Les vitraux de la nef de la cathédrale de Troyes, les baies 130 et 230 de l' Arbre de Jessé. Verrières réalisées par Lievin Varin en 1499, don de Jean de Marisy et Guillemette Phélipe sa femme. Armoiries.
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1°) Voir sur les vitraux de la cathédrale de Troyes :
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2°) Voir dans ce blog sur les Arbres de Jessé :
A. ARBRES DE JESSÉ SCULPTÉS.
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L'Arbre de Jessé de l'Abbaye de Saint-Riquier (Somme). Tympan sculpté : 1511-1536
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Chapelle St Nicolas en Priziac. (56) : XVIe siècle.
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L' arbre de Jessé de l'église de Saint-Aignan (56). : XVIe siècle. Retable.
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L'arbre de Jessé de l'église Notre-Dame de Saint-Thégonnec. (29) : 1610.
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L'arbre de Jessé de la chapelle de La Trinité à Cléguerec (56). :1594
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L'arbre de Jessé de la cathédrale de Burgos. (1483-1486)
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B. PEINTURE MURALE:
C. VITRAUX DE L'ARBRE DE JESSÉ
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de la basilique de Saint-Denis. (1144), le premier vitrail sur ce thème.
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de la cathédrale de Chartres. (1150)
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale du Mans. (1235) :
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale d'Amiens. (1242) :
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Le vitrail de la Vigne de Jessé et la Vie de Marie (1466) à l'église Saint-Dominique de Vieux-Thann (Haut-Rhin). Vieux-Thann (1466)
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Vitrail de la Baie 0 de la cathédrale d'Évreux (vers 1470)
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L'étrange vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Moulins. Vitrail de la cathédrale de Moulins en Allier (vers 1480)
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Sens. I. (V. 1504)
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Sens, II : la Vierge et la Licorne.
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Bourg-Achard. (vers 1500-1510)
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de Notre-Dame du Touchet. (V.1537)
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Saint-Pierre de Chartres. (XVIe siècle)
En Bretagne, par ordre chronologique :
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de la chapelle N.D. de Lansalaün à Paule. 1528
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de la Sainte-Trinité à Kerfeunteun :1528-1530
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Confort-Meilars. c.1530
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de l'église de Malestroit.: 1530-1540.
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Moncontour. c.1530-1540
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L'arbre de Jessé de l'église de Beignon. : 1540-1550
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Le vitrail de la Passion de l'église Saint-Mériadec en Stival (56) : 1550.
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Saint-Armel de Ploermel. c.1550.
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Les vitraux de l'église des Iffs ( seconde partie : les chapelles). Baie 12 milieu XVIe.
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Notre-Dame de Vitré. c.1868-1870
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PRÉSENTATION GÉNÉRALE.
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Avec 1 500 m² de verrières, allant du XIIIe au XIXe siècle, la cathédrale de Troyes est l’un des plus vitrées de France. Elle possède un triforium totalement vitré, (situé à mi-hauteur et qui fait le tour du bâtiment), ce qui est assez exceptionnel. Les vitraux de la cathédrale de Troyes sont considérés comme une œuvre majeure de la peinture sur verre en France.
Les 20 verrières hautes de la nef forment un ensemble homogène. Elles ont été réalisées entre 1498 et 1505 par plusieurs peintres-verriers dont le nom de certains sont connus (Pierre Maçon, Jean Verrat, Balthasar Godon, Lievin Varin et le cartonnier Nicolas Cordonnier). Parmi les 66 « verriers » recensés dans les archives entre 1470 et 1560, 37 peuvent être considérés comme des peintres verriers. Regroupés autour de la collégiale Saint- Urbain, ils travaillaient au sein de structures familiales et fondaient des dynasties, comme les Verrat ou les Macadré. Leur atelier était une petite structure dirigée par un peintre verrier qui n’employait qu’un ou deux serviteurs, selon ses moyens, comme on le voit à Paris et en Provence (D. Minois).
