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18 janvier 2013 5 18 /01 /janvier /2013 13:28

L'Histoire de Bretaigne de Bertrand d'Argentré :  l'exemplaire de la Bibliothèque de Brest de la seconde édition de 1588. L'ex-libris de Sinclair et les gravures.

 

  Il s'agit de l'ouvrage cote RES FB. A88 décrit ainsi : "Bertrand d'Argentré L'Histoire de Bretaigne, des roys, ducs, comtes et princes d'icelle, l'establissement du royaume, mutation de ce titre en duché, continué jusques au temps de Madame Anne, dernière duchesse... Avec la carte géographique dudict pays... Mise en escrit par... Bertrand d'Argentré,...Paris : J. du Puys, 1588, In-fol. Reliure 16e s. chamois blond ".

 C'est l'un des 45 exemplaires de la seconde édition de 1588 répondant au sigle 2A de I.E. Jones. Cet auteur en donne la description suivante :

L'HISTOIRE / DE BRETAIGNE / DES ROYS, DVCS, COMTES ET / PRINCES D'ICELLES ; L'ETABLISSE- / ment du Royaume, mutation de ce tiltre en Du- /ché, continué jusques au temps de Madame / Anne dernière duchesse, & depuis Royne de / France, par le mariage de laquelle passa le Duché en la maison de France. / Avec la carte Géographique dudict pays, & table de la / Genealogie des Ducs, & Princes d'iceluy. / Mis en escrit par noble homme, messire BERTRAND / D'ARGENTRÉ sieur de Gosnes, Forges &c. / Conseiller du Roy & President / au siège de Rennes. / A Paris, / chez IACQUES DV PVYS à la Samaritaine. / M.D. LXXXVIII. / AVEC PRIVILEGE DV ROY./

2°, a6, e4, A-C6, A-Z, AA-ZZ, AAa-ZZz, AAAa-ZZZ-z, 4Aa-4Zz, 5Aa-5Zz6, 6Aa4 ; ff[28], 831 [1] ; 2 planches.

Contenu :

a1r : titre, gravure sur bois

a1v : Privilège du roi de 6 ans daté du 13 juillet 1587.

a2r : Epitre Au Roy

a5v : Gravure sur bois et poème de François de Thoor.

a6r : Gravure au burin de René Boyvin, traduction grecque du poème précédent

a6v et e1r : épigramme en latin de Jean Botin

e1v - e4v : Ordre sommaire des roys et ducs de Bretaigne

AC6v Table des matières terminée par un errata.

A1r -6Aa3v : Texte incluant les deux planches.

6A4ar : armoiries de Bretagne.

 

  L'ouvrage lui-même est divisé en douze livres.

 

Liste des exemplaires.

I.E Jones a recensé 46 exemplaires de cette seconde édition dans les bibliothèques publiques. Parmi ceux-ci, 14 seulement, dont bien-sûr l'exemplaire de Brest, possèdent la carte géographique de 1588 (indiqués ici par l'astérisque). Voici la liste que donne Jones:

  • Staatsbibliothek West-Berlin RK 4318*
  • Besançon BM 7745.
  • Paris, bibliothèque de l'Arsenal H.2067*
  • id, H. 2068*
  • id. H.2069
  • Paris, BNF Lk2.446*
  • id. Lk2 446a*
  • Brest, RES. FB. A88*
  • British Library 596K9
  • Trinity College Cambridge W.5. 28 (Adams 1640);
  • Châlon-sur-Saône, BM.
  • Carpentras, Bibliothèque Inguimbertine 12888*
  • Clermont-Ferrand, BM 14025.
  • Dijon, BM.*
  • Dinan, BM.
  • Dean and Chapter Library Durhan F.V.2*
  • Edinburg U.L.
  • Rijkuniversiteit bibliotheek Ghent.
  • Forschungsbibliothek Gotha 20 Hist 298.
  • Grenoble, BM B. 1349*
  • The Hague Koningklijke Bibliotheek
  • Kergonan : 2 exemplaires dont un* avec carte.
  • Landevennec : une partie de carte *
  • Bibliotheca Thysiana Leiden 721*
  • Lille, BM.
  • Kings College London Library
  • Lyon, BM.
  • Madison Wisconsin U.L.*
  • Manchester U.L.
  • Magdalen College Oxford L.15.1*
  • Munich Staatsbibliothek 2° Gall.sp4c
  • Nancy, B.M.
  • Nantes, Archives de Loire Atlantique
  • Nantes, Bibliothèque Dobrée.
  • New-York U.L.
  • Quimper, B.M. 72.9.2 bis
  • Rennes, Archives départementales 52 bi 35
  • Rennes B.M. 414
  • Rennes Bibl. universitaire 1299
  • Rennes Musée 62.5.2 avec carte mais manquant.
  • St Brieuc, Archives départementales HB fo 14
  • St-Brieuc, BM. Br.G.80.
  • Abbaye St Pierre de Solesmes
  • Abbaye N.D. de Trimadeuc
  • Stockholm Kungliga Biblioteket
  • Vienna National Bibliothek.

 

 

 

 

Découverte de l'exemplaire de Brest.

1. Reliure.

Elle est décrite par la notice de bibliothèque comme étant "une reliure chamois, du XVIe siècle". Le dos compte cinq nerfs. Le plat est encadré par un filet brun-noir. Le plat de devant porte en son centre un élément ovale rempli d'entrelacs.

 

Plat de devant :

               DSCN7883c

 

 

                                                   DSCN7884c

 

  On note la curieuse pièce de titre portant les mots : "DE HIST. BRETIGNE D'ARGENTRE", témoignant du fait que le propriétaire ou le responsable de la bibliothèque ne parlait pas français. Mais pourquoi ne pas recopier le titre de la page-titre ?

 

DSCN7885c

 

Au dessus du premier nerf se trouve une marque de propriétaire au fer à dorer que je décrirais comme un phoenix ailes écartées au dessus de flammes, surmonté par une couronne de comte, avec une devise en fer à cheval RINASCE PIU GLORIOSA.

 

DSCN7886c

 

        Cette devise ("il renaît plus glorieux") est traditionnellement associée au phoenix ou phénix, oiseau fabuleux et héraldique qui renaît de ses cendres, après s'être consummé sous l'effet de son propre feu. Symbole des cycles de ressurection et de mort, et donc de renouvellement, symbole christique également, il est, en héraldique, représenté de face, tête de profil, ailes étendues, sur son bucher (qu'on nomme "immortalité"), et regardant le soleil : proche de l'aigle, il en est une variante.

 Cette marque est répertoriée par le British Armorial Bindings de l'Université de Toronto avec ses dimensions de 21 x 17 mm comme étant celle de James St Clair Erskine, 2e comte de Rosslyn (1762 - 1837). Le timbre est placé en haut du dos d'un exemplaire du Traité du cœur, ou instruction des courtisants d' Eustache de Refuge, livre paru à Leyden en 1649 et relié en velin ; ce livre porte un ex-libris armorié de Sinclair, "probablement Lord Sinclair, Henry Sinclair ". (Université de Bristol A401f).

Les Comtes de Rosslyn possédaient en Écosse les châteaux de Dysart House (Fifeshire) et de Rosslyn (Mid-Lothian). Mais ce sont les barons de Sinclair qui étaient, depuis 1407, établis à Dysart, et c'était le général James Sinclair (1688-1762), 9éme Lord Sinclair qui avait fait construire Dysart House (au dessus du port de Dysart) et avait racheté le château de Rosslyn (propriété des Sinclair depuis 1330).

 Effectivement, les armoiries des comtes de Rosslyn, telles qu'elles sont données ici  (Ann.hist. et biogr) comportent bien un cimier : «the crest is first a phoenix in flames, ppr, and over it the device Rinasce piu glorioso (sic), second for Wedderburn an eagle's head erased,ppr, with the words "Illœeso lumine solem". The motto is "Fight"» , mais d'une part le Comté de Rosslyn ne date que de 1801 (avec Wedderburn), d'autre part son association avec un ex-libris de Sinclair sur des ouvrages du XVIe (L'Histoire d'Argenté) ou majoritairement du XVIIe siècle est discordante avec ce James St Clair Erskine.

  Dysart House est passé de la famille des Lord Sinclair à celle des Comtes de Rosslyn, mais le 5ème Comte, James St-Clair Erskine (1869-1939) a du vendre cette propriété en raison de dettes de jeu.


 De nombreux autres ouvrages sont signalés comme portant ce timbre, mais il est alors placé à la partie inférieure du dos sur une reliure dont le plat porte une rose centrale et des fleurons en écoinçons (et non, comme ici, un élément central ovale). J'en donne ici la liste telle que je l'ai collectée sur le site Abebooks (avec la traduction automatique !), il est évident que bien d'autres pourraient être trouvés, mais j'ai voulu montrer le caractère répété du style de la reliure, de la marque au phoenix,  de l'association systématique avec l'ex-libris Sinclair avec inscription à l'encre noirs. J'ai voulu aussi faire remarquer  la datation homogène des ouvrages (1628-1640) qui sont très souvent des Elzeviers. On signale  des reliures "de l'époque", et non des reliures du XIXe correspondant à James Erskine. En somme, je ne crois pas que ce personnage soit le propriétaire de ces ouvrages, ni même que ce soit lui qui les ait fait relier.

  • L'histoire de Filipe Emanuel de Loraine duc de Mercoeur, dédiée à sa Majesté Apostolique.Chrysostome De Montpleinchamp, Jean. Description du livre: Cologne, Pierre Marteau, 1689, 1689.. 11 Bll., 357 S. Mit gest. Porträtvignette. Lederband mit der Zeit und Rückenschild reicher-Vergoldung sowie auf Rücken goldgeprägtem Wappen. Wappen: gekrönter Phönix mit Motto "Piu Rinasce Gloriosa". Gest. gekröntes Exlibris auf Innendeckel.  Du libraire 38803AB


  • De Constantinopoleos Topographia. Lib IV.GILLES, Pierre] GYLLIUS, Petrus.Libraire: Librairie ScrittiEx Officina Elzevirianna, 1632. Couverture rigide. État: Très bon. Lugduni Batavorum (Leyde), Ex Officina Elzevirianna, 1632. , reliure en plein veau fauve de l'époque, dos lisse orné de doubles filets dorés ,  petit écusson doré representant un phénix au milieu des flammes avec au dessus uns couronne dorée  et en dessous  la devise suivante: "Rinasce piu gloriosa », double filet doré d'encadrement sur ​​chaque plat avec fleuron doré en Ecoinçon, petite fleur (une rose) dorée au centre du plat, Quelques Lettres et Manuscrits CHIFFRES A L'Encre Noire Dans La Partie Supérieure de la Première page de garde,  ex-libris héraldique de Lord Sinclair, Initiales d'appartenance à l'encre noire rayées Au bas de l'ex-libris, . Du libraire 3293


  • Persia, seu Regni Persici Status, variaque itinera in atque per Persiam. LAET, Johannes de [Editor]. Lugd. Batav. Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1633. , armorial bookplate of Lord Sinclair. Contemporary calf, a.e.g., covers with double gilt rules, cornerpieces and a central rose, gilt phoenix to the foot of the spine with the motto Rinasce Piu Gloriosa . N° de réf. du libraire 17488


  • Vallesiæ et Alpium descriptio.SIMLER, Josias.Description du livre de: Lugduni Batavorum Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1633. , ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa . Première édition 1574. N ° de réf. du LIBRAIRE 17114


  • Hispania, sive de Regis Hispaniae Regnis et opibus Commentarius.LAET, Johannes de [Editor].: Lugd. Batav. Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1629. , ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa . N ° de réf. du LIBRAIRE 17127

 

  • Respublica Statut et Imperii romano-Germanici.: Lugduni Batav. Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1640. , ex-libris armoiries de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa . N ° de réf. du LIBRAIRE 17124
  • patricii Vénètes] De Republica Venetorum. Libri quinque. Article Reip synopsis. Venete, et alii de eadem discursus politisation. CONTARINI, Gaspar. Lugd. Batavorum Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1628. , ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa . Première édition 1543. N ° de réf. du LIBRAIRE 17129
  • Respublica et Statut Regni Hungariae. HONGRIE Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1634. , ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa . N ° de réf. du LIBRAIRE 17113

 

  • Helvetiorum Respublica. Diversorum Autorum, querum nonnulli nunc primum dans lucem prodeunt.SIMLER, Josias. Lugd. Bat. Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1627. , ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa N ° de réf. du LIBRAIRE 17123


  • Rhétie, ubi eius verus situs, Politia, bella, fœdera, et autres, des souvenirs accuratisimè describuntur.SPRECHER, [Fortunatus].: Lugd. Batavorum Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1633, ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa . Première édition 1617. N ° de réf. du LIBRAIRE 17121

 

