L'emblématique de la chapelle de Laurent de Gorrevod (v. 1540) au monastère royal de Brou. Les monuments funéraires. Le vitrail de l'Incrédulité de saint Thomas.
Au-delà de l'oratoire de Marguerite se trouve la chapelle de son conseiller, Laurent de Gorrevod, dédiée à Notre-Dame de Pitié. Elle abrite les tombeaux de Laurent de Gorrevod et de ses deux épouses, Philiberte de la Palud et Claude de Rivoire, ainsi que de plusieurs membres de leur famille. Les magnifiques gisants en bronze de Gorrevod et de ses épouses furent détruits à la Révolution, et seule subsiste la dalle sur laquelle reposaient les statues, portant la devise du fondateur —POUR JAMES (lire :"jamais") — et les initiales L. F. et L. C. (lettres de son nom et de celui de ses épouses ), reliées par la cordelière de Savoie.
L.F = Laurent et Filiberte, pour Filiberte de la Pallud, décédée en 1509
L.C = Laurent et Claudine de Rivoire, décédée en 1535
Rappel :
La famille de Gorrevod joua un rôle considérable dans le duché de Savoie. Louis de Gorrevod, évêque de Maurienne et abbé d'Ambronay, avant de devenir le premier et éphémère évêque de Bourg puis cardinal, en 1530, avait présidé au mariage savoyard de Marguerite d'Autriche, en 1501 . Et c'est lui qui consacra l'église de Brou en 1532.
La Chapelle de Ducs de Pont-de-Vaux , située du côté nord et dans laquelle on pénètre par une arcade supportant la galerie haute qui mène à l'oratoire de la princesse, est due à Laurent de Gorrevod, qui fut le chef du conseil pour la construction de la maison et de l’église de Brou. Acté par la Princesse à la date du 28 avril 1520, Laurent de Gorrevod choisit sa sépulture pour lui et successeurs dans cette chapelle. Les gisants en bronze ont été fondus à la Révolution pour en faire des canons.
Laurent de Gorrevod (né en Bresse vers 1470 ; † 6 août 1529 à Barcelone) faisait partie de la haute noblesse savoyarde. Il fut écuyer de Philibert Le Beau puis gouverneur de Bresse ; il suivit Marguerite d'Autriche aux Pays-Bas en tant que son chevalier d'honneur avant d'être attaché à Charles Quint. Il fut baron de Marnay et de Montenai, comte de Pont-de-Vaux et vicomte de Salins.
L'écu est entouré du collier de la Toison d'Or, est suspendu à un heaume entouré de lambrequins, surmonté d'une licorne comme cimier, reposant sur un tortil.
J'intérprête l'élément animal à crinière de cheval et dont la tête est brisée comme une licorne en me basant sur le R.P. Rousselet : "Contre le pilier où le Mausolée est adossé on a suspendu l'écu des armes de la Maison de Gorrevod ,d'azur au chevron d'or, ayant pour supports deux Lions d'or & une licorne d'argent pour cimier».
2. Les lettres L et F réunies par la cordelière de Savoie.
Les lettres L pour Laurent et F pour Filiberte sont perlées, tressées, et leurs empattements fleurissent en prolongements exubérants, qui viennent jouer avec les entrelacements de la cordelière à glands de passementerie.
On notera, sur la droite du phylactère portant le mot POUR JAMES, les fleurs de marguerite, ultime hommage à Marguerite.
J'ai, débarquant ici en touriste, cru d'abord très naïvement que le monument honorait un défunt prénommé JAMES.
James (ou jamès) est une forme rare de jamais, retrouvée toujours en lien avec Marguerite d'Autriche. Elle est d'abord attestée dans un courrier de Maximilien à Marguerite :
"Très chière et très amée fylle, jé entendu l'avis que vous m'avez donné par Guyllain Pingun, nostre garderobes vyess, dont avons encore mius pensé desus.
Et ne trouvons point pour nulle résun bon que nous nous devons franchement marier, maès avons plus avant mys nostre délibération et volontéde jamès plushanter faem nue."
Ou dans un courrier de Marguerite à son valet :
"Premier, que je desire sur toute chose mestre ma religion en tel estat quepour jamés ils n'aient grant povreté; mes qui puissent vivre sans mandier..."
Et enfin dans un charmant rondeau que Marguerite d'Autriche a écrit de sa main :
"C'estpour jamèsqu'un regret me demeure;
Que sans sesser nuit et jour à tout eure
Tant me tourmant que bien voudroi mourir;
Car ma vie n'est fors seulement languir,
Et s'y faudra à la fin que j'en meure.
De l'infortune estais bien seure
Quan le regret maudit où je demeure
Me coury sus pour me faire mourir,
Car ma vie n'est fors
Seulement languir:
Sy faudra que j'en meure "(Bibliothèque royale de Bruxelles, cité par E. E.Tremayne
sur le vitrail en place, des armoiries des Gorrevod, accompagnées de la devise «pour james » et celles de sa seconde épouse, ..
3. Le blason en losange de l'épouse, entouré de la ceinture Espérance.
4. Deuxième réunion des lettres L et F.
5. Les lettres L et C réunies par la cordelière de Savoie.
6. Le blason en losange de l'épouse, entouré de la ceinture Espérance.
7. Deuxième réunion des lettres L et C.
On en admirera la préciosité de graphie des lettres. Non seulement leurs fûts sont perlés et les empattements sont bifides, mais certains fûts sont aménagés d'une fente où se faufilent les traverses et les diagonales, aux extrémités parfois tressées en brandebourg.
8. Sur le monument : le briquet et la croix écotée.
Le vitrail de l'Incrédulité de saint Thomas, baie 13 (1527-1531).
Numérotation des vitraux selon le Corpus Vitrearum
Ce vitrail de la chapelle de Gorrevod porte les armes de Laurent de Gorrevod et de sa seconde épouse Claudine de Rivoire.
Baie 13, chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Baie 13, chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Le tympan : 15 anges en prière.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Registre supérieur : suspendues aux arches de l'architecture gothique flamboyant, les armes de Philibert le Beau et de Marguerite d'Autriche.
On remarque les élements de décor Renaissance, comme les dauphins (au sommet ou en frise) et les médaillons de personnage de profil.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Deux femmes à la poitrine nue et au bas du corps qui se transforme dans le rinceau feuillagé affrontent les têtes de "dauphins".
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Le registre principal : l'Incrédulité de saint Thomas vénérée par Laurent de Gorrevod et Claudine de Rivoire, en donateurs.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
L'Incrédulité de saint Thomas: l'apôtre Thomas met ses doigts sur la plaie du flanc droit du Christ ressuscité, sur l'injonction de ce dernier.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Laurent de Gorrevod agenouillé en donateur sur son prie-dieu, en armure recouvert d'un tabard à ses armes, est présenté par saint Laurent, tenant le grill de son martyre.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Le blason de Laurent de Gorrevod.
Ses armes d'azur au chevron d'or sont entourées du collier de l'Ordre de la Toison d'or (dont les briquets sont bien visibles) et timbrées de la couronne de baron.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Claudine de Rivoire présentée par saint Claude.
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Le blason losangique (féminin) mi-parti de Claudine de Rivoire
Née en 1465 et décédée le 28 décembre 1535 à Besançon, c' est la fille de Louis, seigneur de Gerbaiset de Marguerite d'Albon. Elle a épousé Laurent de Gorrevod en 1509. Elle est veuve depuis décembre 1529. Le couple eut une fille, Louise.
Dans une guirlande d'honneur, les armes de Gorrevod, en 1, sont associées à celle de la famille de Rivoire, en 2 , Fascé d'argent et de gueules à la bande d'azur brochant sur le tout chargé de trois fleurs de lys d'or posées en bande.
https://man8rove.com/fr/blason/dkdvpc6-rivoire
Chapelle de Gorrevod, monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
SOURCES ET LIENS
— BEAUME (Florence), 2015, LA FAMILLE GORREVOD ET SES COMMANDES ARTISTIQUES La famille Gorrevod et ses commandes artistiques, in Colloque organisé par Laurence Ciavaldini Rivière, professeur d' université Grenoble-Alpes et Magali Briat-Philippe, conservateur, responsable du service des patrimoines, monastère royal de Brou, Bourg-en-Bresse
— collectif, 2015, Princesses et Renaissance(s), La commande artistique de Marguerite d'Autriche et de son entourage, Colloque organisé par Laurence Ciavaldini Rivière, professeur d' université Grenoble-Alpes et Magali Briat-Philippe, conservateur, responsable du service des patrimoines, monastère royal de Brou, Bourg-en-Bresse
L'emblématique (amoureuse) de Marguerite d'Autriche au monastère royal de Brou : armes parlantes, lettres entrelacées, cordelières, briquets de Bourgogne, Croix de Bourgogne, devise FERT, ceintures d'Espérance, blasons... etc.
C'est après avoir achevé cet article que j'ai réalisé qu'écrire l'emblématique du monastère royal de Brou, consistait en fait à décrire tout, absolument tout de l'église Saint-Nicolas-de-Tolentin...
A l’origine, une merveilleuse histoire d’amour
"Fille de l’empereur Maximilien de Habsbourg et petite-fille du dernier grand-duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, Marguerite d’Autriche (1480-1530) est veuve à 24 ans de Philibert le Beau, duc de Savoie, qui meurt en 1504 après une partie de chasse. Dès 1506, elle décide de bâtir aux portes de la ville de Bourg en lieu et place d’un modeste prieuré bénédictin, le monastère royal de Brou pour perpétuer sa gloire et le souvenir de l’amour qu’elle portait à son époux, mais aussi son ambition politique d'héritière du duché de Bourgogne et de régente des Pays-Bas. Suite à la décision de la princesse d’être inhumée aux côtés de son époux, il s’agit désormais de construire un écrin digne de son rang qui abritera trois somptueux tombeaux : ceux de Philibert le Beau, de sa mère et le sien propre. En souvenir du jour de la mort de Philibert, Marguerite exige que l’église soit placée sous le vocable de saint Nicolas de Tolentin, moine augustin italien très populaire en Savoie.
Nommée en 1506 régente des Pays-Bas pour le compte de son père puis de son neveu l’empereur Charles Quint, Marguerite suit depuis la Belgique ce chantier exceptionnel, rapidement mené (1505-1532). Elle y envoie les meilleurs maîtres d’œuvre et artistes de toute l’Europe, dont l’architecte de renom Loys Van Boghem qui succède à Jean Perréal. En juillet 1513, la première pierre de la nouvelle église est posée. Il ne faudra que 26 ans pour construire ce magnifique chef d'œuvre, ce qui est exceptionnel à cette époque. Marguerite s’éteint le 1er décembre 1530, sans avoir vu son œuvre achevée. Son corps est inhumé à Brou en juin 1532."
L'EXTÉRIEUR : LES PORTAILS OUEST ET NORD, LES FAÇADES.
LA FAÇADE OCCIDENTALE
" Un ample arc en anse de panier est surmonté d’une accolade ouvragée sur laquelle figure une statue de saint André (saint patron de la Bourgogne). Cette façade occidentale a la forme d’un vaste triangle divisé en trois bandes verticales : le corps central correspond à la nef et les deux pignons latéraux couvrent les bas-côtés. Le corps central est divisé lui-même en trois étages par des balcons ajourés.
Le portail dont les sculptures très riches encadrent un tympan, montre Philibert et Marguerite présentés au Christ par leurs saints patrons. Sur le trumeau, on trouve saint Nicolas de Tolentin avec son étoile. L’église de Brou est placée sous son patronage. De part et d’autre, figurent les apôtres saints Pierre et Paul, patrons du prieuré bénédictin antérieur. Aux niveaux supérieurs se détachent trois grandes fenêtres gothiques puis encore au dessus un pignon triangulaire terminé par un fleuron et deux pinacles."
Mais on peut décrire encore 7 frises emblématiques (photo) à côté des blasons losangiques, donc féminins, de Marguerite, où se succèdent les marguerites, le P et le M liés par les lacs d’amour, et les emblèmes bourguignons : la croix de saint André (en X) unie au briquet.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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I. LES LETTRES P et M ET LES ENTRELACS.
Elles sont partout sur les moulures des deux portails, leur recherche dans le décor devient une chasse jubilatoire mais inlassable.
Ce sont les initiales de Philibert le Beau et de son épouse Marguerite d'Autriche. En signe d'amour, d'union indéfectible malgré la mort de Philibert en 1504, à 24 ans, trois ans après son mariage en 1501.
[En 1483, à la mort de leur mère, Marguerite de Bourbon, Philibert et Louise de Savoie avaient été envoyés à la cour. Une partie de leur enfance s’était donc déroulée à Amboise, en compagnie de Marguerite d’Autriche qui, alors promise au dauphin Charles, futur Charles VIII, vivait également auprès d’Anne de Beaujeu, et ce depuis cette même année 1483... ]
La légende dit que le beau Philibert est mort d'avoir bu de l'eau trop glacée alors qu'il avait excessivement chaud lors d'une partie de chasse. On peut penser à un accès de fièvre, peut-être d'une pneumonie, car son épouse lui avait , dit-on, déconseillé d'aller chasser, alors qu'il était déjà bien grippé. Mais la chasse est, chez les seigneurs, une addiction parfois maudite, comme en témoignent les légendes de saint Hubert ou de saint Eustache.
Philibert était si mordu de chasse que, duc de Savoie à 17 ans, il avait laissé le gouvernement de ses États à son demi-frère René de Savoie, pour s'y adonner.
Marguerite d'Autriche, imitant en cela Louise de Savoie, veuve dès 1496 ne se remariera jamais et ne cessera, dès lors, de porter le deuil de son époux ou d'honorer sa mémoire. Mais si Louise de Savoie portait le deuil en noir, Marguerite porta le deuil blanc, qui se différencie par la présence d’un voile blanc plissé, recouvrant le corps du menton jusqu’à la poitrine ou la taille, d’inspiration flamande ou germanique. Et elle porte l'attifet presque toujours doublé d’un serre-tête blanc, qui cache le front comme le bandeau des religieuses. Ses manches sont doublées d'hermines. Un fin anneau noir est passé à son index gauche.
Bernard van Orley (atelier de) Portarit de Marguerite d'Autriche vers 1518 Musée royal des beaux-arts de BelgiqueInv. 4059
Les lettres en écriture gothique ont le fût perlé et leur empattement est bifide. Cet empattement vient parfois se prolonger par des éléments de feuillage, comme s'ils portaient en eux une sève fertile.
Certaines sont réunies par un cordage qui se termine par des glands de passementeries. Et sont placées entre des branches écotées, qui, nous le verront, sont fortement emblématiques. Et pas seulement des bois et de leur gibier.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
La plupart de ces lettres accouplées sont réunies plus soigneusement par une cordelière qui forme un ou plusieurs huit. Ce sont alors des entrelacs, des lacs d'amour.
Puisque Philibert était duc de Savoie, faut-il y voir des "nœuds de Savoie", attesté depuis 1382 dans la Maison de Savoie depuis Amédée VI, dit "Le comte vert"? La sœur de Philibert, Louis de Savoie, mère de François Ier, en introduisit l'usage à la cour de France, sous le nom de "cordelière", corde à plusieurs nœuds, cordelières combinant nœuds de Savoie et cordon franciscain, avec boucle, gland et grains serrés.
On trouve ces nœuds de Savoie à Brou sur le jubé ou la cuve baptismale.
Le noœud de Savoie.
"Dérivé des lacs d’amour médiévaux, ce nœud – un nœud lâche, à double boucle, en forme de huit – constitue l’une des devises le plus traditionnellement associées à cette maison. À l’origine, il s’agit du badge personnel du comte Amédée VI de Savoie (1343-1383), dit "le comte vert" : à l’occasion d’une joute organisée au moment de Noël 1354, Amédée VI arborait une selle peinte avec des lacs d’amour; en 1356, c’est tout son équipement de joute qui est décoré de tels nœuds. Puis au moment de la croisade, décidée en 1364 à Avignon, par le pape Urbain V, le badge personnel d’Amédée VI devient un badge dynastique et héréditaire représentant la maison de Savoie : le jour du départ pour la croisade, le comte portait, comme ses compagnons d’armes, des vêtements de velours vert, ornés de broderies représentant ce type de nœuds. Dès lors, comtes et ducs de Savoie arborèrent le nœud lâche en forme de huit sur les objets de leur vie quotidienne ou sur les monuments et objets d’art qui leur étaient associés.
Parallèlement, le nœud de Savoie figure – associé au mot FERT – sur le collier de l’ordre chevaleresque du Collier, un ordre fondé par le même Amédée VI, en 1364, à l’occasion de la prestation de serment de croisade générale contre les Turcs (plus tard, en 1434, l’ordre sera rebaptisé ordre de Saint-Maurice par Amédée VIII, puis réformé en ordre de l’Annonciade au xvie siècle). Notons que, sur le collier de l’ordre – qui est sculpté notamment sur le gisant de Philibert le Beau à Brou –, les nœuds de Savoie alternent avec le mot FERT mais ils ne forment pas une cordelière à proprement parler; quant au pendentif du collier, il est formé de trois lacs d’amour, allusion à la Trinité, trois lacs d’amour dont la présence est déjà attestée dans les formes primitives du collier.
Dans la plupart des occurrences, le nœud de Savoie apparaît de façon isolée (un seul nœud noué sur un petit morceau de cordelette). Au début du xvie siècle, quand se multiplient les images du nœud de Savoie, sous l’influence de Philibert II de Savoie et de Marguerite d’Autriche, le nœud apparaît toujours seul. La médaille qui est modelée et coulée à l’effigie de Philibert et Marguerite en 1502, à l’occasion de l’entrée de la princesse dans la ville de Bourg-en-Bresse, montre ainsi des nœuds de Savoie uniques, et non regroupés sur une corde à la manière d’une cordelière. Il en va de même sur le Grand Sceau équestre de Philibert II (sceau appendu à un document daté de 1497) ou, bien sûr, dans le monastère royal de Brou, où des nœuds de Savoie ornent notamment le jubé ou la cuve baptismale – nœuds qui se distinguent aisément des lacs d’amour reliant les initiales P et M. Si, sur la médaille de 1502, le jubé ou la cuve baptismale, le nœud se termine par un gland, évoquant par là le cordon franciscain, le nœud est toujours unique, et non répété en plusieurs exemplaires sur un même cordon.
Plus tard, les ducs de Savoie recourent encore à cet emblème : Charles III, duc de Savoie, le successeur de Philibert II, utilise le nœud de Savoie tel qu’il a été dessiné sous le règne du comte Amédée VI, comme en témoigne son sceau (appendu à un document daté de 1531)17. Ainsi, le nœud de Savoie n’est pratiquement jamais répété de façon à former une cordelière. Or, c’est bien l’usage qu’en fait Louise de Savoie, comme le montre par exemple son sceau (1515) 18. La plupart des cordelières qui lui sont associées se présentent même comme des cordelières combinant nœuds de Savoie et cordon franciscain, avec boucle, gland et grains serrés." (Laure Fragnart 2025)
Dans la dentelle de pierre des façades de Brou, les cordages sont parfois brisés, mais leur forme en huit est toujours évident ; et le gland du cordon est parfois présent.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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Ici, le nœud est plus complexe.
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Fermaillet d'une verrière de la nef.
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II. LE MOTTO FERT.
On le trouve sous la statue de saint Philibert du trumeau du portail ouest.
Au tympan de ce portail, le couple ducal est agenouillé devant le Christ aux liens. Philibert le Beau est présenté par son patron, saint Philibert figuré avec une tonsure sous la capuche de son habit monastique. Le duc, mains jointes, porte la couronne ducal, le manteau et le camail frappé d'hermines.
Entre les lettres accouplées, son blason (aujourd'hui muet) est entouré des lettres FERT entre lesquelles passe un ruban plat à glands.
En dessous figure un nœud de Savoie, sans ambigïté puisqu'il rejoint une croix pommelée, la croix de Savoie telle qu'elle figure sur les jetons du duché en 1579.
"Le nœud de Savoie figure – associé au mot FERT – figurait sur le collier de l’ordre chevaleresque du Collier, un ordre fondé par Amédée VI, en 1364, à l’occasion de la prestation de serment de croisade générale contre les Turcs. Sur le collier de l’ordre qui est sculpté sur le gisant de Philibert le Beau à Brou –, les nœuds de Savoie alternent avec le mot FERT mais ils ne forment pas une cordelière à proprement parler; quant au pendentif du collier, il est formé de trois lacs d’amour, allusion à la Trinité, trois lacs d’amour dont la présence est déjà attestée dans les formes primitives du collier. Quant à la signification du mot FERT, dont l’apparition est liée à l’institution de l’ordre du Collier, elle demeure problématique. Pour Michel Pastoureau, ce mot pourrait évoquer le présent de l’indicatif du verbe latin ferre, à la troisième personne. Ainsi devrait-il se comprendre par rapport à l’ordre du Collier, chacun des quinze chevaliers portant (FERT) le collier de l’ordre." (Laure Fragnart)
Sur la médaille en or créée par Jean Marende pour l'entrée de Marguerite d'Autriche en 1502 dans la ville de Bourg-en-Bresse ou sur sa copie en bronze argenté du XIXe conservée au MBA de Lyon, les profils du couple en buste derrière un plessis (nouage symbolique ?) se détache sur un fond de lacs d'amour et de fleurs de lys, mais aussi des marguerites. L'envers montre les marguerites autour du blason mi-parti, et le nœud de Savoie au dessus. Le mot FERT est inscrit horizontalement de part et d'autre.
Sur un autre exemplaire du même musée , la devise FERT est absente, et ce sont les nœuds de Savoie et des hermines qui sont devant les profils du couple.
Ces devises, nœud et mot FERT , figurent également sur son tombeau, placé au centre du chœur (sur le collier, les armes et les ornements du gisant supérieur, ainsi que sur les socles des statuettes des sibylles) et, pour les nœuds, au revers du jubé regardant vers ce même tombeau.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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III. LA PALME ET LES MARGUERITES.
Selon Françoise Blattes-Vial, "la palme peut avoir de multiples sens : par exemple, le martyre de la sainte patronne de la fondatrice ou l’amour conjugal . [...] La palme fichée dans le plant de marguerites est riche d’ambiguïtés qui pourraient s’additionner plus que s’exclure : sainte patronne, mariage et signe de victoire associé ou associés à la paix de l’olivier,[ comme sur les panneaux héraldiques de la chapelle Sainte-Apolline]."
Je pensai à un lien plus étroit entre la palme (ou bien est-ce une plume?) et le prénom Philibert, ou le saint patron, mais je n'ai pu valider cette hypothèse. Voyons donc ici la palme du martyre de sainte Marguerite.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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IV. LA CROIX DE SAVOIE ET LE BRIQUET (ou FUSIL) DE BOURGOGNE
Le briquet de Bourgogne et la croix de Bourgogne, croix en X de saint André en bois écoté, sont deux éléments qui font référence à la filiation bourguignonne de Marguerite d’Autriche, arrière-petite-fille de Philippe le Bon, duc de Bourgogne.
Le briquet
Cet emblème choisi par Philippe le Bon (début 15e siècle) a été longtemps la marque des Ducs de Bourgogne dans toutes leurs possessions. Fabriqué en fer forgé, le briquet médiéval servait à allumer le feu en le percutant contre une pierre de silex dans le but de produire des étincelles. On le tenait par une poignée en forme de B majuscule, qui évoque l’initiale du mot Bourgogne. Les anneaux du collier de l’ordre de la Toison d’or, ordre de chevalerie fondé en 1430 par Philippe le Bon, se composent également de deux B accolés dos à dos.
La croix de Bourgogne
On appelle croix de Bourgogne une croix de saint André rouge dont les branches sont écotées sur fond blanc. Cet emblème se blasonne ainsi : « d'argent au sautoir écoté de gueules ».
C’est sous la protection de saint André, réputé pour avoir évangélisé les Burgondes, ancêtres des bourguignons, que Philippe Le Bon a placé la Bourgogne. L’attribut principal de saint André est une croix en X sur laquelle il fut martyrisé.
Des nœuds entrelaçant la croix de Bourgogne formées de bâtons noueux, comme pour signifier l'union des Maisons de Bourgogne et de Savoie, figurent aussi sur les verrières aux armes de Marguerite placées dans la chapelle Sainte-Apolline.
Les Pays-Bas et la Franche-Comté constituent l’héritage bourguignon des Habsbourg depuis le traité de Senlis (1493), et ne seront séparés politiquement qu’au traité de Nimègue (1678), date à laquelle le comté de Bourgogne est définitivement intégré au royaume de France.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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Sur un fermaillet des vitraux de la nef
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V. LES BLASONS DE MARGUERITE
On les trouve sur les portails mais aussi tout atour des façades nord et ouest. Ils ont perdu leurs armoiries, qui y étaient peintes, mais leur forme losangique, celle des femmes, permet de les imaginer. Ils sont présentés par des anges, des putti, des personnages fantastiques.
