Ensemble de 14 pièces de sablières, de 6 blochets, de 6 entraits à engoulants taillés entre 1475 et 1494 (choeur et nef) et vers 1520 ( transept et les deux premières travées de la nef) de la chapelle Notre-Dame-du-Loc à Saint-Avé (Morbihan).
Voir :
Merci à Violette Beurel, de l’association Les amis de la chapelle de Notre-Dame-du-Loc, qui nous a ouvert la porte de cette chapelle.
PRÉSENTATION.
Cette petite chapelle de la fin du XVe siècle (date de 1475 et 1494 sur les sablières) a été élevée à la suite d'un voeu ou pour commémorer un fait et est devenue par la suite, est devenue lieu de pélerinage. Elle comprend encore son enclos, son calvaire et sa fontaine. Sur plan en croix latine, elle est bâtie en pierre de taille aux pignons, le reste étant en moëllons. Le pignon ouest est le plus ouvragé, avec mouluration encadrant la porte ogivale en saillie. Une flèche très allongée se trouve au centre de la nef. La fenêtre du chevet est flamboyante et contient quelques restes de vitraux.
Elle est remarquable par son mobilier (sa croix de chancel qui porte la date de 1500 et le nom d'André de Coëtlagat, ses retables en granite, son retable en albâtre de Nottingham (fin XVe), ses statues polychromes (fin XVe), ou dans son enclos son calvaire (1500) et sa fontaine), mais aussi par sa charpente sculptée et par ses sablières exceptionnelles. (Les sablières ou pannes sablières sont ces pièces de bois (un quart de tronc de chêne), horizontales placées à la base de la charpente sur le haut du mur, rempli d'un lit de sable pour éviter la remontée d'humidité ou pour permettre à la poutre de prendre place lentement). Les 14 sablières, 6 blochets et 6 entraits ont été taillés entre 1475 et 1494 pour une partie localisée dans le choeur et dans la nef et vers 1520 pour l'autre localisée dans le transept et les deux premières travées de la nef.
Exceptionnelles dans le corpus très riches des chapelles et églises bretonnes, ces sablières le sont par leurs inscriptions gothiques précisant les dates de réalisation de cette charpente en 1475 et en 1494 et le nom des commanditaires, Olivier de Peillac chanoine de Guérande et recteur de Saint-Avé, et André de Coëtlagat, son successeur, chanoine de Vannes et recteur de Plescop et de Saint-Avé ; par leur polychromie ; et par la variété de figures traditionnelles aux ymagiers telles que les bestiaire, les sirènes et centaures, les musiciens (luth, cornemuse , traverso, harpe) et les drôleries. Elles sont remarquables aussi par le riche ensemble héraldique, peint en majorité, qui a échappé aux marteaux révolutionnaires ou a été repeint, et qui fait écho aux blasons sculptés sur d'autres supports, lapidaires notamment, de la chapelle.
Les entraits également sont remarquables par les personnages qui combattent ou tentent d'échapper à la gueule des dragons des engoulants, tout comme les blochets à forme de dragons dévorants.
La chapelle a été restaurée en 1913 puis de 2010 à 2012.
La chapelle, avec l'enclos, la fontaine et le calvaire sont classés par arrêté du 22 juin 1932
Les sablières et entraits en bois sculpté sont classées Mh par arrêté du 11 septembre 1922.
" Par la qualité des sculptures et des reliefs, cet ensemble qui alterne régulièrement des blasons, portés par des angelots en pied de cerces, et des scènes historiées, est l’un des ensembles bretons majeurs du dernier quart du XVe siècle." (C. Diego Mens)
Pour S. Duhem, l'ensemble de Saint-Avé rejoint ceux, de même facture exceptionnelle, de Trédrez, Trémel, Plumelec, Grâces-Guingamp, dont les artisans disposent d'un bagage iconographique, intellectuel et d'habilité technique, que n'auront pas leur successeur, avec des ensembles plus hétérogènes, plus inventifs, plus réfléchis que ceux du XVIe tardif et du XVIIe siècle.
Les inscriptions sont sculptées en creux, et les motifs figurés végétaux, humains, merveilleux (chimères et dragons) et plus rarement animaux disposés de façon isolée et régulière — une caractéristique stylistique bas-médiévale du XVe siècle— sont sculptés en moyen relief en bois polychrome. Les motifs se détachent franchement de l'épaisseur de la poutre et sont couverts par un "toit".
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I. LE CHOEUR DE 1475.
Le commanditaire.
Les sablières portent l'inscription en lettres gothiques qui court de chaque côté nord puis sud du chœur :
MESTRE O. DE PEILLAC CHANOYNE DE GUERÃDE ET RECTE DE ST EVE FIST F
CESTE OUVRE LAN MILL CCCC LX XV
soit "Maître Olivier de Peillac chanoine de Guérande et recteur de Saint-Avé fit faire cette œuvre l'an 1475".
L'inscription, sculptée et peinte en rouge, comporte des lettres ornées, des lettres liées ou abrégées par des tildes et les mots sont séparés par des deux-points reliés par une accolade. Elle est interrompue régulièrement par des blasons présentés par des anges, aux armes peintes (et repeintes par les restaurateurs). J'aime m'attarder sur la matérialité de ces inscriptions et ne pas les considérer seulement comme des sources documentaires : ces calligraphies sont des œuvres d'art.
La paroisse de Peillac, d'où la famille du chanoine est originaire, se trouve à l'est du Morbihan, à une dizaine de kilomètres au nord-ouest de Redon, mais la famille de Peillac a détenue aussi le château de Lohan à Plaudren, au nord de Saint-Avé.
Pol de Courcy indique dans son Armorial à propos de cette famille :
Peillac (de), sieur dudit lieu et du Plessis, paroisse de Peillac, — du Gouray, paroisse de Pleucadeuc, — de Bodeveno, paroisse de Pluvigaer, — de Lohan, paroisse de Plaudren.
Références et montres de 1426 à 1536, dites paroisses, évêché de Vannes.
D’argent à trois merlettes de gueules ; au franc canton de même.
Fondu dans Rohan, puis Ploësquellec.
Olivier de Peillac était l'un des 14 chanoines à la collégiale Saint-Aubin de Guérande. Un homonyme (son père ? ) participe en 1452 à la montre de Guillaume de Rosnyvinen.
Les armes de sa famille ne sont pas présentes sur ces sablières du chœur, mais on les trouve dans celles de la nef nord, et huit fois dans la chapelle, sur un bénitier, près du portail , sur une crédence, au socle de plusieurs statues et sur les contreforts du portail et du chevet.
Selon D. Mens :
"Olivier de Peillac est d’une famille noble assez importante, vassale de la seigneurie de Rochefort-Rieux et alliée à la puissante branche des Rohan Gué-de-L’Isle. Olivier pourrait être le frère de Jean, mentionné en 1477 et 1484 comme prévôt féodé 4 des paroisses de Plaudren et de Saint-Jean-Brévelay 5 . Cette fonction est obtenue par les Peillac par alliance avec les Tréal. Jean de Peillac perçoit les droitures 6 dues au seigneur de Largoët pour ces paroisses. La fille de Jean, Jacquette, est qualifiée de prévôte féodée de 1494, avec son époux, puis seule en 1503 et 1511 7 . Elle épouse François de Rohan, seigneur du Gué-de-l’Isle et maître d’hôtel de la reine Anne de Bretagne. Outre ses possessions dans la commune de Peillac, la famille détient également les seigneuries de la Gorays en Pleucadeuc, héritée des Tréal, de Botéven en Pluvigner et celle de Lohan en Plaudren, mais apparemment pas dans la paroisse de Saint-Avé. "
Pour le même auteur, il faut envisager pour le finacenmet de la chapelle outre la contribution des recteurs et de leur famille, une possible intervention d’un grand féodal breton, Jean IV de Rieux, maréchal de Bretagne, qui entre en possession de la seigneurie de Largoët, dont dépend la paroisse, en 1480, après le décès de sa première épouse.
