, tenant un épieu à gauche et un bouclier à droite. Mais celui-ci est orné d'une tête de cerf dans les bois de laquelle une tête apparaît: si cette tête est celle du Christ, il s'agit d'une contamination par les légendes de saint Eustache et de saint Hubert où les bois du cerf portent la croix du Christ.
IV. La bannière.
Elle est dédiée à Notre-Dame de Kergrist et non à N.D du Yaudet, avec l'inscription Itron Varia Kergrist Pedet Evid-omp, sainte Vierge de Kergrist Priez pour nous. La Vierge de Kergrist est couronnée et présente l'Enfant-Jésus qui tient le globus crucigère.
Le verso de cette bannière est traité de façon beaucoup plus originale et souligne, comme l'ex-voto vu précédemment, que cette chapelle dessert une population maritime. On y voit, encadrée par quatre ancres, une étoile et une fleur, un trois-mats gréé de trois voiles carrées et équipé non pas d'un gouvernail d'étambot, mais de deux avirons tribord et babord, ce qui correspondrait à un navire antérieur au XIIIe siècle.
V. Les tableaux.
Je donne à ces deux tableaux toute mon estime, et je suis frappé par leur qualité, les trouvant dignes des grands musées. J'ai été étonné de ne pas les trouver très étudiés, mais simplement mentionnés sur les sites en ligne. Quels en sont les auteurs ? Qui est F. Vali ? D'où proviennent ces oeuvres?
1) Saint Marc écrivant son Évangile, F. Vali, 1656
Inscription F. Vali fecit 1656 Ste Marce Ora pro nob~
2) la Nativité ou la Vierge au fourneau.
Inscriptions :
On lit : aier alit natum....seph somnum et de l'autre cotè Angelus auras ex... ast munus reddit... utrisque puer .
Ces inscriptions ont été coupées lors du réencadrement, mais l'abbé Guillotin de Corson (Les sanctuaires du pays de Paimpol, Revue de Bretagne et Vendée, 1889 (1) p. 108 link) les a relevé ainsi : Mater alit natum, Joseph somnum, angelus auras (ex) ast munus reddit utrisque puer. Je tente de traduire par "La mère nourrit son nouveau-nè, Joseph songe / un ange souffle ? tandis que deux groupes d'enfants rendent grâce."
Le chanoine honoraire décrivait ainsi ce tableau comme une toile peinte qu'on dit être de l'école espagnole, et intitulée par le peuple comme le Ménage de la sainte Vierge : "on y voit Marie faisant elle-même de la bouillie dans un petit poêlon tandis que saint Joseph berce le divin Enfant ; plusieurs anges aident à la Sainte famille, l'un attise le feu, un autre le souffle, un troisième apporte du charbon."