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LES ARMOIRIES EXPLICITES PAR LES PANNEAUX DU MUSÈE.
Les armoiries de Marguerite se blasonnent ainsi :
parti, à dextre, de gueules à la croix d’argent (Savoie) ;
à senestre, écartelé, au 1, de gueules à la fasce d’argent (Autriche) ; au 2, d’azur, semé de feurs de lys d’or, à la bordure componée d’argent et de gueules (Touraine ou Bourgogne moderne) ; au 3, bandé d’or et d’azur, à la bordure de gueules (Bourgogne ancien) ; au 4, de sable au lion d’or, armé et lampassé de gueules (Brabant) ; sur le tout de l’écartelé, d’or au lion de sable, armé et lampassé de gueules (Flandre)
Du côté dextre ( à notre gauche), les armes de son mari :
Du côté sénestre, les armes en écartelé de son héritage familial :
Son père Maximilien 1er de Habsbourg :
Le reste de l'écartelé lui vient de sa mère Marie de Bourgogne
...Fille de Charles le Téméraire et d'Isabelle de Bourbon
DEUXIÈME PARTIE : À L'INTÉRIEUR DU MONASTÈRE.
DANS LA NEF : LES FONTS BAPTISMAUX.
Ces fonts en marbre noir du XVIe siècle (1546 ou 1548) associent par scellement une vasque hexagonale et un pietement.
Le piètement est orné de feuillages et repose sur quatre masques en forme de tête de dauphins. La cuve est également ornée de larges feuilles aux indentations évoquant des feuilles de figuier, deux masques animaux et deux têtes opposées : celle d'un angelot, et une tête de mort.
Le rebord hexagonal porte une inscription en hautes lettres romaines.
1. Venant de Philibert le Beau, la devise FERT et la cordelière de Savoie, à glands.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
2. Venant de Marguerite d'Autriche, la devise FORTVNE * INFORTVNE * FORT * VNE
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Il convient bien de lire FORTVNE INFORTVNE FORT VNE, "la fortune [en] infortune beaucoup une". Les mots sont séparas par des fleurons (que j'ai remplacés par une étoile). Mais ces fleurons sont discrets pour ne pas troubler l'apparente et ludique symétrie de la devise nous faisant lire d'abord Fortune infortune fortune.
Nous avons conservé l'adjectif infortuné, mais non le verbe "infortuner" attesté en moyen français (Godefroy) par exemple chez Clément Marot en 1517 : Rien cognoissant que despite Fortune/ Et non pas toy, à présent m'infortune".
Oui, Fortune, la déesse Fortuna qui tourne la roue du destin et des vers et revers de l'existence, a réservé à la jeune Marguerite beaucoup d'infortunes, puisqu'elle perdit sa mère, Marie de Bourgogne d'une chute de cheval, alors qu'elle était enfant. Elle a d'abord été fiancée en 1483 au dauphin Charles, fils de Louis XI. Elle avait alors ... 3 ans. Elle est répudiée en 1491 lorsque Charles lui préfère, pour des raisons d'alliance politique, Anne de Bretagne.
"En 1493, Marguerite est donc de retour en Flandre, dans son pays qu’elle ne connaît pas. À peine a-t-elle le temps de s’accoutumer à la langue et aux mœurs de son peuple que son père organise pour elle un nouveau mariage lui donnant l’espoir de monter sur le trône espagnol. Elle sera la femme de Don Juan, prince des Asturies, fils des Rois catholiques, Isabelle et Ferdinand.
Cependant, le voyage vers la péninsule Ibérique ne va pas être de tout repos. Ne pouvant traverser le royaume de France, avec lequel les relations sont plus que fraîches, Marguerite embarque à Flessingue, à l’embouchure de l’Escaut, et traverse le golfe de Gascogne. Par une nuit de mars, son navire essuie une telle tempête que, le soleil étant revenu, elle propose un divertissement aux dames de sa suite : chacune doit rédiger l’épitaphe qui lui aurait convenu en cas de naufrage ! La sienne est parlante : « Ci-gît Margot, la gente demoiselle / Qu’eut deux maris et si mourut pucelle. »
L’arrivée en Espagne, à La Corogne, est triomphale et le mariage, d’une pompe extraordinaire. Mais Don Juan est déjà gravement atteint aux poumons et les jeux de l’amour vont précipiter sa fin. Six mois après cette deuxième union, Marguerite est veuve à l’âge de 17 ans.
Pourtant, un espoir subsiste car elle est enceinte.
Pour son malheur, la petite fille à laquelle elle va donner naissance ne survivra que quelques jours. Elle a tout perdu : son mari, son enfant et sa place à la cour d’Espagne.
Drapée de noir et de tristesse, Marguerite regagne les paysages brumeux de la Flandre tandis que son père et son frère la remettent déjà sur le marché des princesses à marier. Il s’agit pour eux de trouver un prétendant qui servira leurs ambitions diplomatiques. L’oiseau rare s’appelle Philibert II de Savoie. Ce choix recueille l’assentiment des souverains espagnols, du roi de France, de l’empereur d’Autriche et des cantons suisses : une prouesse !
Mais Marguerite acceptera-t-elle de sortir de sa retraite pour nouer un nouvel hymen ? Dans son château du Quesnoy, elle écrit des vers mélancoliques : « Le temps m’est long et sait bien le pourquoi, / Car un jour m’est plus long qu’une semaine / Dont je prie Dieu que mon coeur tôt ramène / Où est mon coeur qui n’est plus avec moi. »
C’est son frère, Philippe le Beau, qui propose à Marguerite ce nouveau parti. Au préalable, il a pris soin d’envoyer à Philibert un médaillon représentant sa soeur sous son meilleur jour. Le duc est enthousiaste : l’alliance est prestigieuse et la jeune fille, ravissante. Après avoir hésité, la princesse accepte d’épouser celui qui fut son compagnon de jeu pendant son enfance à la cour de France. Pourquoi risquer de devoir accepter un époux dont elle ignorerait tout alors qu’elle n’a gardé de celui-ci que de bons souvenirs ? Et puis, sa réputation précède le duc, qui a le même âge que Marguerite : beau, excellent cavalier, fort et amoureux de la vie, il a tout pour séduire une femme. La voici donc de nouveau partie, vers les Alpes cette fois. Un premier mariage par procuration est organisé à Dole avec René, le demi-frère bâtard de Philibert, selon le rite germanique : tandis que Marguerite est allongée sur un lit public, « le Grand Bâtard de Savoie » se couche à côté d’elle, une jambe dévêtue. Un homme étant entré dans le lit de la princesse, elle est considérée comme mariée. La rencontre avec Philibert et le serment religieux ont lieu cinq jours plus tard, dans le petit monastère bénédictin de Romainmôtier. Contre toute attente, le troisième mariage de Marguerite sera des plus heureux. Trop, peut-être, pour celle qui va à nouveau perdre son époux en septembre 1504, après trois ans d’union : Philibert, qui vient d’achever une partie de chasse sous un soleil de plomb, s’abreuve à une fontaine glacée et meurt de pleurésie. Cette fois, Marguerite sera inconsolable et refusera de quitter le noir. " (Historia)Après la mort de son frère Philippe le Beau le 25 septembre 1506, Marguerite devint gouverneur des Pays-Bas bourguignons de 1507 à 1515 et de 1517 à 1530 et prit en charge l'éducation des enfants de Philippe à la cour de Malines.
Jean Lemaire de Belges, futur historiographe de la cour de Marguerite, composa la Couronne Margaritique autrement le triomphe d'honneur à l'occasion de la mort de Philibert de Savoie .
Avec la figure allégorique d' Infortune , Lemaire introduit le côté négatif personnifié du destin, Fortuna adversa , dans sa description. L'Infortune voit dans le meurtre de Philibert sa dernière chance de briser la vertu de Marguerite, qu'il déteste. Le complot du couple et le meurtre de Philibert sont illustrés dans les miniatures.
Philibert victime d'une chute de cheval et soutenu par des chasseurs, sous le regard d'Infortune et de son la Mort, à droite.
Jean Lemaire de Belges, La Couronne de Marguerite, mais le Triomphe de l'Honneur, 1504. – Bibliothèque nationale d'Autriche, Cod. 3441, fol. 4v (détail)
À gauche, Infortune vise offre à boire une eau glacée et fatale à Philibert, tandis que son acolyte, la Mort e vise de sa flèche . À droite, Philibert meurt, assisté de ses amis et de son médecin, en manteau rouge et bonnet carré qui porte l'urinal ou matula insigne de son titre.
Jean Lemaire de Belges, La Couronne de Marguerite, mais le Triomphe de l'Honneur, 1504. – Bibliothèque nationale d'Autriche, Cod. 3441, fol. 14v, détail
Marguerite, entourée de ses suivantes, pleure la mort de son mari, causée par Infortune.
Jean Lemaire de Belges, La Couronne de Marguerite, mais le Triomphe de l'Honneur, 1504. – Bibliothèque nationale d'Autriche, Cod. 3441, fol. 14v (détail)
La veillée funèbre de Philibert II, duc de Savoie en présence de Marguerite.
Jean Lemaire de Belges, La Couronne de Marguerite, mais le Triomphe de l'Honneur, 1504. – Bibliothèque nationale d'Autriche, Cod. 3441, fol. 21 (détail)
Cependant, dans son manuscrit, Lemaire soutient que le pouvoir du destin n'est pas illimité en montrant comment Marguerite défait l'allégorie de l'Infortune avec l'aide de la figure allégorique de Vertu et de ses deux filles, Prudence et Force .
Jean Lemaire de Belges, La Couronne de Marguerite, mais le Triomphe de l'Honneur, 1504. – Bibliothèque nationale d'Autriche, Cod. 3441, fol. 27 (détail)
Marguerite parvient ainsi à vaincre définitivement l'Infortune grâce à sa vertu. Cette idée était déjà citée par les stoïciens. En récompense de sa force, Vertu couronne sa protégée de la couronne de vertu dans la deuxième partie du manuscrit. Lemaire présente Vertu et l'Infortune comme des adversaires sur le plan allégorique. Il semble subordonner la Fortune, ou en l'occurrence l'Infortune, à la providence divine.
Dans Le Changement de Fortune en toute prospérité, écrit entre 1504 et 1507 par Michele Riccio, le thème de l'inconstance du destin est également abordé : la devise Fortune Infortune Fort Une est inscrite aux quatre coins de la page de titre et l'ouvrage semble être une dissertation à son sujet . Mais Fortuna n'apparaît pas comme un personnage actif dans le dialogue ; à la place, Riccio crée un dialogue fictif entre l' Acteur , qui peut probablement être vu ici comme un homologue littéraire de l'auteur, et un Chevalier . Tous deux philosophent sur le pouvoir de Fortuna et sur les coups du sort de Marguerite. Ici, la déesse du destin est présentée comme une femme, étant désignée dans le texte par le pronom elle ou par la désignation dame Fortune. Riccio blâme Fortuna pour les malheurs du peuple et surtout pour les malheurs subis par Marguerite, y compris la perte de la couronne de France.
Fortuna y est représentée sous la forme de Kairos (l'opportunité), aux talons ailés, chevelue par devant, mais chauve par derrière, telle qu'on ne peut la saisir lorsqu'elle est passée. En équilibre sur la roue de la chance, du hasard ou de la Vie qui tourne, elle tient deux fils d'or.
Michele Riccio, Changement de fortune en toute prospérité, entre 1507 et 1509 – Bibliothèque nationale autrichienne ; Cod. 2625, fol. 2v, détail
Michele Riccio, Changement de fortune en toute prospérité, entre 1507 et 1509 – Bibliothèque nationale autrichienne ; Cod. 2625, fol. 2v, détail
Les deux fils d'or sont noués à la couronne de la duchesse, sur la page de droite.
Mais Fortesse et Prudence sont les alliées de Marguerite.
Michele Riccio, Changement de fortune en toute prospérité, entre 1507 et 1509 – Bibliothèque nationale autrichienne ; Cod. 2625, fol. 10v, détail
Michele Riccio, Changement de fortune en toute prospérité, entre 1507 et 1509 – Bibliothèque nationale autrichienne ; Cod. 2625, fol. 11v, détail
La devise est partout dans le Monastère de Brou. Comment la comprendre?
Dès la construction, l’état des travaux daté de 1527 décrit « les clez principalles » du chœur « avec les armes et blason de Madicte dame, contenant ces motz : FORTUNE INFORTUNE FORT UNE »
"Le mot accompagne souvent les armoiries de Marguerite d’Autriche, tant à Brou que sur plusieurs manuscrits et objets d’art, et apparaît en plusieurs lieux de l’église. Outre les écus losangés de l’abside, les lettres formant cette devise sont également sculptées sur la corniche couronnant les murs de l’abside sous les vitraux, au sommet du baldaquin du tombeau de l’archiduchesse, sur les consoles supportant les statues des apôtres Philippe et André dans les angles de sa chapelle, sur la corniche du lutrin monumental daté de 1532. La sentence est également peinte dans sa chapelle, sur un phylactère accompagnant le chifre ducal sur la clef de voûte centrale et autour de ses armes sur la verrière de l’Assomption. On la retrouve sur le vitrail oriental de la chapelle du Prince. On a beaucoup spéculé sur ce mot . Certains y ont lu, à tort, « Fortune, infortune, fortune » en voyant dans cette devise l’alternance de la bonne et la mauvaise fortune de Marguerite, tandis que Dagmar Eichberger en a proposé la traduction « Luck, misfortune makes one strong ». J’en conserverai la traduction la plus simple : « le destin accable beaucoup une [femme] ». Cette signification est en effet la seule attestée au XVIe siècle. Dans une apologie latine de la princesse publiée en 1532 et dédiée à son chevalier d’honneur, fidèle ami et exécuteur testamentaire Antoine de Lalaing, Cornelius Grapheus (Cornelis De Schrijver), magistrat malinois proche de la princesse puis secrétaire de la ville d’Anvers, mais aussi poète et musicien, traduit la devise par ce vers latin : « Fortis fortuna infortunat fortiter unam ». Or, cette traduction n’est pas une invention du poète de cour : elle a été ajoutée, de la propre main de la princesse semble-t-il, sur le premier feuillet du manuscrit de la Complainte de Marguerite, poème qui lui a été ofert vers 1507 par Antoine de Lalaing et qui relate sa vie et ses deuils. Au bas du folio, figure en guise d’ex-libris, sa devise en français, FORTUNE INFORTUNE FORT UNE, et en latin, Fortis fortuna infortunat fortiter unam. À la fn du XVIIe siècle, le Père Raphaël adopte une traduction proche : Fortuna infortunat valde unam, id est personam . Le verbe infortuner n’est qu’un démarquage du latin tardif et rare infortunare, passé en ancien italien avec le sens de blesser, au propre comme au figuré. Un autre poème de Jean Lemaire écrit à l’occasion de la mort de Philippe le Beau en 1506, en caractérisant Marguerite comme la « dame infortunée » et en concluant le poème par le mot de l’archiduchesse, confrme cette lecture en l’associant au deuil de son frère. Marguerite elle-même, pleurant la mort de son père dans la Complainte sur le trépas de l’empereur Maximilien, se dépeint ainsi : "Car onque à dame qui fut sur la terre Les infortunes firent tant de guerre Que font à moy triste et infortunée, Trop forte a moy ma dure destinée". C’est encore le sens que donne à la devise Corneille Agrippa, devenu archiviste et historiographe de la princesse à la fn de sa vie, dans son oraison funèbre de Marguerite, rédigée en latin. Il cite la devise en français et l’associe à la mort de Philippe le Beau : "Ainsi elle supporta avec constance et modération tous ces malheurs et ces calamités domestiques, le décès de son époux et la mort de son frère, maîtrisant et refoulant la sévérité, la douleur et la rudesse de son destin (« violentiam fortunae ») par sa grandeur d’âme, en triomphant même et se contentant de témoigner à la postérité de son sort par le mot emprunté à la langue française (« Gallico verbo ») : Fortune infortune fort une". Un rondeau de Julien Fossetier dédié à l’archiduchesse – dont il « ne fut pas l’indiciaire officiel mais l’historiographe officieux et dévoué » – développe l’idée que l’infortune révèle sa vertu et assure même son salut : Vertu en infortune apere. Qui fort soefre, il vainct infortune. Fortune infortune fort une. Mais en tous assaulx [var. : efors] de fortune Fortitude en celle prospere. Que la vertu permette de triompher de l’infortune et des caprices du destin est également illustré par une médaille à l’effigie de Marguerite (Vienne, Kunsthistorisches Museum, Münzkabinett), qui la commanda vers 1505, et dont le revers porte la légende : VICTRIX FORTVNAE FORTISSIMA VIRTVS. La composition montre une Vertu debout, probablement la Force car elle appuie son bras sur une colonne, qui élève une couronne de la main droite. À ses pieds se voit la Fortune, renversée, tenant une couronne dans chaque main. Pour Camille Picqué, « la femme renversée, c’est la mauvaise fortune de la princesse ; les couronnes qu’elle tient sont celles de France et d’Espagne », tandis que « la troisième couronne est celle que lui offre, en 1501, Philibert de Savoie ». On ignore si Marguerite adopta ce mot dès la mort de son époux, en septembre 1504, ou bien après le décès de son frère, deux ans plus tard. Françoise Blattes-Vial observe qu’il n’est attesté qu’à l’automne 1506 et orne la page de titre du Changement de Fortune en toute prospérité de Michele Riccio, dans lequel « le juriste napolitain décline la devise que Marguerite venait d’adopter pour rédiger l’ouvrage qu’il lui destine ». On n’en connaît pas davantage l’auteur, mais peut-être a-t-il été composé par Marguerite elle-même ou par son secrétaire et historiographe Jean Lemaire de Belges. Son rédacteur pourrait s’être inspiré du curieux texte d’un autre poète de cour français, André de la Vigne, qui publie à Paris, dès 1501, Les Complaintes et Épitaphes du Roy de la Bazoche, dont le vers 30 du prologue, rédigé dans un sabir incompréhensible farci de mots latinisants, livre une formule analogue : « Rogue Fortune, [ex]orundant fort une » . L’emploi du mot FORTUNE INFORTUNE FORT UNE comme évocation des épreuves et deuils successifs que Marguerite avait traversés apparaît donc comme la seule signifcation attestée par elle-même et ses contemporains. Les autres interprétations résultent des spéculations postérieures. Pourtant, plus encore que les armoiries ou la devise au sens moderne du terme, ce qui frappe à Brou, c’est la prolifération d’emblèmes qui peuvent se répartir en trois catégories : une devise personnelle, un chiffre conjugal et une devise dynastique à laquelle s’ajoute un emblème d’alliance." (Pierre Gilles Girault 2022)
Mais on ne peut lire cette devise que comme un éloge de la détermination de Marguerite d'Autriche a surmonter ces revers de sort grâce à ses vertus, la Force, la Prudence et l'art de saisir sa chance lorsqu'elle se présente (kairos). Elle avait fait réaliser en 1505 une médaille ((Vienne, Kunsthistorisches Museum, Münzkabinett) ) représentant Fortune avec la légende VICTRIX FORTVNAE FORTISSIMA VIRTVS. La Vertu, Virtus, s'oppose au Destin et en triomphe.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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POURSUIVONS LA VISITE
Les présentations étant faites, je ne décrirai pas chaque motif.
Dans les vitraux de la nef.
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Dans la chapelle du Prince, fenêtre ouest, le blason est timbré du bonnet archiducal en forme de couronne :
chapelle du Prince, fenêtre ouest
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Dans le vitrail de la chapelle de Marguerite, baie 5 de l'Assomption et du Couronnement de la Vierge.
Le duc porte sur son armure un tabard à ses armes de gueules à la croix d'argent. Il porte le collier d'or gravé de son motto FERT et de la cordelière en 8. On distinguera mieux ensuite le motif du médaillon: l'Annonciation.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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Les blasons de Philibert le Beau et de Marguerite d'Autriche.
Armes du duc de Savoie timbré d'un heaume entouré de lambrequins et sommé d'un cimier à tête de lion ailé.
Armes de Marguerite d'Autriche sous sa couronne , au dessus de sa devise FORTVNE INFORTVUNE FORT VNE.
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Sur la baie 1 du chœur, lancette inférieure : Philibert le Beau agenouillé en donateur.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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Sur la baie 0, lancette inférieure, Apparition du Christ ressuscité à la Vierge.
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Sur la baie 2, lancette inférieure, Marguerite d'Autriche en donatrice présentée par sainte Marguerite.
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DANS LE CHŒUR
Toute l'emblématique est rassemblée dans le chœur sous et autour des vitraux :
-le blason en losange entouré de la ceinture au dessus du phylactère portant la devise FORTVNE INFORTVNE FORT VNE
-La devise en lettres capitales découpèes dans la pierre de la console
et dans le remplage des baies :
-la croix écotée en X et le briquet de Bourgogne,
-la palme et les marguerites.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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SUR LE TOMBEAU DE MARGUERITE D'AUTRICHE, SUR LE JUBÉ , SUR LE RETABLE DES SEPT JOIES DE LA VIERGE DE LA CHAPELLE DE L'ASSOMPTION.
Il m'est impossible de détailler la description de ces monuments, mais tous les éléments héraldiques et emblématiques s'y retrouvent. Je me contente de quelques photos.
1. Le jubé.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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2. Le tombeau à deux étages de Marguerite.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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On notera le manteau constellé de larmes, comme sur les draps funéraires.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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3. Sur le tombeau de Philibert, le collier avec le motto FERT et les noeuds en 8.
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
4. Le retable des Sept joies de la Vierge (sculpteurs bruxellois, avant 1522).
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
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DANS LE MUSÉE DU MONASTÈRE
Monastère royal de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
SOURCES ET LIENS
—Collectif d'auteurs: 2015, Princesses et Renaissance(s), La commande artistique de Marguerite d'Autriche et de son entourage, Colloque organisé par Laurence Ciavaldini Rivière, professeur, université Grenoble-Alpes et Magali Briat-Philippe, conservateur, responsable du service des patrimoines, monastère royal de Brou, Bourg-en-Bresse
—BARON (Françoise), 2004. Quelques dessins de la collection Hippolyte Destailleur à la Bibliothèque nationale de France. In: Bulletin dela Société Nationale des Antiquaires de France, 2004-2005, 2011. pp. 373-380;
— BLATTES-VIAL (Françoise), 2015, Le manuscrit de la Couronne margaritique de Jean Lemaire de Belges offert par Marguerite d’Autriche à Philippe le Beau en 1505 La rhétorique et l’image au service d’une princesse assimilée à la paix
—FAGNART ( Laure) 2015, "Les entrelacs : nœuds de savoie et cordelière de Louise de Savoie" in Colloque Princesses Et Renaissance, La commande artistique de Marguerite d’Autriche et de son entourage, Colloque scientifique international 27 et 28 février 2015, monastère royal de Brou, Bourg-en-Bresse
— FRIES (Aline) 2018, Sur l'idée de Fortuna dans l'environnement de Marguerite d'Autriche, mémoire de recherche de master université de Trèves
https://cusanus.hypotheses.org/1055
— GIRAULT (Pierre-Gilles) 2022 "L’emblématique de Marguerite d’Autriche au monastère royal de Brou : images de soi, affirmation dynastique et revendication politique à l’aube de la Renaissance" , in Devises, lettres, chiffres et couleurs : un code emblématique 1350-1550, par Miguel Metelo de Seixas, Matteo Ferrari, Christian de Mérindol, Lea Debernardi, Johnatan Saso, et Catarina Fernandes Barreira.
—HABLOT (Laurent), FERRARI (Matteo), METEO DE SAIXAS (Miguel ), sous la direction de, 2022 Devises, lettres, chiffres et couleurs : un code emblématique 1350-1550, Colloque Lisbonne
— MÉRINDOL (Christian de), 1994, "Le décor emblématique et les vitraux armoriés du couvent de Saint-Nicolas-de-Tolentin à Brou" In: Revue française d'héraldique et de sigillographie vol. 64 (1994) p. 149-180
— MÉRINDOL (Christian de),1993, « Le couvent de Saint-Nicolas de Tolentino à Brou. Réfexions sur les églises et les chapelles à destination funéraire à la fn du Moyen Âge », Bulletin de la société nationale des Antiquaires de France, 1993, p. 140-152 ;
— ROUSSELET (révérend père Pacifique), 1767, Histoire et description de l'église royale de Brou, 1767
Le visiteur du Monastère royal de Brou, créé après le décès de son mari Philibert le Beau en 1504 par Marguerite d'Autriche, duchesse de Savoie et régente des Pays-Bas, parvient, après avoir découvert l'église Saint-Nicolas, aux bâtiments monastiques aménagés en musée. Là, il peut arpenter le couloir de l'ancien dortoir, donnant accès aux spatieuses cellules individuelles des chanoines de l'Ordre augustinien.
