Les vitraux armoriés (quatrième quart XVIe siècle ; XXe ; 1957) de la chapelle de Trémalo à Pont-Aven lors d'une excursion de la Société archéologique du Finistère.
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Le 26 novembre 2021, les Journées d'études de la Société archéologique du Finistère, menées par le président Yves Coativy, ont débuté par une visite du four à pain et de l'enclos mégalithique de Kerambris à Névez, et se sont poursuivies par une visite du Musée de Pont-Aven, où Daniel Le Feuvre, qui venait de publier dans le dernier bulletin de l'association une étude très approfondie des œuvres du peintre André Joly (1882-1969), a enrichi de ses commentaires la présentation de la médiatrice.
Le soleil était déjà couché lorsque nous terminâmes la journée par la découverte, incontournable, de la chapelle de Trémalo. Nous y admirâmes, bien sûr, et à nouveau sous la guidance de Daniel Le Feuvre, le Christ Jaune qui a donné à la chapelle sa renommée internationale. Mais pas que.
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PRÉSENTATION.
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La chapelle, qui est privée, a été restaurée en 1755, par Jean-Baptiste Mahé, recteur de Nizon, et en 1957 à l'initiative du propriétaire du Plessis, le vicomte Patrice de la Villemarqué de Cornouaille. Après lui, son fils Xavier a présidé l’Association pour la sauvegarde de la chapelle de Trémalo, laquelle a, en 2009, fait procéder au drainage, au rejointoiement des maçonneries de la façade est, de la voûte de la porte sud et de l’escalier du clocher.
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L’intérieur de la chapelle est composé d’une nef et de deux bas-côtés. Il est divisé en six travées soulignées par des arcades gothiques. Les poutres sont sculptées d'engoûlants et et les sablières de figures humaines et animales. Un (et peut-être deux) motifs héraldiques y sont présents.
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La maîtresse-vitre comportait jadis un Arbre de Jessé, déjà absent lors de la visite du chanoine Pérennès en 1938 . Le tympan lui-même ne conservait que quelques pièces anciennes, la seule intacte étant une précieuse Messe de saint Grégoire, et il a été restauré et largement complété en 1957 par Etienne Scaviner, verrier de Pont-Aven.
La description qu'en donnent Françoise Gatouillat et Michel Hérold en 2005 pour le Corpus Vitrearum est brève, et ces auteurs n'avaient pas identifié les éléments héraldiques. Je m' appuierai néanmoins sur leur travail pour décrire les panneaux. Mais c'est Yves-Pascal Castel et Catherine Puget qui , en 2007, en ont décrypté les armoiries, sans doute aidée par le propriétaire de la chapelle dont le père avait commandité les panneaux récents en 1957. Leur notice est reprise en ligne sur le site municipal Pont-Aven Histoire et Patrimoine. Je me suis appuyé sur ces descriptions, non sans les vérifier et les commenter.
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Mais puisque ces verrières nous conduisent à une étude héraldique, il nous faut présenter les données connues sur l'histoire de la chapelle seigneuriale du manoir de Plessis en Nizon, et étudier les blasons sculptés à l'extérieur.
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HISTORIQUE (d'après T. Daniel et C. Puget, etc.).
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Étymologie.
— Plessis (Plessix) est la forme française de Quinquis.
Quinquis est un toponyme très fréquent, parfois sous la graphie kenkis, issu du moyen-breton kenkist "maison de plaisance" désignant à l'origine des maisons entourées d'une haie de branches entrelacées (on a rapproché le préfixe kenkis du radical gallois cainc- , "branche"). Le vieux français plesse avait un sens identique et a donné plessis, "entrelacement". Le toponyme s'applique souvent, en Bretagne, à d'anciennes mottes féodales ou castrales, dont le sommet est défendu par de fortes palissades. Pour F. Tournier, "Kenquiz, quenquis (plessis, clôture), équivalent de "haia" (enceinte faite de haies) peut dénoter aussi bien des enclosures à vocation agricole qu'à vocation défensive militaire." Mais la situation du manoir (cf. topologie) permet d'évoquer un site idéal pour une vocation défensive. Mon opinion se trouve confirmée dans un article de J. Le Goff-Ruiz 2011.
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—Trémalo.
"Du point de vue étymologique, la particule “Tré-” désigne, selon Bernard Tanguy, non une trève dépendant d’une paroisse, mais un village d’origine ancienne qui tirerait son nom d’un personnage, un certain Malo dont la silhouette se perd dans la nuit des temps. Paradoxalement, si un acte de 1653 donne à la chapelle le titre de “Notre-Dame de Saint-Malou, en laditte paroisse de Nizon”, aucune statue n’évoque ici le patron de la cité des corsaires. A moins que Malo étant bien loin, on lui ait, à une époque donnée, attribué le nom de Corentin, fondateur du diocèse de Cornouaille. Ce ne serait pas la seule fois qu’une statue ait été rebaptisée pour les besoins de la cause locale." (Castel et Puget)
Je note sur la carte IGN le toponyme Pontic-Malo ("petit pont Malo"), mais il doit être récent, n'est pas attesté sur les cartes antérieures, et doit se rattacher au nom de la chapelle qui le domine.
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Les seigneurs de Quinquis ou Quenquis/Plessis et le manoir de Plessis-Nizon.
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La seigneurie du Plessix à Nizon appartint successivement aux familles du Plessis, Feydau et Hersart de la Villemarqué.
"La Réformation de 1426 (pour 1427?) révèle, dans la paroisse de Nizon, l’existence des manoirs suivants : Le Quenquis ou Plessix ; Kerazret appartenant à Guillaume de la Rue Neuve ; Penboutou possédé par Yvon du Plessix ; Penisquin, à Pierre du Hautbois ; Penalen, à Jehan Penquelen. Celle de 1536 mentionne quelques autres manoirs, au nombre desquels figure celui de Rustéphan .
La réformation de 1427 sous le rapport de paroisse de Nizon mentionne "le manoir de Paubatoux (?), Yvon du Plessix, noble, et Jehan du Plessix, noble.