A. Le côté nord.
On trouve successivement depuis la croisée des transepts et en suivant le sens des aiguilles :
—entre deux feuillages verts, les armes des Coëtlagat d'azur à 3 aiglettes d'or (peintes en 1913 au dessus d'un écusson muet), tenue par un ange à la chevelure divisée en deux boules. Curieusement, ces armes de Coëtlagat ne figuraient pas dans la chapelle. La famille habitait le manoir de Coëtlagat, en la paroisse Saint-Patern de Vannes
—L'entrait à engoulant dont le dragon laisse échapper une langue rouge.
— un masque d'un homme coiffé d'une cagoule à rabats.
— le début de l'inscription interrompue par des feuilles vertes, ou par des blasons
—Les armes écartelées des Rieux-Rochefort d'azur à 5 besants d’or en sautoir aux 1 et 4 (Rieux) et aux 2 et 3 vairé d’azur et d’or (Rochefort) sur fond de feuillages. Jean II de Rieux (avant 1343-1417 avait épousé en 1374 Jeanne de Rochefort, d'où Jean III de Rieux (1377-1431). Sa fille Marie de Rieux épousa vers 1425 Louis d'Amboise, son fils François-Jean épousa Jeanne de Rohan d'où Jean IV de Rieux (1447-1518). Jean IV de Rieux, un grand féodal breton, maréchal de Bretagne, qui entre en possession de la seigneurie de Largoët, dont dépend la paroisse, en 1480, après le décès de sa première épouse Françoise Raguenel, décédée le 18 janvier 1480, aurait (D. Mens) pu participer au financement de la chapelle. Il versa un paiement à Olivier de Peillac le 26 juin 1481 pour avoir fait mettre les armes de « Monseigneur et de mademoiselle ».
— Celles, tenues par un ange aux cheveux volumineux, des Rieux-Malestroit en alliance en 1 Rieux-Rochefort comme supra et en 2 Malestroit : de gueules à neuf besants d’or. Cela peut renvoyer à Gilles de Rieux, fils de Jeanne de Malestroit et de Michel de Rieux (1394-1473), qui épousa en 1495 Anne du Chastellier.
Les Malestroit était seigneurs de Largoët, une forteresse d'Elven, à 13 km de Vannes, avant que Jean IV de Rieux ne devienne comte de Largoët au XVe siècle. " C'est à cette époque (entre 1474 et 1476) que Jean IV, seigneur de Rieux, y retient Henri Tudor, duc de Richmond, futur Henri VII d'Angleterre. En 1490, Charles VIII démantèle le château, mais il est restauré sous l'impulsion d'Anne de Bretagne. La forteresse est en effet une des pointes du triangle rieuxois (trois grandes forteresses Rochefort-Malestroit-Elven). "
—Celles de Bretagne, tenues par un ange mais douteuse car à trois hermines seulement. [le blason modifié pourrait être en lien avec le fait que Jean de Rieux est le petit-fils de Marguerite de Bretagne, fille du duc Jean IV.]
—un masque d'un homme barbu coiffé d'un chaperon, tenant de la main droite un phylactère. Ce dernier portait-il jadis une inscription?
— un blochet débutant par un engoulant et s'achevant par une tête d'homme à l'extrémité de la pièce de bois octogonale.
Il convient en fait d'ordonnancer cette succession de blasons, comme du côté sud, en partant de l'est et de l'autel en respectant les prééminences : duché de Bretagne/Rieux-Malestroit/Rieux-Rochefort, comme au tympan d'une verrière armoriée de haut en bas. Le vitrail ancien du chœur n'a pas été conservé, mais on sait, d'après un mémoire de Galles en 1854, qu'on y trouvait les armes de Bretagne, "et deux écussons : celui de Lestrelin ; et un autre ainsi alliancé : parti au 1 d'argent à la bande nouée d'azur accompagnée de 7 merlettes de gueules, qui est Lestrelin, au 2 d'or à trois tourteaux "(J. Guyomar).
B. Le côté sud.
En poursuivant notre visite dans le sens des aiguilles d'une montre, et donc ici du chevet vers le transept, nous trouvons, en symétrie avec le côté nord :
— Un blochet, semblable au blochet nord avec un personnage tirant la langue
— Un masque d'homme barbu tenant un phylactère
— les armes de Bretagne, à huit hermines , présenté par un ange
— la suite de l'inscription , "ceste ouvre l'an mill cccc LXX XV", également fragmentée par les motifs ornementaux et les blasons,
—un masque léonin émergeant de feuillages,
— un ange présentant les armes écartelées des Rieux-Rochefort d'azur à 5 besants d’or en sautoir aux 1 et 4 (Rieux) et aux 2 et 3 vairé d’azur et d’or (Rochefort)
—un primitif ou homme naturel, de couleur verte, assis jambes croisées et tenant un livre. Pour l'abbé Guyomar, il s'agit d'un tailleur. Ses pieds ressemblent à des pattes. Sa tête est coiffée d'une capuche.
— Les armes, présentées par un ange, des Malestroit, de gueules à neuf besants d’or.
— Un masque de lion, à la crinière rayonnante
— la Lune et le Soleil, entourés de rayons,
— l'entrait à engoulant,
— un lion,
—un agneau à phylactère
— un dragon ailé.
On examinera aussi la voûte lambrissée, et notamment la nervure principale est-ouest, qui est ornée de panneaux rectangulaires aux armes de Bretagne, à huit hermines.
Au total, le programme des sablières de ce chœur privilégie les insignes du pouvoir ducal (*) et des grands officiers ducaux, qui ont peut-être participé par donation à la construction, ou qui ont pu en favoriser l'établissement. Les armoiries du commanditaire, d'une famille plus modeste, n'ont pas leur place ici.
(*) Sur la commune de Saint-Avé se trouvait le château de Plaisance, résidence officielle des ducs de Bretagne, démantelée au XVIIe siècle. Jean V, duc de Bretagne (1389-1442) y séjournait fréquemment, et François Ier, duc de Bretagne (1414-1450), y est décédé le 17 juillet 1450. Les sablières de 1474 sont contemporaines du règne de François II (de 1458 à 1488), auquel succède Anne de Bretagne de 1488 à 1514.
Sophie Duhem, l'auteur de référence sur les sablières de Bretagne, s'interroge sur l'influence ici d'Olivier de Peillac, et du clergé en général :
"Comment imaginer que ce chanoine si soucieux de composer un ensemble décoratif majestueux , n'ait pas, à un moment ou à un autre, donné des directives précises aux artisans-charpentiers ? Sa contribution au choix des sculptures paraît certaine si l'on considère à la fois la grande qualité de l'iconographie représentée, et la monumentalité de l'ensemble au regard des dimensions de la chapelle."
Casas Diego Mens sépare bien le programme "protocolaire" du chœur commandé par le chanoine de Peillac, un espace accessible au clergé et à la noblesse, et qui s'avère assez convenable malgré son bestaire et la présence du merveilleux non chrétien, et celui, plus populaire, de la nef, dont le commanditaire André de Coëtlagat appartient pourtant au même milieu, celui des chanoines et recteurs issus de la noblesse bretonne. La nef, séparée du chœur par une clôture ou chancel est réservée au peuple. La clôture à claire-voix permet malgré tout aux fidèles de voir le chœur et d'entendre les offices. Casas Diego Mens, répondant à Sophie Duhem, écrit :
"Ainsi, le programme iconographique de la nef et d’une partie du chœur, mêlant fantastique, religieux, irrévérencieux et des scènes du quotidien, semble essentiellement destiné à la seule lecture d’une catégorie de la population [On ne prendra pas en compte dans cette analyse les inscriptions portées établissant les commanditaires, dans le chœur et la nef, réservées probablement à la noblesse et au clergé, et une certaine partie de la population lettrée.]
Il ne traduit sans doute pas une commande précise d’un clerc mais il compose plutôt un décor voulu par les sculpteurs, mêlant des thèmes populaires ou savants, selon une organisation qui nous échappe désormais."
