Les navires sculptés (leucogranite, v. 1528) de la façade occidentale de l'église de Confort-Meilars. Son inscription. Ses 13 statues d'apôtres en kersanton (Maître de Plougastel, v.1588-1602).
.
.
— Voir sur l'église Notre-Dame de Confort-Meilars :
-
Les bannières de procession de l'église Notre-Dame de Confort à Confort-Meilars (29).
-
Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Confort-Meilars.
-
Les roues à carillon de Confort-Meilars, de Locarn, de Priziac et de Quilinen.
-
Les sablières (v. 1528-1554) de l'église Notre-Dame de Confort-Meilars (29).
.
Voir aussi sur les carvelles ou les embarcations de pêche sculptées sur pierre en Finistère :
-
Les poissons du porche sud (1509) de l'église Saint-Nonna de Penmarc'h.
-
à la chapelle Saint-Yves et à l'église Saint-Collodan de Plogoff .
-
sur le porche de la tour carrée de Saint-Guénolé.
-
à l'église Saint-Hervé de Ploaré (Douarnenez) (poissons et Fou de bassan) en 1550.
Voir les embarcations de pêche sculptées sur bois sur les sablières :
- de l'église de Pont-Croix
- de la chapelle Saint-Tugen de Primelin
- de la chapelle Saint-Trémeur de Cléden-Cap-Sizun
- de la chapelle de Sainte-Marine à Combrit.
.
Voir les graffiti normands :
-Dives-sur-mer, église : 400 graffiti
-Saint-Vaast la Hougue, chapelle des Marins, graffito, XVIe
http://www.saintvaast.fr/pageLibre000125fc.aspx
-Vatteville-la-rue graffiti des murs de l'église
http://www.jpdugene.com/camping_car/normandie_2012/2012-08-07.htm
-Fécamp, abbatiale Ste-Trinité, graffiti
http://www.unicaen.fr/recherche/mrsh/sites/default/files/forge/vignettes/abbatialeFecamp.jpg
-Région de Fécamp :
http://www.fecamp-terre-neuve.fr/GalerieGraffiti.html
-Honfleur, Maison Erik Satie, graffiti XVIe-XIXe
-Eglise d'Hénouville:
http://perso.numericable.fr/~arnaudser/serander/Henouville/Graffiti.htm
-Dreux, beffroi, graffiti de 1537 :
https://www.sagaphoto.com/photo.asp?from=liste&id=PF008391#.XlEHBWhKiM8
-Couvent Sainte-Barbe de Canteleu près de Rouen:
https://rouen.blogs.com/photo/2007/11/o-trouver-ce-gr.html
.
Sur l'atelier de taille du kersanton du Maître de Plougastel (1570-1621) dans le Cap Sizun :
- -Les apôtres et évangélistes de la chapelle Saint-Tugen en Primelin. A paraître.
- Les navires sculptés (leucogranite, v.1547) de l'église de Plogoff. Une statue de saint Pierre daté vers 1621.
.
PRÉSENTATION.
La façade occidentale (1528) de l'église Notre-Dame de Confort-Meilars, globalement triangulaire sous la tour du clocher et sa tourelle ronde, est fortement structurée horizontalement par une moulure et verticalement par deux contreforts à quatre niches à dais, couronnés de pinacles à crochets. D'où trois espaces, entre ces contreforts (avec le portail) ou à l'extérieur de ceux-ci.
À l'extérieur des contreforts, nous n'aurons à décrire que les niches coiffés de demi-pinacles, et leur statue. Mentionnons la porte murée gauche, qui donnait accès à la chapelle des Fonts (ou des lépreux).
Au centre, le portail en plein cintre puis à peine ogival est rythmé par ses colonnes engagées. Une arcade ogivale à choux frisés et fleurons dessine sa belle courbe tandis que deux très hauts pinacles encadrent le gable du fronton.
Deux niches à dais sont occupées par leur statue d'apôtre.
La pointe du fronton est un fleuron sur lequel saint Michel triomphe d'un démon.
Tout en haut, une baie et son ouverture ogivale.
.
.
.
.
I. L'INSCRIPTION DE FONDATION.
.
Elle est sculptée en cinq lignes sur trois blocs de granite, l'un (trois lignes) faisant toute la largeur disponible sous la corniche du fronton, les deux autres étant moins longues de moitié.
