Le jubé (chêne non peint, 1534-1543 ? et Denis Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn.
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1. Voir sur Lambader :
2. Voir sur les jubés de Bretagne (ordre +/- chronologique) :
- Le jubé (en pierre de kersanton) du Folgoët
- Le jubé de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. I. Le coté de la nef (Ouest). A. La clôture. 1480
- Le jubé de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. I. Le coté de la nef (Ouest). B. La tribune. 1480
- Le jubé de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. II. Le coté du chœur (coté est).
- Le jubé (chêne polychrome, v. 1560) de l'église Saint-Yves de La Roche-Maurice (29).I. La tribune.
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Le jubé de l'église Saint-Yves de La Roche-Maurice III. Les retables aux licornes.(1560)
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L'église de Goulven IV : la tribune d'orgue, ancien jubé du XVIe siècle.
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La chapelle St Nicolas en Priziac et son jubé. (achevé en 1580)
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La tribune de l'église d'Esquibien. (ancien jubé, XVIe siècle)
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La chapelle Notre-Dame de Berven en Plouzévédé V. Le chancel .(1607)
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La chapelle Notre-Dame de Berven en Plouzévédé VI. La tribune ou jubé .(1724)
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3. Voir sur l'art des grotesques de la Renaissance :
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Les vitraux en grisaille (1542-1544) de la galerie de Psyché, Musée Condé de Chantilly.
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Les vitraux héraldiques provenant du château d'Ecouen, 1541, de la Galerie Duban à Chantilly.
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Le Hibou harcelé par les oiseaux des Compertementen (cartouches) de Jacques Floris en 1564.
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Voir sur l'art des grotesques de la Renaissance en Bretagne par ordre chronologique :
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Les 54 stalles (vers 1530-1550) de l'ancienne collégiale de La Madeleine de Champeaux (35).
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L'église de Goulven IV : la tribune d'orgue, ancien jubé du XVIe siècle.
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La tribune (bois polychrome, XVIe siècle) ou ancien jubé de l'église d'Esquibien.
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Sans compter les sablières à cuirs chantournés et/ou grotesques du Maître de Plomodiern à Saint-Nic (1561-1566), Plomodiern (1564), à l'atelier du Cap-Sizun à Primelin, Pont-Croix (1544), Confort-Meilars, Esquibien ou de celle du Maître de Pleyben (1567-1576) à Pleyben, Kerjean, Plomodiern (Sainte-Marie du Menez-Hom), Bodilis, Saint-Divy, et peut-être Roscoff.
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GÉNÉRALITÉS : LES JUBÉS BRETONS.
Dans une église, le jubé est une tribune formant clôture de pierre ou de bois séparant le chœur liturgique de la nef, car suivant la conception médiévale, l'autel, lieu du mystère sacré, ne doit pas être directement visible. : le chœur était réservé au clergé, et les fidèles, installés dans la nef, écoutait la lecture et les prédications, chants liturgiques, et apercevait le chœur à travers la claire-voie.
Il se compose de 3 parties :
- La clôture appelée chancel,, elle est à claire-voie et dotée d'une ou deux portes.
- Au-dessus la tribune (le véritable jubé), parfois en encorbellement, à laquelle on accédait pour prêcher ou chanter, par un ou deux escaliers.
- Et l'ensemble étant dominé par un groupe de crucifixion ou « tref » — du latin trabs (« poutre ») — .
Nous pouvons ajouter une quatrième partie, les autels latéraux destinés parfois à déposer des offrandes en nature (St-Herbot) ou à la célébration des messes à l'intention des fidèles, le maître-autel leur étant interdit.
La tribune est souvent ornée, coté nef, de douze panneaux figurant dans un but didactique les apôtres.
Au XVIe siècle, le concile de Trente (achevé en 1563) provoqua une évolution de la liturgie catholique en réponse au succès des églises protestantes. Le chœur devant désormais être visible pour les fidèles, les jubés étaient condamnés. Tandis que les chaires à prêcher les remplaçaient, ils seront déplacés ou détruits aux siècles suivants, quelquefois tardivement au XIXe siècle. Curieusement, plusieurs jubés bretons ont été construits pendant ou après le Concile de Trente.
La Bretagne conserve encore 12 jubés complets et quelques chancels. Les panneaux des tribunes furent remontés ici ou là comme tribune d'orgue (Goulven) ou tribune de fond d'église, comme à Esquibien.
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LISTE DES JUBÉS BRETONS.
Sur la centaine d'origine, il subsiste douze jubés entiers en Bretagne : j'ai tenté de les classer chronologiquement.
— église du Folgoët (29), un jubé en pierre.
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/eglise-paroissiale-notre-dame-place-de-l-eglise-le-folgoet/5f4c4b00-49a8-4644-a69b-f36f08115031
— chapelle St-Fiacre du Faouët (56) : c'est le plus ancien des jubés de bois bretons , puisqu'il a été réalisé vers 1480.
http://www.lavieb-aile.com/2016/01/le-jube-de-la-chapelle-saint-fiacre-du-faouet-i-le-cote-de-la-nef-ouest-b-la-tribune.html
— chapelle de Kerfons en Ploubezre (22), vers 1491-1495. 12 apôtres disposés comme dans le Calendrier des Bergers de 1493.
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/jube-de-la-chapelle-de-kerfons/5c64208e-8ddc-4391-b955-0ff20004cab9
— chapelle St-Fiacre de Melrand (56), fin XVe (chapelle 1460). 12 apôtres disposés comme dans le Calendrier des Bergers 1493.
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/jube/f3d4975b-c112-4d60-b888-612dff2f546b
—chapelle St-Pabu de Saint-Guen (22). 1501 ? Jubé gothique
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00089629
https://actu.fr/bretagne/mur-de-bretagne_22158/a-saint-guen-pres-mur-bretagne-tresor-patrimonial-va-etre-restaure_16545697.html
— chapelle de Lambader à Plouvorn (29) : vers 1520 ou 1534 (discussion infra)
— chapelle Ste-Avoye de Pluneret (56), daté de 1555. 12 apôtres coté nef (Pierre-André-Jacques Philippe avec épée-Jean-Thomas avec équerre - Mathieu avec lance-Barthélémy=couteau -Jacques min. foulon - Jude+scie- Simon tourne le dos- Mathias hallebarde), Vertus et saints coté chœur
https://www.petit-patrimoine.com/fiche-petit-patrimoine.php?id_pp=56176_3
— église St-Yves de La Roche Maurice (29), daté de 1570-1580. Apôtres coté nef.
Le jubé (chêne polychrome, v. 1560) de l'église Saint-Yves de La Roche-Maurice (29).I. La tribune.
— chapelle St-Nicolas de Priziac (56) achevé en 1580. Apôtres coté chœur. Pierre-André-Jacques Maj.-Jean-Thomas-Philippe-Matthieu-Barthélémy-Jude-Simon-Jacques min.-Mathias.
http://www.lavieb-aile.com/article-chapelle-st-nicolas-en-priziac-104337834.html
— chapelle St-Herbot en Plonevez-du-Faou (29), seconde moitié du XVIe siècle. 12 apôtres coté nef.
— chapelle ND de la Croix à Plélauff (22) XVIe siècle.
http://www.plelauff.fr/decouvrir/la-chapelle-le-jube
— chapelle de Locmaria en Belle-Isle-en-Terre (22)12 apôtres coté chœur, ordre recomposé. Après 1516.
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/chapelle-notre-dame-de-pendreo-locmaria-belle-isle-en-terre/728ce742-202f-4535-a9b4-e30a8442598c
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Les jubés en ré-emploi :
— église de La Martyre (29) : chancel de pierre, XVe siècle.
— église de Goulven (29) : la tribune d'orgue, ancien jubé du XVIe siècle. Décor Renaissance (dauphins, griffons, arabesques, masques)
—église ND de Rochefort-en-Terre (56) : jubé transformé en tribune au XIXe siècle.
— église de Loc-Envel (22) : ré-emploi en tribune. https://fr.wikipedia.org/wiki/Jub%C3%A9_de_l%27%C3%A9glise_Saint-Envel_de_Loc-Envel
"Le jubé présente trois styles différents. Les panneaux de la tribune et les baies du côté subsistant de la clôture sont de style gothique flamboyant. Les pilastres et les meneaux à décor d'écailles ou de rosettes, les nids-d'abeilles et les torsades des colonnes, de style Louis XIII, sont inspirés des décorations du château de Blois. Les panneaux de soubassement, où l'on reconnaît de fins oiseaux affrontés, des vases, des candélabres, des arabesques, datent de l'époque de la Renaissance italienne et sont l'œuvre d'un atelier morlaisien."
— Cathédrale Saint-Paul Aurélien de Saint-Pol-de-Léon (29)
— Lamballe (22) restes de jubé : tribune d'orgue
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/buffet-d-orgue-lamballe-fusionnee-en-lamballe-armor-en-2019/c3763869-0343-4347-a923-b59b5686e23a
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/jube-lamballe-fusionnee-en-lamballe-armor-en-2019/e970ddf1-22e2-4788-93a6-cafe584b86d5
— Les Iffs (35): les 12 apôtres, 12 panneaux restant du jubé (deuxième moitié XVIe siècle), remontés dans un bâti :
http://inventaire-patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/public/annexes/IM35001291_01.pdf
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/jube/8a842632-bcbc-4f03-b37b-5f500aa5dd9f
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PRÉSENTATION : LES INCERTITUDES DE LA DATATION.
