La chapelle Notre-Dame de Lannelec à Pleyben : Deuxième partie : Sainte-Barbe .
.
Voir :
Cet article appartient à la série consacrée à Pleyben et ses chapelles :
L'église
-
La charpente sculptée de l'église de Pleyben (1571) par le Maître de Pleyben : le transept sud.
-
Le sacraire (bois polychrome, deuxième moitié du XVIe siècle) du chœur de l'église de Pleyben.
Les chapelles :
-
La chapelle Notre-Dame de Lannelec à Pleyben. Deuxième partie : Sainte-Barbe .
-
La chapelle Saint-Laurent en Pleyben. L'édifice (XVIe, 1662, 1731, 1776, 1808,...).
-
La chapelle Saint-Laurent à Rozalghen en Pleyben. Le calvaire (Bastien Prigent, vers 1555).
-
La chapelle de la Trinité (An Dreïnded) de Lanridec en Pleyben.
.
3°) Voir aussi :
Voir sur sainte Barbe :
-
Les vitraux anciens de l'église Saint-Étienne de Beauvais. La baie n°14. le Baptême du Christ, et sainte Barbe. 1550. .
.
.
Sainte-Barbe apparaît à Lannélec comme la patronne en second de la chapelle, bien qu'aucun document ne l'atteste. En effet, c'est pour elle qu'est dressée en face de Notre-Dame de Lannélec (ou de Misericorde) une niche dévotionnelle à droite de l'autel. C'est aussi elle qui figure sur le vitrail de la maîtresse-vitre.
Alors que je rédigeais cet article, j'ai réussi à avoir accès au site d'Alain Ménard kergranit.free.fr, et j'y ai découvert le rapport entre cette Sainte, habituellement considérée comme protectrice de la foudre (voir : Église Saint-Thurien à Plogonnec II : une inscription du tonnerre!.) et les Mamm al lez ou Vierges au lait. Je commence par décrire la statue, puis j'en arrive à ce point passionnant :
.
.
1. La niche et la statue de Sainte Barbe.
La niche gothique est identique à celle que j'ai décrit pour Notre-Dame de Lannelec, mais sa partie supérieure est mieux conservée, et elle possède ses deux volets. Elle porte l'inscription GRANDE . et . PVISSANte . Ste BARBE .
.
La statue de pierre polychrome du XVIe siècle grandeur nature présente Sainte Barbe avec ses attributs habituels : la tour à trois fenêtres, dont celle qu'elle a fait percer en l'honneur de la sainte Trinité ; le livre, astucieusement placé à la base de la tour comme s'il était dans une salle de lecture ; et la palme du martyre.
.
.
.
Elle est vêtue d'un manteau rouge doublé de bleu et dont la bordure, bleue également, porte des éléments carrés et dorés qui descendent jusqu'à l'inscription d'une date, 1578. Je rappelle qu'à cette date, toute la région est embrasée par la guerre de la Ligue entre le catholique et ambitieux duc de Monfort, et l'ex-protestant Henri IV qui cherche à reprendre le contrôle de la Bretagne.
Cette date m'apparaît très intéressante si on considère que cette statue et sa niche s'établissent en vis-à-vis de la statue de Notre-Dame de Lannélec, qui, elle, n'est pas datée. Les deux niches sont identiques, les deux statues paraissent de la même taille et de la même facture, leurs costumes sont très semblables, et, détail à mes yeux significatif, on retrouve chez Sainte Barbe la même chevelure retenue par un bandeau occipital que j'ai observé sur 6 des 7 Vierges allaitantes et sur Sainte Gwen. Or, aucune des Vierges allaitantes n'est datée. Si on accepte d'attribuer la même date à N.D. de Lannélec qu'à sa voisine Sainte Barbe, cela donne une indication sur la datation de toute la série des Vierges au Lait : au dernier quart du seizième siècle, avant et pendant la Ligue.
Cette date de 1578 est exactement celle de la statue de St Venec, placée en vis-à-vis de le Vierge allaitante à la chapelle St-Venec en Briec. Nous avons donc :(sd = sans date)
Vierge allaitante | socle vierge | saint patron | socle saint |
Tréguron Gouezec :sd | 1654 | saint Eloi sd | 1584 |
Kergoat : sd | sd | ||
Quillidoaré : sd | sd | ||
Kerlaz : sd | 1566 | Saint Germain | |
St Venec : sd | 1592 | Saint Venec : | 1578 |
Kerluan :sd | pas de socle | --- | |
Lannélec : sd | socle : sd | Sainte Barbe : 1578 |
Si on écarte le socle de Tréguron en l'estimant non contemporain de la statue qu'il accueille, on obtient la fourchette de datation de 1566-1592 pour les vierges au lait de Cornouaille.
.
.
.
.
.
.Outre ce manteau, le reste du costume retrouve les éléments que l'on trouvait sur les Vierges allaitantes, à l'exception bien-sûr du corselet d'allaitement à ouverture à soufflet frontal.
La longue chevelure ruisselante est un autre point commun avec les Vierges ; je la considérais comme métaphorique de l'écoulement du lait, et nous verrons qu'ici encore cette interprétation n'est pas à écarter.
