Le vitrail de l'Arbre de Jessé (vers 1530, Le Sodec) en baie 0 de l'église Notre-Dame de Confort-Meilars.
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Voir dans ce blog :
Liste des 225 articles de ce blog décrivant les vitraux.
LES ARBRES DE JESSÉ
En Bretagne, selon l'ordre chronologique:
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de la chapelle N.D. de Lansalaün à Paule. 1528 :
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de la Sainte-Trinité à Kerfeunteun :1528-1530, Quimper.
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Confort-Meilars. ca.1530
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: Le vitrail de l'arbre de Jessé de l'église de Malestroit.: 1530-1540.
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: Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Moncontour. ca.1530-1540
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Vitrail de L'arbre de Jessé de l'église de Beignon. : 1540-1550
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Vitrail de L'arbre de Jessé de l'église de La Ferrière. : 1551.
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Vitrail de L' arbre de Jessé de l'église de Moulins (35). : c.1560.
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Les vitraux de l'église des Iffs ( seconde partie : les chapelles). Baie 12 milieu XVIe.
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Le vitrail de la Passion de l'église Saint-Mériadec en Stival (56) : 1550.
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Saint-Armel de Ploermel. ca.1550.
- Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Notre-Dame de Vitré. Vitrail par Chauvel : ca.1868-1870 :
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L'arbre de Jessé de l'église de Gouesnou . par Jacques Le Chevallier :1972.
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Et en comparaison avec les œuvres bretonnes :
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de la basilique de Saint-Denis. (1144), le premier vitrail sur ce thème.
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de la cathédrale de Chartres. (1150)
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Saint-Pierre de Chartres.
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale du Mans. (1235) :
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: Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale d'Amiens. (1242)
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Vitrail de la Baie 0 de la cathédrale d'Évreux (vers 1470)
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L'étrange vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Moulins. Moulins en Allier (vers 1480)
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L'Arbre de Jessé de l'Abbaye de Saint-Riquier (Somme). Tympan sculpté de l'abbatiale Saint-Riquier : 1511-1536
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Le vitrail de l'arbre de Jessé de Notre-Dame du Touchet.(Manche)
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Voir sur cette église de Confort-Meilars :
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Les bannières de procession de l'église Notre-Dame de Confort à Confort-Meilars (29).
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Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Confort-Meilars.
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Les roues à carillon de Confort-Meilars, de Locarn, de Priziac et de Quilinen.
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Les sablières (v. 1528-1554) de l'église Notre-Dame de Confort-Meilars (29).
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Les navires sculptés (v. 1528) de la façade occidentale de l'église de Confort-Meilars.
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PRÉSENTATION.
La maîtresse-vitre de Notre-Dame de Confort mesure 4,30 m de haut et 1,70 m de large et dispose de 3 lancettes de six panneaux, —que je désigne de gauche à droite par A, B, C, et de bas en haut de 1 à 4, — et d'un tympan à 3 ajours. Elle a été murée sur la hauteur d'un panneau en sa partie inférieure.
Elle est consacrée à un Arbre de Jessé ; un autre vitrail est consacré à la Vie de Jésus (avec une date :1554), et un troisième présente deux panneaux d'une Résurrection incomplète.
Malgré sa proximité avec celui de Kerfeunteun à Quimper datant d'environ 1520, cet Arbre de Jessé est bien différent par une composition en dix-huit panneaux clairement structurés, chacun présentant un personnage pour former un ensemble de cases bien lisibles. On découvre de bas en haut et de gauche à droite les donateurs et Jessé, puis les douze Rois de Juda, pour culminer avec la Vierge, le Christ et Saint Jean. Les douze Rois sont : Ezechias, David, Joram, Salomon, Acham, Joatan, Roboam, Ozias, Assa, Josaphat, Abia et Manassé.
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Sachant que le chœur à trois pans de l'église a été édifié en 1528 par donation d'Alain de Rosmadec et de son épouse, et que les donateurs figurent sur le bas du vitrail, les auteurs des Vitraux de Bretagne pour le Corpus Vitrearum la datent de 1530 (Gatouillat et Hérold). Roger Barrié avait proposé la date de 1550.
On y reconnaît le style de l'atelier quimpérois des Le Sodec.
Je l'ai décrit une première fois en 2011. C'était alors, après la verrière de l'église de Kerfeuteun à Quimper, ma deuxième description d'une série sur les Arbres de Jessé qui s'est amplifiée depuis. Je reprends ma description avec de nouvelles photos et un texte actualisé.
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La verrière a subi une restauration, jugée "absurde" par Abgrall puis J.J. Grüber, en 1840 par le vitrier-peintre quimpérois Cassaigne, qui en a détruit le bel ordonnancement, et c'est Jean-Pierre Le Bihan, restaurateur de vitraux à Quimper, qui a du lui rendre une cohérence en 1995 : tous les détails peuvent se trouver ici :
http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-16659536.html
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J'en retiens que les panneaux A2 et A6 (Ezechias et la Vierge) sont l'oeuvre de l'atelier Le Bihan.
Pendant la dernière guerre, comme beaucoup de vitraux des églises de France (mais, selon Jean Lafond, trop peu d'églises en Normandie), ces verrières ont été démontées et mises à l'abri en 1939 et replacées en 1951.
Elles ont été examinées par Roger Barrié dans le cadre de sa thèse parue en 1978; le même auteur a procédé avec Claude Quillivic à son évaluation pour l'inventaire général 1981. Dans le cadre de cet inventaire, une datation a été proposée : 1540 pour les verrières latérales, 1550 pour l'Arbre de Jessé.
Protection juridique : La verrière est classée au titre d'objet à la date du 10 11 1906.
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SOURCES D'INTÉRÊT.
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Cette verrière offre de très nombreuses sources d'intérêt :
— historique et héraldique : par la présence d'Alain de Rosmadec et Jeanne du Chastel. Relation avec les autres commandes de ce couple, comme la verrière de Pont-Croix, portant les mêmes portraits de donateurs.
— stylistique illustrant l'art de l'atelier quimpérois de Le Sodec, très présent en Finistère au XVIe siècle.
— technique pour l'art du vitrail : emploi du jaune d'argent (déjà ancien), du verre rouge doublé et gravé, et de la sanguine. Des vues rapprochées des visages permettront cette étude.
— technique, pour les techniques de restauration des vitraux (suppression des plombs de casse au profit d'un collage bout à bout).
— histoire du vêtement : présence de crevés (ou taillades) propres aux règnes de François Ier et de Henri II, confirmant une datation vers 1530. Voir Cast, Conversion de saint Hubert vers 1525.
— Représentation des personnages bibliques avec indication codée de leur appartenance hébraïque : barbes longues, bonnet conique, franges, glands de passementerie.
— Iconographie des Arbres de Jessé. Je renvoie à la liste des articles de mon blog. Nous avons ici un schéma en chandelier à trois branches culminant par un Calvaire, comme à Quimper (Kerfeuten, 1520) et Le Faouët (Saint-Fiacre ) .