A la "Montre" de l'Evêché de Cornouailles de l'an 1481 qui s'est tenue à Carhaix les 4 et 5 septembre, est présent Maurice le Quinquis, représenté par Guillaume son fils, archer en brigandine ;
A la "Montre" de l'Evêché de Cornouailles de l'an 1536 qui s'est tenue à Quimper le 10 et 11 mai est présent Guillaume du Plessix, sieur dudit lieu, à deux chevaux et armé
A la "Montre" de l'Evêché de Cornouailles de l'an 1562 qui s'est tenue à Quimper les 15 et 16 mai, les nobles suivants de Nizon apparait : François du Plessix, sieur du Plessix, présent, dict faire corselet suivant sa déclaration .
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"Plessix (du), en breton Quenquis (du), sieur dudit lieu, paroisse de Nizon, - de Missirien, paroisse de Kerfeunteun, - de Kerfrez [39], paroisse d’Ergué-Gabéric, - de Kerminihy et de Penbuel, paroisse d’Elliant, - de Kervidal, paroisse de Tourc’h.
Ancienne extraction., réf. 1669, huit générations, références et montres de 1426 à 1562. dites paroisses, évêché de Cornouaille.
D’argent au chêne de sinople englanté d’or ; au franc canton de gueules, chargé de deux haches d’armes adossées d’argent en pal.
-Yves, vivant en 1427, épouse Marie de la Villeblanche.
La branche aînée fondue en 1690 dans Feydeau, puis Hersart ; la branche de Missirien fondue dans Autret ; la dernière branche fondue dans la Marche.
Le sr de Kerhouaz, paroisse de Lesbin-Pontscorff, débouté à la Réformation de 1671.
Le sr de Penfrat, débouté au conseil en 1700.
Pol Potier de Courcy édition de 1895, tome II, page 397. Correction 2005" https://www.tudchentil.org/spip.php?article738
Remarque.
Les armoiries des Quenquis figurent sur la baie 107 de la cathédrale de Quimper où se voit un chanoine qui les porte. Il s'agit de Pierre de Quenquis :
Pierre de Quenquis fut reçu chanoine de la cathédrale le 20 janvier 1415. Il décéda en 1459, et son tombeau fut placé dans la chapelle Saint-Corentin ( depuis, chapelle Saint-Paul). Ses armes sont aussi sculptées sur l'un des deux écussons des clefs de voûte du bas-coté nord de la nef, et en deux écussons accolés, à la naissance de la voûte du porche du portail nord.
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Généalogie (des aînés) de la famille du Plessix : https://www.tudchentil.org/spip.php?article583
- Yves du Plessix x Amice de la Villebranche [Montre 1427]
- Maurice x Clemence Kergoet [ décédés en 1502]
- Guillaume I x Constance Kerjequel [Montre 1481. Lui ou son fils :Montre 1536]
- Guillaume II x Marguerite du Rinquier du Poulguin (fille de Louis du Rinquier et Louise Didoueget). Ils fondent l'actuelle chapelle de Trémalo, datée de 1550.
- François I x Marguerite Le Glas (décédée en 1582). [Montre 1562. Existe en 1568]
- François II x Marie Du Moulin [mariage en 1574]
- Nicolas x Hélène Guimarho [Existe en 1602 ; Marié en 1638 ]
- Georges-Joseph (1640-1669) x Mauricette de Bouvans . [ Marié en 1659 ; Existe en 1659]. Ils ont une fille unique Anne du Plessix, héritière, épouse en 1690 Charles Feydeau de Saint-Remy, cf. infra.
- Jacques du Plessix, frère de Georges, héritier du nom. [Existe en 1669]
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Généalogie des descendants : Feydeau et Hersart :
- Marie-Anne du Plessix, fille et héritière de Georges du Plessix, x 1690 Charles Feydeau de Saint-Remy, chevalier de Malte.
- Louis-Charles Feydeau (1732-1786) x Marie-Josèphe Briant Du Stang, d'où
- Jean-Marie Feydeau de Vaugien, seigneur du Plessis Nizon, officier de marine, x 1774 Marie-Thérèse de Talhouët-Grationnaye.
- Marie-Ursule Feydeau de Vaugien (1776-1847) dame du Plessis-Nizon x 9 Novembre 1798, le comte Pierre Michel François Marie Toussaint Hersart de la Villemarqué (1775-1843)
- De ce mariage naquirent huit enfants, dont le plus jeune fut Théodore-Claude-Henri, l’auteur du Barzaz Breiz ( Plessix-Nizon 1815 - 1895 manoir de Keransquer, près de Quimperlé). Le manoir du Plessix , la chapelle de Trémalo et le Bois d'Amour appartiennent encore à la famille de la Villemarqué. Mais la propriété passent à :
- Roland Eleonore Marie Cyprien Armand (Quimperlé 1861-Kermaria Pont-Aven 1937 X Jeanne Marcetteau du Brem 1867-1958
- Patrice (1904-1959) x Anne-Marie de Grimoüard (1907-1990). https://gw.geneanet.org/fperrach?lang=fr&iz=4&p=patrice+albert+michel+armand&n=hersart+de+la+villemarque+de+cornouaille
- Xavier de la Villemarqué de Cornouaille (-décédé au manoir de Plessis 19 septembre 2018)
- Yann Hersart de la Villemarqué de Cornouaille
(sous réserve)
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Le manoir.
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Un article illustré de photos de J. Le Goff-Ruiz permet de le découvrir, avec un bâtiment rectangulaire de style classique bien éclairé par de nombreuses fenêtres et datant de la seconde moitié du XVIIe, et l'ancien manoir contemporain de la chapelle (1550), et "dont les pierres énormes servant de linteaux aux portes et fenêtres, toutes curieusement dissemblables, et où figurent quelques belles accolades" incitaient Bertrand Queinec (*) à évoquer "très facilement la réutilisation des matériaux d'un manoir primitif, peut-être victime d'un incendie". Une chapelle du début du XIXe siècle, des écuries et un puits ancien complètent cet ensemble.