.
.
.
le culte de Sainte Barbe en Europe.
Sainte Barbe, ou Sainte Barbara, Santez Barba en Breton, est une sainte martyre qui aurait vécu au IIIe siècle à Heliopolis.
Les premières versions du Mystère de sainte Barbe apparaissent au VIIe siècle en Orient, d'où des reliques sont rapportées en de nombreuses villes d'Europe (Burano à Venise, à Plaisance en Italie, Abbaye de Sainte-Barbe-en-Auge en 1050, cathédrale de Liège, aux Feuillants à Paris, etc...) La fête catholique est instituée le 4 décembre dès le XIIe siècle à Rome. Vincent de Beauvais mentionne la sainte dans son Speculum Historiale de 1258, Jacques de Voragine donne le récit de sa vie dans la Legenda aurea en 1261-1266 (traduction française en 1476) mais les principaux témoignages iconographiques de son culte datent du XVe siècle en Flandre puis en Italie : peintures de Jan Van Eyck en 1437 ( Musée royal des Beaux-Arts d'Anvers), de Robert Campin en 1438, Cosimo Rosselli en 1468 (Musée des Offices, Florence), de Hans Memling en 1479 (Metropolitan Museum de New York), de Lorenzo Lotti en 1524.
L' église de Savigny (Manche) possède un cycle de peintures murales du XIVe.
Le récit de Jacques de Voragine ici page 296 : link
.
.
2. Culte de Sainte Barbe en Bretagne
ou : les éléments apportés par le site d'Alain Ménard kergranit.free.fr: Dans sa description de la chapelle de Lannélec, remarquable par la qualité des photographies et l'art de faire jouer la lumière, je commence par lire une présentation très bien rédigée des divers éléments que j'ai pu trouver dans la Notice de 1938 d'Henri Pérennés ou dans d'autres sources. Mais j'y trouve surtout un texte d'Anatole le Braz, auquel je n'avais pas eu accès, Les saints bretons d'après la tradition populaire en Cornouaille, 1893-1894. L'extrait qui y est cité, et que je trouve aussi ici :link m'apporte trois éléments :
- une description de Lannélec vers 1883, que j'ignorais
- la mention d'un "mystère de Sainte Barbe de 1557 réédité par Ernault",
- La mention d'une sainte Barbe protectrice des femmes enceintes dans la citation suivante :
"Ce qu'on oublie parfois, c'est qu'elle tient aussi sous sa sauvegarde les femmes enceintes. "Elles me sont plus particulièrement chères, dit-elle à Dieu en mourant ; faites-en des mères joyeuses ! Que leurs enfants viennent à bien, pour recevoir la grâce du baptême !" Ainsi s'explique qu'on ait placé sa statue, dans l'église de Lanneléc, en face de celle de Notre-Dame. Les femmes sur le point d'accoucher s'agenouillent devant l'une, et devenues mères, n'ont qu'à passer à l'autre. "
.
Il me reste à explorer ces pistes :
Emile Ernault (1852-19838)
Ce professeur de langue et littérature classique (latin et grec ancien) à l'Université de Poitiers, né à Saint-Brieuc et membre actif de la Société d'émulation des Côtes du Nord s'est avant tout consacré à l'étude le la langue bretonne : il a étudié et édité des cartulaires et gloses en vieux-breton et des mystères médiévaux en moyen-breton.
En 1885, il donne la première édition française du Mystère de Sainte Barbe de 1557 :
Le Mystère de Sainte Barbe, tragédie bretonne, texte de 1557, publié avec traduction française, introduction et dictionnaire étymologique du breton moyen, Société de Bibliophiles bretons et de l'histoire de Bretagne, Nantes 1885 404 p, in 4° :link
C'est en réalité La Villemarqué qui est à l'origine de cette publication, car c'est lui qui a initialement recopié un exemplaire de 1557 appartenant à M. de Saint-Prix et qui a commencé à le traduire avant de confier la suite du travail à Ernault.
.
Le Mystère de Sainte Barbe en breton.
a) les mystères bretons et le contexte historique .
J'apprends dans un article de Jean-François Courrouau, L'imprimé religieux en langue bretonne (1526-1660), Ann. Bret. Pays de l'Ouest, 115-3, 2008, 57-79, link que ce Mystère est la première Vie de Saint éditée en breton, précédée par le Catholicon (1499), le Missel breton (1526) et le Mystère de la Passion (1530). Viendront ensuite une Vie de Sainte Catherine ( 1576) et la Vie de Saint-Yves (1623). Mais il faut adjoindre à ces livres imprimés les manuscrits qui ne seront parfois édités qu'au XIXe siècle, et imaginer la tradition orale, attestée par les mentions de mystères joués dans les églises puis à l'extérieur.Je complète par les éléments que je peux glaner pour donner cette liste (non qualifiée) enrichie de repères historiques (source :Kervarker link )
- fin XVe : manuscrit de Buhez santez Nonn, la vie de sainte Nonne écrit probablement par un moine de l'abbaye de Daoulas et édité en 1837 par Le Gonidec, puis récemment par l'équipe du CRBC.