  • Gallia, sive de Francorum Regis Dominiis et opibus Commentarius.LAET, Johannes de [Editor].: Lugduni Batavorum Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1629. , ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa  . N ° de réf. du LIBRAIRE 17116
  • De Principatibus italiae. Tractactus varier.SEGETHUS, Thomas]. Lugd. Bat. Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1631. , ex-libris armoiries de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa . N ° de réf. du LIBRAIRE 17142
  • Suecia, sive de Suecorum Regis Dominiis et opibus. Commentarius Politicus.SUÈDE: Lugd. Batav. Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1633. ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa  . N ° de réf. du LIBRAIRE 17117
  • Respublica Bojema. Descripta, recognita, et aucta.STRANSKY, Pavel.: Lugd. Batavorum Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1643. Gravé titre, marbre downs pâte, ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa,  N ° de réf. du LIBRAIRE 17125
  • Belgii Confæderati Respublica: Gelriæ plu, en Hollande. Zélande. Traject. Fris. Transisal. Gröning. Chorographica Politicaque descriptio , LAET, Johannes de . Lugd. Batav. Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1630. persillée, ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa , N ° de réf. du LIBRAIRE 17118
  • De Regno Daniæ et Norwegiæ. Insulisq. adjacentibus: juxta ac de Holsatia, ducatu Sleswicensi, et finitimis provinciis. Tractatus varii.Stephanius], Stephen [Hansen]. Lugduni Batavorum Leiden: Ex Officina Elzeviriana, 1629. , ex-libris armorié de Lord Sinclair. Contemporain veau, aeg, couvre les règles dorés doubles, écoinçons et une rose centrale, doré phénix au pied de la colonne vertébrale avec la devise Rinasce Piu Gloriosa , . N ° de réf. du LIBRAIRE 17131

  • Donnati Iannotii dialogi De Repub. Venetorum... Lugduni Batavorum (Leyde), Ex Officina Elzevirianna, 1631. In 16 de [IV]-467-[9 (index)]pp., reliure en plein veau fauve de l'époque, dos lisse orné de doubles filets dorés, un petit écusson doré représentant un phénix au milieu des flammes avec au dessus de celui-ci une couronne dorée et en dessous la devise suivante: "Rinasce piu gloriosa", titre doré, dos frotté avec de petites épidermures, accrocs aux coiffes supérieure et inférieure, double filet d'encadrement doré sur chaque plat avec un fleuron doré en écoinçon à chaque angle, petite fleur (une rose) dorée au centre du plat, quelques petites épidermures sur les plats sans gravité, mors frottés, quelques lettres et chiffres manuscrits à l'encre noire sur la première page de garde,  N° de réf. du libraire 908

 

  • Conversations nouvelles..., Melle de Scudery, La Haye, Abraham 1685.Folger Shakespeare Library : "  in reinforced vellum; ms. spine title. Stamp on spine: crowned phoenix with motto: rinasce piu gloriosa. Armorial bookplate: Sinclair (motto: Fide sed pugna). Ms. shelfmarks."
  • La vita del catholico et invittissimo don Filippo Secondo d'Avstria re delle Spagne, & c. Con le guerre de suoi tempi. Cesare Campana ; Agostino Campana Éditeur: [Vicence, G. Greco, 1605] -08. Armorial bookplate: Sinclair (with motto: Fide sed pugna) Anonymous superexlibris (with motto: Rinasce piu gloriosa)  Ici 
  • Lamberti Hortensii Montfortii historici, De bello Germanico libri septem : Hortensius, Lambertus, 1500 or 1501-1574.  Basileae : [s.n.], 1560. Armorial bookplate with name Sinclair and motto: Fide sed pugna.. spine title: De bello Germanico. Stamp on spine with motto: Rinasce piu gloriosa. Yale University Library VD 16, H 5035 
  • Pascasii IUSTI Eclouiensis, philosophiae & medicinae doct. Alea, siue De curanda ludendi dans pecuniam cupiditate, libri II: Joostens, Paquier, d. 1590? Basileae: Par Ioannem Oporinum, MDLXI. [1561]  Timbre sur le dos avec la devise: gloriosa piu Rinasce. Ex-libris armorié avec Sinclair nom et la devise: pugna sed Fide.  Yale University Library,VD 16, 923 J 

 

 

2. L'ex-libris.


DSCN7807c

 

 

      DSCN7806c

 

    Au dessus d'un cartouche où s'inscrit le nom SINCLAIR, deux griffons tiennent un écu armoirié surmonté par la couronne de baron ; le cimier porte "un cygne au nid". La devise est Fide sed pugna, "la Foi mais le combat, (ou) Fidéle mais pugnace". [Il est difficile maintenant de ne pas voir dans ce "cygne au nid" un "phoenix sur son immortalité"].

    Les armes sont divisées en quartiers autour d'un petit écu central à la croix engrélée : cette croix engrélée de sable forme les armes d'Henri Ier Sinclair, (1345-1400) baron de Rosslyn et  comte d'Orkney . Les armoiries des Barons Sinclair se blasonnent  ainsi en anglais " 1 and 4 Azure a ship at anchor, her oars (erected) in saltier (and sails furled) within a double tressure flory counterflory, Or for Orkney; and 2 and 3 azure a ship under sail Or, the sails argent, for Caithness". Over all an escutcheon argent charged with a cross engram. sable for Sinclair. Crest : a Swan argent ducally collared and chained or. Supporters two griffons ppr.armed or. Motto Fight." (Encyclopædia of Heraldry: Or General Armory of England, Scotland, and ... Par John Burke,Bernard Burke 1844,  ET A System of Heraldry Speculative and Practical : with the Truc Ant of Blazon ... par Alexander Nisbet, 1722). Nisbet décrit bien, sur le cimier, un cygne, mais signale que James Espline indique, dans son Illuminate Books la tête d'un griffon.

Au dessus et à cheval sur l'étiquette et la garde est écrit A.1.12. (également inscrit en haut avec la même graphie particulière du A).

Au dessous est calligraphié à la plume, mais barré, l'inscription P.O  Sd  N4, qui peut être une cote de bibliothèque.

  Je mentionne d'emblée qu'un ex-libris très semblable, avec les mêmes inscriptions, a été mis en ligne sur Flickr Bookplate of Henry Sinclair, 10th Lord Sinclair (1660–1723) sur Projet Provenance Penn, avec l'inscription A II 26 et P.E Sd N.2.


    La famille Sinclair ou Saint-Clair serait originaire de Normandie, plus exactement de Saint-Clair-sur-Epte, leur nom dérivant du nom de lieu Sancto Claro (c'est, par exemple, à Saint-Clair-sur-Epte que le viking Rollon a conclu un traité avec Charles III). Un illustre aïeul, William /Guillaume de Saint Clair fut compagnon de Guillaume le Conquérant. En raison de ses exploits, il reçut en héritage, la baronnie de Roslin ou Rosslyn en Écosse, sur laquelle les descendants de la famille Saint Clair édifièrent par la suite la chapelle de Rosslyn. En tant que clan écossais, elle s'est divisée en deux branches, de Rosslyn et de Caithness. Le petit-fils de Henri Ier Sinclair fut William, 3ème comte d'Orkney et 1er comte de Caithness, chancelier d'Écosse de 1454 à 1458.

  L'élément de certitude est que c'est ici l'ex-libris d'un baron Sinclair appartenant à la famille que je viens de décrire.

 La liste des "Baron Sinclair" (selon la dénomination de l'armorial de John Bernard Burke de 1852) est donnée par Wikipédia sous le titre Lord Sinclair :

Sir William de sancto Claro, décédé en 1358.

Henry Saint-Clair, comte d'Orkney (Orcades) en 1379, dont on dit qu'il aurait exploré le Groenland et la côte nord de l'Amérique.

Henry II Saint-Clair.

William Sinclair, 3ème comte d'Orkney puis 1er Comte de Caithness and 1er Lord Sinclair (d. 1480), grand Amiral d'Ecosse puis Chancelier, constructeur de Rosslyn Chapell.

William Sinclair, 2ème Lord Sinclair (d. 1487)

Henry Sinclair, 3ème Lord Sinclair (d. 1513)

William Sinclair, 4è Lord Sinclair (d. 1570), 2ème baron Sinclair

Henry Sinclair, 5e Lord Sinclair (1528–1601), 3ème baron Sinclair

Henry Sinclair, 6e Lord Sinclair (1581–1602)

James Sinclair, 7e Lord Sinclair (d. 1607)

Patrick Sinclair, 8e Lord Sinclair (d. 1615), 5ème baron

John Sinclair, 9e Lord Sinclair (1610–1676)

Henry St Clair, 8ème baron Sinclair et 10e Lord Sinclair (1660–1723)

John St Clair, Maître de Sinclair (1683–1750) (fils ainé du précédent, mais déchu de son titre de Lord; toutefois il en fit usage )

Général James St Clair (d. 1762) (le fils cadet); rachète Rosslyn Castle et fait construire Dysart House. Sans succession.

titre dormant 1762–1782

Charles St Clair, cousin de James, Lord Sinclair de jure 11ème Lord Sinclair (d. 1775)

Andrew St Clair, de jure 12ème Lord Sinclair (1733–1775)

Charles St Clair, 13ème Lord Sinclair (1768–1863) (confirmed in title 1782)

James St Clair, 14ème Lord Sinclair (1803–1880)

Charles William St Clair, 15ème Lord Sinclair (1831–1922)

Archibald James Murray St Clair, 16ème Lord Sinclair (1875–1957)

Charles Murray Kennedy St Clair, 17ème Lord Sinclair (1914–2004)

Matthew Murray Kennedy St Clair, 18ème Lord Sinclair (b. 1968).

Un autre ex-libris 

 Outre celui dont la photographie figure sur Flickr, et outre les 19 exemples trouvés parmi les livres des catalogues de libraire, cet ex-libris est signalé sur un manuscrit rassemblant des écrits de Gilbert de Haye (L'Ordre de chevalerie, l'Arbre des batailles et le Gouvernement des princes)sous le nom de The Buke of the Law of Army Gilbert of the Haye's prose manuscrit sur Openlibrary;  il y est attribué à Henry 10ème Lord Sinclair ou à son fils John, mais l'ex-libris a été arraché lorsqu'il changea de propriétaire: il n'est visible qu'indirectement.


 


 


 


Mon hypothèse. 

        Aucun armorial d'Ecosse ou d'ailleurs ne donne pour les familles Sinclair ou Saint-Clair la devise Fide sed pugna. Par contre, de très nombreux ouvrages, manifestement issus de la même bibliothèque, soigneusement catalogués et répertoriés, faisant majoritairement appel aux éditions Elvezier de Leyde et témoignant d'un goût (bien partagé il est vrai) pour les auteurs humanistes, rassemblent des caractères communs :

  • l'ex-libris aux armes des Baron Sinclair, mais avec la devise fide sed pugna.
  • une reliure "en plein veau fauve" dont beaucoup d'exemplaires présentent sur le plat une rose centrale et des écoinçons dorés, et d'autres plus rares un élément ovale à entrelacs.
  • Sur le dos de cette reliure, le fer doré au phoenix heraldique et sa devise Rinasce piu gloriosa. Ce timbre est placé soit en tête, soit au pied ; il semble alors (selon les petites photo disponibles) plus grossierement facturé.

 Il me paraît vraisemblable que la devise Fide sed pugna soit placée, en remplacement de la devise héraldique anglaise Fight (dont pugna est la traduction) dans les armoiries uniquement pour réaliser l'ex-libris, afin de placer cette bibliothèque sous le signe des antiquités gréco-latines et d'une ouverture vers le mouvement humaniste issu de l'Italie de la Renaissance.

    Une hypothése plus aléatoire, mais qu'il me plaît à formuler, est que cette bibliothèque soit celle d'Henry Lord Sinclair, mais aussi de ses prédecesseurs, recevant dès le milieu ou la fin du XVIIe siècle les envois des libraires hollandais dans leur demeure de Dysart ou à Castel Rosslyn. James St-Clair Erskine aurait pu faire frapper sa propre marque et sa devise sur le dos de chacun des volumes, ou, ce qui me plaît à suggérer, cette marque aurait pû être créée dès l'origine de la bibliothèque, et James St-Clair Erskine s'en serait inspiré pour sa devise. Lui, ou un autre, aurait barré les inscriptions manuscrites sous les ex-libris. Enfin, l'ensemble de la bibliothèque aurait été mise en vente en même temps que Dysart House fut vendue, et pour les mêmes raisons financières engendrées par les dettes de jeu du 5ème Comte Erskine dans la première partie du XXe siècle.

  Bien-sûr, cette hypothèse d'amateur n'attend qu'une chose, être contredite par des gens sérieux.