Selon le rédacteur de la notice de l'Inventaire, rédigée en 1999, "Leur iconographie répond à la seule volonté des multiples donateurs. Leur véritable lien provient plus de la technique que du style : les peintres-verriers ont mis l'accent sur la lisibilité des compositions (larges registres de scènes, mise en valeur des faits et gestes des personnages par la réduction du rôle de l'architecture et des arrières-plans, modelé très appuyé, absence de chef-d'oeuvre et de gravure sauf dans la baie 233). Certains aspects rappellent les vitraux du milieu du 13e siècle des parties hautes du choeur : la gamme colorée très vive avec barbes et cheveux en pleine couleur, la mise en plomb des yeux de certains personnages, les fonds de mosaïque. Si la Renaissance italienne ne s'y fait pas encore sentir, Jean Lafond reconnaît une influence venue de l'est dans la verrière de saint Pierre (notamment l'atelier strasbourgeois de Pierre d'Andlau). Pour Emile Mâle, la présence dans ces verrières d'une forte veine d'inspiration populaire évoque l'imagerie d'Epinal."
Au contraire, Danielle Minois (2003 ; 2005) souligne la cohérence de ces ensembles qui illustrent en un discours argumenté et savant l’histoire du salut. "Seul un clergé cultivé a pu élaborer ces programmes ; il l’a donc imposé aux donateurs qui l’ont financé. Parce que « le choix des sujets des verrières posées dans les églises est un reflet de la vie intellectuelle et religieuse », elle signale en outre les réactions des commanditaires face à la Réforme à travers les thèmes choisis, surtout après 1550 : l’histoire de Daniel ou de Tobie, la légende de l’hostie profanée. Elle montre comment les mêmes thèmes peuvent changer de sens face à un climat de remise en cause de l’Église romaine." (L. Rivale)
Ces 20 verrières hautes de la nef se répartissent entre les baies du triforium (galerie à trois arcades entre chaque travée), qui portent les numéros 127 à 136, et, au dessus de celles-ci, les baies hautes homologues portant les numéros 227 à 236. Selon la numérotation internationale des vitraux, les baies nord portent un numéro impair et les baies sud un numéro pair.
Les baies 130 (triforium) et 230 occupent la quatrième travée de la nef côté sud.
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Nous avons donc ainsi :
a) du côté nord, depuis le transept vers le fond de la nef :
-baies 127 et 227 : Saints ; vie de saint Pierre. réalisée en 1502, don d'Henri II de Lorraine Vaudémont, évêque de Metz ;
-baies 129 et 229 : Histoire de Tobie. 1500 ; don de Jean Fuestot l'Aîné (marchand et bourgeois de Troyes dans l'Aube) et de Denise Chappelain sa femme. Monogramme [du peintre verrier en tête de lancette de la baie 129].
-131 et 231 : Adoration des mages, et Histoire de Job. Don de Jeanne de Mesgrigny veuve de Jean Molé. 1501. Inscription et armoiries. Monogramme d'un verrier au tympan.
-133 et 233 : légende de saint Sébastien ; réalisée en 1501 par Lievin Varin, don de la confrérie de saint Sébastien ; un écu armorié d'Odard Hennequin mis en place en 1502-1503 par Jeancon Garnache et Nicolas Hulins a disparu.
- 135 et 235 : Légende de la Vraie Croix ; réalisées entre 1501 et 1502 par Jean Verrat, don de Claude Dorigny, veuve de Jean Péricard. Armoiriesidentifiées. Monogrammes. Très restaurées au XIXe.
b) du côté sud :
-baies 128 et 228 : Calvaire ; saints et saintes. 1499 ; peintre-verrier Balthazar Godon ; armoiries (identifiées) : Jean Huyard chanoine de la cathédrale, et Guillaume Huyard avocat du roi à Troyes
-baies 130 et 230 : Arbre de Jessé. Verrières réalisées par Lievin Varin entre 1498 et 1499, don de Jean de Marisy et Guillemette Phélipe sa femme. En baie 230, toute la famille de Jean de Marisy et de Guillemette Phélipe (ses frères, ses 9 filles et belles-filles) est représentée au bas de cette verrière. Armoiries.
-baies 132 et 232 : Annonciation et Nativité. Parabole du Fils Prodigue. Don de Guillaume Molé et Simone Boucherat , 1499. Réalisée en 1499 peut-être par Pierre I maçon (inscription ne notant que son prénom). Armoiries identifiées, devise "en attendant", monogrammes [du verrier]
-baies 134 et 234 : Vie de Joseph (biblique) ; réalisée en 1499, don d'Agnès Bonjean, veuve de Jehan Thévenin (écuyer et notaire royal à Troyes) son mari . Armoiries identifiées et monogrammes en baie 134. Inscription mentionnant le commanditaire et la date en baie 234.
