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22 juin 2014 7 22 /06 /juin /2014 21:57

L'Azuré du Genêt Plebejus idas (Linnaeus, 1761) à Crozon.

Lieu : au sud-est de Saint-Hernot.

Date: 22 juin 2014.

Guide et identification : Mikaël Buord.

   Sur le sentier côtier, nous découvrons un rassemblement de petits papillons bleus (azurés) puis, les ayant identifié comme Plebejus idas ou Azuré du Genêt et connaissant la myrmécophilie (symbiose avec les fourmis) de cette espèce, nous découvrons deux dômes de fourmilières. Les mâles bleus évoluent sur un périmètre d'une vingtaine de mêtres autour des solariums des fourmis. Nous ne parvenons pas à assister à une ponte des femelles bien plus discrètes.

Les fourmis en question appartiennent soit au genre Formica (comme ici) soit au genre Lasius.


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Le mâle :

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 la femelle :

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Détail : les ocelles marginales des ailes postérieures sont pupillées d'un bleu métallique ; les lunules submarginales oranges sont coiffées de lunules noires sagittées (en triangle comme la pointe d'une flèche.)

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azure-du-genet-Plebejus-idas-0373c.jpg

 

Cette femelle, qui recherche sans-doute les signaux d'un lieu de ponte, abaisse et incurve son abdomen tout en agitant et faisant tournoyer  sa trompe comme si elle fouettait l'air.

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Published by jean-yves cordier
22 juin 2014 7 22 /06 /juin /2014 21:25

L'Azuré du Thym Pseudophilotes baton  (Bergsträsser, 1779) à Crozon.

 

Lieu : entre Kerdreux et la plage de la Palue.

Guide et identification : Mikaël Buord.

Date : 22 juin 2014.

Origine et histoire du nom ? Voir : Zoonymie du papillon l' Azuré du Thym ou Azuré de la Sarriette, Pseudophilotes baton (Bergstrasser, 1779)  


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Published by jean-yves cordier
9 juin 2014 1 09 /06 /juin /2014 11:19

L'église de Plouedern (29) après son sauvetage de l'incendie de 1974.

 


  Cette visite est un retour. En 2011, j'avais été estomaqué par la découverte des blochets superbement sculptés et peints qui m'avaient lancés leur muet appel :  Formidable ! Les blochets de l'église Saint-Edern à Plouedern.

  Je compris qu'ils témoignaient d'un drame, l' incendie de mai 1974 qui avait détruit tout le mobilier et la charpente. "Seule la statue de Saint Edern chevauchant un cerf au sommet du baptistère a été préservée !". Si je compris aussi qu'ils résultaient d'une formidable aventure, celle du sauvetage d'un monument historique contre l'évidence du désastre, je ne réalisais que tardivement que ce sauvetage avait été mené avec un panache éblouissant, puisque l'architecte Gérard Cailliau et l'économiste-métreur Gérard Jamain avaient réussi non seulement à rendre au culte l'église paroissiale sur le seul budget de l'assurance en janvier 1978, mais encore à compenser l'irréparable perte des œuvres d'arts du passé par un luxe de décoration et par une ambition dans le choix des artisans et artistes. Attirés dans la commune du Léon , le peintre décorateur Paul Mériguet et les compagnons du Tour de France, ou le sculpteur Vincent Fancelli mirent à la disposition des 2250 Ploudernéen, et bien moins de paroissiens les techniques qu'ils déployaient habituellement à Versailles ou dans les palaces princiers. Leur savoir-faire rejoint celui du landernéen Roland Doré, auteur des plus beaux calvaires bretons, qui a laissé ici en 1641 une vasque baptismale.

 Je veux donc leur rendre hommage en consacrant à leur travail une description détaillée. Mais l'exigence de perfection brille souvent par l'absence, quasi indétectable, d'imperfections. J'en donnerai un seul exemple. Alors que, dans tant d'églises renommées, j'ai photographié les statues et les sablières dénaturées par des câbles électriques noirs ou blancs fixés par de gros cavaliers, des boites électriques grises, des projecteurs ou des hauts-parleurs, ici, ce matériel n'apparaît nulle part. Les boites électriques, lorsqu'elles sont décelables à mon téléobjectif ont été peintes dans le même bleu que la voûte. 

Non contents d'égaler en talent leurs prédecesseurs, ils  en ont adopté aussi l'art des facéties, des  signatures dissimulées et des clins d'œil reservés aux curieux. Ces professionnels se sont bien amusés.

Mais trois ans plus tard, l'humidité suintant des murs décollait la peinture de la partie basse des murs, et les boiseries de la sacristie révélaient la présence de la mérule. L'architecte fut condamné pour avoir omis  de veiller à organiser une ventilation suffisante.

  Cette visite est donc une méditation sur la perfection dans l'idéal du Beau, qui reste toujours hors d'atteinte ; sur les conflits qui animent toutes les collectivités ; sur le temps qui passe et qui effaçait déjà les noms et les visages des acteurs de ce sauvetage ; sur les destructions et les ruines, et sur les œuvres d'art qui disparaissent ; sur les églises, cœur jadis ardent des paroisses au centre des villages, et cœur inanimé et déserté aujourd'hui, dans lesquelles je reste pendant des heures sans voir entrer une seule personne. Visite qui mêle amertume et émerveillement, et où les notions de patrimoine et d'héritage (tiens, c'est le nom de la société de Gérard Jamain), de la page qui se tourne et de la page du passé qui se lit encore comme un palimpseste par ceux qui s'y attachent, ne m'ont pas quitté. 

Je remercie les deux interlocuteurs qui m'ont aidé à retrouver les traces d'un passé pourtant bien proche et à mettre un nom sur les blochets : Gérard Jamain et Hervé Duhot. Merci aussi à Jean-Yves Le Roux pour ses messages.


 

 

 

 

 


blochets 4917c

 

 

 

 


         L'ÉGLISE VUE DE L'EXTÉRIEUR.  

 L'aiguille du clocher, de type léonarde avec ses balustres de pierres est ajourée et lui donne une silhouette élancée.

 

               139c

 


  

 

Sa façade sud :


140c

 

 

Son calvaire ou croix de cimetière:

"La croix du cimetière, du Moyen Âge, repose sur un socle cubique à degrés. Son fût rond porte un croisillon court sur lequel une Vierge et saint Jean encadrent une Vierge de Pitié. La croix du crucifix a des branches rondes et se termine par des fleurons carrés." 

 Voir Atlas des Croix et calvaires du Finistère n°1802. 

133c

 

Le portail d'entrée nord.

 Le porche nord de type classique et monumental en granit à gros grain est de style Renaissance comme le confirme la date sculptée de 1609 sur la frise. A cette date, la Bretagne est réunie à la France depuis plus de 70 ans, et Henri IV règne. La nouvelle construction a donc débuté avec la fin des guerres de religion et le retour à la paix.

Les autres dates relevées sont celles de 1626 ( au sud, au dessus d'une petite porte Renaissance), de 1679 et de 1680 sur la sacristie.

 "L'entablement de la porte d'entrée extérieure est soutenu par des colonnes doriques composites et amorti par un fronton. Au-dessus, attique supportant une niche à coquille et fronton cintré brisé, volutes très accusées. Sur le rampant du gable, décoration  en S. Ce porche est voûté sur croisée d'ogives, il n'y a pas de niches pour des Apôtres." (Couffon 1981)  

  Il porte paraît-il une statue de saint Edern (Topic-topos) mais j'y reconnais pour ma part (et René Couffon comme moi)  saint Pierre, pieds nus avec sa clef dont le penne est brisé : celui-ci ne serait-il pas le patron de la paroisse plutôt que saint Edern ? Pourtant ce saint, qui a donné son nom à la paroisse de Plou-edern (et à celle de Lann-edern), ermite d'origine irlandaise débarqué au IXe siècle près de Douarnenez, est bien le patron reconnu de l'église.

 

 

                    143c

 

La porte d'entrée nord .

                 138c

 

L'inscription de fondation de la sacristie :

Au dessus d'une fenêtre sud de la sacristie, on lit :

M : H : QVEFELEAN : RECT

IAC : MORRI : PIER : COGN : FABRIQVE

               1680

(le relevé de Couffon et le Bars comporte deux erreurs)

"Notez le N rétrograde.

Selon le site d'André Croguennec, * "la signature du recteur Hervé Quefelean  apparaît sur les BMS de 1671 à 1677 à Pont-Christ et il est désigné comme curé dans un aveu du 23/4/1671. En 1677, il quitte Pont-Christ pour devenir recteur de Plouedern." Il succéda donc à Allain Riou que nous allons découvrir bientôt.

http://andre.croguennec.pagesperso-orange.fr/cures.htm    

134c

 

 


 

      L'ÉGLISE VUE DE L' INTÉRIEUR.

Je débuterai par les éléments les plus anciens, qui ont survécu, après restauration, à l'incendie de 1974.

Les fonds baptismaux.

La chapelle sud abritait jadis un retable du rosaire.Elle accueille aujourd'hui, devant un enfeu et un lavabo au bel encadrement de pierre, la cuve des fonds baptismaux, signée du sculpteur landernéen Roland Doré et datée de 1641. Elle a perdu son baldaquin hexagonal sur colonnes feuillagées et seule la cuve de granit subsiste, rénovée en 1977.

.

  

028cc

 

La cuve porte l'inscription suivante : 

A : RIOV : REC[T]EVR : I : K[ER]DELENT : H : APERVE : FABRIQVE : LAN : 1641 : R : LE : DORE : FECIT.

 

Le sculpteur et architecte du roi Roland Doré, né à Landerneau, est  décédé à Plouedern en 1663 (acte de décès retrouvé). Sur l'ensemble des très nombreuses œuvres de cet artiste en granit ou en kersanton, ce dernier n'a laissé sa signature que sur sept d'entre elles, dont cette cuve ; témoin indirect de son attachement à la paroisse ou à son recteur.

 

Le recteur Allain Riou apparaît comme parrain dans plusieurs actes de baptême, notamment celui d'Anne Rolland ( 17 janvier 1641 / premier mai 1663), fille d'Alain Rolland et de Marguerite Le Hir : Anne Rolland épousa le 18 mai 1660 Yves Kerdelant (10 avril 1634-18 août 1709). Nous ne pouvons pas considérer que cet Yves Kerdelant est le fabricien en fonction en 1641, date de la réalisation de cette cuve, puisqu'il avait alors 8 ans. Son père se prénommait Fiacre.

Allain Riou fut aussi parrain de Julien Barz, fils de Mathieu Barz et de Janne (le) Dantec et né le 28 octobre 1639, comme il fut le parrain de Alain le Guen, né le 4 août 1650.

Le patronyme Apperé (Abhervé) est attesté à Plouedern par les généalogistes (Yves Abhervé 1615-1676 père de Jean Abhervé 1642-?)

           043c

 

              fonds-baptismaux 4901c

      Nota bene :

 

 

Autre inscription (détruite).

 Le baldaquin en bois polychrome, brûlé en 1974, portait l'inscription : "M. H. MILBEAV. R. Y. KDELANT. F. T. Y. BOVRHIS. FABR. 1661."

Cette fois-ci, il s'agit bien de Yves Kerdelant (1634-1709)

 

 



 

Les pierres tombales.

Deux pierres tombales très semblables avec leur bénitier en forme de cœur sont préservées, mais leur inscription n'a pas été relevée à ma connaissance. La première, bien conservée, se trouve dans la chapelle sud près de la vasque baptismale. J'y lis ceci (sous réserve):

ICI GISE

LE CORPS

DE ANNE

LE GOF E

POUSE DE

JEANNARIE LE

COR.... [CORBERE? COIBERCE]

VI DECEDE

LE 9 7BRE

1638 PRIEZ

DIEU POUR

EL       LE 

La date 1638 est logique par rapport au style et aux autres dates de l'église, mais le chiffre 6 est douteux à la lecture.

Les généalogistes mentionnent Anne Le Goff, de Plouedern, mariée le 6 novembre 1684 avec François Kerdelant (fils de Yves Kerdelant, cf supra).  Ce n'est donc pas notre défunte, mais cela atteste le patronyme Le Goff dans la commune.

056c

 

059c

 

La seconde pierre tombale se trouve sur le seuil de la porte d'accès à la sacristie, sur la façade sud : elle est si usée que sa lecture supposerait un calque ; je suppose qu'il s'agit de l'époux:

                         124c

 

Les sculptures.

1. Saint Guénolé.

Placé devant un enfeu vide du coté nord, l'abbé de Landévennec tient un livre et sa crosse. J'ai tout lieu de croire que la pierre qui lui sert de support a été taillée et sculpté par le l'artiste Mourad Horch. L'inscription signifie bien sûr "St Gwenolé", mais dans une calligraphie qui détourne le rôle signifiant des mots pour faire danser les lettres et les spiritualiser. Ce qui est parfaitement adapté à un personnage qui nous présente un livre saint.

