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14 septembre 2024 6 14 /09 /septembre /2024 21:38

La Marie-Madeleine pénitente (huile sur toile, 1630-1635, collection Sursock) d'Artemisia Gentileschi exposée  devant la fresque de Marie-Madeleine au pied de la croix du couvent de Santa-Chiara de Naples.

 

Retrouver, parmi les 2200 articles de ce blog, surtout consacré au patrimoine breton, ceux qui concernent la figure de Marie-Madeleine tiendrait de la gageure, puisqu'il faudrait citer tous ceux décrivant les calvaires, les maîtresse-vitres des Passions du XVIe siècle, les Déplorations, les Mises au tombeau, les représentations du Noli me tangere, les Apparitions du Christ ressuscité, les Trois Maries etc, etc.

Mais ce n'est pas essentiel, puisque la figure de Marie-Madeleine qui y est présentée est principalement celle qui a été en faveur, notamment sous l'impulsion des franciscains, avant la Contre Réforme, exemple de la mystique des larmes versées devant le sang versé par le Christ en croix, ou celle, portant le flacon d'aromates, des soins tendres apportés au corps du Christ. 

Celle-ci est bien différente de la Madeleine repentante qui prédominera à partir de la fin du XVIe siècle , et que nous pourrions nommer Madeleine du Renoncement (au Monde et à ses lucres, à la beauté, aux richesses, aux plaisirs et aux sens).

 

Cette Marie-Madeleine-là est une femme pécheresse, qui, après une conversion, un bouleversement, adopte les valeurs de la solitude, de l'ascèse et de la prière et devient, dans les œuvres des peintres, une figure de dénonciation de la Vanité, parallélement aux tableaux de natures mortes.

Ce modèle de mortification, bien triste, a permis aux meilleurs peintres de l'art baroque de nous laisser des  chefs-d'œuvres,  et le premier d'entre eux est le Caravage, qui saisit l'occasion de détourner la leçon de morale au profit de peintures pleines d'érotisme d'une femme exaltée et troublée.

Marie-Madeleine repentante, 1593-1594

Conversion de Marie-Madeleine (ou Marthe et Marie-Madeleine), vers 1598

Marie-Madeleine en extase, 1606

Marie-Madeleine repentante, 1593-1594, Le Caravage, Galerie Doria Pamphili, Rome

 

Artemisia Gentileschi (Rome 1593-Naples v. 1656), après avoir vécu une dizaine d'années à Rome, s'installa en 1630 à Naples, une ville d'une extraordinaire vivacité artistique.

 Elle était une disciple du Caravage, et on lui attribuait jusqu'à présent quatre Madeleine pénitente :

Mais en 2022, deux nouveaux tableaux sont attribués à la peintre, deux œuvres jusqu'alors anonymes qui se trouvaient dans le palais Sursock à Beyrouth, fortement endommagées par les explosions dévastatrices de 2020. Hercule et Omphale, et ... une Madeleine pénitente datée vers 1630-1635, peu après  l'arrivée d'Artemisia à Naples, période pendant laquelle les tons jaunes et bleus abondent dans ses peintures.

 Moins endommagée que l'Hercule et Omphale qui dut être longuement restauré au Getty Museum,  la toile fut l'une des pièces maîtresses de l'exposition Maddalena, il mistero e l'imagine organisée en 2022 par les Musées de San Domenico de Forlì. En 2024, elle est exposée dans l'une des salles du monastère de Santa-Chiara à Naples. Elle devrait rejoindre Beyrouth et le Palais Sursock , en cours de restauration.

 

 

 

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La Madeleine repentante (huile sur toile, 102 x 118 cm, vers 1630-1640) d'Artemisia Gentileschi.

C'est la seule toile exposée dans cette salle, à l'opposé de la peinture murale de la Crucifixion. La toile diffère beaucoup du tableau homologue du Caravage, où la sainte qui semble effondrée est peinte après son geste de dépouillement, le visage en larmes retombant sur la poitrine, tandis que le collier rompu, ses bijoux et son flacon de parfum sont posés sur le sol.

Ici,  la sainte est représentée dans un moment de dialogue avec le divin, ses yeux, certes rougis ne sont pas pleins de larmes  mais brillants d'exaltation, et c'est une aspiration intérieure, plutôt qu'un tourment, qui la conduit consciemment au geste du renoncement à la vanité, représenté par le collier de perles au fil rompu, mais encore en place. De même, les boucles d'oreilles n'ont pas été arrachées, comme sur la toile du Caravage. Les narines sont frémissantes de désir de transformation, nous sommes très proches de l'extase. La foi n'est pas un sacrifice pénitentielle, mais un élan mystique de don, voire d'amour.

Les cheveux châtain sont détachés, signes de liberté et non d'ascèse : ces cheveux dénoués, et non sagement coiffés et recouverts, sont l'un des attributs de la sainte et signent sa vie mondaine. Ils retombent dans le dos, derrière la robe de drap (velours?) jaune doré aux manches très courtes mais bouffantes. Une petite rangée de boutons montre combien cette robe est aisément dégrafée. Sous la robe, au bustier ajusté et au large décolleté, la chemise blanche est animée de plis mouvementés.

Le manteau bleu-outremer est presque entièrement rejeté en arrière, n'étant retenu par le pan sur le bras droit et celui qui entoure tel un serpent la cuisse gauche.

Les tons incomparables de jaune d'or foncé et de bleu outremer sur lesquels se détache la blancheur de la chemise sont soulignés par la puissance du clair-obscur, ce qui n'empêche pas une splendeur claire des parties lumineuses. La sainte, dont le regard extatique traduit la gratification du passage à une nouvelle vie soutenue par la foi, semble dialoguer mentalement avec le divin, tandis que derrière elle sont placés les bijoux et le vase de onguents pour souligner l'abandon de l'existence antérieure.

 

La main droite vient de rompre le fil du collier, mais elle s'attarde, sans la moindre violence mais avec tendresse, sur le bord de la chemise frisée de dentelle, à l'émergence des seins. 

Le bras gauche est plein d'expression, décidé, actif, mais la main, en extension, esquisse un geste d'enrobement, qui rappelle celui des Noli me tangere, soutendu par plus de désir, voire de ravissement, que de renoncement.

À côté de Madeleine se trouvent le vase de parfum (plutôt que d'onguent, déplacé dans ce contexte) sur la table derrière elle, les bijoux et ce qui semble être un miroir dans un panier, détail iconographique déjà présent dans sa Madeleine  du Palais Pitti (1617-1620).

Le personnage est vu d'un point légèrement abaissé, assis et émerge avec véhémence du fond sombre. Artemisia fait appel à un registre cher à l'art baroque, énoncé par Rudolf Wittkower en 1958 : le drame subtil donné par cette torsion vers sa gauche, l'expression qui révèle un état de transe dû au dialogue intérieur avec le Divin, qui ne choque pas mais réconforte le saint. La lumière, à forte valeur spirituelle, investit la figure imposante, accentuant l'effet de mouvement du drapé. (Francesco Trasacco, 2023 d'après source).