-baies 136 et 236 : Histoire de Suzanne et du prophète Daniel ; réalisées en 1499 , don de Jean Corart, marchand de Troyes et de Marguerite, sa femme (inscription) ; les vitraux du 15e siècle du triforium (baie 136) ont disparu et sont remplacés par des vitraux du 20e siècle sur le thème de l'histoire de Daniel.
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Datation et donateurs : par inscription.
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Tout au long de la partie inférieure de la baie 230 se lit l'inscription en lettres gothiques : MESSIRE JEHAN DE MARISY ET DAMOYSELLE GUILLEMETTE PHELIPE SA FEMME ONT DONNE CESTE VERRIERE EN L'HONNEUR DE DIEU ET DE SAINT PIERRE L'AN 1498. PRIEZ POUR EUX.
Danielle Minois estime que la réalisation d'une verrière se fait l'année suivant la donation, soit en 1499, ce que confirme les comptes de la cathédrale.
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Attribution à Liévin Varin et paiement en 1498-1499 : par pièce d'archive.
Comptes de la confrérie Saint-Pierre de la cathédrale (AD G 1571)
1498- 1499 : "A la femme de Lyevin, verrier, à laquelle messires ont ordonné bailler ug escu d'or pour ung chapperon: affin qu'il fist bien et deument la verrière de Radix Jessé, pour ce cy xxxv s.t"
Le peintre-verrier :
Lyevin Varin est documenté de 1474 à 1513. Son patronyme apparaît sous les graphies Varin Verrien Warin, Voirrin, Il est désigné uniquement par son prénom Lyevin ou Lievin dans la plupart des registres de comptes troyens et on trouve l'expression « Liévin le verrier » . Lyevin était peut-être d'origine flamande puisque saint Lievin est le patron de Gand, et que le prénom Liévin n'est jamais donné à Troyes.
Sa femme se prénommait Jeanne. Il était l' oncle de Jean Macadré. Il habitait rue Notre-Dame.
Il est l'auteur en 1501-1502 au transept sud de la cathédrale de Sens, avec Jean Vierrat et Balthasar Godon, de la Rose du Jugement de l'Arbre de Jessé, et de l'Invention des reliques de saint Etienne et de la Translation des reliques de saint Etienne.
Il travailla aux verrières de l'église Sainte-Madeleine de Troyes en 1503 et à celles de l'église Saint-Jean de 1508 à sa mort. Il répara avec son neveu Macadré les verrières de Saint-Jean en 1510-1512, puis refit le vitrail de saint Christophe de cette église en 1512-1513. Il décéda en 1512-1513.
https://books.google.fr/books?id=ODxBePnXNwsC&pg=PA238&dq=varin+troyes&hl=fr&newbks=1&newbks_redir=0&sa=X&ved=2ahUKEwidlNO7mtiEAxWzRaQEHWedCgUQ6AF6BAgGEAI#v=onepage&q=varin%20troyes&f=false
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Description
La baie 230, avec six lancettes réunies deux à deux sous deux mouchettes, et un tympan à treize ajours et écoinçons, mesure 10 m de haut et 6 m de large.
La baie 130, en dessous, au triforium, avec ses six lancettes réunies deux à deux sous un tympan à deux mouchettes et un soufflet, mesure 3, 50 m de haut et 6 m. de large.
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Les baies 130 et 230 de l'Arbre de Jessé de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Les baies 130 et 230 de l'Arbre de Jessé de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
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LA BAIE 130.
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Elle associe les saints patrons des donateurs (saint Jean-Baptiste et saint Guillaume), aux extrémités, aux deux prophètes Isaïe et Jérémie cités en référence avec leurs versets dès les premiers Arbres de Jessé, et à deux scènes typologiques, celle du Buisson ardent et de Gédéon préfigurant l'Incarnation et la Nativité du Christ. Si on considère que Jean-Baptiste a été le prophète qui a annoncé la venue du Christ, cinq des six personnages de ces lancettes introduisent bien le motif de l'Arbre de Jessé, arbre de la généalogie de Jésus démontrant que le Sauveur "accomplit les Écritures", selon les termes de l'incipit de l'évangile de Matthieu après sa généalogie :
"Tout cela est arrivé pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète [Isaïe] : Voici que la Vierge concevra, et elle enfantera un fils ; on lui donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : « Dieu-avec-nous »" Mt 1:22-23.