- 1499 : Catholicon de Jehan Lagadeuc publié à Tréguier (dictionnaire trilingue)
- 1500 (vers) : vitrail de Sainte Barbe à Lannelec.
- 1530 : publication en un seul ouvrage de deux poèmes chrétiens,Tremenuan an Ytron Guerches maria et Pemzek Levenez Maria.
- 1530 : mystère de la Passion publié à Paris : Aman ez dezrou an Passion ha goude an Resurrection [...], e Paris a neuet imprimet...(Ici commence la Passion ...publié à nouveau à Paris) réédité à Morlaix en 1622 puis par La Villemarqué en 1865.
- 1532 : Réunion de la Bretagne et de la France.
- 1539 : Edit de Villers-Cotteret imposant le français comme langue officielle (documents administratifs)
- 1544 :Le mystère breton Dismantr Jerusalem est composé par le léonard Fiekr Mezanstourm.
- 1545-1563 : Concile de Trente.
- 1557 : Mystère vie de sainte Barbe
- 1575 : publication du Miroer Mort en breton
- 1576 : Vie de sainte Catherine : Buhez an Itron sanctes Cathell
- 1576 : Cathechisme,
- 1578 : statue de sainte-Barbe à Lannelec,
- 1609 : Mystère de la Passion, ed. Marciguay à Saint-Malo
- 1636 : Albert Le Grand de Morlaix publie à Nantes en français Les Vies, gestes, mort et miracles des saints de la Bretagne Armorique.
- 1650 : Nouelou Ancien ha devot par Tangui Gueguen
Il faudrait y ajouter les cantiques imprimés sur feuille volante ou seulement mémorisés, qui reprenaient la trame des Mystères : ainsi, le canticou Histor eus a vuez Santez Barba, Morlaix, sd, cité par Ernault.
.
b) le Mystère et Vie de Sainte Barbe .
Il y eut deux éditions ; La Villemarqué a travaillé sur une copie incomplète de la première, et Ernault a complété cette copie à partir de la 2ème édition.
1. Aman ez dezrou buhez sante Barba dre rym euel maz custumer he hoary en goelet breiz, Imprimet E Paris euilt Bernard de Léau pe huy a chom e Mouutroulez var pont bourret en Bloez [15]57, British Library : C.40.b.49
2. Aman ez dezraou buhez santes Barba dre rym, eues maz custumer he hoary en goelet Breiz. Gant euriou an itron sanctes Barba hac he Officou amplamant, E Montroulez, gant Ian Hardouyn, 1647 (BnF : Res Yn-16). Ed. Ernault, 1885
Ce titre signifie : "Ici commence la vie de Sainte Barbe en vers, comme on a coutume de la jouer en Basse-Bretagne, Avec les heures de Madame Sainte Barbe et les offices, tout au long."
"comme on a coutume de la jouer" : en effet, les mystères étaient joués par des groupes parfois réunis dans des confréries. A Rennes, la première représentation attestée a lieu le 25 mai 1430 jour de l'Ascension, pour donner devant le duc Jean V le Mystère de la Passion. La confrérie du saint Sacrement se consacre dès le XIVe et jusqu'en 1520 à l'exécution scénique du mystère. Des confréries de Sainte Barbe (attestée à Rouen) furent constituées, peut-être dans le même but. S'il semble que les premiers mystères produit soient des mystères "sacrés" tirés de la Bible, en premier lieu le mystère de la Passion ( dès le XIe siècle), les mystères "religieux" tirés de la vie des saints sont également donnés, comme le Mystère de saint Martin. En langue français, deux manuscrits de Mystère de sainte Barbe ont été conservés, l'un du XVe siècle, l'autre du XVIe. Le premier, riche de 20 000 vers, met en scène cent personnages parlants.
Selon E. Ernault, le Mystère de Sainte Barbe fut, après le Mystère de la Passion, l'oeuvre la plus jouée. Cette sainte était invoquée contre la mort subite, et on relatait les miracles où un homme victime d'un accident mortel priait la sainte : celle-ci intervenait pour maintenir en vie l'agonisant jusqu'à l'arrivée d'un prêtre qui administrait les saints sacrements et évitait au malheureux un séjour éternel en enfer. Le succes de sainte Barbe se comprend à la lumière de la mentalité des hommes du Moyen-Âge terrorisés par la hantise de mourir sans confession.
- En juin 1476, on joua à Compiègne un mystère (français) de Sainte Barbe donné en trois jours (Emile Ernault)
- En 1493, il est signalé que la Vie et histoire de Madame Sainte Barbe fut jouée à Laval.
- Au XVIe siècle, le Parlement de Bretagne interdit les représentations publiques des mystères à la suite de rixe mortelle durant un Mystère de Sainte Barbe à Domolain près de Guerches de Bretagne ( le Parlement de Paris prononça la même interdiction le 18 novembre 1548)
- Le Concile de Trente interdit également la représentation des Mystères.
.
.
c) Culte de sainte Barbe en Bretagne : édifices et iconographie.