 

Note : les reflets indésirables n'ont pu être évités lors de ma prise de vue.

 

Madeleine repentante, v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante, v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante, v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante, v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

 

 

Madeleine au pied de la croix, Crucifixion, fresque vers 1700.

Dans un paysage mi-rural mi- urbain (Jérusalem), Marie-Madeleine est agenouillée , nimbée, les cheveux dénoués, étreignant de ses bras le bois de la croix, sur lequel elle appuie son visage en larmes. Ce visage est situé juste au dessus des pieds du Christ, et le sang des plaies s'écoule devant lui. On ne peut mieux représenter ce lien très étroit, dans l'iconographie et dans la mystique chrétienne, et notamment franciscaine, entre Madeleine et sa chevelure d'une part, et les pieds de Jésus, mais surtout entre l'écoulement de ses larmes et l'écoulement du sang versé "pour le rachat des péchés" et la rédemption de l'Humanité, selon le dogme catholique.

Les larmes, au nombre de deux sous chaque paupière inférieure, sont précisément représentées.

Le Christ sous le titulus Iesus Nazaren Rex Iudeorum est tout entier environné d'anges pleurant dans les nuées basses, et de chérubins dans les nuages supérieurs. Mais néanmoins, son visage aux yeux clos est incliné vers le bas et semble comntempler la sainte.

On remarquera l'absence de Marie et de Jean : l'accent est mis sur le personnage de Marie-Madeleine.

Malgré la réalisation de cette peinture postérieure au tableau d'Artemisia (mais peut-être reprenait-il une œuvre antérieure),  le thème de  l'élan de chagrin  et de gratitude et du "don des larmes" face au sang versé est très ancien, et dans la scène de la réception des stigmates par saint François d'Assise , ce dernier est représenté en adoration devant le crucifix portaé par des anges. Angèle de Foligno et saint Bonaventure (Lignum vitae) proneront cette contemplation, et les franciscains institueront le Chemin de Croix au XIVe siècle. 

Voir, outre ces articles, celui de Daniel Russo 1984 Saint François, les franciscains et les représentations du Christ sur la croix en Ombrie au XIIIe siècle. Recherche sur la formation d'une image et sur une sensibilité esthétique au Moyen-Âge.

En 1700, cette représentation de Marie-Madeleine est démodée par rapport aux Madeleines pénitentes.

 

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.

 

 

ANNEXE. L'HISTOIRE PASSIONNANTE ET DRAMATIQUE DE LA "MADDALENA SURSOCK".

 

 

La vie d’Artemisia Gentileschi (née à Rome en 1593, décédée à Naples en 1656) est particulièrement fascinante. Fille du peintre Orazio Gentileschi, disciple du Caravage, elle fut l’une des premières artistes femmes à réaliser de grandes compositions historiques et religieuses. Avec autant de maîtrise – sinon plus – que nombre de ses condisciples masculins. Reconnue et respectée tout au long de sa vie, celle qui fut notamment peintre à la cour des Médicis et à celle du roi Charles Ier d’Angleterre a été presque totalement occultée des récits historiques de l’art après sa mort, jusqu'à sa re-découverte au cours des années 1970-80. Son histoire personnelle, marquée par un viol à l’âge de 17 ans, aura eu une influence certaine sur sa peinture, lui faisant privilégier les thématiques de femmes puissantes (Judith et Holopherne...), car elle fut une féministe avant l’heure, qui toute sa vie se battra pour être l’égale de ses condisciples masculins. Une femme en avance sur son XVIIe siècle qui n’hésitera pas à dénoncer son violeur, son précepteur le peintre Agostino Tassi, dans un « infamant » procès public intenté devant le tribunal papal…

Cette Madeleine repentante fut réalisée dans les premières années de  son arrivée à Naples en 1630, peut-être pour la famille Serra , ducs de Cassano. Naples, d’où sont issus les Serra di Cassano, était alors sous domination espagnole ».

Elle fut acquise, tout comme Hercule et Omphale (une toile de très grande dimension, 192 x 241 cm datant également du début des années 1630), en 1920 par Alfred Sursock lors d’un séjour à Naples, juste avant son mariage avec Donna Maria Teresa Serra di Cassano, fille unique de Francesco Serra, 7ème duc de Cassano. Mais aucune de ces deux toiles n'étaient encore attribuée à Artemisia.

Alfred Bey Sursock, le plus jeune fils de Moussa Sursock ( à la fortune colossale),  est l'héritier (tout comme son cousin Nicolas qui épousa Victoria Serra di Cassano, et créateur du Musée Nicolas Sursock de Beyrouth),  de l'une des plus grandes familles grecques chrétiennes orthodoxes, installée à Beyrouth depuis 1714. 

https://en.wikipedia.org/wiki/Sursock_family

Une rue de Beyrouth, et non la moindre, porte leur nom, car la famille y possédait, et possède encore les demeures des plus somptueuses : La rue Sursock , dans le quartier d'Achrafieh à Beyrouth. 

Alfred Bey Sursock  évolua, comme son père, dans les cercles titrés d'Europe. Il est à l'origine, à Beyrouth, de l'hippodrome (1921), du Casino ou Sawfar Grand Hôtel, et de la Résidence des Pins (parc de  600 000 m²), où se situe aujourd'hui l'Ambassade de France au Liban. Il épousa Donna Maria Teresa Serra di Cassano, fille de Francesco Serra, 7e duc de Cassano, qui venait d'une vieille famille princière italienne de Naples.  Leur fille Yvonne  épousa Sir Desmond Cochrane , 3e baronnet,  en 1946, et porta le nom de Lady Cochrane. Elle eut quatre enfants.

Incidemment, les Sursock ont puissamment contribué à la colonisation sioniste en Palestine, en vendant au Fonds national juif une grande part des 240 km² qu’ils y possédaient. 

Alfred Sursock fit installer sa collection, qui comprenait des œuvres de plusieurs artistes napolitains du XVIIe siècle, tels que Luca Giordano et Andrea Vaccaro dans les salons du fameux Palais Sursock à Beyrouth ou 

" Le Sursock Palace, une somptueuse demeure du XIXe siècle située rue Sursock près du port fait face au musée Nicolas-Sursock, un bâtiment du XIXe siècle légué à la ville de Beyrouth en 1961.

 Certaines pièces font neuf mètres de hauteur, dotées de plafonds ouvragés, de colonnes de marbre ou encore de murs en stuc. La collection privée du palais est riche en objets d’art, par exemple des tapisseries flamandes du XVIe siècle ou des statues de femmes dénudées rapportées de Paris.

Le palais est entouré de 8000 m² de jardins. Sa conception est innovante pour l’époque : la maison est ouverte sur le parc et non pas close sur un patio. L'escalier central est également novateur, l'usage du métal allégeant la structure. C'est un symbole de la riche histoire de la famille Sursock."

https://fr.wikipedia.org/wiki/Palais_Sursock

L'explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020  qui a fait 207 morts et environ 7 000 blessés, et qui a dévasté une grande partie de la capitale libanaise, dévaste le Palais Susrock et détériore les toiles de la collection.