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1. Saint Jean-Baptiste patron du donateur.
Jean est vêtu de sa robe en poil de chameau, il tient l'agneau mystique au nimbe crucifère et l'étendard à l'oriflamme portant la croix.
Inscription JOHANNES.
Armoiries de Jean de Marisy, d'azur aux six macles d'or posées 3,2,1.
Tentures damassées rouge et vertes.
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2. le prophète Isaïe.
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Inscription ISAYAS
Inscription du phylactère : EGREDIETVR VIRGA DE RADICE JESSE. Citation d'Isaïe 11:1 "Il sortira un rejeton de la racine de Jessé". Le thème iconographique de l'Arbre de Jessé provient de cette citation.
Tentures damassées rouge et vertes.
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Tympan bleu aux macles jaunes.
Armoiries de Jean de Marisy et phylactère portant sa devise FINS CORONAT, citation abrégée de Finis coronat opus, "La fin couronne l'œuvre".
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Vient ensuite deux scènes typologiques, celle du Buisson ardent, et de la toison de Gédéon. La verrière de l'arbre de Jessé de la cathédrale de Sens, réalisée par Liévin Varin juste après celle-ci, en 1502-1504, reprend cette idée, mais ce sont alors quatre scènes qui sont disposées sur les bordures latérales de l'arbre : outre Moïse et Gédéon (avec les mêmes citations bibliques), on y trouve Melchisédech devant l'autel, et Ézéchiel et la porte close, dans la même intention interprétative, reliant le motif de l'Arbre généalogique de Jessé avec une défense de l'Immaculée conception de Marie, et de la nature royale de la Vierge et du Christ.
La comparaison entre les deux verrières ne s'arrête pas là, puisque à Sens, sont représentés Isaïe et Jérémie (et également Daniel et Ézéchiel, Nahum et Zacharie et Aggée et Amos).
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3. Moïse et le Buisson ardent.
Inscription DNE MITE QVEM MISSVRVS ES. EXODVS JJJJ, citation du livre de l'Exode 4:13 Seigneur, envoie qui tu voudras envoyer."
Moïse, ayant auprès de lui ses moutons, se déchausse sur l'ordre de Dieu qui lui apparaît sous la figure du Christ au nimbe crucifère au centre du buisson environné de flammes. Il tient son bâton, qui, dans le texte, vient de se transformer en serpent, témoignant de la puissance effectrice de Yahvé.
Comme la suivante, cette scène provient de la typologie biblique largement vulgarisée et mise en image à la fin du Moyen-Âge par les Bibles des pauvres. Le Buisson ardent y est mis en parallèle avec la Nativité, ce qui se comprend ici puisque la prophétie d'Isaïe est lue comme une annonce de la naissance du Christ par la Vierge. Voir la page de la Biblia pauperum.
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4. La toison de Gédéon.
Inscription : GEDEO
Gédéon est en prière devant une toison d'où s'élève une rosée (des rayons blancs descendant d'une nuée). Il est revêtu de son armure de guerre, et porte dans son dos son bouclier où est inscrit son nom. Un ange lui apparaît , portant une banderole avec ces mots : DOMINE TECVM VIRORVM FORTISSIME , "Le Seigneur est avec toi, ô le plus puissant des hommes" (Juges 6:25).
Dans la Biblia pauperum, le miracle de la rosée (ou de la toison) de Gédéon est mis en parallèle avec l'Annonciation, ce qui là encore, est cohérent vis à vis de la prophétie d'Isaïe.
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Tympan bleu aux macles jaunes.
Armoiries de Jean de Marisy et phylactère portant sa devise FINS CORONAT, citation abrégée de Finis coronat opus, "La fin couronne l'œuvre".
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5. Le prophète Jérémie.
Inscription : IEREMIAS.
Inscription du phylactère : CREABIT DOMINVS NOVVM SUPER TIAM JEREMIE XXXI.
