Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
27 août 2021 5 27 /08 /août /2021 08:12

L'enclos paroissial de Saint-Herbot en Plonevez-du-Faou. IX. Le calvaire (granite et kersantite, Maître de Guimiliau) de 1575.

 

.

 

Voir sur la chapelle de Saint-Herbot :

.

.

PRÉSENTATION.

Ce calvaire a été érigé sur le placître au sud de la chapelle lors du gouvernement de Mathieu Cravec, qui fut prêtre-gouverneur de la fabrique de Saint-Herbot de 1575 à 1595, comme en témoigne l'inscription portée sur le pourtour de la base octogonale, en débutant la lecture par le coté nord tourné vers l'église :

CEST CROIX FVT FAICTE N LAN 1575 M[AISTRE] MATHIEV CRAVEC PG [PRETRE GOVVERNEVR] … XXV. (relevé par Castel et Ducouret).

Les dernières lettres sont lues (atlas) NHMNVIXXV, mais restent incomprises.

.

Il a été décrit par René Couffon en 1953, par Yves-Pascal Castel en 1980, par Jean-Jacques Rioult en 2009, et enfin par Emmanuelle Le Seac'h en 2014. Cette auteure consacre deux pages entières à sa description, et en attribue la réalisation à l'atelier du Maître de Guimiliau, lequel exécuta ensuite le grand calvaire de Guimiliau entre 1581 et 1588.

.

Stylistique.

Le style du Maître de Guimiliau est ici à ses début ; il donne à ses personnages des yeux globuleux, plus ou moins en amande, avec un double contour formant les paupières inférieures qui  disparaitra à Guimiliau, mais qui sera repris par l'émule du Maître vers 1589. Ces yeux de batracien disgracieux ressemblent parfois à des olives dénoyautées, parfois à des pruneaux fendus.

Les visages et les attitudes frisent la caricature et même les personnages sacrés ne brillent pas par leur beauté, car les traits sont grossiers, les nez tous identiques sont d'épaisses pyramides, le tiers médian du visage est élargi par des pommettes accentuées. Si aucun des saints personnages n'est gracieux, les diables sont carrément horribles avec des traits vultueux et gonflés de bourrelets et des rictus ad hoc.

Une autre caractéristique est l'allure longiligne excessive de Marie et de Jean au calvaire, ou des larrons, ou du visage du Christ en croix.

Bien que les décors de la Seconde Renaissance, très présents sur la clôture de chœur pourtant contemporaine (vers 1570-1580), soit absents, (et que la truculence des diableries relève plutôt de la tradition médiévale), le contexte contemporain, celui de la transition Charles IX/Henri III, s'affirme par les crevés des  culottes des larrons, dont la braguette est accentuée. Mais cet indice est faible, alors qu'il s'exprime largement sur le calvaire de Guimiliau dans la tenue et les chapeaux des soldats et bourreaux, ici absents.

.

Composition et thématique.

Si on examine la seule face principale, ce sont vingt personnages qui se présentent, rendant l'analyse de la composition laborieuse.

L'habituel croisillon est remplacé par une plateforme à quatre consoles, supportant les gibets sur ses côtés, et Marie et Jean en son centre. Cette plateforme délimite deux étages.

Sur l'étage supérieur, et principal, il faut d'abord isoler la Croix portant le Christ entourée de Marie et de Jean, des deux gibets où sont liés les larrons. Puis on repère les cinq anges autour  du Christ, quatre recueillant le sang des plaies des mains et des pieds, et un voletant et priant au dessus du titulus INRI.

À l'étage inférieur, le Christ ressuscité, assis sur un arc-en-ciel, les pieds sur le globe du Monde,  écarte les bras, entouré par deux anges qui le vénèrent : c'est le Christ du Jugement dernier, qui figurait aussi sur les calvaires de Châteaulin et d'Argol au XVe siècle.

Enfin,  les consoles sont supportées par trois anges, et un diable sous la console du Mauvais Larron.

L'association d'un Calvaire en haut et d'un Jugement dernier ou Parousie en bas forme un discours théologique sur la Rédemption, et ce discours serait, selon les auteurs, renforcé par le seul personnage qui n'a pas encore été décrit, l'homme presque nu (il porte un pagne) placé sur l'axe vertical reliant ces deux scènes, entre les anges hématophores : il représenterait l'humanité sauvée, ou un "Adam régénéré" (Castel). Mais ne peut-on y voir un Christ aux liens (très habituel sur les calvaires) , un Christ à la colonne attaché contre le fût ?

.