 

 


2. Le frontispice de la page de titre.

  Outre les mentions de la cote RES F.B A 88 et du tampon B.M B de la Bibliothèque de Brest, ainsi qu'une cote 133475, cette page 1r porte la gravure sur bois représentant, sous les armes du Duché, le titre entre deux Allégories puis l'emblème de Bertrand d'Argentré.

  Cet "emblème" rappelle que, depuis la parution en 1534 des Emblemata d'Alciat et la centaine de ses réimpressions, ce fut une grande mode dans la République des Lettres de s'inspirer de l'antiquité grecque pour associer, selon la formule "verba signifiant, res significantur", une brève devise, une image, et un texte latin en vers. Ici, Bertrand d'Argentré a choisi la devise Lampeite Kaieite, et l'image d'un vase enflammé, ou pot-à-feu. Daniel-Louis Moircec explique dans sa biographie que, sur les cotés du portrait de d'Argentré gravé en 1604 par Thomas de Leu, on voit une urne d'où sortent des flammes ardentes avec les mots Lampeite, Kaite, "je brille et je brûle", ce qui est un bel éloge, ou un beau but. On les trouvait déjà en 1568 sur le titre de l'édition des Commentarii de d'Argentré, ou sur celui de l'édition de 1570 de l'Advis sur les Partages des Nobles.

  Sous le titre de cette Histoire, la devise change et le mot kaite devient kaieite : au lieu de "je brille et je brûle", on a désormais "il brille et il brûle", l'éloge visé s'appliquant plus clairement à l'ouvrage qu'à son auteur. Miorcec écrit " D'Argentré en mettant ce vase de flammes ardentes à la tête de son Histoire avec ces deux mots grecs a voulu dire que, de même que le feu brille et brûle tout à la fois, de même son Histoire brille pour les bons en faisant apparaître avec éclat leurs talents et leurs vertus, et brûle pour les méchants, en manifestant leurs vices ou leurs crimes : d'où résulte une autre application de la devise à ses ouvrages sur la Coutume, dans lesquels il brille pour les bons, en soutenant le bon droit, et brûle pour les méchants en dévoilant leurs injustices."

  L'Allégorie de droite cumule aussi les symboles : elle porte les traits de Janus bifrons (avec une face de vieillard et une face féminine), elle porte des ailes comme un ange ou une Victoire, elle tient un sablier et une faux comme la Mort ou le Temps, et autour de son coude s'enroule un ourobouros des cycles eternels de la nature. En face d'elle, une femme jeune et alerte tient telle une Vénus un miroir,et un serpent.

I.E. Jones a retrouvé le modèle de ce frontispice dans les titres de l'Histoire de Berry de Jean Chaumeau (1566) ou de Mémoires de l'histoire de Lyon de Guillaume  Paradin de Cuyseaux, tous les deux publiés à Lyon chez Gryphe. Effectivement, le catalogue de la BNF permet de retrouver la page de titre ici , où un aigle remplace les armoiries de Bretagne. Une devise apparaît alors, Virtute duce, Comite Fortuna (La vertu me guide, la Fortune m'accompagne), devise de la ville de Lyon, ( paroles de Cicéron à Lucius Munatius Plancus, le fondateur de Lyon) et devise figurant sur la marque d'imprimeur de Sébastien Gryphe, ce qui met un nom sur les deux Allégories.

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  Il reste à préciser que c'est la seule édition qui présente cet emblème propre à l'auteur, alors que toutes les autres présentent sous le titre la marque typographique du libraire.

 

 

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 Les Du Puis ou Du Puys (ou Puteanus) sont une vieille famille d'imprimeurs-libraires. Guillaume exerce de 1504 à 1515; au début, rue Saint-Jacques, à l'enseigne de la Croix Blanche, "au dessoubz de Saint Benoist." Jacques I  Du Puis -sans doute fils de Guilhaume et frère de Mathurin*- serait décédé en 1589 et son activité se serait développée de 1540 à 1589, rue Saint Jean de Latran, prés du Collège de Cambrai à l'enseigne de la Samaritaine (tout-près de la rue Saint-Jacques). Son fils Jacques II reprend la succession à la même adresse vers 1591.

*Mathurin Du Puys racheta en 1541 les matrices du célèbre fondeur de caractères Claude Garamond

La marque parlante de Jacques Du Puys joue sur son nom pour associer l'image du puits à celle de son enseigne, la Samaritaine, cette femme à qui le Christ demande de l'eau. Elle représente donc Jésus rencontrant la Samaritaine au puits. Mais ici, la marque typographique du libraire est absente.

 

 3. Extrait du Privilège.

Folio 1v. Ce privilège royal de six ans est signé par Charles (II) de Chantecler, fils d'un Conseiller au Parlement de Paris, lui-même Conseiller d'État et maître des requêtes reçu le 20 juin 1578.

  La mention précisant que "le texte a été vu et soigneusement examiné par les Commissaires députés à cette fin par le Conseil dudict Seigneur" rappelle que les mêmes Commissaires avaient condamné le texte précédent (1ère édition) : c'est dire si celui-ci a été expurgé de tout ce qui les avaient choqués.

 


                                 DSCN7812c

 

4. AV ROY.

 La première édition comportait, à cette place de cette letrre dédicatoire au roi Henri III, une Épître aux États de Bretagne.

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5. Dédicace aux armes des d'Argentré.

 

Armoiries de la famille d'Argentré : blason présenté par deux lions. Les armoiries sont d'argent à une croix pattée d'azur. La croix pattée se retrouve sur le cimier.

La versification est signée de Fran(çois) Thorius Bellion, ou François Thory, sans parenté connue avec l'illustre Guillaume Tory. On connaît de lui une traduction d'un poème de Ronsard (Wechel, 1558) sous le nom de Francisco Thorio Bellione. Jean-Paul Barbier y voit un médecin protestant, François de Thoor, né en Flandres à Bailleul. Un manuscrit Sloane 1768 du British Museum contiendrait 103ff. d'épigrammes, de dédicaces, de traductions latines de Ronsard de la plume de cet auteur.

  Les Commentarii de d'Argentré dans l'édition de Nicolas Buon de 1628 comporte également la reproduction de ce poème de cet auteur.

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6.   Traduction grecque de l'épigramme précédent.

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  Cette gravure est attribuée à René Boyvin,  en raison de la marque R de son monogramme qui figure en pied de gravure. Un examen attentif permet de voir qu'il ne s'agit pas de la lettre R, mais de la superposition d'un R et d'un B, initiales de l'un des plus considérables graveurs au burin (et à l'eau-forte) du XVIe siècle (1525-1595 ou 1625)

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7. second épigramme en latin.

Par Jean Botin de Nantes 

 

 

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                                  DSCN7825c

 

8. L'Ordre sommaire des Roys et Ducs de Bretagne et le temps de leur régne pour l'intelligence de l'histoire.

De Conan Meriadec premier roi de Bretagne en 387 jusqu'à Salomon quatrième de ce nom, 14 rois sont énumèrés jusqu'en l'année 864. Puis en 894 le titre du Royaume changea en Duché, et le décompte des ducs débute à Alain Rebré dit le Grand, s'étend jusqu'au 25ème duc François II avant de donner le nom d'Anne de Bretagne, de sa fille Claude "femme du roi François premier lequel en l'an mil cinq cent trente deux, le quatrième jour d'aoust du contentement des Estats de Bretaigne unit inséparablement le duché au domaine de la couronne de France."

 La liste se termine par XXVIII François Daulphin de France [...] fut couronné duc , & receu en la ville de Rennes, capitale du pays de Bretaigne en l'an mille cinq cens trente deux, mourut au grant regret d'un chascun en l'an mille cinq cens trente neuf, ayant esté empoisonné à Tournon par un Italien nommé Sébastien de Montecuculo, estant Prince de grande espérance."

9. Planche I : La carte géographique.

  ... est soigneusement pliée sur la page suivante. Elle sera étudiée dans un prochain article. 

                         DSCN7832c.jpg

 


10. L'Histoire elle-même débute alors

 par le Livre Premier pour se poursuivre jusqu'à la fin du Livre XII. Mais au Livre III, après le chapitre XLIIII, entre les pages 180 et 181, une autre feuille soigneusement repliée donne un tableau généalogique :


11. Planche II : Le tableau généalogique :

GENEALOGIE DES DVCS ET PRINCES DE BRETAIGNE d'après Geoffroy premier du nom couronné Duc en l'an IX.C.XCII jusques à présent.

  Le tableau débute donc à Geoffroy I.du nom Duc de Bretaigne qui mourut en l'an 1008 au retour de Ierusalem , [qui] eut de Hanoise la femme fille du viel Richard Duc de Normandie ...Alain Duc de Bretaigne mari de Berthe, etc...

    Ce tableau est daté dans l'encart inférieur de 1588 (il n'était donc pas prévu pour la première édition de 1583).

 

 

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Dernière page : Le collier de l'Ordre de l'Hermine et de l'épi.

 

  Cet ordre de chevalerie breton témoin des fastes du pouvoir ducal ayant été supprimé lors de la réunion de la Bretagne avec la France, sa présence dans l'histoire de d'Argentré n'est pas dépourvue de signification. 

  L'Ordre de l'Hermine fut créé par le duc Jean IV en 1381, peu après un exil en Angleterre, où il s'inspire du modèle de l'ordre de la Jarretière pour rassembler autour de lui la noblesse bretonne irritée par son anglophilie. Le collier se composait de deux chaînes d'or dont les extrémités étaient attachées à deux couronnes ducales, chacune desquelles renfermant une hermine passante. Ces chaînes étaient composées chacune de quatre fermoirs (compartiments), et ces fermoirs étaient une hermine avec une banderolle autour du corps, sur lequel était écrit "à ma vie", et au cou un collier d'où pendait une chaînette de quatre ou cinq anneaux.

  L'hermine héraldique (fourrure* blanche mouchetée de noir) appartient aux armoiries des ducs de Bretagne sous forme du franc quartier d'hermine de Pierre Mauclair (1213-1237) jusqu'en 1316 où Jean III adopte l'écu d' hermine plain. "L'hermine est un champ d'argent semé de mouchetures de sable ; les formes des mouchetures varient, depuis celles qui rappellent des larmes renversées, jusqu'à celles qu'on prendrait pour des fers de flèches tréflés ou aux pointes arrondies" (P.B. Gheusi). En effet, ces mouchetures avaient à l'origine sous Pierre Mauclair la forme d'un rectangle vertical à pied triangulaire (provenant de la pièce du vair), puis adoptèrent la forme d'une amphore, puis sous Jean Ier la forme d'un poisson, queue bifide en haut, puis d'une cravate stylisée. Au XIVe siècle apparaît une partie haute à trois pétales surmontant une partie globuleuse basse hérissée d'une douzaine de rayons. Sous Charles de Blois et Jean de Monfort apparaît le pseudo-lys, où la forme du lys royal est imitée dans la partie supérieure trifoliée. C'est ce modèle qui va se développer jusqu'à nous, avec une poignée faite de trois pétales arrondis, triangulaires ou losangique, et une "cravate" (je forge mon vocabulaire) inférieure élargie vers le bas et se divisant en trois ou cinq digitations. voir les dessins de S. de la Nicollière-Teijeiro).

* en blason, les fourrures ou pannes, ainsi appelées parce qu'elles étaient appliquées sur des vêtements (assutæ pannis) sont au nombre de deux : le vair, blanc et azur, et l'hermine. 

L'hermine naturelle posséde une fourrure blanche, à l'exception de l'extrémité de la queue qui est noire. Les pelletiers et fourreurs mouchetaient jadis la fourrure blanche de petits morceaux de peau d'agneaux de Lombardie renommés pour leur couleur noir luisant, destinés à faire ressortir la blancheur. "On a donné-dit Dom Lobineau- à la fourrure le nom d'Ermine, à cause qu'elle était faite de peaux qui venaient d'Arménie, et que l'on appelait autrefois Irmins ou Ermins ceux que nous appelons aujourd'hui Arméniens". On nommait jadis l'hermine Mus armenius, "rat d'Arménie".

  Le nom du célèbre Château de l'Hermine que Jean IV fit construire près de Vannes, et qui justifie les armoiries de gueles à une hermine passante au naturel de cette ville témoigne de l'attachement du duc pour cet emblème.

 L'hermine passante (l'animal représenté allongé de profil, quatre pattes posées) n'apparaît que plus tardivement, précisément comme emblème de Jean IV. La devise "A ma vie" lui est aussi propre, et Dom Lobineau y voit l'allusion au fait que le duc ayant déjà exposé deux fois sa vie pour la Bretagne et qu'il l'exposerait encore pour défendre ses droits et sa dignité. SourceD'Ambreville et Revue de Bretagne.

 

 

 


  Le collier de l'épi est venu compléter le collier précédent.

