1. A l'Aber à Crozon, une petite troupe d'une vingtaine de Petites Violettes Clossiana dia(Linnaeus,1767) volent dans une prairie humide :
Elle tient son nom vernaculaire de la coloration violine, lie-de-vin du dessous de l'aile postérieure.
Un synonyme de son nom scientifique est Boloria dia,Boloria étant un nom propre grec, et le genre Boloriaavait été baptisé ainsi par Moore en 1900.
Le genre Clossionaest dû à Reuss, 1920, dans Ent. Mitt. 9 : 192 nota. En 1922, Alfred Franz Théodor Reuss (1879-1958) , zoologue excentrique allemand qui publia surtout en herpétologie déclara qu'il avait forgé ce nom de genre en souvenir d' Adolf Closs, mais il s'avère que ce dernier ne fut qu'un entomologiste de second ordre.
Le protonyme donné par Linné dans sa douzième édition de 1767 du Systema Naturae 1(2) p. 785 est Papilio dia, ou plutôt Papilio Dia.Faut-il voir en Dia l'île grecque située au nord d'heraklion en Crète, et qui, selon certaines versions de la légende deThésée, servi de refuge, plutôt que Naxos, à Ariane? On se souvient que Linné a réparti les papillons diurnes en phalanges, et que Papilio Dia appartient aux Nymphes, les Nymphalis.
2. Le Point-de-Hongrie Erynnis tages (Linnaeus, 1758).
Il est discret comme une ombre grise, petit, banal, et je l'aurais pris pour un papillon de nuit s'il n'avait attirè mon attention par la vivacite de son vol.
Qui lui attribua ce nom? Le Point-de-Hongrie est un motif de parquet, dont les lames sont disposées en frises de la même longueur, sont coupées à l'onglet à 45°, et forment des travées à angle droit , ce qui le distingue du parquet au Point de Bourgogne, en fougère, ou à bâtons rompus.
C'est aussi le nom d'un point de tapisserie à l'aiguille.
Seul les français ont pensé aux travaux de Pénélope ou à ceux de saint Joseph le menuisier en observant ce papillon, et les allemands le nomment Kronwicken ou Dickkopffalter, les anglais Dingy Skipper, et d'autres le Cervantes.
Nous renonçons parfois à notre Point-de-Hongrie (qui me fait régulièrement penser au chef-d'œuvre de Vivant Denon Point de Lendemain ) pour l'appeler La Grisette, tout simplement ; cela lui va bien.
Il appartient à la famille des Hesperiidae, que les anglais nomment Skipper ou Sauteurs, pour leur vol à saut et à gambade: ces petits papillons ont une grosse tête d'où partent deux antennes à la pointe recourbée en crochet.
Cette famille comprend la sous-famille de Pyrgynae Burmeister,1878, qui accueille notre papillon. Elle est ainsi nommée en raison d'un autre genre, Pyrgus (Hübner,1819), du grec purgos, une tour.
Le nom de genre Erynnis a été attribué par Schrank en 1801, du nom des Erynies ( du grec ancien erinein, pourchasser) ou Furies, ces déesses vengeresses qui poursuivent les coupables de leur hargne acharnée. Selon Emmet, il se justifie en raison du vol incessant de ces diablotins qui évoque celui du criminel toujours aux abois, mais on peut aussi attribuer ce vol aux déesses justicières.
L'épithète spécifique vient de Linné : Tages est ce nain qui sortit un jour d'un sillon labourè en Toscane : ce dieu étrusque s'avèra bien savant pour un enfant, et c'est lui qui enseigna aux étrusques les pratiques divinatoires d'hiéroscopie, d'hépatoscopie et la science des haruspices : voir mon article :Achille-Cléophas Lavieb : Ornithologie et religion étrusque. .
Mais il serait vain de rechercher parmi les caractéristiques du Point-de-Hongrie les raisons de l'attribution de ce nom. Dans sa classification du systema Naturae page 458, Linné répartit les Papilio en 6 phalanges, les Equites, les Heliconii, les Danaii, les Nymphales (répartis en Gemmati et en Phalerati), les Plebeii parvi et les Barbari.
Tages vient en 168 ème position, c'est le dernier des Plébèiens, il est talonné par les Barbares qui vont de 169 à 192.
Les plébéiens se divisent en Rurales, ceux de la campagne, et les Urbicolae, ceux de la ville : Tages est donc un urbicolae, autant que le voyageur qui, à l'hôtel, se voit attribuer la chambre Venise de l'étage Italie se verra qualifier de Vénitien par le Gentil Organisateur. Les autres Urbicolae définis par Linné comme ceux qui ont "alis saepius maculis pellucidis" sont les numéros 162 à 167 et recoivent les noms de Comma, Proteus, Phidias, Bixae, Polycletus et Maluae.
On aurait pu trouver d'autres noms scientifiques plus seyants. Mais hors de Linné, Point-de-Salut.
3. La Mégère, Lasiommata megera (Linnaeus,1767).
Nom vernaculaire : Satyre, lorsque c'est un mâle, Mégère, lorsque c'est une femelle, comme ici. On reconnaît le mâle à la plage androconiale qui traverse en oblique l'aile antérieure , comme ici (archive):
Nom scientifique :
• Lasiommata: Westwood, 1841., vient du grec lasios, chevelu, et ommata (pl.) les yeux : car la Mégère appartient à ces quelques Satyrinae à avoir des yeux velus.
• megera: c'est l'une des trois Erynies, avec Alecto et Tisiphone, l'une des trois déesses de la vengeance, et son nom Mégaira signifie "la Haine".
Son nom a été donné par Linné dans la douzième édition du Systema Naturae, 1 (2) page 771, dans le protonyme papilio megera.
Les anglais le nomment the Wall Brown,le Mur Brun, et les allemands Mauerfuchs, Mur- renard. L'allusion au renard renvoie à la couleur fauve, et la référence au mur à l'habitude, presque une manie, de la mégère de stationner ailes ouvertes au 2/3 sur toute surface dénudée, y compris les murs. On la rencontre souvent posée sur les sentiers côtiers, où nos pas l'a font décoller pour se reposer quelques mètres plus loin.
4. Quand au Tircis, il est toujours très présent, comme s'il n'avait pas quitté sa feuille de lierre depuis mon précédent passage: