La Marie-Madeleine pénitente (huile sur toile, 1630-1635, collection Sursock) d'Artemisia Gentileschi exposée devant la fresque de Marie-Madeleine au pied de la croix du couvent de Santa-Chiara de Naples.
Retrouver, parmi les 2200 articles de ce blog, surtout consacré au patrimoine breton, ceux qui concernent la figure de Marie-Madeleine tiendrait de la gageure, puisqu'il faudrait citer tous ceux décrivant les calvaires, les maîtresse-vitres des Passions du XVIe siècle, les Déplorations, les Mises au tombeau, les représentations du Noli me tangere, les Apparitions du Christ ressuscité, les Trois Maries etc, etc.
Mais ce n'est pas essentiel, puisque la figure de Marie-Madeleine qui y est présentée est principalement celle qui a été en faveur, notamment sous l'impulsion des franciscains, avant la Contre Réforme, exemple de la mystique des larmes versées devant le sang versé par le Christ en croix, ou celle, portant le flacon d'aromates, des soins tendres apportés au corps du Christ.
Celle-ci est bien différente de la Madeleine repentante qui prédominera à partir de la fin du XVIe siècle , et que nous pourrions nommer Madeleine du Renoncement (au Monde et à ses lucres, à la beauté, aux richesses, aux plaisirs et aux sens).
Cette Marie-Madeleine-là est une femme pécheresse, qui, après une conversion, un bouleversement, adopte les valeurs de la solitude, de l'ascèse et de la prière et devient, dans les œuvres des peintres, une figure de dénonciation de la Vanité, parallélement aux tableaux de natures mortes.
Ce modèle de mortification, bien triste, a permis aux meilleurs peintres de l'art baroque de nous laisser des chefs-d'œuvres, et le premier d'entre eux est le Caravage, qui saisit l'occasion de détourner la leçon de morale au profit de peintures pleines d'érotisme d'une femme exaltée et troublée.
Marie-Madeleine repentante, 1593-1594
Conversion de Marie-Madeleine (ou Marthe et Marie-Madeleine), vers 1598
Marie-Madeleine en extase, 1606
Artemisia Gentileschi (Rome 1593-Naples v. 1656), après avoir vécu une dizaine d'années à Rome, s'installa en 1630 à Naples, une ville d'une extraordinaire vivacité artistique.
Elle était une disciple du Caravage, et on lui attribuait jusqu'à présent quatre Madeleine pénitente :
- Madeleine pénitente, collection privée, vers 1615-1616
- Marie Madeleine ou La Conversion de Madeleine, palais Pitti, Florence, 1615-16
- Marie-Madeleine pénitente, Kimbell Art Museum de Fort Worth, vers 1625-1626, acquise en 2024.
-
Marie Madeleine en mélancolie, cathédrale de Séville, salle du trésor, vers 1625
Mais en 2022, deux nouveaux tableaux sont attribués à la peintre, deux œuvres jusqu'alors anonymes qui se trouvaient dans le palais Sursock à Beyrouth, fortement endommagées par les explosions dévastatrices de 2020. Hercule et Omphale, et ... une Madeleine pénitente datée vers 1630-1635, peu après l'arrivée d'Artemisia à Naples, période pendant laquelle les tons jaunes et bleus abondent dans ses peintures.
Moins endommagée que l'Hercule et Omphale qui dut être longuement restauré au Getty Museum, la toile fut l'une des pièces maîtresses de l'exposition Maddalena, il mistero e l'imagine organisée en 2022 par les Musées de San Domenico de Forlì. En 2024, elle est exposée dans l'une des salles du monastère de Santa-Chiara à Naples. Elle devrait rejoindre Beyrouth et le Palais Sursock , en cours de restauration.
.
La Madeleine repentante (huile sur toile, 102 x 118 cm, vers 1630-1640) d'Artemisia Gentileschi.
C'est la seule toile exposée dans cette salle, à l'opposé de la peinture murale de la Crucifixion. La toile diffère beaucoup du tableau homologue du Caravage, où la sainte qui semble effondrée est peinte après son geste de dépouillement, le visage en larmes retombant sur la poitrine, tandis que le collier rompu, ses bijoux et son flacon de parfum sont posés sur le sol.
Ici, la sainte est représentée dans un moment de dialogue avec le divin, ses yeux, certes rougis ne sont pas pleins de larmes mais brillants d'exaltation, et c'est une aspiration intérieure, plutôt qu'un tourment, qui la conduit consciemment au geste du renoncement à la vanité, représenté par le collier de perles au fil rompu, mais encore en place. De même, les boucles d'oreilles n'ont pas été arrachées, comme sur la toile du Caravage. Les narines sont frémissantes de désir de transformation, nous sommes très proches de l'extase. La foi n'est pas un sacrifice pénitentielle, mais un élan mystique de don, voire d'amour.
Les cheveux châtain sont détachés, signes de liberté et non d'ascèse : ces cheveux dénoués, et non sagement coiffés et recouverts, sont l'un des attributs de la sainte et signent sa vie mondaine. Ils retombent dans le dos, derrière la robe de drap (velours?) jaune doré aux manches très courtes mais bouffantes. Une petite rangée de boutons montre combien cette robe est aisément dégrafée. Sous la robe, au bustier ajusté et au large décolleté, la chemise blanche est animée de plis mouvementés.
Le manteau bleu-outremer est presque entièrement rejeté en arrière, n'étant retenu par le pan sur le bras droit et celui qui entoure tel un serpent la cuisse gauche.
Les tons incomparables de jaune d'or foncé et de bleu outremer sur lesquels se détache la blancheur de la chemise sont soulignés par la puissance du clair-obscur, ce qui n'empêche pas une splendeur claire des parties lumineuses. La sainte, dont le regard extatique traduit la gratification du passage à une nouvelle vie soutenue par la foi, semble dialoguer mentalement avec le divin, tandis que derrière elle sont placés les bijoux et le vase de onguents pour souligner l'abandon de l'existence antérieure.
La main droite vient de rompre le fil du collier, mais elle s'attarde, sans la moindre violence mais avec tendresse, sur le bord de la chemise frisée de dentelle, à l'émergence des seins.
Le bras gauche est plein d'expression, décidé, actif, mais la main, en extension, esquisse un geste d'enrobement, qui rappelle celui des Noli me tangere, soutendu par plus de désir, voire de ravissement, que de renoncement.
À côté de Madeleine se trouvent le vase de parfum (plutôt que d'onguent, déplacé dans ce contexte) sur la table derrière elle, les bijoux et ce qui semble être un miroir dans un panier, détail iconographique déjà présent dans sa Madeleine du Palais Pitti (1617-1620).
Le personnage est vu d'un point légèrement abaissé, assis et émerge avec véhémence du fond sombre. Artemisia fait appel à un registre cher à l'art baroque, énoncé par Rudolf Wittkower en 1958 : le drame subtil donné par cette torsion vers sa gauche, l'expression qui révèle un état de transe dû au dialogue intérieur avec le Divin, qui ne choque pas mais réconforte le saint. La lumière, à forte valeur spirituelle, investit la figure imposante, accentuant l'effet de mouvement du drapé. (Francesco Trasacco, 2023 d'après source).
Note : les reflets indésirables n'ont pu être évités lors de ma prise de vue.
Madeleine repentante, v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Madeleine repentante, v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Madeleine repentante (détail), v. 1633-1640, Artemisia Gentileschi, collection Sursock, exposée au monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Madeleine au pied de la croix, Crucifixion, fresque vers 1700.
Dans un paysage mi-rural mi- urbain (Jérusalem), Marie-Madeleine est agenouillée , nimbée, les cheveux dénoués, étreignant de ses bras le bois de la croix, sur lequel elle appuie son visage en larmes. Ce visage est situé juste au dessus des pieds du Christ, et le sang des plaies s'écoule devant lui. On ne peut mieux représenter ce lien très étroit, dans l'iconographie et dans la mystique chrétienne, et notamment franciscaine, entre Madeleine et sa chevelure d'une part, et les pieds de Jésus, mais surtout entre l'écoulement de ses larmes et l'écoulement du sang versé "pour le rachat des péchés" et la rédemption de l'Humanité, selon le dogme catholique.
Les larmes, au nombre de deux sous chaque paupière inférieure, sont précisément représentées.
Le Christ sous le titulus Iesus Nazaren Rex Iudeorum est tout entier environné d'anges pleurant dans les nuées basses, et de chérubins dans les nuages supérieurs. Mais néanmoins, son visage aux yeux clos est incliné vers le bas et semble comntempler la sainte.
On remarquera l'absence de Marie et de Jean : l'accent est mis sur le personnage de Marie-Madeleine.
Malgré la réalisation de cette peinture postérieure au tableau d'Artemisia (mais peut-être reprenait-il une œuvre antérieure), le thème de l'élan de chagrin et de gratitude et du "don des larmes" face au sang versé est très ancien, et dans la scène de la réception des stigmates par saint François d'Assise , ce dernier est représenté en adoration devant le crucifix portaé par des anges. Angèle de Foligno et saint Bonaventure (Lignum vitae) proneront cette contemplation, et les franciscains institueront le Chemin de Croix au XIVe siècle.
Voir, outre ces articles, celui de Daniel Russo 1984 Saint François, les franciscains et les représentations du Christ sur la croix en Ombrie au XIIIe siècle. Recherche sur la formation d'une image et sur une sensibilité esthétique au Moyen-Âge.
En 1700, cette représentation de Marie-Madeleine est démodée par rapport aux Madeleines pénitentes.
Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
Marie-Madeleine au pied de la croix, fresque vers 1700, monastère Santa-Chiara de Naples. Photo lavieb-aile 2024.
ANNEXE. L'HISTOIRE PASSIONNANTE ET DRAMATIQUE DE LA "MADDALENA SURSOCK".
La vie d’Artemisia Gentileschi (née à Rome en 1593, décédée à Naples en 1656) est particulièrement fascinante. Fille du peintre Orazio Gentileschi, disciple du Caravage, elle fut l’une des premières artistes femmes à réaliser de grandes compositions historiques et religieuses. Avec autant de maîtrise – sinon plus – que nombre de ses condisciples masculins. Reconnue et respectée tout au long de sa vie, celle qui fut notamment peintre à la cour des Médicis et à celle du roi Charles Ier d’Angleterre a été presque totalement occultée des récits historiques de l’art après sa mort, jusqu'à sa re-découverte au cours des années 1970-80. Son histoire personnelle, marquée par un viol à l’âge de 17 ans, aura eu une influence certaine sur sa peinture, lui faisant privilégier les thématiques de femmes puissantes (Judith et Holopherne...), car elle fut une féministe avant l’heure, qui toute sa vie se battra pour être l’égale de ses condisciples masculins. Une femme en avance sur son XVIIe siècle qui n’hésitera pas à dénoncer son violeur, son précepteur le peintre Agostino Tassi, dans un « infamant » procès public intenté devant le tribunal papal…
Cette Madeleine repentante fut réalisée dans les premières années de son arrivée à Naples en 1630, peut-être pour la famille Serra , ducs de Cassano. Naples, d’où sont issus les Serra di Cassano, était alors sous domination espagnole ».
Elle fut acquise, tout comme Hercule et Omphale (une toile de très grande dimension, 192 x 241 cm datant également du début des années 1630), en 1920 par Alfred Sursock lors d’un séjour à Naples, juste avant son mariage avec Donna Maria Teresa Serra di Cassano, fille unique de Francesco Serra, 7ème duc de Cassano. Mais aucune de ces deux toiles n'étaient encore attribuée à Artemisia.
Alfred Bey Sursock, le plus jeune fils de Moussa Sursock ( à la fortune colossale), est l'héritier (tout comme son cousin Nicolas qui épousa Victoria Serra di Cassano, et créateur du Musée Nicolas Sursock de Beyrouth), de l'une des plus grandes familles grecques chrétiennes orthodoxes, installée à Beyrouth depuis 1714.
https://en.wikipedia.org/wiki/Sursock_family
Une rue de Beyrouth, et non la moindre, porte leur nom, car la famille y possédait, et possède encore les demeures des plus somptueuses : La rue Sursock , dans le quartier d'Achrafieh à Beyrouth.
Alfred Bey Sursock évolua, comme son père, dans les cercles titrés d'Europe. Il est à l'origine, à Beyrouth, de l'hippodrome (1921), du Casino ou Sawfar Grand Hôtel, et de la Résidence des Pins (parc de 600 000 m²), où se situe aujourd'hui l'Ambassade de France au Liban. Il épousa Donna Maria Teresa Serra di Cassano, fille de Francesco Serra, 7e duc de Cassano, qui venait d'une vieille famille princière italienne de Naples. Leur fille Yvonne épousa Sir Desmond Cochrane , 3e baronnet, en 1946, et porta le nom de Lady Cochrane. Elle eut quatre enfants.
Incidemment, les Sursock ont puissamment contribué à la colonisation sioniste en Palestine, en vendant au Fonds national juif une grande part des 240 km² qu’ils y possédaient.
Alfred Sursock fit installer sa collection, qui comprenait des œuvres de plusieurs artistes napolitains du XVIIe siècle, tels que Luca Giordano et Andrea Vaccaro dans les salons du fameux Palais Sursock à Beyrouth ou
" Le Sursock Palace, une somptueuse demeure du XIXe siècle située rue Sursock près du port fait face au musée Nicolas-Sursock, un bâtiment du XIXe siècle légué à la ville de Beyrouth en 1961.
