Le visiteur du Monastère royal de Brou, créé après le décès de son mari Philibert le Beau en 1504 par Marguerite d'Autriche, duchesse de Savoie et régente des Pays-Bas, parvient, après avoir découvert l'église Saint-Nicolas, aux bâtiments monastiques aménagés en musée. Là, il peut arpenter le couloir de l'ancien dortoir, donnant accès aux spatieuses cellules individuelles des chanoines de l'Ordre augustinien.
Là, au milieu de ce couloir, sur le palier donnant accès aux cloitres, il découvre une lanterne, celle qui, allumée toute la nuit, éclairait jadis les religieux se rendant aux offices.
C'est une lanterne de pierre faisant saillie sur l'angle du mur, composée d'un culot circulaire et d'un dais, réunis par un vitrage à trois pans en verre antique losangé monté au plomb, autour d'un médaillon octogonal ancien, un vitrail du XVIe siècle représentant le Mariage de la Vierge. Cet aménagement est récent, remplaçant le fenestrage à châssis ouvrant permettant d'allumer, d'éteindre et de remplacer le bougeoir.
Le vitrail ancien placé en réemploi est admirable, la lanterne dans son ensemble possède une forme et des dimensions parfaitement intégrés à l'architecture du couvent, et l'objet réussit parfaitement à plonger le touriste dans l'ambiance monacale et à le laisser évoquer les chanoines quittant leur chambre dans la nuit pour chanter matines, guidés par la clarté vacillante mais vigilante de cette veilleuse .
Note : cet objet n'est accompagné d' aucun cartel : dommage...
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Le vitrail du XVIe siècle, peinture en grisaille (sanguine) et jaune d'argent sur verre blanc. Joseph s'appuie sur une canne, pour signaler sa vieillesse. Marie a les cheveux longs et dénoués, retenus au front par un diadème. Elle relève le pan gauche de son manteau. Sa robe longue est serrée à la taille par un simple cordon noué.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
La beauté de l'objet incite à en détailler les sculptures. Le registre inférieur du dais porte le monogramme christique IHS (notez le H modulé par un tilde), puis le monogramme marial MARIA, puis, après trois fleurs, la date de 1536. C'est la date de la création du dortoir. Les cloîtres seront terminés plus tard encore, en 1539.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
L'inscription centrale, que j'ai présenté comme un monogramme marial, montre les deux lettres M et A réunies par les boucles d'une corde, exactement comme les lacs d'amour qui réunissent, sur le porche et à l'intérieur de l'église, les lettres P et M de Philibert de Savoie et de Marguerite d'Autriche. Comment faut-il comprendre cet emblème-ci ?
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
C'est sur la partie inférieure, en tronc de cône, du culot que l'on lit l'inscription SILENTIVM, en lettres ornées (fût perlé et empattements bifides à enroulement). La lettre finale M est remplacée par le sigle abréviatif en forme de z ou de 3, comme c'est l'usage dans les manuscrits de l'époque.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
Lanterne du dortoir de l'abbaye royale de Brou. Cliché lavieb-aile 2025.
DISCUSSION
1°) La présence des lanternes de dortoirs monastiques (que ce soit avec cellules individuelles ou dortoirs communs) est attestée ailleurs, mais fort rarement, sans doute par oubli de signalement.
L' abbaye de Sénanque : https://www.senanque.fr/ancien-dortoir/
"Le dortoir, édifié vers 1200, occupe l’étage de l’abbaye sur plus de 30 mètres de long.
Douze baies en plein cintre éclairent l’ensemble, tandis qu’une rose à douze lobes, semblable à celle de la façade méridionale de l’abbatiale a été percée dans le pignon Ouest.
Deux escaliers desservent le dortoir. L’escalier des matines permettait à nos anciens de se rendre à l’église pour Vigiles, soit entre 2 et 3h du matin selon les saisons : « Au signal donné les moines se lèvent sans retard et s’empressent de se rendre à l’œuvre de Dieu » nous rappelle le chapitre 16 de la Règle. Une niche est ménagée dans le mur à côté de l’escalier : elle accueille la lampe qui brûle toute la nuit, fidèle à la préconisation du chapitre .
Le second escalier permet de remonter du cloître vers le dortoir pour la nuit, après Complies, soit entre 20h et 21h selon les saisons.
La règle de Saint Benoît indique que tous les moines, y compris l’abbé, doivent dormir ensemble dans un lieu unique. Le silence y est absolu."
2°) L'inscription soulignant la règle d'observation du silence, SILENTIUM (latin silere "se taire") me rappelle le personnage qui, un doigt sur la bouche, accompagnait l'inscription SILENZIO sur une fresque du cloître du couvent de Santa Chiara de Naples.
Fresque de la Conversion de Paul au couvent de Santa-Chiara à Naples. Photographie lavieb-aile 2024.
—Une description de l'abbaye de Saint-Denis, au XVIIIe , indique que "dans le courant du mois d’août année susdite, fut posée une figure en pierre ou en plâtre dans le parterre ou espèce de gazon faisant face au potager derrière le réfectoire de l’abbaye. Cette figure représentoit le Silence, ayant, pour le désigner, un doigt sur la bouche : elle étoit debout sur un piédestal." https://books.openedition.org/editionsmsh/42563?lang=fr
—Dans la salle du lavabo (près du réfectoire) du couvent de San Marco de Florence, Fra Angelico a peint en fresque vers 1442 un dominicain, Pierre de Vérone (ou Pierre le martyr) imposant le silence aux moines.
—André Alciat consacre, en ... 1536, un de ses emblèmes au silence sous le titre SILENTIUM avec une vignette représentant un moine devant le lutrin de sa cellule, l'index sur la bouche. (Notez la référence à Hapocrate, le dieu latin ayant le doigt sur les lèvres).
In silentium, Livret des Emblemes, de maistre Andre Alciat, mis en rime françoys folio 20, Paris, Wechel, 1536 , Paris, Bibliothèque nationale de France, Réserve RES P-Z-14, numérisation Gallica
Si ces exemples d'inscription ou de figures du Silence en bâtiment monastique sont difficiles à retrouver en ligne, l'importance de l'observation du silence, précisément sous le terme de Silentium, en milieu monastique, est fréquemment rappellée par les auteurs, et notamment par Vincent Debiais.
Voir la revue iconographique :
—Francisco Prado-Vilar, 2013, Silentium: Cosmic Silence as an Image in the Middle Ages and Modernity / Silentium: El silencio cósmico como imagen en la Edad Media y la Modernidad Revista de poética medieval
"Les préceptes du haut Moyen Âge sur la conduite monastique ont toujours encouragé le silence. Les règles applicables aux communautés cloîtrées interdisaient spécifiquement de parler dans l’église, le réfectoire et le dortoir. Enfin, il a toujours été expressément interdit de parler la nuit. La règle du Maître du Ve siècle décourageait ses lecteurs de parler une fois qu’ils avaient terminé les complies, le dernier office de la journée. Ils devaient garder un silence si profond pendant toute la nuit que personne ne devait croire que des moines se trouvaient dans l’abbaye. Un ensemble de signes codifiés en usage à Cluny permettait dles échanges
La règle de Benoît du VIe siècle consacre un chapitre entier aux bienfaits moraux de cette vertu (chapitre 6 : De taciturnitate), en commençant par des versets du livre des Psaumes qui associent le silence et l’humilité :
« J’ai placé une sentinelle sur ma bouche. J’ai été muet, j’ai été humilié et j’ai gardé le silence sur les bonnes choses » (Ps 38, 2-3).
Le silence était également l’expression de l’obéissance, une vertu étroitement liée à l’humilité. Les moines devaient demander l’autorisation de parler à un supérieur avec la plus grande humilité et une soumission respectueuse."
"Deux siècles plus tard, la discipline du silence a acquis de nouvelles significations dans les dépendances bondées des abbayes carolingiennes. La règle de Benoît consacrait une attention considérable aux moyens d’éviter les paroles pécheresses, mais l’ambiguïté de certains de ses passages laissait les commentateurs carolingiens perplexes. La tendance de l’auteur à qualifier le mot « silence » (silentium) par des adjectifs tels que « maximal » (summum) et « total » (omne) était particulièrement gênante. Lorsqu’il est renforcé par un adjectif superlatif ou totalisant, le mot silentium a le poids d’un silence absolu. Ce sens est toutefois spécifique au contexte. Il ne s’applique qu’au réfectoire, à l’oratoire à la fin de la liturgie et pendant le temps réservé à la lecture. Dans tous les autres cas, le mot silentium ne signifiait pas une interdiction stricte des paroles. La règle de Benoît a ainsi toujours encouragé la culture du silence, en particulier la nuit, mais ce précepte signifiait que les moines pouvaient converser avec discrétion, mais seulement à voix basse (sub silentio), c’est-à-dire en chuchotant. Dans la pensée monastique carolingienne, l’objectif de la discipline du silence n’était pas la cessation complète des bruits humains, mais la promotion d’un ton feutré et révérencieux parmi les frères, qui imprégnait tous les aspects de leur vie cloîtrée."
"Le terme latin utilisé le plus fréquemment dans ces textes est silere (silentium) qui désigne moins l’absence de parole (tacere) que la tranquillité (quies), l’absence de mouvement et de bruit. On rappelle alors un constat de la nature que faisait déjà la philosophie classique : la seule expérience du silence par les sens est celle d’une quiétude, non d’une absence totale de son, quant à elle impossible et relevant d’une construction intellectuelle qui vise à démontrer une capacité à s’extraire de l’agitation du monde. Aussi, dans la théologie chrétienne, l’idée du silence existe non parce que le monde peut être un lieu de silence (il ne le peut pas), mais parce que l’homme a besoin de construire la représentation d’un espace fictionnel dans lequel ce que l’on sait peut être tu, nié, ou inversé."
"La Règle cistercienne cherche davantage à contrôler les aspects négatifs de la parole qu’à empêcher le bruit. La normativité des règles monastiques ne fonde pas une interdiction de la parole et n’institue pas le silence, même si elles répètent que « le moine doit s’appliquer au silence en tout temps selon les préceptes ». Elle cherche davantage à prévenir un excès et un usage détourné de la voix qu’à la supprimer au sein de la vie cénobitique. Très tôt d’ailleurs, les commentateurs de la règle bénédictine établissent des variations et des nuances dans ce qu’il faut entendre par « silence » au sein du monastère, en fonction des heures, des lieux, des actions collectives ou solitaires…"
C'est le 12 août 1663 que fut posée la première pierre de la chapelle Saint-Michel, dont l'évêque avait autorisé l'édification tout près de la maison achetée de ses deniers par Dom Michel Le Nobletz, missionnaire breton qui séjourna à Douarnenez de 1617 à 1639. La chapelle fut construite en 1664 et 1665 : la façade occidentale, est ornée d'une porte à fronton en ailerons portées par inscription MRE HIE PAILLART P RECT DE PLOUARRE MICHEL POULLAOUEC FABRIQUE 1664, alors qu'on lit sur la chambre de cloche amortie par un lanternon MATTHIEU LOZEAC'H 1665.
L'édifice est en forme de croix dont la tête et les branches se terminent en hémicycle ( forme souvent qualifiée de "trèfle", ce plan trèflé pouvant être l'œuvre du jésuite Charles Turmel). La façade ouest est percée d'une porte classique entre deux pilastres surmontés d'un fronton brisé au centre d'un mur pignon supportant un petit campanile classique.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Cette construction s'opéra à l'instigation du Père Maunoir, par vénération pour son maître Dom Michel, mort onze ans plus tôt, en 1652. Il y aurait été incité par les visions d'une pieuse femme illuminée de Quimper, Catherine Daniélou. Il a reçu l'aide de la famille Ernothon-Pratglas, dont les armoiries d'azur à trois molettes d'or figuraient sur les vitraux (procès-verbal des armoiries de 1678). Cette famille possessionnée à Pont-L'Abbé a fait construire une maison pour les jésuites de Quimper (Peuziat).
De 1669 à 1676, le Père Maunoir vient chaque année prêcher en mission à Douarnenez, en mai ou en juin, récoltant des offrandes pour la chapelle. Ses visites deviennent plus espacées ensuite, jusqu'à sa mort en 1683.
A l'intérieur, la voûte en lambris peint comporte quatre blochets à la croisée du transept et des culots de poinçon sculptés représentant alternativement des têtes et des ornements. Le lambris est entièrement peint sur les deux-tiers de la partie inférieure de la voûte, le tiers supérieur, de teinte gris-bleu, voyant se succéder un semis d'étoiles à six branches avec un semis de fleurs de lys, sans ordre précis.
Les peintures
On compte 64 panneaux peints, cloisonnés par les nervures du plafond de cette chapelle, dont 58 scènes (Vie et Passion du Christ, Vie de la Vierge, évocations des différents ministères des anges auprès des hommes) et des séries de personnages vénérés (les 4 Evangélistes, les 4 docteurs d’Occident).
Ces peintures ont été exécutées en trois tranches en 1667 pour le chœur, en 1675 pour le transept et 1692 pour la nef. Ces peintures sont inspirées des taolennoù, tableaux d’inspiration chrétienne réalisés par Michel Le Nobletz pour présenter aux fidèles la religion dans une catéchèse missionnaire.
Chronologie des peintures, in Peuziat 2011.
Michel Le Nobletz, né à Plouguerneau en 1577 est un missionnaire qui a exercé à St-Malo, à l’Ile d’Ouessant, à l’Ile de Batz, à l’Ile Molène puis qui fut envoyé à Douarnenez de 1617 à 1639.
L'organisation du décor.
"À la base des panneaux, jouxtant la sablière, un cartouche à fond noir contient, en caractères dorés, la légende de la scène. Le cadre doré du cartouche porte aux extrémités des enroulements inspirés des cuirs découpés et est bordé de motifs végétaux, guirlandes, fleurs stylisées, disposées sur fond pourpre. La partie supérieure est une savante composition en courbe et contre-courbes. Les bases de l'arcade en plein-cintre reposent sur une petite tablettes supportée par une petite console en voûte. Les deux segments de l'arcade, ornés de guirlandes, se terminent par une spirale à révolution externe séparés par une goutte en guise de clef de voûte Reposant sur ses enroulements, un putto ailé, nimbé d'un motif en coquille, ornement fréquemment utilisé au cours du XVIIe siècle. De part et d'autres s'étalent spirales, volutes et guirlandes . Le peintre, afin de ne pas créer un ensemble monotone, a modifié la couleur du fond, alternant ainsi champs clairs et champs foncés, pour animer sa composition. Le panneau est amorti par un pot-à-feu orné de godrons et muni de deux anses. Dans le cul-de-four, l’exiguïté de la surface a obligé l'artiste à simplifier sa composition, mais l'inspiration est préservée.
La décoration du transept, réalisée sept ans plus tard, montre une évolution. Le cadre des cartouches gagne en simplicité, seuls des enroulements vaguement inspirés de parchemins l’agrémentent. Latéralement, l'ornementation est plus diversifiée tant par la polychromie que par les sujets où sont représentés coquilles, fleurs, feuilles stylisées. A la partie supérieure, la composition est presque identique au chœur. Dans les parties hautes, seuls les pots à feu des grands panneaux sont remplacés par des vases à fleurs ." (J. Peuziat)
Les peintures ont été restaurées en 1963 et 1964.
I. LE CHOEUR, CÔTÉ EST, Le FLOCH de PRATANBARS,1667.
1°) Dans l'abside ou arrondi :
les quatre évangélistes (Marc, Matthieu, Luc et Jean), à gauche.
les 4 Pères de l'Église (Jérôme, Ambroise, Augustin, Grégoire) à droite
2°) Sur les côtés, dans le sens horaire :
a) Sur le côté gauche : la Vie de la Vierge, I :
Annonciation (l'Ange)
Présentation de Marie au Temple
Nativité de la Vierge.
Conception.
b) Sur le côté droit : la Vie de la Vierge II:
Assomption
Purification
Visitation
L'Annonciation (la Vierge)
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les quatre évangélistes.
1, 2. Saint Marc et son lion, saint Matthieu et son ange.
Tous les deux, debout, pieds nus et barbus, écrivent leur évangile.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
3, 4 . Saint Luc et son taureau, saint Jean et son aigle.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les quatre Pères ou Docteurs de l'Église.
5 et 6 : Saint Jérôme en cardinal, accompagné de son lion et saint Ambroise en évêque de Milan, avec la ruche d'abeilles près de lui.
Comme les évangélistes, ces Pères de l'Église sont représentés la plume à la main, rédigeant leur œuvre.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
7 et 8 : Saint Augustin évêque d'Hippone et saint Grégoire, pape, inspiré par la colombe de l'Esprit.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Sur le côté gauche : la Vie de la Vierge, I :
9.Annonciation (l'Ange)
Dans cette portion haute du découpage des tableaux par les nervures, seule la moitié de l'Annonciation est figurée, car il n'y a ici que l'ange Gabriel ; et la Vierge, qui est le complément du tableau, se trouve en face de l'autre côté.
10. La Présentation de Marie au Temple.
La jeune Marie entre au service du Temple, dont elle gravit les degrés sous les regards de ses parents Anne et Joachim. Elle est accueillie par le grand prêtre.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
11. La Conception de la Vierge, ou scène de la Porte Dorée. La signature du peintre.
Devant la Porte Dorée de Jérusalem, Anne et Joachim (qui gardait ses troupeaux, chacun alerté de ce rendez-vous par une vision, se retrouvent, et cette seule rencontre (ou leur baiser) déclenche la conception chez Anne de l'enfant que le couple espérait depuis si longtemps : ils le nommeront Marie (Myriam) et le vouent au service de Dieu.
Dieu le Père apparaît dans les nuées, bénissant, la main gauche posée sur le globe du monde, la tête parée du nimbe triangulaire. La Vierge, immaculée dans sa conception, est figurée entre les deux époux, les pieds sur le croissant et entourée d'étoiles, selon le motif de la Vierge de l'Immaculée-Conception.
On lit en bas l'inscription PRATANBAR LE FLOCH FECIT 1667. Les experts n'y voient qu'un seul peintre, Hamon Pratanbars-Le Floch. En effet, le même peintre, le "sieur de Pratanbars", est intervenu en 1675 sur ces lambris, comme on le verra sur les inscriptions de la croisée du transept. Ce peintre avait signé en 1663 un tableau conservé à l'évêché de Quimper et qui porte la signature PRATANBARZ-FLOCH PINXIT LAN 1663. Il s'agit d'un ex-voto commandé par M. de Fages de Quimper après avoir été guéri en novembre 1661, alors qu'il était assisté par Michel de Nobletz, celui-là même en la mémoire de qui a été édifiée la chapelle Saint-Michel.
Yves-Pascal Castel (Dictionnaire des artistes..) indique que Hamon Floch, sieur de Pratambars (Morlaix,?-Quimper 1677) s'est marié le 4 septembre 1662 avec Marie Guérin à Quimper, paroisse de Saint-Mathieu. De 1664 à 1670, quatre enfants voient le jour à Quimper. Il est l'auteur des lambris de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez en 1667. En 1670, Hamon Floch reçoit 15 livres des fabriciens de Saint-Evarzec "pour le days au dessus du crucifix". En 1672, il peint un tableau de Saint-Yves moyennant 30 livres, et fait "le devant d'autel de monsieur st nicolas" pour 7 livres 2 sols. Il décède le 17 janvier 1677 à Quimper, paroisse de Saint-Mathieu. Sa femme meurt le 11 mai 1677. En 1679, sa maison de terre-au-Duc à Quimper est vendue lors de sa succession.
Les généalogistes précisent que Hamon Aymon FLOCH est né le 22 février 1609 à Landerneau et baptisé à Saint-Thomas de Landerneau. Ses quatre enfants sont Jacques, Marguerite, Jean-François et François. Il n'existe pas de lieu-dit Pratanbars à Quimper.
Le commanditaire de l'ex-voto, M. de Fages, est représenté alité, entouré de plusieurs membres de sa famille et de Michel de Nobletz venu le bénir. Il est figuré étendu sur une couchette, entouré de sa femme Anne Gary et de ses sept enfants. La Vierge à l'Enfant est représentée en haut à gauche du tableau.
Signé et daté en bas à gauche : Pratanbarz-Floch / pinxit l'an 1663 / [illisible] ; inscription peinte en bas au centre : veu faict par monsr de fages de / La ville de quimper a Dom / michel Noblet prestre et a / este gueri au moys de / novembre lan 1661.
Ce tableau appartient à une série d'ex-voto consacrés à dom Michel Le Nobletz (1577-1652). Michel Nobletz naît à Plouguerneau. Après des études chez les Jésuites à Bordeaux, à Agen puis à la Sorbonne à Paris, il est ordonné prêtre en 1607. De retour à Plouguerneau, il enonce à la carrière ecclésiastique, et décide de devenir missionnaire. Il entreprend des missions dans les évêchés de Tréguier et de Léon, puis se rend dans les îles d'Ouessant, de Molène et de Batz. En 1617, il s'établit et séjourne pendant vingt ans à Douarnenez, puis revient dans le diocèse de Léon, au Conquet, petit port près de Brest, où il passe les douze dernières années de sa vie. Il met au point en 1613, lors d'une de ses missions à Landerneau, une méthode d'enseignement originale, associant l'image à la parole, qui repose sur les taolennoù, peaux de moutons sur lesquelles sont dessinées des images symboliques illustrant les dogmes de la religion catholique. Doublés de textes explicatifs et de déclarations, ils permettent aux laïcs de les utiliser à leur tour. Les 14 taolennoù en langue bretonne conservés à l'évêché ont été classés au titre des monuments historiques en 2003. Le procès de béatification du prédicateur Michel de Nobletz est relancé en 1888, mais il faut attendre le 14 décembre 1913 pour que le pape Pie X proclame l'héroïcité des vertus du vénérable Michel Le Nobletz, première étape vers sa béatification. C'est à l'occasion de ce procès que sont rassemblés différentes uvres à l'évêché, prouvant la véracité du culte, dont la série d'ex-voto qui s'inscrivent dans la suite logique de l'action d'évangélisation menée par dom Michel Le Nobletz. Le peintre de ce tableau, Hamon Floch, sieur de Pratanbars de Quimper, est le peintre d'une partie de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Le commanditaire, apothicaire de la rue Kéréon, a été identifié par Henri Pérennès qui publie La Vie du Vénérable Dom Michel de Nobletz par le Vénérable Père Maunoir.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
12. La Nativité de la Vierge.
Anne, allongée sur son lit de relevaille de couches, a donné naissance à Marie, et une servante lui présente, en guise de brouet, une assiette de fruits rouges ressemblant à des groseilles. Joachim est assis près d'elle et la désigne à un autre homme.
Deux servantes ou sage-femmes lavent l'enfant dans une bassine, une troisième tend un linge pour l'essuyer, tandis qu'une troisième femme descend quelques marches, chargée d'une assiette de groseilles.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Sur le côté droit : la Vie de la Vierge, II :
13. L'Assomption.
Marie s'élève dans les nuées, entourée d'anges, sous les yeux des 12 apôtres (on reconnait Jean et Pierre).
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
14. La Purification de la Vierge.
La scène correspond à la Présentation de Jésus au Temple. L'un des prêtres est vêtu en docteur en théologie ou droit du XVIIe siècle (robe rouge et camail d'hermines).
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
15. La Visitation de la Vierge.
Elisabeth est agenouillée et pose la main sur le ventre de Marie, qui tresaille. Les maris sont présents.
16. L'Annonciation (la Vierge)
La Vierge, en prières dans sa chambre, salue la visite de l'ange et fait le geste d'acceptation du Fiat.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
II. LE BRAS SUD DU TRANSEPT.
1°) Dans l'abside ou arrondi : dans le sens horaire
Ange
Saint Paul
Michel de Nobletz
Vierge
Jésus Sauveur
Saint Michel
Saint Pierre
Ange présentant une couronne de gloire
2°) Sur les côtés, dans le sens anti-horaire:
a) Sur le côté gauche :
Couronnement de la Vierge
La Vierge ensevelie par les apôtres
Le Trépassement de la Vierge (Dormition)
Ange voletant.
b) Sur le côté droit :
Ange
Jésus enseignant aux Docteurs de la Loi
Adoration des Mages
Adoration des Bergers (et signature A. Madezo)
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
L'arrondi du bras sud , présenté dans le sens horaire.
17. Ange tenant la croix, qu'il désigne du doigt.
Légende : PRENS LA CROIX DE IESUS SI TU VEUX SA COURONNE.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
18. Saint Paul et son épée.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
19. Dom Michel [de] Nobletz Prestre.
Il est vêtu de la robe blanche, d'un surplis, et de la soutane. Il porte l'étole.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
20. La Vierge.
Inscription Mère de Dieu P.P.N.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
21. Jésus Sauveur du Monde.
Inscription Sauveur du Monde A.P.D.N ("Aie Pitié De Nous"].
Il bénit en tenant le globe crucifère.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
22. Saint Michel archange.
Armé d'une épée, il terrasse le dragon tout en pesant sur la balance du Jugement dernier une âme qui le supplie mains jointes (plateau à notre droite) : sur l'autre plateau, une meule, d'où s'échappe un dragon ailé.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
23. Saint Pierre et ses clefs.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
24. Ange présentant une couronne de gloire.
Inscription "SI TU VEUX UNE COURONNE DE GLOIRE".
L'ange porte une couronne de roses. Le panneau est le complément de celui où l'ange présente la croix en disant "Prends la croix de Jésus si tu veux la couronne."
.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Sur le côté droit , dans le sens anti-horaire (vers l'arrondi).
25. Ange tenant une banderole rouge (ceinture de la Vierge?)
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
26 . Jésus enseignant aux Docteurs de la Loi.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
27. L'Adoration des Mages.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
28. L'Adoration des Bergers. Signature.
Un ange déroule dans le ciel la banderole où est inscrit GLORIA IN EXCEL[CIS DEO]
Les bergers sont accompagnés de leur houlette, bâton de berger élargi à son extrémité.
Inscription : NOSTRE SEIGNEUR EST NÉ EN BETLEM
Puis : AVGUSTIN MADEZO : f.
Si le "f" correspond à "fabrique", cet Augustin MADEZO est donc le commanditaire ou maître d'ouvrage de cette tranche nord des peintures.
Mais le f minuscule peint être l'abrégé de "fecit" (fait par), ce pourrait être aussi un des peintres.
Les généalogistes mentionnent un Augustin Madezo, fils de Jean Riou Madezo, Honorable Marchand, et de Jeanne Le Marrec (épousé en 1642) et né le 5 mars 1652 à Ploaré Douarnenez, aîné de 6 enfants. S'il s'agit de notre signataire, il aurait 15 ans en 1667 (peinture du chœur) et 23 ans en 1675 (date portée à la croisée des transepts).
Il épousa le 22 février 1672 à Douarnenez Anne Lozach [LOZEAC'H]*, d'où une fille, Marguerite, née en 1685.
* nb le nom de Matthieu Lozeac'h figure, avec la date de 1665, sur l'édifice.
Une seule généalogie donne pour cet Augustin la date de naissance de 1642, date "attendue" par rapport à celle du mariage des parents.
Un autre (ou le même) Augustin Mazedo figure sur la liste des gens de mer de Douarnenez-Poullan, sans-doute comme matelot puisque "âgé de 11 ans", une liste tenue depuis 1671. Voir le dépouillement réalisé par l'association Bagou Coz.
.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Sur le côté gauche du bras sud du transept : sens horaire (vers l'arrondi).
29. Ange voletant
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
30. Le Trépassement de la Vierge [Dormition].
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
31. La Vierge ensevelie par les apôtres.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
32. Le Couronnement de la Vierge.
Inscription : LA VIERGE REINE DES ANGES ET DES HOMMES.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
III. LE BRAS NORD DU TRANSEPT, À GAUCHE.
1°) Dans l'abside ou arrondi : dans le sens horaire :
L'ange de dévotion ; il tient un gros chapelet.
L'ange de paix ; il tient une couronne et une palme.
L'Ange chef de l'armée de l'Eternel tenant un glaive
L'Ange gardien conduisant un enfant.
L'Ange tient Satan enchaîné
Lange envoyé pour nous défendre ; il tient un bâton et un glaive.
L'Ange porte cierge bénist : il tient un cierge et une couronne
ange qui donne Lo contre le diable ; il tient un bénitier et un goupillon.
Sur le côté gauche :
Ange voletant tenant une banderole rouge
L'ange nous arme ; un ange donne une croix à un enfant que le diable menace de sa fourche.
L'ange nous anseigne ; un petit enfant écrivant, l'ange lui montre un livre.
L'ange qui nous esclaire ; il tient un flambeau allumé.
Sur le côté droit : 3 Sacrements.
La Pénitence :"L'ange nous mène à la pénitence ; il conduit un enfant dans un confessionnal. "
L'Eucharistie : "L'ange nous mène à la sainte communion".
L'extrême-onction :"L'ange nous assiste à la mort ; il exhorte un moribond et le démon s'enfuit. "
Hors programme : l'Annonciation La salutation de l'ange ; la Sainte-Vierge faisant pendant à l'ange Gabriel dans la scène de l'Annonciation.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
1°) Dans l'abside ou arrondi : dans le sens horaire :
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
33. L'ange de dévotion ; il tient un gros chapelet.
34. L'ange de paix ; il tient une couronne et une palme.
35. L'Ange chef de l'armée de l'Eternel tenant un glaive
36. L'Ange gardien conduisant un enfant.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
37. L'Ange tient Satan enchaîné
38. Lange envoyé pour nous défendre ; il tient un bâton et un glaive.
39. L'Ange porte cierge bénist : il tient un cierge et une couronne
40. L'ange qui donne Lo contre le diable ; il tient un bénitier et un goupillon.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Sur le côté droit :
41. Ange voletant tenant une banderole rouge
42 . "L'ange nous mène à la pénitence" ; il conduit un enfant dans un confessionnal.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
43. "L'ange nous mène à la sainte communion" ; il guide l'enfant vers la Sainte Table.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
44. "L'ange nous assiste à la mort" ; il exhorte un moribond et le démon s'enfuit.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Sur le côté gauche :
45. Ange voletant tenant une banderole rouge
46. "L'ange nous arme "; un ange donne une croix à un enfant que le diable menace de sa fourche.
47. "L'ange nous anseigne" ; un petit enfant écrivant, l'ange lui montre un livre.
48. "L'ange qui nous esclaire" ; il tient un flambeau allumé.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
IV. LA CROISÉE DU TRANSEPT ET SES INSCRIPTIONS, peints par H. F de Pratanbars 1675.
Huit cartouches indiquent les noms des commanditaires (recteurs et gouverneurs) et du peintre de ce vaste ensemble de peinture, tout en en précisant les dates, de 1667 à 1692.
1. Le clergé :
On lit sur les 8 cartouches les inscriptions suivantes :
MESSIRE . HIEROSME PAILLART. Rre 1667.
Mre. GVILLAVME . PAILLART . Rvr . 1675.
V. ET. D. Mre G . PAILLART. DOCTEVR et Rre . 1692.
MESSIRE . JAN . COVLLOCH . CVRE . 1675.
Mre MICHEL LAVEC CURÉ
Soit :
a. Messire Jérôme Paillart recteur 1667
DANS LE PORCHE SUD, de l'église Saint-Herlé nous lisons M : H : PAILLART : R : 1673, inscription qui se lit comme suit : « Messire Hiérosme (Jérôme) Paillart, Recteur 1673 ». Il fut recteur de Ploaré (Douarnenez) et de ses trèves du Juch et de Gourlizon, de 1657 à 1675. Son nom apparaît aussi au-dessus de la porte ouest de la chapelle Saint-Michel, commencée en 1663 Son nom est inscrit sur le porche sud de l'église de Saint-Herlé à Ploaré avec la date de 1673. Le recteur qui lui succéda se nommait Guillaume Paillart.
b. Messire Guillaume Paillart recteur 1675 ; et Vénérable et discret Guillaume Paillart docteur 1692.
Il fut recteur de Ploaré de 1676 à 1707. Il indique son titre de docteur en Sorbonne (et les textes qu'il rédige sont en latin, en grec ou en français) On trouve aussi son nom sur le mur nord du chœur de Saint-Herlé et et dans l’église du Juch. Il a commenté les taolennou de Michel Le Nobletz .
c. Les deux curés, messires Jean Coulloch (1675) et Michel Lavec. Ce dernier nom n'est pas attesté, il faut peut-être lire "Michel Poullaouec", même nom que le premier gouverneur de 1664. J.M. Abgrall avait lu "Mr. MICHEL . CONAN . POVLLAOVEC . CVRE."
2. Les gouverneurs de la fabrique en 1674-1675.
N . H . LAN LARCHE . GOUVERNEUR . 1674.
H . H . ALAIN . SQVIVIDAN GOVVERNEVR . 1675.
Soit "Noble Homme Jean Larche, gouverneur pour 1674, et Honorable Homme Alain Squividan; gouverneur pour 1675."
Il pourrait s'agir de Jean Larcher, né en 1631 à Quimper, décédé à Ploaré le 27 juillet 1693, "noble homme, sieur de Kerbasquiou en Logonna", fils de procureur et notaire. Il épousa à Crozon Anne Madec, née à Ploaré.
En 1672-1673 le gouverneur et trésorier était Guillaume Coulloc'h, dont le chanoine Abgrall cite le compte-rendu de son exercice dans sa Notice, d'après les comptes de la chapelle Saint-Michel conservés aux Archives départementales .
3. Le peintre.
L'inscription énonce : PEINCT . PAR . LE . SIEVR . DE. PRATANBARS . 1675. Il s'agit d'Hamon Le Floch, sieur de Pratanbars, qui a signé aussi les lambris sud.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
LES 4 BLOCHETS DE LA CROISÉE DU TRANSEPT.
Quatre anges aux chevelures longues et bouclées portent une robe rouge et une tunique dorée à manche courte : leur tenue évoque celle des servants d'autel et chanteurs des maîtrises en soutanelle et surplis. ( les comptes de la chapelle mentionnent en 1672-73 "deux aubes garnyes de belle dentelle et sept autres de petite dentelle, etc., sept devant d'autels ... une chape et deux tuniques de satin" .
La couleur dorée a pu être proposée par les peintres-restaurateurs. Deux portent l'encensoir, mais deux autres sont beaucoup plus originaux et "locaux" car ils présentent des cartouches illustrant des scènes de pêche.
Du côté du chœur : deux anges thuriféraires portant leur encensoir.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Du côté de la nef : deux anges portant des cartouches.
Dans le premier cartouche, un marin relève ses filets : un oiseau sombre pique vers eux. Ce comportement est celui des Fous de Bassans. Une scène semblable est sculptée sur un contrefort de l'église Saint-Herlé de Ploaré.
Dans le deuxième cartouche, un marin (le même, en rouge) revient de pêche, sa barque pleine de poissons.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
LES 14 PANNEAUX DES LAMBRIS PEINTS DE LA NEF, 1692, Claude Hauteville et Olivier Le Minteur, peintres.
Le lambris est divisé de chaque côté par les nervures en sept panneaux, soit 14 panneaux. Huit panneaux traitant de la Passion et de la Vie glorieuse du Christ sont associés, avec un côté pêle-mêle, à des scènes de la Vie de la Vierge, de saint Michel et d'autres encore.
Les archives mentionnent le règlement le 28 juin 1692 par Honorable Homme Noël Le Manach, fabricien, de la somme de 150 livres à Claude de Hauteville pour les travaux de peinture. Ce dernier en a reversé une part au sieur de Mezlann (Meslan) qui avait réalisé les peintures "du bas du lambris". J. Peuziat propose l'hypothèse suivante : Claude Hauteville serait l'auteur des tableaux, et Olivier Le Minteur celui des ornementations.
