Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais. La Déposition, en baie n° 0.
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Voir :
L'églse Saint-Étienne :
- Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais. Adam et Ève chassés du Paradis.
- Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais. La Déposition, en baie n° 0.
- Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Saint-Etienne de Beauvais. Baie n°5, 1522.
Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais baie n° 6, Le Jugement Dernier (vers 1522)
- Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais I : la baie n°9.
- Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais . Baie n°12, La Fontaine de Vie. (1524)
- Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais. La baie n° 14, le Baptême du Christ, et sainte Barbe. 1550.
- Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais : la baie n°19 de Notre-Dame de Lorette.
- A la date d'aujourd'hui. (13 novembre 2015)
La cathédrale :
- Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la cathédrale de Beauvais.
- Le vitrail d'Engrand Leprince de la cathédrale de Beauvais : vitrail dit "de Roncherolles" . I. Généralités. (1522)
- Le vitrail d'Engrand Leprince de la cathédrale de Beauvais : vitrail dit "de Roncherolles" dans la chapelle du Sacré-Cœur. Baie 25. II. Saint Christophe dévisagé.
- Saint Jean à Patmos : la verrière de la baie 12 de la cathédrale de Beauvais.
Beauvais :
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La baie n°0 occupe, comme son numéro l'indique, le centre de la chapelle axiale du chœur, chapelle à cinq pans qui fut désignée sous le nom de Chapelle de la Vierge et qui est connue aujourd'hui sous celui de Chapelle du Saint-Sacrement. Dans cette abside, cette fenêtre est encadrée par la baie n°1 à gauche, les Scènes de la Vie du Christ, et par la baie n°2 à droite, les Scènes de la Vie de la Vierge et de la Vie du Christ, pour réaliser un triptyque cohérent centré sur le Fils de Dieu et sa Mère, alors que les autres baies latérales sont consacrées au culte des saints.
Elle se distingue des autres par la simplicité de sa seule lancette en plein cintre. Mesurant 1,50 m de haut et 1,20 m de large, elle est divisée par quatre barlotières horizontales et trois verticales en 12 panneaux, mais elle se lit selon deux registres : celui du bas n'occupe qu'un quart de la hauteur et présente un couple de donateurs, et celui du haut montre, non pas une "Mise au tombeau" ni une "Déposition", comme on peut le lire, mais une Déploration.
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REGISTRE SUPÉRIEUR. DÉPLORATION.
Le Christ mort est allongé sur un linceul au pied de la croix, avec Joseph d'Arimathie à sa tête, et une sainte femme à ses pieds . Marie est debout près de lui, en manteau bleu et robe rouge, mains jointes, éplorée. Saint Jean l'évangéliste est à sa droite, bien identifiable à son visage imberbe et à son manteau rouge. Vêtu d'une robe au riche tissu damassé d'or, il croise les bras sur sa poitrine et sa posture à demi penchée témoigne de son affliction. Le troisième personnage, qui lui fait face à gauche de la Vierge, est plus difficile à identifier. Je la considère comme Marie-Madeleine, en raison de la richesse, ici exubérante, de sa mise, en raison de ses cheveux blonds qui s'échappent de son escoffion à couronne et à huves, de ses bijoux en or et du collier large à angelots qui recouvre ses épaules, des crevés de ses manches et de son manteau damassé au revers moucheté. Certes, ce sont bien là les goûts raffinés qui la caractérisent avant qu'elle ne s'adonne au repentir et à l'ascèse dans une grotte de Sainte-Baume ou devant une bougie à la mèche fumeuse. Mais le peintre y a été un peu fort, et, ce faisant, il s'est trahi. Ce ne peut être qu'un membre de la famille Le Prince, Engrand ou quelqu'un des siens, car aucun autre verrier ne se livrerait à un tel exercice de style au jaune d'argent. On notera au passage que les fuseaux blancs des crevés sont réalisés par gravure d'un verre rouge doublé.
En arrière-plan, un paysage urbain représente symboliquement Jérusalem.
ce vitrail est considéré comme étant inspiré voire copié de la Déploration du Christ ou Glimm Lamentation d' Albrecht Dürer (vers 1500) conservé à l' Alte Pinakothek de Munich. Pourtant, les différences sont si frappantes que je n'ai peut-être pas trouvé la source à laquelle il est fait allusion.
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Sainte Marie-Madeleine.
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La luxuriance des étoffes de la sainte éclipserait presque les remarquables portraits de femmes éplorées et l'art avec lequel le drapé du voile est rendu par des nuances de grisaille : ce drapé devient une extériorisation du tremblement spasmodique des sanglots réprimés et du ruissellement tout intérieur des larmes.
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REGISTRE INFÉRIEUR : COUPLE DE DONATEURS.