  Il est en argent, et composé "d'épis de blé terminés par une hermine pendante" attachée au collier avec deux chaînes". L'Ordre a été institué par le duc François Ier avant 1450. Le collier a été présenté par L. Lobineau comme une récompense de moindre valeur que l'Hermine, mais cette notion a été remise en cause.

  

 

  La question peut se poser de savoir si Pierre  d'Argentré ou l'un de ses aïeux étaient chevaliers de l'Ordre de l'Hermine et de l'Épi. Leur nom n'apparaît pas sur la liste qu'en donne Dom Morice. Liste de Dom Morice sur infobretagne.

 


                         DSCN7880c-copie-1.jpg

 

 

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Published by jean-yves cordier
16 janvier 2013 3 16 /01 /janvier /2013 00:49

          

         Le portrait de Bertrand d'Argentré.

 

 J'ai commencé par découvrir, comme une carte au trésor, dans l'Histoire de Bretagne de Bertrand d'Argentré de cette Bibliothèque Municipale, soigneusement pliée, une carte géographique. Rien de moins que l'un des 18 ou 20 exemplaires mondiaux de la toute première carte imprimée connue de la Bretagne. Datant de 1588. 

  J'ai découvert la vie de celui qui fut l'un des esprits les plus cultivés de Bretagne, l'un des plus attachés à défendre l'originalité, pour ne pas dire l'indépendance, de sa Province, ses privilèges et ses droits. Un héritier des Chroniqueurs bretons, dont l'exceptionnelle bibliothèque* de son hotel d'Argentré à Rennes, rue des Foulons avait enrichi le fond lui venant de son père Pierre d'Argentré, Sénéchal de Rennes, qui y était mort à soixante ans, en 1548.

  Né à Vitré en 1519, sous François 1er, Bertrand d'Argentré après des études de droit à Orléans, Poitiers et Bourges fut sénéchal (chef de la Justice) de Vitré à 22 ans, puis de Rennes en 1547 en succession de son père puis président du présidial (Tribunal de justice) de Rennes de 1552 à 1589. Ce "présidial" défend ses prérogatives contre les visées du Parlement, composé pour moitié, par ordre du roi, de membres étrangers à la Bretagne.

 * Cette bibliothèque lui avait coûté six mille écus d'or ; il en a dressé l'inventaire des 2943 volumes  de sa main en 1582 dans un manuscrit de 95 feuillets. Ce fond  passa à sa petite fille, puis fut légué aux Capucins de Rennes avant d'intégrer en 1794 la Bibliothèque Publique de Rennes. L'inventaire est disponible sur microfilm sous la cote 1M.39 à la médiathèque Les Champs Libres.

  Bertrand d'Argentré et l'étude de la Très Ancienne Coutume de Bretagne (T.A.C).

Bertrand d'Argentré hérite de ses parents de deux domaines d'investigations: par sa mère, nièce de Pierre Le Baud auteur d'une Compillation des cronicques et ystoires des bretons (1480) et d'une Cronicque des roys et princes de Bretaigne armoricaine (1505), la défense d'une Histoire du peuple breton et de ses chefs, descendant des Troyens. Par son père, la défense de la Très Ancienne Coutume de Bretagne, ensemble du droit coutumier élaboré au cours des siècles.

  En 1539, Pierre d'Argentré avait été nommé avec quatre autres juristes pour participer à la réforme de la Coutume de Bretagne, réforme générale en France mais rendue spécialement urgente depuis la réunion du duché au royaume ; mais, gravement malade, il ne put assister à la rédaction d'un texte qui fut, en son absence,rédigé en quinze jours avec ses 632 articles, "si fort à la haste, que MM. les réformateurs avoient eu le pied dans l'étrier, [pedem in stapia]" (B. D'Argentré) , et reprenant souvent le texte ancien. Les quatres autres commissaires étaient François Crespin, Président au Parlement de Rennes, Nicole Queslain, président des enquêtes à Paris, Martin Ruzé, conseiller au Parlement de Paris et Pierre Marec, maître des requêtes de Bretagne, tous conseillers au Parlement de Bretagne. La première rédaction de la Très Ancienne Coutume était antérieur à 1350, et peu compréhensible pour les officiers deu Parlement de Paris qui venaient tenir, comme Conseillers, le parlement des Grands Jours. Le nouveau texte prend le nom d'Ancienne Coutume  et sera publié en 1568 par J. Duclos à Rennes. Sa forme est mise au goût du jour, les anciennes dispositions sont rangées dans les "titres" convenables, "sans se donner trop de libertés de corriger dans le sens" link

  C'est cette Ancienne Coutume que Bertrand d'Argentré ne cessera d'étudier, en écrivant des commentaires successives, puis participant en 1580 à la rédaction de la Nouvelle Coutume.

  Les Commentaires sur les trois premiers titres (des justices, des droits des Princes, et des procureurs, soit les 105 premiers articles) de l'Ancienne Coutume furent publiés en 1568 par Julien Duclos à Rennes, in-4°.

En 1570 parut à Rennes l'Advis sur les partages des nobles, Julien Duclos, in-4°.

Le troisième ouvrage sur la Coutume fut imprimé en 1576 à Rennes chez Julien Duclos : Commentaires sur les Appropriances, Bannies et Prescriptions, in-f°.

En 1580 paraît son commentaire sur les Donations, qualifié de "son chef d'œuvre" par Hévin, à Paris chez Dupuys, in folio.

C'est en cette année 1580 qu'il fut l'un des cinq commissaires employés à la réformation de la Coutume, qui eût lieu le 15 octobre aux États de Ploermel, avec R. de Bourgneuf, P. Brullon, B. Glé et Alixant.

  En 1584, Bertrand d'Argentré publie chez Jacques Dupuys à Paris son Aitiologie, ou notes sur la Coutume réformée.

 Ses autres commentaires furent publiés de manière posthume : Commentarii ad praecipuos juris britannici titulos, Parisii, 1605 sur les titres des mariages, des bastards, des successions et des partages.

 En 1605 puis 1608 est donnée par son fils Charles une édition complète de ces commentaires : Commentarii in patrias britonum leges, in lucem editi cûra et studio Caroli d'Argentré filii. Ce texte est réédité en 1613 et 1614, puis par Nicolas Buon en 1621, associé aux privilèges de Bretagne, à la Coutume de 1580, à l'Aitiologie, l'Advis sur le partage des nobles, le traité de Laudimiis et six consultations. La traduction de l'Ancienne Coutume est due à Nicolas Buon. Cette OPERA a été rééditée à Paris en 1628, 1640 (5ème édition, Veuve de Nicolas Buon), 1646, 1660, 1661 (7ème édition, Jacob d'Allun,Paris) et à Bruxelles, Amsterdam/Anvers par Petrum Bellerum en 1664.

 

  Ce sont ces dernières éditions posthumes qui possèdent le portrait de Bertrand d'Argentré. J'ai été déjà trop long, je le montre illico :

 

 



 

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  C'est une gravure sur cuivre dont l'auteur se manifeste sur le texte écrit en dessous :

 

argentre-commentarii 0633c

 

Effigies .viri clariss. Bertr. D'Argentré quondam Redonens. praesidies. Tho. de Leu. fecit Anno .1604. mens. Decemb. 

"Portrait de l'illustre Bertrand d'Argentré, jadis Président (du présidial) de Rennes. Tho(mas) de Leu le fit l'année 1604, au mois de décembre."

Thomas de Leu ou Leeuw ou Le Leup (1560-1612) est un graveur français d'origine néerlandaise (Audenarde). Il fit ses débuts à Anvers, influencé tout d'abord par les Wierix. Il travailla surtout à Paris, à partir de 1576, chez Jean Rabel. C'est un des plus importants graveurs de portraits de son temps, et le plus célèbre avec Gaultier. Il est le gendre de Antoine Caron, l'un des principaux peintres de la 2e école de Fontainebleau, et de ce fait beau-frère des graveurs en taille douce Léonard Gaultier et Jaspar Isaac. Il est également le beau-père de Claude Vignon.

Voir par exemple :

portrait de François 1er 

Portrait de Henri II 

portrait de Henri IV   

  La première impression en taille douce (en creux) fut réalisée en 1488 par Michelet Topie de Pymont.  L'engouement des portraits en taille douce à partir de la seconde partie du XVIe siècle est dû d'abord à l'introduction de cette technique par les graveurs flamands qui fuirent Anvers après le sac de cette ville en 1576 par les troupes espagnoles mal payées et mutinées ; bien que trois fois plus onéreuses que la gravure sur bois ( les plaques de cuivre permettent quelques centaines d'épreuves avant d'être regravées alors que les plaques de bois en autorisent jusqu'à plusieurs milliers, et peuvent être imprimées avec la même presse que le texte), les gravures au burin (ou à la pointe sêche) sont appréciées pour leur délicatesse d'éxécution, premettant un meilleur rendu des modelés par le dégradé des ombres et des lumières. Le déclin économique de l'édition dans les années 1580 explique aussi que beaucoup de graveurs sur bois désertent leur traditionnel quartier parisien autour de la rue Montorgueil ou se reconvertissent. 

  Par ailleurs, le pouvoir royal fait appel depuis Henri III (1574-1589) à ces portraits gravés pour diffuser une "image du bon roi" facile à placarder à l'intérieur des maisons. La revue Nouvelles d l'Estampe montre ainsi dans son dernier numéro 2012 comment, lors du mariage à Lyon de Henri IV et Marie de Médicis en 1600, cinq portraits furent gravés par Jacques Fornazeris et associés à des quatrains pour participer à la pompe et la publicité de l'évenement. Cette mode royale s'étend à la Cour, puis à la noblesse de Province, comme en témoigne le portrait d'Argentré. Cela fut favorisé par la parution de Vrais Pourtraits et vies des hommes illustres d'André Thevet à Paris en 1574.

  Le portrait est daté de 1604, alors que d'Argentré est décédé en janvier 1590. Mais Miorcec signale que d'Argentré s'était fait peindre en 1579 en sa soixantième année et que cela a inspiré le portrait que l'on voit.

 


  On observe à la fois les traits du personnage lui-même, la prestance de son maintien, l'assurance de son regard, la taille soigneuse de la barbe, on s'attarde sur le court toupet retombant sur la calvitie frontale, on s'interroge sur la dilatation sinueuse des veines du front (artérite de Horton ?), puis on admire le travail du burin qui déploit son art dans les moires du satin de la veste, dans les minutieux détails (au rendu bien flamand) du velours du pourpoint.

  Prosper Jean Levot écrit dans Biographie bretonne : 

"Bertrand d'Argentré étrait d'une taille au dessous de la moyenne, d'une figure grave et d'une physionomie qui peignait la vivacité de son esprit et la fermeté de son caractère. Il avait le teint brun et la barbe et les cheveux noirs même dans sa vieillesse"

                            argentre-commentarii-0625c.jpg

 

  A gauche, ce sont les armoiries de la famille d'Argentré, d'argent à la croix pattée et alaisée de gueules (G. de Genouillac, recueil d'armoiries). Le casque est traversé par une lance, et surmonté de la croix pattée. En dessous de l'écusson se voit deux rameaux (olivier, laurier ?) partant d'un médaillon contenant un monogramme complexe dans lequel on peut dicerner les lettres T, A, O, par exemple.

  L'inscription italique Anno Æ . t 60. reste aussi énigmatique pour moi.

                          argentre-commentarii 0629c

 

 A droite figure l'emblème de Bertrand d'Argentré, un vase enflammé et la devise LAMPEITE .KAITE, "je brille et je brûle".


argentre-commentarii 0631c

 


 

  Je l'ai dit, la mode est d'associer ces portraits à des quatrains, des épigrammes, des compliments grecs ou latins. Charles d'Argentré, dans ce Tombeau en l'hommage de son père, fait les choses comme il faut. 


              argentre-commentarii-0621c.jpg

 

  Trois courtes citations se succèdent : 

Haec hominis non tam facies, quam numinis Aequi est

Cui se tota Themis iunxit, & haec peperit. 

Parcite, municipum fessi sartagine legum,

Haec ARGENTRÆI scriptio nempe satis.

N. Richelet, Paris.


Os habitumque vides ARGENTRÆI cernis opusque :

Igneus in vigor ingeniis Astrææque medulla

Fed. Morel, Professor Regius.


Du docte ARGENTRÉ l'Image icy tu voix,

Dont Themis inspiroit l'esprit, l'ame et la voix :

Et qui de ses bretons consacre à la mémoire

En l'Argent de son nom, et les Loys, et l'Histoire.

Y. Fyot.

  Les premiers vers sont de Nicolas Richelet, avocat au Parlement de Paris, dont on connaît son édition commentée des œuvres de Ronsard publiés en 1623. 

