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27 mars 2014 4 27 /03 /mars /2014 22:02

 Enquête sur une femme Bellah, esclave et porteuse d'eau :

                      L'exposition

 Anna Quinquaud, une sculptrice en Afrique

au Musée des Beaux-Arts de Brest (5 février-17 mai 2014).

   En 1980, au terme de l'exposition Regards sur l'Afrique au Musée de Brest, Anna Quinquaud faisait donation d'une partie de son atelier (sculptures, dessins, photographies et documents)  au musée des Beaux-Arts de Brest. Certaines de ces œuvres ont été prêtées pour être exposées à Gray, Mont-de-Marsan, Roubaix, La Rochelle, Quimper, et Gueret dont l'hôpital a été baptisé du nom de l'artiste. La ville de Brest a baptisé Rue Anna Quiinquaud une artère du quartier de l'Europe.

                      expo-anna-quinquaud-brest 4182c

Anna Quinquaud est la fille du docteur et académicien Charles-Eugène Quinquaud et de Thérèse Caillaux, sculpteur, élève de Rodin et de Boucher. En 1924 elle obtient un deuxième grand prix de Rome en sculpture, mais aussi le prix de l'Afrique Occidentale Française. A la villa Médicis et à l'École de Rome, elle préfère  l’aventure lointaine et solitaire en Afrique. Elle s’immerge dans la découverte du continent africain qui s’avérera être pour elle une puissante source d’inspiration. Son œuvre est un hymne à la beauté de l’Afrique et à ses traditions ancestrales.

 Elle effectuera trois voyages :

1925-1926 Premier voyage en Afrique : Sénégal (Dakar), Soudan français [actuel Mali] (Djenné, Tombouctou), Niger et Mauritanie.

1930-1931 Deuxième voyage en Afrique. Choix de la Guinée française : Foutah-Djallon. Peuples Foulahs, Coniaguis et Bassaris  

1932 : Troisième voyage : Somalie, Ethiopie, Madagascar.

                                 

 

 

I. Femme Bellah, esclave et porteuse d'eau.

Lors du premier voyage, elle observe près de Tombouctou une jeune esclave et elle en réalise un plâtre : c'est celui qui illustre l'affiche de l'exposition : 

                                       

                      expo-anna-quinquaud-brest 0560c


Cette œuvre est accompagnée du cartel suivant :

 

Femme bellah, captive de Touareg

(Tombouctou, Mali)

Plâtre, Musée des beaux-arts, Brest Métropole océane.

 

La femme captive dite Femme bellah est un plâtre qui introduit des lignes obliques et verticales, suggestives d'un abandon résigné et calme. Observée sans aucun doute, cette scène représente une de ces captives que les chefs de tribus foulah s'arrogeaient à la manière de l'esclavage comme l'atteste les fers qu'elle porte au pieds*.

 

      * Je m'interroge sur la validité de cette interprétation : les esclaves africaines sont enchaînées par d'autres fers  qui sont la tradition, les relations de pouvoir, la dépendance économique, l'absence de possibilité de survivre en cas de fuite, les réseaux d'allégeance, la complexité des relations de servage mélant intimité familiale, concubinage, servitudes domestiques,  mais je n'ai pas trouvé confirmation qu'elles portent des fers aux pieds. Certes, René Caillé écrivait dans  son Voyage à Tombouctou  au sujet des Mandingues "dès qu'on soupçonne dans un esclave le projet de déserter, on lui met les fers aux pieds", mais je conserve un doute : peut-être s'agit-il sur cette sculpture seulement de bracelets de cheville.

 

Cette femme est torse nu, vêtue d'un pagne. Elle porte un bracelet — de cuivre ou d'argent— de bras à gauche et d'avant-bras à droite. La chaîne ou le bracelet qu'elle porte à la cheville passe facilement inaperçue. Les yeux clos, elle somnole, le bras gauche soutenu par une vasque ronde dont nous voyons le fond. 

J'ignore, lors de ma visite, la nature de l'objet rond sur lequel elle s'appuie et je néglige de m'en préoccuper ; peut-être une meule, peut-être l'équivalent du boulet de nos forçats ? 

Cette sculpture peut être rapprochée d'un détail d'un bas relief sculpté par A. Quinquaud pour la résidence Lucien Paye (pavillon de la France d'outre-mer) dans la Cité Internationale Universitaire de Paris (1951) : c'est ainsi que je comprends qu'il s'agit de la jarre d'une porteuse d'eau :


                        

  •  

     159-quinquaud-anna.jpg

 Poteries des femmes Songhay, Gorom-Gorom, Burkina Faso.

 

 

 

   Ayant négligé cet élément, c'était la coiffure qui avait attiré mon attention. En 1996, Madeleine Joret décrivait, dans les enclos des Bellah, dans des cases de bancos ou de vannerie couvertes de paille,  une femme en train de tresser en une multitude de nattes fines la toison crépue d'une jeune maman : "scène paisible d'une séance de coiffure qui dure plusieurs heures, se fait en famille, demande patience et habileté, se renouvelle tous les deux à quatre semaines.". Les cheveux sont parfois lustrés au beurre de karité.

  Rentré chez moi, ayant identifié la jarre, ce ne fut encore qu'après une longue observation que je constatais l'essentiel : la taille énorme et disproportionnée du récipient, qui, une fois rempli, doit être beaucoup trop lourd pour cette (très) jeune femme ; peut-être s'épuise-t-elle à puiser à longueur de journée l'eau afin de faire boire les dromadaires ? 

 Par ce détail, cette sculpture d'une femme Bellah rejoint la série des Porteuses d'eau d'Anna Quinquaud, observées tant au Soudan que lors de son second voyage.

Il suffira de cette sculpture pour nous faire ressentir l'empathie du regard de l'artiste observant combien cette jarre pleine est excessivement pesante :

Porteuse d'eau songoï (Tombouctou, Mali), Bronze. Collection Pierre et Dohti Dumonteil.

  1. Comme l'empire Mandingue l'empire Songoï (Songhaï, Songhay) a été puissant jusqu'au XVIe siècle autour de Gao, sa capitale, et Tombouctou, sa capitale culturelle. Il s'est opposé aux Peuls et aux Touaregs. Depuis, le peuple sanghaï constitue un groupe ethnique important du Mali et du Niger, pratiquant l'agriculture et l'élevage, ou la pêche sur le Niger. Quoiqu'il existe des classes privilégiées (noblesse, classe maraboutique), on trouve aussi des classes serviles, les tyindikata et les gabibi. Les Songhaï ayant été souvent rassiés par les Touaregs, beaucoup de Bellah sont d'origine songhaï.

2. La collection Pierre et Dohti Dumonteil a été constitué par les propriétaires de la célèbre galerie Dumonteil (Paris, New-York, Shangaï) spécialisée en bronzes animaliers ; Dohti Dumonteil, ambassadrice de l'art et de la haute-couture d'origine vietnamienne, ancienne égérie d'Yves Saint-Laurent, s'est éteinte en 2013.