Claude Hauteville, sieur des Roches, est né à Pleyben vers 1652 et décédé à Locronan en 1720. En 1694, il assure des travaux de peinture de de dorure pour l'église Saint-Pierre de Plogonnec tout en assurant les charges de « procureur et notaire de plusieurs juridictions ». En 1691, il était au service du roy au port de Rochefort.
Olivier Le Minteur ou Le Meinteur qui est, pour Peuziat, le sieur de Meslan, est connu pour avoir travaillé comme peintre et doreur en 1675 pour la fabrique de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Les actes montrent qu'il a vécu quelques années, de 1691 à 1698, avec sa famille, à Ploaré. Un autre peintre, Guillaume Le Meinteur, qualifié de maître-peintre, a décoré deux autels en 1690 pour l'église de Plogonnec. Guillaume Le Minteur a restauré l'église du Folgoët après 1708.
Un Olivier Le Minteur a épousé en 1702 Catherine Lazennec (1670-1705) et est décédé après 1702.
Les généalogistes mentionnent Olivier Le Minteur ou Le Minther, 1640-1721, maître-coutelier, ou Olivier Le Minteur de Plouvien, né en 1601.
I. LE CÔTÉ SUD DE LA NEF.
Les cinq premiers panneaux en allant vers le fond de la nef traitent de scènes de la Passion.
Agonie à Gethsémani.
Flagellation.
Couronnement d'épines.
Le Portement de croix, le voile de Véronique.
Crucifixion.
L'apparition de saint Michel sur le Mont Gargan.
L'échelle de Jacob.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
49. Agonie à Gethsémani.
Légende : "La prière au jardin".
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
50. La Flagellation.
Légende :"La flagellation du Sauveur".
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
51. Le Couronnement d'épines.
Légende : "Jésu est couronné d'épines."
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
52. Le Portement de croix, le voile de Véronique.
Légende : "Jésu portant sa croix. "
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
53. La Crucifixion.
Légende : "Le Sauveur Jésu crucifié."
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
54. Apparition de Saint Michel archange sur le Mont Gargan.
La tradition catholique de l'apparition de l'archange au Gargano est décrite dans la Légende dorée (Legenda Aurea), recueil de légendes chrétiennes compilé par Jacques de Voragine entre 1260 et 1275 :
"Son apparition s’est manifestée en plusieurs circonstances. Il est apparu, d’abord, sur le mont Gargan, qui se trouve en Pouille, auprès de la ville de Manfrédonie. L’an du Seigneur 390, vivait dans cette ville un homme, nommé Garganus, qui possédait un énorme troupeau de bœufs et de moutons. Et comme ses troupeaux paissaient au flanc de la montagne, un taureau, laissant ses compagnons, grimpa jusqu’au sommet de la montagne. Garganus se mit à sa recherche, avec une foule de ses serviteurs, et le trouva enfin, au sommet de la montagne, près de l’entrée d’une caverne. Furieux, il lança contre lui une flèche empoisonnée ; mais celle-ci, comme repoussée par le vent, se retourna vers lui et le frappa lui-même. Ce qu’apprenant, la ville entière fut émue et vint demander à l’évêque l’explication du prodige. L’évêque ordonna un jeûne de trois jours, au bout duquel saint Michel apparut, et lui dit : « Sache que c’est par ma volonté que cet homme a été frappé de sa flèche ! Je suis l’archange Michel. J’ai résolu de me garder ce lieu ; et j’ai eu recours à ce signe pour faire connaître que j’en étais l’habitant et le gardien. » Aussitôt l’évêque, avec toute la ville, se rendit en procession sur la montagne. Et, personne n’osant entrer dans la caverne, on pria l’archange devant le seuil."
On voit Saint Michel, Garganus lançant sa flèche vers le taureau, et la caverne.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
55. L'échelle de Jacob.
Légende : "Les anges montent et descendent dans léchel de Jacob."
Comme le précédent, ce tableau doit être mis en relation avec celui qui lui fait face, "La mort du Juste", où le défunt est assisté par des anges descendus du Ciel.
Quatre anges montent et descendent de l'échelle, adressés à Jacob par Dieu qui est en haut de l'échelle, tenant le globe du Monde.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
II. LE CÔTÉ NORD DE LA NEF.
Après l'Annonciation, les trois premiers panneaux en allant vers le fond de la nef traitent de scènes de la Vie glorieuse de Jésus après sa mort. Puis vient, sans cohérence, le Mariage de la Vierge.
L'Annonciation
La Résurrection.
L'Ascension.
La Pentecôte.
Le mariage de la Vierge.
Saint Michel chassant Lucifer du Paradis.
La mort du juste.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
56. L'Annonciation.
Légende : "La salutation de l'Ange."
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
57. La Résurrection.
Représentation classique : le Christ ressuscité, tenant l'étendard de sa victoire sur la Mort, sort du tombeau devant les gardes, l'un dormant et les autres se protégeant les yeux de l'éblouissement.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
58. L'Ascension.
Légende : "L'ascention de Nostre Seigneur"
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
59. La Pentecôte.
Légende : "La descente du Saint-Esprit sur les Apostres."
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
60. Le mariage de la Vierge.
Chaque époux est accompagné de témoins. Jospeh tient sa verge fleurie, signe de son élection.
Le prêtre (en tenue épiscopale) guide la main de Joseph tenant l'anneau vers le doigt de Marie.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
61. Saint Michel chassant Lucifer du Paradis.
Dans des nuées, saint Michel (casque crucifère, cuirasse, sandales lacées) entouré d'anges et de chérubins, brandit son glaive et chasse Lucifer, l'ange déchu, vers les flammes de l'Enfer aux diables cornus munis de fourches.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
62. La mort du juste.
Sur le lit, le mourant est assisté par deux anges, l'un lui présentant un crucifix et l'autre le glaive de la Justice divine.
S'échappant du dais rouge, saint Michel (ou du moins un ange casqué à panache et écharpe rouge) emporte l'âme du "juste" (une figure féminine, nue à longue chevelure) vers une trouée de lumière.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
Les lambris peints (1667, 1675, 1692) de la chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
L'AUTEL ET LE RETABLE DU CHOEUR.
Le retable aurait été exécuté en 1666, il est orné de colonnes torses abritant au centre la statue de l'archange saint Michel sous un dais, dans la même tenue baroque que sur les peintures et brandissant son glaive à la lame d'éclair.
Les niches latérales accueillent la Vierge à l'Enfant (dont on notera le bandeau rétro-occipita) et sainte Anne éducatrice (qui a peut-être perdu la statue de Marie).
Le retable est surplombé par une Trinité souffrante, le Père tenant le Christ en croix dominé par la colombe.
La bannière honore saint Michel avec la devise QUIT US DEUS sur fond de velours incarnat frappé d'hermines noires.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
La chapelle Saint-Michel de Douarnenez. Cliché lavieb-aile 2022.
DISCUSSION.
Il reste à discuter du choix iconographique du programme de peinture. On lit qu'il est inspiré des tableaux de mission ou taolennou (petites tables, petits tableaux) peints entre 1613 et 1639 par Michel Le Nobletz (environ 70), mais on ne trouve rien ici des dispositifs en bande dessinée, des cartographies d'un itinéraire vertueux, des représentations des péchés capitaux sous forme d'animaux, et des représentations des tourments de l'Enfer, visant à impressionner les bas-bretons en manipulant les sentiments de peur pour provoquer la conversion et le retour à la pratique des sacrements de l'Église.
On conserve aussi 10 tableaux de Carème du Père Maunoir conservés en la basilique Sainte-Anne d'Auray : on verra en les consultant qu'ils sont bien différents des tableaux de Saint-Michel de Douarnenez.
Reprenons la liste des tableaux (ma numérotation est arbitraire et renvoie à mes images) :
1, 2 ,3 ,4 les quatre évangélistes (Marc, Matthieu, Luc et Jean)
5,6,7,8 les 4 Pères de l'Église (Jérôme, Ambroise, Augustin, Grégoire)
9. Annonciation (l'Ange)
10. Présentation de Marie au Temple
11. Nativité de la Vierge.
12. Conception.
13. Assomption
14. Purification
15. Visitation
16. L'Annonciation (la Vierge)
17. Ange tenant la croix "Prends la croix de Jésus si tu veux sa couronne".
18. Saint Paul
19. Michel de Nobletz
20. Vierge
21. Jésus Sauveur du Monde
22. Saint Michel
23. Saint Pierre
24. Ange présentant une couronne de gloire : "Si tu veux une couronne de gloire"
25. Couronnement de la Vierge
26. Jésus enseignant aux Docteurs de la Loi
27. Adoration des Mages
28. Adoration des Bergers
29. Ange voletant
30.Dormition de la Vierge
31. La Vierge ensevelie par les apôtres
32. Couronnement de la Vierge
33. L'ange de dévotion ; il tient un gros chapelet.
34. L'ange de paix ; il tient une couronne et une palme.
35. L'Ange chef de l'armée de l'Eternel tenant un glaive
36. L'Ange gardien conduisant un enfant.
37. L'Ange tient Satan enchaîné
38. L'ange envoyé pour nous défendre ;
39. L'Ange porte cierge bénist : il tient un cierge et une couronne
40. L'ange qui donne Lo contre le diable ; il tient un bénitier et un goupillon.
41. Ange voletant tenant une banderole rouge
42.L'ange du Sacrement de Pénitence
43. L'ange du Sacrement de l'Eucharistie
44. L'ange du Sacrement de l'Extrême-Onction
45. Ange voletant tenant une banderole rouge
46. "L'ange nous arme "; un ange donne une croix à un enfant que le diable menace de sa fourche.
47. "L'ange nous anseigne" ; un petit enfant écrivant, l'ange lui montre un livre.
48. "L'ange qui nous esclaire" ; il tient un flambeau allumé.
49. L'Agonie à Gethsémani.
50. Flagellation.
51. Couronnement d'épines.
52. Le Portement de croix, le voile de Véronique.
53. Crucifixion.
54. L'apparition de saint Michel sur le Mont Gargan.
55. L'échelle de Jacob.
56. L'Annonciation
57. La Résurrection.
58. L'Ascension.
59. La Pentecôte.
60. Le mariage de la Vierge.
61. Saint Michel chassant Lucifer du Paradis.
62. La mort du juste.
Nous trouvons ici un programme narratif bien plus traditionnel et largement illustré au XVIe siècle sur les vitraux des églises et chapelles bretonnes, détaillant en épisodes la Vie de la Vierge, celle de l'Enfance et de la Vie Publique puis de la Vie Glorieuse du Christ, tandis que les saints et apôtres figurent dans la statuaire des mêmes édifices . La source se trouve dans les Evangiles et évangiles apocryphes et dans la Légende dorée de Jacques de Voragine. Cela concerne 36 tableaux . Ajoutons les Pères de l'Église —témoin de la Contre-Réforme) et une scène biblique (l'échelle de Jacob) , soit 41 tableaux (en noir gras) sur 61.
Parmi les panneaux restants, un est consacré à Michel de Nobletz. Tous les autres représentent des anges. Certains sont des angelots décoratifs. Mais 17 (en rouge) sont ce que je peux désigner comme des anges de catéchèse (ou de Mission). C'est là la partie la plus originale, mais nous voyons qu'elle n'est pas majoritaire.
J'ai voulu rechercher dans les prédications du Père Maunoir la source de cette "angélologie pieuse", mais j'ai perdu patience : l'échec de cette recherche montre au moins que cette dimension n'est pas première dans les grandes manœuvres de conversions des campagnes, qui reposent surtout sur des exortations à la confession et à l'organisation de Drames liturgiques jouant la Passion comme dans les Jeux médiévaux.
Ces panneaux prédominent dans le transept nord. Notamment les six panneaux, trois de chaque côté s'adressent à des enfants à qui ils s'adressent en leur disant : "nous" :
L'ange nous arme .
L'ange nous anseigne .
L'ange qui nous esclaire .
"L'ange nous mène à la pénitence "
"L'ange nous mène à la sainte communion".
"L'ange nous assiste à la mort " Ce dernier panneau est complété, dans la nef, par "La mort du Juste"
3°) Nous pouvons consulter aussi les 24 taolennou des séries Plouguerneau 1 et Plouguerneau 2 (ils viennent du presbytère de Plouguerneau) conservées à l'évêché de Quimper. Mais ces tableaux datent du XIXe siècle :
—ABGRALL, (Jean-Marie), 1894, "Les peintures de la chapelle Saint-Michel à Douarnenez", Bull Société archéologique du Finistète tome XXI p. 341-344
—ABGRALL, (Jean-Marie), 1904, "Les peintures de la chapelle Saint-Michel à Douarnenez" Architecture bretonne, p. 355-358
—ABGRALL, (Jean-Marie), et PEYRON 1908, "Douarnenez, Les peintures de la chapelle Saint-Michel", Bulletin de la Commision diocésaine d'Histoire et d'Archéologie p. 90-96.
—ABGRALL, (Jean-Marie), et PEYRON 1915, Notice Douarnenez, Bulletin de la Commision diocésaine d'Histoire et d'Archéologie
—ABGRALL, (Jean-Marie), 1883 Bulletin monumental, p. 567 Douarnenez
—ABGRALL, (Jean-Marie), 1898, Congrès archéologique de France p. 120
—BARRIÉ (Oger), 1979, La peinture, in Dilasser (Maurice), Un pays de Cornouaille: Locronan et sa région - - Page 550
—BOURDE DE LA ROGERIE ( Henri )· 1998 Fichier artistes, artisans, ...
—CASTEL (Yves P. ), Georges-Michel Thomas, Tanguy Daniel · 1987 Artistes en Bretagne: dictionnaire des artistes, artisans et ... - Page 115
— CELTON (Yann) « Taolennoù. Michel le Nobletz. Tableaux de mission », éditions Locus Solus de Châteaulin, sous la direction de Yann Celton.
— CROIX (Alain),1988, « Les cartes de Michel Le Nobletz. L'art de la prédication au XVIIe siècle », Ar Men, n° 17, octobre 1988, p. 74-85.
—Couffon (René), Le Bars Alfred, 1980
— DILASSER (Maurice), 1979, Un pays de Cornouaille: Locronan et sa région - page 691
— PEUZIAT (Josick), 2011, Contribution à l'étude des peintres ayant oeuvré à la chapelle Saint-Michel de Douarnenez; Bull. SAF 2011, 89-102, ill.
Résumé : Cette étude a pour point de départ la découverte de dessins à la plume accompagnant une signature dans les registres de catholicité de la paroisse de Ploaré. Le signataire, Olivier Le Minteur, n’est autre que l’un des peintres qui, associé à Claude Hauteville, effectua en 1692 les peintures du lambris de la nef de la chapelle Saint-Michel à Douarnenez, tandis que le choeur et le transept, décorés en 1667 et 1675, sont l’oeuvre d’Hamon Le Floch, sieur de Pratanbars, peintre domicilié à Quimper, décédé en 1677. Malgré l’étalement des travaux dans le temps – vingt-cinq ans – l’ensemble montre, à première vue, une certaine unité de composition qui peut être nuancée par l’observation de menus détails"
À l'ouest du bourg de Lennon, Nac'h Gwen (Neachguen sur les cartes anciennes) domine, à 105 m d'altitude, un petit affluent de l'Aulne qui coule vers l'ouest et passe, un peu plus bas, devant la chapelle Saint-Nicolas. Le cours d'eau se réunit à un autre et alimentait un moulin avant de se jeter dans l'Aulne.
Carte de Cassini, vers 1785Carte IGN annotée.
Le cartel de présentation est si bien fait que j'en ai recopié et repris le texte (anonyme), cité en retrait.
Photo lavieb-aile.
"Nac'h Gwen : la « colline blanche », la « colline sacrée » (*). Bien avant la construction d'une chapelle, bien avant l'instauration d'un culte chrétien, le site de Nac'h Gwen a sans doute été le lieu d'un culte pré-chrétien. On pense que les anciens Celtes qui ont peuplé notre région se faisaient une idée de la beauté de leurs Dieux et de leur force mystérieuse, à travers les variations du ciel, le rythme des saisons, le jaillissement de l'eau et la fécondité de la terre. Ils avaient coutume de es rassembler auprès des sources , dans la pénombre des clairières, ou dans des sites privilégiés comme celui-ci où le regard embrasse les Montagnes Noires depuis les collines du Laz jusqu'à la Roche du feu. Leurs célébrations avaient pour objet d'attirer la protection bienveillante de leurs Dieux, ou de détourner leur colère. L'un des vieux saints des 6ème et 7ème siècle, comme saint Tugdual, saint They ou saint Idunet, moines itinérants, disciples de saint Maudez ou de saint Guénolé, s'est-il installé à Nac'h Gwen ? À partir d'un premier ermitage, un établissement monastique, un lieu de culte a-t-il été établi ici ?"
(*) Gwenn vient du celtique -vindo qui signifie "sacré". ( Jean-Yves Éveillard, Maître de conférence en Histoire ancienne à l'Université de Bretagne Occidentale).
Plus exactement peut-être, l'adjectif breton gwenn correspond au gaulois vindo qui signifie aussi bien "sacré" que "blanc". (irlandais find, gallois gwynn et fem. gwen), mais son usage en toponymie reléverait le plus souvent du sens "pur, sacré". Selon Christian J. Guyonvarc'h, il a donné le dérivé suffixé Vindonnus , surnom d'Apollon dans la religion celtique attesté par trois inscriptions à Essarois en Côte-d'Or , et "il n'est pas impossible que le gaulois ait eu aussi les trois sens fondamentaux du thème vindo- en celtique insulaire : « blanc », « beau » et « sacré », ce dernier sens étant appliqué aux êtres divins, comme l'indiquent le surnom d'Étain, Bé Find (« femme blanche »), et la désignation irlandaise des anges dans le vocabulaire religieux chrétien : in drong find (« la troupe blanche »)" (Encyclopédie Universalis)
Voir mon article sur la chapelle de la Fontaine Blanche à Plougastel .
"...Rien ne le prouve. Une autre chapelle a pu précéder l'édifice actuel, d'abord dédié à saint Maudez. Vers la fin du 16ème siècle, c'est le culte de Marie, mère de Jésus, qui allait prévaloir : en effet, après le Concile de Trente, les autorités romaines, trouvant nos vieux saints bretons "pas très catholiques", les ont remplacés par Marie, les Apôtres et autres saints officiellement reconnus ! Dieu merci, à Nac'h Gwen, on a gardé le souvenir et conservé les reliques de saint Maudez, et son Pardon continue à être célébré le Jeudi de l'Ascension."
Notons que le reliquaire en argent de Saint-Maudez date de 1567. Inscription SAINT MAOVDES EN : LA PAROESE DE : LEN[N]ON 1567. Poinçon Y.S.A et un quadrupède indistinct. Le fabrique était Hervé CARIOU.
Reliquaire classé, base Palissy PM29000471. Cliché H. Moreau.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La croix.
Sur le placître de la chapelle se dresse une croix de granite, à fut à pans, portant un crucifix en relief, elle repose sur un socle cubique à griffes et deux degrés maçonnés et daterait de 1545.
Les pieds du Christ sont posés sur un écusson.
—Castel (Yves-Pascal), 1980, Atlas des croix et calvaires du Finistère. Lennon, atlas n°1133. Néac’hguen
"La fontaine de dévotion se trouve non loin du village de Mesmeur mais elle est énigmatique, certaines parties n'ayant rien à voir avec l'édicule d'origine."
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
"La chapelle actuelle, inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques le 24 janvier 1952, est le résultat de nombreuses restaurations."
La porte sud et son bas-relief.
"Elle date du XVIe siècle, comme l'atteste une inscription en caractères gothiques au dessus de la porte sud :
LAN MILVcXXI / IEAN RIVELEN. R. / 1692
soit "L'an 1521, Jean Rivelen recteur."
En plus de cette inscription, un bas-relief bien conservé représente le Baptême de Jésus. Jean-Baptiste et l'Ange portant la tunique sont représentés de façon traditionnelle ; Jésus, lui, ne porte pas l'auréole crucifère qui permet habituellement de l'identifier."
L'atteinte par les lichens gêne beaucoup la lecture de la sculpture et la détériore.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
L'inscription du clocher.
"La chapelle fut restaurée en 1692 comme en témoigne l'inscription au dessus de la porte principale, sous le clocher : Mre GILLES KRIOU.RECT. Il s'agit de Gilles KERRIOU, originaire de Nac'h Gwen, et prêtre à cette date. C'est d’ailleurs lui qui qui fit édifier le presbytère tout près de la chapelle où résideront quelques uns de ses successeurs desservant la paroisse."
La famille KERRIOU semble plutôt implantée à Mesmeur, juste au nord de Nac'h Gwen dont elle était propriétaire.
En 1678, "honorable Joseph Corentin Kerriou [1615-1676], qui habitait Mesmeur et devait être le père de Gilles, déclarait "avoir une maison et chambre proche la chapelle de Monsieur Saint Maudez du Crec'h guen, aussy dépendante du lieu de Mesmeur" (Arch Nat P1555 f 473), cité par Chaussy 1953.
Gilles serait alors le fils de Catherine RIVOAL, que Corentin Kerriou épousa le 25 novembre 1633. Il décéda en 1699, et ses successeurs furent messire Jean Valay puis messire Yves Le Goff.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
Le clocher, ses têtes sculptées et sa cloche.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
Une crossette double à lion et ange à l'angle nord-ouest.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La cloche
Elle a été baptisée sous Pie X, pape de 1903 à 1914, et Mgr Dubillard, évêque de Quimper de 1900 à 1908. Elle a été réalisée par "Ferdinand Farnier, Fondeur" à Robécourt (Vosges). Elle porte en médaillon le Christ, la Vierge de l'Immaculée Conception et un calvaire.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
L'intérieur.
"La chapelle comporte une nef avec un bas-côté nord de cinq travées. Les colonnes sans chapiteaux sont d'un gothique très pur, d'un bel élan.
Au sud est une grande chapelle avec une sacristie en appentis.
Le mobilier comprend deux autels en bois peint et doré, et des stalles avec dossiers à balustres du XVIIIe siècle.
La dernière restauration de la chapelle, réalisée de 1996 à 1998, a été rendue possible grâce au legs de Mme Le Douzen, et aux subventions du Ministère de la Culture, du Conseil Régional et du Conseil Général. Les murs ont été passés au lait de chaux, mettant en valeur les statues, qui ont été restaurées . Des vitraux ont été commandés à Nicolas Fédorenko."
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
Les blochets de la croisée du transept.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
Les statues (celles des saints Côme et Damien seront décrites dans un article séparé).
1. Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle, Vierge à l'Enfant terrassant un démon, bois polychrome, XVIIe siècle. Dans le chœur, à droite de l'autel.
Je constate que cette Vierge appartient au groupe des "Vierges à l'Enfant foulant une représentation semi-humaine", collectées en Bretagne par Hiroko Amemiya avec 50 exemples, mais sans inclure cette statue. Soit parce que la créature noire à la queue de serpent et au visage de félin lui a échappé, soit qu'elle l'ait écartée. Elle était jadis peinte en rouge vermillon. Je n'ai constaté sa présence qu'en publiant ce cliché ; je n'ai donc pu centrer sur elle mes clichés et mon intérêt, et rechercher si elle présente des traits féminins. Le Dr Le Thomas a également fait le recensement de ce qu'il nomme les Vierges à la démone.
LE THOMAS (Louis), 1961 "Les Démones bretonnes, iconographie comparée et étude critique", Bulletin de la société Archéologique du Finistère t. 87 p. 169-221.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
2. Le Christ en croix entre Marie et Jean. Bois polychrome, XVIe siècle. Chœur.
Il tient la lance fleurdelisée (la lance était intacte sur un cliché de 1993, il est tonsuré, et son nom est inscrit sur le socle. Il est vêtu d'une chape à fermail, dont le pan fait retour sous le poignet droit, d'une tunique frangée et d'un surcot talaire.
Hauteur 1,05m, largeur 0,30, pr. 0,22 m
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
La chapelle de Nac'h Gwen à Lennon. Photographie lavieb-aile 2025.
5. Saint Corentin. Pierre polychrome, XVIe siècle. Mur est du bas-côté de la chapelle.
On peut s'étonner de la barbe en bouc ou "en ancre". La chasuble en boîte à violon recouvre une robe rouge .
La tenue d'évêque (mitre, gants épiscopaux, crosse, manipule) rappelle que saint Corentin fut le premier évêque de Quimper.
"Elle comprend une nef avec bas-côté nord de cinq travées, dont les voussures des grandes arcades sont à pénétration directe, et au sud une grande chapelle avec sacristie en appentis. Elle date du XVIè siècle, ainsi que le montre l'inscription de la porte sud : "LAN. MIL. VcXXI / IEAN. RIVELEN. R." La façade ouest, classique, porte la date de 1692 sur la clé en console et l'inscription : "Mre GILLES. KRIOV. RECTR." sous le fronton brisé. Le clocher à flèche courte n'a pas de galerie. La chapelle a été restaurée en 1952 et bénite le 1er février 1953.
Mobilier : Deux autels en tombeau droit, bois peint et doré. Stalles avec dossier à balustres.
Statues anciennes - en pierre polychrome : saint Maudez en chasuble gothique, XVIè, saint Maurice en abbé, XVIè, saint Corentin, XVIe ;
- en bois polychrome : Vierge Mère dite Notre Dame de Bonne Nouvelle, XVIIe, saint Côme, saint Damien, XVIIe, groupe du Christ en croix, XVIè, entre saint Jean et la Vierge portés par des consoles en forme de volutes.
Au-dessus de la porte sud qui est flamboyante, bas-relief en pierre représentant le Baptême du Christ. Si Jean-Baptiste et l'ange portant la tunique sont conformes à l'iconographie usuelle, le Christ ne porte pas le nimbe crucifère ; sur les bords, l'inscription susnommée, en caractères gothiques. Stalles Louis XIII, table de communion, XIXè"
— Notice sur Lennon, Bulletin diocésain archéologique et historique BDHA
La baie 2 (donateur vers 1520 ; Résurrection vers 1570; Jugement dernier 3ème quart XVIe ; rest. 1999) de l'église de Saint-Nic. Une représentation de l'Enfer froid ?
Classement Monuments historiques le 10 novembre 1906.
Le nom de la commune proviendrait du nom d'un saint breton dénommé saint Maeoc ou saint Maëc ou saint Mic ou saint Nic. Le nom de la paroisse apparaît dès le XIe siècle dans des chartes sous les noms de Plebs Sent Nic in pago Porzoed ou Plebs Sent Mic, puis au XIVe siècle sous le nom de Seinctnic, puis en 1410 sous celui de « Saint Vic » et en 1599 Saint Nic. Issue d'un démembrement de la paroisse de l'Armorique primitive de Plomodiern, Saint-Nic dépendait de l'évêché de Cornouaille, ce qui fut maintenu au Concordat.
D'un premier édifice, il persiste, si on suit les dadations des auteurs du Corpus vitrearum, un fragment de verrière de 1520 représentant un donateur (cf. Baie 2).
L'église, en forme de croix latine a été reconstruite après 1550 : les inscriptions attestent la vitalité du chantier : mur Nord ou porche datant de 1561, mur Sud de 1562, arcades de la nef de 1566 avec l'inscription :"M. Le Parlat. Fa. 1566", et clocher de 1576. A cette époque, elle reçut ses verrières figurées, dont un Cycle de la Passion — très certainement dans la maîtresse-vitre —, et un Jugement dernier de belle facture. Les archives mentionnent qu'en 1578, la Fabrique se pourvoit de vitraux. Certains panneaux avaient été intégrés, comme celui du donateur de l'actruelle baie 2, datant vers 1520.
A une date indéterminée — sans-doute lors de la restauration générale achevée en 1838—, ces ensembles ont été regroupés dans le transept (Baie 1 au nord et Baie 2 au sud). On ôta alors les meneaux de ces baies du transept, et la partie inférieure de celle du sud fut murée pour en réduire la surface. Les panneaux qui les occupaient furent mêlés aux panneaux anciens récupérés de la vitre axiale. On relève deux Suites de la Passion différentes, l'une vers 1560, l'autre vers 1600. Or, si on se base sur les trois lancettes de la maîtresse-vitre, celle-ci n'a pu donner que six scènes en deux registres: des vitres exogènes sont donc été introduites.
Les verrières ont été restaurées en 1928 par Touraine, puis déposées pendant la guerre en 1942, remontées par Gruber en 1955, et reaturées et complétées en 1994 (baie 1) et 1998-1999 par le maître-verrier quimpérois Jean-Pierre Le Bihan.
Pour Gatouillat et Hérold, "seule une partie de ces vitraux appartenait donc à l'église, et les autres y on été rapportés pour remplir les verrières. Les panneaux de la série la mieux représentée [la Passion] qui comportait nécessairement des épisodes supplémentaires dont une Crucifixion, paraissant trop nombreux pour avoir logé dans la maîtresse-vitre, qui n'admettait que dix scènes disposées en deux registres au vu des dimensions de ses trois lancettes, il est probable qu'ils ont été importés ici depuis un édifice inconnu."
.
Description de la baie 2.
Une seule lancette de 2,80 m de haut et de 1,70 m de large est divisée en quinze panneaux dont on décrit deux registres. Mais cette verrière est recomposée, associant 1) un donateur en bas à gauche datant vers 1520, 2) à sa droite quatre panneaux d'un Jugement dernier et Resurrection des morts datant du 3ème quart du XVIe siècle, 3) en haut au milieu une Résurrection détachée d'une Passion datant vers 1570 et 4) des panneaux ornementaux créés par Le Bihan en 1999., parfois associés en haut à des pièces anciennes (angelots, frangments d'un Baiser de Judas).
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
.
.
Deux panneaux inférieurs gauches. Le donateur, un dignitaire ecclésiastique présenté par saint Jean (v.1520?).
.
Ce panneau provient peut-être de la maîtresse-vitre, avant qu'elle soit refaite vers 1560. La scène est surmontée d'un dais en grisaille à double volutes, identique à celui qui surmonte les scènes de la Passion de la baie 1 (mais ces dais sont-ils postérieurs?). Le sol est un carrelage noir et blanc en dents de scie, qu'on ne retrouve pas ailleurs. Il existe de nombreuses restaurations dans la partie basse.
Saint Jean est identifié à ses attributs : son manteau rouge, l'absence de barbe, ses cheveux blonds, son calice de poison d'où sort un dragon (ici en vert).
Le donateur pouvait être identifié par son blason suspendu au drap vert du prie-dieu, mais celui-ci a été effacé pendant la Révolution.
L'inscription en lettres gothiques miserere mei domine ("Prends pitié de moi Seigneur") ne permet pas non plus de connaître le donateur. Il s'agit d'un verset du Psaume 6, l'un des psaumes pénitentiels.
L'élément remarquable, c'est la chape pluviale porté par le donateur, qui est donc non seulement un écclesiastique, mais un dignitaire : Évêque ? Père abbé ? l'absence de crosse et de mitre ne plaide pas en faveur de ces hypothèses. Chanoine de Quimper ? La bande blanche tigrée de gris est-elle une aumusse ?
Ce panneau est plus ancien que les autres et daterait des années 1520. Connaît-on un dignitaire du début du XVIe siècle, prénommé Jean, et attaché à la paroisse de Saint-Nic ?
Le personnage le plus considérable fut Claude de Tréanna, "noble et discret messire, grand archidiacre de Cornouaille et recteur de St Nic". La famille Tréanna porte d'argent à la macle d'azur. Ces armes figurent sur le retable de la chapelle Saint-Côme, et le nom et le titre de Claude de Tréanna sont inscrits sur l'un des deux reliquaires provenant de cette chapelle, qui porte la date de 1680.
S'agirait-il d'un Abbé de Daoulas ? Dans la période concernée, nous trouvons, avec le prénom Jean :
1502-1519 : Jean du Largez, abbé de Daoulas, était originaire de Botlézan, évêché de Tréguier. En 1505, il est aussi nommé évêque suffragant de Quimper (administrant le diocèse à la place de Claude de Rohan, l'évêque titulaire, simple d'esprit) et en 1515 évêque de Vannes. Il démissionne en 1519 et meurt à l'abbaye de Daoulas le 5 juin 1533. On trouve une inscription portant son nom à Plougastel, Chapelle de la Fontaine Blanche.
1550-1573 : L'abbé Jean Le Prédour gouverne l'abbaye (ses armoiries se trouvent dans l'oratoire Notre-Dame-des-Fontaines). Il était originaire de la paroisse de Plourhan, diocèse de Saint-Brieuc).
1573-1581 : Jean de Kerguiziau, abbé de Daoulas, originaire du manoir de Kerguiziau en Bohars, il fut inhumé dans la chapelle du Faou, attenante à l'église abbatiale.
Jean du Largez, dans son rôle d'évêque suffragant de Quimper, serait un bon candidat dans notre recherche. Mais il n'a aucun lien connu avec Saint-Nic.
Cette chape pluviale en tissu d'or damassé est orné d'orfrois de scènes brodées rectangulaires dont quatre sont visibles et représentent sans-doute les apôtres puisque saint Pierre peut y être identifié par ses clefs. Saint Jean (sans barbe) est vraisemblablement en dessous.
On comparera ce donateur au portrait du recteur Henri de Coatsquiriou, peint vers 1566 à la chapelle de Kergoat à Quéménéven (proche de saint-Nic), devant un Jugement dernier (baie 9). Le visage aux cheveux courts, et toute la tenue, sont assez similaires. Les recteurs des paroisses bretonnes, d'origine nobles, portaient-ils de telles chapes?
.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
.
.
Quatre panneaux inférieurs droits. Scènes d'un Jugement dernier (vers 1550-1575).
.
La scène est celle de la Résurrection des morts à l'appel des trompettes du Jugement, embouchées par les anges.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
.
.
À gauche, un ange en manteau rouge et ailes vertes souffle dans sa trompe, mais on devine au dessus des nuées les saints et saintes (dont un moine et peut-être un évêque) en grisaille qui s'apprêtent à accueillir les élus. Il devait y avoir au moins quatre autre panneaux décrivant cette assemblée autour du Christ du Jugement.
Sous l'ange devant une architecture antique bleue, trois morts enveloppés de leur linceul, debout, mains jointes figurent parmi les élus. Ils regardent, en haut, des êtres nus poussés vers un lac par des démons (verre bleu, nuées en boucles de grisaille, personnages en grisaille, cheveux parfois rehaussés de jaune d'argent).
.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
.
.
L'ange buccinateur de droite porte un manteau vert, des ailes violettes et un bandeau sur le front. Au dessous, un diable monstrueux conduits des damnés enchaînés vers un lac où quatre hommes et femmes nus font des gestes de supplication.
Il s'agit là très vraisemblablement d'une représentation de l'Enfer froid,an Ifern yen, un « enfer froid » mais brûlant, d’origine celtique, une conception a-chrétienne de l’enfer qui se serait maintenue en Bretagne .
Christian Maol relève une soixantaine de références à l’« ifern yen », à l’« abim yen » (l’abîme froid) ou la « maru yen » (la mort froide)en remontant au xve siècle. Comme le dit l'inscription de l’ossuaire de La Martyre , daté de 1619, et copie directe du Mirouer de la mort, ouvrage du recteur de Plougonven, Jehan An Archer Coz de 1519 : An maro : han ba : han : ifern : ien : pa : ho : soing : den : e : tle : crena : "La mort, et le jugement, et l'enfer froid, quand l'homme y songe, il doit trembler".
