Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau.
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Voir sur l'art tumulaire hors Bretagne:
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L'emblématique et l'héraldique monumentales de la Sainte-Chapelle de Champigny-sur-Veude. (Monument funéraire d'Henri de Montpensier-Bourbon 1608)
Sur les gisants de Bretagne, voir (approximativement par ordre chronologique) :
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L'enclos paroissial de Dirinon VI: le gisant de sainte Nonne (vers 1450).
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Le gisant d'Olivier de La Palue au château de Kerjean (Saint-Vougay), (vers 1505).
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Le gisant de François de Tournemine (Maison prébendale de St-Pol-de-Léon) et son soubassement à Landivisiau. (XVIe siècle)
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Le gisant de Troïlus de Mondragon au Musée Départemental Breton de Quimper (vers 1545).
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Le gisant (kersanton, XVIe siècle) de Gilles de Texue au château de Brest (Musée de la Marine).
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La tendre main de l'ange et le sommeil éternel : les treize gisants du cloître de la cathédrale de Tréguier. (dont 3 gisants de Roland Doré)
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Seigneur de Sainte-Marie du Mont, et ami de Henri IV "mon cousin" Henri-Robert Aux-Épaules. (1607)
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Le gisant de Jacques Barbier (kersanton, Roland Doré, 1638) au Musée du Léon de Lesneven .
PRÉSENTATION.
Bien que je n'ai pas décrit, tant s'en faut, tous les monuments funéraires nobiliaires de Bretagne aux XVe-XVIIe siècle, la liste des liens donnée supra donne une idée de ceux que nous avons conservés. J'omets les tombes ducales, bien étudiées ailleurs.
Roland Doré a produit dans son atelier de taille du kersanton à Landerneau neuf gisants pour une clientèle de grands nobles comme les Barbier, Bois-Boissel, Bréhant, de la Noé, Bervet, ou du Chastel. On ajoutera à ceux que j'ai décrits les gisants de Thébault de Tahouarn en l'église de Plérin, de Gilles de la Noë au château de Keranroux à Ploujean, et celui d'Auffray du Chastel, que voici.
Après Emmanuelle Le Seac'h en 2014, Jean Guichoux en a donné en 2016 une description et une analyse complète pour Kaier ar Poher. Je me contente donc de donner ici mes images.
Le gisant mesure (Le Seac'h) 1,73 m de long, 63 centimètres de large et 36 centimètres de hauteur. Le lion mesure 58 centimètres de long, 28 centimètres de large et 23 centimètres de haut. Le tombeau mesure 2,34 mètres de long, 1, 04 mètre de large et 93 centimètres de hauteur.
Le chevalier de Fréminville le décrit ainsi dans ses Antiquités du Finistère, tome 2 :
"C'est encore un modèle curieux du costume militaire du commencement du règne de Louis XIII , époque à laquelle il fut sculpté. François du Châtel (sic) , marquis de Mesle et seigneur de Châteaugal , est ici représenté armé de toutes pièces , à l 'exception de la tête , qui est découverte. Son armure est tout à fait analogue à celle de Sébastien Barbier, sieur de Kernaou, que nous avons décrite à la 1ère partie, page 104, sur la statue de ce seigneur, datant à peu près de la même époque. François (sic) du Châtel a , selon l'usage de son temps, les cheveux coupés assez courts sur le front , mais fort longs sur les deux côtés de la tête , où ils forment une multitude de grosses boucles réunies en touffes. II porte des moustaches relevées et une impériale sous la lèvre inférieure. II a une fraise plissée autour du cou , et son épée est suspendue par une bandoulière à son côté gauche. La garde en est recouverte par un grand écusson , où l'on remarque les armes pleines de l'illustre maison des du Châtel en Léonnais , dont était issu le marquis de Mesle."
Selon E. Le Seac'h :
"Le gisant d'Auffray du Chastel est identique aux autres réalisés par le sculpteur [Roland Doré] : allongé, mains jointes, et vêtu de la même armure au col à plis empesés, il porte à son bras gauche l'écusson des Du Chastel, "fascé d'or et de gueules de six pièces", qui cache la garde d'une longue épée dont la lame descend jusqu'aux solerets. Ses pieds reposent sur un lion. Une banderole en breton se déploie sur le dos de la bête et donne la devise des Du Chastel en breton : MAR : CAR : DOE, "S'il plait à Dieu".
