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11 janvier 2019 5 11 /01 /janvier /2019 12:47

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PRÉSENTATION.

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La reconstruction de l'église Saint-Ouen avait été décidée sous Louis XII en 1480, et commença par la façade occidentale. Puis les travaux se poursuivirent avec les sept travées de la nef, qui est raccordée en 1514 au chœur roman, tandis que les bas-cotés, avec leurs 12 chapelles latérales, sont édifiés sous François Ier jusqu'en 1535, et dotés progressivement de vitraux à partir de 1514 environ, et jusqu'en 1556 grâce aux dons des confréries (du Saint-Sacrement en baie 18 et 20), aux corporations (des boulangers en baie 13, des peintres  en baie 10), des familles de notables (baies 7, 8, 10, 12, 16, 17) ou du clergé (abbaye de Saint-Ouen de Rouen en baie 14, chapelain en baie 15). 

Les six chapelles du coté sud,  se succèdent ainsi d'ouest en est (vers le chœur) :

  • 1ère chapelle : baies 20 et 18  (vers 1515) : Miracles de l'Eucharistie (20), vie de saint Ouen (18) et procession de la confrérie du Saint-Sacrement (18 et 20), commanditaire.

  • 2ème chapelle : baie 16 (1516) Annonciation et Mise au tombeau offerte par le conseiller Guillaume Tesson et Jeanne Myre.

  • 3ème chapelle : baie 14 (vers 1515-1520) : saints Pierre et Paul offerte par l'abbaye de Saint-Ouen de Rouen.

  • 4ème chapelle :  baie 12  (1519) : saints Eustache, Jean, Nicolas et Mathurin offerte par 2 familles.

  • 5ème chapelle :  baie 10 (v. 1535) : Dormition de la Vierge offerte par ?.

  • 6ème chapelle : baie 8 (1535) : Vie de saint Jean-Baptiste, peinte par Mausse Heurtault et offerte par Jean de Génouville, marchand.

La baie 12 occupe donc la 4ème chapelle sud et date de 1519, elle a été offerte par deux familles figurées en donateurs et identifiées par les inscriptions et armoiries, celle de Jean de Fréville et celle de Le Tellier de Triqueville. 

Elle mesure 5 m de haut et 2,90 m de large et comporte 4 lancettes trilobées et un tympan à 13 ajours. Les lancettes sont organisées en 4 registres dans lesquels on doit séparer le pavé supérieur de 3 registres, consacré aux saints Eustache, Jean l'évangéliste, Nicolas et Mathurin et qui se lit verticalement de bas en haut lancette par lancette , le registre inférieur réservé aux donateurs et qui se lit horizontalement de gauche à droite.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE REGISTRE INFÉRIEUR.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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1°) Lancette A. L'épouse de Jean de Fréville et ses trois filles.

a) le cadre.

Malgré l'altération du vitrail, nous distinguons le cadre architecturé (grisaille sur verre blanc et jaune d'argent) avec ses pilastres et son entablement, et l'intérieur d'une pièce aux murs rouges et à la fenêtre à verres losangés. Une tenture bleue est suspendue à une tringle ; des motifs en pomme de pin dorée scandent cette étoffe damassée.

Nous reconnaissons là le tissu (aux couleurs inversées) de la chape d'un chantre de la procession de la baie 18 de Pont-Audemer, ou bien — en rouge et or — de celle d'un confrère de la même procession en baie 20, toutes les deux datées vers 1515 de la tenture derrière saint Sébastien de la baie 17, datée vers 1475,  1530 et 1551. Faut-il y voir l'indice d'un même atelier  ou, moins probablement, d'une étoffe liturgique appartenant à la sacristie de Pont-Audemer ?

b) les quatre femmes.

Leur identité est basée sur une inscription aujourd'hui illisible, mais déchiffrée au XIXe siècle, mentionnant Jehan de Fréville (représenté en lancette B) et son épouse Juanès de ....

"Juanès de" Fréville est représentée agenouillée devant un prie-dieu où est posé un ouvrage, probablement son missel ou livre d'Heures dans sa couverte. Le meuble est recouvert d'une étoffe rouge, qui se poursuit par une autre qui est rouge à étoiles blanches (verre rouge gravé).

Elle est coiffée d'un bonnet de coiffe blanc, porte une robe rouge à ceinture verte et à encolure carrée laisse voir une chaîne à maillons d'or, recouverte d'un manteau bleu à fourrure recouvrant largement les épaules.

Ses filles portent des tenues similaires.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2°) Jehan de Fréville et ses 7 fils.

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Dans la même pièce ou la même église que son épouse, Jean de Fréville figure, devant la même tenture bleue à pommes de pins d'or, agenouillé devant le même livre et devant ses sept fils. Le premier de ceux-ci est tonsuré et vêtu d'un habit blanc (dominicain ?).

L'inscription  laisse en partie deviner BLE - JOHANNES DE FREVILLE

DE -- VIC--- ECOU.

En partie haute, deux blasons portent les armes de la famille de Fréville, d’azur à 2 roses d’argent en chef et au fer de dard de même en pointe.

Les nobiliaires qui décrivent ces armes (N.V. de Saint-Allais) les distinguent de celle de Fréville, sieur de la Haye, Boutot, du Dessert  etc, appartenant aussi à l'élection de Pont-Audemer, qui porte d'argent, à trois flèches tombantes et raugées de gueules, surmontées de trois trèfles de même. On précise ailleurs que le titulaire nomme ces roses "fleurs d'épines".

Il existe donc un risque de confusion entre ces deux familles de Pont-Audemer. Dans celle de sieurs de La Haye de Routot, un certain Jean de Fréville, seul fils de Geoffroy,  se maria à Marie de la Haye le 3 février 1586 ; il eut un fils, également prénommé Jean, qui épousa Marie de Harden qui lui donna deux fils, Robert et Antoine.

Vu la notoriété de Jehan de Fréville, capable d'offrir une verrière à Pont-Audemer, et père de 10 enfants, il semble néanmoins raisonnable de l'assimiler  à celui qui fut en 1489 et 1493  garde des sceaux de Pont-Audemer et Pontautou [Pont-Authou] ; et/ ou  entre 1500 et 1525 « avocat du roi en la vicomté de Pont-Audemer », est aussi « avocat de la ville ».

 

On trouve aussi mention de Nicolas de Freville , garde des sceaux de la Vicomté, bourgeois de Pont-Audemer, sieur de La Motte jusqu'à 1456, lieutenant général du bailliage d'Evreux, en 1471,...

Différents documents  mentionnent Jehan de Fréville : ; 

http://bibnum.enc.sorbonne.fr/omeka/files/original/b68e22c2f8cb75a18c8d5b5c2ee60dd7.pdf

https://books.openedition.org/puc/9471?lang=fr

https://books.openedition.org/purh/5052

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http://www.archivesdepartementales76.net/pdf/3Bblasons.pdf

http://www.archivesdepartementales76.net/pdf/3Bblasons.pdf

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3°) Le seigneur Le Tellier en donateur.

Le décor est le même, l'étoffe damassée pourpre à pommes de pins de même teinte accueille des motifs blancs et or en fleurons.

Deux anges présentent un blason composite, en chef d'azur à trois [mains] de sable et en dessous le fragment d'un élément blanc avec des cloches pourpres (et un lambel ?).

Elles auraient été attribuées (Gatouillat 2001) à un Le Tellier de Triqueville et à son épouse Marguerite Lanyer.

L'inscription  laisse voir PONTIAU DU ROY EN VICOMTE DU PONT.

Gatouillat et al. indiquent que les fragments citaient Mathieu Dukay et Nicole Dupont (erreur pour Vicomte du Pont[audemer] ?.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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4°) La donatrice et ses trois filles.

La tenture est rouge marquée de fleurs blanches à cœur bleu.

Inscription : MMISE LA.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LES TROIS REGISTRES SUPÉRIEURS.

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Les scènes s'inscrivent toutes dans un encadrement architecturé à arc surbaissé à décor tantôt flamboyant, tantôt Renaissance.

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Lancette A : la Vie de saint Eustache.

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1°) Saint Eustache abandonne sa femme aux bateliers (peu restitué).

J'ai déjà présenté la Légende de saint Eustache et son iconographie  dans ces trois articles :

 

On trouve d'autres verrières de la vie de saint Eustache,  à Chartres (baie 43 datant de 1210)...

http://www.vitraux-chartres.fr/vitraux/43_vitrail_vie_st_eustache/index.htm

...et à la cathédrale de Sens (1200-1210) 

https://cem.revues.org/11639

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Les bases sont données au XIIIe siècle  par la Légende Dorée de Jacques de Voragine ...

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/voragine/tome03/162.htm

...et par le Miroir historial de Vincent de Beauvais.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8449688c/f43.item

Pour cet épisode, nous trouvons ce récit :

 

"Après avoir fait quelque chemin, les fugitifs arrivèrent à la mer Où ayant trouvé un vaisseau, ils s'embarquèrent. Alors  le maître du navire, voyant que la femme d'Eustache était fort belle, conçut un grand désir de la posséder. Après la traversée, il exigea d'Eustache le prix du passage, et comme ils n'avaient pas d'argent, il ordonna que cette femme fût retenue pour payement, dans la conviction de l’avoir à soi. Eustache, informé de cela, refusa absolument d'y consentir, et comme il persistait, le maître fit signe à Ses matelots de le précipiter dans la mer; afin de pouvoir ainsi posséder sa femme. Eustache, qui s'aperçut de cela, leur abandonna sa femme tout désolé, et prenant ses deux enfants, il s'en alla en versant des larmes : « Malheur à moi et à vous, dit-il, car votre mère est livrée à un mari étranger! » "

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Eustache, à gauche, tenant ses deux enfants, est très luxueusement habillé et coiffé. En face de lui, à bord d'une nef, son épouse est gardée par le maître de barque.

Trois pièces de verre rouge sont gravées.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

2°) Eustache doit traverser un fleuve et ne peut porter qu'un seul fils à la fois. Ses enfants sont enlevés par un lion et par un loup sur chaque rive du fleuve. Ils sont sauvés par deux homme mais Eustache l'ignore.

"Parvenu sur les bords d'un fleuve, il n'osa le passer avec ses deux fils à la fois, parce qu'il y avait beaucoup d'eau; mais en en laissant un sur la rive, il se mit en devoir de transporter l’autre; quand il eut passé le fleuve à gué, il posa par terre l’enfant qu'il avait porté, et se hâta de venir prendre l’autre. Il était au milieu du fleuve, lorsqu'un loup accourut tout à coup, saisit l’enfant qu'il venait de mettre sur la rive, et s'enfuit dans la forêt. Eustache, qui n'espérait pas le sauver, courut à l’autre : mais en y allant survint un lion qui s'empara du petit enfant et s'en alla. Or, comme il ne pouvait l’atteindre, puisqu'il n'était encore qu'au milieu du fleuve, il se mit à gémir et à s'arracher les cheveux. Il se serait laissé noyer, si la divine providence ne l’eut retenu. Des bergers, qui virent le lion emporter un enfant vivant, le poursuivirent avec leurs chiens, et Dieu permit que l’animal lâchât sa proie sans lui avoir fait aucun mal. D'un autre côté, des laboureurs se mirent à crier après le loup et délivrèrent de sa gueule l’autre enfant aussi sain et sauf. Or, bergers et laboureurs, tous étaient du même village et ils nourrirent les enfants chez eux. Eustache de son côté ignorait cela ; alors il s'en alla bien triste. "

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"Il delaissa la reine et prist ses enfanz et vint a tres grant pleur a un fleuve. Et pour le seuron dennit de lyaue il nosa entrer ou fleuve a tout les .II. enfans. Mais en laissa .I. a la rive et lautre porta outre.

Et li rive il revenoit arriere pour lautre porter outre , il fust en mi le fleuve et avoit lautre laissie de lautre p[er]t Vez ci que .I. lyon le ravi et l'emporta el lui. Et il desespere retourna pour espance de l'autre. Mais li rive il sen aloit vez ci un lou et emporta lautre semblablement et sen ala. Et pour ce que il estoit ou mi lieu du fleuve ne il ne pot avoir icelui. Il vin ca a pleurer et plaindre et tirer ses cheveux et rompre. Et se voult gerer en lyaue. Mesme sire retint sa pensee qui veoit avaut les choses a venir. Et les pasteurs escoustrent lenfant au lyon avec leurs chiens. Et les areurs osterent aussi lautre au lou. Et ainsi les .II. enfans furent nourriz en une vue. Mais vraiement eustace ne le sotnne. Mais s'en ala a pleurs et a lermes en une ville et la garda par .XV. ans les champs des hommes." (Vincent de Beauvais, BnF NAF 15941 ).

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Vincent de Beauvais, BnF NAF 15941

 

Eustache est au milieu du gué, avec de l'eau à mi-jambes. Il garde le luxueux habit de la scène précédente, tunique bleue à ceinture violette, manteau rouge doublé de fourrure, étoffe verte à crevés au poignets, toque rouge. Les verres rouges sont gravés ( médaillons du chapeau et boutons du manteau).

À droite, un lion tient un des fils dans sa gueule, au moment où un paysan élève son glaive.

À gauche, même scène avec le second fils attaqué par un loup. (verre gravé rouge).

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3°) Eustache et les siens refusent de sacrifier aux idoles : l'empereur les fait supplicier dans un taureau d'airain rougi au feu.

 

"Mais Eustache lui dit: « Le Dieu que j'adore, c'est Jésus-Christ., et je n'offre de sacrifices qu'à lui seul. » Alors l’empereur, en colère, ordonna de les exposer dans le cirque avec sa femme et ses enfants, et fit lâcher contre eux un lion féroce. Le lion accourut, et baissant la tête comme s'il eût. adoré ces saints personnages il s'éloigna d'eux humblement. L'empereur ordonna aussitôt de faire rougir au feu un taureau d'airain, et commanda de les y jeter tout vifs. Les saints se mirent donc en prières et se recommandant à Dieu, ils entrèrent dans le taureau où ils rendirent leur âme au Seigneur. Trois jours après, on les en tira en présence de l’empereur; et on les retrouva intacts au point que pas même leurs cheveux, ni aucune partie de leurs membres n'avait été atteinte par l’action du feu. Les chrétiens prirent leurs corps et les ensevelirent en un endroit fort célèbre où ils construisirent un oratoire. Ils pâtirent sous Adrien qui commença à régner vers l’an du Seigneur 120, aux calendes de, novembre, ou, d'après quelques auteurs, le douze des calendes d'octobre (20 septembre)." Légende dorée.

On discerne bien le taureau d'airain contenant Eustache, sa femme et ses deux fils, un bourreau s'activant à attiser le feu, les flammes (verre rouge gravé), mais aussi l'empereur et un bourreau.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Lancette B. Vie de saint Jean l'évangéliste.

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1°) Supplice de saint Jean à la Porte latine.

"L’apôtre et évangéliste Jean, lorsque après la Pentecôte les apôtres se séparèrent, se rendit en Asie, où il fonda de nombreuses églises. Or, l’empereur Domitien, ayant appris sa renommée, le manda à Rome, et le fit plonger dans une chaudière d’huile bouillante ; mais le saint en sortit sain et sauf, de même qu’il avait échappé à la corruption des sens. Ce que voyant, l’empereur le relégua en exil dans l’île de Patmos, où, vivant seul, il écrivit l’Apocalypse." Légende dorée https://fr.wikisource.org/wiki/La_L%C3%A9gende_dor%C3%A9e/Saint_Jean

 

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2°) Vision de l'Apocalypse 1:12-20. 

Saint Jean agenouillé voit sept chandeliers , et le Fils d'homme tenant sept étoiles et une épée, dans une trouée de lumière.

Je me retournai pour connaître quelle était la voix qui me parlait. Et, après m'être retourné, je vis sept chandeliers d'or, et, au milieu des sept chandeliers, quelqu'un qui ressemblait à un fils d'homme, vêtu d'une longue robe, et ayant une ceinture d'or sur la poitrine. Sa tête et ses cheveux étaient blancs comme de la laine blanche, comme de la neige; ses yeux étaient comme une flamme de feu;  ses pieds étaient semblables à de l'airain ardent, comme s'il eût été embrasé dans une fournaise; et sa voix était comme le bruit de grandes eaux. Il avait dans sa main droite sept étoiles. De sa bouche sortait une épée aiguë, à deux tranchants; et son visage était comme le soleil lorsqu'il brille dans sa force." Ap. 1:12-20 L. Segond)

Verre rouge gravé pour les rais de lumière sur l'embrasement rouge.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3°) Saint Jean debout bénissant la coupe de poison à Éphèse.

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"Alors le grand prêtre Aristodème souleva une sédition dans le peuple, au point que les deux partis s’apprêtaient à en venir aux mains. Et l’apôtre lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour t’apaiser ? » Et lui : « Si tu veux que je croie en ton Dieu, je te donnerai du poison à boire ; et, s’il ne te fait aucun mal, c’est que ton Dieu sera le vrai Dieu. » Et l’apôtre : « Fais comme tu l’as dit ! » Et lui : « Mais je veux que d’abord tu voies mourir d’autres hommes par l’effet de ce poison, pour en constater la puissance ! » Et Aristodème demanda au proconsul de lui livrer deux condamnés à mort : il leur donna à boire du poison, et aussitôt ils moururent. Alors l’apôtre prit à son tour le calice, et, s’étant muni du signe de la croix, il but tout le poison et n’en éprouva aucun mal : sur quoi tous se mirent à louer Dieu."  Légende dorée https://fr.wikisource.org/wiki/La_L%C3%A9gende_dor%C3%A9e/Saint_Jean

Le serpent ou dragon qui sort de la coupe, selon l'iconographie, est ici stylisé par des virgules blanches gravées sur verre rouge.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Lancette C : Vie de saint Nicolas.

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La légende de saint Nicolas est également illustrée à Pont-Audemer en baie 9.

Voir la Légende dorée :

https://fr.wikisource.org/wiki/La_L%C3%A9gende_dor%C3%A9e/Saint_Nicolas

1°) Saint Nicolas ressuscite les trois enfants.

Les trois enfants sortent du saloir. Nous retrouvons le verre rouge gravé d'étoiles déjà rencontré à deux reprises.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2°) Saint Nicolas dote les trois jeunes filles.

Le vieil homme dont la maladie a entraîné la misère et qui envisageait de prostituer ses trois filles en désespoir de cause est représenté dans son lit mains jointes. Saint Nicolas, vêtu en évêque, est à l'intérieur de la chambre et jette une bourse à l'une des trois filles qui sont agenouillées.

Nouvelle occurrence du verre rouge gravé d'étoiles.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3°) Saint Nicolas et le débiteur de mauvaise foi.

Certain homme avait emprunté de l’argent à un Juif, en lui jurant, sur l’autel de saint Nicolas, de le lui rendre aussitôt que possible. Et comme il tardait à rendre l’argent, le Juif le lui réclama : mais l’homme lui affirma le lui avoir rendu. Il fut traîné devant le juge, qui lui enjoignit de jurer qu’il lui avait rendu l’argent. Or l’homme avait mis tout l’argent de sa dette dans un bâton creux, et, avant de jurer, il demanda au Juif de lui tenir son bâton. Après quoi il jura qu’il avait rendu son argent. Et, là-dessus, il reprit son bâton, que le Juif lui restitua sans le moindre soupçon de sa ruse. Mais voilà que le fraudeur, rentrant chez lui, s’endormit en chemin et fut écrasé par un chariot, qui brisa en même temps le bâton rempli d’or. Ce qu’apprenant, le Juif accourut : mais bien que tous les assistants l’engageassent à prendre l’argent, il dit qu’il ne le ferait que si, par les mérites de saint Nicolas, le mort était rendu à la vie : ajoutant que lui-même, en ce cas, recevrait le baptême et se convertirait à la foi du Christ. Aussitôt le mort revint à la vie ; et le Juif reçut le baptême."

La représentation du récit n'est que partielle, mais nous voyons bien le débiteur malhonnête allongé à terre, son bâton brisé laissant se répandre les pièces d'or.

Le Juif est coiffé du bonnet et porte la barbe : sa tunique est faite d'un verre rouge gravé de bandes régulières.

Le juge est entouré de ses conseillers.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Lancette D : Vie de saint Mathurin.

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Saint Mathurin est aussi représenté à Pont-Audemer en baie 17, avec la reine Théodora à ses pieds.

http://www.lavieb-aile.com/2018/12/la-verriere-des-saints-mathurin-sebastien-jacques-et-jean-baptiste-a-pont-audemer.html

J'ai déjà décrit les 8 panneaux de la verrière de Moncontour (Ille-et-Vilaine) contemporaine de celle-ci puisque datant de 1525. Je renvoie à cet article pour les textes et l'iconographie commentant la légende.

http://www.lavieb-aile.com/2018/03/les-vitraux-de-moncontour.v.la-verriere-de-la-vie-de-saint-mathurin-vers-1500-1525.html

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1°) Saint Mathurin guérit les possédés.

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Le saint bénit des possédés et des infirmes tandis que deux diablotins s'enfuient.

Nouvel exemple d'un verre rouge gravé.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2°) Scène perdue remplacée par une macédoine.

On y trouve une tête de Michel archange, une inscription EGO SUM QUI venant de l'Apocalypse, une petite inscription DESCEND...LINNOCENT...FOU.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3°) Saint Mathurin sauve un navire démâté par les démons.

Voir le 8ème panneau de Moncontour où, en route vers Rome, saint Mathurin s'endort dans le bateau et une tempête se lève. Il l' apaise et aborde à l'île St-Honorat (Lèrins) où deux anges le conduisent à la chapelle.

Les trois démons s'enfuyant et les deux anges sur l'île de Lérins sont bien visibles

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE TYMPAN.

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Jugement dernier et résurrection des morts.

De haut en bas, le Christ, Marie et Jean, les anges buccinateurs, les hommes et femmes sortant de leur tombe, dont un pape, un évêque, un moine, un roi. En bas, les démons.

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Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints ..., (1519), baie 12 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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SOURCES ET LIENS.

 

Sources principales : — GATOUILLAT ( Françoise), CALLIAS-BEY (Martine), CHAUSSÉ (Véronique), HÉROLD (Michel), 2001, Eglise Saint-Ouen in Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum / Recensement des vitraux anciens de la France VI, Paris, CNRS, 2001. p. 193.

— LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ;

— MONTIER, (Armand), 1895,Les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, Pont-Audemer, Impr. du Commerce, G. Hauchard, 1895 ;

— MONTIER, (Armand), 1896, "L'église Saint-Ouen à Pont-Audemer", Normandie monumentale et pittoresque p. 109.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62406567/f145.item

En complément :

— PERROT (Françoise), 1972, M. Baudot et J. Lafond. Églises et vitraux de la région de Pont-Audemer, numéro spécial des Nouvelles de l'Eure, 3e trimestre 1969 , [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1972  130-1  pp. 87-88

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1972_num_130_1_5138_t1_0087_0000_3

— PHILIPPE-LEMAITRE (Delphine) 1853, Notice sur les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer (Eure), Rouen, non consulté

— REGNIER (Louis)  en 1899, non consulté.

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Published by jean-yves cordier - dans Vitraux
8 janvier 2019 2 08 /01 /janvier /2019 14:39

La verrière de saint Pierre et de saint Paul (vers 1515-1520) ou baie 14  de l'église Saint-Ouen de Pont-Audemer.

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Voir :

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PRÉSENTATION.

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La reconstruction de l'église Saint-Ouen avait été décidée sous Louis XII en 1480, et commença par la façade occidentale. Puis les travaux se poursuivirent avec les sept travées de la nef, qui est raccordée en 1514 au chœur roman, tandis que les bas-cotés, avec leurs 12 chapelles latérales, sont édifiés sous François Ier jusqu'en 1535, et dotés progressivement de vitraux à partir de 1514 environ, et jusqu'en 1556 grâce aux dons des confréries (du Saint-Sacrement en baie 18 et 20), aux corporations (des boulangers en baie 13, des peintres  en baie 10), des familles de notables (baies 7, 8, 10, 12, 16, 17) ou du clergé (abbaye de Saint-Ouen de Rouen en baie 14, chapelain en baie 15). 

Les six chapelles du coté sud,  se succèdent ainsi d'ouest en est (vers le chœur) :

 

  • 1ère chapelle : baies 20 et 18  (vers 1515) : Miracles de l'Eucharistie (20), vie de saint Ouen (18) et procession de la confrérie du Saint-Sacrement (18 et 20), commanditaire.

  • 2ème chapelle : baie 16 (1516) Annonciation et Mise au tombeau offerte par le conseiller Guillaume Tesson et Jeanne Myre.

  • 3ème chapelle : baie 14 (vers 1515-1520) : saints Pierre et Paul offerte par l'abbaye de Saint-Ouen de Rouen.

  • 4ème chapelle :  baie 12  (1519) : saints Eustache, Jean, Nicolas et Mathurin offerte par 2 familles.

  • 5ème chapelle :  baie 10 (v. 1535) : Dormition de la Vierge offerte par ?.

  • 6ème chapelle : baie 8 (1535) : Vie de saint Jean-Baptiste, peinte par Mausse Heurtault et offerte par Jean de Génouville, marchand.

La baie 14 occupe donc la 3ème chapelle sud et date vers 1515-1520, elle mesure 5 m. de haut et 3,15 m de large et comporte 4 lancettes trilobées et un tympan à 11 ajours.  Elle a probablement été offerte par les abbés de Saint-Ouen de Rouen, auxquels était attribuée cette chapelle comme en témoigne leurs armes à la clé de voûte, les armes de France posés sur la clef de saint Pierre et le glaive de saint Paul. "Or aucun lien spirituel ou juridique n'est connu entre le monastère rouennais et la paroisse, dont le patronage appartenait à l'abbaye Saint-Pierre-des-Préaux. On est conduit à supposer une libéralité des religieux de saint-Ouen qui aurait permis d'édifier la chapelle et de la doter d'un vitrail consacré non pas à saint Ouen, déjà pourvu, mais aux saint Pierre et Paul, sous l'invocation desquels était fondée  l'abbaye royale." (J. Lafond)

 Le registre inférieur représente 4 saints (Jean-Baptiste, Sébastien, Antoine et Jacques le majeur) et le registre supérieur des scènes de vie des saints Pierre et Paul. Au tympan, la Vierge entourée d'anges musiciens.