Outre le fait que cela suppose, comme il le constate, d'oublier l'inscription de fondation de la nef supposant l'accès à la lecture, cela ne tient pas compte des données qui nous apprennent que, pour leurs stalles aux miséricordes très populaires voires grivoises par exemple, ces chanoines, loin de laisser carte blanche aux huchiers et de fermer les yeux sur leurs excès, peuvent exiger par contrat la présence de ces références au merveilleux médiéval, aux fabliaux, aux proverbes, et aux scènes érotiques ou scatologiques, qui se découvrent, sculptés dans la pierre et le bois , et pas seulement dans les marges des sanctuaires. Il faut imaginer d'autres rapports que les notres entre l'obscène et le sacré, exactement comme dans la Rome impériale où les phallus avaient une fonction apotropaïque nullement choquante et très ostensible.
Pour Sophie Duhem p. 270, " à Saint-Avé, les thèmes religieux sont absents et les thèmes courtois ou distrayants sont probablement conçus à la demande de l'élite de recteurs à l'origine de la commande".
LA CROISÉE DU TRANSEPT.
Les armes de Bretagne, se poursuivent ici sur la nervure centrale, et sur la clef de voûte.
C'est aux angles de la croisée du transept que sont placées les armes des familles nobles de la paroisse du dernier quart du XVe siècle : les Benoist, seigneurs de Lesnévé sur l'angle nord-est , les Arz, seigneurs de Tréviantec et Rulliac sur l’angle sud-est et enfin, sur l’angle diamétralement opposé les Lestrelin, de Lesvellec d’argent à la fasce nouée d’azur accompagnée de sept merlettes de gueules posées 4 et 3 . Selon C. Diego Mens cette organisation héraldique témoigne sans doute du placement de ces familles nobles, lors des offices, au-devant du chancel.
L'angle nord-est : les armoiries des Benoist de Lesnévé.
Ces armes d' hermines à trois chevrons de gueules chargés de besants d’or sont sculptées et non seulement peintes.
Selon l'article Wikipédia de Saint-Avé, Sébastien de Rosmadec (~1570-1646), évêque de Vannes est né au manoir de Lesnevé. René Descartes (1596-1650), mathématicien, physicien et philosophe, aurait passé "une partie de son enfance dans la métairie du manoir de Lesnevé alors que son père Joachim Descartes (1563-1640), siège aux États de Bretagne lorsque ceux-ci sont réunis à Vannes". Je n'ai pas trouvé la confirmation de ce séjour dans les biographies de Descartes ; il a séjourné au manoir de son frère Pierre, le manoir de Kerleau à Elven.
L'angle sud-est : les armoiries d'une famille à préciser.
Ces armes sont d'or à la fasce de gueules accompagnée de 3 quintefeuilles de même. L'abbé Guyomar propose d'y voir les armes des Eder, mais celles-ci sont de gueules à la fasce d'argent accompagnée de 3 quintefeuilles de même.
On les retrouve sur la crédence à côté de celles des Peillac.
C. Diego Mens signale ici les armes de la famille d'Arz seigneurs de Tréviantec et Rulliac sur l’angle sud d’azur à trois quintefeuilles de gueules .
L'angle nord-ouest : les armoiries de la famille Lestrelin, de Lesvellec en Saint-Avé.
Ils portent d’argent à la fasce nouée d’azur accompagnée de sept merlettes de gueules posées 4 et 3.
Leurs armes figuraient aussi dans la vitre du chœur. Et dans la chapelle Saint-Avoye de Pluneret.
Le pedigree ?
Lestrelin (de), sieur de Lesvellec, en Saint-Avé ; Kerlois et Liscoet, en Pluvigner ; Keropert, en Grand-Champ ; Kerlagadec, en Noyal-Pontivy ; Pradic, en Plumergat ; Penhaer, en Camors ; et Kerispert, en Pluneret. Réformations de 1426, 1448 et 1536 (famille éteinte à la fin du XVIème siècle).
L'angle sud-ouest : les armoiries des Laouénan, de Baden.
D'azur à la fasce d'argent accompagnée de 3 roitelets d'or
Pas de photo.
LES SABLIÈRES DE LA NEF (1494)
L'inscription. Le commanditaire.
L'inscription se partage entre le côté nord :
OU LOYAL TEMPS DE MASTRE : OLIVIER : DE PELIAC CHANOE GUERANDE ET MAISTRE ANDRE DE COETLAGAT
et le côté sud :
RECTO DE SANT AVE FIT ACHEVER CESTE CHAPLE EN LÃ MIL IIIIc IIIIxx ET XIIII
"Au loyal temps de maître Olivier de Pellac chanoine de Guérande et maître celles d'André de Coëtlagat recteur de Saint-Avé fit achever cette chapelle en l'an 1494".
Qui est ce nouveau recteur et commanditaire ?
Origine.
Essentiellement vannetaise, la très vieille maison de Coëtlagat eût pour berceau la terre de ce nom en la paroisse de Saint-Patern ès-faubourgs de Vannes. Elle comparut aux montres et réformations de 1426 à 1536 dans les paroisses de Saint-Patern, Guehenno et Plœren, et fut reconnu noble d'ancienne extraction à la réformation de 1669 avec sept générations (Bibl. de la ville de Rennes. Mss. des Réformations).
Membres.
Remontant à Messire Geoffroy de Coëtlagat, croisé en 1248 (P de Courcy. Armorial de Bretagne. Tome I, p. 211), elle compte en outre parmi ses membres :
—Escuyer Guillaume de Coëtlagat qui reçoit en legs du duc Jean II dans son testament de l'an 1303, une somme de 50 livres pour ses bons et loyaux services (Dom Morice. Preuves. Tome I. Col. 1196) ;
—Messire Guillaume de Coëtlagat, écuyer de Mademoiselle de Porhoët en 1426 (Ibidem. Compte de Jehan Droniou, trésorier du Duc. Tome II, Col. 1223) ;
— Noble écuyer Renaud de Coëtlagat, marié vers 1445 à Aliette de Peillac et décédé en 1473 (Arch. Dép. du Morbihan, Série E et Mss. Galles) ;
— Messire Jehan de Coëtlagat, l'un des témoins déposant à l'Enquête de canonisation de saint Vincent-Ferrier, le 21 novembre 1453, avec son frère Yves de Coëtlagat, prêtre, et sa femme Jeanne Trainevault, guérie miraculeusement de la peste peu de temps auparavant, par l'intercession du saint (Enquête de canonisation de saint Vincent-Ferrier. Mss. de l'abbé Chauffier). Noble dame Olive de Coëtlagat, nourrice de la fille du Duc en 1455 (Dom Morice. Preuves. Tome II. Col. 1689) ;
— Messire Robert de Coëtlagat, qui avait épousé demoiselle Catherine Sorel vers 1448 (P. de Courcy. Armorial de Bretagne. Tome I, p. 211) ;
— Messire Pregent de Coëtlagat, vivant en 1495, fils d'autre Pregent de Coëtlagat, écuyer du pays de Guérande (Cartulaire inédit de l'abbaye de Prières. Mss. de l'abbé Chauffier) en 1418 ;
— Messire André de Coëtlagat,
— Messire Jean de Coëtlagat, moine de Prières en 1539, prieur de cette abbaye en 1547 (Cart. inédit de l'abbaye de Prières. Mss. de l'abbé Chauffier), abbé de celle de Lanvaulx en 1565 (P. de Courcy. Armorial de Bretagne. Tome I, p. 211) ;
— Messire Jean de Coëtlagat, vivant en 1543, marié à Anne de Quifistre (Arch. Dép. du Morbihan. Mss. Galles) ;
etc.
Seigneurie.
La famille de Coëtlagat a possédé les terres et seigneuries de Coëtlagat et Ménimur en Saint-Patern ; — de Kerlois en Pluvigner ; — de Pont-Dinan en Arradon ; — du Clegrio, paroisse De Guehenno ; — de Cantizac, de Porte-Layec et Bodrual, paroisse de Séné ; — de Liscouët en Péaule ; — de Penvern en Plaudren ; — de Kerlan en Plumergat ; — de Kerdualic, du Quelennec, de Kervaly, etc.