(*) Bertrand QUEINEC, 1992, page 187
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Situation : topologie.
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L'examen des cartes est, comme toujours, très utile.
La carte IGN et la photo aérienne permettent de repérer la proximité du château (ancien manoir) et de la chapelle, reliés par une route traversant Quistilliau et Trémalo-Kerhuil en restant sur la crête. En effet, le château est à 67 m d'altitude, à la pointe d'un quadrilatère aux pentes abruptes, tracées par le cours de l'Aven et d'un ruisseau prenant sa source vers Kerhuil (étymologie non retrouvée). Et la chapelle est à la même altitude approximativement.
Cette situation en hauteur mais dominant directement un cours d'eau est évidemment très avantageuse sur le plan militaire et économique. Plus précisément, il permet l'établissement d'un moulin (associé aux droits seigneuriaux), "le moulin du Plessis", aujourd'hui démoli mais où un bief subsiste. Le zoom de la carte IGN en détaille l'implantation (le site Pont-Aven signale une installation de pisciculture ; cela rappelle que les seigneurs percevaient des droits sur la pêche). Ce n'est qu'un des nombreux moulins qui ont fait la prospérité de Pont-Aven.
Juste en face, un site symétrique porte le nom de Colline Sainte Marguerite, témoignant d'une ancienne chapelle et donc d'une sanctification de ces promontoires.
La situation de la chapelle est celle que je retrouve presque constamment : point haut, proximité d'une rivière, moulin. On peut l'expliquer par les avantages économiques et politiques, ou par la reprise d'anciens cultes, les deux ne s'excluant pas.
On peut observer la situation des ruines de Rustéphan, deuxième manoir de Nizon.
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La carte d'Etat-Major (1820-1866) rend plus visible, par le hachurage des pentes, les reliefs et l'hydrologie. La carte de Cassini dressée en 1783, permet de repérer tous les moulins indiqués par une petite roue dentée, d'examiner la modification du paysage, et de relever les toponymes (ici : Trémalo ?)
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Carte de Cassini Gallica https://gallica.bnf.fr/html/und/cartes/france-en-cartes/la-carte-de-cassini?mode=desktop
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"L’édifice, situé sur les hauteurs qui dominent Pont-Aven (mais sur le territoire de la paroisse de Nizon), se trouve sur le chemin qui monte du bourg vers le manoir du Plessis-Nizon et, d’autre part, vers le hameau de Trémalo. On y accède par une longue allée de chênes et de châtaigniers, dans ce qu’on appelle localement le Bois d’amour, et la majesté de ce parcours contraste avec la simplicité de la chapelle, formant un ensemble réellement harmonieux.
Construite en 1550 (comme en témoigne une inscription au-dessus de la porte sud), elle est de fondation seigneuriale : le blason des du Plessis figure en plusieurs endroits de l’édifice : sur la façade ouest, sur la maîtresse-vitre, sur les sablières. Le style relève encore du gothique flamboyant, ce qui n’a rien d’étonnant dans cette région où la tradition médiévale persiste en même temps que pénètrent les nouveautés de la Renaissance.
Le plan est rectangulaire, orienté est-ouest. La longueur de l’édifice est de 24 m, la largeur de 13 m. À l’extérieur, les murs en granit sont soigneusement appareillés en pierre de taille ; le chevet plat comporte trois baies flamboyantes, celle de gauche étant murée ; la façade occidentale est d’une grande simplicité : une porte en anse de panier, quatre contreforts (deux droits de part et d’autre de la porte, et deux biais aux extrémités nord et sud), un blason sculpté au milieu de la façade, un petit clocher de type cornouaillais, à une seule cloche.
Du côté nord, une seule petite fenêtre passante, contrastant avec les ouvertures du côté sud : deux portes en anse de panier (l’une toute simple, l’autre surmontée d’une accolade et de pinacles latéraux), et quatre fenêtres (deux ouvertes dans le muret, deux passantes, la première du XVIe siècle avec son remplage d’origine, la seconde construite en 1755). L’ensemble est couvert d’une imposante toiture dissymétrique qui descend, au nord, jusqu’à hauteur d’homme." (T. Daniel)
D'après Castel et Puget citant Bertrand Quéinec I, 1992:
La chapelle était desservie par les prêtres de la paroisse de Nizon. La fabrique était tenue d'y célébrer deux messes, l'une à l'intention du seigneur de/u Plessis "le jour de Monsieur saint Marc", l'autre à l'intention du sieur Troguidic (un patronyme qui échappe à mes recherches) à la Saint Grégoire. Ces clauses n'ayant pas été respectée, il fallut une sentence de la cour royale de Concarneau en 1624 pour obliger la fabrique à reprendre ces célébrations à l'intention du sieur du Plessis à la Saint-Marc, et à l'intention du même sieur du Plessis, héritier des Troguidic, à la Saint Grégoire.
Trémalo fondée par la famille du Plessis est considérée par eux comme leur chapelle privée où sont célébrés les baptêmes de la famille, mais cette appropriation était contestée par Charles de la Roche-Rouxe, du manoir voisin de Penanroz, qui déclarait en 1653 "avoir le droit de faire figurer ses armoiries dans la maîtresse-vitre de Saint-Malou en la paroisse de Nizon, comme elles figuraient depuis longtemps dans l'église paroissiale."
C'est sans doute le même différend qui entraîna un affreux scandale le 11 septembre 1661, le jour du pardon, quand un groupe de cinq gentilhommes pénétra dans le sanctuaire avec à leur tête Alain de Guer, marquis de Pont-Callec, seigneur de la Porte-Neuve en Briec. Ce dernier bondit l'épée à la main dans le chœur pour attaquer le jeune Georges du Plessis, qui aurait manqué de respect au procureur fiscal du puissant marquis.
Tout le long du XVIIIe siècle les finances de la fabrique de Trémalo sont saines, et les revenus permettent un bon entretien de la chapelle.
