Les sablières et la charpente sculptée de l'église de Bodilis. VI. Le bas-coté sud (Maître de Pleyben 1574, et anonyme, 1659).
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Sur les sablières de Bodilis, voir :
Les sablières de l'église de Bodilis. I. La scène des semailles et du labour (anonyme, 1567).
Les sablières de l'église de Bodilis. III. Le coté nord de la nef.
Les sablières de l'église de Bodilis. IV. Le coté sud de la nef. (Maître de Pleyben, 1567-1576).
Les entraits sculptés à engoulants (1567-1576) de la nef de l'église de Bodilis.
.Sur les autres réalisations du Maître de Pleyben, voir :
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Vous pourrez lire aussi, sur le sujet des sablières de Bretagne, les articles suivants :
Les sablières (1506-1508) de la nef centrale de l'église Notre-Dame de Grâces (22).
Les sablières (1508) du bas-coté de l'église Notre-Dame de Grâces (22).
Les sablières et les blochets de la chapelle Notre-Dame-du-Tertre à Châtelaudren.
Les sablières et les blochets restaurés de l'église Notre-Dame de Brennilis.
Quelques sculptures de l'intérieur de l'église Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle à l'Hôpital-Camfrout.
Les sablières, les blochets et les statues de l'église de Le Tréhou. I.
La charpente sculptée de l'église Saint-Yves de La Roche-Maurice. Les abouts de poinçon du chœur.
Sablières, inscriptions et pardon de la chapelle Saint-Sébastien au Faouët (56). (1608)
L'enclos paroissial de Dirinon V. Les sablières (1623), les blochets et poinçons.
Les sablières et poinçons de l'église Notre-Dame et Saint-Michel de Quimperlé.
L'intérieur de l'oratoire Notre-Dame de l'abbaye de Daoulas.
Quelques pièces sculptées de la charpente de l'église de Grâces à Guingamp. Les abouts de poinçons.
L'église de Guengat II : Statues, sablières et inscriptions.
Les sablières de la chapelle Notre-Dame-du-Tertre à Châtelaudren.
Vierges allaitantes VII: Lannelec à Pleyben (3) mobilier et statues.
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La nef de l'église de Bodilis est divisée par 8 entraits (ces poutres qui la traversent), et, entre le 4ème et le 5ème entrait, par deux blochets. Le quatrième entrait porte en son milieu la date 1567, et le sixième celle de 1576. J'ai numéroté les entraits de 1 à 8 en allant de la nef vers le chœur.
Après avoir étudié les sablières de la nef et découvert leurs éléments décoratifs déployant tout le répertoire maniériste de l'école de Fontainebleau créé par le Primatice et ses disciples et d'inspiration italienne : cuirs découpés, légumes, mascarons, satyres grimaçants, petits animaux et putti cachés dans des rinceaux, tête de lion, etc., après avoir signalé l'attribution de ces sculptures au Maître de Pleyben, actif vers 1564-1580 en Léon et Cornouaille nord, et après avoir inspecté les faces sculptées des 8 entraits, il est temps de s'intéresser aux bas-cotés.
RAPPEL GÉNÉRAL.
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"A la fin du XVe siècle et au début du XVIe siècle, Bodilis un lieu de pèlerinage très fréquenté et les donations y affluaient. En 1533, un accord intervint entre François de Tournemine, seigneur de Coetmeur, et l'évêque de Léon au sujet du droit de visite ; c'est donc vraisemblablement là la date de son érection en église tréviale.
Dans le troisième quart du XVIe siècle, en 1564, débuta la construction de l'édifice que nous voyons actuellement ; mais, à peine était-il achevé, que l'on commença à l'agrandir en élevant en 1574 sur son flanc sud une vaste chapelle. Quelques années plus tard, en 1583, les tréviens, désirant construire, comme leurs voisins de Landivisiau, un porche monumental, firent à ce sujet accord avec René de Kergorlay, seigneur de Crechgaribot et du Plessix, dont les armes timbraient le porche à démolir ; le nouveau fut terminé en 1601 divin et, le 14 septembre 1623, le chapitre de Léon accorda quelques reliques pour être déposées dans les nouveaux autels qui devaient être bénis. Au milieu du XVIIe siècle, l'on agrandit considérablement l'église. L'on abattit toute la longère nord et l'on augmenta de ce côté l'édifice d'un double bas-côté ; les dates de 1653 sur l'une des portes et de 1657 sur l'une des poutres confirment l'ampleur des travaux. L'on augmenta également l'église au sud en prolongeant en 1659 la chapelle de 1574 jusqu'au porche. Le Père Cyrille Le Pennée, carme de Saint-Pol-de-Léon, écrivait en 1647 que, si l'église fut ainsi « merveilleusement embellye selon la direction du recteur, noble et vénérable Claude de Kermenou », c'est en raison de l'affluence du peuple qui la fréquentait aux solennités de la sainte Vierge, « ce dévot lieu étant parmis les Léonais en singulière vénération et respect ». En 1663, l'on reconstruisit le quatrième pilier du côté de l'épître, auquel était fixé le jubé, pilier qu'il fallut d'ailleurs reconstruire en 1670, « après perquisition de son assise». En cette dernière année, Christophe Kerandel, maître architecte, fit divers travaux à l'église, et notamment, aidé de Jean Le Roy, dit La Pierre, son compagnon, et de Pierre Vilart, modifia le pignon de la grande chapelle sud éclairant le jubé. Une porte y fut alors percée, assez malencontreusement d'ailleurs, et les fenestrages refaits . En 1677, ce maître architecte soumettait aux tréviens le dessin de la sacristie monumentale, que ceux-ci lui avaient demandée, et se rendait à Trefmaouezan pour choisir la carrière d'où l'on tirerait la pierre nécessaire. Les travaux de maçonnerie commencèrent en 1679 et furent terminés en 1684, époque où l'on acheta en Cornouaille le bois destiné à la charpente, dont l'exécution fut confiée à Alain L'Horleach, charpentier. La couverture fut exécutée en 1686, par Noël Le Batet et son compagnon ; puis, en 1687, l'édifice fut plombé par Guillaume Le Roux, de Kerfeunteniou, la vitrerie posée par Gelin, vitrier de Lesneven, et, enfin, la croix mise en place par François Le Rest, maréchal, qui terminait ainsi les travaux de l'église actuelle. Depuis, le clocher fut restauré en 1714 sous le rectorat de messire René de Moucheron, recteur de Plougar, et plusieurs réparations opérées, dont celle, assez peu soignée, de la chapelle Saint-Jean-Baptiste.