Il s'agit d'une citation du verset de Jérémie 31,22 Creavit Dominus novum super terram femina circumdabit virum : "Le Seigneur a fait du nouveau sur la terre, une femme entourera [ou "environnera"] l'homme". Ce verset a été interprété par Saint Bernard comme annonçant la Vierge, qui concevra Jésus, homme parfait dès sa présence dans le sein de Marie, non par la maturité de l'âge, mais par celle de la sagesse :
http://www.abbaye-chaise-dieu.com/Les-Peres-de-l-Eglise-commentent.html
Voir l'arbre de Jessé de Férel :
https://www.lavieb-aile.com/article-le-vitrail-de-l-arbre-de-jesse-a-ferel-56-117745491.html
Tentures damassées rouge et vertes.
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6. Saint Guillaume patron de la donatrice Guillemette.
Inscription GVILL'MVS
En l'honneur de Guillaume de Bourges, archévêque de Bourges (1199-1209) , le prénom Guillaume est extrémement répandu à Troyes à l'époque sous ses formes masculines (Guillaume, Guiot ou Guyot) et féminine. Voir Guillaume Molé et Guiot I le Peley (mort en 1485), amis de Jean de Marisy.
Tentures damassées rouge et vertes.
En bas à gauche, blason mi-parti de Jean de Marisy d'azur aux six macles d'or posées 3,2,1 et de Guillemette Phelippe de gueules aux trois lionceaux grimpants d'or.
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Tympan bleu aux macles jaunes.
Armoiries de Jean de Marisy et phylactère portant sa devise FINS CORONAT, citation abrégée de Finis coronat opus, "La fin couronne l'œuvre".
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LA BAIE 230.
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LE REGISTRE INFÉRIEUR : LES DONATEURS JEAN DE MARISY ET GUILLEMETTE PHELIPPE.
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Tout le registre inférieur.
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Un cas unique ?
Il existe un nombre considérable de verrières de l'Arbre de Jessé (près de 80 entre 1475 et 1600) en France, mais très peu d'entre elles comportent, à ma connaissance, des donateurs ; et parmi ceux-ci, la baie 230 est peut-être la seule où ceux-ci, composant une famille entière de 17 membres, occupent le registre inférieur aux côtés de Jessé et se placent ainsi sous le patronage des Rois de Juda.
C'est également un cas unique que cette famille qui insére ses membres, sans séparation dans l'arbre généalogique du Christ, et même dans les racines ou premières branches de l'arbre, au même rang que Jessé le fondateur, les branches basses venant englober dans leur rinceau les têtes de Jean de Marisy, de son épouse et de leurs enfants. Qui entoure Jessé d'un complexe héraldique important, et qui empiète sur sa robe. Et qui suspend sans complexe ses blasons à une branche principale de l'arbre !
C'est également un cas unique parmi les 20 verrières hautes de la nef de la cathédrale de Troyes, les autres donateurs occupant une place plus modeste, et se contentant du patronage de leurs saints patron. Autre particularité, les donateurs des autres verrières troyennes figurent en bourgeois (malgré la présence d'armoiries témoignant d'un annoblissement récent) tandis que Jean de Marisy figure ici en armure.
En la cathédrale de Sens, la verrière de l'Arbre de Jessé de Liévin Varin, dont j'ai déjà souligné la proximité avec celle de Troyes, montre également un donateur, le chanoine Louis Lahure, sur la même horizontale que Jessé mais à l'écart dans la bordure latérale, et en petite taille entre deux prophètes . Mais l'écu portant ses armes parlantes est suspendu tout aussi cavalièrement à une branche servant d'appui à l'archange Gabriel.
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Jean de Marisy, ses onze descendants mâles, et son complexe héraldique.
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Jean de Marisy est représenté agenouillé mains jointes devant son livre de prières posée sur le prie-dieu. Il est en armure, et il porte ses armes sur son tabard.