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
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Armoiries Du Chastel de Châteaugal. De gueules à trois châteaux d’or, deux et un.
Collier de l'Ordre de Saint-Michel. Couronne de marquis ou de vicomte. Devise : DIEV : POVRVOIRA. Cette devise n'est attestée ou relevée nulle part sous sa forme française, mais celle des de Goësbriand est "Dieu y pourvoira".
Voir le Nobiliaire de Potier de Courcy :
Chateaugal (de) sr dudit lieu et du Granec, paroisse de Landeleau, évêché de Cornouaille. De gueules à trois châteaux d'or.
Jeanne, abbesse de la Joie en 1370, † 1390.
La branche aînée fondue en 1312 dans les Kermellec qui adoptèrent les armes de Châteaugal, en retenant le nom de Kermellec, d’où la seigneurie de Châteaugal a passé par alliance en 1433 aux du Chastel-Mezle.
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Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
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Je propose d'examiner le gisant et le bâti sur lequel il repose face par face, avec les quatre écussons de kersanton désormais apposés sur ce bâti. En tournant dans le sens horaire.
Au pied du gisant, le lion portant sur une banderole la devise MAR : CAR : DOE, "Sil plait à Dieu", forme bretonne équivalente de DIEV POVRVOIRA.
Selon Kerbiriou, "Depuis 1438, la seigneurie de Châteaugal était passée par alliance à cette branche de Mezle, dont la devise était : Da vad e teui et Mar car Doue. "
Dans le culturezine d'Hervé Torchet la devise est celle de Tanneguy II du Chastel en 1449 : "Devise “ marc car doué ” ( s’il plait à Dieu ) sur son écu , “ da vad è tevy ” ( tu n’as qu’a venir) sur sa bannière, cri de guerre de sa maison, Tanneguy II du Chastel 1449". Mais avec une erreur de transcription sur "marc" au lieu de "mar".
http://www.laperenne-zine.com/articles.php?lng=fr&pg=480
Note : j'ai eu, sur place, un doute sur le matériau dont sont sculptés les pieds et le lion du gisant. Si ceux-ci sont visibles sur la carte postale Vilard publiée par J. Guichoux, je me suis demandé s'il ne s'agissait pas d'une très habile reconstitution par P. Le Floch.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
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Armoiries Du Chastel en alliance avec Ploeuc d'hermines à trois chevrons de gueules et Kergolay vairé d'or et de gueules à la bordure engreslée d'azur.
Pour Marc Faujour, au pied du gisant, Il faut lire les armes comme un mi-parti du Chastel en alliance avec Ploeuc, mais en précisant que les Ploeuc portent un écartelé Ploeuc-Kergorlay depuis que la famille de Ploeuc est tombée en quenouille au XIII° siècle dans un cadet de Kergorlay (*). Il faut donc décrire ce blason ainsi : parti au premier du Chastel fascé d'or et de gueules de six pièces, au second écartelé Ploeuc d'hermines à trois chevrons de gueules et Kergorlay vairé d'or et de gueules (alors que j'avais initialement attribué le vairé de ce blason aux Kermellec, Sr de Chateaugal).
Cet auteur chevronné précise : "On peut ainsi voir l’écartelé des Ploeuc dans les vitraux de la cathédrale de Quimper, sur l’église de Gouesnou (voir la notice de Michel Mauguin) ou dans les aveux Ploeuc déposés à la chambre des comptes de Bretagne (ADLA B 2034)"
On les trouvait aussi au tympan de la maîtresse-vitre de l'église Saint-Pierre de Gouezec, avant sa desctruction en 1656.
(*) Jehanne de Plœuc, héritière de la branche ainée épousa en 1292 Tanguy de Kergorlay, seigneur du Tymeur en Poullaouen à condition de relever le nom et les armes de Plœuc, ce que fit leur fils Vincent né vers 1293.
Les armes sont surmontées d'une couronne de vicomte et du collier de l'Ordre de Saint-Michel.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
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Armoiries avec un mi-parti au premier d’un écartelé Kermellec-Châteaugal, vairé d’argent et de gueules – de gueules à trois châteaux d’or et au second Languenoez d’or à trois fasces ondées d'azur.