 

081c

                    095c

 

 

2. Saint Laurent.

  Ce saint dont l'attribut est le grill sur lequel il fut brûlé lors de son martyre est bien placé pour nous faire mesurer l'épreuve terrible que traversa l'église de Plouedern en 1974, et le miracle que fut se reconstruction. On considérerait bien facilement aujourd'hui que la décision de relever les ruines calcinées allait de soi. Pourtant, d'autres églises, après de tels sinistres, sont livrées par leur maire à la pelleteuse des démolisseurs.

                sculptures 4891c

 

3. La sainte et l'ange.

Bas-coté sud. Est-ce une Vierge ? sainte Marthe ? une autre sainte ?

                    sculptures 4945c

sculptures 4948c

 

 

4. La porte de l'entrée principale coté nord. Pierre et Paul.


                 116c

 

 

                  115c

 

                              106c

 

5. Les têtes d'anges de la porte ouest.


137c

 

6. La cuve octogonale  de 1679.

 

                       sculptures 4807c

 


7. Bénitier à godrons.

Bénitier en forme de cuve hexagonale, décoré de niches ornées de coquilles et d'accolades formées de galons plats, XVIe siècle. (Couffon et le Bars)

sculptures 4809c

 

8. Bénitier à godrons et anges.

Le Nouveau répertoire de Le Bars et Couffon le décrit comme un "bénitier daté 1679 et surmonté de deux personnages tenant une massue".

                    sculptures 4810c

 

 

LES ŒUVRES CONTEMPORAINES (1976-1978).

 


L'autel du Saint-Sacrement de Mourad Horch.

Chapelle du chevet à gauche du chœur .

En dessous du tabernacle de bronze orné du calice et de l'hostie, une inscription de la même calligraphie que celle du support de saint Guénolé est une paraphrase le l'évangile de Luc 24 :13-31 consacré à la rencontre des pèlerins d'Emmaüs avec le Christ ressuscité :

Jésus rentre pour rester avec eux il partage le pain ils le reconnaissent.

Les quatre symboles des évangélistes (tétramorphe) encadrent l'autel : le lion et l'aigle en haut, et l'homme et le taureau en bas. Ces derniers sont taillés dans une pierre noircie au feu : rappel émouvant de l'incendie.

 

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Les vitraux de l'atelier d'Hubert Sainte Marie.

Les anciens vitraux.

Selon le blog du maître-verrier Jean-Pierre Le Bihan, en 1614 un bref état des prééminences du marquisat de Carman dressé par Charles de Maillé, marquis de Carman (mort en 1628) et contenant le relevé au lavis par Jean Bourricquen de 72 verrières du Léon  donne des indications sur les vitraux existant au XVIIe : Dans la baie du chevet, trois lancettes à plein cintre et six soufflets accompagnés de cinq écoinçons portaient le blason Carman du Chastel. Ils étaient consacrées à la Fontaine de Vie (Le Christ sur la croix, dont le sang remplit une vasque où se baignent huit personnages) avec la Vierge et saint Jean en haut des lancettes latérales, et Saint Germain évêque présentant un donateur (ou « avec un personnage le suppliant selon le Bihan) et saint Antoine de l'autre coté assis, lisant et accompagné de son fidèle cochon à clochette. On lisait leur nom Seint Germai et Seint Anton.

 

la vitre du coté de l'épître avait deux lancettes à plein cintre et celle du pignon sud deux lancettes et deux soufflets.

Les Carman du Chastel étaient seigneurs des Granges, à Plouedern.

I. Baie 1 : l'Eucharistie.

Signature HSM Quintin 1976. Placé immédiatement au dessus de l'autel de Mourad Horch, ce vitrail est organisé en trois registres : la multiplication des pains en bas, la Cène au milieu, la rencontre d'Emmaüs en haut, trois références au partage du pain. Les ajours du tympan montrent que le pain et le vin sont le fruit de la terre et du travail des hommes.


                      vitraux 4801c

 

 

Baie centrale ou baie 0.

On voit le Christ au nimbe crucifère bénissant des pêcheurs qui font cuire leurs poissons , ou qui trient leur filet, ou apportent des mannes remplies de sardines ou de langoustines ; un peu plus haut, le village et son clocher à droite, le port et ses voiliers à gauche. Ce sont les images de la pêche et du poisson, le Christ ICHTUS symbolisé par un poisson dans l'Église primitive, les récits évangéliques de Luc 5:1-11 de la pêche miraculeuse au lac de Génésareth, lac de Tibériade de Jean 6:1 avec la métaphore des apôtres "pêcheurs d'hommes", etc. En même temps, bien que Plouedern ne soit pas une commune maritime et que sa richesse ait été bâtie sur l'agriculture toilière, cela évoque la Bretagne et son activité littorale.

                     vitraux 4797c

 

 

Baie 2. Scènes de la vie de Marie.

Marie tricotant tandis que le petit Jésus aide son papa. Ces vitraux (comme ceux de J.P. Le Bihan) ont un coté puéril évoquant des illustrations pour la jeunesse catholique des années 1950-1970 parfois agaçant.

                        vitraux 4793c

 

 

 

 Baie 6. Chapelle sud. Baptême du Christ Pentecôte et Assomption.

             vitraux 4802c

 

 


Détail : signature :

vitraux 4953c

 

 

Baie 4 et 8, 3, etc. : jeux de lumière.

                           vitraux 4804c

 

    vitraux 4796c

 

                         102c

 

                      098c

 

La nef centrale et sa voûte .

      " Les grandes arcades en plein cintre de la nef pénètrent directement dans les piliers cylindriques ; les nefs latérales sont aussi lambrissées en berceau." (Couffon, 1981)

017c

                     020c

 

              005c

      La voûte est peinte en bleu constellé —pléonasme— d'étoiles d'or et frappé de monogrammes. Le monogramme christique IHS avec une croix et un cœur est classique. On en Ltrouve le commentaire suivant :

Le monogramme IHS qui représente le nom de Jésus est parfois interprété de plusieurs manières, et notamment en latin comme Iesus Hominum Salvator. En réalité il s’agit d’une abréviation en trois parties du nom de Jésus, dans laquelle le I et le H sont les premières et le S la dernière lettre du nom écrit en grec IH-SOUS. Le H est la lettre grecque ETA et se prononce E, ce qui est important pour identifier les lettres du monogramme. Souvent un petit trait horizontal surmonte les trois lettres indiquant qu’il s’agit bien d’une abréviation. Plus tard la lettre centrale deviendra même une croix. http://www.jesuites.com/2011/09/ihs/

Le monogramme MÃR appartient bien-sûr à Marie. On peut aussi le lire comme Auspice Maria, "sous la protection de Marie".

Mais que signifie J~MP ? Dans la convexité du jambage médian (en V) de la lettre M se distingue, à peine, une trace qui, en vision rapprochée, correspond aux quatre chiffres 1978. J'ai la conviction qu'il s'agit là de la signature rusée du peintre. 

 D006c

 

On admirera les moulures ou nervures peintes très soigneusement en noir, ocre-rouge, blanc et gris pour obtenir cet élégance rare.

 

 

009c

 

Le lustre est remarquable : je le qualifierai de "tout à fait dans le goût de l'époque".

 

010c

 

      Les anges ont-ils abusé des fruits du jardin d'Eden, qui ne leur est pas fermé, pour obtenir des joues si mûres ? Ou bien — on le chuchote— le peintre a-t-il saisi en son émoi les couleurs des belles villageoises avec lesquelles il croquait le fruit défendu ? Certaines, levant les yeux vers le ciel, y liraient le reflet de leurs fautes, mais n'en pleureraient pas.

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anges 4846c

 

anges 4851c

 

 

 

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Le portrait d' Anne-Marie Favé ?

  Il est évident qu'il s'agit ici, non plus d'un ange plus ou moins ému, mais d'un portrait. On me certifie qu'il faut y reconnaître Anne-Marie Favé, qui occupera le mandat de maire divers droite "de 1971 à 1995" selon Wikipédia (tines, Hervé Ropars n'est pas mentionné). Peu importe pour mon propos, mais nous voyons que nous avons affaire à un peintre facétieux dans la ligne droite des artisans médiévaux et Renaissance, pour qui les sablières, les gargouilles et autres lieux haut situés, ou au contraire les miséricordes des stalles capitulaires permettaient de laisser libre cours à leur fantaisie irrespectueuse. 

                             anges 4819c 

 

 

Les bas-cotés de la nef. 

 

Les premières photographies du chantier montrent que les blochets (" terme de charpente, se dit d'une pièce de bois placée horizontalement et formant une jambe de force avec le pied d'un arbalétrier") se trouvaient dans la nef elle-même, surplombant le chœur. Or, ces pièces de bois sont sculptées pour représenter en demi-nature les divers intervenants du chantier de construction, qui tiennent sous les combles leur réunion de chantier. On y trouve le maire en face de l'architecte, le métreur près du recteur, le sculpteur de bois devant le sculpteur de pierre, le couvreur et le charpentier près des flammes menaçantes du chauffagiste, au total quinze marionnettes croquées par Vincenzo Fancelli et peintes par Paul Mériguet. Ce dernier nous toise de là-haut en tenue d'Adam.

N.B : les identifications sont proposées, mais des erreurs sont possibles.

                 062c

 

 

 

 

I. Les blochets du coté nord.

 

1. Josset, l'électricien.

Attribut la lanterne. Peut-être Mr JOSSET, directeur technique de l' entreprise d'électricité CADIOU.

                      blochets 4893c

 

 


2. Hubert SAINTE MARIE, le maitre-verrier.

Attribut : le panneau de verre mis en plombs.

C'est bien Hubert de Sainte Marie (1923-1991) (Entreprise HSM de Quintin) qui a réalisé les vitraux, mais ce n'est pas forcément son portrait, car le maître-verrier avait de petites lunettes cerclées comme Tryphon Tournesol. Néanmoins le sculpteur a ôté les lunettes de tous ses modèles.

                     blochets 4895c

 

3. Paul MÉRIGUET, le peintre.

 attribut : le pinceau.

Identification : Paul Mériguet  "le peintre de toutes les têtes couronnées" : voir le site de l'Atelier Mériguet-Carrère  qui donne une haute idée des techniques qui ont été employées sans-doute à Plouedern. Cet atelier créé en 1960 est dirigé aujourd'hui par Antoine Courtois, qui a pris le relais de Paul Mériguet 

 Notice nécrologique de  Paul Mériguet en 2014 dans La Nouvelle République : "Après son CAP de peintre, passionné d'art et d'histoire ancienne, il réalise des décors de théâtre pour la troupe de son village. A 30 ans, il crée un atelier de décoration à Paris. Il avait de par son savoir-faire une réputation internationale. Spécialiste du trompe-l'œil, des dorures, des cuirs gaufrés, il a travaillé à la restauration de monuments historiques nationaux étrangers.

Il a participé en particulier aux travaux de décoration et de restauration du château de Versailles, des cathédrales d'Amiens et de Beauvais, de l'opéra Garnier, du palais de l'Élysée et l'hôtel Matignon. Son atelier compte encore aujourd'hui 120 compagnons amoureux du travail bien fait.
A Preuilly-sur-Claise (Indre-et-Loire) dont sa femme est originaire, il a été l'instigateur de la résurrection de l'antique foire au safran (qui aura lieu cette année le 15 février). Il est également un des précurseurs de la culture du chêne truffier en Touraine. 
Il était chevalier de la Légion d'honneur, chevalier national du mérite, chevalier des arts et lettres et chevalier du mérite agricole. Il est décédé samedi 18 janvier [2014] dans sa 83e année."


                     blochets 4920c

 


4. Le métreur : Gérard JAMAIN.


Attribut : le bon vieux mètre pliant jaune en bois.

Gérard Jamain, alors Gérard JAMAIN, Métreur Monuments Historiques 6bis rue Louis Barthou Rennes et actuellement Ingénieur-Conseil et économiste du patrimoine : il a fondé en 1986 "HÉRITAGE", bureau d'études spécialisé dans la restauration de bâtiments anciens.

Voir sa Notice biographique professionnelle d'où je tire ce portraits.

p-gj.jpg

 

                              blochets-4916c.jpg

 

5. Non identifié.

Attribut : le calepin et le stylo. Inscription NISAT PAIX COMM/UN. Un représentant de la commission diocésaine d'Art Sacré CDAS ?? 

                              blochets-4914cc.jpg

 

 

6. Le recteur  Jacques MALLÉJAC.

plouedern 5939

 

7. Le menuisier .

Attribut : le rabot ; Peut-être Paul XX, contre-maître d'AMC.

 

                       blochets-4815c.jpg

 

 

8. Le maçon : Christophe GAILLARD, de Bénodet.

 attribut, la truelle.

 

plouedern 5944

 

II. Bas-coté sud.


068c

 

9. Vincenzo FANCELLI, le sculpteur-bois.

attribut la masse et le ciseau .

 "le sculpteur du château de Versailles" : Vincenzo Fancelli, d'Alfortville restaurateur officiel du château de Versailles, est intervenu aussi dans la restauration des 22 stalles de la cathédrale Saint-Pierre de Saint-Claude (Jura) qui avaient été détruites par un incendie en 1983 (près de 200 statues de Jehan de Vitry). 