Là, au milieu de ce couloir, sur le palier donnant accès aux cloitres, il découvre une lanterne, celle qui, allumée toute la nuit, éclairait jadis les religieux se rendant aux offices.
C'est une lanterne de pierre faisant saillie sur l'angle du mur, composée d'un culot circulaire et d'un dais, réunis par un vitrage à trois pans en verre antique losangé monté au plomb, autour d'un médaillon octogonal ancien, un vitrail du XVIe siècle représentant le Mariage de la Vierge. Cet aménagement est récent, remplaçant le fenestrage à châssis ouvrant permettant d'allumer, d'éteindre et de remplacer le bougeoir.
Le vitrail ancien placé en réemploi est admirable, la lanterne dans son ensemble possède une forme et des dimensions parfaitement intégrés à l'architecture du couvent, et l'objet réussit parfaitement à plonger le touriste dans l'ambiance monacale et à le laisser évoquer les chanoines quittant leur chambre dans la nuit pour chanter matines, guidés par la clarté vacillante mais vigilante de cette veilleuse .
Note : cet objet n'est accompagné d' aucun cartel : dommage...
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Le vitrail du XVIe siècle, peinture en grisaille (sanguine) et jaune d'argent sur verre blanc. Joseph s'appuie sur une canne, pour signaler sa vieillesse. Marie a les cheveux longs et dénoués, retenus au front par un diadème. Elle relève le pan gauche de son manteau. Sa robe longue est serrée à la taille par un simple cordon noué.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
La beauté de l'objet incite à en détailler les sculptures. Le registre inférieur du dais porte le monogramme christique IHS (notez le H modulé par un tilde), puis le monogramme marial MARIA, puis, après trois fleurs, la date de 1536. C'est la date de la création du dortoir. Les cloîtres seront terminés plus tard encore, en 1539.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
L'inscription centrale, que j'ai présenté comme un monogramme marial, montre les deux lettres M et A réunies par les boucles d'une corde, exactement comme les lacs d'amour qui réunissent, sur le porche et à l'intérieur de l'église, les lettres P et M de Philibert de Savoie et de Marguerite d'Autriche. Comment faut-il comprendre cet emblème-ci ?
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
C'est sur la partie inférieure, en tronc de cône, du culot que l'on lit l'inscription SILENTIVM, en lettres ornées (fût perlé et empattements bifides à enroulement). La lettre finale M est remplacée par le sigle abréviatif en forme de z ou de 3, comme c'est l'usage dans les manuscrits de l'époque.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
DISCUSSION
1°) La présence des lanternes de dortoirs monastiques (que ce soit avec cellules individuelles ou dortoirs communs) est attestée ailleurs, mais fort rarement, sans doute par oubli de signalement.
L' abbaye de Sénanque : https://www.senanque.fr/ancien-dortoir/
"Le dortoir, édifié vers 1200, occupe l’étage de l’abbaye sur plus de 30 mètres de long.
Douze baies en plein cintre éclairent l’ensemble, tandis qu’une rose à douze lobes, semblable à celle de la façade méridionale de l’abbatiale a été percée dans le pignon Ouest.
Deux escaliers desservent le dortoir. L’escalier des matines permettait à nos anciens de se rendre à l’église pour Vigiles, soit entre 2 et 3h du matin selon les saisons : « Au signal donné les moines se lèvent sans retard et s’empressent de se rendre à l’œuvre de Dieu » nous rappelle le chapitre 16 de la Règle. Une niche est ménagée dans le mur à côté de l’escalier : elle accueille la lampe qui brûle toute la nuit, fidèle à la préconisation du chapitre .
Le second escalier permet de remonter du cloître vers le dortoir pour la nuit, après Complies, soit entre 20h et 21h selon les saisons.
La règle de Saint Benoît indique que tous les moines, y compris l’abbé, doivent dormir ensemble dans un lieu unique. Le silence y est absolu."
2°) L'inscription soulignant la règle d'observation du silence, SILENTIUM (latin silere "se taire") me rappelle le personnage qui, un doigt sur la bouche, accompagnait l'inscription SILENZIO sur une fresque du cloître du couvent de Santa Chiara de Naples.
Fresque de la Conversion de Paul au couvent de Santa-Chiara à Naples. Photographie lavieb-aile 2024.
—Une description de l'abbaye de Saint-Denis, au XVIIIe , indique que "dans le courant du mois d’août année susdite, fut posée une figure en pierre ou en plâtre dans le parterre ou espèce de gazon faisant face au potager derrière le réfectoire de l’abbaye. Cette figure représentoit le Silence, ayant, pour le désigner, un doigt sur la bouche : elle étoit debout sur un piédestal." https://books.openedition.org/editionsmsh/42563?lang=fr
—Dans la salle du lavabo (près du réfectoire) du couvent de San Marco de Florence, Fra Angelico a peint en fresque vers 1442 un dominicain, Pierre de Vérone (ou Pierre le martyr) imposant le silence aux moines.
—André Alciat consacre, en ... 1536, un de ses emblèmes au silence sous le titre SILENTIUM avec une vignette représentant un moine devant le lutrin de sa cellule, l'index sur la bouche. (Notez la référence à Hapocrate, le dieu latin ayant le doigt sur les lèvres).
In silentium, Livret des Emblemes, de maistre Andre Alciat, mis en rime françoys folio 20, Paris, Wechel, 1536 , Paris, Bibliothèque nationale de France, Réserve RES P-Z-14, numérisation Gallica
Si ces exemples d'inscription ou de figures du Silence en bâtiment monastique sont difficiles à retrouver en ligne, l'importance de l'observation du silence, précisément sous le terme de Silentium, en milieu monastique, est fréquemment rappellée par les auteurs, et notamment par Vincent Debiais.
Voir la revue iconographique :
—Francisco Prado-Vilar, 2013, Silentium: Cosmic Silence as an Image in the Middle Ages and Modernity / Silentium: El silencio cósmico como imagen en la Edad Media y la Modernidad Revista de poética medieval
"Les préceptes du haut Moyen Âge sur la conduite monastique ont toujours encouragé le silence. Les règles applicables aux communautés cloîtrées interdisaient spécifiquement de parler dans l’église, le réfectoire et le dortoir. Enfin, il a toujours été expressément interdit de parler la nuit. La règle du Maître du Ve siècle décourageait ses lecteurs de parler une fois qu’ils avaient terminé les complies, le dernier office de la journée. Ils devaient garder un silence si profond pendant toute la nuit que personne ne devait croire que des moines se trouvaient dans l’abbaye. Un ensemble de signes codifiés en usage à Cluny permettait dles échanges
La règle de Benoît du VIe siècle consacre un chapitre entier aux bienfaits moraux de cette vertu (chapitre 6 : De taciturnitate), en commençant par des versets du livre des Psaumes qui associent le silence et l’humilité :
« J’ai placé une sentinelle sur ma bouche. J’ai été muet, j’ai été humilié et j’ai gardé le silence sur les bonnes choses » (Ps 38, 2-3).
Le silence était également l’expression de l’obéissance, une vertu étroitement liée à l’humilité. Les moines devaient demander l’autorisation de parler à un supérieur avec la plus grande humilité et une soumission respectueuse."
"Deux siècles plus tard, la discipline du silence a acquis de nouvelles significations dans les dépendances bondées des abbayes carolingiennes. La règle de Benoît consacrait une attention considérable aux moyens d’éviter les paroles pécheresses, mais l’ambiguïté de certains de ses passages laissait les commentateurs carolingiens perplexes. La tendance de l’auteur à qualifier le mot « silence » (silentium) par des adjectifs tels que « maximal » (summum) et « total » (omne) était particulièrement gênante. Lorsqu’il est renforcé par un adjectif superlatif ou totalisant, le mot silentium a le poids d’un silence absolu. Ce sens est toutefois spécifique au contexte. Il ne s’applique qu’au réfectoire, à l’oratoire à la fin de la liturgie et pendant le temps réservé à la lecture. Dans tous les autres cas, le mot silentium ne signifiait pas une interdiction stricte des paroles. La règle de Benoît a ainsi toujours encouragé la culture du silence, en particulier la nuit, mais ce précepte signifiait que les moines pouvaient converser avec discrétion, mais seulement à voix basse (sub silentio), c’est-à-dire en chuchotant. Dans la pensée monastique carolingienne, l’objectif de la discipline du silence n’était pas la cessation complète des bruits humains, mais la promotion d’un ton feutré et révérencieux parmi les frères, qui imprégnait tous les aspects de leur vie cloîtrée."
"Le terme latin utilisé le plus fréquemment dans ces textes est silere (silentium) qui désigne moins l’absence de parole (tacere) que la tranquillité (quies), l’absence de mouvement et de bruit. On rappelle alors un constat de la nature que faisait déjà la philosophie classique : la seule expérience du silence par les sens est celle d’une quiétude, non d’une absence totale de son, quant à elle impossible et relevant d’une construction intellectuelle qui vise à démontrer une capacité à s’extraire de l’agitation du monde. Aussi, dans la théologie chrétienne, l’idée du silence existe non parce que le monde peut être un lieu de silence (il ne le peut pas), mais parce que l’homme a besoin de construire la représentation d’un espace fictionnel dans lequel ce que l’on sait peut être tu, nié, ou inversé."
"La Règle cistercienne cherche davantage à contrôler les aspects négatifs de la parole qu’à empêcher le bruit. La normativité des règles monastiques ne fonde pas une interdiction de la parole et n’institue pas le silence, même si elles répètent que « le moine doit s’appliquer au silence en tout temps selon les préceptes ». Elle cherche davantage à prévenir un excès et un usage détourné de la voix qu’à la supprimer au sein de la vie cénobitique. Très tôt d’ailleurs, les commentateurs de la règle bénédictine établissent des variations et des nuances dans ce qu’il faut entendre par « silence » au sein du monastère, en fonction des heures, des lieux, des actions collectives ou solitaires…"
Le pavillon de l'Horloge, établi au flanc nord de la cathédrale, est commandé par le chapitre de la cathédrale à Jehan de Beauce pour abriter le mécanisme d'horlogerie qui actionne le timbre à marteau sonnant les heures, placé dans la lanterne du clocher nord, et l'horloge de la façade du pavillon. Le mécanisme était relié aux cloches par une tringlerie. Sa construction est achevée vers 1520. Il est consolidé en 1862 puis restauré en 1864. En 1991, la pierre est nettoyée et les chiffres du cadran sont redorés à la feuille d'or. En 1887, le mécanisme qui a cessé d'être utilisé vingt ans plus tôt, est remplacé par une horloge comtoise installée par l'horloger chartrain Albert Renouf (1848-1895). En 1990, le mécanisme d'origine est restauré, et bien que vraisemblablement incomplet, est toujours en état de marche.
On accède à cet édifice en calcaire de Berchères au plan rectangulaire de 5 m sur 3 m 50 , —dont le mur méridional est partiellement scellé à la tour nord de la cathédrale — et au toit en pavillon couvert de bardeau par un escalier en vis, en maçonnerie.
Le cadran polychrome, d'un diamètre de 2,58 mètres encadré de pilastres, est divisé en 48 rayons alternativement droits (marquant les heures) et flamboyants (marquant les demies) sur fond étoilé . Il porte les deux séries de chiffre gothique I à XII , selon la mode ancienne italienne en 24 heures ; il est entouré d'une frise de fruits et légumes enrubannés par un ruban marqués de traits en I, et ce décor végétal de type figue ou courge, typiquement Renaissance se retrouvera largement sur les stucs de la Galerie François Ier à Fontainebleau.
Les deux anges musiciens des écoinçons supérieurs.
L'un joue de la chalémie (chalémie-hautbois), l'autre de la harpe.
Sur le Tour de chœur de la cathédrale (1529), des anges musiciens ou des putti jouent de la viole, du luth ou de la flûte. Ailleurs, sur la huitième travée, un bas-relief montre une chalémie et une flûte entrecroisées dans un décor de ruban plissé.
Les deux sirènes porte-lanterne des écoinçons inférieurs.
Elles sont comparables et tiennent d'une main une lanterne allumée ou torchère à l'extrémité d'une longue hampe , et de l'autre, par son enroulement, un cuir découpé en forme d'écu losangique, peint d'une croix noire sur fond jaune.
Elles sont ailées. Le haut de leur corps est celui de femmes, nues, aux traits fins, à la bouche entrouverte, aux cheveux bouclés, aux petits seins ronds et au ventre projeté en avant, simplement ceint d'une ceinture de ruban nouée sur le côté et dont les longues extrémités flottent.
Leur queue n'est pas celle d'un poisson (*), mais d'un serpent, couvert d'écailles et formant une boucle. mais cette queue n'est pas représentée de manière naturaliste, et elle s'orne d'appendices en forme de feuilles à l'extrémité de tiges en volutes, tandis que l'extrémité s'achève par un bouquet de feuilles et de fruits.
(*) stricto sensu, ce ne sont pas des "sirènes" ou femmes poissons, mais des créatures semi-humaines de type femme-serpent".
Leur corps, si on en juge par la queue, est orientée vers l'extérieur de l'horloge, mais elles se tournent pour nous faire face, et leurs regards se tournent encore pour s'observer réciproquement.
Un décor première Renaissance.
Les cuirs découpés à enroulement, ces créatures hybrides et ces queues feuillagées témoignent de la pénétration à Chartres de l'influence de la Renaissance italienne, comme déjà en Normandie au château de Gaillon ou à Rouen sous l'influence du cardinal d'Amboise vers 1509, ou à Dol-de-Bretagne sous celle de l'évêque James en 1507.
Mais en 1529, ce décor Première Renaissance se développe largement à Chartres tout au long des 100 mètres du Tour de chœur de la cathédrale, construit par le même architecte que l'horloge, Jehan de Beauce.
On remarquera notamment le bas-relief du pilastre de jonction entre les deux sections, sixième travée sud : deux femmes ailées et élancées dont le corps de termine en rinceaux portent des vases dont les fruits sont picorés par des oiseaux situés au dessus.
Cathédrale de Chartres, claire-voie du Tour du choeur, photo Robert Malnoury.
Autre panneau comparable à nos sirènes, celui de la treizième travée nord montre un décor de candélabre avec des amours en pied dansant, portant des torches allumées et tenant un cuir découpé losangique.
On trouvera assez rapidement se diffuser ensuite, notamment sur les sablières ou les stalles de Bretagne, le même vocabulaire de candélabres, de chutes d'objets suspendus à des rubans, etc., et des dragons qui se caractériseront par ces queues feuillagées. La Guerche de Bretagne v. 1518-1525, Champeaux v.1530, Pont-Croix v. 1544.
La sirène porte-torche de l'écoinçon de droite .
Les chapiteaux.
Alors que la corniche supérieure ornée d'éléments végétaux, la corniche inférieure est ornée d'oves et de denticules, alternance de modillons à feuille d'acanthe et coquille Saint-Jacques.
Les pilastres encadrant le cadran s'appuient sur des chapiteaux ornés de figures fantastiques.. et de sirènes.
Le chapiteau de droite.
Il est orné au centre d'un mufle de lion, ailé, tenant dans sa gueule l'anneau d'un médaillon perlé. Sur les côtés, deux supports anthropomorphes coiffés de bonnets en limaçon, la bouche ouverte, les bras tronqués en appendices feuillagés, portent, sous une jupette de feuillage, une queue serpentine.
Notez aussi la frise supérieure avec ses spires de banderole.
Le chapiteau de gauche.
Il est orné au centre d'une tête d'angelot. Les deux créatures féminines qui l'encadrent, bouche ouverte, perdent également leurs bras au profit d'appendices feuillagés, et leurs queues de serpent écaillées et débutant par une jupette de feuille, viennent s'entrecroiser au centre en volutes de feuillages. Ce sont des femmes-serpents, cousines des sirènes femmes-poissons (ou des sirènes grecques femmes-oiseaux).
L'architecte Jehan Le Texier, dit de Beauce.
Ce petit pavillon a été érigé entre 1519 et 1520 par l’architecte (ou plutôt "Maître des maçons de l'Oeuvre") Jehan Texier plus connu sous le nom de Jehan de Beauce. C'est lui qui a reconstruit dans un style gothique flamboyant la flèche nord de la cathédrale haute de 115 mètres (après sa destruction par la foudre en 1506), et, nous l'avons vu, son Tour de chœur, commandé par les chanoines en 1513, débuté en 1516 et dont la décoration renaissance est datée par inscription de 1529, mais fut introduit dès 1521 (*). Il rénova aussi l'église Saint-Aignan de Chartres de 1513 à 1525.
(*) Tour de chœur "Très tôt et jusqu'au début des années 1530, une équipe de sculpteurs cisèle le décor du soubassement et de la claire-voie. Vingt-neuf dates, gravées dans des cartouches, parfois très discrètement, rappellent leur passage et permettent de suivre la conduite des travaux. 1521 portée à la quatrième travée méridionale est la date la plus ancienne ; 1532, à la treizième travée nord, année qui rappelle le déplacement de la porte d'accès au choeur, constitue la date extrême."
Auparavant, il avait reconstruit la façade de l'abbaye de La Trinité de Vendôme.
Il est décédé à Chartres le 29 décembre 1529.
Est-il responsable de l'introduction du décor Renaissance du Pavillon de l'horloge et du Tour de chœur? Le chapitre des chanoines a-t-il eu de l'influence? Ou bien, moins probablement par son conflit avec les chanoines, l'évêque Erard de la Marck ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jehan_de_Beauce
On notera que la clôture de chœur de l'abbaye de la Trinité de Vendôme réalisée en 1528, porte un décor Renaissance, complétant le jubé, les stalles, et le tombeau livré par Jean Juste en 1530. Voir mon article :
Ces quatre sirènes aux queues feuillagées témoignent, au même titre que le cuir découpé à enroulement, de l'introduction à Chartres de la Première Renaissance française, consécutive aux guerres d'Italie de Charles VIII et de Louis XII et de l'arrivée des premiers artistes italiens au château d'Amboise en 1495.
J'ai cité le château de Gaillon (1506-1509) et le cénotaphe de Thomas James à Dol-de-Bretagne (1507) par la famille Juste, ou l'escalier de l'aile Longueville du château de Châteaudun (1520). Les historiens mentionnent aussi , pour ce style Louis XII, l'allée Louis XII du château de Blois (1498-1503), le Pilier Saint-Jacques de Gisors, ...
Les sirènes des écoinçons réunissent quatre "règnes" (à défaut d'autre termes) :
L'humain artificieux et ses artefacts, produits de son industrie : les torches, et les cuirs — qui découlent de l'évolution dans l'art ornemental des peaux de tanneurs— découpés.
L'humain au naturel : le buste des femmes.
L'animal : la queue de serpent.
Le végétal : les appendices feuillagés évoluant en rinceaux.
Elles sont régies par le principe de métamorphose, cher à l'antiquité grecque et romaine — et à Ovide—, principe qui règne en maître dans l'art grotesque de la Domus Aurea de Néron, dont les pièces excavées ou "grottes" sont découvertes par les artistes italiens de la fin du XVe siècle (Michel-Ange, Raphael et Ghirlandaio). Ce principe de métamorphose introduit à la légereté, à l'onirisme et à la fantaisie.
Cet article destiné à partager mes clichés est largement documenté par l'ouvrage suivant :
Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Les vitraux de la Renaissance à Chartres, Centre international du vitrail de Chartres, 2010 (pages 56 à 93 notamment).
J'ai repris (en retrait) leurs commentaires, mis en ligne sur le site suivant :
Jusqu'à la Révolution, Chartres comportait onze paroisses en plus des églises conventuelles (église Sainte-Foy, des Cordeliers, Saint-Hilaire, Saint-André, abbatiale Saint-Père-en-vallée), etc. La plupart de ces églises ont été détruites, ou leurs verrières démontées, procurant ainsi aux restaurateurs de l'église Saint-Pierre et de l'église Saint-Aignan un matériel disponible pour compléter les verres existant.
L'église Saint-Aignan aurait été fondée par saint Aignan, évêque d'Orléans vers 400, au cœur de la cité chartraine au Ve siècle. Elle fut rapidement la première paroisse de la cité : sa situation à l’intérieur des murs et sa proximité du château en font une de ses églises remarquables. Elle était la paroisse des comtes de Blois et de Chartres.
Détruite puis reconstruite aux 15e et 16e siècles, elle présente alors une architecture de style gothique.
Les vitraux les plus anciens datent du XV et XVIe siècle mais beaucoup ont été détériorés pendant le siège de Chartres en 1568, lors de la deuxième guerre de religion. Malgré ces destructions, l'édifice présente un ensemble de 20 verrières classées monuments historiques . Si elle proviennent bien de Saint-Aignan, elles ont perdu pour la plupart leur emplacement d'origine, et elles ont été complétées par des pièces de réemploi.
"Rebâtie à la fin du XIIIe siècle, détruite puis reconstruite aux XVe et XVIe siècles, l’église Saint-Aignan, ancienne paroisse du château comtal et collégiale, présente un décor vitré d’une grande richesse. Les vitraux actuellement conservés sont pour l’essentiel ceux qui lui étaient destinés mais replacés de manière anarchique vers 1823. Seules les baies 12 et 18 sont demeurées homogènes et quelques panneaux de tympans sont encore en place."
"L'église Saint-Aignan renferme vingt-et-une baies (7, 9, 11 à 15, 18, 20, 22 et 100 à 110) garnies de vitraux exécutés entre la fin du XVe siècle et 1656. C’est en 1514 que débutèrent les travaux de construction de l’église, à partir des vestiges des édifices antérieurs. La pose des vitraux historiés s’effectua probablement au moment de l’achèvement de l’église et au cours des années suivantes. L’un d’entre eux est daté de 1547, un autre de 1566. Endommagés par faits de guerre, en 1568, leur restauration se poursuivit au cours du XVIIe siècle, notamment par les soins d’un verrier, Pierre Dubois, chargé en outre de l’exécution de 14 baies hautes dans la nef (marchés passés en 1630-1634). Certaines d’entre elles ont conservé les panneaux héraldiques des différents bienfaiteurs de l’église (XVIe et XVIIe siècles). Dans les années 1634-1646, les frères Massonet, « vitriers », procédèrent à quelques restaurations dans les verrières historiées du XVIe siècle. À nouveau fortement endommagés sinon totalement brisés par la grêle, en 1724, les vitraux furent réparés par M. Hubert, « vitrier ». Les vitraux de la nef ont été mis en caisses à la fin du XVIIIe ou au début du XIXe siècle : ils furent alors remisés chez le vitrier qui les avait ôtés ou dans une dépendance du monument. Reposés vers 1823, peu après la réouverture de l'église au culte, ces vitraux ont été redistribués de manière anarchique dans neuf des fenêtres de la nef : toutes abritent aujourd'hui des verrières composites, dans lesquelles rien n’est à sa place d’origine à l’exception des baies 12 et 18, restées homogènes, et de quelques panneaux des tympans qui n’ont jamais dû être retirés (baies 11, 14, 15, 20). L'atelier Lorin, établi à Chartres, restaura les vitraux des fenêtres hautes dans les années 1890 puis en 1923, ainsi que ceux de la nef autour de 1914. Déposés en 1939, ces vitraux ont été restaurés en 1943 par François Lorin sous la direction de Jean Trouvelot, architecte en chef des Monuments historiques, puis reposés en 1948. Endommagée par un incendie, la baie 14 a été restaurée en 1976 par l'atelier Hermet-Juteau (Gatouillat et Leproux, 2010)."
J'ai placé les baies dans un ordre chronologique.
La baie 9. Dormition de la Vierge par Pierre Courtois v.1485-1490.
"Les huit scènes dispersées d’un cycle de la Dormition de la Vierge, en grande partie regroupées dans la baie 9, illustrent l’activité d’artistes étrangers à la ville. Cette verrière, réalisée vers 1485-1490, est attribuée à l’atelier du peintre-verrier Pierre Courtois, sans doute installé à Évreux, en Normandie, dont le rayonnement est déjà identifié à Bernay (Eure), Dreux (Eure-et-Loir) et jusqu’à La Ferté Bernard (Sarthe).