Plan. — Primitivement, l'église comportait une nef de six travées avec bas-côtés, précédée d'un clocher-porche et terminée par un chœur à chevet polygonal. Au droit de la cinquième travée, il y avait deux ailes formant faux transept. Au nord, en effet, les corbelets supportant le long des grandes arcades la sablière de l'ancien bas-côté n'existent que dans les quatre premières travées. Ainsi que nous venons de l'indiquer, ce plan fut profondément modifié par les adjonctions de la fin du xvie et du xvne siècle, qui lui donnèrent un aspect irrégulier.
Intérieur. — L'église est du type à nef obscure. Les deux voussures des grandes arcades et de celles séparant les chapelles sud sont bien moulurées et pénètrent directement dans les colonnes lisses leur servant de supports. Celles-ci, comme dans beaucoup d'églises bretonnes, ont leurs bases circulaires reposant sur un haut socle également circulaire servant de banc ; les deux premières au nord de la. nef ont un diamètre supérieur à celui des autres (0m66 contre 0m58). Il est à remarquer qu'en bas de l'église, la première arcade, probablement à la suite d'une erreur d'implantation, retombe sur une colonne engagée dans le pignon ouest, présentant un décrochement tout à fait insolite.
Egalement, la grande arcade de la cinquième travée du côté de l'épître a sa voussure ne correspondant plus au départ de la colonne refaite en 1670. Dans le bas-côté nord, rebâti au XVIIe siècle, les différentes chapelles ne sont pas séparées par des arcades, mais par des architraves reposant sur des colonnes.
A l'exception de la petite chapelle nord s'ouvrant sur le chœur du côté de l'évangile, qui est voûtée sur croisée d'ogives, tant la nef que les bas-côtés sont couverts par un lambris apparent avec entraits et sablières. Les sablières du xvie siècle, ainsi que les têtes des blochets, sont très finement sculptées. On retrouve notamment sur les premières une scène de labourage semblable à celle de Sainte-Marie du Menez-Hom, une scène d'ivrognerie également visible à Saint-Thomas de Landerneau, et divers éléments décoratifs Renaissance à rapprocher de ceux de l'ossuaire de Pencran. Parmi les têtes de blochets, mentionnons une belle statue de la Madeleine, ainsi qu'un ange abritant le groupe de la Visitation. 11 semble que ces sablières aient été sculptées par les artistes qui travaillèrent à la décoration de la chapelle de Kerjean. Les sablières et entraits du XVIIe siècle, également très décorés, ne portent pas de scènes figurées, mais des palmettes et autres motifs décoratifs. Plusieurs des entraits sont datés et ainsi d'un grand secours pour l'étude du monument. Dans le bas-côté sud, l'un porte : « domus mea domus oracionis 1574 » ; celui de la chapelle neuve : « domus. mea. domus. oratioNIS. 1659. M. IAN. KERGUELEN RECTUR-M. Y. GAL. CURE. A. G. C. B. FABRIQUES.» Dans le bas-côté nord, l'un porte la date de 1657. Mentionnons, enfin, parmi les sculptures d'attache, deux angelots se tenant par la main et formant cul-de-lampe, ainsi qu'un bénitier Renaissance sur le second pilier sud et un grotesque au départ de l'ancien jubé encastré dans le quatrième pilier. » (Couffon)
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Sur le bas-coté nord, nous trouvons de la nef vers le chœur la chapelle des fonts baptismaux (entrait daté de 1657), les 2 travées de la chapelle de la Sainte-Famille, et la petite chapelle de Notre-Dame de Bodilis, voûtée d'ogive.
Sur le bas-coté sud, de la nef vers le chœur, trois salles lambrissées conduisent au retable du Rosaire (1669), précédent la petite chapelle Saint-Jean-Baptiste et son retable.
Le plus riche ensemble se trouve dans les trois salles de la deuxième chapelle sud, et se divise en un premier groupe oriental daté de 1574 contemporain des sablières et entraits de la nef (1567 -1576) et attribuable au Maître de Pleyben, et un second ensemble, le plus occidental, daté de 1659 et bien moins intéressant.