Selon Christian Moal, l’enfer froid punit les coupables de malice, de luxure et enfin d’envie. La représentation de l’enfer froid s’est formée et diffusée en France et a circulé en Bretagne où elle n’apparaît que dans une inscription de l’ossuaire de La Martyre (1619), copie du Miroir de la mort (1519), dans Buhez mab den (avant 1530) et dans la Passion d’Eozen Quilivéré (1530). Cette production, datée du XVIe siècle, s’inscrit dans un mouvement qui concerne la France et l’Europe, un thème à la mode à la Renaissance qui disparaît ensuite.
Iconographie :
.
Jugement dernier,BnF fr 19 f.38r, Saint Augustin, la Cité de Dieu, traduite par Raoul de Presles, enluminures Maître François , vers 1469-1473.
.
Tourment de l'enfer, l'enfer froid,BnF fr 19 f211r, Saint Augustin, la Cité de Dieu, traduite par Raoul de Presles, enluminures Maître François , vers 1469-1473.
.
Kompost des bergers BNF, VELINS-518
.
.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
.
.
Les deux panneaux inférieurs montrent la foule des ressuscités guidés par saint Pierre, manteau rouge et robe violette, tenant la clef du royaume des Cieux. La femme nue au premier plan pourraît être Éve, et Adam pourrait être à droite de saint Pierre. Le panneau inférieur droit rassemble divers fragments et les complète.
.
.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
.
.
Six panneaux supérieurs droits. La Résurrection ou Sortie du Tombeau (vers 1600).
.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
La baie 2 de l'église de Saint-Nic. Photographie lavieb-aile.
.
.
SOURCES ET LIENS.
— BARRIÉ (Roger) 1979 Étude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle : Plogonnec et un groupe d'églises de l'ancien diocèse de Quimper / ; sous la direction d' André Mussat, 1979 Thèse de 3e cycle : Art et archéologie : Rennes 2 : 1979. Bibliogr. f. 9-32. 4 annexes (vol. 2)
— COUFFON (René) LE BARS 1959 1988, Notice sur Saint-Nic, Diocèse de Quimper et Léon, nouveau répertoire des églises et chapelles, Quimper, Association diocésaine, 1988. - 551 p.: ill.; 28 cm.
"Vitraux du XVIè siècle (C.) dans les fenêtres du transept : au nord, la Passion en sept panneaux, et, au sud, mosaïque d'un Jugement dernier avec donateur à genoux présenté par une sainte."
— GATOUILLAT (Françoise), HEROLD (Michel), 2005 "Les vitraux de Bretagne", Corpus Vitrearum France- Recensement VII, Presses Universitaires de Rennes, Rennes : 2005, 367pp. pages 192-193.
"Saint-Nic.Dépose et éloignement des vitraux pour sauvegarde durant l'état de guerre
Publié le 26 avril 2008 par jeanpierrelebihan2 Les illustrations ne sont pas reproduites et puevnet être consultées sur l'article original.
Ces deux baies nous apprennent que l'église possèdait au XVI°siècle plusieurs vitraux de sujet diffèrent. Tout d'abord une Passion à laquelle il faut ajouter un panneau de la baie sud offrant quelques éléments de la scène où le Christ recolle l'oreille du serviteur du grand prêtre,ayant servi dans les deux lieux et l'auteur étant, il y a de grande chance, le même.Nous trouvons ensuite une Résurrection du Christ Sujet qui occupe deux panneaux qui ne sont pas de la même main ni du même esprit que la Passion.
Par contre, pour le panneau supérieur de Saint Nic, ici à gauche,
sauf la tête du Christ,nous relevons que ce panneau est du même carton que celle que l'on voit à l'église de Saint-Thuriau dans le Morbihan.
Autre sujet, cette Crucifixion du haut de la baie nord n'est pas d'un atelier cornouaillais connu et où certaines présentations de personnages se retrouvent à Saint-Thuriau, entre autres,Marie et Marie Madeleine
Dans la baie sud,deux sujets n'ont aucun rapport entre eux: le Jugement Dernier et le Donateur.
Ce dernier pourrait provenir de la baie du chevet où aurait régner ses armoiries. Son intercesseur et saint patron est ici Saint Jean tenant de la main gauche la coupe d'où sortent les serpents
LES ARCHIVES D'AVANT LA REVOLUTION.
il y en a peu .On sait seulement qu’en 1578, la Fabrique se pourvoit de vitraux. S’agit-il des deux baies du transept. Cette date correspondrait assez bien aux scènes de la Passion mais encore plus particulièrement aux restes d’un Jugement Dernier dont l’esprit correspond bien aux canons de l’école de Fontainebleau. Ll'église comme les deux vitraux sont bien de la seconde partie du XVI° siècle; A première vue, l’église, elle-même, semble bien être de cette époque. Le porche est daté de 1561, ainsi que les socles de certaines statues. De 1566, on relève un texte entre deux arcades de la nef avec: "Parlat Fabricien". Quant au clocher, il est de 1576.Mais aucune date n’a encore été trouvée sur le choeur.
L’abbé Corentin Parcheminou, dans "une paroisse cornouaillaise pendant la révolution " relève des débris de verre peints dans les réseaux d’autres fenêtres, ce qui indique l'ancienne présence de vitraux à sujets religieux.
A cette fin du XVIe siècle, la commune devait être assez riche, car nous découvrons qu’en 1578 la Fabrique de la chapelle Saint-Côme et Saint Damien offre un reliquaire en argent doré.
LA REVOLUTION
Cette époque a vu l'envoi, par les mairies, du département, de peintres vitriers ou vitriers souvent incompétants, pour supprimer les armoiries qui étaient le symbole de la féodalité.Cela fut le cas ici à Saint-Nic;
En novembre 1790, le conseil municipal charge le procureur de la commune, Henry Join, de faire disparaître les enfeus et armoiries de l'église paroissial et "autres chapelles" Cependant, semble-t-il, on a hésité à briser les armoiries ds vitraux.
Cependant le 30 avril 1791,on fit appel à un vitrier quimpérois du nom de Jean Louis Cavellier qui se charge pour la somme de 72 livres d’enlever les écussons des vitres peintes de l’église paroissiale et de la chapelle Saint-Côme. En voulant enlever ces armoiries, il brise les vitres qui les encerclaient.Il ne semble pas avoir fait entièrement son travail, car un blason est signalé, par de Courcy en 1860, à la chapelle Saint-Côme. Cette façon de travailler a été le cas de nombreux vitraux du Finistère,
La restauration de 1929. Dès 1927, l'architecte Paul Génuys propose un devis de restauration de ces vitraux. dans lequel il signale que les deux baies ont été murées dans la partie inférieure.
Il lui semble que les vitraux sont restés enfouis dans la maçonnerie.
Un peintre verrier parisien, Tournel, le contacte, car ce dernier souhaiterait vivement restaurer ces vitraux. C'est ce verrier,qui, a reconstitué les manques des sujets figuratifs de façon approximative.
La RESTAURATION DE LA PASSION EN 1929 ;
Suivant le constat dressé par l’abbé Parcheminou, le verrier restaurateur s’est donc trouvé devant des vitraux dont les manques étaient en verre blanc et qui étaient évalués à une surface de 1m2 par l’architecte.
L’armature de ferrures, qui devra être conservée, partageait la verrière en 15 panneaux dont les sujets, au nombre de sept, emplissaient deux panneaux chacun.
Les manques en verre blanc concernaient les parties hautes de la Flagellation et du Couronnement d’épines. Un filet encore en verre blanc devait courir le long des fers verticaux et au-dessus des scènes de l’Arrestation et du Couronnement d’épines.
L’abbé Parcheminou signalait de chaque côté de la Crucifixion » dans les petits panneaux, il y a un ange à genoux adorant le Christ ».Actuellement, nous n’avons rien de cela ; nous nous trouvons devant deux têtes dont une ancienne qui n’est pas, semble-t-il, celle d’un ange.
Le verrier de 1929, qui pourrait être le verrier parisien Tournel, a donc reconstitué les manques des sujets figuratifs de façon approximative sans se référer à une source possible telle qu'un carton antérieur, ce qui est le cas ici pour beaucoup de panneaux.
Les filets verticaux ont été traités en cannelures. Ces pièces n’ont pas du résister à la rouille des ferrures et à la dépose de 1942 ; De nombreux plombs de casse les défiguraient.
Pour faire une séparation entre le panneau de l’Arrestation et le bas de celui du Portement de Croix, une clôture d’enclos, dans l’esprit des arrestations du XVI°, mais incompréhensible, a été posée.
L'abbé Parcheminou confirme en partie nos propos sauf pour ce dernier et ajoute-t-il "cela montre de façon saisissante, toute la distance qui sépare encore dans l'art du vitrail, les conceptions modernes de la technique ancienne".
La guerre 39-45
le 6 mai 1942, l’architecte Prieur propose un devis de dépose et d’éloignement des vitraux pour sauvegarde durant l'état de guerre. Ce qui est approuvé par Monsieur le Secrétaire général des Beaux Arts et dont l’exécution est demandée sans délai par les autorités d’occupation car «St Nic se trouve à proximité du rivage et au pied des collines du Ménez Hom. De plus cette commune se trouve sur la route de Quimper à Morgat».
Le devis se monte à 8 181 francs 35 et dans le dossier, il n’est fourni aucune photo ni carte postale comme il est demandé.
Les vitraux déposés devaient être mis en caisses avec couvercles vissés et remplies de copeaux ou de paille. Celles-ci devaient rejoindre un dépôt provisoire à Quimper. Les caisses restent dans l'église de Saint-Nic. Cela ne semble pas avoir été exécuté car la mémoire des habitants de Saint-Nic se rappelle très bien de ces caisses qui ont traversé la guerre dans l’église près du clocher et qui ont manqué d’être pulvérisées par un obus. Ils avaient subis des dégats suite à la chute de l'obus, on ne sait qu'elle en était le style.
Pour en remplacer les restes, il est prévu une vitrerie losange. L'atelier quimpérois Le Bihan-Saluden, qui s'en charge, a une correspondance fournie en 1946 avec Monsieur Chabal architecte des Monuments Historiques, en avril, juin et octobre 1946.
Celui-ci transmet la maquette à Mr Cornou à l’Inspection générale.
Copie du texte, voir les illustrations sur le lien :
"SAINT NIC ET SAINT FIACRE DU FAOUÊT
Lors de la restauration de la Passion que nous avons mené en 1995, (Atelier jean pierre le bihan) vitraux, nous sommes donc trouvés devant trois sujets d’une Passion:l’Arrestation, la Flagellation et le Couronnement d’épines, dont la restauration de 1929 ne nous
satisfaisait pas.Pour conforter nos propositions de remplacement des apports d’il y a soixante six ans, nous avons dû faire des recherches auprès des autres Passions du XVIème siècle.
Trois d’entre-elles présentaient des analogies :
Un bourreau tire la langue au Faouêt, le même bourreau de Saint-Nic est moins démonstratif.
Cet échange de cartons, ou utilisation du même, nous l’avons déjà relevé entre Guengat et Gouézec pour une Passion (Cf BSAF tome CXVIII 1989).
LES CARTONS
Une quinzaine d’années maximum séparent ces deux verrières du Faouêt, et de Saint-Nic. Nous sommes dans cette deuxième moitié du XVIème siècle qui a vu éclore entre autres de nombreuses Passions dans le Finistère et dont il nous en reste encore ving quatre. On peut estimer que leur nombre, il y a 400ans, à plus du double.
Beaucoup d’entre elles se ressemblent et l’appétit des chercheurs bretons des XIXème et Xxème siècle en a été stimulé.Cela n’est pas spécifique à notre région et ce réemploi de cartons, autant sur le plan national qu’européen n’est pas prêt à donner son dernier mot.
Mais je pense que la région Bretagne est la première pour le remploi de cartons d’un même sujet, qui est la Passion."
— PARCHEMINOU (Corentin), 1930, une paroisse cornouaillaise pendant la Révolution.
Mes sources principales sont l'article de Christian Moal, puis les articles de Jérôme Baschet.
— BASCHET (Jérôme), 1993 Les Justices de l’au-delà. Les représentations de l’enfer en France et en Italie (XIIe -XVe siècle), Rome, EFR, 1993, p. 437-448 et fig. 152-159.
https://journals.openedition.org/ccrh/2886
— BASCHET (Jérôme), 1993, Les justices de l'au-delà. Les représentations de l'enfer en France et en Italie (XIIe-XVe s.). Rome, Ecoles françaises d'Athènes et de Rome, 1993. Christe Yves, compte-rendu Cahiers de Civilisation Médiévale Année 1995 Suppl. 1995 pp. 4-7
En résumé, on retiendra ces quelques conclusions. L'enfer gothique est figuré le plus souvent par la gueule d'enfer — elle est déjà attestée au xne s. — d'abord comme seuil infernal, ensuite comme lieu de tourments. Celle-ci est également l'image usuelle de l'enfer dans les manuscrits contemporains. Elle est accompagnée par la marmite sur le feu qui, à partir du milieu du xine s. (Bourges, puis Rouen), tend à se confondre avec elle. Il est rare au nord des Alpes que Satan intronisé préside aux supplices infernaux. Le portail de Conques et celui de Notre-Dame de la Couture au Mans, un siècle plus tard, en présentent une illustration exceptionnelle. À cette courte liste, j'ajouterai un témoignage précoce mais très important, celui des tituli de Gauzlin pour le revers de la façade de Saint-Pierre de Fleury au début du xie s. « Satan enchaîné dans une prison qui vomit des flammes » évoque exactement le même sujet dans YHortus Deliciarum d'Herrade de Landsberg.
— BASCHET (Jérôme), 1985, "Les conceptions de l'enfer en France au XIVe siècle : imaginaire et pouvoir", Annales Année 1985 40-1 pp. 185-207
— FRAPPIER ( Jean), 1953,. "Châtiments infernaux et peur du Diable". In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1953, n°3-5. pp. 87-96;
PRÉSENTATION.
Bien que la chapelle Notre-Dame de Kergoat ait été reconstruite à la fin du XVIe siècle, elle conserve des vitraux plus anciens, la baie 10 des saints et anges (2ème moitié du XVe siècle), la baie 8 de l'enfance et de la Passion du Christ (fin XVe) et la baie 5 rassemblant 4 apôtres et 4 prophètes d'un Credo, datant du 4ème quart du XVe siècle.
D'autres verrières contiennent des panneaux du XVIe siècle (baie 3, 4, 6, 7, 9 et 11).
Restaurations.
Dès 1600, les vitraux anciens du XVe et XVIe siècle furent réorganisés vers 1600, puis en 1841, Guillaume Cassaigne les modifiant, plaçant des ornements colorés dans les baies du chœur et du transept. Il replaça les panneaux qu'il remplaçait dans les petites fenêtres des collatéraux, en les encadrant de larges bordures.
En 1901, Felix Gaudin restaura les verrières du flanc nord, puis en 1922-1924 l'atelier Labouret intervint sur les trois verrières méridionales de la nef. Les vitraux furent déposés en 1942, replacés en 1954 par Gruber, entretenus par Hubert de Sainte-Marie en 1978, mais en 2005, les auteurs du volume Vitraux de Bretagne du Corpus vitrearum déploraient, dans la nef, et en particulier au nord, des trous et un état précaire.
En 2009-2010, l'atelier Anne Pinto de Tussau (Charentes) qui se charge de restaurer et surtout de protéger les vitraux. En effet, ceux-ci s'altèrent avec le temps : soit la peinture s'efface, soit la condensation (air froid extérieur, air chaud intérieur) ruisselle sur la face interne et lessive la peinture, soit celle-ci facilite le développement de micro-organismes (lichens et algues) qui rongent le verre.
La protection mise en oeuvre par l'atelier Pinto consiste en la pose d'une verrière de protection à la place du vitrail, lequel est décalé de 3cm vers l'intérieur pour créer une ventilation : c'est désormais sur la face interne du verre de protection que l'eau de condensation se forme et s'écoule. En outre, le vitrail est désormais à l'abri des garnements qui lancent des pierres, de la grêle, du vent ou de la pollution.
Mais l'atelier a aussi procédé à la restauration du vitrail lui-même. Des verres avaient été brisés ; certains fragments avaient été fixés par des "plombs de casse", plomb ficelle ou aile de plomb, qui, s'ils sont trop nombreux, finissent par altérer le dessin d'origine. Les soigneurs de vitraux en ont compté en moyenne 750 par verrière ! Ils les ont déposé au profit d'un collage bord à bord par résine silicone.
L'accumulation de poussières et de lichens avait encrassé les panneaux, en les noircissant ou les verdissant. Pire peut-être, la masse du verre se trouvait piquée de taches blanchâtres ou noires, surtout les bleus du XVe, alors que ceux du XVIe résistaient mieux. Un nettoyage au pinceau puis au coton-tige. Et puis l'ancien mastic très dur a été retiré, les verres bouche-trous ou les lacunes ont été remplacés par du verre soufflé maintenu par des cuivres Tiffany.
J'ai appris tout cela en lisant les panneaux exposés dans la chapelle et réalisés par l'atelier Anne Pinto
Les pertes subies, les remaniements et désordres consécutifs à ces initiatives ne permettent pas de définir avec certitude le programme iconographique initial. Mais les huit personnages de la baie 5, réunis deux à deux et portant des phylactères, proviennent à l'évidence d'un Credo apostolique et prophétique à 24 personnages, rappellant la grande verrière d'axe de Quemper-Guézennec, un peu antérieure (1460-1470).
.
Description.
La baie actuelle mesure 2,30 m de haut et 1,40 m de large. Elle comporte deux lancettes cintrées et un tympan à un ajour et deux écoinçons dont les rois de Jessé Ezéchias et Jechonias attestent de la présence, toujours au 4ème quart du XVe siècle, d'un Arbre de Jessé.
Je peux soulever aussi l'hypothèse d'un Arbre de Jessé à 12 rois de Juda, entouré de 12 prophètes et de 12 apôtres.
Les huit figures du Credo apostolique et prophétique sont rassemblés deux à deux (un apôtre avec son nimbe, et un prophète) dans des niches et tenant un phylactère où est inscrit leur nom, et un article du Credo ou un verset prophétique.
L'identité des personnages, et le relevé des inscriptions, n'ont pas encore été publiés : c'est le but de cet article.
-lancette de gauche :
Saint Jacques le Majeur et le prophète Isaïe
Saint André et Baruch.
-lancette de droite
Saint Pierre et Jérémie (têtes modernes)
Philippe, tenant une croix et Malachie
L'ordre des apôtres dans le Credo étant Pierre-André-Jacques-Jean-Thomas-Jacques le Mineur-Philippe-Barthélémy-Matthieu-Simon-Jude-Mattias : Pierre, André et Jacques apôtres ici présents se plaçaient donc au tout début de la grande verrière initiale.
Le thème du Credo apostolique et prophétique est rare en Bretagne (Kermaria-an-Iskuit et Quemper-Guézennec) et unique en Finistère. Mais au XVIe siècle, les 12 apôtres portant leur phylactère accueillent les fidèles dans la plupart des porches des églises et chapelles bretonnes.
Nous avons bien affaire à un fragment de Credo apostolique et prophétique où les apôtres sont clairement identifiables, présentant les articles 1, 2, 3 et 7 du Symbole des Apôtres, selon une forme abrégée voire conventionnelle, et selon une graphie gothique qui associe au moins deux styles différents (restauration?). L'écriture la plus difficile à déchiffrer est la plus belle en terme de calligraphie, mais elle multiplie les procédés d'abréviation, les omissions par tilde, les lettres conjointes, les lettres souscrites pour placer un texte de plusieurs mots sur un emplacement réduit. C'est ce qui en fait sa richesse.
Les apôtres devaient être disposés selon deux rangs verticaux, puisque les apôtres des six premiers articles se trouvent à droite, et inversement pour Philippe qui appartient aux six apôtres suivants.
Le Credo prophétique est d'autant plus ardu à décrypter que le verset qui leur est attribué n'est pas fixé, et que les prophètes ne sont pas identifiables, comme les apôtres, par des attributs. Là encore, les autres exemples de Credo de l'iconographie montrent que la réduction du texte peut aller jusqu'à l'omission de mots ou de plusieurs lettres des mots, ce qui rend le déchiffrement du verset trop inaccessible à un néophyte.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
En haut à gauche : L'apôtre Jacques le Majeur et le prophète Isaïe.
.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
Isaïe et sa prophétie Ecce virgo concepiet .
Isaïe est barbu et coiffé d'un bonnet vert. Il est pieds-nus, peut-être par suite de la recomposition des fragments.
Malgré quelques difficultés de lecture, le phylactère porte le début du verset d'Isaïe, VII, 14 : ESAIUS ECE VIRGO CONCIPIET (ou co(n)cep...pa(r)iet). Ecce virgo concipiet et pariet filium, et vocatibur nomem ejus Emmanuel : "une vierge concevra, elle enfantera un fils qui sera appelé Emmanuel".
Dans la tradition, et notamment à Quemper-Guezennec, c'est bien Isaïe, et ce verset, qui sont appariés à l'apôtre Jacques le Majeur.
.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
L'apôtre Jacques le Majeur et son troisième article du Credo qui conceptus est de Spirituo Sancto natus est Maria Virgine
Jacques porte, sous le nimbe, le chapeau frappé d'une coquille et tient le bourdon du pèlerin vers Compostelle. L'inscription JACOBUS QUI -FEZ NATUS EST DE-- est suffisante pour attester que le verset cité est bien le troisième du Credo.
Plus intéressant peut-être est l'inscription qui se lit, tracée en réserve sur le galon du manteau blanc de l'apôtre : VOS DEVS --ANG--ET, car sa présence n'a pas été soulignée.
.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
En bas à gauche : L'apôtre André et le prophète Baruch.
.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
Le prophète Baruch et son verset :
Le prophète est coiffé d'un bonnet (presque un casque) et ses épaules sont couvertes d'un camail frappé d'hermines portant un collier à gros maillons de chaines. Ne serait-ce pas là un réemploi provenant d'un roi de l'Arbre de Jessé ? Son manteau est rouge, et c'est une épée qui longe son côté gauche.
Le texte est BARUCH VITIO EGO ANTEUS [AUTEM ] ---DUUM --ET ER--
Je n'ai pu rattacher cette inscription à un verset de Baruch. Baruch est plus souvent cité dans les Arbres de Jessé (avec les citations Hic est enim deus noster Baruch 3:36, ou Post haec in terris visus est. Baruch 3:38) que sur les Credo, où son verset 3:38 Visus est in terris et cum hominibus conversatus est est emprunté par Jérémie à qui il est attribué.
.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
L'apôtre André et le deuxième article du Credo.
.
André est accompagné de sa croix en X (de couleur jaune). Il est nimbé, barbu, il tient un livre, il est pieds nus, et l'inscription indique :
ANDREAS EST IN IESUM XSTUM FILIUS EI--, soit l'association du titulaire, ANDREAS, et du début de deuxième article Et in Iesum Christum Filium eius unicum , Dominum nostrum.
.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
En haut à droite : saint Pierre et Jérémie (têtes modernes).
.
1. Jeremias : patre(m) (in)voca/ .is..et v..me
. S : petrus Credo i(n) deu(m) patre(m)
Nous avons affaire au premier article du credo présenté par Saint Pierre préfiguré par Jérémie et sa citation Patrem invocabit qui terram fecit.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
Saint Pierre.
Saint Pierre tient sa clef sur l'épaule droite. La tête est moderne : un ancien n'aurait pas omis la calvitie et le toupet de l'apôtre.
Son phylactère indique :
S.PETRUS CREDO IN DEUS PATREM
Soit "Saint Pierre" puis le début du premier article du Credo "Je crois en Dieu le Père".
L'inscription en lettres gothiques utilise des deux-points , des lettres conjointes , des abréviations par titulus, et des lettres ornées.
.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
La baie 5 ou verrière du Credo prophétique et apostolique (4ème quart XVe siècle, fragments recomposés) de la chapelle de Kergoat à Quéménéven.Photographie lavieb-aile.
.
.
Le prophète Jérémie.
il est coiffé d'un bonnet vert conique. La tête est moderne.
L'inscription indique :
JEREMIAS PATREM VOCABIS ME ET POST ME
Soit le nom Jérémie et fragment du verset de Jérémie 3:19 :Et dixi: Patrem vocabis me, et post me ingredi non cessabis.
"Je disais : Tu m'appelleras: Mon père! Et tu ne te détourneras pas de moi."
Cette association de saint Pierre avec le prophète Jérémie est extrémement fréquente, mais l'inscription présente ici est beaucoup plus rare. Ce prophète présente ce verset Je 3:19 au Baptistère San Giovanni de Sienne du milieu du XVe siècle (peinture de Lorenzo Vecchetia). Ou dans le Bréviaire de Martin d'Aragon (entre 1380 et 1400) BnF Rothschild 2529 f.2. Mais ailleurs, et depuis le Verger de Soulas, Jérémie présente un texte qui est composé de plusieurs découpages de citations bibliques : Patrem invocabitis qui terram et concidit coelum.
.
.
.
En bas à droite : l'apôtre Philippe et le prophète Malachie.
L'inscription indique S: PHILIPPE IUDICAR VIVOS ET MO : fragment du 7ème article inde venturus est iudicare vivos et mortuos.
.
.
.
Le prophète Malachie.
.
L'inscription indique :
MALACHIAS ONUS[?] INIQUITATE .
Il ne s'agit plus de la même écriture, le deux-point a disparu, les abréviations également : ce texte est-il fidèle à l'original ? Le terme iniquitate se retrouve dans Malachie 2:4 Lex veritatis fuit in ore eius, et iniquitas non est inventa in labiis eius; in pace et in aequitate ambulavit mecum et multos avertit ab iniquitate. "La loi de la vérité était dans sa bouche, Et l`iniquité ne s'est point trouvée sur ses lèvres; Il a marché avec moi dans la paix et dans la droiture, Et il a détourné du mal beaucoup d`hommes".
Dans la salle du Credo des appartements Borgia du Vatican, Philippe est associé à Malachie avec le texte ascendam at vos in iudicio et ero testis velox ou bien Ascipient in me deum suum quem confixerunt. Ce prophète est aussi associé, dans le même Credo Borgia, à Simon au 10ème article pour le verset Cum odio habueris, dimitte.
.
.
LE TYMPAN.
.
Dans l'ajour, le buste du Christ bénissant et globe crucifère est estimé vers 1540, il était autrefois utilisé en baie 7 . Dans les écoinçons se trouvent 2 rois d'un Arbre de Jessé, couronnés, dotés du sceptre, tenant le phylactère indiquant leur nom : Ezechias et Jechonias (4e quart XVe).
.
COMMENTAIRE
Le thème du "Credo apostolique et prophétique" et son illustration sur le vitrail de Kergoat.
Cette iconographie s'est développée au XIIIe siècle à la suite de réflexions théologiques montrant que les articles du Credo trouvent leur fondement dans le Nouveau Testament, par des références à des textes des Évangiles, des Épîtres et des Actes des Apôtres, mais aussi dans l'Ancien Testament par des citations des Prophètes, ce qui fonde le Credo non pas sur tel ou tel Concile, mais sur la parole de Dieu.
a) Le Symbole des Apôtres
Ce Symbole des apôtres, souvent appelé Credo comme celui de Nicée, était récité quotidiennement par les clercs dans la lecture de leur bréviaire, et, depuis le Missel Romain de 2002, il peut être récité à la place du Credo lors de la Messe.
Il est la traduction, latine puis française, d'un texte grec. On le reconnaît dès le premier article qui dit Je crois en Dieu le Père tout-puissant (Credo in Deum, Patrem omnipotentem) alors que le Credo énonce Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant (Credo in unum deum ).
Il s'agit ici non pas du Credo à proprement parler, celui qui est récité à la messe et qui est le Symbole de Nicée-Constantinople, mais le Symbole des Apôtres, une profession de foi qui, selon la tradition, proviendrait directement des Apôtres et qui serait donc inspiré par l'Esprit-Saint. La légende développée dès le IVe au VIe siècle veut même qu'à la veille de leur dispersion, chacun des douze apôtres en ait récité un article : il compte donc douze articles de foi. On trouve cette tradition chez Ambroise de Milan (339-397) puis chez Rufin d'Aquilée (345-410), l'auteur qui donne le premier texte latin du symbole. celui-ci écrit dans Commentaire du symbole des apôtres (v.400) " Nos anciens rapportent qu'après l'ascension du Seigneur, lorsque le Saint-Esprit se fut reposé sur chacun des apôtres sous forme de langues de feu, afin qu'ils puissent se faire entendre en toutes les langues, ils reçurent l'ordre de se séparer et d'aller dans toutes les nations pour prêcher la parole de Dieu. Avant de se quitter, ils établirent en commun un régle de la prédication qu'ils devaient faire afin que, une fois séparés, ils ne fussent exposés à enseigner une doctrine différente à ceux qu'ils attiraient à la foi du Christ ; étant donc tous réunis, remplis de l'Esprit -Saint, ils composèrent ce bref résumé de leur future prédication, mettant en commun ce que chacun pensait et décidant que telle devra être la règle à donner aux croyants. pour de multiples et très justes raisons, ils voulurent que cette règle s'appelât symbole."
Au VIe siècle, à la suite de deux sermons pseudo-augustiniens (Sermon 240 et 241) d'un prédicateur gaulois, chaque article fut attribué à un apôtre particulier : ce point est important , puisqu'il va nous aider à déchiffrer le texte du phylactère si nous identifions l'apôtre. Voici la répartition selon le texte latin, celui qui nous interesse :
1- St Pierre : Credo in Deum, Patrem omnipotentem, creatorem caeli et terrae
2- St André : Et in Iesum Christum Filium eius unicum , Dominum nostrum
3 - St Jacques le Majeur : qui conceptus est de Spirituo Sancto natus est Maria Virgine
4 -St Jean : passus sub Pontio Pilato, crucifixius, mortuus et sepultus
5 -St Thomas : descendit ad inferos, tertia die ressurrexit a mortuos
6 -St Jacques : ascendit ad caelos ; sedet ad dexteram patris Dei Patris omnipotentis
7 -St Philippe : inde venturus est iudicare vivos et mortuos
8 -St Barthélémy : Credo in Spirituum Sanctum
9 -St Mattieu : sanctam ecclesiam catholicam
10 -St Simon : sanctorum communionem, remmisionem pecatoribus
11 -St Jude : carnis resurrectionem
12 -St Matthias : vitam eternam.
Ce Credo apostolique est représenté en Bretagne dans le porche ou sur le calvaire de très nombreuses chapelles et églises (je citerai le calvaire de Saint-Venec en Briec, l'ossuaire de Sizun, le porche de Saint-Herbot à Plonevez-du-Faou, saint-Mélaine à Morlaix, mais la rencontre de l'alignement de leurs niches est trop fréquente pour qu'une liste soit exsaustive.) Voici par exemple Saint Jacques à Saint-Venec, avec un fragment de l'article ascendit ad c(a)elos :
b) Le Credo prophétique.
Il relève, sur le plan théologique, de la typologie biblique, ou recherche de la correspondance entre l'Ancien et le Nouveau Testament, conformément à la phrase de Saint-Augustin dans Questions sur l'Heptateuque,2, 73 "Le Nouveau Testament est caché dans l'Ancien, et l'Ancien se dévoile dans le Nouveau". Cette exègése était particulièrement nécessaire pour le Credo, dont un article du Symbole de Nicée affirme : "Je crois en l'Esprit Saint [...] il a parlé par les prophètes". J'ignore à quelle date les théologiens (pour Emile Male, "quelque théologiens contemporains de St Thomas d'Aquin au XIIIe) ont cherché dans les textes des Prophètes les verset qui préfigurent les articles du Credo, mais dès le XIVe et surtout au XVe siècle, cette correspondance se trouva illustrée soit dans les miniatures et enluminures (Heures du Duc de Berry), les gravures des incunables (Calendrier des Bergers, XVe), les peintures murales (Génicourt, Meuse, XVIe), les stalles (dès 1280-1290 à Pöhlde, Basse-Saxe; consoles de la chapelle Bourbon à Cluny et au XVe à la cathédrale Saint-Claude de Genève, comme à Saint-Ours d' Aoste en Savoie ; "credo savoyard" de la cathédrale de Saint-Jean de Maurienne), les sculptures (portail de la cathédrale de Bamberg, fonts baptismaux de celle de Meersburg, châsse de St Héribert à Cologne, piédroits de la cathédrale Saint-Jacques de Compostelle, fenêtres de la basilique Saint-Rémi de Reims, trumeau et portail nord de Chartres, porche de la cathédrale de Tarragone, déambulatoire de la cathédrale d'Albi, portail du Beau Dieu d'Amiens, portail sud de la cathédrale de Bourges...) et les vitraux (infra).
L'une des bases théologiques est le Commentaire du Credo par Thomas d'Acquin.
Deux thèmes iconographiques relèvent de la même analyse typologique, et ces deux thèmes sont organisés autour du chiffre douze: l'Arbre de Jessé, dès le XIIe siécle, avec les douze rois de Juda préfigurant la royauté du Christ. Et les douze Sibylles qui ont prophétisé l'avènement du Christ. C'est ce qui rend bien intéressant la présence des deux rois au tympan de la baie 11, et qui laisse imaginer deux vitraux à Kergoat, l'un consacré au Credo apostolique, l'autre à l'arbre de Jessé.
L'une des plus belles, des plus grandioses et des mieux conservés de ces représentations du credo prophétique se trouve à Sienne, à quelques mètres du célèbre pavement du Duomo consacré aux Sibylles : c'est la voûte du Baptistère, réalisé de 1415 à 1428 par Lorenzo di Pietra dit Vechietta. Les apôtres, portant leur phylactère, sont placés en vis-à-vis de leur précurseur.http://www.viaesiena.it/fr/caterina/itinerario/battistero/articoli-del-credo/articoli-della-terza-campata
Les vitraux ne sont pas en reste : Vitrail de la Sainte Chapelle de Bourges, de la cathédrale de Chartres, de l'église Saint-Marcel à Zetting (57), 2e quart XVe), de la chapelle de la Mailleraye à Jumièges, et en Bretagne celui de Quemper-Guezennec (Cotes d'Armor) datant de 1460-1470 décrites par Jean-Pierre le Bihan http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-35934749.html
A la différence de celle des apôtres, la liste des versets prophétiques n'est pas fixée, mais on retrouve néanmoins une certaine constance. Je m'appuierai sur le relevé de J.P. Le Bihan à Quemper-Guezennec (Q.G) et sur le texte du baptistère de Sienne (B.P)
1-St Pierre : Jérémie : Patrem invocavit qui terram fecit (Q.G) (citation complexe)
2-St André : David : Filius meus es tu ego hodie (Q.G)
= Psaumes, 2, 7 : Domine dixit ad me : Filius meus es tu ego hodie genui te (Vulgate)
"Je publierai le décret : Yahvé m'a dit : Tu es mon fils, je t'ai engendré aujourd'hui".
3-St Jacques le majeur : Isaïe : Ecce virgo concipiet et pariet (Q.G) :
= Isaïe, VII, 14, Ecce virgo concipiet et pariet filium, et vocatibur nomem ejus Emmanuel : "une vierge concevra, elle enfantera un fils qui sera appelé Emmanuel".