Le visage exprime la souffrance, la poitrine plate témoigne de l'âge, le pagne autour des reins et l'absence de tout bijou disent le dénuement. Le pied cambré pour soulever le genou gauche fait physiquement ressentir la lourdeur du fardeau. Les tresses des cheveux sont la seule concession, si ce n'est à la coquetterie, du moins à la préoccupation de soi. 

                            expo-anna-quinquaud-brest 0585v

 


II. Autres femmes porteuses d'eau du Soudan par Anna Quinquaud :

 

1. Femme songoï. (Tombouctou, Mali). Bronze, 1926.

Cachet Grandhomme-Andro* fondeur. Collection particulière.

*Paris (1924-1929).

Le récipient à col étroit semble moins lourd, mais le visage de la jeune fille la montre à peine sortie de l'enfance. Elle porte des bracelets épais et plats (cuivre ?) au poignet et aux chevilles, et sur sa longue tunique, un pectoral en dessous d'un collier de billes ; La tête, aux cheveux réunis en chignon, est ceinte d'un cerceau de métal à trois masses rondes.

La pénibilité du travail n'apparaît pas ici, au profit d'une certaine fraîcheur juvénile, ou de la conviction de ses charmes, et de la supériorité relative de sa condition. On sentirait presque ce "Cœur à l'ouvrage" qu"évoque le sociologue Jean-Paul Kaufmann dans son analyse des tâches domestiques, où la répétitivité et les charmes de "l'habitude" atténue la rudesse du travail. 


                      expo-anna-quinquaud-brest 0589c

Les collections de Sèvres — Cité internationale de la céramique—  possèdent sous le titre Négresse à l'amphore ou femme porteuse d'eau songoï une version en plâtre peint et patiné de 1925, H. 49 cm,

 

 

 

2. Laveuse du Niger, (Soudan) Bronze. Collection Pierre et Dohti Dumonteil :

Pagne, collier de grosses perles, bracelet rond, bracelet de cheville, coiffure rassemblée à l'apex en chignon torsadé sur un crâne rasé. Charme de la petite main aux doigts écartés, image de la confiance et de l'abandon d'un enfant dans son sommeil.

                      expo-anna-quinquaud-brest-0581c.jpg

Le Musée de Brest possède un plâtre patiné qui porte le même titre :

Laveuse du Niger (Soudan).

Plâtre patiné. Musée des beaux-arts, Brest métropole océane.. Cette figure féminine associant deux attributs de la femme en Afrique, l'enfant et l'eau est l'une des premières d'une longue série de maternités qui passionnent Anna Quinquaud.

 

III. La femme et l'eau, deuxième et troisième voyages d'Anna Quinquaud.


  1.     Femme à la fontaine.

Bronze à patine brun-clair ; Cachet « Susse fondeurs ». Collection Pierre et Dohti Dumonteil.

La fonderie Susse-Fondeur, créée en 1758, est toujours en activité à Paris.

    expo-anna-quinquaud-brest 0596c

 

      2. Sur les route du Sud.

Bronze à patine brune, 1934, Musée d'Art et d'Archéologie, Guéret.

                        expo-anna-quinquaud-brest 0630c

 

3. Jeunes antandroy (Madagascar).

Les Antandroy – « ceux qui vivent dans les épines » – sont un peuple de Madagascar présent dans l’extrême sud de l'île, dans une région aride couverte de ronces.  

                      expo-anna-quinquaud-brest 0633c

 


Les Bellah, "anciens" esclaves des Touaregs.

Wikipédia m'apprend que

"Les Bellas (Bella ou bela en songhaï, Bouzou en haoussa, Ikelan en tamasheq) sont un groupe ethnique ou une caste issu du statut servile dans la société touareg. Affranchis depuis l'époque coloniale, les Bellas sont parfois encore victimes d'esclavage au Mali et au Niger, sans qu'il existe de statistiques à ce sujet."

J'apprends aussi que les Touaregs ont souvent razzié les Songhaïs, peuple métissé de la vallée du fleuve Niger, et la plupart des esclaves touaregs, les bellah, sont d'origine Songhaï.

Lors du voyage d'Anna Quinquaud, Tombouctou appartenait, comme colonie, au Soudan français, mais l'esclavage préexistait à la colonisation. En 1892, le Commandant Réjou écrivait (Huit mois à Tombouctou) ceci :

 BELLAHS. - La condition du bellah vis-à-vis du Touareg rappelle celle du captif de case chez les noirs du Soudan. Le bellah est un métis touareg et indigène. Il cultive pour l'Echaggaren auquel il est attaché, surveille ses troupeaux, exerce les différents métiers nécessaires au bien-être de son seigneur, l'accompagne à la guerre, et combat à son côté.  CAPTIFS. - La condition du captif chez les Touaregs est la même que partout ailleurs au Soudan. Le captif doit son travail à son maître; mais le maître est tenu à remplir certaines obligations vis-à-vis de son captif . La Case de l'oncle Tom et quelques romans ont faussé nos idées en France sur l'esclavage, tout au moins sur ce qu'il est au Soudan. La liberté vaudrait certainement mieux pour le captif, cela n'est point douteux ; mais il n'est pas malheureux. La loi musulmane le protège, et c'est un capital que le maître conserve avec soin.Le maître doit au captif le logement, la nourriture, les vêtements, et est contraint de lui accorder à certains jours de la semaine le droit de travailler pour lui. Le Coran défend les mauvais traitements; et, s'il est avéré qu'un maître a maltraité son captif, le conseil des anciens qui fonctionne dans chaque village le lui retire. Le captif peut toujours se racheter.

Plus tard, en 1955, Henri Lhote écrivait dans Les Touaregs du Hoggar, Paris, Payot à propos des iklans (Les Touaregs utilisent pour désigner leurs esclaves le terme d' iklan,ou  aklids.) que "Le Touaregs ont rendu une semi-liberté à un certain nombre d'entre eux. Ce sont les Iklan-n-Egef, ou captifs de dune. Au Soudan, on les désigne souvent sous le nom de Bellah ou de Bouzous."

Aujourd'hui, la persistance de l'esclavage chez les Touaregs reste un sujet très discuté mais aussi très actuel. Un article paru dans l'Express le 17 mai 2013 sous le titre Mali, La révolte des esclaves  sous la plume de  Boris Thiolay signalait ceci :

 

Dans un pays accablé de tant de maux, la tradition séculaire de l'esclavage, officiellement interdit, reste un fléau. Avec courage, une association lutte pour rendre la liberté à au moins 300 000 personnes et traîner leurs "maîtres" en justice. Un combat sans relâche.  [...] Au Mali, l'esclavage est un tabou absolu, un abcès qui ronge la société. A l'exception de quelques ethnies du Sud, il se pratique encore dans quasiment toutes les communautés. Les chiffres sont effarants. "Il y a au moins 300 000 esclaves à part entière dans le pays, assure Naffet Keïta, anthropologue à l'université de Bamako et directeur de l'ouvrage L'Esclavage au Mali (L'Harmattan, 2012). Mais, en incluant les descendants et les affranchis, méprisés en raison de leurs origines, la question concerne plus de 850 000 personnes, soit près de 7 % de la population (14,5 millions d'habitants)." Au terme de plusieurs mois d'enquête de terrain, Naffet Keita est parvenu à esquisser une géographie régionale de l'ampleur du problème : de 30 à 35 % de la population autour de Tombouctou (nord du pays), 30 % à Mopti (centre), 20 % à Gao (nord-est), de 12 % à 15 % à Kayes (ouest).