"C'est dans ce palais , dans le grand hall à triple arcade caractéristique de l’architecture libanaise, que Lady Yvonne Cochrane, la propriétaire du palais Sursock, avait pour habitude de se poster pour savourer les derniers rayons du soleil. Elle était âgée de 98 ans, ce tragique 4 août 2020. En contrebas, dans les jardins, une réception de mariage battait son plein. Mais c’est un autre spectacle qui, ce jour-là, suscite l’étonnement de Lady Cochrane. En face d’elle, à 300 mètres à vol d’oiseau, s’élève une colonne de fumée noire en provenance du port. A 18 heures passées de sept minutes, le mystérieux tourbillon noir se transforme en un champignon géant, et la déflagration ravage tout à des kilomètres à la ronde.

D’une violence inouïe, le souffle de l’explosion projette le fauteuil roulant de la vieille dame plusieurs mètres en arrière. Autour d’elle, les portes et les vitres se brisent en des milliers d’éclats, les boiseries précieuses sont déchiquetées, les tentures et les fauteuils tapissés sont lacérés, les plafonds et les murs se soulèvent, traversés par la puissance du souffle, éparpillant leurs débris sur le sol. Les jambes tailladées par des éclats de verre, Lady Cochrane est évacuée, inconsciente. Elle s’éteindra quelques semaines plus tard, le 31 août, à la veille du centenaire du Grand Liban, sans réaliser l’étendue du désastre."

Elle était une fervente défenderesse de l’art et du patrimoine, ayant été présidente du Sursock Museum et fondatrice de l’Association pour la protection des sites naturels et des bâtiments anciens (APSAD) en 1960.

Lire : https://restartbeirut.art/2021/12/23/histoire-du-palais-sursock/

Deux toiles, qui sont à l'époque attribuées à des peintres anonymes, sont frappées par les conséquences des explosions : un Hercule et Omphale et une Madeleine repentante .

« Ces deux tableaux faisaient partie de notre décor depuis toujours. Et comme dans toutes les maisons familiales, on n’y prêtait plus vraiment attention », confie à  un journaliste Roderick Sursock Cochrane, petit-fils d'Alfred Sursock et fils de Lady Cochrane. « D’autant que ces peintures – que nous savions de grande qualité, certes, comme toutes celles que mon grand-père, grand esthète et mécène, avait acquises – n’étaient pas considérées comme les plus importantes de notre collection. Celle-ci comportait plusieurs œuvres de grands peintres baroques comme Luca Giordano, Andrea Vaccaro et Jusepe Ribera (José de Ribera)… Sans compter un tableau de Guercino (le Guerchin) que ma mère a vendu durant la guerre et qui trône aujourd’hui au Metropolitan Museum of Art », ajoute l'actuel propriétaire du palais.

Gregory Buchakjian fait reconnaître alors son attribution de l'Hercule et Omphale et la Madeleine repentante à Artemisia Gentileschi, proposée en 1990.

Au milieu des années 1990, Gregory Buchakjian, alors jeune étudiant en histoire de l’art à la Sorbonne, qui avait choisi d’axer son master sur la collection privée du palais Sursock, avait mentionné à Lady Yvonne Sursock Cochrane  la possibilité que ces deux toiles soient attribuées à la fameuse Artemisia Gentileschi. Une hypothèse que Buchakjian avait mis deux ans à développer, à l’issue d’intenses recherches au sein du Centre de documentation et d’archives du musée du Louvre, mais qu’en tant qu’étudiant, il n’avait pas osé porter devant des experts. « Ces deux tableaux avaient dès le départ fortement attiré mon attention. C’était de la très grande peinture. Il s’en dégageait une puissance peu commune », souligne celui qui est aujourd’hui directeur de l’École des arts visuels de l’Académie libanaise des beaux-arts. 

« J’avais donc mentionné Artemisia dans mon mémoire de master. En me basant sur différents indices, comme la similarité des visages féminins dans les deux tableaux, que l’on retrouve dans d’autres œuvres d’Artemisia, mais aussi la richesse des étoffes peintes et certains détails des bijoux.  

"il s’agissait encore d’un travail d’étudiant. Lorsque j’ai discuté de ma thèse, mes professeurs m’ont dit qu’elle était très convaincante et que je devais poursuivre mes recherches et la publier. Mais je ne l’ai pas fait, parce qu’à l’époque, après mon retour à Beyrouth, j’étais complètement choqué par ce qui se passait dans la ville et j’ai oublié Artemisia [la guerre civile libanaise venait de se terminer. Mes priorités étaient la ville, la reconstruction, etc. Le « découvreur » de ces deux toiles,  ne les reverra à nouveau que 25 ans plus tard, dans les jours qui suivront l’explosion au port :

« Entraîné par mes amis Camille Tarazi et Georges Boustany qui faisaient la tournée des palais dévastés de la ville, je me suis rendu au palais Sursock mû par la curiosité de voir ce qu’il était advenu de sa collection. Et là, je constate l’ampleur des dégâts. De nombreuses œuvres avaient été endommagées, dont la grande pièce Hercule et Omphale. Elle comportait de multiples lacérations, dont une d’un demi-mètre, ainsi que des trous et des incrustations d’éclats de verre. La Marie-Madeleine était beaucoup moins abîmée, mais il m’a fallu faire quasiment des manœuvres acrobatiques pour la sortir de sous les gravats qui la recouvraient sans la détériorer plus amplement », relate Buchakjian.

Ce dernier tente alors de profiter de la médiatisation de la tragédie de Beyrouth pour attirer l’attention des institutions internationales sur les dommages subis par le palais Sursock. Une photo prise avec Audrey Azoulay, la directrice générale de l’Unesco accourue au chevet de Beyrouth, devant Hercule et Omphale et postée sur les réseaux sociaux sera un premier déclencheur. Elle provoquera la curiosité de nombreux professionnels du monde de l’art."

Cette attribution est aujourd'hui acceptée par tous les experts. 

La Madeleine a été prêtée pour l’exposition Le signore dell’arte à Milan (Palazzo Reale), et l’attribution a été confirmée par Riccardo Lattuada, spécialiste d’Artemisia Gentileschi. L’attribution a été confirmée par Riccardo Lattuada, spécialiste d’Artemisia Gentileschi, et par l’érudite Sheila Barker, selon laquelle certains éléments (tels que le type de bijoux, les types de visage, les tissus) renvoient aux manières typiques d’Artemisia.

« La Madeleine  devrait  faire partie dans les prochains mois d’une rétrospective consacrée à Artemisia Gentileschi à Naples, la ville où cette artiste a passé les 15 dernières années de sa vie », signale Roderick Cochrane. Lequel, à partir de là, pourra enfin commencer à concrétiser son rêve de toujours. Celui de faire de sa demeure patrimoniale « un musée privé ouvert aux touristes comme à tous les Libanais ». Le chantier de restauration du palais Sursock devrait s’achever, en principe – et avec l’aide de l’Unesco –, en 2025, indique son propriétaire.