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L'article de Wikipédia me permettra d'exposer la difficulté de datation que pose ce jubé :
"Le jubé de la chapelle de Lambader est situé à la jonction des cinquième et sixième travées de l'édifice. Construit en bois de chêne, il affecte une architecture flamboyante. Cette œuvre sculptée présente des affinités certaines avec le jubé de la chapelle de Kerfons sise en Ploubezre. Dépourvu aujourd'hui de toute polychromie, il date du dernier quart du XVe siècle, voire du début du XVIe siècle. L'art de la Renaissance y fait une timide apparition, les panneaux de la galerie, enchâssés dans des arcs en accolade, s'ornant de vases, rinceaux et autres motifs italianisants."
https://fr.wikipedia.org/wiki/Chapelle_Notre-Dame_de_Lambader
En effet, les deux blasons de ce jubé, qui portent les armes de Troërin et de Kermellec, et sont attribuées à Marc de Troërin et Isabeau de Kermellec, mariés en 1481, ont longtemps incité les chercheurs à estimer que le jubé fut donné en 1481.
C'est le vicomte de Reals, propriétaire du château de Troërin, maire de Plouvorn à l'origine de la restauration de la chapelle, qui affirme :
"D'après les titres des Troërin, ce jubé fut donné à l'église en 1481, par Marc de Troërin, époux d'Isabeau de Kermellec; les armes du donateur sont soutenues par un ange formant l'un des pendentifs du jubé du côté du chœur; elles sont aussi reproduites, ainsi que celles de sa femme, au dessus de la porte du milieu." Mais il ajoute : " Les motifs multiples de ce jubé sont du style flamboyant et ils reproduisent le dessin de la maitresse vitre.". Or, ce vitrail porte la date de 1543.
D'autre part, argument faible contre l'hypothèse d'être en capacité de faire donation, en 1481, Marc de Troërin n'était pas présent à la Montre de l'Évêché de Léon, à la différence de Guillaume de Troërin, son père a priori.
Mais V.-H. Debidour, en 1979, après une étude stylistique comparative des jubés bretons, proposait pour celui de Lambader la date de 1520, au vu des panneaux italianisants.
En 1976, Tanguy Daniel écrit dans un article de 4 pages sur ce jubé :
"De quand dater ce chef-d'œuvre ? Certaines analogies avec le jubé de Kerfons en Ploubezre, daté, lui aussi des années 1481-1485, ont poussé certains auteurs à faire remonter aussi celui de Lambader aux années 1480, d'autant qu'un écusson des donateurs, Marc de Troënin et Isabeau de Kermellec, vivant à cette époque, figure du coté du chœur tenu par un ange en pendentif. Cela peut correspondre à la partie flamboyante du jubé, mais la tribune, avec ses éléments décoratifs de la première Renaissance, ne peut remonter au delà des années 1510-1520. Quoiqu'il en soit, ce chef-d'œuvre fragile a été considérablement restauré en 1877 , au moment de la reconstruction de la chapelle, par Denis Derrien, sculpteur à Saint-Pol-de-Léon : il a refait bien des entrelacs de la claire-voie, et surtout remplacé la plupart des statues accolées à la tribune du coté du chœur. Il n'en reste pas moins que le jubé de Lambader, même s'il n'a pas — ou plus ? — de polychromie, est en Bretagne une œuvre majeure de la fin du flamboyant et du début de la Renaissance."
De même en 1977, Michel de Mauny, écrit dans Le Pays de Léon :
"La date se rapproche beaucoup plus de 1510-1520, en raison du décor Renaissance des panneaux de la tribune, comparables à ceux de Goulven : rinceaux, candélabres et chimères sous des accolades jumelées sont identiques. Par la délicatesse de ses découpures, ce jubé mérite d'être placé en parallèle avec les plus beaux jubés conservés de Bretagne, tels celui de Kerfons en Ploubezre avec lequel il a en commun certains détails, l'escalier notamment, celui de Locmaria en Belle-Isle-en-Terre, celui encore de Saint-Fiacre du Faouët."
C'est aussi l'évaluation des services du Patrimoine (base Palissy) qui donne la datation du "premier quart du XVIe siècle".
Les cartes de l'examen iconographique, stylistique et héraldique sont brouillés par l'importante réfection de novo et la restauration de 1877. Ainsi, les deux blasons, très bien conservé, semblent en relever.
"En 1877, Denis Derrien sculpteur de Saint-Pol démonta et restaura ce jubé et l'état des statues détermina leur remplacement . Par un contresens aussi grossier que déplorable , dû à l'ignorance , on le remonta à l'envers, plaçant les statues des apôtres face au chœur, au lieu de les remettre face à la nef où ils doivent obligatoirement se trouver puisqu'ils sont là pour rappeler qu'ils figurent les portes par lesquelles on entre dans l'Eglise apostolique les deux portes de la Jérusalem céleste. Du coté opposé on a mis le pélican qui se perce le flanc, figure du Christ dont le sang vivificateur ressuscite à la vie spirituelle les hommes morts par le péché, allégorie en raison de laquelle il devrait se placer face au chœur. Des anges, portant les instruments de la Passion, terminent les pendentifs." (Michel de Mauny)
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Je peux donc, pour reprendre ces auteurs, poser ce postulat : la clôture de chœur est de style gothique flamboyant, tandis que la tribune relève de la Première Renaissance. Soit de façon contemporaine (comme cela se voit pour la clôture de chœur de la chapelle haute de Gaillon, 1502-1510), soit par deux chantiers distincts et successifs.
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Rappel : On divise la Renaissance entre un Style Louis XII (1495-1525/1530) de transition avec le gothique, une Première Renaissance française (1515-1530/1540) et une Seconde Renaissance ou Classicisme (1540 à 1560/1590, incluant le Style Henri II) qui s'achève avec le Maniérisme. L'Ecole de Fontainebleau (1534-1539) y joue un rôle pivot, avec l'introduction dans l'ornementation des créations de Primatice, Rosso Fiorentino, et, pour les boiseries, de Scibec de Carpi.
Mais ces datations qui qualifient l'architecture française doivent être interrogées pour leur application à la sculpture en Bretagne.
Les premières manifestations de la sculpture Renaissance en Bretagne se trouvent en Haute-Bretagne, à Dol-de-Bretagne en 1508, puis à Guerche-de-Bretagne (stalles, 1518-1525), à Notre-Dame de Vitré (vers 1530-1550) sous l'influence de Guy XV de Laval, puis à Champeaux (stalles, v.1530-1550) sous l'influence des familles d'Espinay et de Goulaine. Le style de la Seconde Renaissance ne s'introduit en Basse-Bretagne qu'en 1553-1559 à la chapelle de Kerfons, sous l'influence de Marquise de Goulaine, puis au château de Kerjean vers 1570 et au château de Maillé sous l'influence de Maurice de Carman et Jeanne de Goulaine, mariés en 1541. Ce sont ces familles d'Espinay, de Goulaine, de Carman, de Boutteville, de Montejean, de Vertus-d'Avaugour qui diffusèrent le style italianisant qui s'était développé à la Cour de France dans le Val-de-Loire.
D'où mon interrogation : les panneaux sculptés de Lambader (que je vais présenter en détail), de style Première Renaissance avec leurs rinceaux symétriques autour d'un axe vertical, leurs dauphins et dragons affrontés, leurs putti ailés, leurs oiseaux fabuleux buvant aux mêmes vasques, leurs candélabres, et leurs crânes animaux, comparables à ceux de Gaillon, Dol-de-Bretagne, La Guerche et Champeaux, mais sans aucun élément bellifontain comme les cartouches, cuirs découpés et mascarons, ont-ils, si on accepte la datation de 1510-1520, précédé ceux des collégiales de Haute-Bretagne et sont-ils apparus, de façon presque virginale, en Basse-Bretagne sans y être introduit par un haut seigneur fréquentant le Val-de-Loire et la Cour?
Ne faut-il pas accorder un peu plus de temps à la Première Renaissance pour pénétrer le Léon ?
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L'un des arguments que je propose est de remarquer que la chapelle fut victime d'une importante destruction du chevet, nécessitant de la part de Marc de Troërin une donation du 17 janvier 1534.
"dans les papiers de la famille de Troërin, famille fondue dans la maison de Réals, nous trouvons un acte de 1534 par lequel le seigneur de Troërin, à l'occasion d'une reconstruction du pignon sud de l'église, donne au prieur de Lambader un champ sis au terroir de Kerguidal. L'acte n'indique pas à quel ordre appartenait le prieur de Lambader. En reconnaissance de ce don, le dit prieur reconnut au seigneur de Troërin le droit à trois tombes dans la chapelle, plus le droit à la troisième arcade, plus le droit de placer ses armes dans trois endroits différents de l'église. Diverses tombes ont été découvertes pendant la démolition ; mais aucune inscription n'a permis de reconnaître quels étaient les personnages que recouvraient ces sépultures." (Vicomte de Réals)
N.B Tanguy Daniel signale que ce don permit non seulement la reconstruction "du pignon suzain [haut, supérieur] d'icelle chapelle" mais aussi la réparation de la chapelle.
On peut déduire de cet acte que Marc de Troërin n'avait pas, avant 1534, droit à apposer ses armoiries dans la chapelle. On remarque que le nombre des blasons concédés par le prieur est le même que celui des écus qui existent aujourd'hui sur le jubé.
Le nouveau chevet est achevé en 1543, puisqu'on y installa la maîtresse-vitre représentant une Passion (elle sera brisée en 1845) portant cette date. .