Je débuterai ma visite, à l'est, par les pièces placées au dessus du retable du Rosaire et je progresserai vers l'ouest. Je nomme "salle" les trois espaces lambrissés pour éviter le terme de chapelle, qui a été employé dans un sens incertain pour moi par les auteurs. Dans ma progression je nommerai les pièces de bois des sablières Sb [Sb 1 à Sb4 pour la première salle à l'est, etc.], les Blochets B [B1 à B12] les entrais E [E1 à E3] et les abouts de poinçons P [P1 à Pn].
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PREMIÈRE SALLE DE LA CHAPELLE DU ROSAIRE, BAS-COTÉ SUD.
(Note: la confrérie du Rosaire fut érigée à Bodilis en 1633).
Les blochets B1 à B4 : les quatre évangélistes.
Sb1 : Masque ; la Sainte Face, les Cinq Plaies, le Calice eucharistique.
Sb2 : Masque : Renart prêchant les poules.
Sb3 :
Sb4 : Cuir découpé ; la Lubricité ; cuir RESPICE FINEM ; l'Ivrogne à son tonneau ; Truie débondant le tonneau (proverbe: la Négligence) ; femme poursuivant la truie de sa quenouille.
L'entrait E1 : masque de femme à l'antique ; homme déféquant.
Les poinçons : P1 à P8 : P1 : homme apeuré. P2 : quatre têtes. P3, P4, P6, P7 : feuillages. P5. Couples dansants sur une boule.
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Le blochet B1. L'évangéliste saint Matthieu.
Mon identification est basée sur les pieds nus (attribut des apôtres), sur l'enfant en guise d'Homme/Ange (attribut de Matthieu dans le Tétramorphe) et sur le phylactère (texte écrit = évangile). L'absence de barbe me déroute.
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Blochet B1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Comparez avec l'évangéliste Matthieu de la chapelle de Kerjean:
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Sablière Sb1. (mur portant le retable du Rosaire, partie gauche de la corniche du lambris).
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Sablière Sb1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Masque crachant des rubans / têtes zoomorphes à langues accouplées.
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Sablière Sb1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Deux anges déroulant un cuir découpé de la Sainte Face.
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Sablière Sb1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Deux anges déroulant un cuir découpé des Cinq Plaies.
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Sablière Sb1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Comparez avec le cartouche de la chapelle de Kerjean :
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Deux anges présentant un ciboire eucharistique.
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Sablière Sb1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Le retable du Rosaire.
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La sablière Sb2. (mur du retable du Rosaire, corniche de droite).
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On y voit, dans un cuir découpé, un masque coiffé d'un foulard noué sur les deux cotés. Ce cuir émet des prolongements en volutes où se cache un personnage.
Mais surtout...
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Sablière Sb2, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb2. Renart prêchant aux poules.
C'est bien la représentation habituelle de Renart en chaire que nous découvrons sur l'extrême droite, coiffé de la capuche des Cordeliers ou Frères Mineurs, les deux pattes posées sur les montants de la cuve car il est prêt à bondir. Sa prédication s'échappe en deux banderoles de sa gueule, et l'une porte une inscription LE : REN [ART].
Devant lui, trois poules et un coq sont captivés par ses propos.
Cette représentation crée un lien avec les sablières de Saint-Sébastien du Faouët (22), de la clôture (vers 1420) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët (22), et des sablières de Grâces-Guingamp (1506-1512). Ou avec beaucoup d'autres œuvres en France (cf. mon article sur Grâces-Guingamp). Ou avec le fragment de la scène de Renart et les poules des sablières de l'église Saint-Thomas de Landerneau.
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Sablière Sb2, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Renart prêchant les poules, Sablière Sb2, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Le blochet B2 (angle sud-est). L'évangéliste saint Marc à son pupitre.
Mon identification se base sur le pupitre, l'écritoire et la plume, sur la posture du rédacteur, sur la barbe et les pieds nus (?), mais surtout sur le lion abrité sous le montant du pupitre.
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Blochet B2, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Comparez avec saint Marc du château de Kerjean :
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Le blochet B3. (angle nord-est). L'évangéliste saint Luc écrivant, un bœuf à ses pieds.
Ce serait saint Luc s'il n'était imberbe et ailé comme un ange. Il est assis à son bureau et un plumier est suspendu à sa ceinture. On peut toujours suggérer qu'il s'agit, de toute évidence, de saint Luc, et que les ailes sont en fait le dossier de son siège.
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Blochet B3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Comparez avec le saint Luc de Kerjean :
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La sablière Sb3. Masque, cuir découpé, putti, etc.
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Sablière Sb3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Sablière Sb3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Sablière Sb3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Sablière Sb3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Sablière Sb3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Sablière Sb3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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La sablière Sb4.
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Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sb4. La partie droite.
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Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Au centre, une femme (?), nue, jambes écartées, sexe exhibé, tient les extrémités des deux cuirs qui l'entourent. J'y vois, vu le contexte moral de Sb4, une allégorie, la Lubricité.
Sa main gauche tient un cuir découpé à enroulement dont le motif central est une boule, ou ove, dont le centre est déprimé en croissant.
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Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sa main droite tient un autre cuir, centré par une tête de mort dont les yeux sont traversés par un vers annelé à tête de serpent. Ce motif morbide est explicité si besoin en était par les mots RESPICE FINEM inscrits au dessus. Cette formule latine, "Songe à la fin dernière", est une application chrétienne ("pense à ta mort) de la maxime Quidquid agis, prudenter agas et respice finem, "Quoique tu fasse, fais le avec prudence sans perdre de vue la fin". On la trouve sur l'ossuaire de Guengat avec la date de 1557, sur celui de Lannédern ou de Daoulas (1589), ou encore sur le bénitier de Loc-Egigner-Ploudiry avec la formule Cogita Mori Respice Finem.
