Les statues (atelier du Folgoët, granite, traces de polychromie, XVe siècle) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Saint Christophe, sainte Catherine, sainte Marie-Madeleine, saint Fiacre, Jean V ou personnage en armure, saint Yves, saint Faron, martyre d'Apolline.
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Les articles sur la chapelle Saint-Fiacre, Le Faouët :
- Le vitrail de l'Arbre de Jessé de la chapelle Saint-Fiacre au Faouët (56), associé à la Passion et au collège apostolique. Verrière de la baie 4. Un vitrail du XVe siècle.
- Le vitrail de la Passion de la chapelle Saint-Fiacre
- La Passion de la maîtresse-vitre de la chapelle Saint-Fiacre au Faouët (56).
- Le vitrail dela Sainte Parenté
- Le vitrail de la Vie de saint Fiacre
- Le vitrail de la Vie de saint Jean-Baptiste, chapelle Saint-Fiacre, Le Faouët (56).
- Le jubé de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. I. Le coté de la nef (Ouest). B. La tribune.
- Le jubé de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. I. Le coté de la nef.
- Le jubé de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. II. Le coté du chœur.
- La bannière Le Minor réalisée en 1991 sur un carton de Toulhoat.
- Les sculptures de la chapelle Saint-Fiacre au Faouët.
- Le retable de Saint-Sébastien de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët.
Et dans l'église du Faouët.
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On s'agacera peut-être du nombre de mes photographies. Mais c'est le seul moyen à ma disposition pour palier à l'inspection directe et ne pas passer à côté des détails importants.
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I. Saint Christophe portant Jésus enfant Sauveur du Monde pour traverser le gué. Granite, traces de polychromie, XVe siècle.
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— Sur l'iconographie de saint Christophe : Voir :
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Iconographie de saint Christophe : La peinture murale de saint Christophe à Louviers (vers 1510).
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Petite iconographie de Saint Christophe à Séville. II : La cathédrale. (1584)
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Petite iconographie de Saint Christophe à Séville. IV: à l'Alcazar
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Iconographie de Saint Christophe : les vitraux de la cathédrale d'Angers, II. La baie 117 (1451)
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Panneau de Jeanne du Pont présenté par Saint Christophe à Tonquédec (1470)
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Iconographie de saint Christophe : Semur-en-Auxois (c.1372).
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La statue occupe le coin nord-ouest de la nef, allongée au sol comme si elle attendait (depuis 1951) un emplacement meilleur. J'ai redressé mes photos pour mieux en rendre compte. Elle est en leucogranite avec de rares traces de polychromie. Elle est mutilée, puisqu'il manque les jambes, le bâton et la tête du saint, ainsi que la tête de l'Enfant. Selon les auteurs de la notice de la base Palissy, elle serait du "XVIe siècle (?)" mais je pense qu'on peut l'estimer du XVe siècle (et même de la première moitié, par assimilation aux autres statues datées par E. Le Seac'h). Malgré les mutilations, elle est de très belle facture.
Le saint est de face, mais il traverse le gué dont l'eau est représentée, recouvrant ses pieds. Il tient du côté droit son bâton de passeur, écoté, mais on ne peut préciser si, comme le veut la tradition iconographique, ce bâton est en train de reverdir miraculeusement. Il est vêtu d'un manteau au dessus d'une robe boutonnée. La main gauche est posée sur la ceinture.
L'Enfant est vêtu d'une tunique laissant voir ses pieds. Il tient le globe terrestre de la main gauche, et entoure le cou de Christophe de son bras droit.
La présence de ce globe est capitale, puisque c'est parce que Jésus tient le monde avec lui que, malgré son allure d'enfant, il va peser si lourd que Christophe ne parvient plus à progresser dans le cours d'eau. Mais un acte de foi sauve le passeur, et, miraculeusement, tandis que son bâton verdit, il gagne la rive opposée.
Un élément important de ce thème, c'est l'échange possible des regards entre Jésus et le passeur ; mais ici, nous ne savons pas si Christophe (Christophoros, "porteur du Christ") tourne la tête vers son passager.