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"L'admirable composition du tympan rappelle d'abord le vitrail précédent [ baie 16, vers 1516, de l'Annonciation ]. Dans la fleur de lys que dessinent les meneaux, un luxuriant plant de lis porte la Sainte Vierge et l'Enfant Jésus, entourés dune cour de séraphins bleus. Les autres compartiments sont peuplés d'anges musiciens sur fond rouge.

Cependant, les deux ouvrages sont d'une facture très différente. L'élégance un peu sèche est remplacée ici par une verve truculente dans les tableaux du registre supérieur où l'on voit saint Pierre marchant sur les flots, le supplice du prince des apôtres sur une croix fourchue où il est attaché la tête en bas ; la conversion de saint Paul sur le chemin de Damas et sa décollation aux Trois-Fontaines.

Au dessous, quatre figures sont debout devant des niches à coquille encadrées de fines colonnettes. Ce sont saint Jean-Baptiste (dont la tête est moderne), saint Sébastien, saint Antoine flanqué de son cochon, et saint Jacques le Majeur en costume de pèlerin. Ici, le style se relève et c'est la noblesse qui prend le dessus.

Dans ce vitrail abondent les souvenirs d'Arnoult de Nimègue et aussi du Maître de saint Jean-Baptiste. C'est encore une œuvre rouennaise des environs de 1520, où la technique est caractérisée notamment par l'emploi d'un verre bleu plaqué et gravé dans la bride du cheval de saint Paul, le nimbe de saint Pierre, etc.)." (Jean Lafond)

 

 

 

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE REGISTRE INFÉRIEUR.

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Des dais à coquilles avec dais ornés soutenus par de fins balustres et socles vus en perspective abritent successivement les saints Jean-Baptiste (tête restituée au XIXe siècle), Sébastien et ses flèches, Antoine avec son cœur enflammé, son cochon, son chapelet  et sa canne en tau, et  enfin Jacques le Majeur.

Les deux nimbes latéraux portent des inscriptions que je n'ai pas pris le temps d'étudier.

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE REGISTRE SUPÉRIEUR.

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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1°) Saint Pierre marchant sur les eaux après la Pêche miraculeuse sur le lac  de Tibériade. 

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J'ai d'abord  penché pour l'Apparition de Jésus à Pierre après sa Résurrection  selon le récit de Jean 21:11-15.  Pourtant, Jésus ne porte aucun attribut du Ressuscité. Il s'agit donc  de la Pêche miraculeuse et de Pierre marchant sur les eaux selon Matthieu 14:15-21.

https://www.biblegateway.com/passage/?search=Jean%2021&version=LSG;VULGATE

Le peintre a représenté deux nefs marchandes du XVe siècle. La première est au mouillage, c'est une caraque à deux mâts, coque ronde à clins, château arrière, et deux saints apôtres (André et Jean) relèvent le filet. Sous la vergue, le verre offre de belles teintes rosées.

Verre verre rouge gravé pour le nimbe de Pierre.

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2°) Néron et le crucifiement de saint Pierre.

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On y remarque sur le plan technique :

- Le verre rouge gravé pour le nimbe du saint, pour l'épée du bourreau, le médaillon d'une toque.

- Le verre bleu gravé pour le bonnet du bourreau.

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Sur le plan stylistique, Jean Lafond a rapproché cette verrière des styles d'Arnoult de Nimègue, et du Maître de saint Jean-Baptiste. Ce dernier nom est un "nom de convention" dont les œuvres attribuées ont été ré-étudiées par Michel Hérold. Il s'agirait d'un atelier rouennais, possédant des cartons issus d'un atelier d'un peintre parisien assimilé au Maître des Très Petites Heures d'Anne de Bretagne Jean d'Ypres.

Dans le cadre de ce travail, Michel Hérold a souligné l'emploi des mêmes cartons pour les scènes de la vie de saint Jean-Baptiste à Bourg-Achard, Saint-Romain de Rouen, Conches, ou à Louviers .

De même, des cartons identiques ont été employés (par le Maître de Montmorency) pour la baie 20 de Pont-Audemer et pour la verrière des Miracles de l'Eucharistie de Nogent-le-Roi (et des tapisseries de Ronceray).

F. Gatouillat & al. écrivent : "d'autres verrières procèdent de cartons fournis par des peintres d'origine probablement flamande (baie 14, 16 et scènes des lancettes de la baie 20)".

Par contre, je n'ai pas trouvé de rapprochement entre ce Crucifiement et celui de la baie 24 de Louviers :

http://www.lavieb-aile.com/2018/11/la-verriere-de-saint-claude-de-l-eglise-de-louviers.html

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Baie 24 de Louviers. Photographie lavieb-aile.

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Certes, on ne peut pas parler d'identité de patron à grandeur et de mise en plombs, mais d'un modèle (peinture, gravure) commun.

L'un des éléments qui diffère est, à Pont-Audemer,  la bande dorée centrale dotée d'une inscription.  Mais cette dernière rappelle immédiatement celle qui descend de Dieu le Père vers son Fils sur les Baptêmes du Christ par Jean-Baptiste des verrières de Bourg-Achard, Conches, Louviers, Saint-Romain de Rouen et Philadelphie. Par le "maître de la vie de saint Jean-Baptiste".

http://www.lavieb-aile.com/2018/11/la-verriere-du-bapteme-du-christ-et-de-la-procession-des-drapiers-de-l-eglise-de-louviers.html

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Louviers, (baie 26, Maître de la vie de saint Jean-Baptiste vers 1500-1510). photographie lavieb-aile.

 

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Ce bandeau d'inscription, vertical, est un trait stylistique à mon sens suffisamment discriminant pour en faire un critère d'appartenance à un atelier commun, actif dans l'Eure et la Seine-Maritime , a priori identique à celui étudié par M. Hérold dans son analyse du Maître de la Vie de saint Jean-Baptiste.

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Néron est présent à gauche, tenant un bâton de commandement et vêtu d'un manteau rouge à revers damassé. Il est coiffé de ce qui peu être considéré comme une couronne. Une dague est passée à sa ceinture, où est appendue une aumônière.

Derrière lui, les quatre personnages, coiffés qui d'une toque, qui d'un bonnet, qui d'un chaperon, peuvent être considérés comme ses officiers ou conseillers.

À droite, le personnage principal est le bourreau chargé de hisser la croix. L'artiste lui a donné tous les traits du type : la gestuelle pleine de dynamisme, la chemise débraillée aux manches relevées, les collants bleus à la braguette avantageuse, et la trogne moustachue, mais c'est un soldat portant épée.

Derrière lui, c'est le peuple des curieux à la discussion très animé, mais l'un des hommes, richement vêtu et coiffé d'un bonnet conique à turban, portant l'aumônière à la ceinture, est désigné par l'artiste, selon les codes en vigueur, comme un Juif : cette disposition lui donne un rôle équivalent à celui de Néron dans la responsabilité du martyre.

En bas, un second bourreau est représenté comme le premier, mais le peintre l'a figuré en plein effort, un pied arc-bouté à un montant de la croix, et le tronc renversé en arrière. Ses cheveux sont réunis en chignon.

Saint Pierre est crucifié vêtu d'un manteau bleu noué autour des chevilles, comme à Louviers où j'ai déjà étudié cette tradition iconographique.

dans la tête de lancette, Dieu, au visage christique, lui envoie sa bénédiction depuis les nuées.

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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L'inscription centrale.

Elle possède la même position axiale, les mêmes proportions, les mêmes couleurs, le même encadrement par un double trait, la même écriture que celles des Vies de saint Jean-Baptiste, et, comme elles, elles descendent de la Divinité placée au dessus et dont elle porte la parole. Pourtant, celle-ci est composée de deux parties inversées quant au sens de lecture. D'autre part, le texte n'en est pas directement en rapport avec la scène représentée.

La portion supérieure (sans doute inversée lors d'une restauration, ou provenant d'une verrière différente) porte les mots : GAUDE TE MEAUN.

On imagine volontiers qu'il faille lire Gaudete meam ou Gaudete meum. Des mots (Réjouis-toi avec moi ?) qui se retrouvent en Luc 15, dans un contexte bien différent. Le mystère reste entier.

La partie inférieure, qui descend correctement de Dieu vers son Apôtre, porte les mots : NOLITE FLERE SED

C'est à nouveau dans l'évangile de Luc que nous trouvons ce fragment : Luc 28.29.30 

https://www.biblegateway.com/passage/?search=Luc%2023&version=LSG;VULGATE

http://gregorien.info/chant/id/3335/0/fr

Filiae Ierusalem, nolite flere super me,
sed super vos ipsas flete et super filios vestros,

 

Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi,
mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants ;

Rien n'explique la présence de ce verset fragmentaire ici.

J'en suis là de mes pérégrinations lorsque je songe à interroger le moteur de recherche en replaçant les fragments sous la forme  nolite flere sed gaudete meum ... et je parviens  à cet antienne qui me donne tout l'éclaircissement :

 

Dum duceretur Petrus apostolus ad crucem,
repletus gaudio magno, dixit:
Non sum dignus ita esse in cruce sicut Dominus meus,
qui de Spiritu Sancto conceptus est.
Me autem ex limo terrae ipse formavit;
ita crux mea caput meum in terris debet ostendere.
At illi verterunt crucem,
et pedes eius sursum confixerunt, manus vero deorsum.
Dum esset Petrus in cruce,
venit turba multa maledicens Caesarem,
et fecerunt planctum magnum ante crucem.
Petrus exhortabat eos de cruce dicens:
Nolite flere, sed gaudete mecum,
quia ego hodie vado vobis parare locum
et cum hoc dixisset, ait:
Gratias tibi ago, pastor bone,
quia oves quas tradidisti mihi compatiuntur mecum;
peto namque ut participentur mecum de gratia tua in sempiternum.

Traduction :  P. Gueranger, L'Année liturgique 1911 : https://archive.org/details/lanneliturgiqu12gu/page/470

 

"Comme l'on conduisait Pierre l'Apôtre à la croix,

rempli d'une grande joie, il dit :

Je ne suis pas digne d'être sur la croix comme mon seigneur

qui lui fut conçu du Saint-Esprit,

tandis que moi j'ai été formé par lui du limon de la terre

Ainsi ma croix à moi doit montrer ma tête en la terre.

On tourna donc la croix ; on cloua ses pieds en haut et ses mains en bas.

Pendant que Pierre était en croix, vint une grande multitude maudissant César, et ce fut une grande lamentation devant la croix.

Pierre, de la croix, exhortait tout ce peuple, et il disait :

Ne pleurez pas, mais réjouissez-vous avec moi,

parce que je m'en vais aujourd'hui vous préparer une place.

Et ayant dit cela, il ajouta :

Bon Pasteur, je vous rends grâces de ce que les brebis que vous m'avez confiés s'unissent de cœur à mes souffrances ;

faites donc, je vous en prie, qu'elles participent comme moi à votre grâce dans l'éternité."

 

Cette antienne provient de la liturgie de la célébration de la Fête de saint Pierre et saint Paul le 29 juin In natali apostolorum Petri et Pauli ,  et on la trouve aussi  dans les Bollandistes (Acta sanctorum novembre, tome 67 1925 page 110) pour la fête de saint Ursin, 1er évêque de Bourges dont la tradition en fait un contemporain du Christ et des apôtres, le faisant assister à la Cène, au lavement des pieds, à la Passion du Seigneur, à sa Résurrection, à l’Ascension et à la Pentecôte jusqu’à suivre saint Pierre à Rome.

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Elle  est chantée depuis bien longtemps, puisqu'on la trouve dans les Antiphonaires du XIIe siècle avec une notation en grégorien. Le site gregorien.info en donne 4 références.

http://gregorien.info/chant/id/2505/9/fr


1°) Benevento, Biblioteca Capitolare 34 f.  207  

A. Mocquereau, 1937 paléographie musicale XV, le codex VI.34 de la Bibliothèque capitulaire de Bénévent (XIe-XIIe siècle) page 207*

https://archive.org/stream/palographiemusic15macq#page/208/mode/1up

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2°) Cambrai, Bibliothèque municipale 0075 (0076) - St-Vaast d’Arras f. 12v : DE SANCTO PETRO AD ...

https://bvmm.irht.cnrs.fr/consult/consult.php?mode=ecran&corpus=manuscrit&COMPOSITION_ID=4675&IMAGE_ID=530616

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3°) Ivrea, Biblioteca Capitolare 60 - Gr. Ivrea IV 60

4°)Monza, Basilica di S. Giovanni Battista - Biblioteca Capitol C. 12/75 - Ant. Monza

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3°) La Conversion de saint Paul sur le chemin de Damas.

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Verres rouges gravés : buste de Dieu ; toques des deux cavaliers.

Verre bleu gravé : harnachement des deux chevaux.

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La scène de la conversion de Paul, alors prénommé Saul, sur le chemin qui le mène à Damas à la tête d'une troupe de soldats, est très connue et très fréquemment représentée.  Elle illustre le début du chapitre IX des Actes des apôtres : Actes IX:1-7

"Cependant Saul, respirant encore la menace et le meurtre contre les disciples du Seigneur, se rendit chez le souverain sacrificateur,

et lui demanda des lettres pour les synagogues de Damas, afin que, s'il trouvait des partisans de la nouvelle doctrine, hommes ou femmes, il les amenât liés à Jérusalem.

 Comme il était en chemin, et qu'il approchait de Damas, tout à coup une lumière venant du ciel resplendit autour de lui.

Il tomba par terre, et il entendit une voix qui lui disait: Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu?

 Il répondit: Qui es-tu, Seigneur? Et le Seigneur dit: Je suis Jésus que tu persécutes. Il te serait dur de regimber contre les aiguillons.

 Tremblant et saisi d'effroi, il dit: Seigneur, que veux-tu que je fasse? Et le Seigneur lui dit: Lève-toi, entre dans la ville, et on te dira ce que tu dois faire.

 Les hommes qui l'accompagnaient demeurèrent stupéfaits; ils entendaient bien la voix, mais ils ne voyaient personne."

 

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Nous pourrions comparer cette peinture à celle du Maître de Dunois, pour les Heures de Prigent de Coëtivy (entre 1443 et 1450) : Dublin, Chester Beaty Library  CBL W 082 f. 260 : j'y retrouve saint Paul encore sur son cheval mais renversé sur son encolure bras écartés, tandis que son manteau qui s'envole témoigne de la soudaineté de l'événement. Et le cheval lui-même, terrassé par l'épouvante, au riche harnachement, et dont la tête très expressive est peinte en enfilade.

L'intervention de Dieu est figurée, dans cette enluminure, par un rayonnement partant de Dieu et atteignant la tête du cavalier, englobant  le phylactère avec les mots Saule, saule, quid persecutis : ce que le peintre-verrier a repris à Pont-Audemer sous la forme du bandeau vertical qui le caractérise.

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Mais ici, le peintre a choisi de placer la troupe de six cavaliers romains casqués et en armure en deuxième plan entre Paul et Dieu le Père. Ainsi qu'un noble personnage, également à cheval, qui tend la main vers le saint, et retiens son manteau.

L'ensemble est plus animé et dramatique que l'enluminure peinte par Fouquet pour les Heures d'Etienne Chevalier . Mais dans tous les cas, la colonne de lumière verticale accompagne les mêmes mots Saule saule quid persecutis.

Nous pourrions multiplier les références plus tardives, les comparaisons.

Par exemple avec le vitrail de l'église de Iffs en Bretagne (baie 2, vers 1550)

http://www.lavieb-aile.com/article-les-vitraux-de-l-eglise-des-iffs-107930990.html

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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L'inscription.

Sa disposition verticale partant de la figure divine supérieure, ses proportions, sa couleur, l'écriture utilisé, ou l'encadrement par une double ligne jaune sur le fond rouge, créent un parallèle immédiat entre les deux scènes qui sont deux théophanies.

 

 

SAULE SAULE QUID ME PERSEQUERIS.

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C'est ce verset des Actes des Apôtres IX:4  qui accompagne cette scène de la Conversion et qui la résume, dans les enluminures comme dans la liturgie. 

Et cadens in terram audivit vocem dicentem sibi : Saule, Saule, quid me persequeris?

 Qui dixit: Quis es, domine? Et ille: Ego sum Jesus, quem tu persequeris: durum est tibi contra stimulum calcitrare.

grec original:  Σαοὺλ Σαούλ, τί με διώκεις;εἶπεν δέ· Τίς εἶ, κύριε; ὁ δέ· Ἐγώ εἰμι Ἰησοῦς ὃν σὺ διώκεις·

" Il tomba par terre, et il entendit une voix qui lui disait: Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu?  Il répondit: Qui es-tu, Seigneur? Et le Seigneur dit: Je suis Jésus que tu persécutes. Il te serait dur de regimber contre les aiguillons (*)." (Segond)

(*) Ou bien : "de regimber contre l'aiguillon"

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Au fur et à mesure de mon examen des vitraux, je comprends que ceux-ci servent d'illustrations à des scènes cultes, parfaitement connues des fidèles par une quantité de medium : textes liturgiques (antiennes) prononcés à l'office, livres d'heures, bréviaires, livre imprimé, antiennes chantées en grégorien, motets composés en polyphonie, peintures, sculptures, mais aussi, comme l'avait souligné Émile Mâle, le théâtre religieux.

a) Grégorien et motets :

https://www.youtube.com/watch?v=crFE35g5MKQ

Motets de Jean Le Brung, Treize livres de motets parus chez Pierre Attaingnant en 1534 et 1535.

https://imslp.org/wiki/Saule%2C_Saule_quid_me_persequeris_(Le_Brung%2C_Jean)

b) théâtre religieux du XVe siècle. "Tu fais que fol et que felon"

Manuscrit de la bibliothèque Sainte-Geneviève retranscrit par A. Jubinal en 1837

https://books.google.fr/books?id=a2J1xccH8ScC&dq=%22tu+fais+que+fol+et+que+felon%22&hl=fr&source=gbs_navlinks_s

SAULUS, en alant.
Alon en à Damas bon erre.
Le cuer d’ire ou ventre me serre
De ce que ces faulz crestiens,

Ces faulz bougres, cez ruffiens,
Sy vont nostre loy destruisant.
Certes je leur seray nuysant
Dore-en-avant quenque porray;
Ou ilz mourront ou je morray.
Brief et court n’en faut plus parler.

Ses compaignons.

Or tost, tost, penssons de l’aler.

Lors sy comme Saules passera par dessoulz Paradis , Jhésus prengne .l. brandon ardant, et gete sus ly, et lors il se lesse cheoir à terre.

JHÉSUS die :
Saulé, Saulé , tropt es testu.
Dy pour quoy me guerroies tu?

SAULUS.
Qui es tu qui es cy venus?
muses,
Je suis Jhesus Nazarethus
Que tu poursuis, quant guerroiant
Vas ceulz qui en moy vont croiant.
Tu fais que fol et que félon
De regiber contre aguillon.

 

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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4°) La décollation de saint Paul.

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Paul est décapité sur ordre de l'empereur Néron, qui se tient à gauche, tenant son bâton de commandement. Derrière lui, sept personnages, dont deux portent le bonnet conique caractérisant les Juifs.

À droite, le bourreau rengaine son épée. Il tient sa toque à plumet en main droite. C'est un soldat, qui a revêtu une cuirasse au dessus d'une tunique dorée et de chausses bleues, tous deux à crevés. Le détail "qui fait vrai" (et que Lafond relève sans l'expliquer) réside dans la jambe droite dont la chausse est relevé jusqu'à la racine de la cuisse. Il s'agit d'une précaution professionnelle afin d'éviter que le geste ne soit entraver. (Dans la décollation de Jacques le Majeur, Fouquet , le bourreau porte un tablier ; ailleurs, les deux jambes sont nues, au dessus de bottes).

Voir d'autres exemples ici :

Maître de Boucicaut, Décollation de saint Denis, Châteauroux BM 0002, Bréviaire de Louis de Guyenne f. 364

 

http://www.enluminures.culture.fr/public/mistral/enlumine_fr?ACTION=RETROUVER&FIELD_2=SUJET&VALUE_2=DECOLLATION%20DE%20SAINT%20NICAISE&NUMBER=3&GRP=0&REQ=%28%28DECOLLATION%20DE%20SAINT%20NICAISE%29%20%3aSUJET%20%29&USRNAME=nobody&USRPWD=4%24%2534P&SPEC=9&SYN=1&IMLY=&MAX1=1&MAX2=100&MAX3=100&DOM=All

http://www.enluminures.culture.fr/public/mistral/enlumine_fr?ACTION=CHERCHER&FIELD_2=SUJET&VALUE_2=%27DECOLLATION%20DES%20SAINTS%20FUSCIEN,%20VICTORIC%20ET%20GENTIEN%27

http://www.enluminures.culture.fr/public/mistral/enlumine_fr?ACTION=CHERCHER&FIELD_2=SUJET&VALUE_2=DECOLLATION%20DE%20SAINT%20CORNEILLE

Le bourreau saisit la victime par les cheveux, qu'il a pris le soin de nouer : c'est ce que nous voyons sur la tête de Paul, à terre.

Verre rouge gravé : le chapeau de Néron et un bonnet conique.

Pièce montée en chef d'œuvre : le médaillon sur la poitrine de Néron.

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE TYMPAN.

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Vierge à l'Enfant couronnée, au sein d'une mandorle de chérubins dorés, au dessus d'un lis dans un vase.

 

Dix-huit chérubins bleus.

Trois paires d' anges musiciens (cartons renversés) : harpe, mandore, et une représentation plus rare, celle d'une viole de gambe.

Deux anges orants.

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Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des saints Pierre et Paul (vers 1515-1520), baie 17, église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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SOURCES ET LIENS.

Source principale :

— GATOUILLAT ( Françoise), CALLIAS-BEY (Martine), CHAUSSÉ (Véronique), HÉROLD (Michel), 2001, "Eglise Saint-Ouen" in Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum / Recensement des vitraux anciens de la France vol. VI, Paris, CNRS, 2001. p. 193.

En complément :

— LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ; 

— MONTIER, (Armand), 1895, Les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, Pont-Audemer, Impr. du Commerce, G. Hauchard, 1895 ;

— MONTIER, (Armand), 1896, "L'église Saint-Ouen à Pont-Audemer", Normandie monumentale et pittoresque p. 105.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62406567/f141.item

 

— PERROT (Françoise), 1972, M. Baudot et J. Lafond. Églises et vitraux de la région de Pont-Audemer, numéro spécial des Nouvelles de l'Eure, 3e trimestre 1969 , [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1972  130-1  pp. 87-88

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1972_num_130_1_5138_t1_0087_0000_3

— PHILIPPE-LEMAITRE (Delphine) 1853, non consulté

— REGNIER (Louis)  en 1899, non consulté.

 

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4 janvier 2019 5 04 /01 /janvier /2019 18:14

La verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres offerte par le chapelain Jacques Voisin (vers 1530 ; vers 1600 ; vers 1898) ou baie 15 de l'église Saint-Ouen de Pont-Audemer.

 

 

 

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Voir :

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PRÉSENTATION.

 

La reconstruction de l'église Saint-Ouen avait été décidée sous Louis XII en 1480, et commença par la façade occidentale. Puis les travaux se poursuivirent avec les sept travées de la nef, qui est raccordée en 1514 au chœur roman, tandis que les bas-cotés, avec leurs 12 chapelles latérales, sont édifiés sous François Ier jusqu'en 1535, et dotés progressivement de vitraux à partir de 1514 environ, et jusqu'en 1556 grâce aux dons des confréries (du Saint-Sacrement en baie 18 et 20), aux corporations (des boulangers en baie 13, des peintres  en baie 10), des familles de notables (baies 7, 8, 10, 12, 16, 17) ou du clergé (abbaye de Saint-Ouen de Rouen en baie 14, chapelain en baie 15). 

Les six chapelles du coté nord, principalement dédiées à des saints,  se succèdent ainsi d'ouest en est (vers le chœur) :

  • 1ère chapelle : baie 17 (1475 ; v.1530 ; 1551) : saints Mathurin, Sébastien, Jacques le Majeur et Jean-Baptiste.
  • 2ème chapelle : baie 15 (v.1530 ; XVIIe ; XIXe) : Apparition du Christ aux 12 Apôtres.
  • 3ème chapelle : baie 13 (1536) : Saint Honoré.
  • 4ème chapelle :  baie 11  (v.1540 . V; 1556 . 1952) : saint Vincent.
  • 5ème chapelle :  baie 9 : (v. 1556 ; 1952) : saint Nicolas.
  • 6ème chapelle : baie 7 (1556) : Histoire du Salut.

 

La baie 15 occupe donc la deuxième chapelle du bas-coté nord ; elle est haute de 5 m. et large de 2,80 m et comporte 4 lancettes trilobées et un tympan à 9 ajours. Elle est divisée en deux registres de styles différents, le registre inférieur contenant des armoiries et 4 rondels dans une vitrerie losangique et le registre supérieur montrant l'Apparition du Christ aux douze apôtres et une Vierge à l'Enfant vénérée par un donateur. Au tympan, un Christ en croix. Les datations estimées sont : vers 1530 ; vers 1600 ; vers 1892 pour une restauration par Duhamel-Marette.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE REGISTRE INFÉRIEUR.

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Dans un encadrement de pilastres et entablement Renaissance décorés avec des guirlandes, masques, griffons , dauphins, feuilles et cartouches IHS, cette vitrerie géométrique incolore  comporte quatre rondels ; six médaillons et un monogramme en losange ; deux armoiries ; une inscription  [de donation].

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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1°) La moitié gauche.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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a) Les médaillons.

-Monogramme christique IHS couronné.

-Soleil/étoile.

b) les anges présentant des armoiries.

Celles-ci n'ont pas été identifiées. Elles sont écartelées en quatre quartiers, au 1 et 3 d'argent à cinq [ou six] vergettes de sable  et au 2 et 4 d'or à trois tourteaux de gueules, témoignant d'une alliance. d'or à trois tourteaux de gueules peut correspondre au comté de Boulogne, ou à diverses familles sans résoudre l'énigme. Notons parmi celles-ci celle de Courtenay, puisque Jean de Courtenay fut, au XIIIe siècle, seigneur de Pont-Audemer.