Vincent Fancelli appartient à une lignée d'artisan ; Otello Fancelli ouvrit d'abord dans les années 1920 un atelier à Pise sur la célèbre Piazza Miracoli, puis s'installa à Paris après la seconde guerre mondiale avec son fils Vincenzo, en se spécialisant dans la restauration et la reproduction de modèles anciens. Ils intervinrent dans la restauration du Musée Carnavalet, de l'Hôtel de Sully, du Château de Chambord, et, sous la direction de Gérard Van der Kemp, dans celle de la Chambre à coucher de Marie-Antoinette à Versailles. Depuis 1985, l'Atelier Fancelli (Paris-New-York) est dirigé par Jean-Pierre Fancelli.

 

                            blochets 4929c

 

 

10. L' architecte Gérard CAILLIAU.

Ses attributs : le compas et le niveau.

 Gérard CAILLIAU, DPLG et ABF, architecte des Bâtiments de France était le maître d'œuvre  -Il est surtout connu pour la réalisation du Pont de Cornouaille à Bénodet en 1972. (Il serait apparenté avec la sœur aînée du général de Gaulle, Marie-Agnès, qui avait épousé en 1910 Alfred Cailliau).

                           blochets 4921c

 

 

 

11.  le couvreur Hervé DUHOT .

Attributs : le toit d'ardoise, et un outil en bois.

Hervé DUHOT, Société Duhot de Landerneau. Il était assisté par Jean-Louis Ropars.

                          blochets 4937c

 

12. L'entreprise de chauffage STEINER.

Attribut : les flammes.

L'artisan responsable du chauffage était Mr STEINER de Ploudalmézeau (S.A Steiner Equipement)

                blochets 4942c

 

 

 

13 : L'entreprise de peinture RAUB, Brest.

Attribut : les pinceaux ; Claude JAOUEN, peintre chez Raub.

                      blochets 4943c

 

 

14.   le charpentier d'AMC Rennes.

attribut : la scie.

Identification : DAVALIS de l'entreprise Entreprise de Menuiserie-Charpente A.M.C. Rennes, ou JULIOT, chef charpente. d'AMC de Rennes ?

 

                       blochets 4938c

 

15. le maire Hervé ROPARS.

attribut : le village : la Mairie de Plouédern était Maître d'ouvrage.

                        blochets 4922c

 

 

 

16. Le sculpteur sur pierre MOURAD HORCH .

Identification : Mr MOURAD-HORCH.  il a réalisé aussi l'autel de pierre de la chapelle nord.

Cet artiste est connu pour avoir sculpté deux lions pour le Palais de Justice de Nantes : ceux-ci ont été déplacés lorsque le Palais fut converti en un hôtel de luxe. Ouest France 19 oct. 2010. A Nantes encore, il réalisa en 1979 la fontaine de la Place Pirmil. L'Ecole des pyramides de la Roche-sur-Yon lui doit un Totem.

                            blochets 4933c

 

 

 

 

 

Sources et liens.

 —  René Couffon et Alfred Le Bars, Nouveau Répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper et de Léon Quimper 1988, en ligne 

 

— (pour info : Barral I Altet, Javier  « Décor peint et iconographie des voûtes lambrissées de la fin du Moyen Âge en Bretagne »  Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres1987 Volume   131 No   3 pp. 524-567   Persée. )

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8 juin 2014 7 08 /06 /juin /2014 21:54

            Oreina caerulea Olivier 1790,

une chrysomèle bleue de la Centaurée.


Coleoptera ; Chrysomelidae

Synonyme : Chrysomela rugulosa Suffrian, 1851.

Lieu : Prairie humide, Scaer (29).

 "9-12 mm, 3 premiers articles des antennes tachés de roux, bourrelets latéraux du pronotum larges et saillants, élytres densément ponctués..., seule espèce de ce genre à se trouver en montagne et en plaine " (http://aramel.free.fr/INSECTES11-32.shtml)

Plante-hôte : Centaurée des bois

début juin et jusqu'à l'éclosion des fleurs mi-juillet

écologie et évolution de la chrysomèle du genre Oreina (Université de Neufchâtel) :

Les chrysomèles du genre Oreina se nourissent sur plusieurs espèces végétales des familles Asteraceae et Apiaceae. Généralement colorées de bleu ou de vert métallique, ce coléoptère adresse ainsi un message d'alerte indiquant à ses prédateurs sa capacité à se défendre chimiquement. Deux modes de défense sont connu à l'interieur de ce genre: certaines espèces synthétisent des cardénolides à partir de precurseurs stéroliques alors que d'autres sont capables de séquestrer des alcaloïdes pyrrolizidine (APs) contenus dans leurs plantes hôtes; certaines espèces sont à même d'utiliser les deux voies de défense. Se répartissant à travers toute l'Europe, des Pyrénées aux Balkans, il semble qu'elles atteignent un niveau maximal de diversité dans les Alpes et les Apennins.

 Le groupe "Oreina" de Neuchâtel travaille sur les interactions entre différentes espèces du genre, entre elles et avec leurs plantes hôtes, leurs prédateurs et des champignons phytopathogénes. 

 

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8 juin 2014 7 08 /06 /juin /2014 21:38

L'Étoilée, la chenille de l'Orgyia antiqua L..

 

Lieu : prairie humide à Saules, Guiscriff (56).

Date : 8 juin 2014

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5 juin 2014 4 05 /06 /juin /2014 19:44

La baie 40 de la Chapelle de Vendôme des

vitraux de la cathédrale de Chartres.

 

      Les vitraux de la chapelle de Vendôme de Chartres ont suscité mon intérêt après mon étude de la baie 217 du transept nord de la cathédrale du Mans, et après avoir constaté de nombreux parallèles entre les deux baies, celle de Chartres datant de 1418 et celle du Mans vers 1430-1435. L'une et l'autre célèbrent le Couronnement de la Vierge tout en faisant état du Jugement Dernier,  mettent en scène, discrètement à Chartres et théâtralement au Mans, les douze apôtres, et présentent les deux saints évêques tutélaires de la monarchie, Denis et Rémi. Dans les deux cas, la baie a été réalisée par des Armagnacs pendant que les Anglais, alliés aux Bourguignons, occupaient les villes. Les donateurs appartiennent dans les deux cas aux familles de Bourbon et de Laval. Enfin, les rapprochements stylistiques sont constatés, comme par exemple dans les fonds damassés inspirés des soieries de Lucques et parsemées de boules de couleur. Le rapprochement des deux verrières permet-elle d'approfondir la compréhension de la Rose du Mans ? Au préalable, il fallait décrire dans ses détails la baie 40 de Chartres.

Voir :  La Rose du transept nord de la cathédrale du Mans. et 

Le vitrail du Credo apostolique de la cathédrale du Mans, ou baie 217 du transept nord.

 


La chapelle de Vendôme de la cathédrale de Chartres : Vœu et donation.

Cette chapelle qui porte le nom de son fondateur est adjointe à la cathédrale suite au vœu qu’avait fait Louis de Bourbon, comte de Vendôme le 31 mai 1413 : prisonnier  de son frère Jacques de Bourbon comte de la Marche, partisan des bourguignons,  et libéré le jour de l'Annonciation le 25 mars 1413, il se rendit en pèlerinage à Notre-Dame de Chartres comme il l'avait promis. Il y arriva le 31 mai 1413; ayant rencontré la procession du Chapitre de la cathédrale du mercredi des Rogations près du lieu de Mautrou , il mit pied à terre, lui et toute sa suite, qui était composée de plus de cent chevaliers et écuyers, et convoya la procession. Le lendemain, jour de l'Ascension il se rendit à l'issue de mâtines, presque nu, en chemise et tenant un cierge à la main devant la porte royale où le clergé vint le recevoir. Il accomplit dévotement son vœu à l'autel de la Vierge-Noire et fit don au chapitre, par donation du 2 juin, de soixante livres tournois de rente sur les comtés de Vendôme et les chapellenies de Montdoubleau et d'Epernon à la charge d'une messe à chacune des cinq principales fêtes de l'année. Par acte capitulaire du 2 décembre 1414, les chanoines permirent au duc de Vendôme de bâtir la chapelle hors d'œuvre qui porte son nom.

   Les travaux ne sont réellement entrepris par Geoffroy Sevestre en style gothique flamboyant   qu’en 1417, entre les deux contreforts de la cinquième travée, alors que Louis de Bourbon a été fait prisonnier en 1415 à Azincourt. La clef de voûte de la chapelle Vendôme est décorée aux armoiries du commanditaire : écartelé au 1 et 4 d’azur  semé de fleurs de lis d’or, au 2 et 32 au lion de gueules  et à la bande de lions de gueules brochant sur le tout. Si, en 1446 le duc de Vendôme fut inhumé en l'église  saint-Georges de Vendôme, son cœur fut amené à Chartres et déposé dans sa chapelle. Celle-ci était autrefois décorée des statues du duc et de son épouse Blanche de Roucy, adossées au mur en face de l'autel.

 

 La chapelle reçut aussi le nom de Chapelle de l'Annonciation (en souvenir du jour de sa délivrance) mais aussi celui de Chapelle des martyrs, car une armoire creusée dans le mur y renfermait deux chasses avec les ossements de saint Piat et ceux de saint Taurin évêque d'Evreux, ainsi que plusieurs autres saints. De temps immémorial on invoque à Chartres, disait le guide Joanne,  saint Piat pour obtenir de la pluie, et saint Taurin pour retrouver le beau temps.

Le duc de Bourbon-Vendôme fut fait prisonnier à la bataille d'Azincourt en 1415 et enfermé dans la Tour de Londres. Mis à cent mille écus de rançon, il ne put en payer que cinquante quatre mille comptant et y demeura jusqu'en 1422. Délivré, il s'engagea auprès de Jeanne d'Arc, était présent à la première entrevue entre Jeanne d'Arc et Charles VII, participa à la libération d'Orléans, commanda le siège de Jargeau, assista au sacre du roi à Reims où il faisait fonction de pair, et était présent à la paix d'Arras en 1435. Il épousa en premières noces le 21 décembre 1414 Blanche de Roucy fille de Hugues II de Roucy et Blanche de Coucy et qui mourut le 22 août 1421 sans postérité, puis  se remaria le 24 août 1424 à Rennes avec Jeanne de Laval-Campzillon, fille de Guy XIII de Montfort, sire de Laval, dont il  eut un fils Jean VIII (1428-1477), comte de Vendôme. 

La chapelle a été restaurée – et repeinte en 1866-1873. Les vitraux étaient déjà endommagés avant le XVIIIe siècle, ils furent partiellement restaurés en 1592. Ils ont disparu en grande partie au moment de la Révolution, en particulier les membres de la famille de Louis de Vendôme. La baie fut mutilée en 1816, avec insertion de panneaux étrangers à la verrière, puis  restaurée par Coffetier de 1868 à 1872. Les personnages ont été refaits en 1920 par le peintre-verrier Albert-Louis Bonnot avec retrait des panneaux étrangers et restitution de panneaux manquants, en s'inspirant des dessins de la collection Gaignières. (François Roger de Gaignières, (1642-1715) est un généalogiste français, antiquaire et collectionneur qui commença très jeune  à constituer une collection de matériaux originaux pour servir l'Histoire, en particulier sur l'Église et la Cour de France. La plus grande partie est conservée à la Bibliothèque Nationale dans la Collection Gaignières, et à la Bodleian library d'Oxford.)  d'après les dessins de Gaignières, restaurée par Bonnot en 1918 

   Elle fut encore restaurée dans les années 1980.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                      DESCRIPTION.

 

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Verrière composée de quatre lancettes trilobées et tympan à quatorze ajours. Pour des raisons de cohérence, je décrirai  les registres inférieur et intermédiaire ensemble.

    REGISTRES INFÉRIEUR ET INTERMÉDIAIRE. DONATEUR ET SA FAMILLE.

 

Louis de Bourbon-Vendôme, donateur et fondateur de la chapelle, est représenté à droite dans la quatrième lancette, accompagné de son épouse. Ses parents Jean de Bourbon et Catherine de Vendôme (portraits posthumes) trouvent place dans la deuxième lancette, son frère Jacques de Bourbon et son épouse Jeanne de Naples dans la première, et sa sœur Charlotte de Bourbon, reine de Chypre dans la troisième avec son époux Janus de Chypre. Ils sont agenouillés à leur prie-dieu et sont présentés par un saint : saint Denis, saint Jacques, saint Louis, et saint Rémi, trois de ceux-ci se référant directement à la monarchie de France.

1. Première lancette : Jacques de Bourbon et Jeanne de Naples.

1a : Armoiries 

Les armes de Jacques de Bourbon, écartelés des armes de Bourbon Blason duche fr Bourbon (moderne).svg et de Naples Armoiries André Hongrie.svg, se blasonnent écartelé en 1 et 4 tiercé en pal en 1 fascé d'argent et de gueules de huit pièces, en 2 d'argent à la croix potencé d'or et en 3 d'azur semé de fleurs de lys d'or et au lambel de gueules, et en 2 et 3 d'azur à trois fleurs de lys d'or à la bande de gueules. (Wikipédia) 

 

— Fond  damassé vert à rinceaux et oiseaux (lampas de Lucques)

—Architecture en grisaille: à gauche l'apôtre Paul ou Matthieu (un glaive) et ?

                 chapelle-de-vendome 2093c

 

1b : registre intermédiaire Jacques II de Bourbon et Jeanne de Naples présentés par saint Denis.