Le deuxième auteur, Fédéric Morel, est décrit ainsi par Data BNF :

 Autre(s) graphie(s) : Morello, Federico. Imprimeur-libraire ; imprimeur ordinaire du Roi (1581-1602). Fils aîné de l'imprimeur-libraire parisien Fédéric I Morel, succède à son père comme imprimeur du Roi en 1581, mais ne suit pas le roi à Tours pendant la Ligue. Cède les "Grecs du Roi" à Étienne Prevosteau en 1587. En 1586, épouse la fille de Léger Du Chesne, professeur d'éloquence au Collège royal, dont il obtient la chaire la même année. En 1602, laisse la direction de l'imprimerie à son fils Fédéric III Morel. Se consacre alors entièrement à sa chaire de grec et à ses travaux d'érudition. Ses propres textes ont été publiés par son officine ou par d'autres imprimeurs-libraires : Abel L'Angelier, Gabriel Buon, Lucas Breyer ou Jean Libert. A travaillé en association avec Sébastien Nivelle, Guillaume Bichon, Guillaume Chaudière, Rolin Thierry et avec les deux autres imprimeurs ordinaires du Roi.

Enfin Y. Fyot pourrait correspondre à Yves Fyot, sieur de la Rivière, conseiller du roi, trésorier et receveur général des Finances en Bretagne, pour la seigneurie de la Rivière (en 1625). On retrouve un épigramme de cet auteur dans l'Histoire d'Argentré, 2ème édition de 1588.

  Le volume comprend au fil des pages beaucoup d'autres éloges et versifications.

 

  Ce portrait étant ainsi présenté, il semble nécessaire de découvrir le livre dans lequel il se trouve. 

Les Commentarii d'Argentré à la Bibliothèque de Brest. 

Edition de 1664 sur Google Books ici

 La Bibliothèque dispose de trois exemplaires présentés ainsi:

 

 

 

    Cote :  RES FB A42 - f Commentarii in consuetudines ducatus Britanniae aliique tractatus varii [in lucem edidi cura et studio V. C Caroli d'Argentré] ; [Suivi de] Coustumes générales du pays et duché de Bretagne, réformées en l'an 1580. Aitiologia, sive ratiocinatio de reformandis causius / auctore B. d'Argentré...: Parisiis : Nicolaum Buon, 1628 Description physique: 2 parties en un vol., [2 bl-22] p.-2472 col. [-70-1-1 bl.-18-] 120 [-7] p. : portrait grav. sur cuivre par Thomas de Leu, t. grav. sur cuivre par L. Gaultier, fig., marque typogr. aux p. de t. ; 35 cm  Rel. XVIIè s. veau brun Auteur collectif: Argentré, Caroli d' (ed. scientifique) Leu, Thomas de (ill.) Gaultier, L. (ill.)

 


   Cote :  RES FB A43 - f. Commentarii in consuetudines ducatus Britanniae aliique tractatus varii ; [Suivi de] Coustumes générales du pays et duché de Bretagne, réformées en l'an 1580. Aitiologia, sive ratiocinatio de reformandis causius / auctore B. d'Argentre... Paris : Nicolas Buon, 1628 Description physique: 2 parties en un vol., [8 bl.-17-1 bl.-4] p.-2472 col [-70-1-1 bl.-18] 120 [-7-3 bl.] p. : portr. gr. sur cuivre par Thomas de Leu., fig., marque typogr. à la 2è p. de t. ; 34 cm  Mq. 1ère p. de t. Notes mss. en début de vol. Rel. basane blonde racinée 

 

Cote :  RES FB A44 - f   V. C. B. d'Argentré,... Commentarii in patrias Britonum leges seu... consuetudines antiquissimi ducatus Britanniae (in lucem editi cura Caroli d'Argentré). Coustumes générales du pays et duché de Bretagne, réformées en l'an mil cinq cents quatre vingts. Aitilogia, sive Ratiocinatio de reformandi causis, auctore B. d'Argentré : Parisiis : apud N. Buon, 1608,  2 parties en 1 vol. in-fol.  Rel. XVIIe s veau fauve  Auteur collectif: Argentré, Charles d' (ed. scientifique).

  J'ai examiné les deux exemplaires FB A42 et A43 disposant du fameux portrait. Celui qui est reproduit ici provient de l'exemplaire RES FB A42.

 

Exemplaire RES FB A42 :

 

reliure en veau brun, dos à six nerfs, caissons ornés de motifs floraux dorés, titre ARGENTRÉ BRITTANIAE

 

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                       DSCN8624c

 

 

Composition de l'ouvrage :

  • première page de titre
  • Titre-frontispice
  • Amplessimo Britanniae senatui carolus argentraeus VSLM : [dédicace ]
  • Nicolas Buon Huius operis typographus optimo (3f.) [epître du libraire au lecteur]
  • A M. Charles d'Argentré conseiller deu Roy et Président es Enquestes du Parlement,
  • Versifications : Y. Fyot puis épigramme de Philippe d'Argentré, petit-fils de B.A, vers grecs et latins de G. Crittoni, Prof. Regis, et de Nicolas Bordionius et de Lvd de Cresolles.
  • Versifications : texte grec, In Carolum..., Ad EUNDEM par Lud. de Cresolles, Brito e societate Iesu.
  • Portrait et éloges versifiées 
  • V.C. Bertrandi Argentraei Redonensis Provincae Praesidi, Elogium Auctore Scaevola Sammarthano queastore Franciae, (3f.) 
  • Eloge en latin signe DD
  • Typographus lectori
  • In antiquae gentis argenteae...Fr. Thorius Bellion
  • privilège du Roy 27 janvier 1621 signé RENOVARD
  • Index titulorum Juris Britannici commentarius (2f.)  Pagination par colonnes (2 par f.).
  • Deuxième page de titre avec marque typographique de Nicolas Buon.
  • opus, pp. 2471
  • Index rerum verborum
  • page de titre : Coutume générale du pays et Duché de Bretagne 
  • Lectori
  • Versifications Ad Britanniam (S.S.S fecit) et Sonnet d'Y. Fryot.
  • Les Privilèges, Franchises et Libertez des pays et Duché de Bretagne (9 ff.).
  • Index des Tiltres contenus en ce Livre coustumier, suivi de Au Lecteur.
  • Coustumes générales des pays et Duché de Bretagne en l'an 1580.
  • Des Droicts du prince et Aultres Seigneurs & des Aides coustumières.
  • De Laudimiis tractatus.
  • Table des matières


 

Première page de titre, f.1r : 

V.C. B.D'ARGENTRÉ COMMENTARII IN CONSVETVDINES DVCATVS BRITANNIÆ. ALIIQVE TRACTATVS VARII Quarta Editio ememdatissima, plerisque in locis aucta. 

"Commentaire de la Coutume du Duché de Bretagne et autres traités variés. Quatrième édition extrémement corrigée et  augmentée dans de nombreux endroits."


DSCN8629c

 

La marque typographique de Nicolas Buon.

Elle porte la devise OMNIA MEA MECUM PORTO, "J'emporte avec moi tous mes biens" : cette sentence, citée par Cicéron dans Paradoxes I, 8, ou par Sénèque avant d'être reprise par Henri Estienne au XVIe siècle dans le Dialogue du nouveau langage françois italianisé  est la traduction d'une phrase du philosophe Bias de Priène ; il la prononça en grec, mais la phrase grecque n'est pas facile à trouver. Bias est l'un des sept sages de la Grèce antique. Sauriez-vous réciter la liste de leur nom? Lavieb-aile est là pour ça. Ce sont Thalès de Milet Ἐγγύα, πάρα δ᾽ ἄτα. « Ne te porte jamais caution. » Solon d'Athènes Μηδὲν ἄγαν. « Rien de trop. » Chilon de Sparte Γνῶθι σεαυτόν. « Connais-toi toi-même. » Pittacos de Mytilène Γίγνωσκε καιρόν. « Reconnais l'occasion favorable. » Bias de Priène Οἱ πλεῖστοι κακοί. « La plupart des hommes sont mauvais.» (sur sa statue de la villa Hadriana) Cléobule de Lindos Μέτρον ἄριστον. « La modération est le plus grand bien. » Périandre de Corinthe « Prudence en toute chose. ». Avec ces sept maximes, vous êtes armés pour tout affronter, mieux qu'un couteau suisse , utilisant Cléobule, Pittacos ou Chilon selon la situation.

Notre Bias était avocat et orateur, mais ne défendait que les causes justes. Laissant la métaphysique à d'autres (mais qu'est-ce que la metaphysique, si ce n'est le bouquin du dessus de la pile), il se bornait à élaborer de bons préceptes de morales, dont il donnait l'exemple par sa pratique. Sage parmi les sages, il ecrivit néanmoins un poème de 2.000 vers consacré à l’examen des moyens de rendre l’Ionie heureuse.

Il savait conseiller ses proches avec lucidité: « Il faut vivre avec ses amis comme si on devait un jour les avoir pour ennemis », Haïssez vos ennemis avec modération, car il peut se faire qu’ils deviennent vos amis dans la suite ». 

  Un jour que Cyrus II roi des Perses assiègeait, à l'embouchure du méandre, la cité de Priène et qu'on avait autorisé les civils à sortir en emmenant sur son dos sses biens les plus précieux, il étonna les gardes en faction en sortant les mains vides. Quoi, pas de regret, aucun objet à sauver ? C'est alors que l'amoureux de la sagesse répondit en montrant son front : Omnia mea mecum porto

  Le libraire Nicolas Buon (15..-1628) a repris cette maxime de Bias de son père Gabriel Buon (15..-1592), lequel la tenait de Maurice de la Porte (1524-1548) et de sa veuve, décédée en 1588. Gabriel avait en effet repris de cette femme libraire le fond, l'adresse Au Clos Bruneau, à l'Image Saint-Claude, la devise et les marques typographiques qu'il utilisa de 1558 à 1587. L'une de ces marques représente "un homme chargé d'une valise à la porte d'une maison" (sic, A.J.Bernard). Nicolas Buon, successeur de son père employa à son tour les marques de son père qu'il fit regraver sous plusieurs formes au XVIe siècle.

  Sur la marque, l'homme qui sort, non pas d'une maison, mais d'une porte des murailles de la ville, ne porte bien-sûr pas de valise : fièrement drapé dans sa toge, il regarde -le devrait-il ?- derrière lui, et se tourne avec dédain vers ceux qui peinent sous le fardeau de leurs biens indispensables ( Mon vœu pour 2013 : n'ajoutez plus rien !).

    Tout dans la tête, rien dans les livres : mauvaise réclame pour un libraire, mais belle philosophie du coeur léger, des mains vides et du détachement. A conseiller (pour les autres.)


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L'adresse du libraire. (voir image précédente).


PARISIIS / Apvd NICOLAVM  BVON, viâ Iacobâ, sub signo D. Claudii, & Hominis Sylvestris.

 M.DCXXVIII.

CVM PRIVILEGIO REGIS.

"Paris, chez Nicolas Buon, rue Saint-Jacques sous l'enseigne de Saint-Claude et de l'Homme Sylvestre."

  J'ai déjà dit que Gabriel puis sa veuve (1597), puis son fils Nicolas Buon avaient repris l'enseigne "de Saint-Claude".  Nicolas Buon, actif à Paris de 1598 à 1628*, indique dans ses livres "Au Mont Saint-Hilaire", "Rue Saint-Jacques, près les Mathurins", et "à l'enseigne /à l'Image Saint-Claude".

  *On trouve en 1627-1640, "Veuve de Nicolas Buon".

  Dans Garamond.culture.fr un site que j'apprécie beaucoup se trouve le plan de Paris sur lequel sont reportés tous les libraires de 1540. On trouve alors dans la rue Saint-Jacques, "pres les Mathurins", André Berthelin, à l'image Saint-Claude , et un peu plus loin, en traversant la rue des Mathurins, parmi une quinzaine de confrères, Nicolas Gilles, à l'enseigne de l'homme sauvage. En 1581, c'est le libraire Guillaume Chaudière qui donne son adresse "Rue Saint-Jacques, à l'enseigne du Temps et de l'homme sauvage".

Notice sur Nicolas Buon.

Nicolas Buon, fils de Gabriel Buon (libraire-juré depuis 1558) et de Jeanne Rondel, ne semble pas avoir été libraire-imprimeur, mais avoir fait imprimé ses livres (par exemple par Denis Binet). Sa fille Marie Buon épousé Barthélémy Massé, libraire, puis Claude Sonnius, libraire le 2 mai 1624 et fils de Jean Sonnius, libraire.

  Son père exerçait son métier au Mont-Saint-Hilaire dans ce quartier Saint-Hilaire situé juste au nord du quartier Saint-Jacques et qui regroupa jusqu'à 14 libraires.

Il fut agréé libraire-juré en 1600.

  Aprés l'adoption le 9 juillet 1618 du Premier réglement général sur l'imprimerie et la librairie, qui stipule qu'une chambre syndicale représentative soit constituée, il est nommé dès la première élection, le 17 juillet 1618, avec quatre autres membres.