Jean de Marisy, fils de Simonnet de Marisy et de Marguerite La Héraulde, est né en 1420. Il était écuyer, seigneur de Juzanvigny, Valentigny, Champigny-suur-Aube, Richereau et Racine. Il fut Maire de Troyes en 1471 et 1488. Il épousa Guillemette Phelippes (1424-/1492) dont trois enfants :
- François Ier de Marisy, qui fut confirmé dans sa noblesse par sentence de l'élection de Troyes, décédé après 1515, Maire de Troyes en 1498 . Il épousa Catherine Molé (ca 1464-1520), fille de Jean II Molé et de Jeanne de Mesgrigny, donateurs des verrière 131 et 231, puis il épousa Ysabeau de Louvement d'où trois enfants, Claude (qui épousa Jeanne Le Boucherat puis Michelle Molé et qui fit construire en 1526 l'Hôtel de Marisy), Marguerite et Jacques.
- Jacques de Marisy ca 1460-1541/ maire de Troyes en 1514 et en 1518, époux de Margaux Huyard, d'où six enfants, Guillemette, Catherine, Louis, Simon, Guyot et Jeanne de Marisy.
- Ysabeau de Marisy qui épousa Alain I de Vassan, d'où trois enfants Guillemette, Guillaume et Jean.
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Juste derrière lui vient un fils portant armure et tabard aux armes de Marisy, probablement François de Marisy. Charles Fichot y voit le frère puiné de Jean.
Puis vient un clerc, probablement un chanoine puisqu'il porte l'aumusse de fourrure au bras droit, vêtu d'une robe blanche au dessus d'un vêtement rouge. Ce serait pour Charles Fichot le frère cadet de Jean.
Puis suivent neuf hommmes, vêtus en bourgeois avec des manteaux rouges, bleus ou verts. Il n'est pas possible de les identifier parmi les fils ou petits-fils du donateur.
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En 1499, date de la donation de la verrière, tous les enfants et petits enfants mentionnés étaient nés.
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Le complexe héraldique.
Le blason aux armes de Marisy, d'azur aux six macles d'or posées 3,2,1, armes qui remonterait à Philippe VI de Valois, est présenté par deux lévrettes blanches colletés aux couleurs azur et or. Le blason est timbré d'un casque à sept grilles entouré de ses lambrequins et coiffé d'un tortil (aux couleurs de Marisy), et qui reçoit en cimier une femme blonde richement vêtue, en buste.
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Le côté féminin de la famille.
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On trouve d'abord le blason suspendu par une sangle à une branche de l'Arbre de Jessé : il porte les armes mi parti, en 1 de Marisy et en 2 de Phelippes de gueules à trois lions d’or rampants.
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La donatrice et ses filles.
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Guillemette de Phelippes.
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Elle est agenouillée sur un coussin, mains jointes devant son prie-dieu où est posé le livre de prières à fermoir, et un rosaire à grains rouges et à gland vert.
Elle porte une coiffe noire, et une robe rouge à longue traine et à manches larges et fourrées. Une bague en or est passée à son index. Une longue ceinture blanche tombe jusqu'à terre.
Derrière elle vient une fille en robe bleue et coiffe rouge; livre sous le bras puis une autre en robe et en coiffe rouge.
Pour Charles Fichot, ce pourrait être ses belles-filles. Catherine Molé et Margaux Huyard ?
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Les filles ou petites-filles de Guillemette.
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Les deux dernières sont de taille plus petite, et portent leur livre de prières sous le bras.
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L'ARBRE DE JESSÉ.
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La verrière trouve sa source dans l'incipit de l'évangile de Matthieu Mt 1:6-16, et dans l'énumération des 28 descendants de Jessé (ou Isaï), les derniers étant Jacob puis Joseph, père de Jésus : quatorze générations de David jusqu'à la déportation à Babylone, et quatorze générations de Babylone jusqu'à Jésus. Plus précisément, ce sont les rois du royaume de Juda depuis David qui sont retenus, pour démontrer l'ascendance royale de Jésus.
Nous allons trouver, comme des fleurs sur les branches d'un arbre né de l'ancêtre Jessé, son fils David, son petit-fils Salomon, puis Roboam fils de Salomon, puis Abia, Asa, Josaphat, Joram, Ozias, Joatham, Achaz, Ézéchias, Manassé, Amon, et Josias, tous rois avant la déportation, mais aussi Jéconiah, Salathiel, Zorobabel, Abioud, Azor et Sadoq, descendants depuis la déportation. Parmi les premiers, tous sont couronnés et portent un sceptre, tandis que dans la deuxième liste, seul Jéconiah est couronné, les autres portent des chaperons de ou bourgeois ou des bonnets de seigneurs du XVe-XVIe siècle. En effet, Zorobabel par exemple, ne fut pas roi de Juda mais gouverneur de la province de Judée.