Ce phénomène, ancré depuis des siècles, est qualifié d'"esclavage par ascendance" : "La condition servile se transmet par la mère, poursuit l'anthropologue. Tout enfant né d'une femme esclave le sera à son tour, quel que soit le statut de son père." Ainsi, de génération en génération, ces enfants deviennent les serviteurs des descendants du maître. Ils sont leur propriété, à l'instar d'un animal ou d'un objet. Certes, ils sont assimilés culturellement - les Bellahs parlent tamacheq, la langue touareg ; les Harratines sont arabophones ; les Dyons connaissent le bambara... - et vivent auprès de leurs maîtres, mais ils n'ont aucun droit. "L'esclave ne possède rien, n'hérite de rien, reprend Intamat ag Ikadewan, le "sauveur" de Bellahs. Il ne peut pas se marier librement et ses enfants peuvent lui être pris à tout moment." Il y a aussi les brimades, les humiliations, les mauvais traitements. Sans compter les coups, parfois mortels, le droit de cuissage et les viols.  Face à cette réalité insoutenable, Intamat, le "Spartacus" touareg, a sonné, en lien avec Temedt, l'heure de la révolte des esclaves. Une fronde encore balbutiante, mais qui commence à rallier des partisans. Créée en 2006 par des militants et des notables originaires du Nord malien, l'association est à la pointe du combat, revendiquant aujourd'hui 38 000 membres. Dans ses antennes ouvertes à Gao, Kidal, Mopti, Ségou ou Sikasso, des correspondants locaux mènent des campagnes de sensibilisation auprès des esclaves, mais également des chefs traditionnels de différentes ethnies. Une tâche ardue. "Nous avons mis deux ans avant de simplement faire admettre aux autorités publiques l'existence du problème", explique Ibrahim ag Idbaltanat, le président, qui reçoit au siège de l'association, à Magnambougou, un quartier populaire de Bamako. "Nous devons aussi être prudents pour ne pas éveiller la suspicion des maîtres. Car le plus compliqué reste d'approcher les personnes réduites en esclavage."

En dépit de ces craintes, entre octobre 2011 et mars 2012, 22 personnes ont accepté de porter plainte auprès des tribunaux de Tombouctou, de Gao et de Menaka. Une première dans l'histoire du Mali. Leur demande, jugée recevable par la justice, a été soutenue par Temedt et des avocats locaux. Chaque dossier dont L'Express a eu connaissance révèle une vie bafouée, une litanie de souffrances venues d'un autre âge...  

Dans un document très complet édité en 2007 par Abdoulaye Macko et  la Coopération Allemande sous le titre "Etude de la communauté Bellah de Gourmah Rharous" ( région au sud-est de Tombouctou, l'auteur donne les éléments suivants :

  "On peut dire sans exagération que les Kel Tamacheq représentent près de 80% de la population dont 55% sont des Bellahs ou Kel Tamacheq noirs.

-Présentation des Bellahs

 L’histoire des Bellahs est l’une des plus méconnues du fait de l’absence d’écrits spécifiques. Dans les ouvrages consacrés aux Tamacheq et aux Touareg les Bellahs sont toujours dépeints comme des esclaves des Touareg. Bien que fondée sur des faits établis, cette affirmation n’est pas toujours vérifiée. Par le passé, en milieu Tamacheq, l’esclave ou « Akli » est la propriété de son maître. Ce dernier a le droit de vie ou de mort sur lui. Il est taillable et corvéable à merci. Il peut être vendu à volonté par son maître. Il a le droit de posséder des biens. Une fois mort, les biens de l’esclave reviennent non pas à sa descendance mais à son maître. L’esclave s’occupe des travaux domestiques, du gardiennage des troupeaux. L’esclave femme peut aussi allaiter les enfants de son maître, ce qui crée des liens de fraternité entre les enfants de la femme et ceux du maître. La femme esclave est souvent une concubine.  

Les Bellahs sont aujourd’hui organisés en fractions ou villages issus de l’éclatement des tribus.

Les différentes tribus sont :

- Les tribus des Touareg guerriers 

- Les tribus des Touareg vassaux 

- Les tribus du clergé musulman ou tribus marabouliques 

A ces tribus Kel Tamacheq on peut ajouter les deux groupes Kounta d’origine maure .

Les critères de répartition sociologique de la communauté Bellah sont très variés. Aussi pour la compréhension du texte nous avons choisi de repartir les Bellahs en 3 groupes : les Bellahs libres, les Bellahs affranchis et les Bellahs esclaves.

1-Les Bellahs libres. [...]

 

2-Les Bellahs Affranchis : Le statut d’affranchis s’acquiert de plusieurs manières :

- religieuse : certains marabouts Touareg affranchissent des esclaves pour se conformer aux règles et préceptes de l’islam,

- politique : les chefs des tribus ou de fractions affranchissent des esclaves et leur confèrent ainsi un rang supérieur à leurs frères. Ces affranchis seront chargés de la gestion des biens et intérêts de leurs chefs (contrôle des troupeaux et des champs, récupération des impôts). Fidèles et redoutables à la tâche, ces hommes de paille sont craints par les esclaves et les métayers.

3-Les Bellahs esclaves :

    Chaque fraction Touareg possède ses esclaves. Certains Bellahs libres ont eux-mêmes des esclaves. L’esclavage par ascendance fait que même émancipé l’ancien esclave continue à porter le nom de la fraction de son maître. Ainsi le statut d’esclave se perpétue de génération en génération bien que cela ne correspond à aucune réalité aujourd’hui. Aussi nous pouvons répartir les esclaves en deux groupes : les anciens esclaves et les esclaves.

3-1-Les anciens esclaves

Les Diambouratanes usités surtout à Menaka pour désigner les habitants Bellahs des quartiers de liberté créés par les colons français qu’on trouve dans tous les chefs lieu de cercle du Nord du Mali. A Rharous il existe un quartier nommé « diambourou » : il s’agit d’esclaves des Imghads (vassaux) qui ont été affranchis par les Français. Ce sont les premiers habitants de la ville.

Les Bellahs esclaves qui se sont émancipés d’eux-mêmes sont nombreux.

On a :

- des Bellahs qui ont créé des hameaux de culture ou qui ont profité de hameaux de culture créés pour eux par leurs maîtres pour s’émanciper. Le hameau de culture ou « Dabaye » est transformé par la suite en village dirigé par un Bellah. C’est le cas de plusieurs villages dont Dabaye Foumba et Koro Bellah dans la commune de Bambara Maoudé, de Djérel dans la commune de Fifo et de la ville de Gossi ;

- des esclaves qui se sont affranchis après la maîtrise du coran.