Ce motif macabre est présent, à l'identique mais sans inscription, sur une sablière nord de l'église Saint-Thomas de Landerneau (fin XVI-début XVIIe). Or, il est remarquable qu'il y accompagne une figure de la Lubricité tenant, exactement comme à Bodilis, les extrémités de deux cuirs découpés, avec la même dénonciation des plaisirs puisque l'un de ces cuirs porte un joueur de bombarde, métonymie des noces et des danses.
Nous allons découvrir la suite de la sablière Sb4, avec ses tableau de l'Ivrognerie et de la Négligence. Toute la pièce de bois est donc placée sous le signe de la condamnation des Vices, et du rappel chrétien des châtiments réservés au pécheur après la mort. Le cartouche de la Mort est encadré par la femme lubrique à gauche et par l'ivrogne à droite.
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Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sb4. La partie gauche.
Il faut sans doute la diviser en trois ensembles.
— À droite, un homme accroupi devant un tonneau y remplit un pichet ; il tient la bonde dans sa main gauche. C'est la figure de l'Ivrognerie.
— À gauche, une truie ôte le robinet (la bonde) du même tonneau. C'est la figure de la Négligence. et du Gaspillage.
— Enfin, une femme couchée en arrière et arc-boutée, pieds appuyés contre les pattes de l'animal, tire la queue de la truie vers le haut tandis qu'elle la frappe d'un bâton. On notera que le "bâton", par sa forme élaborée, ressemble plutôt à un instrument dont l'usage reste à déterminer. Je suggère d'y voir sa quenouille.
La compréhension de la scène centrale est apportée par le tableau Les Proverbes Flamands, une huile de 1559 de Pieter Bruegel l'Ancien qui illustre 120 proverbes et moralités. Parmi ces illustrations, en bas à gauche, une truie tient la bonde d'un tonneau, dont le contenu s'écoule dans un récipient vers lequel s'approche un petit cochon. Selon les spécialistes, c'est l'image du proverbe néerlandais "De zeug trekt de tap uit",ou " De zeugt loopt met de tap weg" - La truie débonde [elle-même] le tonneau -
Selon L. Maeterlink (1910), conservateur du musée de Gantl, "De suygh loopt met den tap weg" (La truie se sauve avec le robinet) serait la satire des ivrognes qui, en buvant, ne surveillent pas leur intérieur et ne peuvent empêcher le gaspillage. (La truie, ou le porc, qui faisait pour ainsi dire partie des ménages campagnards, arrachait parfois le robinet du tonneau, croyant peut-être avoir à faire à un os à moelle.). Louis Maeterlinck. Le genre satirique: fantastique et licencieux dans la sculpture flamande et wallonne; les miséricordes de stalles (1910)
Cette truie débouchant le tonneau est donc la figure de la Négligence domestique.
[D'autres auteurs (Louis Hautecoeur 1943) voit ici la truie et l'ivrogne s'abreuvant au même tonneau.]
Dans l'esprit de Bruegel, ces saynètes étaient une dénonciation morale de la "folie" du monde.
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La dernière pièce des sablières nord de Saint-Thomas de Landerneau représente une scène très proche : le même tonneau, la même truie tenant dans son groin la bonde, la même femme arc-boutée tirant la queue de la truie et la frappant avec le manche de sa quenouille. La parenté entre ces deux œuvres est évidente.
Sophie Duhem (p. 178-179) signale la même scène à Plouguerneau.
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Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Sablière Sb4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Le blochet B4. L'évangéliste saint Jean à son pupitre.
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Blochet B4, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Comparez avec saint Jean au château de Kerjean (son aigle est à sa droite) :
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Les poinçons P1 à P8 (du sud au nord).
P1 : homme apeuré ? mains au dessus de la tête
P2 : quatre têtes.
P3, P4, P6, P7 : feuillages.
P5. Couples dansants sur une boule.
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P1. Homme recroquevillé, mains sur la tête.
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P2 : quatre têtes.
Les quatre visages sont coiffés d'un élément architectural en volute.
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Poinçon P2, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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P5. Quatre personnages dansants sur une boule.
Je les avais d'abord vus comme quatre danseuses, avant qu'un appendice ne me donne un démenti irréfutable.
About de poinçon P5, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
About de poinçon P5, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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About de poinçon P5, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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L'entrait E1.
a) sa face nord.
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Entrait E1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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E1. La partie droite.
Engoulant. Masques, cuirs découpés entrelacés, rubans, rinceaux de vigne.
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Entrait E1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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E1. La virole : cuir découpé au masque de femme à l'antique.
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Entrait E1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Entrait E1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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E1. La partie gauche.
Rubans, rinceaux de vigne ; homme nu déféquant sur un pot.
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Entrait E1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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E1. b) la face sud.
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Entrait E1, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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CHARPENTE SCULPTÉE DE LA DEUXIÈME SALLE DE LA CHAPELLE DU ROSAIRE, BAS-COTÉ SUD.
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Blochets B5 à B9 : les apôtres Paul, Pierre. Sainte Marie-Madeleine. Saint Jean.
Sablières Sb 5 à Sb8.