Elle n'a jamais été déchiffrée entièrement, alors qu'il serait encore temps de procéder à un estompage, ou à une lecture en éclairage rasant.
Je lis le début de la première ligne LAN MIL --- et le début de la deuxième ligne DE CEAN, ces dernières lettres moins certaines. Ce sont des caractères gothiques en minuscules.
Le site Pop.culture donne la date : MILVCXXVIII (1528).
Nous sommes donc autorisés à dater les bas-reliefs de la façade de cette année 1528 (également inscrite sur le chevet nord).
.
.
.
II. LES BATEAUX DE PÊCHE ET LES POISSONS EN BAS-RELIEF (GRANITE).
.
Les commanditaires (les paroissiens représentés par leur fabricien, ou Alain II de Rosmadec et son épouse Jeanne du Chastel, malgré l'absence de tout rappel héraldique) ont tenu à souligner la vocation maritime de leur paroisse en sculptant quatre embarcations entourés de poissons ou cétacés. En effet, au XVIe siècle, profitant d'un heureux concours de circonstance (neutralité de la Bretagne), le Finistère connait une expansion économique liée aux transports commerciaux maritimes entre Espagne, Angleterre et Flandres, et liée également au succès de la pêche côtière.
La situation de ces sculptures de nefs et de poissons au dessus et immédiatement au dessous de l'inscription de fondation n'est peut-être pas attribuable à un souci décoratif, et elle peut être l'expression, de la part des seigneurs du lieu, de leurs prérogatives, très lucratives, tant en droits de pêche qu'en droits sur la construction et la navigation. On évaluera leurs étendues à la lecture de l'extrait d'un article de J. Darsel cité en bibliographie, où Alain [Ier, père d'Alain II] de Rosmadec est nommément cité pour ses droits de « lods et ventes » sur la construction des navires construits à Audierne.
Il faut consulter une carte pour voir Confort, sur le plateau où passe la route Douarnenez-Pont-Croix, dominer le cours du Goyen, rivière qui arrose ensuite Pont-Croix, puis Audierne. On rappellera alors qu'Alain de Rosmadec est seigneur de Tyvarlen mais aussi de Pont-Croix, où il est donateur de l'église de Roscudon.
Les meilaristes ne sont pas seuls à honorer ainsi leurs marins et armateurs, et les paroisses du Cap Sizun sont riches en ces bas-reliefs, tout comme, au nord du département, le port de Roscoff lié à Morlaix. En Normandie, la pierre calcaire se prête d'avantage à des graffiti marins, et ceux-ci apparaissent plus nombreux lors du déclin de la primauté bretonne.
Ces navires sont, à Confort-Meilars au nombre de cinq : deux forts rouliers (I et II) en position haute à l'extérieur des contreforts, et, au dessus du porche, deux embarcations de pêche, non mâtés, plus un navire mâté, entourés de poissons ou cétacés en deux ensembles (III et IV).
.
Carvelles et scènes de pêche (1528) de la façade ouest de l'église de Confort-Meilars. Photographie lavieb-aile.
.
.
Le bas-relief I : un trois-mâts de transport maritime, ou "roulier".
.
On peut voir un exemple de ce type de navire sculpté au palais Jacques Cœur de Bourges au milieu du XVe siècle.
.
.
Parmi les miniatures, je choisis, quoique ce soit un deux-mâts, celle peinte par Jean Colombe vers 1485 dans les Faits des Romains BnF fr. 22540 f. 59r sous la légende Comment les bretons se rebellerent contre les rommains.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b85144325/f125.item.zoom
.
.
.
.
Le bas-relief II : un navire de transport maritime, ou "roulier".
Celui-ci n'a qu'un mât (on devine à l'avant une forme compatible avec un espar), mais il est néanmoins identique au précédent, tant par sa carène que ses superstructures, son gouvernail et son nid-de-pie.
Ce type de navire est couramment représenté dans les enluminures du XVe siècle :
.
.
.
.
.
On trouve également ce gréement, nommé Cogge peint sur le vitrail du palais Jacques Cœur à Bourges vers 1451.
.
.
.
.
Les bas-reliefs III, à droite du fleuron de l'arcade du portail.
.
Vue des groupes III (à droite) et IV (à gauche) .