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Au nombre de 20 au total, ils sont répartis à 7 dans les deux lancettes de gauche, à 6 dans les deux lancettes médianes et à 7 dans les lancettes de droite.
L'arbre générationnel se poursuit au tympan avec six derniers ancêtres (Ahim, Elioud, Eléazar, Eliakim, Matthan, Jacob) menant à Joseph, à Marie puis à Jésus.
Cette composition à 30 personnages menant de Jessé à Jésus et inclunat Joseph est plus rare que la formule à 12 rois, conduisant à la Vierge tenant l'Enfant.
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1. Jessé livré à son songe.
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L'inscription indique RADIX JESSE, "Tige de Jessé" qui renvoie au verset d'Isaïe Is 11:10a In die illa radix Jesse qui stat in signum populorum "En ce jour-là la racine de Jessé qui se dresse comme un signal pour les peuples".
Radix Jesse désigne aussi, dans les hymnes chrétiens, la Vierge :
—Germinavit radix Iesse, orta est stella ex Iacob : Virgo peperit Salvatorem; te laudamus, Deus noster "une étoile s'est levée de Jacob : la Vierge a enfanté le Sauveur ; nous vous louons, notre Dieu."
—Radix Jesse virgo flore floruit | Quoniam Maria virgo deum nobis genuit | Quem patriarchis Deus promisit signisque praefiguravit "La souche de Jessé a fleuri la tige a porté son fruit la mère féconde a enfanté et elle est restée vierge."
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Alors que souvent Jessé est allongé et qu'un tronc s'élève de sa poitrine ou de son bassin, ici il est assis, endormi dans le creux d'un tronc d'arbre dont il enlace la branche maîtresse, la tête appuyée sur son bras gauche. Il porte à peu près l'habit des bourgeois de Troyes, avec un chaperon violet, une robe rouge ouverte sur la poitrine, ourlée de fourrure et serrée par une ceinture verte.
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Les rois de Juda David et Salomon.
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De l'aiselle droite de Jessé s'élève une branche qui se divise : la première division porte le roi David, fils de Jessé (inscription DD), portant la harpe qui le caractérise, la couronne, le sceptre, et une robe bleue à motifs dorés. La deuxième division porte Salomon (inscription SALOMÕ), petit-fils de Jessé, couronné, barbu, portant le sceptre, et une robe verte. Chaque roi est figuré en buste, naissant d'une fleur en bourgeon.
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Ézéchias, Ozias, Azor et Abiut.
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Au dessus de David et de Salomon viennent sur les divisions hautes de l'arbre EZECHIAS et OZIAS, puis AZOR et ABIVT .
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Sur le côté gauche de l'arbre, au dessus des donateurs mâles, nous trouvons successivement AZA, ROBOAM, JORÃ, AMÕ, JOATHÃ, JECHONIAS, et ZOROBABEL en tête de lancette. Les armoiries de Marisy occupent la tête de lancette voisine.
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Sur le côté droit de l'arbre, au dessus des donatrices , nous trouvons successivement JOSAPHAT, ACHAZ et ABIAS, puis MANASSES, JOSIAS, SALATIEL et SADOTH .
Les armes mi-parti Marisy/Phelippes sont suspendues à un rameau au dessus de Salathiel.
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JOSAPHAT.
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LE TYMPAN.
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Tympan de la baie 230 de l'Arbre de Jessé de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
Tympan de la baie 230 de l'Arbre de Jessé de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
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ACHIN et ELIAZAR. Plus haut, IACOB.
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Tympan de la baie 230 de l'Arbre de Jessé de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
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ELIVD et ELIACHI[M]. Plus haut, MATHÃ.
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Tympan de la baie 230 de l'Arbre de Jessé de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
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La Vierge et Joseph agenouillés devant Jésus. Au sommet, dans une nuée radiante, Jésus en Sauveur, bénissant, portant le nimbe crucifère et tenant le globe.
Inscription : M[ARI]A et IOZEPH. IESUS.
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Tympan de la baie 230 de l'Arbre de Jessé de la nef de la cathédrale de Troyes. Photographie lavieb-aile.
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SOURCES ET LIENS.