On ajoutera à cela que le calvaire date de 1550 environ. La période 1534-1550 est celle d'une importante activité pour Lambader.
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Au total, j'incite les chercheurs à reconsidérer la datation du jubé (ou peut-être seulement de sa tribune) et, pour les motifs héraldiques et stylistiques exposés, de le retarder autour de 1534-1539 (avant la Galerie de François Ier de Fontainebleau) ou de 1534-1543.
Un autre élément de datation pourrait, comme Jérôme Lafeuille l'a si élégamment fait à Kerfons, se baser sur les statues des apôtres Credo apostolique. Mais celles-ci, qui ne forment pas un Credo apostolique, sont dues au ciseau de Denis Derrien en 1877, et il faudrait , pour s'y fier, supposer qu'il s'est fondé, pour les réaliser, sur des modèles préexistants. Son orientation inhabituelle de la tribune, et l'étude de ces statues, n'encouragent pas à les inclure dans une iconographie comparative permettant une datation.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LE JUBÉ VU DEPUIS LA NEF.
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Le jubé de la chapelle de Lambader est situé à la jonction des cinquième et sixième travées de l'édifice.
Nous voyons les trois arcades de la clôture de style flamboyant, l'arcade du milieu étant ouverte en partie basse pour permettre un passage vers le chœur. Était-elle fermée par une porte ?
Au dessus des voûtains de ces arcades, la tribune se déploie, rythmée par 12 panneaux, un crucifix central et deux statues du XIXe siècle.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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I. LA TRIBUNE, COTÉ NEF.
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Sous une frise de fleurs et feuilles de chardons, douze arcatures jumelées deux à deux sont séparées par des pinacles à crochets ou des pinacles suspendus. Ces arcatures imitent des baies gothiques avec un remplage chargé de choux frisés, découpant des mouchettes et marquées, comme des yeux, par deux roses contiguës.
Cette dentelle flamboyante se répète sans varier, mais chacune des 12 arcades renferme un panneau rectangulaire, de style Renaissance, qui diffère à chaque fois. Je les présenterai de gauche à droite.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LES DOUZE PANNEAUX "GROTESQUES".
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Premier panneau.
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Feuilles larges et fleurons dans un rinceau symétrique autour d'un axe vertical.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Deuxième panneau.
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Dans une symétrie autour d'un axe vertical formé par un candélabre, deux dauphins s'affrontent dans le réseau de rinceaux produisant des masques anthropomorphes de profil .
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Troisième panneau.
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L'axe vertical est un candélabre (ou vase, ou bassin) recevant la tête d'un putto ailé. Deux oiseaux fantastiques et hybrides viennent en mordre le bord. La tête, le corps, les ailes et la queue de ces oiseaux sont feuillagés, selon le procédé de métamorphose et effacement des limites entre monde animal et végétal.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Quatrième panneau.
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L'axe vertical est un encore un vase, contenant des fruits ronds que deux oiseaux viennent picorer. Ces oiseaux sont feuillagés comme les précédents.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Cinquième panneau.
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L'axe vertical est un candélabre (ou vase, ou bassin) auquel deux dauphins copieusement feuillagés viennent s'abreuver. Leur queue bascule du monde naturel vers le monde artificiel en adoptant la forme d'une lame marquée de I.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Sixième panneau.
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L'axe vertical est un candélabre supportant une tête plus animale qu'humaine, aux longues oreilles, aux yeux caves et au nez épaté. De part et d'autres, deux dragons (ou unicornes) s'ébattent, mais leur buste laisse vite place à des rubans de feuillages.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Septième panneau.
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Au dessus du candélabre central, une tête vaguement anthropomorphe, mais feuillagée, crachent trois rinceaux de chaque coté. L'un s'achève en feuillage, l'autre en corne, et le troisième est la queue d'un dauphin. Feuillagé, cela va de soit.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Huitième panneau.
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Deux dragons, qui reprennent la plupart des traits des animaux précédents, s'opposent de chaque coté du candélabre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Neuvième panneau.
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Deux oiseaux picorent un fruit rond trouvé sur la vasque du candélabre central.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Dixième panneau.
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Deux dragons feuillagés autour d'un candélabre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Onzième panneau.
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Le candélabre supporte un masque de forme lunaire; Il est gardé par deux dragons ailés, assis comme des sphinx.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Douzième panneau.
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Composition à feuilles larges creusées en cupules au centre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LES DEUX STATUES (1877).
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Elles occupent les deux consoles à godrons (d'origine ?) encadrant le Crucifix? Comme ce dernier, elles sont dues au ciseau de Denis Derrien, et il est très improbable que ce dernier se soit basé sur des statues antérieures ; le culte de saint Joseph s'est développé au XIXe siècle. Joseph et son fils, Anne et sa fille célèbrent les vertus des liens familiaux.
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1. Saint Joseph et l'Enfant-Jésus.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Sainte Anne éducatrice.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LES SEPT ANGES PRÉSENTANT LES INSTRUMENTS DE LA PASSION.
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1. Ange ayant perdu son attribut.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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2. Ange présentant la croix (traverse perdue)
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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3. Ange présentant le marteau et les tenailles du crucifiement.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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4. Ange présentant la couronne d'épines.
Le pélican dans une corbeille s'ouvre la poitrine pour nourrir ses petits de son sang. Allégorie de l'Eucharistie.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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5. Ange présentant l'échelle de la Descente de croix.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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6. Ange présentant la lance de Longin.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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7. Ange volant (accessoire perdu ?).
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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II. LA CLÔTURE, COTÉ NEF.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Les montants de la porte présentent les statues de l'ange Gabriel et de la Vierge Marie, tandis qu'au centre un ange montrent le blason aux armes de Kermellec. Tout autour court un rinceau de vigne, avec ses grappes, symbole eucharistique au même titre que le pélican.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Ange présentant un blason.
Le blason porte, selon Pol de Courcy (1864) repris par De Réals (1889) puis Abgrall (1897) les armes de la famille de Kermellec, d'or à une fasce de gueule, accompagnée de trois molettes d'éperon de même, deux en chef et une en pointe.
https://www.tudchentil.org/spip.php?article789
Selon les auteurs, Isabeau de Kermellec épousa Marc de Troërin en 1481.
Les meubles du blason, tout comme l'ange, ne montrent aucun signe d'altération : il s'agit sans doute d'une copie de 1877. Les molettes sont remplacées par des étoiles. La fasce porte des hachures verticales, comme dans le codage de représentation monochrome en héraldique, pour rendre la fasce de gueules.
L'affirmation de Pol de Courcy peut s'étayer sur les informations réunis par le site d'Hervé Torchet, La Pérenne :
http://www.laperenne-zine.com/articles.php?lng=fr&pg=616
a) Ysabeau de Kermellec est la fille de Tanguy de Kermellec et de Constance de Coetanroch
1499, Partage : Guillaume de Cornouaille seigneur de Cornouaille sgr de Kerguern et de Coetanroch à Ysabeau de Kermellec, héritage de feus Tanguy de Kermellec et Constance de Coetanroch père et mère de ladite Ysabeau et aïeuls dudit Guillaume.
b) en 1505, ladite Ysabeau est femme de Marc Tuonquirin ( en marge Troerin)
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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L'Annonciation sur l'encadrement de la porte.
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J'ai remarqué récemment (Arc de triomphe de Saint-Thégonnec) combien les Annonciations étaient disposées à l'entrée des sanctuaires, sur les portes monumentales, les porches, et, ici, la porte de clôture.
Les statues sont placées dans une niche à dais gothique.
Gabriel qui ébauche une génuflexion, tient le lys, fleur pur et blanche symbolisant la conception virginale. Le phylactère de son message entoure la tige.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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La Vierge Marie.
Elle tient le livre des Écritures (qu'elle réalise) et fait le geste de son acceptation au plan divin de l'Incarnation.
Son front est largement épilé, ses cheveux ne sont pas voilés ou retenus, ses joues sont particulièrement rondes et pleines. Elle porte sur une chemise à col rond une robe à encolure carrée et un manteau. Le vase portant le lys est à ses pieds.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LE JUBÉ VU DEPUIS LE CHOEUR.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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I. LA TRIBUNE.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LES DOUZE PANNEAUX "GROTESQUES".
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Nous trouvons plusieurs fois les mêmes motifs, déjà présents sur la face ouest, sans pouvoir affirmer si ces panneaux sont ceux d'origine, ou encore si Denis Derrien a complété des espaces manquants ou trop altéré.
Il me manque, pour l'ensemble des boiseries de ce jubé, une expertise des bois qui en daterait la réalisation.
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Premier panneau.
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Un candélabre supporte un masque feuillagé qui crache des rinceaux, dont deux s'achève en tête de dragons.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Deuxième panneau.
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Un candélabre supporte un crâne animal (bucrâne? mais sans cornes) aux oreilles longues. Deux dragons ou unicornes voient leur queue s'empanacher en rinceaux.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Troisième panneau.
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Deux oiseaux huppés et feuillagés boivent ou picorent le bord du vase central, lequel est dominé par une tête de putto ailé.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Quatrième panneau.
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Deux oiseaux feuillagés picorent les fruits ronds disposés sur la coupe d'un candélabre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Cinquième panneau.
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Deux dauphins s'affrontent autour d'un candélabre, croisant le trajet de deux rinceaux qui s'épanouissent en masques anthropomorphes de profil.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Sixième panneau.
Rinceaux autour d'un candélabre.
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Septième panneau.