 

D'après :

https://www.letemps.ch/societe/sursock-un-palais-beyrouth-un-symbole?srsltid=AfmBOooyKLfKPe1dKxednT6p_zeAPamh1vUEDsEpGeYPqp-NLrERgArE

 

 
 

 

 

SOURCES ET LIENS

https://www.monasterodisantachiara.it/artemisia-gentileschi/

https://www.youtube.com/watch?v=Zg6Ep4L2g9Q&ab_channel=IlMattino

http://www.santachiara.info/ver_en/3000/3000.0.htm

https://www.letemps.ch/societe/sursock-un-palais-beyrouth-un-symbole?srsltid=AfmBOooyKLfKPe1dKxednT6p_zeAPamh1vUEDsEpGeYPqp-NLrERgArE

https://www.finestresullarte.info/fr/art-ancien/deux-peintures-attribuees-a-artemisia-gentileschi-emergent-de-l-explosion-de-beyrouth-en-2020

https://www.lefigaro.fr/flash-actu/liban-deces-d-yvonne-sursock-cochrane-memoire-d-un-beyrouth-revolu-20200831#:~:text=Figure%20embl%C3%A9matique%20de%20la%20d%C3%A9fense,annonc%C3%A9%20ses%20proches%20sur%20Facebook.

https://restartbeirut.art/2021/12/23/histoire-du-palais-sursock/

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Published by jean-yves cordier - dans Peinture. Peintures murales. Marie-Madeleine.
20 août 2023 7 20 /08 /août /2023 21:12

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou.

 

Voir sur cette église :

 

 

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PRÉSENTATION.

La Bretagne comporte de multiples simples croix antérieures à la seconde moitié du XVe siècle, mais les principaux calvaires furent érigées au XVIe siècle, témoin d'une spiritualité de méditation sur les souffrances endurées par le Christ et sur le sang versé (pour le rachat de l'Humanité) par ses cinq plaies et par la couronne d'épines. Cette floraison de calvaires fut favorisée par le développement de grands ateliers de taille d'une pierre remarquable extraite en Rade de Brest, la kersantite ou kersanton, conduite par voie fluviale à Landerneau : les deux ateliers du Folgoët de 1423 à 1509, l'atelier des Prigent de 1527 à 1577, celui du Maître de Plougastel de 1570 à 1621.

Selon Castel, ces calvaires bénéficièrenet de  l'influence de Mgr Roland de Neufville, évêque de Léon de 1562 à 1613.

Ces calvaires du XVIe siècle sont contemporains de l'édification ou de la reconstruction des principales églises et chapelles de Basse-Bretagne, et, dans celles-ci, de leurs maîtresse-vitres consacrées, dans le même souci spirituel que les calvaires, à la Passion et la Crucifixion du Christ.

Ces constructions témoignent d'un développement économique remarquable basé sur la culture du lin et du chanvre, de la production textile et d'un commerce maritime vers l'exportation.

Au Tréhou, rattachée à la Vallée de l'Elorn centrée sur son port de Landerneau, pépinière des plus grands enclos paroissiaux, c'est principalement dans le dernier quart du XVIe siècle que les calvaires furent érigés : outre celui de l'église, on dénombre celui de Brunoc S + Croas-ar-Vossen (1576), Goaz-Zu (vers 1580), Gorréquer (1575), Guernélès (1556),  Lespinou (vers 1525), et Rosnoen, daté du XVe ,  Croas-ar-Guennou (XVIè s).  [Castel 1980]. Dans le cimetière de l'église paroissiale (dont le chevet porte la date de 1555), le calvaire a été érigé en 1578 (inscription).

 

Le calvaire de Le Tréhou est édifié au cœur de la période pendant laquelle on voit éclore, en Finistère, notamment dans les enclos paroissiaux, des calvaires à deux croisillons, dont la majorité répondent à la même organisation  donnant place sur le croisillon inférieur à deux statues géminées (avec la Vierge et Jean sur la face occidentale), sur le croisillon supérieur  les deux cavaliers de la Passion se faisant face, au centre une Pietà ou Déploration, et un Christ au lien sur l'autre face, et enfin Marie-Madeleine agenouillée au pied de la Croix. Il y a donc reprises par les ateliers de sculptures d'un modèle, jamais copié mais toujours développé. Ce sont ceux de Pencran nord (1521), Saint-Sébastien en Saint-Ségal (1541-1554), Sainte-Marie du Ménez-Hom (1544), Loc-Brévalaire (Prigent, vers 1550), Lopérec (Prigent,1542 ou 1552), Plougonven (Prigent, 1554) Loqueffret (1576 ?), Plounéventer (v.1578) Le Tréhou (1578), Locmélar ( Maître de Plougastel v. 1600), Plougastel (Maître de Plougastel, 1602-1604), Saint-Thégonnec (1610)

 

  • Pencran nord, (1521 par inscription). Trois fûts. Deux croisillons. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. Deux cavaliers, Madeleine/ Yves,  Jean/Pierre. Pietà, Vierge à l'Enfant . Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix.

  • Plomodiern, chapelle Sainte-Marie-du-Ménez-Hom (1544, Prigent). Deux croisillons. Jean/Pierre et Madeleine/Yves. Pietà, Christ aux liens, Vierge à l'Enfant. Ange aux calices. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix.

  • Saint-Ségal, chapelle Saint-Sébastien (v.1541-1554, Prigent). Deux croisillons.Vierge et Jean  géminés avec des archers. Deux cavaliers.

  • La Forest-Landerneau. Vers 1550, atelier Prigent pour les statues réunies à l'entrée du cimetière :

    N.-D. de Pitié. Statues géminées: Vierge-Madeleine, Jean-personnage sans attribut. [YPC 1980]

     

  • La Forest-Landerneau, XVIe siècle pour le calvaire encore érigé.  Madeleine à genoux. Un seul croisillon :Statues géminées: Vierge-sainte martyre, Jean-évêque. Croix à branches rondes, crucifix, groupe N.-D. de Pitié.

  • Lopérec (1552) par "Fayet, compagnon des Prigent" (lecture fausse du mot "fayte" par Castel). Trois fûts . Deux croisillons. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. Deux cavaliers, Christ aux liens, Jean ?/Marie-Madeleine / et Vierge/Pierre, Christ ressuscité.

  • Plougonven, (1554), Henri et Bastien Prigent. Calvaire monumental. Deux croisillons.  Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. les larrons sur des croix séparées (mais depuis le XIXe), saint Yves,  Vierge et Jean non géminés. Deux cavaliers.

  • Pleyben (1555) par Henri et Bastien Prigent. Un seul croisillon. Calvaire monumental. Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix.  Vierge et Jean non géminés. Cavaliers.