.
.
.
Le groupe III est constitué de 4 blocs de leucogranite, irrégulièrement rectangulaires, qui montrent deux scènes de pêche sur deux embarcations différentes.
.
.
.
En haut à gauche : une barque de pêche.
.
La barque à clins à trois lames, dont la quille et la haute étrave convexe sont individualisées, possède un tableau arrière, ou du moins une poupe) droite, verticale. L'étambot est bien distinct, descendant moins que la quille, et s'élevant au dessus du franc-bord, pour permettre la fixation d'une barre, que le maître de la barque semble tenir. Il tend l'autre bras vers l'avant, mais nous ne voyons ni le mât ni les apparaux de pêche, ni les avirons, ni la ligne ni son matelot, comme cela s'observe sur les sablières de Pont-Croix ou Primelin.
.
.
.
En haut à droite.
Le bloc suivant est difficile à décrire. On y a vu, je crois, un oiseau pêchant (comme à Saint-Herlé à Ploaré).
.
.
.
Ensemble III, en bas à gauche : un navire de pêche.
.
C'est un navire à mât central, étayé en avant et en arrière (l'étai arrière semblant empennelé), à proue convexe et étambot vertical, à clins, avec deux marins à son bord. Nous pouvons suggérer qu'il est en pêche car il remorque une ligne (ou une annexe ?), et qu'il est suivi par trois formes vaguement évocatrices de poissons. Surtout, son mât est encadré de deux formes en hameçon.
.
.
.
Ensemble III, en bas à droite : deux poissons.
Cétacés ? Simples sardines ou maquereaux.
Deux gros poissons sont sculptés l'un au dessus de l'autre, remarquables par leur tête plus forte que le corps et par une solide mâchoire. On distingue bien deux nageoires ventrales, mais je ne distingue pas (défaut d'éclairage) de nageoire dorsale. La queue ou nageoire caudale, homocerque et fourchue, est placée verticalement (alors que les cétacés ont une queue horizontale), mais le sculpteur est tenu par ses impératifs à la placer ainsi.
.
.
.
.
Les bas-reliefs IV, à gauche du fleuron de l'arcade du portail.
Le groupe IV est constitué de 3 blocs de granite, rectangulaires, en deux registres, qui montrent en haut une scène de pêche sur une barque à deux marins, et en bas des poissons ou cétacés bondissants .
.
.
.
.
Ensemble IV, en haut .
Une barque non mâtée est au mouillage sur son ancre ; un homme, à l'arrière, tient le gouvernail, tandis qu'à l'avant, le second matelot tend un bras vers la ligne de mouillage. La barque possède les mêmes caractéristiques que celle de l'ensemble III. Dans l'eau, un poisson, comparable à un maquereau, nage librement.
.
.
.
Ensemble IV, en bas à gauche .
.
Trois poissons nagent dans le même sens. On distingue une queue verticale, une nageoire ventrale triangulaire et deux nageoires caudales arciformes, une caractéristique qui semble peu commune.
Rappel :
Les cétacés ont :
-
une queue horizontale
-
deux nageoires pectorales
-
un aileron dorsal
-
ils respirent avec des poumons par un évent
Les poissons ont :
-
une queue verticale
-
deux nageoires pectorales
-
deux nageoires ventrales
-
une à deux nageoires dorsales
-
une nageoire anale
-
ils respirent avec des branchies
Conclusion : soit c'est une vue fantaisiste d'un sculpteur, soit une tentative de montrer à la fois une nageoire dorsale et une nageoire pectorale, ou bien quelque chose comme ça.
Mais on ne peut y facilement voir des cétacés.
.
.
.
Ensemble IV, en bas à droite : quatre poissons.
Ils sont restés en partie à l'ombre lors de ma prise de vue, pourtant patiente. Quatre "poissons" aux mêmes caractéristiques que les précédents font des bonds en position presque verticale en s'entrecroisant (ou bien, c'est une vue de haut d'un panier de pêche !)
.
.
.
.
III. LES 13 STATUES EN RONDE-BOSSE.
.
.
.
LES DOUZE APÔTRES du CREDO APOSTOLIQUE (KERSANTON, MAÎTRE DE PLOUGASTEL, v. 1588-1602).
.