Jacques II de Bourbon, comte de La Marche, et son épouse Jeanne, reine de Naples, présentés par saint Denis.

Louis de Bourbon-Vendôme n'est pas rancunier et n'a pas l'esprit de parti, puisque c'est ce frère Jacques qui est responsable de sa captivité une première fois en 1407 et de 1412 à 1413. D'autre part, Jacques de Bourbon (1370-1438) avait choisi le parti des Bourguignons et s'était alliè à Jean Sans Peur, duc de Bourgogne. Il soutiendra Charles VII contre les Anglais en 1428.

Veuf de Béatrice d'Évreux (ou de Navarre) puis de Marguerite de Blois, il épouse Jeanne de Naples en 1415 et devient roi consort de Naples. Jeanne de Naples était la fille de Charles III roi de Naples, de Sicile et de Hongrie. Mais les mésententes conjugales conduisent Jacques II à regagner la France en 1419. Il se fit cordelier à Besançon où il décéda en 1438. Ne laissant pas d'héritier, la branche des comtes de la Marche s'éteint avec lui.

  Dans la longue tradition de fidélité à la royauté et de lutte contre les Anglais de la maison de Bourbon (Louis Ier, Jacques Ier de Bourbon-La Marche, Jean Ier), Jacques II dénote aussi par son alliance avec les Bourguignons.

— Intercesseur : saint Denis (inscription S DENIS). Saint Denis, premier évêque de Paris et patron de la Basilique Saint-Denis qui est la nécropole des rois de France est étroitement lié au pouvoir royal.

— Le relevé effectué par Gaignères :

Fond damassé rouge.  

— Architecture en grisaille: deux apôtres.

                                 chapelle-de-vendome 2097c

 

 

2. 2ème lancette : Jean de Bourbon et Catherine de Vendôme.

2a: Armoiries

 Fond damassé vert à rinceaux et oiseaux (lampas de Lucques) 

— Architecture en grisaille: à gauche l'apôtre Pierre (la clef) et à droite un personnage (un livre).

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2b Jean de Bourbon et Catherine de Vendôme présentés par saint Jacques [Sainte Catherine].

     Ce sont les parents du donateur :  Jean de Bourbon (1344-1393), comte de La Marche, avec Catherine de Vendôme (v1350-1412), comtesse de Vendôme et de Chartres, avec saint Jacques.

Comme l'indique le site cathédrale-chartres.fr, c'était sainte Catherine, avec l'épée et la palme de son martyre, qui présentait à l'origine les deux époux, comme en témoigne les relevés de Gaignères; mais pour une raison incompréhensible, Coffetier lui substitua, lors de sa restauration, ce personnage en qui on reconnaît saint Jacques parce qu'il tient un bâton, mais qui n'en détient aucun des autres attributs. A la différence de Jacques, sainte Catherine d'Alexandrie avait, comme fille de roi, sa place dans ce vitrail consacré au couronnement.

A l'inverse, Coffetier a gratifié d'une couronne Jean de Bourbon et Catherine de Vendôme, alors qu'ils ne sont pas roi et reine, et alors que Gaignères les représentent sur son calque lui coiffé d'un bonnet à bords roulés en bourrelet et elle d'un hennin à cornes.

— Fond damassé rouge pourpre à larges rinceaux. 

Architecture : apôtres ? (Livre et ) et ? (hampe ou manche)

 

                                 chapelle-de-vendome 2098c

 

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3. Troisième lancette : Janus de Lusignan et de Charlotte de Bourbon.

 3a : Armoiries. 

 

L'ange de gauche tient les armoiries des rois de Chypre et de Jérusalem écartelé, en 1 et 4 d'argent, à la croix potencée d'or, cantonnée de quatre croisettes du même et en 2 et 3 burelé d'argent et d'azur de huit pièces, au lion de gueules, armé, lampassé et couronné d'or, brochant sur le tout. Ce sont les armes de 1268 à 1393, car Janus de Lusignan était roi de Chypre, de Jérusalem et d'Arménie et portait écartelé, en 1 d'argent, à la croix potencée d'or, cantonnée de quatre croisettes du même, en 2 burelé d'argent et d'azur de huit pièces, au lion de gueules, armé, lampassé et couronné d'or, brochant sur le tout, en 3 d'or au lion de gueules, armé, lampassé et couronné d'azur et en 4 d'argent au lion de gueules, armé, lampassé et couronné d'or. (Wikipédia)

   Le blason de Charlotte comporte le blason des comtes de la Marche qui est  d'azur à trois fleurs de lys d'or à la bande de gueules chargée de trois lions léopardés d'argent 

 

— Fond damassé vert à rinceaux et oiseaux.

 — Architecture : à gauche, un apôtre tenant un couteau (Barthélémy)  ou le manche d'un ?. A droite ?

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3b : registre intermédiaire : Janus de Lusignan et de Charlotte de Bourbon, présentés par saint Louis.

Janus de Lusignan (1375-1432), roi de Chypre de Jérusalem et d'Arménie se maria en 1411 avec Charlotte de Bourbon (1388-1422), sœur du fondateur.

Saint Louis a été qualifié de "figure tutélaire de la maison de Bourbon" (Françoise Perrot, Exposition Espérance, le mécénat religieux à la fin de Moyen-Âge, Souvigny 2001). En effet, la Maison de Bourbon est issue de Robert de Clermont (1257-1318), sixième fils de Louis IX, dit Saint Louis. 

D'autre part, Louis est le prénom du donateur, prénom très usité dans la famille de Bourbon à coté de ceux de Jean et de Charles.

— Fond damassé vert à motif inspiré des lampas de Lucques (oiseaux). 

— Architecture en grisaille: deux apôtres (attributs cachés par la barlotière) 

 

 

                                     )chapelle-de-vendome 2099c

 

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4. Quatrième lancette :  Louis de Bourbon-Vendôme et Blanche de Roucy.

4a Armoiries.

-Armoiries de Louis de Bourbon-Vendôme : écartelé, aux 1 et 4 de France brisé d'une bande de gueules chargée de trois lionceaux d'argent, qui est Bourbon-La Marche, aux 2 et 3 d'argent au chef de gueules, au lion d'azur brochant armé et lampassé d'or, qui est Vendôme.

 

-Armoiries de Roucy :  d'or au lion d'azur lampassé de gueules   

—Fond damassé pourpre à feuillages et oiseaux affrontés inspiré des lampas de Lucques.

— Architecture en grisaille:  personnage à gauche (tenant un livre) et apôtre Thomas à droite.

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4b: registre intermédiaire : Louis de Bourbon-Vendôme et Blanche de Roucy présentés par saint Rémi.

   Les fondateurs, Louis de Bourbon et sa première épouse, avec saint Rémi.

 

  Louis Ier de Bourbon-Vendôme (1376-1446), cousin du roi Charles VII, comte de Vendôme, de Chartres (titre reçu en 1425 mais jamais confirmé), de la Marche en 1438, seigneur de Mondoubleau, d'Epernon et de Rémalard, Grand Chambellan de France en 1408, souverain maître d'hôtel du roi en 1413, gouverneur de Picardie, de Champagne et de Brie, épousa le 14 décembre 1412 Blanche de Roucy, décédée sans postérité en 1421., fille de Hugues II Comte de Roucy et de Blanche de Coucy, puis en 1424 Jeanne de Laval, fille de Guy XIII Sire de Laval et de Anne de Laval, mariage dont il eut un fils, Jean III comte de Vendôme (1428-1477) et fidèle de Charles VII. Son descendant Henri de Bourbon duc de Vendôme deviendra le bon roi Henri IV.

 

  Saint Rémi est, comme évêque de Reims où les rois de France sont sacrés et oint, le principal tutélaire de la monarchie française. La présence de saint Denis, tutélaire de la nécropole des rois et de saint Rémi, tutélaire de leur sacre, place cette donation sous le signe du combat mené par les Armagnacs pour conduire le dauphin Charles au trône (ce dernier sera roi sous le nom de Charles VII en 1422).

Le dessin est entièrement du au restaurateur, y compris la sainte ampoule que présente saint Rémi, et sans-doute l'inscription S. REMY. La sainte ampoule était censée contenir l'huile qui avait sacrée Clovis et qu'une colombe avait apporté au saint.

— Fond damassé bleu à motif floral large. 

 — Architecture : apôtre André à gauche (la croix) et ? à droite.

 

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La relevé effectué par Gaignères : 

                                      

 

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                   REGISTRE SUPÉRIEUR . 

Couronnement de la Vierge et Christ Sauveur, entourés de saint Jean-Baptiste et saint Jean l'Évangéliste. Leur présence est sans-doute due au prénom du père de Louis de Bourbon-Vendôme, Jean de Bourbon la Marche.


Première lancette : saint Jean-Baptiste.


— Fond damassé bleu à fleurs larges et fleuron vert (jaune d'argent). 

 — Architecture : à gauche, l'apôtre Thomas et ? tenant un bâton ou une hampe.

                                         chapelle-de-vendome 2101c

 

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Deuxième lancette. Couronnement de la Vierge.

 

— Fond damassé vert selon le style des lampas de Lucques à oiseaux ; boules à étoiles rouges.

 — Architecture en grisaille : apôtres Jacques ?? (bâton) et Philippe (croix latine à hampe)

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Comparer avec la Rose de la baie du Mans :     

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Troisième lancette. Christ Sauveur.

— Fond : damassé vert selon le style des lampas de Lucques à oiseaux ; boules à étoiles rouges.

 — Architecture en grisaille : personnage à gauche et Jacques le mineur (bâton de foulon) à droite.

— Le Christ Sauveur qui tient le globus cruciger et trace sa bénédiction sur le Monde est couronné.

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      Comparer avec la Rose de la baie du Mans :

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Quatrième lancette : saint Jean l'évangéliste.

— Saint Jean, imberbe, nimbé de rouge, vêtu d'une robe rouge et d'un manteau bleu à revers vert tient la coupe de poison d'où sortent la tête et la queue de deux serpents. 

Fond damassé rouge à feuillages stylisés à gros motif et parsemé boules à motif d'étoile rouge.

 — Architecture : personnages non identifiés.

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Récapitulatif des apôtres :  Pierre, Paul ou Matthieu, André, Thomas, Philippe, Jacques le mineur, Barthélémy. 

 

                         TYMPAN.

Composé de douze ajours et de 18 écoinçons, il associe dans le registre inférieur les trois quadrilobes d'une Passion à des scènes d'un Jugement Dernier, et dans le registre supérieur un Christ ressuscité au sommet, adoré par la Vierge et saint Jean tandis que deux anges sonnent à droite et à gauche l'heure du Jugement de leur trompette.


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Registre inférieur.

Au centre du tympan, le Christ en croix sous le soleil et la lune et le titulus INRI : il est couronné d'épines et ceint du perizonium. Deux anges recueillent le Précieux Sang et trois autres (en bleu) le vénèrent.

A sa gauche, Marie-Madeleine et la Vierge (toutes les deux en manteau damassé) et saint Jean ainsi qu'une Sainte Femme.

Scènes de résurrection lors du Jour du Seigneur : deux hommes sortent du tombeau, mains jointes ou bras écartés. Plus près de la croix, un pape coiffé de la tiare à trois couronnes se dresse également. 

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Rose du Mans (cliquez pour agrandir): scènes de résurrection des morts :

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A droite de la croix, suite de la Passion : pas moins de neuf personnages  parmi lesquels on tente de reconnaître le Bon Centurion qui prononce les mots inscrits sur la banderole : Vere Filius Dei est hic, "Vraiment celui-ci était le Fils de Dieu". Chacune des coiffures est curieuse à détailler.


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      Un cardinal, nu en dehors de la pourpre cardinalice de son galero, sort du tombeau. Une femme au longs cheveux, vêtue d'un linceul, se dresse également.

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      Le Christ ressuscité, au nimbe crucifère, assis sur un arc-en-ciel, présente les plaies de ses mains, de son flanc et de ses pieds; il  est encadré par trois anges dans la mouchette, et par quatre anges dans les ajours, dont deux présentent les instruments de sa Passion.

 

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Comparez au Christ de la Rose du Mans : là aussi le Christ porte un nimbe crucifère et est assis sur un arc-en-ciel ; il présente les plaies de ses mains.

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Mécène, donateur, commanditaire ou concepteur : le thème iconographique.    

 

S'il est bien attesté que Louis Ier de Bourbon-Vendôme est le fondateur de la chapelle, rien n'indique si d'autres donateurs ont participé à l'établissement de la verrière. Surtout, rien n'indique non plus qu'il ait choisi l'iconographie de cette dernière. En captivité depuis 1415, il n'a pu être consulté lors de la construction de la chapelle en 1417.

Il est donc probable que le choix de faire figurer à ses cotés d'autre membres de sa famille, et de consacrer la verrière au thème central du Couronnement de la Vierge complété dans le tympan à une Passion et un Jugement Dernier, soit imputable aux chanoines de la cathédrale de Chartres par leur Chapitre.