Principales alliances.
Elle s'est alliée aux familles : de Lesteno (XIVème. s.), de Peillac vers 1445, Sorel (1448), de Lourme (fin du XVème s.), Trainevault vers 1450, de Broël (XVIème s.). de Quifistre vers 1538, Riou, Le Goff, de Lesmais (XVIème s.), Guimarho vers 1574, de Gaincru vers 1592, de Rosmadec (XVIème s.), , etc
R. de L'Estourbeillon, in Infobretagne
Diego Mens apporte des informations complémentaires :
"La famille Coëtlagat possède un manoir à Vannes, dans la paroisse de Saint-Patern, des terres à Séné (Bodrual et Cantizac) et Plescop. Jean est mentionné comme seigneur de Bodrual à la fin du XVe siècle . Il dépose, à moins qu’il ne s’agisse de son père, dans le procès en canonisation de Saint-Vincent Ferrier en 1453 avec son frère Yves, prêtre. Olive de Coëtlagat est au service de la duchesse Isabeau d’Ecosse, comme nourrice de Marie de Bretagne en 1455 9 . Les deux familles des recteurs qui ont œuvré à la construction de cette chapelle sont alliées puisqu’un mariage 10 est célébré en 1455 entre Aliette de Peillac et Renaud ou Regnaud de Coëtlagat. Ce dernier, fils de Michèle de Tréal 11 et de Guillaume de Coëtlagat, est mentionné dans les montres du 8 septembre 1464 pour la paroisse de Séné avec 700 livres de revenus, et comme seigneur de Cantizac 12 . Prigent de Coëtlagat hérite de ce domaine en 1474."
Le côté nord de la nef.
Description depuis l'entrée à l'ouest vers le transept
Les motifs ou personnages sont répartis en frises et répondent aux retombées (en culot) des nervures de la charpente.
On trouve successivement :
Première pièce entre blochet et entrait.
— Le blochet, engagé dans la maçonnerie, avec engoulant et personnage.
— un masque d'homme encapuchonné, bouche ouverte
— entre les mots OU et TEMPS, un coeur percé de deux flèches croisées, et portant le mot LOYAL. Les auteurs ne l'intègrent pas toujours au texte de l'inscription.
— un masque d'homme barbu de face, bouche ouverte
— Entre les mots DEMAISTRE et :OLIVIER, une fleur à quatre pétales,
— un homme accroupi sous la console, qui désigne de l'index un passage d'un livre et lève les yeux au ciel. Il est coiffé d'un chaperon ou d'un bonnet, porte une tunique rouge, des chausses vertes et des chaussures ou sabots.
— dans l'angle une feuille d'acanthe étalée ;
Le premier entrait, côté ouest.
Un homme vêtu de chausses, d'une tunique ajusté et portant un chapeau noir, court vers la tête du dragon de l'engoulant en brandissant une massue.
Le premier entrait, côté est. Un chasseur (piqueux) s'avance vers la gueule du dragon et y enfonce sa pique.
Deuxième pièce entre premier et deuxième entrait.
— Dans l'angle de l'entrait un homme barbu (prophète??) écarte les spires d'un phylactère qui lui enrubanne la tête.
— Lui faisant face, un joueur de cornemuse est vêtu d'habits découpés. J. Guyomar écrit que " ses lèvres viennent d'abandonner le bec du biniou pour répondre au moine qui le blâme d'exciter à la danse ; mais si la bouche du sonneur ne remplit pas son office, nous voyons son bras gauche presser l'outre de l'instrument, ses doigts n'ont pas abandonné les trous, et la musique continue toujours. Le tuyau de la corne du biniou a disparu ".
Ce joueur est décrit dans l'encyclopédie de la cornemuse de Jean-Luc Matte :
http://jeanluc.matte.free.fr/fichsz/stavesabl.htm
Sculpture en bois avec traces de polychromie: homme portant des vêtements en forme de feuilles et coiffé d'une couronne de feuilles. Un bourdon d'épaule dont seuls subsistent le pavillon et la "souche"; un porte-vent brisé, un hautbois à pavillon
S. Duhem indique qu'une copie de cette sablière, du XIXème, existe à la chapelle de Kerozer de cette même commune
— un chien qui se lèche en se retournant vers son arrière-train, dans une vue plongeante audacieuse
— présentées par un ange coiffé d'un bonnet et vêtu d'une robe très ample, les armoiries d'Olivier de Peillac, suivant la mention de son nom sur l'inscription.
On retrouve aussi ces armoiries sur les consoles des statues de Marie-Madeleine, de saint Corneille, de saint François, sur la crédence sud et sur le bénitier.
— une femme dont la main gauche est levée. J. Guyomar y voit "une paysanne, dont la figure est d'une finesse extraordinaire ; elle détourne les yeux et se sert de sa main gauche comme d'un écran pour ne pas voir l'exhibition indécente d'un homme voisin accroché à la sablière, et que M. Pobéguin, sculpteur à Vannes, a mutilé du temps de M. Panhéleux (1830-1860)."
— Un clerc (tonsuré), de dos, la main gauche sur le crâne, dont la partie basse a été buchée car jugée inconvenante.
Troisième pièce entre deuxième et troisième entrait.
— À l'angle de l'entrait un homme nu et barbu se protège du centaure ...
—un centaure qui, armé d'une massue et le bouclier au bras, va se ruer sur l'homme.
— Près du nom de Maître André de Coëtlagat, armoiries de Cantizac de la paroisse de Séné : d'argent à la bande de gueules, chargée de 3 alérions d'or, présentées par un ange, qui porte sur ses ailes et sa tête la couronne d'épines. Il y avait eu des alliances entre les Coëtlagat et les Cantizac. Le recteur, maître André de Coëtlagat, a-t-il préféré mettre auprès de son nom les armoiries de sa famille maternelle ? Non photographié.
— Une sirène, admirablement fine, tient dans sa main gauche un peigne, dont elle vient de se servir pour sa longue chevelure, et dans sa main droite une glace, où elle se mire. Elle répond à une autre sirène du côté sud. Elle est couchée sur le ventre, le buste redressé, la tête à gauche. Ses seins sont globuleux. La partie inférieure a la forme d'une queue de poisson.
Quatrième pièce entre troisième et quatrième entrait.
Le côté sud de la nef.
dans le mouvement des aiguilles d'une montre, du transept vers l'entrée.
Cinquième pièce entre deux entraits.
— feuillages
— ange présentant des armoiries de Kerboulard, en Saint-Nolff, et aussi seigneur de Kervelin, en Saint-Avé : de gueules à l'aigle d'argent, armée et becquée d'or, cantonnée à dextre d'un croissant de même.
Quatrième pièce entre deux entraits.
—Blason muet
— Femme grimaçant et échevelée vêtue en vert évoquant une sorcière caressant ses longs cheveux blonds.
— armoiries présentées par un oiseau : les armoiries d'Ars ou Arz, seigneur de Ruliac et de Tréviantek ou Triantek en Saint-Avé : d'argent à 3 quintefeuilles de gueules. peintes en 1913
— feuillage.
Troisième pièce entre deux entraits.
L'inscription reprend ici avec RECTO [Recteur] SANT AVÉ FIT ACHEVER.
— feuillage.
—Une sirène de face, verte et écaillée avec une queue de poisson bien visible tient un peigne de la main droite est caresse ses longs cheveux blonds de la main gauche.
—une tête de clerc, tonsuré, tournée vers la sirène dans une posture renversée en arrière, comme envoûté .
— un joueur de luth , en chevalier servant, de face, la tête coiffé d'un bourrelet sur des épais cheveux peignés en masses latérales ; Grand manteau et chausses.
— une joueuse de harpe, à genoux, tournée vers le luthiste, et sur la traîne de son manteau un petit chien blanc.
— et enfin, dans l'angle de l'entrait, un joueur de traverso, assis sur une cathèdre.