— Inscriptions des galons des vêtements dans la peinture, que ce soit la peinture au chevalet, l'enluminure ou la peinture sur verre : ces inscriptions le plus souvent dénuées de sens mentionnent parfois des oraisons (comme ici l'incipit du Pater), parfois le nom du personnage, mais de nombreux auteurs ont cédés à la tentation d'y voir des signatures, quitte à modifier les séquences de lettre. L'histoire de cet usage d'inscriptions décoratives dépourvues de sens reste, à ma connaissance, à écrire dans la Peinture du XV et XVIe siècle. Pourtant, un pseudo peintre-verrier "R. de Loubes" est toujours validé comme auteur de ce vitrail par le site Pop-culture!
Je reprendrai quelques thèmes en fin d'article.
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PRÉSENTATION PANNEAU PAR PANNEAU DE BAS EN HAUT.
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Registre inférieur : Jérémie, Jessé et Isaïe ; les donateurs.
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Cinq personnages sont placés sur une même scène, sous une grande tente ou un dais dont les deux prophètes Jérémie et Isaïe tiennent les coins, découvrant ainsi Jessé endormi. Ce dais rouge aux mouchetures blanches et doublé de satin bleu réunit les trois panneaux. La partie basse est manquante.
La zone inférieure a été complétée en 1994. La tête du donateur a été complétée.
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1°) Case A1: Alain de Rosmadec présenté par Jérémie.
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Le prophète Jérémie.
C'est lui qui présente le donateur. Son nom n'est pas inscrit mais c'est habituellement lui qui, avec Isaïe, entoure Jessé . Il lève la main vers le sommet du vitrail pour montrer que c'est le Christ qui réalise la prophétie.
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Inscriptions.
a) L'inscription principale est le phylactère où est écrit CREAVIT DEUS CELOM TERA
Cela correspond à l'Incipit de la Vulgate, les premiers mots latins de la Bible qui débute par Genèse, 1, 1 : In principio creavit Deus caelum et terram, au commencement Dieu créa le ciel et la terre.
Pourquoi cette citation ? Sans-doute pour souligner que le Christ du registre supérieur vient accomplir non seulement la prophétie d'Isaïe présentée sur le phylactère de gauche, mais la totalité de l'Ancien Testament depuis le début des Temps.
J'admire la calligraphie aux lettres capitales très variables de forme, de taille ou d'inclinaison mais qui réalisent un ensemble très équilibré et élégant.
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b) On trouve aussi sur l'épaule et les manches de Jérémie les lettres suivantes :
-MNOE avec N rétrograde
- VdICREN, avec d en onciale, N rétrograde. On voudrait y trouver un sens...Judiciem... cela ne donne rien.
- NoRI, avec un O en forme de 9, un N rétrograde.
- M MNIB . NORI. N avec N rétrogrades. J'essaye Numinibus, pluriel datif de nomen, inis, la puissance agissante d'un dieu.
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Le donateur Alain de Rosmadec.
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Le donateur, qu'on imagine agenouillé puisqu'on ne voit que la partie supérieure, les mains jointes, est Alain II de Rosmadec (18 août 1508-30 janvier 1560), d'une famille originaire de Telgruc, en presqu'île de Crozon avant d'obtenir la prééminence sur Pont-Croix, et que les guerziou (chansons populaires bretonnes) ont fait rentrer dans la mythologie bretonne en les présentant comme descendant des anciens rois de Bretagne; une des familles les plus illustres de la région par les fonctions occupées par ses membres et par leurs constructions à Quimper, Pont-Croix, Landudec et Confort, ou par ses alliances avec les grandes familles:
"Alain, sire de Rosmadec, II du nom, de Tyvarlan, de Pont-Coix, baron de Molac, de La Chapelle, et de Sérent, vicomte de Bignan, maréchal de camp aux armées du roi en Bretagne, capitaine d'une compagnie de gens d'armes, de la noblesse et de la côtes de Basse-Bretagne.
Étant demeuré mineur à la mort de son père, sa mère lui servit de tutrice.
L'an 1528, il épousa Jeanne du Chastel, fille aînée de feu Tanguy, sire du Chastel, de Poulmic, de Leslein, de Kersalio, et de Marie dame du Juch, du Mur, de Coëtivy, et de Kersimon, laquelle dame eut pour partage la terre et châtellenie de Kerlourenan, maison qui à eu ses seigneurs particuliers et chevaliers anciens.
L'an 1532, il assista parmi les barons aux États tenu en la ville de Vannes, où le duché de Bretagne fut uni à la couronne de France à la requête des États de ladite province, et ensuite il se trouva à Rennes, à l'entrée de François dauphin, et y porta le second bâton de poile, ainsi qu'il lui appartenait le droit héréditaire, comme seigneur de Molac.
L'an 1539, en la réformation de la coutume de Bretagne, il fut le premier député en l'ordre de la noblesse de la part des États, pour l'assemblée avec des commissaires du roi.
Il rendit son aveu au roi, qui se trouve en la chambre de comtes en date du 4 avril 1541. Il exerça l'Office de Maréchal de Camp en l'armée du roi en Bretagne, commandée par Monsieur le duc d'Étampes, gouverneur dudit pays l'an 1543.
Dame Jeanne de La Chapelle était décédée l'an 1544, Henry fils aîné du roi dauphin de Viennois, et duc de Bretagne, lui fit don de rachat en considération de ses services, par lettres données au Camp de Viennes le 10 octobre audit an.
Il mourut le 30 janvier l'an 1560 et fut déposé dans le tombeau des seigneur de Molac, en la chapelle de Notre-Dame de Lermain en la paroisse de Molac."
Il eut 6 enfants :
-Tanguy de Rosmadec, dont le fils Sébastien II de Rosmadec ( 1566-1613) reçut le titre de marquis, et fit bâtir le fameux marquisat de Pont-Croix, l'actuel musée du patrimoine
- Marc,
- Claude,
-Marie,
- Louise,
- Jeanne.
Signalons deux évêques, Bertrand de Rosmadec (1417-1455) évêque de Quimper et bâtisseur de la cathédrale (c'est un demi-frère de Jean Ier, ancêtre de notre Alain II ) et Sébastien de Rosmadec, évêque de Vannes de 1624 à 1646, issu d'un Jean de Rosmadec seigneur de Plessis-Josso.
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Il s'agit d'un des plus beaux visages peints des vitraux du Finistère. Il associe une coloration en lavis d'une sanguine brun clair, avec des traits fins de sanguine plus sombre, et de traits blancs qui procèdent d'un "enlevé" par la pointe du manche du pinceau.
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Les armoiries portées par Alain de Rosmadec :
Le donateur est vêtu comme un gentilhomme de la Renaissance : en 1528 (le mariage avec Jeanne du Chastel a lieu le 8 mai 1528, et la chapelle dédicacée en août 1528), sous François Ier, 3 ans après le désastre de Pavie et la captivité du roi en Espagne, la mode est au port de la barbe, aux cols qui commencent à présenter à la place du décolleté de François Ier en 1525 une fraise dont les godrons restent encore discrets, un pourpoint court, et les crevés viennent fendre les belles étoffes, les brocarts, les velours et les soies pour faire apparaître la lingerie sous-jacente. Ce sont les Rois qui, comme des Rois de carte à jouer, vont nous présenter la mode Renaissance.
Alain porte un corselet de cuirasse et des pièces d'armure protégeant les avant-bras, mais cette tenue militaire est recouverte d'une tunique légère (en soie ?) dont les couleurs ne sont autres que celles de son blason : étudions-les.