  • Loc-Brévalaire (v.1555), Deux croisillons. Premier croisillon, anges, statues géminées: saint Yves-Jean, Brévalaire-Madeleine. Second étage de fût: Christ lié, sur console figurée, Vierge de Pitié. Second croisillon, moulures simples. Croix, branches rondes, crucifix. Un vestige de diable avec l’âme du mauvais larron conservé dans un jardin voisin montre que le croisillon haut portait les gibets des larrons

  • Saint-Divy calvaire de 1562 Un seul croisillon. Trois croix sur les pilastres de la porte forment monument. Le fût central, rond comme ceux des larrons, porte des écots, Marie-Madeleine. Croisillon, culots: 1562, autre inscription, écu des Rohan, une macle martelée. Croix à fleurons, crucifix, statue en-dessous, au revers, Vierge de Pitié.

    https://www.lavieb-aile.com/2021/07/les-calvaires-de-l-eglise-de-saint-divy.html

  • Cléden-Poher (1575). Un seul croisillon. Soubassement rectangulaire, table d’offrande, groupe de N.-D. de Pitié, Portement de Croix, Flagellation, Cavaliers, sur le socle de celui de gauche: 1575 N PEZRON LORS F. Gibets des larrons. Fût central, écots. Croisillon, statues géminées: Vierge/Paul, Jean/Pierre. Croix à branches rondes, fleurons godronnés, anges aux calices, crucifix, Douleur du Père. 

  • Loqueffret (1576?) .  Deux croisillons. Soubassement, corniche, table d’offrande, bénitier. Fût rond, masque, sainte Geneviève. Croisillon bas, anges, statues: Vierge, Jean. Second croisillon, ange et démon (larrons disparus). Croix, petits fleurons, large titulus, crucifix, groupe N.-D. de Pitié, avec deux anges. 

  • Le Tréhou (1578) Deux croisillons. Vierge/Marie-Madeleine et Jean/? Deux cavaliers, saint Pierre et sainte Pitère sur le fût, Marie-Madeleine agenouillée au pied de la croix. , Pietà, Christ aux liens,

  • Plounéventer (v.1578). Deux croisillons. trois marmousets se tenant les bras, trois autres, sur les côtés et au revers, statues modernes: Jean, Yves (?), au centre saint Georges, au revers Vierge de Pitié. Croisillon du haut, formés d’anges dont les ailes se rejoignent, statues: ermite, Jean. Croix, branches rondes, fleurons, crucifix, titulus rubanné. Pièces anciennes et grosses restaurations qui semblent de la main de Larhantec. [YPC 1980]

  • Guimiliau (1581-1588)

  • Locmélar (vers 1600), par le Maître de Plougastel Deux croisillons.  Premier croisillon, anges orants, mains ouvertes, statues géminées: Vierge-Madeleine, Jean-Pierre, au centre, sur une console, Vierge de Pitié, au revers, Christ enseignant. Second croisillon, culots feuillagés, gibets des larrons, cavaliers au pied de la croix. Croix à branches rondes, fleurons godronnés, anges au calice l’un manque à droite, crucifix, Christ lié. https://societe-archeologique.du-finistere.org/croix/locmelar.html

  • Plougastel (1602-1604) par le Maître de Plougastel. Deux croisillons.

  • Saint-Thégonnec (1610). Deux croisillons. Trois fûts. Deux cavaliers, Pietà, Christ aux liens, Yves.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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Le calvaire mesure 6 mètres de haut et est principalement en kersanton. Au dessus du soubassement et du socle, sont superposés cinq ensembles monolithiques : un fût cylindrique écoté (imitant un tronc d'arbre) sculpté sur ses deux faces ouest et est (saint évêque et sainte Pithère), un premier croisillon (portant les gibets des larrons), un fût non écoté sculpté sur ses deux faces ( saint Pierre, et Vierge de Pitié), un deuxième croisillon (déserté de ses statues), et une croix à fût et traverse cylindrique non écoté, aux fleurons en boule, portant le Christ vers l'ouest et le Christ aux liens vers l'est.

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I. LE SOUBASSEMENT : LE SOCLE AUX 12 APÔTRES.

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Sur un soubassement carré en pierre de Logonna (microdiorite quartzique) à deux degrés dont le premier forme un banc, est posé un socle en kersanton à gros grain, dont chacune des faces est creusée de trois niches par de simples arcades. Ces niches abritent chacune un apôtre, taillé en bas-relief dans la masse du socle. Chaque apôtre tient un phylactère, dont la probable inscription peinte composait un Credo apostolique. Saint Pierre, qui débute la série, occupe le côté gauche de la face ouest.

E. Le Seac'h attribue (p. 254) ce socle au "sculpteur de Logonna-Daoulas", auteur du calvaire de Rungléo, en pierre de Logonna-Daoulas et décrit ainsi celui de Le Tréhou : "Les tuniques à la romaine laissent dépasser le bout des pieds nus . Les vêtements forment des plissés verticaux amples sans aucun mouvement. Les visages sont mangés par des barbes pointues et des moustaches rondes comme à Rungléo." Elle commet une erreur en écrivant p. 253 que ce socle est, comme à Rungléo, en pierre de Logonna. 

Je propose de reconnaître ici, en tournant dans le sens antihoraire pour respecter la séquence du Credo apostolique, Pierre (clef) André (croix en X) Jacques (bourdon) Jean (calice) Thomas (lance) Jacques le mineur (bâton de foulon) Philippe (croix à longue hampe) Matthieu (balance) Barthélémy (coutelas) Jude (hache ?) Simon (scie) Mathias (équerre).

Ce ne sont pas les identifications d'E. Le Seac'h.

De Pierre à Philippe, l'artiste suit l'ordre et les attributs  du Calendrier des bergers (1493 à 1579). Puis l'ordre est plus original, de même que sont inhabituels certains attributs notamment celui de Mathias. 

On trouve Mathias tenant l'équerre dans le porche de Lopérec, où les statues, qui datent de 1615 portent le nom de l'apôtre inscrit sur le socle. On trouve Pierre (clef), André (croix en X) Jacques (bourdon) Jean (calice) Thomas (lance) Jacques le mineur (bâton de foulon) Philippe (croix à longue hampe) Matthieu (hache) Barthélémy (coutelas) Jude (livre) Simon (scie) Mathias (équerre).

Il existe en Finistère un certain nombre de calvaires dont le soubassement abrite une succession des 12 apôtres présentant les phylactères du Credo, soit dans des niches (Kerdévot à Ergué-Gabéric ; Confort-Meilars, Trois-Fontaines en Gouézec ) soit au dessus du soubassement triangulaire (Quilinen en Landrévarzec ; Saint-Vénec à Briec-sur-Odet).

