Les vitraux de Manessier,
chapelle de Bonne-Nouvelle à Locronan.
Vitraux contemporains : voir aussi :
Bazaine à La Madeleine de Penmarc'h :
ou tout simplement les vitraux de Saint-Louis à Brest :
http://www.lavieb-aile.com/article-les-vitraux-de-l-eglise-saint-louis-de-brest-103429661.html
Jacques Le Chevallier à Gouesnou :
Gérard Lardeur à Langonnet :
http://www.lavieb-aile.com/article-les-vitraux-de-gerard-lareur-a-langonnet-104407243.html
ou Gérard Lardeur à Saint-Sauveur :
Voir aussi la chapelle et ses statues : Vierges allaitantes IX : Chapelle de Bonne-Nouvelle à Locronan.
Présentation de l'œuvre :
Pour une fois, je placerai les commentaires sur l'œuvre à la fin.
J'ai pris ces photos le matin, en avril, par temps couvert : chaque visite recrée un nouveau spectacle.
Baie O ou Maîtresse-vitre :
Baie 2, à gauche du chœur :
Baie 1, à droite du chœur :
Détail : la signature :
Baie 3 : à droite, au dessus de la Déploration :
Baie 4 :
Baie 5 :
Baie 6 :
Au dessus du portail ouest et de la tribune :
Commentaires.
I. Maurice Dilasser ( 1918-2005)
Le chanoine Maurice Dilasser a été recteur de Locronan en 1974 à 1990, fonction qui le désigne comme le commanditaire de ces vitraux. Mais c'est surtout par son engagement pour la promotion de l'art sacré, et pour ses fonctions à la tête de la Commission d'art sacré qu'il est important de le citer comme premier auteur de ces verrières de Bonne-Nouvelle.
N'ayant pas trouvé ces renseignements sur le web, je donne ici une Biographie (d'après la notice nécrologique de Yann Celton, Bull Soc. Arch. Fin. Tome CXXXV, 2006 pp.433-435):
Né le 22 mars 1918 à Lesneven, Maurice Dilasser est ordonné prêtre en 1942 puis nommé professeur à Lesneven avant de prendre de 1960 à 1964 les fonctions d'aumônier à Quimper à Sainte Anne et auprès des enseignantes chrétiennes. Supérieur de Saint-Yves de 1964 à 1965, il devient recteur de Tréboul de 1965 à 1969. Profitant du renouveau liturgique impulsé par Vatican II et sous l'influence des principes novateurs exposés par les pères dominicains Couturier et Régamey dans la revue Art sacré, il rénove radicalement l'intérieur de l'église de Tréboul, supprimant les peintures en trompe-l'-oeil fin XIXe qui dataient de la construction de l'édifice par l'abbé Abgrall en 1881-1884, supprimant le mobilier liturgique et les statues de plâtre produites en série par les entreprises de bondieuserie saint-sulpicienne, respectant les verrières datées de 1885-1901 des ateliers Megnen, Bordereau, Fenep et Florence complétées en 1948 par Lorin et Choisnard et en 1957 par des vitraux confiés à Pierre Toulhoat.
En 1969, il revient à Quimper comme aumônier de maison de retraite et il est nommé official diocésain (la même fonction que saint-Yves à Tréguier), un rôle d'avocat qu'il conserva toute sa vie.
En 1974, et jusqu'en 1990, il devient recteur de Locronan, et il ajoute à cette fonction celle de recteur de Kerlaz en 1988.
Maurice Dilasser et l'art sacré.
Maurice Dilasser est le frère de François Dilasser (1926-.), peintre contemporain qui a réalisé les vitraux de Ty Mamm Doué à Quimper et de la chapelle Saint-Maudez à Guiscriff.
En 1949, l'évêque de Quimper, Mgr André Fauvel, attentif à la création contemporaine, crée une commission d'art sacré, dirigée par un (ou, actuellement, une) délégué(e) diocésain(e). Ses statuts seront publiés en 1983. C'est en 1979 que Maurice Dilasser rentrera dans cette commission, et il sera le délégué diocésain de la CDAS pour neuf ans en 1990.