4-St Jean : Daniel : Post LXX hedomadas, accidetur Christus (Q.G)
: Ezechiel : Signa Thau gementium (B.S)
: Zacharie 12,10: Ascipiens ad me, quem confixierunt (Autre)
= Zacharie, 12, 10 : ascipient me, quem confixierunt :"ils tourneront les regards vers moi, celui qu'ils ont percé"
5-St Thomas : Malachie : Et fuit Jonas in ventrem ceti (Q.G)
: Osée, 13, 14 De manu mortis liberado eos...ero mors tua, o mors, ero morsuus tuus, inferno (autre) : "Je les délivrerai de la mort...Ô mort, où est ta peste ? Séjour des morts, où est ta destruction? "
6 -St Jacques : Michée : Ce ... et erit civita gloria (Q.G)
: Amos : qui aedificavit in coelo ascensionem suam (B.S)
7 -St Philippe : Zacharie : Acharias, suscitabo filios tuas (Q.G)
: Joël : In valle Iosaphat iudicabit omnes gentes (B.C)
8 -St Barthélémy : Sophonie : sedebo ut judicui omnes gentus (Q.G)
: Aggée : Spiritus meus erit in medio vestrum (B.C)
9 -St Matthieu : Joel : Spiritus meus erit une medie vestrum (Q.G)
: Sophonie : Hic est civitas gloriosa qui dicitur extre me non est altera (B.S)
10 -St Simon : Osée : Ose, arida audite verbum Dominum (Q.G)
: Malachie : cum hodio abueris dimille ( B.S)
: Malachie : deponet dominus omnes iniquates nostras.(La Mailleraie)
11 - St Jude : Amos : qui aedificat in caelo ascensionem suam. (Q.G) (La Mailleriae)
: Zacharie : Suscitabo filios tuos (B.S)
12 -St Mattias : Ezechiel : Et erit dominus regnum missus.(Q.G)
: Abdias : Et erit domino regno (B.S)
On peut trouver une magnifique illustration sur le Psautier de Jean de Berry (Gallica).
.
.
SOURCES ET LIENS.
— GATOUILLAT (Françoise), HEROLD (Michel), 2005 "Les vitraux de Bretagne", Corpus Vitrearum France- Recensement VII, Presses Universitaires de Rennes, Rennes : 2005, 367pp. pages 169-171.
Sur le Credo apostolique :
Le Livre de prière d'Anne de Bretagne (Jean Proyer, Tours 1492-1495), Morgan & Pierpont Library
— FAVREAU Robert 2003,Les autels portatifs et leurs inscriptions, Cahiers de civilisation médiévale 2003 Volume 46 pp. 327-352 :http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ccmed_0007-9731_2003_num_46_184_2865
— Baptistère de Sienne : http://www.viaesiena.it/fr/caterina/itinerario/battistero/articoli-del-credo/articoli-della-seconda-campata
— Psautier de Jean de Berry, Enluminures de André Beauneveu 1380-1400 : gallica
—GAY (Françoise) 1993, Le choix des textes des prophètes face aux apôtres au Credo", in Actes du Colloque Pensée, image et communication en Europe médiévale. A propos des stalles de Saint-Claude - Besançon
— GAY (Françoise) 2019, Introduction au catalogue des inscriptions...
—GAY (Françoise), 2019, Les doubles credo, prophètes et apôtres = Les inscriptions présentées par les prophètes dans l’art de l’Occident médiéval – catalogue et édition
— HASENORH (Geneviève), 1993 "Le Credo apostolique dans la littérature française du Moyen-Âge", Actes du Colloque Pensée, image et communication en Europe médiévale. A propos des stalles de Saint-Claude - Besançon
— LACROIX (Pierre) , Renon, Andrée, Mary, Marie-Claude, Vergnolle, Éliane [Publ.] Pensée, image et communication en Europe médiévale. A propos des stalles de Saint-Claude - Besançon (1993).
— RENON F, relevé du Credo du chœur de la cathédrale de Cambray en 1404 Revue de l'art chrétien: recueil mensuel d'archéologie religieuse, Volume 8 Arras ; Paris 1864 page 262.
— RITZ-GUILBERT, Anne 1993 ; "Aspects de l'iconographie du Credo des apôtres dans l'enluminure médiévale", Pensée, image & communication en Europe médiévale : à propos des stalles de Saint-Claude; Besançon; Asprodic L'auteur analyse les Credo typologiques apparus dans l'enluminure du 13e siècle, puis la version originale qu'en donne Jean Pucelle dans le Bréviaire de Bellevill (Paris, B. N., ms lat. 10483) aux environs de 1323-1326. Le peintre a utilisé le Credo des apôtres comme attribut de la vertu personnifiée de la Foi
—SCHMITT (Jean-Claude), 1989 "Les images classificatrices", in Actualité de l'histoire à l'Ecole des chartes: études réunies à l'occasion publié par Société de l'Ecole des charte 1989 pp.311-341.
Les vitraux de Saint-Nicolas-de-Port : la baie 20 de la troisième chapelle latérale sud (Saint Georges et saint Martin, Valentin Bousch v.1514-1520 ; panneaux typologiques et anges à phylactères du tympan, atelier lorrain et Jacot de Toul v.1510-1520). Monogramme de verrier.
"Le culte de saint Nicolas de Bari s'est établi à Saint-Nicolas-de-Port (à 13 km de Nancy) autour d'une relique d'une phalange du saint évêque depuis le XIIe siècle, et un pèlerinage majeur pour la chrétienté s'y est développé. La victoire du duc René II, duc de Lorraine et de Bar, face au grand duc d'Occident Charles le Téméraire en 1477 lors de la bataille de Nancy, incite le duc à faire édifier un édifice imposant pour symboliser le retour à l'indépendance de la nation Lorraine ainsi que sa reconnaissance au saint patron et protecteur de la Lorraine. Le choix de Saint-Nicolas-de-Port qui s'appelle encore simplement Port est évident, puisque la ville, alors la plus peuplée du duché, est le centre économique du duché de Lorraine attirant de nombreux marchands de toute l'Europe lors des foires. Les travaux de reonstruction de l'église débutent à la fin du XVe siècle.
Les verrières ont été décrites par Michel Hérold, qui leur a consacré en 1993 une monographie du Corpus vitrearum. Toutes les informations de cet article proviennent de ses travaux.
"Le vitrage de l'édifice ayant suivi de près les progrès de l'architecture, moins de trente années séparent les verrières les plus anciennes des plus récentes (la « grisaille des Bermand ») : on commença à vitrer l'abside en 1508, et la fenêtre occidentale porte les armes de Renée de Bourbon morte en 1539.
De nombreux donateurs ont permis de financer un tel programme et la diversité de leur condition sociale, mais aussi de leur origine géographique se reflète dans les oeuvres conservées.
Au premier rang, on trouve bien entendu la famille ducale de Lorraine, dont les donations occupent les places privilégiées d'un édifice considéré comme le sanctuaire national des Lorrains aux trois verrières de l'abside offertes par le duc René II, mort en 1508, répond celle de la façade occidentale où le duc Antoine, sa femme Renée de Bourbon et son frère Jean, évêque de Metz, firent placer leurs armes. D'autres blasons aujourd'hui dispersés dans l'édifice indiquent par ailleurs que la générosité ducale ne s'était pas limitée aux seules baies axiales, mais avait concouru au vitrage de l'ensemble de l'église, aux côtés de quelques représentants de la noblesse lorraine (seul Henri de Thierstein, dont la famille est étroitement liée à l'histoire du pèlerinage, a pu être identifié formellement) mais surtout de riches marchands qui faisaient placer leurs seings manuels au bas des verrières, et même de cités comme Bâle et Strasbourg qui entretenaient d'étroites relations politiques ou commerciales avec la Lorraine. Cette diversité des donations explique l'absence d'un programme iconographique bien défini et même, comme le remarque Michel Hérold, la relative banalité des thèmes choisis, mais elle a également permis l'intervention d'ateliers de diverses origines et font de cette monographie une étude passionnante sur les courants artistiques du début du XVIe siècle dans l'est de la France.
Vingt-huit baies possèdent encore des vitraux anciens, certains malheureusement très mutilés en 1635 lors du pillage et de l'incendie de l'église. Aux dégâts causés par les troupes franco-suédoises s'ajoutèrent les restaurations maladroites entreprises par Napoléon Rives et Désiré Laurent au milieu du XIXe siècle : de nombreux panneaux furent alors déplacés et regroupés arbitrairement." (D'après G.M. Leproux)
Les maîtres-verriers :
"Trois des baies de l'abside reçurent des vitraux colorés (vers 1510, baies 200, 201, 202), de même toutes les baies des chapelles et des bas-côtés ; les fenêtres hautes de la nef étaient de verre blanc en losanges ; la mise en place de toute la vitrerie échelonnée sur près de 35 ans, donna de l'ouvrage à plusieurs ateliers de verriers : Nicolas Droguet, de Lyon, à Saint-Nicolas-de-Port jusqu'en avril 1510 et maître George (baies de l'abside), peut-être avec la collaboration de Jacot de Toul et de maître Nicolas ; le 1er septembre 1514 Valentin Bousch, de Strasbourg passe contrat pour exécuter des verrières blanches en losanges, il exécute aussi de nombreuses verrières historiées ; peuvent lui être attribuées : la Transfiguration (baie 107), l'Adoration des Mages, saint Nicolas, saint Sébastien et saint Christophe (baie 109), la verrière de la rose ouest (baie 225) à la gloire de la famille de Lorraine ; d'autres artistes originaires du Rhin supérieur, restés anonymes, travaillent en même temps que Valentin Bousch ; plusieurs ateliers locaux réalisent des vitraux pour la basilique : Jehan de Saint-Nicolas-de-Port, Nicolas de Saint-Nicolas-de-Port, maître I V de Toul (baie 20) ; dès 1576 on répare des verrières endommagées ; le 11 novembre 1635 les troupes suédoises incendient la basilique ; vers 1770 on procède à une remise en plomb générale ; les restaurations se succèdent : 1847, 1848 et 1850 jusqu'au delà de 1855, par les maîtres verriers restaurateurs nancéiens Pierre-Napoléon Rives et Désiré Laurent ; ils procèdent à la remise en état des vitraux anciens, restituent et complètent la vitrerie des chapelles latérales et regroupent dans quelques baies des bas-côtés et des absidioles les fragments anciens isolés ; ces restaurations abusives aboutissent à la mutilation définitive de la plupart des verrières ; de 1888 à 1906 les maîtres verriers restaurateurs parisiens Steinheil et Albert Louis Bonnot mènent une seconde campagne de restauration ; en 1918 une partie des verrières anciennes sont déposées ; en 1921 le maître verrier restaurateur parisien Auguste Labouret restaure les verrières des chapelles latérales restées en place pendant la guerre ; à la veille du second conflit mondial, tous les vitraux anciens sont à nouveau déposés ; dès 1947, 1948 le maître verrier restaurateur parisien Bidault remet en place les verrières anciennes en respectant la disposition du 19e siècle." (Palissy IM54002402)
.
.
La basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
Description générale.
.
Cette baie n°20 comporte 3 lancettes polylobées et un tympan ajouré, elle occupe la troisième chapelle sud. Elle mesure 2,96 m de haut et 1,84 m de large. Elle est peinte par grisaille et jaune d'argent sur verres transparents sertis au plomb.
C'est un ensemble composite réuni sans souci de cohérence en 1850 par les restaurateurs de 1850, le cartonnier Désiré Laurent et le peintre Napoléon Rives. Elle comprend des éléments d'origine et des éléments rapportés, notamment ceux de Valentin Bousch. Les hauts de lancettes sont modernes (1850).
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
LES PANNEAUX D'ORIGINE PAR UN ATELIER LORRAIN ET PAR JACOT DE TOUL : LA MATERNITÉ VIRGINALE DE MARIE.
.
Le programme iconographique originel de cette baie et de sa voisine reposait sur la Maternité virginale de Marie et sa préfiguration typologique. On en trouve quelques traces dans la baie 18, mais bien davantage dans cette baie.
Elle témoigne de la présence sur le chantier peu avant 1510 d'un atelier Lorrain anonyme. Cet atelier est également l'auteur, à Saint-Nicolas, d'un Martyre de saint Sébastien, d'une sainte Barbe, et d'une Assomption encore conservés .
Un autre maître lorrain est, lui, parfaitement identifié, il s'agit de Jacot le Verrier, connu notamment pour avoir exécuté la grande verrière du croisillon nord de la cathédrale de Toul, sa ville d'origine et des vitraux de la collégiale Saint-Gengoult. Il a exécuté aussi des vitraux à Vézélise. Michel Hérold lui a attribué les anges des tympans des deux baies 18 et 20 de la troisième chapelle sud de la nef, mais aussi quatre figures de saints placées dans les deux registres supérieurs de la baie d'axe.
De même, les trois panneaux de la lancette de gauche, qui sont d'origine et attribués à un atelier lorrain anonyme, sont tous des préfigurations de la maternité virginale de Marie : la Vision de la porte close d'Ézéchiel, la Verge bourgeonnante d'Aaron, frère de Moïse, et la prière de Gédéon.
Enfin, sur la droite, la belle Vierge coiffée d'une couronne d'étoiles sur un fond de lumière rouge faisait aussi partie de l'iconographie initiale. Elle est attribuée au même atelier lorrain. Certains auteurs la présentent comme une Vierge de l'Apocalypse en raison des rayons de feu de la mandorle.
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
1°) La Vierge dite de l'Apocalypse. Bas de la troisième lancette. Atelier lorrain vers 1510-1520.
.
La Vierge s'inscrit dans une mandorle rouge zébrée de rayons ou lames de feu, sertis au plomb et non gravés. Elle est nimbée et couronnée, et porte un médaillon ovale doré autour du cou. Ses cheveux longs et blonds tombent devant sa poitrine. Elle entrouve son manteau bleu à revers jaune sur une robe blanche à décolleté carré (modifiée en dessous par les restaurateurs.
Seul le buste nous est parvenu, nous ne pouvons savoir si ses pieds reposaient, comme les Vierges de l'Apocalypse, sur un croissant de lune.
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
2°) Les quatre anges du tympan présentant les litanies en latin. Jacot de Toul, vers 1510-1520.
.
Ces anges blonds , en aube à amict doré et aux ailes colorées (rouges, vertes) portent des phylactères où se lisent les litanies en latin VIRGO SPECIOSA VIRGO GENEROSA VIRGO PULCHRA .
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
2bis le tympan de la baie n°18 par le même atelier. Quatre anges sous la bénédiction de Dieu le Père. Jacot de Toul vers 1510-1520.
.
Les anges identiques à ceux de la baie 210 présentent les inscriptions suivantes :
VIRGO ANTE PARTUM ; VIRGO IN PARTU [VIRGO POST PARTUM] VINCENTI (? XIXe ?)
La formule Virgo ante partum, virgo in partu, virgo post partum est dûe à saint Thomas d'Acquin (Somme théologique III, Q28 a 3), et elle affirme la virginité de Marie non seulement avant la conception de Jésus, et après celle-ci, mais aussi pendant la conception (in partu), selon la référence à Ézéchiel de la porte close, porta clausa auquel Thomas d'Acquin se réfère dans son texte. L'utérus est resté clos, le vase n'a pas été ouvert : uterus clausa.
Elle figure, associée dans les litanies précédentes, dans de nombreux textes en hommage à Marie :
.
"Rosa sine spina, Dominus tecum. Stella matutina, Dominus tecum. Virgo Dei inviolata, Dominus tecum. Virgo innupta, Dominus tecum. Virgo Dei intacta, Dominus tecum. Virgo incorrupta, Dominus tecum. Virgo Deo grata, Dominus tecum. Virgo ante partum, Dominus tecum. Virgo in partu, Dominus tecum. Virgo post partum. Dominus tecum. Splendor inextinguibilis, Dominus tecum. Virgo inestimabilis. Dominus tecum. Virgo inmarcessibilis vitis, Dominus tecum. Uva germinans, Dominus tecum. Virgo incomparabilis, Dominus tecum. Virgo cui noil est nec erit similis, Dominus tecum. Virgo generosa. Dominus tecum. Virgo speciosa, Dominus tecum. Virgo pulchra, Dominus tecum. Fons misericordie cum omni copia, Dominus tecum. Virgo eximia, Dominus tecum. Virgo pia, Dominus tecum. Virgo mater sine ruga, Dominus tecum. Virgo dulcis Maria, Dominus tecum. Laus prophetica, Dominus tecum. Salomonis fabrica, Dominus tecum."
.
Cette baie était donc bien, à l'origine, destinée à illustrer et défendre la thèse d'un enfantement préservant la virginité de Marie.
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 18, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
3°) Les panneaux typologiques de la première lancette : la vision de la porte close d'Ézéchiel ; le miracle de la toison de Gédéon et la verge bourgeonnante d'Aaron. Atelier lorrain vers 1510-1520.
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
a) Le miracle de la toison de Gédéon.
nb : Aaron et Gédéon étaient à l'origine inversés.
Gédéon est figuré en cavalier en armure, agenouillé sous l'effet du prodige, mains jointes, son casque à plumes jaune, rouge et violette à terre, dans une prairie. En arrière-plan, une porte fortifiée, et des montagnes.
La scène illustre ce passage du livre des Juges :
" Gédéon dit à Dieu : Si tu veux délivrer Israël par ma main, comme tu l’as dit, voici, je vais mettre une toison de laine dans l’aire ; si la toison seule se couvre de rosée et que tout le terrain reste sec, je connaîtrai que tu délivreras Israël par ma main, comme tu l’as dit.
Et il arriva ainsi. Le jour suivant, il se leva de bon matin, pressa la toison, et en fit sortir la rosée, qui donna de l’eau plein une coupe.
Gédéon dit à Dieu : Que ta colère ne s’enflamme point contre moi, et je ne parlerai plus que cette fois : Je voudrais seulement faire encore une épreuve avec la toison : que la toison seule reste sèche, et que tout le terrain se couvre de rosée.
Et Dieu fit ainsi cette nuit-là. La toison seule resta sèche, et tout le terrain se couvrit de rosée. » - Juges 6:36-40
Je ne vois pas la toison de laine tandis que des plantes indiquent que la terre est humide, et que la rosée descend du ciel sous forme d'une colonne grise sous un point jaune.
Une inscription indique GEDEON RORE MADET VELLUS SED PERMANET ARIDA VELLUS.
Cette phrase est relevée plusieurs fois par les auteurs germaniques (notamment à Nuremberg où elle est datée du XVIe siècle) sous la forme Haec madet tellus sed permanet arida vellus et traduite par "Cette terre est humide mais la fourrure reste sèche.".
Louis Réau la rapporte ainsi Rore madet vellus permanet arida vellus. M. Thiriet a lu ici Gedeon rore madet vellus permanet arida tellus et traduit "Gédéona le vêtement tout humide de rosée mais la terre reste sèche". C'est la forme couramment rapportée ailleurs,, où on trouve plus souvent tellus que vellus comme dernier mot, ce qui est plus logique pour traduire littéralement "La rosée mouille la laine, la terre reste sèche".
Mais plus précisément, l'inscription de cette baie 20 avec ses abréviations Gedeõ rore madet vell9 sed permanet arida vell9 (le sigle 9 remplaçant -us) reprend celle de l'édition imprimée de 1460-1465 du Biblia pauperum : Rore madet vellus, permansit arida vellus [tellus].
En effet, cette scène figure en vignette dans la Biblia Pauperum à la page de l'Annonciation, en vis à vis de celle de la Nativité. Il s'agit d'une relation typologique entre le texte vétéro-testamentaire de Juges, 6:37-38, et la virginité de Marie : Gédéon, cinquième juge d’Israël, souhaite savoir si Dieu veut l’utiliser pour libérer la Terre Promise. En réponse à Gédéon, un miracle se produit. Une toison déposée au sol se gorge de rosée, que le juge recueille dans une coupe alors que la terre alentour est restée sèche. Au Moyen Âge, on interprète cet espace resté sec et pur comme un symbole de la virginité de Marie. Gédéon sortira vainqueur du combat, grâce à ce signe de Dieu. Sur la gravure de la Biblia Pauperum Gédéon lève les bras vers l'ange qui lui dit Dominus tecum virorum fortissime (Juges 6:12), dans un parallèle évident avec l'archange Gabriel disant à la Vierge Ave gratia plena dominus tecum.
Ce parallèle entre le miracle de Gédéon et la conception virginale de Jésus par la Vierge illustre aussi les verrières de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Troyes et de Sens (par les mêmes verriers et à la même époque tout début du XVIe siècle 1499 et 1504), et sur le retable de l'Annonciation à la Licorne de Martin Schongauer.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
b) Aaron agenouillé devant un autel devant la verge (bâton, tige) verdie.
Aaron est représenté en grand prêtre juif (longue barbe grise, châle rouge sur un manteau vert à franges), agenouillé mains jointes devant un autel à l'intérieur d'un temple. Devant lui, le rameau bourgeonnant bien vert au milieu de douze tiges grises. Le sens du médaillon à profil couronné m'échappe, à moins d'y voir celui de Moïse au front ceint de flammes.
Rappel :
Alors que l’autorité de Moïse et d’Aaron est contestée, Moïse, sur l’ordre de Yahvé, demande aux chefs des douze tribus d’Israël de lui remettre un rameau pour chaque tribu, qu’il dépose dans la « Tente du Témoignage » . L’homme dont le rameau bourgeonnera sera celui que Dieu a choisi. Le lendemain, seule la verge d’Aaron, déposée au nom des familles de Lévi, a bourgeonné. « Yahvé dit alors à Moïse : Remets le rameau d’Aaron devant le Témoignage où il aura sa place rituelle, comme un signe pour ces rebelles. Il réduira à néant leurs murmures qui ne monteront plus jusqu’à moi, et eux ne mourront pas. »
Cette verge d'Aaron, et cette illustration figurent dans la Biblia Pauperum à la page de la Nativité, avec la mention Hic contra morem producit virgula florem. Comme le bâton d'Aaron choisi par Dieu fleuri miraculeusement alors qu'il était sec, la Vierge donne naissance à Jésus tout en préservant sa virginité. Cette verge est rapprochée de la virginité de Marie d'une part parce qu'elle reprend la prophétie d'Isaïe 11:1 sur la verge de Jessé qui fleurit (Egredietur virga de radice Jesse, et flos de radice ejus ascendet) en associant les mots virgula (diminutif de virga, la verge) et de florem (flos, la fleur), mais aussi par le raisonnement exposé par exemple ainsi en 1613 par Petrus Muranus :
"Aaron, en sens allégorique, ne nous représente autre chose que le peuple juif : cette verge n'est autre que la Vierge immaculée, seiche et aride de tout péché, sèche et aride pour n'avoir jamais fréquenté la compagnie des hommes : verge sèche qui néanmoins a fleuri, fructifié et produit le fruit de vie, fruit médicinal, je dis le Fils de Dieu, fort justement représenté par le fruit de l'amandier "
.
Biblia pauperum, BnF gallica.
.
C'est précisément la citation ---HIC CONTRA MOREM qui est inscrite en bas du panneau.
Comme pour la toison de Gédéon, ce rapprochement est illustré par Martin Schongauer sur son retable.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
c) Ézéchiel et la Porte close.
.
Le prophète est figuré de face, bras écartés, vêtu d'une robe bleue et d'un châle rouge. Il est devant la porte fortifiée des murailles de Jérusalem.
Rappel : Les Pères de l'Église ont vu dans le passage suivant du Livre d'Ézéchiel la préfiguration de l'utérus de Marie, traversé par l'Enfant mais restant clos, et donc vierge . Le prophète décrit sa vision du porche oriental du Temple futur , successivement ouvert pour accueillir la gloire de Yahvé, puis fermé après son départ :
« Il me ramena vers le porche extérieur du sanctuaire, face à l’orient. Il était fermé. Yahvé me dit : Ce porche sera fermé. On ne l’ouvrira pas, on n’y passera, car Yahvé, le Dieu d’Israël, y est passé. Aussi sera-t-il fermé. Mais le prince, lui s’y assiéra pour y prendre un repas en présence de Yahvé. C’est par le vestibule du porche qu’il entrera et c’est par là qu’il sortira. » (Ezechiel, XLIV 1-3.)
Ce porche va se confondre ensuite avec la Porte Dorée de Jérusalem, par où pour les Juifs le Messie fera son entrée à Jérusalem, mais aussi avec la porte orientale de Jérusalem par où Jésus arriva le jour des Rameaux.
Làa encore, nous trouvons cette scène dans le Speculum humanae salvationis, puis dans la Biblia pauperum, tout comme sur le retable de Martin Schongauer (litanie PORTA CLAUSA), et sur la verrière de l'Annonciation de la cathédrale de Sens, avec la formule latine Porta hec clausa erit et non aperietur
Dans la Biblia pauperum, cette typologie se trouve à la même page de l'Annonciation que les autres mais en bas et à gauche avec le dessin du prophète Ézéchiel, la référence Ezech XLIIII et la citation porta haec clausa erit et non ap[er]ietur.
.
.
Même si l'inscription est très difficile à lire, nous pouvons gager qu'on y trouvait les mots PORTA HAEC CLAUSA ERIT NON APERIETUR.
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
d. Le monogramme du tympan : la marque du verrier ?
Michel Hérold ne précise pas s'il considère ce monogramme comme appartenant à la verrière d'origine.
Il évoque fortement les monogrammes des verriers de Troyes, décrits par l'abbé Coffinet en 1858, et dont j'ai décrit plusieurs dans mes articles sur les baies de la nef de la cathédrale de Troyes entre 1498 et 1502. Comme eux, il comporte une barre verticale formant clef. Cette clef se termine par un quatre de chiffre, est barrée d'une ligne courbe et encadrée de deux étoiles. Les monogrammes 13 et 23 de Troyes utilisent également un quatre de chiffre.
Nous retrouvons un monogramme à peu près identique dans la baie 111 de la Transfiguration, attribuée à Valentin Bousch vers 1514-1520 et accompagnée de deux autres monogrammes. Ceux-ci sont parfois considérés comme des blasons de donateurs non nobles. D'autres monogrammes sont présents dans les baies 9 et 26.
Les œuvres de Valentin Bousch sont signés selon Hérold "du monogramme V.B bien visible" : je pense plutôt que ce monogramme de la baie 20 est celui d'un atelier lorrain.
.
Baie 111 de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
L'autre ajour du tympan comprend un élément rose peu explicite.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Sain-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
e. Le pélican sous la Vierge.
.
Ce pélican, symbole christique domine un phylactère avec l'inscription : PELLICANUS SUM QUI CUNCTIS SANGUINE PROSUM "Je suis le pélican utile à tous par mon sang".
.
Panneaux d'atelier lorrain et de Jacot de Toul (1510-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
LES PANNEAUX PROVENANT D'UNE AUTRE BAIE, CRÉES PAR VALENTIN BOUSCH (1514-1520). SAINT MARTIN, SAINT GEORGES ET SAINTE CATHERINE.
.
Valentin Bousch est né à la fin du XVe siècle à Strasbourg et mort en août 1541 à Metz.
Au moins six des dix grandes verrières des bas-côtés de la nef et au moins cinq des dix-sept verrières des chapelles latérales, produites entre 1514 et 1520, sont attribuées par Michel Hérold à l'atelier deValentin Bousch, connu jusqu'ici essentiellement pour sa participation au vitrage de la cathédrale de Metz de 1520 à 1541 et à celui du prieuré de Flavigny-sur-Moselle (dont les panneaux subsistants sont pour la plupart aujourd'hui au Metropolitan Museum de New- York) . Il réalisa également des vitraux pour l'église priorale de Varangéville (disparue au cours de la première guerre mondiale) sur une commande de Jean IV de Lorraine, évêque de Metz. En outre il réalisa de nombreux vitraux sur commande de la bourgeoisie messine pour des églises, des hôtels et des chapelles messines mais aussi pour des églises de la campagne lorraine. En 1530, il revient travailler à Saint-Nicolas-de-Port pour ses mécènes lorrains le duc Antoine la duchesse Renée de Bourbon et le cardinal Jean de Lorraine et il réalise le vitrail de la rose ouest .
On lui doit à Saint-Nicolas la Transfiguration de la baie 107, l'Adoration des Mages, saint Nicolas, saint Sébastien et saint Christophe de la baie 109, la verrière de la rose ouest ou baie 225.
Mais le maître n'était pas seul à peindre et plusieurs mains ont travaillé pour Valentin Bousch. Les contrats de service retrouvés dans les archives confirment d'ailleurs l'importance de l'atelier, qui, après 1518, semble avoir travaillé quelque temps conjointement pour Metz et Saint-Nicolas-de-Port.
"Valentin Bousch constitue ou développe un important atelier. Dès le 26 décembre 1514 soir environ trois mois après le marché conclu avec le gouverneur de la fabrique Valentin Bousch embauche pour quatre ans un apprenti originaire de Bar-le-Duc Meuse) Symon Clarget . Pour des raisons inconnues Symon Clarget quitte son maître le 18 septembre 1517 avant expiration de son engagement. Nicolas fils de feu Pierre le chirurgien demeurant Saint-Nicolas-de-Port entre dans atelier le juin 1517 Quelques mois plus tard le 23 décembre 1518 Valentin Bousch recrute Claude Moynne originaire de la localité voisine de Rosières-aux-Salines Meurthe-et-Moselle. Les nouveaux apprentis sont recrutés l'un pour cinq ans l'autre pour deux ans. Valentin Bousch embauche encore le juillet 1518 Gérard Regnaldin de Vic-sur-Seille Moselle et Pierre Paiger de Moyen (Meurthe-et-Moselle) deux verriers déjà confirmés qui s'engagent à le servir pour des périodes assez courtes le premier pour un an l'autre pour six mois. Avec aide de son important atelier il se dispose donc à répondre de nombreuses commandes." M. Hérold.
.
.
.
1°) Saint Georges terrassant le dragon.
.
Une tenture damassée rouge est suspendue sous les arcades d'une architecture à cul de lampe (mais feuillagé d'acanthes peu vraisemblables), formant le fond devant lequel Saint Georges, en armure, combat le démon à grands coups d'épée . Les plumes rouge et or de son casque et de sa cuirasse répondent à celles de sa monture, mais aussi aux miroitements des écailles de l'aile du dragon. Ce dernier, aux pattes et au cou couverts de verrucosités, redresse sa gueule, tend ses griffes et fouette de sa longue queue l'arrière-train du cheval. Le sol est une prairie verte.
Les volumes sont rendues par des hachures courbes ou entrecroisées. Les plumes sont rendues par un travail en enlevé du jaune et de la grisaille, au petit-bois ou à l'aiguille. La pièce correspondant à l'aile et au tronc du dragon est un savant usage du gris, et des valeurs de jaune.
Le visage a été remplacé par un verre jaune, mais on mesure, sur les autres exemples, qu'il devait être très soigné.
Fond damassé.
"Les fonds damassés sur lesquels se détachent scènes ou figures comptent beaucoup aussi. Réalisés par enlevés dans une épaisse couverte de grisaille noire suivant des pochoirs, ils sont en quelque sorte la marque de l'atelier. Les calques des mêmes motifs damassés relevés directement sur le vitrail se superposent exactement. L'utilisation répétée d'un pochoir n'exclut cependant pas des variantes (détails supplémentaires enlevés au petit-bois, par exemple), ni, à l'inverse des pochoirs du XIXe, une certaine irrégularité d' exécution ; les ajours du pochoir indiquent les parties à enlever dans la grisaille et non celles à couvrir de grisaille. " (M. Hérold)
.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Sain-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
2°) Saint Martin partageant son manteau avec le pauvre.
.
La niche architecturée change et l'arcade feuillagée est ponctuée de perles. C'est une création de 1850. Les colonnes sont également feuillagées. Le motif damassé de la tenture bleue n'est pas le même que pour le Saint-Georges et fait apparaître des œillets et des feuilles sur des rinceaux crénelés.
Saint Martin, nimbé (inscription SACTUS MART-- moderne, tout comme le visage) s'apprête à couper de son épée son manteau rouge d'officier. Ses bottes sont d'un rose rare.
Un mendiant barbu (tête et haut de tunique datant de 1850) tend la main pour s'en saisir. Les chausses sont pourpres.
.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Sain-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
3°) Sainte Catherine d'Alexandrie.
.
Dans ce panneau , la sainte tient l'épée de son supplice (vitrail assez bien conservé). Tenture rouge. La robe blanche (ou surcot à manches) est également damassé. Le visage est partiellement parasité par des plombs de casse.
Michel Hérold fait remarquer que le pochoir utilisé pour le damas du saint Jérôme de Genicourt en 1524 est le même que celui du damas de la sainte Catherine de Saint-Nicolas-de-Port réalisé vers 1514-1520. D'ailleurs, les verrières des chapelles latérales sont jugées très proches de l'Annonciation et surtout de la sainte Barbe et du Saint Jérôme de l'église Sainte Marie-Madeleine de Géricourt-sur-Meuse, et même "archaïques" par rapport aux visages et aux mains putoisées aux effets de granité très appuyés de la nouvelle manière développée à Metz.
Au sol, on remarque la roue brisée, principal attribut de la sainte avec sa couronne et son épée. Du côté gauche, au dessus de l'herbe, les initiales G.C.
.
Un vitrail représentant sainte Catherine d'Alexandrie est conservé au musée du Louvre à Paris, provenant probablement (notice du Louvre) de l'église de Saint-Nicolas-de-Port. Il est pourtant bien différent. Michel Hérold note : "Entre les figures élégantes et statiques de sainte Marguerite de saint Georges ou de la sainte Catherine du Louvre disposées sous des dais arborescents caractéristiques du gothique tardif et celle de saint Sébastien déjà citée plus dynamique avec son corps athlétique dans un encadrement architecture Renaissance on assiste à une véritable mutation."
.
Sainte Catherine d'Alexandrie vers 1515 Atelier de Valentin Bousch. Musée du Louvre inv. OAR 519. Droits RMN.
.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneaux de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 20, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
SAINT GEORGES, PANNEAU CRÉE PAR VALENTIN BOUSCH (1514-1520) ET AUJOURD'HUI REMONTÉ EN BAIE 18.
.
Seule la moitié supérieure du saint Georges est attribuée à l'atelier de Valentin Bousch. Il tient l'étendard blanc à croix rouge, le vexillum beati georgi des Génois qui deviendra l'emblème des Croisés.
On reconnaît la tenture damassée, ici pourpre, et le goût du verrier strasbourgeois pour les plumes tout aussi multicolores qu'exubérantes. La partie basse est une création de 1850, le saint est dépourvu de son cheval et li piètine un dragon vert.
.
Panneau de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 18, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneau de l'atelier de Valentin Bousch (1514-1520), baie 18, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
Panneau restauré en 1850, baie 18, basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Photographie lavieb-aile.
.
.
SOURCES ET LIENS.
— COFFINET (Abbé Jean-Baptiste), 1858, Les peintres-verriers de Troyes pendant trois siècles depuis 1375 jusqu'à 1690 "Peintres-verriers. Nomenclature des peintres-verriers de Troyes depuis 1375 jusqu'à 1690". Annales archéologiques, 1858, t. 18, p. 212-224.
—HÉROLD (Michel), 1987, Les verriers de Lorraine à la fin du Moyen Age et au temps de la Renaissance (1431-1552). Approche documentaire, Bulletin Monumental Année 1987 145-1 pp. 87-106
—HÉROLD (Michel), 1992, La verrière en grisaille des Bermand à Saint-Nicolas-du-Port ou les chemins tortueux de l'italianisation, Bulletin Monumental Année 1992, 150-3 pp. 223-237
—HÉROLD (Michel), 1993, Les vitraux de Saint-Nicolas-de-Port, vol. VIII/1, Paris, CNRS, coll. « Corpus vitrearum France, monographies », 1993, 219 p.
—HÉROLD (Michel), 1994, « Valentin Bousch, l'un “Des Peintres sur verre qui se distinguèrent au seizième siècle” », Revue de l'art, 1994, no 103, p. 53-67.
—HÉROLD (Michel), et Christian Corvoisier, 2008 « Saint-Nicolas-de-Port - Vitraux de l'église du pèlerinage de saint Nicolas », dans Congrès archéologique de France. 164e session. Nancy et Lorraine méridionale. 2006, Société française d'archéologie, Paris, 2008, p. 312-316.