Dans des encadrements architecturés de style flamboyant peints en grisaille et jaune d’argent sont figurés les différents épisodes de la Dormition, depuis l’Agonie de la Vierge (en bas à gauche) jusqu’à son Couronnement par la Trinité (tympan). L’attribution de la verrière de Saint-Aignan à Pierre Courtois repose sur ce qui caractérise ses œuvres attestées, entre autres le goût des tons rompus, les carnations peintes de préférence sur verre blanc, les visages féminins à l’ovale très pur, ou l’expression mélancolique des figures christiques. Outre la finesse d’exécution, on relève certains procédés techniques délicats, à l’exemple de la scène du miracle des impies dont les mains collées sur le cercueil sont des pièces montées en chef-d’œuvre, dans le panneau des funérailles de Marie (au milieu à droite)." (Gatouillat et Leproux in Arviva)
Les auteurs comparent cette Dormition avec celle de Notre-Dame des Marais de La Ferté-Bernard, peinte par Robert Courtois, auteur en 1498 de l'Arbre de Jessé de cet église. Les vitraux réalisés par Pierre Courtois (père de Robert?) datent vers 1480.
Chacune des cinq scènes de la Dormition est encadrée par des colonnettes au fût taillé de losanges et soutenant un arc en rinceaux de tiges et de feuilles, et un phylactère décrivant la scène.
Un panneau de donation datant du XVIe siècle s'y ajoute en haut à gauche.
L'épisode est fondé sur des écrits apocryphes, comme celui du Pseudo-Jean, Sur la mort de Marie (IVe ou Ve siècle) ou La Légende dorée de Jacques de Voragine rédigée en latin entre 1261 et 1266.
Voir aussi : Petrus Christus 1457-1467 https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Mort_de_la_Vierge_(Petrus_Christus)
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
1. La Vierge alitée et mourante est entourée des apôtres. Elle est assistée d'une jeune femme (ou d'un ange, à bandeau portant une escarboucle).
Inscription COMME TOUS SALUÉRENT [...] NOSTRE DAME.
Jean est à sa gauche, tenant la palme du paradis qui lui a été remis par un ange. Pierre, précédent les autres apôtres, est agenouillé . Les draps du lit sont rouges.
L'épisode de la palme remis par un ange :
'Lorsque les apôtres se furent séparés, pour aller prêcher l’évangile aux nations, la sainte Vierge resta dans leur maison, qui était près de la montagne de Sion. Elle ne cessait point de visiter pieusement tous les lieux consacrés par son fils, c’est-à-dire ceux de son baptême, de son jeûne, de sa prière, de sa passion, de sa sépulture, de sa résurrection et de son ascension. Et Épiphane nous apprend qu’elle survécut vingt-quatre ans à l’ascension de son fils. Il ajoute que, comme la Vierge avait quinze ans lorsqu’elle mit au monde le Christ, et comme celui-ci avait passé sur cette terre trente-trois ans, elle avait donc soixante-douze ans lorsqu’elle mourut. Mais il paraît plus probable d’admettre, comme nous le lisons ailleurs, qu’elle ne survécut à son fils que douze ans, et qu’elle avait soixante ans, lors de son assomption : car l’Histoire ecclésiastique nous dit que, pendent douze ans, les apôtres prêchèrent en Judée et dans les régions voisines.
Un jour enfin, comme le désir de revoir son fils agitait très vivement la Vierge et la faisait pleurer très abondamment, voici qu’un ange entouré de lumière se présenta devant elle, la salua respectueusement comme la mère de son maître, et lui dit : « Je vous salue, Bienheureuse Marie ! Et je vous apporte ici une branche de palmier du paradis, que vous ferez porter devant votre cercueil, dans trois jours, car votre fils vous attend près de lui ! » Et Marie : « Si j’ai trouvé grâce devant tes yeux, daigne me dire ton nom ! Mais, surtout, je te demande avec instance que mes fils et frères, les apôtres, se rassemblent autour de moi, afin que je puisse les voir de mes yeux avant de mourir, et rendre mon âme à Dieu en leur présence, et être ensevelie par eux ! Et je te demande encore ceci : que mon âme, en sortant de mon corps, ne rencontre aucun méchant esprit, et échappe au pouvoir de Satan ! » Et l’ange : « Pourquoi désirez-vous savoir mon nom, qui est grand et admirable ? Mais sachez qu’aujourd’hui même tous les apôtres se réuniront ici, et que c’est en leur présence que s’exhalera votre âme ! Car celui qui, jadis, a transporté le prophète de Judée à Babylone, celui-là n’a besoin que d’un moment pour amener ici tous les apôtres. Et quant au malin esprit, qu’avez-vous à le craindre, vous qui lui avez broyé la tête sous votre pied, et l’avez dépouillé de son pouvoir ? » Cela dit, l’ange remonta au ciel ; et la palme qu’il avait apportée brillait d’une clarté extrême. C’était un rameau vert, mais avec des feuilles aussi lumineuses que l’étoile du matin.
Or, comme saint Jean prêchait à Éphèse, une nuée blanche le souleva, et le déposa au seuil de la maison de Marie. Jean frappa à la porte, entra et salua respectueusement la Vierge. Et elle, pleurant de joie : « Mon fils Jean, tu te souviens des paroles de ton maître, qui m’a recommandé à toi comme une mère, et toi à moi comme un fils. Et voici que le Seigneur me rappelle, et que je confie mon corps à ta sollicitude. Car j’ai appris que les Juifs se proposaient, dès que je serais morte, de ravir mes restes et de les brûler. Mais toi, fais porter cette palme devant mon cercueil lorsque vous conduirez mon corps au tombeau ! » Et Jean lui dit : « Oh ! comme je voudrais que tous les apôtres mes frères fussent ici, pour préparer tes funérailles, et proclamer tes louanges ! » Et, pendant qu’il disait cela, tous les apôtres, dans les lieux divers où ils prêchaient, furent soulevés par des nuées, et déposés devant la maison de Marie. Et quand ils se virent réunis là, ils se dirent, tout surpris : « Pour quel motif le Seigneur nous a-t-il rassemblés aujourd’hui ? » Alors Jean sortit vers eux, leur annonça la mort prochaine de la Vierge, et ajouta : « Prenez garde, mes frères, à ne point pleurer quand elle sera morte, de peur que le peuple en voyant vos larmes, ne soit troublé et ne se dise : « Ces gens-là prêchent aux autres la résurrection, et, eux-mêmes, ils ont peur de la mort ! » Et saint Denis, le disciple de saint Paul, dans son livre sur les Noms de Dieu, nous fait un récit analogue, ajoutant que lui aussi était là, et que la Vierge sommeillait pendant l’arrivée des apôtres." (Légende Dorée)
Nombreux bouche-trous.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
2. Les apôtres et la Vierge sont agenouillés autour du lit vide.
Les apôtres ont la tête levée et attendent la venue du Christ.
Inscription COMME TOUS CHANTÉRENT
Le dais du lit, rouge à franges dorées, recouvre la pièce, associé à des rideaux verts et une tête de lit rouge où une fleur blanche est gravée.
"Quand la Vierge vit tous les apôtres réunis, elle bénit le Seigneur et s’assit au milieu d’eux, parmi des lampes allumées. Or, vers la troisième heure de la nuit, Jésus arriva avec la légion des anges, la troupe des patriarches, l’armée des martyrs, les cohortes des confesseurs et les chœurs des vierges ; et toute cette troupe sainte, rangée devant le trône de Marie, se mit à chanter des cantiques de louanges. Puis Jésus dit : « Viens, mon élue, afin que je te place sur mon trône, car je désire t’avoir près de moi ! » Et Marie : « Seigneur, je suis prête ! » Et toute la troupe sainte chanta doucement les louanges de Marie." (Légende Dorée)
Nombreux bouche-trous dont une tête masculine sur l'épaule de la Vierge.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
3. La Dormition de la Vierge entourée des apôtres.
On reconnaît saint Jean, toujours placé à gauche et qui place la palme entre les mains de Marie. la palme et Pierre tenant le goupillon. Un autre apôtre tient le seau d'eau bénite, tandis qu'un autre encore tient une croix à longue hampe.
Inscription COM[MENT], suite non déchiffrée.
Devant saint Pierre, un personnage au fin visage tient les chaines d'un encensoir. Faut-il y voir Marie-Madeleine, célèbre pour sa beauté et son élégance et caractérisée par son lien avec les parfums ? Sa robe blanche est brodé d'or, autour du cou et sous la forme de fleurs à trois pétales.
Au coin inférieur droit, peint au trait sur verre blanc avec rehaut de jaune d'argent, deux criquets (réemploi).
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
4. Les funérailles de la Vierge.
Les apôtres, Jean en tête tenant la palme, portent le cerceuil, couvert du drap rouge.
Inscription COMME LES APOTRES PORTENT LE CORPS.
Un homme en armure d'or (tête en réemploi de Dieu le Père barbu coiffé d'une tiare à triple couronne fleurdelisée) et tenant une épée s'approche du cercueil et y pose la main. Il s'agit du "prince des prêtres" de la Légende Dorée, qui, avec d'autres Juifs, voulut s'emparer du cercueil. Les mains du prince se désséchèrent tandis que les autres Juifs étaient aveuglés.
Les deux mains blanches (dont une gantée de l'armure) sont montées en chef d'œuvre sur le verre rouge.
F. Gatouillat fait remarquer le sol en tapis de fleurs peint en grisaille et jaune d'argent sur le verre bleu.
"Attirés par la douceur de cette musique, tous les Juifs accouraient, s’informant de ce qui se passait. Quelqu’un leur dit : « C’est Marie que les disciples de Jésus portent au tombeau ! » Sur quoi les Juifs de prendre les armes et de s’exhorter l’un l’autre, en disant : « Venez, nous tuerons tous les disciples, et nous brûlerons ce corps qui a porté l’imposteur ! » Et le prince des prêtres, furieux, s’écria : « Voilà donc le tabernacle de celui qui a troublé notre race ! Et voilà les honneurs qu’on lui rend ! » Ce disant, il voulut s’approcher du cercueil pour le jeter à terre. Mais aussitôt ses deux mains se desséchèrent, et restèrent attachées au cercueil, pendant que les anges, cachés dans les nuées, aveuglaient tous les autres Juifs. Et le prince des prêtres gémissait et disait : « Saint Pierre, ne m’oublie pas dans ma peine, mais prie ton Dieu pour moi ! Rappelle-toi comment, un jour, je te suis venu en aide et t’ai excusé, quand une servante t’accusait ! »
Et Pierre lui dit : « Je n’ai pas le loisir de m’occuper de toi ; mais si tu veux croire en Jésus-Christ et en celle qui l’a enfanté, j’espère que tu pourras recouvrer la santé ! » Et le prince des prêtres : « Je crois que Jésus est le fils de Dieu et que voici sa sainte mère ! » Aussitôt ses mains se détachèrent du cercueil ; mais ses bras restaient desséchés et endoloris. Et Pierre lui dit : « Baise ce cercueil et dis que tu crois en Jésus-Christ ! » Ce qu’ayant fait, le prêtre recouvra aussitôt la santé ; et Pierre lui dit : « Prends, cette palme des mains de notre frère Jean, et pose-la sur les yeux de tes compagnons privés de la vue ; et tous ceux d’entre eux qui croiront recouvreront la vue ; mais ceux qui refuseront de croire seront privés de leur vue pour l’éternité ! »"
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
5. La mise au tombeau de la Vierge par les apôtres.
Saint Pierre bénit la défunte, en suivant sur un livre l'oraison. Saint Jean tient la palme, mais son visage a été remplacé par celui d'une tête barbue "peinte vers 1520" (Gatouillat et Leproux). L'inscription n'est que fragmentaire.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
6. Un couple de donateurs.
Ce panneau, tout comme celui, jumeau, remonté en baie 15, devait provenir d'une verrière distincte datée vers 1500-1515.
Dans une niche surbaisée à décor arborescent, un couple de donateurs est suivi de ses six enfants. Le mari, suivi de deux fils, est présenté par saint Jacques le Majeur, la femme suivie de quatre filles, par un saint archevêque.
Saint Jacques s'identifie son visage barbu, par son chapeau frappé d'une coquille, par sa besace elle aussi frappée d'une coquille, et par son bourdon.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
7. Le tympan en quadrilobe : le couronnement de la Vierge par la Trinité.
C'est la scène qui achève le cycle de la Dormition. "La tête du Christ, au nimbe orné de rais terminés en fleur de lys, est caractéristique du style de Pierre Courtois." (Gatouillat et Leproux).
Les écoinçons renferment deux anges en grisaille et jaune d'argent sur fond bleu, datés vers 1500-1515 et réalisés sur le même carton que la baie 7 : ils occupent sans doute à leur place d'origine.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
La baie 15. Dormition de la Vierge par Pierre Courtois v.1485-1490 (suite) et panneaux de différentes origines et époques.
"Le « désordre » du vitrage de Saint-Aignan reflète l’histoire mouvementée de l’église : vendue en 1792 à l’architecte voyer Laurent Morin, elle abrita un hôpital militaire, puis servit de grange à foin avant d’être restituée à la ville en décembre 1822 pour être rouverte au culte. Pendant cette période les vitraux de l’étage inférieur avaient été déposés et conservés en caisses. Le vitrier chargé de regarnir les fenêtres de la nef n’eut qu’à puiser dans ce stock, ce qui n’exclut pas qu’il ait pu introduire en complément quelques morceaux étrangers à Saint-Aignan. Les panneaux remployés furent alors restaurés en comblant les manques par des bouche-trous retaillés dans d’autres vitraux, à l’image de la baie 15, recomposée vers 1893 à l’aide de morceaux auparavant dispersés" arviva.univer-Tours
"L’ensemble des lancettes de la baie 15 a été recomposé vers 1893 par l’atelier Lorin de Chartres, à l’aide de morceaux auparavant dispersés, deux d’entre eux, le buste de saint Jean et la scène relative à sainte Catherine, étant probablement étrangers à l’église. Tandis que le tympan et les quatre panneaux du registre supérieur proviennent de plusieurs verrières narratives exécutées entre 1485 et 1510, le soubassement de la baie présente les restes des compositions héraldiques des fenêtres hautes de l’église, réalisées vers 1625-1630." arviva.univer-Tours
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
1 et 2. branches de lauriers entrecoupées , cadre ornemental provenant des fenêtres hautes (vers 1625-1630).
Les branches de laurier sont teintées d'émaux rouge et bleus.
Panneau 1.
L'écu est remplacé par un panneau civil du XVIIe siècle où quatre anges (jaune d'argent, grisaille et émail bleu) sont en adoration devant un reliquaire d'or en forme de chapelle.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Panneau 2 :
Le champ de l'écu est occupé par un rondel figurant sainte Marguerite issant du dragon (grisaille et jaune d'argent, vers 1500) au dessus d'un autre panneau civil rectangulaire du XVIIe siècle représentant sainte Catherine, dont on voit la roue et l'épée, la jupe bleue, et le buste du roi à ses pieds.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
3. Sainte Catherine dans sa prison. Vers 1510-1520.
La sainte, nue mais assistée par deux anges, convertit l'impératrice, femme de Maxence, et Porphyre, capitaine des gardes.
La scène est tirée d'une suite narrative provenant d'un autre édifice chartrain.
Les deux visages féminins sont très ronds. L'impératrice porte sur la tête une coiffe comme en portait Anne de Bretagne à la même époque, et un manteau rouge à manches larges et fourrées. Porphyre porte un bonnet rouge, tout à fait Renaissance, et qui devait être orné d'un plumet.
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
4. Scène de la Dormition. 1485-1490.
"À gauche, deux apôtres assis, l’un muni d’un livre, proviennent d’une des scènes du cycle de la Dormition de la Vierge exécuté en 1485-1490 ; leurs têtes, aux carnations réchauffées, sont des exemples de la restauration subie par la verrière vers 1520. À droite, saint Jean l’Évangéliste tient la coupe empoisonnée, son attribut habituel ; la figure, dont le buste est seul conservé, patronnait probablement des donateurs ; elle pouvait appartenir à un vitrail d’une autre église. Fin du XVe siècle. Comme le panneau 3, ces deux éléments servaient de bouche-trou dans une baie de l’étage supérieur avant 1850.
Remontés au-dessous d’eux et à l’extrême droite, on reconnaît deux fragments de la verrière du Jugement dernier déjà signalée dans les baies 13 et 14 : un ange porte une âme devant la tour du paradis, un autre sonne la résurrection des morts. Vers 1500-1510." https://www.arviva.univ-tours.fr/oeuvre/641
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
5. Un couple de donateurs et ses onze enfants présentés par saint Jacques Le Majeur et un saint évêque.
"Un couple de donateurs, avec ses onze enfants, est présenté par un saint évêque et saint Jacques le Majeur, identifiable par les insignes des pèlerins ; la tête de ce dernier est perdue, comme celle du père de famille, remplacée par une autre. Le panneau, utilisé en baie 7 avant 1893, est similaire à celui décrit en baie 9. L’arc supérieur est rogné, mais l’amorce du culot de l’encadrement est conservée d’un côté. Vers 1500-1515." https://www.arviva.univ-tours.fr/oeuvre/641
Ce sont les mêmes donateurs que pour la scène homologue aujourd'hui en baie 9 (cf). Le chapeau de Jacques Le Majeur, seul indice d'identification avec la barbe longue et le bourdon, est peint de façon très réaliste, puisqu'il porte non seulement la coquillle des pèlerins, mais aussi un bourdonnet, et une image de pèlerinage (un visage vu de face).
Le donateur, mains jointes, visage remplacé par un réemploi, porte une robe rouge-pourpre recouvert par un manteau gris, plissé, aux manches fendues et doublées de fourrures. Il pourrait s'agir d'un marchand.
Derrière lui viennent ses cinq fils, portant le même manteau.
L'épouse porte une coiffe dont le voile, formant un cornet vers l'arrière, débute par deux ailes couvrant les tempes et les joues. Elle est vêtue d'un manteau du rouge le plus vif, au décolleté en V et aux manches à larges revers. Son front et ses sourcils sont épilés. Ses yeux sont en amande, mais ce terme est trop vague pour désigner leurs formes en croissant effilé . La bouche est pulpeuse.
Les filles, plus grandes que les fils, portent une coiffe semblable à celle de leur mère, et un manteau, de couleur verte ou bleue.
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
6. Un des panneaux de la Dormition de Pierre Courtois v. 1485-1490.
"L’encadrement de colonnettes à décor losangé permet de reconnaître dans cette scène un des panneaux du cycle de la Dormition de la Vierge attribué à Pierre Courtois, bien qu’elle soit devenue confuse en raison des bouche-trous qui altèrent toute la partie centrale.
Parmi les pièces d’origine, on distingue, à gauche, des objets d’orfèvrerie posés sur une table, et à droite, deux têtes féminines – la Vierge et une suivante ? –, ainsi que quelques fragments de drapés. Ce sujet, décrit comme « trois saintes femmes » en 1850 et 1860, était alors placé en baie 7. Vers 1485-1490." https://www.arviva.univ-tours.fr/oeuvre/641
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
7. Le tympan : miracle de saint Sébastien.
"Cette scène de la vie de saint Sébastien, restée à sa place initiale, est la seule rescapée du cycle qui remplissait toute cette fenêtre. D’après la Légende dorée, saint Sébastien procède ici à la guérison du préfet de Rome Chromace, en présence du fils de celui-ci, Tiburce, et de Polycarpe. La scène serait intacte sans les plombs de casse qui y ont été introduits. Vers 1515-1520.
Écoinçons : les putti peints en grisaille et jaune d’argent sur fond bleu sont probablement en place. Vers 1515-1520." (Gatouillat et Leproux)
Sur cette scène d'une coloration raffinée, Sébastien, le fameux capitaine de la garde prétorienne de Dioclétien, un bel éphèbe blond, est coiffé d'une toque à quatre plumes blanches, tandis que le préfet porte un turban rouge constellé de bijoux. Des pots en étain sont rangés sur une étagère, et à gauche une main en gros plan tend une coupe : nous sommes à l'intérieur d'une chambre. Les deux hommes se serrent les mains, chacun avançant la jambe vers son interlocuteur. À droite, un homme (Tiburce?) porte une boîte rectangulaire.
Je consulte le texte de la Légende Dorée : il y est fait mention d'une chambre d'astronomie :
"Et le vieux Tranquillin, qui était atteint d’une maladie grave, guérit dès qu’il fut baptisé. Ce qu’apprenant le préfet de la ville de Rome [Chromace], qui était lui-même très malade, demanda à Tranquillin de lui amener l’homme qui l’avait guéri. Et quand le vieillard lui eut amené Sébastien et Polycarpe, il les pria de lui rendre la santé. Mais Sébastien lui dit qu’il ne guérirait que s’il permettait à Polycarpe et à lui de briser en sa présence les idoles des dieux. Et, le préfet Chromace ayant fini par y consentir, les deux saints brisèrent plus de deux cents idoles. Puis ils dirent à Chromace : « Puisque l’acte que nous venons de faire ne t’a pas rendu la santé, c’est donc que, ou bien tu n’as pas encore abjuré tes erreurs, ou bien que tu gardes debout quelque autre idole ! » Alors il avoua qu’il possédait, dans sa maison, une chambre où était représenté tout le système des étoiles, et qui lui permettait de prévoir l’avenir : ajoutant que son père avait dépensé plus de deux cents livres d’or pour l’installation de cette chambre. Et saint Sébastien : « Aussi longtemps que cette chambre ne sera pas détruite, tu ne retrouveras pas la santé ! » Et Chromace consentit à ce qu’elle fût détruite. Mais son fils Tiburce, jeune homme des plus remarquables, s’écria : « Je ne souffrirai pas que l’on détruise impunément une œuvre aussi magnifique ! Mais comme, d’autre part, je souhaite de tout mon cœur le retour de mon père à la santé, je propose que l’on chauffe deux fours, et que, si après la destruction de cette chambre mon père ne guérit pas, les deux chrétiens soient brûlés vifs ! » Et Sébastien : « Qu’il en soit fait comme tu as dit ! » Et pendant qu’il brisait la chambre magique, un ange apparut au préfet et lui annonça, que le Seigneur Jésus lui avait rendu la santé. Alors le préfet et son fils Tiburce et quatre mille personnes de sa maison reçurent le baptême. Et Zoé, qui s’était convertie la première, fut prise par les infidèles et mourut après de longues tortures ; ce qu’apprenant le vieux Tranquillin s’écria : « Voici que les femmes nous devancent au martyre ! » Et lui-même fut lapidé peu de jours après."
Les vitraux du XVe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
La baie 11. Quatre saints évêques, vers 1515-1530.
H = 3 m-L = 1,10 m."Les deux lancettes abritent quatre saints évêques en pied provenant de verrières différentes, complétées par de nombreux bouche-trous. Lesencadrements architecturaux en arc surbaissé indiquent les premières décénnies du XVIe siècle. La baie 11 est constituée de deux lancettes trilobées, divisées en deux registres, surmontées d'un tympan à trois ajours."
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
1. Saint Martin de Tours.
"Saint Martin, archevêque de Tours, identifié par l’inscription portée au centre de l’arc supérieur de sa niche, se tient dans un édicule tendu de damas, muni d’un livre et de la croix archiépiscopale. Sa chape est enrichie d’un galon rouge gravé, technique également employée pour le nimbe. Dans la partie inférieure perturbée de bouche-trous, on discerne le contour d’un écu. Vers 1515-1520." https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/637
Sur le verre rouge gravé (verre rouge plaqué à un verre blanc, et gravé à l'acide ou à la molette), lire Roger Barrié :
Le galon est gravé de points blancs, le nimbe est cerclé d'un trait blanc.
La niche est tendue d'un drap d'honneur bleu damassé et bordé d'or comme dans une chapelle seigneuriale sous quatre baies cointrées à verrières losangées.
Le motif du damas du manteau doublé de soie verte s'apparente à un ananas au centre d'un cercle flammé.
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
2. Saint Denis, évêque de Paris.
"Saint-Denis, soutenu par deux anges, tient dans ses mains sa tête tranchée ; un paysage apparaît au fond. La chape faite de verres rouges gravés a été partiellement remplacée. L’encadrement, un arc orné de médaillons à l’antique, est en revanche resté presque intact. Le nom du saint est inscrit sur un phylactère placé en bas à gauche. Vers 1520-1530." https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/637
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
3. Saint Nicolas de Myre.
"identifiable grâce à la représentation des trois enfants qu’il a ressuscités, il protège un clerc donateur, agenouillé à gauche sur un sol carrelé teinté de jaune d’argent. Le panneau a subi maintes altérations : le saint est défiguré par une restauration, et la tenture du fond est constituée de bouche-trous. Mais sa qualité transparaît dans la souplesse du drapé de la chape bleue bordée de jaune d’argent. Vers 1515-1520.