Le 3 messidor an III (juin 1795), on procéda à la vente aux enchères des biens de la fabrique de Nizon, dont la chapelle de Trémalo, la chapelle Saint-André et la chapelle Saint-Maudez devenus biens nationaux. La chapelle de Trémalo, son petit placître au sud planté de trois chênes et de deux châtaigniers, ainsi que les matériaux en pierre de taille d'une croix écroulée, est adjugée pour 5320 livres au citoyen Pierre Caudan, riche cultivateur de Keramperchec et maire de Nizon. L'intention de ce dernier, dont deux de ses fils seront prêtres dont l'un vicaire à Nizon) est de rendre au culte la chapelle après les troubles. C'est après 1805 que la famille de la Villemarqué y effectue des travaux et édifie un nouveau calvaire en 1807.
Au cadastre de 1832, la chapelle est indiquée avec ses 300 m² de superficie comme propriété de la commune.
En 1852, Cyprien de la Villemarqué fait donation à la fabrique de "l'église succursale de Nizon" d'une rente annuelle pour la célébration des messes à Trémalo.
Le grand pardon était célébré à la Nativité de la Vierge le 8 septembre, et un autre avait lieu le dimanche le plus rapproché de la Sainte-Anne, le 26 juillet. Plus tard on institua une troisième célébration le 15 août, jour de l'Assomption.
Le 11 mai 1932, la chapelle est classée "monuments historiques".
Le groupe de Sainte-Anne, la statue de la Vierge et le Christ Jaune sont classés "monuments historiques" à titre d'objet le 16 août 1957.
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Je note sur la base Geneanet que Trémalo figure comme lieu de décès sur les actes paroissiaux dans la deuxième moitié du XVIIe siècle pour les familles Couric ou Gouric (Pierre Coric 1630-Trémalo1690), Le Calvez, Le Du, Le Deuff, Le Tallec, Quénéhervé.
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Le pignon ouest.
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Sur le pignon ouest, sous le clocher à gables aigus, pinacles et pointe à crochets, et au dessus de la porte cintrée flanquée de contreforts, un ange aux ailes éployées tient un blason des armoiries de la famille des Seigneurs Plessis Nizon, fondateurs de la chapelle. La pierre étant érodée, on devine les meubles (notamment le chêne) plus qu'on ne les distingue avec certitude.
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La façade sud et sa porte flamboyante.
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L’élément architectural le plus intéressant est la porte sud en anse de panier, où l'ocre rouge qui rehaussait jadis les contours du panneau d'inscription a laissé quelques traces.
L'accolade à fleurs d'acanthes et fleuron s'appuie sur deux culots qui supportent des pinacles à fleurs ampulliformes et masques.
Deux blocs de pierre, de chaque coté du fleuron, sont sculptés d'inscriptions en réserve. Leur lecture est difficile, surtout pour un visiteur qui ne bénéficie pas des meilleurs conditions d'ensoleillement et de lumière rasante (chaque inscription, comme les personnages des horloges astronomiques, ne livre son message qu'à une heure et parfois une date bien précise et la réserve aux fidèles patients et persévérants). La première, à gauche, est en lettres gothiques sur deux lignes, et on y a lu :
ALAIN AUDREN
FABRIQUE DE CEANS
La seconde porte, sur une ligne, la date : LAN 1550. Numérotation en chiffre arabe.
La base Geneanet ne fournit aucune donnée sur ce nom AUDREN à Nizon ou Pont-Aven avant 1743, et encore moins avec ce prénom.
C'est la lecture la plus assurée. Citons d'autres leçons : GUILQUENQUIS 1558 (renvoyant à Guillaume de Quenquis), pour la notice de l'exposition Gauguin et le Christ Jaune du Musée d'Orsay et de Pont-Aven (Puget, 2000), ou bien LAN 1556 (pour René Couffon).
Néanmoins, Castel estime que sa lecture de 1550 est "claire".
"Le “fabrique”, paroissien en charge de l’édifice, assure les rentrées d’argent et pourvoit aux dépenses. On sait, mais par ailleurs, que le recteur de Nizon, est alors Jacques Le Vescoz . Pourvu de son poste en 1549, il s’y maintient jusqu’en 1580 (“Bulletin diocésain d’histoire et d’Archéologie”, 1938, p. 47)." C. Puget.
Je me demande s'il ne s'agit pas d'une coquille pour Le Vergoz ou Le Vergos, patronyme bien plus attesté en Finistère. Mais cette hypothèse ne permet pas d'aller plus loin. Le corpus épigraphique finistérien conserve la mention d'un recteur Guillaume Le Vergoz (Kerlaz, Sainte-Anne-la-Palud) dans les années 1653 et 1654.
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La crossette d'angle sud-est : un lion tenant un blason.
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C'est un lion de crossette typique, avec la gueule débonnaire, la langue tirée, la crinière bouclée et la queue faisant retour sur l'arrière-train. Sa tête est tournée vers l'est, et donc vers le manoir et ses seigneurs. Mais il tient un blason bien érodé et défiguré ("démeublé") par les lichens. Y.-P. Castel y reconnaît les armes du Plessis.
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On remarque aussi ce bloc sculpté.
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Nous pouvons maintenant entrer dans la chapelle et nous diriger vers le chœur.
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Mais avant d'examiner la maîtresse-vitre, nous remarquerons le blason intégré dans la frise des sablières, du coté gauche près du chœur.
Ce sont les armes de la famille du Plessis. Le chêne et ses glands pourraient renvoyer au nom quinquis. Le chêne est figuré par un tronc central, trois feuilles de chêne vertes, et des glands au bout de leurs tiges ou pétioles (gland et petioles rouges et non jaune d'or comme il siérait) ; ce serait alors un chêne pédonculé Quercus robur. Les deux haches en pal occupent une place un peu exagérée. Voici le modèle :
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Castel, citant apparemment Bertrand Quéinec, décrit page 2 "les deux écussons de bois peint sur une poutre au dessus du chœur, la place d'honneur, montrent les armes de Guillaume du Plessis et de Catherine de Botigneau son épouse." Mais je n'ai pu trouver une confirmation de ce couple. Il ajoute : "on retrouvait d'ailleurs dans un vitrail disparu les armes du même Guillaume du Plessis accolées à celles de sa deuxième épouse Marguerite du Rinquier du Poulgwin." Je n'ai pas trouvé confirmation d'un deuxième mariage de Guillaume II du Plessis.