—LEPROUX (Guy-Michel), 1994, Michel Hérold, Les vitraux de Saint-Nicolas-de-Port, Paris, C. N. R. S. Éditions, 1993 (Corpus Vitrearum, France, vol. VIII/1), 220 p. [compte-rendu] Bulletin Monumental Année 1994 152-2 pp. 240-242
Les vitraux de la nef de la cathédrale de Troyes : les baies 127 et 227 des Saints et de la vie de saint Pierre, réalisée en 1502, don d'Henri II de Lorraine-Vaudémont, évêque de Metz . Armoiries épiscopales.
.
Voir sur les verrières hautes de la nef de la cathédrale de Troyes :
Avec 1 500 m² de verrières, allant du XIIIe au XIXe siècle, la cathédrale de Troyes est l’un des plus vitrées de France. Elle possède un triforium totalement vitré, (situé à mi-hauteur et qui fait le tour du bâtiment), ce qui est assez exceptionnel. Les vitraux de la cathédrale de Troyes sont considérés comme une œuvre majeure de la peinture sur verre en France.
Les 20 verrières hautes de la nef forment un ensemble homogène. Elles ont été réalisées entre 1498 et 1505 par plusieurs peintres-verriers dont le nom de certains sont connus (Pierre Maçon, Jean Verrat, Balthasar Godon, Lievin Varin et le cartonnier Nicolas Cordonnier). Parmi les 66 « verriers » recensés dans les archives entre 1470 et 1560, 37 peuvent être considérés comme des peintres verriers. Regroupés autour de la collégiale Saint- Urbain, ils travaillaient au sein de structures familiales et fondaient des dynasties, comme les Verrat ou les Macadré. Leur atelier était une petite structure dirigée par un peintre verrier qui n’employait qu’un ou deux serviteurs, selon ses moyens, comme on le voit à Paris et en Provence (D. Minois).
Selon le rédacteur de la notice de l'Inventaire, rédigée en 1999, "Leur iconographie répond à la seule volonté des multiples donateurs. Leur véritable lien provient plus de la technique que du style : les peintres-verriers ont mis l'accent sur la lisibilité des compositions (larges registres de scènes, mise en valeur des faits et gestes des personnages par la réduction du rôle de l'architecture et des arrières-plans, modelé très appuyé, absence de chef-d'oeuvre et de gravure sauf dans la baie 233). Certains aspects rappellent les vitraux du milieu du 13e siècle des parties hautes du choeur : la gamme colorée très vive avec barbes et cheveux en pleine couleur, la mise en plomb des yeux de certains personnages, les fonds de mosaïque. Si la Renaissance italienne ne s'y fait pas encore sentir, Jean Lafond reconnaît une influence venue de l'est dans la verrière de saint Pierre (notamment l'atelier strasbourgeois de Pierre d'Andlau). Pour Emile Mâle, la présence dans ces verrières d'une forte veine d'inspiration populaire évoque l'imagerie d'Epinal."
Au contraire, Danielle Minois (2003 ; 2005) souligne la cohérence de ces ensembles qui illustrent en un discours argumenté et savant l’histoire du salut. "Seul un clergé cultivé a pu élaborer ces programmes ; il l’a donc imposé aux donateurs qui l’ont financé. Parce que « le choix des sujets des verrières posées dans les églises est un reflet de la vie intellectuelle et religieuse », elle signale en outre les réactions des commanditaires face à la Réforme à travers les thèmes choisis, surtout après 1550 : l’histoire de Daniel ou de Tobie, la légende de l’hostie profanée. Elle montre comment les mêmes thèmes peuvent changer de sens face à un climat de remise en cause de l’Église romaine." (L. Rivale)
Ces 20 verrières hautes de la nef se répartissent entre les baies du triforium (galerie à trois arcades entre chaque travée), qui portent les numéros 127 à 136, et, au dessus de celles-ci, les baies hautes homologues portant les numéros 227 à 236. Selon la numérotation internationale des vitraux, les baies nord portent un numéro impair et les baies sud un numéro pair.
Du côté nord du transept, l'auteur du carton des baies 213, et 215 réalisées par Jean Verrat et Balthazar Godon au début du XVIe siècle est connu, il s'agit de Nicolas Cordonnier, dit le Maître de la Légende de Santa Casa.
.
Nous avons donc ainsi :
a) du côté nord, depuis le transept vers le fond de la nef :
-baies 127 et 227 : Saints ; vie de saint Pierre, réalisée en 1502, don d'Henri II de Lorraine Vaudémont, évêque de Metz ;
-baies 129 et 229 : Histoire de Tobie. 1500 ; don de Jean Fuestot l'Aîné (marchand et bourgeois de Troyes dans l'Aube) et de Denise Chappelain sa femme. Monogramme [du peintre verrier en tête de lancette de la baie 129].
-131 et 231 : Adoration des mages, et Histoire de Job. Don de Jeanne de Mesgrigny veuve de Jean Molé. 1501. Inscription et armoiries. Monogramme d'un verrier au tympan.
-133 et 233 : légende de saint Sébastien ; réalisée en 1501 par Lievin Varin, don de la confrérie de saint Sébastien .
- 135 et 235 : Légende de la Vraie Croix ; réalisées entre 1501 et 1502 par Jean Verrat, don de Claude Dorigny, veuve de Jean Péricart. Armoiries . Baie 135 très restaurée au XIXe.
b) du côté sud :
-baies 128 et 228 : Calvaire ; saints et saintes. 1499 ; peintre-verrier Balthazar Godon et Jean Verrat ; don de Jean Huyard chanoine de la cathédrale, et Guillaume Huyard avocat du roi à Troyes ; armoiries .
-baies 130 et 230 : Arbre de Jessé. Verrières réalisées par Lievin Varin entre 1498 et 1499, don de Jean de Marisy et Guillemette Phélipe sa femme. En baie 230, toute la famille de Jean de Marisy et de Guillemette Phélipe (ses frères, ses 9 filles et belles-filles) est représentée au bas de cette verrière. Armoiries.
-baies 132 et 232 : Annonciation et Nativité. Parabole du Fils Prodigue. Don de Guillaume Molé et Simone Boucherat , 1499. Réalisée en 1499 peut-être par Pierre I maçon (inscription ne notant que son prénom). Armoiries identifiées, devise "en attendant", monogrammes [du verrier]
-baies 134 et 234 : Vie de Joseph fils de Jacob ; réalisée en 1499, don d'Agnès Bonjean, veuve de Jehan Thévenin (écuyer et notaire royal à Troyes) son mari . Armoiries identifiées et monogrammes en baie 134. Inscription mentionnant le commanditaire et la date en baie 234.
-baies 136 et 236 : Histoire de Suzanne et du prophète Daniel ; réalisées en 1499 , don de Jean Coiffart, marchand de Troyes et de Marguerite, sa femme (inscription) ; les vitraux du 15e siècle du triforium (baie 136) ont disparu et sont remplacés par des vitraux du 20e siècle sur le thème de l'histoire de Daniel.
.
Donation par Henri de Lorraine évêque de Metz.
À la différence des autres verrières de la nef, où une inscription du bord inférieur revendique la donation par un couple de bourgeois de Troyes, et où le donateur ou la donatrice veuve sont représentés, cette verrière ne fournit aucun indice, hormis des alerions (petits aigles héraldiques) au tympan de la baie 127. Les belles armoiries épiscopales d'Henri de Lorraine sur le tympan de la baie 227 ne sont pas d'origine, car ce tympan a subi les conséquences d'un incendie de 1700.
Mais Léon Pigeotte s'est basé sur les comptes de la cathédrale pour en attribuer la donation à un "monseigneur de Metz", rapproché de Henri de Lorraine-Vaudémont (1425-1505), évêque de Metz de 1485 à 1505, fils d'Antoine de Lorraine et frère du duc Jean de Lorraine.
"La première verrière du côté gauche, vers la rue, représente plusieurs saints, notamment l'apôtre saint Pierre, saint Etienne, etc. Au pied de ce vitrail on ne voit point par une inscription quel en serait le donateur, mais nous pensons cependant qu'il aurait été donné par "Monsieur de Meitz". On voit en 1501-1 502 une dépense de roseaux « pour clore la verrière de Monsieur de Meitz » et une autre dépense au couvreur "pour faire escharfaud pour prendre la mesure de la verrière de Monsieur de Meitz..." au mois de mai et au mois de juillet 1502, les armatures de fer fournies par le serrurier avaient été directement payées par le donateur, ainsi qu'il résulte d'une mention écrite en marge de l'article de dépense qui lui-même est biffé (Comptes de l'année 1501-1502). Si nous attribuons le don de la verrière de la première grande fenêtre vers la rue, au personnage désigné par les indications que nous avons relevées , c'est que l'on connaît les donateurs des quatre autres grandes verrières de ce même côté par les inscriptions qui se trouvent au pied de chaque vitrail et qu'il est naturel de penser que ce "Monsieur de Metz", donateur d'une verrière qui est indéterminée, est celui qui a donné la verrière qui ne révèle aucun nom..
Quel est ce personnage désigné sous le nom de Monsieur de Meitz ou Metz ? Nous ne saurions le dire exactement. M. Arnaud, dans son travail, en parlant de cette verrière, rapporte que l'on y voit les armes de Lorraine, et par suite en attribue le don à Louis de Lorraine, évêque de Troyes vers 1545, depuis cardinal de Guise. Cette opinion est inadmissible. Lors de sa nomination, Louis de Lorraine n'avait que 18 ans, il était par conséquent né vers 1527 ; or, le vitrail de M. de Metz existait au moins quinze ans avant 1527, car nous rencontrons dans les comptes de l'année 1511-1512 l'article que voici : « Payé à Jehan Verrat pour avoir relevé deux des panneaulx de la verrière de Monseigneur de Metz, y avoir fait des pièces selon les couleurs des histoires, les quels panneaulx avoient esté gastés quand la fouldre tomba sur le [grand] clocher (Comptes de l'année 1511-1312; dépense commune. ). » Il semble même résulter des comptes cités quelques lignes plus haut que ce vitrail aurait été posé dès 1501 ou 1502. A cette époque le siège épiscopal de Metz était occupé par Henri II de Lorraine-Vaudemont, fils d'Antoine de Lorraine, comte de Vaudemont, sire de Joinville. Ce prélat, qui fut évêque de Metz de 1484 à 1505, est probablement le donateur de notre verrière. Le passage du compte de 1511-1512 qui se réfère à la même verrière, nous apprend que Jean Verrat fut chargé de la réparer, serait-il téméraire d'en conclure qu'elle était sortie de son atelier ?" (Léon Pigeotte 1870)
Cette hypothèse est admise aujourd'hui par tous.
.
Armoiries épiscopales d'Henri de Lorraine.
.
Charles Fichot soulève une hypothèse complémentaire, celle d'un canonicat d'Henri de Lorraine à Saint-Etienne de Troyes, expliquant que saint Etienne soit ici présentant un donateur ; mais je n'ai pu vérifier cette information.
"Nous avons souvent remarqué dans nos recherches que certain chanoine de l'église collégiale et royale de Saint-Étienne était assisté du patron de cette église dans les verrières où il se faisait représenter. Les verrières du sanctuaire de l'église d'Aulnay, près Lesmont, nous en donnent un exemple: maître Claude de Gyé, doyen de l'église Saint-Étienne et curé d'Aulnay, est représenté assisté de saint Etienne et non de saint Claude, son véritable patron.
Cet enseignement fait naître dans notre esprit la pensée qu'Henri II de Lorraine pourrait bien avoir fait partie de ce chapitre avant son épiscopat, ce qui expliquerait sa générosité à l'égard de la cathédrale de Troyes." (Fichot 1889)
Par contre, le fait que Henri de Lorraine-Vaudémont reconnaisse saint Etienne comme son patron est établi par le vitrail de la chapelle Sainte-Anne de Joinville, sur lequel il est agenouillé en donateur, présenté par saint Etienne, avec un phylactère énonçant Ora pro me beate prothomartyr Stephane" (Priez pour moi, bienheureux Etienne, premier martyr). Ce vitrail de 1502 est exactement contemporain des baies 127-227.
D'autre part, Henri de Lorraine était évêque de la cathédrale Saint-Étienne de Metz, et cela me semble être la raison principale de son choix de patronage. Il a été le commanditaire en 1504 de la verrière du transept nord de sa cathédrale réalisée par Théobald de Lixheim.
Note : En 1500-1501, le sculpteur Jacques Bachot quitta Troyes pour réaliser à Joinville le tombeau de Henri de Lorraine-Vaudémont, dans la collégiale Saint-Laurent, chapelle du château, propriété de sa famille depuis des siècles. L'évêque de Metz suivait là une tradition familiale qui avait débuté avec le chroniqueur Jean de Joinville. C'était une grande chasse en marbre décorée de figures de saints (mais lesquels ?) et un grand buste en bronze de Henri Costerel, de Troyes. Le sculpteur revint à Troyes en 1505.
.
Attribution possible à Jean Verrat.
Comme on vient de le lire sous la plume de Léon Pigeotte, cette attribution se base sur le fait que Jean Verrat répara cette baie en 1511-1512. En outre, Jean Verrat est un peintre-verrier très actif à cette époque de 1502 à Troyes et en la cathédrale de Sens.
.
Le sujet : la Vie de saint Pierre.
.
La Vie de saint Pierre est illustrée, en peinture, sculpture et verrières, dans les nombreuses cathédrales dont Pierre est le saint Patron (à Poitiers, Rennes, Vannes, Montpellier, Beauvais, ou, partagé avec saint Paul, à Troyes et à Nantes). Au XIe siècle, quatorze scènes de la vie de saint Pierre, tirées de Matthieu, de Luc, des Actes des apôtres, des Actes apocryphes du pseudo Marcellus, étaient peintes en l'église Saint-Pierre de Saint-Benoît-sur-Loire. On la trouvait à Troyes figurée sur la baie 204 du chœur, au XIIIe siècle. Elle figure bien-entendu aussi dans de nombreuses églises. Voir par exemple dans ce blog, au XVIe siècle :
Elle est ici incomplète, et réduite à cinq épisodes. Le registre inférieur des deux premières lancettes comportait-il un scène de donation avec saint Etienne présentant le donateur en robe rouge?
L'unité des panneaux est assurée par celle des fonds puisque la même tenture bleue damassée et frangée est retrouvée de scène en scène, sur un gazon plus ou moins fleuri.
.
Description.
.
Ces deux verrières occupent la cinquième travée de la nef, côté nord.
La baie 227, avec six lancettes réunies deux à deux sous deux mouchettes, et un tympan à treize ajours et écoinçons, mesure 10 m de haut et 6 m. de large.
La baie 127, en dessous, au triforium, avec ses six lancettes réunies deux à deux sous un tympan à deux mouchettes et un soufflet, mesure 3, 50 m de haut et 6 m. de large.
.
Les baies 127 et 227 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les baies 127 et 227 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE 127 (TRIFORIUM).
.
Les descriptions, différentes, des auteurs montrent que cette baie a été modifiée et restaurée au XIXe siècle.
"Dans les arcades des tribunes au-dessous, on voit d'abord des figures incomplètes de vieillards, qui remplissent les deux premiers panneaux. Au troisième, un vieillard près de la tête duquel est écrit un nom que quelques lettres transposées ou enlevées rendent illisibles.
Au troisième panneau est représentée la vraie croix, qui en occupe toute la hauteur, et auprès un vieillard debout, qui indique du doigt le signe de la rédemption autour duquel est un rouleau chargé d'une inscription.
Au quatrième panneau, saint Antoine, avec son compagnon, tient un livre ouvert et semble lire en marchant. Le fond est une étoffe bleue brochée et d'un dessin fort riche.
Les cinquième et sixième arcades sont occupées par des figures auxquelles on a rapporté quelques pièces qui sont tout à fait étrangères au sujet. La dernière est celle d'un évêque, dont il ne reste que la partie supérieure.
Dans les cercles à jour, au-dessus des figures, sont multiplices les bandes de gueules chargées des trois alerions d'argent de Louis de Lorraine. Ce blason répété, du même évêque, peut faire présumer avec quelque vraisemblance qu'il est le donateur de tout le vitrail de cette fenêtre. Louis de Lorraine, évêque de Troyes en 1545, mourut le 28 mars 1578, sous le nom du cardinal de Guise, après avoir été archevêque de Sens et abbé de Saint-Victor de Paris." (A. F. Arnaud 1837)
.
"Les vitraux de cette galerie sont composés de figures de saints n'ayant aucun rapport avec le sujet principal de la grande fenêtre; ce sont, entre autres, saint Antoine, saint Louis, saint Gond et sainte Catherine, toutes figures endommagées et rapportées, provenant, à n'en pas douter, de la première fenêtre du transept." (Charles Fichot 1889)
.
"Vitraux réalisés pendant les années 1500-1505 ; selon Biver et Fichot les figures de saint Gond, sainte Maure et saint Louis (auxquelles se rattacheraient saint Claude et saint Michel de la baie 213) proviendraient d'une verrière du bras nord du transept (la baie 217) peinte en 1505 par Jean Verrat et Balthazar Godon d'après un carton de Nicolas Cordonnier." (Brunon Decrocq, Palissy)
.
La baie 127 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
1 et 2. Saint Gond. Saint Claude accompagné d'un enfant.
.
1. Saint Gond ou Godon ou Gaon ou Gand est un moine du VIIe siècle, neveu de saint Wandrille. Il fonda l'abbaye de Saint-Pierre-en-Oyes, ou Prieuré de Saint-Gond, dans la Marne.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Saint_Gond
Le saint tonsuré, en habit monastique recouverte d'une chape rouge à bords perlés et tenant la crosse abbatiale, est identifié par l'inscription St GO[N]D. Il tient sous le bras le livre (bleu) des fondateurs d'abbaye.
Fond damassé.
.
2. Le saint évêque est identifié comme étant saint Claude car il est accompagné d'un enfant agenouillé. Il est placé dans une niche architecturée gothique flamboyant à maçonnerie, proche mais différent des niches de la baie 215.
.
Dans le tympan, les bandes rouges chargées d'aigles sur fond jaune rappellent les armoiries du donateur supposé, Henri de Lorraine, d'or à la bande de gueules chargé de trois alerions d'argent. Ces motifs se retrouvent dans les tympans voisins.
.
La baie 127 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
3 et 4. Sainte Maure tenant la palme de martyre. Saint Louis tenant la couronne d'épines et portant le collier de l'Ordre de Saint-Michel.
.
Inscription Se MAURE.
.
Le collier de l'Ordre de Saint-Michel, avec coquilles et aiguillettes date de la création de l'Ordre en 1469 (il n'a pu être porté par saint Louis) et a été modifié en 1515 par François Ier : les aiguillettes seront alors remplacées par des entrelacs. Le médaillon de saint Michel terrassant le dragon est bien présent, à l'extrémité de la main gauche, sur la poitrine du roi.
.
La baie 127 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
5 et 6. Saint Claude. Saint Antoine et son cochon.
5. Inscription SAINCT CLAUDE. Comme en 2. , ce "saint Claude" est placé dans une niche architecturée. Mais il est ici agenouillé mains jointes, comme un donateur. Il ne porte pas de nimbe. L'inscription a-t-elle été ajoutée ou remplace-t-elle une invocation ? Ne serait-ce pas l'évêque de Metz Henri de Lorraine figuré comme donateur ?
.
6. Saint Antoine est identifiable par sa canne en tau, par son cochon, et par les flammes rouges qui rappellent qu'il soigne le "mal des ardents", ou ergotisme.
Source : égliseduconfluent.
.
La baie 127 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE 227.
.
.
.
1 et 2. - Première apparition de Jésus-Christ à saint Pierre après sa résurrection.
Le saint, dans un manteau rouge, est agenouillé, les mains jointes, sur le seuil d'une grotte. Jésus debout devant lui porte le nimbe crucifère et la croix symbole de sa résurrection. Il est torse nu et enveloppé dans le manteau rouge de sa gloire (manteau ici lie-de-vin et ourlé de perles), laissant visible la plaie du flanc. Sur la banderole qui occupe les deux panneaux on lit : CONFIDE FRATER QUIA MORS MEA.L'inscription complète se retrouve sur le panneau de l'apparition du Christ à Saint Pierre de la baie 9 de 1510 de l'église Saint-Etienne d'Arcis-sur-Aube, Confide frater quia mors mea salus tua, "Mon frère, ayez confiance, parce que ma mort est votre salut". Je n'ai pu trouver l'origine de cette citation.
.
Note : dans ce panneau, comme dans les suivants, et comme dans l'Histoire de Job de la verrière n°231, la bouche de saint Pierre est montée en chef d'œuvre dans le verre blanc de la barbe.
.
.
La baie 227 (1502) de la Vie de saint Pierre de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
3 et 4. Saint Pierre en présence de Néron.
.
L'empereur Néron, assis sur un siège romain en X, la tête couverte d'un turban surmonté d'une couronne d'empereur, le sceptre en main, et les pieds posés sur un coussin damassé. Devant lui, saint Pierre est conduit par un soldat. Un phylactère se développe sur les deux panneaux, sur lequel on lit les paroles de saint Pierre devant le Sanhedrin OBEDIRE OPOTET DEO MAGIS [quam hominibus], "Il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes." (Actes des Apôtres V,29).
Le soldat, qui grimace accumule les caractères vestimentaires des "méchants" selon le code de l'iconographie des vitraux et enluminures : couleurs verte et jaune, chaussures (en patte d'ours) à crevés, chausses à rayures, et tunique à taillades.
.
La baie 227 (1502) de la Vie de saint Pierre de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
5 et 6. Saint Pierre ressuscite la charitable Tabithe, à Joppé.
La scène est décrite dans les Actes des Apôtres 9:36-43. Apprenant le miracle de la guérison d'un paralytique, deux hommes de la ville de Jaffa [Joppé] viennent demander à Pierre de ressusciter Tabitha morte en odeur de sainteté. Il s'y rend, fait sortir les pleureuses de la chambre et se met à genoux . "Pierre dit : 'Tabitha, lève-toi', elle ouvrit les yeux, et voyant Pierre, elle se mit sur son séant." Il rappelle ensuite hommes et femmes qui attendaient dehors et leur présente la femme vivante.
On la voit ici affaissée sur le bord d'une fosse, les mains jointes, les cheveux épars, dans un linceul ; devant elle, saint Pierre portant sa clef et bénissant. Il dit, suivant le phylactère qui se déroule à la hauteur de sa bouche THABITA SURGE "Tabithe, lève-toi." Un personnage, peut-être Simon le corroyeur, hôte de saint Pierre à Joppé, est debout derrière cette femme.
.
La baie 227 (1502) de la Vie de saint Pierre de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
REGISTRE INFÉRIEUR
.
7 et 8. Saint Étienne en diacre martyre et saint Claude en évêque.
.
"Au bas de la fenêtre, à gauche, on distingue la figure de saint Étienne portant dans sa dalmatique, qu'il soulève de la main gauche, les pierres qui ont servi à le lapider, en même temps qu'il tient la palme de son glorieux triomphe. Le bras et la main droite se soulèvent en avant : c'est l'attitude ordinaire d'un saint patron à l'égard du donateur qui devait se trouver devant lui dans le deuxième panneau, qui fut brisé en 1701 la chute du clocher du transept et par l'incendie qui se propagea sur les combles des bas côtés.
Cette figure de donateur a été remplacée par un saint Claude provenant de la première fenêtre du transept nord (baie 217), dont les verrières ont été complètement détruites par le même incendie. Cependant la première figure du donateur dont nous parlons a laissé des traces de son passage et de la position qu'elle occupait. On remarque au bas des pieds de saint Étienne un fragment de la queue de la soutane rouge que portait ce grand dignitaire de l'église de Metz, détail précieux qui confirme notre raisonnement et remplace toute espèce de supposition par une certitude. Ce prélat était à genoux devant un prie-Dieu chargé de ses armes et accompagné de saint Étienne, son protecteur, comme dans toutes les verrières anciennes." (Charles Fichot)
.
La baie 227 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
9 et 10. Saint Pierre, assis sur une cathèdre, vêtu de la chape et de la tiare papales, reçoit et bénit Lin et Clet, qu'il ordonna évêques de Rome.
.
Lin et Clet sont plutôt les assistants de Pierre, ses épiscopes, l'un pour l'enceinte de la ville, l'autre hors des murs; selon la tradition, se livrant tous deux à la prédication, ils convertirent beaucoup de monde et ils guérirent beaucoup de malades.
Ils sont représentés dans l'attitude du recueillement et les mains jointes. L'un des deux, la tête découverte, fléchit le genou; l'autre, debout, est coiffé d'un bonnet pointu à bourrelet ; ses épaules sont couvertes d'un camail.
.
La baie 227 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
11 et 12. Dernière apparition de Jésus à saint Pierre.
On lit sur le phylactère qui se déroule au-dessus de la tête de l'apôtre DOMINE QUO VADIS, "Seigneur, où allez-vous?" Une banderole devant la tête de Jésus lui répond: VADO ROMAE ITERUM CRUCIFIGI , "Je vais à Rome me faire crucifier de nouveau."
La baie 227 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LE TYMPAN.
.
Toutes les verrières de la partie ogivale de la fenêtre ont été renouvelées après l'incendie de 1700 par un damier de lozanges rouges séparées par des bandes bleues avec des rosettes d'or et d'argent. Dans les lobes du centre, quatre anges, qui auraient échappé à l'incendie portent les armes du duché de Lorraine d'or à la bande de gueules, chargé de 3 alérions d'argent (XIXe siècle ?) et traversées d'une crosse en pal.
Ces armoiries épiscopales sont comparables à celles qui accompagnent Henri de Lorraine sur le vitrail de la chapelle Sainte-Anne de Joinville, réalisée aussi en 1502.
Il est évident que si ces armoiries étaient d'origine, le problème de l'identification du donateur ne se posaient pas.
.
Henri de Lorraine agenouillé en donateur, chapelle Sainte-Anne de Joinville.Site ducs de lorraine.canalblog.com
.
.
Tympan de la baie 227 (1502) de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
SOURCES ET LIENS.
.
— ARNAUD (Anne-François), 1837, Voyage archéologique et pittoresque dans le département de l'Aube, Troyes page 144.
"Les compartimens de l'ogive de la cinquième fenêtre sont remplis par des lozanges rouges séparées par des bandes bleues avec des rosettes d'or et d'argent comme à la fenêtre en regard. On y remarque l'écu deux fois répété de l'évêque Louis de Lorraine, qui est d'or à la bande de gueules chargée de trois alérions d'argent, et la crosse d'or adossée. Louis de Lorraine, évêque de Troyes en 1545, mourut le 28 mars 1578, sous le nom du cardinal de Guise, après avoir été archevêque de Sens et abbé de Saint-Victor de Paris. Au-dessous sont des figures d'anges en attitude d'adoration.
L'intervalle des meneaux est occupé par deux rangs de figures de saints, grandes comme nature et détachées sur un fond d'étoffe bleue brochée de feuillages.
Dans le premier panneau, en haut, on voit premièrement saint Jean-Baptiste devant lequel est agenouillé saint Pierre, en chape papale de couleur pourpre et bordée de perles. Derrière le prince des apôtres est une grotte ouverte dans un rocher.
Aux deuxième et troisième panneaux, saint Pierre, toujours en chape papale et avec le nimbe entouré de perles d'or, est amené devant Agrippa assis sur son trône et coiffé d'un turban. Saint Pierre a la tête chauve entourée d'un nimbe bordé de perles avec une chape rose bordée de même.
Aux quatrième et cinquième panneaux, saint Pierre, vêtu de même, guérit une femme en présence de son mari.
Au deuxième rang, on voit d'abord saint Étienne vêtu en diacre, tenant une palme d'or et portant dans un pli de sa tunique plusieurs pierres pour rappeler le genre de son martyre. Vient ensuite un saint archevêque au nimbe de pourpre, tenant une croix et un livre ouvert sur lequel il a les yeux baissés.
Aux troisième et quatrième panneaux, on voit un personnage richement vêtu, coiffé d'un turban, qui accompagne un jeune homme prosterné aux pieds de saint Pierre, assis sur un trône d'or à dossier, revêtu d'une magnifique chape verte avec la tiare ornée des trois couronnes, et tenant à la main les deux clefs, signe caractéristique de la puissance qu'il a reçue du Christ. Ces trois dernières figures n'ont pas de nimbe.
Dans les cinquième et sixième panneaux sont encore les figures de saint Pierre tenant une énorme clef d'argent; sa tête est détachée sur un nimbe vert entouré d'un cercle d'or. Puis celle de saint Jean, en manteau rouge, et tenant une croix d'or; de la bouche de ces deux saints partent de longs rouleaux chargés d'inscriptions. Les figures des sujets supérieurs dont nous venons de parler ont aussi de semblables rouleaux déployés autour de la tête.
Le fond des douze panneaux de cette dernière fenêtre est une étoffe bleu foncé, brochée à fleur, d'un dessin assez riche.
Dans les arcades des tribunes au-dessous, on voit d'abord des figures incomplètes de vieillards, qui remplissent les deux premiers panneaux. Au troisième, un vieillard près de la tête duquel est écrit un nom que quelques lettres transposées ou enlevées rendent illisibles."
— BIVER (Paul), 1908-1935, L'École troyenne de peinture sur verre. Non consulté.
— COFFINET (Abbé Jean-Baptiste), 1858, Les peintres-verriers de Troyes pendant trois siècles depuis 1375 jusqu'à 1690 "Peintres-verriers. Nomenclature des peintres-verriers de Troyes depuis 1375 jusqu'à 1690". Annales archéologiques, 1858, t. 18, p. 212-224.
— JUBAINVILLE (Henri d'Arbois de), 1862, "Documents relatifs aux travaux de construction faits à la cathédrale de Troyes pendant les XIIIe, XIVe et XVe siècles" [second article].Bibliothèque de l'École des chartes Année 1862 23 pp. 393-423
— LAFOND (Jean) 1955, "Les vitraux de la cathédrale Saint-Pierre de Troyes". In Société française d'archéologie, éd. Congrès archéologique de France : 113e session, Troyes, 1955. Orléans ; Nogent-le-Rotrou, 1957, p. 29-62.
— LIEZ (Jean-Luc), 2022, "Regard(s) sur l’héraldique à Troyes au XVIe siècle". ffhal-03940420f
https://hal.science/hal-03940420/document
—MARSAT (André), Charles J. Ledit, Angelico Surchamp · 1972 Cathédrale de Troyes, les vitraux
— MINOIS (Danielle), 2005 Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560) .Sorbonne Université presses Corpus vitrearum France Etudes VI, 1 vol. (475 p.-XXIV p. de pl.) : ill. en noir et en coul., jaquette ill. en coul. ; 33 cm
— MINOIS (Danielle), 2003,La peinture sur verre à Troyes à la fin du Moyen Age thèse d'histoire de l'art Paris IV sous la direction de Fabienne Joubert et Michel Hérald,
Camille Georges Picavet, L. Morel-Payen. — Troyes et Provins (les villes d’art célèbres). — Paris, Laurens, 1910 [compte-rendu] Revue internationale de l'enseignement Année 1911 61 pp. 87-88
— MOREL-PAYEN (Lucien) sd, Guide-Souvenir de la cathédrale de Troyes Troyes, Imp. L. Droin, -
—PASTAN (Élisabeth C. BALCON (Sylvie), 2006, "Les vitraux du chœur de la cathédrale de Troyes (xiiie siècle)", Paris, Cths, coll. « Corpus vitrearum - France II », 2006, 539 p.
— PIGEOTTE (Léon),1870, Étude sur les travaux d'achévement de la cathédrale de Troyes de 1450 à 1630, Paris, Librairie archéologique de Didron, page 47.
— RIVIALE (Laurence), "Danielle Minois, Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560). Paris, P.U.P.S., 2005, 475 p. (Corpus vitrearum France, études VI)." In: Bulletin Monumental, tome 166, n°1, année 2008. La galerie à Paris (XIVe-XVIIe siècle) pp. 85-86.
Les vitraux de la nef de la cathédrale de Troyes : les baies 128 (1499 et XIXe) et 228 (1449) des saints et saintes, par les peintre-verriers Balthazar Godon et Jean Verrat ; don de Jean Huyard chanoine de la cathédrale, et Guillaume Huyard avocat du roi à Troyes ; armoiries .
.
Voir sur les verrières hautes de la nef de la cathédrale de Troyes :
Avec 1 500 m² de verrières, allant du XIIIe au XIXe siècle, la cathédrale de Troyes est l’un des plus vitrées de France. Elle possède un triforium totalement vitré, (situé à mi-hauteur et qui fait le tour du bâtiment), ce qui est assez exceptionnel. Les vitraux de la cathédrale de Troyes sont considérés comme une œuvre majeure de la peinture sur verre en France.
Les 20 verrières hautes de la nef forment un ensemble homogène. Elles ont été réalisées entre 1498 et 1505 par plusieurs peintres-verriers dont le nom de certains sont connus (Pierre Maçon, Jean Verrat, Balthasar Godon, Lievin Varin et le cartonnier Nicolas Cordonnier). Parmi les 66 « verriers » recensés dans les archives entre 1470 et 1560, 37 peuvent être considérés comme des peintres verriers. Regroupés autour de la collégiale Saint- Urbain, ils travaillaient au sein de structures familiales et fondaient des dynasties, comme les Verrat ou les Macadré. Leur atelier était une petite structure dirigée par un peintre verrier qui n’employait qu’un ou deux serviteurs, selon ses moyens, comme on le voit à Paris et en Provence (D. Minois).
Selon le rédacteur de la notice de l'Inventaire, rédigée en 1999, "Leur iconographie répond à la seule volonté des multiples donateurs. Leur véritable lien provient plus de la technique que du style : les peintres-verriers ont mis l'accent sur la lisibilité des compositions (larges registres de scènes, mise en valeur des faits et gestes des personnages par la réduction du rôle de l'architecture et des arrières-plans, modelé très appuyé, absence de chef-d'oeuvre et de gravure sauf dans la baie 233). Certains aspects rappellent les vitraux du milieu du 13e siècle des parties hautes du choeur : la gamme colorée très vive avec barbes et cheveux en pleine couleur, la mise en plomb des yeux de certains personnages, les fonds de mosaïque. Si la Renaissance italienne ne s'y fait pas encore sentir, Jean Lafond reconnaît une influence venue de l'est dans la verrière de saint Pierre (notamment l'atelier strasbourgeois de Pierre d'Andlau). Pour Emile Mâle, la présence dans ces verrières d'une forte veine d'inspiration populaire évoque l'imagerie d'Epinal."
Au contraire, Danielle Minois (2003 ; 2005) souligne la cohérence de ces ensembles qui illustrent en un discours argumenté et savant l’histoire du salut. "Seul un clergé cultivé a pu élaborer ces programmes ; il l’a donc imposé aux donateurs qui l’ont financé. Parce que « le choix des sujets des verrières posées dans les églises est un reflet de la vie intellectuelle et religieuse », elle signale en outre les réactions des commanditaires face à la Réforme à travers les thèmes choisis, surtout après 1550 : l’histoire de Daniel ou de Tobie, la légende de l’hostie profanée. Elle montre comment les mêmes thèmes peuvent changer de sens face à un climat de remise en cause de l’Église romaine." (L. Rivale)
Ces 20 verrières hautes de la nef se répartissent entre les baies du triforium (galerie à trois arcades entre chaque travée), qui portent les numéros 127 à 136, et, au dessus de celles-ci, les baies hautes homologues portant les numéros 227 à 236. Selon la numérotation internationale des vitraux, les baies nord portent un numéro impair et les baies sud un numéro pair.