Il existe plusieurs fractions Bellahs créées par d’anciens esclaves. Plusieurs familles Bellahs ont abandonné la fraction de leur maître pour s’installer dans des villes et des villages, ce qui explique la croissance rapide des villes commeGossi, Bambara Maoudé, Rharous.

 

3-2-Les Bellahs esclaves

Dans la plupart des campements Imochagh (guerriers), des Inesleman (clergé musulman) et des Imghad (vassaux) nous avons aujourd’hui encore des Bellahs esclaves. Dans les campements, on reconnaît leur présence par leurs petites huttes situées à la périphérie. Ces esclaves généralement démunis dépendent entièrement de leurs maîtres. Ils s’occupent des travaux domestiques et des animaux. Lors du mariage de la fille du maître, celle-ci est accompagnée de jeunes esclaves filles et garçons qui se mettent à son service. Le ou la jeune esclave peut être affecté selon les besoins au fils ou à un parent du maître. Ces esclaves qu’ils soient esclaves de tente (Eklane-n-han) ou esclaves de dune (Eklane-n-edjef) font partie intégrante de la famille du maître. Ce sont des biens qui sont transmis par héritage. Leur sort est le plus préoccupant. Au moment où le cercle de l’esclavage se rétrécit, les maîtres veillent sur ceux qui leur restent fidèles. Il existe dans le Gourma de nombreux esclaves qui vivent indépendamment du maître mais qui restent toujours soumis à sa volonté. Ils demeurent à la fois esclaves et tributaires."

 

expo-anna-quinquaud-brest-0563c_2.jpg

 


 

Sources et liens :

http://www.brest.fr/uploads/tx_pmpresse/CP_Quinquaud.pdf   

http://www.quimper.co/docs/itinerairesafricains.pdf

http://www.loisiramag.fr/actualite/expositions/395/anna-quinquaud-itineraires-africains-dans-les-annees-30

Mont-de-Marsan :file:///C:/Users/jean-yves/Downloads/Dossier%20presse%20expo%20Anna%20Quinquaud.pdf

La Rochelle : http://www.alienor.org/musees/var/storage/original/application/4bf9be30a0d3c2515f55dcbbc5ed5ca9.pdf

 

Roger Botte, "Les habits neufs de l'esclavage", Cahiers d'études africaines, 2005 pp.651-666.

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Published by jean-yves cordier
24 mars 2014 1 24 /03 /mars /2014 23:24

A la recherche du Papango : La danse de l'oiseau, sculpture de Anna Quinquaud exposée à Brest.

 

Lors de ma visite de l'exposition Anna Quinquaud (1890-1984) au Musée des Beaux-Arts de Brest, j'ai admiré l'une des pièces maîtresses, intitulée Danse La Papanga (Oiseau). L'œuvre étant abritée par une vitrine, je n'ai obtenu qu'une photographie médiocre, mais qui témoigne bien de la curiosité que suscite le sujet, une danse exécutée en équilibre sur une étroite colonne à peine évasée en son sommet, comme des stylites anachorètes.

 

                    expo-anna-quinquaud-brest 0660c

 

Elle était accompagnée d'un titulus remarquable indiquant ceci : 

Danse « la Papanga » (oiseau) Plâtre, 1933. Musée des Beaux-Arts, Brest métropole océane.

 

   "«La « Papanga » ou « danse de l'oiseau » qui expose le corps à une gymnique d'exception, est un exercice complexe de sculpture au cours duquel l'artiste témoigne expressément de son admiration pour une danse scrupuleusement observée à Madagascar. Expression identitaire de l'Île Rouge, cette chorégraphie est traitée en sculpture avec la suggestion d'une action en train de se faire. Ainsi, par un léger débordement du pied droit, par la position allongée des bras et leur savante asymétrie, par le subtil décollement des pieds qui prélude au mouvement du danseur, pas la légère inclinaison avant du buste, elle rejoint la pensée de Gaston Bachelard pour qui le corps de l'oiseau « est fait de l'air qui l'entoure, sa vie est faite du mouvement qui l'emporte. En Afrique, l'oiseau offre aux populations une dimension symbolique associée à la vie, à la fécondité ainsi qu'à l'envol des âmes.." (© Musée B-A Brest)

                           expo-anna-quinquaud-brest 0656c

On voit que les responsables de l'exposition s'étaient très justement consacrés à décrire l'œuvre et la technique plutôt que le sujet représenté.  Il me restait donc à mener mon enquête sur cette curieuse danse, que Anna Quinquaud avait observé lors de son voyage à Madagascar en 1932. La documentation fournie par le Musée me permit ainsi d'apprendre que :

"Cette sculpture en plâtre de la sculptrice Anna Quinquaud  est un défi à la statuaire. Aux volumes stables, l’artiste préfère l’expression ample et la mobilité précaire d’un danseur, dont le corps, tout en légèreté et équilibre, incarne la grâce d’un mouvement arrêté. Anna Quinquaud témoigne ici de son admiration pour une danse qui figure parmi les expressions rituelles et identitaires de Madagascar. Elle découvre l’île en 1932, à l’occasion de son troisième et dernier voyage sur le continent africain. Observée au sein de l’ethnie Antaisaka, la danse de la Papanga, ou Danse aux oiseaux, représente une forme culturelle propre à ce peuple dont les traditions ont essaimées dans toute l’île."

 

Mon atlas m'apprend vite que les Antaisaka – « ceux qui viennent des Sakalava » – sont un peuple côtier de Madagascar. Ils vivent principalement dans le sud-est de l’île dans la province de Fianarantsoa. Il me reste à découvrir d'où vient ce nom de "papanga", et, comme dans un jeu de piste, au lieu de trouver tout de suite la réponse, le fil d'Ariane me fut fourni par une expression malgache. Sur l'île, si vous restez immobile au lieu de progresser, vous pouvez entendre un passant pressé vous lancer : " Eh, tu va rester encore longtemps à faire le papanga ?".

Car c'est au masculin que le terme est utilisé. "faire le papanga", c'est faire comme cet  oiseau de proie qui peut rester longtemps les ailes déployées sans presque bouger, bien connu à Madagascar et à la Réunion, la Papangue (au féminin cette fois-ci !).

 

I. La Papangue, rapace.

On le trouve dans les traités d'ornithologie sous les noms de Circus maillardi maillardi Verreaux, 1862,  le Busard de Maillard, quoique ce nom corresponde plutôt à son cousin endémique de la Réunion, et qu'à Madagascar et aux Comorres, il faille plutôt parler de Circus macrosceles Newton, 1863. On le trouve décrit par Milne-Edwards avec des lithographies de John Gerrard Keulemans.  C'est un rapace de grande taille, à l'œil et aux pattes jaunes, au bec noir et crochu, le mâle est bigarré brun-noir et gris clair teinté de touches blanches, la femelle brun clair avec des ailes grises. Le mâle est plutôt brun/noir.

Il se nourrit de petits mammifères, de petits oiseaux, d'amphibiens et de reptiles. Il était jadis la terreur des basses-cours.

"Histoire naturelle des oiseaux Vol. XII", in  Histoire physique, naturelle et politique de Madagascar 1876 publiée par Alfred Grandidier ; par MM. Alph. Milne Edwards et Alf. Grandidier, atlas 1, pl. 77 page 90  et planche XXVII.