De chaque coté d'un écu présenté par deux angelots, un donateur et une donatrice sont agenouillés à leur prie-dieu recouvert d'un drap bleu damassé et qui porte leur livre d'Heures. Mains jointes, ils participent par un exercice de dévotion à la souffrance de Marie devant son Fils, par cette spiritualité de la compassion (souffrir-avec) et ce culte marial qui se sont développés depuis le XII-XIIIe siècle. C'est sans-doute la récitation intérieure et la méditation sur chaque strophe du Stabat Mater dolorosa :
Elle était debout, la Mère, malgré sa douleur,
En larmes, près de la croix ,
Tandis que son Fils subissait son calvaire.
Alors, son âme gémissante,
Toute triste et toute dolente,
Un glaive transperça.
Qu'elle était triste, anéantie,
La femme entre toutes bénie,
La Mère du Fils de Dieu !
Dans le chagrin qui la poignait,
Cette tendre Mère pleurait
Son Fils mourant sous ses yeux.
Les armoiries d'azur aux trois roses d'argent, à la cordelière nouée autour d'un annelet d'or et à la lettre D (l'autre initiale étant manquante) n'ont pas été attribuées, et sont peut-être des armes parlantes de fantaisie.
On apprécie aussi sur ce cliché la minutie avec laquelle le linceuil a été décoré d'une frise-labyrinthe centrée par des croix .
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C'est donc un bel exemple du talent exceptionnel d'Engrand Le Prince et de son atelier : on retrouve ici tout ce qui le caractèrise : les fond bleus peints à la grisaille d' architectures fantastiques, les admirables voiles des saintes femmes, la beauté des coloris, la qualité des brocarts , l' harmonie de la composition, et le registre du jaune d'argent déployé du l'orange flamboyant au jaune pâle.
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SOURCES ET LIENS.
— Les vitraux de l'église Saint-Etienne sur le site de l'Association Beauvais Cathédrale ABC :
http://www.cathedrale-beauvais.fr/nouveausite/saintetienne/vitraux/vitrauxste.html
— Le site www.patrimoine-histoire :
http://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Beauvais/Beauvais-Saint-Etienne.htm
— Wikipédia :
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89glise_Saint-%C3%89tienne_de_Beauvais
—Site therosewindow
http://www.therosewindow.com/pilot/Beauvais-st-etienne/table.htm
— CALLIAS-BEY (Martine) , Véronique CHAUSSÉ , Françoise GATOUILLAT ,Michel HÉROLD, 2001, Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum ; Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Commission régionale Haute-Normandie. Nombreuses pages sur l'atelier Leprince, 48-49 etc.
— DANJOU (1847), Note sur les vitraux de l'église Saint-Étienne de Beauvais, Société académique de l'Oise. Mémoires de la Société académique d'archéologie, sciences et arts du département de l'Oise. 1847 (T1) page 62.
http://visualiseur.bnf.fr/ark:/12148/cb32813221g/date1847
— DÉNOIX (Fanny Descampeaux Dénoix des Vergnes ) Beauvais ...Description matérielle : In-18, III-194 p. Édition : Beauvais : tous les libraires , 1868. 2e éd., page 125 et suivante.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65168165/f138.image
— HÉROLD (Michel), 1995, L'atelier des Leprince et la Normandie, Vitraux retrouvés de Saint-Vincent de Rouen , Rouen, musee des beaux-arts , 190 pages, p. 44-5
— LAFOND (Jean), 1943, Pratique de la peinture sur verre à l'usage des curieux suivi d'un essai sur le jaune d'argent et d'une note sur les plus anciens verres gravés [s. n.] (Rouen)
— LEBLOND (Dr Victor),1921, L'art et les artistes en Île de France au XVIe siècle d'après les minutes notariales . Beauvais & Beauvaisis. Paris : E. Champion ; Beauvais : Imprimerie départementale de l'Oise, 1921. 352 p.-VII, VII pl. ; 25 cm.
— LEBLOND (Dr Victor) LAFOND (Jean) 1929, L'Eglise Saint-Etienne de Beauvais. / [Dr.] V[ictor] Le Blond. étude sur les vitraux par Jean Lafond. Paris. 1929 38 grav. et 1 plan pages 65-118.
— LEBLOND , 1924, Nicolas le Prince, verrier et tailleur d'images : un artiste Beauvaisin au XVIe siècle / Dr Victor Leblond
— PERROT (Françoise), GRODECKI (Louis), 1978, Les vitraux de Paris, de la région parisienne, de la Picardie et du Nord-Pas-de-Calais , Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France Centre national de la recherche scientifique, 1978 - 275 pages
— SAINT-GERMAIN (Stanislas de ), 1843, Notice historique et descriptive sur l'église Saint-Etienne de Beauvais page 61 et suivantes.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6517959k.r=%22saint-etienne%22