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Les Rosmadec "portent palé d'argent et d'azur de six pièces", c'est à dire que leur blason est fait de trois bandes verticales blanches (argent) alternant avec trois bandes bleues (azur). Leur devise est : "BON ESPOIR".
Alain porte ces armoiries, mais en débutant par l'azur de la manche, soit un palé d'azur et d'argent. Elles sont associées à un lion blanc dressé sur ses pattes sur fond bleu : traduit en terme d'héraldique, il porte "d'azur au lion d'argent rampant". La langue est de la même couleur que le corps, il n'est donc pas "lampassé".
Le sire de Juch porte d'azur au lion d'argent, lampassé et armé de gueules (aux griffes rouges), ce ne sont donc pas ses armes, bien que Jeanne du Chastel soit de cette Maison.
En 1406, ces armes avaient été partagées après un accord entre le sire du Juch et Jean de Rosmadec qui dut se contenter en signe de juveigneurie du Juch de porter "d'azur au lion d'argent morné", c'est-à-dire dépourvu de griffes, de langue et parfois de queue. Le juveigneur est, dans la noblesse bretonne, un cadet sans distinction d'ordre de naissance ; les armes plaines sont réservées au chef de famille, et les armes brisées (incomplètes), au cadet.
Ce sont ces armes, devenues celles de Pont-Croix qui apparaissent dans le blason de Sébastien de Rosmadec :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Blason_S%C3%A9bastien_de_Rosmadec.svg
Mais ici, Alain de Rosmadec porte un lion qui n'est pas "morné" du tout, mais doté d'une belle langue et d'une belle queue.
Comme il est sire de Pont-Croix, je penche pourtant pour y voir les armoiries correspondantes à son titre, au prix d'une erreur du dessinateur du carton du vitrail.
C'est, avec son épouse, le commanditaire de ce vitrail, ce qui veut dire que c'est eux qui ont choisi ce thème ; l'arbre de Jessé de l'église de la Sainte-Trinité à Kerfeunten a été réalisé en 1525-1530, et Alain de Rosmadec et Jeanne de Chastel, mariés en 1528, ont fait construire l'église de Confort en la même année de 1528 : le thème choisi pour Kerfeunten les a obligatoirement influencé.
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Les mêmes armoiries se voient dans la verrière sud de l'église de Pont-Croix, où le couple avait financé la modification du chœur. Mais c'est un palé d'argent et d'azur (si on intègre la manche dans le blasonnement) , plus correct, qui s'y voit sur le donateur.
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2°) Case B1 : Jessé songeant, assis sous un pavillon.
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Présence de verre rouge gravé. Zone inférieure complétée.
S'est-il assoupi alors qu'il lisait une lecture pieuse à la rubrique D enluminée ? Mais non, bien-sûr : il songe, et c'est de ce songe que va naître sa vision prophétique d'une lignée royale. Il est déjà vieux, la barbe chenue, les mains ridées, mais ses traits sont sereins.
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Il me semble que ce qu'il porte autour du cou, avec des rayures noires et blanches est un talith, un châle de prière muni de franges (tsitsits), vêtement rituel pour la prière juive du matin. Il vient peut-être de lire Nombres, 15, 37-41 : "Et l'Eternel dit à Moïse : parles aux enfant d'Israël et dis-leur qu'ils se fassent, de générations en générations, des tsitsits aux bords de leurs vêtements". Il pense à la transmission du culte générations après générations, et il se sent comme un vieux tronc d'olivier noueux et tors mais à la sève puissante, il sent ces générations futures monter de sa propre colonne et fructifier. Il est âgé mais sa foi est forte, elle lui survivra.
Derrière lui, effectivement, le tronc de l'Arbre de Jessé s'élève. Il peut sentir ses enfants, petits-enfants et arrière-petits enfants jouer dans les branches à chat-perché sur des générations et des générations. Il les voit ; ils ont des tsitsits aux quatre coins du vêtement dont ils se couvrent. Pas de souci, il peut s'endormir.
Inscriptions :
-sur la manche : NOPV
- sur le drap vert du fond : AMN...HEd...IAR...ONC...MA...NO
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3°) Case C1 : Jeanne de Chastel et Isaïe.
"Panneau bien conservé, déplacé en haut de la lancette gauche pour remplacer un roi dans le montage précédent, et lui-même remplacé par le fragment de Couronnement de la Vierge réutilisé en baie 3." (Gatouillat)
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Le prophète Isaïe.
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Jeanne du Chastel est présentée par Isaïe. Le prophète tient le dais d'une main, tandis que l'autre désigne le ciel en un geste jumeau de celui de Jérémie. Mais quelque chose ne va pas, et une observation attentive constate que la main à l'index dressé est en supination excessive pour une main gauche dont le bras est croisé devant la poitrine ; et puis l'avant-bras est trop long. On pense à une inversion des morceaux d'un puzzle. Revenant à la case A1, je vois bien que la main gauche de Jérémie est en réalité une main droite (voir infra, case A3 la main gauche correcte de Salomon). Les auraient-on interverties ?
Inscriptions:
-sur le phylactère (la partie supérieure en case C2): EGREDIET VIRGAd ER (DICE) : IESSE / ISAIA : c'est la citation d'Isaïe, 11, 1 dans la traduction latine de la Bible ou Vulgate :
Et egredietur virga de radice
Et flos de radice ejus ascendet,
Un rameau sortira de la bouche de Jessé, et un surgeon sortira de ses racines.
On note le mélange de lettres capitales et d'onciales (e initial,d, g), l'inversion de deux S alors que celui d'ISAIA est conforme, l'équilibre de la calligraphie, et on observe que le phylactère est écrit à son endroit, et à son envers pour IESSE.
- sur les étoffes : néant
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Jeanne de Chastel est issue de la branche aînée de la Maison du Chastel, famille appartenant à la haute noblesse bretonne et occupant le deuxième rang de la hiérarchie nobiliaire après les Rohan. Établie autour du chateau de Trémazan en Landunvez, elle voit se succéder Tanneguy du Chastel I , Tanguy ou Tanneguy III (1370-1458), Tanguy IV, Tanguy V (+ 29/05/1477), mais aussi Tanguy du Chastel (+1521) le père de Jeanne :
-son père :Tanguy du Chastel Seigneur du Chastel et du Ploumic, Leslein et Kersalio épousa en troisième noce le 23 juin 1501 Marie du Juch. Les armes de la Maison du Chastel sont "fascié d'or et de gueules de six pièces", soit un blason alternant trois bandes verticales jaunes et trois rouges. La devise est Marc car Doué ( s'il plaît à Dieu), ou Da vad teui (tu verras bien), ou Vaillance du Chastel.
- sa mère : Marie, dame et baronne du Juch (1533), dame du Coëtivy, du Forestic, du Mur, du Menault, du Leslein, de Kersimon. Les armes de la Maison du Juch sont, nous l'avons vu, "d'azur au lion d'argent et lampassé de gueules"; leur devise est: La Non-pareille.
- sa fratrie : de cette union nacquit Guillaume du Chastel, Jeanne, Olivier qui fut recteur d'Argol (+1550), Prégent, René et Jacques seigneur du Juch.
Ce qui me surprend, c'est de ne trouver aucune trace des armoiries de la donatrice. Elles devaient se trouver sur le panneau muré.