Du côté nord du transept, l'auteur du carton des baies 213 et 215 réalisées par Jean Verrat et Balthazar Godon au début du XVIe siècle est connu, il s'agit de Nicolas Cordonnier, dit le Maître de la Légende de Santa Casa.
.
Nous avons donc ainsi :
a) du côté nord, depuis le transept vers le fond de la nef :
-baies 127 et 227 : Saints ; vie de saint Pierre. réalisée en 1502, don d'Henri II de Lorraine Vaudémont, évêque de Metz ;
-baies 129 et 229 : Histoire de Tobie. 1500 ; don de Jean Fuestot l'Aîné (marchand et bourgeois de Troyes dans l'Aube) et de Denise Chappelain sa femme. Monogramme [du peintre verrier en tête de lancette de la baie 129].
-131 et 231 : Adoration des mages, et Histoire de Job. Don de Jeanne de Mesgrigny veuve de Jean Molé. 1501. Inscription et armoiries. Monogramme d'un verrier au tympan.
-133 et 233 : légende de saint Sébastien ; réalisée en 1501 par Lievin Varin, don de la confrérie de saint Sébastien .
- 135 et 235 : Légende de la Vraie Croix ; réalisées entre 1501 et 1502 par Jean Verrat, don de Claude Dorigny, veuve de Jean Péricart. Armoiries . Baie 135 très restaurée au XIXe.
b) du côté sud :
-baies 128 et 228 : Calvaire ; saints et saintes. 1499 ; peintre-verrier Balthazar Godon ; don de Jean Huyard chanoine de la cathédrale, et Guillaume Huyard avocat du roi à Troyes ; armoiries .
-baies 130 et 230 : Arbre de Jessé. Verrières réalisées par Lievin Varin entre 1498 et 1499, don de Jean de Marisy et Guillemette Phélipe sa femme. En baie 230, toute la famille de Jean de Marisy et de Guillemette Phélipe (ses frères, ses 9 filles et belles-filles) est représentée au bas de cette verrière. Armoiries.
-baies 132 et 232 : Annonciation et Nativité. Parabole du Fils Prodigue. Don de Guillaume Molé et Simone Boucherat , 1499. Réalisée en 1499 peut-être par Pierre I maçon (inscription ne notant que son prénom). Armoiries identifiées, devise "en attendant", monogrammes [du verrier]
-baies 134 et 234 : Vie de Joseph fils de Jacob ; réalisée en 1499, don d'Agnès Bonjean, veuve de Jehan Thévenin (écuyer et notaire royal à Troyes) son mari . Armoiries identifiées et monogrammes en baie 134. Inscription mentionnant le commanditaire et la date en baie 234.
-baies 136 et 236 : Histoire de Suzanne et du prophète Daniel ; réalisées en 1499 , don de Jean Coiffart, marchand de Troyes et de Marguerite, sa femme (inscription) ; les vitraux du 15e siècle du triforium (baie 136) ont disparu et sont remplacés par des vitraux du 20e siècle sur le thème de l'histoire de Daniel.
.
.
Datation en 1499 et donateurs: par inscription.
Le bord inférieur des quatre lancettes médianes de la baie 228 porte l'inscription :
.
MAÎTRE JEHAN HUARD CHANOINE DE CESTE EGLISE ET Me GUILL[AUM]E HUYARD ADVOCAT DU ROY A TROYES ET GRA|N]T MAIRE DE CESTE DICTE EGLISE ONT FAIT METTRE CESTE VERRIERE LAN MIL IIIIcc IIIIxx. ET XVIII [1498]
Les donateurs seront présentés avec les panneaux où ils figurent.
La date de réalisation des verrières est postérieure d'un an à leur donation, d'où la date estimée de 1499.
.
Attribution à Jean Verrat et Balthazar Godon : par document d'archive.
Dans les comptes de la fabrique 1498-1499 on trouve cette mention: "Payé à Jean Verrat et Balthazard verriers auxquels a esté deu pour la fin de la Verrière Monseigneur l'Advocad."
Jean Verrat et Balthazar Godon ont souvent travaillé ensemble entre 1497 et 1515, pour ces baies 128 et 228, pour les baies 213 des Saints du diocèse et 215 des Prophètes,apôtres et évangélistes (1506) de la cathédrale, pour la verrière de la Passion de l'église Saint-Syre de Montceaux-les- Vaudes (vers 1525-1530), ou avec Lyevin Varin pour la rose sud de la cathédrale de Sens (1502), L'invention des reliques de Saint-Etienne (1502), la Translationdes reliques de Saint-Etienne (1502) l'Arbre de Jessé (1503-1504).
Sur la baie 213, Jean Verrat a indiqué son nom, lacunaire : "l'an . mil . cinq [...]/ ble . homme Jehan [...]/ verrier . prie . Dieu"
Jean Verrat est seul mentionné pour les baies 135 et 235 de l'Exaltation de la Croix (1502).
Il est intervenu en 1512 en la cathédrale de Troyes pour "relever deux des panneaux de la verrière de Monseigneur de Metz" ou baies 127-227.
.
Sujet et relation avec le théâtre religieux en Champagne.
Le sujet est la représentation de neuf saints et saintes vénérés dans le diocèse de Troyes (notamment saint Loup saint Nizier, sainte Hélène et sainte Mathie), rassemblés autour de la Vierge à l'Enfant.
Ce sujet met en évidence la présence des reliques des saints locaux évangélisateurs du diocèse. "Il est fréquent de sortir ces reliques lorsque la Cité est touchée par un fléau, afin d’invoquer la protection du saint, tout en récitant la litanie des saints protecteurs du diocèse et de la Cité. Établir le lien entre les reliques et les thèmes hagiographiques des verrières c’est nous permettre de valoriser le trésor de la cathédrale d’une part, l’ecclesia-matrix surtout, comme haut lieu de pèlerinage, et d’autre part de mettre en avant le chef spirituel du diocèse : l’évêque et ceux qui en sont délégués, les chanoines et les prêtres."
Ce sujet n'est pas issu du théâtre médiéval, mais il est capital, pour la relation, que j'ai développée tout au long de la description des verrières de la nef, de ces peintures avec le Mistère duVieil Testament à personnages,de remarquer que le donateur Guillaume Huard a organisé en 1489 une représentation theâtrale de la Passion à Troyes :
5 novembre 1489.— « Ce jour, messieurs ont permis à messieurs maistres Guillaume Huyard et Symon Liboron, advocas en la court séculière, requérans qu'il pleust à messieurs leur bailler congyé, permission et licence, de jouer le Mystère de la Passion ou cloistre, y faire escharfault ; laquelle requestre messieurs ont consenti et ont permis mesdits sieurs que ceux qui vouldront jouer y puisse jouer, pourveu que trois ou quatre des plus souffisans se obligeront de rendre et restituer tous les intérestz et dommaiges tant ou cloistre que en l'esglise. » (Ibidem, 6G, 8, reg; f°37.) (Le théâtre à Troyes aux quinzième et seizième siècles / par Octave Beuve, 1913, p. 19).
Ces deux verrières occupent la cinquième travée de la nef, côté sud.
La baie 228, avec six lancettes réunies deux à deux sous deux mouchettes, et un tympan à treize ajours et écoinçons, mesure 10 m de haut et 6 m. de large.
La baie 128, en dessous, au triforium, avec ses six lancettes réunies deux à deux sous un tympan à deux mouchettes et un soufflet, mesure 3, 50 m de haut et 6 m. de large.
.
Les baies 128 et 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les baies 128 et 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE 128.
.
Cette verrière réalisée en 1499 a été très restaurée au 19e siècle ; Anne-François Arnaud décrit à cet emplacement en 1837 les vitraux de la baie 130, Charles Fichot y décrit les fragments d'une Transfiguration et enfin, en 1905, Morel Payen y décrit les vitraux actuels.
Dans la baie 135, également profondément restaurée à la même époque, les tympans conservaient des armoiries et devises d'origine. Il ne semble pas que ce soit le cas ici.
Le Christ et saint Jean datent de la fin du XIXe siècle. Les 2 lancettes de gauche et les 2 lancettes de droite comportent encore quelques pièces de la fin du 15e siècle.
"Dans le triforium, on voit des fragments encore assez considérables d'un vitrail de la Transfiguration. Jésus-Christ, vêtu de blanc, le visage resplendissant comme le soleil, les mains étendues; autour de lui une banderole, où on déchiffre ces paroles du Sauveur à ses apôtres Surgite nolite timere, Levez-vous et ne craignez pas. A sa droite est Moïse, à sa gauche Élie. Les apôtres Pierre, Jacques et Jean contemplent avec admiration; quelques fragments d'inscription rappellent les paroles de saint Pierre: Domine, faciamus hic tria tabernacula, tibi unum, etc., Seigneur, faisons ici trois tentes, une pour vous, une pour Moïse, une pour Élie. (Charles Fichot)
.
La baie 128 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
n°1 : deux pharisiens assistant à la Crucifixion. n° 2 : deux saintes femmes.
.
Tympan : losanges rouges centrés sur un fleuron blanc ; croisillons bleus.
.
La baie 128 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
n°3 : Marie et Jean assistant à la Crucifixion. n° 4 : le Christ en croix et Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix.
.
Tympan : losanges rouges centrés sur un fleuron blanc ; croisillons bleus.
.
La baie 128 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
n°5 et n°6 : pharisiens, notables et soldats assistant à la Crucifixion.
.
Tympan : losanges rouges centrés sur un fleuron blanc ; croisillons bleus.
.
La baie 128 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE 228.
Cette verrière a été mise en place en 1499 mais porte la date de 1498, elle a été réalisée par Jean Verrat et Balthazar Godon, après le don de Jean Huyard chanoine de la cathédrale et de Guillaume Huyard avocat du roi à Troyes ; les vitraux d'origine du tympan ont été incendiés en 1700 et remplacés par des losanges fleurdelisés par entrecrosiement des bandes bleues. L'ensemble a été assez restauré à la fin du XIXe siècle, notamment les têtes de sainte Hélène, sainte Mâthie, saint Loup et de la Vierge.
La décoration de cette fenêtre ne ressemble en rien aux verrières précédentes, surtout comme facture. Les sujets dont elle se compose sont simplement la représentation de saints et de saintes honorés pour la plupart dans le diocèse de Troyes. Douze figures grandes comme nature, disposées sur deux rangs, occupent toute la hauteur des lancettes, dans des niches à colonnes et arcades feuillagées, au dessus d'un phylactère portant leur nom. Les six panneaux du registre inférieur sont tenus par deux putti, tandis que pour le registre supérieur, les arcades sont des tressages de rinceaux, avec des putti en tête de lancette pour les deux premiers.
Les donateurs occupent, respectivement présentés par saint Jean-Baptiste et par saint Guillaume, la première et la sixième lancette au registre inférieur.
.
La baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
. I. LES DONATEURS.
.
1°) Le chanoine Jean Huyard présenté par saint Jean-Baptiste. Première lancette, registre inférieur.
N.b : les formes Huyart et Huyard sont équivalentes.
.
.
Jean-Baptiste s'identifie par son agneau tenant dans la patte gauche l'étendard de la résurrection, par sa barbe et ses cheveux longs, par sa tunique de poils de chameau. Il porte un manteau rouge.
Le chanoine porte l'habit de chœur avec l'aumusse fourré d'hermines à l'avant-bras gauche et le collier bleu du chapître de Troyes.
Le fond est orné de losanges bleus et verts fleuronnés par entrelacs de rubans rouges.
.
En 1504, plusieurs chanoines portaient le nom de Jean Huyart.
a) Il y avait d'abord Jean Huyart l'ainé, fils cadet de Nicolas Huyart, dit Vinneret, tabellion de la cour de Troyes. Il était, en 1438, chapelain de la chapelle de SainteMadeleine à la cathédrale, en 1444, maître ès-arts et chanoine prébendé de Saint-Etienne et de Saint-Urbain ; et en 1449, chanoine de Saint-Pierre. En 1482, il était curé de Saint-Nizier. Il mourut le 27 mars 1505. Le 9 avril 1505, un executeur du testament de Jean Huyard offre un livre de parchemin en grande lettre de forme muni de deux fermoirs d'argent émaillés contenant le canon de la messe. C'est a priori notre donateur.
On mentionne un "Jehan Huyart seniori," dans un texte de 1531 :
— A Nicolas Halins, ymagier, le XIIIIe jour de janvier, baillé la somme de six livres tournois, sur et en déduction de la somme de XXXVI 1. tournois à quoy il a marchandé à messieurs le doyen J. Huyart sen. et moy de faire trois ymages, assavoir Nostre Dame de Pité, Sainct Jehan et la Magdelene aux deux boutz, selon le volume et ordre que le maistre maçon de ceste église luy a donné, pour ce cy VI 1. t. J. Huyart Sen. = seniori : il s'agit de Jean Huyart, l'aîné. — Texte mentionné par KMV, p. 72, d'après Pigeotte, Etude sur les travaux d'achèvement de la Cathédrale de Troyes, p. 118.
b) Ce Jean Huyart avait un neveu, nommé comme lui Jean Huyart, et surnommé le jeune ; à la mort de son oncle, il prit le nom de Jean Huyart l'ainé. Il était chanoine de Saint-Pierre au moins depuis 1487, et c'est lui qui fut nommé doyen de Lirey le 28 octobre 1504. Il fut également curé de Saint-Nizier, dont la reconstruction, commencée vers 1528, reçut probablement son concours; il y succéda peut-être immédiatement à son oncle; il fut aussi curé de Montceaux et de Vaudes. ("Monseigneur Jean Hyuart le vieil, chanoine de la cathédrale", doyen de l'église Notre-Dame de Lirey, contribue à cette église). Dans une délibération à laquelle il assiste avec son neveu Jean Huyart le jeune, il est surnommé Vinneret. Il laisse par testament, le 20 novembre 1539, de quoi augmenter les fondations de son oncle et institue pour exécuteurs testamentaires son neveu Antoine Perricard, chanoine de Saint-Pierre, et Jean Colet, official de l'évêché. Sa mort arriva à Lirey le 14 juin 1540. Il est mentionné dans un baillage de 1509.
Ce Jean Huyard, ancien curé de l'église Saint-Nizier à Troyes, doyen de Lirey, chanoine de la cathédrale en même temps que marguillier et comptable de la fabrique, en 1533, et curé de Montceaux, offrit à l'église de Montceaux-lès-Vaudes un lutrin aigle portant ses armoiries et son portrait.
Jean Huyard avait été curé de Saint-Nizier de Troyes.
c) Un troisième Jean Huyart, neveu du doyen de Lirey et petit-neveu du premier Jean Huyart, était surnommé le jeune depuis que le doyen de Lirey avait été surnommé l'aîné; il fut pourvu du canonicat et de la prébende de son grand-oncle qui avait résigné en sa faveur le 26 mars 1505. De 1507 à 1536, le doyen de Lirey, son oncle, est la plus grande partie du temps à Lirey, où il surveille et active la reconstruction de l'église; aussi, dans les délibérations du chapitre de Saint-Pierre, l'on ne rencontre guère alors que le nom de Jean Huyart le jeune. Nous le trouvons cependant en 1520 à Saint-Étienne, où il rend compte de 15 sous qu'il a reçus de la confrérie de Sainte-Clotilde. Il est alors le seul Huyart faisant partie du chapitre de cette collégiale. Le vendredi 13 avril 1526, il assemble, avec Juvenel Coiffart, les officiers de la seigneurie d'Isles chez l'avocat Huyart, son frère, pour leur communiquer des pièces relatives à une affaire, pendante entre le chapitre de la cathédrale et le seigneur d'Isles.
Un autre Jean Huyart, de Lanis, né à Laines-aux-Bois , chanoine de la cathédrale, ne parait pas avoir appartenu à la même famille. Il est mort vers 1532, et apparaît dans les comptes pour l'année 1525-1526 et 1527-1528
d) Pour mémoire, il existe un Etienne Huyart curé de Pont-sur-Seine, et un Etienne Huyart chanoine de la cathédrale au XVe
.
Les donateurs de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
Les armoiries de la famille Huyard sont présentées par deux angelots aux ailes bleues : elles se blasonnent d'argent , à trois têtes de faucon au naturel arrachées , à la bordure engrelée de gueules.
Il pourrait s'agir d'armes parlantes, le "huard" etant un aigle de mer.
.
.
.
.
Les donateurs de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
2° Guillaume Huyard avocat du Roi de la cathédrale, présenté par saint Guillaume archevêque de Bourges. Dernière lancette, registre inférieur.
.
Le donateur est agenouillé mains jointes, il porte un manteau rouge traversé par une bande noire longitudinale (marque d'avocat ou chaperon?) et une aumônière bleue.
.
L'inscription indique Me GUILL[AUM]E HUYARD ADVOCAT DU ROY A TROYES ET GRANT MAIRE DE CESTE DICTE EGLISE
Charles Fichot commente le terme "maire" ainsi : "Parmi les officiers laïques de la cathédrale, le maïeur ou bailly tient le premier rang. Il est nommé par le chapitre et reçu par le lieutenant général de Troyes. En quelque lieu de la ville où il demeure, il est de la paroisse du Sauveur (chapelle de la cathédrale qui avait le titre de paroisse), lui, sa femme, ses enfants et ses domestiques. » (Courtalon, tome II, page 109.)"
Léon Pigeotte, citant Arnaud, lit plutôt "écuyer, maire de la ville et marguillier de la dite église".
.
Guillaume HUYARD, avocat du roi, bailli de Brienne en 1483, licencié en lois, est né vers 1430 à Troyes, et décédé vers 1510, à l'âge d'environ 80 ans ; il fut inhumé dans la cathédrale Saint-Pierre. Il fut Député aux Etats Généraux en 1484.
Dans l'Obituaire de Saint-Pierre, publié par M. l'abbé Lalore, il est dit que Jean et Guillaume Huyard étaient inhumés sous l'arcade de la grande vitre qu'ils ont fait mettre avec celle de dessous (le triforium); que les deux frères auraient fait décorer cette travée de peintures (ou de bas-reliefs) représentant la mort et l'assomption de la Vierge, et d'une statue de Notre-Dame de Pitié; qu'entre les deux piliers, il y avait deux tombes, une blanche pour la sépulture de Jean et une noire pour celle de Guillaume, et que toute cette travée était consacrée à cette famille. (C. Fichot)
Il était, comme son frère cadet Jean, le fils de Nicolas HUYART, tabellion en la Cour de Troyes et conseiller de la ville né à Beaufort ca 1390-1441. Il épousa Isabeau GUERRY ca 1430, fille d'Antoine GUERRY, licencié en lois ca 1390-ca 1474 et de Jeanne HENNEQUIN ca 1400-1474/) dont un fils, Antoine HUYART, avocat du roi, lieutenant général au baillage de Troyes (1504-1513), seigneur d'Argentolle, ca 1460-1513 épousa Guillemette LESGUISE ca 1465.
Guillaume Huyard fut député du tiers-état pour le bailliage de Troyes aux états de Tours, tenus en 1483. Sous Charles VIII, il y soutint avec honneur les droits de ses commettans.
En 1530, Antoine Huyard, escuyer, licencié en lois, fut élu maire de la ville de Troyes, au bailliage duquel il était conseiller.
Les généalogistes signalent une sculpture sur une poutre de gloire de la chapelle latérale nord de l'église Saint-Quentin du Meix-Tiercelin (51), aux armes du couple HUYART/HENNEQUIN.
Un carreau en terre rouge foncé provenant de l'ancien château de Lirey (Aube), donné au Musée de troyes en 1874, porte des armes écartelées ; il porte au 1 et 4 les armes de la famille Huyart: et au 2 et 3, les armes de la famille Guerry des Essarts. La réunion de ces armoiries rappelle l'alliance de Guillaume Huyart, conseiller du roi et son avocat au bailliage de Troyes, vivant en 1495, avec demoiselle Ysabeau Guerry des Essarts, dame de Lirey, fille ou sœur d'Antoine Guerry, seigneur des Essarts ou de Lirey. La famille Guerry des Essarts descend de Jean Guerry « le jeune » prévôt de Sens en 1333. Elle a donné un gouverneur de Champagne, un lieutenant général au bailliage de Chaumont, un prévôt de Troyes, une prieure de Foicy, des chanoines de la Cathédrale. Alliée aux d'Avelly, de la Haye, de Dormans, Hennequin, Huyart, Milon, Piedefer, de Roffey, etc., elle a possédé les seigneuries d'Avirey, Lignières, Lingey, Lirey, SaintBenoit-sur-Vanne, etc. (Louis Le Clert)
.
Les donateurs de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les donateurs de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les donateurs de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
Je décrirai les autres panneaux en partant du coin supérieur gauche.
.
1. Saint Loup évêque de Troyes, terrassant de la pointe d'une épée un dragon ailé rouge.
"Saint Loup, évêque de Troyes, terrassant l'hérésie, représentée par un monstrueux dragon, souvent symbole des fléaux; on sait que saint Loup protégea la ville de Troyes contre l'armée d'Attila. Le saint évêque tient sa crosse de la main gauche; de la main droite, il transperce la gorge de l'animal de la pointe de son épée. Au-dessous de lui est écrit Saict Loup." (Charles Fichot)
Le visage a été restauré au XIXe siècle.
La représentation du saint est archetypale depuis le XVe siècle, on la retrouve sur le vitrail de 1505 de l'église Saint-Denis à Torvilliers.
Le Trésor de la cathédrale contenait jadis une "chasse de Saint-Loup", travail d'orfèvre réalisée en 1503 à la demande de Nicolas Forjot, abbé de Saint-Loup de Troyes, et surmontée du buste de saint Loup en grandeur naturelle, coiffée de sa mitre ornée de pierres précieuses. Son socle était décoré de seize émaux racontant sa vie. Ces émaux ont échappés à la destruction de la chasse à la Révolution et sont soigneusement reproduits par Charles Fichot.
Fond à croisillon verts formant des losanges jaunes .
.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
2. Saint Savinien de Sens, apôtre et martyr.
Il est vêtu d'une longue robe bleue tombant sur les pieds nus et d'un manteau jeté sur l'épaule, se drapant en sautoir sur le corps, tenant un livre fermé de la main droite et un bâton fleuri de la main gauche, emblème du messager de la paix. Au-dessous de lui on lit: S. favinic.
Saint Savinien (IIIe siècle) fut envoyé de Rome vers les Gaules avec ses compagnons Potentien et Altin. Il est fêté le 31 décembre.
La tradiotion y voit le premier évêque de Sens. Il fut décapité à la hache à l'emplacement de l'actuelle église Saint-Savinien de Sens.
Fond à croisillon verts formant des losanges jaunes .
.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
3. La Vierge à l'Enfant.
Son visage date du XIXe siècle. Elle est couronnée et porte un manteau bleu doublé d'hermines et à fermail agrafé d'un médaillon perlé, sur une robe rouge. De sa main gauche elle tient une tige fleurie , auquel l'enfant, tenu sur le bras droit, cueille une fleur. Elle repose sur une console soutenue par deux putti.
Dans la tête de lancette, la colombe du Saint-Esprit (allusion à l'Annonciation) est posé sur un entrelacs de lys, symbole de pureté.
Fond à crosillons rouges, fleurons blancs et losanges verts.
.
La Vierge de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La Vierge de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
4. Saint Pierre tenant sa clef.
.
"Saint Pierre, le prince des apôtres, la barbe frisée, la tête chauve, tenant une grosse clé de la main droite et un livre ouvert de la main gauche." (Fichot)
Nous retrouvons la console soutenue par deux putti, la colombe du Saint-Esprit dans la tête de lancette sur un entrelacs de lys, et le fond à crosillons rouges, fleurons blancs et losanges verts : les deux panneaux centraux de la Vierge et de saint Pierre sont appariés.
.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
4. Saint Paul tenant son épée.
.
Saint Paul, longue chevelure dégarnie en région frontale et longue barbe, tient l' épée la pointe en l'air de sa décollation, et un livre ouvert.
.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
5. Saint Nizier archevêque de Lyon.
.
Il est représenté de trois-quart ; il tient sa croix et son livre d'heures ouvert. Au-dessous de lui est écrit : Sainct nicier.
L'église Saint-Nizier de Troyes en conservait les reliques.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
REGISTRE INFÉRIEUR.
.
6. Saint Étienne, martyr, tenant une palme de la main droite, vêtu de sa dalmatique de diacre qu'il soulève de sa main gauche et dans laquelle il porte les pierres qui ont servi à le martyriser.
.
Une autre pierre est posée sur son crâne tonsuré. Il porte le manipule vert frangé et orné de croix. Amict perlé.
.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
7. Sainte Hélène d'Athyra.
.
Sainte Hélène, dont le corps fut transporté de Constantinople à Troyes par le chapelain de l'évêque Garnier de Trainel, en 1209, était la fille du roi de Corinthe. Elle porte une couronne d'or d'où s'échappe une belle et longue chevelure; elle est vêtue d'une robe et d'un manteau royal et porte une palme de la main droite; elle tient de ses deux mains un livre ouvert devant elle. Son nom HELENA est inscrit sur une petite bordure jaune à côté de sa figure.
Ses reliques byzantines ont été retrouvées dans le Trésor de la cathédrale. Il s'agit de deux fragments de samit de soie et de fils d'or, représentant un cavalier, probablement dans une scène de fauconnerie.
Visage restauré au XIXe siècle.
Fonds à croisillons rouges délimitant des carrés à étoiles jaunes.
Sainte Hélène, mais c'est alors la mère de Constantin figure aussi sur la baie 235.
Les saintes de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
7. Sainte Mâtie patronne de Troyes.
.
Sainte Mâthie ou Mâtie vécut à Troyes au IIIe/IVe siècle, en même temps que Savinien. Elle était la servante ou la fille d'un boulanger, dont elle distribuait le pain aux pauvres. Elle aurait subie la décapitation.
Cette sainte, représentée en regard de sainte Hélène, a le front ceint d'un anneau d'or orné d'un camée et de pierres précieuses, comme en portaient les dames nobles du xve siècle, destiné à maintenir sa longue chevelure. Elle est vêtue d'une robe jaune, et un grand manteau rouge doublé d'hermine, avec une bordure bleue garnie de perles, descend de ses épaules à ses pieds. Elle tient une palme de la main gauche et un livre d'heures de la main droite. Le vitrail ne fait aucune allusion au "miracle des roses" (les charbons ardents que lui lançait son père se transformaient en roses).
Les saintes de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les saintes de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
8. Saint Jacques le Majeur .
.
Saint Jacques le Majeur, debout et au repos, les mains appuyées sur son bourdon. Il est vêtu en pèlerin et la tête est couverte d'un grand chapeau avec coquillages, relevé sur le devant et noué sous le menton par un ruban rouge. Sa pèlerine bleue porte également une coquille de pèlerinage.
Les chaussures sont remarquables, en cuir brun fendu au cou de pied.
.
Les saints de la baie 228 de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
SOURCES ET LIENS.
.
— ARNAUD (Anne-François), 1837, Voyage archéologique et pittoresque dans le département de l'Aube, Troyes page 144.
"Les divers cadres de la partie ogivale de la cinquième fenêtre sont remplis par des lozanges formées de bandes bleues avec des rosettes rouges à leur intersection; et le reste est occupé par douze figures de saints honorés à Troyes, grandes comme nature, et disposées sur deux rangs. En commençant vers le choeur, on voit d'abord saint Loup, évêque de Troyes, vainqueur du monstre, symbole de l'hérésie. Puis saint Savinien, le premier apôtre de Troyes. Ensuite la Vierge et l'enfant Jésus : la reine des anges a sur la tête une magnifique couronne d'or. Puis vient saint Pierre, tenant un livre et les clefs d'or, symbole du pouvoir qui lui a été donné; saint Paul, tenant un livre et l'épée. Puis saint Nizier, tenant une croix. Les noms de ces saints se lisent en noir au bas de chaque figure.
Au deuxième rang, au-dessous, vers le choeur, saint Jean Baptiste, reconnaissable à ses attributs, présente l'un des donateurs de ce vitrail : c'est un ecclésiastique revêtu de son aube, il est à genoux, tourné vers l'ouest, et les mains jointes, au bas de la figure est l'écu de ses armes qui sont d'argent, engrelé de gueules avec trois têtes d'épervier au naturel, et pour supports des anges nuds agenouillés. Viennent ensuite trois figures de saints et saintes. Premièrement saint Etienne, premier martyr, représenté en diacre avec une grosse pierre sur la tête et d'autres qu'il porte dans sa robe. Puis sainte Hélène avec une couronne d'or et un manteau de pourpre, un livre à la main. Puis sainte Mathie, patronne de la ville, placée en regard; elle a aussi un manteau de pourpre avec un nimbe d'or et tient un livre avec une palme verte; ensuite saint Jacques en costume de pèlerin avec le bourdon et les coquilles à son large chapeau. Puis enfin saint Guillaume qui présente le second donateur dont il est le patron. Celui-ci est tourné vers le chœur et en robe rouge avec une escarcelle ou carnacière bleue suspendue à sa ceinture. Près de lui est reproduit l'écu aux trois têtes d'épervier avec les supports dont nous avons parlé ce qui indique qu'il est de la même famille.
Au bas du vitrail, on lit sur deux lignes cette inscription: Maistre Jean Huyard, chanoine de ceste église, et Guillaume Huyard, avocat du Roi à Troyes, escuyer, maire de ceste dicte ville et mareglier de ceste dicte église, ont fait mettre ceste verrière l'an mil IIIIC IIIIXX et XVIII.
Jean Huyard avait été curé de Saint-Nizier de Troyes. Guillaume Huyard fut député du tiers-état pour le bailliage de Troyes aux états de Tours, tenus en 1483. Sous Charles VIII, il y soutint avec honneur les droits de ses commettans.
En 1530, un Antoine Huyard, escuyer, licencié en lois, qui était de cette famille, fut élu maire de la ville de Troyes, au bailliage duquel il était conseiller.
Dans le fond de la tribune, au-dessous de cette cinquième fenêtre, on remarque plusieurs figures bibliques premièrement les prophètes Johel, Abdias, puis Moïse et le buisson ardent; Gédéon et l'ange, puis Jérémie; saint Guillaume, archevêque, occupe la dernière ogive vers l'orient. Toutes ces figures ont autour de la tête des rouleaux déployés sur lesquels on lit leurs noms écrits en grosses lettres d'or."
— COFFINET (Abbé Jean-Baptiste), 1858, Les peintres-verriers de Troyes pendant trois siècles depuis 1375 jusqu'à 1690 "Peintres-verriers. Nomenclature des peintres-verriers de Troyes depuis 1375 jusqu'à 1690". Annales archéologiques, 1858, t. 18, p. 212-224.
— JUBAINVILLE (Henri d'Arbois de), 1862, "Documents relatifs aux travaux de construction faits à la cathédrale de Troyes pendant les XIIIe, XIVe et XVe siècles" [second article].Bibliothèque de l'École des chartes Année 1862 23 pp. 393-423
— LAFOND (Jean) 1955, "Les vitraux de la cathédrale Saint-Pierre de Troyes". In Société française d'archéologie, éd. Congrès archéologique de France : 113e session, Troyes, 1955. Orléans ; Nogent-le-Rotrou, 1957, p. 29-62.
— LIEZ (Jean-Luc), 2022, "Regard(s) sur l’héraldique à Troyes au XVIe siècle". ffhal-03940420f
https://hal.science/hal-03940420/document
—MARSAT (André), Charles J. Ledit, Angelico Surchamp · 1972 Cathédrale de Troyes, les vitraux
— MINOIS (Danielle), 2005 Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560) .Sorbonne Université presses Corpus vitrearum France Etudes VI, 1 vol. (475 p.-XXIV p. de pl.) : ill. en noir et en coul., jaquette ill. en coul. ; 33 cm
— MINOIS (Danielle), 2003,La peinture sur verre à Troyes à la fin du Moyen Age thèse d'histoire de l'art Paris IV sous la direction de Fabienne Joubert et Michel Hérald,
Camille Georges Picavet, L. Morel-Payen. — Troyes et Provins (les villes d’art célèbres). — Paris, Laurens, 1910 [compte-rendu] Revue internationale de l'enseignement Année 1911 61 pp. 87-88
— MOREL-PAYEN (Lucien) sd, Guide-Souvenir de la cathédrale de Troyes Troyes, Imp. L. Droin, -
—PASTAN (Élisabeth C. BALCON (Sylvie), 2006, "Les vitraux du chœur de la cathédrale de Troyes (xiiie siècle)", Paris, Cths, coll. « Corpus vitrearum - France II », 2006, 539 p.
— PIGEOTTE (Léon),1870, Étude sur les travaux d'achévement de la cathédrale de Troyes de 1450 à 1630, Paris, Librairie archéologique de Didron, page 47.
— RIVIALE (Laurence), "Danielle Minois, Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560). Paris, P.U.P.S., 2005, 475 p. (Corpus vitrearum France, études VI)." In: Bulletin Monumental, tome 166, n°1, année 2008. La galerie à Paris (XIVe-XVIIe siècle) pp. 85-86.
Les vitraux de la nef de la cathédrale de Troyes : les baies 135 et 235 de l'exaltation de la Sainte Croix. Réalisées entre 1501 et 1502 par Jean Verrat, don de Claude Dorigny, veuve de Jean Péricart. Armoiries.
.
Voir sur les verrières hautes de la nef de la cathédrale de Troyes :
Avec 1 500 m² de verrières, allant du XIIIe au XIXe siècle, la cathédrale de Troyes est l’un des plus vitrées de France. Elle possède un triforium totalement vitré, (situé à mi-hauteur et qui fait le tour du bâtiment), ce qui est assez exceptionnel. Les vitraux de la cathédrale de Troyes sont considérés comme une œuvre majeure de la peinture sur verre en France.
Les 20 verrières hautes de la nef forment un ensemble homogène. Elles ont été réalisées entre 1498 et 1505 par plusieurs peintres-verriers dont le nom de certains sont connus (Pierre Maçon, Jean Verrat, Balthasar Godon, Lievin Varin et le cartonnier Nicolas Cordonnier). Parmi les 66 « verriers » recensés dans les archives entre 1470 et 1560, 37 peuvent être considérés comme des peintres verriers. Regroupés autour de la collégiale Saint- Urbain, ils travaillaient au sein de structures familiales et fondaient des dynasties, comme les Verrat ou les Macadré. Leur atelier était une petite structure dirigée par un peintre verrier qui n’employait qu’un ou deux serviteurs, selon ses moyens, comme on le voit à Paris et en Provence (D. Minois).
Selon le rédacteur de la notice de l'Inventaire, rédigée en 1999, "Leur iconographie répond à la seule volonté des multiples donateurs. Leur véritable lien provient plus de la technique que du style : les peintres-verriers ont mis l'accent sur la lisibilité des compositions (larges registres de scènes, mise en valeur des faits et gestes des personnages par la réduction du rôle de l'architecture et des arrières-plans, modelé très appuyé, absence de chef-d'oeuvre et de gravure sauf dans la baie 233). Certains aspects rappellent les vitraux du milieu du 13e siècle des parties hautes du choeur : la gamme colorée très vive avec barbes et cheveux en pleine couleur, la mise en plomb des yeux de certains personnages, les fonds de mosaïque. Si la Renaissance italienne ne s'y fait pas encore sentir, Jean Lafond reconnaît une influence venue de l'est dans la verrière de saint Pierre (notamment l'atelier strasbourgeois de Pierre d'Andlau). Pour Emile Mâle, la présence dans ces verrières d'une forte veine d'inspiration populaire évoque l'imagerie d'Epinal."