Annotation d’un descendant de la famille Keransquer, Mikaël Ansker (comm. pers.) :
"Concernant la chapelle de Trémalo, située à Pont-Aven, le blason situé dans l’un des vitraux (d’argent à deux haches de gueules adossées), est celui des Keransker ou Kerasker. Il est donc possible qu’il y ait eut une fusion de cette famille Hersart avec les Ansquer (Ansker), primitivement propriétaires de cette terre (la donation ayant été effectuée par le duc de Bretagne afin de disperser les moines dans les grands espaces pour transmettre leur foi. Ces haches d’armes font sans doute référence à un Anscher virgiferi, cité dans le Cartulaire de Kemperlé au XIème siècle (*), et l’on sait que leurs attributs étaient, déjà au temps des Romains, un faisceau de deux haches entouré de verges."
(*) page 172. Le virgifer était le sergent chargé des contraintes et de la recette des devoirs et rentes. https://www.bannalec.fr/medias/2015/10/bpt6k1138272.pdf
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Les armoiries des Botigneau ou Botigno sont d'azur à l'aigle éployée d'or à deux têtes becquées et membrées de gueules . Voir la lancette B de la baie 110 de la cathédrale de Quimper où la dame de Botigneau est présenté par sainte Catherine ; Le portail sud de la cathédrale de Quimper ; ou les Dronou de Bodigneau à N.-D. du Folgoët.
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A noter cet aigle bicéphale des sablières, aux têtes becquées de gueules.
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LA MAÎTRESSE-VITRE.
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Cette baie d' 1,80 m de haut et 1, 50 m de large comporte 3 lancettes et un tympan à 6 ajours — dont deux soufflets et 4 mouchettes — et deux écoinçons. Elle a été presque complètement détruite, et seule le soufflet du rang inférieur consacré à la Messe de saint Grégoire, et la mouchette placée à droite représentant les Saintes Femmes au tombeau sont du quatrième quart du XVIe siècle (Corpus Vitrearum) ou de 1550 environ (Y.-P. Castel). Les lancettes sont occupées par des vitreries à bornes modernes, et les autres ajours du tympan de tableaux héraldiques dont certains datent de 1957.
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Les trois ajours supérieurs.
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Le soufflet du sommet.
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Le Corpus Vitrearum le qualifie "d'écu de fantaisie (XXe siècle) sommé d'une couronne ancienne".
Ce sont les armoiries d'or à la herse sarrasine de sable de la famille Hersart de la Villemarqué qui sont placées en prééminence, témoignant du fait qu'elle est présente au Plessis depuis 1798. L'écu est surmonté d'un casque fermé et timbré de la couronne comtale posée sur un bourrelet.
La devise des Hersart, evertit et oequat (sic, pour evertit et æquat) "Il bouleverse et aplanit", en accord avec la métaphore de la herse de labourage, n'a pas été retenue dans la restauration.
Si on consulte en ligne les représentations de ce meuble héraldique, on trouve très généralement la représentation d'une herse rectangulaire et quadrillée, qui ne correspond pas à ce qui est représenté ici où deux traverses se croisent comme le tipi qui sert de logo pour annoncer un camping.
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La herse héraldique est décrite ainsi :
HERSE SARRASINE. Ce meuble, qui prend aussi le nom de coulisse, est composé de six pals alésés, aiguisés par le bas, et de cinq traverses horizontales, jointes par des clous aux intersections, enfin, la traverse du haut est munie d'un anneau dans sa partie du milieu.
HERSE, subst. fém., meuble de l'écu, qui représente un instrument propre à renverser les terres entre les sillons sur les grains, pour les couvrir après qu'ils ont été semés.
D'après le Manuel héraldique ou Clef de l'art du blason », une herse symboliserait un commandement de place forte.
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Pol Potier de Courcy écrit dans son Nobiliaire : d'or à la herse sarrasine de sable; sceau 1381).Il faut retrouver les sceaux de la famille pour retrouver cette forme en X, et notamment ceux conservés au musée Dobrée de Nantes :
https://www.musee-dobree.fr/jcms/navigation/les-collections/bases-de-donnees-en-ligne/sigillographie/origine/bretagne/hersart-de-la-villemarque-fr-eja_91840
https://www.musee-dobree.fr/jcms/navigation/collections/online-databases/sigillography/origin/bretagne/hersart-du-buron-/-breil-du-buron-du-en-eja_91843
https://www.musee-dobree.fr/jcms/navigation/les-collections/bases-de-donnees-en-ligne/sigillographie/origine/bretagne/hersart-de-la-villemarque-/-cornouailles-de-fr-eja_91841
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Hersart de la Villemarqué / Cornouailles (de) :
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En alliance :
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La mouchette supérieure gauche : du Plessis.
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Le blason des du Plessis, déjà présenté dans la sablière, est d’argent au chêne arraché et tigé de sinople, englanté d’or au franc-canton aussi chargé de deux haches d’armes de gueules adossées et posées en pal.
"Armes pleines d'argent à l'arbre de sinople sous un heaume empanaché couronné et cimé d'une tête de lion : assez bien conservé (Gatouillat et Hérold)
"Sous un casque fermé, cimier au lion sur le bourrelet, lambrequins tailladés en volutes feuillagées, un détail emprunté à l’héraldique germanique : “d’argent au chêne arraché et tigé de sinople, englanté d’or au franc-canton aussi d’argent chargé de deux haches d’armes de gueules adossées et posées en pal. ” (Castel et Puget)
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Mouchette supérieure droite.