J'admire sa robe damassée, sa chemise blanche à col montant, ses bijoux (collier, broche, bagues à tous les doigts), ses manches réalisées avec ce verre rouge gravé de la robe de Jessé.
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Nous la comparerons au panneau de la baie 10 de Notre-Dame de Roscudon de Pont-Croix, où elle porte ses armes :
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Maîtresse-vitre (1530) de Notre-Dame de Confort. Photographie lavieb-aile 2020.Maîtresse-vitre (1530) de Notre-Dame de Confort. Photographie lavieb-aile 2020.
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Deuxième registre : les rois Ézéchias, David et Joram.
4°) Case A2 : Ezechias (Le Bihan, 1994).
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J'apprécie beaucoup le travail de rénovation de l'atelier Le Bihan, mais ce panneau ne suscite pas l'émotion que je ressens devant l'oeuvre originale et ses mystères. Pas d'inscription, j'en profite pour écouter la belle histoire de la guérison miraculeuse du roi Ézechias. (Isaïe, 38 : 2-22)
Car Ézechias, treizième roi de Juda fut un bon souverain, qui fit plaisir à son Eternel en chassant les idolâtres. Mais un jour, il tomba gravement malade, et il se tourna vers le mur, il appela Yahvé pour lui rappeler combien il avait été un bon et pieux serviteur. Et il pleura, tant et si bien que Yahvé lui fit dire : "j'ai vu tes larmes. Je vais te guérir ; dans trois jours tu monteras au Temple de Yahvé. J'ajouterai quinze années de ta vie. Voilà que je vais faire reculer l'ombre des degrés que le soleil a descendu sur les degrés de la chambre haute d'Achaz dix degrés en arrière."
Vous ne me croirez pas si je vous dis ce qui est pourtant l'exacte vérité : c'est que le soleil recula de dix degrés, sur les degrés qu'il avait descendu.
Yahvé qui ne leva pas le petit doigt pour son serviteur Job et qui le laissa sur son fumier à gémir de douleur, voilà ce qu'il donna à Ézechias : quinze années gratuites!
Je ne le regrette pas, car cela nous a valu ce cantique d'Ézechias, qui est admirable de poésie :
Je disais : au midi de mes jours, je m'en vais
Aux portes du Shéol je serai gardé pour le reste de mes ans.
Je disais : Je ne verrai pas Yahvé sur la terre des vivants
Je n'aurai plus un regard pour personne parmi les habitants du monde.
Ma demeure est arrachée, jetée loin de moi, comme une tente de berger.
Comme un tisserand j'ai enroulé ma vie, il m'a séparé de ma chaîne.
Du point du jour jusqu'à la nuit tu m'as achevé.
J'ai crié jusqu'au matin ; comme un lion, c'est ainsi qu'il broie tous mes os,
du point du jour jusqu'à la nuit tu m'as achevé.
Comme l'hirondelle, je pépie, je gémis comme la colombe,
mes yeux faiblissent à regarder en haut. Seigneur, je suis accablé, viens à mon aide.
Comment parlerai-je et que lui dirai-je ? Car c'est lui qui agit.
Je m'avancerai toutes mes années durant dans l'amertume de mon âme.
Le Seigneur est sur eux, ils vivent et tout ce qui est en eux est vie de son esprit.
Tu me guériras, fais-moi vivre.
Voilà que mon amertume se change en bien-être. C'est toi qui as préservé mon âme de la fosse du néant, tu as jeté derrière toi tous mes péchés.
Ce n'est pas le shéol qui te loue, ni la mort qui te célèbre. Ils n'espèrent plus en ta fidélité, ceux qui descendent dans la fosse.
Le vivant, le vivant lui seul te loue, comme moi aujourd'hui. Le père à ses fils fait connaître ta fidélité.
Yahvé, viens à mon aide et nous ferons résonner nos harpes tous les jours de notre vie dans le Temple de Yahvé."
C'est beau, non ? avec l' hirondelle et la colombe qui gémissent, avec la vie qui s'arrache comme une tente de berger, et le lion qui broie les os, c'est mieux qu'un psaume de David, nom d'un Yahvé, non?
Et Yahvé fut de mon avis : il envoya Isaïe pour lui faire dire :"qu'on apporte un pain de figues, qu'on l'applique sur l'ulcère, et il vivra".
Un pain de figues ! Sur l'ulcère ! Et il vivra !
Alleluia !
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5°) Case B2 : le roi David.
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On reconnaît le psalmiste à sa harpe.
Inscriptions :
DAVID : je note l'utilisation systématique de l'onciale pour la lettre D.
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6°) Case C2 : Le roi Joram.
Il porte tous les attributs royaux : barbe, sceptre, collier, couronne, et un camail de verre gravé à mouchetures et à pois.
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Inscriptions : Outre JORAM, on lit :
MOPUS RDILONBESNPVM(O).
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Cette inscription a fait couler plus d'encre que les précédentes, après que René Couffon se soit avisé qu'il s'agissait de la signature du maître-verrier quimpérois R. de Loubes, un artisan que l'on trouve mentionné dans tous les bons ouvrages, notamment le Dictionnaire des artistes et artisans de Bretagne de Yves-Pascal Castel, le Patrimoine Religieux de Bretagne, histoire et inventaire de Maurice Dilasser et Claude Berger (2006) mais qui ne s'y trouve peut-être que parce que son nom a été découvert ici même. C'est ce nom qui est donné comme auteur du vitrail par R. Barrié dans l'Inventaire Régional de 1981 réf 29002964 après avoir relevé l'inscription "OPUS R. DE LOUBES". Dans un Bulletin de la Société d'archéologie de Bretagne de 1951, on signale l'existence au XVIIe d'un chanoine de Saint Corentin, la cathédrale de Quimper, portant le nom de J. de Loubes, présenté comme un possible descendant du maître-verrier.
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La mention se trouve publiée dans : René Couffon et Alfred Le Bars, Répertoire des églises du diocése de Quimper et de Léon, 1959, réédité après mise à jour en 1988 sous le titre Diocése de Quimper et de Léon, nouveau répertoire des églises et chapelles (p. 204 de cette édition).
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Or il se trouve que Jean Pierre Le Bihan, qui a restauré le vitrail, a écrit en 2006 dans l'article de son blog intitulé "une famille de peintre vitriers cornouaillais du XVIème siècle" la note suivante :
"inclure des initiales est chose fréquente chez les verriers. A Rouen, les frères Le Prince signant ILP pour Jean, ELP pour Engrand ou encore plus prés de chez nous, en plus des Le Sodec [voir : l'arbre de Jessé de Kerfeunteun] VI DI pour Vincent Desportes. Mais personne n'est à l'abri d'une erreur. Pour Notre-Dame de Confort en Meilars, Monsieur René Couffon donnait de Loubes comme auteur de l'arbre de Jessé. Une restauration postérieure révéla Raimondi Lombes".
Tout me porte à croire que c'est Jean-Pierre Le Bihan lui-même qui a relevé ce nom et qui propose de lire Raimondi Lombes.