A Locronan, il fait venir des artistes pour les exposer dans le Pénity. "Proche de Bazaine et de la Galerie de France à Paris, il fait venir ainsi Manessier, Le Moal, Viera da Silva, Arpad Szenes, Raoul Ubac, Pierre Tal-Coat, Serge Poliakoff, Elvire Jan entre les années 1974 et 1985, et se met en contact avec Pierre Soulages et avec les héritiers d'Yves Tanguy." Depuis 1980, il est le conseiller technique et artistique auprès de la CDAS dirigé par Yves Marzin qui en est plutôt l'économe, et il visite de nombreux chantiers. "Partisan de la non-figuration dans le vitrail, il fait travailler Bazaine dans les chapelles Chapel-ar-Zonc de Locronan et de la Madeleine à Penmarc'h, fait intervenir Manessier au Pouldu et à la chapelle de Bonne-Nouvelle, et approuve le choix de Kim en Joong (peintre dominicain, créateur de vitraux pour la cathédrale d'Évry) à la chapelle classée de Perguet en Bénodet. Il s'oppose aux tenants d'un art figuratif plus classique, au risque de frictions et d'incompréhension, préférant systématiquement des créations plus résolument contemporaines, envisageant de faire intervenir Marta Pan pour le baptistère de l'église Saint-Louis de Brest. Le figuratif peut cependant trouver place, comme ces vitraux de Nicolas Fédorenko réalisés à la chapelle Saint-Maudez à Lennon."
"Suivant de près les chantiers diocésains d'église, il veille à la réalisation, et spécialement à l'aménagement intérieur des églises de Tourbian à Guipavas (1993), de Kerinou à Brest (1998). A Concarneau en 1996, il confie à son ami Bazaine la réalisation de la grande mosaïque du porche, à Quimper il confie la réalisation du mobilier liturgique de la cathédrale de Quimper nouvellement restaurée au sculpteur Pierre Manoli."
Il a fondé en 1983 l'Association du Patrimoine Religieux en Vie SPREV qui forme de nombreux jeunes à la fonction de guide des chapelles et églises bretonnes.
En 2005, il reçut la décoration de chevalier des arts et des lettres.
On lui doit :
- Locronan, ed. Ouest-France 1983,
- Loc Ronan et Tromènie,Maurice Dilasser et paroisse de Locronan, 1989
- Locronan 1993
- Antiquité de la petite Troménie de Locronan, Bull. Soc. arch. Finist. t. CVVIII, 1994, p. 254-261.
- Locronan et sa région, Yves Gallo, Maurice Dilasser et U.B.O.,1979
- Églises et symboles, ed du Signe, 1999
- Sculpter la lumière, le vitrail contemporain en Bretagne Philippe Bonnet et Maurice Dilasser,1945-2000
- Patrimoine religieux de Bretagne Maurice Dilasser (dir.) Hervé Gusty Brest, Ed Le Télégramme, 2006,381 p.
II. Alfred Manessier (Saint-Ouen dans la Somme 1911-1993)
Trop connu pour que je m'étende d'avantage, je rappellerai que ce peintre non-figuratif animé d'une profonde foi catholique, très sensible aux lumières littorales et fluviales de la Baie de Somme, attaché à observer et à rendre les paysages naturels, a développé une importante œuvre de vitrail depuis 1948. Il a été l'un des premiers à introduire l'art non figuratif dans les églises par sa verrière de Sainte-Agathe des Brézeux en 1948, et s'est initié aux techniques du verre ancien et plomb notamment auprès du maître-verrier François Lorin à Chartres. Il est l'auteur de 27 ensembles de vitraux, dont 16 en France et deux en Bretagne, à Locronan et en 1958 à la chapelle Notre-Dame de la Paix au Pouldu.
La verrière de Bonne-Nouvelle :
C'est Maurice Dilasser qui a proposé "le thème de Marie qui présente au monde d'hier, d'aujourd'hui et de demain la Bonne Nouvelle. Celui qui est venu après une longue attente... Marie dans le mystère de l'Annonciation, de la Visitation et de la Nativité. Celui qui vient aujourd'hui apporter la lumière et la paix au milieu de nos incertitudes, de nos angoisses et de nos dissensions. Marie dans les jours cachés de Nazareth : "Heureuse celle qui a cru"... Celui qui viendra pour le salut des nations et qui nous réunira pour toujours dans la vie et la résurrection. Marie dans la gloire de l'Assomption".