Certaines pièces font neuf mètres de hauteur, dotées de plafonds ouvragés, de colonnes de marbre ou encore de murs en stuc. La collection privée du palais est riche en objets d’art, par exemple des tapisseries flamandes du XVIe siècle ou des statues de femmes dénudées rapportées de Paris.
Le palais est entouré de 8000 m² de jardins. Sa conception est innovante pour l’époque : la maison est ouverte sur le parc et non pas close sur un patio. L'escalier central est également novateur, l'usage du métal allégeant la structure. C'est un symbole de la riche histoire de la famille Sursock."
https://fr.wikipedia.org/wiki/Palais_Sursock
L'explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020 qui a fait 207 morts et environ 7 000 blessés, et qui a dévasté une grande partie de la capitale libanaise, dévaste le Palais Susrock et détériore les toiles de la collection.
"C'est dans ce palais , dans le grand hall à triple arcade caractéristique de l’architecture libanaise, que Lady Yvonne Cochrane, la propriétaire du palais Sursock, avait pour habitude de se poster pour savourer les derniers rayons du soleil. Elle était âgée de 98 ans, ce tragique 4 août 2020. En contrebas, dans les jardins, une réception de mariage battait son plein. Mais c’est un autre spectacle qui, ce jour-là, suscite l’étonnement de Lady Cochrane. En face d’elle, à 300 mètres à vol d’oiseau, s’élève une colonne de fumée noire en provenance du port. A 18 heures passées de sept minutes, le mystérieux tourbillon noir se transforme en un champignon géant, et la déflagration ravage tout à des kilomètres à la ronde.
D’une violence inouïe, le souffle de l’explosion projette le fauteuil roulant de la vieille dame plusieurs mètres en arrière. Autour d’elle, les portes et les vitres se brisent en des milliers d’éclats, les boiseries précieuses sont déchiquetées, les tentures et les fauteuils tapissés sont lacérés, les plafonds et les murs se soulèvent, traversés par la puissance du souffle, éparpillant leurs débris sur le sol. Les jambes tailladées par des éclats de verre, Lady Cochrane est évacuée, inconsciente. Elle s’éteindra quelques semaines plus tard, le 31 août, à la veille du centenaire du Grand Liban, sans réaliser l’étendue du désastre."
Elle était une fervente défenderesse de l’art et du patrimoine, ayant été présidente du Sursock Museum et fondatrice de l’Association pour la protection des sites naturels et des bâtiments anciens (APSAD) en 1960.
Lire : https://restartbeirut.art/2021/12/23/histoire-du-palais-sursock/
Deux toiles, qui sont à l'époque attribuées à des peintres anonymes, sont frappées par les conséquences des explosions : un Hercule et Omphale et une Madeleine repentante .
« Ces deux tableaux faisaient partie de notre décor depuis toujours. Et comme dans toutes les maisons familiales, on n’y prêtait plus vraiment attention », confie à un journaliste Roderick Sursock Cochrane, petit-fils d'Alfred Sursock et fils de Lady Cochrane. « D’autant que ces peintures – que nous savions de grande qualité, certes, comme toutes celles que mon grand-père, grand esthète et mécène, avait acquises – n’étaient pas considérées comme les plus importantes de notre collection. Celle-ci comportait plusieurs œuvres de grands peintres baroques comme Luca Giordano, Andrea Vaccaro et Jusepe Ribera (José de Ribera)… Sans compter un tableau de Guercino (le Guerchin) que ma mère a vendu durant la guerre et qui trône aujourd’hui au Metropolitan Museum of Art », ajoute l'actuel propriétaire du palais.
Gregory Buchakjian fait reconnaître alors son attribution de l'Hercule et Omphale et la Madeleine repentante à Artemisia Gentileschi, proposée en 1990.
Au milieu des années 1990, Gregory Buchakjian, alors jeune étudiant en histoire de l’art à la Sorbonne, qui avait choisi d’axer son master sur la collection privée du palais Sursock, avait mentionné à Lady Yvonne Sursock Cochrane la possibilité que ces deux toiles soient attribuées à la fameuse Artemisia Gentileschi. Une hypothèse que Buchakjian avait mis deux ans à développer, à l’issue d’intenses recherches au sein du Centre de documentation et d’archives du musée du Louvre, mais qu’en tant qu’étudiant, il n’avait pas osé porter devant des experts. « Ces deux tableaux avaient dès le départ fortement attiré mon attention. C’était de la très grande peinture. Il s’en dégageait une puissance peu commune », souligne celui qui est aujourd’hui directeur de l’École des arts visuels de l’Académie libanaise des beaux-arts.