Les armoiries sont ornées d'un heaume cimé.

Notons l'utilisation d'émaux sur les écus et les vêtements des anges.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

c) Le rondel de gauche : saint Ouen.

par Duhamel-Marette vers 1892 en remplacement d'un rondel ancien perdu.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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d) le rondel de droite : saint Jacques le Majeur, XVIIe.

dans une couronne à ornementation Renaissance , le paysage et le saint sont peints à l'aide d'émaux sur verre blanc , plombs de casse.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2°) La moitié droite.

On retrouve

a) Les médaillons.

-Deux alliances sommées d'une couronne de marquis.

-Soleil

b) les anges présentant des armoiries identiques aux précédentes.

c) un losange au monogramme IHS et aux instruments de la Passion.

 

 

 

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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d) Le médaillon de saint Adrien.

Inscription St ADRIA [N]  et daté du premier quart du XVIe siècle par le Corpus vitrearum.

Inscription IHS sur les pilastres.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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e) Médaillon de saint Léger.

Daté vers 1530. Un seul plomb de casse. Inscription St LEGIER. Saint Léger, évêque martyr d'Autun, qui eut les yeux crevés et la langue coupée, porte en plus  de sa crosse trois outils, assemblage de deux traverses obliques.

 Inscription sur les pilastres :  IHSM à gauche et IHS à droite.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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f) L'inscription en bas à droite.

JACQUES / VOESIN EN SOR /..../ ET CHAPEL

IY / FACE PAR / ..../ FIETA

On en a déduit que le donateur était Jacques VOISIN (forme voesin en patois), chapelain de Pont-Audemer.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE REGISTRE SUPÉRIEUR.

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Chaque lancette est encadrée par un élément architecturé en arcature sur colonnes, au sein de pilastres à cannelures et guirlandes et entablement.

Les têtes de lancette portent un décor de masques de feuilles, de dauphins et bordures en guirlandes.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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La Vierge à l'Enfant et le donateur agenouillé.

Le donateur (le chapelain Jacques Voisin) est un tonsuré et porte sur son surplis l'aumusse fourrée. Il adresse à la Vierge la prière MATER DEI MEMENTO MEI ("Mère de Dieu souviens-toi de moi") .

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.


L'Apparition du Christ (1) : six apôtres.

L'un des apôtres est vêtu d'une chape damassée qui incite à y reconnaître saint Pierre. Un autre, imberbe, est saint Jean.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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L'Apparition du Christ (2).

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Inscription PAX VOBIS EGO SUM NOLITE TIMERE.

cette inscription permet de préciser à quelle apparition du Christ l'auteur fait référence. Il s'agit d'une citation de l'évangile selon Saint Luc 24 : 36  où Jésus apparaît aux Onze juste après son apparition aux pèlerins d'Emmaüs, une scène qui a lieu dans la pièce où ils se réunissent à Jérusalem (communément nommé "Cénacle"). 

https://www.biblegateway.com/passage/?search=Luc+24&version=BDS

 

36 Pendant qu’ils s’entretenaient ainsi, Jésus se trouva au milieu d’eux et leur dit: Que la paix soit avec vous! 37 Mais ils furent saisis de crainte et d’effroi, croyant voir un esprit. 38 – Pourquoi êtes-vous troublés? leur dit-il. Pourquoi les doutes envahissent-ils votre cœur? 39 Regardez mes mains et mes pieds, et reconnaissez que c’est bien moi. Touchez-moi et regardez! Car un esprit n’a ni chair ni os. Or, vous voyez bien que j’en ai. 40 Tout en disant cela, il leur montra ses mains et ses pieds. 41 Mais ils étaient si heureux qu’ils ne parvenaient pas à croire et restaient dans l’étonnement. Alors il leur demanda: Avez-vous quelque chose à manger? 42 Ils lui présentèrent un morceau de poisson grillé. 43 Il le prit et le mangea sous leurs yeux.

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L'Apparition du Christ (3) : six apôtres.

C'est une image globalement symétrique de celle de gauche, mais  Jean y est plus volontiers identifié.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE TYMPAN.

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Une vitrerie géométrique accueille des ajours bordés de guirlandes en grisaille et jaune d'argent. On retrouve des étoiles-soleils, des monogrammes Ma et IHS. 

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L'ajour sommital est placé en réemploi un Christ en croix daté vers 1530.

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Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Apparition du Christ aux Apôtres, (vers 1530 et XVIIe), église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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SOURCES ET LIENS.

Source principale : — GATOUILLAT ( Françoise), CALLIAS-BEY (Martine), CHAUSSÉ (Véronique), HÉROLD (Michel), 2001, Eglise Saint-Ouen in Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum / Recensement des vitraux anciens de la France vol. VI, Paris, CNRS, 2001. p. 194.

En complément :

— LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ; (pas de description de la baie 15)

— MONTIER, (Armand), 1895, Les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, Pont-Audemer, Impr. du Commerce, G. Hauchard, 1895 ;

— MONTIER, (Armand), 1896, "L'église Saint-Ouen à Pont-Audemer", Normandie monumentale et pittoresque p. 109 (simple mention de la baie).

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62406567/f145.item

 

— PERROT (Françoise), 1972, M. Baudot et J. Lafond. Églises et vitraux de la région de Pont-Audemer, numéro spécial des Nouvelles de l'Eure, 3e trimestre 1969 , [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1972  130-1  pp. 87-88

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1972_num_130_1_5138_t1_0087_0000_3

— PHILIPPE-LEMAITRE (Delphine) 1853, non consulté

— REGNIER (Louis)  en 1899, non consulté.

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1 janvier 2019 2 01 /01 /janvier /2019 10:06

La verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516 et 1927) , la baie 16 de l'église Saint-Ouen de Pont-Audemer.

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Voir :

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PRÉSENTATION.

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 Cette verrière qui éclaire la deuxième chapelle du bas-coté sud date de 1516, après l'édification de ce bas-coté terminée en 1515 . Avec ses 3 lancettes trilobées et son tympan à 7 ajours, elle est haute de 5 m et large de 2,40 m. 

Offerte par un couple de notables de la ville, elle associe une Annonciation au registre supérieur et une Mise au tombeau au registre inférieur, tandis que la Trinité parmi les anges occupe le tympan.

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Nous en conservons des descriptions de 1853, et de  1895 : 

"La verrière de la seconde chapelle date de 1516. « Guillaume Tesson, bourgeois de Pont-Audemer et Jeanne Lemire sa femme, ont donné cette verrière l'an mil cinq cents et seize. Priez pour eux » ajoute l'inscription. La salutation angélique, fait un contraste saisissant avec la douleur de la Vierge-mère, courbée par la désespérance et mettant son fils au tombeau . Ecce ancilla dni, lit-on sur le phylactère qui l'entoure ; plus loin, au-dessous du lis environné d'épines qui occupe le second panneau : lilium  inter spinas ; à gauche de ce lis : quomodo fiet istud nam virum non cognosco? L'ange salue la Vierge de ces mots : Ave gracia plena dnus tecum. La scène de l'ensevelissement du Christ est admirablement traitée dans les panneaux inférieurs et s'inspire de l'influence religieuse gothique, malgré les détails qui sont déjà pourtant du style Renaissance." (Armand Montier, 1895)

Les registres  sont délimités par un encadrement d'architecture Renaissance avec fins balustres latéraux et entablement orné séparant les deux scènes.

Le registre inférieur fut détruit dans un incendie en 1913, et refait à l'identique par l'atelier de Félix Gaudin en 1927 d'après une photographie de 1888 (Monuments historiques).

 

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Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Registre inférieur : la Mise au tombeau (1927).

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a) L'inscription.

GUILLAUME TESSON BOURGOIS DU PONTAUDEMER ET JEHANNE

MYRE SA FEMME ONT DON[N]E CESTE VERRIERE EN LAN MIL CINQ

CENTZ ET SEIZE. PRIES DIEU POUR EULX.

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Ce Guillaume Tesson est présenté comme "tavernier et conseiller de la ville au début du XVIe siècle" (Corpus vitrearum). Mes recherches en ligne n'obtiennent que ceci : "Un bourgeois de Pont-Audemer, Guillaume Tesson, livre en 1478 une centaine de blocs taillés pour le pavement et le "cahos" de la fontaine de la ville. " Jean-Pierre Leguay  1999. Est-ce le même en 1478 et en 1516 ?

L'inscription est citée par SINTIC (Bruno), Reconstituer le monde des petites villes : l’apport des images, in Petites villes de Normandie p. I-XV https://books.openedition.org/purh/5063?lang=fr&format=embed

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b) La Mise au tombeau.

Elle porte cinq fois dans des cartouches parfois encadrés de cerceaux de guirlandes l'inscription du titulus de la crucifixion  INRI , avec dans tous les cas l'emploi d'un N rétrograde. Les pilastres latéraux portent dans des cartouches l'inscription MARIA.

À gauche, le donateur Guillaume Tesson est accompagné de ses cinq fils ; à droite, Jehanne [Le] Myre est suivie de ses deux filles.

Dans un jardin (oranges, grenades ou pommes, poires, plessis), Jésus est étendu sur la pierre d'un tombeau de marbre à médaillons antiques. Il est entouré de Joseph d'Arimathie qui tient la tête, de Nicodème qui soutient les pieds, de la Vierge et de saint Jean entre deux saintes femmes, de Marie-Madeleine agenouillée avec une cassolette d'encens, et de deux autres hommes portant le bonnet conique. Je propose d'y voir le pharisien  Gamaliel et son fils  Abibon, tels qu'ils sont représentés sur la Mise au tombeau de l'abbatiale de Quimperlé, globalement contemporaine de ce vitrail.

http://www.lavieb-aile.com/2018/06/la-mise-au-tombeau-de-l-abbatiale-sainte-croix-de-quimperle.html

Il serait passionnant de savoir si le verre vénitien du bonnet de Nicodème, et le verre rouge gravé de l'homme de l'extrême gauche [Gamaliel et du nimbe du Christ, sont déjà décelable sur la photographie de 1888.

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Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Registre supérieur : l'Annonciation (1516).

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Pour Jean Lafond, "

« C'est l'œuvre très brillante d'un des meilleurs élève d'Arnoult de Nimègue, celui à qui l'on doit le vitrail de l'ancienne église Saint-Vincent de Rouen où figurent saint Claude et cinq autres saints, et les trois verrières du bas-coté sud de Saint-Denis à Duclair. On y admire un décor plein de finesse dans son exubérance. »

À gauche, la Vierge est debout devant un lutrin, sous un baldaquin de tissu ; le livre posé de biais sur la console du lutrin est fait d'un verre rouge gravé.

Inscription INRI (avec à nouveau un N rétrograde) sur le pilastre.

Phylactère Ecce ancilla dni, "Voici la servante du Seigneur".

Au centre, Dieu le Père en buste et la colombe de l'Esprit-Saint sont entourés par une gloire de séraphins rouge et de rais de lumière.

Plus bas, un vase de lys au milieu d'un buisson d'épine renvoie à la litanie mariale lilium  inter spinas ("Lys parmi les épines") inscrite sur le phylactère.

À droite, l'ange Gabriel assisté de quatre petits anges présente les phylactères : Spiritus  sanctus super veniet in te (L'Esprit Saint vient sur toi" et  Ave gracia plena dnus tecum. ("Je te salue pleine de grâces le Seigneur soit avec toi"). 

La réponse de Marie est inscrite sur un dernier phylactère : quomodo fiet istud nam virum non cognosco? ("Comment pourra s'accomplir, puisque je ne connais point d' homme ?")

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Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE TYMPAN.

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Au sommet : la Trinité où, sous la colombe,  le Père et le Fils sont figurés à l'identique, enveloppés du même manteau et tenant le même livre où est inscrit EGO SUM ALPHA ET OMEGA.

Les anges chantent  Sanctus Sanctus Sanctus, Dominus deus Sabaoth,  Benedictus , Alleluia, Benedictus es domine in firmamento celi , Benedicamus patrem et filium cum Spirituo Sancto  et prononcent le Benedicamus Domino ("Louons le Seigneur").

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Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de l'Annonciation et de la Mise au tombeau (1516), baie 16 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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SOURCES ET LIENS.

Sources principales : — GATOUILLAT ( Françoise), CALLIAS-BEY, CHAUSSÉ, HÉROLD 2001, Eglise Saint-Ouen : Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum / Recensement des vitraux anciens de la France, Paris, CNRS, 2001. p. 194.

— LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ;

— MONTIER, (Armand), 1895,Les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, Pont-Audemer, Impr. du Commerce, G. Hauchard, 1895 ;

— MONTIER, (Armand), 1896, "L'église Saint-Ouen à Pont-Audemer", Normandie monumentale et pittoresque p. 109.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62406567/f145.item

En complément :

— PERROT (Françoise), 1972, M. Baudot et J. Lafond. Églises et vitraux de la région de Pont-Audemer, numéro spécial des Nouvelles de l'Eure, 3e trimestre 1969 , [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1972  130-1  pp. 87-88

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1972_num_130_1_5138_t1_0087_0000_3

— PHILIPPE-LEMAITRE (Delphine) 1853, non consulté

— REGNIER (Louis)  en 1899, non consulté.

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30 décembre 2018 7 30 /12 /décembre /2018 12:30

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PRÉSENTATION.

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Datée par inscription de 1475, cette verrière est l'une des deux plus anciennes de l'église Saint-Ouen (avec la baie 6) et a été réadaptée dans la première chapelle du bas-coté nord lors de l'édification de ce dernier entre 1515 et 1535 ; elle porte la date d'"une restauration en 1551. Avec ses 4 lancettes trilobées et son tympan à 11 ajours, elle est haute de 5 m et large de 2,80 m. Elle a été restaurée en 1892 par Duhamel-Marette.

 

Dans les lancettes, des niches architecturées surmontées de tourelles hérissées de pinacles nous retiennent par leurs piédroits peuplés de statuettes (24 au total) et par leurs tentures damassées. Le raffinement de celles-ci, avec les pierreries de leurs bordures, culminent dans la deuxième lancette avec les motifs damassés verts mis en plomb dans le fond vert.

Hélas, mes photos, prises trop rapidement, ne rendront pas compte des détails de ces richesses.

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Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LES QUATRE LANCETTES.

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Leur partie inférieure est occupée par un complément de vitrerie géométrique avec les monogrammes du Christ IHS dans des médaillons ((XVIe et XiXe) bordées de colonnettes soutenant des entablements , dans un travail à la grisaille et au jaune d'argent daté par les auteurs du Corpus vitrearum  vers 1525, restauré vers 1551?.

 

 

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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1°) Saint Mathurin et Théodora.

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Je retrouve saint Mathurin, avec qui j'avais fait connaissance en l'église de Carolles (Manche), avec sa curieuse spécialité de lutter contre le "rabonnissement des mégères", qui avait fait mon ravissement. La statue du XVe siècle que j'y avais admiré représentait, comme ici, le diacre exorcisant la princesse Théodora qui était agenouillée à ses pieds, et on voyait très bien le démon qui sortait de sa bouche. Cela me permet de retrouver ce détail sous la forme d'une étoile ou de phylactère de B.D, de couleur verte, et de ne pas le confondre avec quelque pièce de paramentique. 

 

 

 

 

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2°) Saint Sébastien.

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L'inscription signale que cette vitre a été offerte en 1475 par les trésoriers de l'église, Guillaume Le Bienvenu, Pierre Cardonnel, Guillaume Roussel et Jean Duval.

— Guillaume LE BIENVENU :

Il est indiqué comme avocat du roi dans le registre de l'Échiquier de 1469  pour le vicomté de Pontautou et Pont-Audemer, et prêta serment en 1474 à ce titre. Jean Le Bienvenu, sr de l'Épine, son fils, fut avocat du Roi en la vicomté de Pont-Audemer, en 1491-1497.

Mémoires et notes pour servir ...

"En 1475, à Guillaume le Bienvenu, écuyer, sieur de la Motte-Freneuse possédait le fief de l'Espinai en Saint-Pierre-des-Ifs, arrondissement de Pont-Audemer. Son fils Jehan le Bienvenu, écuyer, conseiller en l'échiquier de Normandie, et son petit-fils Guillaume le Bienvenu, écuyer, héritèrent successivement de ce fief. Le 24 août 1484, Jehan le Bienvenu, écuyer, rendit aveu, pour ce fief, à Charles VIII, dans les mains du chancelier de France.

Un aveu fut rendu à François Ier par Guillaume le Bienvenu, écuyer, seigneur de l'Espinai, le 28 octobre 1516.

Guillaume Le Bienvenu, avocat du roi, Pierre Le Bienvenu et Jehan Cardouel (Cardonel) 

 

Pierre Le BIENVENU entra en procès en 1500 pour la charge d'avocat du roi à Pont-Audemer.  Jehan LE BIENVENU était fait le 9 novembre 1482, "lieutenant es vicomtez de Pontautou et Pont-Audemer "

— Pierre CARDONNEL (CARDONEL, CARDOUEL),  conseiller en cour lai de Pont-Audemer en 1466,  lieutenant du bailli de Rouen en la vicomté de Pontautou et Pont-Audemer en 1488-1496. Prêta serment devant l'Echiquier en 1474 comme officier, (avce Guillaume Le Bienvenu)

— Guillaume Roussel : un de ses ancêtres était maître de la nef Notre-Dame de Pont-Audemer en 1250.

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Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3°) Saint Jacques le Majeur.

Cette lancette a été restaurée en 1551, comme en témoigne l'inscription 1551, et l'emploi de la sanguine.

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Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Saint Jean-Baptiste.

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Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE TYMPAN.

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Vitrerie géométrique bordée de guirlandes en grisaille et jaune d'argent (vers 1525), avec pièces peintes d'étoiles, 2 têtes de profil à l'antiques et 2 têtes nimbées dans des médaillons, et, à petite échelle, les emblèmes des  4 saints figurés dans les lancettes, indiquant l'interversion des 2 figures centrales avant 1853.

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Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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L'ajour central est occupé par un losange figurant saint Quentin sur la chaise de torture (vers 1525, restauré peut-être en 1551) avec l'inscription SAI[N]CT / QUE[N]TIN.

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Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière des quatre saints (1475, v.1525-1530, 1551), baie 17, Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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SOURCES ET LIENS.

Source principale : — GATOUILLAT ( Françoise), CALLIAS-BEY, CHAUSSÉ, HÉROLD 2001, Eglise Saint-Ouen : Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum / Recensement des vitraux anciens de la France, Paris, CNRS, 2001. p. 194.

LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ;

MONTIER, (Armand), 1895,Les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, Pont-Audemer, Impr. du Commerce, G. Hauchard, 1895 ;

MONTIER, (Armand), 1896, "L'église Saint-Ouen à Pont-Audemer", Normandie monumentale et pittoresque p. 109.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62406567/f145.item

PERROT (Françoise), 1972, M. Baudot et J. Lafond. Églises et vitraux de la région de Pont-Audemer, numéro spécial des Nouvelles de l'Eure, 3e trimestre 1969 , [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1972  130-1  pp. 87-88

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1972_num_130_1_5138_t1_0087_0000_3

PHILIPPE-LEMAITRE (Delphine)  en 1853, non consulté

REGNIER (Louis)  en 1899, non consulté.

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Published by jean-yves cordier - dans Vitraux
24 décembre 2018 1 24 /12 /décembre /2018 15:58

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PRÉSENTATION.

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Cette baie à 3 lancettes trilobées et au tympan à 9 ajours principaux mesure 5 m. de haut et 3 m. de large. Elle éclaire la 3ème chapelle du bas-coté nord et a été vitrée en 1536, une quinzaine d'années après la fin de la construction de la nouvelle nef en 1515, dont les chapelles sont vitrées progressivement de 14 vitraux. Nous sommes donc à la seconde  Renaissance, sous le règne de François Ier, et en 1535, la baie 8 venait de recevoir une copie de la Vie de saint Jan-Baptiste de Saint Vincent de Rouen par l'atelier des Le Prince de Beauvais, tandis que la baie 10 recevait la verrière de la Dormition.

Cette baie 13 "se ressent", pour les auteurs du Corpus vitrearum, " du style de l'atelier de Beauvais", tandis que Jean lafond affirme : "comme La vie de saint Jean-Baptiste, la Légende de saint Honoré est évidemment la copie d'un ouvrage du grand atelier de Beauvais."

Ses deux registres horizontaux sont divisés en quatre scènes légendées de la vie de saint Honoré, patron des boulangers  et de la Picardie qui figure en évêque d'Amiens au sommet du tympan.

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1. Le jeune Honoré, à l'école, reçoit l'inspiration de l'Esprit Saint.

2. Miracle du "fourgon fleuri" dans le four à pain.

3. Procession du Fourgon Fleuri.

4. Le saint est intronisé évêque d'Amiens par le pape Vitalien.

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Les scènes sont limitées par des pilastres latéraux soutenant un étroit entablement avec à la base des scènes et des têtes de lancettes la légende  partiellement déchiffrable.

La baie a été décrite par Delphine Philippe-Lemaître en 1853, par Raymond Bordeaux en 1874, puis par Régnier en 1899, par Jean Lafond en 1969, et par Françoise  Gatouillat et co. pour le Recensement en 2001. J'emprunte mon texte principalement à Bordeaux et à Gatouillat.

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Vue générale.

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Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Inscription de donation.

D'après Jean Lafond, "comme nous l'apprend une inscription très mutilée, la verrière a été faite en 1536  des deniers de la confrérie Saint-Honoré "fondée en l'église de Monsieur Sainct-Ouen de Pont-Audemer".

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Aujourd'hui, je déchiffre ceci :

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LAN DE GRACE MIL CINQ CENT TRENTE SIX CESTE VITRE /DENIERS DE LA CONFRAR /HONORE FONDE EN L EGLISE DE MONSIEUR SAINT OUEN 

PONT AUDEMER . JACQUES LANGLOYS ET ROBERT AUBIN. / O MESTRES PRIEZ D

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Il me semble probable que Jacques Langloys et Robert Aubin soient les membres les plus éminents de la confrérie parmi les maîtres-boulangers, le président et le trésorier par exemple.

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Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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1. Comment saint Honoré fut inspiré par Dieu alors qu'il était à l'école.

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— Inscription en haut de la scène :

COM[M]ENT SAINCT HONORE FVT INSPIRE DE DIEV ESTANT A LESCOLLE. 

 Saint Honoré est debout devant un professeur, et tient à la main un livre ouvert dans lequel ce professeur lui indique un passage. 

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"C'est à un chef-d'œuvre d'Engrand Le Prince, "La légende de saint Claude" à Gisors, qu'évoque irrésistiblement le premier épisode : "Com[m]ent saint Honoré fut inspiré de Dieu enfant étant à l'école". On pense aussi au vitrail de Conches où Romain Buron, dans l'Education de sainte Foy, a très heureusement imité son maître. Comme à Conches, l'élève est placé dans la même lancette que le pédagogue armé de verges, le reste de la scène étant occupé par ses condisciples. La colombe du saint-Esprit qui vole vers lui s'explique par l'inscription. 

Les visages du vitrail de Pont-Audemer ne sont pas peints comme les visages de Beauvais et les rehauts de jaune d'argent sont appliqués avec moins de sûreté, mais le copiste a respecté l'une des caractéristiques principales de l'atelier : les murs de l'école sont violets sous un plafond vert et leurs baies s'ouvrent sur le ciel bleu foncé où des édifices sont peints en grisaille. Le chien du premier plan figurait certainement sur le modèle." (J. Lafond)

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Le plafond à caisson, les bas-reliefs de la colonne  et du siège (masques, têtes animales, monstre ailé) sont typiquement influencés par la Renaissance italienne. Le maître d'école tient la férule non pas pour punir, mais comme emblème de son autorité, tandis que quatre autres maîtres sont coiffés de la barrette (de clerc ou de docteur) et que les enfants sont nu-tête pour la plupart. Dans les fenêtres, les fabriques sont réduites, et nous sommes loin des édifices architecturaux précisément rendus sur les vitraux d'Engrand et de Nicolas Le Prince.

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Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2.  Le miracle du fourgon fleuri.

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Préalable.

a) Il est nécessaire de connaître le sens du substantif "fourgon" :

"Longue barre métallique ou longue perche garnie de métal utilisée pour remuer la braise ou la charge d'un four, d'une forge, d'un fourneau, ou pour attiser un feu. " Issu du latin populaire. furico, -onis dér. d'un furicare , dérivé du latin classique furare « voler » dér. de fur « voleur ». http://www.cnrtl.fr/definition/fourgon

b) il est également nécessaire de connaître la légende du fourgon fleuri, propre à saint Honoré.

"Pour la tradition qui s'appuie sur un texte de la fin du XIe siècle édité par les Bollandistes, Honoré, qui appartenait à la noble lignée des comtes de Ponthieu, vécut en Amiénois une existence studieuse, austère et généreuse. Ceci lui valut non seulement d'être élevé contre son gré à la dignité épiscopale, mais encore de susciter ds son vivant des miracles, multipliés après sa mort le 16 mai 600. Dans cette vie exemplaire, seul un modeste incident pourrait justifier que les boulangers se soient placés sous la protection du saint.

Alors que la nourrice d'Honoré chauffait son four domestique, le fourgon à la main, quelqu'un lui annonça la nouvelle de l'élection épiscopale. Incrédule, la brave femme s'écria que cette élection était aussi inimaginable que la métamorphose de son fourgon en arbre. Et aussitôt, le fourgon se couvrit de feuilles et de fleurs...

Au XIIIe ou au XIVe siècle, une légende populaire prit corps qui donnait au patronage choisi par les boulangers une autre assise. Honoré, loin d'être fils de famille, « s'adonna dès les premiers jours de sa jeunesse aux œuvres pies et à la profession de boulanger qu'on appelait vulgairement fournier... ; nourrissant son prochain par de larges aumônes qu'il lui prodiguait dans la profession de boulanger dont il vivait ». La légende est connue par un manuscrit du XIVe siècle ayant appartenu à Victor de Beauvillé. Cf. H. Josse, La légende de saint Honoré, évêque d'Amiens, d'après un manuscrit de la bibliothèque de V. de Beauvillé, trad., Amiens, 1879 ; L. du Broc de Segange, Les saints patrons des corporations..., Paris, 1887, t. I, p. 36 ".