Tête de lancettes : un sommet de dais gothique sur fond rouge abrite le haut d’un paysage peint sur verre bleu clair. Premier quart du XVIe siècle. "
On retrouve la présentation du saint dans une chapelle à verrière cintrées, tendue d'un drap d'honneur rouge à galon doré.
Le clerc donateur porte un manteau plissé blanc à larges manches sur une robe rouge.
Les trois enfants sauvés par saint Nicolas sortent du saloir, mains jointes.
Une belle pièce de réemploi en grisaille et jaune d'argent sur verre blanc montre une jeune femme (Grâce?) parmi des rinceaux perlés où est suspendue une clochette.
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
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4. Saint Aignan, évêque de Chartres.
"Il se tient dans un paysage où se voit, selon Métais, le château de Vauventriers, celui de sa famille. Il est nommé sur une inscription placée en bas à gauche : Ygnen. Le panneau, quasiment intact, provient d’une verrière du bas-côté sud offerte par le chapitre de l’église, qui portait la date de 1518."
Tête de lancette : un fragment de dais Renaissance, rapporté, est orné de putti tenant des guirlandes de perles. Premier quart du XVIe siècle. "
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
7. Tympan, quadrilobe Premier quart du XVIe siècle : la Trinité souffrante.
"La Trinité souffrante apparaît dans une gloire ovoïde, entourée d’une nuée d’anges peints sur fond bleu-gris. Dieu le Père, coiffé de la triple couronne, tient devant lui le Christ en croix, la colombe du Saint-Esprit étant figurée devant sa barbe. Ce panneau bien conservé est demeuré à sa place initiale.
Écoinçons : deux anges, revêtus de dalmatiques colorées, sont tirés du même carton retourné. Comme le précédent, les deux panneaux paraissent en place. Premier quart du XVIe siècle." (Notice extraite de : Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Les vitraux de la Renaissance à Chartres, Chartres, Centre international du Vitrail, 2010, p. 72).
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
La baie 13. Adam et Ève ; Vie de saint Denis ; Vie de sainte Barbe ..., vers 1500, 1520 et 1656.
"La baie 13 est constituée d'une lancette divisée en trois registres : I. Partie rectiligne de la fenêtre : des panneaux originaires de trois verrières distinctes se trouvent ici regroupés, deux provenant de l’histoire de saint Denis, deux autres de celle de sainte Barbe, et deux éléments de l’Expulsion du paradis."
Les vitraux du XVIe siècle de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
1 L’ange chasse Adam et Ève du paradis. Jean Chastellain, v. 1520
2. Adam et Éve expulsé du paradis, Jean Vacher 1656.
"1. l'ange est environné de phylactères édictant la condamnation divine (Genèse 3, 1 6-19) : MULTIPLICABO […] MALEDICTA EX EA […] Ce fragment, attribuable au parisien Jean Chastellain, est le panneau supérieur gauche de la scène qui occupait initialement le bas des lancettes de la baie nord de la chapelle de la Vierge. Vers 1520. La tête de l’ange, interpolée, est une pièce tirée d’un vitrail du milieu du XVIe siècle.
2. Adam et Ève quittent le paradis. Cette portion de scène, complément du panneau 1, est une réfection du milieu du XVIIe siècle, peinte sur fond d’émaux bleus et violets, aujourd’hui écaillés."
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
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Éve, par Jean Vacher 1656.
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Inscription de restauration.
"Au-dessus de ce panneau et du précédent, se lit l’inscription qui soulignait la scène du registre supérieur de la verrière, relative aux Litanies de la Vierge : QUAE EST ISTA QUAE PROGREDITUR UT AURORA CONSURGENS […] ELECTA UT SOL […] UT CASTRORUM ACIE […], et la référence du Cantique des Cantiques, suivie de la date de [16]56 et de la signature de Jean Vacher, le peintre-verrier auteur de cette restauration."
La référence du Cantique des Cantiques 6:9 est :
Quae est ista quae progreditur quasi aurora consurgens, pulchra ut luna, electa ut sol, terribilis ut castrorum acies ordinata? Canticum Canticorum 6:9 "Une seule est ma colombe, ma parfaite; Elle est l'unique de sa mère, La préférée de celle qui lui donna le jour. Les jeunes filles la voient, et la disent heureuse; Les reines et les concubines aussi, et elles la louent."
Les vitraux de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
3. Saint Denis comparaît devant le préfet Fescennius assis sur un trône.
"Le saint a les mains entravées de cordes que tient le soldat qui le suit ; Rustique et Eleuthère, figurés à l’arrière-plan, attendent leur jugement. Les débris du commentaire […] RUSTIQUE ET […] FURENT AMENEZ […] sont complétés des fragments d’une autre inscription. Vers 1515-1520."
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
4. Sainte Barbe s’apprête à subir le martyre.
"Dans un paysage rocheux, le père de la sainte, richement vêtu d’un manteau damassé doublé d’hermine, la menace de son sabre ; à droite, la représentation de la sainte, altérée par diverses interpolations, laisse à peine deviner qu’elle tournait le dos, agenouillée en prière. Le début de l’inscription est conservé : COMMENT SON PERE LA VEULT [OCCIRE]. Vers 1515-1520."
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
5. Saint Denis et ses compagnons.
"La dernière communion de saint Denis et de ses compagnons, les diacres Rustique et Eleuthère, dans leur prison, leur est administrée par le Christ suivi d’un ange. Des bouche-trous ont remplacé la tête du Christ et une partie de la tunique de l’ange. Sur l’inscription en partie conservée se déchiffre […] EN LA CHARTRE LUI DONNA MESSIRE […]. Vers 1515-1520."
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
6. Sainte Barbe, emprisonnée, reçoit les consolations du Christ.
"La scène est bien conservée, mais l’inscription, soulignant la représentation comme dans la légende de saint Denis, a presque disparu : COMMENT NOTRE [SEIGNEUR…]. Vers 1515-1520."
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Amortissement : 7 et 8.
"L’ensemble est composé de bouche-trous divers, parmi lesquels plusieurs fragments d’une cour céleste, petits personnages peints en grisaille rousse et jaune d’argent, provenant de la verrière d’une Jugement dernier dont on reconnaît d’autres éléments en baies 14 et 15. Vers 1500-1510. D’autres fragments sont teintés d’émaux, notamment des portions de bordures du XVIIe siècle intégrant deux écus armoriés, sans doute originaires des fenêtres hautes (1625-1630).
L’écu de gauche est parti des familles Chouayne, d’azur à deux épées d’argent gainées d’or posées en sautoir, cantonnées de quatre croissants d’or, et Symon, d’azur au chevron d’argent accompagné de trois cygnes becqués et membrés de sable.
L’écu de droite, d’azur fascé d’argent, accompagné en chef de trois coquilles d’argent, et en pointe d’une étoile d’or, est celui des Lebeau, qui possédaient la chapelle éclairée par la baie 7, et qui ont laissé d’autres marques de leur contribution au vitrage de l’étage supérieur, l’une en baie 106, l’autre maintenant remployée en baie 22."
(Notice extraite de : Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Les vitraux de la Renaissance à Chartres, Chartres, Centre international du Vitrail, 2010, p. 76).
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
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La baie 14. Parenté de la Vierge v.1500-1520.
"La fenêtre est celle de la chapelle octroyée en 1504 à Regnault de Gyvès, prévôt de Chartres; sa verrière est conservée en grande partie à son emplacement initial, y compris les panneaux des têtes de lancettes et ceux du tympan.
Lancettes : restées à leur place d’origine dans la partie supérieure, quatre scènes encadrées d’architectures mêlant les vocabulaires flamboyant et Renaissance illustrent la Parenté de la Vierge (nos 3 à 6) ; l’une figure sainte Anne, les autres ses trois filles avec leurs familles, les soeurs de la Vierge ayant pour progéniture six des futurs apôtres. La partie inférieure a été complétée de scènes provenant de deux autres verrières. " Gatouillat et Leproux, https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/640
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
1. Légende de saint Denis.
"Cette scène du début de la légende de saint Denis provient de la même verrière que celles remontées en baie 13. Elle représente l’autel du Dieu inconnu érigé dans un temple d’Athènes (une inscription précise : DEO IGNOTO), devant lequel vient prier un aveugle que guérit Denis l’Aréopagite sur ordre de saint Paul. Ce dernier est rendu méconnaissable par le bouche-trou qui remplace sa tête. Vers 1515-1520. " Gatouillat et Leproux, https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/640
Sauint Denis porte la tenue des docteurs en théologie médiéval, avec le bonnet carré , la robe rouge, le camail et la fourrure d'hermines. L'aveugle montre les signes de son indigence : couvre-chef, tunique trouée, culotte mal ajustée par une pauvre ceinture, chausses trouées au genou, gamelle de mendicité, et husseaux.
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2. Jugement dernier.
"Le panneau appartient à la verrière du Jugement dernier signalée en baie 13. Il figure la résurrection des morts, une âme assistée d’un ange quittant le plateau de la balance que tenait saint Michel – jadis figuré à droite –, et les élus se pressant au seuil de la tour d’or qui commande l’entrée du Paradis, gardée par saint Pierre, dont la tête est une réfection du XVIIe siècle. La scène est peinte en camaïeu de grisaille rousse et de jaune d’argent, avec quelques pièces de verres de couleurs. Des bouche-trous l’élargissent du côté gauche. Vers 1500-1510." Gatouillat et Leproux, https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/640
À droite, un homme sort de son tombeau, mains jointes, regard tourné vers les cieux.
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3. Marie Jacobé, Alphée et leurs quatre fils.
"Marie Jacobé, coiffée d’un volumineux atour de tête à la mode germanique, et son époux Alphée sont assis dans une cathèdre, leurs quatre enfants, les saints Jude, Joseph le Juste, Simon et Jacques le Mineur, se tenant debout devant eux. La scène est presque intacte. Vers 1505-1510." Gatouillat et Leproux
Le premier enfant tient un livre ouvert, le deuxième (saint Joseph le Juste ou Joseph Barsabas ?) porte un un écritoire glissé dans sa ceinture ; Jacques le Mineur se reconnaît à son bâton de foulon, instrument de son supplice.
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4. Marie Salomé, Zébédé et leurs deux fils.
"Marie Salomé et son époux Zébédée se tiennent derrière leurs fils, saint Jean et saint Jacques le Majeur, munis de leurs attributs habituels. La scène comprend des bouche-trous et des restaurations, notamment dans la partie supérieure. Vers 1505-1510." Gatouillat et Leproux
Zébédée porte une aumônière à la ceinture. Saint Jean l'évangéliste bénit la coupe de poison (un dragon ailé) afin de la boire sans danger et de témoignenr de la puissance de son Dieu. Jacques Le Majeur se reconnaît à son chapeau, à sa besace et à son bourdon.
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5. La Vierge filant.
"La Vierge file la laine près du berceau de Jésus veillé par un ange, et saint Joseph travaille le bois, des anges recueillant les copeaux. On retrouve dans ce panneau peu altéré chacune des figures du Séjour de la Sainte Famille en Égypte d’Albrecht Dürer, y compris des détails tels que la couronne dont est coiffé l’ange de droite. Vers 1505-1510." Gatouillat et Leproux https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/640
Albrecht Dürer, Le séjour de la Sainte Famille en Égypte, de La Vie de la Vierge, vers 1504.
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6. Sainte Anne, Joachim et la Vierge enfant.
"Sainte Anne, Joachim et la Vierge enfant sont tous trois assis, occupés à lire dans une salle au décor Renaissance ouverte sur un paysage. Le panneau est bien conservé. Vers 1505-1510.
Têtes de lancettes : 7 et 8. Sur fond rouge, un entablement supporte des anges assis autour de vases godronnés, panneaux demeurés à leur place primitive ; vers 1505-1510.
Le sommet est complété de bouche-trous, parmi lesquels deux écus du XVIe siècle aux meubles mis en plombs, l’un, d’azur à trois fasces ondées d’argent, identifié comme celui de la famille Bouffineau, l’autre de gueules à deux fasces d’or, peut-être celui de la famille d’Harcourt, placé sous un fragment du précédent remonté de biais."Gatouillat et Leproux https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/640
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7 et 8 Têtes de lancettes.
"Sur fond rouge, un entablement supporte des anges assis autour de vases godronnés, panneaux demeurés à leur place primitive ; vers 1505-1510.
Le sommet est complété de bouche-trous, parmi lesquels deux écus du XVIe siècle aux meubles mis en plombs, l’un, d’azur à trois fasces ondées d’argent, identifié comme celui de la famille Bouffineau, l’autre de gueules à deux fasces d’or, peut-être celui de la famille d’Harcourt, placé sous un fragment du précédent remonté de biais."Gatouillat et Leproux https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/640
"Les familles de la haute bourgeoisie charlraine donnèrent de nombreux lévites a l'église pendant l'épiscopal d'Erard de la Marck. Nous citerons parmi eux Michel de Champrond, [...] Claude Grenet, Charles Bouffineau, Guillaume Poussemotte, Sébastien Grenet." https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56057220.texte.r=.ngFR
Les Bouffineau furent marchands de sel à Chartres.
Tympan.
"Tympan, ajour principal : 9. Dieu le Père apparaît en buste dans une gloire d’or, portant la couronne fermée ; il tient le globe d’une main et bénit de l’autre. De part et d’autre, deux anges tiennent des phylactères exaltant la généalogie de la Vierge d’après le prophète Isaïe : EGREDITUR VIRGA DE RADICE IESSE. Le panneau serait intact sans le trou qui a fait perdre la tête de l’ange de gauche. Vers 1505-1510.
Écoinçons : deux anges jouent de la viole ; le style de ces figures, traitées en grisaille et jaune d’argent à l’exception de leurs ailes, s’accorde à celui des panneaux de la Sainte Parenté. Vers 1505-1510." Gatouillat et Leproux, https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/640
(Notice extraite de : Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Les vitraux de la Renaissance à Chartres, Chartres, Centre international du Vitrail, 2010, p. 78).
La citation Egredietur virga de radice Iesse, (et flos de radice ejus ascende) est souvent associée aux verrières mariales ou aux Arbres de Jessé. Elle signifie : "Un rameau poussera sur la racine de Jessé, un rejeton naîtra de ses racines, et portera du fruit" et est lu comme une annonce de la naissance de Jésus.
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La baie 18. Apparitions du Christ à saint Pierre et à saint Paul. Jean Jouan, Jean Cousin v. 1540.
"Cette verrière, consacrée aux apparitions du Christ à saint Pierre et à saint Paul après sa Résurrection, paraît ne pas avoir subi beaucoup de modifications et pourrait être encore à son emplacement d’origine, les bordures du registre supérieur épousant parfaitement la forme de la baie. Elle est constituée de deux scènes superposées dont les modèles ont certainement été commandés au peintre parisien Jean Cousin dans les années 1540 : l’inventivité et l’élégance du répertoire décoratif, la complication et l’amplitude des drapés, les physionomies des protagonistes, le dessin des mains et les paysages à l’antique sont en effet caractéristiques du style de l’artiste. De plus, de nombreux éléments de la Conversion de saint Paul se retrouvent dans une gravure attribuée à Cousin par Henri Zerner. Une autre version a été par la suite gravée par Delaune.
Selon Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, la facture de la verrière est semblable à celle du vitrail de Saint Michel combattant les anges rebelles dans la même église (baie 12) et à celle des panneaux de la Vie de la Vierge de Saint-Pierre de Chartres (Chartres, Center international du Vitrail), attribués au peintre-verrier Jean Jouan."
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1. Domine quo vadis ?
"Cet épisode de la vie de saint Pierre, qui ne figure pas dans les Actes des apôtres, semble d’invention tardive. Il est rapporté par saint Ambroise et repris par Jacques de Voragine dans la Légende dorée : fuyant les persécutions de Néron, l’apôtre cherche à quitter Rome par la voie Appienne, lorsqu’il voit apparaître Jésus portant sa Croix. Il lui demande : « Seigneur, où vas-tu ? » (DOMINE, QUO VADIS ?). Le Christ lui répond : « À Rome, pour me faire crucifier une seconde fois » (ROMAM EO ITERUM CRUCIFIGI). Honteux, Pierre retourne dans la ville subir le martyre. C’est ce dialogue, en latin, qui figure sur le cartouche placé au bas de la scène, dont la partie gauche a disparu.
L’encadrement, très plastique, est constitué de motifs de « cuirs » découpés, inspirés de ceux conçus par Rosso pour la Galerie François Ier de Fontainebleau et diffusés par des graveurs comme Antonio Fantuzzi ou Jean Mignon. Cependant, on ne relève aucune copie directe, l’ensemble étant savamment réinterprété par un artiste visiblement à l’aise dans ce répertoire.
Deux écus sont figurés dans les écoinçons de la partie supérieure. Les armoiries, traditionnellement associées à la famille Godeffroy, sont plus vraisemblablement celles de François Arroust, prévôt de Chartres de 1540 à 1547, et de sa femme Catherine Michon. La moitié droite de l’écu écartelé est restaurée." https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/642
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2. La Conversion de saint Paul
"Saül, Juif hellénisé servant dans l’armée romaine, se rendait à Damas pour pourchasser les disciples du Christ, lorsqu’il fut aveuglé par une vive lumière qui le fit chuter de cheval. Il entendit alors une voix lui disant « Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu ? ». Il se convertit et prit le nom de Paul. La scène prend place dans un encadrement tout aussi recherché que celui de la partie inférieure, quoique de structure différente, puisé à des sources de même origine interprétées avec autant de science : deux termes supportent un arc brisé orné d’une frise de rinceaux et de bucrânes qui épouse la forme de la baie. On note quelques restaurations, notamment la tête de l’un des soldats, et un emploi d’émail bleu plus abondant que dans le registre inférieur, où il se limitait à la couronne d’épines du Christ et à son voisinage. On en trouve en particulier pour le harnachement de l’un des chevaux et les guêtres de son cavalier. L’une des pièces présente même la particularité d’être peinte à l’émail bleu sur un verre de même couleur. En revanche, les paysages peints sur verre bleu sont traités de façon similaire dans les deux scènes."
(Notice extraite de : Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Les vitraux de la Renaissance à Chartres, Chartres, Centre international du Vitrail, 2010, p. 51 et 82).
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
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La baie 12. Saint Michel combattant les anges rebelles. Jean Jouan, 1547.
"Cette verrière, demeurée quasiment entière, est à son emplacement d’origine. Elle fut commandée au peintre-verrier Jean Jouan par la famille Grenet, titulaire de la chapelle, et fut posée en avril 1547.
Le sujet, le combat victorieux de l’archange saint Michel et des armées célestes contre Lucifer et les anges rebelles, est tiré de l’Apocalypse : « Et il y eut guerre dans le ciel. Michel et ses anges combattirent contre le dragon […] Le grand dragon appelé Satan fut précipité sur la terre et ses anges furent précipités avec lui. » (Apocalypse, 1 2, 7). Le choix de cet épisode revient probablement à l’un des membres de la famille, l’avocat Michel Grenet qui, dans son testament rédigé quelques mois plus tard, demanda qu’une statue de son protecteur soit placée sur l’autel.
Saint Michel vêtu d’une armure étincelante, accompagné de deux anges, précipite Lucifer et d’autres démons dans les flammes de l’enfer.L’artiste possédait probablement la planche correspondante del’Apocalypse de Dürer, ainsi que la gravure de Jean Mignon sur le même sujet (Zerner, JM 50), mais ses emprunts à l’une comme à l’autre sont très ponctuels.
On sait aussi que le peintre-verrier Pierre Massonnet restaura la verrière en 1650. La tête de l’ange de gauche est une réfection de Charles Lorin en 1914, tandis que celle de l’ange de droite porte les traces d’une intervention plus ancienne, remontant probablement au XIXe siècle."
(Notice extraite de : Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Les vitraux de la Renaissance à Chartres, Chartres, Centre international du Vitrail, 2010, p. 74). https://arviva.univ-tours.fr/oeuvre/638
Les vitraux Renaissance de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
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Le tympan : Dieu le Père.
"Au sommet, dans une nuée peuplée de chérubins, Dieu le Père assiste au combat, entouré par deux angelots tirant des flèches."
Les vitraux de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Le soubassement.
"Le soubassement, orné d’un grand cartouche et de serviettes, comporte des éléments insérés postérieurement. Il s’agit, au centre, d’un petit panneau carré peint à la grisaille, au jaune d’argent et à l’émail bleu, représentant une femme assise tenant un livre et, à droite, d’un écu dont les armes, d’azur au chevron d’argent accompagné de deux croix potencées d’or et, en pointe, d’une feuille de chêne de même, sont celles des Challine, descendants des Grenet et possesseurs de la chapelle à partir de la fin du XVIe siècle. Ces modifications pourraient être consécutives à des dégâts survenus pendant le siège de 1568."
Les vitraux de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les vitraux anciens de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Les fenêtres hautes.
"Trente-trois fenêtres en plein cintre éclairent l'étage supérieur de l'église, les cinq du rond-point étant suivies de deux baies par travées."La baie 100, dans l'axe et ses voisines de part et d'autre regroupent les restes des armoiries et des emblèmes de ceux qui ont contribué à la réalisation de ces verrières blanches à bordures teintées d'émaux, menée en deux temps, en 1625 dans le chœur et vers 1630 dans la nef. Les panneaux, tous peints en grisaille, jaune d'argent et émaux, ont été redistribués tels qu'on les voit aujourd'hui à l’occasion de la restauration de ces fenêtres survenues vers 1895. Les doubles filets qui cernent chaque baie furent alors réalisés à partir des débris des anciennes bordures." (Notice extraite de : Françoise Gatouillat et Guy-Michel Leproux, Les vitraux de la Renaissance à Chartres, Chartres, Centre international du Vitrail, 2010, p. 51 et 82).
Les fenêtres hautes de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Baie 100.
"Ecu d'azur ouvert en chevron surmonté d'une crossette d'or accompagné de trois épis de blé."
Les fenêtres hautes de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Baie 103.
Cet écu de sable au ciboire d'or est peut-être l'emblème d'une confrérie.
Les fenêtres hautes de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Baie 105.
Ecu d'argent à la fontaine jaillissante d'or.
Les fenêtres hautes de l'église Saint-Aignan de Chartres. Cliché lavieb-aile 2025.
Baie 107.
Écu au monogramme sur fond d'argent incluant peut-être les lettres A, V, B, R, et F.
Il évoque les marques des imprimeurs et des libraires, mais aussi des verriers de la cathédrale de Troyes à la fin du XVe siècle.
Marque de la baie 132 (par le verrier Pierre, 1499) de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
— COFFINET (Abbé Jean-Baptiste), 1858,Les peintres-verriers de Troyes pendant trois siècles depuis 1375 jusqu'à 1690 "Peintres-verriers. Nomenclature des peintres-verriers de Troyes depuis 1375 jusqu'à 1690". Annales archéologiques, 1858, t. 18, p. 212-224.
Située, comme son nom l'indique, dans un paisible vallon dont le ruisseau se jette dans l'Aber Wrac'h après avoir alimenté des moulins, Notre-Dame du Val, en breton Chapel an Traoñ, dépendait du manoir de Ranorgat : voir la carte de Cassini, de la fin du XVIIIe siècle.
Carte de Cassini, fin XVIIIe s.Carte IGN
La chapelle actuelle dépendait à sa construction de la famille Le Moyne, propriétaire du manoir de Rannorgat, famille qui y a apposé ses armoiries — celles de Tanguy Le Moyne de Rannorgat et de son épouse Leveneze de Kermenou —entre 1537 et 1560 (M. Faujour), et bien qu'on lise la date de 1572 sur la porte à fronton de la longère nord, la construction serait donc plus précoce . À l'intérieur, une statue porte la date de 1527 avec le nom de son donateur, le prêtre François Jézégou.
Elle est d'architecture harmonieuse avec son clocheton à deux chambres de cloches, son fronton Renaissance de la porte latérale et ses crossettes en forme de lion et de chien. Au sud, la fontaine votive alimente un bassin de dévotion, un lavoir et un poull-lin, "trou à rouir le lin".
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Cartel de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
LE CALVAIRE : SON SOUBASSEMENT.
Croquis Y.P. Castel 1980.
Au nord, sous les frondaisons du placître, le calvaire se découvre, avec son soubassement à cinq degrés circulaires en granite.
Les quatre premiers degrés (dont le premier est enterré dans sa moitié nord) sont faits de blocs en portion de cercles, tandis que le dernier est monolithique et chanfreiné. C'est ce bloc qui porte l'inscription [équerre] IO.TOINAS [marteau] : H : CONCI : LAN MIL CINQ CANS XI, affirmant sa datation en 1511.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le soubassement (granite) du calvaire de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le soubassement (granite) du calvaire de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le soubassement (granite) du calvaire de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le soubassement (granite) du calvaire de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Mais cette date (si on en accepte la validité malgré la difficulté de lecture) est-elle celle du socle en granite (une belle performance), ou bien celle de l'ensemble du calvaire avec ses personnages en kersanton ?