Les douze apôtres de la façade ont tous perdu l'attribut qui permet leur identification, et souvent le livre qui renvoie au Livre des Apôtres, mais ils tiennent encore le phylactère sur lequel était peint l'un des douze articles du Credo, ou Symbole des Apôtres, auquel ils étaient associés.
Plusieurs d'entre eux portent une robe plissée et serrée par une ceinture, fermée sous le cou par trois boutons soigneusement sculpté, selon un procédé propre à l'atelier des Prigent ou du Maître de Plougastel. Sur cette robe, ils ont un manteau dont un pan revient vers le bras ou la ceinture, occasion d'un élégant jeu de pli qui introduit entre eux de la variété. C'est bien au Maître de Plougastel (actif de 1570 à 1621), sculpteur du calvaire monumental de Plougastel en 1602-1604, que'Emmanuelle Le Seac'h attribue les apôtres de Confort-Meilars.
On lui doit le portail intérieur du porche sud de Bodilis en 1570, une œuvre de jeunesse. Ses ouvres principales sont, outre le calvaire de Plougastel, , une part de celui de Guimiliau en 1606-1617, et le calvaire de Locmélar vers 1600. Dans le Cap-Sizun, il a travaillé aux douze apôtres de Notre-Dame de Confort, aux onze statues de la chapelle Saint-Tugen de Primelin (après 1582 ?), et à un apôtre du porche ouest de Plogoff (v.1621). Je renvoie aux articles de ce blog qui les décrivent.
"Les visages sont ronds, fermés, sévères avec des barbes régulières et soigneusement peignées. La chevelure rappelle étonnamment le saint Pierre de Locmélar. Les épaules sont étroites et basses. Les douze apôtres sont vêtus de longues tuniques flottantes. Les plis des vêtements sont très structurés avec toujours les mêmes formes : plats, à festons et ronds.Les statues sont de grande dimensions. le format utilisé est le plus grand rencontré dans l'œuvre du Maître et l'on retrouve le même à la chapelle Saint-Tugen." (E. Le Seac'h p. 189)
On sait que ces 12 apôtres occupaient, sur l'imposant calvaire à soubassement triangulaire de Confort devant cette façade, des niches . Mutilés et décapités à la Révolution, ils furent enfouis près de l'église avant d'être déterrés en 1849. Les têtes furent recollés par le sculpteur Yan Larch'antec en 1870, mais celui-ci décida de les placer dans les niches à dais de la façade ouest . Pour le calvaire, il réalisa 13 statues (les 12 Apôtres et saint Paul), et plutôt que de le replacer dans leur niche, il les campa tout autour de la plateforme. C'est également Yan Larch'antec qui sculpta le Saint-Michel de la façade.
.
,
.
I. Un Apôtre.
.
.
.
II. Un Apôtre.
.
.
.
III. Un Apôtre.
.
.
.
IV. Saint Matthieu tenant sa balance.
.
.
.
V. Un Apôtre.
.
.
VI. Un Apôtre.
.
.
.
VIII. Apôtre tenant un livre en main droite.
.
.
.
IX. Saint Jacques le Majeur.
Il tient un livre en main gauche. On devine son baudrier à coquilles.
.
.
.
X. Un Apôtre.
.
.
.
XI. Un Apôtre.
.
.
.
XII. Apôtre.
.
.
XIII. Saint Michel terrassant le démon (kersanton, Yan Larch'antec, 1870)
Saint Michel, (kersanton, Yan Larc'hantec, 1870) de la façade ouest de Confort-Meilars. Photographie lavieb-aile.
.
.
Tout en haut : un cavalier et un ange.
.
.
SOURCES ET LIENS.
.
Congrès archéologique de France 1957.
— COUFFON (René) & LE BARS (Alfred), 1988, Notices de Meilars-Confort.
http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/MEILARS.pdf
"Suivant la généalogie de la Maison de Rosmadec, l'édifice actuel fut bâti en même temps que l'ancienne église de Landudec, entre 1528 et 1544, par les soins d'Alain de Rosmadec et de sa femme Jeanne du Chastel. La date de fondation inscrite sur la face nord du chevet, "EN. LAN. MVCSXXVIII. LE. SECOND. DIMANCHE. DAVST", vient confirmer cette assertion, mais les nombreux poissons et les caravelles sculptées sur le tympan du portail ouest montrent la participation importante des pêcheurs et armateurs, comme à Roscoff et à Penmarc'h."