Deux interprétations au moins sont envisageables :

  Soit la famille de Bourbon-Vendôme souhaite souligner ses liens avec l'essence de la royauté comme signe de l'élection divine, rappeler qu'elle descend de saint Louis, en lequel fusionne les deux valeurs de royauté et de sainteté, ou qu'elle comprend parmi ses membres des têtes couronnées sur le royaume  de Jérusalem (nouveau lien avec le divin), de Naples, de Sicile et de Hongrie. Ce sentiment d'élection divine ou de sang royale lui impose une exigence d'excellence religieuse et morale et elle élève ses enfants à cette "escolle de vertu et de perfection" (1505, Suzanne de Bourbon). La verrière se lit alors en considérant les huit donateurs irradiés par la grâce diffusée par la scène princeps du Couronnement de Marie et du Christ-Roi, et revendiquant à travers leurs pieuses attitudes le privilège de cette proximité avec Dieu, la Vierge et ses saints.

  Soit le chapitre cathédral de Chartres décide souverainement de l'usage qu'il fait des fonds reçus par donation et choisit le thème iconographique en fonction de ses préoccupations théologiques ou de la défense de ses propres intérêts : tout en rendant hommage aux donateurs, il place au dessus d'eux le Jugement divin, rappelle la vanité des gloires mortelles, et souligne que toute royauté ici-bas n'est qu'une délégation de la Royauté divine. Plaçant les apôtres dans l'encadrement en grisaille des donateurs, il illustre la place de l'Église et le rôle des clercs comme conseillers des princes.


Datation :

La construction de la chapelle ayant débuté en 1417, et Jacques de Bourbon ayant quitté Jeanne de Naples en 1419, les verrières ont pu être réalisées en 1418-1419. 


Stylistique :

  Je ne dispose pas d'éléments bibliographiques à ce sujet. Le profond remaniement dû aux restaurations successives limitent la portée des constatations faites sur la vitre existante. Je remarque, à mon petit niveau, l'usage des fonds damassés parsemés de boules colorées, beaucoup de ces fonds comportant les oiseaux affrontés qui témoignent de l'influence des soieries de Lucques. A la différence de la baie du Mans, et d'autres vitres contemporaines de l'ouest de la France, les pupilles ne sont pas rehaussées de jaune d'argent.


Rapprochement avec la baie du transept nord de la cathédrale du Mans. 

J'ai mené au fur et à mesure ce rapprochement qui concerne la disposition des donateurs, les donations au chapitre, le contexte historique lors de la Guerre de Cent Ans et la présence des Anglais dans les villes ou le conflit entre Armagnacs et Bourguignons. La présence de saint Denis, de saint Rémi et de saint Louis à Chartres m'incite à penser que les deux saints mal identifiés au Mans à coté de saint Louis sont, là aussi, Denis et Rémi. Inversement, le Credo apostolique du Mans me fait observer avec plus d'attention la présence des apôtres avec d'autres personnages (prophètes ?) dans l'encadrement de grisaille. A Chartres, le tympan semble la copie au brouillon de la Rose du Mans, et on mesure combien le thème de la Passion fait perdre de la cohérence à l'ensemble placé sous le signe du Christ Roi, Sauveur et Juge ; mais parmi l'ensemble des couronne dorées de la baie 40, la couronne d'épine souligne le paradoxe de la Croix.

L'une des différences est l'absence à Chartres de toute donnée épigraphique, alors qu'outre les articles du Credo, les versets des Psaumes et les prières qui sont encore déchiffrables sur les livres d'Heures commentent l'état d'âme des donateurs, et que les citations du Gloria et de l'Agnus Dei de la Rose précisent la double dimension de Gloire et de Rédemption du Christ Roi.

  Les éléments stylistiques communs que j'ai su remarquer sont ceux qui concernent les fonds damassés. L'étude des visages et des drapés, ou les techniques de peinture dépassent mes compétences, mais, là encore, les verres originaux sont trop rares pour renseigner le chercheur.  L'étude des vêtements et des coiffures dans une comparaison avec celle du Mans reste à mener.

 Sources et liens. 

— Ernest de Buchère de Lépinois - 1858 - Histoire de Chartres volume 2.

— http://vitrail.ndoduc.com/vitraux/htm6101/ND@Chartres_40.php

http://www.cathedrale-chartres.fr/vitraux/vitrail_chapelle_vendome/index.htm

— Pages perso de Stephane Thomas : Branche des comtes de la Marche 

http://stephane.thomas.pagesperso-orange.fr/capetien/bourbon_marche.html

—  MONFAUCON (R.P. Bernard de )  Les monumens de la monarchie française qui comprennent l'histoire de France Vol. 3 Page 191

 

 

 

 

 

Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Vitraux_de_Chartres#Chapelle_de_Vend.C3.B4me

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Published by jean-yves cordier
4 juin 2014 3 04 /06 /juin /2014 20:47

Les "échiquiers" ou "damiers" des vitraux de la cathédrale de Chartres . Baie 114b et baie 35.


 La Baie 114 lancette de droite : Fuite en Égypte et Nativité, Colin de la chambre royale, donateur.

 


Numérotation de la verrière :114b (Chaussé ; Deremble-Manhès) soit 105 Delaporte. Elle mesure 7,27 m par 2,09 m, et se divise en trois registres de scènes dans des médaillons octogonaux. La baie a deux lancettes a et b, une rose à 16 ajours. Les bordures ont été détruites en 1757. La baie a été restaurée en 1921 par Gaudin avec restitution de bordures.

Introduction.

  Mon but était d'examiner deux exemples (baie 114 et baie 35) de plateau de jeu à cases des vitraux de la cathédrale de Chartres, pour préciser s'il convenait de les nommer "échiquiers" ou "damiers", ou s'ils servaient de support ("tablier") au jeu de dés, très en vogue au Moyen-Âge malgré sa mauvaise réputation aux yeux de l'Église. Ces deux vitraux datent du XIIIe siècle. Véronique Chaussé et al. 1981 y décrivait "2 joueurs d'échecs" en baie 114. En réalité, j'ai eu la surprise de découvrir un autre usage de ces plateaux à carreaux comme support de comptabilité et de réfléchir à la proximité des mots "échiquier" et "chéquier".

 Cela me permit aussi de découvrir l'ensemble de la baie 114, verrière du chœur coté nord datée de 1210-1225. 


1. Registre inférieur : Colini donateur.

Inscription : VITREA COLINI : D

                      E CAM[ER]A REGIS

  Deux personnages sont assis l'un en face de l'autre devant un "tablier" ou table de jeu à damier de 8 x 8 = 64 cases bleues et blanches : c'est le nombre traditionnel des cases de l'échiquier de l'époque, mais ces plateau peuvent également, de façon plus ancienne, servir à lancer les dès (cet usage est l'origine du mot "fritillaire"). Or le personnage de gauche lance les dès  placés non pas dans un cornet, mais dans un sac, tandis que son compagnon fait un geste et une mimique de réprobation. Il faut une bonne dose d'imagination affranchie de l'observation de l'image pour voir ici des joueurs d'échecs.

 Selon l'abbé Bulteau : "Au tableau inférieur, le donateur et sa femme jouent aux dés sur un échiquier ; ils tiennent de vastes cornets rouges au fond desquels se trouvent des dés : au dessus de leurs têtes se trouvent l'inscription : VITREA : COLINI : D E CA~MA REGIS, que M. de Lasteyrie rétablit de cette manière : Vitrea Colini de camera Regis, "Vitre de Colinus de la chambre du Roi". Ce Colinus est sans-doute le même dont parle une charte de Hugues datée de 1225, laquelle fait connaître que Colinnus de Mannoi a donné à Robert Foart une terre située à Marchéville (cartulaire de Saint-Père, tome II)". Bulteau 1850 page 211

  Cette description n'est pas exacte, puisqu'il ne s'agit manifestement pas d'un couple d' homme et de femme, qu'un seul personnage tient un sac, et que les dès ne sont pas visibles, comme le souligne F. de Mély dans la Revue de l'Art chrétien 1888 ("étude iconographique sur les vitraux du XIIIe siècle" page 423). 

L'inscription elle-même a été comprise certainement à tort comme "Colin, vitrier du roi", mais le décryptage de Lasteyrie et Bulteau est plus juste : "Vitre de Colinus (Colin) de la Chambre du Roi".

  L'inscription m'incite à découvrir d'abord ce que recouvre la "chambre du roi "; la datation du vitrail correspond au règne de Philippe Auguste (1165-1223) ou au bref règne de Louis VIII (1223-1226).

   a) la Chambre du Roi.

   Cette Chambre du Roi représente ce qui deviendra La Maison du Roi, ensemble d'officiers de cour chargés de faire fonctionner le Palais sur le plan administratif et comptable mais aussi domestique. Elle trouve son origine dans la Curia regis (Cour du roi ou Conseil royal) des Capétiens et se composait alors de la famille royale, du sénéchal (chef des armées), du connétable, du chancelier (chef de la Justice), de laïcs et ecclésiastiques et divers officiers juristes ou comptables.

  Au XIIe siècle, la Curia regis a été scindé en deux, " l'hôtel-le-roi" qui gère les services domestiques, et le Conseil. À la fin du XIIIe siècle et au début du XVe siècle, le Conseil se scinda en trois sections spécialisées : le Conseil du roi, la Chambre des comptes et le Parlement. La charge de Sénéchal de France est supprimée sous Philippe Auguste et d'autres charges de grands officiers furent relégués aux rangs subalternes de chambrier, bouteiller, etc., Philippe Auguste choisissant surtout comme conseillers, après 1190, de petits nobles et des clercs obscurs. Cette Cour suivait le roi dans ses déplacements, si bien qu'en 1194, lors d'une bataille, Richard Ier d'Angleterre s'empara des coffres contenant les comptes du royaume de France et refusa de les restituer : la décision fut prise alors de rendre les comptes de la cour sédentaires, avec un embryon de Chambre des Comptes dans l'île de la Cité, le Trésor étant gardé à la Tour du Temple. 

  Il est donc probable que Colin, qui n'est pas connu comme un grand seigneur et dont qui n'a laissé quasiment aucune autre trace de son existence soit un clerc : clerico camera regis

Cette perspective incite non plus à voir dans ces deux personnages deux joueurs de dès ou de dames, mais un comptable du roi récusant les comptes que lui présente un quidam : voyez le geste de contestation du personnage de droite. En effet, il est bien connu qu'au Moyen-Âge, les plateaux quadrillés servaient soit à apprendre aux enfants à compter, soit aux adultes à faire leurs comptes.

b) De l'échiquier en comptabilité.

   Ce tapis ou ce plateau carré des banquiers médiévaux était formé de cases comprenant chacune un nombre selon une certaine loi de répartition. Cela conduit à découvrir comment s'entremêlent les mots et les sens du mot "échiquier", et de notre mot "chèque" qui lui est lié : Ouvrons le Littré et ses définitions du mot échiquier : nous y verrons que ce terme désigne certes une table divisée en carrés alternativement blancs et noirs, sur laquelle on joue aux échecs et aux dames, mais aussi "une abaque ou table à compter, dont on se servait pour la perception des impôts", et en Angleterre, la juridiction qui règle toutes les affaires des finances. ( La cour de l'Échiquier, Le chancelier de l'Échiquier : "Il y a à Londres un grand et un petit échiquier ; le Grand Échiquier est ce qu'on appelle en France Chambre des Comptes ; le Petit Échiquier est le Trésor royal.". Nous retrouvons les termes de Chambre et de Cour qui sont directement issus de la Curia regis et de la Camera regis. Le lexicographe ajoute "Quant à la signification de échiquier, pour cour de finance, trésor, elle vient de ce que cette cour tenait ses séances avec une table recouverte d'un tapis divisé en carreaux comme un échiquier. C'est ainsi que bureau, (étoffe), a pris le sens de table sur laquelle on écrit, et d'office où l'on expédie les affaires."

 

Le Trésor de la Langue Française (CNRTL) précise encore que  la première occurrence du mot date de 1160 environ sous la forme eschaquiers « dont la surface est divisée en carreaux » dans l'Enéas, éd. J. J. Salverda de Grave, vers 742 et vers 4030 :

Onkes ne fu plus preciose e un mantel qui molt fu chiers ;/ la penne en fut a eschaquiers d'une biche de 2 colors. (740-744)

Ses mantels furent riches et chiers, et fu toz faiz a eschaquiers / L'un tavel ert de blanc hermine et l'altre ert de gole martrine. (4029-4032)

Les deux usages du mot servent à décrire, dans l'expression "a eschaquiers" semblable dans ce pluriel à notre "à carreaux", d'abord le manteau de la reine de Carthage Didon, puis celui de Camille, fameuse reine des Volsques depuis Virgile. Donc, l'expression désigne d'abord une étoffe (ou fourrure) bicolore, privilège exorbitant réservé aux reines. Cette association Étoffe / deux couleurs opposées / Royauté sera persistante et accompagnera en sourdine le mot et la chose.