Jean de la Caille indique :"Nicolas Buon, fils de Gabriel, fit imprimer par Denis Binet Chroniques et Annales de France par Nicol. Gilles in folio en 1600 et avec Robert Fouët Epitome disputationum [...] in octavo 4 volumes en 1603 ; la Coutume d'Orléans par Duret in quarto en 1609, Abelardi opera in quarto en 1616 [ Œuvres complètes d'Abélard avec la première édition des Lettres d'Héloïse et Abelard]. Il a ausii fait imprimer plusieurs éditions de la Coutume de Bretagne commentée par d'Argentré, sçavoir une en 1608, 1619 et 1628. Cette dernière édition est la meilleure édition de toutes celles que l'on ait imprimées jusqu'à présent, à cause qu'elle est plus ample. Annales ecclesiastici vet. et novi testamenti auct. Saliano, in folio six volumes en 1619. Arret de Papon in quarto 1621, Excerpta et tragediis & comaediis graecis...in octavo en 1628, plusieurs traductions de l'Ecriture Sainte par Guilbert in octavo en 1627. Il s'est acquis une grande réputation par la grande quantité de livres qu'il a publié & par les usages réformez, pour l'impression desquels et autres ouvrages considérables il était associé en plusieurs Compagnies.[...] Il épousa en première noce Blanche Chaudière [ grande famille de libraire] et en seconde noce Marie Drouyn, desquels il eut quelques enfants, dont un a esté notaire au Chastelet de Paris. Il fut enterré à Saint-Benoist."

  Il faut aussi signaler l'édition, en 1623, des Œuvres de Pierre de Ronsard, la quatorzième collective et la septième posthume. Edité par Claude Garnier, d'après les travaux de Jean Galland, et de Philippe Galland, ce monument littéraire est orné de nombreux portraits gravés par Léonard Gaultier et Thomas de Leu. Nicolas Buon est LE libraire de Ronsard.

 

Venant juste après le titre précédent, le Titre-frontispice est gravé sur cuivre par Léonard Gaultier. C'est, bien-sûr, un cadre type, personnalisé en plaçant les armoiries de la Bretagne présentées par les deux Victoires dont l'une porte sur sa trompette un fanion aux armes de d'Argentré et l'autre l'emblème de Bertrand d'Argentré, une flamme. 

Au dessus des deux chapiteaux, les métopes recoivent deux D entrelacés en miroir.

  Les deux Allégories sont la Paix (rameau d'olivier) et la Justice (Glaive et balance).

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  Le titre est différent de la page précédente :

V.C B. D'ARGENTRÉ REDONENSIS PROVINCIÆ PRÆSIDIS COMMENTARII IN PATRIAS BRITONVM leges, seu Consuetudines generales antiquissime Ducatus Britanniae. IN LVCEM EDITI CVRA ET studio V.C. CAROLI D'ARGENTRÉ B.F. & in Senatu Armorico Praesidi &c.

EDITIO QVARTA EMENDATISSIMA, plerisque in locis multum aucta ex auctoris...

 "B. d'Argentré Président du Présidial de Rennes : Commentaires sur les lois et tres anciennes coutume générale du pays breton et Duché de Bretagne. Edité à la lumière des travaux et des soins de Charles d'Argentré B.F etc..."

 

Je m'interesserai surtout à sa partie inférieure :

 Sous la colonne de gauche, on voit un saint évêque bénissant un enfant : c'est saint Claude, correspondant à l'Image Saint-Claude que nous avons vu. Elle est accompagnée de la mention Cum privilegio regis 1628.  De l'autre coté, c'est l' "homme sauvage" de l'autre enseigne. 

 

 

DSCN8633c

 

Dans le médaillon central se trouve inscrit à nouveau les coordonnées du Libraire. Mais au dessous se trouve son chiffre, un "quatre de chiffre" dont la hampe à double traverse sert d'appui et de fut aux deux lettres initiales du libraire. La devise Omnia mea ... n'y figure pas, comme si, dans cette gravure réalisée à son nom plutôt que de reprendre les bois gravés de son père, Nicolas renonçait à l'ancienne devise.

                                               DSCN8634v

 

  On remarque que le personnage n'est pas dénommé "homme sauvage", mais "homme sylvestre", ou homme des bois. Couvert de poil et armé d'une massue, c'est plus qu'un homme pré-historique, un homme-animal ou homme- sauvage dont Merlin est un avatar.

 

 

                           DSCN8635c

 

  Sur la base du pilier figure l'inscription L. Gaultier incidit, "taillé par L. Gaultier".

a) sur le terme "incidit" : le verbe incido signifie "tailler, inciser" et "graver, buriner". Les graveurs sur bois étaient nommés incisor lignorum à la fin du XVe siècle, alors que les "faiseurs d'images de papier, ou imagiers en papier, peintres en bois", dessinaient le motif sur le bloc de bois qui est taillé par un artisan nommé "tailleur d'histoires".

  Le "graveur" ne désigne au début du XVIe siècle que l'employé de l'orfèvre qui grave au burin le métal. Pour s'en distinguer, les graveurs d'estampes du milieu du XVe prennent le nom de"graveurs sur cuivre", in aes incidebat. C'est ce nom de "graveur sur lames de cuivre" que portent dans les années 1585-1588 Thomas de Leu et Léonard Gaultier. Le terme de "taille douce" apparaît ou se diffuse vers 1580, et Thomas de leu et Léonard Gaultier se font appeller "graveurs en taille douce" à partir de 1594. (Source : Jean Adhémar)

b) Léonard Gaultier (1561-c1635. Actif de 1576 à sa mort).

  Dessinateur, graveur et illustrateur, c'est, avec Thomas de Leu, le portraitiste le plus réputé de son temps. Il est le fils d'un orfèvre de Paris, soulignant la parenté entre le métier de graveur de pièces d'orfévrerie et celui de graveur d'estampes. Il s'installa à partir de 1599 ... rue Saint-Jacques, à l'enseigne de la Fleur du Lys d'or. On le dit gendre d'Antoine Caron, et, comme tel, beau-frère de Thomas de Leu. 

  On voit donc à l'occassion de ce simple volume comment s'entrecroisent les fils des relations familiales et de voisinage entre les différents professionnels du livre, regroupés autour de la rue Saint-Jacques.

  Aussi Nicolas Buon assure-t-il, comme libraire, un rôle de coordinateur : c'est lui, sans-doute, qui propose à Charles d'Argentré les artistes et graveurs. C'est lui qui, par les éditions qu'il a déjà mené, peut solliciter les auteurs habitueés à composer des épigrammes et des éloges. C'est sans-doute lui aussi qui s'occupe de loger le commanditaire du livre lors de ses séjours parisiens, puisque dans un Privilège, on découvre que Charles d'Argentré demeure rue Saint-Jacques. C'est enfin lui qui rédige plusieurs pages de présentation et d'introduction, et c'est même lui qui traduit du latin l'Ancienne Coutume.

D'une façon générale, Nicolas Buon joua un rôle important d'intermédiaire de premier plan dans le monde des Lettres, "contribuant à lancer en France certains textes célèbres dans leur pays d'origine en les faisant traduire". H.J. Martin; Livre, pouvoir et société, 1969.

 

  Il nous reste à découvrir diverses ornementations, comme ce cul-de-lampe :

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  L'éditeur égaye son texte par les initiales historiées, sans-doute puisées dans le fond ancien, et sans rapport avec le texte. Cet angelot s'accoude sur la traverse du A, sous un dais arpenté par les escargots tandis que des sortes de hérons se perchent sur les rinceaux.

 

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Pas de rapport entre le texte et la lettrine ? Sans-doute, lorsque l'on découvre cette lettre C au thème scatologique, qui débute l'éloge composé par "Scaevola Sammarthano".

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  L'auteur de cet éloge ainsi bafoué est Scévole de Sainte-Marthe, l'auteur de La manière de nourrir les enfants à la mamelle. 

    Gaucher II, dit Scévole de Sainte-Marthe, né le 2 février 1536 à Loudun où il est mort le 29 mars 1623, est un poète français issu d'une grande famille d'humanistes et d'érudits français. Il demeure le produit parfait de la floraison intellectuelle de la fin du xvie siècle. Poète et administrateur, il fut capitaine et maire de Poitiers (1579-15801) puis trésorier de France dans la même généralité – ses vers furent très prisés par Pierre de Ronsard et Étienne Pasquier ; son éloquence auprès d'Henri IV le rendit célèbre

 

 

La deuxième page de titre :

                     argentre-commentarii 0622c

 

L'exemplaire RES FB A43 :


                               DSCN8718c

 

                          DSCN8720c

 

                         DSCN8723c

 

  Une plume anonyme a reproduit " l'avis de Hévin, extrait de l'avertissement d'Hévin, à la tête des plaidoyers de M. ..., édition de 1684. Il faut mettre, dit-il, de la différence entre ses ouvrages, ce que ne font pas la plupart de ceux qui les lisent, qui  trouvant toutes ses œuvres ramassées dans un seul volume, s'imaginent qu'elles ont eu également ses derniers soins et qu'elles sont de même valeur. je me sens obligé d'avertir le public...!... " etc...



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Published by jean-yves cordier
15 janvier 2013 2 15 /01 /janvier /2013 23:49
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Published by Lavieb Aile
15 janvier 2013 2 15 /01 /janvier /2013 23:46
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Published by Lavieb Aile
15 janvier 2013 2 15 /01 /janvier /2013 22:31

           

              Souvenirs de la marée basse.

 

  Je débute cet article pour la seule raison de son titre. Il ne va pas sans piège, car il y a là matière à échouage proche de l'échec, et au discours vaseux. Mieux eut valu entamer un Éloge du Bigorneau, lequel, à ma connaissance, reste à écrire.

  Ce titre provient d'un livre somptueux, mais que je n'ai pas lu ; il m'en aurait coûté 15 000 € si j'avais prétendu acquérir, en mars 2011, à Drouot, lors de la vente aux enchères Pierre Bergé et associés, "un volume orihon complet" décrit sous ce titre.

  J'aurais dû déjà savoir ce qu'est un volume orihon et me féliciter que ce mot ne soit pas écrit en japonais, car l'ouvrage en question est japonais. Dans "orihon", qui s'écrit 折本 , vous reconnaissez les signes "ori" (pli) et "hon", (livre) : c'est très simple, c'est un livre dont les pages sont collées ensemble et pliées en accordéon.

  Son titre original est Shioi no tsuto, et vous pouvez, soit en trouver le fac-similé aux éditions Philippe Picquier (2006) qui reproduit l'exemplaire que Jacques Doucet avait acquis avant d'en faire don à la bibliothèque de l'INHA (cote 4 Est 449), soit rêver sur la description donnée lors de la vente de Drouot :  C'est donc, disais-je, un volume orihon complet, " Couverture bleue avec un décor de lac avec feuilles et vagues, 10 feuilles dont 2 pages de préface signée Akera Kanko, 36 poèmes de 36 poètes différents sont rassemblés dans cette anthologie kyoka. 6 double-pages d'illustrations avec coquillages, paysage avec des personnages ramassant des coquillages en bord de mer. Quelques coquillages sont rehaussés de mica, quelques impressions sans couleur mais avec relief. Une double-page représente un groupe de femmes jouant au kaiawase, sur la première et dernière page un poème dans la partie supérieure, sur les autres pages, environ six poèmes sur les coquillages. 1 double-page de postface signée Kurabe Yukisumi. Colophon : Kitagawa Utamaro zu avec un sceau Jisei ikke, éditeur Kôshodô Tsutaya Jûzaburô à Edo, sceau d'un antiquaire.

Il s'agit du second ouvrage d'histoire naturelle illustré par Utamaro sur les trois qu'il publia. Chef d'œuvre de la gravure sur bois japonaise. Signé : Kitagawa Utamaro zu Circa 1789Editeur : Tsutaya Jûzaburô à Edo. Format : H_25 cm L_18,9 cm."

 

  Un mot sur les Kyôka : ce sont des poèmes burlesques, passe-temps de lettrés réunis en cercles et qui organisaient des concours sur des thèmes donnés. Akera Kankô (1738-1798) qui est à l'initiative de cette anthologie, est précisément l'un des plus importants poètes de kyôka de la fin du XVIIIe siècle, et si il en réunit trente-six, c'est bien évidemment en référence aux Trente-Six Génies de la poésie classique.