" Statues en pierre du pignon ouest : saint Michel terrassant le dragon sur le fleuron du gable, et, dans les niches, saints dont les Apôtres, retrouvés, mutilés, après la Révolution"
— DARSEL (Joachim), 1966 Bulletin philologique et historique:vol.1, Les seigneuries maritimes en Bretagne.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6430324f/f110.item.r=rosmadec.texteImage
"Les seigneuries maritimes en Bretagne comme en Normandie et autres régions riveraines de la Manche ou de l'Atlantique ont joué un rôle capital dans la vie économique et administrative, voire militaire, de leur pays respectif . En Normandie, leurs propriétaires se divisaient en deux catégories : les « gravagers » ou « hauts justiciers »; et les « bordiers » ou « bas justiciers ». Cette distinction se retrouvera en Bretagne mais seulement dans les faits, dans l'exercice de certains droits, sans qualification aucune; et l'emploi de ces épthètes demeurera extrêmement rare. Les uns et les autres, en revanche, se partageront sur le même pied quantité d'autres redevances féodales, portant sur la navigation et la pêche. Ces redevances étaient, pour la plupart, communes à toutes les régions maritimes de l'Europe occidentale : péages, coutumes, dîmes du poisson et du sel, tonlieu, ancrage, passage, halage, jeaugeage, etc.
Droits sur la pêche.
Au Moyen Age, le poisson était d'une abondance incroyable dans la Manche. Outre diverses grosses espèces, comme la morue, les cétacés (baleines, marsouins, cachalots), y étaient aussi courants que celles plus communes du hareng, du maquereau, du merlan ou du congre . Or, si la mer relevait de l'autorité du duc de Bretagne
jusqu'à trente lieues de la côte, le rivage, lui, demeurait du domaine des seigneurs particuliers riverains . Et ceux-ci en exploitaient au maximum les nombreuses ressources, car ils disposaient de tout : du milieu et des hommes. Seuls, répétons-le, ils pouvaient exploiter édifier des estacades, construire des chaussées et des quais aux limites maritimes ou fluviales de leurs fiefs; seuls, donc, ils pouvaient construire et armer des nefs; seuls, organiser la pêche et la navigation; seuls, créer et mettre en valeur des salines. Les preuves de ces diverses activités nous sont fournies en Bretagne par une foule de documents qui ne concernent pas seulement les domaines ducaux mais encore et surtout les fiefs seigneuriaux, des plus importants aux plus modestes. Sur la côte septentrionale notamment, pêcheries et sêcheries abondent .
Sur la côte sud, les pêcheries de Cornouaille, aux seigneurs de Penthièvre, rivalisaient avec celles, ducales, de Saint-Mathieu, avant leur totale décadence du XVIIe siècle. Les pêcheurs des terroirs de Douélan, de Cap-Sizun, de Cap-Caval, au xvie siècle, étaient obligés d'abandonner aux receveurs du duc de Penthièvre, à un prix déterminé, les congres, merlus et autres poissons qu'ils prenaient. Ils pouvaient racheter ce droit en versant une certaine somme pour chacun des maîtres, des compagnons et des « pages » ou mousses.
Ceux qui cessaient de pêcher, ou qui allaient pêcher ou naviguer ailleurs, autrement dit les « vacanteurs » devaient acquitter en espèces, la moitié de ce droit. Les uns et les autres se faisaient enregistrer, par paroisse, chaque année, par devant un notaire de la seigneurie ( Les maîtres et les compagnons du Cap-Sizun payaient de 25 à 50 sous chacun, suivant les paroisses; les « pages » et les "vacanteurs ", de 12 sous 6 deniers à 25 sous. ).
Le baron de Pont-l'Abbé exerçait ce même droit de « vacanteaige », avec celui de pêcherie et sècherie dans les paroisses de Loctudy, Combrit et Treffiagat .
Le seigneur de Lezoualc'h, en Goulien, jouissait au port et rade de Loc'h, de la faculté de prendre une fois l'an, un merlu sur tout « compagnon de bateau » qui déchargeait au dit port; outre un droit de sennage consistant en le septième des merlus, dorades et autres poissons péchés sur les côtes de Cléden,
Plogoff, Goulien et aux environs de l'île de Sein .