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Deux dauphins cornus s'ébattent sur la margelle d'un candélabre ; leur tête, leur corps et leur queue libèrent des volutes de feuillages.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Huitième panneau.
Rinceaux autour d'un vase et d'une fleur.
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Neuvième panneau.
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Semblable au 3ème panneau.
Deux oiseaux huppés et feuillagés boivent ou picorent le bord du vase central, lequel est dominé par une tête de putto ailé.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Dixième panneau.
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Rinceaux autour d'un candélabre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Onzième panneau.
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En registre supérieur, deux oiseaux fabuleux picorent les fruits ronds proposés sur un candélabre.
Au centre, un médaillon (aux bords marqués de I ) renferme un fleuron inscrit dans par un losange.
En registre inférieur, deux dauphins autour d'un candélabre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Douzième panneau.
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Identique au onzième.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LES TREIZE STATUES , LES DOUZE APÔTRES.
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L'étude des 13 statues en ronde-bosse s'est avérée décevante. Elles sont posées sur un culot, la plupart polyédrique, un seul à godrons) sous des dais gothiques. Une seule (saint Jacques), placée devant la porte de l'escalier, n'a pas de dais.
Cette étude est décevante car la plupart des statues ont été crées par Denis Derrien en 1877 sans que nous ne sachions s'il disposait, ou non, de modèles.
Elle est décevante, car nous ne retrouvons ni l'ordre traditionnel des Credo apostoliques (Pierre, puis André, puis Jacques le Majeur, puis Jean, etc.), ni les phylactères portant l'article du Credo qui est leur est attribué. Or, cet ordre et ces phylactères sont présents dans les autres jubés "contemporains" (notion vague en raison du manque de consensus sur cette datation). À Kerfons en Ploubezre vers 1495 et Saint-Fiacre en Melrand les 12 apôtres suivent l'ordre du Credo du Calendrier des Bergers de 1493.
Elle est décevante car ces apôtres sont tournés vers le chœur et non vers la nef comme dans les autre cas, ce qui amène Michel de Mauny à en rendre responsable Denis Derrien. Ce serait vraiment la preuve d'une grande incompétence ; mais cette orientation des apôtres se retrouve aussi à Saint-Nicolas en Priziac.
Elle est décevante car la représentation des apôtres semble fautive (par égard à l'iconographie traditionnelle). C'est ainsi que saint Jean est figuré en évangéliste (accompagné de l'aigle du Tétramorphe), au lieu de tenir en main gauche son attribut, le calice de poison. La main droite brisée ne permet pas d'en dire plus.
Et enfin elle est décevante car l'identification de nombreux apôtres nous plonge dans l'embarras.
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Que savons-nous de ce sculpteur de Saint-Pol-de-Léon?
Fils de Jean-François, menuisier à Saint-Pol, Jean-Denis Derrien (Saint-Pol,1816/ Saint-Pol, 1897) installa en 1854 dans une ancienne demeure du XVIe un atelier de sculpture religieuse au 5 rue Saint-Yves (ex Venelle-aux-poules), près de la cathédrale, où, pendant plusieurs décennies, une quinzaine d'ouvriers réalisèrent des statues, autels, retables pour les églises de la région. Il réalisa ainsi un autel et le baptistère (1897) de la cathédrale, pour l'église de Carantec la chaire à double escalier, trois confessionnaux et l'autel de Saint-Sacrement, les chaires du Folgoët et de La Feuillée, les stalles de la cathédrale de Quimper et de Saint-Brieuc, et les stalles de l'église de Rumengol (1874) . Et peut-être deux statues de saints (Corentin et Guénolé) à l'église de Rumengol vers 1886, tout comme la niche (1883) de la Trinité et celle de Notre-Dame de-Rumengol (1883). Il a travaillé aussi à Plounéventer et Carhaix.
Il est aussi entrepreneur (c'est sa qualification sur son acte de décès), et se chargea de la construction de l'église Saint-Pierre de Plounevez-Lochrist en 1871 sur les plans de Rivoalan, architecte de Brest.
On le trouve désigné aussi sous le terme "atelier Derrien-Pondaven", en association avec son concurrent Yves-Marie Pondaven, qui employait à la même époque jusqu'à 29 ouvriers dans son atelier de la Grand-Rue ; ce dernier réalisa les retables et autels de Plouvien, le reliquaire en acajou de Rumengol en 1855, deux autels et le maître-autel de Pleyber-Christ en 1869. Le reliquaire de Rumengol porte une inscription associant leurs deux noms : "gant D.M. Pondaven ha Derrien D.
Au total, nous avons la certitude que ces statues du jubé sont sorties d'un atelier prestigieux et prolifique de Saint-Pol-de-Léon, mais cet atelier s'est illustré dans les créations de mobilier religieux neuf, et non dans les restaurations de monuments historiques. [Le jubé de Lambader est classé Mh depuis 1840].
Dernière remarque. Beaucoup d'auteurs pensent que ce jubé était, à l'origine, peint. Si cela était le cas, il ne subsiste pas la moindre trace de polychromie, ce qui supposerait de la part du restaurateur un décapage très sérieux. Les visiteurs qui ont décrit au XIXe siècle et avant 1877 le jubé "en bois sculpté" se sont tous extasiés sur "la finesse du travail et la multiplicité des détails qui pourraient le comparer à un ouvrage de dentelle brodé dans le chêne" et aucun n'en mentionne les couleurs. Certes ils recopient peu ou prou les Antiquités de Fréminville (1832-1835), mais cela m'amène à penser que ce jubé était alors en bois brut.
Un autre sujet d'étonnement est qu'aucun de ces voyageurs ne signale, bien au contraire, le mauvais état de conservation des sculptures, y compris en 1864 dans la description de Pol de Courcy.
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Liste des statues. On a compris que les identifications sont plutôt des propositions ou interrogations destinées à susciter des échanges que des affirmations.
Saint Jacques le Majeur ?? Chapeau ; bâton. Statue ancienne ?
Saint Pierre. Clef ; livre ; toupet frontal
Saint Paul. Epée ; livre ; calvitie.
Saint André. Croix en X (?), livre.
Saint Jean. Imberbe, aigle du Tétramorphe, phylactère (évangile ?)
Saint Thomas. Équerre, livre.
Apôtre non identifié. Geste de bénédiction ; livre ; attribut en demi-lune près du pied droit.
Apôtre non identifié. Deux livres ?
Saint Barthélémy (couteau ?) ou Matthieu (hache ?). Livre.
Apôtre non identifié. Attribut brisé (manche d'outil?) en main droite ; livre.
Saint Jacques le Majeur. Chapeau de pèlerin, coquille sur une courte pèlerine, bourdon (brisé) ; livre.
Apôtre non identifié. Attribut brisé en main droite ; livre. Statue plus ancienne ; le manteau est lacé par devant selon un motif rare.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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1. Saint Jacques le Majeur ?? Chapeau ; bâton. Statue ancienne ?
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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2. Saint Pierre. Clef ; livre ; toupet frontal
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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3. Saint Paul. Epée ; livre ; calvitie.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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4. Saint André. Croix en X (?), livre.
Il me manque un cliché pour préciser l'objet tenu en main droite et que je suppose être la croix de Saint-André.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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5. Saint Jean. Imberbe, aigle du Tétramorphe, phylactère (évangile ?).
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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6. Saint Thomas. Équerre, livre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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7. Apôtre non identifié. Geste de bénédiction ; livre ; attribut en demi-lune près du pied droit.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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8. Apôtre non identifié. Deux livres ?
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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9. Saint Barthélémy (couteau de dépeçage ?) ou Matthieu (hache ?). Livre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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10. Apôtre non identifié. Attribut brisé (manche d'outil?) en main droite ; livre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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11. Saint Jacques le Majeur. Chapeau de pèlerin, coquille sur une courte pèlerine, bourdon (brisé) ; livre.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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12. Apôtre non identifié. Attribut brisé en main droite ; livre. Statue plus ancienne ; le manteau est lacé par devant selon un motif rare.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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LES CINQ ANGES .
Quatre anges présentent des phylactères autour d'un ange tenant le blason de Marc de Troërin. ils sont décrits de gauche à droite.
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1. Ange volant, présentant un phylactère.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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2. Ange volant, présentant un phylactère.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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3. Ange volant, présentant un phylactère. Aile gauche brisée.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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4. Ange volant, présentant le blason de Marc de Troërin. Aile droite brisée.
Selon l'Armorial ou nobiliaire de l’évêché de Saint-Pol-de-Léon, en Bretagne, en 1443, par le marquis du Refuge, (BnF RES 8-LM2-124) ces armoiries de Troërin ou Traonvilin sont : d'azur à la fasce vivrée d'argent accompagnée de six besants de même.
Ici, le sculpteur a figuré une fasce simple, et non "vivrée", découpée en grandes dents de scie.
On trouve aussi ici d'azur à la face ondée ... mais la fasce sculptée est parfaitement droite (mais marquée d'un croissant en bord inférieur, comme une moitié de besant).