  Utamaro Kitagawa (pour respecter l'usage japonais de donner d'abord le nom, puis le prénom) a donné deux autres splendides volumes d'estampes consacrés à l'histoire naturelle : l'Album d'insectes choisis (Ehon mushi erami), paru à Edo en 1788, et Concours de poèmes burlesques des myriades d'oiseaux, plus brièvement Momochidori-kyöka-awase; paru à Edo en 1791. Un ravissement dans lequel l'entomologiste ou l'ornithologue en herbe plonge, à dix centimètres du sol, dans des nez-à-nez avec la libellule rouge, la sauterelle-palefrenier, le troglodyte-mignon et le rossignol dont il n'avait pas oser rêver (voir le volume 1 et le volume 2 de l'exemplaire de l'INHA des Insectes choisis, et le volume 1 et volume 2 des Myriades d'oiseaux.

Quelques images de Souvenirs de la marée basse peuvent être admirées ici grâce à l'INHA.


  Bien-sûr, le nom d'Utamaro, surtout depuis qu'Edmont de Goncourt a écrit Outamaro, le peintre des maisons vertes, est surtout connu pour ses portraits de courtisanes habillées de tissus précieux, ou, plus confidentiellement, pour Le Chant de l'Oreiller, Utamakura (1788), dont on a deviné qu'il s'agit d'un recueil érotique.

  Rêvons encore un peu. La quartier de plaisir de la ville d'Edo, résidence des shoguns Tokugawas et qui ne se nommera Tokyo qu'après 1868, tous les amateurs d'Ukiyo-e le savent, se nomme le Yoshiwara. C'est un ancien marécage asséché le long de la rivière Edo, et il n'est accessible qu'en barque. Nous sommes la quatorzième nuit de la huitième lune, la veille de chûshû, la mi-automne : demain brillera la lune la plus remarquable de l'année, celle qui inspire les poèmes les plus beaux. Nous avons étendu nos nattes sur la digue de la Sumida, et nous sommes tous préoccupés par une chose : écouter le chant des insectes. Distinguer, parmi les deux chants des grillons (Matsumushi), lequel est le plus beau. Reconnaître les stridulations de la cigale (Higurashi), imiter les cris du "conducteur de cheval" de la sauterelle-palefrenier (Umaoimushi). Ce bruit métallique de mors de cheval, c'est celui de Kutsuwamushi, le Mécopode. Et cela, ce n'est que la grenouille (Kaeru). Déjà, vingt-trois poèmes ont été composés, tous de cinq vers de 5,7,5,7 et 7 pieds.

  Le lendemain, pour la quinzième nuit, vous serez seul : une belle geisha vous attend dans une petite île que très peu connaissent. On y accède par un gué, au jusant, à mi-marée, et vous n'y restez que le temps de la marée basse : ceux qui connaissent l'île Callot à Carantec voient ce dont il s'agit. Si vous laissez le flot vous piéger, dieu seul sait vers quels oublis et vers quelles létargies cette Calypso saurait vous entraîner. Vous regarderez la lune (faire "tsukimi"), vous offrirez à l'astre de Séléné, sur un petit autel, douze boules de riz ("tsukimi dango" 団子 ) parfaitement rondes et parfaitement blanches. La belle en robe de satin cherchera à reconnaître le lapin qui détache son ombre sur le globe lunaire, et de son doigt de princesse elle tracera le contour de l'animal en train de piler au mortier le riz : " il est en train de préparer les motshi, les gâteaux de riz de o-tsukimi !".

                    DSC07262

http://jessicawilhide.wordpress.com/category/japanese-food/

  Vous vous regarderez d'un air entendu, et vous composerez un kyôka à double sens sur ce lapin aux occupations équivoques. Puis, elle disposera dans un vase, afin que tout soit fait selon la tradition, les tiges de Susuki (miscanthus sinensis) : elle le fera avec tant de savoir-faire que le bouquet ressemblera à une calligraphie disant : "sous la lune, maintenant, si tu veux" . L'obi du kimono sera dénoué, et aussi la ceinture de dessous. Elle fera à la lune le plus bel hommage, celui des contours de sa candide nudité. Ce sera marée de vives eaux, puis l'étale des humeurs et du sang. Enfin elle montrera  du doigt, trop tôt, mais en riant, une vieille estampe représentant un coq (Niwatori), pour faire allusion au petit matin. Elle dira : "vite, la marée va monter", et elle refermera sa porte derrière vous. L'eau du gué sera agréablement fraîche, pas si haute encore, puis la barque remontrera la rivière.

  Si vous êtes une lectrice, ce sera votre amant que vous rejoindrez ainsi sur l'île, et, en repartant, comme Charles Swann qui, après avoir effeuillé l'orchidée de la robe d'Odette, utilisait l'expression "faire catleya", vous garderez comme un secret ce que veux dire, pour vous, "faire o-tsukimi", "o-tsukimi tsuto", "regarder la lune à marée basse".

  Chez vous, plus tard, vous écrirez Shioi no tsuto, "Souvenirs de la marée basse." Le plus beau des poèmes que jamais la nouvelle lune de chûshû (中秋の名月 Chusyu no Meigetsu ) inspira depuis l'époque Heian aux amateurs de saké, et le plus beau coquillage depuis Utamaro.

   Et vous laisserez, bien-sûr, la mer monter sur le sable, et en effacer

jusqu'au souvenir.

 

 

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Published by jean-yves cordier
15 janvier 2013 2 15 /01 /janvier /2013 22:00

 

  Le blogueur de mon type n'a pas peur du ridicule.. N'étant pas lu, s'ingéniant à rebuter l'âme oiseuse ou égarée par un moteur de recherche (l'essentiel des cinquante visiteurs quotidiens  qu'il lui échoit d'héberger quelques minutes), il plonge sans scrupules dans des souvenirs qui ne regardent, mais fixement, que lui.

 Il y a des choses que l'on ne peut confier qu'à soi-même, trop certain d'être incompris ; tenez (ou tiens, car j'aime à me tutoyer), les entremets franco-russe.

  Pour paraphraser Mikhail Boulgakov, je dirai  qu'à ceux qui n'ont jamais porté une casquette FRANCORUSSE, "je n'ai rien à raconter sur le sujet : de toute manière, ils ne comprendraient pas. Quand à ceux qui ont vécu l'aventure, je préfère ne pas leur en rappeler le souvenir*". 

* Récits d'un jeune médecin, Livre de poche, p.7

 

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  J'aurais tort d'alléguer, pour justifier de l'apparition de cette image en prologue d'un article sur Utamaro et ses Souvenirs de la marée basse, les algues japonaises qui, sous le nom d'Agar Agar, font, avec la vanille, l'essentiel du succès de cette poudre  qui, mélangée par la ménagère au lait bouilli, lui font un désert épatant en un tour de main.

   Mais si je pose devant le photographe dans cet élégant déshabillé, c'est que je reviens de la plage ; de la plage à marée basse.

 Et des souvenirs de marée basse, justement, j'en ai : il me suffit de descendre un raidillon vers la Vallée des Peintres. Tout est dit.

Car l'authentique,  le seul souvenir de la marée basse, ce sera celui-là:

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  Tout le reste est flou, sauf, peut-être, la bouée-canard de mes premiers bains, et mon slip en tissu-éponge jaune pipi.

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  Et puis, incontournable image, le pélerinage vers le Mont, au départ de Genêt.

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  J'ai connu d'autres estrans, d'autres rives.

L'angoissant silence de l'étale, lorsque, aux Îles Chausey, le crâne minéral de l'archipel surgit, hirsute, dégouttant, profondément hostile, et menace de demeurer ainsi.

  La coque de mon voilier appuyé sur le quai, un cordage frappé sur le mât amarré à un échelon rouillé, très haut.

 

Les ports désertés comme par un désastre.

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Published by jean-yves cordier
12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 23:09
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Published by Lavieb Aile
12 janvier 2013 6 12 /01 /janvier /2013 23:06
                                     LE CHASSEUR D'IMAGES  
II saute du lit de bon matin, et ne part que si son esprit est net, son coeur pur, son corps léger comme un vêtement d'été. Il n'emporte point de provisions. Il boira l'air frais en route et reniflera les odeurs salubres.
Il laisse ses armes à la maison et se contente d'ouvrir les yeux. Les yeux servent de filets où les images s'emprisonnent d'elles-mêmes.
La première qu'il fait captive est celle du chemin qui montre ses os, cailloux polis, et ses ornières, veines crevées, entre deux haies riches de prunelles et de mûres.
Il prend ensuite l'image de la rivière. Elle blanchit aux coudes et dort sous la caresse des saules. Elle miroite quand un poisson tourne le ventre, comme si on jetait une pièce d'argent, et, dès que tombe une pluie fine, la rivière a la chair de poule.
Il lève l'image des blés mobiles, des luzernes appétissantes et des prairies ourlées de ruisseaux. Il saisit au passage le vol d'une alouette ou d'un chardonneret.
Puis il entre au bois. Il ne se savait pas doué de sens si délicats. Vite imprégné de parfums, il ne perd aucune sourde rumeur, et, pour qu'il communique avec les arbres, ses nerfs se lient aux nervures des feuilles.
Bientôt, vibrant jusqu'au malaise, il perçoit trop, il fermente, il a peur, quitte le bois et suit de loin les paysans mouleurs regagnant le village.
Dehors, il fixe un moment, au point que son oeil éclate, le soleil qui se couche et dévêt sur l'horizon ses lumineux habits, ses nuages répandus pêle-mêle.
                                              Jules Renard, Histoires naturelles.
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Published by jean-yves cordier
6 janvier 2013 7 06 /01 /janvier /2013 14:49

                 

                  N'ajoutez plus Rien!

 

                                                                              I would prefer not to. Herman Melville, Bartleby the Scrivener.

 

  Me promenant dans les couloirs de la faculté Victor Ségalen à Brest, je remarque sur la porte d'un enseignant (ces pin-up sont à la mode) un dessin humoristique où le Dalaï-Lama reçoit un volumineux paquet-cadeau de la part de ses moines et amis : il ouvre et s'écrit : RIEN! Justement le cadeau dont je rêvais !

 


 Rien devient aussi précieux, aussi rare et estimable que, sur notre planète, un coin de ciel nocturne qui ne soit pas éclairé.

 


 Rien est un bien trop recherché pour que je puisse y prétendre, et moi, qui ne délacerais pas la sandale du Dalaï, alla-t-il nu-pied, je ne peux que rêver d'un espace libre. Nos arrière-grands-pères se sont battus pour obtenir des vacances, du temps libre, mais ce fut précisément lorsqu'ils l'eurent obtenu que débuta l'Ére du Grand Remplissage et de l'accumulation des Choses que, par dérision, nous continuons à nommer des "biens".

 


  Nos armoires, dressing, tiroirs, placards de cuisines, bibliothèques et  disques durs dégorgent leurs trop-pleins dans des poubelles et des déchetteries. N'en jetez plus ! Oui, mais, d'abord, n'en ajoutez plus. 

 


  Saturation, encombrement, embouteillage, tout va de pair. [sauf les chaussettes, dont une statistique révèle que le nombre de divorce augmente de 12% par an et concerne 44,7% des couples ; or, l'ostracisme frappe encore les éléments que l'on qualifie de "dépareillés" et que l'on entasse -encore- dans un tiroir au lieu de les qualifier de "famille recomposée" et de les porter sans complexe].


  Des objets de dernière nécessité prennent toute la place qui devrait être réservée aux seuls objets indispensables, car superflus, les œuvres d'art.

 

 

 Les esthètes recherchent pour leurs lectures les éditions à Grande Marge, où le blanc de tête et le blanc de fond occupent à eux deux la même place que le corps de texte, et où le petit fond et le grand fond dépassent en largeur la justification. Ah, atteindre le Grand fond, large, immaculé, gagner les espaces marginaux et s'astreindre à n'y laisser aucune annotation ! 

  Vivre ainsi dans la Marge est un luxe que seule une manchette peut s'offrir. Et se résoudre à descendre en blanc de pied pour vivre en footnote numéroté la solitaire attente de quelque improbable  lecteur nécessite la détermination d'un Bartleby.

Le marginal outrancier pousserait le bouchon en rêvant d'un livre dont les marges seraient tellement larges, tellement hautes que... Non, de la mesure en Tout, même en matière de Rien.

 

N'être Rien, cet absolu est inaccessible ou prétentieux, et pour cette année de l'impair, je ne peux viser que le moins-que-rien, le rien-du-tout, le petit-rien ; un creux paisible de silence et de repos dans l'herbe tendre où viennent s'allonger pour des noces voluptueuses et coquines le rêve avec l'humour. 


Non, l'herbe même tendre est encore de trop. Ôtez, ôtez, il en restera toujours trop.


Seule la pierre, dans son ascèse, peut me combler.


Proue tendue vers le Rien, voguons, sans atteindre l'escale.

 




                           posto 0385c

 

 

 



    posto 0375c

 

 

 


 

    posto 0384c

 

 

           Que peut faire le temps  pour se passer soi-même ? Il suce

de durs fragments de sucre que zèbre la réglisse,

et croque des niniches dans des falaises de schistes.