                                    Description de cette image, également commentée ci-après

 

Source image :http://www.classicnatureprints.com/pr.Keulemans%20Birds/mad.circus.maillarde.html

 

                circus.maillarde.

 

Busard de Maillard (Circus maillardi) mâle, 1867 lithographie de Louis Antoine Roussin http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Circus_maillardi_male_lithograph.jpg

 

                         File:Circus maillardi male lithograph.jpg

 

 

II. La danse  papangue, Papango .

      Curieusement, je n'ai pas trouvé de description de "la danse Papanga" chez les Antaisaka. Il existe à Madagascar de nombreuses danses traditionnelles, accompagnées par le tambour langoro ou amponga, le violon (lokanga), la flûte (sandina), l'arc musical (jejolava), la cithare Marovany, la mandoline triangulaire, et l'accordéon introduit après l'époque coloniale.  Chaque ethnie a sa danse propre, comme  la danse du fusil chez les Sakalava, la danse des Antandroy , celle des Merina avec leurs les danseurs Mpilalao, et la danse du pilon, danse commune aux ethnies côtières Bestimisaraka et Antakara qui marque les premières récoltes de riz de l'année. On trouve aussi les noms de danse comme  la danse d'introduction Afindrafindrao, Bahoejy,  le Malesa, l'Alalaosy,le  Kinetsanetsa, Antsa, Beko, Tosy, Djihe, et, propre aux Antaisaka, le chant polyphonique féminin Sakalava.

  Dans toutes les danses de différentes régions de Madagascar, pétries de symboles, aucun geste n’est gratuit. Les femmes harcèlent les hommes de leurs chants. Les pas saccadés font se déhancher les corps, coudes relevés. Les mâles piqués au vif répondent individuellement, rivalisant d’adresse pour attirer l’attention. Les pieds martèlent le sol. Les malgaches ont hérité de l’Afrique la danse avec les pieds, de l’Indonésie la danse avec les mains. Le ton se fait parfois grave, lorsque les chants sakalava appellent à la fin des mauvais jours, sur des mélodies teintées d’une pointe arabisée. Au Sud, au pays des épines, l’environnement hostile incite, sans doute plus qu’ailleurs, au dialogue avec les esprits. Le rythme des percussions s’accélère, se fait plus africain. Les instruments de musique témoignent du dénuement : la langoro, petit tambour à baguettes, la mandoline rectangulaire, de facture évidement artisanale… La force de la nature, oppressante, est omniprésente dans la chorégraphie.. Les chants se transforment souvent en incantations, pour que la pluie tombe, pour que l’amitié perdure entre les hommes… Les danses rappellent aussi les rituels guerriers, à grand renfort de lances et de démonstrations de la force masculine, faisant appel aux génies bienfaisants qui s’invitent dans le corps. Les danseurs et le public communient dans les rituels ancestraux, particulièrement vivaces chez les Antandroy. La transe du « bilo » en est le moment le plus fort : la cérémonie d’exorcisme arrive alors à son terme, la guérison par l’extraction du mal. Le Phoenix Magazine, 2013

...mais pas de "danse Papanga". Je ne découvre le sujet de la sculpture d'Anna Quinquaud que sous deux noms, la danse Papango, et la danse de l'épervier.

1. Les danses de l'épervier.

Les danses malgaches les plus appréciées sont celles qui imitent la gestuelle animale : épervier, crocodile, zébu surtout.  Les pas de danse évoquent parfois la façon caractéristique de la marche dans la sable. Le danseur déploie ses grands bras et semble guetter sa proie, en contrebas. Il n’agite que ses mains, comme des ailes dont le battement minuscule suffit à vaincre le pesanteur, dans ce ciel éternellement bleu. L'une des danses folkloriques les plus connues en Imerina est Mandihiza, Rahitsikitsika (Danse, Sieur-l'épervier) qui se rapporte au rituel des prémices du riz.

Les archives de la Bnf conservent sur Gallica un enregistrement ethnographique sur disque de 1931 présenté ainsi : 

 Rahitsika : chant et danse de l'épervier / Vanamana, chant / choeur, accompagnement d'accordéon, de hochet tubulaire, de kaiamba et de battements de mains; Madagascar : Face A : Rahitsika [Enregistrement sonore] : chant et danse de l'épervier / Vanamana, chant / choeur, accompagnement d'accordéon, de hochet tubulaire, de kaiamba et de battements de main.

 Doc. Exposition coloniale 1931.

 

2. La danse des Papangues des Betsimsarak.

Le Dr Lacaze a laissé une description précise de la Danse des Papangues en 1881 chez les Betsimsarak (qui occupent la côte est de Madagascar, et non la côte ouest comme les Antaisaka):  .

      Après la danse des Hovas ou de l'aristocratie, vint la danse des Betsimsarak ; les femmes seules y prirent part. En face de nous, dans le fond, huit belles Malgaches se placèrent en face les unes des autres et dansèrent la danse des papangues. La papangue est un oiseau de proie très-redouté des basses-cours; c'est une espèce d'épervier qui plane  La pagangue est un oiseau de proie très redouté des basses-cours : il plane sur tous les villages malgaches pour chercher à saisir saisir volailles, canards, oies, tout ce qu'il peut. La papangue a un vol majestueux, les ailes tantôt agitées, , tantôt étendues horizontalement et immobiles. Cette danse rappelle le vol de cet oiseau, et les femmes betsimsarak l'imitent avec les mouvements de leurs bras et de leurs mains ; cette espèce de pantomime est très gracieuse et mes regards se reposaient avec plaisir sur ce groupe d'une originalité franche et ne visant pas à copier une civilisation encore éloignée. Elle était accompagnée par le chant des femmes assises autour, chant monotone dont le rythme est appuyé et marqué par des battements de mains comme les danses populaires de l'Espagne.

 Dr Honoré Lacaze, 1868-1869.

"Souvenirs de Madagascar", Revue maritime et Coloniale vol. 68 page 627 1881.

 

Mais cette danse est réalisée à plusieurs danseuses, et Lacaze (père du futur amiral) ne signale pas que celles-ci se hissent au sommet d'une colonne.

 

3. La danse  de l'oiseau Papango chez les Bara.

 C'est chez les Bara, peuple semi-nomade des plateaux du sud de Madagascar occupant une grande prairie  reculée et pratiquement désertique,  ponctuée de palmiers Satrana, que l'on trouve la description de la danse la plus proche de celle représentée par  Anna Quinquaud.

Cette danse de l'épervier (on sait que "épervier" sert de dénomination vernaculaire pour tout rapace), ou danse de l'oiseau, danse du Papango, leur est propre, quoiqu'on la retrouverait chez les Zoulous ou les Bantous d'Afrique du Sud, et honorerait en le mimant leur ancêtre mythique, symbole de force. Elle est décrite ainsi par différentes sources trouvées en ligne :

"le danseur feint d'être fasciné par un pilier d'environ un mètre de haut. Il avance, recule, tourne autour. D'un coup, il saute au sommet et imite l'oiseau de proie, entrecoupant ses arrêts de piétinements." 