Au contraire, Danielle Minois (2003 ; 2005) souligne la cohérence de ces ensembles qui illustrent en un discours argumenté et savant l’histoire du salut. "Seul un clergé cultivé a pu élaborer ces programmes ; il l’a donc imposé aux donateurs qui l’ont financé. Parce que « le choix des sujets des verrières posées dans les églises est un reflet de la vie intellectuelle et religieuse », elle signale en outre les réactions des commanditaires face à la Réforme à travers les thèmes choisis, surtout après 1550 : l’histoire de Daniel ou de Tobie, la légende de l’hostie profanée. Elle montre comment les mêmes thèmes peuvent changer de sens face à un climat de remise en cause de l’Église romaine." (L. Rivale)
Ces 20 verrières hautes de la nef se répartissent entre les baies du triforium (galerie à trois arcades entre chaque travée), qui portent les numéros 127 à 136, et, au dessus de celles-ci, les baies hautes homologues portant les numéros 227 à 236. Selon la numérotation internationale des vitraux, les baies nord portent un numéro impair et les baies sud un numéro pair.
.
Nous avons donc ainsi :
a) du côté nord, depuis le transept vers le fond de la nef :
-baies 127 et 227 : Saints ; vie de saint Pierre. réalisée en 1502, don d'Henri II de Lorraine Vaudémont, évêque de Metz ;
-baies 129 et 229 : Histoire de Tobie. 1500 ; don de Jean Fuestot l'Aîné (marchand et bourgeois de Troyes dans l'Aube) et de Denise Chappelain sa femme. Monogramme [du peintre verrier en tête de lancette de la baie 129].
-131 et 231 : Adoration des mages, et Histoire de Job. Don de Jeanne de Mesgrigny veuve de Jean Molé. 1501. Inscription et armoiries. Monogramme d'un verrier au tympan.
-133 et 233 : légende de saint Sébastien ; réalisée en 1501 par Lievin Varin, don de la confrérie de saint Sébastien .
- 135 et 235 : Légende de la Vraie Croix ; réalisées entre 1501 et 1502 par Jean Verrat, don de Claude Dorigny, veuve de Jean Péricart. Armoiries . Baie 135 très restaurée au XIXe.
b) du côté sud :
-baies 128 et 228 : Calvaire ; saints et saintes. 1499 ; peintre-verrier Balthazar Godon ; armoiries (identifiées) : Jean Huyard chanoine de la cathédrale, et Guillaume Huyard avocat du roi à Troyes
-baies 130 et 230 : Arbre de Jessé. Verrières réalisées par Lievin Varin entre 1498 et 1499, don de Jean de Marisy et Guillemette Phélipe sa femme. En baie 230, toute la famille de Jean de Marisy et de Guillemette Phélipe (ses frères, ses 9 filles et belles-filles) est représentée au bas de cette verrière. Armoiries.
-baies 132 et 232 : Annonciation et Nativité. Parabole du Fils Prodigue. Don de Guillaume Molé et Simone Boucherat , 1499. Réalisée en 1499 peut-être par Pierre I maçon (inscription ne notant que son prénom). Armoiries identifiées, devise "en attendant", monogrammes [du verrier]
-baies 134 et 234 : Vie de Joseph fils de Jacob ; réalisée en 1499, don d'Agnès Bonjean, veuve de Jehan Thévenin (écuyer et notaire royal à Troyes) son mari . Armoiries identifiées et monogrammes en baie 134. Inscription mentionnant le commanditaire et la date en baie 234.
-baies 136 et 236 : Histoire de Suzanne et du prophète Daniel ; réalisées en 1499 , don de Jean Coiffart, marchand de Troyes et de Marguerite, sa femme (inscription) ; les vitraux du 15e siècle du triforium (baie 136) ont disparu et sont remplacés par des vitraux du 20e siècle sur le thème de l'histoire de Daniel.
.
Donateur et datation établie par inscription :
.
La baie 135 comporte sur une banderole du tympan l'inscription :
CESTE PRESENTE VERRIERE FUT FAICTE L'AN MIL CINQ CENT ET UNG.
Cette inscription avait déjà été relevée par l'abbé Coffinet en 1858, elle n'est pas attribuable aux restaurateurs du XIXe siècle.
La baie 235 comporte en son bord inférieur l'inscription de donation suivante :
DAMOISELLE CLAUDE DORIGNY VEUVE DE FEU NOBLE JEHAN PERICART DEMEURANT À TROYES A DONNE CESTE VERRIERE L'AN MIL CINQ CENT ET UN. PRIEZ DIEU POUR ELLE.
Les armoiries du couple Pericart/ Dorigny figurent sur le panneau représentant la donatrice.
Les armoiries pleines des Pericart d'or au chevron d'argent accompagné en pointe d'une ancre de sable, au chef aussi d'azur chargé de trois molettes d'or brisée d'une bordure de gueules figurent au tympan de la baie 135 à côté de celles en alliance Pericart/Dorigny.
Claude Dorigny, fille de Jean Dorigny et de Marie Robelin [fille de Jean Robelin et Jeanne Largentier], a épousé (vers 1460?) Jean Péricart (Perricard, Le Pericard, fils de Pierre et de Catherine de Pleurre), dont elle eut trois enfants, Jeannette, Marguerite et Jacques.
-Jeannette Péricart épousa vers 1480 Nicolas Colinet Mauroy (ca 1455-1510) dont trois enfants Jehannette, Guillaume et Claude.
-Jacques Péricart, seigneur de Champgrillet et de Colaverdei, marchand bourgeois de Troyes, décédé le 13 juillet 1525 à Paris, épousa Catherine Huyart, dont deux enfants Jacques et Guillemette.
Un document permettrait de rattacher la famille à Jean Dorigny (1469) , tanneur, qui eut comme enfants Claude Dorigny, écuyer, et Nicolas Dorigny conseiller au Parlement de Paris, chancelier de l'Université de Paris ; Marguerite Dorigny , épouse de Jacquet Phelippe , sieur de Bligny et Claude Dorigny épouse de Jean Péricard , décédé vers ou avant 1493 (D'azur et argent, l'art du blason en Champagne, Association des Amis des archives de l'Aube, 2000).
.
Plus tard, Claude Dorigny, écuyer, seigneur du Cormont, épousa Louise Lingault, dont Pierre, dont Claude seigneur de Chalette. Ces Dorigny de Chalette sont cités parmi les familles protestantes de Vitry-le-Français.
Les Dorigny, seigneur de Saint-Parre-aux-Tertres, des Minots (c. de Pargues), de Vauchassis, et pour moitié de Fouchères et Rosson (c. de Doches) sont une grande famille de Troyes.
Jacques Dorigny seigneur de Fontenay fut maire de Troyes de 1524 à 1528.
Leurs armoiries sont d'azur à trois chandeliers d'or accompagnés en chef d'une étoile du même.
La baie 8 de l'église Saint-Pantaléon de Troyes, consacrée à l'histoire de Daniel, porte les armoiries de Pierre Dorigny et de Nicole Molé fille de Jean. Cette baie du côté sud du chœur dans la première chapelle Dorigny a été offerte en 1531.
Dans la même église, les clefs de voûte du chœur montre les armes en alliance de la famille Molé avec la famille Dorigny (Claude II Molé et Simone Dorigny, fille de Jean seigneur de Fouchères et de Nicole Molé ) ou de la famille Pericart (Jacques Pericart et Catherine Molé).
Les Péricart ou Péricard sont mentionnés en Bourgogne et en Normandie, où un Jean Péricard fut avocat puis Procureur général au Parlement de Rouen au XVIe siècle ; il eut six fils et deux filles. Ses deux frères étaient Guillaume Péricard, chanoine de Rouen , abbé de Saint-Taurin , plus tard vicaire général du cardinal de Bourbon , et Odard Péricard.
L'armorial du département de l'Aub indique "PÉRICARD et LE PÉRICARD, originaire de Normandie, Troyes, seigneur de Bierne, Chassoy (auj. Chassois, c. d'Herbisse). D'or, à un chevron d'azur accompagné en pointe d'une ancre de sable ; au chef aussi d'azur chargé de trois molettes d'or. (d'Hozier.)"
Les archives départementales de Côte d'or indiquent un Jean Péricard, de Troyes, chanoine trésorier, conseiller au Parlement, enterré au couvent des Cordeliers.
Parmi les Péricard de Troyes, T. Boutiot mentionne Antoine, chanoine de Saint-Pierre de Troyes, Colin, Edme, François, chantre de Saint-Etienne de Troyes, François, évêque nommé de Troyes et évêque d'Avranches en 1588 après son frère Georges, Jacques, drapier de Troyes, Jacques, échevin de Troyes, Jean, Nicolas maire de Troyes, Odard maire de Troyes, Odard secrétaire du duc de Guise Henri Ier de Lorraine, Pierre, marchand, député aux Etats Généraux de Tours enn 1468, Pierre, conseiller de ville à Troyes. Vers 1431, T. Boutiot mentionne une "messe perricart" en la salle royale à Troyes.
.
.
Attribution au peintre-verrier Jean Verrat par document d'archive :
.
Les comptes de la cathédrale en 1501 indiquent : "payé à un maçon pour ayder à Jean Verrat à morteller la verrière perricarde."
Jean Verrat, actif de 1497 à 1515, est l'auteur des baies 215 et 218 datant de 1499 de la cathédrale de Troyes, de la baie de la Passion de l'église Sainte-Syre de Montceaux-les-Vaudes, de cinq verrières sud de la cathédrale de Sens (avec Balthazar Godron et Varrin Liévin).
Les archives mentionnent un règlement effectué "À Jehan Verrat, verrier, pour avoir livre et mis le verre au Relicquière de la Vraye-Croix, et au joyau des relicques nouveau faict".
.
Le sujet : l'Exaltation de la Sainte Croix.
J'ai d'abord pensé que le sujet était la Légende de la Vraie Croix, telle qu'elle fut racontée au XIIIe siècle dans la Légende dorée de Jacques de Voragine, qui décrit notamment l'invention (découverte des reliques) de la croix sur laquelle le Christ fut crucifiée par Hélène mère de l'empereur Constantin, son vol par le roi perse Chosroes II, et sa récupération par Héraclius.
Elle est représentée sur ces baies de la cathédrale de Troyes, sur une baie datant de 1520 de l'église Saint-Nizier de Troyes, puis plus tard au XVIe siècle sur une baie représentant Le triomphe de la Croix de l'église Sainte-Madeleine de Troyes et sur une verrière de l'église Saint-Pantaléon de Troyes, ou bien à l'abbatiale Saint-Martin de Clamecy ou à l'église Saint-Etienne de Bar-sur-Seine.
Mais il faut voir ici plutôt une Exaltation de la Croix, dans une démarche typologique soulignant le rôle de la Croix (symbole de la Mort rédemptrice) dans l'histoire du Salut.
C'est dans cette réflexion théologique que s'explique l'introduction ici d'un épisode du Livre d'Esther.
À Troyes, l'importance de cette vénération de la Croix était fondée sur la possession jusqu'à la Révolution, au Trésor de la cathédrale, d'une relique de la vraie croix de 25 cm de long, dont une inscription précisait qu'elle fut "tirée du trésor même où Héraclius avait déposé la Croix, dont il avait obtenu la restitution du Roi des Perses, Chosroès".
La fête religieuse de l'invention de la sainte Croix a lieu le 3 mai.
.
.
Description.
.
Les baies 135 (triforium) et 235 occupent la première travée de la nef côté nord.
La baie 235, avec six lancettes réunies deux à deux sous deux mouchettes, et un tympan à treize ajours et écoinçons, mesure 10 m de haut et 6 m de large.
La baie 135, en dessous, au triforium, avec ses six lancettes réunies deux à deux sous un tympan à deux mouchettes et un soufflet, mesure 3, 50 m de haut et 6 m. de large.
.
Les baies 135 et 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les baies 135 et 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE N°135 (TRIFORIUM).
.
.
Ensemble très restauré au 19e siècle ; en 1837 l'absence de vitraux à cet emplacement est signalé par Arnaud, ils sont rétablis en 1889 du temps de Charles Fichot, qui les décrit en 1889.
Lancettes réunies 2 par 2 sous 1 tympan à 2 mouchettes et 1 soufflet.
La baie 135 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
1, 2 et 3. Haman ministre d'Assuerus fait dresser une croix pour y pendre le Juif Mardochée.
.
La scène est extraite du Livre d'Esther, comme l'indique l'inscription JUBE PARARI CRUCEMEsther 5:14 :
Responderuntque ei Zares uxor ejus, et ceteri amici: Jube parari excelsam trabem, habentem altitudinis quinquaginta cubitos, et dic mane regi ut appendatur super eam Mardochaeus, et sic ibis cum rege laetus ad convivium. Placuit ei consilium, et jussit excelsam parari crucem.
"Zéresch, sa femme, et tous ses amis lui dirent: Qu'on prépare un bois haut de cinquante coudées, et demain matin demande au roi qu'on y pende Mardochée; puis tu iras joyeux au festin avec le roi. Cet avis plut à Haman, et il fit préparer le bois."
Rappel : le peuple Juif a été mené en exil en Perse. Mardochée est l' oncle d'Esther, qui est devenue reine. Il accéde alors à un poste important à la cour d'Assuérus, mais il refuse de se prosterner devant le grand vizir Haman. Celui-ci décide d'exterminer tous les Juifs du royaume, puis de faire pendre Mardochée à une potence. Esther use de sa beauté et de ses charmes pour obtenir du roi tout ce qu'elle voudra. Haman est pendu à la potence dressée pour Mardochée, lequel devient vizir et fait exterminer les ennemis des Juifs. Les dix fils d'Haman furent pendus. C'est l'origine de la fête juive de Pourim. "Esther s'étant présentée devant le roi, le roi ordonna par écrit de faire retomber sur la tête d'Haman le méchant projet qu'il avait formé contre les Juifs, et de le pendre au bois, lui et ses fils. C'est pourquoi on appela ces jours Purim, du nom de pur. [sort] Esther 9:25
.
Dans le premier panneau figurent Haman (inscription AM.EN) et un de ses fils. Dans le deuxième panneau, un fils ou un ami d'Haman est devant la croix et une banderole porte ses paroles "Jube parari crucem".
Dans le troisième panneau, Mardochée se tient appuyé sur une canne. Inscription MARDOCHE
.
La baie 135 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 135 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 135 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
La tête de lancette de la troisième lancette montre le blason de la famille Pericart d'or au chevron d'argent accompagné en pointe d'une ancre de sable, au chef aussi d'azur chargé de trois molettes d'or, brisée d'une bordure de gueules. Une sangle rappelle la ceinture Espérance.
La tête de lancette de la quatrième lancette montre le blason mi-parti du couple Pericart/Dorigny (d'azur à trois chandeliers d'or accompagnés en chef d'une étoile du même.)Une sangle rappelle la ceinture Espérance.
.
La baie 135 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
4, 5 et 6. Sainte Véronique et les filles de Jérusalem lors de la montée au Golgotha. Jésus portant sa croix. Deux soldats.
.
Jésus se retourne vers les femmes, et leur adresse les mots inscrits sur la banderole : FILIE JHRLEM, NOLITE FLERE SUPER ME, "Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi", citation de l'évangile de Luc Lc 23:28. Il s'agit de l'incipit d'un cantique.
.
La baie 135 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 135 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE n°235 : LES LANCETTES .
.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
7. La donatrice Claude Dorigny .
.
Elle est agenouillée mains jointes refermée sur un crucifix, devant son prie-dieu où est ouvert son livre de prières, mais, de façon inhabituelle, elle n'est pas présentée par son saint patron, mais en premier plan devant les soldats de la troupe d'Héraclius, et incorporée à une scène répartie sur trois lancettes. Parmi ces hommes, le dernier est un cavalier tenant les rènes, l'un tient une trompette (le héraut?), et le premier, hors lancetten est un archer tenant sa flèche.
Claude Dorigny porte une coiffe à bonnet rouge bordeaux, de la même couleur que sa robe à traine et à larges manches.
Devant elle, sur le drap du prie-dieu, le blason mi-parti Pericart/Dorigny.
.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
8 et 9. L'empereur Héraclius Ier fait son entrée à Jérusalem, tenant la croix. À la porte de la ville, fermée, un ange l'accueille avec une banderole .
.
Héraclius Ier, portant la couronne d'empereur romain d'orient est en armure recouverte d'une tunique d'or aux aigles bicéphales noirs. Il monte un cheval blanc harnaché de rouge et au front orné de plumets. De même l'écuyer est vêtu de rouge et porte une toque à plumets.
L'ange déroule un phylactère portant l'inscription REX CELORUM HUMILITATIS EXANPLAR RELIQUIT, "Le roi des cieux nous a donné l'exemple de l'humilité" .
Je ne trouve pas cet épisode dans la Légende dorée, mais dans le Panthéon de Godefroi de Viterbe (1133?-1191). Voir BnF Latin 4935 f.49.
Voir aussi Jean Mancel, La Fleur des hystoires, enluminé par le Maître de Hérion entre 1450-1474, Bibl. Mazarine Ms 1560 f. 343v
"Au XIIe siècle, la tradition narrative ayant trait à Héraclius était bien développée et l’on en retrouve certains éléments dans la chronique de Godefroi de Viterbe. C’est ainsi que Godefroi raconte un épisode qui est peu présent dans les autres chroniques relatant le mythe de la « race des circoncis ». Voici l’épisode. Héraclius rapporte la sainte relique à Jérusalem. Il descend du Mont des Oliviers et arrive devant la porte par où était entré Jésus Christ, la veille de la Passion. Or, voici que les pierres de la porte se rejoignent de façon à former un mur. Au dessus de la porte, l’on voit apparaître l’ange tenant en main le signe de croix. L’ange rappelle à l’empereur l’entrée de Jésus à Jérusalem : ce n’est pas avec un luxe princier, mais en pauvre, monté sur un petit âne, que le fils de Dieu est entré par cette porte, laissant un bel exemple d’humilité.
Héraclius, tout en larmes, descend alors de son cheval, se déchausse, se dépouille de ses vêtements jusqu’à sa chemise et, prenant la croix du Seigneur, il en frappe humblement la porte qui, se soulevant, lui permet de passer avec toute sa suite. Ce sujet est connu dans la littérature médiévale sous le nom de porta clausa. Il est traité dans de nombreux textes liturgiques et hagiographiques. Godefroi de Viterbe et les autres auteurs médiévaux avaient probablement emprunté ce passage (de même que la description du combat singulier sur le Danube ou le récit sur le roi perse Chosroès, qui voulait s’assimiler à Dieu) à la source la plus ancienne. Il s’agit du texte liturgique intitulé Reversio Sanctae Crucis, que l’on a attribué très longtemps à l’écrivain du ixe siècle Raban Maur et qui circulait dans la société médiévale entre les VIIIe et XIIIe siècles.". Le savant suédois S. Borgenhammar a pu montrer dans sa recherche que ce texte avait été créé entre la fin du VIIe et le milieu du VIIIe siècle par un auteur italien anonyme qui s’appuyait sur les sources byzantines et orientales ; voir Borgehammar, « Heraclius Learns Humility », p. 145-202.
S. Luchitskaya ajoute :
"On remarque que dans le Pantheon et les autres textes médiévaux, Chosroès est représenté comme l’Antéchrist, tandis que l’empereur byzantin est assimilé au Christ : ainsi, comme le Christ a triomphé de la mort avec l’aide de la croix, Héraclius a remporté la victoire sur ses ennemis. Dans les écrits des chroniqueurs, Chosroès-Antéchrist manifeste de l’orgueil (superbia) en s’assimilant à Dieu, tandis qu’Héraclius qui transporte la vraie croix à travers la Porte Dorée fait preuve d’humilité (humilitas) en imitant Jésus-Christ. On voit que l’image d’Héraclius construite par Frédégaire et ses compilateurs est très ambiguë : d’une part, l’empereur byzantin est considéré comme un véritable pécheur, ses défaites représentant le châtiment divin de ses crimes ; d’autre part, il est représenté comme le souverain chrétien idéal qui a récupéré la sainte relique pour le monde chrétien."
.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
10, 11 et 12. L'empereur Héraclius vêtu en pénitent obtient l'ouverture des portes de Jérusalem .
.
Héraclius et sa suite se présentent en chemise, pieds nus, mais l'empereur a conservé sa couronne afin que nous l'identifions.
Le gouverneur les accueille, chaperon en main et la main sur le cœur.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
13, 14 et 15. Sainte Hélène, mère de Constantin, assiste à la découverte de la Vraie Croix par un vieillard barbu (Judas). Elle est accompagnée d'une servante et de six hommes discutant vivement.
.
"Alors la reine les congédia tous a l’exception de Judas, à qui elle dit : « Choisis entre la vie et la mort ! Si tu veux vivre, indique-moi le lieu qu’on appelle Golgotha, et dis-moi où je pourrai découvrir la croix du Christ ! » Judas lui répondit : « Comment le saurais-je, puisque deux cents ans se sont écoulés depuis lors, et qu’à ce moment je n’étais pas né ? » Et la reine : « Je te ferai mourir de faim, si tu ne veux pas me dire la vérité ! » Sur quoi elle fit jeter Judas dans un puits à sec, et défendit qu’on lui donnât aucune nourriture.
Le septième jour, Judas, épuisé par la faim, demanda à sortir du puits, promettant de révéler où était la croix. Et comme il arrivait à l’endroit ou elle était cachée, il sentit dans l’air un merveilleux parfum d’aromates ; de telle sorte que, stupéfait, il s’écria : « En vérité, Jésus, tu es le sauveur du monde ! »
Or, il y avait en ce lieu un temple de Vénus qu’avait fait construire l’empereur Adrien, de façon que quiconque y viendrait adorer le Christ parût en même temps adorer Vénus. Et, pour ce motif, les chrétiens avaient cessé de fréquenter ce lieu. Mais Hélène fit raser le temple ; après quoi Judas commença lui-même à fouiller le sol et découvrit, à vingt pas sous terre, trois croix qu’il fit aussitôt porter à la reine." Jacques de Voragine, Légende dorée.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
16, 17 et 18. Judas élève la croix et la cadavre d'un jeune homme ressuscite, devant trois Juifs stupéfaits. Deux autres Juifs maugréent.
Un personnage richement vêtu, suivi de deux autres, et au-dessus de la tête duquel on lit le nom de Judas, tient la croix du Sauveur. C'est lui, en effet, qui avait indiqué le lieu où la croix était enfouie. Il maintient la croix horizontalement au dessus du cadavre d'un jeune homme, qui, ressuscité à son attouchement, est assis sur le bord de la fosse, les mains jointes, couvert de son linceul. Un personnage accourt pour voir le miracle, et trois autres sont dans une attitude qui marque une grande surprise.
"Restait seulement à reconnaître celle de ces croix où avait été attaché le Christ. On les posa toutes trois sur une grande place, et Judas, voyant passer le cadavre d’un jeune homme qu’on allait enterrer, arrêta le cortège, et mit sur le cadavre l’une des croix, puis une autre. Le cadavre restait toujours immobile. Alors Judas mit sur lui la troisième croix ; et aussitôt le mort revint à la vie. D’autres historiens racontent que c’est Macaire, évêque de Jérusalem, qui reconnut la vraie croix, en ravivant par elle une femme déjà presque morte. Et saint Ambroise affirme que Macaire reconnut la croix à l’inscription placée jadis par Pilate au-dessus d’elle.
Judas se fit ensuite baptiser, prit le nom de Cyriaque, et, à la mort de Macaire, fut ordonné évêque de Jérusalem." Jacques de Voragine, Légende dorée.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
19 . L'échelle mystique du songe de Jacob.
.
Inscription IACOB.
Le Christ en tête de lancette.
Les trois panneaux 19, 20 et 21 établissent, selon la démarche typologique de la Biblia pauperum, des relations entre la Croix et destextes de l'Ancien Testament.
Ici, l'échelle que vit Jacob lors de son songe, reliant la Terre et les Cieux et où des anges montaient et descendaient, est mise en parallèle avec la Croix, signe de nouvelle alliance entre Dieu et les hommes.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
20 . La Croix unissant la terre et le ciel.
.
Pour souligner la valeur de la comparaison entre la Croix et l'échelle de Jacob, des anges montent de la terre vers des nuées devant la Croix, tenant dans leurs bras des âmes sauvées.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
21. Moïse et le serpent d'airain.
.
Une femme, étendue à terre, a succombé à la blessure d'un serpent venimeux. Moïse, tenant sa verge, montre aux israélites mécontent la statue d'un serpent (dragon ailé) élevé au sommet d'une colonne.
Inscription MOISES.
Rappel :
Lors de l'Exode du peuple d'Israël hors d'Égypte vers le Pays de Canaan, Moïse, après avoir reçu les Tables de la Loi, fait face au mécontentement du peuple.
"Le peuple s'impatienta en route, et parla contre Dieu et contre Moïse: Pourquoi nous avez-vous fait monter hors d'Égypte, pour que nous mourions dans le désert? car il n'y a point de pain, et il n'y a point d'eau, et notre âme est dégoûtée de cette misérable nourriture. Alors l'Éternel envoya contre le peuple des serpents brûlants; ils mordirent le peuple, et il mourut beaucoup de gens en Israël.Le peuple vint à Moïse, et dit: Nous avons péché, car nous avons parlé contre l'Éternel et contre toi. Prie l'Éternel, afin qu'il éloigne de nous ces serpents. Moïse pria pour le peuple.
L'Éternel dit à Moïse : Fais-toi un serpent brûlant, et place-le sur une perche ; quiconque aura été mordu, et le regardera, conservera la vie.
Moïse fit un serpent d'airain, et le plaça sur une perche ; et quiconque avait été mordu par un serpent, et regardait le serpent d'airain, conservait la vie. » Nombres 21:8-9
Dans la même démarche typologique que précédemment, l'exaltation du serpent d'airain sauvant les Israélites des morsures de serpent est mis en parallèle avec l'élévation du Christ sur la Croix guérissant par sa mort et sa réssurection le genre humain des morsures du péché.
Dans la Biblia Pauperum, l'image de cette scène est placée à côté de celle de la Crucifixion.
.
Coll. Le Louvres
.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
22, 23 et 24. Héraclius reprend la Croix à Chosroes roi des Perses .
.
Sur le panneau n°22, Héraclius en guerrier, vêtu de son armure et de son surcot d'or brodé d'une aigle noire à deux têtes, menace de son épée Chosroës, qui, en grand costume, lui fait face assis sur son trône.
Chosroes II, roi des Perses,trône sous un pavillon de soie de diverses couleurs, couronne d'or en tête, sceptre en main, vêtu de pourpre.
Sur le panneau n°24, le peuple, représenté par des hommes et des femmes, se prosterne devant lui et semble l'adorer. Derrière ce groupe, une colonne surmontée d'un coq d'or. Vainqueur, il menace de substituer la religion des Mages à celle de l'Évangile.
En 615, Chosroës, roi des Perses, soumit à son empire tous les royaumes du monde. Il vint à Jérusalem, se rendit au Saint-Sépulcre et emporta la portion de la vraie croix que sainte Hélène y avait laissée. Chosroës, voulant se faire adorer par tout le monde, ordonna d'élever une tour d'or et d'argent, garnie de pierres précieuses; alors il abandonna le royaume à son fils, se retira dans ce phare lumineux et ordonna à son peuple de l'appeler Dieu. Chosroës, assis sur un trône, comme Dieu le Père, mit la croix à sa droite, à la place du fils de Dieu, et un coq d'or à sa gauche, pour représenter le Saint-Esprit.
Inscriptions : ERACLIVS. COSDROS. LE PEVPLE.
.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE n°235 : LE TYMPAN .
.
Tympan de la baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
Registre inférieur : trois prophètes portant des banderoles avec les inscriptions: Benedictu lignum "Bois béni" (Livre de la Sagesse, 14, 7). — Exaltavi lignum. "J'ai élevé l'arbre" Ezéchiel 17:24 et Super montem caliginosum "sur la montagne couverte de nuages [élevez un signal]" (Isaïe 13:2).
.
La démarche typologique se poursuit ici avec la présentation de versets relatifs à l'élévation d'un bois, d'un arbre, ou d'un signal.
.
Tympan de la baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
Deux anges portant les instruments de la Passion : la Croix et le marteau, la tenaille et la lance.
Sur les phylactères, les inscriptions : O CRUX AVE / NOSTRA SPES "Salut, ô croix, notre espérance".
.
Tympan de la baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
Deux anges portant les instruments de la Passion : la colonne et les verges de la Flagellation ; les clous, et le roseau portant l'éponge .
.
Sur les phylactères, les inscriptions : O CRUX BENEDICTA / BENEDICTA SANCTA .
Tympan de la baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
Au sommet du tympan, une croix dressée sur un ciel étoilé, au dessus de phylactères. De chaque côté, des clercs et des laïcs agenouillés.
.
Les phylactères portent les inscriptions SALVE CRUCE SANCTA/ O CRUX BENEDICTA.
Le soufflet de gauche montre un pape, un cardinal et un jeune laïc ou clerc.
Celui de droite montre un empereur, puis peut-être un noble ou un magistrat et un bourgeois.
.
Tympan de la baie 235 de l'Exaltation de la Croix de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
SOURCES ET LIENS.
.
.
— COFFINET (Abbé Jean-Baptiste), 1858, Les peintres-verriers de Troyes pendant trois siècles depuis 1375 jusqu'à 1690 "Peintres-verriers. Nomenclature des peintres-verriers de Troyes depuis 1375 jusqu'à 1690". Annales archéologiques, 1858, t. 18, p. 212-224.
— JUBAINVILLE (Henri d'Arbois de), 1862, "Documents relatifs aux travaux de construction faits à la cathédrale de Troyes pendant les XIIIe, XIVe et XVe siècles" [second article].Bibliothèque de l'École des chartes Année 1862 23 pp. 393-423
— LAFOND (Jean) 1955, "Les vitraux de la cathédrale Saint-Pierre de Troyes". In Société française d'archéologie, éd. Congrès archéologique de France : 113e session, Troyes, 1955. Orléans ; Nogent-le-Rotrou, 1957, p. 29-62.
— LIEZ (Jean-Luc), 2022, "Regard(s) sur l’héraldique à Troyes au XVIe siècle". ffhal-03940420f
https://hal.science/hal-03940420/document
—MARSAT (André), Charles J. Ledit, Angelico Surchamp · 1972 Cathédrale de Troyes, les vitraux
— MINOIS (Danielle), 2005 "Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560)" .Sorbonne Université presses Corpus vitrearum France Etudes VI, 1 vol. (475 p.-XXIV p. de pl.) : ill. en noir et en coul., jaquette ill. en coul. ; 33 cm
— MINOIS (Danielle), 2003, thèse d'histoire de l'art Paris IV sous la direction de Fabienne Joubert et Michel Hérald, La peinture sur verre à Troyes à la fin du Moyen Age
—PASTAN (Élisabeth C. BALCON (Sylvie), 2006, "Les vitraux du chœur de la cathédrale de Troyes (xiiie siècle)", Paris, Cths, coll. « Corpus vitrearum - France II », 2006, 539 p.
— RIVIALE (Laurence), "Danielle Minois, Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560). Paris, P.U.P.S., 2005, 475 p. (Corpus vitrearum France, études VI)." In: Bulletin Monumental, tome 166, n°1, année 2008. La galerie à Paris (XIVe-XVIIe siècle) pp. 85-86.
Les vitraux de la nef de la cathédrale de Troyes : les baies 134 et 234 de l'Histoire de Joseph fils de Jacob,réalisées en 1500, don en 1499 d'Agnès Bonjean, veuve de Jehan Thévenin (écuyer et notaire royal à Troyes). Armoiries et monogrammes.
.
Voir sur les verrières hautes de la nef de la cathédrale de Troyes :
Avec 1 500 m² de verrières, allant du XIIIe au XIXe siècle, la cathédrale de Troyes est l’un des plus vitrées de France. Elle possède un triforium totalement vitré, (situé à mi-hauteur et qui fait le tour du bâtiment), ce qui est assez exceptionnel. Les vitraux de la cathédrale de Troyes sont considérés comme une œuvre majeure de la peinture sur verre en France.
Les 20 verrières hautes de la nef forment un ensemble homogène. Elles ont été réalisées entre 1498 et 1505 par plusieurs peintres-verriers dont le nom de certains sont connus (Pierre Maçon, Jean Verrat, Balthasar Godon, Lievin Varin et le cartonnier Nicolas Cordonnier). Parmi les 66 « verriers » recensés dans les archives entre 1470 et 1560, 37 peuvent être considérés comme des peintres verriers. Regroupés autour de la collégiale Saint- Urbain, ils travaillaient au sein de structures familiales et fondaient des dynasties, comme les Verrat ou les Macadré. Leur atelier était une petite structure dirigée par un peintre verrier qui n’employait qu’un ou deux serviteurs, selon ses moyens, comme on le voit à Paris et en Provence (D. Minois).
Selon le rédacteur de la notice de l'Inventaire, rédigée en 1999, "Leur iconographie répond à la seule volonté des multiples donateurs. Leur véritable lien provient plus de la technique que du style : les peintres-verriers ont mis l'accent sur la lisibilité des compositions (larges registres de scènes, mise en valeur des faits et gestes des personnages par la réduction du rôle de l'architecture et des arrières-plans, modelé très appuyé, absence de chef-d'oeuvre et de gravure sauf dans la baie 233). Certains aspects rappellent les vitraux du milieu du 13e siècle des parties hautes du choeur : la gamme colorée très vive avec barbes et cheveux en pleine couleur, la mise en plomb des yeux de certains personnages, les fonds de mosaïque. Si la Renaissance italienne ne s'y fait pas encore sentir, Jean Lafond reconnaît une influence venue de l'est dans la verrière de saint Pierre (notamment l'atelier strasbourgeois de Pierre d'Andlau). Pour Emile Mâle, la présence dans ces verrières d'une forte veine d'inspiration populaire évoque l'imagerie d'Epinal."
Au contraire, Danielle Minois (2003 ; 2005) souligne la cohérence de ces ensembles qui illustrent en un discours argumenté et savant l’histoire du salut. "Seul un clergé cultivé a pu élaborer ces programmes ; il l’a donc imposé aux donateurs qui l’ont financé. Parce que « le choix des sujets des verrières posées dans les églises est un reflet de la vie intellectuelle et religieuse », elle signale en outre les réactions des commanditaires face à la Réforme à travers les thèmes choisis, surtout après 1550 : l’histoire de Daniel ou de Tobie, la légende de l’hostie profanée. Elle montre comment les mêmes thèmes peuvent changer de sens face à un climat de remise en cause de l’Église romaine." (L. Rivale)
Ces 20 verrières hautes de la nef se répartissent entre les baies du triforium (galerie à trois arcades entre chaque travée), qui portent les numéros 127 à 136, et, au dessus de celles-ci, les baies hautes homologues portant les numéros 227 à 236. Selon la numérotation internationale des vitraux, les baies nord portent un numéro impair et les baies sud un numéro pair.
.
Nous avons donc ainsi :
a) du côté nord, depuis le transept vers le fond de la nef :
-baies 127 et 227 : Saints ; vie de saint Pierre. réalisée en 1502, don d'Henri II de Lorraine Vaudémont, évêque de Metz ;
-baies 129 et 229 : Histoire de Tobie. 1500 ; don de Jean Fuestot l'Aîné (marchand et bourgeois de Troyes dans l'Aube) et de Denise Chappelain sa femme. Monogramme [du peintre verrier en tête de lancette de la baie 129].
-131 et 231 : Adoration des mages, et Histoire de Job. Don de Jeanne de Mesgrigny veuve de Jean Molé. 1501. Inscription et armoiries. Monogramme d'un verrier au tympan.
-133 et 233 : légende de saint Sébastien ; réalisée en 1501 par Lievin Varin, don de la confrérie de saint Sébastien .