Ailleurs, le "fourgon" fut planté en terre par la nourrice, et c'est alors qu'il se transforma en mûrier fleuri :

"Honoré fut promu au sacerdoce par Béat, septième évêque d'Amiens. Lorsque ce dernier mourut vers 554, Honoré fut désigné pour lui succéder par les acclamations du peuple et du clergé. En apprenant cette nouvelle, sa nourrice, incrédule, s'écria : « Je croirais plus volontiers que ce fourgon ardent pourrait prendre racine et se changer en arbre ». Et elle planta dans la cour de sa maison l'instrument dont se servent les boulangers pour remuer les braises.

Le fourgon, emmanché d'un bâton se changea en un mûrier couvert de fruits et de fleurs. Devant un tel miracle, la nourrice dut se rendre à l'évidence. Une variante à cette légende proclame que la nourrice s'est écriée à la mort du saint : « Si celui-là est saint, je veux que mon fourgon reverdisse ». Mais nous préférons la première version, car il paraît difficile même à une servante de refuser le titre de saint à un évêque qui reçut la communion à l'autel d'une main lumineuse présentant les stigmates de la Passion, à cet élu de la divinité qui, bénéficiant d'un pouvoir auditif vraiment extraordinaire, entendit à deux lieux de distance l'hymne chanté par Lupicin, après la découverte des restes des saints Fuscien, Victoric et Gentien...

Le miracle de Port annonça qu'Honoré serait grand devant l'Éternel, comme ce prince chrétien d'Occident qui fit reverdir l'Arbre Sec d'Ebron, desséché depuis la mort du Christ, en célébrant la messe sur lui .

Au XVIIe siècle, dit le Père Ignace, on voyait encore le mûrier. « Dans la cour de cette maison (la maison paternelle du saint), on voit encore  le « meurier miraculeux » provenu d'un fourgon à demi-brûlé qu'on tient par tradition avoir été planté en cette place par la nourrice de ce saint, quand on vint lui dire qu'il étoit évêque d'Amiens » . Cet arbre miraculeux fut considéré comme un emblème prophétique des fruits de salut que devait porter l'épiscopat de saint Honoré . Cette légende, conclut l'abbé Corblet est la raison pour laquelle, dès le XIIe siècle, les boulangers choisirent saint Honoré pour patron.

En la chapelle Saint-Honoré d'Amiens, la confrérie des boulangers et pâtissiers célébrait sa fête tous les ans, le 16 mai.

Enfin, une dernière tradition affirme que le tisonnier brûlant a été planté en terre par saint Honoré lui-même. Il se couvrit de feuilles et de fleurs et devint un noisetier superbe qui, à la ressemblance de celui de saint Gratien possédait une amande rouge de feu."

Saint Honoré serait né à Port-Le-Grand, en aval d'Abbeville, et c 'est là que Jacques Sanson, en 1646,  a vu le mûrier miraculeux (Histoire ecclésiastique d'Abbeville p. 192).  Ce miracle rappelle celui du bâton de saint Christophe. Mais cet auteur donne une solution à l'épineux problème de savoir si Honoré était le fils d'Aymeric comte de Boulogne (ou d'un comte de Ponthieu), ou bien le fils d'un boulanger, en expliquant que c'était la nourrice qui était mariée à un boulanger : dès lors, tout devient cohérent, et nous pouvons savourer l'exclamation de la bonne femme, qu'elle croiroit plustost que ce fourgon ardant qu'elle tenoit en ses mains (c(est elle qui enfourne) prendroit racine & deuiendroit arbre, que de croire qu'Honoré fust Evesque. Et ce personnage truculent de scander son propos en fichant d'un bras vigoureux son tisonnier fumant et rougeoyant sur le sol de l'échoppe, où il s'enracine.

 

Description.

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"Cinq pains sont sur une planche fixée à la muraille par des chevilles de bois.  Du four allumé, sortent des flammes jaunâtres. Nu, sauf les reins qu'il a ceints d'un linge blanc, ainsi que sa tète, saint Honoré est debout devant l'entrée du four, et en retire son fourgon, qui, loin de sortir noirci du foyer enflammé, apparaît couvert de fleurs et de feuillages. La mère du saint manifeste par ses gestes sa stupéfaction à la vue de ce prodige. L'aspect du fourgon fleuri plonge aussi dans l'étonnement d'autres spectateurs. Au bas [sic] du panneau, l'artiste inconnu, mais de grand talent, a tracé cette inscription" :


COMENT LA MERE SAINCT HONORE SE ESBAHI  DV FOVRGO[N] QVI AU FOVR FLEURI. 

 

"Le récit du fourgon miraculeux, particulièrement bien venu ici pour illustrer le patronage dont se réclament les donateurs, autorise l'artiste à représenter avec un grand art un fournil médiéval. Autour du boulanger Honoré debout, torse et jambes nus, au milieu de la pièce, tout est en place : le pétrin de chêne dont le couvercle refermé supporte les pains ronds qui seront bientôt enfournés sur les pelles au long manche appuyées au mur, le four à la gueule ouverte à hauteur d'homme d'où s'échappent les flammes qui ont transformé en rameau feuillu l'extrémité du fourgon (ce crochet métallique qui sert à déplacer les bûches sur la sole brûlante) que tient encore Honoré, les étagères où les pains cuits refroidissent. L'épouse, la servante, l'apprenti, auxiliaires indispensables, sont présents sous les traits de la mère du saint et de deux comparses flanqués d'un client ébahi." (Bordeaux)

Autre description :

"C'est dans un fournil non moins puissamment coloré — plafond pourpre et parois violettes que se déroule le miracle qui, pour le populaire, a fait de l'évêque d'Amiens le patron des boulangers alors que la légende a été imaginée pour justifier un patronage dont on oubliait l'origine . Nu jusqu'à la ceinture, le mitron retire du four embrasé son fourgon tout verdoyant de feuillage. Sa mère est debout derrière la table où sont posés les pains. Admirablement peint sous la coiffe dont les barbes pendent sur un corsage rouge, son visage exprime un vif étonnement. Déjà l'inscription semblait faire d'elle le personnage principal de la scène : Com[m]ent la mère saint Honoré se esbahi du fourgon qui au four fleuri ». Depuis que la tête de saint Honoré a dû être refaite, ainsi que le visage d'une spectatrice, c'est aujourd'hui la figure la plus intéressante." (J. Lafond)

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Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3. La Procession du Fourgon Fleuri.

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"l'histoire se termine par la représentation très-mouvementée d'une procession, la procession de Fourgon-fleuri, où l'on portait en grande solennité un fourgon verdoyant. 
On lit: 


COM[M]ENT POVR LE MIRACLE DV FOVRGO[N] FVT FAICTE VNGNE POVRCESSYON. 

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"Le registre supérieur se tient dans une gamme plus claire. On voit d'abord « com[m]ent pour le miracle du fourgon fut faicte ungne pourcessyon ». Derrière la bannière de saint Honoré, un boulanger en tenue de ville élève le fourgon miraculeux, puis vient le clergé : un porte-croix escorté par deux enfants de chœur tenant des flambeaux, deux chantres et deux prêtres en chape. La foule des confrères ferme la marche en sortant, semble-t-il, d'une église. On ne manquera pas de comparer ce cortège peint avec une verve familière à la procession de la charité (baie 18 et 20)." (Jean Lafond)

 

"Les habitants de Port n'ont pas oublié la légende du fourgon fleuri. C'est pourquoi, de nos jours, ils allument encore un feu de joie, le 15 mai, veille  de la fête patronale. L'idée d'organiser ce feu est née d'un rapprochement entre le tisonnier flamboyant du saint et la flamme d'un bûcher. Le grand arbre qu'on brûlera, c'est la représentation gigantesque et populaire du bâton fleuri. On pourrait bien faire remarquer que, dans la légende, c'est la verdure qui triomphe du feu ; au bûcher du 15 mai, c'est au contraire la flamme qui dévore et détruit la végétation de l'arbre ; mais n'y regardons pas de si près. L'idée, très ingénieuse s'imposa chez les premiers organisateurs de ces feux, grâce à l'extrême popularité des feux de la Saint-Jean.

Le feu de Saint-Honoré était allumé autrefois, au centre du village près de la maison du saint. 

C'est après l'office du soir, que la procession quitte l'église et grimpe la côte raide de la route de Sailly. Les rues sont jonchées de feuillages et les maisons, ornées des plus belles fleurs du jardin.

On emporte la châsse du saint , et le grand cierge qui jamais ne s'éteint pendant la marche. Une seule fois, pourtant, le vent eut raison de la flamme ; mais on s'expliqua bien vite pourquoi ; le chantre avait oublié quelques versets... Jadis, suivaient le bâtonnier de Saint-Honoré, les bâtonniers de la Vierge, de Sainte-Catherine, de Sainte Anne..."

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Notez le sol jonché de tiges de fleurs (la fête du saint a lieu de 16 mai), comme pour la Fête-Dieu.

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Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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4. Le saint est intronisé évêque d'Amiens par le pape Vitalien.

"Dans un troisième compartiment, le pape Vitalien, entouré d'un cortège de cardinaux et de prélats en brillants costumes, sacre évêque saint Honoré: l'inscription porte ceci: 


COMMENT SAINCT HONORE FVT SACRE EVESQVE  DE AMIANS. 
 

Description par J. Lafond :

"Le sacre épiscopal de saint Honoré par le pape Vitalien est d'une composition moins heureuse. Les deux cardinaux qui y assistent paraissent singulièrement gauches. Sans doute le peintre verrier ne disposait pas, pour ce dernier épisode, d'un bon modèle." 

Cet artiste était-il Mausse Heurtault, comme l'a supposé Louis Régnier ?

La question devait être posée puisque nous sommes en présence de deux copies faites à un an d'intervalle d'après les maîtres de Beauvais. Il faut répondre par la négative, car le tympan de la vie de saint Jean-Baptiste, la Pentecôte, œuvre authentique et, semble t-il, originale de Mausse Meursault, est d'une facture et d'un style tout différents de ceux du réseau de saint Honoré." (Jean Lafond)

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On remarquera le verre bleu gravé et rehaussé de jaune d'argent utilisé pour la mitre d'Honoré et pour la robe damassée d'un assistant. Et le procédé de représentation du sol par des hachures en tirets sur le sol vert, déjà utilisé dans les scènes 1 et 2, mais qui se retrouve dans les vitraux réalisés par Nicolas ou Engrand Le Prince, par exemple à Gisors (baie 26).

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Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE TYMPAN

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"Le saint évêque d'Amiens, patron du mestier » des boulangers, est représenté au sommet du tympan dans ses vêtements pontificaux. D'une main, il tient sa crosse, et , de l'autre, un livre ouvert. Le peintre verrier ne l'a pas chargé du pain doré, son emblème particulier."

"Les saints logés dans les autres compartiments principaux sont sainte Catherine, sainte Barbe, saint Jacques le Majeur et sainte Austreberte. Derrière la sainte abbesse de Pavilly, un loup s'attaque à l'âne du monastère : pour expier son forfait, il devra faire jusqu'à sa mort le service de sa victime. Des anges adorateurs et des têtes finement peintes complètent ce charmant ensemble auquel répond l'amortissement des lancettes avec des putti et des dauphins, et des soldats porteurs de drapeaux." (Jean Lafond)

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C'est bien-sûr la présence de sainte Austreberthe qui m'interpelle : j'en découvre l'existence, mais j'apprends ceci :

 

"Austreberthe de Pavilly (Sainte Austreberthe) (née en 630 à Thérouanne, Pas-de-Calais - morte le 10 février 704 à l'abbaye de Pavilly) était une religieuse française du Moyen Âge, qui prit le voile très jeune et fut religieuse au monastère du Port dans le Ponthieu. Puis, elle devint abbesse à la fondation de Pavilly, où elle mourut au début du viiie siècle, à l'âge de 74 ans.

Sainte Austreberthe et ses religieuses avaient l'habitude de blanchir les linges de sacristie de l'abbaye de Jumièges distante de quelques lieues de Pavilly. Un âne avait été dressé pour transporter seul le linge d'un monastère à l'autre. Or, un jour, l'âne se retrouva face à face avec un loup qui se jeta sur lui et le dévora.

Sainte Austreberthe apparut, réprimanda le loup, et le condamna à remplir les fonctions dont sa victime s'acquittait auparavant. C'est ainsi que le loup accomplit jusqu'à la fin de sa vie sa tâche avec humilité et soumission.

Sur le lieu de la mort de l'âne fut érigée une chapelle, au VIIe siècle, puis, quand le monument fut ruiné, une simple croix de pierre le remplaça. Elle sera remplacée à son tour par un chêne, dans lequel furent placées plusieurs statues de la Vierge, nommé chêne à l'âne."

Sa présence s'explique peut-être par un culte local à la vallée de la Seine et au diocèse de Rouen, mais aussi peut-être par sa présence au monastère de Port-le-Grand, dans le Ponthieu, lieu de naissance présumé de saint Honoré.

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Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

 

 

 

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 26 août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 26 août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 26 août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 26 août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 26 août 2018.

Verrière de saint Honoré (baie 13, 1536), église Saint-Ouen de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 26 août 2018.

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SOURCES ET LIENS.

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— BORDEAUX (Raymond ), 1874, Bibliographie : Hagiographie du diocèse d'Amiens par l'abbé Jules Corblet, Bulletin monumental vol 40 pages 398-400

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k31059g/f442.item

"Le chapitre consacré par M. l'abbé Corblet à saint Honoré, évêque d'Amiens, est également digne d'être compulsé. On sait que saint Honoré, patron titulaire d'une des anciennes églises de Paris, dont le nom désigne encore l'une des rues les plus importantes de cette grande ville, est le patron des boulangers et des pâtissiers. Pourquoi? M. l'abbé Corblet passe en revue les diverses explications qui ont été données de ce patronage, sans pouvoir offrir aucune conclusion certaine. Un écrivain peu sérieux, A.-V. Arnault, de l'Académie française, a publié en 1833, dans le tome 48 de la Revue de Paris, un article léger, intitulé "Du patronage déféré à certains saints, sur  certaines industries" et en tète il place saint Honoré. Dans sa légende, dit-il, on ne voit rien qui explique le culte particulier que les boulangers lui ont voué. "De sa vie, il n'a mis la main à la pâte." A quoi tient donc la dévotion des mitrons pour saint Honoré? A force de se creuser la tête, notre académicien finit par supposer ceci : "C'était un riche boulanger qui fonda la chapelle devenue plus tard l'église Saint-Honoré de Paris, et cela suffit pour que tous les boulangers suivissent l'exemple de dévotion donné d'abord par leur confrère". 

Malgré ses plaisanteries, A.-V. Arnault se montre aristocrate. Pour lui, comme pour M. Corblet, saint Honoré était le noble fils d'un comte du Ponthieu. Mais les boulangers de Normandie étaient en possession, au XVIe siècle, d'une légende plus populaire. D'après cette légende, peinte avec une couleur splendide sur les superbes vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, saint Honoré, loin de n'avoir de sa vie mis la main à la pâte, aurait commencé par être garçon boulanger; puis, ayant étudié, serait devenu évêque d'Amiens. Cette verrière de saint Honoré, si resplendissante d'éclat et de fraîcheur, fut donnée en l'an de grâce 1536, par la Confrérie des boulangers de Pont-Audemer, dont Jacques Langlois et Robert Aubin étaient alors dignitaires. Elle a été décrite amplement par Mme Philippe Lemaître, qui lui consacre huit pages dans sa Notice des vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer (Rouen, 1853, 3 pages gr.in-8°). 

 

C'est dans la troisième chapelle de la nef, du côté de l'Évangile, que j'ai pu admirer cette peinture de la Renaissance. Le premier panneau, à droite de l'observateur représente l'intérieur d'une boulangerie. Cinq pains sont sur une planche fixée à la muraille par des chevilles de bois Du four allumé, sortent des flammes jaunâtres. Nu, sauf les reins qu'il a ceints d'un linge blanc, ainsi que sa tète, saint Honoré est debout devant l'entrée du four, et en retire son fourgon, qui, loin de sortir noirci du foyer enflammé, apparaît couvert de fleurs et de feuillages. La mère du saint manifeste par ses gestes sa stupéfaction à la vue de ce prodige. L'aspect du fourgon fleuri plonge aussi dans l'étonnement d'autres spectateurs. Au bas du panneau, l'artiste inconnu, mais de grand talent, a tracé cette inscription 
COMENT LA MERE SAINCT HONORE SE ESBAHI DV FOVRGO QVI AU FOVR FLEURI. 

Le second tableau représente une école où un second miracle s'accomplit. Saint Honoré est debout devant un professeur, et tient à la main un livre ouvert dans lequel ce professeur lui indique un passage. Inspiré par l'Esprit-Saint, l'écolier, jusqu'alors ignorant, explique ce passage, et on lit au bas du panneau 

COMENT SAINCT HONORE FVT INSPIRE DE DIEV ESTANT A LESCOLLE. 

Dans un troisième compartiment, le pape Vitalien, entouré d'un cortége de cardinaux et de prélats en brillants costumes, sacre évêque saint Honoré: le socle porte ceci: 
COMMENT SAINCT HONORE FVT SACRE EVESQVE DE AMIANS. 

Enfin, l'histoire se termine par la représentation très-mouvementée d'une procession, la procession de Fourgon-fleuri, où l'on portait en grande solennité un fourgon verdoyant. 
On lit: 
COMENT POVR LE MIRACLE DV FOVRGU  FVT FAICTE VNGNE POVRCESSION. 

Nous avons résumé. ici cette légende, parce qu'elle a échappe aux patientes recherches de M. Corblet, et à celles du R. P. Cahier, dans ses Caractéristiques des Saints
Ajoutons qu'une autre verrière de cette même église de Pont- Audemer représente le martyre subi à Amiens par saint Quentin, 
dont M. Corblet raconte la vie dans le volume qui nous occupe."

— CALLIAS BEY (Martine), CHAUSSÉ (Véronique), GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2001,"Les vitraux de Haute-Normandie", Corpus vitrearum Recensement VI, CNRS éditions, page 194.

 

— CORBLET. Origine du patronage liturgique des boulangers. Le miracle du fourgon reverdissant de saint Honoré était cher à l'érudit abbé qui l'évoqua dans un mémoire sur Quelques Pèlerinages de Picardie, présenté au Congrès Scientifique de France tenu à Amiens en 1867.— CORBLET. Hagiographie..., t. III, p. 42. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5457554s/texteBrut

— DESPORTES ( Françoise), 1981, . Le pain en Normandie à la fin du Moyen Âge. In: Annales de Normandie, 31ᵉ année, n°2, 1981. pp. 99- 114; doi : https://doi.org/10.3406/annor.1981.5421 https://www.persee.fr/doc/annor_0003-4134_1981_num_31_2_5421

— GATOUILLAT ( Françoise) 2001, Eglise Saint-Ouen : Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum / Recensement des vitraux anciens de la France, Paris, CNRS, 2001. p. 194-195.

 

— GATOUILLAT  (Françoise),, "L'utilisation de modèles graphiques dans le vitrail parisien au début du XVIe siècle", dans Michel Hérold et Claude Mignot (dir.), Vitrail et arts graphiques XVe-XVIe siècles, actes de la table ronde de Paris, Ecole nationale du patrimoine, 29-30 mai 1997, Paris, 1999, p. 159.
Michel Hérold, "A propos du "Maître de la Vie de saint Jean-Baptiste : recherches sur l'usage des patrons à grandeur au début du XVIe siècle", dans Michel Hérold et Claude Mignot (dir.), Vitrail et arts graphiques XVe-XVIe siècles, actes de la table ronde de Paris, Ecole nationale du patrimoine, 29-30 mai 1997, Paris, 1999, p. 182.

— GATOUILLAT  (Françoise), 1996, Eglise paroissiale Saint-Ouen, Pont-Audemer : les verrières, inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, commission régionale Haute-Normandie, Rouen, Connaissance du patrimoine de Haute-Normandie, Itinéraires du patrimoine n°103, 1996 ;

— GATOUILLAT  Françoise,Notice © Monuments historiques, 2005,

http://www2.culture.gouv.fr/public/mistral/palissy_fr?ACTION=RETROUVER&FIELD_98=LOCA&VALUE_98=%20Pont-Audemer&NUMBER=4&GRP=0&REQ=((Pont-Audemer)%20%3ALOCA%20)&USRNAME=nobody&USRPWD=4%24%2534P&SPEC=3&SYN=1&IMLY=&MAX1=1&MAX2=200&MAX3=200&DOM=Tous

"Une autre (baie 13) reflète aussi par sa facture, l'influence d'un grand atelier de Beauvais. Du point de vue iconographique, les verrières ne comportent pas de programme d'ensemble. Les vitraux sont commandés pour orner les chapelles privatives. Le sujet est le choix du donateur. On peut noter toutefois plusieurs cycles hagiographiques rarement illustrés, ceux dédiés à saint Ouen (baie 18), à saint Mathurin (baie 12) et à saint Honoré (baie 13).  « 

— LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ;

— MONTIER, (Armand), 1895,Les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, Pont-Audemer, Impr. du Commerce, G. Hauchard, 1895 ;

— MONTIER, (Armand), 1896, "Pont-Audemer", Normandie monumentale p.97-110. (non consulté)

— OTTIN, sd. [1896], p. 223

— PERROT (Françoise), 1972, M. Baudot et J. Lafond. Églises et vitraux de la région de Pont-Audemer, numéro spécial des Nouvelles de l'Eure, 3e trimestre 1969 , [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1972  130-1  pp. 87-88

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1972_num_130_1_5138_t1_0087_0000_3

— PHILIPPE-LEMAITRE (Delphine)  en 1853, non consulté

— REAU (Louis), 1958, iconographie 

— REGNIER (Louis)  en 1899, Compte-rendu d'une Excursion à Pont-Audemer et à Quillebeuf (18 août) ,  in "Annuaire des cinq départements de l'ancienne Normandie publié par l'association normande,  Caen Rouen, Henri Delesques

 https://archive.org/stream/annuairedescinq00artsgoog/annuairedescinq00artsgoog_djvu.txt

"Non contents d'élever un monument imposant par ses dimensions, les paroissiens de Saint-Ouen avaient voulu doter leur église d'une décoration intérieure capable de rivaliser avec la somptuosité de l'œuvre architecturale. Ainsi, selon le goût du temps, les chapelles devaient être fermées de clôtures en pierre, ajourées, qui ne furent sans doute jamais construites, dont nous ne possédons, en tout cas, que les extrémités, liées de chaque côté au pilier voisin. Tout naturellement, l'ornementation de ces clôtures eût été empruntée de façon exclusive au style de la Renaissance, et ce que l'on en peut voir atteste en effet, autant de délicatesse que de goût. Mais nous ne saurions étendre cet éloge aux piscines ménagées dans le mur des chapelles ; ce sont de gauches et monotones compositions, qui ont, il est vrai, subi plus d'une injure, et souffert notamment du plus maladroit des grattages.

D'autres objets, remontant au XVe siècle, mériteraient çà et là d'attirer l'attention. Nous citerons, par exemple, les jolies boiseries mi-gothiques mi-Renaissance qui ferment la chapelle des fonts baptismaux, installée sous la tour inachevée du midi; les fonts eux-mêmes, œuvre de sculpture intéressante, contemporaine des derniers grands travaux de l'église; quelques frises et sculptures décoratives dans les chapelles du nord, ayant, selon toute apparence, servi soit d'appui, soit de couronnement, à des tableaux peints sur bois ou à des retables à personnages en relief, les uns et les autres malheureusement disparus, aussi bien que la grande contre table du maître-autel, commandée en 1535 par la confrérie de charité à Gaspard de Laval, « imaginier » à Caudebec.

Mais ce qui constitue la grande richesse artistique de l'église Saint-Ouen, c'est une collection de verrières polychromes depuis longtemps célèbre et que l'opinion des érudits et des artistes classe à bon droit parmi les plus intéressantes du nord de la France. Décrites une première fois en 1853 par M"'* Philippe-Lemaître, les quatorze verrières de Saint-Ouen de Pont-Audemer ont été récemment l'objet d'un nouveau travail, dû à M. Montier, ancien maire de la ville, sous l'administration duquel commencèrent à être pris des soins de conservation depuis longtemps nécessaires. Le renouvellement des plombs, un nettoyage prudent, une restauration ou plutôt une mise en état sobre et discrète ont rendu à ces belles peintures translucides leur solidité, leur fraîcheur et leur éclat d'autrefois ( Ce travail délicat fut confié à M. Duhamel-Marette, l'artiste bien connu. On a reproché à M. Duhamel d'avoir, dans la verrière mystique, remplacé deux têtes, qu'il affirme énergiquement n'avoir pas appartenu à l'œuvre primitive : l'une de ces têtes était un véritable soleil placé au-dessus du corps de Moïse et traduisant d'une manière peut-être outrée le rayonnement lumineux dont parle la Bible. Le lecteur pourra en juger dans les photographies prises avant la restauration par les soins de la Commission des monuments historiques.).

Tous ces vitraux garnissent les fenêtres des chapelles de la nef. La première baie du côté nord, à partir de l'ouest, renferme les panneaux les plus anciens de tous. Dans cet unique vestige de la vitrerie antérieure au XVe siècle, on voit des figures de saints, surmontées chacune d'un dais gothique, et deux dates, l'une — 1475 — s'appliquant au vitrail lui- même, l'autre — 1551 — indiquant l'époque où il fut complété et définitivement placé à l'endroit où nous le voyons aujourd'hui. Voici d'ailleurs l'inscription, qui a donné lieu à une interprétation erronée :

lan • mil • cccc • Ixxv • fut • ce /te • vriere • fcte ' p ' guille • le • bnvenu • pierre • cardonel •

M*"' Philippe-Lemaître et, après elle, M. Canel  et M. Montier ont pris le premier de ces noms pour celui du peintre-verrier. C'est une erreur manifeste. Guillaume Le Bienvenu figure ici comme trésorier, au même titre que les trois autres. Il était d'un usage courant, à cette époque, que le temporel des églises fût administré par quatre marguilliers .