Sb5 et Sb6 : frises.
Sb 7 :Anges tenant un cuir découpé.
Sb8 : Cuirs découpés animés de motifs animaliers et végétaux.
E2. Inscription de 1574.
Poinçons P9 à P16.
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Un des éléments distinctifs de cette salle est la présence sur le mur occidental d'une pierre en encorbellement, sculptée en forme d'un homme buvant à un tonnelet. La forme du tonneau, en T inversé car le goulot est au centre, est si reconnaissable qu'elle évoque aussitôt, par exemple, la scène de beuverie des sablières de la nef de Grâces-Guingamp (1506-1508)
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Pièce en encorbellement de la charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Le blochet B5 : saint Paul.
Il s'agit d'un apôtre (pieds nus, barbe, livre) tenant une épée. Je propose Paul, par symétrie à Pierre, en B6.
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Blochet B5, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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La sablière Sb5. Frise répétitive à cuirs et coquilles. Pas d'image.
Sablière Sb6. Frise répétitive à rubans et coquilles. Pas d'image.
Le blochet B6. Saint Pierre tenant sa clef.
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Blochet B6, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Le mur ouest . E2, B7, Sb7, Sb8 et B8.
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Le blochet B7. Sainte Marie-Madeleine tenant le flacon d'aromates (ou de parfum).
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La présence de Marie-Madeleine tenant son flacon de parfum, parmi les quatre évangélistes, comme dans la chapelle de Kerjean, lui confère une place remarquable sur laquelle nous pouvons nous interroger. C'est, comme toujours au XVIe siècle, non pas la pénitente, mais une très belle et élégante femme. Elle semble illustrer le luxe et peut-être l'idéal de beauté et d'ornementation des artistes soucieux d'offrir à la Maison de Dieu ce qu'il y a de plus beau.
À coté des anges musiciens des poinçons, elle apporte la touche sensorielle particulière, celle de l'odorat. La valeur de l'encens (Oliban tiré du Boswellia sacra du Yémen) est polysémique, soit honorifique, soit sacrificielle (faire monter une fumée agréable à la Divinité), soit liée à la purification, soit , avec la myrrhe, d'embaumement.
Marie-Madeleine amène aussi, comme les parfums d'Arabie, une note orientale.
Enfin, c'est, pour les Chrétiens, la valence positive de la Féminité.
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Sainte Marie-Madeleine. Blochet B7, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sainte Marie-Madeleine. Blochet B7, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sainte Marie-Madeleine. Blochet B7, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Comparez avec Marie Madeleine de la chapelle de Kerjean (malgré l'altération du bois):
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Sainte Marie-Madeleine. Blochet de la chapelle du château de Kerjean. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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La sablière Sb7.
Il s'agit de deux hommes (ou deux anges aptères) déployant par l'intermédiaire d'étoffes resserrées en liens un cartouche semblable à un drap. Celui-ci ne contient rien, mais est percé d'orifices traversés par des rubans. Il est contenu dans un cuir à enroulement. C'est dire la complexité du montage ornemental.
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Sablière Sb7, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb7, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Les deux hommes ont tous les traits stylistiques des anges et personnages couchés du Maître de Pleyben dans des scènes analogues de déploiement de cuirs, tant dans la nef de Bodilis que dans les autres églises et chapelles ornées par cet atelier.
Je les énumère à nouveau : manches courtes bouffantes en spires superposées, tunique retombant en collerette au dessus d'une ceinture, plis complexes de ces tuniques, amict autour du cou, front largement épilé, cheveux en boules, regard de face, nez long et étroit s'épanouissant en deux narines en bulbes, pieds nus tordus dans des positions peu anatomiques (pour entrer dans le cadre étroit). Et surtout une allure primesautière, une légèreté et une grâce semblent emporter ces créatures aériennes dans le même enthousiasme que celui de danseurs exaltés par une musique céleste ou de patineurs sacrés.
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Sablière Sb7, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb7, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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La sablière Sb8. Cuirs découpés animés de motifs animaliers et végétaux.
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Sablière Sb8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Au centre, un cuir aux découpes en losange ; il libère latéralement des bras en volute et en corne d'abondance, et plus loin des rubans s'enroulant en gueules de poissons. La séquence s'achève, à gauche, par une tête de dragon aux larges oreilles.
La frise inférieure mêle les lignes géométriques des cuirs et cartouches aux courbes des légumes et des fleurs. Un escargot y progresse, à la coquille perlée déjà rencontrée sur les sablières de la nef.
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Sablière Sb8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Le blochet B8. Saint Jean l'évangéliste.
Je l'identifie par les pieds nus (apôtre), le visage jeune et imberbe et le calice de poison de sa mise à l'épreuve face au magicien.
Nous retrouvons les caractères stylistiques des apôtres de Saint-Divy, Pleyben et Kerjean : très long nez pyramidal, les sourcils fins, les yeux ronds écarquillés aux pupilles creusées, la bouche large aux lèvres pulpeuses, le menton étroit.
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Saint Jean, blochet B8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Saint Jean, blochet B8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Saint Jean, blochet B8, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Comparez avec saint Jean du château de Kerjean.
Saint Jean, blochet B8, charpente sculptée de la chapelle du château de Kerjean. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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L'entrait E2. inscription de 1574.