Dans le but de situer la statue de Sainte Barbe de Lannelec sur le plan historique, je recueille encore quelques dates :
- 1489 : construction de la chapelle Sainte-Barbe du Faouët
- 1538 : vitrail du cycle de Sainte Barbe à Montcontour
- 1578 : Sainte Barbe à Lannélec
- 1619 : chapelle Sainte-Barbe de Roscoff
.
Les volets historiés de la niche.
Ils illustrent la légende de Saint Barbe, que j'avais déjà évoquée ici :
Église Saint-Thurien à Plogonnec II : une inscription du tonnerre!.
Ils se lisent de bas en haut.
Rappelons que Sainte Barbe, libanaise d'Heliopolis au IIIe siècle, persiste dans sa foi chrétienne et dans sa détermination à refuser tout mariage et résiste aux ordres pressants de son père, le satrape Dioscore, qui l'enferme dans une tour avant de partir en voyage. A son retour, il constate une troisième fenêtre qui n'était pas dans ses plans :
.
1. Sainte Barbe, Dioscore et la tour.
.
Ier épisode : Dioscore amène sa fille devant la tour qu'il a fait bâtir pour y mettre à l'abri sa virginité :
DIOSCORE
199. Barba, ma merch net he derch ha guerch glan, Denesset lem dirac ma dem breman, Huy heu noman dreis pep hunan ganet Ma holl esper singulier ha querhaff Ham holl buhez noz dez seul maz vezaff Ac e caraff muyhaff nen nachaff quet.
200. Rac se seder emeux sclaer prederet Ober fournis flam dam guis diuizet Un tour flour net doz miret hep quet sy Enn haff affet secret ez vihet plen Perguen eno na no guelo neb den Bezet certen bizhuyquen nep heny
SANTE BARBA 201. Ma tat quer, pebez pridirit Na pe dre dezen eu dihuy Na pez ouz eux huy studiet Ma lacat gardis en prison, Priuet a gracc en pep faczon? Re diraezon ez sarmonet.
|
DIOSCORE
Barbe, ma fille, pure et chaste vierge, approchez à l'instant en ma présence; c'est vous qui êtes en ce monde, plus que personne, mon espoir le plus cher, ma vraie vie, nuit et jour, tant que j'existerai . Je vous aime par dessus tout, je ne vous le cache pas.
C'est pourquoi j'ai songé sérieusement à faire une tour épaisse, belle, disposée à mon gré, une tour élégante pour vous y bien garder. Vous y serez parfaitement au secret et à votre aise, et personne ne vous verra plus désormais, soyez-en sûre.
SAINTE BARBE Mon cher père, quel souci prenez-vous, quelle est votre intention? A quoi songez-vous, de me mettre dans une dure prison, privée de tout agrément ? Je n'ai nullement méritée d'être emprisonnée, croyez-moi.
|
.
.
2ème épisode : Le panneau sculpté en bas-relief montre plutôt l'épisode où Dioscore rentre de son voyage, pressé de découvrir si la tour qu'il a ordonné avant son départ est conforme à ses souhaits et où il découvre tout-de-suite la fenêtre que Sainte-Barbe a fait ajouter aux deux ouvertures prévues sur les plans. Aussi suspicieux et aussi jaloux que Marcel face à Albertine prisonnière, il apprend du contremaître que l'ordre a été donné par la fille ; tandis que l'entrepreneur, traité de Diot, sotin, babouin, mastin quy (imbécile, sot, babouin, fils de chien), s'enfuit sans attendre le réglement de sa facture, Barbe est intérrogée : elle répond que "trois donne plus de clarté que deux", que "c'est maintenant la mode", que Try frenest en re onestaff Da sclaerhat muyhaff, ne raff sy "trois fenêtres, c'est ce qu'il y a de plus convenable, pour éclairer mieux, je le sais", avant de déclarer enfin :
Rac tri person tron onest
En un test en un maieste
A un coudet, a un edit
Un ster, un esper, un merit,
Un apetit, un deite :
" Parce qu'il y a trois personnes dans le ciel brillant, qui ont une seule nature,une seule majesté, une seule pensée, une seule puissance, une seule dignité, un seul désir, une seule vertu, une seule volonté, une seule divinité".
C'est le moment représenté par l'artiste : Barbe désigne à la fois les trois fenêtres de la tour et le ciel brillant avec les trois personnes qui s'y trouvent, pendant que le malheureux paternel qui est sur des charbons ardents s'arrache les cheveux. Il n'est pas au terme de son supplice puisqu'il va avoir droit à un exposé de théologie avant d'entendre sa Barbie chérie traiter ainsi les dieux qu'il vénère : "Je leur cracherais bien à la face si j'en trouvais l'occasion ; je les détruirais en tout lieu ces sales démons puants et maudits odieusement fabriqués pour la superstition par des réprouvés !" (strophe 316 : Crachet oar tro en ho face ) . Et il s'arracherait la barbe par surcroit (à défaut d'arracher sa Barbe aux influences néfastes qui l'ont ainsi pervertie) s'il apprenait ce que les spectateurs du Mystère ont découvert tout à l'heure sur les tréteaux dréssés sur le placître de Pleyben : en son absence, sa fille a adressé un messager à Origène en personne, qui lui a envoyé d'Alexandrie son jeune diacre Valentin. Lorsqu'il est reparti, elle en savait plus qu'un docteur en Théologie sur les trois hypostases du Dieu unique, la consubstantialité, les errements du subordinatianisme. Et elle vous récitait Polycarpe de Smirne comme votre grand-mère récitait ses départements, leur préfecture et leurs sous-préfectures !