Sur cette pièce, on constate que les motifs, quoiqu'isolés le long d'une frise, composent des ensembles narratifs. Si la sirène, ici, témoigne de l'enchantement de la voix (simple hypothèse), toute la pièce est alors dédiée aux pouvoirs de la musique.
Pour certains, la sirène pourrait aussi renvoyer aux anciennes graphies de Saint-Avé, Senteve, Sainct Eve (en 1427, 1448, 1464 et 1536) ou Sainct Evve (en 1477) .
Les deux sirènes de Saint-Avé n'ont pas échappées à l'inventaire de Hiroko Amemiya, qui les classent dans les 20 exemples d'"ornement de type sirène", dont 13 en pierre et 7 en bois avec celles des sablières de Loc-Envel, et de N-D des Grâces de Kerlenat.
Elle décrit ici "un sujet debout, au visage rond grossièrement taillé, avec une longue chevelure ondulée, gonflée en forme d'éventail aux côtés des oreilles, qui tombe jusqu'à l'extrémité de la queue. Ses mains soulèvent les cheveux [H. Amemiya n'a pas identifié le peigne]. La partie inférieure du corps a la forme d'une queue de poisson à écailles à peine apparentes."
Deuxième pièce entre les entraits.
— Un homme endormi, la tête appuyée sur la main, le coude posé sur l'accoudoir d'une cathèdre.
—Un oiseau blanc s'emparant du rouleau de phylactère du dormeur. Pour J. Guyomar, "dans l'angle, un moine, les pieds en haut et la tête en bas appuyée sur sa main droite, dormait, bercé par la musique, lorsqu'une colombe aux ailes déployées arrive du ciel avec un message, qu'elle tient dans son bec et ses pattes, pour lui dire qu'il a autre chose à faire que de dormir ; et le moine a la main gauche appuyant sur la sablière ; il fait un effort pour se lever."
— Un homme, en position de chevalier servant de face, dans une position d'exhibition encore plus indécente que celle de la sablière nord, a subi la même mutilation que l'autre.
— Après les mots CESTE CHAPEL, un homme coiffé d'un turban et vêtu d'une longue robe de chambre qui fait signe du doigt à son chien et lui dit : APORTE (« Apporte). Ce mot est écrit à l'envers de manière à n'être pas confondu avec ceux de la légende ; le chien blanc montre les crocs et fait voir qu'il n'est pas disposé à porter à son maître l'os ou le bâton qu'il tient dans ou sous sa gueule .
Cette écriture rétrograde de la droite vers la gauche doit être un unicum dans le corpus des inscriptions des sablières, et on pourrait s'interroger longuement à son propos : l'artiste a su innover pour rendre de manière concrète le trajet de la parole du locuteur vers l'auditeur, de l'émission vers la réception. Ce procédé existe-t-il dans l'épigraphie médiévale ? dans les enluminures ? Et même dans nos bandes dessinées? Que de questions passionnantes!
Bien plus, on pourrait y voir une pensée philosophique, sur la vanité de la parole, sur son nonsens, sur la rupture ou de l'inversion/perversion du "propre de l'humanité" lorsque le langage s'adresse à un animal, etc.
Car, quel est le sens de cette saynète? Quel est même l'objet blanc défendu par le chien ? Y a-t-il ici jeu, ou antagonisme ? La scène est-elle reliée à la précédente, où intervient aussi un homme, un animal et un support d'écriture?
Avons-nous affaire à un art populaire destiné à faire sourire, ou à des supports de pensée savante cachée sous ces dehors énigmatique ?
Le sens de ces tableaux était-il clair pour leur contemporain, qui en posséderait les codes par une culture et des références, ou bien était-il déjà destiné à plonger le spectateur dans la perplexité et à ouvrir les portes de son imaginaire ?
— dans l'angle un dragon sans tête enroule sa queue autour de ses ailes.
L'engoulant du deuxième entrait, côté ouest.
Un homme sauvage, nu mais velu, prend la fuite, un pied encore dans la gueule du dragon. Il tient une pierre entre ses mains.
L'engoulant du premier entrait, côté est.
De la gueule du dragon sort un serpent qui l'affronte.
L'engoulant du premier entrait, côté ouest.
Un homme vêtu d'une robe violette et de chausses grimpe sur la poutre pour échapper aux dents du dragon ; il prend appui sur la gueule elle-même.
Du premier entrait jusqu'au blochet .
— Dans l'angle une feuille.
— De l'autre côté de la poutre, un homme dans une posture de chute cul dessus tête, qui fait écrire à Guyomar " cette figure rappelle la folie de Don Quichotte dans une forêt, où ce héros en chemise se livre à des exercices acrobatiques et excentriques, qui découvrent à Sancho des choses si drôles qu'il s'enfuit pour ne pas les voir."
— un bouton rouge au cœur de pétales ou sépales verts.
— Et un homme aux cheveux abondants serrés par un bandeau, qui a l'air de vouloir soutenir à lui seul toute la toiture.
—une fleur rouge dans des feuillages,
—un masque d'homme souriant, coiffé d'une capuche à rabats.
.
—Le blochet engagé dans la maçonnerie
On y voit , s'échappant de la gueule du dragon, une forme violette qui doit correspondre à un personnage féminin s'échappant, si on en juge par les tourbillons de plis d'une robe.
Le bras nord du transept.
.
SOURCES ET LIENS.
— AMEMIYA (Hiroko), Vierge ou démone, statuaire insolite en Bretagne, Keltia graphic, pages 226 et 227.
—DANIGO (Joseph), 1983, La chapelle Notre-Dame-du-Loc à Saint-Avé, Congrés archéologique de France tome 141 page 216 et suiv.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3210037c/f218.item
"Depuis des siècles, la paroisse de Saint-Avé avait cette particularité de posséder deux bourgs,
distants de quelques centaines de mètres : le « bourg d’en-haut » regroupé autour de l’église-mère et le « bourg d’en-bas » appelé au xvi e siècle « bourg de Notre-Dame Saint-Evé » et, au xv e , « Locmaria-Saint-Evé ». Ce dernier se signalait par une chapelle dédiée à la Vierge où les paroisses voisines se rendaient en pèlerinage, les lundi et mardi de Pâques.
Historique. — Grâce aux inscriptions de ses sablières, la chapelle Notre-Dame du Loc peut être
exactement datée. Dans le chœur, on lit, en effet : « MEST e o. de peillac chanoyne de guerade et RECT e de s t eve fist F(aire) ceste ouvre (œuvre) lan mill cccc lxxv (1475) » et dans la nef : « ou (loyal) TEMPS DE MASTRE OLIVIER DE PELIAC CHANO e (de) GUERANDE ET MAISTRE ANDRE DE COETLAGAT RECT(r) DE SAIT AVE FIT ACHEVER CESTE CHAP le (chapelle) EN LAN MIL IIII C IIII XX ET XIIII (1494) ».
Olivier de Peillac fut recteur de Saint-Avé de 1475 à 1488 et André de Coetlagat, d’une famille
alliée, lui succéda de 1488 à 1504. La chapelle de Saint-Avé, leur œuvre commune, a donc été construite, très exactement, dans le dernier quart du Xv e siècle. Sans doute ne furent-ils pas les seuls à y concourir car, à côté de leurs armes, maintes fois répétées, figurent les hermines ducales de Bretagne, les besants des Rieux, au titre de Largouet, seigneurie dont dépendait Saint-Avé et les marques des Benoist de Lesnevé, des Lestrelin de Lesvellec et autres vassaux. Mais il ne faut pas négliger la contribution populaire, toujours importante.
Au fil des siècles, bien des réfections sont intervenues. La plus importante date de 1913, où les
pignons du transept furent relevés, la nef percée de nouvelles baies, la façade occidentale déposée, le sol nivelé, le mobilier déplacé et, en partie, renouvelé. En 1948, une violente tornade emporta le clocheton de charpente qui ne sera rétabli qu’en 1952.
Description. — En dépit de ces restaurations, parfois un peu intempestives, la chapelle Notre-Dame
du Loc garde bien des caractères du xv e siècle : plan en croix-latine, chevet droit, contreforts d’angle, clocher d’ardoise au haut de la nef, charpente apparente sous un lambris en carène.