— COFFINET (Abbé Jean-Baptiste), 1858,Les peintres-verriers de Troyes pendant trois siècles depuis 1375 jusqu'à 1690 "Peintres-verriers. Nomenclature des peintres-verriers de Troyes depuis 1375 jusqu'à 1690". Annales archéologiques, 1858, t. 18, p. 212-224.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9693408c/f153.item
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9693408c/f252.item
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9693408c/f250.item
— FICHOT (Charles), 1889, Statistique monumentale du département de l'Aube page 220
https://www.google.fr/books/edition/Statistique_monumentale_du_d%C3%A9partement/-6jnG1emOHgC?hl=fr&gbpv=1&dq=civitas+ninive&pg=PA220&printsec=frontcover
— JUBAINVILLE (Henri d'Arbois de), 1862, "Documents relatifs aux travaux de construction faits à la cathédrale de Troyes pendant les XIIIe, XIVe et XVe siècles" [second article].Bibliothèque de l'École des chartes Année 1862 23 pp. 393-423
https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1862_num_23_1_445819
https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1862_num_23_1_461956
— LAFOND (Jean) 1955, "Les vitraux de la cathédrale Saint-Pierre de Troyes". In Société française d'archéologie, éd. Congrès archéologique de France : 113e session, Troyes, 1955. Orléans ; Nogent-le-Rotrou, 1957, p. 29-62.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k32099177/f59.item
— LEDIT (Charles-J. Abbé) 1948, Les Hautes verrières de la cathédrale de Troyes, préfacées par S. E. Mgr Julien Le Couedic,.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3339359k.texteImage?lang=FR
— LIEZ (Jean-Luc), 2022, "Regard(s) sur l’héraldique à Troyes au XVIe siècle". ffhal-03940420f
https://hal.science/hal-03940420/document
—MARSAT (André), Charles J. Ledit, Angelico Surchamp · 1972 Cathédrale de Troyes, les vitraux
— MINOIS (Danielle), 2005 Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560) .Sorbonne Université presses Corpus vitrearum France Etudes VI, 1 vol. (475 p.-XXIV p. de pl.) : ill. en noir et en coul., jaquette ill. en coul. ; 33 cm
https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_2008_num_166_1_2453_t14_0085_0000_1
— MINOIS (Danielle), 2003, thèse d'histoire de l'art Paris IV sous la direction de Fabienne Joubert et Michel Hérald, La peinture sur verre à Troyes à la fin du Moyen Age
—PASTAN (Élisabeth C. BALCON (Sylvie), 2006, Les vitraux du chœur de la cathédrale de Troyes (xiiie siècle), Paris, Cths, coll. « Corpus vitrearum - France II », 2006, 539 p.
https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_2010_num_168_3_7592_t19_0308_0000_1
— RIVIALE (Laurence), "Danielle Minois, Le vitrail à Troyes : les chantiers et les hommes (1480-1560). Paris, P.U.P.S., 2005, 475 p. (Corpus vitrearum France, études VI)." In: Bulletin Monumental, tome 166, n°1, année 2008. La galerie à Paris (XIVe-XVIIe siècle) pp. 85-86.
https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_2008_num_166_1_2453_t14_0085_0000_1
— ROSEROT (Alphonse) Les Marisy
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5509735m/f207.item
— SITES
Eglises du confluent :
https://www.eglisesduconfluent.fr/Pages/VIT-10Troyes-CathStPierreStPaul.php
https://www.eglisesduconfluent.fr/Pages/AT-ArbreJesse2.php
Archives de la cathédrale de Troyes :
https://www.google.fr/books/edition/INVENTAIRE_SOMMAIRE_DES_ARCHIVES_DEPARTE/RZcNAAAAQAAJ?hl=fr&gbpv=1&dq=%22la+Mosl%C3%A9e%22&pg=PA315&printsec=frontcoverhttps://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Troyes/Troyes-Saint-Pierre-et-Saint-Paul.htm
Inventaire :
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/IM10000423
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/IM10000396
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/IM10000397
https://www.culture.gouv.fr/ar/29/5/2/2/4/Travaux-de-mise-en-securite-et-de-protection-de-la-Cathedrale-de-Troyes
https://abedehem.blogspot.com/2016/11/des-troyens-en-champagne.html