En 1170 on trouve la forme eschekier « trésor royal » (Quatre livres des rois, éd. E. R. Curtius, p. 118 [1 Rois 4, 6])

L'usage du mot pour désigner le jeu  apparaît presque en même temps, en 1176 sous la forme eschaquier dans le Cligès de Chrétien de Troyes (Cligès, éd. A. Micha, vers 2335).

L'Échiquier de Normandie.

Il s'agit d'une Cour itinérante, chargée de la vérification des comptes puis de l’instruction des affaires judiciaires, mis en place au XIe siècle par les ducs. 

Scacarii Sancti Michaelis (Plaids de l’Échiquier de Saint Michel) : © Arch. Dép. Seine-Maritime

" Le registre présenté ici est le plus ancien conservé dans le fonds de l'Échiquier de Normandie. Intitulé Placita Scacarii Sancti Michaelis (Plaids de l’Échiquier de Saint Michel), il s’agit d’un registre factice conservant la mémoire des affaires portées devant l’Échiquier de la Saint Michel (29 septembre) et de Pâques entre 1336 et 1342. Pour chaque affaire sont mentionnés le nom des parties ainsi que leurs procureurs. Rédigé tantôt en latin tantôt en français, il se distingue des autres registres de l’Échiquier qui sont intégralement rédigés en français. ADSM, fonds du Parlement de Normandie, 1 B 1. Registre parchemin)"

 

 Le CNRTL signale que c'est dans le Cartulaire de l'église de Chartres qu'en 1280 le mot eschekier est attesté dans son sens de « cour de justice, en Normandie », cour maintenue sous le nom d'Échiquier de Normandie lors de la réunion de la Normandie au domaine par Philippe-Auguste. L'article Wikipédia consacré à cet Échiquier de Normandie indique que son nom dérivait " de ce qu’il y avait sur la table où se réglait les comptes de la trésorerie, un tapis échiqueté de noir et de blanc, servant à caser les différentes monnaies ayant cours dans le duché. Les ducs emmenaient partout avec eux ce tapis et concluaient leurs décisions par ces mots : actum in scaccario ou super scaccarium.", fait en l'Échiquier ou sur l'Échiquier (Floquet page 25)

 Le terme de latin médiéval scaccarium, relevé en 1140 semble avoir précédé le nom français, et certains font dériver ce scaccarium  du saxon scata "trésor" ou eschaita "revenus" ; d'autres de l'allemand skechen, "envoyé". 

Le motif à l'échiquier, ou échiqueté apparaît comme l'emblème de cette Cour des Comptes  et de Justice, soit sous forme d'une table aux carreaux de marbre alternés ou de constructions en briques bicolores, soit surtout sous forme d'un tapis à carreaux qui devait présider à ses réunions. Ces draps échiquetés nommés scacaria étaient en usage à l'Échiquier de Londres,(terme anglais Exchequer ca 1190) fournis par les rois Henry II,  Richard-Cœur-de-Lion et Jean-Sans-Terre (Floquet citant de la Morinière). Ces tapis si essentiels trouvaient-ils l'origine de leurs motifs dans les jetons bicolores qu'on y jetait ou à la nécessité de placer dans des cases différentes les différentes monnaies "les besants, les talents, les monnaies d'Anjou et de Rouen". 

Mais on ne peut faire de cet échiquier un ornement quasi héraldique ou, comme le dit Floquet, "sacramentel" de cette Cour puisqu'il était aussi en usage chez les banquiers pour effectuer leurs comptes (eschequier, milieu du XIIIe siècle).

Dans ce contexte, notre terme chèque apparu selon le CNRTL en 1878 et 1932, fut emprunté à l'anglais check (1774) dans le sens de « talon, souche (d'un bon de trésorerie) » sens issu de celui de «contrôle, vérification, arrêt, échec » le procédé des souches étant destiné à mettre un terme aux manœuvres illégales. Check est emprunté à l'ancien français eschec, v. échec.

 Mais  je lis ailleurs que l'origine du mot anglais est compliquée et controversée. "Le "chèque" semble bien venir de l'"échec" qui, au départ, représente le jeu stratégique qu'on connaît, et qui nous vient de Perse (Shakh mat = le roi est mort = "échec et mat") .Le "jeu d'échecs" a donc donné l'"échiquier" et comme, semble-t-il, les banquiers du Moyen âge avaient coutume de compter leurs sous sur de petits tapis à carreaux, l'"échiquier" est devenu à la fois la métonymie de trésor (trésor royal anglais - chancelier de l'Échiquier) et également de vérification. D'où cette idée du "chèque", bordereau de crédit.  L'idée de vérification est encore primordiale en anglais, et le franglais, si jargonnant qu'il soit, nous en fournit des exemples : (checklist, checkpoint, etc.)".

Pour continuer à se perdre dans le dédale des associations, le mot de latin médiéval scaccus désigne le Roi, rex du jeu d'échec, lui-même nommé scacchi ou scaccarium, ou ludo scachorum. Le terme latin vient du persan shakh  شاه, le Shah ou Chah, Roi traduit sachus, i en latin. Le lien entre les échecs et le roi est indissociable.

  Jean de Vignay traduisit entre 1332 et 1350 le De ludo scacchorum [Liber de moribus hominum et officiis nobilium ac popularium super ludo scacchorum] de Jacques de Cessoles sous le titre Le jeu des échecs moralisé ou plus exactement Le livre de la moralité des nobles hommes et de gens du peuple soubz le gieu des eschés (ms. BnF, fr. 572, inc.); Le gieu des eschés (ms. BnF, fr. 572, expl.); La moralité des nobles hommes et des gens de pueple sus le gieu des eschés

Voir manuscrit Bnf 480 folio 34r  ou 35r .

Nota bene : Le manuscrit Bnf 572 est dédicacé à Jean II Le Bon (1319-1364) alors qu'il n'était pas encore roi  ...mais duc de Normandie. Roi de 1350 à 1364, et prisonnier des Anglais à Londres, il reçut d'Edouard III en 1360 un Eschiquier de musique... Les deux "échiquiers de musique" de la cathédrale du Mans.


 

 


Voir aussi le chapitre V de  Zoonymie du papillon la Mélitée du Plantain, Melitaea cinxia.

Cette excursion lexicographique permet de regarder autrement le vitrail de la baie 114 de Chartres. Certes il s'agit d'un plateau de jeu aux 64 cases traditionnelles, mais nous sommes devant une scène de contrôle des comptes par un clerc de la Chambre du Roi veillant à mettre en échec les tentatives de fraude.    

 

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2. La Nativité (Luc 2:1-7, Matthieu 1:25).

 C'est une "Vierge dans son lit d'accouchée" typique, avec la pose de la veilleuse accoudée un coussin sous la tête, et l'influence byzantine dans le drapé très riche. Joseph est songeur, car le voilà dans de beaux draps! Selon la tradition iconographique, une canne montre qu'il a dépassé l'âge habituel de la paternité et qu'il pourrait être le grand-père plutôt que le beau-père du bébé.  Celui-ci, si parfaitement langé qu'il ne peut pas bouger, regarde avec inquiétude le bœuf qui, comme l'âne son compère, a placé une patte dans le berceau. Heureusement, ils sont tous les deux solidement attachés par un licol. Ces deux là illustrent la prophétie d'Isaïe 1:3, «Le bœuf connaît son possesseur, et l'âne la crèche de son fabricant." et l'Évangile du Pseudo-Matthieu atteste de leur présence dans la crèche.

La structure sur laquelle est posée le berceau semble en brique surmontée d'une grille métallique : elle est assez identique à la sorte de fourneau de la voûte duquel pend deux lampes. Ces dernières évoquent celles qui, symbolisant la veille attentive du pseudo-dormeur, sont placées au dessus de tous les autres dormeurs des vitraux médiévaux, à commencer par Jessé. Même allongée et les yeux fermées, la Vierge ne s'endort pas, elle médite et elle prie.


On notera encore que Joseph n'est pas gratifié d'un nimbe : son culte ne se développera que beaucoup plus tard. L'Enfant-Jésus porte un beau nimbe crucifère rouge et or et la Vierge un nimbe rouge.


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3. La Fuite en Égypte. (Matthieu 2:1-12)

 

      (Saint) Joseph, à défaut d'auréole, a retrouvé de la vigueur, et sa canne ne lui sert plus qu'à porter son baluchon. La mère et le Fils échangent un regard complice, et Dieu touché par la scène ne peut résister à passer la main à travers les nuages pour bénir son rejeton. Quelle Sainte Famille, quoique recomposée ! Mais le plus beau, après le visage de Joseph, c'est l'âne, superbement dessiné dans sa marche rétive.

                 echiquier-donateur-colini 2219cc     

 

 

 La Baie du Fils prodigue (Baie 35, 1205-1215) et la Griesche d'hiver de Rutebeuf (ca1250).

 Une autre verrière de Chartres montre deux joueurs face à un plateau de jeu à 64 cases, abusivement nommé encore damier ou échiquier puisque le joueur de gauche tient manifestement dans un cornet trois dès dont on distingue les chiffres 5, 3 et 2. Comme le fait remarquer le site www.cathédrale-chartres.fr, son adversaire (le fils prodigue, précisément) est fort dépité, car il ne porte plus que ses braies et ses chausse vertes et a déjà été dépouillé de sa chemise. C'est donc une condamnation morale par l'Église de ce jeu.

Cette image montre bien que le tablier ou "damier" n'est pas utilisé pour ses cases, mais comme plateau de jeu. Mais au jeu nommé "dringuet", 2 joueurs se placent de chaque côté d’un échiquier ; l’un choisit les cases claires, l’autre les cases foncées, et décident d’un enjeu. Le premier à jouer lance un dé sur l’échiquier. Si le dé tombe à l’intérieur d’une case claire, le gain va à celui qui a choisit cette couleur ; c’est l’inverse dans le cas contraire ; si le dé « boit », c’est à dire si le dé est à cheval sur 2 cases, le tir est recommencé. (Daniel Onfray)

  Ce panneau semble vouloir illustre à l'avance les poèmes des Complaintes de Rutebeuf, le Dit de la griesche d’yver et le Dit de la griesche d’été dans lesquels il déplore les méfaits du jeu, qui l'ont laissé sans chemise, ayant du la laisser en gage à l'aubergiste. Car si nous connaissons la Pie griesche ou Ecorceur qui empale les insectes qu'elle capture sur des épines, nous ignorons souvent que la Griesche est le nom d'un jeu de dès venu, comme son nom l'indique, de Grèce vers 1255 : 

Dit de la griesche d'yver :

Les dés que les déciers ont fait

M’ont de ma robe tout défait ;
Les dés m’occient,
Les dés m’aguettent et épient,
Les dés m’assaillent et défient,
Ce pèse moi.

Je n’en puis mais, si je m’émeus :
Ne vois venir avril ni mai,
Voici la glace.
Or suis entré en male trace ;
Les trahiteurs de pute extrace
M’ont mis sans robe.
Le siècle est si plein de lobe !
Qui auques a, si fait le gobe ;
Et je, que fais,
Qui de pauvreté sens le fait ?
Griesche ne me laisse en paix,
Moult me dérroie,
Moult m’assaut et moult me guerroie ;
Jamais de ce mal ne garroie
Par tel marché.

...Trop ai en mauvais lieu marché ;
Les dés m’ont pris et emparché :
Je les claims quitte !
Fol est qu’à leur conseil habite :
De sa dette pas ne s’acquitte,
Ainçois s’encombre ;

 Adaptation : "Les dés que les fabricants de dés ont faits m’ont pris ma robe; les dés me tuent, les dés me guettent et m’épient. Les dés m’assaillent et me défient, cela pèse sur moi. Je n’en peux plus, je m’énerve: je ne vois venir ni avril, ni mai, voici la glace. Je suis entré dans une mauvaise voie, les traîtres de mauvaise extraction m’ont laissé sans vêtement. 

 ... Le démon du jeu ne me laisse pas en paix, il me dérange beaucoup, il m’assaille sans cesse et me fait la guerre sans arrêt, jamais je ne pourrai guérir de ce mal, par un quelconque arrangement. J’ai trop marché en de mauvais lieux, les dés m’ont pris et emprisonné: je leur demande d’être quitte. Fou est celui qui prend conseil d’eux, qui ne s’acquitte pas de ses dettes, mais s’en encombre et, de jour en jour, en accroît le nombre

Dit de la griesche d'été :

Rutebeuf y fait allusion à l'expression "Échec!" utilisée pour marquer sa victoire ; mais c'est le jeu qui gagne, et laisse le joueur "habillé d'un sac" :

La dent dit Clac / Et la griesche dit Échec. / De quoi s'habiller d'un sac. C'est le gain / du plus habile à la griesche.

 

Le "Jeu de saint Nicolas" de Bodel, et l'origine du mot "hasard".

Si l'artiste verrier de Chartres n'a pas pu, vers 1215, être influencé par Rutebeuf, il a pu l'être par le "jeu" (piède de théâtre) du trouvère Jehan Bodel qui met en scène des truands dans une taverne : il l'a écrite en 1200.