Le chœur est demeuré à peu près intact dans son appareil de granit. Les rampants du pignon sont
lisses et la fenêtre axiale s’ouvre en arc brisé, moulurée d’un cavet, à l’intérieur comme à l’extérieur, et garnie d’un remplage flamboyant. De l’ancien vitrail ne subsistent que de minimes fragments regroupés dans les flammes trilobées. Plus petite, la fenêtre méridionale répète ce même dessin mais avec un ébrasement rectiligne.
Il n’y a guère lieu de tenir compte du transept, si ce n’est parce qu’il a conservé, à l’intérieur, ses
bancs muraux, ni des longères de la nef construites en moellons et dont les contreforts et les ouvertures ont été modifiées.
La façade occidentale a souffert, elle-même, de la restauration du xx e .siècle, mais on a sauvegardé
son aspect général. Au sommet des contreforts d’angle, de hauts pinacles encadrent les rampants du pignon où apparaissent les premières crosses végétales. Le portail en arc brisé s’inscrit dans un avant-corps, amorti en bâtière, qui lui donne plus de profondeur. Malheureusement les colonnettes engagées dans les piédroits pour recevoir les moulurations toriques ont été privées de leurs chapiteaux. Au-dessus, le grand oculus du pignon contenait sans doute à l’origine une rose.
A l’intérieur, si les lambris de la voûte ont été renouvelés, les éléments apparents de la charpente
remontent aux origines.
Aux entraits, plutôt qu’aux habituels crocodiles, les engoulants ressemblent à des sangliers aux crocs puissants qui parfois tirent la langue. Certains d’entre eux sont aux prises avec des animaux ou des hommes. Le long des sablières, alternant avec les inscriptions et les signes héraldiques, défilent des figurations souvent mystérieuses, non seulement des feuilles dentelées ou des masques, une sirène tenant en mains un miroir et un peigne, un sagittaire, un moine réveillé par une colombe, un homme coiffé d’un turban qui commande à son chien tenant un os : « aporte ». Certains de ces reliefs, jugés indécents, ont été mutilés vers 1830 et pourtant ces sculptures comptent parmi les meilleures du Morbihan.
Le mobilier. Le mobilier de la chapelle n’est pas moins remarquable. Dès l’entrée, se dresse, sur
un support sobrement mouluré, un bénitier octogonal de granit, frappé des armes de Peillac et de Cantizac.
A l’autre extrémité de la nef, se hisse jusqu’à la voûte un crucifix de bois qui dominait autrefois
la barrière du chancel. Au pied de la croix discrètement orné se trouve incorporé un tronc. Des niches, aux dais délicatement fouillés mais vides de leurs statues entourent le fût. Plus haut, se détachent, en accolade renversée, deux branches aux feuilles luxuriantes, qui portent à leur extrémité les statuettes polychromées de la Vierge et de saint Jean. Le Christ est cloué à la croix, les jambes droites, les bras largement ouverts, la tête un peu penchée. Au-dessus du titulus, un dais pyramidal, ajouré sur toutes ses faces d’arcades flamboyantes et hérissé de pinacles et de crosses végétales s’élève triomphalement en trois étages. La finesse de cette dentelle lui a valu, de la part des gens du pays, le surnom de « er spernen », l’aubépine. Au dos, face au chœur, un évêque se tient debout et les bras de la croix portent l’inscription :« MESTRE ANDRE DE COETLACAT RECTEUR DE SAINT AVE FIT FAIRE GESTE EUPVRE (œuvre) LAN MIL Vc (1500) ».
Les ailes du transept contiennent quatre autels de pierre, tous les quatre adossés à l’est et disposés
symétriquement.
Les deux principaux sont constitués d’un massif rectangulaire assez grossier, d’une table moulurée
sur ses bords d’une bande et d’un cavet, enfin d’un retable de granit comme il n’en existe plus que de rares exemplaires. Le retable du nord est mutilé dans sa partie gauche où figurait la scène de l’Adoration des Mages mais, à droite, on voit encore celle de l’Annonciation : l’ange porte un phylactère avec l’inscription, en caractères gothiques : « ave maria » et s’agenouille devant la Vierge qui se tient debout, la main droite sur la poitrine, un livre à fermoir dans sa main gauche.
Dans celui du sud s’alignent, de gauche à droite, une Crucifixion avec la Vierge et saint Jean, le
Couronnement de Marie (fig. 3), sainte Catherine tenant la roue et l’épée de son martyre, sainte Madeleine avec son vase de parfum et sainte Marguerite « issant » du corps du dragon.
Tous ces sujets sont sculptés, en réserve entre deux bordures saillantes, avec une réelle maîtrise,
en dépit de la rudesse du matériau. Ce sont de bons spécimens de la sculpture vannetaise du xv e siècle.
De part et d’autre de l’entrée du chœur, les deux autres autels, de même composition, sont plus
petits et plus soignés. Leur retable, en pierre blanche, s’entoure d’un cadre 01 circulent des rameaux de vigne. Jadis, des peintures de l’Annonciation et de la Nativité ornaient le panneau central. Une œuvre similaire, à Noyal-Pontivy, qui a gardé son décor peint, porte la date de 1574.
Les autels s’accompagnent d’une statuaire de bois abondante et variée mais les deux images de
sainte Madeleine et de sainte Luce sont en pierre, cette dernière marquée du blason d’Olivier de Peillac, qui les date du xv e siècle. On le retrouve sur plusieurs socles sculptés de feuillages et d’angelots.
Dans le chœur, l’autel de pierre blanche est moderne, tout comme la table de communion. Fort
heureusement, on a respecté l’ancienne crédence, bien qu’elle ait été mutilée. Un beau trilobé s’inscrit à l’intérieur de son cintre brisé et elle s’accompagne des habituels ornements flamboyants : pilastres à pinacle, accolade verdoyante, fleuron épanoui et, en outre de deux blasons. De l’autre côté, le triangle du sacraire indique une date plus tardive.
Au nouvel autel, on a incorporé les éléments d’un retable d’albâtre placé primitivement sur l’autel
méridional. Il se composait de sept éléments sculptés en bas-relief ne comportant pas moins de quarante-sept personnages. Malheureusement, il faut déplorer le vol, en 1980, du panneau central qui ornait le tabernacle. Le Père Eternel y figurait, assis sur son trône. Au sommet de sa tiare pointue était perchée la colombe du Saint Esprit. Entre ses genoux se dressait la croix où pendait son Fils. Contre sa poitrine, une poche, image du sein d’Abraham, contenait trois élus. De part et d’autre, six anges accusaient la composition en trois étages : ceux du bas recueillaient dans un calice le sang qui coulait des pieds du Crucifié, deux autres, au milieu, celui des mains et, en haut ils tenaient à main droite une clef et de l’autre supportaient le nimbe céleste .
Les six autres compartiments, quatre grands et deux petits, encadrent le tabernacle. Dans les
quatre principaux se pressent une foule de personnages : à gauche, d’abord les patriarches et les prophètes parmi lesquels on reconnaît Abel, Melchisedech, Abraham, Moïse, Isaïe, puis des dignitaires : pape, cardinal, roi, évêque, abbé, moine ; à droite des saints : Pierre, Paul, André, des martyrs et des confesseurs, des saintes : Catherine, Marguerite, Madeleine, Hélène, Appoline. Séparés de ces cortèges, saint Jean-Baptiste et saint Jean l’Evangéliste occupent les panneaux extrêmes. Une frise de dais en arcs infléchis et garnis de crosses végétales couronne tout l’ensemble.
La plupart du temps, ces retables d’albâtre étaient importés de Grande-Bretagne où leur fabrication en série a commencé à York et à Nottingham vers 1390 pour se continuer jusque très avant dans le xvi e siècle.