Plus loin, une verrière, offerte en 1536 par les boulangers, est tout entière consacrée à la vie de saint Honoré, évêque d'Amiens, patron de la corporation. C'est une des plus curieuses de l'église, bien que l'on puisse y relever de fâcheuses défaillances de dessin. Si le groupe des écoliers, par exemple, est d'une grâce ravissante, le saint Honoré dans sa boulangerie et les deux cardinaux de la procession du « fourgon fleuri » paraissent, au contraire, fort gauches.

On peut rapprocher de cette fenêtre la verrière suivante, qui, malheureusement très endommagée, représentait le long martyre de saint Vincent. Peut-être faut-il reconnaître dans l'une et dans l'autre deux œuvres sorties de la même main. Toutes deux se distinguent par une coloration vive et brillante, avec quelques duretés toutefois et même quelques discordances. Le peintre, d'ailleurs, n'était pas sans expérience et savait produire une piquante variété d'effets: les extérieurs abondamment ensoleillés contrastent avec des intérieurs assez habilement traités en clair obscur. Nous croyons avoir reconnu un parti de coloration analogue dans plusieurs verrières des églises d'Elbeuf et de l'église de Caudebec-en-Caux, toutes d'une date à peu près contemporaine.

La Vie de saint Nicolas, qui suit, appartient à une époque un peu postérieure et à un genre sensiblement différent. La palette du peintre s'est enrichie de tons nouveaux : l'artiste auquel nous avons affaire affectionne, par exemple, un jaune doré dont l'emploi répété donne à l'ensemble un aspect tout particulier. Egalement remarquable par l'habileté de la composition, la sûreté du dessin et l'harmonie des couleurs, cette verrière a malheureusement perdu la plus grande partie de ses panneaux inférieurs, que l'on a eu la sagesse de ne pas compléter lors de la restauration récente.

des deux verrières latérales de l'abside de la même église, représentant, d'une part, l'histoire du chef de saint Jean-Baptiste, de l'autre, l'Invention et l'Exaltation de la sainte Croix;

de David terrassant Goliath, puis reçu en triomphe par les filles de Juda, dans le bas-côté sud de Saint-Jean d'Elbeuf;

enfin de la magnifique verrière de la Femme adultère, datée de 1532, dans l'église de Caudebec-en-Caux (deuxième chapelle méridionale).

MM. Palustre et Montrer ont été frappés, à juste titre, de l'étroite parenté qui unit cette Vie de saint Nicolas au grand vitrail de la Loi et de la Grâce que l'on voit ensuite, terminant la série des baies du côté nord. Dans cette dernière fenêtre, nous trouvons de nouveau, mais à un degré plus extraordinaire encore, la perfection du dessin, la hardiesse des attitudes, une science du groupement prodigieuse, un coloris vibrant, égal et bien équilibré, et, dominant le tout d'inoubliable façon, la même note chaude, lumineuse et dorée. Cette page splendide, datée de 1556, contemporaine, par conséquent, du plus bel épanouissement de la Renaissance française, fut à coup sûr l'œuvre d'un artiste de premier ordre, au courant de tous les progrès de la technique, non moins attentif au mouvement des idées en matière esthétique, mais heureusement protégé contre tout excès par un goût sûr et une raison dont son œuvre même atteste la puissance. Nous avons vainement cherché son nom. Tout au plus pouvons-nous nous risquer à rattacher son œuvre à l'atelier qui produisit, vers le milieu du XVP siècle, les vitraux de Serquigny et de Beaumont-le-Roger (1), les admirables panneaux dont il ne reste que des débris à Jouy-sur-Eure, la verrière de la Manne, à Couches, et peut-être aussi la Présentation au Temple de la même église. Mais où chercher elle-

(1) Nous parlons surtout des deux panneaux, représentant l'Annonciation et ia Nativité, qui figurent dans les petites fenêtres latérales de l'abside. Ce sont ceux qui ont le moins souflert des restaurations modernes.

môme l'origine de ces œuvres ? Nous ne saurions le dire. Si Ton en croit M. Palustre, c'est du côté d'Argentan et d'Alençon qu'il faudrait se tourner ; mais, pour notre part, nous ne voyons aucune raison sérieuse de suivre l'auteur de la Renaissance en France dans des observations et des classifications qui sont loin, en réalité, d'avoir le mérite de la justesse.

 

Traversons la nef et continuons notre rapide examen. Nous trouverons, en face de la précédente, une verrière fort intéressante, parce que c'est la seule de la série dont l'auteur soit connu. En effet, le 16 novembre 1535, par contrat notarié, deux ou trois membres d'une famille bourgeoise de Pont- Audemer, les Genouville, alors simples marchands, commandèrent à un peintre-verrier de Rouen, nommé Mauxe Heurtault, un vitrail où devaient être représentées la Vie de saint Jean-Baptiste et, au-dessus, la Descente du Saint- Esprit sur les apôtres ; de plus, voulant faire comprendre à l'artiste le genre qui avait leurs préférences, il lui recommandèrent de s'inspirer avec soin de la verrière consacrée à saint Jean , dans l'église de Saint- Vincent de Rouen (1). Or, grâce à M. Paul Baudry, nous savons que la verrière de Saint- Vincent, qui par bonheur subsiste intacte, porte, avec la date 1525, le monogramme d'un peintre-verrier célèbre, Engrand Le Prince (1). Les productions de l'école de Beauvais excitaient donc dès lors assez d'admiration pour que Ton ne crût pouvoir mieux faire que de les copier. Et, de fait, Mauxe Heurtault imita le plus qu'il put, de la verrière rouennaise, la disposition générale ( Il supprima cependant la Danse de Salomé, remplacée par la scène qui montre la jeune fille apportant sur un plat la tête de Jean-Baptiste. De nombreuses variantes ont également été introduites dans la scène du Baptême, tandis qu'au contraire la Prédication fut presque littéralement copiée.), la richesse des fabriques et, — ce qui, sans doute, importait le plus, — la tonalité merveilleusement sonore. Mais, en dépit d'un talent incontestable, le dessin est plus sec, et le faire n'a pas cette largeur étonnante qui caractérise le modèle. Nous signalerons comme un des meilleurs le personnage du premier plan qui ôte ses vêtements pour entrer dans le Jourdain. Peut-être, si nous ne nous abusons, quelques analogies pourraient-elles conduire à faire honneur au môme peintre de la Vie de saint Honoré et de la Vie de saint Vincent que nous avons vues dans les chapelles septentrionales.

(1) M. Paul Baudry a, le premier, signalé ce curieux document dans sa description des vitraux de Saint-Vincent (1875) ; mais le texte qu'il en donne, p. 94, d'après une copie de M. Gosselin, renferme quelques inexactitudes. Grâce à une très obligeante communication de M. Charles de Beaurepaire, il nous est possible d'en donner ici une leçon meilleure : « Mausse Heurtault, maistre du mestier de verrier en ceste ville de Rouen, dem* en la paroisse S. Nicolas du dit lieu, s'est submis et obligé, par ces présentes, envers ditz de Genouville, bourgeois et marchans, dem" au Pont Audemer, qui présens estoient, faire pour les dits de Genouville, construire, agréer et parfaire... une vitre de la gratideur qu'il disoit luy avoir esté baillée par lesdits de Genouville; et icelle figurer telle et delà sorte que celle qui estédiffiée et construite en l'église S' Vincent de ceste ville de Rouen, qui est la première du costé de devers la maison du grenetier de Rouen; et icelle vitre figurer de la vie de s. Jehan Baptiste, de aussi bonnes pièces, matières et pourtraicts que est celle du dit lieu de S. Vincent ; et faire et figurer aux fourmementz d'icelle vitre une Penthecouste, où seront figurez Dieu, le S* Esperit, Nostre Dame et les apostres ; et icelle vitre rendre toute parfaicte, preste , et icelle asseoir en l'église de S. Ouen du dit lieu de Pont Audemer dedens le jour de Pasques fleuries prochain, à ses despens; cette submission ainsy faicte aumoyen de la somme de Ixx 1. 1.,... » (Min. du tab. de Rouen. Arcli. de la S.-Inf.).

 On voit bien aussi dans cette verrière un écu chargé des initiales M. P., mais la place donné à cet écu au premier plan suffit à prouver qu'il ne saurait avoir la même signification que les cartouches fort peu apparents où se trouvent les lettres E L. I*. : il fait allusion, non à l'auteur, mais à un donateur.

Tout à côté de cette œuvre exclusivement française, on trouve une page au caractère complètement opposé et à la date cependant presque, contemporaine, ainsi que suffit à le prouver le costume des donateurs, f La composition quelque peu théâtrale, l'abondance des draperies, la noblesse des attitudes, l'expression môme des figures • (1), indiquent dans cette Mort de la Vierge l'influence pour ainsi dire exclusive de l'art italien. L'œuvre est, d'ailleurs, remarquable, et serait plus admirée encore si le coloris, à côté d'harmonies charmantes, ne présentait des lourdeurs qui nuisent gravement à l'effet général.

Une très grande diversité de style et d'inspiration règne, — nous ne sommes pas le premier à le faire remarquer, — dans les vitraux de cette partie de l'église.  C'est là, ainsi qu'on l'a dit, un des effets les plus intéressants de l'exécution des chapelles au moyen de donations isolées. » Ainsi, côte à côte avec une scène inspirée des idées les plus hardies, les plus gramme ou des armoiries fort difficiles à déchiffrer. M"« Philippe- Lemaître en a donné la reproduction. — On ne connaît aucune autre œuvre du peintre- verrier Heurtault, dont M. Ch. de Beaurepaire n'a retrouvé la trace, en dehors du marché précité, que dans le passage suivant des comptes de Saint- Vincent ; « Le 18 novembre 1531, [payé] à Mausse Hertault, verrier, pour la refachon de toutes les verrières cassées de l'église et pour la lanterne, x 1. v s. ».

novatrices, les plus favorables aux influences du dehors, nous contemplons toute une série de petits panneaux encadrés d'architectures dont l'aspect, à première vue, est plus gothique encore que Renaissance, rappelant tout à fait, en un mot, les productions de l'art du verrier au XV" siècle. De quelques fragments informes d'inscription qui s'y aperçoivent, M. Ernest de Fréville (1) a cru pouvoir induire que cette verrière avait été posée en 1519. Ce serait assez, en effet, la date indiquée par les costumes. Divers épisodes de la vie de saint Nicolas, de saint Eustache, de saint Jean l'Évangéliste, et l'une des visions de l'Apocalypse, forment dans cette fenêtre autant de sujets d'un vif intérêt iconographique.

La verrière suivante, sans doute de quelques années moins ancienne, représente divers saints isolés et plusieurs scènes de la vie des apôtres Pierre et Paul. L'auteur subissait encore l'influence affaiblie du passé.

Nous arrivons aux trois fenêtres des chapelles terminées sous Louis XII. Les verrières qu'elles enchâssent, loin d'être inférieures en intérêt aux précédentes, fournissent, au contraire, d'excellents spécimens des productions d'une période transitionnelle dans l'art du peintre-verrier comme dans tous les autres. La première, donnée en 1516 par Guillaume Tesson, bourgeois de Pont-Audemer, offre à nos regards plus d'un personnage traité de façon supérieure, — par exemple la Vierge penchée sur le corps de son Fils (la Mise au tombeau) et les deux acteurs de la scène de l'Annonciation, — et les encadrements y récèlent aussi de charmants détails. Quant aux deux autres fenêtres, elles mériteraient de nous arrêter longtemps. De nombreux épisodes empruntés à la vie de saint Ouen sont figurés dans l'une d'elles en de petits panneaux où tout serait matière à examen, où l'œil admire avec un égal plaisir la judicieuse sobriété de l'ordonnance, la grâce, l'aisance, la clarté de l'exécution. L'autre, qui ne paraît pas de la même main et pourrait être môme de quelques années antérieure, est consacrée à la représentation de plu- sieurs miracles eucharistiques d'une identification difficile. Il y a dans tout cela d'inappréciables documents pour l'histoire du costume. Au bas se déroule, sur toute la largeur des deux baies, une procession du Saint-Sacrement, suivie de nombreux paroissiens et précédée de la confrérie de charité, donatrice des deux verrières. M, Ferdinand de Lasteyrie a jugé cette curieuse procession digne de figurer dans sa grande histoire de la peinture sur verre.

Telle est cette brillante série de vitraux, dont l'examen permet de saisir toutes les transformations que subit l'art du peintre-verrier dans la première moitié du XVP siècle. Il faut souhaiter qu'un érudit, doublé d'un artiste, consacre bientôt à ces œuvres remarquables, dont la valeur est aujourd'hui, heureusement, bien comprise, la publication approfondie et abondamment illustrée que comporte un tel sujet, c II est temps », comme le faisait remarquer récemment M. Eugène de Beaurepaire,  il est temps, avec les procédés graphiques dont nous disposons aujourd'hui, de faire connaître, sans distinction d'époque, à tous. Français et étrangers, les trésors infiniment variés de notre art national. N'est- il pas, d'ailleurs, sage et patriotique, en prévision de désastres qui peuvent toujours se produire, d'assurer à ces fragiles monuments le privilège de la perpétuité en en reproduisant l'image? > Peut-être une étude ainsi longuement et patiemment poursuivie, et les comparaisons minutieuses avec les œuvres contemporaines qui en seraient le complément obligé, nous vaudront-elles un jour la réponse à ces questions d'origine, toujours si délicates à trancher. A ce point de vue, il convient de ne pas l'oublier, les plus petits détails ont leur importance, et l'examen des damassés par exemple, auquel M. le comte de Marsy conviait récemment les archéologues, ne manquerait pas sans doute d'amener çà et là des résultats inattendus.  (Les vitraux peints de la cathédrale de Bourges, dans le BulL mon., 1897, p. 396)."

 

 

 


 


 

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Published by jean-yves cordier - dans Vitraux
12 décembre 2018 3 12 /12 /décembre /2018 21:56

La verrière de la vie de saint Ouen (offerte par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515) ou baie 18 de l'église de Pont-Audemer.

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Voir :

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PRÉSENTATION.

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Cette baie du bas-coté sud de l'église juste après la baie 20 est faite de trois lancettes trilobées et un tympan à trois soufflets.

Elle est datée vers 1515, puisque Une nouvelle nef à sept travées avec ses bas-côtés et les chapelles latérales fut élevée de 1505 à 1515 par l'architecte rouennais Roulland le Roux. (On avait  commencé  par abattre la nef en conservant le transept et le chœur ; la construction du portail, de la tour Nord et de la base de la tour Sud semble avoir débuté vers 1485 sous la direction de Michel Gohier). 

 Haute de 5 mètres et large de 2,50 m, elle peut accueillir quatre registres de trois scènes. Le registre inférieur est consacré aux donateurs, les charitons de la Confrérie du Saint Sacrement qui y défilent en procession.

— Sujet:

Les trois registres sus-jacents et les trois mouchettes du soufflet représentent, en 12 scènes, la vie de saint Ouen, le patron de l'église.

Ces deux sujets sont tout aussi intéressants l'un que l'autre. 

Découvrir l'importance du culte du Saint Sacrement en Normandie à la fin du XVe et au début du XVIe siècle, à l'aube de l'apparition de la réforme protestante, est passionnant, et les deux articles précédents sur les Miracles de l'eucharistie (baie 20 de Pont-Audemer et baie 9 de Nogent-le-Roi) participent à cette découverte.

Mais approfondir la connaissance du culte de saint Ouen, si important à Rouen, grâce à une bande dessinée, est également très agréable.

— Attribution : Le peintre verrier pourrait être un élève d'Arnoult de Nimègue, grand maître néerlandais.

— Décor (décrit par J. Lafond)  : Le registre inférieur est surmonté d'un bandeau porté par des consoles dorées. Des motifs composés de cornes d'abondance ou de simples rinceaux, de médaillons ou de cartouches, et animés par des putti, par  des oiseaux ou par la tête ailée des anges règnent sur les deux autres registres et garnissent le sommet des lancettes autour d'un vase d'ornement. Le fond blanc des paysages met en valeur un coloris qui paraît léger et gai à coté de la gamme plus soutenue de la baie 18. Notez les inscriptions IESVS MARIA IESVS des cartouches du deuxième registre.

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Verrière de la vie de saint Ouen, offerte par   la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen, offerte par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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SITUATION.

Pont-Audemer ( Pontem Aldemari, "le pont d'Aldemar" ou ad duos pontes, "à deux ponts")  fut un centre religieux important, siège d'un archidiaconé, et partagé entre les diocèses de Lisieux et de Rouen. 

 

Découvrir la carte de 2018 et de la fin du XVIIIe sur Géoportail.

Je les situerai grâce aux "plaques de cocher" en disant que Pont-Audemer est placé à 1 km de Saint-Germain, à 24,3 km d'Honfleur et à 8,9 km de Saint-Maclou, sur l'ancienne Route Nationale n° 180.

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La verrière de la vie de saint Ouen en l'église de Pont-Audemer.
La verrière de la vie de saint Ouen en l'église de Pont-Audemer.

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LA PROCESSION DE LA CONFRÉRIE DU SAINT SACREMENT, BAIES 18 ET 20.

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Ce registre représentant une procession du Saint Sacrement par la confrérie ou "charité" donatrice de la verrière.

 

 

 

 

La confrérie « ambulatoire » du saint Sacrement de Rouen, créée en 1561 en riposte à la menace protestante, charge chaque dimanche un confrère, à tour de rôle, de célébrer une messe et de faire prêcher dans une des paroisses de Rouen. Un registre de la confrérie du très Saint Sacrement de l'Eucharistie établie en l'église St-Denis de Rouen, tenu entre 1661 et 1669, nous permet de mieux pénétrer le fonctionnement de ces confréries. A l'entrée, pas de cotisation obligatoire, mais une simple « aumône ».Tous les membres, frères et sœurs, participent aux mêmes exercices, qui consistent notamment à accompagner le Saint Sacrement quand il est porté aux malades. Les frères et sœurs s'engagent à prier chaque jour les uns pour les autres, et à se confesser et à communier tous les mois et aux grandes fêtes. Enfin, ils « s'efforceront aussi de s'exercer en tout temps, et particulièrement les jours de communion, en diverses actions de piété, de dévotion et de charité ». Dans cette confrérie très officielle, les premiers membres inscrits sont le curé de la paroisse, dix anciens trésoriers de la fabrique et les deux trésoriers en charge. Pour la seule année 1661, on compte 216 membres inscrits, parmi lesquels 71 hommes et 145 femmes , ce qui témoigne de la féminisation importante des confréries de dévotion (à la différence des confréries funéraires). 

D'autres vitraux représentent des confréries, à Saint-Martin de l'Aigle, à Saint-Jacques de Lisieux (où le vitrail  de 1526 a été détruit en 1940), à Quillebeuf (baie 3, vers 1600), et à Louviers (baie 26 vers 1490-1500).

 

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1°) La baie 20.

Sous un dais rouge orné de calices et frangé d'or, porté par quatre prêtres, l'officiant revêtu d'une chape blanc et or présente la monstrance. Les quatre prêtres portent la même chape, rouge à pommes de pins d'or, dont la bordure est divisée en niches où figurent sans doute les 12 apôtres.

Un groupe d'hommes et de femmes ferme la marche.  Ce sont de riches bourgeois, luxueusement vêtus de manteau fourrés et coiffés de toques ou de coiffes. La plupart tiennent un livre. Les fils tiennent leur bonnet à la main.

Comme dans la baie 18, le sol est jonché de fleurs et de tiges, ce qui pourrait indiquer que la procession est celle de la Fête-Dieu. 

 

Inscription : OST JEHAN LE PETIT [PRESIDENT ?] DE CE LIEU --

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Procession de  la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de  la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de  la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Le début de la procession dans les trois lancettes de la baie 18.

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 L'inscription en partie basse indique : « CES VITRES ONT [ETE] FAICTES DES DENIERS DE LA CHARITE FONDEE EN L'EGLISE SAINT OUEN DE PONT AUDEMER".

 

 

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Procession de  la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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En tête, le « tintenellier », vêtu d'une dalmatique bleue semée de calices d'or, agite ses clochettes. Suit la bannière à l'effigie de saint Ouen, portée par un confrère précédé de deux jeunes clercs céroféraires et  suivi d'enfants de chœur, ou plutôt d'e jeunes garçons habillés en petits monsieurs .

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Procession de  la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Douze confrères, le chaperon bleu posé sur leur robe, tiennent de grandes torches allumées.

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Procession de  la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Viennent ensuite sept chantres vêtus de chapes. Une inscription, a priori dépourvue de sens , court sur le galon de la dernière  chape, et une autre sur le col du dernier chantre.

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Procession de  la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Procession de la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LES 12 ÉPISODES DE LA VIE DE SAINT OUEN.

En voici la liste :

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1. Saint Colomban abbé de Luxeuil bénit Dadon, le futur saint Ouen, accompagné de ses frères Adon et Radon, en présence de sa mère et de deux autres femmes.

2. Jeune noble, le saint fait jaillir miraculeusement une source sur les terres familiales.

3. Saint Ouen chasse par la prière les grues qui avaient envahi les champs de son père.

4. Le saint est nommé officier de  chancellerie par le roi Dagobert qui lui remet un coffret fleurdelysé.

5. Intronisation au siège épiscopal de Rouen.

6. Apparition miraculeuse dans le ciel d'une croix fulgurante devant saint Ouen, qui fait ériger une croix, marquant ainsi  l'emplacement où devra s'ériger le monastère de la Croix-Saint-Leuvroy.

7. Saint Ouen guérit un meunier paralysé de la main droite après avoir travaillé le dimanche [ou : un homme muet].

8. Guérison d'une possédée devant un retable orné d'un calvaire : un diable vert s'enfuit.

9. Dernière communion de saint Ouen, assisté de saint Ansbert.

10. Le corps de saint Ouen porté par des clercs au lieu de ses funérailles.

11. Sa mise au tombeau.

12. Transfert des reliques du saint de Clichy à Rouen par saint Ansbert son successeur.

 

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La Vie de saint Ouen a été décrite dans des manuscrits (BMR, ms. U. 64 (Vitae sanctorum), BM Rouen, ms. Y. 41 ou Livre noir de l'abbatiale Saint-Ouen de  la fin du XIe siècle) et dans les Acta Sanctorum vol. 37 du 24 août : De S. Dadone vel Audoëno ep. Rothomagi in Normannia (Ici ed. 1739, pages 794-840).

Elle a été illustrée à Rouen au XIVe siècle sous forme de sculptures sur deux édifices prestigieux :

a) Le portail dit « de la Calende », au transept méridional de la cathédrale de Rouen, entre 1310 et 1320 . Les contreforts est sont dédiés à saint Romain et à saint Ouen, et ce dernier cycle comporte 20 bas-reliefs quadrilobés de la vie et des miracles de saint Ouen.

b) Le portail des Marmousets de l'abbatiale Saint-Ouen de Rouen  à la fin des années 1330 double la mise, avec 40 bas-reliefs consacrés au saint dont l'abbaye possède les reliques.

Ces sculptures ont été décrites par Franck Thénard-Duvivier en 2012 avec un riche corpus d'illustration disponible en ligne.

Les scènes du vitrail de Pont-Audemer sont, à l'évidence, inspirées de ces sculptures.

 

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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1. Saint Colomban abbé de Luxeuil bénit Dadon, le futur saint Ouen, accompagné de ses frères Adon et Radon, en présence de sa mère et de deux autres femmes.

Inscription EN MARES ASES sur le bas de la robe du petit garçon.

Verre rouge gravé : néant.

"Saint Ouen naquit vers l'an 600 dans le village de Sancy près de Soissons, et eut pour père et mère Authaire et Aige, que leur vie édifiante et les miracles qu'on leur attribua ont fait mettre au nombre des saints. Son frère fut le vénérable Adon qui, bientôt dégoûté des pompes du siècle, fonda au diocèse de Meaux, dans une terre qu'il avait près de la Marne , le monastère de Jouarre. Saint Colomban, abbé de Luxeuil, chassé du royaume de Bourgogne et cherchant un asile à la cour d'Austrasie, passa dans le village d'Ussy-sur-Marne.  Il y fut généreusement accueilli dans le manoir d'Authaire qui en était seigneur. En reconnaissance , le saint bénit Authaire et ses deux enfants.

Élevés l'un et l'autre au milieu du faste de la cour, ils y exercèrent les charges les plus importantes. Dadon, depuis appelé Ouen, remplit sous Dagobert et sous Clotaire II les fonctions de référendaire ou garde du sceau royal. Ce fut à cette époque que voulant donner aux siècles futurs une preuve éclatante de l'estime et de la vénération qu'il avait pour l'ordre monastique, il fonda, sur un emplacement qu'il avait obtenu du roi, dans la pagus Briensis, au diocèse de Meaux, l'abbaye de Rebais en 634, et à sa demande saint Aile, moine de Luxeuil, fut peu après institué, par saint Paron, le premier abbé de ce monastère."

Comparaison avec le Portail des Calendes  et le Portail des Marmousets :


 

 

"À droite, le moine irlandais est représenté en costume d’évêque bien qu’il n’occupât jamais cette fonction et qu’il soit habituellement figuré dans la tenue monacale, vêtu d’un froc ample, tenant un livre et un bâton ou la crosse abbatiale. Ici, il s’agit davantage d’un type iconographique pour souligner son statut dans la hiérarchie ecclésiastique et son rôle d’évangélisateur à l’instar des évêques du VIIe siècle comme Romain ou Ouen. Colomban fait le geste de bénédiction en direction des trois enfants agenouillés en prière (Saint-Ouen) ou debout dans une tenue – avec peut-être même une tonsure ? – qui semble déjà signifier leur vocation ecclésiastique (Calende). Cette bénédiction est davantage une consécration à Dieu. Les deux bas-reliefs montrent l’un des parents posant sa main sur le dernier de ses fils : geste de protection mais aussi, probablement, de consentement à la vocation de ses enfants, voire d’encouragement à l’accepter." (Franck Thénard-Duvivier)

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Saint Colomban bénit Dadon et ses frères (Calende, Rouen) in Thénard-Duvivier 2012.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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2. Jeune noble, le saint fait jaillir miraculeusement une source sur les terres familiales.