Placé lors de la restauration, l’écu d’azur au chevron d’or cantonné de coquilles de même , 2, 1, évoque les Feydeau de Vaugien, qui ont été les propriétaires du Plessis de 1690 à 1798.
Il trouve place dans un chapeau de triomphe ancien orné de mascarons et de rubans rehaussés de bandes au jaune d'argent. Le mascaron supérieur, une femme au voile en bavoir, est un motif typique de la Seconde Renaissance, repris très largement après la construction vers 1571 du château de Kerjean.
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Mouchette inférieure gauche.
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En alliance, les armes de Guillaume du Plessis et de Marguerite du Rinquier du Poulguin de gueules au lion rampant morné d’or, fondateurs de la chapelle en 1550. Selon Castel, un blason analogue occupait l’oculus qui éclairait l'autel de Sainte-Anne, avant qu'on le remplace par une large baie en 1755.
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Mouchette centrale de la rangée inférieure : Rare vitrail représentant la Messe de saint Grégoire
Quasi intacte, “la Messe de Saint Grégoire” est datée du 4ème quart du XVIe siècle . Gatouillat et Hérold signalent la présence de verres colorés et l'emploi de sanguine.
Le thème a joui d’une vogue prodigieuse aux XVe et XVIe siècles, pour affirmer, contre les thèses de la Réforme, la présence réelle du Christ lors de la Consécration, dans sa chair (hostie) et dans son sang (vin du calice). C'est dire l'importance du sang qui s'écoule des plaies du Christ qui apparaît nu, sortant du Tombeau, au pape Grégoire (540-604) qui célèbre à la messe entre deux acolytes céroféraire (porteurs de cierge). Le Christ est nimbé, couronné d’épines, flanc percé, mains liées, le fouet de la flagellation et autres instruments posés à son côté.
Selon la légende , pendant qu'il célèbre la messe, une des personnes de l'assistance doute de la présence réelle du Christ dans l'Eucharistie. Quand Grégoire se met à prier, l'assistance aurait eu la vision du Christ sur l'autel, entouré des instruments de la Passion et versant dans le calice eucharistique le sang de sa plaie au côté.. L'iconographie montre souvent le pape assistant à la messe, sans la célébrer lui-même. Le détail important est le jet de sang qui, depuis le flanc, rempli le calice. (Ici)
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Mouchette droite de la rangée inférieure . “Visite des saintes femmes au tombeau”. Deux des trois têtes restaurées en 1957. Fragment d'un panneau réutilisé en réemploi. 4ème quart XVIe, provenant peut-être des lancettes.
Les trois femmes portant les aromates d'empressent de se rendre, au matin de Pâques, au Tombeau où leur maître a été enseveli après la Crucifixion. Il y avait là selon Luc 24:10 Jeanne, Marie, mère de Jacques et Marie de Magdala (Marie-Madeleine), qui porte le vase de parfums ou d'aromates.
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Les vitraux modernes.
Celui qui éclaire l'autel Sainte-Anne a été réalisé en 2013 par Charles Robert de Pluguffan, après que la baie, qui avait été bouchée au XVIIIe siècle, ne soit réouverte, et son meneau restauré.
https://fr.calameo.com/read/002543322c6a51fe49f82
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SOURCES ET LIENS.
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— Association de sauvegarde
https://www.pontaven.fr/Association-de-sauvegarde-et-de
—CASTEL (Yves-Pascal), PUGET (Catherine), 2007 La chapelle de Trémalo, Association des amis du musée de Pont-Aven éditeur au profit de l'Association de sauvegarde de la chapelle de Trémalo, 60 pages couleurs.
Un ouvrage coécrit par Catherine Puget, ancien conservateur du musée des Beaux-Arts de Pont-Aven et Yves Pascal Castel, docteur en histoire de l'art et ancien vicaire de la paroisse de Pont-Aven, de 1952 à 1955. Photos de Michel Thersiquel
Les bénéfices de la vente de cet ouvrage serviront à la restauration de la chapelle. Cet ouvrage est le premier livre complet sur la chapelle; outre les très belles photos des sablières et des oeuvres réalisées par des peintres des XIX e et XX e siècles inspirés par la chapelle, le lecteur peut y découvrir l'histoire de la chapelle, l'étude de l'architecture et la statuaire.
https://www.letelegramme.fr/ar/viewarticle1024.php?aaaammjj=20070422&article=20070422-730986&type=ar
—COUFFON (René), LE BARS (Alfred) 1980, Notice sur Nizon, Nouveau répertoire des églises et chapelles, Diocèse de Quimper et Léon Quimper, 1988
https://bibliotheque.diocese-quimper.fr/files/original/7ef28aa3252c41c6080f5f943dd7dfa1.pdf
"PONT-AVEN-NIZON Depuis la fusion en 1955 des deux communes de Pont-Aven et de Nizon, le territoire de la nouvelle commune comprend deux paroisses : 1. Pont-Aven - 2. Nizon.
CHAPELLE DE TREMALO (I.S.) Dédiée à Notre Dame. Edifice de plan rectangulaire comprenant une nef de six travées avec bas-côtés. Il date du XVIe siècle ; les grandes arcades sont à pénétration directe dans les piliers cylindriques, les poutres et les sablières sont sculptées. Une inscription en petits caractères gothiques est encore lisible au-dessus de l'arcade flamboyante de la porte sud : le nom du fabrique et la date : "LAN. 1556". Des armoiries tenues par un ange sur le pignon ouest et un escalier sur le rampant sud du même pignon.
Mobilier : Maître-autel en tombeau droit, avec tabernacle surmonté d'un dais à colonnettes torses ; sacraire muni de sa porte dans le mur du chevet. - L'autel latéral sud est dédié à sainte Anne ; dans le petit retable à deux colonnes corinthiennes qui bouche la fenêtre du chevet, groupe sculpté de l'Education de la Vierge. La balustrade est encore en place. Statues anciennes en bois polychrome : Crucifix du XVIIe siècle qui a inspiré à Gauguin son "Christ jaune" (C.), groupe de sainte Anne et de la Vierge, XVIe siècle (C.), saint Etienne portant des cailloux, saint Laurent, saint Corentin, saint portant un livre ouvert, saint moine en chasuble gothique ; - en pierre blanche polychrome : Vierge à l'Enfant dite Notre Dame de Trémalo, XVe siècle (C.).