                                  Puis laisse à marée basse

les bonbons tout collants qui agacent ses dents,

pour boire dans les mares l' eau de Seltz mentholée

qui suinte des rochers.

 

 

 

 

  Si j'avais le temps, moi

j'en ferais autant.

 

 

 

 

 

 

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         posto 0383c

 

Images prises sur le sillon de Camaret (n°1) et sur la plage de Postolonnec à Crozon.

 

  La question du Rien, comme celle du Tout, est préoccupante. Pourquoi vouloir tout ? 

  Et le rien, après tout, pourquoi pas ? 

  Les réponses tombent parfois du Ciel, mais la question, cette fois, arriva de Mer ; solidement amarrée au quai de mes préoccupations, elle brandissait son poing d'interrogation comme celui du capitaine Crochet :

                     

 

                  pourquoi-pas 0479c

 

                         pourquoi-pas 0463c 

 

 

  Il fallait mettre un terme à ces divagations déboussolées et jeter l'encre en terre ferme, cesser d'épisser et de des-épisser cette oiseuse question.

                         pourquoi-pas 0465c

 

pourquoi-pas 0477c

 

  Sinon, on tourne en rond. 

 Si  un cordier cordant veut accorder sa corde, pour sa corde à corder  trois cordons il accorde. Mais si l'un des cordons de la corde  décorde, Le cordon décordé fait décorder la corde. Si  un cordier cordant veut accorder sa corde, pour sa corde à corder  trois cordons il accorde. Mais si l'un des cordons de la corde  décorde, Le cordon décordé fait décorder la corde. Si  un cordier cordant veut accorder sa corde, pour sa corde à corder  trois cordons il accorde. Mais si l'un des cordons de la corde  décorde, Le cordon décordé fait décorder la corde.

 

 

                                                                         Nada fica de nada. Nada somos. (Pessoa)

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Published by jean-yves cordier
22 décembre 2012 6 22 /12 /décembre /2012 12:04

              La vie cachée de J.N. 

 

 Chaque jour, il sortait le document et relisait, ou récitait par cœur, les mots suivants : LIVRET DE FAMILLE. VILLE DE BREST. Extrait de l'acte de naissance n° 4865 Le vingt cinq décembre mille neuf cent qu(tache de café) à 9 heures 14 est né  Joyeux Désiré Exupère NOËL de sexe masculin, à Brest Recouvrance. Délivré conforme aux registres le 26 décembre, l'Officier de l'état civil Fanc'h Quémeneur.

  Il n'avait pas besoin de tourner les pages pour lire à nouveau l'extrait de mariage de ses parents : Époux NOËL Prosper Jules Amédée, né à Brest Quatre-Moulins d'Achille Cléophas Noël, etc...Épouse KERVAREC Hortense Blanche Neige, nèe à Recouvrance, etc..

 Depuis sa plus petite enfance sa vie s'écoulait comme un songe, une vaste rigolade, un bluff auquel personne ne croyait, surtout pas lui.

     Déjà à l'école primaire Sanquer, lorsqu'il confia un soir à ses  copains que sa mère s'appellait Blanche Neige, cela entraina un tel charivari qu'il comprit que la réalité la plus tangible, celle qu'il vérifia le soir même dans ce livret (ce fut la première fois qu'il l'ouvrit), ne devait jamais être avouée.

   La vérité, il avait fini par l'apprendre, c'est que son père, qui était bu ce jour là comme les autres jours, avait trouvé drôle, le jour de sa naissance, de déclarer comme prénom à la mairie, pour le premier enfant de son épouse, celui d'un des sept nains : "Et encore, j'avais choisi "Simplet", mais c'est ce Jean-foutre de Quéméneur qui a refusé !".

  Il se trouva donc affublé dès ses premiers jours de ce nom de Joyeux Noël qui est, on le lui concédra, difficile à porter. 

  Pour chercher les endroits où l'Histoire avait laissé les preuves indiscutables de la réalité de son nom, il se rendait avec un ami au Musée des Beaux-Arts de la ville, où était exposé dans un cadre pompeux et à la place d'honneur la toile la plus célèbre de son arrière-grand-père. 


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    Le tableau était là, incontestable, et "donné par l'Etat". Il demandait au fidèle ami de se pencher sur la petite plaquette, là, à droite, et qui portait le nom de l'ancêtre :

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 "Alors, tu vois ! C'est aussi un J.N."

  Ce qu'il ne voyait pas,l'ami, heureusement, mais ce qui taraudait l'esprit de notre anti-héros , c'était le deuxième prénom de Jules : car le grand peintre, célébré par Baudelaire, l'égal d'Isabey et de Boudin, se prénommait Jules Assez.

  Oui, Jules Assez Noël. Indiqué dans tous les dictionnaires. Une sorte de fatalité, un roman familial, certainement un très vieux secret de famille qui jetait sa malédiction répétitive sur la succession de ses membres. Dans la famille, on rigolait en disant "il aurait du s'appeller Juste!"  "Oui, Juste Assez, Ah Ah Ah !"

  Mais quand un jour, excédé de colère après avoir été lui-même persécuté pour son joyeux prénom, J.N. s'écroula sur une chaise et martela la table du salon en criant Assez, assez, assez !, le guéridon se mit à danser sur ses petits pieds de cuivre et on entendit distinctement une voix d'outre-tombe qui disait "Oui ? C'est pour une huile ? Un portrait ?". Ce n'était pas drôle, vraiment.


  Avec la malédiction du prénom, le gène fatal portait aussi des séquences d'ADN qui procuraient le goût de la peinture, et ses oncles et tantes taquinaient les pinceaux avec, ma foi, assez (si j'ose dire) bon goût.

  Dans la famille Noël, ça peint, ou ça s'enguirlande.

  Parmi eux, il y avait le mystérieux peintre "R. Noël" dont l'œuvre n'était pas exposée au Musée des Beaux-Arts de Brest, rue Neptune, mais un peu plus bas, au Château, dans le prestigieux cadre du Musée de la Marine. C'était une huile sur toile datée de 1899 représentant "un croiseur classe Suchet en mer". (Le Suchet de 1893 est un "croiseur protégé", type bientôt abandonné au profit du croiseur cuirassé).

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    R. Noël  semble avoir eu aussi des difficultés avec son prénom puisqu'aucun dictionnaire, aucune revue spécialisée ne parvient à lever l'anonymat de ce "R point" Noël. Certes, on connaît d'autres toile du maître, dont l'une (50x40 cm) représente le Sfax, le premier des croiseurs protégés de la Marine, un trois-mâts-barque de 1884. Une gouache représente un Vaisseau au mouillage,  une huile sur toile de 27 x 39  dépeint un Cargo dans une mer forte, et toutes sont signées R. NOËL en lettres rouges. R. Noël accompagne sa signature d'un tréma sur le i, mais nullement d'une ancre de marine, ce qui indique qu'il n'appartient pas aux peintres aggrées de la Marine. D'ailleurs aucun peintre de la Marine, peintre titulaire ou peintre agréé, ou aucun peintre de marines ne répond à ce signalement, et on ne peut le confondre avec Pierre Noël (1903-1981, peintre titulaire, ni avec Jean Alexandre Noël (1752-1834) élève de Vernet et de Sylvestre (sic), mais qui exposait ses Marines entre 1800 et 1822. C'est qu'on était peintre de marine de Père Noël en Fils Noël, et Jean Alexandre Noël était l'heureux papa-Noël d'Alexis-Nicolas Noël (1792-1871, "il illustra le livre de Dumont-Durville"!), lui-même père-Noël de Gustave Noël (1823-1895). 

  On cite un Noël ornementaliste, dont on cite l'album conservé à la Laurentienne de Florence : catalogue Bandini, LA 2512, Décorations de Noël, 25 planches, velin in-8°.

  L'air de rien, cet R. de Noël est embarrassant pour désigner un peintre, et fut sans-doute abandonné au profit de "air de Noël", d'usage plus courant mais tombé en désuétude sur les huiles sur toile. D'une manière plus générale, il n'y a désormais plus aucun peintre de marine dénommé Noël depuis le décès de Pierre Noël, et ce fait inhabituel est désigné par les historiens de l'art sous le nom de "vacance de Noël", bien-entendu. 


 

 

     Cette vacance est d'autant plus surprenante que l'usage du pinceau remplaçait, chez les Noël, celui de l'appareil photo. On ne se souvenait plus qui, dans la famille, avait peint par exemple le mariage de ses parents, dans la chapelle de Recouvrance trop petite pour l'assistance : Prosper portait encore la barbe, et Maman, qui méritait vraiment de s'appeller Blanche Neige, au lieu de suivre le Suissecherchait à savoir si tante Camille avait trouvé une place !

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Voici par exemple la toile que la tante Josèphe peignit le jour de l'anniversaire de son neveu :

 

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  C'est peint devant la fenêtre de l'appartement, rue des Remparts , avec la Penfeld en contre-bas, et des coquelicots inventés "pour mettre de la couleur". 

  On dessina aussi, pour ses six ans, un plan de sa maison, avec des petits bateaux, qu'on lui offrit :

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Le tableau qu'il préférait était celui-ci, une vue du môle, du haut duquel il sautait avec les copains, ignorant fiérement les filles qui, elles-mêmes, feignaient de ne pas les voir. Un jour, hélas, il prit, devant elles, une bûche si mémorable qu'on en parle encore : "Eh, tu t'souviens de la bûche de Noël ?".

 

 

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  Somme toute, entouré par les muses, il vécut heureux, Joyeux... jusqu'au jour où son père décida qu'il les avait bien vu et qu'il prendrait le large. Il les quitta sans crier port, embarqua sur le premier navire, et voilà. 

  C'est lui, on s'en souvient, qui lança la mode, dite "du Père Noël", des bonnets rouges que beaucoup d'autres marins brestois adoptèrent, délaissant le chapeau rond :

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  Il envoyait des nouvelles régulières, citant ses embarquements, ses escales, 

      "Papa Noël sur le Carnot, cuirassé d'escadre au mouillage en Afrique du Nord. Apprends tes leçons et tu deviendras comme ton père."

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 "Route terre vers Lisbonne : Papa Noël sur le Caravellas, cargo à propulsion mixte des Chargeurs Réunis. Travailles bien à l'école, je t'envoie un cadeau. Kenavo."

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  "Ton papa sur le Saint-Simon, paquebot à hélice. Vous me manquez, j'ai les boules, Noël "

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  Son fils en était si fier qu'il collait, sur un grand cahier, les images des bateaux de Papa Noël :

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  Pendant longtemps, il fut mécanicien sur la Sirène ; Et Joyeux, pourquoi, pourquoi pas, croyait que cela s'écrivait Six rennes, et suivait tout autour de la terre les voyages de son père Noël et de ses six rennes. 

   Sa mère lui disait "écris à ton père", et il lui écrivait. Mais lorsque, pendant son Service Militaire, il essaya de faire comprendre au Quartier-Maître qu'il ne se foutait pas du tout de sa gueule en prétendant qu'il écrivait encore, à son âge, à son Papa Noël, il comprit une fois de plus que les ennuis, décidément, c'était toujours pour lui.

  Un jour, une amie de sa mère lui révéla que tous les bateaux de son père venaient, en réalité, du Musée de la Marine où son père, qui s'était remarié, était gardien.

  Il devint méfiant ; il ne voulut plus croire à rien, et un matin du 25 décembre, lorsqu'il trouva dans son godillot un gros paquet amené soit-disant par un collègue de La Sirène et marqué "de la part du père Noël", il refusa, absurdement, de l'ouvrir.

 

 Il préféra le cadeau de Tonton Jean, encore peint de sa fenêtre : 

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   Un jour où il avait invité ses amis à regarder le feu d'artifice du 14 juillet, il eut l'idée de leur envoyer une photo de son appartement, pour les aider à trouver l'adresse ; et il ne comprit jamais pourquoi les gens arrivaient avec un curieux sourire en lui disant "Merci pour tes voeux !"

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Nota bene

Certaines œuvres d'art détournées pour ce petit conte proviennent du Musée des Beaux-Arts de Brest : on reconnaîtra :

Julie Delance-Feurgard, Le Mariage, 1884.

 Maurice Denis, Mère à la fenêtre ouverte, 1889.

Maurice Denis, le Port de Brest vers 1932.

Ferdinand Perrot, La barque de Plougastel, 1837.

Fernand Bruguière, Port de Doëlan, 1910.

 

  Les Marines proviennent du Musée de la Marine, toujours à Brest :

Anonyme, Le Caravellas, , construit en 1893 par les Ateliers et Chantiers de la Loire

Edouard-Marie Adam (Brie-Comte-Robert 1847-Le Havre 1829, Le Saint-Simon, paquebot à hélice, 1882. 


 


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  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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