.
.
2 . Le miracle de la fontaine :
La scène se place entre le moment où Barbe est conduite dans sa prison, et le retour de son père :
.
.
.
Mystère de sainte Barbe, strophes 255 à 258 : sainte Barbe se rend à la fontaine "car son âme a envie de boire" mais elle la trouve tarie. Elle se met à genoux et implore le Seigneur ; quand elle se relève, elle la trouve remplie. link
L'image montre Dieu-le-père, coiffé de sa tiare préférée et tenant en main gauche le monde crucifère dont il ne se sépare pas, qui apparaît dans les nuées à Santez Barba pour la bénir.
Dieu partage avec la Bretagne ce point commun de n'apparaître que dans les nuages ; c'est comme ça, on ne les changera pas.
258. Huy goar en mar dre hoz caret Emeux ent espres dileset An bet ; recevet ma pedenn Ha reit diff dont mat en stat man Evit enaff anezaff glan Quent monet breman ahanenn.
|
Vous savez sans-doute que par amour pour vous j'ai complètement abandonné le monde recevez ma prière et donnez-moi à l'instant de bonne eau pure, pour que j'en boive avant de m'éloigner de ce lieu. |
.
.
3 La grande colère de Dioscorus.
Le satrape (c'est le titre et la fonction du père de Barbe, qui gouverne une satrapie, une province de l'empire Perse) vient d'entendre la profession de foi de sa fille et a perdu ses longs cheveux. Il avait donné la meilleure éducation à sa fille, l'avait entourée (au sens propre) de son affection, la promettait aux joies ineffables du mariage, et il découvre qu'elle tient des discours antisociaux, qu'elle a un comportement alimentaire déviant (ne buvant l'eau que d'une certaine fontaine à l'exclusion de toute autre, se nourrissant de baies et d'herbes cueillies autour de cette source), qu'elle se détourne ainsi des circuits économiques traditionnels, qu'elle voue à la numérologie consacrée au chiffre trois une vénération inconsidérée, qu'elle s'isole en suivant les préceptes anorexigènes d'un gourou d'Alexandrie et qu'à l'âge où toutes ses amies jouent avec leur poupée Mademoiselle (ann Nemezell) passe son temps le nez fourré dans les ouvrages d'un certain Justin (de Naplouse), d'un Ignace (d'Antioche) et d'un Irénée (de Lyon). Il n'est pas content content :
.
.
.
Dioscorus 357. A ! paillardes ! pautres esou Penauz ez den yen az guenou Blasfemaff ma doeou louen Hac y heb goall dre ho gallout ouz gouvernn an bet heb quet dout Hac en pep rout oz ma souten.
358. Me ray dit cruell meruell yen ; En place man breman oar en men Ez renty dyen da eneff An despet dan stinn az lignez Mez lamo pep tu a buhez, Me toe dam fez, gant ma clezeff.
(Santa Barba a pet doe di difenn, ha neuse un men bras en em digoras hac he euzas ouz he tat a predere neuse he lazaff )
|
357 Ah, coquine, fille dévergondée, comment ta bouche ose-t-elle blasphémer froidement mes dieux bienheureux eux qui sans faute, par leur puissance, gouvernent évidemment le monde, et me soutiennent de toute façon!
358. Je te ferai cruellement sentir la froide mort, en ce lieu même A l'instant, sur cette pierre tu vas rendre l'âme Malgré ta naissance et ta race je t'enléverai complétement la vie, Je le jure par ma foi, avec mon épée.
( Sainte Barbe prie Dieu de la défendre, et alors une grande pierre s'ouvrit et la cacha à son pére, qui voulait la tuer).
|
.
.
4. La mammectomie bilatérale, ou le supplice de Sainte Barbe:
Cette scène ne survient qu'après une cinquantaine de pages du Mystère de Sainte Barbe où sont relatés les faits suivants : Ayant perdu de vue sa fille, le père aveuglé de fureur part à sa recherche pour la tuer ; deux bergers l'ont vu passer, le bon berger Rivallen nie l'avoir vu mais le méchant Gueguen révèle sa cachette et Dioscore s'empare de sa fille. Il la menace puis l'emprisonne avant de se rendre auprès du Grand Prévot pour la faire châtier.
Le Prévôt fait convoquer Sainte Barbe et l'exorte d'un ton bonhomme à répudier ses convictions coupables, mais devant son refus, il appelle les bourreaux ( ce sont Les sieurs Loupant , Agripant, Claudin et Glouton) pour une surenchère de supplices successifs : strophes 450 à 490
Mettez-la à nue et attachez la
Promenez la en la battant qu'il ne reste machoire ni lèvre qui ne soit vigoureusement frappées.