« J’avais donc mentionné Artemisia dans mon mémoire de master. En me basant sur différents indices, comme la similarité des visages féminins dans les deux tableaux, que l’on retrouve dans d’autres œuvres d’Artemisia, mais aussi la richesse des étoffes peintes et certains détails des bijoux.
"il s’agissait encore d’un travail d’étudiant. Lorsque j’ai discuté de ma thèse, mes professeurs m’ont dit qu’elle était très convaincante et que je devais poursuivre mes recherches et la publier. Mais je ne l’ai pas fait, parce qu’à l’époque, après mon retour à Beyrouth, j’étais complètement choqué par ce qui se passait dans la ville et j’ai oublié Artemisia [la guerre civile libanaise venait de se terminer. Mes priorités étaient la ville, la reconstruction, etc. Le « découvreur » de ces deux toiles, ne les reverra à nouveau que 25 ans plus tard, dans les jours qui suivront l’explosion au port :
« Entraîné par mes amis Camille Tarazi et Georges Boustany qui faisaient la tournée des palais dévastés de la ville, je me suis rendu au palais Sursock mû par la curiosité de voir ce qu’il était advenu de sa collection. Et là, je constate l’ampleur des dégâts. De nombreuses œuvres avaient été endommagées, dont la grande pièce Hercule et Omphale. Elle comportait de multiples lacérations, dont une d’un demi-mètre, ainsi que des trous et des incrustations d’éclats de verre. La Marie-Madeleine était beaucoup moins abîmée, mais il m’a fallu faire quasiment des manœuvres acrobatiques pour la sortir de sous les gravats qui la recouvraient sans la détériorer plus amplement », relate Buchakjian.
Ce dernier tente alors de profiter de la médiatisation de la tragédie de Beyrouth pour attirer l’attention des institutions internationales sur les dommages subis par le palais Sursock. Une photo prise avec Audrey Azoulay, la directrice générale de l’Unesco accourue au chevet de Beyrouth, devant Hercule et Omphale et postée sur les réseaux sociaux sera un premier déclencheur. Elle provoquera la curiosité de nombreux professionnels du monde de l’art."
Cette attribution est aujourd'hui acceptée par tous les experts.
La Madeleine a été prêtée pour l’exposition Le signore dell’arte à Milan (Palazzo Reale), et l’attribution a été confirmée par Riccardo Lattuada, spécialiste d’Artemisia Gentileschi. L’attribution a été confirmée par Riccardo Lattuada, spécialiste d’Artemisia Gentileschi, et par l’érudite Sheila Barker, selon laquelle certains éléments (tels que le type de bijoux, les types de visage, les tissus) renvoient aux manières typiques d’Artemisia.
« La Madeleine devrait faire partie dans les prochains mois d’une rétrospective consacrée à Artemisia Gentileschi à Naples, la ville où cette artiste a passé les 15 dernières années de sa vie », signale Roderick Cochrane. Lequel, à partir de là, pourra enfin commencer à concrétiser son rêve de toujours. Celui de faire de sa demeure patrimoniale « un musée privé ouvert aux touristes comme à tous les Libanais ». Le chantier de restauration du palais Sursock devrait s’achever, en principe – et avec l’aide de l’Unesco –, en 2025, indique son propriétaire.
D'après :
https://www.letemps.ch/societe/sursock-un-palais-beyrouth-un-symbole?srsltid=AfmBOooyKLfKPe1dKxednT6p_zeAPamh1vUEDsEpGeYPqp-NLrERgArE
SOURCES ET LIENS
https://www.monasterodisantachiara.it/artemisia-gentileschi/
https://www.youtube.com/watch?v=Zg6Ep4L2g9Q&ab_channel=IlMattino
http://www.santachiara.info/ver_en/3000/3000.0.htm
https://www.letemps.ch/societe/sursock-un-palais-beyrouth-un-symbole?srsltid=AfmBOooyKLfKPe1dKxednT6p_zeAPamh1vUEDsEpGeYPqp-NLrERgArE
https://www.finestresullarte.info/fr/art-ancien/deux-peintures-attribuees-a-artemisia-gentileschi-emergent-de-l-explosion-de-beyrouth-en-2020
https://www.lefigaro.fr/flash-actu/liban-deces-d-yvonne-sursock-cochrane-memoire-d-un-beyrouth-revolu-20200831#:~:text=Figure%20embl%C3%A9matique%20de%20la%20d%C3%A9fense,annonc%C3%A9%20ses%20proches%20sur%20Facebook.
https://restartbeirut.art/2021/12/23/histoire-du-palais-sursock/