Lisons la description d'E. Le Seac'h :
La description d'Emmanuelle Le Seac'h :
"L'introduction du vocabulaire décoratif classique (1511-1542).
"Le rôle pionnier de IO. Toinas et de H. Conci (1511)
"Io. Toinas et H. Conci seraient les sculpteurs du calvaire de la chapelle Notre-Dame du Traon en Plouguerneau dans le diocèse du Léon. L'inscription avec leur nom est figurée sur le socle en granite : [équerre] IO.TOINAS [marteau] : H : CONCI : LAN MIL CINQ CANS XI. (R. Couffon n'a lu en 1988, ou n'a cité, que la date LAN MIL CINQ CANS XI).
Quant aux initiales « IO », doit-on les lire comme l'abréviation de Joseph ou de Jean (Johannes en latin). Les deux noms ne sont pas d'origine bretonne mais peut-être italienne.
Le Dictionnaire des artistes de Castel, Daniel et Thomas les cite comme sculpteur pour Io Toinas, et sculpteur avec un point d'interrogation pour H. Conci.
La tête de croix en kersanton est-elle de la même époque que le socle ? On ne peut le dire. En tous les cas, le registre des sculpteurs introduit le vocabulaire ornemental de la Renaissance dans la sculpture bretonne. Les lettres romaines pour l'inscription signée, le fleuron-boule pour la branche horizontale de la croix du Christ et les moulures simples du nœud et du croisillon qui porte les statues de la Vierge et de Jean sont des éléments significatifs de l'entrée dans ce nouvel art en Basse-Bretagne que l'on peut donc dater d'au moins 1511.
Remarques
1. Aujourd'hui (et sans doute hier), l'inscription est de relevé difficile. Portée en lettres romaines en retrait sur une seule ligne dans un cartouche, elle fait presque le tour de la pierre ronde du degré supérieur du socle. Il s'agit, pour Y.P. Castel, de la première inscription en lettres romaines sur l'ensemble des croix et calvaires du Finistère. Elle semble avoir été relevée pour la première fois par Castel en 1980, et Couffon ne la relève pas dans son Répertoire de 1959 p.310. Louis Le Guennec mentionne la date de 1511.
2. L'inscription datée et signée est portée sur un socle en granite, alors que le travail de sculpture ornementale et figurative est en kersanton. IO Toinas et H. Conci sont-ils seulement les auteurs du socle , comme tailleurs de pierre ?
3. L'équerre et le marteau sont-ils des marques ou emblèmes propres aux tailleurs de pierre (carriers, tacherons) ou bien des marques de sculpteurs ? Et d'ailleurs, la distinction entre ces professions a-t-elle du sens ? On trouve ces outils gravés avec une inscription IA MAZE sur le socle d'une statue de saint Jacques du porche (XVIIe) de l'église Saint-Neventer à Plounéventer. On trouve l'équerre, le marteau et un outil de taille sur une inscription de Telgruc H. GOVRMELEN 1584. L'inscription de la base de la croix du cimetière du Faou datée de 1526, porte une marque ésotérique (de tailleur de pierre?), mais aussi une doloire.
4. E. Le Seac'h pose le problème de l'attribution, et reste prudente : "La tête de croix en kersanton est-elle de la même époque que le socle ? On ne peut le dire." ou bien "IO. Toinas et H. Conci seraient les sculpteurs.." et dans sa description du calvaire proprement dit et des trois larmes de Marie et de Jean elle écrit "Les sculpteurs introduisent un signe distinctif qui permettra plus tard de reconnaître le style de Bastien et Henry Prigent.". Effectivement, dans sa présentation de l'atelier des Prigent (1527-1577), elle fait de ces trois larmes, parmi d'autres traits stylistiques, une vraie marque d'atelier (p. 140 : "le trait commun aux deux Prigent se repère à un détail qui devient leur signe distinctif : trois larmes en relief roulent sur les joues de leurs vierges éplorées au calvaire (et de Jean, qui peut leur être associé), leur Vierge de pitié et leurs Marie-Madeleine".
5. On note que Henri Pérennès date, sans se justifier, ce calvaire de 1550.
Au total, on peut être tenté de voir dans ce calvaire une œuvre composite, avec un soubassement de 1511 par les tailleurs de granite IO Toinas et H. Conci, et un calvaire sculpté en kersanton par l'atelier de Bastien et Henri Prigent , postérieur à 1527 (première date de leur catalogue raisonné) et alors, contemporain des premières réalisations sur la chapelle elle-même.
Seul argument contraire : les blasons du croisillon, aux armes mi-parti d'un couple Olivier Le Moyne/Typhaine Coëtivy, couple attesté selon Potier de Courcy ... en 1503. Cette affirmation est-elle fondée ? Je n'ai pu la confirmer.
LE CALVAIRE PROPREMENT DIT.
Au dessus du soubassement est dressé un fût rond sur une base rectangulaire, en granite, portant des écots rappellant les rapports entre la Croix et l'Arbre. Puis vient la partie en kersanton . D'abord le croisillon avec son nœud évasé, sa moulure, ses écusson à chaque extrémité et ses quatre supports ; deux supports latéraux portant les statues de la Vierge et de saint Jean, une base évasée portant le crucifix et un support demi-circulaire portant la Vierge de Pitié (on lit encore "pietà"). Le Crucifié est porté par une croix à branches rondes et à fleurons-boules aux extrémité, avec un titulus en lettres fleuronnées, le tout étant monolithique.
Cliché Marc Faujour ARMMA
La description d'Emmanuelle Le Seac'h :
"La Crucifixion de Toinas et Conci marque aussi le début de la stylisation de la souffrance des personnages. La Vierge et Jean ont des joues baignées de larmes, trois sur chaque pommette. Les sculpteurs introduisent un signe distinctif qui permettra plus tard de reconnaître le style de Bastien et Henry Prigent. Les seuls détails plus médiévaux sont les pieds du Christ cloués en rotation interne et les lettres fleuronnées du titulus. Le reste du style est sobre. Les yeux des personnages sont en forme de bogue de noix, très ronds et clos. "(E. Le Seac'h p. 20 et 257)
Note : les yeux "en bogue" ou en pruneau fendu se remarquent aussi sur les personnages du calvaire du Grouanec.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le Christ en croix.
"Le Christ, qui a la tête légèrement penchée sur sa droite porte une couronne tressée. Les bras en Y, le visage impassible, il porte une barbe bien peignée en mèches. " (E. Le Seac'h)
On remarque aussi les cheveux décollés des épaules, le pagne noué du côté gauche, les côtes horizontales du thorax, et l'abdomen dilaté projeté en avant. Ou les lettres su titulus, au fût perlé.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
La Vierge et Jean éplorés.
"La Vierge, les bras croisés sur la poitrine, est vêtue d'une longue robe et d'un voile qui recouvre les cheveux et cache ses oreilles et d'une guimpe. Jean, la main droite posée sur la poitrine, penche la tête du côté du Christ. Il est vêtu à la romaine, d'une aube longue et d'un manteau." (E. Le Seac'h)
Les trois larmes sous chaque paupière inférieure sont bien présentes, même si mes clichés, dépendants de l'éclairage du moment, peinent à en rendre compte. Ce sont typiquement les larmes de l'atelier Prigent débutant par un fin filet et se dilatant en une goutte terminale, tels qu'on les retrouve sur leurs calvaires et leurs déplorations.
— Voir d'autres œuvres de Bastien ou Henry Prigent:
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
La Vierge de Pitié... et ses larmes.
"À l'arrière, une pietà à deux personnages est posée sur une console." (E. Le Seac'h)
Comme c'est très majoritairement le cas dans les Vierges de Pitié de Basse-Bretagne (et de la demi-douzaine provenant de l'atelier Prigent), la Viere est assise, enveloppée dans un manteau-voile qui l'englobe dans une forme triangulaire, et elle tient sur ses genoux son fils, au corps presque horizontale, dont elle soutient le thorax de la main droite. Le bras droit du Christ est vertical puis oblique, pendant, tandis que le bras gauche est horizontal et soutenu par la Mère. Le pied droit est tourné de façon peu anatomique, peut-être pour montrer la plaie du clou.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Les trois larmes.
Elles sont bien visibles.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Les deux blasons : Le Moyne de Ranorgat et Coëtivy.
"Les blasons placés aux extrémités du croisillon portent les armes des Le Moyne de Ranvlouc'h avec trois coquilles et un croissant de lune du côté de la Vierge et, du côté de Jean, l'écusson mi-parti des Le Moyne et mi-parti des Kergadiou représenté par trois fasces. Il doit s'agir des commanditaires de l'œuvre." (E. Le Seac'h)
E. Le Seac'h reprennait ici les identifications de blasons proposées par L. Le Guennec repris par Y. P. Castel en 1980, mais Marc Faujour s'est livré à une analyse précise et y voit les armes des Le Moyne de Ranorgat et celles, mi-parti des Le Moyne et des Coëtivy. Malgré l'absence de couleurs, nous reconnaissons dans le blason près de la Vierge les trois coquilles et le croissant ( Le Moyne de Rannorgat : d'argent au croissant accompagné de trois coquilles, à la bordure, le tout de gueules ), et du côté de Jean, l'alliance de ces armes se fait avec un fascé de six pièces, armes des Coëtivy qui sont un fascé d'or et de sable de six pièces.
Au contraire, les armes de Kergadiou (famille qui héritera du titre de seigneur de Ranorgat ) sont d'or à trois fasces ondées, [et non rectilignes] d'azurau franc-canton d’hermines.
"Les armes d'Olivier Le Moyne, sieur de Ranorgat, juveigneur de la maison Trévigny, en Plounéour, et des armes de Tiphaine de Coëtivy, sa compagne en 1503. De ce mariage naquit Marie Le Moine qui porta par mariage la seigneurie de Ranorgat dans la maison de Kergadiou"
Les armes des Le Moyne, des deux côtés, sont affectées d'une bordure, signe de juveigneurie des Le Moyne de Rannorgat par rapport au lignage des Le Moyne de Trévigny.
N.b La forme du nom peut être Le Moyne, Le Moine, ou Le Manac'h.
A la montre de l'évêché de Léon reçue à Lesneven le 25 septembre 1503, est mentionné Olivier le Moyne, seigneur de Rannorgat, représenté par Olivier Kergadiou.
N.B
Olivier Le Moyne, seigneur de Trévigny, capitaine de Lesneven, tint une Montre et revue devant Jehan du Juch le 1 janvier 1378 avec 32 compagnon, dont Yvon Le Moyne, Guillaume Le Moyne, Richard le Moyne, Prigent de Coëtivy. Selon les généalogistes de Geneanet, il était né vers 1340 et il épousa une Tiphaine de Coëtivy (v.1340-1398).
Le blason mi-parti ne correspond pas aux armes de Tanguy Le Moyne et de son épouse Leveneze de Kermenou, couple dont le blason a été identifié par Marc Faujour, porté par un gentilhomme barbu à l'extérieur de la chapelle Notre-Dame du Val (cf. infra).
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
Le calvaire (kersanton, Prigent v.1527) de la chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
DISCUSSION.
Si on cherche à attribuer le calvaire, dans sa partie en kersanton, à un atelier de sculpture sur pierre de Basse-Bretagne, sur les seuls critères stylistiques, la réponse est vite trouvée, c'est un travail de l'atelier des Prigent.
Trois statues de kersanton de l'intérieur de la chapelle du Traon ont été attribuées à cet atelier par E. Le Seac'h dans son catalogue raisonné (p. 331):
-celle de saint They en abbé, dans l'enfeu sud, portant une inscription gothique sur le socle orné d'un calice : V:M:F. IEZEGOU/ P.A FAICT FAIRE ICELLE . YMAGE. LAN. MVCXXVII, soit "Vénérable messire François Jézégou prêtre a fait faire cette image l'an 1527. C'est là la sculpture datée la plus précoce de l'atelier. (H. Pérennès avait lu la date de 1526).
Saint They, kersanton. Atelier Prigent. Cliché E. Le Seac'h CD n° 516.
-celle de sainte Suzanne qui porte les armes pleines des Le Moyne de Rannorgat. Voir les deux clichés de Marc Faujour. Je remarque le bandeau plissé rétro-occipital, si fréquemment repris par cet atelier. [Les Prigent ont sculpté aussi une sainte Suzanne pour le porche sud de Pencran avec l'inscription S. SUSSANNA: ORA. Elle tient aussi un livre et un rouleau de manuscrit, mais elle porte un voile sur la tête, et l'exécution est plus fine : elle date de 1553.]
Chapelle N.-D. du Val, Plouguerneau, sainte Suzanne kersanton polychrome, Atelier Prigent, Cliché Le Seac'h C.D N° 503.
-celle d'un saint moine agenouillé , mur sud.
Saint moine agenouillé, kersanton. Atelier Prigent. Cliché Le Seac'h C.D. 518.
Donc, l'intervention des Prigent en la chapelle Notre-Dame du Val est attestée, avec au moins une date, celle de 1527.
Affirmer que le calvaire est dû aux ciseaux des Prigent, disons entre 1527 et 1550, est cohérent avec cette intervention, mais il faut admettre alors que la date de 1511 du socle ne se rapporte pas au calvaire proprement dit. Enfin, les données héraldiques restent embarrassantes si on valide les affirmations de Pol de Courcy les attribuant à une Tiphaine de Coétivy vivant en 1503 avec un Olivier Le Moyne ; mais ce couple vivait peut-être encore en 1527 ?
COMPLÉMENT : ÉLÉMENTS SCULPTÉS DE LA CHAPELLE.
1. Les 2 crossettes figurées portant des écus.
a) Homme barbu allongé présentant les armes mi-parti Le Moyne de Rannorgat/Kermenou. Angle sud-ouest. Kersanton, après 1537 ?
L'homme porte la tenue à tunique courte et chausses d'un écuyer, et adopte la posture de "chevalier servant", un genou fléchi. Ses cheveux sont mi-longs, sa barbe peignée est soignée. Il ne porte pas (à la différence d'autres exemples similaires) d'épée au côté. La tunique est plissée, à plis épais sur les manches.
Il tient contre sa poitrine un écu mi-parti que Marc Faujour a su attribuer au couple Tanguy Le Moyne de Rannorgat / Leneveze de Kermenou , soit au 1 : d'(argent) au croissant accompagné de trois coquilles, à la bordure, le tout de (gueules) (Le Moyne de Rannorgat) ; au 2 : d'(or) à trois fasces ondées d'(azur) (Kermenou).
"Tanguy, qui avait hérité de son père en octobre 1537, décéda sans hoir vers 1560 (AD Finistère, 34 J 55 ; AD Loire Atlantique, B 1706). Après sa mort, la seigneurie de Rannorgat échut à son cousin Hamon de Kergadiou, fils d’Olivier de Kergadiou et d’Anne Le Moyne de Rannorgat, dont la famille blasonnait d’un fascé-ondé de six pièces ou trois fasces ondées, au franc-canton d’hermines. " (M. Faujour)
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
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b) Lion présentant les armes pleines des Le Moyne de Rannorgat. Angle nord-ouest. Kersanton, XVIe siècle.
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2. Les 2 crossettes du clocheton .
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a. Un chien (sans collier) ou un renard, à queue enroulée à l'arrière. Kersanton.
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
b. Un lion. Kersanton.
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
2. LES PORTES.
a) La porte sud.
Cette porte rectangulaire est surmonté d'un fronton triangulaire portant la date de 1758 et , en dessous, l'inscription Mr.A:L:HAMON C pour "Messire A.L. Hamon, curé" centrée autour d'un calice.
Ce curé est mentionné à Plouguerneau entre 1754 et 1776.
Au sommet du fronton a été scellée en réemploi une tête d'homme barbu (XVIe ou XVIIe), probablement une tête de Christ portant une couronne d'épines.
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
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b) La porte nord.
Du côté nord, H. Pérennès a pu lire sur le linteau de la porte la date de 1572 à côté d'un calice.
Pour Marc Faujour, "le fronton de la porte au nord est daté de 1572, mais paraît avoir été rapporté après coup. "
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
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L'ARC TRIOMPHAL DONNANT L'ACCÈS AU NORD DE L'ENCLOS.
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
a) La date de 1758 (ou 1738) accompagnée d'un calice inscrit dans un blason.
Les auteurs (H. Pérennès) ont lu la date de 1738. Ma lecture rapproche cette inscription de celle de la porte sud, elle aussi accompagnée d'un calice : son commanditaire serait alors également le curé A. L. Hamon.
Si on adopte la leçon de Pérennès, le curé en exercice entre 1734 et 1767 était Hervé Guiavarch.
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b) Un personnage tenant un chapeau à larges bords, dans le mur de l'arc (réemploi). Kersanton, XVIe siècle.
Ce personnage, dont il manque la tête, tient un chapeau évoquant un galero cardinalice avec au moins une houppe visible à l'extrémité d'un cordon (j'ai aussi pensé à la queue d'un lion...). L'identification est difficile ; saint Jérôme ?
J'écarte l'hypothèse d'un saint Jacques, ou d'un saint pèlerin comme saint Roch : leurs couvre-chefs restent sur leurs têtes.
Cette tenue du chapeau sur la hanche droite correspond plus à une posture d'humilié ou de respect qu'à celle d'un saint personnage.
Il pourrait être attribué à l'atelier Prigent.
Faut-il envisager d'y voir le portrait du cardinal Alain IV de Coëtivy (1407-1474), dont les armes, un fascé de six pièces, sont les mêmes que celles associées en alliance à celles des Le Moyne sur le calvaire de Notre-Dame du Val ? Certes, la statue de ce cardinal figure agenouillé au pied du calvaire de la Basilique du Folgoët (Lesneven), à 14 km de là ; mais son chapeau est rejeté derrière sa nuque. La famille Le Moyne (François et son fils François) avait ses armes sur la maîtresse-vitre de Leneven ; Prigent Le Moyne était capitaine de Lesneven, etc..
Le cardinal de Coëtivy , Kersanton, Atelier du Folgoët (vers 1449). Calvaire de la basilique du Folgoët. Photographie lavieb-aile mai 2017.
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
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LES DEUX CLOCHES.
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
a) la cloche la plus ancienne.
Deux médaillons : un crucifix, et un saint évêque.
Inscription sur la faussure : BR---EL A BREST
Suggestion : BRIENS VIEL A BREST ? Elle pourrait dater de la deuxième moitié du XIXe siècle.
"L’accouplement a lieu de mai à août. Le mâle attrape la femelle par le cou grâce à une sorte de pince à l’extrémité de son abdomen. La femelle recourbe son abdomen pour mettre en contact son extrémité avec l’organe copulateur du mâle. Cette posture d’accouplement appelée tandem a la forme d’un cœur et dure en général un quart d'heure.
Le mâle reste lié à la femelle durant la ponte qui a lieu dans l’eau sur une tige de plante aquatique. Le couple descend jusqu'à ce que l'abdomen de la femelle touche l'eau. A raison d'un œuf pondu toutes les 5 secondes, le couple descend doucement le long de la tige et se retrouve au bout de 40 à 50 minutes totalement immergé (parfois jusqu'à 1 m de profondeur). Environ 600 œufs sont insérés dans la tige de la plante choisie, pondus en zig-zag. La ponte terminée, le couple lâche le support et remonte à la surface." DORIS)
La chapelle Notre-Dame du Val en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile.
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SOURCES ET LIENS.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1991,"Essai d'épigraphie appliquée. Dates et inscriptions sur les croix et calvaires du Finistère du XVème au XVIIIème siècle" Ouvrage: Charpiana : mélanges offerts par ses amis à Jacques Charpy.Fédération des Sociétés Savantes de Bretagne, 1991, page 145.
— CASTEL (Yves-Pascal), 1980, "Plouguerneau", atlas n°2104 "Le Traon" Atlas des croix et calvaires du Finistère + 3 clichés
2104. Le Traon, g. k. 4,30 m. 1511 (?). Quatre degrés de plan circulaire, comme le socle: équerre, IO: TOINAS, marteau: H: PONCI: L AN MIL CINQ CANS (sic) XI: Fût rond, écots. Croisillon, moulures, écusson à chaque extrémité: Lemoine et Kergadiou; statues: Vierge, saint Jean, crucifix sur croix à branches rondes, fleurons-boules, titulus en lettres fleuronnées. Vierge de Pitié. [YPC 1980]
Croquis Y.P. Castel 1980. Le relevé du blason mi-parti est erroné.
— COUFFON (René), LE BRAS (Alfred), 1988, « Plouguerneau », Nouveau répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper et de Léon, Quimper.
"CHAPELLE NOTRE-DAME DU TRAON Ou du Val, sur l'ancienne route de Lannilis. Edifice de plan rectangulaire avec chevet plat.
Dans l'enclos, côté nord, calvaire en kersanton : la Vierge et Jean sur le croisillon, Pietà au revers, et, sur le socle, date : " LAN. MIL. CINQ. CANS. XI. " -
— FAUJOUR (Marc) Plouguerneau, chapelle Notre-Dame du Traon,
"Au nord et dans le voisinage immédiat du sanctuaire de Traon se dresse un calvaire dont le socle est formé de cinq degrés circulaires. Le fût bosselé soutient un groupe en kersanton du Christ crucifié avec à l'avers une piéta. Ce calvaire est daté de 1550."
—POTIER DE COURCY (Pol) 1859, « Itinéraire de Saint-Pol à Brest », Revue de Bretagne et de Vendée, 6, p. 111-132.
Présentation générale, voir article sur les vitraux. Citons R. Couffon :
L'édifice, en forme de tau irrégulier, comporte une nef étroite et un choeur séparés par un arc diaphragme en tiers-point ; le choeur communique, au sud, par deux arcades, avec une chapelle en aile et, au nord, par trois arcades, avec une chapelle également en aile. Il date de plusieurs époques : la longère nord paraît remonter en partie au XIIIè siècle [non : la nef, le chœur et l'aile nord sont du milieu XIVe], la belle rose rayonnante du chevet à la fin du XIVè siècle ou au début du XVè siècle, la chapelle sud à la fin du XVè siècle [non : vers 1503. Une pierre, avec fleuron, porte l'inscription : " LAN MIL VcIII. I. NOUEL.] ; la chapelle nord a été reconstruite en 1954 par l'architecte Péron, elle a gardé deux fenêtres flamboyantes. "
L'église renferme 3 statues en kersanton polychrome —celles de la Vierge à l'Enfant du XVe siècle, dite Notre Dame du Grouanec, une Vierge de Pitié du XIVe siècle, et la statue d'un saint Alar en évêque — , et 3 statues en kersanton dépourvues de leur peinture— à l'extérieur saint Matthieu en évangéliste au pignon ouest (1550) et un saint Fiacre (XVe) à la porte aile sud ; et à l'intérieur une Vierge à l'Enfant mutilée—. La fontaine de dévotion de 1604, dite Feunteun ar Gwelleat (Fontaine de la Guérison), abrite une statue en kersanton de la Vierge à l'Enfant du XVIe siècle .
L'église abrite, outre un Christ en croix et deux Anges céroféraires, plusieurs statues anciennes en bois polychrome, celles de saint Roch (XVIe), de saint Antoine ermite (XVe), de saint Sébastien, de sainte Catherine d'Alexandrie (XIVe siècle), et d'une sainte tenant un livre (Barbe ?) du XVe siècle.
LES STATUES EN KERSANTON POLYCHROME.
1. Vierge à l'Enfant dite Notre Dame du Grouanec, kersanton polychrome du XVe siècle. Chapelle nord, entre les baies 1 et 3.
Cette Vierge à l'Enfant, couronnée, est assise comme les Vierges romanes en majesté ou Sedes Sapientae — trône de sagesse—, mais elle n'a pas le hieratisme et la frontalité de ces dernières. Au contraire, elle est souriante, et hanchée, le haut du corps étant décalé vers la gauche pour équilibrer le volume de l'Enfant-Jésus.
Elle porte, sous un manteau-voile bleu ouvert, sans fermail, à revers rouge et à ourlet doré, une robe blanche (jadis dorée) très ajustée sur le buste, au dessus d'une large ceinture à boucle carrée à aiguillon, et dont le passant tombe verticalement et se dissimule sous le pan gauche du manteau. Entre la gorge et le bord de la robe, un ensemble doré, à rangs de perles et godrons, peut correspondre à un collier, ou à la broderie de la robe, ou au haut d'une chemise. Le manteau tombe en larges plis sous les genoux, en deux groupes symétriques.