Procurez-vous de durs bâtons et des nerfs de boeufs solides
Et des fléaux, et de nouveaux fouets aux noeuds durs
Placez-la dans un tonneau pour y danser, plantez-y mille clous, et roulez-la à travers la ville
Sus, sus, faites qu'elle sente le supplice, avancez vite, je la veux transpercée et harassée,
les membres disloqués. Froids vilains, est-ce un jeu que vous avez fait? Fustigez-la !
Vos batons et des fouets bien durs ! Remplissez ses plaies de sel ! Frottez-la promptement, dur et serré !
Habillez-la d'une robe de crin et jetez-la en prison pour qu'elle soit déchirée mutilée chair et peau.
En prison, Sainte Barbe reçoit la visite et la consolation de Jésus et des anges. Ses plaies guérissent miraculeusement. Convoquée à nouveau devant le Prévôt, elle continue à refuser d'adorer "les idoles, stupides épouvantails faits par l'artifice de vils fripons", et son martyre reprend : elle est brûlée par des torches, frappée avec des marteaux, avec des bâtons, et enfin, strophe 593 page 138 : link : on trouve la didascalie :
Aman ez troucher e diu bron, "Ici on coupe les mamelles".
.
.
.
.
593. Squegiett diff astriff e diu bronn Quen disaczun ha da un gonn Digoar he poull calon gronnet Mar guelher frost he holl costou Gant travell hac he bouzellou Gruet hv ent re dou badouet
|
593. Arrachez-moi violemment ses mamelles, sans plus de façon qu'à une truie. Tirez-les de sa poitrine, qu'on voit toutes ses côtes à nu et ses entrailles, que la douleur la fasse défaillir. |
.
.
Agripant possède un bon couteau pour tailler dans les mamelles, celui de Loupant n'est pas mauvais non plus, mais Claudin propose son braquemart et voilà Barbe mutilée et bien punie, mais la Sainte pense § 601 à son Dieu, son roi et son créateur, son souverain et son rédempteur, son protecteur si bienveillant, son maître si cher et si puissant, sa joie, sa pensée unique en ce monde, et tout le reste l'indiffère parfaitement.
N.B : Le texte ne parle pas de cette abominable paire de tenaille particulièrement cruelle et pénible à regarder, mais simplement d'honnêtes couteaux aiguisés (contell) et de braquemarts (braquemar) bien tranchants, capables "de les couper parfaitement, tranquillement et en un clin d'oeil", "tout net et séparés" : de la belle ouvrage, pas ce travail de cochon qu'on nous donne ici à voir et qui déprécie le métier.
Remarque : j'ignore quelle est la raison d'être du pot de fleur noir qui est placé en équilibre sur l'auréole bien méritée de Barbe.
Barbe est ensuite condamnée à être promenée nue et à exposer son triste état d'amastozoaire à la foule. Mais Jésus en son infinie compassion envoie ses anges qui couvrent (§ 628) la vierge martyre d'un voile blanc. Elle épuise ses bourreaux qui sont éreintés et déshonorés de voir les plaies qu'ils infligent guérir comme des bobos. Le Grand Prévôt a administré la question ordinaire, la question extraordinaire et les tortures additionnellles mais n'a pas encore la science des Dominicains de l'Inquisition avec le "bouc des sorcières", l'écartèlement, l'estrapade, les grésillons ou la poire d'angoisse : il rend son tablier, il renvoie la fille (aussi fraiche et intacte, aussi vierge de toute blessure qu'à son arrivée) à son père.
.
.
5. Barbe traînée par les cheveux par le cheval de son père.
.
.
J'éviterai de plaisanter sur ce satrape barbu sur son cheval barbe attrapant sa Barbe par la queue de cheval, car nous avons affaire ici à ce drame pathétique qui se répète de générations en générations, celui où l'amour insensé d'un père pour sa fille se transforme en une haine insensée.
Dans le texte (page 93), cette scène n'apparaît en réalité que comme une menace verbale, avant que Dioscore ne sollicite la justice et ses bourreaux.
.
394. En amguin me haz trahino E ry an blev hac az blevo Me promeno ne vezo sy me rayguiridic da quic noaz Maz yeno gant poan hac anoaz Quent evit henvoaz da goazy |
Je te trainerai par les cheveux et te briserai le corps je te promènerai ainsi je ferai souffrir ta chair nue Si bien qu'avant cette nuit tes veines se glaceront de peine et d'angoisse. |
.
.
6. Barbe décapitée et sa vengeance posthume.
.
.
Résumer les trente pages de la fin du Mystère de Sainte Barbe (p. 158-187) par une image ou quelques phrases semble aussi dérisoire que, pour un mélomane, de "raconter" le troisième acte de la Traviata en citant sans les costumes, l'orchestre et la Diva, l'aria Ah, gran Dio, morir de Violetta.