Dans le remplage de la fenêtre d'axe, débris de vitraux anciens : armoiries, messe célébrée devant un Christ ressuscité (?).
Dans le placitre, deux croix de granit, sans sculptures, la plus grande, côté du midi, posée sur un marchepied octogonal, la petite contre le chevet. "
— DANIEL (Tanguy) Pont-Aven, chapelle Notre-Dame de Trémalo, Sauvegarde de l'Art Français
https://www.sauvegardeartfrancais.fr/projets/pont-aven-chapelle-de-tremalo/
La chapelle de Trémalo, c’est la chapelle du Christ jaune de Gauguin. C’est à celui-ci qu’elle doit sa renommée, qu’on peut dire internationale : en 1889, le peintre, frappé par le caractère fruste du Christ en croix fixé sur un mur (alors) chaulé, en face de la porte d’entrée sud, en fait le sujet d’une toile célèbre (aujourd’hui conservée à l’Albright-Knox Art Gallery de Buffalo aux États-Unis) et, l’année suivante, reproduit cette même figure hiératique dans son Autoportrait au Christ jaune (musée d’Orsay à Paris). Cependant, avant Gauguin, bien des artistes avaient été inspirés par la chapelle de Trémalo (mais non par le Christ en croix) : l’Allemand Otto Weber vers 1863, l’Américain Frederick A. Bridgmann entre 1866 et 1871, le Français Auguste Anastasi vers 1869-1870, le Suisse Henri Girardet en 1871, l’Anglais George Sherwood Hunter en 1873, l’Irlandais Augustus Burke en 1876, l’Américain Franck C. Penfold vers 1880, la Finlandaise Hélène Schjerfbeck en 1884. C’est dire que l’édifice a séduit nombre de peintres et de dessinateurs de toutes nationalités avant 1889, et a continué à les attirer jusqu’à nos jours.
Il est juste de dire que la chapelle de Trémalo ne peut laisser indifférent, et qu’elle doit son charme particulier à son environnement naturel et au caractère à la fois simple et recueilli du sanctuaire. L’édifice, situé sur les hauteurs qui dominent Pont-Aven (mais sur le territoire de la paroisse de Nizon), se trouve sur le chemin qui monte du bourg vers le manoir du Plessis-Nizon (résidence du propriétaire de la chapelle, M. Xavier de La Villemarqué) et, d’autre part, vers le hameau de Trémalo. On y accède par une longue allée de chênes et de châtaigniers, dans ce qu’on appelle localement le Bois d’amour, et la majesté de ce parcours contraste avec la simplicité de la chapelle, formant un ensemble réellement harmonieux.
Construite en 1550 (comme en témoigne une inscription au-dessus de la porte sud), elle est de fondation seigneuriale : le blason des du Plessis (d’argent au chêne arraché et tigé de sinople, englanté d’or au franc-canton aussi chargé de deux haches d’armes de gueules adossées et posées en pal) figure en plusieurs endroits de l’édifice : sur la façade ouest, sur la maîtresse-vitre, sur les sablières. Le style relève encore du gothique flamboyant, ce qui n’a rien d’étonnant dans cette région où la tradition médiévale persiste en même temps que pénètrent les nouveautés de la Renaissance. Le plan est rectangulaire, orienté est-ouest. La longueur de l’édifice est de 24 m, la largeur de 13 m. À l’extérieur, les murs en granit sont soigneusement appareillés en pierre de taille ; le chevet plat comporte trois baies flamboyantes, celle de gauche étant murée ; la façade occidentale est d’une grande simplicité : une porte en anse de panier, quatre contreforts (deux droits de part et d’autre de la porte, et deux biais aux extrémités nord et sud), un blason sculpté au milieu de la façade, un petit clocher de type cornouaillais, à une seule cloche. Du côté nord, une seule petite fenêtre passante, contrastant avec les ouvertures du côté sud : deux portes en anse de panier (l’une toute simple, l’autre surmontée d’une accolade et de pinacles latéraux), et quatre fenêtres (deux ouvertes dans le muret, deux passantes, la première du xvie s. avec son remplage d’origine, la seconde construite en 1755). L’ensemble est couvert d’une imposante toiture dissymétrique qui descend, au nord, jusqu’à hauteur d’homme.
L’intérieur comporte une nef à six travées, séparée des deux bas-côtés par des arcades en arc brisé, à l’exception de deux qui sont en plein cintre). Les colonnes sont cylindriques (sauf une, octogonale) et à pénétration directe, c’est-à-dire sans chapiteaux, ce qui est commun dans les édifices de cette époque. La voûte est couverte d’un lambris de bois, et la solidité de l’ensemble est assurée par des entraits engoulés reliés entre eux, en haut des murs, par des sablières ornées de nombreuses sculptures représentant des animaux, réels ou fabuleux, et des têtes de personnages aux expressions les plus diverses. La maîtresse-vitre a conservé quelques éléments anciens, de la fin du xvie s., en particulier une Messe de saint Grégoire (sujet iconographique rare en Bretagne), les Saintes Femmes au tombeau, et plusieurs écus armoriés.
Le mobilier est constitué de trois autels adossés au chevet, simples coffres en bois peu ornés, séparés de la nef par une grille de communion d’un bout à l’autre du chœur. Curieusement, la statuaire ne comporte pas d’image de saint Malo, que l’on attendrait par référence au nom du lieu : au xviie s., la chapelle était appelée « Notre-Dame de Saint-Malou ». En revanche, on y trouve, outre le célèbre Christ jaune (bois, fin du XVe s., cl. M.H. 1957), des statues de bonne facture : Notre-Dame de Trémalo (en pierre tendre du Val de Loire, XVe s., cl. M.H. 1957), un groupe de sainte Anne éducatrice (Anne assise, un livre sur les genoux, et la Vierge debout à ses côtés, bois polychrome, xviie s., cl. M.H. 1957), et d’autres d’un style rustique, toutes en bois polychrome : saint Corentin, saint Laurent, saint Étienne, saint Léger, sainte Madeleine (?).