Très différente est la croix dite des Douze Apôtres, située près du hameau de  Rungléo, sur l'ancien chemin vicinal reliant Logonna-Daoulas à l'Hôpital-Camfrout.  Elle se compose d'un monolithe dressé de forme trapézoïdale à quatre faces, au sommet duquel est insérée une croix de section quadrangulaire, l'ensemble étant posé sur un bloc arrondi de granite formant socle. L'élément principal est haut de 2,20 m. Sa face antérieure est sculptée de bas-reliefs représentant les douze apôtres disposés dans des niches, dominés par la figure du Christ bénissant tenant un globe dans la main gauche. La liste et l'emplacement des apôtres serait, selon Castel, à mettre en relation avec le canon romain du rite tridentin défini par le pape Pie V en 1570, ce qui suggère une mise en oeuvre de cette croix dans le dernier quart du 16e siècle, donc en même temps que le calvaire du Tréhou.

Par ailleurs, les calvaires de Carhaix, Plouhinec, Melrand, accrochent  douze masques le long de leurs fûts. Pléchâtel (35) accorde aux apôtres une figuration en pied dans douze niches ogivales soulignées du nom qui les désigne sans erreur.

Ailleurs (mais aussi au Tréhou postérieurement au calvaire), les apôtres se succèdent pour présenter leur Credo dans les niches du porche sud. Ce thème du Credo apostolique, dont l'importance fut accrue après le Concile de Trente (1545-1563) figure aussi sur des verrières, comme à Quemper-Guézennec, à Kergoat (Quéménéven) ou à Merléac, ou sur des jubés (Kerfons; La Roche-Maurice ; Saint-Nicolas en Priziac ; Plounévez-Moédec ; Locmaria en Belle-Île-en-Terre).

Mais l'ordre dans lequel les apôtres se suivent, et leur identification par leur attribut, est très variable d'une représentation à l'autre, malgré les modèles diffusés par l'imprimerie à partir de 1492 dans les Calendriers des Bergers , et qui est le suivant Pierre (clef), André (croix en X) Jacques (tenue de pèlerin, bourdon) Jean (calice) Thomas (lance) Jacques le mineur (bâton de foulon) Philippe (croix à longue hampe) Barthélémy (coutelas), Matthieu (hache) Simon (croix) Jude (scie) Mathias (hallebarde).

 

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86267664/f88.item

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86267664/f89.item

Nous pouvons avoir parmi de nombreux exemples la séquence Pierre-André-Jacques M-Jean-Philippe-Thomas-Barthélémy-Matthieu-Jacques le Mineur-Jude Thaddée-Simon-Mathias. (verrière de Quemper-Guezennec)

Ou bien Pierre-André-Jacques Majeur-Jean-Thomas-Jacques le Mineur-Philippe-Barthélémy-Matthieu-Simon-Jude Thaddée-Matthias (Chapelle Saint-Herbot en Plonévez-du-Faou)

Ou bien Pierre-André-Jacques M-Jean-Thomas-Jacques le Mineur-Philippe-Barthélémy-Matthieu-Simon-Thaddée-Mathias (Verger du Soulas)

Ou Pierre-André-Jacques M-Jean-Jacques le Mineur-Thomas-Matthieu-Barthélémy-Philippe-Simon-Jude-Mathias (Cluny).

Etc.

 

 

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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II. SUR LE SOUBASSEMENT : MARIE-MADELEINE AGENOUILLÉE AU PIED DE LA CROIX. Pierre de kersanton.

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Cette statue se retrouve, avec ses grands traits caractéristiques comme son manteau qui a glissé dans son dos et forme une coque, ou sa posture tête en extension tournée vers le Christ, et bien-sûr son pot à onguent godronné à couvercle à bouton,  sur de nombreux calvaires de la vallée de l'Elorn et de Haute Cornouaille : À Pencran (en trois spécimens), à Saint-Divy, à La Forest-Landerneau,  à Saint-Sébastien en Saint-Ségal , à Dinéault, à Sainte-Marie-du Ménez-Hom, ou à Lopérec, sans oublier  celles qui sont incluses dans les calvaires monumentaux de Pleyben et Plougonven. 

Mais elle ne partage pas d'autres éléments vestimentaires, comme les manches bouffantes aux épaules et aux poignets, ou le bandeau occipital.

Comparez avec: 

-Pelouse nord de l'église de Pencran (Prigent v.1553).

-Calvaire monumental de Pleyben (Prigent 1554)

-Calvaire monumental de Plougonven (Prigent 1555)

-Calvaire de Sainte-Marie du Ménez-Hom (Prigent vers 1550)

-Calvaire de l'église de Lopérec (Prigent ou "fayet", 1542 ou 1552)

-Calvaire du cimetière bas de La Forest-Landerneau  (Prigent vers 1555)

Calvaire du bourg de Saint-Ségal (vers 1550)

-Calvaire de la chapelle Saint-Sébastien en Saint-Ségal (1541-1554)

-chapelle Saint-Tugen en Primelin, contrefort sud-ouest.

 

Nombreuses sont celles qui sont en larmes , signant le travail des Prigent. Ce n'est pas le cas au Tréhou.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2017.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2017.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2017.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2017.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2017.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2017.

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Progression très rapide des lichens en cinq ans :

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Clichés de 2023 :

 

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2023.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2023.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2023.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2023.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2023.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile 2023.

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III.  LA FACE PRINCIPALE DE LA CROIX, TOURNÉE VERS L'OUEST .

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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1. Le Christ en croix.

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On remarque l'absence du titulus portant l'inscription INRI, ce qui est très étonnant.

À la différence des calvaires de Locmélar et de Lopérec, on constate aussi l'absence d'anges hématophores recueillant le sang des plaies des mains et du flanc. Par contre, le sang des plaies des pieds est recueilli par deux anges. 

Il faudrait peut-être examiner de plus près cette absence, car la plaie du flanc est ici anormalement large, comme si le flot de sang, qui s'en échappe sur les deux autres calvaires et qui sert de fixation à l'ange de droite, avait été brisé.

Le visage (incliné vers la droite) et les bras sont particulièrement émaciés, mais les traits sont très fins. Il n'y a pas d'espace vide entre la chevelure et les épaules , un caractère stylistique que E. Le Seac'h attribue aux Prigent, et qu'on observe à Lopérec. Les côtes sont horizontales. Le dos est cambré, et décollé du fût. Le pagne est noué sur le côté gauche.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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2. Les anges hématophores du pied de la croix.

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Ils sont beaux et joufflus, et leur sourire rappelle la facture de Roland Doré (sans que cela incite à lui attribuer ces anges).

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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3. Les bras du croisillon supérieur : un ange et un diable allongés. Ce croisillon ne porte plus de statues.

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C'est une pièce monolithique qui débute en haut par plusieurs anneaux (dont l'un à spires et perles) sur lesquels s'appuie le carré portant les deux anges hématophores, et qui se poursuit par les croisillons proprement dits, puis par les deux personnages (ange et démon) aux pieds prenant appui sur un anneau. Cette pièce est indépendante de la pièce supérieure (croix du Christ et Christ aux liens), et de la pièce inférieure (Vierge de Pitié et saint Pierre). Ces distinctions sont importantes, car chaque pièce monolithique peut être d'un atelier, ou d'une époque, différents.