Tout ceci me surprend, puisque je lis MOPUS et non OPUS (ouvrage, oeuvre), RdILONBESNPVM sans ponctuation permettant de lire la lettre R comme initiale d'un prénom, que la lettre qui suit le dILO est distinctement un N, et un N rétrograde comme tous les N de ce vitrail et non un U (comme dans Loubes) ni un M (comme dans Lombes). En outre, les lettres présentent de nombreuses anomalies, comme les lettres P en onciale, le D en onciale (ou minuscule) certes comme pour toutes les lettres D de ce vitrail, mais aussi le E proche d'un F, le second S inversé et qui s'apparente plutôt à un deux-points de ponctuation qu'à un S rétrograde, le V pointe en haut, comme si le diable carnavalesque de la dérision s'était déchaîné sur cette inscription.
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Est-ce raisonnable de déterminer une signature sur ces éléments ?
Si je reprends l'article que Jean-Pierre Le Bihan consacre à l'atelier Le Sodec, je lis qu'il peut attribuer à cet atelier quimpérois des œuvres reconnaissables par des particularités de style comme "une façon d'appréhender certains muscles comme celui au dessus du sourcil" , muscle très protubérant et marqué qu'il surnomme "à la banane" et qu'il a reconnu à Confort-Meilars, et par le traitement des veines des mains et des pieds en "graphisme losangé", graphisme qui m'a surpris en examinant en la case A2 les mains de Jessé.
Plutôt que de considérer que l'auteur du vitrail est connu, le fait de renoncer à une attribution...contestable peut relancer les hypothèses et les rapprochements.
Enfin, d'autres affirmations de René Couffon ne se sont pas trouvées confirmées, comme l'attribution de la Passion de La Martyre à Jost de Necker (voir : J.P. le Bihan, Jost de Necker, un mythe qui a la vie dure, 14 janvier 2009). Cela confirme la citation donnée en page de titre du Nouveau Répertoire des Eglises : "La science est faite d'erreurs patiemment corrigées" R. Couffon.
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Troisième registre : les rois Salomon, Acham et Joatan.
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7°) Case A3 : le roi Salomon.
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On remarque que l'inscription de son nom donne SALAMON (avec le N rétrograde).
Il porte le turban entourant un casque, un camail gris-métal évoquant une cuirasse, une robe jaune damassée de motifs de feuillages, et ses manches roses à crevés portent les inscriptions PVSR à droite et MdVI à gauche.
Sur son épaule, le pied botté du roi Roboam conduit à l'inscription de la robe, MOPVR.
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8°) Case B3 : le roi Acham.
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Acham est une forme ancienne pour Achab, roi d'Isrël entre 874 et 863, c'est un roi impie que son épouse Jézabel détourne de Yavhé au profit du dieu cananéen Baal. Ce n'est donc pas un roi de Juda ( qui est alors Josaphat, qui part en guerre avec Achab contre Aram) et il n'a pas sa place dans la généalogie du Christ. Que lui vaut cette place centrale dans l'arbre ?
Si on compare les rois du vitrail de Confort-Meilars et ceux de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Chartres, on constate que ceux sont les mêmes, hormis que c'est Achaz qui figure à Chartres : il est alors évident qu'il faut lire ici Achaz et non Acham ; la lettre M d'Acham est clairement inscrite, ce n'est pas une erreur de lecture, mais une faute de transcription à l'origine ou lors d'une restauration entre ce M et un Z.
Il porte la barbe, un turban, un sceptre, et un collier à chaînon rectangulaire. Sa manche droite porte les lettres NOPI et PVRI, le V étant inversé pointe en bas.
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9°) Case C3 : le roi Joatan.
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Inscriptions:
-JOATAN et son N rétrograde.
- manche droite : PNRVO
- manche gauche : NDMEO (ou , NdMEQ)
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Quatrième registre : les rois Roboam, Ozias et Assa.
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10°) Case A4 : le roi Roboam.
Inscriptions :
- épaule : N...ONDN
- écharpe : MOP
- Manche droite : PVRN et MITRIT
gauche : NOBIV
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11°) Case B4 : le roi Ozias.
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Installé en position de "chevalier servant" sur un rameau de l'arbre, sous les pieds d'Abbia, il dispose des mêmes attributs que les autres, barbe, couronne, collier de chaîne, épée, sceptre, vêtements à crevés, mais il ne désigne pas le ciel du doigt, se contentant de lever les yeux d'un air pensif. On ne lit aucune lettre sur ses vêtements.
Ozias, ou Osias, ou Azarias, fut le dixième roi de Juda de -783 à -740. Son règne fut aussi prospère que celui de Salomon et sa conduite, sous les admonestations du prophète Zacharie, fut pieuse et fidèle à Yahvé. Mais "lorsqu'il fut puissant, son cœur s'éleva pour le perdre. Il pécha contre l'Eternel, son Dieu, il entra dans le temple de l'Eternel pour brûler des parfums" (Second Livre des Chroniques, 26,16), ce qui était le privilège des prêtres : pour s'être emporté contre les sacrificateurs consacrés, il fut frappé au front de la lèpre;" il fut lépreux jusqu'au jour de sa mort, et il demeura dans une maison écartée comme lépreux." C'est son fils Jotham qui prit sa place à la tête de la maison du Roi.
En regardant bien, on peut voir un anneau tuméfié rond à la racine du nez du visage d' Ozias ; c'est le remords qui le mord. On comprend son regard triste.
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12°) Case C4 : le roi Assa.
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Son étiquette le nomme en inversant les S. Ses vêtements sont prodigues en inscriptions, dont il garde le secret :
- sur le camail rouge aux motifs blancs gravés, on lit : NE et NOMINID. On peut faire dériver ce nominid, attesté en latin au IIIème siècle, de nomenis, ou bien le rapprocher du MNIB trouvé en A1 ; qu'en faire? Les N sont rétrogrades, bien-sûr.
- sur la manche droite, MNEO, et sur la manche gauche ONBRVSO , qu'on peut rapprocher du latin umbrosa, la pénombre. Le N de MNEO est conforme, celui de ONBRVSO est rétrograde.
- sur le galon de la tunique, PATERNOS(T) ...NIBID, avec N rétrogrades et lettre d en onciale. Le premier élan est de lire le début du Pater Noster (qui es in caeli, sanctificetur nomen tuum), mais le NIBID ne s'y intègre pas.
Assa ou Asa est le fils d'Abia, le petit fils de Roboam, et le père de Josaphat ; il a régné 41 ans, quarante-et-une année de bons et loyaux services auprès de l'Eternel son Dieu, sans un faux pli, sans un mouvement de colère ou de prétention pour l'entacher de la lèpre, rien que de louables persécution contre les hiérodules (un mot toujours plaisant à placer), de destruction des autels et stèles en l'honneur d' Ashera, de Baal, du soleil et de la lune et de toutes les figures de l'horoscope.
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Cinquième registre : les rois Josaphat, Abia et Manassé.
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13°) Case A5 : le roi Josaphat.
Inscription:
- JOSAPHAT, à noter le h en onciale.
- NOBI
- sur l'écharpe violette : PTER(M)18LDI
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14°) Case B5 : le roi Abia.
La broche qui orne son chapeau est gravée sur verre rouge, ce qui est un travail original avec les quatre pois qui l'encadrent.
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Inscriptions :
-ABIA et le deux point.
-sur le galon de la tunique : (O)IRANT BE (I)MODPES
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15°) Case C5 : le roi Manasses.
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Inscriptions :
-MANASSES et non Manassé.