La chapelle a connu bien des restaurations depuis sa construction : on connaît celle de 1755, entreprise par Jean-Baptiste Mahé, recteur de Nizon, celle de 1957, effectuée par le vicomte Patrice de La Villemarqué. En 2009 enfin, l’Association pour la sauvegarde de la chapelle de Trémalo, présidée par M. Xavier de La Villemarqué, a fait faire le rejointoiement des maçonneries de la façade est, de la voûte de la porte sud et de l’escalier du clocher. Pour le drainage de la chapelle, la Sauvegarde de l’Art français a fait un don de 5 000 € en 2008. Tanguy Daniel
— GUEGUEN, Michel, 1997, "Pont-Aven. Nizon. Chapelle de Trémalo" in Bulletin de la Société archéologique du Finistère, Vol. CXXVI, , p.154-155.
— LE BIHAN (Jean-Pierre)
http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-17951976.html
—LE GOFF-RUIZ (Jacqueline), 2011, le manoir de Plessis-Nizon. Pont-Aven-Nizon, bulletin communal décembre 2011, pages 6 et 7.
https://fr.calameo.com/read/00254332211270b969826
— MONUMENTUM
https://monumentum.fr/chapelle-notre-dame-tremalo-pa00090288.html
—PERENNES, Henri, 1938, "Notices sur les paroisses : Nizon" in Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie, Vol. 37,
"NOTRE-DAME DE TRÉMALO Enfoui sous les arbres qui l'enveloppent de toutes parts, ce charmant édifice du xvr siècle, à clocher à jour, s'élève à l'orée du Bois-d'Amour, à un kilomètre E.N.E. de Rustéphan. ll comporte trois nefs, et douze arcades gothiques. Les poutres sont ornées de sablières sculptées, La fenêtre du chevet a encore quelques restes du vitrail, où figurait un arbre de Jessé. Le maître autel est encadré de deux statues : N.-D. de Trémalo et Saint Etienne qui porte des cailloux dans sa dalmatique. Un vieux tableau présente le Christ et deux saintes femmes dont l'une est la Madeleine. La chapelle a deux autels secondaires. L'un possède les statues de sainte Anne et de saint Laurent, l'autre celles de saint Corentin et de saint Léger. Au Sud de la chapelle se dresse une petite croix de granit. Les pardons de N.-D. de Trémalo ont lieu le dimanche après le 26 Juillet (en l'honneur de sainte Anne), le 15 Août, et le dimanche après le 8 Septembre."
http://bibliotheque.diocese-quimper.fr/files/original/3c650c05ef86fe15d59ddb6b528d5f93.pdf
—Pont-Aven-Nizon, bulletin communal juillet 2006.
https://fr.calameo.com/read/002543322996922075012
—Pont-Aven-Nizon, bulletin communal décembre 2013.
https://fr.calameo.com/books/002543322c6a51fe49f82
Eugène Cadel (1862-1940).
En 1885, Eugène Cadel entre dans l'atelier de Luc-Olivier Merson puis, en 1886 devient l'élève de Léon Bonnat. En 1889, admis au salon des artistes français, il côtoie Messonier et Puvis de Chavannes et obtient en 1899 une mention honorable. Aujourd'hui, l'artiste es surtout connu comme illustrateur de la revue l'Assiette au beurre publiée dans les années 1900.Cette peinture sur bois, sans date, exécutée sans doute au tournant des XIXe et XXe siècles, représente l'intérieur de la chapelle de Trémalo à Pont-Aven
Au premier plan, sont représentés deux prie-Dieu nimbés par la lumière du vitrail et placés sous l'arcature de la nef, et devant la table de communion. A l'arrière-plan, on remarque, sur la droite, l'autel sud surmonté du bois polychrome situé dans la niche, qui représente sainte Anne et la Vierge Marie. À gauche de l'autel, se trouve sur une console sculptée d'un large masque, la statue en bois polychrome de saint Léger. Tout personnage est absent de cette composition, m^me si la disposition des prie-Dieu laisse à penser qu'ils viennent d'être occupés ou qu'ils le seront bientôt. Ce site d'inspiration a été peint par de nombreux autres artistes, tels que Pierre-Eugène Clairin, Emile Jourdan ou Otto Weber, dont les œuvres sont exposées au Musée de Pont-Aven.
Estelle Guille des Buttes-Fresneau, Directrice des équipements culturels CCA, Conservatrice en chef du Musée de Pont-Aven et du Musée de la Pêche de Concarneau.
« Chapelle de Trémalo », Eugène Cadel, Huile sur panneau Ht : 22 cm, L:27 cm. Don des Amis du Musée de Pont-Aven. Collection du Musée de Pont-Aven
— POUDOUVRE.over-blog.com
http://poudouvre.over-blog.com/2021/07/quelques-notes-sur-les-possesseurs-de-la-seigneurie-du-plessis-nizon.html
—PUGET (Catherine), 2000, "La chapelle de Trémalo en Nizon", in "Gauguin et le Christ jaune", Musée de Pont-Aven, Pont-Aven, 31 pages. Plaquette de l'exposition éponyme du Musée de Pont-Aven.
https://www.google.fr/books/edition/Gauguin_et_le_Christ_jaune/PKZNAAAAYAAJ?hl=fr&gbpv=1&bsq=%22Guilquenquis%22&dq=%22Guilquenquis%22&printsec=frontcover
— QUEINEC (Bertrand ), 1992, Nizon Histoire d'une paroisse rurale tome I page 187
— TOURNIER (Fanny) 1993, Les fortifications de terres médiévales à l'est du Trégor (Côtes d'Armor)
http://bibliotheque.numerique.sra-bretagne.fr/files/original/4088d3a60b94617a5772717738dc2e64.pdf