Ses chaussures ont une extrémité pointue, selon la mode du XVe siècle, les pieds sont parallèles.
Le visage est un étroit ovale, les sourcils sont épilés, les yeux larges, le nez fort et long, la bouche étroite, le menton petit et rond. Le regard, pensif, est dirigé vers l'avant, à peine vers la droite et le bas. La Vierge ne fixe pas l'Enfant, mais chacun regarde vers les fidèles. Sous la couronne fleurdelysé, les cheveux bruns sont bouclés puis disparaissent sous le voile en arrière des épaules.
La Vierge tient en main gauche la sphère du Monde [ou une pomme, selon Le Seac'h], qu'elle éloigne en la montrant à son Fils.
L'Enfant est debout, les pieds posés sur le genou droit de sa mère. Sa tête est très ronde, à la Tintin, mais avec des cheveux aux boucles fournies repoussées vers l'arrière, très en accord avec les caractères stylistiques du XVe siècle. Il porte une tunique verte longue, à encolure en V.
Surtout, il tient devant lui un livre ouvert : les deux pouces maintiennent les pages.
J'ai étudié ce thème de l'Enfant-Jésus au livre à propos de Notre-Dame-du-Loc de Saint-Avé une statue en calcaire du dernier quart du XVe siècle. J' explore dans cet article, auquel je renvoie, les données iconographiques, les seuls exemples en Bretagne étant ceux de Saint-Avé, du Grouanec et de la chapelle Saint-Brieuc-de-Plonivel à Plobannalec, les deux dernières étant assises, mais celle de Plobannalec étant en bois, et du XVIe siècle. (*)
En Belgique, c'est le sculpteur sur bois Jan Borman II qui a le mieux illustré ce thème, qui est attesté aussi en peinture.
Enfin, j'en indique les fondements théologiques, l'Enfant suivant dans les Écritures le récit de la Rédemption dont il est le vecteur.
C'est dire l'intérêt exceptionnel de ce groupe sculpté, que le thème inciterait à dater de la fin du XVe siècle. Une restauration a-t-elle pu en préciser les pigments des couches initiales?
(*) J'ajoute un autre exemple, tout proche du Grouanec, mais plus tardif :
Emmanuelle Le Seac'h qui l'a décrite dans son ouvrage Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne p. 103, assure qu'elle est un héritage de l'Atelier du Folgoët (Premier atelier du Folgoët 1423-1468; second atelier du Folgoët 1458-1509) : elle rapproche les mèches striées des cheveux ondulants de celles de la sainte Marguerite du Folgoët et de la Vierge à l'Enfant [du porche sud] de La Martyre, elle-même rapprochée p.71 de celle de la Sainte-Catherine du porche sud de la cathédrale de Quimper.
On en trouve la réplique en bas-relief sculpté dans le bois de la porte d'entrée du porche.
N.D.-du-Grouanec. Porte d'entrée. Cliché lavieb-aile.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
2. Vierge de Pitié . Kersanton polychrome du XIVe siècle, à l'angle nord-est de la nef.
Sur quels critères cette statue est-elle datée du XIVe, période peu représentée dans la statuaire de Basse-Bretagne en kersanton ?
La Vierge est assise, le corps de son Fils est retenu par sa main droite sur le bassin et la main gauche sous le flanc gauche dans une orientation du corps tête à notre droite qui est minoritaire en Bretagne.
Les axes du corps du Christ sont brisés, mais selon un schéma original et émouvant, et on remarque notamment l'angulation de la tête , avec la joue appuyée sur l'épaule gauche.
Les plaies et le saignement de la tête, des mains et pied, et du flanc, sont bien visibles.
Dessin sur cliché lavieb-aile
Son voile forme au dessus de sa tête un double repli (un trait stylistique d'E. Le Seac'h attribue aux Prigent actifs en 1527-1577). Les manches du manteau reviennent en large revers sur le coude. La robe a un col rond. Les jambes, écartées pour soutenir le corps, sont couvertes du manteau bleu et de la robe jaune, mais ces plis laissent voir deux chaussures noires, à bouts fins.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
3. Statue de saint Alar en évêque, kersanton polychrome du XVe siècle. Chapelle sud, à gauche de la baie 2.
Le saint patron des chevaux, et qui est en Léon une forme locale de saint Éloi, est identifié par le marteau de maréchal-ferrand qui'il tient en main gauche, et par le fer à cheval et la tenaille de son socle. Il est présenté en évêque, mitré (avec les fanons) , tenant la crosse, portant la mitre, la chape et les gants à glands de ce titre tandis qu'il trace une bénédiction. Il ne lui manque que l'anneau et les bagues. Sous la chape à fermail, il porte un surplis frangé et une cotte laissant apercevoir une solide chaussure à bout rond.
Il est daté par M. Castel du XVe siècle.
Le socle porte un blason martelé "à trois coquilles" selon Pérennès.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
LES STATUES EN KERSANTON, NON PEINTES.
1. Statue de saint Matthieu évangéliste, niche du pignon ouest. Atelier Prigent v.1527-1577.
Le saint est identifiable comme évangéliste car il écrit (bien que la main droite et le stylet soient brisés) sur un phylactère, et par mi les quatre évangélistes, il est identifié comme étant Matthieu par son attribut, l'ange du Tétramorphe. Cet ange lui présente l'encrier.
On le comparera à l'évangéliste du porche de Guipavas, exécuté par l'atelier Prigent en 1563, ou à celui (assis devant son pupitre) de l'entrée du porche de Landivisiau dû au même atelier entre 1554 et 1559.
E. Le Seac'h ne l'inclut pas dans son catalogue raisonné des Prigent (1527-1577), mais l'atelier a réalisé 3 statues pour la chapelle N.-D. du Traon à Landerneau, dont l'une porte la date de 1527.
Le saint a un large front bombé au dessus d'arcades aux sourcils hauts et aux yeux aux paupières ourlées. Les moustaches débutent à la pointe des narines, la barbe est peignée et bifide, les cheveux longs sont méchés en torsade. Sous le manteau, juste posé sur les épaules, et aux manches larges, la robe est fermé sous le cou par un gousset en8 dont le bouton n'est pas détaillé. Le phylactère tombe verticalement.
L'ange porte une tunique longue à col baillant en avant, il a un genou à terre ; il tient l'encrier rond des deux mains, il l'élève vers la main droite de l'évangéliste.
— Voir d'autres œuvres de Bastien ou Henry Prigent:
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
2. La statue de saint Fiacre au dessus de la porte de la chapelle sud. Kersanton, fin XVe-début XVIe.
La chapelle sud ou chapelle Saint-Fiacre a été ajoutée à l'église vers 1503 alors que les Boutteville, seigneurs de Coëtquénan, faisaient édifier le porche sud.
Le saint est représenté selon les codes, en moine portant l'habit, le camail à capuchon, la tête coiffée d'un bonnet couvrant les oreilles (un peu comme celui de saint Antoine). D'ailleurs, si on désigne sous le nom de scapulaire le camail et sa cuculle prolongés en avant du corps par le long pan vertical, nous retrouvons la tenue traditionnelle de saint Antoine, et seul la bêche remplaçant le tau, et l'absence de chapelet, distingue les deux types de statues.
Les chaussures semblent à extrémité pointues.
Il tient en main droite la bêche à lame ferrée.
La console porte un blason mi parti dont les armes n'ont pas été attribuées. Je pense reconnaître à notre gauche des hermines, et à notre droite un réseau en losange, ou frétté. Ces armes ne correspondent ni à celles des Boutteville et de leurs alliances, ni à celles de Le Nobletz, ni à celles des familles dont les membres étaient présents lors de la montre de Léon en 1481 ou en 1503. H. Pérennes y voyait "un lion martelé". A tout hasard, je signale que les armes des Montjean sont d'or fretté de gueules, et que la mère de Claude de Goualine, seigneur de Coëquenan était Claude de Montjean (ca 1485-1525)
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
3. La Vierge à l'Enfant occupant une niche à l'entrée de la sacristie. Kersanton, fin XVe-début XVIe.
"la Vierge à l'Enfant de l’église du Grouanec, dans une niche basse qui devait servir autrefois de bénitier… Jusqu’à la restauration de cette église, la statue se trouvait à Kerriec, sur le socle de la croix n° 62. Elle s’encastre dans l’évidement d’un chapiteau circulaire à moulures, et elle porte 2 écus : d’un côté, un calice et les lettres « N D » ; de l’autre, les instruments de la Passion. C’était le verso d’un Christ en croix, dont il ne reste qu’un morceau de fût circulaire et un pied de crucifié… L’ensemble provient donc d’un calvaire, et probablement du calvaire même de Kerriec dont le soubassement intact reste, de nos jours, si impressionnant…"
Effectivement, on reconnaît le socle évasé de l'ancien calvaire, et le blason où sont sculptés autour d'une colonne centrale avec ses liens des fouets et des clous.
La Vierge a perdu sa tête et son cou, mais elle conserve sa silhouette déhanchée, son buste fin, sa ceinture à boucle et aiguillon dont le passant est long et tombe verticalement, sa robe aux plis tubulaires sous la ceinture, et le manteau entrouvert. L'Enfant, debout sur le bras gauche, nous regarde avec sa tête ronde. Les points communs avec N.D. de Grouanec sont nombreux. Que tient Jésus ? Un livre ouvert?
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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4. La Vierge à l'Enfant (kersanton, XVIe siècle) de la fontaine de la Guérison ou Feunteun ar Gwelleat de 1604.
Cette Vierge est plus tardive que les précédentes, elle présente un objet (fruit?) à l'Enfant qui, assis sur son bras gauche et vêtu d'une tunique longue, tient la sphère du Monde tandis qu'il pose la main droite sur le sein maternel en aggripant le bord du manteau. L'Enfant a perdu tête et épaules.
La Vierge porte une couronne à fleuron, son visage ovale est fin, souriant, ses cheveux nattés retombent devant ses épaules. Le pan gauche du manteau fait retour sous le poignet droit, la robe est serrée par une ceinture. Les chaussures sont rondes. Un blason, entre les peids, a été martelé.
Et si ce travail était dû à l'atelier Prigent ? Comparez avec la Vierge à l'Enfant du Folgoët :
Vierge de l'Apocalypse (Bastien Prigent) kersanton, XVIe, tympan du portail sud de la Collégiale du Folgoët, photographie lavieb-aile avril 2017.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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LES STATUES EN BOIS POLYCHROME.
1.Sainte Catherine d'Alexandrie ( Bois polychrome, XIVe siècle), chapelle sud.
Cette remarquable statue montre la sainte couronnée, vêtue d'un manteau bleu dont le pan gauche fait retour vers la troussière du poignet droit, et d'une robe dorée. Elle a perdu l'épée qu'elle tenait en main droite, l'un de ses principaux attributs qui fait allusion à sa mort par décollation, mais elle tient la roue de son supplice en main gauche. On remarque la rondeur presque parfaite de son visage.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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2. Une sainte tenant un livre (sainte Barbe ?), bois polychrome, XVe siècle. Angle sud-est de la chapelle sud.
Cette sainte portait dans la paume de la main droite un objet, a priori vertical, et tient dans la main gauche, par l'intermédiaire d'un linge, un livre.
Mon intuition est d'y voir sainte Barbe, tant est fréquente sa représentation à côté de sainte Catherine et de sainte Marguerite. Si c'est elle, elle tenait son principal attribut, la tour à trois fenêtres.
Mais mon hypothèse rencontre divers obstacles. Au lieu de l'élégante coiffure, agrémentée souvent d'un turban pour souligner son origine orientale (Barbe = Barbara), son visage est ici strictement entouré d'un bonnet qui dissimule le moindre cheveu, sous un voile pieux. Elle n'a pas non plus la tenue princière, raffinée dans son élégance, de Barbe.
Sainte Marie-Madeleine partage les mêmes caractéristiques dans son iciongraphie : longs cheveux dénoués soulignant la liberté de ses mœurs avant sa conversion, turban parfois, robe ajustée au corps, bijoux. Son attribut est le flacon d'armoates ou de parfum. J'écarte cette hypothèse.
Elle fait penser à une moniale dévouée, avec sa croix dépouillée sur la poitrine.
Serait-ce sainte Marthe, soeur sage, vouée aux taches domestiques, de Marie-Madeleine ? Son culte est présent dans nos régions, mais est rare.
Sainte Agnès et son cierge ? Je n'y crois pas plus.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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2'. La console en kersanton avec traces de polychromie ocre, portant cette statue de sainte au livre.
C'est une magnifique composition, de hauteur exceptionnelle, de feuilles découpées aux dos nervurés, parmi lesquelles on découvre deux escargots broutant les bords. Quelle en est la datation? XVe siècle, par l'atelier du Folgoët?
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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3. Statue de saint Antoine ermite (XVe), bois polychrome, XVe siècle, mur nord de la chapelle nord.
Lui, il est impossible de ne pas l'identifier, même s'il a perdu sa canne en tau et même si le petit cochon muni d'une clochette manque : son chapelet à grains, son livre (celui de sa règle monastique), sa barbe d'ermite et surtout sa tenue monastique (avec scapulaire et cuculle) et son bonnet couvrant les oreilles suffisent à faire reconnaître l'ermite fondateurs de l'Ordre hospitaliers des Antonins.
On sait qu'il était invoqué contre diverses maladies contagieuses ou épidémiques, en particulier contre l'ergotisme, également nommé " mal des ardents " ou " feu saint Antoine ", maladie provenant de la consommation de seigle contaminé par un champignon parasite.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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4. Saint Roch, son ange et Roquet son chien (Bois polychrome, XVIe).
Autre saint thaumaturge, saint Roch est invoqué, comme saint Sébastien, contre la "peste" ou toute maladie épidémique apparentée. Il était né à Montpellier en 1350, en pleine Guerre de Cent Ans et épidémie de Peste Noire, et après avoir rejoint le Tiers-Ordre franciscain, il partit en pèlerinage à Rome, et y soignit les pestiférés, avant d'être atteint lui-même de la peste. Soucieux de ne pas contaminer ses semblables, il se rendit jusqu’à un bois, pensant y mourir. À cet endroit, une source jaillit et un chien vint alors lui apporter chaque jour un pain, sans doute envoyé près de lui par son maître. On nomma ce chien Roquet.
L'iconographie est bien fixée : le saint porte la tenue des pèlerins (large chapeau, pèlerine, bâton de marche, et ici, guêtres) et il montre le bubon pesteux de sa cuisse. Ici, c'est un ange qui vient le soigner en aposant sa main sur la plaie. Roquet , son pain dans la gueule, bondit vers lui.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
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5. Statue de saint Sébastien, sacristie.
Le saint martyr qui a été transpercé des flèches de ses archers, et qu'on invoque contre le fléau de la peste, est représenté nu, portant seulement un pagne, attaché à un arbre vert, les mains dans le dos ; les flèches sont perdues mais on voit encore les orifices là où elles étaient fichées.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
6. Deux anges céroféraires (porteurs de cierge), bois polychrome, chœur.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les statues de l'église du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
SOURCES ET LIENS.
—CASTEL (Yves-Pascal ): Plouguerneau . L'enclos du Grouanec . Non consulté.
—CASTEL (Marcel), s.d, L'enclos paroissial du Grouaneg-Eglise Notre-Dame. Dépliant de présentation.
— COUFFON (René), LE BRAS (Alfred), 1988, « Plouguerneau », Nouveau répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper.
Si la nef, le chœur (séparé de la nef par un arc diaphane) et l'aile nord de l'église paroissiale du Grouanec datent, selon P.F. Brouc'h, du milieu du XIVe siècle, le chœur fut agrandie au début du XVIe siècle (vers 1503) au sud par une chapelle dédiée à saint Fiacre et par le porche sud, portant les armes des seigneurs de Boutteville.
Dans cette chapelle, Jehan de Nobletz seigneur de Kerodern avait fait établir, par contrat du 15 février 1514, passé devant la cour de Lesneven avec Yves Héliou, prêtre gouverneur du Grouanec, un autel et, selon le contrat, deux tombes en plus des trois dont sa famille jouissait ailleurs dans l'église, moyennant la somme de douze sous monnaies par an, à payer au jour de la Chandeleur. Le contrat lui assurait aussi d'un droit d'escabeau (une sorte de stalle) et de prie-dieu. Les armoiries de son couple étaient visibles sur le vitrail.
(*)Jean Le Nobletz, fils d'Alain de Nobletz, ecuyer et de Typhaine de Kérouzéré, épousa Isabeau de Kerourfil. Ses armes étaient d'argent, à deux fasces de sable, au canton de gueules chargé d'une quintefeuille d'argent , celles des Kerourfild'azur à la fasce d'argent accompagné de six besans du même, trois en chef rangés, et trois en pointe posés 2 et 1.
Le bénitier de kersanton de la porte ouest est accompagné d'un écu au calice accompagné des lettres gothiques J et M, initiales de Jean Madéran, prêtre de Plouguerneau qui desservait Le Grouanec en 1527.
Si la charpente actuelle est contemporaine de cette extension, ou de ces contrats de 1514, ou de ce bénitier de 1527, et si donc elle n'a pas été restaurée ou reconstruite ensuite, les deux ensembles de pièces sculptées des sablières datent de ce début du XVIe siècle.
Mais les deux ensembles sont-ils contemporains? Du côté est, il s'agit de motifs séparés, avec quatre feuillages et quatre masques anthropomorphes espacés et correspondant à la retombée des liernes, alors que du côté ouest il s'agit d'une frise continue de masques et de tiges feuillues dans laquelle s'insère joyeusement une saynète festive et satirique.
Je n'ai pas procédé à l'inventaire des abouts de poinçons, qu'on voit sur les clichés des entraits, avec leurs motifs végétaux, et avec un masque masculin.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
I. LE CÔTÉ DROIT EN FRISE DE MASQUES ET SAYNETES RÉUNIS PAR UN DÉCOR CONTINU.
La première pièce, avant l'entrait.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Masque de femme (?) à longs cheveux nattés en spirale. La main droite saisit l'extrémité en volute de la tige de feuillage. Le bras gauche se transforme en un serpent à corps végétalisé.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Petit homme vert à barbe bifide, aux jambes écartées, tenant les extrémités de tiges.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Masque crachant.
On nomme aussi ce motif, très répandu sur les sablières, "masque régurgitant", ou "masque feuillu" : il libère par sa bouche des tiges qui courent en rinceaux et d'épanouissent en volutes et feuilles.
Ici, le masque libère vers sa droite deux autres éléments : un serpent, et un ruban crénelé.
Si le thème de ces sablières (et de bien d'autres) est lié à la croissance de la nature, à son potentiel printanier (comme les "reverdies" de la poésie médiévale), à la pulsion vitale et ses cycles, elle tient à illustrer celle-ci sous le mode de la métamorphose des formes, et de l'unité des ordres, le végétal, l'animal et l'humain.
Ces deux principes (pulsion vitale et métamorphose) vont se décliner tout au long de ces sablières, mais ce masque crachant une tige (végétal), un serpent (animal) et un ruban (artefact humain) en est un condensé saisissant.
L'homme est coiffé d'un vague chapeau. Son visage est bilobé, avec un étage supérieur large et un étage inférieur (menton et mandibule) formant une petite boule. On retrouve aussi cette morphologie bilobée, presque constante au Grouanec, dans d'autres sablières plus tardives.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Le couple qui trinque, et la truie qui tire la bonde.
Ces deux scènes très connues sont considérées comme des dénonciations des vices, et notamment de l'ivrognerie (M. de Kerdanet, Vie des Saints, 1837). Ainsi, selon Tehy, reprenant les auteurs de référence, "leurs motifs sculptés déclinent toute la palette des vices dénoncés par la religion."
Mais on peut objecter que les personnages truculents qui précèdent ont comme objet de répondre au goût des contemporains du XVe et XVIe siècle pour les drôleries qui abondent dans les marges des livres d'heures et autres manuscrits pieux, qui sont aussi éxigées sur les miséricordes et appuie-mains des stalles des chanoines, et qui sont très répandus aussi sur les sablières (à l'intérieur) ou les crossettes (à l'extérieur), ou sur les jubés, bref dans tous ces emplacements marginaux, mais parfaitement visibles, des églises. Qu'ils reprennent la tradition des modillons romans, et qu'ils témoignent d'une liberté de ton, décompléxée et joyeuse, se gardant de toute attitude de dénonciation, et de toute préoccupation de séparation cloisonnée entre le sacré qui prévaut dans le chœur et le trivial qui anime les autres lieux.
Ce n'est que vers le début du XVIIe siècle, un siècle plus tard, que Michel Le Nobletz —d'une famille qui a ses prééminences précisément dans cette chapelle Saint-Fiacre— adoptera une attitude moralisatrice virulente et fera, sur ses tableaux de cathéchèse, la dénonciation des vices, avant d'être suivi par Julien Le Maunoir.
Rien, dans les deux motifs qui se suivent, ne témoigne d'une condamnation morale, ou d'une stigmatisation des passions, ou d'un prosélytique appel à une conversion des mœurs mais plutôt d'une satire en clin d'œil, plus proche de Rabelais que de Julien Maunoir. Et peut-être d'avantage encore de références à une culture populaire des proverbes et dictons, des fabliaux et fables qui nous échappent. D'autant qu'il pourrait s'agir non d'un bagage culturel "breton" mais de celui de huchiers venus de Flandres, tant l'ensemble des thématiques se retrouve hors de notre province.
On voit d'abord un couple levant leur coupe pour trinquer. L'homme, moustachu, tient l'extrémité de la tige qui naît (cf. la scène précédente), de la bouche du masque crachant. Y.P. Castel y avait vu "une volaille".
La femme, identifiée par un col frisée, tient l'extrémité de la queue de la truie. Certes cet homme empoigne la tige, et la femme tient la queue de la truie, mais il n'y a peut être là qu'une volonté de réunir les motifs ensemble, de les lier par des conjonctions d'une narration graphique.
La scène est festive. Les personnages qui tiennent une cruche, un gobelet ou un tonnelet s'observent (S. Duhem p.178) sur une soixantaine de sablières en Bretagne. Sophie Duhem qualifie les deux scènes (buveurs + truie) du Grouanec de "saynète amusante" et y voit un "exemple de la popularité de l'illustration des proverbes et dictons", particulièrement en vogue aussi aux Pays-Bas au XVe siècle.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
La truie et le tonneau.
Puis vient le tableau, fameux, de la truie qui tire la bonde du tonneau. Là encore, aucune condamnation de l'intempérance.
Le thème est assez stéréotypé, et on en trouve des exemples sur une sablière de l'église Saint-Thomas de Landerneau, et sur une sablière de l'église de Bodilis. Dans les deux cas, une femme frappe une truie de sa quenouille (*) et la tire par la queue alors que l'animal retire la bonde d'un tonneau.
(*) On connait la sculpture de la Truie qui file sur une maison de Rouen, qui se retrouve sur une miséricorde de l'église Saint-Nicolas d'Amsterdam. Ailleurs, elle joue de la cornemuse, ou de l'orgue (Beauvais) elle allaite ses petits (Saint-Houardon de Landerneau), elle pose en philosophe (cathédrale de Rouen), elle enfile des culottes,
Sablière du bas-coté nord de la nef, première travée, église Saint-Thomas de Landerneau. Photographie lavieb-aile.Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
Le thème de la truie qui tire la bonde est figuré sur le tableau de Pieter Bruegel L'Ancien "Les Proverbes Flamands" (La Huque Bleue) datant de 1559. Mais on considère qu'il s'agit ici d'une dénonciation de la négligence (et non de l'ivrognerie). La négligence en cause est sans doute de ne pas surveiller correctement l'animal domestique. Pour Maeterlink, la truie pourrait confondre la bonde avec "un os à moelle".
On ne peut nier pourtant que le cochon est assimilé par le peintre à l'ivrognerie, car dans son tableau de 1557, Un ivrogne est poussé dans une porcherie. Mais la sablière du Grouanec est antérieure à ce tableau de 50 ans, et fait supposer que le proverbe circulait déjà dans le Léon (peut-être introduit par les liens entre Bretagne et Flandre dans le commerce alors florissant du drap et du vin).
Bien que Bruegel ne montre pas de lien entre sa truie et des ivrognes, une image populaire gravée à Gand au XVIIIe siècle, mais reprenant une tradition ancienne, montre le lien entre la Négligence, et l'Ivrognerie :
Louis Maeterlink 1910, Le genre satirique, fantastique et licencieux dans la sculpture flamande et wallonne;
Note : on remarquera la difficulté d'interprétation des images. Alors que Sophie Duhem mentionne le proverbe flamand "la truie se sauve avec le robinet" et le tableau de Bruegel, elle décrit la scène ainsi : la truie "a un bouchon dans la gueule qu'elle tente d'enfoncer dans le trou ouvert du tonneau" (illustration 102) ... alors que cela décrirait mieux la scène de Landerneau. Elle ajoute dans le texte "elle s'éloigne du tonneau d'où s'écoule du vin".