Le jeu de dès y porte le nom de "hazart", terme qui désigne aussi "un certain coup au jeu de hasard". La première occurrence du mot en français date de 1150, dans ce sens de "jeu de dés" avant de prendre la signification moderne de cause imprévisible et fortuite. Il provient de l'espagnol azar, qui le tient peut-être de l'arabe az-zahr (" dé à jouer") mais comme az-zahr n'appartient pas à l'arabe classique, on propose zahr, "fleur", "parce qu'une fleur aurait été présente sur une face du dé", ou yazara, "jouer aux dés".

Quant au mot , il proviendrait de dare, datum, "donner" ; mais on sait qu'en latin les dés se disent alea.

 

 

 

  "Le succès des dès s’explique très certainement par la simplicité du matériel utilisé (os, bois de cerf, plus rarement ivoire) ainsi que par celle des règles suivies. Même si, comme l’affirme Polydore Virgile en 1499, il existe plus de six cents manières de jouer aux dés, la plupart des parties que la documentation permet de restituer avec quelque détail se jouent avec trois dés, le but étant d’obtenir le plus grand nombre de points possible en un seul jet ou, éventuellement, en une succession de jets. Des formes de parties de dés plus complexes apparaissent néanmoins çà et là dans la littérature. D’autres jeux, comme le dringuet ou le "franc du carreau", tiennent à la fois du jeu de hasard et du jeu d’adresse puisqu’ils consistent à jeter les dés sur un damier.

 Tout l’intérêt de ces jeux réside évidemment dans les enjeux, qu’il s’agisse de savoir simplement qui va payer l’aubergiste ou de risquer des sommes plus importantes comme c’est le cas dans les milieux aristocratiques, où peuvent être repérés de véritables "flambeurs", capables de perdre en une soirée des sommes fantastiques." (Bnf)

 

 Le jeu de dès fait fureur depuis les Grecs et les Romains, et les dés se jettent sur des plateaux depuis l'origine (plateau de térébinthe verni). Au Forum de Rome, on a retrouvé des tables de jeu gravés sur le pavé de la basilique Julia. Antoine, les empereurs Auguste, Néron, ou Claude étaient des joueurs passionnés ; Caligula était un tricheur impérial, et Commode fit aménager des salles spéciales pour y jouer dans son palais. Verus y passait des nuits blanches. Le peuple y jouait de si gros enjeux que les magistrats en condamnèrent la pratique. 

Les Gaulois y jouaient aussi, et emmenaient leurs dés dans la tombe.

Plus près de nous, le Duc de Berry était un joueur effréné, et un jour de 1370 où il avait épuisé sa bourse, il engagea son chapelet, dont il obtint 40 francs. (Voir ici)

A Paris, au Moyen-Âge, les joueurs (ouvrier de griesche) se réunissaient Place de Grève. 

Le jeu de dès, invention diabolique : les dès ont d'autant plus mauvaise réputation pour l'Église qu'ils figurent parmi les Instruments de la Passion, les soldats romains ayant tiré au dés la tunique du Christ plutôt que de la coupée, car elle était sans couture.

 

                                                 

 

 

Source image : http://www.mjae.com/eglise.html

 

Sources et liens.

BULTEAU (  abbé M. T..) 1850 Description de la cathédrale de Chartres : suivie d'une courte notice sur les églises de Saint-Pierre, de Saint-André et de Saint-Aignan de la même ville : avec cinq planches Edit.  Garnier :Chartres  1 vol. (320 p.) : pl. ; in-8 p. 211

https://archive.org/stream/descriptiondela00bultgoog#page/n228/mode/2up

— DELAPORTE (Abbé Yves), 1926 Les Vitraux de la cathédrale de Chartres. Histoire et Description, par l'abbé Delaporte, archiviste diocésain, secrétaire de la Société archéologique d'Eure-et-Loir. Reproductions, par E. Houvet, lauréat de l'Académie des beaux-arts, gardien de la cathédrale. Texte (1 volume) et planches (3 volumes). I. (Planches en trichromie, I-IV ; planches en noir, I-XCI ; planches coloriées, I-IX.) II. (Planches en trichromie, V-VII ; planches en noir, XCII-CLXXXII ; planches coloriées, X-XVIII.) III. (Planches en trichromie, VIII-X ; planches en noir, CLXXXIII-CCLXXXIV.). impr. Durand, rue Fulbert ; E. Houvet, éditeur, 20, rue de Rechèvres, Paris 1926 (non consulté) 

 — CHAUSSÉ (Véronique) , Martine Callias Bey, Françoise Gatouillat, Les vitraux du Centre et des Pays de la Loire ,  Corpus vitrearum, Recensement des vitraux anciens de la France, volume II Ed. du CNRS, Paris 1981 page 38.

 

FLOQUET,( Amable) 1840  Essai historique sur l'Échiquier de Normandie Ed. E. Frère :Rouen) 1840 Gallica 

 — KURMANN-SCHWARZ (Brigitte)  "Récits, programme, commanditaires, concepteurs, donateurs : publications récentes sur l'iconographie des vitraux de la cathédrale de Chartres" Bulletin Monumental1996  Volume   154   pp. 55-71 page 63

LUCAS (Bernard) L'Église et le jeu d'échec : http://www.mjae.com/eglise.html

— STONES Alison Site Medart :  http://www.medart.pitt.edu/image/France/Chartres/Chartres-Cathedral/Windows/Nave-windows/chartres-Nave-windows-main.html

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2 juin 2014 1 02 /06 /juin /2014 13:22

 

Les deux "échiquiers de musique" de la cathédrale du Mans ... et le Gwezboel celte.


 

      L'échiquier de musique est un instrument à cordes et à clavier, comportant huit à neuf touches, apparu au XIVe siècle et qui disparaîtra peu à peu au XVIe siècle. Ses deux seules représentations au monde se trouvent dans la cathédrale du Mans, l'un sur les voûtes de la chapelle de la Vierge (1377), l'autre dans la rose du vitrail qui ferme la baie 217 du transept nord (1430-1435).

Frappées ou pincées ?

  A la différence du psaltérion, instrument à cordes pincées à l'aide de plectres, et du clavecin, ce serait un instrument à cordes frappées, comme le doulcemelle, le tympanon, le clavicorde  et plus tard le piano. Les cordes métalliques seraient frappées par un petit marteau pour produire les notes do ré mi fa sol la si. Le son en devait être assez doux et discret (cette particularité est à l'origine du nom doulcemelle, dulce melos ou chant doux), comme plus tard celui du clavicorde, qui sera un instrument d'étude et non de concert public. Il est, dès son origine historique, liée à la noblesse, voire peut-être réservé aux cours royales.

  Pourtant, des auteurs (E.L Kottick infra ;  Histoire du clavecin in Wikipédia) en font un ancêtre du clavecin, avec des cordes pincées. Frappées ou pincées ? En réalité, il est impossible de trancher.

  Ce qui est certain, c'est que l'échiquier tire son nom de la décoration de sa caisse de résonance, décoration qui n'a a priori rien à voir avec ses propriétés musicales : c'est bien cette ornementation caractéristique en damier qui va retenir notre attention.  

 I. Histoire.

Elle nous est présentée par E.L. Kottick, que je traduis ici :

 

   "En 1356, durant la guerre de Cent Ans, Jean le Bon le mal nommé fut capturé par les Anglais à la bataille de Poitiers et passa les quatre années suivantes en captivité. Le prisonnier royal ne manqua pas d'égards, et un livre de compte de 1360 de la cour de France mentionne qu'un eschequir lui fut donné par  le monarque anglais Edouard III. Il s'agit de la première mention d'un nouvel instrument nommé chekker, mais aussi eschequir, eschiquir, eschaquier, eschiquier, etc. et qui est généralement considéré comme étant une sorte d'instrument à cordes à clavier.

L'échiquier  (dans le texte : Chekker) est mentionné à nouveau vers 1367 par le poète et compositeur Guillaume de Machaut (ca 1300-1377) à la fin d'un passage de son poème La Prise d'Alexandrie dans lequel il énumère tous les instruments de musique connus au milieu du XIVe siècle. Les dernières lignes sont celles-ci :

Trompes, buisines & trompettes,

 Guiges, rotes, harpes, chevrettes,

cornemuses & chalemelles,

Muses d'Aussay, riches et belles,

Et la fretiaus, & monocorde,

Qui à tous instrumens s'acorde,

Muse de blé, qu'on prent en terre,

Trépié, l'eschaquier d'Engletere,

Chifonie, flaios de saus.

 

 Il est intéressant de noter que Guillaume de Machaut identifie l'instrument comme un eschaquier d'Engletere. Sachant que Jean le Bon reçut l'instrument d'Edouard III cela semblerait indiquer que cet instrument fut associé très tôt à l'Angleterre, mais il est attesté par des sources en Espagne, en France et en Bourgogne qu'il était largement répandu alors. Par exemple, une lettre adressée en 1388 par Jean d'Aragon à Philippe le Hardi, duc de Bourgogne  se réfère à un instrument « ressemble à un orgue mais qui résonne par des cordes". Bien que le propos de Jean soit d'obtenir un musicien sachant jouer de l'organetto, l'instrument à cordes en question pourrait être un claviciytherium, ancêtre du clavecin pouvant être placé sur les genoux.

Témoignages, lettres et sources littéraires durant tout le début du XVIe continuèrent à mentionner l'énigmatique échiquier bien qu'à cette date le nom soit aisément appliqué dans un sens archaïque au harpsichord." ( Edward L. Kottick 2003, A History of the Harpsichord, Volume 1  Page 9).

Compléments d'information :

  • Le facteur ayant réalisé l'instrument d'Edouard III se nomme Jehan Perrot.
  • L'instrument apparaît dans divers inventaires du XIV au XVe siècle.
  • Johannes de Muris (Jean de Murs) mentionne un instrument de ce genre dans son traité Musica speculativa daté de 1323
  • Il est cité dans la liste des instruments à cordes du Tractatus de canticis vol.1 "du chant sensible" de  Jean Gerson en 1429. 
  •  Cet instrument, diversement orthographié, apparaît vers 1367 dans le texte de Guillaume de Machaut cité supra, puis en 1378 chez Eustache Deschamps.
  •  Le nom reste en usage, sans plus de précision, jusqu'au début du XIVe siècle : il apparaît sous les formes de Schachtbrett, cité en 1404 par Eberhard Cersne dans Der Minne Regel, et sous le nom de Scacarum vers 1426 par Jean Gerson dans son De canticorum originali ratione.
  • (Wikipédia, Histoire du clavecin)

 

Un damier de 81 cases.

  Ce qui ressort de l'examen des deux seules représentations de l'instrument, c'est que son damier comporte  9 x 9 soit 81 cases. Il diffère en cela de l'échiquier du jeu d'échec  et le damier du jeu de dame qui comportent 64 cases (8 x 8) jusqu'au début du XVIIIe siècle, puis 100 (10 x 10) (damier à la polonaise ou international).

Les damiers ou plateau de jeu de dès des vitraux de Chartres (Baie 35 du Fils Prodige, 1205-1215 et Baie 114 haute du donateur Colin, 1210-1225) comportent 64 cases. De même, les échiquiers des enluminures de la Bnf comptent 64 cases.

Pour trouver un jeu de 81 cases, il faut se rendre soit au Japon (Shogi), soit en Afrique saharienne où les Mauritaniens jouent toujours au jeu oriental du dhama (jeu de dames dans le sable avec 40 noyaux de dattes et 40 bâtonnets), soit chez les Celtes où le plateau à 81 cases sert de support à une sorte d'échecs nommé, en breton,  Gwezboel : En vogue du Ve siècle  jusqu'au 12e siècle ou jusqu’à la fin du Moyen Âge, cette sorte de jeu d’échec celtique est un concurrent du Tablut nordique. Les Celtes anciens  le nommaient Viducuestla, les gallois Gwyddbwyll,  les irlandais Fidchell, également orthographié fidhcheall , fidceall , fitchneal ou fithchill  , les bretons anciens guid- poill c'est à dire la science ou l'art du "bois", car leurs damiers étaient normalement de cette matière, ou "sens du bois". Le nom, identique en breton, en gallois et en irlandais  indique que le nom est d'une extrême antiquité et qu'il leur était connu vers le Ier siècle avant J-C.  Le jeu est revendiquée par de nombreux Irlandais comme le prédécesseur du jeu d'échecs moderne : le nom a évolué en ficheall , le mot irlandais pour les échecs , tout en gwyddbwyll est le nom pour les échecs en gallois moderne.

Il était joué entre deux adversaires qui bougeaient les pions à travers le plateau.

 Le Fidchell est mentionné souvent dans les anciennes légendes celtiques et les traditions , mais la forme exacte du jeu est ouverte à la spéculation , en raison de l'absence de détails sur les règles, les pièces et même le plateau. Ce qui est clair, c'est qu'il a été joué sur un plateau , avec des ensembles de pièces opposées en nombre égal . Il ne doit pas être confondu avec des jeux comme le tawlbwrdd ou tafl ( également appelé hnefatafl ), qui impliquaient un roi au centre et des pièces dans un rapport 2:1. Il pourrait avoir succéder au jeu de société romain nommé "petits soldats"  (latrunculi ), également joué avec des pièces de nombre égal ; les latrunculi sont connus dans la Bretagne romaine.