Toujours dans le chœur, une très belle Vierge à l’Enfant, en pierre blanche, doit être contemporaine de la chapelle. Majestueuse, la tête un peu penchée, elle se hanche légèrement. Sous la couronne royale, son visage s’encadre entre les boucles de sa chevelure. Sa robe et son manteau tombent sur ses chaussures en plis simples et élégants. Vêtu d’une longue robe, l’Enfant feuillette le Livre saint que tient sa mère, un doigt engagé dans les pages.
Cette œuvre savante n’a plus rien à voir avec les images rustiques des chapelles morbihannaises.
René Couffon y reconnaissait plutôt une œuvre nordique.
L'enclos. —- La chapelle Notre-Dame du Loc est contenue à l’intérieur d’un placître fermé où se
voient encore deux croix anciennes et une fontaine.
Face au portail, se dresse une grande croix de pierre du type à panneau, fréquent dans le Morbihan.
Son soubassement quadrangulaire, élevé sur un perron à trois degrés, s’élargit, du côté de l’ouest, en table d’autel. Il supporte un socle épais sculpté sur ses quatre faces : à l’ouest, sous une grossière accolade, figure une Annonciation analogue à celle du retable intérieur. A l’opposé une triple arcade abrite un saint Jean-Baptiste, un saint Jacques et, peut-être, au milieu un saint Laurent. Sur les petits côtés, il n’y a que deux personnages : sans doute saint Pierre et saint Paul au nord, sainte Madeleine et sainte Catherine, au sud.
Un chapiteau mouluré coiffe le fût écoté et soutient le médaillon à quatre lobes d’où émergent les
extrémités de la croix. Aspectant à l’ouest se détache en bas-relief la scène de la Crucifixion avec la Vierge et saint Jean, la tête appuyée sur la main. Au dos, la Vierge à l’Enfant trône entre quatre anges : deux musiciens et deux thuriféraires.
Un peu plus loin, vers le sud, fichée dans une stèle hémisphérique, une autre petite croix au panneau
hexagonal présente sur une de ses faces le Crucifié et sur l’autre une Vierge à l’Enfant couronnée.
A gauche de l’entrée, le bassin rectangulaire de la fontaine, s’avance, entre deux murets de pierre,
jusqu’à un pignon triangulaire où les crosses en spirale des rampants accusent le début du xvn e siècle.
La petite niche est désormais vide mais la croix domine toujours le monument.
En cet étroit espace, l’enclos de Saint-Avé d’en-bas regroupe ainsi tout un ensemble d’œuvres
variées caractéristiques de l’art vannetais.
Bibliographie sommaire.
L. Rosenzweig, 1863 Répertoire archéologique du département du Morbihan, P, 1863, col. 221-222 ;
Guillotin de Corson, 1898 Les pardons et pèlerinages de Basse-Bretagne. Diocèse de Vannes,
Rennes, 1898, p. 14 à 21 ;
G. Duhem, Les églises de France, Morbihan, P, 1932 ;
H. du Halgouet, Trésors du passé, Vannes, 1948, 86 p. Les albâtres, p. 27-32; H. du Halgouet, Contribution à l'artpopulaire dans le statuaire, Vannes, 1948, 32 p.
— DIEGO MENS (Casas), 2020, La chapelle Notre-Dame-du-Loc en Saint-Avé.« Ymages » et décors du dernier quart du xve siècle, Actes du congrés de Vannes sept. 2019, Mémoires de la Socité d'Histoire et d'Archéologie de Bretagne, 36 Pages
https://www.academia.edu/43033745/La_chapelle_Notre_Dame_du_Loc_en_Saint_Av%C3%A9_Ymages_et_d%C3%A9cors_du_dernier_quart_du_xve_si%C3%A8cle
Celles-ci se décomposent en trois ensembles : en premier lieu, les sablières sculptées, puis les statues de la fin du XVe siècle et enfin le calvaire monumental, commandé en 1500, qui semble clore le chantier de cet édifice. Nous ne reviendrons pas ici sur la symbolique de ces sablières qui a été largement analysée et documentée dans la thèse de Sophie Duhem sur les sablières sculptées en Bretagne . Par la qualité des sculptures et des reliefs, cet ensemble qui alterne régulièrement des blasons, portés par des angelots en pied de cerces, et des scènes historiées, est l’un des ensembles bretons majeurs du dernier quart du XVe siècle. Les reliefs très soignés et élégants, quoiqu’intégralement repeints en 1913, sont travaillés en frise, notamment dans la nef, et accompagnés par des entraits à engoulant. L’exemple est représentatif, selon cet auteur, des décors profanes en vogue dans les ateliers de cette période, avec un bestiaire fantastique (centaures, sirènes), des personnages accompagnés d’animaux ou des musiciens (luth, harpe et un type de flûte traversière). Si certains péchés capitaux sont illustrés, les scènes religieuses ne constituent pas une suite logique, à la façon d’un cycle destiné à l’enseignement des fidèles et à leur mise en garde. L’iconographie, parfois inconvenante, de cet ensemble composé de « thèmes joyeux » selon Sophie Duhem, ne cadre pas à l’évidence avec le rang et la qualité du commanditaire supposé, André de Coëtlagat. Il faut raisonner de manière spatiale pour analyser plus avant ce décor sculpté de charpenterie.
Les scènes historiées au milieu de la hauteur de l’édifice, dans une verticalité entre ciel et terre, se concentrent sur deux espaces horizontaux : le chœur commencé en 1475 et la nef achevée en 1494 avec deux entraits également sculptés de scènes. En revanche, les sablières des bras de transept sont plus dépouillées et décorées essentiellement par des anges porte-blasons, en bas des cerces. Les seules scènes historiées, placées sur les angles du chevet, sont visibles de la nef, donc pour des fidèles réunis derrière le chancel. Dans le chœur également visible de la nef, ce ne sont que quelques scènes profanes, isolées dans une frise essentiellement héraldique.
Le volet iconographique profane, en frise régulière, est donc concentré dans la nef, réservée aux fidèles, contrairement au chœur, chapelles latérales et inter- transept, espaces du clergé et de la noblesse.
Le chancel, sans tribune ici, compose une barrière physique, mais permettant toutefois de lire une partie des décors de sablières, au-delà de celui-ci.
Ainsi, le programme iconographique de la nef et d’une partie du chœur, mêlant fantastique, religieux, irrévérencieux et des scènes du quotidien, semble essentiellement destiné à la seule lecture d’une catégorie de la population [On ne prendra pas en compte dans cette analyse les inscriptions portées établissant les commanditaires, dans le chœur et la nef, réservées probablement à la noblesse et au clergé, et une certaine partie de la population lettrée.]
Il ne traduit sans doute pas une commande précise d’un clerc mais il compose plutôt un décor voulu par les sculpteurs, mêlant des thèmes populaires ou savants, selon une organisation qui nous échappe désormais.
Ce décor est placé à mi-hauteur de l’édifice avec ses blasons, entre quotidien terrestre des fidèles et voûte céleste. L’origine de cette symbolique complexe est à trouver dans ce positionnement. Autre élément constaté : la moindre qualité de la sculpture des scènes historiées du chœur et des chapelles latérales par rapport à celles de la nef. Étant donné sa durée, et à l’inverse de la proposition de S. Duhem qui fixe la date de 1494 pour une pose de la charpente, le chantier a dû être réalisé en deux temps distincts, sans doute par deux ateliers différents pour le décor de la charpenterie.
En effet, on imagine difficilement un tel édifice, doté d’une couverture provisoire durant 19 années, et sans une charpente pour maintenir la cohésion des murs.
L’analyse héraldique du décor de charpenterie permettra de confirmer ces deux phases dans la construction. Les travaux de 1913 ont été l’occasion d’une reprise importante de ces sablières, et notamment des blasons présents, tant sur celles-ci que sur les socles. Comme le précise l’abbé Guyomar , certains écussons ont été repeints, dont ceux des sablières de la nef, notamment celui de l’angle sud de la nef et du transept. Muet, il a été peint aux armes des Coëtlagat d’azur à trois aiglettes d’or .