La face tournée vers l'est associe de haut en bas saint Herbot, patron de la chapelle et protecteur des bêtes à corne, puis une Déploration à quatre personnages (alias "vierge de Pitié" voire Pietà chez nombre d'auteurs), puis Véronique portant le voile.

Il nous reste à reprendre, compléter et illustrer cela.

 

 

 

.

Le visiteur aborde le calvaire par le sud-ouest, derrière l'enceinte du placître, munie de ses échaliers. Deux clichés anciens de F. Dagorn ici :

http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/illustration/ivr5319662900657v/7e83a5ac-42a9-4f21-bde4-76d5d675fc6b

http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/illustration/ivr5319662900655v/1382a3b5-1e1d-460e-beb6-0845f0a207d1

.

 

Le calvaire (granite et kersantite, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (granite et kersantite, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

Cette vue qui nous accueille permet de constater que deux colonnes sont placées entre la croix et les gibets. Ils servent de supports aux deux anges qui recueillent le sang du Christ. Ce détail n'est plus visible quand nous nous trouverons de face, mais nous le remarquerons encore sur la vue orientale.

Dans des calvaires antérieurs (ceux des Prigent), beaucoup d'anges hématophores (portant les calices) sont placés en diagonale entre le fût et les bras, parfois par scellement. L'utilisation de ces colonnes est parfaitement originale, et montre comment ce "Maître de Guimiliau" se démarque des autres ateliers, landernéens notamment, avec  liberté et créativité.

.

L'autre détail qui se remarque bien dans cette vue de trois-quarts, c'est le losange des deux anges supérieurs, qui volent mains jointes avec leurs ailes en faux très acérée. 

En effet, ces anges se livrent à un exercice de voltige puisque leurs pieds reposent sur une sphère tandis que la pointe de chacune de leurs ailes y maintient une tête humaine moustachue. Il faudrait savoir comprendre le message que ce logo nous adresse.

.

Remarquez aussi la croix écotée, soulignant que la croix du Rédempteur est un arbre, avec toute la symbolique chrétienne que les Pères de l'Église et sainte Hélène ont su développer. Et l'extrémité savamment feuillagée de la traverse (les "fleurons") peuvent participer de la même mystique de l'Arbre.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

.

LA FACE OCCIDENTALE. 

.

Nous voici à pied d'œuvre, tentant de dévider le fil conducteur.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

.

.

Le Crucifié.

.

Sur le corps longiligne du  Christ, le pagne est animé d'un mouvement de plis tourbillonnant qui crée une sorte de vortex central, renforcé par le tracé dynamique des côtes thoraciques et des échelons du sternum, des lignes de la musculature étirée des bras, de la torsion des pieds et, bien-sûr, du dessin du visage.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

Le goût du sculpteur pour la "ligne claire" du graphisme, au détriment de la vraisemblance et de l'effet de réel, s'affirme dans son rendu de la moustache et de la barbe sous forme de lignes rayonnantes achevées par des petites boucles. 

Cela m'a évoqué, mais je ne suis pas docteur, l'art roman, dans ses sculptures mais aussi dans ses vitraux  où la grisaille est "enlevée" du bout du pinceau avec un sens maitrisé du contraste.

Et finalement, malgré les yeux de crapaud et le gros nez pataud, j'ai fini par ressentir la spiritualité qui se dégageait de ce visage ; ce qui devait être après tout le but de l'artiste.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

 

Les anges tenant les calices.

.

L'ange "hématophore" (mais oui, j'aime le charme désuet des vocabulaires spécialisés) placé à la droite du Christ tient deux calices, l'un recueillant le sang de la paume et l'autre celui du flanc droit. 

Son collègue n'a bien-sûr qu'un seul calice, sous la paume gauche. Du coup, il place la main droite sur la poitrine, comme tout servant d'autel ou acolyte lors de l'Eucharistie. Les anges portent la tenue de ces enfants de chœur, avec la tunique plissée et bouffant sous l'effet du cordon, et l'amict, ou col formant plusieurs plis circulaires. Et on pourrait presque dire que les cheveux bouclés sur le côté et le front dégagé par la raie médiane fait partie, du moins dans l'iconographie, de cette tenue d'enfants sages.

.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

La Vierge au calvaire.

.

Elle est voilée et porte la guimpe, un manteau et une robe (serrée par une ceinture) qui descend jusqu'aux pieds. Ses mains sont croisées devant la poitrine.

Tout cela est très habituel. Mais ce qui l'est moins, c'est le corps longiligne, et les mouvements des pans du manteau en vagues de volutes s'imitant en miroir. 

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

Saint Jean au calvaire.

.