De la strophe 684 à la strophe finale 812, le spectateur a assisté au long débat de Dioscore et de sa fille, les amers reproches d'un père effondré alternant avec les amers reproches d'une fille exaltée, aux atermoiements de Dioscore conscient de l'absurdité de son geste mais acculé par l'intensité de sa hainamour à le commettre. Comme cela a été annoncé au lecteur par la didascalie " Ici les diables excitent Dioscore à se hater de tuer sa fille", il a assisté à l'intervention de Satan et de Bezlebut (sic) pressés d'en finir, puis aux débats interminables entre Conscience et Bezlebut, et au malheur du père. Nous sommes très loin de la Légende simplifiée où un roi foncièrement cruel tue sa fille sans regret, et aucun mouvement, aucun battement, aucun trésaillement de cette âme paternelle n'est omis :
.
738. Ma coudet so quen tristidic ma em guelet quen reusidic Quen louidic quen milliguet Ha bezaff suget affet pur Da muntraff ma goat ham natur A maleur ezouff furmet. |
738. Mon coeur est si triste qu'on me voit misérable, infâme et maudit, exposé à être le meurtrier de mon sang et de ma race. Ah, je suis bien malheureux ! |
.
Après ce long débat de conscience, la mort dans l'âme, Dioscore excité presque en vain par les deux démons finit par s'exécuter et décapite sa fille (§781). Jésus intervient et s'adresse au démon :
790. "Écoute, Satan, chef criminel des démons, ouvre à l'instant l'abîme plein d'amertume et de glace horrible ; dévore de ton feu ardent Dioscore ce voleur glouton, ce tyran cruel et odieux, ce chien envieux, ce perfide sans excuse."
.
Sathan 793. Ordrenaff tizmat en stat man Foult ha curun dre fortun glan Quemesquet a tan breman scaff Hac et presant gant tourmant bras De dirumpaff an quentaff pas Dann iffern diblas az gassaff. |
Satan 793. Je veux qu'à l'instant même la foudre et le tonnerre mélés de feux le précipitent avec grande violence dans l'enfer horrible et odieux. |
.
C'est le bouquet final pour le spectateur impressionné par tout un appareil dramaturgique de Daemon ex machina, tout un vacarme et une pétarade exécutée en coulisse, des éclairs, un spectacle de pyrotechnie et de la fumée à travers laquelle Dioscore foudroyé disparaît tel Dom Juan dans l'acte V du Festin de pierre.
.
.
Épilogue :
Le prêtre Valentin vient enterrer la Sainte et lui promet de construire une chapelle sur sa tombe ; tout son désir est de finir ses jours à y prier, et on comprend qu'il en était secrètement amoureux lorsqu'il donne la dernière réplique de la pièce, strophe 813 :
Hac an place man da vianhaf Pan duy an dez finuezaff Ez desiraff nen nachaff quet Bout neterret en hoz metou Mar plig gant doe guir roen ploeou reiff diff e gracou golouet.
"C'est ici encore que je désire, quand viendra mon dernier jour, être enterré auprès de vous si Dieu, le vrai roi des hommes, veut bien m'éclairer de sa grâce".
Le rideau tombe sur Valentin pleurant sur la tombe, il pleut sans-cesse sur Pleyben comme sur Brest, et les gens disent que venant de la scène on entendit crier ton nom :
Barbara !
.
.
Sainte Barbe et le culte de la fécondité.
Comme Anatole le Braz le rappelait, la présence de Sainte Barbe face à la Vierge allaitante de Lannélec se justifiait par le fait que cette sainte n'était pas seulement la patronne des mineurs, des artificiers, des pompiers, de l'US.Navy ou de la R.AF, mais qu'elle était aussi invoquée par les femmes souhaitant des enfants ou demandant du lait pour nourrir ces enfants. En Géorgie, c'est l'attribution principale de Santa Barbaroba que de guérir les enfants ou de donner un coup de main à la conception.
Dans le texte du Mystère et Vie de Sainte Barbe, c'est lors de la belle prière que la sainte adresse à Dieu au moment de mourir qu'elle se déclare protectrice des mères: § 661 :
.
661. Han groaguez espres brasesou An re so nez ma caresou Gruel y gant gnou mammou louen Maz duy leal ho bugalez Da quempret an stat a badez Dre trugarez ma ne uez quen.
|
661.Et surtout les femmes enceintes qui sont particulièrement mes amies, faites-en devant tout le monde des mères joyeuses ; que leurs enfants viennent à bien pour recevoir la grâce du baptème. Par pitié, du moins, accordez-le moi. |
.
C'est surtout les fontaines dédièes à la Sainte qui reçoivent les dévotions de jeunes filles en mal de mari et qui viennent jeter dans le bassin des épingles ou des pièces de monnaie, au Faouët bien-sûr où cette pratique est célèbre, à Quistinic (56),à Trémorel (22), Plestin-les-Grèves, Noroy-le Baud, Pont-Point (Oise), Le Relecq-Kerhuon (29), Berrien (29), et Moustoir-Ac où la fontaine jumelle les statues de Sainte Barbe et de la Vierge.
Enfin un auteur ancien signale qu'on trouvait dans plusieurs couvents surtout en Italie des fioles de "lait de Sainte Barbe".
.