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La chapelle a été restaurée à l'initiative du vicomte de Réals (cf. biblio), qui demeurait au château de Troërin. On peut penser qu'il a superviser le travail de restauration du sculpteur, et tout spécialement celui des blasons. En tout cas, le blason aux armes de Marc de Troërin et tenu par un ange du jubé est attesté, avant la restauration de 1877, par les voyageurs du XIXe siècle.
https://books.google.fr/books?id=yWQDAAAAQAAJ&pg=PA79&dq=lambader&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjE3dm_-aDvAhVgA2MBHU8ZBew4ChDoATAAegQIARAC#v=onepage&q=lambader&f=false
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La famille de Troërin et son manoir. Selon Wikipedia :
"Montres et réformations du XVème siècle font mention d'une famille Tuonhirin ou Tuonquerin, dont le vocable a évolué dans la suite en « Troérin ». Sa descendance mâle s'est éteinte en la personne de M. de Troérin, chanoine et grand-chantre de Léon en 1789, dont la sœur, Marie, avait épousé, en 1770, François de la Tullaye, seigneur de Coëquelfen, capitaine de vaisseau. Leur fille fit passer le manoir, le 16 janvier 1796, dans la famille de Réals par son mariage avec Charles Boscat de Réals, ancien capitaine au régiment de Bresse.
Troérin est toujours possédé par cette famille de Réals.
Les archives du manoir contiennent les titres de la famille de Troérin, depuis le XVème siècle, et ceux des familles de Coëtquelfen, de la Tullaye, de Réals... On y voit également des notes sur Plouvorn, des extraits des anciens registres paroissiaux, et des, notices généalogiques sur plusieurs familles du pays, rédigées par le colonel de Réals."
"La famille de Troërin est connue depuis au moins le XIIe siècle : le sire Pierre Michel de Troërin est cité comme participant à l'assise du comte Geoffroy en 1185 et le sire Pierre Michel de Troërin participe à la première croisade de Saint-Louis à partir de 1248. La famille de Troërin, seigneurs du dit lieu (l'existence du manoir de Troërin est attestée dès 1413), de Kerjean, de Kergounan (en Lampaul-Ploudalmézeau, de Kerrannou (en Saint-Pol-de-Léon), présente aux montres de 1426 à 1534, fut reconnue d'ancienne extraction noble lors de la réformation de 1669, à la demande d'Anne de Troërin, épouse de Louis de Kerhoas, seigneur de Coatcoulouarn (en Saint-Thégonnec) et du Quellenec. En 1638, Charles de Troërin épousa à Lampaul-Ploudalmézeau Louise de Kerlec'hb. Leur petit-fils Jan de Troërinc fut lieutenant des maréchaux de France en Bretagne ; il transforma le manoir en château aux alentours de 1717 et fit faire par Isaac Robelin un nouvel aménagement paysager du parc.
Le 16 janvier 1798, Henriette-Marie-Salomé de La Tullaye, fille de François-Henri de La Tullayed et de Marie-Anne-Corentine de Troërin, mariés le 20 octobre 1767 à Plouvorn, épousa Charles-Marie-Henri Boscal de Réalse, capitaine au régiment de Bresse en 1790, issu d'une famille originaire du Poitou. Depuis le château de Troërin appartient à la famille Boscal de Réals."
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/chateau-de-troerin-plouvorn/06f06d2a-a963-4976-b197-cd69d0a8bb95
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Marc de Troërin.
Il est présent, équipé en brgiandine (*) à la Montre de l'Evêché de Léon en 1503 ("Marc Truongirin").
(*) La Brigandine était selon Fréminville une cuirasse légère formée de bandes d'acier larges de deux ou trois doigts, assemblées transversalement et doublées d'un cuir de cerf.
On le trouve ensuite à celle de 1534 :
Plouemorn
Le sieur de Penfentenyou, homme d'armes.
Le sieur de Kerounyant (Jean de Kergorlay), homme d'armes.
Le sieur de Créachquerault (Jean de Créachquerault), homme d'armes.
Le sieur de Coatudavel (Ulivier de Coatudavel) , archer .
Jan Kersainctgily, sieur de Keruzoret, archer à deux chevaux.
Marc Traouirin, sieur dudit lieu ou Troërin, archer en brigandine.
Etc
L. Le Guennec, "Convocation du ban et de l’arrière-ban de l’Evêché de Léon et de la chatellenie de Morlaix-Lanmeur (1534-1708)", Bull. SAF 1911 https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207700g/f135.item
Son père (?) Guillaume Trouhirin ("Tnouhirin"), 20 livres de revenu, archer en brigandine est présent à la Montre de 1481 parmi 40 nobles de Plouvorn. Et à la Réformation de 1443 (base de l'Armorial du marquis du refuge), c'est Jean de Troërin ou de Traonvilin qui est mentionné.
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Ajoutons que Troërin est le nom du ruisseau, affluent de l'Horn, qui passe juste au sud de la chapelle de Lambader, et alimente l'étang du château de Troërin. Un moulin de Troërisi ou Troërin y était installé (Marteville et Varin 1853).
Le bourg de Plouvorn est situé sur une éminence, vers 80 mètres d'altitude, entre les vallées des deux ruisseaux de Troërin (au sud) et de Keruzoret (au nord).
Un simple coup d'œil sur les cartes permet de comprendre le lien entre la chapelle, et le manoir.
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Voir les Preuves de la noblesse de Tanguy-Marie de Troérin de Kerjan, réunies en 1774.
https://www.tudchentil.org/spip.php?article1260
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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5. Ange volant, présentant un phylactère. Aile gauche brisée.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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L'ESCALIER À VIS.
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Entièrement en bois et construit autour d'un axe central qui le rend indépendant des piliers, il se déploie sur un tour et quart pour accéder par une porte à la tribune.
On retrouve un tel escalier au jubé de Kerfons.
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Deux des soutiens verticaux qui l'étayent à l'extérieur sont ornés à l'extrémité de belles gueules de dragons avalant le montant comme des engoûlants d'entraits.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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Le joueur de cornemuse.
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Il remplace, à l'extrémité nord de la tribune, l'un des anges et, comme ces derniers, il est figuré volant jambes fléchies derrière lui et vêtu d'une tunique plissée. Comme eux, il a le visage poupon et des cheveux bouclés. Mais il est coiffé d'un chapeau rond (mais évasé après l'étranglement du galon), et ses yeux sont mi-clos, comme un instrumentiste regardant son public placé plus bas. Jean-Luc Matte, qui n'a pas manqué de décrire l'instrument dans son Encyclopédie de la cornemuse signale le bourdon d'épaule brisé, le hautbois également brisé en dessous des mains du musicien, les dites mains étant presque à la même hauteur que le hautbois. Il ne dit rien du porte-vent, qui descend verticalement des lèvres du joueur et qui comporte une encoche. Les deux viroles par lesquelles le bourdon et le hautbois s'implantent dans le sac sont visibles.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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II. LA CLÔTURE, COTÉ CHOEUR.
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Nous retrouvons la disposition symétrique du coté nef, mais au dessus du fleuron de la frise d'acanthes, et au lieu des armoiries d'Isabeau de Kermellec, nous trouvons celles de son mari Marc de Troërin, toujours très "restaurées" (ou remplacées) et dont la fasce n'est ni vivrée ni ondée.
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Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
Jubé (chêne, v. 1534 et Derrien 1877) de la chapelle de Lambader en Plouvorn. Photographie lavieb-aile.
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SOURCES ET LIENS.
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— ABGRALL (Jean-Marie), 1897, Le Livre d'or des églises de Bretagne, Lambader, Berven, Lochrist, Goulven, illustrations de Charles Géniaux, Rennes pages 1-3.
http://bibliotheque.idbe-bzh.org/data/cle_201/lambader__berven__lochrist__goulven.pdf
— COUFFON, René), LE BARS, Alfred), Notice sur Plouvorn, Diocèse de Quimper et de Léon. Nouveau répertoire des églises et chapelles. Quimper : Association Diocésaine, 1988.
— COURCY (Pol de ), 1864, De Rennes à Brest et à Saint-Malo, itinéraire historique et descriptif, Hachette et Cie page 289
https://books.google.fr/books?id=3ueE6p-q1AYC&dq=lambader+%22ma%C3%AEtresse-vitre%22&hl=fr&source=gbs_navlinks_s
" La chapelle prieurale de Notre-Dame de Lambader (à 8 kil. au nord de Landivisiau), se recommandait, il y a peu d'années, par une tour du XIVe siècle. Cette tour était couronnée d'une flèche élancée, une des plus hautes et des plus belles du Finistère, bâtie à l'imitation du célèbre clocher de Creizker, à Saint-Pol de Léon. Classé au rang de monument historique, Lambader avait reçu de l'État une allocation destinée à sa consolidation; cette somme a été employée, en 1837, à descendre la flèche et les étages supérieurs de la tour, fortement ébranlée par la démolition d'un arc de triomphe qui lui servait de contre-fort au nord-ouest, et dont la fabrique a vendu les pierres. Il y aurait une bien triste énumération à faire des édifices détruits ou mutilés sous le prétexte de les restaurer, et ceux qui subsistent encore pourraient dire en défilant devant leurs juges, comme les gladiateurs devant la loge de César, lorsqu'ils allaient combattre dans l'amphithéâtre: Morituri te salutant!
La démolition de son clocher n'est pas le seul acte de vandalisme dont Lambader ait eu à souffrir; sa maitresse vitre, garnie d'une brillante verrière de 1543, a été maçonnée, les vitraux ont été dispersés et plusieurs statues en pierre renversées ou mutilées. Elles gisent aujourd'hui dans l'enclos du prieuré parmi les débris de la tour et de ses clochetons, les rosaces de la flèche et les quatrefeuilles de sa galerie, qu'on ne songe pas à relever, mais qu'on a cherché à vendre. Les murs, qui surplombent de tous côtés, ne tarderont pas à s'effondrer à leur tour.