"La danse est ici mimétique des mouvements de ses ailes et s'apparente ici au rituel avant le sacrifice de la bête".

 "Les Bara et les Sahafatra, par exemple, miment le « papango » du haut d' »une stèle de 25 cm de diamètre et font montre d'une virtuosité peu commune en sautant sur ce perchoir et exécutant de façon très expressive les mouvements de l'oiseau et son vol plané au dessus des maisons à la recherche de nourriture. Les grands et forts Bara sont une ethnie composée de pasteurs nomades qui parcourent les grands espaces à la tête d’immenses troupeaux de zébus, symbole de richesse et fierté de tout un peuple. Le vol de bétail, encore d’actualité, est une tradition ancestrale. Acte glorieux et courageux, plein de séduction, par lequel, le Dahalo (voleur de bétail) prouve sa bravoure et ainsi reçoit les faveurs des belles demoiselles Bara.

Dès leur plus jeune âge, les Bara sont initiés au rodéo ainsi qu’à la lutte à mains nues appelée Ringa. Ces manifestations sont l’occasion de réunir la population nomade Bara.

Autrefois le ringa, sport spectaculaire, constituait un entraînement physique au combat.

Ces fêtes sont accompagnées de musique et de la curieuse danse du Papango, au cours de laquelle un homme juché sur un poteau de bois mime l’envol d’un oiseau de proie."

Deux documents photographiques sont disponibles en ligne :

1. Une Carte postale A1388   "n° 23 danseur Baras, danse du Papango" 1960 en vente chez Delcampe : un danseur qui a sauté sur un premier support (tronc) évasé de moins d'un mètre de haut puis sur un second support (deux mètres environ), se renverse en pont en arrière en prenant appui sur un troisième pieu un peu plus élevé. Photographie Fianarantsoa BP 1329 Madagascar. On distingue de son costume un short blanc entouré de collier, un tee-shirt sombre, cuisses et bras nus, un bracelet , et sa coiffure dont les longues mèches tressées portent des bijoux. 

 danseur-papango-Delcampe-1960.png

 

 

2. la photographie suivante ici :

                             

 

Pour finir, il existe à Madagascar, dans le bassin de l'ltomampy, pres de Befotaka, un mont Papanga, haut de 2200 m.

      La carte postale du danseur Bara peut être rapprochée d'une autre sculpture exposée à Brest, pour laquelle le musée conserve dans ses archives la photographie prise en 1934 à Madagascar et ayant servi de modèle : 

 

 expo-anna-quinquaud-brest 4059c

 

expo-anna-quinquaud-brest 4174c

 

 

Après ce périple ethnographique, je reviens à l'Oiseau d'Anne Quinquaud : le travail artistique est alors évident, avec ce dépassement de l'aspect anectodique ou touristique (— à l'époque : colonial) du sujet pour rendre cette intériorisation du danseur aux charmes androgynes, aspiré par la métamorphose, possédé par l'esprit animal, et par la sacralité de sa fonction.

 

 

 

expo-anna-quinquaud-brest-4061c.jpg

 

 

                             expo-anna-quinquaud-brest-4068c.jpg

 

 

                            expo-anna-quinquaud-brest-4070c.jpg

.

 

On comparera cette sculpture avec l'Hombre Pájaro [Homme-oiseau]  de Josué Manuel Belmonte-Cortez , qui appartient à sa série Anatomia del Alma.

Voir aussi, du même artiste et sur le même thème : Hombre pájaro III au Musée Européen d'Art Moderne MEAM de Barcelone : http://www.meam.es/obra/1002/hombre-p%C3%A1jaro.html

image :http://notascordobesas.blogspot.fr/2014/12/60-anos-de-arte-contemporaneo-en.html

 

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Published by jean-yves cordier
21 mars 2014 5 21 /03 /mars /2014 23:15

Vitrail de la grisaille de l'Annonciation de la cathédrale de Chartres.

 

Voir aussi :

Le vitrail de la Passion de la cathédrale de Chartres.

Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Saint-Pierre de Chartres.

Les Mois, le Zodiaque et le Temps de la cathédrale de Chartres: sculpture et vitrail. .

La Vierge allaitante de l'oculus des vitraux de Chartres. 

Le vitrail de l'arbre de Jessé de la cathédrale de Chartres.

 

 

 

 

Il s'agit ici de la baie 26 selon la numérotation du Corpus Vitrearum : chœur, coté sud.

Ce pur chef d'œuvre est, dans son émouvante simplicité, l'une des plus belles choses que l'on puisse admirer à Chartres ; mais cette verrière est la  proche voisine du fameux vitrail de la Belle Verrière (n°30) et de celui des Mois et du Zodiaque (n°28), et le visiteur risque de passer devant sans y prendre garde. 

  On la qualifie de "grisaille", comme si elle était composée de verres blancs peints de grisaille, mais cette lancette à arc brisé divisée en trois colonnes de douze panneaux, si elle est bien décorée par un réseau de losanges tracés à la grisaille et dont chacun est centré par une fleur rehaussée au jaune d'argent, possède bien une scène en verres colorés dans sa partie inférieure, et un encadrement également coloré.

 La grande clarté de cette verrière est intentionnelle, et elle a sans-doute remplacé, au XIVe siècle, une vitre narrative du XIIIe siècle, entièrement colorée, afin d'éclairer le déambulatoire. 


baie-28-Annonciation-grisaille-6758c.jpg

 

1. L'Annonciation. 

 

L'ange Gabriel se tient à droite et tient une banderole avec l'inscription AVE MARIA GLORIA PLENA. Mais la calligraphie de chaque lettre de cette inscription est une merveille. L'artiste s'est arrangé pour que le nom de Marie soit au sommet du phylactère savamment plié. J'admire aussi le dessin de la main et de l'index annonciateur. 

A cette calligraphie répond celle des traits du visage, chacun dessiné comme pour lui-même : arc des sourcils, prunelles, virgule de l'aile du nez, délié de la bouche, six ou sept traits de pinceaux pour créer cette expression décidée mais souriante, celle de quelqu'un qui se réjouit à l'avance de ce qu'il a à dire.

Ailes qui porte les couleurs d'Iris ; manteau rouge, robe blanche, et le pied encore vibrant de la hâte d'arriver.

                    baie-28-Annonciation-grisaille-6758cc.jpg                 

 Entre lui et la Vierge, le vase ou fleurit un lys, symbole de virginité. Placé sur l'axe médian, il sépare l'espace du divin et l'espace humain, mais les fleurs, comme de petites mains gantées de blanc, se tendent pour rapprocher ces deux espaces, et leurs protagonistes. C'est, comme dirait Winnicott, "l'objet transitionnel" dans l'espace intermédiaire où va fleurir le jeu des échanges verbaux, cet espace qui, dans des Annonciations plus picturales, est traversé par le rayon fécondant du Saint-Esprit.