La tête semble refaite. Jean tient son livre (évangile), et sa main droite est posée sur la poitrine. Mêmes remarques que pour la Vierge.

.

 

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

Le Bon Larron.

.

Il a presque la tête du Christ, sauf les égards qu'on doit au Sauveur. Mais les épaisses arcades sourcilières, les pommettes qui tombent en bajoues et n'ont plus rien d'une pomme, les plis naso-géniens profonds comme des ornières nous le rappellent : bon, certes, mais néanmoins larron.

Il porte la culotte à crevés et à rabat triangulaire faisant office de braguette, qu'on trouve chez nous sur les calvaires et les Crucifixions des maîtresse-vitres du XVIe siècle. Ses bras sont liés en arrière sur la traverse en T du gibet, mais ses deux pieds sont libres, comme le confirmera la vue de la face orientale. Les jambes ne sont pas brisées.

Encore un point par lequel on s'écarte de l'iconographie en vigueur : ses yeux sont baissés, et il ne regarde pas le Christ. Mais n'a-t-il pas un bon sourire ? 

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

Le Mauvais Larron.

.

Il détourne franchement la tête, et tire la langue comme un vilain. Ses bras sont liés, mais aussi sa jambe gauche, et un diablotin plus hideux encore que lui est à genoux et le tire par cette corde vers les Enfers. Une petite tête apparaît entre les cuisses de ce diable : l'une de ses victimes ? Nous allons voir qu'il s'agit, hélas, de son sexe lubrique.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

.

Le Démon.

.

Sous la console de ce méchant Larron, le Diable aux ailes de chiroptère fait tout pour nous effrayer et se croit sur un Train fantôme : il a les deux cornes vrillées, les deux oreilles pointues, le visage balafré et vultueux,  la langue protruse, il est nu comme un ver, mais un ver laid et velu, son sexe est céphalisé comme celui du diablotin précédent, et il porte sur les épaules les fourches  destinées à se saisir des Damnés. Tremblez, mortels !

E. Le Seac'h fait remarquer que "sur ses yeux ronds ont été rajoutés de petites prunelles, l'une en forme de losange et l'autre cylindrique".

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

 

Le Christ aux liens et les anges hématophores.

.

Le Christ aux liens : je choisis cette interprétation car rien ne saurait justifier qu'Adam, ou l'Humain, soit en pagne les bras dans le dos. Il résume métonymiquement la Passion. C'est donc en toute logique que les anges placent sur sa tête le calice de son Sacrifice.

 

.

 

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

Le registre inférieur : la Parousie.

.

J'en rappelle la description : le Christ bras écartés montrant ses stigmates est assis sur l'arc-en-ciel, les pieds posés sur la sphère du Monde tandis que deux anges de profil le vénèrent, jambes à demi-fléchies.

Voir :

.

 

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

.

LA FACE ORIENTALE. 

.

Au sommet, l'ange descendant en piqué sur terre a les mains écartées (et non jointes comme l'ange occidental).

 

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

 

Saint Herbot.

.

 

Saint Herbot est représenté en ermite à longue barbe soigneusement peignée, tenant le bâton ou bourdon, et désignant de deux doigts  un livre ouvert. Il porte la cuculle et un camail au dessus de la bure. Ce sont les caractéristiques des cinq autres statues du saint patron, sur les porches sud et ouest, sur la tribune du coté nef et du coté chœur, et sur le "gisant" du chœur.

Mais là encore, le corps exagérément long et les flots tumultueux des plis signent le style de l'artiste.

.

 

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

.

La Déploration à quatre personnages.

.

Alors que les calvaires bretons non monumentaux comportent souvent une Vierge de Pitié (deux personnages, la Vierge et le Christ) au centre du croisillon, les calvaires de  taille et de composition plus importantes incluant de nombreux personnages dans une disposition plus théâtrale proposent plutôt au spectateur une Déploration, à quatre personnages ou d'avantage. Déjà à Tronoën vers 1470 le sculpteur accompagne la Vierge de deux anges de tendresse à ses cotés. Cela se comprend parfaitement sur le plan spatial. Ce blog ne propose qu'une recension bien incomplète de ces Déplorations des grands calvaires et ne pose cette idée que comme hypothèse. À Guimiliau, le Maître a choisi de faire figurer une Mise au Tombeau à neuf personnages, comme les Prigent l'ont fait à Pleyben (1555) et à Plougonven (1554) puis le Maître de Plougastel sur son calvaire de 1602-1604. Les Déplorations se placent donc, par leur volume spatial et leur nombre de personnages, entre les Vierges de pitié des calvaires à croisillons, et les Mises au Tombeau des 7 calvaires monumentaux.