Les autres blasons, sculptés et peints avec motifs héraldiques et portés par des anges placés aux trois autres angles de la nef et du transept , sont authentiques. Ils correspondent à des familles nobles de la paroisse du dernier quart du XVe siècle : les Benoist, seigneurs de Lesnévé sur l’angle nord du chœur d' hermines à trois chevrons de gueules chargés de besants d’or, les Arz, seigneurs de Tréviantec et Rulliac sur l’angle sud d’azur à trois quintefeuilles de gueules et enfin, sur l’angle diamétralement opposé les Lestrelin, de Lesvellec d’argent à la fasce nouée d’azur accompagnée de sept merlettes de gueules posées 4 et 3 . Cette organisation héraldique témoigne sans doute du placement de ces familles nobles, lors des offices, au-devant du chancel. Sur les sablières du chœur , l’organisation héraldique est différente.
Près du mur du chevet et de la maîtresse-vitre, les armes de Bretagne sont présentes de part et d’autre, avec un doute sur celle placée au nord, qui ne comportent que trois hermines [le blason modifié pourrait être en lien avec le fait que Jean de Rieux est le petit-fils de Marguerite de Bretagne, fille du duc Jean IV.] , contre huit au sud [Identiques à celles qui se trouvent sur le tombeau du duc François II.]. Dans une lecture de droite à gauche au nord, puis à l’inverse au sud, les blasons sont organisés par niveau hiérarchique, comme un vitrail de haut en bas.
--Sur la sablière nord, le blason de Bretagne est précédé de celui des Rieux-Malestroit en alliance [ Malestroit : de gueules à neuf besants d’or et Rieux : d’azur, à dix besants d’or, ordonnés 3, 3, 3 et 1] . En troisième rang les Rieux-Rochefort d'azur à 5 besants d’or en sautoir aux 1 et 4 (Rieux) et aux 2 et 3 vairé d’azur et d’or (Rochefort) , puis enfin les Coëtlagat d’azur à trois aiglettes d’or . Toutefois, ces dernières armes semblent suspectes, car elles n’auraient été apposées qu’après 1488, date de la prise de fonction d’Olivier de Coëtlagat. Les armes des Peillac seraient plus cohérentes, comme celles sculptées sur les contreforts du chevet.
--Sur la sablière sud, sous les armes de Bretagne, l’ordonnancement est différent, avec de gauche à droite, les armes des Rochefort-Rieux, puis celles des Malestroit.
Cette organisation sur les deux sablières peut être étendue aux deux chapelles latérales, comme pour un blason mi-parti : au nord, une chapelle appartenant à Jean IV de Rieux, avec les armes en alliance témoins de son mariage, et, au sud, un espace réservé à sa fille, Françoise de Rieux, dame de Malestroit, de Largoët, de Derval et de Rougé. Sur la panne faîtière, les armes de Bretagne, à huit hermines, se succèdent du chevet jusqu’à la clef de voûte, indiquant probablement une organisation antérieure au mariage de la duchesse avec Charles VIII.
Dans la nef, le blason de Bretagne ne contient plus que cinq hermines et il est suivi vers l’ouest d’un poinçon bagué de fleurs de lys, puis de la lettre R couronné et enfin du monogramme IHS. Ce programme héraldique pourrait illustrer les armes de Bretagne, puis la couronne de France et enfin le chiffre R pour Rieux-Rochefort surmonté d’une couronne vicomtale à trois fleurons, reprise dans le sens inverse dans le poinçon suivant. Il serait donc postérieur au premier mariage d’Anne de Bretagne et antérieur à l’achèvement de la chapelle en 1494.
Ainsi, ce programme héraldique démontre deux temps politiques et architecturaux distincts, celui d’un chœur et des transepts réalisés entre 1475 et 1488 correspondant au règne du duc François II, et un second pour la nef, entre 1491 et 1494, après le premier mariage d’Anne de Bretagne. L’intervention de deux ateliers distincts pour la sculpture de la charpenterie pourrait être ainsi confirmée.
—DUHEM, Sophie, Les sablières sculptées de Bretagne, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1997, pp. 36,38, 39, 63, 67, 69, 71, 88, 125, 168, 170, 179, 193, 216 à 218, 236 et 237, 240, 265, 266, 270 et 271.
— infobretagne :
http://www.infobretagne.com/saintave-notre-dame-loc.htm
reproduit les textes de J. Guyomar, de Gustave Duhem 1932 (Les églises de France) et de la Revue Morbihannaise volume 18 page 126 de 1914
"(1475 - 1494), édifiée par Olivier de Peillac et André de Coëtlagat, recteurs de Saint-Avé, comme l'atteste l'inscription sur la sablière du choeur : "Mestre O. de Peillac, chanoyne de Guérande et recteur de Saint-Avé fit f. ceste ouvre l'an mil CCCcLXXV", et la sablière de la nef : "Ou loyal temps de mastre Olivier de Peillac, chanoine de Guérande, maistre André de Coetlagat recto de Saint-Avé fist achever ceste chapele en l'an mil CCCcIIIIxx, et XIIII". Il s'agit d'un lieu de pèlerinage. Le chantier est commencé en 1475 par le choeur et terminé en 1494. C'est un édifice en forme en croix-latine terminé par chevet plat percé d'une grande fenêtre à meneaux flamboyants. La restauration de 1913 touche principalement la nef et le transept et on a eu soin de conserver intacte la façade occidentale dont le pignon à rampants décorés s'élève entre deux contreforts obliques amortis de pinacles. Un porche peu saillant, surhaussé au moment de la restauration et dont les voussures sont à cintre de plus en plus brisé sous un fronton triangulaire à redents, s'ouvre sous un grand oculus. La charpente est en forme de carène de navire renversée avec lambris à clefs pendantes sculptées.
Sur les sablières se voient de nombreux écussons aux armes de Peillac, Lestrelin de Lesvellec, Benoît de Lesnevé, Coëtlagat, Cantizac, Rieux, Rochefort, Rieux-Malestroit, etc ...
Au croisillon Nord, une fenêtre en tiers-point dont le réseau dessine une fleur de lis semble indiquer que ce croisillon est la partie la plus récente de la construction. Les fenêtres de la nef datent de la restauration de 1913. A la grande fenêtre du chevet se voient des fragments de vitraux du XVIème siècle. La nef comporte un calvaire à personnage en bois sculpté et peint, donnée en 1500 par le recteur André de Coëtlagat : le Christ en croix est flanqué de deux consoles supportant les statues de la Vierge et de saint Jean. L’autel et le retable datent du XVème siècle. Il faut noter également une très belle statue en pierre polychrome de la Vierge à l'Enfant du début du XVème siècle, un retable en albâtre du XVème siècle et deux retables en granit de la fin du XVème ou du début du XVIème siècle. L'un des retables de granit représente l'Annonciation et l'Adoration des Mages, et l'autre retable représente en haut-relief la Crucifixion, le Couronnement de la Vierge, les saintes Catherine, Madeleine et Marguerite. Le maître-autel comporte sept panneaux d'albâtre où figurent des personnages de la Bible. On y voit encore une statue de la Vierge en bois doré du XVIIème siècle, et un beau bénitier de granit à huit pans sur pied octogonal décoré des armes de Peillac et de Cantizac. Dans les transepts il y a de nombreux saints et saintes dont sainte Marguerite (représentée les mains ouvertes, debout sur un dragon) et saint Colomban ;
—GUYOMAR (abbé J.),1914 Notre-Dame du Loc du Bourg d’en-bas en Saint-Avé, Vannes, 1914,
47 p. ;
http://www.infobretagne.com/saintave-notre-dame-loc.htm
—TOSCER Catherine, 1987,inventaire topographique Dossier d’œuvre objet IM56004515 et Dossier de présentation du mobilier IM56004538
https://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/IM56004515
https://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/IM56004538
Autres sites :
https://patrimoines-archives.morbihan.fr/decouvrir/instants-dhistoire/un-objet-des-histoires/notre-dame-du-loc
Vidéo par Alain Peyrus sur Youtube :
https://www.youtube.com/watch?v=cX5G6aKQv9g
retable en albâtre :
https://pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM56001038