La Vierge à peine détournée de sa lecture pieuse (on interprète les éléments architecturaux de l'extrême droite comme figurant sa chambre, et son prie-dieu), à peine frappée par la surprise de l'Annonce, est déjà revenue à son intériorité, mais sa tête inclinée, ses yeux et se lèvres closes expriment l'intensité de son Fiat par lequel elle accepte déjà le pire, comme un préalable à la Rédemption. Toute son éloquence se trouve dans sa main aux longs doigts (5 phalanges !) qui ferme l'arc tendu par Gabriel.


                                                                                                                                                                                        baie-28-Annonciation-grisaille-6758ccc.jpg

 

 

 

 

2. La bordure d'encadrement.

Elle est composée d'une alternance d'une fleur de lys et d'une sorte de damier qui ne retient pas forcément l'attention. Pourtant, la fleur se blasonne d'azur semé de fleurs de lys d'or, et ce sont les armes d'un roi de France. Intéressons-nous au "damier".

  Si on veut trouver une comparaison plus juste avec un jeu de pion, cela ressemble à ce carré que ma sœur traçait en défi sur la plage de Carolles (50) et sur les diagonales ou les droites duquel je tentais d'aligner trois petits cailloux de galets. Nous le nommions "le Drapeau anglais" mais son nom officiel —avec un tracé différent— est "le jeu de Mérelle" (ou Jeu du Moulin, de Charett, Morris, etc.). On y jouait au Moyen-Âge dans les tavernes ou à l'école. Or, je découvre dans un vieux dictionnaire  "En terme de blason, on dit que les anciens rois de Navarre depuis Sanche le Fort ont porté pour armes des chaînes mérellées, qui représentent des mérelles, quoique plusieurs Hérauts les aient pris pour des chaînes et des raies d'escarboucle." (1743)

 Cet indice me suffit pour découvrir que le motif sur fond rouge qui alterne avec la fleur de lys correspond aux armes  de gueules aux chaînes d'or posées en orle, en croix et en sautoir, chargées en cœur d'une émeraude au naturel des rois de Navarre.

                                                    Wikipédia 

  Il s'agit donc de trouver les donateurs de ce vitrail, auxquels ces blasons appartiennent : chacun trouvera comme moi les réponses, dont la première est  Jeanne II de France, reine de Navarre, née le 28 janvier 1311 et morte le 6 octobre 1349, fille du roi de France et de Navarre Louis X le Hutin et de Marguerite de Bourgogne. Elle fut reine de Navarre de 1328 à1349. Son époux est Philippe d'Évreux. 

                                                               Royal Coat of Arms of Navarre (1285-1328).svg Wikipédia

Le chanoine Yves Delaporte suggère aussi qu'il puisse s'agir de leur fille la belle Blanche de Navarre (1333-1398) et son mari Philippe de Valois. Elle fut reine de France 6 mois et 23 jours, en 1350, ayant épuisé son mari, son aîné de quarante-et-un ans.

                                                             Description de cette image, également commentée ci-aprèsWikipédia

 

 

3. Les trois fleurs au dessus de l'Annonciation.

Elles méritent un rapide examen car elles sont chacune différentes. Deux d'entre elles sont au centre de quatre feuilles de houx, et celle du milieu au centre de quatre feuilles de chêne. Peintes en grisaille, elles sont rehaussées au jaune d'argent plus ou moins dense, du jaune jusqu'à l'orange. 

 Le jaune d'argent, cette "couleur de cémentation " obtenue par des sels métalliques qui pénètrent dans le verre pendant la cuisson, a été introduite en occident au début du XIVe siècle, et l'exemple français le plus ancien date de 1313 (Le Mesnil-Villeman). C'était donc, pour ce vitrail du XIVe, une nouveauté.

 

On en profitera pour regarder les différentes fleurs au centre de chaque losange, pour constater une diversité étonnante.

 

 

 

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Published by jean-yves cordier
20 mars 2014 4 20 /03 /mars /2014 23:08

Le vitrail de la Passion de la cathédrale de Chartres. Baie 49.

Il fait partie des trois verrières occidentales, les plus anciennes : autour de la grande lancette centrale de l'Enfance et la Vie de Jésus, les deux lancettes en arc brisé de l'Arbre de Jessé, à droite, et de la Passion, se répondent dans une symétrie où la Passion et la Résurrection viennent accomplir la prophétie du rameau de Jessé. Au dessus de ces trois lancettes, la rosace du Jugement dernier fait culminer ce projet divin dans la Rédemption.

Ces verrières datent de 1144-1155, avant le grand incendie de 1194 auquel elles échappèrent. Cette période correspond au règne de Louis VII, à la deuxième Croisade préchée par Bernard de Clairvaux ; Thibaud V de Blois est alors comte de Chartres, Geoffroy de Lèves est évêque de Chartres jusqu'en 1149, puis Gosselin de Lèves lui succède.

La comparaison  des trois verrières met en évidence  l'organisation de celle de gauche en sept registres de deux médaillons , sans travée médiane ni encadrement ; d'autre part, le bleu dominant des deux autres verrières disparaît au profit d'une macédoine de teintes plus variées, dans un ensemble globalement plus lumineux.

vitraux-9807c.jpg

 

Le vitrail de la Passion :

                    Passion 9810

Je vais étudier la répartition des couleurs, et rechercher une éventuelle utilisation symbolique. Le verrier semble avoir à sa disposition les teintes suivantes :

  • rouge
  • bordeaux
  • lie-de-vin (brun)
  • violet
  • bleu (pour le ciel de fond et quelques accessoires)
  • vert clair
  • vert bouteille
  • vert
  • jaune clair
  • jaune d'or
  • blanc
  • rose-pourpre "chair" pour les visages, mains et pieds.

Je n'ai pas le dossier de restauration permettant de discerner les verres anciens des verres restaurés.

Les verres sont utilisés tels quels, ou peints de grisaille pour les visages et les vêtements, les perles et feuillages de l'encadrement.


 

1. La Transfiguration .

A gauche, la Transfiguration proprement dite, le Christ radieux (8 rayons blancs) dans une mandorle rouge  soulignée d'une irisation concentrique vert-mauve-jaune. Élie et Moïse le présentent avec déférence. A terre, sur le mont Thabor, les trois apôtres Pierre, Jacques et Jean "tombent sur leur face, saisis d'une grande frayeur".

A droite, le Christ (que l'on reconnaîtra dans cette verrière à sa nimbe rouge crucifère) recommande aux apôtres de ne pas parler de ce qu'ils ont vu, et répond à leurs questions.

Étude des couleurs.

— A gauche, le Christ est vêtu d'une tunique verte et d'un manteau bleu orfroyé d'or. Moïse et Élie portent tout les deux les mêmes couleurs vert (deux nuances) et brun (deux nuances), inversées, avec une ceinture bleue. Apôtres en blanc et bleu (Pierre, cheveux dégarnis) ;   rouge et jaune (Jean, imberbe) ; bleu et blanc (Jacques). Leurs nimbes sont rouge, jaune et rouge. 

— A droite, le Christ porte désormais sur sa tunique verte un manteau rouge et lie-de-vin. Les apôtres ont aussi changés de tenues : les manteaux et tuniques sont respectivement vert et blanc ; vert et rouge ; jaune et vert. En outre, ils sont tous les trois barbus, ce qui ne correspond pas à la lecture donnée supra. 