Jehan de Kermellec, seigneur de Châteaugal, chambellan du duc, épouse en 1426 Béatrice de Languenoez, dame de Châteaugal et demoiselle de la duchesse.
https://www.repertoire-breton.org/armorial-leborgne/page/167
https://www.tudchentil.org/spip.php?article687
Les précisions de Marc Faujour :
"Armoiries avec Kermellec de Châteaugal en alliance avec Languenoez. Ici aussi un mi-parti d’un écartelé et d’un plain. Les armes se rapportent bien à l’alliance de Jehan de Kermellec, seigneur de Châteaugal, chambellan du duc, époux de Béatrice de Languenoez. Le blason des Kermellec de Châteaugal présenté ici est un écartelé Kermellec-Châteaugal, signe d’une alliance avec une héritière.
L’armorial de Longchamps (BnF ms fr 5506) donne un vairé d’argent et de gueules pour Guyon de Kermellec. Armes brisées d’un lambel d’azur pour les Kermellec de Coetanroch dont nous savons qu’il sont des cadets des premiers : partage en 1428 « entre nobles homs messire Jan de Kermelec chevalier Sr de Ch(ate)augall dune part et noble escuier Pierre de Kermelec son frere juveigneur » (ADF 1 E 1022, acte N 12). Les armes à la bordure égrélée d’azur sont probablement celles d’une branche ayant atteint la réformation. Pour les armes des Langueouez, le mi-parti les montrent plaines sans le chef de gueules et ce sont bien trois fasces et non un fascé soit d’or à trois fasces ondées d'azur. Le chef se rapporte aussi probablement à une branche cadette. On rencontre ces armes plaines dans les vitraux de l’église St Nonna de Penmarc’h sous la forme d’un fascé ondées d’or et d’azur de six pièces. Le blason est donc un mi-parti au premier d’un écartelé Kermellec-Châteaugal, vairé d’argent et de gueules – de gueules à trois châteaux d’or et au second Langueoez d’or à trois fasces ondées d'azur.
Il faut noter le peu de cas des émaux dans les représentations modernes comme le montre Jean Guichoux. Il serai aussi intéressant d’avoir la description de 1654 de la maîtresse vitre de Landeleau et du dessin de la vitre de Collorec, car des éléments posent problèmes : la représentation du château alors que le gisant montre des tours, les armes de Langueoez au chef, les armes de Bouteville."
Les armoiries sont entourées du collier de l'Ordre de Saint-Michel , surmontées de la couronne de vicomte, et entourées de la devise DIEV POVRVOIRA .
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.
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Blason placé en tête.
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Armoiries Du Chastel en alliance avec de Mezle (trois mains appaumées herminées).
Le mariage de Tanguy du Chastel et de Gabrielle de Mezle est daté vers 1350.
https://man8rove.com/fr/profile/ns97jede-henri-du-chastel
Les hermines des paumes sont bien présentes, mais j'aurai mieux pu en rendre compte par un éclairage rasant si j'avais été plus attentif. Voir sur ce détail :
http://michel.mauguin.pagesperso-orange.fr/Pennon%20Quilbignon%20de%20Coatenes.pdf
On retrouve la couronne, et le collier de l'Ordre de Saint-Michel.
Le gisant (kersanton, 1638, Roland Doré) d'Auffray du Chastel en l'église de Landeleau. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.+
SOURCES ET LIENS.
— ARMMA
https://armma.saprat.fr/?s=chastel
— FRÉMINVILLE (Chevalier de), 1835, Antiquités du Finistère, Brest page 200.
http://grandterrier.net/wiki/images/3/34/Fr%C3%A9minvilleAntiquit%C3%A9sBretagneFinist%C3%A8reV2.pdf
— Catalogue du musée archéologique et du musée des anciens costumes bretons de la ville de Quimper, 1885 page 95.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6527276z/texteBrut
— GUICHOUX (Jean), mars 2016, "L'église de Landeleau et l'étonnante histoire de la tombe d'Auffray du Chastel"; Kaier ar Poher n°42 pages 47 à 58.
http://www.plouye-poher.fr/ressources/files/rub/pdf/66.pdf
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, La sculpture sur pierre en Basse-Bretagne. Les ateliers du XVe au XVIIe siècle, Presses Universitaires de Rennes, pages 225-226.
— KERBIRIOU (L.), les seigneurs de Landeleau
http://www.infobretagne.com/landeleau-seigneurs.htm.
—WAQUET Henri), 1926, La statue tombale d'Auffray du Chastel
https://musee-breton.finistere.fr/fr/search-notice/detail/r-1885-31-2-lio-fa9bb
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