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
La pièce suivante, après l'entrait : six masques réunis par des rubans marqués de traits (I) et feuillagés.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Un masque à corps d'oiseau.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Un masque à la chevelure nattée, crachant des tiges feuillagées.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Un masque entre deux volutes de rubans ponctués et feuillagés, liées entre elles.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Un masque moustachu, entre deux rubans feuillagés.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Une tête de bœuf, vertes, à longues cornes et longues oreilles , crachant deux rubans feuillagés.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Un masque moustachu, entre deux rubans feuillagés.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
II. LE COTÉ GAUCHE, PAR MASQUES ET FEUILLAGES SÉPARÉS.
Les huit éléments sculptés en moyen relief sont encastrés sur les deux pièces de bois au lieu d'être taillés à leur dépens. Ils correspondent soit aux trois entraits (poutres transversales), soit à la tombée des liernes ou nervures de la charpente lambrissée. Leur partie haute est élargie et aplatie en console.
Ce procédé, qu'on peut trouver plus fruste, et plus facile à mettre en place, se retrouve à Saint-Avé dans la nef (1494) de la chapelle de Notre-Dame-du-Loc, mais seulement pour certaines pièces servant aussi de culot aux liernes, mais associées à des éléments sculptés en relief sur la pièce de bois, et à des inscriptions gravées, dans un complexe dû à des huchiers chevronnés. Je ne dispose pas d'autre exemple.
À Chatelaudren (fin XVe-début XVIe) mais aussi à Trémalo (v.1550) et à Kergloff, à l'Hôpital-Camfrout , à Plonévez-du-Faou ou à Brénnilis (moderne), les éléments (des animaux, des masques et des saynettes) sont certes espacés, et correspondent aux liernes, mais sont sculptés au dépens de la pièce de sablière.
Cette liste n'est pas exhaustive, mais ce type de sablières à motifs séparés rythmés par les liernes est bien plus rare que le type à frise continue de motifs réunis par des décors.
Il est difficile d'affirmer que ce type de sablières correspond à un créneau de datation donné (mais les datations des pièces de Saint-Avé et de Chatelaudren sont cohérentes avec une datation vers 1503 des pièces de cette chapelle), et plus diffcile encore de l'attribuer à une zone géographique de Bretagne.
Et on ne peut en déduire que ces sablières de la façade orientale ont été réalisées avant celles du côté occidentale.
Je n'ai photographié que les masques, délaissant les 4 ensembles de feuillage.
Un masque d'homme bouche ouverte (tirant la langue ?). Ou une femme portant une coiffe?
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Une femme (coiffe) bouche ouverte.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Masque d'un clerc (tonsure), bouche ouverte.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Un homme, tirant la langue.
Les sablières de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
III. L'ENTRAIT SCULPTÉ ET SES ENGOULANTS.
Un entrait, assorti d'un poinçon (pièce de bois verticale) traverse la chapelle sud d'est en ouest. Il est sculpté, avec ses deux engoulants, et son bouquet de feuillages central libérant des tiges qui produisent soit des feuilles d'acanthes et des épillets (ou feuilles de vignes et grappes) , soit des roses.
L'entrait de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
L'entrait de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
L'entrait de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
L'entrait de la chapelle sud de l'église du Grouanec. Cliché lavieb-aile 2024.
Sur le milieu de la poutre appuyée au chœur, des armoiries montre, difficilement, leurs meubles, trois fusées, ou trois quenouilles, ou des pommes de pins...
SOURCES ET LIENS.
—CASTEL (Yves-Pascal ): Plouguerneau . L'enclos du Grouanec . Non consulté.
—CASTEL (Marcel), s.d, L'enclos paroissial du Grouaneg-Eglise Notre-Dame. Dépliant de présentation.
— COUFFON (René), LE BRAS (Alfred), 1988, « Plouguerneau », Nouveau répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper
"Dans la chapelle sud, un entrait engoulé et des sablières sculptées représentant les vices, en particulier l'ivrognerie."
— DUHEM (Sophie), 1998, Les sablières sculptées en Bretagne : images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne, XVe-XVIIe s, P.U.R éditions, pages 178 et 179, 201 et 331
— MAETERLINK (L), 1910, Le genre satirique, fantastique et licencieux dans la sculpture flamande et wallonne; les miséricordes de stalles (art et folklore)
"Le 16 février 1514, devant la cour de Lesneven, Jehan Le Nobletz, seigneur de Kerodern et Yves Héliou, prêtre et gouverneur de la chapelle du Grouanec, font un contrat à perpétuité : "le gouverneur octroie à Le Nobletz la place voulue pour cinq tombes, dont deux dans la chapelle Saint-Fiacre. Sur trois de ces tombes plates il aura un escabeau et un prie Dieu. Entre l'autel et la chapelle Saint-Fiacre il pourra construire un autel et une fenêtre avec faculté d'y introduire ses armoiries. Le Nobletz paiera en retour au gouverneur et à ses successeurs douze sous de monnaie par an au jour de la Chandeleur".
—POTIER DE COURCY (Pol) 1859, « Itinéraire de Saint-Pol à Brest », Revue de Bretagne et de Vendée, 6,
Les 13 vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Les fragments du milieu du XVe siècle (baies 3 et 9). Les 11 vitraux des Litanies de la Vierge de Max Ingrand en 1954-56.
L'enclos du Grouanec comprend l'église et son ossuaire d'attache, sa fontaine de dévotion, et son enclos à porte triomphale, et un calvaire de 1761 tandis que l'ancien calvaire a été déplacé au centre du cimetière.
La nef, le chœur (séparé de la nef par un arc diaphane) et l'aile nord de l'église paroissiale du Grouanec datent, selon P.F. Brouc'h, du milieu du XIVe siècle, près du manoir des Coatquénan. La statue en kersanton de Notre-Dame-du- Grouanec (une Vierge à l'Enfant assise) date de cette époque.
Les baies gothiques rayonnant/flamboyant (avant 1500) reçoivent des verrières au milieu du XVe siècle (maîtresse-vitre avec rosace).
Au début du XVIe siècle (v. 1503), le chœur fut agrandie au sud par une chapelle dédiée à saint Fiacre (où la famille Le Nobletz de Kerodern avait ses prééminences), et le porche fut élevé par la famille de Boutteville, nouveaux seigneurs de Coatquénan, qui y placent leurs armes. De cette époque datent les statues de saint Antoine, de saint Roch, et le calvaire de 1505 —déplacé au centre du cimetière— .
Puis, durant "l'âge d'or" des Enclos paroissiaux du Léon, furent ajoutés l'ossuaire d'attache, le maître-autel, la fontaine de dévotion (1604)
Carte IGN annotée
Carte de Cassini, annotée fin XVIIIe s.
1°) Les fragments anciens (d'après Gatouillat et Hérold).
L'édifice médiéval a été augmenté en 1503 de la chapelle bâtie au sud du chœur. Il était autrefois pourvu de plusieurs verrières dont l'entretien est attesté par de nombreuses archives : en 1689-1690, elles furent "accommodées" par Le Bodelec, maître-verrier de Brest. L'édifice conservait au XIXe siècle une partie de ses vitraux anciens, décrits par Pol Potier de Courcy en 1859 : les 24 ajours de la grande rose de la maîtresse-vitre avaient été ornés d'un concert céleste et d'anges munis de phylactère, avec les armes des familles Le Nobletz, de Kergadiou et de Kerourfil.
Intégrés en 1956 dans une nouvelle composition en baie 3, les rares fragments qui en subsistent permettent de dater cette composition du milieu du XVe siècle.
Dans son état originel, la maîtresse-vitre figurait un Calvaire avec deux donateurs, les bisaïeux du missionnaire Michel Le Nobletz (1577-1652). Jean Le Nobletz sieur de Kerodern en cotte armoriée devant la Vierge, et sa femme Ysabeau de Kerourfil devant saint Jean. L'œuvre, déjà fragmentaire en 1900, disparut etotalement ensuite , "jetée au fond de l'ossuaire quand on eut un vitrail neuf à placer", selon Le Guennec 1987.
On les comparera donc aux autres baies bretonnes du XVe siècle encore existantes :
Elles ont été réalisées en 1956 sur le thème des Litanies de la Vierge, puisque l'église est placée sous le vocable de Notre-Dame..
On trouve dans le sens horaire à partir de l'angle nord-ouest :
-L'Etoile du Matin (baie 13)
-La Reine des Vierges (baie 11)
-La Mère du Sauveur (baie 5)
-La Maison d'or (baie 1)
-La Reine des Apôtres ; la Reine des Anges (baie 0 ou maîtresse-vitre)
-La Porte du Ciel (baie 2)
-Le Trône de la Sagesse (baie 4)
-La Tour de David (baie 6)
-Le Miroir de Justice (baie 6)
-Le Vase spirituel (baie 102 au dessus de la porte ouest)
-Max Ingrand a aussi réalisé pour un oculus (baie 10) une composition colorée pour les 3 mouchettes en triskell .
Max Ingrand (1908-1969) de son vrai nom Maurice Max-Ingrand , est un maître-verrier et décorateur français, l'un des plus réputés de l'après-guerre. Après une enfance passée à Chartres, il a suivi l'enseignement de l'École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris où il eut pour maîtres Jacques Gruber, l'un des fondateurs de l'Ecole de Nancy, et Charles Lemaresquier. Il a réalisé les vitraux de plus de soixante sanctuaires français, et en particulier en Bretagne ceux de la cathédrale de Saint-Malo, de la basilique de Hennebont, de l'église Notre-Dame de Lamballe et de celle Dinard, de l'église Saint-Germain, de l'église de Toussaints et de la chapelle du séminaire Saint-Yves de Rennes, de l'église Saint-Melaine de Morlaix.
PLAN ET NUMÉROTATION selon les règles du Corpus vitrearum :
I. LES BAIES ANCIENNES.
1°) la baie n°3, 1956, fragments du milieu XVe.
C'est une baie rectangulaire de 80 cm sur 60 cm, dans laquelle Max Ingrand a utilisé en réemploi 8 fragments anciens provenant de la baie axiale dans une verrière colorée. Les fragments principaux comportent trois têtes d'anges à cheveux bouclés et portant des amicts (linge brodé couvrant le cou et les épaules). Les cheveux et les broderies sont rehaussées au jaune d'argent, tandis que les traits du visage sont tracés et rehaussés à la sanguine (ou, selon F. Gatouillat, une grisaille corrodée). L'ange le plus haut a été manifestement restauré (boucles, amict).
On trouve aussi dans la moitié supérieure un fragment où deux mains pincent les cordes d'une harpe, et dans la moitié inférieure un fragment de dais gothique provenant sans doute d'une tête de lancette. On découvrira aussi des éléments de drapés et de phylactères. Neuf étoiles, jaunes ou bleues, ont été ajoutées.
L'élément central, moderne, est un blason aux armes d'azur au château d'or sommé de trois tourelles de même : celles de la famille de Coatquénan.
Les Coatquénan.
"Les vicomtes de Coatquénan jouissaient de tous les droits de fondateurs dans l'église de Plouguerneau comme dans les chapelles de Saint-Quénan, de Loguivy et de N.-D. du Grouanec.
Au XVème siècle la vicomté de Coatquénan comprenait les manoirs de Measfallet, de Castel-Bihan, de Pont-an-Lez, d'An Ty-Coz, de Grouanec, possédés par Blanche de Cornouaille, épouse d'Olivier de Launay, fils d'Henri (1401), en son nom et pour sa fille Alex (1426). Sa juridiction s'étendait sur les paroisses de Plouguerneau, Tréménec'h, Kernoues, Sibiril, Kernilis et sur la terre du Pont en Plounéour-Trez. Les vicomtes de Coatquénan jouissaient de tous les droits de fondateurs dans l'église de Plouguerneau comme dans les chapelles de Saint-Quénan, de Loguivy et de N.-D. du Grouanec.
Le manoir de Coatquénan (Koad Kenan, IGN) se trouve à 500 mètres au nord-ouest de l'église.
Coatquénan passa aux Bouteville par le mariage d'Alex ou Aliette avec Jean III de Bouteville, seigneur du Faouët, chambellan du duc de Bretagne (1455), puis Jean IV de Boutteville chevalier, vicomte de Coëtquenan, cofondateur de la chapelle Sainte-Barbe du Faouët et son épouse Marie de Kérimerc'h, puis à Louis de Boutteville, Yves de Boutteville. Coatquénan passe Claude de Goulaine, seigneur de Pommerieux, grâce à son union en 1559 avec Jeanne de Bouteville, fille d'Yves. " (d'après H. Pérennes complété)
C'est la raison pour laquelle on trouve, sur un pinacle du porche, les armes des Bouttevilled'argent à cinq fusées de gueules accolées et rangées en fasce, associées à des armes à un lion rampant (qui ne sont celles des de Launay, des Parcevaux, des Goulaine ou des Ploeuc). On retrouve les armes de Boutteville sur la clef de voûte du porche. [ Pol Potier de Courcy écrit "à l'extérieur , sur une console supportant la statue d'un saint ermite que nous prenons pour saint Quénan , honoré dans le voisinage , sont les armes d'Yves de Parcevaux , mort en 1588 et de Jeanne de Bouteville sa compagne , sieur et dame de Mezarnou et de Coatquénan ."]
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
L'ange figuré de face.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
La harpe jouée par les mains d'un ange musicien.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
La partie inférieure.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Visage d'ange, de trois-quart.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Visage d'ange, de trois-quart.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Trois autres fragments, dont celui d'un dais de niche.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
2°) la baie n°9 dans la sacristie, fragments d'une Crucifixion de la première moitié du XVIe siècle.
Milieu XVIe : ancienne maîtresse-vitre de Saint-Gunthiern à Langolen, aujourd'hui au Musée Départemental Breton de Quimper. Larmes. Mêmes cartons qu'à Guenguat, Guimiliau et Gouezec.
3e quart XVIe siècle (vers 1560), Quéménéven église Saint-Ouen : Attribuable à l'atelier Le Sodec . Cartons communs (Le Bihan) avec Guengat, Gouezec et Guimiliau, ou La Martyre et La Roche-Maurice (Gatouillat). Larmes de compassion (une seule femme). Pas d'inscription ni de verres gravés.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
On pourra comparer ce panneau à celui de Plogonnec : l'écriture du titulus est la même, à lettres perlées et à empattement bifide. L'écoulement du sang des poignets et du flanc est peint, à N.-D. du Grouanec, en sanguine, tout comme celui du visage, causé par la couronne d'épines. La scène, dans les deux cas, s'inscrit dans une niche.
Maîtresse-vitre (atelier Le Sodec, 1520) de l'église de Plogonnec. Photographie lavieb-aile .
Nous pouvons comparer aussi ce panneau à celui de Guimiliau :
1550 : La maîtresse-vitre (atelier quimpérois Le Sodec, v.1550) de l'église Saint-Miliau de Guimiliau. Photographie lavieb-aile 2020.
Mais à Grouanec, les lances et le roseau portant l'éponge sont absents, remplacés par un pan du perizonium emporté par le vent, et par un nuage.
Dans ce fragment, le visage a été moins restauré qu'ailleurs, et certes le verre est corrodé , moucheté de points noirs, mais le verre peint est par ailleurs mieux préservé.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Dans la tête de lancette a été placé un très beau visage d'ange, tout à fait dans le style des verriers [et des sculpteurs] du XVe siècle avec les cheveux soufflés en arrière par le vent, et formant des volutes.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
II. LES 11 VERRIÈRES DE MAX INGRAND (1955-1956).
Tous ces vitraux sont en verre antique (de la verrerie de Saint-Just) serti au plomb, peints à la grisaille cuite (ombres des visages, des vêtements et phylactères, lettres), encadrés par une fine bordure blanche divisée par les plombs. Les plombs ne servent pas seulement à réunir des morceaux de verre de forme justifiée par le dessin (main, pied, visage, aile) mais aussi à morceler le fond en motifs colorés géométriques où le triangle prédomine et où les couleurs vives s'affrontent. Les verres colorés (notamment des rouges et des bleus, qui prédominent) sont parfois gravés à l'acide pour rompre leur unité par des zones plus claires.
Chacune des 11 litanies est inscrite sur un phylactère présenté par un ange, tandis qu'un attribut illustre l'épithète ("Reine des Vierges" : une couronne = royauté et un lys = virginité).
Au tympan se placent des emblèmes mariaux : monograme MA et croix tréflée, , étoiles, collier de perles, fleurs de lys.
Le maître-verrier s'adapte à des formes de baies et donc à des remplages très variables.
Les verrières seront décrites dans le sens horaire à partir de l'angle nord-ouest :
1. L'Etoile du Matin(baie 13).
Baie à deux lancettes ogivales et un tympan à une rose et quatre écoinçons.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
2-La Reine des Vierges(baie 11).
Baie à deux lancettes ogivales et un tympan à une rose et deux écoinçons.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
3-La Mère du Sauveur (baie 5).
Très belle baie à deux lancettes crénelées de trois indentations et un haut tympan à quatre mouchettes et un quadrilobe.
On retrouve ce remplage sur la baie 3, du XVe siècle, de la chapelle Saint-Jaoua à Plouvien, avec les mêmes lancettes et le même tympan.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
4-La Maison d'or (baie 1).
Baie à deux lancettes trilobées et un tympan à un quadrilobe.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
5-La Reine des Apôtres ; la Reine des Anges (baie 0 ou maîtresse-vitre).
Baie à quatre lancettes trilobées et un tympan à une grande rosace et six autres ajours dont quatre mouchettes.
La très belle rosace comporte un polylobe au monogramme marial au centre, puis un cercle de 8 mouchettes à fleurs de lys, puis un cercle extérieur de 16 mouchettes et 15 écoinçons.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
6-La Porte du Ciel (baie 2).
Baie à trois lancettes lancéolées et un tympan à quatre mouchettes, un soufflet et deux écoinçons.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
7-Le Trône de la Sagesse (baie 4).
Baie à trois lancettes trilobées et un tympan à quatre mouchettes et deux écoinçons.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
8-La Tour de David (baie 6).
Baie à trois lancettes trilobées et un tympan à quatre mouchettes, un soufflet et deux écoinçons.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
9-Le Miroir de Justice (baie 8).
Baie à trois lancettes trilobées et un tympan à quatre mouchettes, un soufflet et deux écoinçons.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
10.Oculus à composition colorée organisé en 3 mouchettes en triskell (baie 10) .
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
11-Le Vase spirituel (baie 102 au dessus de la porte ouest).
Les vitraux de l'église Notre-Dame du Grouanec en Plouguerneau. Cliché lavieb-aile 2024.
SOURCES ET LIENS.
—CASTEL (Yves - Pascal ): Plouguerneau . L'enclos du Grouanec . Non consulté.
—CASTEL (Marcel), s.d, L'enclos paroissial du Grouaneg-Eglise Notre-Dame. Dépliant de présentation.
— COUFFON (René), LE BRAS (Alfred), 1988, « Plouguerneau », Nouveau répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper
PAROISSE DU GROUANEC Paroisse érigée par l'ordonnance épiscopale du 11 novembre 1949.
EGLISE NOTRE-DAME (I.S.)
L'édifice, en forme de tau irrégulier, comporte une nef étroite et un choeur séparés par un arc diaphragme en tiers-point ; le choeur communique, au sud, par deux arcades, avec une chapelle en aile et, au nord, par trois arcades, avec une chapelle également en aile. Il date de plusieurs époques : la longère nord paraît remonter en partie au XIIIè siècle, la belle rose rayonnante du chevet à la fin du XIVè siècle ou au début du XVè siècle, la chapelle sud à la fin du XVè siècle ; la chapelle nord a été reconstruite en 1954 par l'architecte Péron, elle a gardé deux fenêtres flamboyantes. Une pierre, avec fleuron, porte l'inscription : " LAN MIL VcIII. I. NOUEL. "
Porche sud : arcade extérieure en tiers-point sous une accolade reposant sur des culots ; pinacles et crossettes au bas des rampants, voûte sur croisée d'ogives ; au flanc ouest, ossuaire d'attache. La nef est lambrissée en berceau brisé sur entraits. Dans la chapelle sud, un entrait engoulé et des sablières sculptées représentant les vices, en particulier l'ivrognerie. Les arcades en tiers-point des ailes, au nord, reposent sur les chapiteaux des piliers octogonaux et, au sud, pénètrent directement dans les piliers cylindriques.
Mobilier
Maître-autel en kersanton, table monolithe avec cinq croix de consécration sur un massif à décor d'arcatures trilobées.
Statues
- en pierre polychrome : Vierge Mère dite Notre Dame du Grouanec, la Vierge tenant une pomme, l'Enfant un livre ; Pietà ; saint Eloi en évêque
- en kersanton : Vierge Mère mutilée, saint Matthieu Ev. (pignon), saint Fiacre (porte aile sud) ;
- en bois polychrome : Christ en croix, Immaculée conception, saint Joseph, deux Anges thuriféraires, saint Sébastien, saint Roch, sainte Catherine d'Alexandrie, saint Antoine ermite, sainte non identifiée ; - en bois : sainte Thérèse de Lisieux.
Sur la porte en bois du porche, bas-relief de la Vierge à l'Enfant, " N. D. DU GROUANEC. "
Vitraux de Max Ingrand : Litanies de la Vierge avec anges à banderoles (1956).
Dans une petite fenêtre de l'aile nord, débris de vitrail représentant une Crucifixion, autrefois dans la fenêtre d'axe. On y voyait encore à la fin du XIXè siècle les portraits des donateurs, Jean Le Nobletz et Isabeau de Kerourfil.
Peintures sur le lambris de voûte du choeur : saint Pierre et saint Paul Apôtres, inscriptions au bas des deux panneaux.
Orfèvrerie : ciboire en argent, la coupe, postérieure, est montée sur un pied de calice portant l'inscription : " CALISSE. A. LA. CHAPELLE. DV. BIEN. HEVREV. NOBLES. EN. TREMENAC. 1785. "
* Dans l'enclos, fontaine de dévotion de 1604, dite Feunteun ar Gwelleat (Fontaine de la Guérison), statue de la Vierge Mère sous la voûte ; croix de granit monolithe, 1761 sur le socle. Devant l'entrée de l'enclos, menhir tronqué surmonté d'une croix, mentionné dans la Vie de saint Paul Aurélien.
—FAUJOUR (Marc) Plouguerneau, chapelle Notre-Dame du Traon,
À Restevel (Cassini) ou Restavel (IGN), sur le carrefour de la route qui rejoint, depuis le bourg de Lennon, les chapelle de Nac'h Gwen et de Saint-Nicolas, s'élève une croix dont les sculptures de granite clair sont qualifiées par Yves-Pascal Castel de " peu communes, dans l’esprit de la Renaissance."
Au dessus de deux degrès de schiste et d'un socle en granite à chanfrein se dresse le fût à pans et nœud. Sa face principale, orientée vers l'ouest, porte le Christ en croix, au pagne volant. La face orientale porte le Christ aux liens et, sur le socle, une Vierge de Pitié. La date de MVXXXVIII (1538) a été relevée par Y.-P. Castel à la base de la statue.
Atlas n°1135. Croquis par Yves-Pascal Castel 1980.
La croix (leucogranite, 1538) de Croas-Restevel à Lennon. Cliché lavieb-aile 2025.
La croix (leucogranite, 1538) de Croas-Restevel à Lennon. Cliché lavieb-aile 2025.
La croix (leucogranite, 1538) de Croas-Restevel à Lennon. Cliché lavieb-aile 2025.
La face orientale.
L'Ecce Homo.
Il tient le roseau et la couronne d'épines, par dérision de sa royauté, et est vêtu pour la même raison, directement sur ses épaules nues, du manteau écarlate. Seuls ses poignets sont liés.
La croix (leucogranite, 1538) de Croas-Restevel à Lennon. Cliché lavieb-aile 2025.
La croix (leucogranite, 1538) de Croas-Restevel à Lennon. Cliché lavieb-aile 2025.
La Vierge de Pitié.
La posture du Christ est celle qui est adoptée le plus généralement en Finistère, le bras droit vertical et le bras gauche horizontal dont la main est tenue par la Mère.
La couronne d'épines est posée sous les personnages.
La croix (leucogranite, 1538) de Croas-Restevel à Lennon. Cliché lavieb-aile 2025.
La croix (leucogranite, 1538) de Croas-Restevel à Lennon. Cliché lavieb-aile 2025.
:
1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
"Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)