- collier : NRM(IO)
- galon de tunique : C (inversé) ILONSO MD ANTOIH:IBIVOT, si j'interprète le S inversé et couché comme une ponctuation. Qui trouvera un verrier du nom d' Ilonso Antoine Ibiuot ?
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Le sixième registre : la Vierge, le Christ en croix et saint Jean.
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16°) Case A6 : la Vierge.
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17°)Case B6 : le Christ.
Le titulus semble récent; le bras droit a du être restauré. Les anges de quatre couleurs sont les mêmes que ceux du vitrail de Kerfeunteun.
On peut admirer le traitement en grisaille du visage, et l'emploi de la sanguine dans son indication idéale.
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Il faut remarquer combien le peintre a soigneusement et abondamment montré le sang qui s'écoule des plaies des mains, des pieds, de la tête couronnée d'épines, et du flanc droit.
Lors d'une visite, j'entendais une touriste (les autres visiteurs des sites sont toujours des touristes) demander à son mari si cette plaie signifiait que le cœur du Christ était placé à droite. " Sans-doute" répondit prudemment le conjoint.
Précisons donc que cette plaie est conforme au texte de l'évangile de Jean 19, 31-34:
Comme c'était la Préparation, les Juifs, pour éviter que les corps restent sur la croix durant le sabbat - car ce sabbat était un grand jour-, demandèrent à Pilate qu'on leur brisât les jambes et qu'on les enlevât.
Les soldats vinrent donc et brisèrent les jambes du premier, puis de l'autre qui avait été crucifié avec lui.
Venus à Jésus, quand ils virent qu'il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes.
Mais l'un des soldats, de sa lance, lui perça le coté et il sortit aussitôt du sang et de l'eau.
La tradition veut que ce coup de lance ait porté sur le flanc droit, elle dit aussi que le soldat se nommait Longin, que c'était un centurion, et qu'il se convertit.
On peut remarquer aussi que la croix semble issue du tronc de Jessé, naissant comme sa branche maîtresse à la division de deux branches latérales.
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La peinture de cet écoulement sanguin ne relève pas d'une tendance morbide, mais d'une vénération des "Cinq Plaies" et d'un courant de méditation spirituelle sur le Sang du Christ, très répandu depuis le Moyen-Âge mais qui reste très important à la Renaissance en Finistère notamment pour les sculpteurs de calvaires.
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18°) Case C6 : Saint Jean.
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Il s'agit de Saint Jean l'Évangéliste, le disciple préféré de Jésus. On remarque qu'il est assis sur un rameau de l'arbre de Jessé.
Inscriptions:
- sur l'encolure du manteau : M...IPOI
- sur le galon du manteau :à droite : N..IIP.O...PIORHT: IRI.VOP..
à gauche : NOV:RI ou NOVSRI
-sur le galon de la robe bleue : OSPRdEN.
Tout cela reste incompréhensible ; je remarque la similitude de la séquence ORTH : IRIVO avec celle de Manessé en case C5 : ANTOIH : IBIVO, avec le même H au graphique particulier.
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Le tympan.
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19°) soufflet, ange à la lyre.
On constate que presque toute la peinture au jaune d'argent est partie.
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20°) Tympan, ange avec luth.
Là encore, le jaune d'argent n'a pas tenu, sauf pour la belle boucle d'or, peut-être gravée.
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21°) Soufflet, élément central : cœur enflammé (1994).
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C . Une particularité technique: l'utilisation de verres gravés.
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a) le verre rouge plaqué ; le vitrail gravé.
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Un vitrail est fabriqué par l'ajustement de verres blancs ou colorés, épais de 1,5 à 5 mm qui sont ensuite peints à l'aide de "grisaille" avant d'être associés entre eux au moyen de baguettes de plomb. Les verres colorés sont, ici, de 8 teintes : bleu-clair, bleu foncé, violet, vert pâle, jaune, rose et rouge.
Le verre, un mélange de sable et de potasse auquel on ajoute depuis le Xe siècle de la chaux, est coloré par l'adjonction à la pâte de verre d'oxydes métalliques : sels de cobalt du "bleu de Chartres"; oxyde de cuivre pour le vert, le jaune ; oxyde de manganèse pour le pourpre, avec des teintes différentes selon la concentration et la température de cuisson. On obtient ainsi des verres teintés dans la masse. Le verre rouge est obtenu avec le protoxyde cuivrique, mais avec une teinte si foncée qu'il faut utiliser des verres très fins pour que la couleur soit suffisamment claire ; dés lors, ce verre est trop fragile, et on le plaque sur un verre transparent. En outre, ce verre rouge n'est pas coloré dans la masse.
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Si l'artiste veut faire figurer des détails de couleur qu'il ne peut peindre en grisaille, il doit découper un verre coloré et le sertir de plombs, ce qui représente un gros travail ; impossible d'écrire des lettres, ou de décorer un vêtement avec des motifs réguliers de cette façon.
Pour palier à cette difficulté, les verriers eurent l'idée de décaper par abrasion la couleur rouge des verres plaquées pour créer des motifs transparents ; le verre est gravé au tour (dit encore "à l'archet"),comme on le faisait pour graver le cristal de Bohème avec une roue dentée et un mélange huile-eau-abrasif pour réaliser des motifs : lignes droites, pois, formes géométriques.
Si on en trouve les premiers exemples au début du XIVe, le verre rouge gravé ne devint répandu qu'à la fin du XVème siècle.
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b) la peinture au "jaune d'argent".
Au XIVe siècle, avant la "découverte" du verre rouge gravé, est apparu une nouvelle façon de colorer un verre blanc sans devoir découper et sertir de plomb une nouvelle pièce : l'application sur la face externe de la vitre d'un "cément" de sulfure (ou de chlorure ou de nitrate) d'argent, en quantité si minime qu'on le mélange à de l'ocre pour faciliter l'application au pinceau, ocre qu'on retire après cuisson. Les sels d'argent réagissent chimiquement avec les composants du verre et donnent des teintes jaunes, orangé ou ambre si facilement qu'à partir de là, tous les personnages eurent tendance à être blonds ! Engrand le Prince est connu comme l'un des plus talentueux utilisateurs de ce jaune d'argent.
Cette peinture, lorsqu'elle est appliquée sur le verre gravé, étend le registre de couleur des motifs gravés.
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c) L'article de Roger Barrié.
En 1976, Roger Barrié (que nous retrouverons case C3) fait paraître Les verres gravés et l'art du vitrail au XVIè siècle en Bretagne Occidentale, in Annales de Bretagne et des Pays de l'Ouest, Tome 83, n°1, 35-44. Il y dresse la liste des verrières à verre gravé du Finistère, retrouvé en onze sites, dont l'église Notre-Dame de Confort à "Meilars". Étudiant les motifs gravés, il recense des liserés simples ou doubles, des pois, des fuseaux, des mouchetures, des carrés et des bonnets, et note à Confort l'emploi des mouchetures et les lignes. Il constate que le recours à la gravure survient lorsque le verrier veut souligner la "somptuosité" d'une scène : le thème des rois de Juda est l'occasion d'y recourir pour rendre compte du faste des costumes royaux.
