La tapisserie de Saint Éloi aux Hospices de Beaune.
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- La tapisserie de l'Agneau mystique des Hospices de Beaune.
- La tapisserie de saint Antoine aux Hospices de Beaune. Les volets du Polyptyque du Jugement Dernier.
La tenture de la Vie de la Vierge de la collégiale Notre-Dame de Beaune.
Les peintures murales de la chapelle Saint-Léger de la collégiale Notre-Dame de Beaune.
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Cette tapisserie en laine dite de saint Éloi est exposée aux Hospices de Beaune dans la salle du Polyptyque du Jugement Dernier. Cet ensemble apparemment très homogène par l'unité du fond millefleurs (généralement reservé au style profane) est en réalité composite, réunissant arbitrairement depuis la fin du XIXe siècle diverses pièces en une tapisserie à laquelle s'est ajoutée, depuis 1965, le personnage de l'extrême gauche . On doit distinguer de gauche à droite :
- Une femme profane : http://www.culture.gouv.fr/public/mistral/memoire_fr?ACTION=CHERCHER&FIELD_1=REF&VALUE_1=AP63N00140
- La Vierge à l'Enfant
- Un chevalier au cheval à la patte coupée, appartenant à la légende de saint Éloi,
- Saint Fiacre
Néanmoins, le résultat est globalement crédible, laissant penser qu'on voit ici saint Éloi, puis le propriétaire du cheval dont il vient de ferrer miraculeusement la patte et qui vient en rendre hommage à la Vierge et à son Fils. Les trois personnages de droite (le moine, le chevalier et la Vierge) sont sur des ilots de gazon qui renforcent l'impression d'unité de ce regroupement. Il s'agit sans-doute des différents fragments de pièces d'une même tenture, bien que ces trois personnages ne participent pas d'un thème hagiographique unique.
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La jeune femme.
On l'imagine volontiers au centre d'un jardin, locus amoenus profane plutôt qu'hortus conclusus sacré. Le locus amœnus peut être défini comme un trope littéraire désignant un endroit charmant, plaisant et agréable où on retrouve habituellement des arbres et de l’ombre, un pré verdoyant, un cours d’eau, des oiseaux chanteurs et une brise rafraichissante. Les jeunes gens s'y retirent pour échapper à la chaleur diurne et discuter de philosophie …. et d’amour.
Avec sa robe bleue moirée, son bandeau rouge ne retenant rien de ses cheveux blonds, la jeune fille présente (à son courtisan filant le fin amor) deux œillets et semble disposer à compter fleurette.
Il peut s'agir encore d'une allégorie de quelque Vertu. Ou d'une "échappée du jardin" venant de quelque jeune fille à la licorne. Elle conserve sur ses lèvres closes une part de son mystère.
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La Vierge à l'Enfant.
La Vierge repose sur un îlot fleuri. Son manteau joue de trois tons différents de bleus ( pastel) : clair, nuit, et profond. Sa robe utilise la technique des hachures pour réaliser des effets de reflets et de volumes par le seul jeu du rouge (racine de garance) et du blanc. Le jaune extrait de la gaude est utilisé pour la couronne à cinq étoiles, mais cette couronne est rouge-rose en profondeur. La Vierge regarde sur son coté gauche, vers son Fils qu'elle soutient avec beaucoup de grâce. Ce dernier, nu, cheveux blonds, tient un petit bouquet d'œillets. Le brun est utilisé pour ombrer les chevelures : cette teinte est piquée de points blancs pour en moduler la valeur.
Le mot œillet signifie "petit œil". La fleur symbolise l'amour, mais, dans le domaine religieux, et avec ses couleurs blanche, rose et rouge, elle a été associée à la Vierge et au Christ.
Le nom latin de l’œillet, du grec Dios anthos, latinisé comme Dianthus, signifie "fleur de Dieu". Selon une légende médiévale, les larmes de la Vierge Marie tombèrent sur le sol et se transformèrent en œillets lors de la crucifixion. Pour d'autres, ce sont les gouttes de sang tombé de la croix qui ont généré cette transformation. Cette fleur œillet du poète est aussi appelée clou en raison de sa forme et fait référence à la Passion du Christ.
D'autre part,elle était nommée, "selon des codes anciens italiens, Oculus-Christi et était utilisée pour soigner des yeux abcédés. Ainsi, l’œillet est devenu l’un des symboles christiques. "
http://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?id=lyon2.2010.migdal_a&part=367281
Les tapisseries "millefleurs" en compte une vingtaine d'espèces de plantes fleuries et d'arbres chargés de fruits. Ces fleurs parlent, à ceux qui savent les entendre, un langage symbolique.
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Le chevalier tient par la bride un cheval dont la patte antérieure droite, coupée, saigne : le membre sectionné repose sur le sol, le sabot étant ferré.
Il s'agit d'une allusion à un épisode de la Vie de saint Éloi, dans lequel le saint n'est pas l'orfèvre, le ministre de Dagobert ou l'évêque de Noyons que l'Histoire a retenu, mais un maréchal-ferrant qui se vantait d'être "Maître des maîtres, maîtres sur tous", ce qui est contraire à l'humilité dont doit faire preuve tout chrétien. Il va recevoir du Christ une belle leçon et devra reconnaître qu'il a trouvé son maître. On en lira ici le récit :
https://fr.wikisource.org/wiki/L%C3%A9gendes_chr%C3%A9tiennes/Saint_%C3%89loi_et_J%C3%A9sus-Christ
En un mot, le Christ, prenant l'apparence d'un forgeron voyageur, va se montrer capable de ferrer un cheval en ne mettant le fer au feu qu'une seule fois, et, mieux, de couper la patte du cheval pour le ferrer plus aisément, avant de la remettre en place miraculeusement. Saint Éloi tente ensuite de l'imiter, avec le résultat catastrophique que l'on imagine.
C'est cette leçon contre l'arrogance et la prétention qui constitue la Légende de saint Éloi, mais, dans l'iconographie, tout se passe comme si le miracle de la patte ferrée avait été accompli par saint Éloi.
La scène représentée ici ne peut pas correspondre à un épisode narratif de la légende, il en est une citation ou une vignette emblématique.
La verrière de saint Éloi à la chapelle Notre-Dame-du-Crann
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Saint Fiacre, patron des jardiniers.
Malgré l'inscription en caratère gothique SAINCT ELOY, le moine qui tient ici sa bêche et son livre est, bien entendu, saint Fiacre, le patron de tous les jardiniers.
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Comme dans la tenture de la Dame à la licorne, de nombreux animaux volent ou gambadent dans l'herbe fleurie, pour participer à figurer un monde édenique où les animaux vivent en liberté et en bonne entente . Chacun peut en outre, comme pour la flore, porter un message symbolique. J'ignore si quelqu'un a déjà dressé l'inventaire de la faune de cette tapisserie, ou a procédé aux identifications zoologiques. Je propose de reconnaître, outre les petits lapins blancs, des perdrix et des faisans.
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SOURCES ET LIENS.
— FROMAGET (Brigitte), DEYNIES (Nicole de), 1993, Les Tapisseries des Hospices de Beaune: Cote-D'Or. Edité par Inventaire General, SPADEM/Association pour la Connaissance du Patrimoine de Bourgogne, Dijon.
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