Ce à quoi Manessier répondra en déclarant le jour de la bénédiction lors de la petite Troménie en juillet 1985 :"Ces vitraux non figuratifs évoquent un mouvement qui part du chœur et continue avec les autres vitraux : c'est comme un manteau qui s'ouvre, un mouvement d'accueil qui vous tend les bras. Au fond le petit vitrail du pignon c'est l'écho du grand vitrail du chœur : c'est en quelque sorte la "bonne nouvelle". Dans le mouvement dessiné, le rythme est donné par les lignes de plomb" (in Hélène Claveyrolas, Les vitraux de Manessier dans les édifices historiques, link)
III. Les ateliers Hermet-Juteau
Le maître-verrier est l'atelier Lorin-Hermet-Juteau de Chartres. J'ai déjà présenté ici les vitraux d'Elliant et ceux de Carolles (50) par François Lorin Les vitraux de Jacques Simon en l'église saint-Vigor de Carolles (50)
Costumes bretons d'Elliant : vitrail et statues.
Il faut signaler que Manessier est l'auteur des vitraux de 1972-73 de la tombe de François Lorin au cimetière de Saint-Chéron à Chartres.
Les vitraux sont réalisés en verre antique et plomb.
Leurs commentaires :
Maurice Dilasser : " Dans cette chapelle édifiée au milieu des maisons et des courtils de tisserands, [Manessier] a orchestré l'outremer de l'océan et l'azur nacré, l'ocre des terres et la gamme de verts bocagers en l'honneur de Marie et de son fils, le Verbe porteur de la bonne nouvelle. La transparence des verres sans grisaille est sensible au passage des nuages, qui jouent en contrepoint avec le graphisme élancé des plombs. Cependant, drapée dans son manteau bleu comme à la conque de torcello, la mère de Dieu habite souverainement le chevet de la chapelle. Présence aussi affirmée par sa densité chromatique que celle de la mosaïque vénitienne. Vision plus discrète qui se laisse découvrir et appeler. Le mouvement qui s'élève du panneau central aux flammes des fenêtres voisines évoque Notre-Dame-de-la-Miséricorde accueillant les enfants dans les plis de son manteau.
"Les autres fenêtres sont accordées à d'autres mouvements de l'âme : "Pluie diaphane de grâces au nord, au sud gravité de rouges et de violets déplorant le sang versé, au dessus du groupe de Kersanton où Marie reçoit le corps de son enfant".
Alfred Manessier : " Les trois vitraux du chœur répondent précisément à un même thème : la proclamation de la Bonne-Nouvelle qui s'exprime dans un mouvement d'ouverture, de bras ouverts. C'est peut-être une allusion au paysage, à l'ouverture de la Baie de Douarnenez qui est si proche de l'église.
"Les quatre vitraux de la nef, plus modestes, sont des vitraux d'accompagnement. Ils n'ont pas de thème précis. Leur style est plus simple, comme d'ailleurs le dessin des verrières. Le vitrail rouge accompagne une sculpture de la descente de croix ; le petit vitrail de la tribune est un écho du chœur, ses couleurs sont tirées de la palette du chœur ; les deux autres comportent des grisailles, le plus clair est marin.
"Les vitraux du chœur et ceux de la nef ont été conçus dans deux styles différents -style que l'on retrouve dans l'architecture même du lieu, le chœur n'étant pas du même style que la nef. Cette opposition est également présente dans le dessin des verrières.
" Les vitraux apportent dans la chapelle toute une joie de couleur. Il y aura de la couleur partout, changeante avec le soleil et la lumière qui ne sont pas constamment les mêmes.
"Les vitraux ont la sensiblité des oursins. Il n'y a rien de plus vivant que les vitraux."
Le renouveau des vitraux en Bretagne :
Présentant "le vitrail contemporain en Bretagne 1945-2000", le catalogue "Sculpter la Lumière" de l'exposition du château de Kerjean dresse la liste à peine croyable de plus de 1000 vitraux contemporains créés dans cette période par 119 artistes différents. Et ce n'est pas fini !