.

Voir :
 

 

.

Une fois de plus, le corps du Christ est tout en longueur, contrastant avec la faible hauteur donnée à la Vierge agenouillée.

Le Christ, au lieu de former une ligne brisée comme sur de nombreuses œuvres, s'aligne sur une horizontale qui n'est qu'atténuée par l'inclinaison de la tête et la flexion des genoux. Les bras sont allongés le long du corps. Nous retrouvons l'intérêt du sculpteur pour le graphisme dans les lignes parallèles de la barbe, le rendu de la musculature des bras et dans le "vortex" du pagne. La barbe convexe est identique à celle de saint Herbot.

La tête est soutenue (à peine) par saint Jean, le tronc et la main gauche par la Vierge, et les pieds s'appuient sur les genoux de Marie-Madeleine.

.

La Vierge est agenouillée, ou semble plutôt assise sur ses talons tant son corps est ramassé. Les genoux enveloppés par le manteau prêtent à confusion, et E. Le Seac'h y a vu la forme d'un petit animal "peut-être un chien léchant la main de Jésus".

Son voile dessine des plis géométriques au dessus de son front, et la guimpe rayonne en plis tuyautés comme une fraise. Le sculpteur ne fait aucune concession à ses marques de fabrique et reprend pour elle les yeux en boule et le nez en poire de manière presque accentuée.

L'ensemble n'est pas en ronde-bosse, mais pour ses deux-tiers, en relief sur un fond rectangulaire.

Saint Jean, à gauche, essuie de son mouchoir ses larmes : voici l'évolution du thème des larmes bien visible des calvaires de l'atelier Prigent  un demi-siècle auparavant. Mais les trois boutons passant à travers des languettes est dans la tradition des ateliers landernéens, même si le sculpteur s'attache à accentuer les traits de tension de l'étoffe pour dynamiser son dessin.

Sainte Marie-Madeleine tient son flacon d'aromates dont elle couvre le couvercle ; c'est un pot à pharmacie creusé de godrons.

.

 

 

 

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

 

Le registre inférieur : sainte Véronique et son voile. Les anges portant les instruments de la Passion.

.

Alors que le calvaire de Guimiliau comporte une magnifique statue de Sainte Véronique, nous n'avons ici qu'un bas-relief assez pâle, même si ma photo ne lui rend pas service.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

 

L'ange présentant la couronne d'épines.

.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot. Photographie lavieb-aile 4 août 2021.

.

 

SOURCES ET LIENS.

.

 

 — CASTEL (Yves-Pascal), 1980, Atlas des croix et calvaires du Finistère. Calvaire n° 1641.

https://societe-archeologique.du-finistere.org/croix/plonevez_du_faou.html

"Plonévez-du-Faou n°1641. Saint-Herbot no 1, granite et kersantite,  7 mètres de haut. 1575. Trois degrés de plan octogonal. Socle carré d’arcatures en plein cintre: CESTE CROIX FVT FAICT EN L AN 1575 M. MATHIEV. CRAVEC PG (prêtre gouverneur) N H MNVIXXV (?). Fût à écots. Croisillon de plan complexe orné, anges, démons, Christ de l’Apocalypse avec les élus. Gibets des larrons, ange et démon aux pieds, statues: Vierge, Jean. Croix centrale fleuronnée, crucifix, anges au calice, ceux du pied posant leur coupe sur la tête de l’Adam régénéré, les autres, juchés sur des colonnes. Au sommet, anges adossés, les pointes de leurs ailes mordues par des masques. Au revers, Vierge de Pitié. Le programme iconographique établi sur la théologie de la Rédemption s’allie avec la liberté d’expression que s’accorde le sculpteur, jusqu’au seuil d’une dérision transfigurée en hiératisme." [YPC 1980]

— CASTEL (Yves-Pascal),  DUCOURET, 1966, 1972 et 1986, Dossier IA00005154 Inventaire général, région Bretagne

http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/public/annexes/IA00005154_01.pdf

 

— CASTEL (Yves-Pascal), NOVELO, 1967, Notice site POP.culture.gouv. et dossier IA00005155 de l'Inventaire.

Remarque : les notices mélangent les photos et les données sur le calvaire de Saint-Herbot avec celui du cimetière de Plonévez-du-Faou (atlas n°1682), daté de 1552.