Le baron de Névet possédait la rivière de Pouldavid avec les havres de Porz Ru et de Tréboul, avec droit de prétendre aux poissons royaux (dauphins, esturgeons, etc.) capturés en la dite rivière et en celle de Plolan (Poullan); et au cinquième des mulets et maquereaux ramenés par toute barque de pêche; pour les turbots, le plus beau revenait au seigneur.
Droits sur la navigation
Le domaine maritime seigneurial ne s'étendait que sur les grèves jouxtant le fief, fort peu loin en mer. Sur la terre ferme, en revanche, aux embouchures des rivières et sur le cours inférieur de celles-ci, le maître du domaine exerçait une autorité exclusive sur la navigation et le trafic par eau.
Note :En Normandie, le domaine maritime seigneurial, l'« aquagium » ou « ewagium », sera administré au XIIE siècle par un officier particulier, l'« aquarius », sorte d'intendant et de justicier, auquel succédera un Vicomte de la Mer ou de l'Eau. J. DARSEL, Bailliages et vicomtés des eaux de part et d'autre de la Manche, communication à la 32e Semaine d'Histoire du Droit Normand, Avranches, juin 1961.
En Bretagne, rien de pareil : le sénéchal et le procureur fiscal assumeront ce rôle, assistés de receveurs ou de fermiers. Nous relevons cependant l'existence, au XIe siècle, près de l'abbaye de Redon, d'un officier chargé de la recette des droits dus sur les cargaisons de vin et le sel, mais nous ignorons l'étendue de ses attributions; il s'agit d'un certain Helgomarc'h « qui fuerat ante serviens monachorum de salinagio et vinagio navium » (1066-1075). — Cartulaire de Redon, éd. A. DE COURSON, p. 260.).
D'abord sur toute barque, bateau ou navire en construction ou en réparation (En 1543, Jean du Quélénec, baron du Pont, vicomte du Fou et du Quélénec, déclare un devoir sur les navires en construction ou en réparation sur les rivages de la mer; devoir qu'il estime à 50 sous par an (Arch. dép. de la Loire-Atlantique, B 2025). En 1678, Armand du Plessis, duc de Richelieu, héritier de Françoise de Guémadeuc, comtesse d'Auray, sa mère, déclare un droit calculé d'après le tonnage
et le bois employé, sur tous les navires, grands ou petits, que l'on fera construire, radouber ou « rhabiller » sur le rivage de la mer, dans les limites de la terre et seigneurie d'Irvillac et Logonna. (Ibid., B. 2041.)).
Ensuite sur la cession de tout bâtiment de mer. Ce droit était dit de « lods et ventes ». Il fut octroyé, le 20 mai 1476, à Alain de Rosmadec, écuyer, seigneur de Tiouarlen, sur les vaisseaux construits au port d'Audierne. — Bibl. nat., ms. fr. 8269, fol. 134. A Brest, il était attaché à la charge de voyer, prévôt et sergent féodé de la ville, relevant héréditairement de la seigneurie de Kérénou (Arch. dép. du Finistère, B 1346, 1374, 1669). Un arrêt du Conseil d'État, rendu en 1693, réunit tous les droits du voyer au domaine royal et ne laissa au seigneur de Kérénou que le dixième du produit de leur recette. A Landerneau, le prince de Léon exigeait de tout propriétaire de navire construit dans l'année, un droit de « quintaine » à disputer le 1 er mai sur la rivière, par « vesseau » (Arch. dép. de la Loire-Atlantique, B 1694).