Un autre élément de cette tradition, c'est la grande taille du saint, parfois figuré comme un géant.
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II. Sainte Catherine d'Alexandrie (premier atelier du Folgoët, granite anciennement polychrome, XVe siècle).
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https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM56005831
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La statue est adossée à la table d'offrande du bras nord de la nef, juste devant le saint Christophe allongé, et juste à côté de la statue de Marie-Madeleine.
La pierre est de même teinte que celle des autres statues qui l'entourent. La sculpture date du XVe siècle. Elle mesure 1 mètre de haut, 25 cm de large et 26 cm de profondeur (Le Seac'h).
La sainte, à la taille très fine et à la belle poitrine, est vêtue d'un surcot à encolure ronde, si longue qu'elle ne dévoile qu'à peine ses chaussures pointues, et d'un manteau à manches très larges et dont le pan gauche fait retour vers le poignet droit. Sa main droite est posée sur le pommeau de l'épée qui longe sa jambe droite ; cette épée rappelle qu'elle subit la décollation. Sa main gauche tient la roue, instrument de son supplice qu'elle surmonta miraculeusement. Une sangle oblique vers le bas et la gauche correspond à sa ceinture, comme le montre le gisant de Perronnelle de Boutteville, qui porte la boucle de ceinture bas sur la hanche.
La statue a été décrite par E. Le Seac'h page 68. Elle l'attribue au premier atelier du Folgoët (1423-1468), avec la statue de Marie-Madeleine et le groupe de Saint Sébastien entre les archers, et le personnage décapité en armure, mais aussi les gisants de Perronnelle de Boutteville et de Bertrand de Trogoff. Sa comparaison de sainte Catherine avec Perronnelle de Boutteville, qu'elle date vers 1425, l'incite à affirmer que les statues des saintes Catherine et Marie-Madeleine sont parmi les premières réalisées par l'atelier du Folgoët (1423-1468). Néanmoins, cette datation très précoce se heurte à celle de la chapelle. Enfin, l'encolure est ronde chez Catherine , mais en V chez Perronnelle et ches Marie-Madeleine...
Rappel :
Un premier atelier dépendant du mécénat ducal attaché à la collégiale du Folgoët a travaillé entre 1423 et 1509, réalisant notamment l'autel des Anges, les Anges des façades, le porche des Apôtres, le tympan du porche occidental et de nombreuses statues de la collégiale du Folgoët, mais aussi le porche sud de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper, le calvaire et le porche de Notre-Dame-de-Rumengol, le porche sud de l'église de La Martyre, la chapelle Notre-Dame du Kreisker à Saint-Pol-de-Léon, le gisant de Sainte-Nonne dans l'enclos paroissial de Dirinon, le gisant de Jean de Kérouzéré dans l'église Saint-Pierre de Sibiril, plusieurs statues de l'abbaye Notre-Dame de Daoulas, des sculptures en ronde-bosse à Kernascléden, Saint-Fiacre du Faouët, Quimperlé, etc.
Un second atelier ducal, qui a fonctionné entre 1458 et 1509 a réalisé entre autres le porche sud de Saint-Herbot et le porche de l'église paroissiale Saint-Jean-Baptiste de Plourac'h.
Deuxième rappel : les armoiries ducales, datées "pas plus tard que le milieu du XVe siècle", sont présentes sur le chevet de la chapelle. Le duc Jean V est passé au Faouët en 1442. La chapelle a été construite entre 1436 (date sur une pierre dont l' inscription mentionne la fondation d'un hôpital, en réemploi sur une maison au sud-ouest de la chapelle) et 1480 (date inscrite sur le jubé, installé postérieurement à la fin de la construction puisqu'un pilier a été retaillé). Pour D. Moiriez et J.J. Rioult "la chapelle Saint-Fiacre est une œuvre caractéristique du rapide développement de l'art flamboyant selon des types originaux (*), en Bretagne dans les années 1440-1470, sous l'influence du milieu ducal." (*) comme, selon Léon de Groer, Kernascléden, Sainte-Noyale à Pontivy et Notre-Dame de Quimperlé.