En conclusion, Roger Barrié écrit :" A partir de 1530-1540, les ateliers bretons ont usé avec succès de la gravure des verres doublés, surtout pour enrichir les effets colorés de leur production, bien qu'il faille reconnaître un certain épuisement à la fin du siècle" ..." la verrière de l'Arbre de Jessé à Confort fait sentir la limite du procédé[...] avec le risque de détruire la signification même de l'objet ou du personnage dans un éclaboussement de vibrations colorées", et cela d'autant plus que les verres gravés ont mieux vieillis que les verres peints et gardent une netteté gênante.
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d) ma visite à la recherche de ce rouge gravé :
Il n'est pas nécessaire de rechercher longtemps ces verres rouges aux découpes rondes jaunes et blanches dont la régularité des bords signe le travail de gravure : je les retrouve sur 10 des 18 panneaux de la vitre maîtresse de Confort, sous le forme de mouchetures comme l'a vu R. Barié ( 5 panneaux) et de liserés bordant les vêtements ( 7 exemples), mais aussi de pois (Joram, Manassé) et de fuseaux stylisant les "crevés" des costumes renaissance ( 4 exemples, David, Abia, Manassé et Josaphat), déployant donc toute la "grammaire" décrite par R. Barrié sur le Finistère. Ce sont tout-de-même les mouchetures qui prédominent, utilisées pour le grand dais qui réunit les trois panneaux du registre inférieur, pour la robe de Jessé, les manches de la donatrice, le camail de Joram, ou le manteau d'Acham.
L'utilisation de la gravure pour dessiner des croisillons d'ornementation de manche et surtout pour tracer des inscriptions (NOBI sur Josaphat, NOMINID sur Assa) est plus originale.
Enfin de nombreuses zones gravées ont été laissées blanches ( ou bien, comme l'indique R. Barié, la peinture n'a pas prise), mais certaines (manche et coiffure d'Abia) sont traitées au sulfure d'argent.
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D. La peinture du verre : grisaille et sanguine.
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a) la technique :
Lorsque le verre n'est pas gravé ou coloré au jaune d'argent il est peint sur la face interne avec la "grisaille", peinture vitrifiable faite d'un mélange d'oxyde de fer ou de cuivre comme pigment, et de poudre de verre comme fondant qui sera provisoirement associé à un liquide (vin, vinaigre, urine) et un liant (gomme arabique) pour faciliter l'application au pinceau. Après cuisson à 650°, on obtient un résultat résistant et durable.
Les techniques médièvales du vitrail ont été remarquablement décrites par un moine du XIIe siècle, Théophile, dans son Schedula diversum artum. Il explique dans ses chapitres 19 et 20 que chaque trait doit être exécuté en trois traits d'épaisseur et de valeurs différentes : prenons en exemple le sourcil, ou la lèvre, on effectuera un trait opaque principal avec la grisaille noire, le contour ; et deux traits avec un lavis plus ou moins foncé mais moins sombre que le trait de contour, pour les ombres et les demi-teintes, les modelés. C'est la technique des "trois couleurs pour les lumières du verre", complétée par des jeux de traits paralléles plus fins ou des hachures qui rendent le volume. Les contours sont tracés au pinceau aux poils longs et fins. Les modelés en lavis sont passés aux pinceaux aux poils courts et fournis nommés "putois" , voire en utilisant les poils de martre ou d'écureuil.
Au XV et XVIe siècle le travail des modelés évolue, et on passe un lavis uniforme qui, une fois égalisé en grandes plages au blaireau, va faire l'objet d'enlevage sur la grisaille juste sèche à l'aide de brosses dures en soies de porc, de pointes de métal, de bois ou de plume.
Au XIVe siècle, on dispose de trois sortes de grisailles, noir, brun et sépia ; au XVe, en plus de grisailles rousses, rouges ou noires, des grisailles colorées sont disponibles, nommées "sanguines " et "couleur bois".
Entre "grisaille" et "émail", les céments à base d'hématite (sanguine, du brun chaud au rouge vif) ou de peroxyde ou sulfate de fer ( jeancousin, du rosé au brun chaud) sont utilisés sous le nom de "carnation" pour réaliser les chairs des visages, le modelé d'une chevelure ou d'une barbe rousse, le volume des parties dénudées du corps, les mains.
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b) l'application au vitrail de Confort-Meilars :
Le seul but de ces notes de mes lectures est d'étudier à leur lumière les visages des rois de Juda (et des prophètes) de l'Arbre de Jessé : d'y apprécier le travail de grisaille, la technique des trois traits de Théophile, les contours et les modelés, l'enlevage et l'utilisation des carnations:
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L'un des plus beaux visages, et l'une des barbes les plus rousses : celui de Salomon :
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Superbe aussi : Assa :
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Isaïe :
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Jérémie :
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Joram :
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Manessé :
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E. Les lettres rétrogrades ou inversées.
a) Sur les phylactères:
Douze noms de rois, et deux citations de la Bible sont visibles sur des rouleaux. L'un d'entre eux, Ezechias, est contemporain et sort de mon étude. Parmi les autres, toutes les lettres N et une partie des lettres S sont écrites "à l'envers" ou, plus justement, de façon rétrograde : soit trois N (Manassés, Joatan, Salomon) et 7 S ( Manassés, Assa, et Jessé dans la citation d'Isaïe).
Le titulus de la croix du Christ porte INRI sans inversion du N, mais l'inscription semble récente.
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b) sur les vêtements :
Parmi les lettres inscrites sur les vêtements, tous les N (au nombre de 28) sont rétrogrades. Des V sont inscrits pointe vers le haut.
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Le thème de l'arbre de Jessé.
Je redonne ici, pour la commodité du lecteur, ce que j'ai déjà exposé dans mon article sur l'arbre de Jessé de Kerfeunteun à Quimper, avec lequel ce vitrail vient en comparaison : Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de la Sainte-Trinité à Kerfeunteun :
voir aussi : L'arbre de Jessé de l'église Notre-Dame de Saint-Thégonnec.
Ce thème iconographique de l'Occident chrétien médiéval se développe au XIe siècle ( il est habituel d'y voir l'influence de Suger) en la cathédrale Saint-Denis où un premier vitrail de 1144 sert de modèle à celui de la cathédrale de Chartres en 1145-1150. Le thème de l'arbre de Jessé devient populaire et se répand au XIIe siècle dans les verrières, les Bibles et Psautiers ou en sculpture, et ne déclinera qu'au XVIe siècle après la Contre-Réforme.
Ce qui est l'ancêtre des arbres généalogiques est né de l'application d'une formule de l' Ancien Testament dans la bouche du prophète Esaîe (ou Isaïe) à la généalogie de Jésus dans les Évangiles. La phrase d'Esaïe est celle-ci (en latin puisque c'est ainsi qu'on l'a trouve inscrite sur les vitraux): Esaïe, 11, 1-2 et 11, 10.
Egredietur virga de radice Jesse et flos de radice ejus ascendet.
" Un rejeton sortira de la bouche de Jessé, un surgeon sortira de ses racines.Sur lui reposera l'esprit de Yahvé, esprit de sagesse et d'intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte de Yahvé"
" Ce jour-là, la racine de Jessé, qui se dresse comme un signal pour les peuples sera recherchée par les nations et sa demeure sera glorieuse " (Bible de Jérusalem).
le texte latin de la Septante parle d'un Isaï, mais comme on peut confondre cet Isaï, le père de David, un berger ou éleveur ovin de Béthléem, avec le prophète Isaïe, le nom de Jessé, traduction grecque d'Isaï, a été préféré pour le désigner.