Analyse de la versification :
La grande partie de la littérature bretonne du XVIe siècle qui nous est parvenue découle de la tradition orale et est écrite en vers (à l'exception de la Vie de sainte Catherine et du Cathéchisme de 1576), et elle obéit à une technique de versification qui n'est pas attestée en français, et qui disparaîtra en 1650 : celle des rimes internes qui fait rimer la dernière syllabe du vers avec celle se trouvant généralement avant la césure. Il s'agirait très probablement d'une technique d'origine galloise introduite en Armorique avec l'émigration des Bretons au plus tard au VIe siècle,pour perdurer pendant 1000 ans ce qui ne peut s'expliquer sans écoles locales d'art poètique, hélas non retrouvées.
Source : Gwennolé Le Menn, Bilinguisme et trilinguisme en Bretagne, Bull. Assoc. étude humanisme 1982, 15-1, pp. 30-37. link
Émile Ernault avait déjà parfaitement analysé la versification du Mystère de Sainte Barbe, en la comparant à celle du Mystère de la Passion et de la Vie de Sainte Nonne ; il y a relevé des octosyllabes et des décasyllabes ainsi que des vers de 5 pieds, réunis en strophes de six vers. Il note le reprise de la rime du dernier vers d'une strophe au début de la strophe suivante. Il précise la régle des rimes internes en signalant que la finale des deux premiers vers d'une strophe (ou d'une demi-strophe) doit rimer avec l'avant-dernière syllabe du troisième : j'ai surligné cela en rouge.
J'ai donc tenté de retrouver ces rimes internes dans le texte que j'ai cité en premier :
.
199. Barba, ma merch net he derch ha guerch glan,
Denesset lem dirac ma dem breman,
Huy heu noman dreis pep hunan ganet
Ma holl esper singulier ha querhaff
Ham holl buhez noz dez seul maz vezaff
Ac e caraff muyhaff nen nachaff quet.
200. Rac se seder emeux sclaer prederet
Ober fournis flam dam guis diuizet
Un tour flour net doz miret hep quet sy
Enn haff affet secret ez vihet plen
Perguen eno na no guelo neb den
Bezet certen bizhuyquen nep heny
SANTE BARBA
201. Ma tat quer, pebez pridiry
Na pe dre dezen eu dihuy
Na pez ouz eux huy studiet
Ma lacat gardis en prison,
Privet a gracc en pep faczon?
Re diraezon ez sarmonet.
.
.
Bilinguisme en Bretagne au XV et XVIe siècle: il est singulier de constater qu' à la même époque où les habitants de Cornouaille et du Léon assistent à des Mystères en breton, lisent des missels et des catéchismes dans cette langue, dans laquelle ils écoutent les sermons et prédications, c'est en français qu'ils font graver les inscriptions votives et de construction sur les murs et sur les socles des statues de leurs sanctuaires.
.
.
Rubrique culinaire : la Sliqua.
Sainte Agathe avait ses Minni di vergine ou Seni di vergine, et ses Olivette di sant'Agata...
Sainte Gwen avait ses pupazza frascatana... Vierges allaitantes V : Saint-Venec à Briec : sainte Gwen Trois-mamelles et ses fils
Sainte Lucie ses biscotti di Santa Lucia,
et Sainte Barbe a la Sliqua :
La Sainte-Barbe tombe le 4 décembre, tous les pompiers et artilleurs le savent. Pour les chrétiens orthodoxes, c'est le 17 décembre, et ce jour-là, en Géorgie, on sert la Lobiani, une pâtisserie à base de haricots. En Macédoine, on nomme Sainte Barbe Varsava, et on désigne aussi de ce nom le plat de fête à base de céréales proche du koliva rituel qui est un symbole de résurrection.
Mais au Liban, la Sainte Barbe, Eid-il-Burbara est une fête particulièrement célébrée (fériée au Liban, en Palestine, en Syrie et en Jordanie) ; c'est surtout la veille du 4 décembre que les enfants miment la fuite de Barbe hors de sa tour, en se déguisant et en allant quémander de quoi subsister, en l'occurrence plein de friandises. C'est aussi une fête des céréales ( argument supplémentaire pour relier ce culte à une fête de la fécondité, comme la fête romaine de Bona Dea les 3 et 4 décembre, réservée aux femmes, et consacrée à la fertilité féminine), et pour "faire barbara", les libanaises préparent une bouillie de blé, sucrée, parfumée à l'anis et garnie de graines de fruits secs, ou de graines de grenade (grand symbole de fécondité à nouveau) : voilà le plat que l'on nomme la Sliqua (photo infra).
Le culte lié aux céréales, et qui veut aussi qu l'on plante alors toutes sortes de graines de lentille, de haricot ou de pois pour les voir germer pour Noël où elles décoreront la crèche, est lié à une version de la légende où c'est un champ de blé qui a dissimulé la jeune fugitive à son père en poussant magiquement, et non un simple menhir comme dans la version bretonne.
voir : http://www.traiteur-a-domicile.net/4-categorie-10158473.html
L'image de la Sliqua est empruntée à :http://www.christelleisflabbergasting.com/2010_12_01_archive.html
.
.