Remarque : je n'ai trouvé ce type de croisillon que sur deux des calvaires étudiés dans ce blog,  celui de Locmaria en Plabennec, datant de 1527 et celui de Saint-Herbot daté de 1575. Dans le calvaire de Locmaria, le croisillon supérieur accueille les gibets des larrons. Dans celui de Saint-Herbot, le croisllon unique reçoit les gibets, et quatre saints personnages.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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Le diable, placé au sud au dessus du Mauvais Larron, est cornu, grimaçant, avec de longues oreilles. Il tient dans ses mains un "objet" passé comme un sac par dessus son épaule gauche. Je ne serais pas étonné que ce fut un petit personnage (une âme damnée) dont je crois même voir le visage .

L'ange porte, de même, dans ses bras un petit personnage (une âme sauvée, peut-être celle du Bon Larron).

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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4. Saint Pierre en moyen-relief sur le fût.

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Cet autre bloc de pierre poursuit le fût de la croix, mais est sculpté d'un côté de saint Pierre, et de l'autre d'une Vierge de Pitié.

Une pièce carrée placée au dessus du saint était sans doute destinée à recevoir un ornement religieux.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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5. Les Larrons sur le deuxième croisillon.

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5a. Le Bon Larron (moderne).

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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5b. Le Mauvais Larron.

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On remarque la culotte à crevés (Renaissance). Le Mauvais Larron détourne la tête du Christ et tire la langue : son âme ira en Enfer.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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6. Un blason aux armoiries mi-parti très martelé.

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On peut encore voir en partie haute de la partie gauche une ancre, et peut-être du côté droit le haut d'un lion ?.

Ce blason a été attribué à la famille Mol, qui détenait le manoir de Guernéles au Tréhou, à 1 km à l'est du bourg :

Mol Léon 1375 - d'argent à 3 ancres de sable - Mol Enez - Trébabu Kerjan - Lanildut Rumorvan - Lesmoalec - Tréhou Guernélez - Langolian - Kerengar - Keranforest - Kermellec - Kerhuel - Runtan - Plouvien Garzian - Guipavas Le Vijac - (GDLG-T2-p371) (Michel Mauguin)

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Voici leurs armes sculptées (au XIXe ?) sous une couronne sur la base d'un calvaire en ruine conservé dans le jardin du presbytère :

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Blason des Mol en 1, en alliance avec des armes au dauphin. Photo lavieb-aile août 2023

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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8. Le croisillon inférieur soutenu par deux anges.

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Ce croisillon est un bloc de pierre d'un seul tenant dont le tambour est godronné. Les anges (leurs ailes forment la plate-forme du croisillon) font un geste de salutation.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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8. Un saint évêque en moyen-relief sur le fût.

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Ce saint n'est pas identifiable, oparmi les saints évêques du Finistère. L'absence du dragon mené par une étole exclut néanmoins, a priori, saint Pol-de-Léon.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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IV.  LA FACE  DE LA CROIX TOURNÉE VERS L'EST .

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On y voit de haut en bas un Christ aux liens (sculpté au dépens du bloc formant le fût de la croix portant le Christ), une Vierge de Pitié, et une sculpture en moyen-relief de sainte Pithère, patronne de l'église, elle aussi sculptée au dépens du bloc formant le fût du calvaire, avec au dos le saint évêque.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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9. Le Christ aux liens.

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Les poignets  de ses bras croisés sont liés. Il tenait à gauche un roseau. Le manteau de dérision forme un pan dont les cinq plis  forment un éventail.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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10. La Vierge de Pitié.

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Elle se rapproche beaucoup des Vierges de Pitié de l'atelier Prigent : elle est assise, le genou gauche fléchi, et porte son Fils, dont elle soutient le tronc de la main droite, sur ses cuisses. Le  corps du Fils ne forme pas une diagonale orientée vers le bas et la droite, mais un arc de cercle sous l'éffet de la tête qui, n'étant pas soutenue, retombe, et sous l'effet aussi des jambes fléchies à angle droit. Le bras droit pend verticalement, comme c'est l'usage, tandis que le bras gauche, horizontal est soutenu par sa Mère. Les plaies ne sont pas (ou très peu?) visibles, ce qui est rare.

La Vierge porte un voile "coqué" formant un auvent horizontal et deux ailes, et une guimpe à plis rayonnnants. Le visage est rond, les yeux, aux globes un peu protrus, sont en amande, la bouche est triste. Aucune larme n'est visible.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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11. La statue de sainte Pithère (moyen-relief au dépens du fût).

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La sainte tient deux attributs, peu distinctifs : la palme du martyre, et le livre. Elle porte le manteau-voile, et la cotte, d'où dépassent ses chaussures à bouts ronds.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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12. La date de 1578.

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Elle est gravée à la base cubique  du fût, dans un cartouche. L'inscription LAN 1578 se prolonge du côté nord par trois lettres, ou signes, non déchiffrés.

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Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

Le calvaire (1578) de l'enclos paroissial du Tréhou. Photographie lavieb-aile.

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DISCUSSION.

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Ce calvaire est composite. 

a) Je propose de considérer que le bloc supérieur (Christ, anges hématophores et Christ aux liens ) est de l'atelier de Roland Doré (actif de 1618 à 1663). Celui-ci a travaillé au Tréhou où il a exécuté en kersanton quatre statues d'apôtres et le Christ sauveur du porche sud (catalogue E. Le Seac'h p. 353), mais aussi des bas-reliefs héraldiques en kersantite du portail nord, présentés par des anges, et le chronogramme 1649. Cet ensemble date donc probablement du milieu du XVIIe siècle.

b) Le Bon Larron date de la fin du XIXe siècle et pourrait être de Yann Larc'hantec.

c) Les autres statues et portions de fûts sont contemporaines du chronogramme 1578, ce qui exclut que cela soit une œuvre de l'atelier des Prigent (1527-1577). On ne retrouve pas ici leur "main", les personnages n'ont pas de larmes,  mais ce calvaire est proche de leur production. Un travail iconographique sujet par sujet entre les statues du Tréhou et celles des calvaires contemporains pourrait préciser les choses. Outre les compagnons des Prigent, actifs avant 1563 notamment à Lopérec, c'est l'atelier du Maître de Plougastel qui prit la relève de la taille du kersanton de 1570 à 1621, soit sur le calvaire éponyme (1602-1604) soit sur celui de Guimaëc, soit sur celui de Locmélar au début du XVIIe siècle. Les points communs entre les calvaires de Le Tréhou et de Locmélar, tous deux à deux croisillons, ont été soulignés, notamment par Couffon.  Mais la comparaison rapprochée des éléments comparables (Mauvais Larron et Vierge de Pitié) n'est pas convaincante.

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Ce calvaire du Tréhou a perdu ses deux cavaliers, et ses deux statues géminées. Une carte-postale célèbre montre le calvaire à une époque où étaient installés, sur le croisillon supérieur et du côté sud, un cavalier (faisant face à l'ouest) et une statue géminée ; et le titre indique que le cavalier de droite (a priori Longin) est tombé de son croisillon. La carte appartient à la production d'Émile Hamonic, mais le nom de Jean-Marie Le Doaré n'est pas indiquée : elle pourrait être antérieure à 1906.