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La main droite, photographiée en vue de détail, est très élégamment sculptée, et se révèle comparable à celle de saint Faron (ci-dessous), ce qui tend à prouver que c'est le même sculpteur qui a réalisé toutes ces œuvres : la "même main".
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III. Sainte Marie-Madeleine (premier atelier du Folgoët, granite anciennement polychrome, XVe siècle).
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https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM56005832
La statue, de même facture et de même matériau que les précédentes, mesure 95 cm de haut, 27 cm de large et 26 cm de profondeur. Elle est placée contre la banquette du mur nord du bas-côté, derrière la table d'offrande.
La tête, le haut des épaules, mais aussi un objet tenu dans la main droite, sont brisés.
Marie-Madeleine, porte une robe très longue, à encolure en V, et un manteau épais.
En multipliant les angles de vue, l'objet tenu en main droite se révèle être cylindrique, c'est donc bien un pot à onguent attribut de Marie-Madeleine.
La sainte tient entre ses mains sa chevelure divisée en deux nattes très longues et épaisses.
Du bas de la robe sortent les pointes menues de ses chaussures : ce qui confirme la datation au XVe siècle, avant 1475 environ.
Note. Une carte postale, ainsi qu'un cliché de la direction archéologique, montrent plusieurs têtes réunies sur la table d'offrande lors des travaux de restauration. Les têtes manquantes sur nos statues s'y trouvent-elles ?
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Les chaussures pointues.
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IV. Sainte Marguerite. Granite, traces de polychromie, XVe siècle.
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Cette statue n'est pas identifiée par un cartel sur place, et n'est pas décrite sur la base Palissy, ni même ailleurs. C'est vrai qu'il faut bien connaître le modèle iconographique intacte, dans lequel la sainte qui a été avalée par un gourmand dragon en sort pour avoir su percer une sortie de secours sur le dos de la bête (avec son crucifix, dit la légende) : c'est la scène de "sainte Marguerite issant du dragon". Puisque nous parlons ici du Maître du Folgoët, voici par exemple le groupe réalisé — en kersanton et non en granite— pour l'église du Folgoët :
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En partant de ce modèle, on interprète mieux la pièce sculptée qui est conservée ici, avec l'éventail des nervures de l'aile, la ponctuation des pustules venimeuses de l'échine, les pattes griffues, la gueule affichant dans un sourire féroce sa dentition, la queue (qui s'élève en face postérieure) et, enfin, le début de la robe de la vierge martyre d'Antioche.
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V. Saint Fiacre. Granite, traces de polychromie, XVe siècle.
Pas de description dans la base Palissy.
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Même en réunissant les deux blocs brisés du buste, il n'en reste pas grand chose : la tête, les bras et les jambes sont manquantes. Mais, sur le côté droit, la pelle est conservée, permettant l'identification sûre du saint, patron de la chapelle. Du coup, on remarque le camail qui couvre les épaules, et qui appartient à l'habit du saint moine.
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VI. Personnage en armure (premier atelier du Folgoët, granite polychrome, XVe siècle, tête brisée).
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https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM56005830
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Il mesure 95 cm de haut, 30 cm de large et 26 cm de profondeur. La tête et le bras droit sont manquants. Comme le montre la figure, il prend place sous un dais gothique sur un culot du pilier nord de la nef, à deux mètres du lot des statues précédentes.
L'homme est en armure complète, recouverte d'un tabard et d'une cape. Le bouclier, rectangulaire mais brisé, est porté au bras gauche, comme c'est la règle pendant le combat. L'épée est au côté gauche, tenue par la main gauche, tandis que la main droite devait être posée sur la poignée de la dague qu'on voit encore au côté droit.
Les chaussures ou solerets de l'armure sont à la poulaine, nous sommes bien au XVe siècle, et le granite clair (un peu plus jaune peut-être) est le même que pour les œuvres précédentes.
Il pourrait s'agir (E. Le Seac'h) d'une représentation du duc de Bretagne Jean V, la représentation étant en effet similaire à celle, également en granite, du porche nord de l'église Notre-Dame de Quimperlé. Ce porche nord avait été ajouté à l'édifice suite à une donation le 11 juillet 1418 de ce duc pour célébrer la naissance de son fils Pierre. Il daterait des années 1420-1450.