Lorsqu'un navire était destiné au cabotage, lui et sa cargaison se voyaient frappés d'un très grand nombre de droits. En premier lieu, de droits de ports et havres ou d'entrée et d'issue, perçus au profit des seigneurs locaux avant de devenir impositions ducales, pour la plupart. Dès la seconde moitié du XIVe siècle, le prince breton voyant les revenus ordinaires de son domaine fort diminués à cause des guerres et contraint de trouver de nouveaux subsides pour couvrir les frais d'entretien de son armée, décide de traiter avec ses vassaux les plus dociles. Il obtient ainsi de l'évêque-comte de Saint-Malo les deux tiers des droits levés en ce port (1365) ; puis de l'évêque de Cornouaille, de nouveaux tributs sur les marchandises dans les ports du diocèse; enfin de l'évêque de Tréguier, en 1394, la totalité des impositions exigées à Tréguier et à La Roche Derrien et dont la perception, semble-t-il, avait été suspendue ( DOM MORICE, Preuves, I, 1602, 1603; II, 626, 627. ). Ces concessions à titre temporaire furent reconduites et devinrent définitives. Les ducs Jean IV et Jean V ne connurent point le même succès près des seigneurs laïques : celui de Léon, entre autres, refusa obstinément de partager avec eux. Les ports d'entre Couesnon et Arguenon, propriété des Penthièvre, confisqués en 1420, restitués en 1448, rattachés au domaine ducal en 1485, firent retour à leurs premiers détenteurs, avec tous les autres biens
du comté de Penthièvre, en 1536; puis Jean de Bretagne, duc d'Étampes, les reçut définitivement, en 1555, contre l'abandon au roi de tous ses droits sur le duché de Bretagne."
—LE BOUEDEC (Gérard ),2008, « le cabotage sur la façade atlantique française (XVe-XVIIIe siècles), Revue d’Histoire maritime, n° 8, Presses Universitaires de Paris Sorbonne, 2008, p. 9-37.
—LE BOUEDEC (Gérard ), 2016, Les trajectoires portuaires en Bretagne du XVe au XXe siècle
https://doi.org/10.4000/nuevomundo.69922
"En effet aux XVe, XVIe et XVIIe siècles, c’est l’ensemble de l’économie bretonne agricole et proto-industrielle qui porte la dynamique maritime. Ce modèle a pu émerger car les Bretons ont su saisir certaines opportunités que leur offrait la conjoncture internationale. La gestion de la neutralité bretonne, les difficultés que connaissaient les ports normands, l’orientation scandinave et baltique de la flotte hollandaise et zélandaise ont sans nul doute favorisé « les rouliers bretons ». Ils possèdent une flotte nombreuse mais de taille unitaire médiocre. Il n’y a pas de frontière étanche entre cabotage et pêche pas plus qu’entre activités maritimes et activités agricoles. Mais cette fonction de rouliers ne reposait pas sur un capital maritime solide. Dès la fin du XVIe siècle, les caboteurs bretons de la grande rocade européenne sont submergés par l’offensive hollandaise. La réussite bretonne devait beaucoup à la conjoncture. L’organisation de l’armement breton n’était pas prête à affronter la concurrence étrangère. La Bretagne présentait une sorte de modèle intégré, dont Saint-Malo incarne la réussite, certes qui ne disparaît pas, mais qui est déstabilisé par les effets de la première mondialisation et de la mise en œuvre en Bretagne de la politique mercantiliste durant le règne de Louis XIV"
—LESPAGNOL, André et TANGUY, André, 1993 dans « Penmarch port européen aux XVe-XVIe siècles. Réflexion sur un destin problématique », Le pays bigouden à la croisée des chemins, n° 17 de la Revue du Cap Caval, 1993.
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne. Les ateliers du XVe au XVIe siècle. Presses Universitaires de Rennes.pages 189-191
http://www.pur-editions.fr/couvertures/1409573610_doc.pdf
.
— Pop.culture
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA00006261
"Chapelle fondée et bâtie entre 1528 et 1544 par Alain de Rosmadec et Jeanne du Chastel sa femme ; inscription sur le mur nord du chevet : EN LAN MILVCXXVIII (1528) LE SECOND DIMANCHE D'AUST (août) et sur l'élévation ouest inscription illisible sauf : MILVCXXVIII (1528) ; restaurations faites dés 1651 (inscription sur la 1ère fenêtre nord : 1651 M A BRONELOC RECTEUR IEAN DONAR F (ABRIQUE) ; restauration de la façade sud et modification de la corniche en 1707 (date sur l'un des pignons) ; reconstruction de la tour de 1711 à 1714, ; haut de la tour rebâti de nouveau en 1736 (inscription : M (ESSI) RE JOSEPH LE DOURGUY R (ECTEUR) R 1736 ; tourelle d'escalier surélevée au 18e siècle ; fenêtres est des bas côtés bouchées à une date inconnue ; devient église paroissiale en 1910"
— PARCHEMINOU (Corentin), 1933, Meilars-Confort, Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie (BDHA)
"C'est aujourd'hui l'église paroissiale. Elle fut construite par Alain de Rosmadec, Baron de Molac. L'édifice appartient donc à la première moitié du XVIe siècle et présente tous les caractères de la, dernière période du style ogival. Les murs, sont· en pierres de taille, dont plusieurs mesurent jusqu'à 2 mètres de longueur.