 

Ouen, nimbé, coiffé d'une toque bleue, est vêtu d'une robe dorée damassée et serrée par une ceinture bleue ; une aumônière rouge et or, à rabat et glands frangés, y est suspendue .

Dans le lointain, une église à flèche et à tours.

Verre rouge gravé : l'aumônière.

Comparaison avec le Portail des Calendes  et  le  Portail des Marmousets :


 

 

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Deux récits du « Livre noir » nous livrent probablement deux versions proches d’un même miracle de la « source » ou de la « fontaine » rapporté par la Vita originelle. À Saint-Ouen, Dadon enfant fait jaillir une source sous un arbre en présence de sa mère et d’une servante. Il s’agit d’une illustration plus littérale du récit miraculeux. Le jeune Dadon demande à prendre un bain mais sa mère lui répond d’attendre que les paysans aient puisé l’eau dont ils ont besoin pour les travaux agricoles, car c’est l’unique fontaine de leur propriété. Du coup, il sollicite Dieu pour faire jaillir une autre source et il frappe une roche du bâton qu’il tient à la main ; aussitôt un ruisseau jaillit et irrigue le domaine de ses parents. C’est ce dernier geste qui est sculpté au portail de la Calende : on le voit tendre la main vers une source qui coule d’un rocher. Mais le jeune Dadon est déjà représenté en évêque ; ce qui le rend plus aisément identifiable tout en soulignant l’intemporalité de sa puissance miraculeuse. C’est le pouvoir de l’évêque sur la nature qui est avant tout montré : ici, sur l’eau d’origine terrestre (une source) ; plus loin sur l’eau d’origine céleste (la pluie) ou encore sur les oiseaux au quadrilobe suivant."(Franck Thénard-Duvivier)

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Le miracle de la source (Marmouset) in Thénard-Duvivier 2012.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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3. Saint Ouen chasse par la prière les grues qui avaient envahi les champs de son père.

 

— Description :

À la demande des trois femmes des scènes précédentes, saint Ouen, agenouillé, chasse les grues qui s'envolent du champ de blé. 

verre rouge gravé : l'aumônière ; le livre de prières.

Comparaison avec le Portail des Calendes :

 

"Au portail de la Calende, le second quadrilobe du cycle illustre également un miracle de l’enfance pour mieux souligner que le futur évêque possédait des dons prodigieux dès son jeune âge. À nouveau figuré en costume épiscopal, il éloigne les oiseaux d’un champ de blé d’un geste de la main qui apparaît en même temps comme une bénédiction des récoltes . C’est ce pouvoir miraculeux qui permettra à l’évêque de Rouen d’asseoir son autorité et celle de l’Église dans les campagnes du diocèse de Rouen. En effet, commander aux éléments (sources, pluie) et protéger les récoltes sont des atouts précieux à l’époque médiévale où la production agricole assure l’essentiel des ressources alimentaires et la prospérité du monde rural. C’est également une preuve supplémentaire – s’il en faut – de la sainteté de l’évêque de Rouen. Par contre, aucune mention de ce miracle n’a été retrouvée dans les sources hagiographiques." (Thénard-Duvivier 2012.)

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Le miracle des champs (Calende), in Thénard-Duvivier 2012.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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4. Le saint est nommé officier de  chancellerie par le roi Dagobert qui lui remet un coffret fleurdelysé devant quatre seigneurs.

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Verre bleu gravé : robe du roi avec ses fleurs de lys.

"Après des études au sein de sa famille, il fut envoyé à la cour du roi Clotaire pour faire l'apprentissage des responsabilités administratives et militaires. Il s'y lia avec un groupe de jeunes nobles, qui devinrent des Saints Evêques: Saint Didier, futur Evêque de Cahors (+ 655, mémoire 15 nov.); Paul, Evêque de Verdun (+ 8 fév. 648); Saint Faron, Evêque de Meaux (+ 28 oct. 670); Saint Sulpice, Evêque de Bourges (+ 17 janv. 647); et de futurs fondateurs de monastère, tels Saint Wandrille (+ 22 juil. 668) et Saint Cyran (+ vers 655, mémoire le 4 déc.). Mais ce fut surtout avec Saint Eloi (cf. 1er déc.), alors argentier au service du roi, qu'il entretint une amitié spirituelle profonde et durable.

Il passa une dizaine d'années dans la chancellerie royale, s'initiant à tous les rouages de l'administration du royaume et assistant aux fêtes de la cour. Après la mort de Clotaire II (629), son fils et successeur, Dagobert 1er, éleva Dadon à la dignité de référendaire, c'est-à-dire chef de la chancellerie." (Source)

Comparaison avec le Portail des Calendes  et le  Portail des Marmousets :

 

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"Le roi Dagobert Ier (629-639) choisit Dadon comme référendaire, c’est-à-dire chef de la chancellerie, celui qui garde le sceau royal destiné à sceller les actes diplomatiques. Au portail des Marmousets, le futur saint est agenouillé devant le roi (à gauche) qui tend la main vers lui ; mais l’état de conservation du quadrilobe ne permet pas davantage de précision. Au portail de la Calende. le roi tient un sceptre et semble remettre un objet à Dadon, toujours vêtu en évêque bien qu’il ne le soit pas encore. Cet objet symbolique de sa nouvelle charge ressemble plutôt à un phylactère (un diplôme) qu’à l’anneau royal qui lui permet de sceller les actes. En effet, le référendaire soumet les diplômes à la signature du roi, après en avoir vérifié le contenu, et il les signe lui-même. On connaît une charte de 632-633 portant la signature de Dadon (aujourd’hui illisible) à côté de celle de Dagobert Ier. Cette nomination intervient donc entre 629 et 632-633 ; Dadon occupe ce poste jusqu’à son élévation à l’épiscopat." "Thénard-Duvivier 2012.

 

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Le roi nomme Dadon référendaire (Calende) in Thénard-Duvivier 2012.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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5. Intronisation au siège épiscopal de Rouen par trois évêques.

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Investiture par la mitre (et non par la crosse comme à Rouen). L'un des évêques  (dont la croix est celle d'archevêque) pose la mitre, l'autre tient le récipient ayant servi à l'onction d'huile, le troisième tient entre pouce et index l'anneau épiscopal.

Inscription sur le col de l'évêque de gauche : AKEAFEMSSA.

Motifs des robes damassées bleu et rouge au pochoir.

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"La mort de l’évêque de Rouen, Romain (en 639), et de celui de Noyon, Achaire (en 640), entraînent la vacance de leurs sièges épiscopaux. Le roi choisit parmi ses proches conseillers, anciens « nourris » [nutriti] et hauts fonctionnaires palatins pour les pourvoir : le limousin Éloi et le neustrien Dadon. Cette nomination à l’épiscopat dépendait théoriquement des fidèles et du clergé du diocèse, mais elle devait être ratifiée par le roi.

"Si les bas-reliefs mettent en scène l’investiture des deux amis par le roi (à gauche) qui leur remet à chacun la crosse, le choix de Dadon résulte d’un large consensus selon les sources hagiographiques. Certes, le roi Clovis II (né en 635) n’est pas en âge de procéder à l’investiture ni même au choix des évêques, mais les quadrilobes reprennent un type iconographique , ils insistent sur la concomitance de cette double nomination et sur l’amitié qui lie les deux hommes. Rappelons, qu’après la mort d’Éloi en 660, c’est son ami Ouen qui entreprend de rédiger sa Vie."

Dadon – qui dès lors prend le nom d’Audoenus, « Ouen » – et son ami Éloi seraient ainsi consacrés le même jour, vraisemblablement le 13 mai 641 (dimanche des Rogations), dans la cathédrale de Rouen.  "Thénard-Duvivier 2012.

— Comparaison avec le Portail des Calendes  :

"Cette consécration n’est représentée qu’au portail de la Calende, probablement parce que les moines de Saint-Ouen n’avaient aucun intérêt à exalter outre mesure le pouvoir épiscopal. La scène montre quatre évêques : les deux consacrants font le geste de bénédiction et se tiennent de part et d’autre des deux consacrés agenouillés, les mains jointes en prière. Tous les quatre portent les attributs épiscopaux : mitre, crosse et chasuble. Les Vitae ne précisent pas le nom des évêques consacrants mais on peut penser à celui de Reims (pour l’évêque suffragant de Noyon) et à l’évêque suffragant le plus ancien du diocèse rouennais, c’est-à-dire saint Régnobert de Bayeux. " Thénard-Duvivier 2012.

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La consécration de Ouen et Éloi (Calende) in Franck Thénard-Duvivier.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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6. Apparition miraculeuse dans le ciel d'une croix fulgurante devant saint Ouen, qui fait ériger une croix, marquant ainsi  l'emplacement où devra s'ériger le monastère de la Croix-Saint-Leuvroy.

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— Comparaison avec le Portail des Calendes  et  le  Portail des Marmousets :

Au retour d’une visite pastorale dans le diocèse de Coutances, l’évêque de Rouen a une vision. La scène se déroule, selon le récit hagiographique, dans le diocèse d’Évreux : âgé, l’évêque est transporté dans une petite voiture attelée à des mules, lesquelles s’arrêtent soudainement à un carrefour et refusent de repartir malgré les efforts du cocher20. Intrigué, Ouen tend la tête et aperçoit une croix lumineuse dans le ciel : c’est exactement ce qu’illustre le quadrilobe du portail de la Calende (fig. 90). Au portail des Marmousets (StO E6), le sculpteur représente une litière couverte, portée par un brancard attelé à deux chevaux que mène un conducteur à pied. Ce choix du véhicule utilisé pour les malades, les blessés et les femmes qui ne peuvent supporter le cheval semble s’accorder avec la place qu’occupe cette scène dans le cycle, après l’épisode de la guérison de la possédée quelque temps avant sa mort représentée aux quadrilobes suivants (StO E7-E8). Cette vision de la croix n’est pas tant, comme au portail de la Calende, celle de l’emplacement d’un futur monastère, que l’appel de Dieu envers son serviteur âgé et souffrant. Elphège Vacandard rapporte « qu’il vit en songe un météore lumineux sous forme de croix nettement dessinée sur le sol21 » et ce pendant trois jours, à la suite desquels il décida de choisir cet emplacement, à Rebais, pour y fonder le monastère qu’il appela Jérusalem"

"Le cycle de la cathédrale insiste longuement sur la conséquence de la vision de la croix en montrant comment saint Ouen a fait ériger une grande croix sur le lieu même de l’apparition miraculeuse. Ces trois scènes semblent répétitives : tout d’abord, l’évêque, entouré de ses diacres et acolytes, consacre la croix et y attache des reliques comme le rapporte le récit hagiographique ; ensuite, deux personnes la maintiennent à la verticale tandis que deux autres piochent la terre ; enfin, un homme tenant une crosse semble commander à deux ouvriers en train de piocher au pied de la croix. Les deux premières scènes illustrent la légende selon laquelle Ouen aurait demandé son aiguillon à un laboureur pour le planter en terre en forme de croix à l’endroit de sa vision. Cependant, la dernière scène ne figure pas un évêque mais plutôt un abbé : ne pourrait-on y voir la représentation de saint Leufroy (mort en 738) qui fonda son monastère en ce lieu même marqué par saint Ouen ? D’où le nom de La Croix-Saint-Ouen donné à cette fondation en souvenir de son origine miraculeuse. Serait-ce une manière de rappeler que l’évêque de Rouen est également à l’origine des fondations monastiques, donc que le pouvoir épiscopal s’étend à tout le diocèse, y compris les monastères ? Le cycle de la cathédrale s’achève sur cet épisode." (Thénard-Duvivier)

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Saint Ouen voit une croix dans le ciel (Calende), Franck Thénard-Duvivier 2012

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Saint Ouen marque d’une croix l’emplacement d’un monastère (Calende), Franck Thénard-Duvivier 2012

 

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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7. Saint Ouen guérit un meunier paralysé de la main droite après avoir travaillé le dimanche .

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Saint Ouen est vêtu d'une soutane rouge, d'un surplis et d'un camail pourpre ; il est coiffé d'un bonnet violet. Il bénit un personnage agenouillé, vêtu d'un manteau à larges manches fourrées et dont le chaperon est pendu à la ceinture. La famille (le père, la mère et le frère) regarde la scène . Aucun indice ne milite en faveur de l'interprétation de Jean Lafond, car rien n'indique que le personnage set un meunier, et rien non plus qu'il soit paralysé. Comme nous allons le voir, la scène du meunier se reconnait à la présence d'un bâton, ou d'une meule.

Je propose d'y voir la guérison d’un homme muet , en me fondant sur la description d'un quadrilobe du portail de la Calende :

 

"La première scène du portail de la Calende figure l’évêque de Rouen (à gauche) esquissant le geste de bénédiction vers un personnage agenouillé face à lui, les mains jointes au niveau de sa tête, en train de prier calmement. D’où l’idée que cette scène représente un  miracle accompli par le saint : la guérison d’un homme muet pendant son séjour à Cologne en 684, peu de temps avant de mourir, pour rencontrer Pépin et conclure la paix entre la Neustrie et l’Austrasie." (d'après Franck Thénard-Duvivier 2012)

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— Comparaison avec le Portail des Calendes  et  le  Portail des Marmousets :

Les sources hagiographiques rapportent que lors d’un voyage en Anjou, Ouen a rencontré un meunier dont la main ou le bras s’était paralysé en manœuvrant la meule à l’aide d’un bâton ( Vita A (chap. ii, no 11),Vita B (chap. ii, no 18) et Vita C (chap. xi, no 24-26). ) tandis qu’on était dimanche (jour de repos obligatoire). Le bas-relief de Saint-Ouen montre bien, comme le souligne André Masson, que « le bois du manche de la meule était resté fixé à sa paume dont on ne pouvait l’arracher».

Partiellement restauré, le bas-relief de la cathédrale  est plus facilement lisible.  La scène montre Ouen (en costume d’évêque) qui tient un bâton d’une main et esquisse le geste de bénédiction de l’autre. Face à lui, un homme tient lui aussi le même bâton, ou plutôt semble passer sa main à travers." Thénard-Duvivier 2012.

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Saint Ouen guérit un meunier (Calende), Franck Thénard-Duvivier

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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8. Guérison d'une possédée devant un retable de saint Pierre, orné d'un calvaire : un diable vert s'enfuit.

 

Description :

La saint porte la même tenue et effectue la même bénédiction que sur la scène précédente. La femme, agenouillée mains jointes et le regard pieusement levé, est fort assagie, mais le fouet que tient sa gardienne contre la poitrine montre que ce calme est récent. Ce fouet, cette guérison, et la fuite du démon vert évoquent les deux scènes de guérison d'un démoniaque sur la baie 18 de Pont-Audemer et sur la vitre homologue de Nogent-Le-Roi lors des Miracles de l'eucharistie.

Inscription autour du retable : EONSI OFIR PVA ORPISO / EPONAEO

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— Comparaison avec le Portail des Calendes  et le  Portail des Marmousets :

"Les deux bas-reliefs suivants du portail de la Calende illustrent un autre épisode thaumaturgique qui a lieu sur le chemin de retour [de Rome] : deux hommes maintiennent fermement une femme, puis d’un signe de croix, Ouen expulse un petit démon de la tête de la femme ."

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Saint Ouen exorcise une femme possédée (Calende), in Franck Thénard-Duvivier 2012.

 

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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9. Derniers sacrements (pénitence, eucharistie , extrême-onction) de saint Ouen, assisté de saint Ansbert.

Saint Ouen, alité, est coiffé d'un bonnet à oreillette et il est nimbé de jaune. Saint Ansbert est nimbé de bleu, il porte l'étole et est accompagné par un enfant de chœur céroféraire — et portant un trousseau de clés)  et un acolyte tenant les saintes huiles.

C'est du moins l'interprétation de Jean Lafond. À Rouen est représentée une scène où saint Ouen se rend à Rome pour assister le pape lors de sa mort : rien n'interdit de penser que ce vitrail illustre aussi cette scène, mais rien ne justifie non plus (sauf peut-être un médaillon de saint Martin à cheval ??) cette interprétation.

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Comparaison avec le Portail des Marmousets :

"Les sources hagiographiques indiquent que la mort de l’évêque de Rouen survient le 24 août, 43 ans, 3 mois et 10 jours après le début de son épiscopat. En datant son sacre du 13 mai 641, on obtient ainsi le 24 août 684. Emporté par la fièvre en quelques jours lors de son retour de Cologne, Ouen meurt dans la villa royale de Clippiacum (aujourd’hui Clichy). Aussitôt, la cour s’y précipite afin de lui rendre un dernier hommage. C’est cette scène qu’évoque le premier bas-relief"

"Ouen est tout d’abord représenté assis sur son lit de mort, s’adressant au roi Thierry III et à la reine agenouillés en compagnie de quatre autres personnages. La scène illustre l’hommage de la cour et le deuil accompli par le couple royal ; détails précisés dans les Vitae. Le geste de tenir son poignet droit avec la main gauche, qu’accomplissent distinctement la reine et le dernier personnage à droite, traduit habituellement le deuil, la douleur et l’impuissance dans l’iconographie médiévale. Mais cette scène insiste également une dernière fois sur le rôle de saint Ouen dans le royaume : le geste du roi, dont la main gauche est ouverte, la paume rejetée vers Ouen, signifie qu’il reconnaît la valeur de son interlocuteur et qu’il en accepte les propos."

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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LE TYMPAN.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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— Comparaison avec le Portail des Calendes  et  le Portail des Marmousets :

 

 

"La  scène de l’inhumation du corps de Ouen dans l’église Saint-Pierre  montre trois évêques : l’un le porte en terre avec l’aide de deux moines ; l’autre récite l’oraison funèbre (un livre à la main) ; le troisième procède à la bénédiction du corps (un aspersoir à la main). Ces funérailles semblent associer étroitement les clergés séculier et régulier, même si l’abbé n’est pas distinctement montré. En tout cas, les hagiographes précisent que le corps est déposé à l’endroit que les moines ont préparé pour le recevoir. Le bas-relief montre une sépulture simple, probablement recouverte d’une dalle funéraire, comme pour les abbés et pour les grands personnages."

"Mais rapidement cette sépulture primitive n’est plus adaptée à la renommée grandissante de saint Ouen et au début de son culte. En 688, son successeur, Ansbert (684-695), procède à l’élévation de son corps dans une sorte de riche mausolée placé derrière le maître autel de l’église abbatiale ; probablement déposé sur un lit doré que saint Ouen avait fait réaliser pour le monastère de Jérusalem (fondé en 636) mais qui était resté dans le trésor de la cathédrale. Le bas-relief montre le nouvel évêque qui officie lors de cette cérémonie (fig. 94a), entouré des moines et d’au moins un abbé."  (Franck Thénard-Duvivier)

 

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Translation et élévation du corps de saint Ouen (Marmousets)in Franck Thénard-Duvivier

 

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10. Le corps de saint Ouen porté par des clercs au lieu de ses funérailles.

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11. Son inhumation.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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12. Transfert des reliques du saint de Clichy à Rouen par saint Ansbert son successeur.

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Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

Verrière de la vie de saint Ouen donnée par la confrérie du Saint Sacrement vers 1515, baie 18 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile août 2018.

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SOURCES ET LIENS.

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— CALLIAS BEY (Martine), CHAUSSÉ (Véronique), GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2001,"Les vitraux de Haute-Normandie", Corpus vitrearum Recensement VI, CNRS éditions, page 194

GATOUILLAT ( Françoise) 2001, Eglise Saint-Ouen : Les Vitraux de Haute-Normandie, Corpus vitrearum / Recensement des vitraux anciens de la France, Paris, CNRS, 2001. p. 194-195.

 

GATOUILLAT  (Françoise),, "L'utilisation de modèles graphiques dans le vitrail parisien au début du XVIe siècle", dans Michel Hérold et Claude Mignot (dir.), Vitrail et arts graphiques XVe-XVIe siècles, actes de la table ronde de Paris, Ecole nationale du patrimoine, 29-30 mai 1997, Paris, 1999, p. 159.
Michel Hérold, "A propos du "Maître de la Vie de saint Jean-Baptiste : recherches sur l'usage des patrons à grandeur au début du XVIe siècle", dans Michel Hérold et Claude Mignot (dir.), Vitrail et arts graphiques XVe-XVIe siècles, actes de la table ronde de Paris, Ecole nationale du patrimoine, 29-30 mai 1997, Paris, 1999, p. 182.

GATOUILLAT  (Françoise), 1996, Eglise paroissiale Saint-Ouen, Pont-Audemer : les verrières, inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, commission régionale Haute-Normandie, Rouen, Connaissance du patrimoine de Haute-Normandie, Itinéraires du patrimoine n°103, 1996 ;

GATOUILLAT  Françoise,Notice © Monuments historiques, 2005,

http://www2.culture.gouv.fr/public/mistral/palissy_fr?ACTION=RETROUVER&FIELD_98=LOCA&VALUE_98=%20Pont-Audemer&NUMBER=4&GRP=0&REQ=((Pont-Audemer)%20%3ALOCA%20)&USRNAME=nobody&USRPWD=4%24%2534P&SPEC=3&SYN=1&IMLY=&MAX1=1&MAX2=200&MAX3=200&DOM=Tous

"L'ensemble est constitué de 14 verrières des 15e et 16e siècles : le Saint Sacrement, Légende de saint Ouen et procession de la Charité, l'Annonciation, Saint Pierre et Saint Paul, Saint Eustache, saint Léon, saint Nicolas et donateur de Freville et sa famille (vitrail allemand), Dormition de la Vierge, Vie de saint Jean-Baptiste, Saint Pierre, saint Yves, sainte Barbe, Saint Mathurin, saint Sébastien, saint Jacques le Majeur, saint Jean-Baptiste, l'Apparition du Christ aux Apôtres, Légende de saint Honoré, Martyre de saint Vincent, Légende de saint Nicolas, Histoire de la Rédemption.

Verrière consacrée à la vie de Saint Ouen (baie 18) offerte par la confrérie du Saint-Sacrement de Pont-Audemer. Le peintre verrier pourrait être un élève d'Arnoult de Nimègue, grand maître néerlandais.

LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ;

MONTIER, (Armand), 1895,Les vitraux de Saint-Ouen de Pont-Audemer, Pont-Audemer, Impr. du Commerce, G. Hauchard, 1895 ;

MONTIER, (Armand), 1896, "Pont-Audemer", Normandie monumentale p.97-110

OTTIN, sd. 1896, p. 223

PERROT (Françoise), 1972, M. Baudot et J. Lafond. Églises et vitraux de la région de Pont-Audemer, numéro spécial des Nouvelles de l'Eure, 3e trimestre 1969 , [compte-rendu], Bulletin Monumental  Année 1972  130-1  pp. 87-88

https://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1972_num_130_1_5138_t1_0087_0000_3

PHILIPPE-LEMAITRE (Delphine)  en 1853, non consulté

REGNIER (Louis)  en 1899, non consulté

— THELAMON ( Françoise), 1983, La Sociabilité en Normandie 

https://books.google.fr/books?id=1DugDH8VThYC&dq=Sociabilit%C3%A9+en+Normandie+(La)&hl=fr&source=gbs_navlinks_s

— THÉNARD-DUVIVIER (Franck), 2008,  L 'image du saint évêque à travers les cycles sculptés de la cathédrale et de Saint-Ouen de Rouen (XIVe siècle) , Annales de Normandie  Année 2008  58-3-4  pp. 5-41

https://www.persee.fr/doc/annor_0003-4134_2008_num_58_3_6203

— VACANDARD.1902, Vie de Saint Ouen, Évëque de Rouen, 641-684; étude d'istoire mérovingienne. 1902.

https://fr.scribd.com/document/55932250/Vacandard-Vie-de-Saint-Ouen-Eveque-de-Rouen-641-684-etude-d-istoire-merovingienne-1902

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Published by jean-yves cordier - dans Vitraux
8 décembre 2018 6 08 /12 /décembre /2018 18:52

La verrière des Miracles de l'Eucharistie (1500-1525) ou baie 9 de l'église de Nogent-le-Roi sur des cartons du Maître d'Anne de Bretagne (Jean d'Ypres) .

 

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Voir :

 

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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PRÉSENTATION.

La baie 9 occupe le coté nord du déambulatoire construit, comme l'ensemble du chœur, dans la dernière décennie du XVe siècle (v.1494), et vitré au début du XVIe siècle. Elle mesure 3,20 m de haut et 2,40 m de large et comporte 3 lancettes trilobées à deux registres et un tympan à 7 ajours.

Sa description vient compléter celle de la baie 20 de Pont-Audemer, puisqu'elle est consacrée, comme celle-ci, aux Miracles de l'Eucharistie, selon des cartons originaux attribués à l'atelier parisien du Maître d'Anne de Bretagne — Jean D'Ypres— tout comme la tenture de l'abbaye de Ronceray. Avec ses 9 scènes (6 dans les lancettes et 3 au tympan),  elle partage avec Pont-Audemer trois Miracles, tandis que chacune trouve sur la tapisserie de Ronceray  son homologue parmi les 22 pièces, ainsi que les inscriptions versifiées.  Néanmoins, ces cartons originaux ont été modernisés par un autre atelier parisien, celui du Maître de Montmorency, pour les adapter aux dimensions de chaque support.

Elle a été fort bien décrite, quant à son sujet, par Yves Delaporte : j'en donne ici la transcription (en retrait). Quelques éléments techniques ont été précisés par les auteurs du Recensement II du Corpus vitrearum en 1981. 