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La poutre engoulée porte l'inscription en lettres capitales romaines :
DOMVS MEA DOMVS ORACI[ON]IS ~E / 1574
Il s'agit d'une citation biblique (Isaïe 56:7) ou évangélique (Luc 19:46) qui affirme "Ma maison est une maison de prière". Elle est souvent utilisée à cette époque sur le fronton des églises, parfois dans sa version biblique (ou évangélique selon Matthieu) Domus mea domus orationis vocabitur par exemple à Commana. Mais ici, les quatre mots latins sont suivis d'un E surmonté d'un tilde abréviatif, correspondant au texte évangélique de Luc Domus mea domus orationis est.
adducam eos in montem sanctum meum et laetificabo eos in domo orationis meae holocausta eorum et victimae eorum placebunt mihi super altari meo quia domus mea domus orationis vocabitur cunctis populis. "Je les amènerai sur ma montagne sainte, Et je les réjouirai dans ma maison de prière; Leurs holocaustes et leurs sacrifices seront agréés sur mon autel; Car ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples." Isaïe 56:7
Domus mea, domus orationis vocabitur, vos autem fecistis eam speluncam latrionum Matthieu 21:13
dicens illis : scriptum est : quia domus mea domus oracionis est. vos autem fecistis illam speluncam latronum "leur disant: Il est écrit: Ma maison est une maison de prière. Mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs." Luc 19:46
Elle peut correspondre à une date de cérémonie de dédicace après des travaux de 1574.
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Entrait E2, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Entrait E2, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Les poinçons P9 à P16.
Ils se retrouvent tous dans les poinçons de la nef, mais ce sont aussi ceux de Kerjean, de Pleyben, de Sainte-Marie-du Ménez-Hom et de Saint-Divy : anges présentant les Instruments de la Passion, anges musiciens ou orants, et, constamment, le joueur de cornemuse.
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P9 : Ange volant.
P10 : Ange présentant la Couronne d'épines.
P11. Ange présentant la Croix.
P12. Ange jouant de la mandore.
P13. Ange volant.
P14. Ange main sur la poitrine.
P15. Joueur de cornemuse.
P16. Ange en adoration.
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Vue générale.
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Poinçons P9 à P16, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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About de poinçon P9. Au dessus de la baie. Ange volant.
Poinçon P9 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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About de poinçon P11. AngeP10. Ange présentant la couronne d'épine.
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Poinçon P10 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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About de poinçon P11. Ange portant la croix.
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P11 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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About de poinçon P12. Ange jouant de la mandore.
Cet ange musicien du Maître de Pleyben et facilement reconnaissable avec sa mandore molle, incurvée pour se mouler à son corps. Cet instrument parent du luth à un corps en demi-poire, avec 3 cordes (ici) mais parfois 4 ou 6. L'artiste n'a représenté ni la rosace, ni exactement le chevillier, mais la position des doigts, surtout de la main gauche, est précise.
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Poinçon P12 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Poinçon P12 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Comparez avec l'ange à mandore du château de Kerjean.
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About de poinçon P13. Ange volant.
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Poinçon P13 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
Poinçon P13 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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About de poinçon P14. Ange chantant ou priant.
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Poinçon P14 , charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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About de poinçon P15. Joueur de cornemuse.
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Le poinçon le plus intéressant à mes yeux est celui du joueur de cornemuse de P15. Voici ce qu'en dit Jean-Luc Matte dans son Iconographie de la cornemuse :
"Joueur de cornemuse dans la chapelle sud n° 2 (la médiane), poinçon n° 7 (sur 8 poinçons) en partant du mur sud. Personnage coiffé d'une sorte de tricorne, semblant assis en tailleur dans le vide, les deux mains posées sur le tuyau de sa cornemuse qu'il tient serrée sous son bras gauche.
Un bourdon d'épaule dont le pavillon semble ébréché, court, cylindrique et de diamètre assez fort. Un tuyau mélodique extérieurement quasi-cylindrique, sans décor ni pavillon, un petit porte-vent non tenu en bouche. Sac assez allongé, dont la partie qui déborde sous le bras du musicien semble bien rebondie.
Seconde moitié XVIème. D'après Sophie Duhem op.cit. , ces sablières ont pour auteur le sculpteur qui aurait travaillé à Pleyben, Sainte-Marie-du-Ménez-Hom (Plomodiern), à la chapelle du château de Kerjean et en l'église de St-Divy "(Jean-Luc Matte)
Son article est accompagnée d'une iconographie plus générale des anges musiciens et autres joueurs de l'église de Bodilis, avec d'excellentes photo de Joel Lubin.
Je ne peux rien ajouter à cela, si ce n'est de renvoyer à ma description des deux joueurs de cornemuse de Pleyben (l'un sur poinçon, l'autre en blochet), du joueur de Saint-Divy (un blochet) et de celui de Kerjean : ils sont tous rassemblés dans mon article sur Pleyben. Le chapeau en tricorne se retrouve à peu près à Pleyben (poinçon) et à Saint-Divy.
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Poinçon P15, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Poinçon P15, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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Comparez avec le joueur de cornemuse de Kerjean :
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About de poinçon P16. Mur intermédiaire avec la nef. Ange en adoration.
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CHARPENTE SCULPTÉE (1659) DE LA TROISIÈME SALLE DE LA CHAPELLE DU ROSAIRE, BAS-COTÉ SUD.
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Blochets B9 à B12 : Visitation, Annonce aux bergers, Nativité, Ange présentant deux femmes.