 

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA00005155

http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/dossier/calvaire-saint-herbot-plonevez-du-faou/e902bb3d-7d28-468a-a8ec-0fbf9fbe8159

http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/public/annexes/IA00005155_01.pdf

 

— CHAUSSEPIED (Charles),1914, Notice sur la chapelle de Saint-Herbot en Plonévez-du-Faou,  Bulletin de la Société archéologique du Finistère T. XLI pages 128-139

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207714b/f191.image

— COUFFON (René), 1953,  L'église de Saint-Herbot. In: Bulletin Monumental, tome 111, n°1, année 1953. pp. 37-50

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1953_num_111_1_3732

"Croix-calvaire. — Sur la place de l'église se dresse l'une des plus intéressantes croix-calvaires du Finistère ; elle est datée de 1571. Un massif à trois gradins orné d'une plinthe bien moulurée sert de support au fût monolithe en granit figurant un tronc écoté. La base du fût est ornée de deux séries de niches superposées, sans doute destinées à recevoir les statues des apôtres, et son sommet porte une élégante  console formant nœud et décorée, sur sa face principale, du Christ-Juge en bas-relief et, au revers, du voile de la Véronique entouré d'angelots. De cette console émergent les trois croix du Sauveur et des deux larrons, ainsi que deux petites colonnettes intermédiaires servant de socles à la sainte Vierge et à saint Jean l'Évangéliste. Des angelots recueillent le sang du Sauveur et entourent la croix du bon larron, tandis que des démons veillent sur celle du mauvais. Au revers de la croix se trouve, suivant l'usage, la statue du saint patron, saint Herbot ; elle surmonte ici une Pieta encadrée de deux angelots."

 

 

— COUFFON (René), 1959, Notice de Plonévez-du-Faou, Répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper

http://backup.diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/4bc495e8ae261523262138b91718a386.pdf

 

LECLERC ( Guy), 1973  "l'église de Saint-Herbot", L'écho de Saint-Louis Châteaulin. Bulletin de l'école secondaire privée Saint-Louis. Cité par Le Seac'h, non consulté.

— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne, les ateliers du XVe au XVIIe siècle, PUR éditions. pages 275-277et 367.

— MONUMENTS HISTORIQUES.

http://monumentshistoriques.free.fr/calvaires/herbot/herbot.html

— PEYRON (chanoine), 1910, Notice, Bull. SAF page 164-167

https://societe-archeologique.du-finistere.org/bulletin_article/saf1910_0216_0242.html

— PÉRENNÈS (Henri), 1942, Monographie de la paroisse de Plonévez-du-Faou. Imprimerie bretonne (Rennes) 55 p.: ill.; 21 cm.  Pérennès Henri, “Plonévez-du-Faou : monographie de la paroisse,” Collections numérisées – Diocèse de Quimper et Léon, consulté le 19 mars 2017, http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/items/show/9799.

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/bd492284b708d27c6305fbdba8d5639a.pdf

— RIOULT (Jean-Jacques), CASTEL (Yves-Pascal), BONNET (Philippe), DUCOURET, 2010, Chapelle Saint-Herbot (Plonévez-du-Faou),  Inventaire général, région Bretagne

http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/chapelle-saint-herbot-plonevez-du-faou/7310520a-35ca-4784-91b8-578f98ea65d6

—   BONNET (Philippe), RIOULT (Jean-Jacques), 2010,  « Saint-Herbot. Chapelle Saint-Herbot », dans Philippe Bonnet et Jean-Jacques Rioult, Bretagne gothique, Paris, Picard, coll. « Les Monuments de la France gothique », 2010, 485 p.

—  RIOULT (Jean-Jacques), 2009, « Plonévez-du-Faou, chapelle Saint-Herbot », Congrès archéologique de France « Finistère 2007 »,‎ 2009, p. 207. 

"À la même époque fut érigée, dans l'enclos d'un placitre sud de la chapelle, une étonnante croix formant calvaire qui porte la date de 1575. Au sommet du fût écoté, en granit, la scène du calvaire sculptée en kersantite rassemble sans lourdeur vingt statues sur une plate-forme monolithique évidée dans ses angles et qui semble soutenue par des anges tenant les emblèmes de la Passion. Au revers de la croix, la représentation de saint Herbot au dessus d'une Vierge de Pitié rappelle une disposition fréquente sur les anciennes croix de procession."

 

 

— WIKIPEDIA 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Chapelle_Saint-Herbot_de_Saint-Herbot

https://en.wikipedia.org/wiki/Saint-Herbot_Parish_close

 

Partager cet article
Repost0
Published by jean-yves cordier - dans Sculpture Calvaires Renaissance Kersanton

Présentation

  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
  • Contact

Profil

  • jean-yves cordier
  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)

Recherche