Au IIe siècle Tertullien donna l'interprétation théologique suivante : "la branche qui sort de la racine, c'est Marie, qui descend de David. La fleur qui naît de la tige, c'est le fils de Marie."
Dans les Évangiles, deux textes proposent une généalogie de Jésus et détaillent par quelle filiation il est "fils de David, fils d'Abraham" : Matthieu I, 1-17 (soit l'incipit de l'Évangile de Matthieu), d'Abraham à Joseph, l'époux de Marie ; et Luc, III, 23-28, d'Adam à Joachim, père de Marie. Les généalogies sont donc différentes et divergent à partir de David, Matthieu optant pour la descendance de l'un des fils de David, le roi Salomon alors que Luc choisit la descendance de Nathan, autre fils de David.
Matthieu faisant passer sa filiation par Joseph, cela posait un problème ardu aux théologiens, non pas parce que Joseph "ne connût point Marie", car le lien agnatique attribue la filiation à un enfant adopté, mais parce que cela donnait un rôle effacé à Marie, censée être "la fleur qui naît de la tige". Au Moyen-Age, le culte de Joseph est quasi inexistant, on ne rencontre ni toponyme, ni chapelle qui lui soient dédiés, pas d'avantage de représentations artistiques en dehors des Nativités qui n'apparaissent qu'au XIIIe siècle, il n'a pas de culte officiel avant le XVe siècle, est absent des prédications, et survit dans l'ombre de Marie jusqu'à ce que Gerson puis les franciscains lui donnent une place à part entière. Rien à voir avec le Saint Joseph chef de la Sainte Famille qui a été si honoré au XIXe et au XXe siècle, où tant de garçons ont été prénommés de son nom, et tant de filles baptisées Marie-Joseph ou Joséphine, et sa fête le 19 janvier n'a été instituée qu'en 1480, pour ne devenir fête de précepte qu'en 1621. Absent ou transparent au Moyen-Age, il acquiert une place ambiguë à la fin de cette période, celle d'un vieillard saturnien, d'un travailleur manuel rustre, un béjaune qu'on affuble de la couleur jaune ou de rayures (Michel Pastoureau) pour monter en dérision sa place de dindon de la fable, voire de mari trompé.(Paul Paysan, l'image ambiguë de Saint Joseph à la fin du Moyen-Age, Médiévales, 2000, volume 19 n° 39: 96-111)
Feste n'a en ce monde-cy
Mais de lui
va le cri :
c'est Joseph le rassoté. (Eustache Deschamps (1346-1406) Oeuvres complètes)
Pourtant, c'est la généalogie de Matthieu que les artistes médiévaux préférèrent, et chacun accepta de ne pas voir Joseph, mais Marie se placer au sommet d'une généalogie issue de Jessé par Salomon. C'est donc celle que je vais développer . Elle s'étend sur quatorze générations d'Abraham à David, puis quatorze générations de David à la déportation à Babylone, jusqu'à Jéchonias, et sur quatorze autres générations encore de Jéchonias et ses frères jusqu'à Jacob, puis Joseph. Bien-sûr, les miniaturistes et les verriers ne représentèrent pas les quarante-deux aïeuls du Christ, et choisirent parmi les rois de Juda en un florilège variable selon chacun.
Matthieu I, 1 : Généalogie de Jésus-Christ, fils de David, fils d'Abraham :
I, 2 : Abraham engendra Isaac ;Isaac engendra Jacob ; Jacob engendra Juda et ses frères.
I, 6 : ...Isaï engendra David ; David engendra Salomon de la femme d'Urie.
I, 7 : Salomon engendra Roboam ; Roboam engendra Abia ; Abia engendra Asa.
I, 8 : Asa engendra Josaphat ; Josaphat engendra Joram ; Joram engendra Jozias.
I, 9 : Ozias engendra Joatham ; Joatham engendra Achaz : Achaz engendra Ezèchias.
I, 10 : Ezéchias engendra Manassé ; Manassé engendra Amon ; Amon engendra Josias
I, 11 : Josias engendra Jéchonias et ses frères, au temps de la déportation à Babylone.
I, 12 : Après la déportation à Babylone, Jéchonias engendra Salathiel. Salathiel engendra Zorobabel.
[...]
I, 15 : Eliud engendra Eléazar ; Eléazar engendra Matthan ; Matthan engendra Jacob.
I, 16 : Jacob engendra Joseph, l'époux de Marie, de laquelle est né Jésus, qui est appelé Christ.
I, 16 : Il y a donc en tout quatorze générations depuis Abraham jusqu'à David, quatorze générations depuis david jusqu'à la déportation à Babylone, et quatorze générations de la déportation à Babylone jusqu'au Christ.
L'idée forte est d'associer les deux textes pour créer une métaphore, celle de l'arbre qui croît verticalement et dont chaque rameau donne, comme un fruit, un ancêtre, mêlant une représentation originale du temps orienté vers le haut et animé d'une croissance et d'un projet à celle de la transmission générationnelle. Cet arbre généalogique qui nous est si familier et cette conception linéaire et orientée du temps n'a rien d'évident en soi mais construit un de ces paradigmes sur lesquels sont bâtis notre pensée occidentale. En même temps, elle rassemble en une seule image une synthèse de la théologie chrétienne, du projet de Dieu dans la continuité/rupture entre Ancien et Nouveau Testament, et de la réalisation des prophéties bibliques dans la personne du Christ rédempteur par sa mort sur la Croix.
La même idée est développée sous une forme iconographique proche dans la Légende de la Vraie Croix, telle qu'elle est représentée par exemple par Pierro della Francesca à Arezzo vers 1450. Dans le Paradis poussait l'Arbre de Vie ; lorsque Adam et Ève en furent chassés, et lorsqu' Adam mourût, l'archange Michel apporta une graine de cet Arbre que Seth fils d'Adam plaça dans la bouche de son père, pour le racheter du péché originel. De la graine poussa un arbre, sur la tombe situé à Jérusalem. Salomon fait abattre l'arbre pour en faire une poutre pour le Temple, puis cette poutre est réutilisée pour bâtir un pont à Siloé, avant d'être enfouie en terre. C'est cette poutre qui est utilisée pour dresser la Croix du Christ, plantée sur le Golgotha (araméen gulgulta, le crâne) : sur la tombe et le crâne d'Adam. Ainsi la mort de Jésus sur cette croix-arbre vient-elle racheter Adam et sa race du péché.
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SOURCES ET LIENS.
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—ABGRALL (Jean-Marie), 1904
— COUFFON (René) & LE BARS (Alfred), 1988, Notices de Meilars-Confort.
http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/MEILARS.pdf
— GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2005, Les Vitraux de Bretagne, Corpus vitrearum vol. VII, Presses Universitaires de Rennes, page 147.
— LE BIHAN (Jean-Pierre), blog
http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-16659536.html
— PARCHEMINOU (Corentin), 1933, Meilars-Comfort, son hitoire, ses monuments, BDHA,page 90
https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/295fd408ca344ed8913a9ae63b8516cd.pdf
— ROLLAND (abbé J. )1922, La chapelle Notre-Dame de Comfort, Saint-Brieuc.
http://www.infobretagne.com/meilars-confort-chapelle.htm
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