La statue géminée a dû tomber à son tour. Tout le reste est identique au calvaire d'aujourd'hui.

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L'existence de ces cavaliers sur le calvaire est donc certaine et attestée dans les souvenirs transmis dans la commune. Tout comme l'existence d'une statue géminée, montrant Marie-Madeleine d'un côté (Vierge/Madeleine).

Cette disposition était certainement consécutive à un réaménagement, et ailleurs (sauf à Saint-Thégonnec), les cavaliers font face au Christ, en vis à vis. C'est d'ailleurs bien plus logique, car leur base prend alors appui totalement sur le croisillon et est stable, tandis que l'installation visible sur la carte-postale est précaire. D'autre part, on ne voit nulle part un cavalier orthogonal au croisillon collé à une statue géminée. On trouve à Lannédern (XVIe s) la formule des statues géminées voisines du gibet des larrons sur le même croisillon.

On peut donc imaginer que les deux cavaliers occupaient le croisillon supérieur, l'un en face de l'autre : à droite du Christ Longin (celui qui transperce le flanc droit du Christ de sa lance), l'index pointé sur l'œil, et à gauche le Centenier proclamant sa foi par un geste.

Dans ce cas, dont je répète qu'il est largement attesté en Finistère, l'autre croisillon accueillait les deux statues géminées : Marie (géminée à Marie-Madeleine) à la droite du Christ faisant face à l'ouest, et Jean (géminé avec ?) à sa gauche. cf Plougastel ou Pencran par ex.

Si nous développons cette hypothèse, il faut alors supposer que les larrons n'occupaient pas initialement le croisillon inférieur comme aujourd'hui. Il est logique de penser qu'ils étaient placés sur leur gibet à droite et à gauche du fût central, comme dans de nombreux calvaires. À Lopérec, les deux larrons, qui n'occupent plus non plus leurs gibets initiaux, ont été replacés à côté du soubassement. 

Le fait même que le Bon Larron soit moderne témoigne des chutes et des destructions que ce calvaire, comme beaucoup d'autres, a subis.

L'absence de larmes sur le visage de Marie-Madeleine au pied de la croix, et de la Vierge de Pitié, contrairement à l'usage de l'atelier landernéen des Prigent (1527-1577) est en accord avec la date de 1578. 

Au total, le calvaire du Tréhou devait peut-être ressembler à celui de Lopérec (en ajoutant les croix des larrons) :

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Carte-postale : le calvaire de Lopérec.

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C'est aussi la formule du calvaire de Plougastel (avec cette fois les gibets des larrons indépendants) :

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Calvaire de Plougastel

 

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Certes, celui de Locmélar associe sur le croisillon supérieur les cavaliers et les larrons sur leur gibet, et les statues géminées sur le croisillon inférieur. Mais il a été restauré en 1925 par Donnard. Et le croisillon supérieur (moderne ou ancien ?) est à quatre supports.

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Voir aussi :

Vierges couchées (4) : calvaire de Tronoën à saint-Jean-Trolimon (29).

Le calvaire de l'église d'Argol.

Le calvaire de Motreff.

La chapelle Saint-Laurent en Pleyben. Le calvaire (Bastien Prigent, vers 1555).

Saint-Ségal : le calvaire du bourg.(vers 1550 et 1630, kersanton, atelier Prigent et Roland Doré). 

Le calvaire (kersanton, Maître de Guimiliau, 1575) de la chapelle Saint-Herbot

Le calvaire de l'église de Rosnoën. (Roland Doré)


 

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SOURCES ET LIENS.

 

—  Association Art culture patrimoine Tréhou Mein glas, 2013, L'enclos paroissial de Le Tréhou, Sainte-Pitère, guide de visite. 62 pages  IBSN 9782954442709, 2954442700

 

— CASTEL (Yves-Pascal), 1980, Atlas des croix et calvaires du Finistère, Site de la Société archéologique du Finistère.

https://societe-archeologique.du-finistere.org/croix/trehou.html

3061. Le Tréhou, cimetière, g. k. l. 6 m. 1578. Trois degrés, corniche. Soubassement large, table d’offrande. Socle cubique, niches, apôtres en relief, Madeleine en ronde bosse. Fût rond, écots, évêque, sainte Pitère. Croisillon, écu à l’ancre de marine, ange, démon, larrons (celui de gauche moderne), saint Pierre, N.-D. de Pitié. Second croisillon, ange, démon lubrique. Croix, fleurons, crucifix, Christ lié. [YPC 1980]

— CASTEL (Yves-Pascal), 1983,  La floraison des croix et calvaires dans le Léon sous l'influence de Mgr Roland de Neufville (1562-1613), Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest  Année 1983  90-2  pp. 311-319

https://www.persee.fr/doc/abpo_0399-0826_1983_num_90_2_3130

— COUFFON (René) 1988, Nouveau répertoire des églises du diocèse de Quimper

https://bibliotheque.diocese-quimper.fr/items/show/909

" Dans le cimetière, calvaire du XVIè siècle (I.S.), analogue à celui de Locmélar et daté 1578. Sur le socle, en bas-relief, les douze Apôtres, et en ronde-bosse, la Madeleine. Croix des larrons sur le croisillon ; Pietà et Christ aux liens."

— BASE PALISSY

https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00090475

— BRETANIA  Catre postale "Le Calvaire Un des cavaliers est tombé il y a quelque temps" Hamonic Collection Calvaires de Bretagne

https://www.bretania.bzh/portail/detailstatic.aspx?RSC_BASE=AD35-IMGAVANT&RSC_DOCID=oai-images-archives.ille-et-vilaine.fr-1-190438&TITLE=&_lg=en-US

e-et-vilaine.fr/viewer/190438/?offset=#page=1&viewer=picture&o=&n=0&q=

 

— LE SEAC'H (Emmanuelle), 2014, Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne. Les ateliers du XVe au XVIe siècle. Presses Universitaires de Rennes.

http://www.pur-editions.fr/couvertures/1409573610_doc.pdf

 

— MONUMENTUM

https://monumentum.fr/monument-historique/pa00090475/le-trehou-calvaire

— Stany-Gauthier (Joseph) · 1950 ·Les calvaires bretons -

— WIKIPEDIA

https://fr.wikipedia.org/wiki/Calvaire_du_Tr%C3%A9hou

"Le calvaire du Tréhou est érigé en 1578. Il repose sur une structure en grès rectangle pourvu de deux marches. Son socle en granit comporte des reliefs des Apôtres. Le milieu de la hampe est orné de deux sculptures, représentant un évêque (probablement saint Aurélien) et sainte Pitère. Le bas du crucifix montre saint Pierre entre les deux larrons. Sur l'autre côté, au même niveau, est sculptée une Pietà. Ces deux images sont respectivement surmontées des scènes de la Crucifixion et de l'Ecce homo.

Le calvaire du Tréhou est inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 18 octobre 1926"

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  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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