"  Ce vitrail est un des plus intéressants et des mieux conservés. Comme ceux des autres fenêtres du déambulatoire, il comprend six tableaux principaux, deux dans chacune des trois grandes ouvertures, et trois autres plus petits dans les soufflets du tympan. 
Le sujet est la glorification de l'eucharistie. Travaillant pour un public sans doute plus curieux d'histoires que de 
théologie, l'artiste a représenté divers miracles souvent mentionnés dans les recueils d'exemples de la fin du moyen âge. Les six grands tableaux étaient accompagnés de légendes en forme de quatrains, dont trois ont disparu. Ce vitrail est à rapprocher d'une œuvre d'art où les mêmes sujets sont traités : l'ensemble de tapisseries, malheureusement dispersé en 1888, qui avait été exécuté, entre 1505 et 1518, pour l'abbaye du Ronceray à Angers. Cette tenture, qui se déployait sur plus de vingt-quatre mètres de longueur, comprenait vingt-deux tableaux, dont treize représentaient des miracles au nombre desquels sont les sept de notre vitrail. 
Pour les six grandes compositions, ce sont les mêmes sujets expliqués par les mêmes quatrains. Et à cela ne se borne pas la similitude : la composition est à peu près identique : mêmes personnages dans les mêmes attitudes. Il est invraisemblable que le tapissier, probablement flamand, qui a fait la tenture du Ronceray ait copié une partie de ses compositions sur le vitrail de Nogent ; il est plus croyable que le vitrail imite, directement ou indirectement, la tenture. 
Mais il est possible, et cette hypothèse est sans doute la plus probable, que les deux œuvres d'art reproduisent un 
même original, peut-être un livre à gravures. Quoiqu'il en soit, la tenture donne le texte des inscriptions qui ont 
disparu du vitrail et précise ainsi le sens des scènes qu'elles accompagnaient. Nous indiquons brièvement les sujets, en allant de gauche à droite et de bas en haut." 

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Situation de la baie 9 fléchée sur le plan Delaporte 1958.

Situation de la baie 9 fléchée sur le plan Delaporte 1958.

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CLIQUEZ SUR L'IMAGE POUR ÉCHAPPER À MON COMMENTAIRE OU ACCÉDER AU DIAPORAMA.

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I. LE REGISTRE INFÉRIEUR.

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1. Le cheval, l'âne et le bœuf agenouillés devant le Saint-Sacrement.

 

 

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Description d'Y Delaporte.




"1. En présence d'un incrédule, des animaux s'agenouillent devant le Saint-Sacrement. L'inscription a presque totalement disparu, mais la tenture du Ronceray la fait connaître : 

Ung cheval ung bœuf et ung asne 
Adorèrent leur créateur 
Dont un héréticque prophane 
Fut gecté hors de son erreur. "

 

Ma description.

fragment d'inscription.

En arrière plan, dans la verdure, sont peints des murailles, des tours, une église et des maisons. Une foule (une procession ?) arrive de la droite : trois hommes portant un bonnet, puis un clerc en soutane violette et voile rouge sur les épaules. Ensuite, un évêque, mitré, à chirothèques, mais sans sa crosse. Sa chape en étoffe rouge à damas d'or est réalisée par un verre rouge sur lequel les rinceaux de damas ont été gravés puis peints au jaune d'argent (ce procédé se retrouve aussi dans cet emploi  à Louviers baie 11, chape de Saint Nicolas). 

Un prêtre vêtu d'une aube blanche est agenouillé. Il porte une étole rouge. Cette étole marquée de la croix est portée par tout prêtre qui célèbre la messe, ou encore qui administre les sacrements : ici, elle désigne le prêtre comme portant l'eucharistie qu'il s'apprêtait à administrer. Effectivement, il porte un panier tressé contenant une grande hostie blanche (et plusieurs plus petites).

Là encore, le verrier a utilisé la technique du verre rouge gravé pour tracer, sur la même pièce de verre, les croix d'or  et les perles blanches de cette étole. 

Nous allons la retrouver quatre autre fois, comme un leitmotiv témoignant de l'eucharistie.

Les trois animaux sont agenouillés dans l'herbe du coté gauche.

Le cheval est harnaché avec des brides et des guides ornées de pierreries ou de pièces d'or. C'est le troisième exemple de verre rouge gravé.

L'âne porte une longe ; le bœuf a les cornes liées.

J'ai gardé pour la fin le personnage barbu coiffé d'un bonnet vert : c'est "l'hérétique profane" du quatrain (infra), et il écarte les bras en signe d'émerveillement et de conversion.

L'élément remarquable vient de l'utilisation de verre "vénitien" pour rendre sa tunique rayée. Ce verre est obtenu par fusion de baguettes rouges sur un verre blanc. Il a été rehaussé de jaune d'argent ensuite.

Cet emploi n'est pas fortuit. Dans le code des couleurs médiévales, où le vert et surtout le jaune sont suspectes, les rayures servent à indiquer les personnages marginaux ou malsains (cf. encore les matelots, les prisonniers). 

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La pièce de tenture de Ronceray est la suivante :

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Tenture de l'abbaye de Ronceray. Museum of Fine Arts of Boston

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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2. Le miracle des abeilles.

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Description d'Yves Delaporte :

"Pour guérir ses abeilles malades, une femme leur avait donné en pâture une hostie consacrée. Les abeilles élevèrent une chapelle de cire pour abriter le corps du Sauveur. Voici le texte de la tapisserie : 

Une femme au pays de pourvence 
Jecta ès monches l'hostie sacrée 
Lesquelles lors en grande révérence 
Luy firent une chapelle ornée.  "

"Au bas de la deuxième scène, celle des abeilles, est un écusson au champ d'azur chargé de trois annelets de gueules dont le milieu est incolore. Nous ne savons de qui sont ces armoiries, d'ailleurs non conformes aux règles du blason." 

Ma description.

La scène semble se passer en dehors de la ville, dont on aperçoit les murailles  Une femme et deux voisins écartent les bras en signe d'émerveillement face à une chapelle miniature renfermant un ciboire. Il s'agit de l'œuvre des abeilles  qui se distingue (avec une bonne vue, on en trouve une dizaine) devant l'entrée de la "ruche". Au support est accrochée la guiche d'un écu armoirié. 

Verre rouge gravé  utilisé pour la guiche et le centre des annelets des armoiries.

Les fleurettes rouges, jaunes, jaunes et blanches, ou blanches et jaunes correspondent à celles de la tapisserie. Elles sont rendues par des  pièces rondes de verre de couleur serties de leur plomb, ce qui ne doit pas être facile à faire.

La pièce correspondante de la tenture de Ronceray permet de voir la  correspondance assez stricte entre  les cartons :

 

 

 

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Le miracle des abeilles, tenture de Ronceray.

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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3. Guérison miraculeuse d'un "démoniaque".

 

Description d'Yves Delaporte :

" Un homme tenant des verges amène un possédé à un prêtre. Dès que celui-ci a présenté la sainte hostie au possédé, le démon s'enfuit. La scène est ainsi commentée sur la tapisserie : 

Pas la vertu du sacrement 
Fut desmontré un grant miracle 
Car le dyable visiblement 
Sortit hors d'ung démoniacle. " 


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Ma description.

Le tiers inférieur, brisé, a été remplacé par une "macédoine". Nous sommes ici dans une église, dont la porte cintrée donne sur la campagne et les murailles de la ville. Ce cadre crée une continuité entre les différentes scènes. La composition se fait selon un triangle à sommet au milieu du bord droit, qui englobe les personnages, mais les lignes de perspective convergent vers un point supérieur droit, qui est la direction de la fuite du démon vers le ciel.

 

Le "démoniaque" est vêtu de vert, ce qui n'est plus un détail si on s'avise que cette couleur est réservée, dans cette verrière, aux adversaires de la Foi (et au diablotin). Les  spectateurs ébahis  sont vêtus ou coiffés de bleu et de rouge, voire de violet, et le prêtre conserve son surplis blanc et son étole rouge à croix et perles (verre gravé).

Voir la scène correspondante de la baie 20 de Pont-Audemer ici.

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La comparaison avec la pièce homologue de la tenture  de Ronceray montre que la composition y est semblable. Elle nous donne accès aux détails perdus à Nogent-le-Roi. Le mauvais esprit qui avait élu domicile dans le corps du possédé est un animalcule intermédiaire entre le rat et le kangourou.

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Guérison d'un démoniaque, tenture de Ronceray, Museum of Fine Arts, Boston.

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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LE REGISTRE SUPÉRIEUR.

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4. La Conversion d'un païen dont le cheval s'incline devant le Saint-Sacrement.

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La description du chanoine Delaporte.

 

 

 "Un païen à cheval rencontre un prêtre portant le viatique à un malade ; le cheval fléchit les genoux. Le vitrail 
a conservé l'inscription, identique à celle de la tapisserie : 

Ung payen sans honneur passa 
Par devant le saint sacrement 
Mais son cheval se humilia 
Puys creut le payan fermement. "

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Ma description.

La scène se passe devant une architecture de ville, dont les remparts et la porte cintrée nous deviennent familiers. Nous retrouvons aussi la construction triangulaire englobant les personnages, dont la pointe se trouve au centre du bord gauche ; la foule sort sans doute de l'église en procession, guidée par deux clercs porteurs de torchères (les "céroféraires"). Autre retrouvaille, le prêtre vêtu de son surplis (sur une robe rouge) et portant son étole (mais ici, le verre n'est pas gravé, mais peint). Ce prêtre présente un ciboire à un cavalier, mais celui-là n'en a cure et donne force coups de bâton à son cheval pour passer son chemin. Las, le cheval fléchit les antérieurs et s'incline devant le vase sacré avec un regard obstiné

Un  trait de virtuosité du verrier doit être remarqué, c'est l'insertion de pièces en chef d'œuvre sur le verre vert du gazon pour représenter les fleurs jaunes .

Pas de verre gravé ? Si fait, la flamme de la deuxième torche.

 

 

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Miracle du cheval qui salue le Saint-Sacrement, tenture de Ronceray. Museum of Fine Arts , Boston.

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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5. Après une communion sacrilège un pécheur est puni de mort subite, et l'hostie sort par sa gorge ouverte.

 

La description d'Yves Delaporte.

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 Après une communion sacrilège un pécheur est puni de mort subite, et l'hostie sort par sa gorge ouverte.

L'inscription, la même que celle de la tapisserie, est intacte :

Ung pécheur qui indignement 
Receut la très sacrée hostie 
Mourut tost et visiblement 
Par la gorge fist sa sortie. 

 

Il est à noter que si la composition est la même que celle de la  tapisserie, le dessin est retourné. Cependant, aussi bien dans le vitrail que dans la tenture, le dessinateur a eu soin , par respect de la vraisemblance, de mettre le ciboire dans la main gauche du prêtre. On ne saurait donc dire  laquelle des deux images est plus proche de l'original." (Yves Delaporte)

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Ma description.

Les personnages forment deux triangles inversé, celui du prêtre et des fidèles derrière lui, et, accentué par la diagonale de la table blanche, les communiants agenouillés à la table de communion. La partie haute (retable au crucifix, autel sous le dais dans une abside, devant d'autel damassé, prêtre, ciboire et foule) s'oppose par sa disposition frontale et statique à la violence du premier plan, où le sacrilège (un pêcheur qui n'a pas reçu absolution par la confession, ou un excommunié) tombe à la renverse, la face convulsionnée, tandis que l'hostie sort de sa gorge. Comment est-il vêtu ? D'une robe lie-de-vin au revers diaboliquement vert...

Deux verres rouge gravés : l'un, superbe, pour le devant d'autel, et l'autre, minuscule, pour la flamme du cierge porté (c'est un pléonasme) par le clerc céroféraire. Qui n'a point d'acolytes.

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La scène est inversée sur la pièce de tenture de Ronceray mais les éments s'y retrouvent ; l'aspect dramatique est ici rendu par les plis cassés du pécheur  et de la femme qui se penche vers lui. Les thuriféraires sont deux, comme cela devrait toujours être le cas.

 

Le miracle du communiant sacrilège, tenture de Ronceray.



 

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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6. Deux hérétiques qui, avec l'aide du démon, marchaient sur l'eau, s'y enfoncent par la vertu du Saint-Sacrement qu'un prêtre a laissé tomber dans la rivière et que des anges recueillent.

Description d'Yves Delaporte.

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"Deux hérétiques qui, avec l'aide du démon, marchaient sur l'eau, s'y enfoncent par la vertu du Saint-Sacrement qu'un prêtre a laissé tomber dans la rivière et que des anges recueillent.

L'inscription est incomplète, mais la tapisserie nous fait connaître les mots disparus :

Nayés furent deux héréticques 
Par la vertu du sacrement 
Lesquels devant par ars magicques 
Marcheoient sur l'eau franchement. "

 

 

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Ma description.

Même composition en triangle, soulignée par le cours de la rivière. Verre rouge  gravé pour l'étole et pour la robe du magicien. 

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Voir la scène correspondante à Pont-Audemer.

La tenture de Ronceray :

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Miracles des magiciens hérétiques, tenture de Roncheray. Museum of Fine Arts, Boston.

 

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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LE TYMPAN.

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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"Les compositions des trois soufflets illustrent l'histoire bien connue du « miracle des Billettes ». Un Juif s'est procuré une hostie consacrée ; il la perce à l'aide d'un canif, et il en sort du sang ; il la fait bouillir dans une chaudière, mais elle s'élève au-dessus de l'eau bouillante, tandis qu'apparaît une image de crucifix. L'hostie est recueillie par une pieuse voisine qui la porte à l'église. Le Juif expie son impiété par le supplice du feu ; il est conduit au bûcher sur une charrette. " (Yves Delaporte)

Camille Salatko Petryszcze a consacré un mémoire sur ce Miracle des Billettes et ses rapports avec l'antisémitisme, tandis que Laurence Riviale  l'étudie, dans les vitraux de Normandie, dans plusieurs paragraphes de son ouvrage Le Vitrail de Normandie entre Renaissance et Réforme en y voyant le Juif comme un prête-nom des Protestants. 

Il figure en une seule scène (celle du chaudron) dans la tenture de Ronceray, mais il est plus développé dans six lancettes de l'église Saint-Eloi de Rouen (aujourd'hui au Musée des Antiquités de la Seine-Maritime. Neuf verrières de Champagne lui sont également consacrées.

Des trois scènes présentes à Nogent-le-Roi, seule celle du chaudron peut trouver sa source dans les cartons communs avec la tenture de Ronceray, et il reste à identifier les sources de deux autres mouchettes.

 

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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7. Le miracle "des Billettes" (1) : Un Juif voit une hostie qu'il avait coupée se mettre à saigner.

 

Description.

Intérieur de la maison du Juif, juste en face d'une fenêtre : l'homme, vêtu d'une robe verte et portant l'aumônière à la ceinture, plante son canif dans l'hostie posée sur sa table. Sa main gauche levée témoigne de sa surprise, surprise partagée par son épouse (aux manches vertes, et au turban orientalisant) et par les deux enfants (la fillette : coiffe à rayure).

"Une fois en possession de l’hostie, le Juif place celle-ci sur un coffre et la perce à l’aide d’un canif. Soudain du sang se met à jaillir. Surpris, il appelle sa femme, son fils et sa fille. Très vite horrifiés par ce spectacle, ils l’implorent de ne pas continuer. Mais leurs plaintes ne font qu’accentuer la fureur du bourreau. A partir de là vont se succéder, accompagnées par les pleurs et les cris de sa famille, une multitude de tortures sur l’hostie sanglante, rappelant la Passion du Christ. Il lui enfonce un clou à coups de marteau, elle saigne. Il la flagelle, elle reste entière. Il la jette dans le feu, intacte, elle se met à voler dans toute la pièce. Muni d’un grand couteau de cuisine, c’est en vain qu’il tente de la découper puisqu’elle reste toujours entière. Hors de lui, il la fixe contre le mur et la transperce, le sang jaillit de plus belle." Camille Salatko Petryszcze

 

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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8. Le miracle "des Billettes" (2) : le Juif  fait bouillir l'hostie dans une chaudière, mais elle s'élève au-dessus de l'eau bouillante, tandis qu'apparaît une image de crucifix.

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Quatrain :

« Ung Juif ayant à Paris pans achet(és)

l’hostie au sang la ferrit d’ung coute(au)

puys la mettant bouillir saillant hor(s)

ung crucifix sest dedans présenté. »

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Nous reconnaissons les personnages à la couleur de leurs vêtements et à leurs accessoires (aumônière ; turban) ; la femme en bleu est une voisine qui découvre la scène.

La tenture de Ronceray. L'illustration proposée par Camille Salatko Petryszcze est tronquée et ne montre pas le crucifix s'élevant de la marmite. Voir en complément www.gettyimages.fr.

 

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Miracle "des Billettes", tenture de Ronceray.

 

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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9. L'hostie est recueillie par une pieuse voisine qui la porte à l'église. Le Juif expie son impiété par le supplice du feu ; il est conduit au bûcher sur une charrette.

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La scène figure aussi dans la baie 2 de l'église d'Aumale (L. Riviale planche XXXIX) , et on y retrouve le détail des flammes s'échappant en langues de feu entre les rayons des roues.

Le vitrail sembla avoir été remanié et la tête du Juif  se confond avec les cuisses du personnage en manteau rouge et vert. Néanmoins, ce sont ces couleurs verte et rouge qui occupent aussi  le centre de la charrette. Notez le livre, que le profanateur tient dans ses bras, et qui joue un rôle important dans la Légende : il s'agirait du Talmud :

"L’évêque de Paris, Simon Matifas, prévenu par le curé, réunit les personnalités ecclésiastiques les plus réputées pour faire comparaître le Juif et sa famille. Alors que toute sa famille se déclare convertie, le Juif ne se repent pas et raconte ses actes dans le détail. Après un long procès, il est condamné à la peine du feu sur la place de Grève pour sacrilège obstiné et déicide, et se retrouve livré au prévôt.

Lié sur le bûcher le Juif réclame un livre grâce auquel il prétend ne craindre ni le feu, ni le Dieu des Chrétiens. Intrigué, le prévôt envoie chercher ce livre. Mais cela ne changea en rien le devenir du Juif. Lui et son livre, dit la relation, brûlèrent avec une rapidité incroyable." (C. Salatko Petryszcze)

Verre bleu gravé : Le livre .

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Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

Verrière des miracles de l'Eucharistie (1500-1525), baie 9 de l'église de Nogent-Le-Roi. Photographie lavieb-aile.

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"Nous devons à notre savant ami, M. Jean Lafond, particulièrement compétent en tout ce qui concerne l'histoire 
de la peinture sur verre, la connaissance d'un vitrail de Pont-Audemer où figurent plusieurs miracles eucharistiques traités au Ronceray et à Nogent-le-Roi : le tabernacle bâti par les abeilles, les hérétiques marchant sur l'eau, la libération du possédé, la communion sacrilège. Les deux dernières scènes, la dernière surtout, présentent des ressemblances indéniables avec notre vitrail, ce qui laisse supposer que les deux œuvres ont été exécutées dans un atelier normand, rouennais probablement, mais dont l'origine paraît parisienne."  
(Yves Delaporte, 1958) 

La comparaison des trois œuvres (Nogent-le-roi, Ronceray et Pont-Audemer a été poursuivie par F. Gatouillat et par Guy-Michel Leproux :

..."Seuls trois miracles peuvent utilement être comparés : la Mort du pêcheur qui communie, les Hérétiques noyés et la Guérison d'un démoniaque . Dans le premier, c'est le vitrail de Pont-Audemer qui reste le plus fidèle aux modèles originaux, tels qu'ils apparaissent à Nogent-le-Roi. La composition est seulement resserrée pour occuper une lancette plus étroite, alors que dans la tenture du Ronceray, elle est inversée, et que deux figures ont été rajoutées au premier plan. Pour l'épisode suivant, c'est le contraire : les attitudes des deux hérétiques sont modifiées dans le vitrail et non dans la tapisserie. On pourrait donc penser à des adaptations indépendantes à partir des mêmes maquettes, mais la troisième scène s'oppose à cette interprétation. Dans la Guérison d'un démoniaque, en effet, certaines libertés prises avec les anciens cartons sont identiques : le bras du gardien, par exemple, est dans les deux cas, ramené sur la poitrine, alors qu'il ne l'était pas initialement. Une certaine parenté stylistique, qui transparait malgré la médiocrité du tissage, confirme cette observation : c'est bien le même atelier qui a produit les deux séries de cartons modifiés, et il s'agit encore du Maître de Montmorency. On retrouve en effet le même gardien, le bras tenant les verges replié, dans l'épisode de saint Rémi guérissant un possédé de la tenture de Robert de Lenoncourt, où l'on voit aussi un diable rappelant les démons de Pont-Audemer et, tout à fait à l'arrière-plan, des assistants comparables à ceux de Ronceray. De plus , le schéma de la scène est repris dans une autre pièce, au centre de laquelle est représentée la dernière messe célébrée par le saint. Ce ne sont d'ailleurs pas les seuls liens que l'on peut établir avec les tapisseries attribuées au Maître de Montmorency : le Melchisédech se penchant vers Abraham est, par exemple, le jumeau du Grand Prêtre des scènes de la Présentation de Jésus au Temple des tentures de Reims et de Saint-Bertrand-de-Comminges.

Le Maître de Montmorency, auteur des cartons de la Vie de la Vierge de Saint-Gervais, possédait dans son atelier des modèles et des cartons issus d'un atelier parisien actif à la fin du XVe siècle, celui du Maître d'Anne de Bretagne. Lui-même était à Paris depuis le début du XVIe siècle puisqu'on a pu lui attribuer les plus anciens vitraux de Ferrières-en-Gâtinais et la tenture de Saint-Etienne offerte avant 1505 par Jean Baillet à la cathédrale d'Auxerre. Enfin, il était sans contexte le fournisseur de cartons le plus prolifique de son époque, aussi bien pour les lissiers que pour les verriers, et qu'une production suppose des collaborateurs ou, à défaut, de multiples associations de confrères."

Le Maître de Montmorency est identifié comme étant Gauthier de Campes actif à Paris jusque vers 1530 et dont le nom est lié à la Tenture de l'Histoire de saint Etienne (Musée de Cluny).

 

 

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SOURCES ET LIENS.

— ARMINJON (Catherine), 2004, Saints de chœurs: tapisseries du moyen âge et de la renaissance : [Toulouse, Ensemble conventuel des jacobins, 24 avril-31 août 2004; Aix-en-Provence, Musée des tapisseries, septembre 2003-décembre 2004; Caen, Musée de Normandie, janvier-mai 2005, 5 continents, 2004 - 191 pages

— DELAPORTE, Yves). 1958- L'église Saint-Sulpice de Nogent-le-Roi, In: Bulletin de la Société Archéologique d'Eure-et-Loir vol. 21 (1958/61) p.33-80.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k97712770/f47.item.r=eglise%20saint%20sulpice%20nogent%20le%20roi

— GRODECKI (Louis), PERROT (Françoise), CHAUSSÉ (Véronique), 1981, Les vitraux du Centre et des pays de la Loire, Recensement II, Corpus Vitrearum, edition du CNRS, Paris page 75.

LAFOND, (Jean), 1969, Les vitraux de l'arrondissement de Pont-Audemer, Nouvelles de l'Eure, n°36, 1969 ;

—  LEPROUX Guy-Michel, 2001,  La peinture à Paris sous le règne de François Ier, Presses Paris Sorbonne, 223 pages, p.39-85

https://books.google.fr/books?id=Qj3gePI5adsC&dq=%22leproux%22+%22pont-audemer%22&hl=fr&source=gbs_navlinks_s

MARILLIER (H. C.), The Ronceray Tapestries of the Sacraments, The Burlington Magazine for Connoisseurs , Vol. 59, No. 344 (Nov., 1931), pp. 232-235+238-239

https://www.jstor.org/stable/864915

MUSEUM OF FINE ARTS OF BOSTON : Tapestry, the story of Holy Sacrament

https://www.mfa.org/collections/object/tapestry-the-sacreligious-jew-from-the-series-the-story-of-the-holy-sacrament-123736

NASSIEU MAUPAS ( Audrey), 2000,

« Peinture, vitrail et tapisserie au début du XVIe siècle : l’exemple du Maître de Montmorency », Cahiers de la Rotonde, n° 22, 2000, p. 45-60.

SALATKO PETRYSZCZE (Camille), Le Mistere de la Saincte Hostie, introduction, édition du texte et notes , mémoire de Master sous la direction de D. Hüe, , préparé pour la mise en ligne par Camille Salatko Petryszcze

https://www.sites.univ-rennes2.fr/celam/cetm/Edition%20Hostie/ostie.html

 

TERVARENT (Guy de ), 1938, Les énigmes de l'art du Moyen Âge, Volumes 1 à 2 “Les” Éditions d'Art et d'Histoire, 1938 - 137 pages

—  Le Mistere de la Saincte Hostie Première édition connue et conservée imprimée à Paris chez la veuve Trepperel (1512-1519)

Paris B.N.F. Réserve p Yf 564

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6355669x/f8.image

Le Mistere de la Saincte Hostie nouvellement imprimé à Paris Seconde édition connue et conservée imprimée chez Alain Lotrian ou Jean II Trepperel (1530-1537)

Aix-en-Provence Bibliothèque Méjanes Rés. S. 60.

Le Jeu et Mystere de la Saincte Hostie par personnages Troisième et dernière édition connue et conservée imprimée à Paris chez Jean Bonfons (1547-1566)

Paris B.N.F. Réserve Yf 2915

https://data.bnf.fr/16648387/mystere_de_la_sainte_hostie/

 

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Published by jean-yves cordier - dans Vitraux
6 décembre 2018 4 06 /12 /décembre /2018 23:41

La verrière des Miracles de  l'Eucharistie (vers 1515) ou baie 20 de l'église de Pont-Audemer.

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PRÉSENTATION.

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La baie 20 éclaire la première chapelle du bas-coté sud de l'église.

Son sujet est très intéressant : c'est celui des "Miracles de l'Eucharistie" commandé par la Confrérie du Saint-Sacrement de Pont-Audemer.  L'intérêt est historique d'une part, et iconographique d'autre part.

I. Sur le plan historique.

a) Les confréries du Saint-Sacrement.

Les confréries étaient  nombreuses au XV et XVIe siècle, et plus nombreuses encore aux XVIIe et XVIIIe : on comptait 80 confréries à Rouen au XV-XVIe, dont 19 dans les paroisses, et 267 confréries à Rouen, (contre 337 à Paris) en 1621 . Elles étaient souvent, en Normandie, désignées sous le nom de « Charités ». La moitié des paroisses de Rouen avaient leur confrérie du Saint-Sacrement. 