- 135 et 235 : Légende de la Vraie Croix ; réalisées entre 1501 et 1502 par Jean Verrat, don de Claude Dorigny, veuve de Jean Péricard. Armoiriesidentifiées. Monogrammes. Très restaurées au XIXe.
b) du côté sud :
-baies 128 et 228 : Calvaire ; saints et saintes. 1499 ; peintre-verrier Balthazar Godon ; armoiries (identifiées) : Jean Huyard chanoine de la cathédrale, et Guillaume Huyard avocat du roi à Troyes
-baies 130 et 230 : Arbre de Jessé. Verrières réalisées par Lievin Varin entre 1498 et 1499, don de Jean de Marisy et Guillemette Phélipe sa femme. En baie 230, toute la famille de Jean de Marisy et de Guillemette Phélipe (ses frères, ses 9 filles et belles-filles) est représentée au bas de cette verrière. Armoiries.
-baies 132 et 232 : Annonciation et Nativité. Parabole du Fils Prodigue. Don de Guillaume Molé et Simone Boucherat , 1499. Réalisée en 1499 peut-être par Pierre I maçon (inscription ne notant que son prénom). Armoiries identifiées, devise "en attendant", monogrammes [du verrier]
-baies 134 et 234 : Vie de Joseph fils de Jacob ; réalisée en 1499, don d'Agnès Bonjean, veuve de Jehan Thévenin (écuyer et notaire royal à Troyes) son mari . Armoiries identifiées et monogrammes en baie 134. Inscription mentionnant le commanditaire et la date en baie 234.
-baies 136 et 236 : Histoire de Suzanne et du prophète Daniel ; réalisées en 1499 , don de Jean Coiffart, marchand de Troyes et de Marguerite, sa femme (inscription) ; les vitraux du 15e siècle du triforium (baie 136) ont disparu et sont remplacés par des vitraux du 20e siècle sur le thème de l'histoire de Daniel.
.
Le monogramme du donateur Jean Thévenin ?
Dans le tympan de la baie 134, quatre monogrammes à type de lettres entrelacées peuvent se lire JT, ou JC voire JCT. Ces initiales sont proches de celles des baies 136 et 236 , mais où je lis plutôt JC. Dans les deux cas, ces initiales ne correspondent à aucun des peintres-verriers de Troyes dont les noms ont été relevés par J.B Coffinet, mais bien à celles des donateurs : Jean Thévenin pour les baies 134 et 234, Jean Coiffart dans les baies 136 et 236. Par contre, la ressemblance entre ces monogrammes, amènent à postuler un peintre-verrier commun, mais anonyme.
.
.
Les monogrammes que je suis amené à attribuer, après Coffinet, aux peintres-verriers, en baies 129 et 131 par exemple, sont bien différents, sans lettres réunies, mais asociant , comme les marques professionnelles (tailleurs de pierre), des chevrons VV et une sorte de clef.
.
.
Inscription de donation, datation (1499) et donatrice (Agnès, veuve Thévenin).
.
Comme sur les autres baies voisines, une inscription en lettres gothiques court en bas des six lancettes:
AGNES VESVE DE FEV JEHÃ[N] THEVENI[N] EN SO[N] VIVA[N]T ESCVIER ET NOTAIRE ROYAL A TROYES A DONNEE CESTE VERRIERE L'AN MI JJJJcc JJJJxx ET XI. PRIE DIEV POVR ELLE.
La donatrice sera présentée lors de la description du panneau qui la représente, ainsi que ses armoiries.
Datation du vitrail : Selon Danielle Minois, une verrière est réalisée l'an qui suit sa donation, soit donc ici 1500.
Cette verrière n'est pas mentionnée dans les comptes de la cathédrale.
.
Description.
.
Les baies 134 (triforium) et 234 occupent la deuxième travée de la nef côté sud.
La baie 234, avec six lancettes réunies deux à deux sous deux mouchettes, et un tympan à treize ajours et écoinçons, mesure 10 m de haut et 6 m de large.
La baie 134, en dessous, au triforium, avec ses six lancettes réunies deux à deux sous un tympan à deux mouchettes et un soufflet, mesure 3, 50 m de haut et 6 m. de large.
.
Le sujet et ses rapport avec le théâtre religieux, et les enluminures.
.
L'histoire de Joseph est un véritable roman familial qui termine le Livre de la Genèse du chapitre 37 au chapitre 50, et qui suit la geste de Jacob (Gn. 25-36).
Rappel :
Jacob a eu de Léa six fils, Ruben, Siméon, Lévi, Issachar et Zabulon.
Puis Jacob a eu de Rachel, sa femme préférée, deux fils, Joseph et Benjamin, puis Rachel est morte.
Il eut aussi de servantes ou concubines Dan et Nephtali, par Bilha, et Gad et Asser par Zilpa.
Ces douze fils seront les ancêtres des "douze tribus d'Israël" (autre nom de Jacob).
Fils préféré de Jacob, Joseph devient la cible de l’hostilité de ses onze demi-frères , d'autant qu'il leur raconte ses rêves où ces derniers se prosternent devant lui . Jaloux, ils l'abandonnent au fond d'un puits et présentent à Jacob sa tunique ensanglanté comme preuve de son décès accidentel. Sauvé mais vendu comme esclave en Egypte, il devient l' intendant de Putiphar, officier du roi, mais il résiste aux avances de sa femme et est emprisonné. Mais grâce à son talent d'interprétation de rêves du Pharaon, il devient premier ministre, sauve l’Égypte et finit par retrouver les siens.
Les Pères de l'Église ont vu en Joseph une préfiguration du Christ (innocent sacrifié, trahi, mais sauvant les siens), ou un exemple de vertu malgré les épreuves.
.
Le Mistère du Vieil Testament par personnages , de 49 000 vers, qui fut joué à Paris en 1500 , et dont nous avons vu qu'il pouvait avoir inspiré plusieurs verrières de Troyes (La Patience de Job, l'Histoire de Daniel et de la chaste Suzanne, l'histoire de Tobie) consacre 8000 vers à l'Histoire de Joseph, sous le titre de "Mistère de Joseph", "Moralité de Joseph" ou de "La Vendition de Joseph". Les manuscrits de ce Mistère du Vieil Testament sont perdus. Nous ignorons si le drame de Joseph a été joué à Troyes, ou si les commanditaires y avaient eu accès, mais il est manifeste que les bourgeois de Troyes ont commandités pour les verrières de la cathédrale des sujets qui sont à la même époque très en vogue sous forme de représentation théâtrale. Plus tard, une Moralité de la Vendition de Joseph a été imprimée en 1538 et jouée à Paris à la même époque, puis on retrouve ce mistère à Nancy en 1557 et 1558, à Draguignan en 1559, à Remiremont en 1603, et il fut reprit par Noël Georges en Bretagne au début du XVIIe siècle.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5051p
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k50539
.
Les enluminures traitent abondamment de ce sujet. Voir Base Mandragore.
.
On remarquera que les 21 scènes de la baie 234 ne traitent que de la première partie de l'Histoire de Joseph, avant l'accession de celui-ci auprès du Pharaon, alors que les célèbres interprétations des songes du Pharaon occupent le triforium, alors que la reconnaissance de Joseph par ses frères et le retour en la maison de Jacob ne sont pas traités. La verrière de l'église Saint-Aspais de Melun, au XVIe siècle, traite en cinq scènes de l'ensemble de l'histoire. À Saint-Merry de Paris, trois verrières du chœur et une verrière du transept datant du milieu du XVIe siècle sont consacrées à ce récit. Déjà en la cathédrale de Chartres en 1205 la baie 41 lui est dédié, tandis qu'en la cathédrale de Rouen en 1220-1230 une baie offerte par les tondeurs de drap le raconte en sept médaillons.
.
Les baies 134 et 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE 234.
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA DONATRICE AGNÈS BONJEAN PRÉSENTÉE PAR SAINTE AGNÈS.
.
Sous l'inscription SA[N]CTA AGNES, la sainte est identifiable par sa palme du martyre et surtout par l'agneau blanc renvoyant à la proximité sonore du mot latin agnus avec son prénom issu du grec agnê. Elle est nimbée de violet, ses cheveux blonds descendent devant sa poitrine, et sa robe rouge est ourlé de losanges blancs sur fond noir.
La donatrice est agenouillée mains jointes devant son prie-dieu drapé à ses armes. Un livre de prières y est ouvert, le fermoir en or servant de marque-pages. Elle porte une coiffe à bonnet noir, et une robe violette (couleur adoptée par la plupart des donateurs des verrières de Troyes). Cette robe est fourrée aux manches, et serrée à la taille par une ceinture orange, où est pendu un rosaire à gros grains. Autour de sa tête est déployé un phylactère portant ces mots MISERERE MEI DEUS
Le blason est un losange, donc féminin, mi parti en 1 de gueules à une étoile d'or à six branches, au chef d'argent chargé d'un lambel d'azur, qui est Thévenin, et en 2 d'or à la perdrix d'azur qui est Bonjean.
.
.
Jean Thévenin, seigneur d'Assencière et notaire royal est en exercice en 1449 et en 1486, et décédé en 1494.
Devenue veuve, Agnès Bonjean offrit outre les baies 134 et 234 de la cathédrale, la verrière de l'Arbre de Jessé , et un autre vitrail de sujet inconnu, en l'église de la Madeleine de Troyes
Une messe fut fondée chaque 12 novembre en l'église Sainte-Madeleine de Troyes, pour "Me Jean Thévenin et Agnès Bonjean sa femme, inhumés devant l'autel Saint-Antoine" (comptes de la fabrique de l'église de la Madeleine.
.
Agnès Bonjean, donatrice de la baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Agnès Bonjean, donatrice de la baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
L'HISTOIRE DE JOSEPH EN 21 TABLEAUX, AU TYMPAN PUIS SUR TROIS REGISTRES DANS LES LANCETTES.
.
LE TYMPAN DE LA BAIE 234.
.
Les ajours du tympan sont remplis de rubans entrecroisés rouges et verts délimitant des carreaux bleus ou rouges à fleurons jaunes, ou bien, dans les écoinçons, de rinceaux feuillagés sur fond rouge. Néanmoins, quatre soufflets reçoivent des scènes figurées qui débutent l'Histoire de Joseph par la représentation de ses songes. En outre, ils sont dominées par le blason de Jean Thévenin, à gauche, et d'Agnès Bonjean, à droite.
.
Tympan de la baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Tympan de la baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
1 et 2 : Joseph et ses frères gardent leur troupeau.
"Jacob habita la terre où son père était venu en immigré : la terre de Canaan. Voici l’histoire de la descendance de Jacob. Joseph, âgé de dix-sept ans, faisait paître le petit bétail avec ses frères. Le jeune homme accompagnait les fils de Bilha et les fils de Zilpa, femmes de son père. Il fit part à leur père de la mauvaise réputation de ses frères. Israël, c’est-à-dire Jacob, aimait Joseph plus que tous ses autres enfants, parce qu’il était le fils de sa vieillesse, et il lui fit faire une tunique de grand prix. En voyant qu’il leur préférait Joseph, ses autres fils se mirent à détester celui-ci, et ils ne pouvaient plus lui parler sans hostilité. " Genèse chap. 37.
Sous le blason de Jean Thévenin les panneaux montrent sept bergers gardant les troupeaux, aidés d'un chien à collier rouge. La plupart tiennent le bâton à extrémité creusée des bergers, un seul, assis, souffle dans un hautbois.
.
Tympan de la baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
3 et 4 : le songe des gerbes de blé et le songe des étoiles.
Joseph eut un songe et le raconta à ses frères qui l’en détestèrent d’autant plus.« Écoutez donc, leur dit-il, le songe que j’ai eu. Nous étions en train de lier des gerbes au milieu des champs, et voici que ma gerbe se dressa et resta debout. Alors vos gerbes l’ont entourée et se sont prosternées devant ma gerbe. » Ses frères lui répliquèrent : « Voudrais-tu donc régner sur nous ? nous dominer ? » Ils le détestèrent encore plus, à cause de ses songes et de ses paroles.
Il eut encore un autre songe et le raconta à ses frères. Il leur dit : « Écoutez, j’ai encore eu un songe : voici que le soleil, la lune et onze étoiles se prosternaient devant moi. » Il le raconta également à son père qui le réprimanda et lui dit : « Qu’est-ce que c’est que ce songe que tu as eu ? Nous faudra-t-il venir, moi, ta mère et tes frères, nous prosterner jusqu’à terre devant toi ? » Ses frères furent jaloux de lui, mais son père retint la chose." Genèse chap. 37
.
Sous le blason mi-parti d'Agnès Bonjean, Joseph est représenté endormi dans la maison de son père, faisant le songe des onze gerbes s'inclinant devant la douzième. Du côté droit, le soleil, la lune et onze étoiles adorent Joseph.
.
Tympan de la baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
.
LES LANCETTES DE LA BAIE 234.
.
.
Lecture de haut en cas à partir de l'angle supérieur gauche. Le fil narratif suit le récit de Joseph dans la Genèse chapitre 30 à 50.
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
5 et 6. Jacob envoie Joseph chercher ses frères qui projettent de le tuer.
.
"Les frères de Joseph étaient allés à Sichem faire paître le troupeau de leur père. Israël dit à Joseph : « Tes frères ne gardent-ils pas le troupeau à Sichem ? Va donc les trouver de ma part ! » Il répondit : « Me voici. » Jacob reprit : « Va voir comment se portent tes frères et comment va le troupeau, et rapporte-moi des nouvelles. » C’est de la vallée d’Hébron qu’il l’envoya, et Joseph parvint à Sichem. Un homme le rencontra alors qu’il était perdu en pleine campagne, et lui demanda : « Que cherches-tu ? » Il répondit : « Je cherche mes frères. Indique-moi donc où ils font paître le troupeau. » L’homme dit : « Ils sont partis d’ici, et je les ai entendu dire : “Allons à Dotane !” »
Joseph continua donc à chercher ses frères et les trouva à Dotane. Ceux-ci l’aperçurent de loin et, avant qu’il arrive près d’eux, ils complotèrent de le faire mourir. »
.
Inscription : IOSEPH.
.
Jacob est figuré comme un bourgeois de Troyes, coiffé d'un chaperon et vêtu d'un manteau rouge fourré devant sa demeure. Il pose sa main sur son aumônière, signe de sa richesse.
Joseph porte la belle tunique bleue offerte par son père en signe d'élection. Il tient un bâton et s'éloigne de la maison.
Quatre des frères montrent leur excitation par leurs gestes. L'un porte la houlette de berger, l'autre s'apprête à dégainer son glaive.
Le texte du Mistère de Joseph désigne cette scène sous le beau titre de "Du murmure des frères de Joseph à l'encontre de luy".
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
7 et 8. Sur le conseil de Ruben, qui modère ses frères, Joseph est précipité dans la citerne.
.
" Ils se dirent l’un à l’autre : « Voici notre songeur qui arrive ! C’est le moment, allons-y, tuons-le, et jetons-le dans une de ces citernes. Nous dirons qu’une bête féroce l’a dévoré, et on verra ce que voulaient dire ses songes ! » Mais Ruben les entendit, et voulut le sauver de leurs mains. Il leur dit : « Ne touchons pas à sa vie. » Et il ajouta : « Ne répandez pas son sang : jetez-le dans cette citerne du désert, mais ne portez pas la main sur lui. » Il voulait le sauver de leurs mains et le ramener à son père. Dès que Joseph eut rejoint ses frères, ils le dépouillèrent de sa tunique, la tunique de grand prix qu’il portait, ils se saisirent de lui et le jetèrent dans la citerne, qui était vide et sans eau. Ils s’assirent ensuite pour manger. "
.
Inscription : RUBEN / IOSEPH.
.
À gauche, Ruben, en rouge, intercède en faveur de Joseph et désigne le puits.
À droite, Joseph, qui a été dépouillé de sa tunique bleue, est jeté dans le puits, tandis que ses frères mangent des pains, conformément au texte de la Genèse.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
9 et 10. Joseph est vendu à des marchands par ses frères. Juda reçoit vingt pièces d'argent.
.
"En levant les yeux, ils virent une caravane d’Ismaélites qui venait de Galaad. Leurs chameaux étaient chargés d’aromates, de baume et de myrrhe qu’ils allaient livrer en Égypte. Alors Juda dit à ses frères : « Quel profit aurions-nous à tuer notre frère et à dissimuler sa mort ? Vendons-le plutôt aux Ismaélites et ne portons pas la main sur lui, car il est notre frère, notre propre chair. » Ses frères l’écoutèrent. Des marchands madianites qui passaient par là retirèrent Joseph de la citerne, ils le vendirent pour vingt pièces d’argent aux Ismaélites, et ceux-ci l’emmenèrent en Égypte.
Quand Ruben revint à la citerne, Joseph n’y était plus. Il déchira ses vêtements, revint vers ses frères et dit : « L’enfant n’est plus là ! Et moi, où vais-je donc aller, moi ? »"
.
Inscription : IOSEPH / JVDAS
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
11 et 12. Un bouc est égorgé pour tremper dans son sang la tunique de Joseph et faire croire à Jacob que son fils préféré est mort. Jacob, désespéré, déchire ses vêtements.
.
" Ils prirent alors la tunique de Joseph, égorgèrent un bouc et trempèrent la tunique dans le sang. Puis ils firent porter à leur père la tunique de grand prix, avec ce message : « Nous avons trouvé ceci. Regarde bien : est-ce ou n’est-ce pas la tunique de ton fils ? » Il la reconnut et s’écria : « La tunique de mon fils ! Une bête féroce a dévoré Joseph ! Il a été mis en pièces ! ».
Jacob déchira ses vêtements, mit un sac sur ses reins et porta le deuil de son fils pendant de longs jours. Ses fils et ses filles se mirent tous à le consoler, mais il refusait les consolations, en disant : « C’est en deuil que je descendrai vers mon fils, au séjour des morts. » Et son père le pleura."
.
Inscription : :JACOB.
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
13 et 14. Joseph, mené en Egypte, est acheté par l'intendant du pharaon Putiphar, qui, bientôt, lui confie le gouvernement de sa maison.
.
Texte de la Genèse : "Joseph fut emmené en Égypte. Putiphar, dignitaire de Pharaon et grand intendant, un Égyptien, l’acheta aux Ismaélites qui l’avaient emmené là-bas. Le Seigneur était avec Joseph, et tout lui réussissait ; il vivait dans la maison de son maître, l’Égyptien. Ce dernier vit que le Seigneur était avec Joseph et faisait réussir tout ce qu’il entreprenait. Joseph trouva grâce aux yeux de son maître qui l’attacha à son service : il lui donna autorité sur sa maison et remit entre ses mains tout ce qu’il possédait.
Dès que l’Égyptien eut confié cette charge à Joseph, le Seigneur bénit sa maison, à cause de Joseph, et la bénédiction du Seigneur s’étendit sur tout ce que possédait l’Égyptien, sa maison et ses champs. Il abandonna entre les mains de Joseph tout ce qu’il possédait et ne s’occupa plus de rien, sinon de la nourriture qu’il prenait. Joseph avait belle allure et il était agréable à regarder."
.
Inscription à gauche : PVTIPHAR. Putiphar (en toque et robe violette fourrée des bourgeois de Troyes), achète Joseph au marchand.
Inscription à droite : IOSEPH. Assis sur le lit dans la chambre de Joseph, un tailleur lui confectionne un manteau écarlate. On voit comme la tunique de Joseph sert d'objet clef dans le récit : d'abord bleue , elle devient aux yeux de son père une preuve d'identification. Puis, rouge, elle servira également de preuve de la culpabilité de Joseph. Mais ces deux tuniques-preuves se révèleront trompeuses.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
15 et 16. La femme de Putiphar veut le séduire : il résiste et abandonne sa tunique. La femme de Putiphar l’accuse de l’avoir séduite.
.
"À quelque temps de là, la femme de son maître leva les yeux sur Joseph et dit : « Couche avec moi ! » Mais il refusa et répondit à la femme de son maître : « Voici que mon maître ne s’occupe plus de rien dans la maison. Tout ce qu’il possède, il l’a remis entre mes mains. Dans cette maison, il ne m’est pas supérieur et il ne me refuse rien, sinon toi, car tu es sa femme. Comment donc pourrai-je commettre ce grand mal et pécher contre Dieu ? ». Chaque jour, elle insistait auprès de Joseph. Mais lui n’acceptait pas de partager sa couche et d’être à elle.
Vint le jour où Joseph entra dans la maison pour faire son travail, alors qu’aucun domestique n’était là. La femme l’attrapa par son vêtement, en disant : « Couche avec moi ! » Mais il abandonna le vêtement entre ses mains et s’enfuit au-dehors.
Lorsqu’elle réalisa que, dans sa fuite, il avait abandonné son vêtement entre ses mains, elle appela ses domestiques et leur dit : « Voyez ça ! On nous a amené un Hébreu pour se jouer de nous ! Il est venu vers moi pour coucher avec moi, et j’ai appelé à grands cris. Alors, quand il m’a entendu élever la voix pour appeler, il a abandonné son vêtement à côté de moi et s’est enfui au-dehors. » Elle garda près d’elle le vêtement de Joseph, jusqu’à ce que le maître rentre chez lui. Elle lui tint alors le même langage : « Le serviteur hébreu que tu nous as amené est venu vers moi pour se jouer de moi. Mais j’ai appelé à grands cris, et il a abandonné son vêtement à côté de moi et s’est enfui au-dehors. » Quand le maître entendit sa femme lui dire : « Voilà comment ton serviteur a agi envers moi ! », il s’enflamma de colère. "
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
17 et 18. Joseph est jeté en prison. Le songe du sommelier de Pharaon.
.
"Le maître de Joseph se saisit de lui et le jeta dans la prison où étaient enfermés les prisonniers du roi.
"À quelque temps de là, l’échanson du roi d’Égypte ainsi que le panetier commirent une faute envers leur maître, le roi d’Égypte. Pharaon s’irrita contre ses deux dignitaires, le grand échanson et le grand panetier, et il les fit mettre au poste de garde, dans la maison du grand intendant, au lieu même où Joseph était prisonnier.
Une même nuit, l’échanson et le panetier du roi d’Égypte firent tous deux un songe, alors qu’ils étaient prisonniers dans la prison.
Le grand échanson raconta à Joseph le songe qu’il avait fait : « J’ai rêvé qu’une vigne était devant moi. Elle portait trois sarments. Elle bourgeonnait, fleurissait, puis ses grappes donnaient des raisins mûrs. J’avais entre les mains la coupe de Pharaon. Je saisissais les grappes, je les pressais au-dessus de la coupe de Pharaon et je lui remettais la coupe entre les mains. » Joseph lui dit : « Voici l’interprétation : les trois sarments représentent trois jours. Encore trois jours et Pharaon t’élèvera la tête, il te rétablira dans ta charge, et tu placeras la coupe entre ses mains, comme tu avais coutume de le faire précédemment quand tu étais son échanson. Mais quand tout ira bien pour toi, pour autant que tu te souviennes d’avoir été avec moi, montre ta faveur à mon égard : rappelle-moi au souvenir de Pharaon et fais-moi sortir de cette maison ! En effet, j’ai été enlevé au pays des Hébreux, et là non plus je n’avais rien fait pour qu’on me jette dans la citerne. »
[...]
Toutefois le grand échanson ne se souvint pas de Joseph ; il l’oublia."
Le garde qui menace Joseph d'un bâton porte un gilet mi-parti rouge et vert : cet effet de rayure est porté par exemple par les marginaux, les bourreaux ou les lansquenets, ou les marins.
Le sommelier est endormi, la tête appuyée sur les montants d'un cep, qui immobilise ses pieds. Son rêve est représenté fidèlement, et il presse les grappes au dessus de la coupe du pharaon.
.
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
19 et 20. Le songe du panetier. Joseph interprète leurs rêves.
.
" Voyant que Joseph avait fait une interprétation favorable, le grand panetier lui dit : « Moi, j’ai rêvé que je portais sur la tête trois corbeilles de gâteaux. Et dans la corbeille d’au-dessus, il y avait tous les aliments que le panetier fabrique pour la nourriture de Pharaon, et les oiseaux picoraient dans la corbeille au-dessus de ma tête. » Joseph répondit : « Voici l’interprétation : les trois corbeilles représentent trois jours. Encore trois jours et Pharaon t’élèvera la tête, il te pendra à un arbre, et les oiseaux picoreront ta chair. »"
.
Inscription IOSEPH
Phylactère : SIC SOMPUIAVIMVS, pour sic sompniavimus "ainsi avons-nous vu en songe" , qui se rapporte au verset Gn 41:11 ou bien au sic somnium vidimusGn 40:8 . Sompnia est la forme ancienne de somnia.
Le panetier est condamné au cep comme son collègue, et il est accoudé endormi sur le montant. Trois oiseaux noir, blanc et rouge picorent les pains.
À droite, les deux officiers du pharaon sont au cep, et Joseph a également les jambes entravées par un fer et une chaîne.
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
21. Comme l'avait prédit Joseph, le panetier est pendu et le sommelier est rétabli dans sa charge.
.
"Le troisième jour, jour anniversaire de Pharaon, celui-ci fit un festin pour tous ses serviteurs. Il éleva la tête du grand échanson et celle du grand panetier en présence de ses serviteurs : il rétablit dans sa charge le grand échanson, et celui-ci plaça la coupe entre les mains de Pharaon ; mais le grand panetier, il le pendit, comme l’avait annoncé Joseph."
Note : comme sur la verrière de Job en baie 131-231, la bouche du pharaon est une pièce montée en chef-d'œuvre.
Note : sur tout le registre inférieur, les coins supérieurs sont décorés de deux boules rouges. C'est aussi le cas, mais pour le registre moyen, de la baie 236 de l'Histoire de Danielle . C'est là un deuxième point commun, avec le monogramme FC/FT.
.
La baie 234 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LA BAIE 134 (TRIFORIUM).
.
La baie 134 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
22 et 23. les rêves du pharaon : les vaches grasses et les vaches maigres. Les épis de blé.
.
texte de la Genèse : "Deux ans plus tard, Pharaon eut un songe. Il se tenait debout près du Nil, et voici que montaient du Nil sept vaches, belles et bien grasses, qui broutaient dans les roseaux. Puis, derrière elles, montaient du Nil sept autres vaches, laides et très maigres. Elles se tenaient à côté des premières, sur la rive du Nil. Et les vaches laides et très maigres mangeaient les sept vaches belles et bien grasses. Alors Pharaon s’éveilla. Il se rendormit et fit encore un songe : sept épis montaient sur une seule tige ; ils étaient gros et beaux. Puis, après eux, germaient sept épis maigres et desséchés par le vent d’est. Et les épis maigres avalaient les sept épis gros et pleins.
Alors Pharaon s’éveilla : c’était un songe ! Mais le matin, son esprit était troublé ; il fit convoquer tous les magiciens et tous les sages d’Égypte. Pharaon leur raconta les songes, mais personne ne pouvait les interpréter.
Alors le grand échanson parla à Pharaon en ces termes : « Aujourd’hui, je me rappelle mes fautes. Pharaon s’était irrité contre ses serviteurs et il m’avait mis au poste de garde, dans la maison du grand intendant, et avec moi, le grand panetier. Une même nuit, nous avons fait un songe, moi et lui. Et chacun des songes avait sa propre signification. Il y avait là, avec nous, un jeune Hébreu, serviteur du grand intendant. Nous lui avons raconté nos songes et il a donné à chacun l’interprétation du songe qu’il avait fait. Et ses interprétations s’avérèrent exactes : moi, on m’a rétabli dans ma charge, et l’autre, on l’a pendu. »
.
Inscription PHARAO.
Le pharaon est endormi, tête appuyée sur le bras accoudé dans l'attitude du songeur.
La bouche est montée en chef-d'œuvre.
Le rêve des épis murs et des épis flétris est en haud, celui des vaches est en bas.
.
La baie 134 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
24 et 25. Le sommelier appelle Joseph, fers au pieds, pour qu’il interprète le songe de Pharaon.
.
"Pharaon fit appeler Joseph. En toute hâte, on le tira de son cachot. Il se rasa, changea de vêtements et se rendit chez Pharaon. Pharaon dit à Joseph : « J’ai fait un songe et personne ne peut l’interpréter. Mais j’ai entendu dire de toi, qu’il te suffit d’entendre raconter un songe pour en donner l’interprétation. » Joseph répondit à Pharaon : « Ce n’est pas moi, c’est Dieu qui donnera à Pharaon la réponse qui lui rendra la paix. »
Alors, Pharaon dit à Joseph : « Dans le songe, j’étais debout au bord du Nil, et voici que montaient du Nil sept vaches, bien grasses et de belle allure, qui broutaient dans les roseaux. Puis, derrière elles, montaient sept autres vaches, chétives, très laides et décharnées. Je n’en avais jamais vu d’une telle laideur dans tout le pays d’Égypte. Les vaches décharnées et laides mangeaient les premières vaches, les grasses, qui entraient dans leur panse. Mais on ne s’apercevait pas que les grasses étaient entrées dans leur panse : elles restaient aussi laides qu’avant. Alors je me suis réveillé. Mais j’ai encore vu, en songe, sept épis qui montaient sur une seule tige ; ils étaient pleins et beaux. Puis, après eux, germaient sept épis durcis, maigres et desséchés par le vent d’est. Et les épis maigres avalaient les sept beaux épis. J’en ai parlé aux magiciens, mais personne n’a pu me fournir d’explication. » Joseph répondit à Pharaon : « Pharaon n’a eu qu’un seul et même songe. Ce que Dieu va faire, il l’a indiqué à Pharaon. Les sept belles vaches représentent sept années, et les sept beaux épis, sept années : c’est un seul et même songe ! Les sept vaches décharnées et laides qui montaient derrière les autres représentent sept années ; de même, les sept épis vides et desséchés par le vent d’est. Ce seront sept années de famine. C’est bien ce que j’ai dit à Pharaon : ce que Dieu va faire, il l’a montré à Pharaon. Voici qu’arrivent sept années de grande abondance dans tout le pays d’Égypte. Mais après elles viendront sept années de famine : alors on oubliera toute abondance dans le pays d’Égypte, la famine épuisera le pays. On ne saura plus ce que pouvait être l’abondance dans le pays, tant la famine qui suivra pèsera lourdement. Si le songe de Pharaon s’est répété une seconde fois, c’est que la décision de Dieu est bien arrêtée et qu’il va se hâter de l’exécuter.
Maintenant donc, que Pharaon voie s’il y a un homme intelligent et sage pour l’établir sur le pays d’Égypte.Que Pharaon agisse en instituant des fonctionnaires sur le pays d’Égypte, afin de prélever le cinquième des récoltes pendant les sept années d’abondance. Ils recueilleront toute la nourriture de ces bonnes années qui viennent et, sous l’autorité de Pharaon, ils entasseront dans les villes du froment comme nourriture : ils le garderont en réserve. Ainsi, il y aura une réserve de nourriture pour le pays en vue des sept années de famine qui suivront dans le pays d’Égypte, et la famine ne détruira pas le pays. » Cette proposition plut à Pharaon et à tous ses serviteurs. Pharaon leur dit : « Trouverons-nous un homme comme celui-ci, qui a l’esprit de Dieu en lui ? »"
.
Inscription : IOSEPH
Inscription : SOMPNIORUM INTERPRETATOR EST, "voilà celui qui explique les songes".
.
Le sommelier vient de libérer Joseph de ses chaines (il est nu-pied) et le présente au pharaon.
Fond damassé. Bouche montée en chef-d'œuvre.
.
La baie 134 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
26 et 27. Pharaon nomme Joseph administrateur de son royaume et de ses biens.
.
"Alors, Pharaon dit à Joseph : « Dès lors que Dieu t’a fait connaître tout cela, personne ne peut être aussi intelligent et aussi sage que toi. C’est toi qui auras autorité sur ma maison ; tout mon peuple se soumettra à tes ordres ; par le trône seulement, je serai plus grand que toi. ». Pharaon dit à Joseph : « Vois ! Je t’établis sur tout le pays d’Égypte. » Il ôta l’anneau de son doigt et le passa au doigt de Joseph ; il le revêtit d’habits de lin fin et lui mit autour du cou le collier d’or. Il le fit monter sur son deuxième char et on criait devant lui : « À genoux ! » Et ainsi il l’établit sur tout le pays d’Égypte. Pharaon dit encore à Joseph : « Je suis Pharaon. Mais sans ta permission, personne ne lèvera le petit doigt dans tout le pays d’Égypte. » .Pharaon appela Joseph Safnath-Panéah et lui donna pour femme Asnath, fille de Poti-Phéra, prêtre de One. Alors Joseph partit inspecter le pays d’Égypte."
.
Le pharaon tenant son sceptre remet son anneau à Joseph, qui porte le collier d'or. Il est sous un dais à franches multicolores, sur un char doré tiré par un cheval harnaché d'or. Sur le cheval, un héraut portant une toque à plumet et un pourpoint damassé bleu à manches exubérantes sonne de la trompe.
.
Inscription PHARAO
.
La baie 134 de l'Histoire de Joseph de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
LES TYMPANS DE LA BAIE 134 : MONOGRAMMES ET INSCRIPTIONS.
.
Ces tympans portent les armes partielles (l'étoile d'or sur fond rouge) de Jean Thévenin et son monogramme JT, et sa devise LAUX DEO (louange à Dieu) ainsi que le monogramme du Christ IHS.
La devise a été aussi celle de la famille de Clugny. BnF NAL3209. C'est un extrait de l'office des morts Requiem eternam dona eis domine : et lux perpetua luceat eis laux deo pax vivis re.
.
.
Tympan de la baie 134 de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Tympan de la baie 134 de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Tympan de la baie 134 de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
.
.
SOURCES ET LIENS.
— COFFINET (Abbé Jean-Baptiste), 1858, Les peintres-verriers de Troyes pendant trois siècles depuis 1375 jusqu'à 1690 "Peintres-verriers. Nomenclature des peintres-verriers de Troyes depuis 1375 jusqu'à 1690". Annales archéologiques, 1858, t. 18, p. 212-224.
— JUBAINVILLE (Henri d'Arbois de), 1862, "Documents relatifs aux travaux de construction faits à la cathédrale de Troyes pendant les XIIIe, XIVe et XVe siècles" [second article].Bibliothèque de l'École des chartes Année 1862 23 pp. 393-423
— LAFOND (Jean) 1955, "Les vitraux de la cathédrale Saint-Pierre de Troyes". In Société française d'archéologie, éd. Congrès archéologique de France : 113e session, Troyes, 1955. Orléans ; Nogent-le-Rotrou, 1957, p. 29-62.
—MARSAT (André), Charles J. Ledit, Angelico Surchamp · 1972 Cathédrale de Troyes, les vitraux
— MINOIS (Danielle), 2005 "Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560)" .Sorbonne Université presses Corpus vitrearum France Etudes VI, 1 vol. (475 p.-XXIV p. de pl.) : ill. en noir et en coul., jaquette ill. en coul. ; 33 cm
— MINOIS (Danielle), 2003, thèse d'histoire de l'art Paris IV sous la direction de Fabienne Joubert et Michel Hérald, La peinture sur verre à Troyes à la fin du Moyen Age
—PASTAN (Élisabeth C. BALCON (Sylvie), 2006, "Les vitraux du chœur de la cathédrale de Troyes (xiiie siècle)", Paris, Cths, coll. « Corpus vitrearum - France II », 2006, 539 p.
— RIVIALE (Laurence), "Danielle Minois, Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560). Paris, P.U.P.S., 2005, 475 p. (Corpus vitrearum France, études VI)." In: Bulletin Monumental, tome 166, n°1, année 2008. La galerie à Paris (XIVe-XVIIe siècle) pp. 85-86.
:
1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
"Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)