Sablières Sb 9 à Sb12 : frises d'arceaux ou de rinceaux.
E3. Inscription datée de 1659 indiquant le nom des commanditaires.
Poinçons P17 à 19.
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Vue générale.
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Blochet B9. Visitation.
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Blochet B9, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb9. Frise d'arceaux à palmes.
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Sablière Sb10. Masque, rinceaux de vigne avec grappe.
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Blochet B10. L'ange et le berger.
Cet ange tient une phylactère, il s'agit de l'Annonce aux bergers associée à la Nativité.
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Blochet B10, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Blochet B11. Couple de femmes âgées présentées par un ange.
Si nous les associons aux autres blochets de la Visitation, de la Nativité et de l'Annonce aux bergers, nous pouvons y voir deux épouses de bergers, ou plutôt les deux sages femmes des évangiles apocryphes.
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Blochet B11, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablière Sb11.
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Sablière Sb12. Masque, rinceaux de vigne avec grappe.
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Sablières Sb11 et 12, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Blochet B12. Nativité ? Femme, enfant, âne et bœuf.
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Blochet B12, Blochet B9, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Entrait B3. Inscription de 1659.
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----------------------------------- / M ♦ Y ♦ GAL ♦ CVRE ♦ A ♦ G
DOMVS : MEA : DOMVS / ORATIONIS : 1659
M ♦ IAN ♦ KERGVELEN ♦ REGTVR / C ♦ B♦ FABRICQVES
Soit "Domus mea Domus orationis. M. Ian Kerguelen recteur, M. Y[ves] Gal curé, A.G et C. B fabriques".
Curieusement, les registres n'ont pas conservé le nom de ce recteur, ni de son curé. Les archives mentionnent qu' en 1665, Michel Grall et Yves Quintin, peintre de Saint-Paul, exécutent divers travaux, et qu'en 1670. Christophe Grandet, architecte, répare l'église. Couffon précise pourtant que l'on augmenta l'église au sud en prolongeant en 1659 la chapelle de 1574 jusqu'au porche..
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Entrait E3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Entrait E3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Entrait E3, charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Les poinçons P17 à P19.
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Poinçon P17 : tête tirant la langue.
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About de poinçon P17 de la charpente sculptée du bas-coté sud de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile avril 2018.
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LES DEUX STATUES DE LA TROISIÈME SALLE DU BAS-COTÉ SUD.
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1. Saint Dominique (Couffon). Bois polychrome.
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2. Vierge à l'enfant Vierge à l'Enfant, bois polychrome.
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Notez le bandeau retro-cervical , mon "chouchou" des Vierges du Finistère.
La vierge tenait un objet (fleur ?) dans la main droite. L'Enfant, en tunique rouge ceinturée d'or, est figuré en Sauveur du Monde, bénissant, tourné vers la foule, et tenant le globe terrestre.
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LES BLOCHETS DU FOND DE L'ÉGLISE.
Ils encadrent la première baie ouest de l'élévation sud.
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1. L'Ivrogne.
Identique à son homologue en pierre de la deuxième salle, il boit à un tonnelet à goulot médian.
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2.L'Homme au turban.
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SOURCES ET LIENS.
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1°) Les cartouches et cuirs découpés.
— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), Le premier volume des plus excellents bastiments de France : Le Louvre, Vincennes, Chambord, château de Madrid (Philibert Delorme 1548-1559), Covussi, Folambray, Montargis, La Muette, Saint-Germain, Creil, Vallery, Verneuil, Ancy-le-Franc, Gaillon, Manne.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10411354/f45.image
Le second volume : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3137097/f12.image
Blois, Amboise, Fontainebleau, Villiers, Charleval, Les Tuileries, St-Mort, Chenonceau, Chantilly, Anet, Ecouen, Challueau, Dampierre, Beauregard, Bury.
— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), s.d, Termes et cariatides,
http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-4R85BIndex.asp
— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1542 et 1545] Grands cartouches, [20] pl., Eau forte ; 38 cm [S.l.], [s.n.] 2 suites sans titre ni inscription. 7 des 20 planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées vers 1542-1543.
http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1807/?offset=#page=5&viewer=picture
— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1545 et 1547] Petits cartouches de Fontainebleau, [31] pl., Eau forte ; 26 cm, [S.l.], [s.n.]Suite sans titre d'ornements inspirés par l'art de Fontainebleau et destinés à servir de modèles. Certaines planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées entre 1542 et 1545 ; D'autres figurent déjà dans la première ou la seconde suite des grands compartiments
http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1801/?offset=#page=5&viewer=picture
http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb40564725t
— AUCLAIR ( Valérie), 2007, . L'invention décorative de la galerie François Ier au château de Fontainebleau. In: Seizième Siècle, N°3, 2007. pp. 9-35; doi : https://doi.org/10.3406/xvi.2007.917 https://www.persee.fr/doc/xvi_1774-4466_2007_num_3_1_917
— DIETTERLIN (Wendel), 1598, Architectura, Nuremberg.
http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp
— FLORIS (Cornelis II de Vriendt ,dit) 1556, Veelderley Veranderinghe van grottisen avec HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur)
https://collections.vam.ac.uk/item/O977184/veelderley-veranderinghe-van-grotissen-ende-engraving-floris-cornelis-ii/
https://www.nationalgalleries.org/art-and-artists/60572/plate-veelderley-veranderinhe-van-grottissen-ende-compartimenten-design-fantastic-fountain-published
— FLORIS (Cornelis), 1557, Veelderley Niewe Inuentien, HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur)
— VREDEMAN DE VRIES (Hans), 1557 Architectura ou batiments prins de Vitruve, Anvers,
http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp
— Ecole de Fontainbleau:
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_Fontainebleau
— Cuir auriculaire :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Cuir_d%C3%A9coup%C3%A9
— Sur les ornemanistes
http://www.meublepeint.com/delaune_etienne.htm
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2°) Sur les sablières :
— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne, XVe-XVIIe s. ; préf. d'Alain Croix, Rennes :Presses universitaires de Rennes, 1997 : ET thèse de doctorat en histoire sous la direction d'Alain Croix soutenue à Rennes 2 en 1997.