La façade occidentale, accotée de contreforts garnis de statues et couronnés de pinacles feuillagés, est très .belle avec sa porte ornée de moulures et de colonnettes, surmontée d'un gable aigu sur lequel se dresse une statue de saint Michel, d'attitude très mouvementée, armé en chevalier et terrassant le Dragon. Dans le champ du fronton sont sculptés des bateaux et des poissons, genre de représentation que l'on · .trouve sur la plupart des églises du littoral, depuis la Pointe du Raz jusqu'à Penmarc'h. Sur la même ·sur- .face il y a une longue inscription gothique devenue malheureusement trop fruste pour être déchiffrable."
"La façade occidentale, accotée de contreforts garnis de statues et couronnés de pinacles feuillages, est très belle avec sa porte ornée de moulures et de colonnettes, surmontée d'un gable aigu sur lequel se dresse une statue de saint Michel, d'attitude très mouvementée, armé en chevalier et terrassant le Dragon. Dans le champ du fronton sont sculptés des bateaux et des poissons, genre de représentation que l'on trouve sur la plupart des églises du littoral, depuis Ia Pointe du Raz jusqu'à Penmarc'h. Sur la même surface il y a une longue inscription gothique devenue malheureusement trop fruste pour être déchiffrable.
Le calvaire monumental qui se dresse devant la façade principale peut être classé au nombre des calvaires de second ordre, ll est constitué par un massif de maçonnerie de forme triangulaire dont les angles sont armés d'éperons. Sur chacune des faces, légèrement concaves, sont percées trois niches. Chaque éperon en a une autre. Soit un total de douze. Autrefois ces niches abritaient les statues des douze Apôtres. Pendant la Révolution, elles furent décapitées et mutilées puis enterrées auprès de l'église. Ce n'est qu'en 1849 qu'elles furent retrouvées. Plus tard, elles furent restaurées et placées dans les niches de la façade Ouest de l'église, où elles sont d'un bel effet. Vers 1870, Yann Larc'hantec, de Plougonven, dont l'atelier se trouvait d'abord à Morlaix, ensuite à Landerneau, fut chargé de sculpter de nouvelles statues pour le calvaire. Il s'en acquitta soigneusement. Au lieu de loger les Apôtres dans les niches, il les campa tout autour de la plate-forme, au-dessus de la corniche, et il faut convenir qu'ils offrent ainsi une silhouette imposante, dominés par une grande croix fort artistique, taillée par le ciseau du même ouvrier breton."
https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/295fd408ca344ed8913a9ae63b8516cd.pdf
— ROLLAND (J.), 1922, La chapelle Notre-Dame de Confort (Saint-Brieuc, 1922) : in Infobretagne
Le champ du fronton principal, à l'ouest, est garni d'un nombre considérable de statues et orné de sculptures de barques mouillées sur leurs ancres. Ces embarcations sont montées par des pêcheurs occupés à inspecter l'horizon et paraissant attendre dans le recueillement et la prière l'arrivée prochaine des grands et des petits poissons qui, non loin, prennent leurs ébats.
Dans cette même surface se trouve une longue inscription gothique malheureusement assez fruste et par suite peu déchiffrable.
http://www.infobretagne.com/meilars-confort-chapelle.htm
— TOUCHARD (Henri) 1967. Le commerce maritime breton à la fin du Moyen Âge ; Annales littéraires de l'Université de Nantes, fascicule 1 ; Paris, Les Belles Lettres, 1967, XXXIX-451 p. (dont 27 pages pour les pièces annexes) : : Perrin Charles-Edmond. Le commerce maritime breton à la fin du Moyen Âge
[Henri Touchard. Le commerce maritime breton à la fin du Moyen Âge ; Annales littéraires de l'Université de Nantes, fascicule 1]. In: Journal des savants, 1968, n° pp. 244- 254;
http://www.persee.fr/doc/jds_0021-8103_1968_num_4_1_1183