La fontaine sacrée, qui coule au midi de la chapelle, est le but d'un pieux pèlerinage; mais la merveille de Lambader, depuis l'amputation dont son clocher a été victime, est un jubé en bois travaillé à jour, ainsi que la rampe de son escalier tournant. Cet ouvrage de dentelle, digne d'admiration pour l'élégance et la multiplicité de ses motifs flamboyants, est dû à la munificence de Marc de Troërin, époux, en 1481, d'Isabeau de Kermellec; les armes du donateur sont soutenues par un ange formant l'un des pendentifs du jubé du côté du chœur.
Un devant d'autel sur bois, dans la même chapelle, représente un martyr qu'à la mitre qu'il porte pour tout vêtement, on reconnait pour un évêque. Il est couché sur le dos, le ventre ouvert, et plusieurs soldats roulent, en riant, ses intestins autour d'un cabestan. On croit retrouver dans cet évêque saint Érasme, qui avait enduré le même genre de supplice. Les statues en kersanton de Notre-Dame de Pitié et de Notre-Dame de Lambader, sont reléguées dans des coins obscurs de l'église. Celle de ces statues qui surmontait le portail ouest, était accostée d'un groupe de 1598, qui n'a pas été déplacé, représentant six moines et six religieuses agenouillés.
Les statues de saint Christophe, portant l'enfant Jésus sur ses épaules, et de saint Trémeur, portant sa tête entre ses mains, ont été recueillies à la chapelle du château de Keruzoret, château où l'on conserve un riche cabinet du xviie siècle, à panneaux et à volets sculptés en ébène. Les sujets figurés sur ce beau meuble, qu'envierait le musée de Cluny, sont tirés du roman de l'Ariane, de Desmaretz, un des membres de l'Académie française à sa fondation, en 1635.
Vis-à-vis de Lambader se dresse une croix gothique dont les branches sont chargées des principaux personnages de la Passion. Plusieurs de ces statuettes, renversées par la tempête, ont été employés à macadamiser la route, d'autres jonchent aujourd'hui
les douves de cette même route, sans que la fabrique de Plougourvest prenne souci de les rétablir sur leurs piédestaux."
— DANIEL (Tanguy), 1996, "La chapelle de Lambader en Plouvorn, le jubé XVe-XVIe siècle", Bulletin de l'Association bretonne et union régionaliste bretonne 123e Congrès à Saint Paul de Léon Kergournadec'h Cléder Lambader plouvorn Morlaix Léon Roscoff Saint Paul Aurélien Monsiegneur de la Marche Keremma Berven – 1 janvier 1996 C 1996, I 1997 pages 47-50
— DEBIDOUR (Victor-Henri), 1979 L'Art de Bretagne , Arthaud éditeur, pages 197-199.
"Dans la trentaine d'années qui suit [le jubé de Saint-Fiacre, commencé en 1480], le décor se modifie imperceptiblement. Les jubés ont traduit un peu plus tôt que le décor architectural de pierre les évolutions de style. Les panneaux, aveugles ou ajourés, continuent à agencer leurs flammes de cent façons, les anges à se cambrer au dessus du vide portant un blason ou les instruments de la Passion. Ainsi à la tribune de Rochefort-en-Terre ; mais à celle de Goulven, vers 1515, et à Lambader certains panneaux, sont déjà meublés de rinceaux et de candélabres à l'italienne.
Si Saint-Pabu et les reste de chancel de Kernitron se contentent de broder en tradition flamboyante, Kerfons, qui le fait aussi, introduit vers 1490 la torsade perlée sur les poteaux de soutien et les écailles sur les montants : détails "Louis XII" qui se retrouvent à Locmaria en Belle-Isle-en-Terre, à Loc-Envel, à Lamballe, à Saint-Roch en Lannion-Brélévenez. Pour l'iconographie, Kerfons inaugure aussi l'idée de l'alignement des douze apôtres : on les retrouve vers 1520 à Lambader (restauration de 1877) et pendant plusieurs générations.
Après 1550, le goût nouveau a pleinement triomphé : les colonnettes sont en candélabres, les culots sont en toupie ; vases godronnées, coquilles, cartouches à enroulement, feuillages à profils humains se multiplient, têtes casquées dans les médaillons, bustes en demi-ronde bosse (Sainte-Croix en Plélauff, Rosquelfen, Saint-Jean en Guern, ancien dais à Rochefort-en-Terre, Brennilis, etc.).
À Sainte-Avoye, le jubé signé Bizoel (vers 1565) [1555] avec les apôtres d'un coté, des saints et les sept vertus de l'autre, n'a plus rien de gothique, et les voûtains de sa tribune sont peints en faux marbre.
Beaucoup plus remarquable est celui de Saint-Nicolas de Priziac, achevé en 1580. La clairevoie a des masques grimaçants (plusieurs ont les yeux et la bouche percés) qui broutent des rinceaux. D'un coté les apôtres, de l'autre la légende de saint Nicolas : il défend la vraie foi au concile de Nicée, et meurt couché sur une planche, pleuré de ses clercs, dont un l'asperge d'eau bénite : les sept autres panneaux ont trait à des miracles : dès sa venue au monde, il se tient debout dans la cuvette de son bain [...] Et entre ces scènes toutes médiévales, ce sont cariatides et atlantes nus, dont les bras, quand ils ne tournent pas court en volutes, s'allongent pour cueillir des pommes au sommet des pilastres qui les gaines, ou dont les jambes serpentiformes s'enchevêtrent comme un caducée.
À La Roche-Maurice, dernière étape : la tribune n'est plus sur voûte, mais sur plafonds à caissons décorés d'entrelacs en "cuirs" avec des toupies pendantes ; de monstrueuses consoles animales, accroupies obliquement soutiennent ce plafond, les corniches sont à denticules et à grosses virgules, et les colonnes cannelées de la claire-voie montent par anneaux godronnés vers les chapiteaux corinthiens. La tradition ne se marque plus que par les rangées d'apôtres et de saints : si leurs douze dais sont à balustrades, ils ont encore sous les pieds six anges suspendus ...
De la même seconde moitié du XVIe siècle est le chancel de Saint-Herbot. Il est d'une extrême richesse iconographique et ornementale. C'est une claire-voie faite de colonnettes tournées en candélabres au dessus d'un buffet vêtu, ainsi que les montants de la porte, de reliefs légers, rubans enlacés et noués, vases, masques et mufles, guirlandes de feuillages et de fruits. Il est couronné d'une longue bande de panneaux historiés, somptueusement encadrés, et séparés par des figures engainées : apôtres, prophètes, sibylles et personnages laïcs. Vers l'intérieur, au dessus des stalles de bois ciré, court un baldaquin à caissons. Tout en haut d'une série de petits frontons triangulaires, festonnés de rinceaux à jour.
Le chancel de Berven est plus tardif encore : daté de 1601 — et même de 1720 pour le portique supplémentaire dont il a été doté, solennel et froid avec ses quatre grandes colonnes lisses —il offre vers la nef une claire-voie en pierre. Mais les faces latérales sont en bois avec des colonnettes cannelées prises jusqu'au tiers de leur hauteur dans des manchons feuillagés. Chapiteaux corinthiens, entablement à têtes ailées, tout l'ensemble est pleinement classicisant. Les saints et les saintes sont toujours là aux panneaux inférieurs, Catherine avec sa roue, Apolline avec sa tenailles serrant une molaire ; mais à coté d'elles, Lucrèce s'enfonce une épée dans le sein : "martyre " elle aussi de sa pudicité, mais en bonne païenne, elle est figurée nue.
Mais au second quart du XVIIe siècle, c'était vraiment la fin des jubés et des chancels. Une conception toute nouvelle de l'aménagement et du décor des églises se faisait place : celle des retables monumentaux."
— DEBIDOUR (Victor-Henri), 1953 La sculpture bretonne,
— FRÉMINVILLE ((chevalier Christophe-Paulin de La Poix de Fréminville) 1832, Antiquités de la Bretagne: Finistère, Volume 1, Lefournier et Deperiers, 1832 p. 69
https://books.google.fr/books?id=d04bAAAAYAAJ&dq=lambader&hl=fr&source=gbs_navlinks_s
"Eglise de de Lambader, ancienne maison de l'ordre des Templiers qui, après la spoliation des biens de cet ordre en 1314; passa en la possession des chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem ou de Malte. Cette église , assez vaste , est construite dans le style d'architecture gothique-arabe. Son clocher est très-beau ; c'est une tour carrée ornée en haut d'une balustrade légère et surmontée d'une flèche très-élevée, de forme prismatique hexagonale, flanquée de quatre clochetons. Cette flèche, toute en pierre de taille , est travaillée à jour ainsi que les clochetons qui l'accompagnent. Au pied du clocher est une porte donnant sur un petit porche qui précède l'église.
Presque tous les édifices appartenant aux Templiers portaient le cachet de l'esprit guerrier de leur institution, et leurs églises même avaient quelqu'apparence de forteresse; la commanderie de Lambader était environnée d'une forte muraille à plate-forme, on en voit encore une partie adjacente au clocher et dans laquelle est pratiquée la principale porte de ce monastère demi-couvent, demi-place de guerre. A droite de cette porte en est une autre plus petite ; une espèce de poterne ouverte au pied de l'escalier par où l'on monte sur la plate-forme.
· Entre le portail et le clocher on remarque quelques niches dans lesquelles étaient placées des statues de saints.