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VII. Saint Yves présentant un panonceau à inscription. Granite polychrome, XVe siècle. Tête et main gauche brisées.
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https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM56005829
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Situation : angle sud-ouest du bras sud du transept. H = 95 ; la = 40 ; pr = 25
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Malgré les têtes et parties brisées, nous allons depuis le début de belle statue en belle statue, toutes du XVe siècle, et celle-ci ne fait pas exception : elle est remarquable par sa polychromie et notamment par un très beau bleu. Le saint est principalement identifié par les hermines de sa cotte talaire et par le camail à capuche qui couvre les épaules .
Mais la gestuelle n'est pas habituelle à ce saint, et le geste d'argumentation est absent. De la main droite, il désigne l'inscription d'un panonceau. La main gauche était levée.
L'inscription est effacée, ou presque effacée, elle semble encore capable de nous dire quelques mots, si on voulait bien se donner les moyens de l'étudier. Le panneau est séparé par des bourrelets en trois registres. Trois lignes de lettres noirs sont inscrites sur le registre médian. Je crois lire ----prigen--- et puis à la fin --lan mil -- ???
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VIII. Saint évêque (saint Faron ?). Granite polychrome, XVe siècle. Mains et tête brisés.
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM56005828
Hauteur 115 cm, largeur 35 cm, profondeur 25 cm.
Est-ce saint Faron, évêque de Meaux, qui, comme le représente la verrière de la vie de saint Fiacre, accorda à celui-ci l'emplacement pour bâtir son ermitage ?
Vêtu de la chasuble rouge à croix jaune (or?) et d'une cotte talaire laissant dépasser la pointe de ses chaussures à la poulaine confirmant la datation du XVe siècle, il lève le bras droit pour tracer une bénédiction, et tient sa crosse dont l'extrémité est brisée.
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IX. Martyre de sainte Apolline. Pierre polychrome, quatrième quart XVe siècle .
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM56000269
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La sainte est suspendue par ses cheveux à une potence. Les deux bourreaux sont armés de tenailles et lui arrachent les dents.
La sainte : robe rouge et or mouchetée, à encolure retctangulaire, serrée par une ceinture : chemise à encolure en V
Les bourreaux : bonnets coniques, tunique à découpes festonnées triangulaires, culotte courte sur des chausses ajustées.
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X.La table d'offrande (?) : un système d'écoulement.
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SOURCES ET LIENS.
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—GROER (Léon de). L'architecture gothique des Xve et XVIe s. dans les anciens diocèses de Quimper et de Vannes. Etude de quelques ateliers. Thèse Ecole des Chartes, 1943. Doc dactylographié inédit.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3370857s/f1.item.texteImage
— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne, les ateliers du XVe au XVIIe siècle , 1 vol. (407 p.) - 1 disque optique numérique (CD-ROM) : ill. en coul. ; 29 cm ; coul. ; 12 cm . Note : Index. - Notes bibliogr., bibliogr. p. 373-395 Rennes : Presses universitaires de Rennes , 2014 Éditeur scientifique : Jean-Yves Éveillard, Dominique Le Page, François Roudaut. Pages 69 et 314.
—LEFEVRE-PONTALIS (Eugène), 1914. Le Faouët, chapelle de Saint-Fiacre, dans Congrès archéologique de France, LXXXIe session tenue à Brest et à Vannes en 1914 par la Société française d'Archéologie, Paris, 1919, p. 348-355.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4224131z/f512.item
— MOIREZ ( Denise), Rioult (Jean-Jacques), 1965, La chapelle Saint-Fiacre du Faouët, Dossier IA00008411 de l'Inventaire général du patrimoine.
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/chapelle-saint-fiacre-le-faouet/4613b595-0f59-4fae-8e14-169027523909
Présentation :
http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/public/annexes/IA00008411_01.pdf
http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/public/annexes/IA00008411_02.pdf
— Le Faouët et Gourin. Inventaire topographique. Paris, 1975, p 43-50.