Les données concernent surtout les XVIIe et XVIIIe siècle, après la réforme tridentine et après leur multiplication dans le cadre de la lutte contre les hérésies.  On distingue les confréries professionnelles (de corporation) et les confréries de dévotion. Ces dernières peuvent être réparties en confréries d'agonisants, mariales (du Rosaire), christologique (du Saint-Sacrement), et de saints.  Elles associent un culte privé — récitation régulière d'oraison, adoration et autres exercices de piété,— et un culte public. Ce dernier repose sur la création d'une chapelle propre et d'un autel où seront allumés des flambeaux, ainsi que sur l'organisation de processions. Des Indulgences sont accordées aux participants. Les confréries du Saint-Sacrement réunissent une  élite paroissiale et sociale. 

Le but des confréries du Saint-Sacrement est la diffusion du culte eucharistique, c'est à dire de la lutte contre le doute à l'égard de la présence réelle du corps du Christ dans l'hostie consacrée : c'est le dogme de la transsubstantiation, promulgué par Innocent III en 1215, et officialisé par Jean XXII en 1317. Ce dernier officialisa la fête du Corps du Christ, ou Fête-Dieu, 60 jours après Pâques, fondée par Urbain IV et la bulle Transiturus.  L’Eucharistie y est présenté dans un ostensoir sous un dais porté par quatre notables au milieu des rues et des places qui étaient  richement pavoisées.

Afin de convaincre les fidèles de la réalité de cette présence réelle, les prédicateurs avaient recours à un certain nombre de miracles de l'Eucharistie

b) Le contexte de la Réforme.

Cinq ans après ce vitrail, en 1520, Luther opposa à ce dogme  la doctrine de la consubstantiation (la présence réelle du corps du Christ ne modifie pas la substance de l'hostie ou du vin). À la même époque,  le suisse Zwingli ne voit dans la communion qu'une commémoration et dans les espèces eucharistiques qu'un symbole. Pour Calvin la rémanence du Christ dans l'hostie est d'ordre spirituelle, et il ne peut y avoir de sacrilège concernant les espèces eucharistiques.

Dès 1525, la remise en cause de la transsubstantiation permet de distinguer les hérétiques. En 1551, le Concile de Trente réaffirme ce dogme.

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II. Sur le plan iconographique

a) La procession du Saint-Sacrement lors de processions des charitons et/ou lors de la Fête-Dieu.

Elle est représentée dans huit vitraux de Haute-Normandie au XVIe siècle dont :

  •  Louviers baie 26, 1480-1500 et baie 9, disparue
  • Montchaux-Soreng (disparu)
  • Offranville, baie 17
  • Gisors (baie détruite), en 1571
  • Caudebec-en-Caux  (baie 28) en 1530 : 
  • Rouen, Saint -Nicolas-le-Painteur après 1520

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b) Les Miracles eucharistiques.

Ces miracles forment le sujet de quelques verrières de Haute-Normandie

  • Rouen, église Saint-Vincent, baie 7, 1520-1530 : génuflexion d'une mule devant une hostie.

  • Rouen, Saint-Nicolas-le-Painteur 1542, disparue

  • Nonancourt, baie 107, 1525 : Messe de saint Grégoire 

  • Pont-Audemer

Un miracle particulier, celui des Hosties profanées dit "des Billetttes" est représenté dans 3 verrières de Haute-Normandie, la principale étant :

  • Rouen, église saint-Eloi (Musée des antiquités de la Seine-Maritime) vers 1540-1550

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Mais surtout, trois des scènes des Miracles de la baie 20 de Pont-Audemer trouvent leurs équivalents  sur une tenture de l'abbaye de Ronceray (1505-1520 ) et dans une verrière de l'église saint-Sulpice  de Nogent-le Roy (1510-1515) . Ces trois œuvres (Pont-Audemer, Nogent-le-Roy et Ronceray) partagent des cartons communs provenant d'un même peintre parisien,  Gauthier de Gampes , alias le Maître de Montmorency,  le Maître des Privilèges de Tournai, le maître de saint Gilles : le  peintre le plus fécond à Paris sous François Ier.

Les scènes du tympan sont attribuées à un autre peintre, rouennais, auteur de la baie 18.

La tapisserie de la grande et riche abbaye du Ronceray, située dans un faubourg d’Angers, était exposée lors de la célèbre procession du Saint-Sacrement. Ses 22 pièces  sont aujourd'hui dispersées au Louvre, au Château de Langeais, au Museum de Boston, au château de Leeds, etc. A chaque tableau correspond un quatrain en vers français de dix pieds, expliquant la scène. Ces inscriptions sont tissées en lettres gothiques blanches sur fond rouge dans la partie inférieure de la tapisserie.

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DESCRIPTION.

Haute de 5 m et large de 1,70 m, cette baie a vu sa troisième lancette, à droite, être obstruée par un mur de séparation. 

— Registre inférieur: la procession du Saint-Sacrement. (suite en baie 18).

— Registre moyen et supérieur, et tympan : 6 scènes des Miracles eucharistiques :

1. Mort d'un pêcheur qui a communié sans avoir reçu l'absolution. L'hostie le blesse en sortant de sa gorge.

2. Guérison par la communion d'un possédé que son gardien tient enchaîné dans l'église.

3. Le Saint-Sacrement jeté à la rivière par un prêtre provoque la noyade de 2 magiciens qui marchaient sur l'eau, tandis que deux anges récupèrent le ciboire.

4. La communion miraculeuse d'Archambaud de Bourbon à son lit de mort.

. Mouchette gauche : un Juif est mordu par un chien à qui il avait jeté une hostie.

6. Mouchette  droite : miracle des abeilles qui construisent une ruche-tabernacle pour protéger une hostie.

— Sommet du tympan : la Cène.

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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Le registre inférieur : la procession du Saint-Sacrement.

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Lancette gauche : le prêtre portant l'ostensoir marche en procession sous un dais porté par quatre notables de la Confrérie.

Lancette droite : la foule des fidèles et des bourgeois de la ville suit la procession derrière quatre notables, portant bonnet.

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Inscription : elle a été déchiffrée par Montier, qui signale  que la vitre a été donnée pendant que Leroy était prévost et Jehan Lepetit eschevin de cette confrérie.    Je lis

[o]ST JEHAN LE PETIT D~ CE LIEUE ES LI 

MAISTER MAIL---CESTE ---

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Voir la suite sur la baie 18.

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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Registre intermédiaire.

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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1. Mort d'un pêcheur qui a communié sans avoir reçu l'absolution. L'hostie le blesse en sortant de sa gorge.

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Quatrain de la tenture de Ronceray :

UNG PECHEUR QUI INDIGNEMENT RECEUT LA TRES SACREE HOSTIE MORUT TOST ET VISIBLEMENT PAR LA GORGE FIST LA SORTIE.

Le vitrail de Pont-Audemer est le plus fidèle aux modèles originaux (les cartons du Maître de Montmorency), tels qu'ils apparaissent à Nogent-le-Roi. La composition est seulement resserrée pour occuper une lancette plus étroite, alors que dans la tenture du Ronceray, elle est inversée, et  deux figures y ont été rajoutées au premier plan. (G. Leproux)

 

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Verrière de Nogent-le-Roy. Photographie lavieb-aile.

 

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tenture de l'abbaye de Ronceray.

 

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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2. Guérison par la communion d'un possédé que son gardien tient enchaîné dans l'église.

Devant le possédé, un garde tenant une lance porte le trousseau de clés d'une probable prison.

Inscriptions (lettres en désordres et parfois à l'envers) sur le bas de la robe du "démoniaque".

 

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Quatrain de la tenture de Ronceray :

PAR LA VERTU DU SACRAMENT FUT DEMONSTRE UNG GRAND MIRACLE CAR LE DYABLE VISIBLEMENT SORTIT HORS DUNG DEMONIACLE.

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Verrière de Nogent-le-Roy. Photographie lavieb-aile.

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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Registre supérieur.

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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3. Le Saint-Sacrement jeté à la rivière par un prêtre provoque la noyade de 2 magiciens qui marchaient sur l'eau, tandis que deux anges récupèrent le ciboire.

Inscriptions en lettres capitales romaines dépourvues de sens sur la bordure du manteau bleu du seigneur placé à gauche ; verre rouge gravé pour sa toque.

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Quatrain de la tenture de Ronceray :

NOYES FURENT DEUX HERETIQUES PAR LA VERTU DU SACREMENT LESQUELZ DEVANT PAR ARS MAGIQUES MARCHOIENT SUR LEAU FRANCHEMENT.

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, baie 9, Nogent-le-Roy. Photographie lavieb-aile.

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Tenture de Roncheray

 

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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4. La communion miraculeuse d'Archambaud de Bourbon à son lit de mort.

La communion miraculeuse d'Archambaud de Bourbon ne figure ni à Nogent-le-Roy, ni sur la tenture de Ronceray, mais elle  est représenté dans la tenture bruxelloise de Trajan et Herkenbald, d'après Van der Weyden conservé au musée d'histoire de Berne. Un auteur en fait le commentaire suivant :

 

 "Le troisième sujet est la justice d'Herkinhal, plongeant un poignard dans le cœur de son neveu qui avait fait violence à une jeune fille. Herkinbal saisit de la main gauche par les cheveux son neveu agenouillé au pied de son lit, et de la main droite, lui enfonce un couteau dans la gorge.
4° Herkinbal se sentant près de mourir fait venir, un évêque pour l'administrer ; le prélat part en refusant de donner la sainte communion.  Herkinbal qui ne voulait pas se confesser, comme d'un crime, du meurtre de son neveu,  rappelle l'évêque et lui montre l'hostie sortie du ciboire qui est venue se placer d'elle-même dans sa bouche. Le prélat entonne les louanges du Seigneur."


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La Justice de Trajan et Herkinbald, tenture, vers 1450 d'après Van der Weyden Musée Historique de Bern.

 

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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LE TYMPAN.

 

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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5. Mouchette gauche : un Juif est mordu par un chien à qui il avait jeté une hostie.

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Au premier plan, le juif a jeté l'hostie à terre, pour que son chien la mange. Au lieu de cela, l'animal ploie les genoux et en même temps mord son maître à la main.

. ... Une xpiene vendit la saincte h(ostie)

 A ung faulx iuif cruel et inhum(ain) 

Qui a son chien iecta par mocque(rie)

Lequel ladore mort le iuif en la m(ain)

UNG XPRETRE VENDIT LA SAINTE HO [STIE] A UNG FAULX JUIF CRUEL ET INHUM [AIN] QUE A SON CHIEN JECTA PAR MOQUERIE LEQUEL LADORE MORT LE JUIF EN LA MAIN.

 

 L'histoire du juif sacrilège, mordu par son chien figure généralement parmi les « exemples moraux » de   Jean Mansel  : "le recueil d'exemples moraux", de Jean Mansel (1401-1500)  BnF fr. 911 f.276-277 :

 

"Un Juif acheta une fois le corps de notre seigneur d'une fausse chrétienne elle lui bailla. Sitôt comme le Juif le tint il le donna à son chien pour le manger. Mais le chien s'agenouilla et n'y toucha oncques. Lors le Juif par grand dépit voulut battre son chien . Il advint par vengeance que le chien prit son maître par un bras et le fit crier moult haut à grande angoisse et e le laissa aller jusqu'à ce que les chrétiens y accourent et le Juif qui était repentant de son péché leur dit toute la vérité de cette chose et fit baptiser lui et toute sa famille et la chrétienne fut punie qui lui avait baillé le corps de notre seigneur. »

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10720727t/f296.item.zoom

 

 

 

 

 

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Le Juif mordu par son chien, tenture de l'abbaye de Roncheray, Boston Museum of Art

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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6. Mouchette  droite : miracle des abeilles qui construisent une ruche-tabernacle pour protéger une hostie.

Lettres inscrites sur le col du personnage barbu agenouillé.

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Quatrain de Roncevay  (les "mouches" désignent les abeilles)

 

« Une femme au pays de Pourvence

jecta es mouches l’hostie sacrée

Lesquelles lors en grande révére(n)ce

Luy firent une chapelle ornée. »

cf :  https://www.sites.univ-rennes2.fr/celam/cetm/Edition%20Hostie/ostie.html#DOCUMENT5

  

 L'histoire des abeilles figure également, comme la précédente, parmi les « exemples moraux » de   Jean Mansel  : "le recueil d'exemples moraux", de Jean Mansel (1401-1500)  BnF fr. 911 f.273 : La femme décide de nourrir ses abeilles, qui se mourraient, d'une hostie, mais celles-cu firent "une moult belle chapelle, et avait dedans un autel et sur l'autel était le corps de notre seigneur".

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10720727t/f293.item.zoom

 

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Nogent-le Roy, baie 9 (1500-1525), Miracle des abeilles. Photographie lavieb-aile.

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  Le Miracle des Abeilles , tenture de l'  abbaye de Ronceray, 1505-1520,  laine et soie, Château de Langeais, Chambre des carreaux verts

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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7. Mouchette sommitale : la Cène, institution de l'Eucharistie.

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Quatrain de Roncevay :

DEVANT SA MORT SACRA SON SANG ET CORPS ET PRESBRES FAIT SES APOTRES A LHEURE DE FAIRE AINSI LEUR DIST ET SOIENT RECORS QUE SOUBS CE PAIN SON CORPS ENTIER DEMEURE.

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Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

Verrière des Miracles de l'Eucharistie, vers 1515. Baie 20 de l'église de Pont-Audemer. Photographie lavieb-aile 25 août 2018.

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Annexe I . La tenture de Roncheray.

"Quant au lieu de confection, plusieurs hypothèses ont été suggérées. Pour certains historiens, comme Guiffrey, Göbel ou Marillier (97), elle aurait été confectionnée dans la Vallée de la Loire. Pour d’autres, comme Barbier de Montault, de Coupigny, de Tervarent (98), il s’agirait d’un tissage flamand. Quoi qu’il en soit, on peut affirmer que ces tapisseries se rattachent, par leur format et par leur style, à un groupe de tapisseries commandées pour décorer les stalles d’églises. A ce jour, elle reste la seule suite de tapisseries conçue d’après ces cartons. Cependant, on sait, qu’en 1539, la cathédrale de Tours possédait une série de tapisseries comportant presque les mêmes sujets de l’Ancien Testament. « D’autre part, on sait que Jacques Fourré, évêque de Châlons, commanda deux grandes tapisseries (exécutées entre 1573 et 1578), pour le chœur de l’église, l’une représentait le symbole du Saint-Sacrement et l’autre la Vérité du Saint-Sacrement » (99). Reste à savoir ce que représentaient exactement ces tapisseries. La série à laquelle appartient la tapisserie des Miracles comprenait à l’origine un nombre inconnu de pièces longues et étroites divisées en quatre ou six grands tableaux qui étaient accrochés de part et d’autre du chœur. En 1888, onze fragments existaient, en 1941, le fragment de la Cène et de la Crucifixion avait été divisé en deux parties. Aujourd’hui, ne sont conservés au château de Langeais que deux pans de cette fresque, Les Miracles de la sainte Hostie et Abel, Melchisédech et la Pâque juive. Les dix autres fragments ont été dispersés en 1971 dans différentes collections ." SALATKO PETRYSZCZE (

 

1°Abel, Melchisédech et la Pâque juive, Château de Langeais.

2°Moïse frappant le rocher. / David et le passage de la mer rouge. Elie enlevé par les anges. New-York, The Century Association.

3°La Cène. Boston, Museum of Fine Arts.

4°La Crucifixion. Ohio, Allen Memorial Art Museum. Oberlin College.

5°L’idole renversée. Paris. Musée des Gobelins.

6°Saint Grégoire et la femme incrédule. / Doute et vision d’un prêtre. Leeds Castle.

7°Guérison d’un démoniaque./  Le cheval d’un païen rend hommage à l’Eucharistie. Boston. Museum of Fine Art.

8°Le Miracle des Abeilles. / Le Miracle des Billettes. Château de Langeais.

9°La mort d’un pêcheur qui communie./  Châtiment d’un prêtre coupable. Paris. Louvre.

10°Hérétiques noyés. /  Des animaux s’agenouillent devant l’hostie. Leeds Castle.

11°Le Miracle du Lendit. Musée des Gobelins.

12°Le Juif sacrilège mordu par son chien. Leeds Castle. 

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Description par le Museum of Arts de Boston :

I. Panel of 3 subjects, acquired by M. Siegfried, of the ChAteau de Langeais, and still there. [PLATE I, A].

(1) Adam and Eve. Cain and Abel. The scene shows Adam delving and Eve spinning, with the two boys at play beside an incongruous rustic cottage. On the left is a stone altar with Cain and Abel sacrificing and God appearing in a cloud. The foreground contains the murder of Abel. The verse along the bottom, in black letters on a red band, runs as follows :

CY COMANCE LYSTOIRE ET LA FIGURE DE' JHU CHRIST ET SON SAINCT SACREMENT DEPUIS ABEL ET LA LOY DE LA NATURE' JUSQUES A SON CRUEL CRUCIFIEMENT.

(2) Abraham and Melchizedek. The subject is divided from the last by a tree. Before the inscription below are the arms of Ysabelle de Jaille 3 and her initial Y twice. Abraham is dressed as a warrior of the period, in a jewelled helmet with red and white plumes. From his lance hangs a blue oriflamme. He is accompanied by a bravely clad suite. Melchizedek issues from an ornamental palace bearing bread and a gold wine-cup, and one of his staff carries an ewer. In the second plane are seen Abraham and the three angels, and the Sacrifice of Isaac. The verse runs:

MELCHISEDECH PBRE DU DIEU DIVIN OFFRIT AU BON PRIARCHE ABRAHAM ET LE RECONFORTANT DU PAIN ET VIN A SON RETOUR DE LARMEE DE SALAM.

(3) The Passover. This scene is divided from the last by the door from which Melchizedek appears. A pheasant is perched upon a balustrade. The Passover is represented by nine persons standing round a table with staves in their hands. One is adjusting his footgear. On the table is the paschal lamb and a dish of bitter herbs. In the background Moses is seen keeping his sheep, and God in the burning bush. The verse runs:

LE PEUPLE DISRAEL CHAUSSE ET CEINT TENANT ES MAIS BASTONS BLANS ET HONNESTES MANGEOIT IADIS P. MISTERE TRESAINCT LAIGNEL PASCHAL AUX LAICTUES AGRESTES. II. Panel of three subjects, acquired by M. Jumel, Avocat of Amiens. [PLATE I, B.]

(4) Moses striking the Rock. In the foreground a richly robed woman bends before Moses and offers him a wicker basket filled with manna. Half of the subject and the inscription is missing. The remainder of the latter is as follows: AU DIT PEUPLE QUI AUX DESERS ESTOI[ DESIROIT CELUI QUI EN GOUSTOIT.

(5) David and the Shew-bread. The High-priest wears a white brocaded robe edged with pearls and little bells, and has on his breast the ephod of twelve coloured stones representing the tribes. He offers the shew-bread on a linen cloth to David, who is dressed in a Burgundian costume of blue velvet beneath an ermine-trimmed cloak, and a hat adorned with crown and jewels. A subordinate scene shows the decapitation of Ahimelech, and in the distance is David dancing and playing before the Ark. The verse runs :

ACHIMELECH A DAVID DOULCEMENT DONNA DU PAIN DE PROPOSICION POURQUOI SAUL LE FIST CRUELLEMENT DECAPITER ET SANS DILACION.

(6) Elijah fed by an angel. A holly bush divides this scene from the last. Below, as in various other panels, are the arms on a lozenge of Dame Loyse le Roux. Elijah is reclining in the foreground tended by the angel. Behind, he is taken up in the chariot of fire, watched by Elisha. The verse runs: DE CHEMINER HELYAS SI TRES FORT FUT TRAVAILLE ET LAS QUIL ENDORMIT AUQUEL DIEU POUR LUY DONER RECONFORT PAR UNG ANGE PAIN ET EAU LUY TRANSMIT. III. Double panel, acquired by M. IUvy of Paris.

(7) The Last Supper. Christ, surrounded by the disciples, is seated beneath a canopy, holding the cup. In a subordinate scene, He is washing their feet. The quatrain runs:

DEVANT SA MORT SACRA SON SANG ET CORPS ET PRESBRES FAIT SES APOTRES A LHEURE DE FAIRE AINSI LEUR DIST ET SOIENT RECORS QUE SOUBS CE PAIN SON CORPS ENTIER DEMEURE.

(8) The Crucifixion. The Calvary, with the three crosses; St. John and the Virgin at the foot of the centre cross, and mounted men insulting the Saviour. The quatrain runs:

PUIS EN CALVAIRE IL FUT SACRIFIE AU SAINCT AUTEL DE LA CROIX PAR MISTERE QUANT DES JUIFS IL FUT CRUCIFIE POUR LES HUMAINS SOUFFRIT MORT TRES AUSTERE.

Below this inscription is the name of the donor, " Dame Loyse le Roux, doyenne et dame de chambre céans," who is depicted embracing the foot of the cross itself.

IV. Single subject, acquired by the Musée des Gobelins. (20)

A sacrilegious theft. The subject is the theft from St. Gervais of a Host, which floats miraculously above the head of the thief in the plain of St. Denis. The Bishop of Paris, the abbot of St. Denis, and the curb of St. Gervais bearing a communion cloth, come to seek it. The quatrain runs:

A SAINCT GERVAIS UNG LARRON PRINT LOSTIE QUE AU LENDICT MIST OU SEN ALLA LEVESQUE DE PARIS L ABBE SAINCT DENYS AVECQUE MAIS AU CURE DUDIT LIEU EST SORTIE.

V. Single subject, acquired by Comte de L'Estoile, of Château la Colletrie, Anjou. Now at Leeds Castle with Nos. VII and VIII. [PLATE I, C.] (21)

Punishment of a sacrilegious Jew. A Christian having sold the Host to a jew, the latter throws it to his dog, which bites him in the hand. The quatrain runs:

UNG XPRETRE VENDIT LA SAINTE HO [STIE] A UNG FAULX JUIF CRUEL ET INHUM [AIN] QUE A SON CHIEN JECTA PAR MOQUERIE LEQUEL LADORE MORT LE JUIF EN LA MAIN.

 

According to M. de Farcy, there was attached to this piece a fragment of No. 22, the Birth of Christ, which has disappeared. It showed God the Father overhead, with the words " Ab initio et ante secula creata sum." Below was a town with the seated Virgin, probably holding the Infant, and to her left a nun (possibly the donor) reading her Hours. The only words remaining of the inscription were de BETH . . . SAINCT . . . DONT. . . BROU . . .

VI. Single subjects, acquired by the Musbe des Gobelins.

(9) An Idol overthrown. A pagan stands beside an altar on which is an idol of a crowned King, which is overthrown from its pedestal on the arrival of the Host, borne by St. Antony. A franciscan in blue-grey habit accompanies him. The quatrain runs:

UNG IDOLATRE QUI LA FOI REGNIA AVOIT UNG FILZ SAINCT ANTHOINE CORDELIER DEVANT LYDOLE LOSTIE SACREE PORTA SOUDAINEMENT ON LA VIT TREBUCHER.

VII. Double panel, acquired by Comte de L'Estoile. Now at Leeds Castle. [PLATE II, A.]

(18) Two heretics drowned. It is recorded that in the era of the Albigenses, heretics walked on the water by the aid of Satan. Two of these are shown in the act, but a priest cast the Host upon the water and the heretics were drowned. Angels recovered the Host. The quatrain runs:

NOYES FURENT DEUX HERETIQUES PAR LA VERTU DU SACREMENT LESQUELZ DEVANT PAR ARS MAGIQUES MARCHOIENT SUR LEAU FRANCHEMENT.

(19) Conversion of a heretic. An ox, an ass, and a horse prostrate themselves before a priest bearing the Host. A heretic is converted by the sight. The quatrain runs:

UNG CHEVAL UNG B(EUF ET UNG ASNE ADORENT LEUR CREATEUR DONT UNG HERETIQUE PROPHANS FUT GECTE HORS DE SON ERREUR.

VIII. Double panel, acquired by Comte de L'Estoile. Now at Leeds Castle. [PLATE II, B.] (io)

St. Gregory converts the sacrament into flesh. The pope is communicating a man and a woman, assisted by a cardinal and a priest bearing the double cross, when the Host is transformed into a figure of Christ crucified. The quatrain runs:

SAINCT GREGOIRE COMMUNIOIT UNE FEMME MAL ADVERTIE DONT AINSI QUELLE SENS SOUBZRIOIT FUT LOSTIE EN CHAIR CONVERTIE.

(I I) A sceptical priest converted. Miracle of the transubstantiation; a vision of the Virgin and Child appearing to a doubting celebrant. The quatrain runs:

UNG PBTRE DOUBTA LA HOSTIE POUR QUOY ELLE SE DISPARUT MAIS LA SACREE VIERGE MARIE TENANT SON FILS LUY APPARUT.

 

IX. Double panel, acquired by M. Helft, Paris. Now at the Louvre. [PLATE II, C.] 

10. Death of an unworthy communicant. A priest in a blue chasuble with gold orphreys is preparing to communicate a sinner who has not received absolution, when the latter falls back dead. The quatrain runs:

UNG PECHEUR QUI INDIGNEMENT RECEUT LA TRES SACREE HOSTIE MORUT TOST ET VISIBLEMENT PAR LA GORGE FIST LA SORTIE.

(11) Punishment of a sinful priest. During the profane administration of the sacrament, a sinful priest is consumed by fire from heaven. The quatrain runs:

UNG PRESTRE IMMONDE CELEBRANT NON CRAIGNANT DIEU NI LES HUMAINS FUT DU FEU DU CIEL DESCENDANT EMBRASE' LES BRAS ET LES MAINS.

Double panel, acquired by M. Bailly, of Paris. This figured later in the Tollin sale of 1897, and is now in the possession of the Boston (Mass.) Museum of Fine Arts. [PLATE II, D.]

(I2) Deliverance of a demoniac. The possessed man is kneeling before a priest, who administers to him the sacred wafer, whereupon the devil escapes from his mouth in the shape o