Dans l'intérieur de l'église , la boiserie gothique et travaillée à jour qui sépare la nef du choeur, est digne d'être admirée pour l'élégance et la multiplicité de ses détails, sa légèreté pourrait la faire comparer à un ouvrage de dentelle. Dans le choeur je vis suspendus à la muraille des fers tels qu'en portaient les esclaves : ils furent sans doute consacrés en ce lieu par quelque chevalier qui, ayant longtemps gémi captif chez les infidèles, les a apportés comme offrande à cette église après avoir recouvré sa liberté.
Les vitraux, bien conservés , sont d'une époque postérieure à l'édifice, les personnages qui y sont représentés, portent le costume et l'armure du seizième siècle. Ce sont, selon toute apparence, les seigneurs aux dépens desquels ces vitraux ont été faits.
Plusieurs statues ornaient jadis l'église de Lambader, elles ont été renversées et mutilées, leurs débris gisent sur le gazon dans le préau ou cour du monastère. J'en remarquai une qui me frappa par le fini et la précision de son travail, elle représente un chevalier armé de toutes pièces , tenant l'épée nue sur l'épaule ; la forme de son armure indique la fin du quatorzième siècle. On remarque au bas de la cuirasse l'assemblage de pièces de lames transversales qui recouvre le défaut des cuissards et que l'on nommait tasseltes ou braconnière. La tête de cette statue a malheureusement été brisée ( Pour préserver cette statue de mutilations plus considérables, M. le marquis du Dresnay en a fait récemment l'acquisition et l'a fait transporter à Saint-Pol de Léon , où elle est placée dans son jardin. ) : je présume qu'elle représentait quelqu'un des commandeurs de Malte titulaires de la commanderie de Lambader. Ce ne peut être un templier, car, lors de la destruction de l'ordre du temple, les .chevaliers portaient encore le haubert ou armure entièrement en mailles, celle que l'on voit ici est celle de plaque et de lames adoptée au quatorzième siècle."
— GALLIC (Kristian), Le jubé de Lambader, vidéo.
https://www.youtube.com/watch?v=R8v-UGsxanQ&ab_channel=DanielleRopars
— LAFEUILLE (Jérôme), 2020, Un nouveau regard sur le jubé de Kerfons, Coll. Les cahiers de l'ARSSAT n°4.
— LE GUENNEC (Louis), 1911, La chapelle de Lambader, Morlaix, Lajat brochure in-8°, 88 pages.
— LE GUENNEC (Louis), Le Finistère monumental tome 1, Morlaix et sa région, page 308. Droits réservés. Ouvrage numérisé avec l'aimable autorisation de la Société des Amis de Louis Le Guennec.
https://bibliotheque.diocese-quimper.fr/items/show/9845
https://bibliotheque.diocese-quimper.fr/items/show/9845
Le magnifique jubé, « l'expression la plus parfaite du travail sur bois » fut démonté et reconstitué avec un goût parfait par Denis Derrien, de Saint-Pol-de-Léon. C'est de ses ateliers que sortent les statues des douze Apôtres qu'on y remarque. « Le jubé de Lambader, dit le chanoine Abgrall (Cours d'architecture bretonne professé au Grand Séminaire de Quimper), est une large galerie portée sur une sorte de cloison aux compartiments découpés et fouillés avec la plus grande finesse. L'habileté et l'imagination des huchers de l'époque flamboyante s'y sont donné libre champ. C'est un fenestrage compliqué et néanmoins harmonieux, c'est une dentelle avec dessins variés et toujours pleins de grâce. Sur les torsades des deux montants de la porte étaient gravées des hermines ; le ciseau des révolutionnaires les a toutes mutilées comme des emblèmes dangereux. La galerie est soutenue en encorbellement de chaque côté de ce chancel, par des nervures et des demi-berceaux. Des pendentifs représentent les anges portant des instruments de la Passion, et au milieu est un beau pélican qui nourrit ses petits de son sang. Un écusson tenu par un ange en pendentif, du côté du chœur, indiquerait que cet admirable ouvrage serait dû à la munificence de Marc de Troerin, époux en 1481 d'Isabeau de Kermellec. La balustrade de la galerie est garnie de panneaux encadrés de beaux motifs flamboyants, tandis que la décoration des panneaux eux-mêmes est dans le genre de la Renaissance. Et dans tout cet ensemble, ce qu'on devra encore plus admirer, c'est le petit escalier à vis, qui monte au jubé dans l'angle nord, compris et disposé avec une élégance parfaite, indiquant la spirale de ses marches au moyen de ses gracieuses colonnettes. »
— LE GUENNEC (Louis), 1911, La chapelle de Lambader, Morlaix, Lajat, in-8°, 88 pages
La plus ancienne mention de la chapelle se trouve dans un acte de 1333; les documents conservés aux Archives du Finistère, et que M. Le Guennec a savamment commentés, remontent à 1432 : ils lui ont permis d'écrire une histoire complète de cet intéressant monument.
— LE GUENNEC (Louis), 1911, "La chapelle de Lambader", in Vieux souvenirs bas-bretons, édition 1938 par Les Amis de Louis Le Guennec, Quimper.
http://bibliotheque.idbe-bzh.org/data/cle_139/Vieux_Souvenirs_Bas_Bretons_.pdf
"On admire le magnifique jubé de chêne sculpté qui a fait le renom de Lambader. Sa large galerie, garnie de panneaux encastrés de motifs flamboyants, repose sur un chancel aux compartiments découpés et fouillés avec un art où l'habileté et l'imagination des huchiers de l'époque se sont donnés libre cours.
La présence des armoiries (une fasce ondée accompagnée de six besants) de Marc, seigneur de Troërin en 1481, sur ce splendide ouvrage ne prouve pas que ce personnage ait été le donateur . Le jubé de Lambader a très probablement été fait aux frais de la fabrique, et, si le seigneur de Troërin l'a timbré de son écusson, c'est au titre de simple prééminencier de la chapelle". (Le Guennec, Vieux souvenirs bas-bretons.)
— LE GUENNEC (Louis), Morlaix et sa région, édité par Les Amis de Louis Le Guennec, Quimper.
"La célèbre chapelle de Lambader s'élève à un kilomètre au sud-ouest du bourg. La tradition y voit un établissement de moines Rouges ou de chevaliers Hospitaliers, qui auraient eu leur château à l'enceinte retranchée voisine de Castel-ar-Vouden, en Plouzévédé, mais l'abbé Guillotin de Corson, qui a publié, en 1896, dans le Bulletin de l'Association Bretonne, une intéressante étude sur la « Commanderie de La Feuillée et de ses annexes » en Cornouaille, Tréguier et le Léon, ne fait nulle mention de Lambader.
Le clocher de la chapelle de Lambader, haut de 57,48 mètres, est, des imitations du Creisker dans notre région, celle qui s'en rapproche le plus : aussi le dicton local s'exprime-t-il ainsi Ma vefe diskaret K re isker, Ne vo ket par da Lambader. Ce magnifique clocher, qui avait été mutilé par une tempête le 2 février 1836, et démoli l'année suivante, fut reconstruit en 1882, par Le Naour, entrepreneur à Quimper, qu'on a appelé le « bâtisseur de clochers». A la même époque, grâce aux dons généreux des familles Boscal de Réais et Audren de Kerdrel, on entreprit la restauration intérieure de la chapelle.
Le magnifique jubé, « l'expression la plus parfaite du travail sur bois » fut démonté et reconstitué avec un goût parfait par Denis Derrien, de Saint-Pol-de-Léon. C'est de ses ateliers que sortent les statues des douze Apôtres qu'on y remarque. « Le jubé de Lambader, dit le chanoine Abgrall (Cours d'architecture bretonne professé au Grand Séminaire de Quimper. ), est une large galerie portée sur une sorte de cloison aux compartiments découpés et fouillés avec la plus grande finesse. L'habileté et l'imagination des huchers de l'époque flamboyante s'y sont donné libre champ. C'est un fenestrage compliqué et néanmoins harmonieux, c'est une dentelle avec dessins variés et toujours pleins de grâce. Sur les torsades des deux montants de la porte étaient gravées des hermines ; le ciseau des révolutionnaires les a toutes mutilées comme des emblèmes dangereux. « La galerie est soutenue en encorbellement de chaque côté de ce chancel, par des nervures et des demi-berceaux. Des pendentifs représentent les anges portant des instruments de la Passion, et au milieu est un beau pélican qui nourrit ses petits de son sang. Un écusson tenu par un ange en pendentif, du côté du chœur, indiquerait que cet admirable ouvrage serait dû à la munificence de Marc de Troerin, époux en 1481 d'Isabeau de Kermellec. La balustrade de la galerie est garnie de panneaux encadrés de beaux motifs flamboyants, tandis que la décoration des panneaux eux-mêmes est dans le genre de la Renaissance. « Et dans tout cet ensemble, ce qu'on devra encore plus admirer, c'est le petit escalier à vis, qui monte au jubé dans l'angle nord, compris et disposé avec une élégance parfaite, indiquant la spirale de ses marches au moyen de ses gracieuses colonnettes. »
Aux murs du chœur sont suspendus des fers d'esclaves, ex-voto de croisés qui furent captifs chez les infidèles. On vénère à Lambader une belle statue en kersanton de Notre-Dame. Au bas de la chapelle sont de nombreuses statues mutilées, en granit, provenant de l'ancien Calvaire. La maîtresse vitre contenait un brillant vitrail de 1543, qui a été brisé vers 1845 et remplacé, dans sa partie basse, par une maçonnerie, et dans sa partie haute, par un voile rouge. On en voit quelques débris à la chapelle de Keruzoret, ainsi qu'un saint Christophe et un saint Trémeur portant sa tête entre ses mains."