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3°) Sur Bodilis.
— ABGRALL (Chanoines Jean-Marie) et PEYRON (Paul), 1903, "[Notices sur les paroisses] Bodilis", Bulletin de la commission diocésaine d'histoire et d'archéologie, Quimper, 3e année, 1903, p. 192-208.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k109982z/f180.image
https://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/bdha/bdha1903.pdf
http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf_notices/bodilis.pdf
— APEVE, Association pour la promotion des enclos paroissiaux de la vallée de l'Elorn
http://www.bodilis.org/patrimoineetsites.php
http://www.apeve.net/spip/spip.php?article127
— COUFFON (René), 1958, Notre-Dame de Bodilis. In: Bulletin Monumental, tome 116, n°2, année 1958. pp. 121-133; doi : 10.3406/bulmo.1958.3832 http://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1958_num_116_2_3832
http://www.persee.fr/docAsPDF/bulmo_0007-473x_1958_num_116_2_3832.pdf
— COUFFON (René), LE BARS (Alfred) 1988, Nouveau répertoire des églises et chapelles, : paroisse de Bodilis,” Collections numérisées – Diocèse de Quimper et Léon,
http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/fdf52c93c4ad292cf14cbf5068677c87.pdf
— LAUDREN (Thierry), dossier photo de son travail de restauration de la charpente
https://www.thierrylaudren.fr/pages/monuments-historiques.html
http://thierrylaudren.pagesperso-orange.fr/monumentshistoriq2.htm
— MATTE (Jean-Luc), Iconographie de la cornemuse, Bodilid. Photographies de Joel Lubin.
http://jeanluc.matte.free.fr/fichac/bodilispoinc.htm
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4°) Sur Renart prêchant aux poules :
—GUILHERMY (F de) , 1845, Iconographie des fabliaux. Description du jubé de Saint-Fiacre en Bretagne. Le Diable et le Renard. Annales archéologiques, Paris, Didron, Volume 3 page 22
https://books.google.fr/books?id=nVNfAAAAcAAJ&pg=PA22&lpg=PA22&dq=escripvant+le+quaquet+de+deux+gualoises,+%C3%A0+belles+dentz&source=bl&ots=TJ_SMjUec0&sig=MQXhejvSGAUAhyDvU3ZKV-AXhFQ&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjJha6eotnKAhVLcRQKHRiwDbEQ6AEIIjAA#v=onepage&q=escripvant%20le%20quaquet%20de%20deux%20gualoises%2C%20%C3%A0%20belles%20dentz&f=false
— DUHEM (Sophie), 1998, « Quant li goupil happe les jélines... », ou les représentations de Renart dans la sculpture sur bois bretonne du XVe au XVIIe siècle" Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1998 Volume 105 Numéro 1 pp. 53-69http://www.persee.fr/doc/abpo_0399-0826_1998_num_105_1_3972
— Images de Renart dans la sculpture sur bois bretonne
–Représentations de Renart prêchant aux poules et de Renart écorché :
Le Faouët (Ch. St-Fiacre, v. 1480), Jubé, clôture est.
Le Faouët (Ch. Ste-Barbe, XVIe s.),
Grâces-Guingamp (1506-1512),
Plumelec (Ch. St-Aubin, 1513),
Saint-Gilles-Pligeaux (XVe-XVIe s.),
Tréflévenez (XVIe s.).
[en pierre : Sizun frise extérieure]
— CHANCEL (Dominique), Renart à l'Arthaudière
https://www.chateau-arthaudiere.com/ch%C3%A2teau-de-l-arthaudi%C3%A8re/renart-%C3%A0-l-arthaudi%C3%A8re/
—CORDIER (Jean-Yves), blog lavieb-aile :
-sablières de l'église de Grâces-Guingamp (22)
http://www.lavieb-aile.com/2018/02/les-sablieres-1506-1508-du-bas-cote-de-l-eglise-notre-dame-de-graces-22.html
-Stalles de l'ancienne cathédrale de Saint-Pol-de-Léon (29)
http://www.lavieb-aile.com/2017/12/la-frise-nord-des-stalles-du-choeur-de-la-cathedrale-de-saint-pol-de-leon.html
-Jubé de la Chapelle Saint-Fiacre, Le Faouët (56):
http://www.lavieb-aile.com/2016/01/le-jube-de-la-chapelle-saint-fiacre-du-faouet-i-le-cote-de-la-nef.html
- Sablières de la chapelle Saint-Sébastien, Le Faouët (56)
http://www.lavieb-aile.com/2015/09/sablieres-inscriptions-et-pardon-de-la-chapelle-saint-sebastien-au-faouet-56.html
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