 Ce qui m'intéresse est que les légendes décrivent le fidchell ou goezboell comme un jeu joué par la royauté , et même par les dieux . Selon les Irlandais , il a été inventé par Lugh , le dieu irlandais de la lumière, et a été joué très habilement par son fils, le héros Cúchulainn. 

 On envisage aussi une origine viking, et la possibilité que ce jeu aurait voyagé avec les invasions des peuples nordiques; mais cela concerne plutôt le tawlbwrdd Gallois, lui-même descendant des jeux  nordiques nommés tafl  : des jeux joués sur une grille de 7 x 7 cases , avec le roi au milieu, et un nombre inégal de pièces.

 En outre, le fidchell , tel qu'il est décrit dans les légendes , présente souvent un aspect mystique ou divinatoire : le cours des batailles peuvent dépendre des aléas d'une partie de fidchell , une autre  déciderait de la survenue d'événements historiques  et ainsi de suite. Cet aspect surnaturel n'est pas aussi franc dans les jeux de tafl. 

Lavish conseils gwyddbwyll , parfois mystiques apparaissent souvent dans la littérature galloise médiévale . Dans le rêve de Rhonabwy, une histoire en prose associé à la Mabinogion, le roi Arthur et Owain Mab Urien jouer le jeu avec des pièces d'or sur une planche d'argent . Dans un autre conte en prose, le rêve de Macsen Wledig, Eudaf y joue tandis que l'empereur Magnus Maximus lui rend visite. L'échiquier de Gwenddoleu ap Ceidio est cité comme l'un des Treize Trésors de l'île de la Grande-Bretagne dans des listes datant du 15ème et 16ème siècles ; selon celles-ci, le plateau est d'or et les pions sont  d'argent, et les pièces jouent les unes contre les autres automatiquement. Un damier magique comparable à celui de Gwenddoleu apparaît dans le roman arthurien Peredur fils d' Efrawg. Et un certain nombre de versions françaises de l'histoire Graal disposent d'échiquiers similaires avec des pièces qui se meuvent elles-mêmes comme dans la Deuxième continuation  du Perceval de Chrétien de Troyes ou dans le Conte du Graal , bien que dans ce cas le héros joue seul contre des pièces qui se déplacent par magie.

Source de ce paragraphe :article Wikipédia Fidchell http://en.wikipedia.org/wiki/Fidchell

 

Deux symboliques différentes.

   Source : Bnf

   La différence entre 64 case et 81 cases n'est pas modeste, puisqu' elle est sous-tendue par une symbolique très forte. En effet, le jeu d'échec, d'origine brahmanique comporte 8 x 8 cases car huit est le nombre sacré de la cosmogonie hindoue : la somme des carrés des soixante-quatre cases explique la marche du temps et des siècles. L'échiquier primitif de l'ancien jeu indien est un diagramme unicolore de soixante-quatre cases. Dans l'Inde védique, une telle figure géométrique est déjà employée par les brahmanes pour établir les plans des temples et des cités. Les quatre cases centrales incarnent la résidence de Brahma, le dieu créateur, les soixante autres celles des dieux secondaires du panthéon hindou. Grecs et Perses perdent cet usage rituel du diagramme vers 600 av. J.-C. Ils établissent une table dite "huit carrés", support de nombreux jeux.C'est en effet le tchaturanga - l'ancien jeu indien des "quatre rois", ancêtre des échecs - qui a donné aux échecs sa table de jeu. Au cours de ses voyages, l'échiquier s'est parfois transformé. Il a pu être élargi à douze cases sur douze pour offrir aux armées un plus large champ de combat, ou au contraire réduit à six cases sur six, voire sept sur sept, ou encore former un rectangle de six cases sur huit. En fait, le nombre soixante-quatre est peu symbolique pour la culture occidentale qui aurait préféré trente-six, quarante-neuf ou soixante-douze cases. Mais la plupart des échiquiers médiévaux comptent soixante-quatre cases et forment un carré moyen de 40 x 40 cm. L'échiquier rond est une particularité byzantine qui n'a pas rencontré de succès ailleurs. Le quadrillage en damier noir et blanc est assez tardif. Indiens, Perses et Arabes jouèrent sur une table unicolore, parfois une grille tracée à même le sol. C'est pour des partis pris esthétiques, en réalisant des échiquiers luxueux pour le plaisir des aristocrates, que le damier s'est imposé. Il prend une dimension symbolique à partir du XIIIe siècle : "Le monde ressemble à l'échiquier quadrillé noir et blanc, ces deux couleurs symbolisant les conditions de vie et de mort, de bonté et de péché."

 

 

 

 

L'Échiquier d'Angleterre ou échiquier de musique : une origine celtique ?

   Le fait que les deux damiers de l'échiquier de musique représentés au Mans comportent 81 cases, d'une part,  que l'origine connue de cet instrument soit un don d'Edouard III au roi Jean le Bon captif en Angleterre d'autre part, et que l'instrument ait été désigné comme "échiquier d'Angleterre" alors qu'il était répandu en Europe, amène à s'interroger sur l'hypothèse d'une origine celtique de l'instrument, qui reprendrait à son compte à la fois le caractère royal du jeu de pions, ses liens avec la magie et la divination; et ses rapports avec la Matière de Bretagne, très en vogue parmi la noblesse.


Miscellanés :

a) Dans la légende arthurienne, Palamède est l' inventeur du jeu d'échec, et il porte des armes échiquetées. Dans le Tristan en prose il est le rival puis le compagnon du chevalier Tristan . Il se nomme Palamydes dans Le Morte d'Arthur ou encore Palomidès.  Sarrasin, fils du sultan de Babylone, Palamède s'est converti au christianisme avant de rejoindre la cour du roi Arthur. Instructeur de ses compagnons d'armes avec le jeu d'échecs qu'il a rapporté d'Orient, Palamède est un vaillant chevalier qui se couvre de gloire et finit par être reçu dans l'ordre de la Table ronde. L'héraldique littéraire lui a donné pour armoiries un écu en forme d'échiquier, échiqueté de sable et d'argent

b) Tristan est lui-même un grand joueur d'échec. C'est parce qu'il est trop captivé par ce jeu que des marchands norvégiens l'enlèvent de son pays natal. Il y joue avec la belle Yseut promise au roi Marc sur le bateau qui la mène vers le roi. 

Tristan et Yseut : échiquier de 7x7 cases.

82-1-.jpg 

 

http://tel.archives-ouvertes.fr/docs/00/29/38/74/PDF/theseBoekhoorn.pdf  : chien page 332 

 

 

 

 

L'ange musicien de la voûte peinte par Jean de Bruges dans la chapelle de la Vierge de la Cathédrale du Mans (1377)

 

 

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      L'Ange musicien de la Rose de la baie 217 du transept nord de la cathédrale du Mans (1430-1435).

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Une reconstitution de l'échiquier de musique :

Source image : http://instrumentmusiqueoccasion.fr/lechiquier-de-musique/

 

                      echiquier de musique

 

 

 

Sources et liens.

http://en.wikipedia.org/wiki/Tawl-bwrdd

— Anges musiciens de la chapelle de la Vierge au Mans.

http://amidache72.blogspot.fr/2014/03/anges-musiciens-de-la-chapelle-de-la.html

— KOTTICK (Edward L.) A History of the Harpsichord, Volume 1  Indiana University Press 2003, 557 pp . Page 9


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1 juin 2014 7 01 /06 /juin /2014 14:10

Les œufs et la chrysalide d'Aporia crataegi le Gazé.

 

Quelques jours après avoir observé à Crozon les premiers Gazé en vol, je trouvais une chrysalide (ancienne Gare le long de l'étang de Kerloc'h) le 20 mai.

                       016


Le 1er juin, sur la falaise séparant l'Aber de Postollonec, je remarquais une femelle en train de pondre sur un prunellier  : aux jumelles, je voyais son abdomen s' arquer pointe en bas et frapper la feuille sur laquelle elle était posée, un coup toutes les cinq secondes environ. Rapidement, elle fut importunée dans son travail par un mâle qui cherchait à s'accoupler. Je repérais l'endroit et poursuivi ma promenade. Au retour, j'allais observer le résultat, mais je ne remarquais pas tout-de-suite le petit amas jaune. Comment, sans contrôle de la vue, madame Gazé avait-elle pu aligner ses œufs avec une telle précision ?  Voir une vidéo d'André Lequet sur le spectacle de frappe chirurgicale auquel j'ai assisté :  https://www.youtube.com/watch?v=i9Sjv4i3YX8

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En les regardant à la loupe, je vis qu'ils ressemblaient à de jolis bouteilles de soda-citron cannelée et  à l'opercule étoilée dont les six branches scintillaient comme en un diadème.

Une femelle pondra environ 500 œufs ; sur cette feuille, il s'en trouve près de 120.

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les mêmes, le 24 juin :

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Voir l'incomparable site Insecte.net :http://www.insectes-net.fr/aporia/aporia2.htm

 

Le 22 juin à Kerdreux, j'assiste au même spectacle : cette femelle tête en bas m'intrigue par son comportement :

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29 mai 2014 4 29 /05 /mai /2014 18:05

Le peintre Jules Noël rétrograde ? Persiste et signe à Quimper !

  Le 1er juin 2013, j'ouvrais le débat dans ces colonnes: le peintre Jules Noël est-il délibérémment rétrograde ou emploie-t-il un N rétrograde pour signer ses œuvres par caprice passager, par égarement spéculaire ou par dysorthographie ou autre trouble de la Constellation des dys ? 

 Voir : Jules Noël à Brest, un peintre délibérément "rétrograde".  

Mes arguments pour une atteinte structurelle et durable et non pour un trouble cyclique ont du paraître particulièrement convaincants, car je n'ai reçu aucun commentaire.

  Néanmoins, je renforce ma thèse avec de nouvelles preuves, tirées d'une visite au Musée des Beaux-Arts de Quimper. En effet, ce temple de l'art a acquis  la boite de peinture de l'artiste, et, dans ce lieu intime que le peintre ne décore que pour lui même, en dehors de toute parade ostentatoire, je découvre qu'il a signé sa pochade (guère si vilaine) en commettant la faute d'inversion de la lettre capitale. 

Jules Noël (Nancy, 1810 - Alger, 1881) : Boite de peinture ayant appartenu à l'artiste. Acquisition 2000. 

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Lorsque l'on aura zoomer (cliquez pour agrandir) sur le fond de contreplaqué pour admirer la signature, ou les formes pleines de la chaloupe de Morlaix mis au sec le temps d'une marée sous un moulin pour ravauder la voile, qu'on se sera demandé si le matelot porte, ou pas, une boucle d'oreille, que l'on aura observé la planche servant d'échelle, la femme en coiffe accroupie sur la grève, ou quelqu'autre détail du gréement, il sera temps de jeter un œil aux deux toiles de Jules Noël exposées dans cette salle.

L'une est une vue du port de Brest, l'autre montre une rue de Morlaix.

Le port de Brest en 1849.

A l'instar des Vernet ou des Ozanne qui ont été séduits par la plus belle rade du monde, ses lumières, les mouvements permanents de ses navires ou le pittoresque des diverses embarcations ( Plougastel, Kerhorres aux mœurs bohémiennes), Noël a peint à plusieurs reprises le port de Brest de 1839 à 1864 : il s'agit de la quatrième vue de l'arrière-port le long des rives de la Penfeld : à vos jumelles ! Vous verrez en zoomant l'image les bagnards vêtus de rouge, dont certains se reposent au premier plan alors que d'autres gravissent la rive, sous de grands arbres.

Inutile d'ajouter que la signature du maître fait encore un pied-de-nez aux conventions.

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Les navires sont mouillés devant les bâtiments tout en longueur de la Corderie, du Bagne (254 m) et de l'Hôpital Maritime. Le drapeau (un pavillon) tricolore a été rétabli en 1830.

                jules-noel 4273c

 

Au second plan de cette vue de détail, les petits nains se révèlent être une équipe de sept bagnards portant un lourd madrier, et suivis par un surveillant. A l'arrière-plan, je crois reconnaître les bâtiments du plateau des Capucins, construits de 1841 à 1845. Il s'agit de trois grandes halles parallèles larges de 15 mètres et longs de 150 mètres.

                         jules-noel 4274c

 

 

"Une rue à Morlaix en 1830", tableau de 1870.

Sous l'église gothique Saint-Mélaine et au pied des escaliers, l'animation bat son plein, ce qui donne l'occasion à mon auguste homonyme de multiplier les détails à observer. Mais qui pourra me donner le nom, ou m'expliquer le fonctionnement du véhicule hippomobile stationné devant le ferblantier, et qui semble dépourvu de roues, la caisse paraissant suspendue entre les deux chevaux ?

 

                        jules-noel 4237c

 

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jules-noel 4240c

 

Voir aussi  La vie cachée de Joyeux Noël le brestois, conte.

Sur l'exposition Jules Noël aux Musée des Beaux-Arts de Quimper en 2005 :http://www.latribunedelart.com/jules-noel


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  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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