— PÉRENNÈS (Henri) 1943 Plouvorn Monographie de la paroisse, Rennes, Imprimerie du Nouvelliste, 1943, 86p., Réédition Le Livre d'histoire-Lorisse, Paris, 2004, 83p., p. 50-51.
http://www.infobretagne.com/plouvorn-chapelle-lambader.htm
— REALS (Vicomte de, 1890, "La restauration de Lambader", in Bulletin archéologique de l'Association bretonne, 31e congrès tenu à Saint-Pol-de-Léon du 10 au 15 septembre 1888, Troisième série, Vol.8, Saint-Brieuc, Imprimerie-Librairie R. Prud'homme, 1890, 202p., p. 54-58.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2074856/f95.image
LA RESTAURATION DE LAMBADER LETTRE De M. le Vicomte de Réals à M. le Vicomte DE LA VILLEMARQUÉ, Directeur
Troërin, le 3 septembre 1888.
MONSIEUR,
L'excursion archéologique, à laquelle vous devez consacrer une des journées du Congrès, vous conduira peut-être dans le voisinage de Plouvorn, et dans ce but je désire appeler votre attention sur notre ancienne chapelle de Lambader et son beau clocher, que nous regardons dans le pays comme digne d'intéresser le touriste. Que cette prétention soit fondée ou non, vous trouverez sans doute légitime que, administrateur de la commune de Plouvorn depuis de longues années, je tienne à effacer la mauvaise impression que peut laisser aux étrangers les reproches un peu vifs adressés par M. de Courcy, dans son excellent itinėraire de Nantes à Brest, à nos bons plouvorniens et à l'administration municipale de cette époque.
L'église priorale de Lambader, pourvue de huit arcades élégantes dans chacun de ses bas-côtés, est surmontée d'un clocher très beau, qui a beaucoup de ressemblance avec celui du Creisker à Saint-Pol-de-Léon. C'est une tour carrée, ornée d'une balustrade légère et surmontée d'une flèche élevée, de forme prismatique hexagonale, flanquée de 4 clochetons. La hauteur totale du clocher est de 57 mètres; il est absolument creux dans l'intérieur, et du sol on peut voir la pierre terminale ; l'escalier est à vis dans l'un des piliers.
Classée comme monument historique au commencement de ce siècle, la tour de Lambader dut être démolie en 1842, par mesure de sécurité publique. Un des clochetons était déjà tombé; la flèche elle-même était penchée et menaçait ruine. Pendant de longues années ses débris restèrent épars sur le sol ; la chapelle, toute lézardée et mal entretenue, ne semblait plus devoir résister longtemps aux outrages du temps, et le monument allait disparaître, lorsqu'en 1873, sur une demande du Conseil municipal que je présidais, l'évêque de Quimper, Mgr Nouvel, autorisa la reconstruction de l'édifice. Grâce à la pieuse générosité du clergé paroissial de Plouvorn et de ses habitants, tant châtelains que cultivateurs, grâce aussi à celle des nombreux prêtres nés dans la commune qui, à l'appel du recteur, M. Hillard, envoyèrent tous, sans exception, de belles offrandes, cette reconstruction a pu se faire presque uniquement au moyen de dons; et à part la restauration de la flèche, la fabrique n'y a contribué que pour une part très minime. Aussi les travaux, commencés en 1875, n'ont été terminés qu'en 1877 pour la chapelle et la base de la tour, et en 1881 pour la flèche .
La légende de Lambader est un peu obscure ; d'après la tradition populaire la plus accréditée, un seigneur breton, captif des Sarrasins, délivré par l'intercession de la sainte Vierge, aurait élevé la chapelle au lieu où il se trouva miraculeusement transporté sans savoir comment. Des chaines, que l'on voit encore suspendues des deux côtés du chour seraient celles du captif reconnaissant. D'après Fréminville, Lambader a été le siège d'une ancienne commanderie de Templiers. Il est en cela d'accord avec la tradition populaire qui rapporte que le prieuré de Lambader était autrefois occupé par des moines rouges. En effet, la chapelle n'était pas isolée, mais se rattachait, comme toutes les commanderies de templiers, à un ensemble de constructions dont les vestiges se retrouvent même aujourd'hui. C'est ainsi que, du côté ouest, une grande galerie, formant une voûte sous laquelle passait la route de Landivisiau à Saint-Pol-de-Léon et reliant la chapelle à une maison actuellement démolie, existait encore au commencement de ce siècle. Du côté nord, une deuxième galerie reliait aussi la tour avec une maison d'un style particulier, habitée maintenant par le sacristain. Cette deuxième galerie, qui n'a été détruite qu'en 1842, était terminée par deux anges avec exergue. Tout semble donc attribuer à Lambader une origine très ancienne. La dernière reconstruction en a fourni des preuves certaines. J'ai eu la direction de tous les travaux de Lambader ; j'ai ainsi suivi la démolition jour par jour et j'ai constaté que la chapelle était à sa quatrième reconstruction partielle ou totale. Dans les murs se trouvaient employés, comme moëllons, des fragments de pierres taillées pour former des pleins cintres du style roman grossier ; tandis qu'à côté se voyaient d'autres fragments du style gothique. Ni les uns, ni les autres de ces fragments n'avaient de rapport avec la chapelle que je faisais démolir; ils appartenaient à un édifice plus ancien encore. Dans deux autels en Kersanton, qui sont adossés aux piliers mitoyens de droite et de gauche de la nef, les ouvriers ont mis à découvert des ossements, et des pierres sur lesquelles étaient gravées, à l'un des autels la date de 1500, à l'autre celle de 1300. Enfin, dans les papiers de la famille de Troërin, famille fondue dans la maison de Réals, nous trouvons un acte de 1534 par lequel le seigneur de Troërin, à l'occasion d'une reconstruction du pignon sud de l'église, donne au prieur de Lambader un champ sis au terroir de Kerguidal. L'acte n'indique pas à quel ordre appartenait le prieur de Lambader. En reconnaissance de ce don, le dit prieur reconnut au seigneur de Troërin le droit à trois tombes dans la chapelle, plus le droit à la troisième arcade, plus le droit de placer ses armes dans trois endroits différents de l'église. Diverses tombes ont été découvertes pendant la démolition ; mais aucune inscription n'a permis de reconnaître quels étaient les personnages que recouvraient ces sépultures.
Dans l'intérieur de l'église, on remarque un jubé en bois de chêne, travaillé à jour, ainsi que la rampe de son escalier tournant qui est très admirée. C'est un réseau de sculptures et de fines dentelures du plus bel effet. Les motifs multiples de ce jubé sont du style flamboyant et ils reproduisent le dessin de la maitresse vitre. D'après les titres des Troërin, ce jubé fut donné à l'église en 1481, par Marc de Troërin, époux d'Isabeau de Kermellec; les armes du donateur sont soutenues par un ange formant l'un des pendentifs du jubé du côté du cheur; elles sont aussi reproduites, ainsi que celles de sa femme, au dessus de la porte du milieu.
Le corps du jubé qui fait face à l'autel, est orné de douze statues représentant les apôtres; sur la face opposée on remarque principalement un pélican qui, suivant l'allégorie connue, se perce le flanc; et, enfin, en forme de pendentifs, des anges portant les attributs de la passion.
A côté de la porte sud, la famille de Kerdrel a fait placer en 1876 un bénitier en Kersanton d'un joli travail : il porte les armes de la famille.
Dans le fond de la chapelle on a recueilli une trentaine de statues en pierres de taille qui doivent être les débris d'un ancien calvaire. Plusieurs de ces statues ont beaucoup d'expression dans la physionomie ; malheureusement presque toutes ont été mutilées pendant la révolution. Elles ressemblent comme travail aux statues du calvaire de Guimiliau et doivent être de la même époque.
Les pèlerins ne quittent jamais Lambader sans aller boire à la fontaine sise à deux mètres du pignon sud. La source, qui alimente cette fontaine, est située sous le maitre-autel.
Tels sont, Monsieur, les quelques renseignements que je puis fournir sur la chapelle de Lambader. Je serais heureux s'ils pouvaient vous être de quelque utilité. Veuillez agréer, Monsieur, l'assurance de ma considération la plus distinguée."
Vicomte DE RÉALS.
— TUDCHENTIL, "Troërin de Kerjan, preuves pour la grande écurie (1744)
https://www.tudchentil.org/spip.php?article1260
— TUDCHENTIL, "Kermellec (de). Réformation de 1669.
http://www.tudchentil.org/spip.php?article949
— L'UNIVERS. 27 septembre 1877 Inauguration de la chapelle restaurée sur l'initiative du recteur Hellard. Bénédiction par l'évêque en présence de la comtesse de Kerdrel. Promesse d'indulgence le jour du Pardon le lundi de Pentecôte.
http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/chateau-de-keruzoret-plouvorn/0fabf1a2-bd3c-4ed6-ae2b-055ceffcfe5f
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— Wikipedia Chapelle Notre-Dame de Lambader
https://fr.wikipedia.org/wiki/Chapelle_Notre-Dame_de_Lambader
—Domaine de Troërin à Plouvorn
https://monumentum.fr/domaine-troerin-pa29000069.html
—Style des panneaux sculptés :
https://www.ecoutelebois.com/guide-amoureux-des-styles-de-mobilier-renaissance/