Fond de ciel bleu dans les deux panneaux.

Passion 6698c

 

 

2. La Cène ; le lavement des pieds.

— Dans la Cène, le Christ porte les mêmes couleurs lie-de-vin et vert que dans le dernier panneau ; il va les conserver sauf exception. Jean est en rouge et blanc. 

Judas, assis de l'autre coté de la table, tend la main vers le poisson :

 

 Le soir venu, Jésus se trouvait à table avec les Douze. Pendant le repas, il déclara : « Amen, je vous le dis : l’un de vous va me livrer. »Profondément attristés, ils se mirent à lui demander, chacun son tour : « Serait-ce moi, Seigneur ? »Prenant la parole, il dit : « Celui qui s’est servi au plat en même temps que moi, celui-là va me livrer.Le Fils de l’homme s’en va, comme il est écrit à son sujet ; mais malheureux celui par qui le Fils de l’homme est livré ! Il vaudrait mieux pour lui qu’il ne soit pas né, cet homme-là ! »Judas, celui qui le livrait, prit la parole : « Rabbi, serait-ce moi ? » Jésus lui répond : « C’est toi-même qui l’as dit ! »

 

Je serais tenté de voir dans le manteau jaune de Judas un choix délibéré de le stigmatiser par une couleur jugée discriminante au Moyen-Âge (M. Pastoureau), mais deux autres apôtres portent aussi cette couleur.

Hormis le bleu, réservé au fond, et le violet, les autres couleurs sont distribuées selon des impératifs artistiques et non symboliques.

— Lavement des pieds .

Si j'identifie Pierre par sa chevelure dégarnie (il était alors à droite du Christ dans la Cène), c'est devant lui que le Christ est à genoux. Il porte alors le même manteau rouge. Jésus a ceint un tablier blanc autour de son manteau.

Passion 6698cccc

 

 

 3.  L'Arrestation du Christ dans le Jardin des oliviers ; la Flagellation.

 

— L'artiste est fidèle à ses choix de couleur : Lie-de-vin/vert pour le Christ, Jaune/vert pour Judas, Rouge (mais avec de grandes manches blanches) pour Pierre (sans calvitie) qui tranche de son glaive l'oreille du serviteur du Grand-prêtre (Jaune et Vert).

 

— Flagellation : Le Christ , lié à une colonne jaune, est torse nu mais conserve son manteau rouge, ou (plutôt) le manteau de dérision rouge imposé par Pilate. Les deux bourreaux ont des tuniques courtes soit jaune (péjoratif) soit rouge, mais la bassesse de leur fonction est soulignée par le caractère hétérogène, bigarré, des couleurs entre l'encolure, la tunique, les chausses et les chaussures.

Le titulus porte le motif du jugement, INRI en lettres blanches tracées par soustraction de la grisaille presque noire.

Le nimbe crucifère est peint d'un fond damassé souligné d'un rang de perles rouges.

Passion 6699cc

 

 


4.  Le Christ en croix ; Déposition.

— Le Christ porte, non pas un perizonium, mais un manteau assez complexe et qui n'est ni celui qu'il portait antérieurement puisqu'il associe un revers jaune et vert et un large galon vert. La Croix est verte au bord rouge, de façon peu habituelle, même si on peut a posteriori y voir le vert de l'Arbre et le rouge du Sang, avec la symbolique de l'arbre du Paradis, celle de la Reverdie printannière et de la renaissance, etc... Le déhanchement du corps est très marqué conférant à la posture le caractère dramatique qui convient.

La Vierge est, étonnamment, en manteau rouge et robe jaune (disons plutôt "or"), et non dans ses couleur bleue traditionnelle. Celle-ci est-elle donc réservée au ciel ? Jean est en robe rouge (sa couleur emblématique) et manteau lie-de-vin et jaune d'or.

— Dans la Déposition, la Vierge inverse sa tenue, le manteau rouge devenant jaune et la robe jaune devenant rouge ...mais aussi bleue ! Inversion partielle aussi pour Jean , et apparition d'une robe verte et d'un livre (son Évangile) bleu. Joseph d'Arimathie, qui soutient le Christ, est en lie-de-vin, vert et rouge (chausses), alors que Nicodème qui ôte le clou avec ses tenailles est en jaune ; tous les deux portent un bonnet "juif".

Ces deux scènes étant jumelles, les changements de couleurs des vêtement de Marie et de Jean cherchent peut-être à éviter la monotonie.


Passion 6699ccc

 

 

5. Sainte femme et 3 apôtres ; Noli me tangere.

 Matthieu 28 1-10 : Après le sabbat, à l’heure où commençait à poindre le premier jour de la semaine, Marie Madeleine et l’autre Marie vinrent pour regarder le sépulcre. Et voilà qu’il y eut un grand tremblement de terre ; l’ange du Seigneur descendit du ciel, vint rouler la pierre et s’assit dessus. Il avait l’aspect de l’éclair, et son vêtement était blanc comme neige. Les gardes, dans la crainte qu’ils éprouvèrent, se mirent à trembler et devinrent comme morts. L’ange prit la parole et dit aux femmes : « Vous, soyez sans crainte ! Je sais que vous cherchez Jésus le Crucifié. Il n’est pas ici, car il est ressuscité, comme il l’avait dit. Venez voir l’endroit où il reposait. Puis, vite, allez dire à ses disciples : “Il est ressuscité d’entre les morts, et voici qu’il vous précède en Galilée ; là, vous le verrez.” Voilà ce que j’avais à vous dire. » Vite, elles quittèrent le tombeau, remplies à la fois de crainte et d’une grande joie, et elles coururent porter la nouvelle à ses disciples. Et voici que Jésus vint à leur rencontre et leur dit : « Je vous salue. » Elles s’approchèrent, lui saisirent les pieds et se prosternèrent devant lui. Alors Jésus leur dit : « Soyez sans crainte, allez annoncer à mes frères qu’ils doivent se rendre en Galilée : c’est là qu’ils me verront. »

— Une sainte femme (Marie-Madeleine) est face à saint Pierre (pseudo tonsure) et deux autres apôtres. Pierre est désormais en manteau jaune sur robe rouge ; un galon bleu (moderne ?) orne robe et manteau.

— Sainte Marie-Madeleine se prosterne au pied du Christ, qui reste vêtu d'une robe verte et d'un manteau rouge, qui s'est seulement enrichi d'un galon d'or. 

 

Passion 6700ccc

 


 

 6. Les Pèlerins d'Emmaus.

      — Les deux pèlerins, dont l'un se nomme Cléophas, se rendent de Jérusalem (à gauche) vers Emmaüs (à droite) lorsqu'ils sont rejoint par un troisième marcheur dont nous sommes les seuls à voir le nimbe crucifère :

Et voici, ce même jour, deux disciples allaient à un village nommé Emmaüs, éloigné de Jérusalem de soixante stades ;et ils s’entretenaient de tout ce qui s’était passé. Pendant qu’ils parlaient et discutaient, Jésus s’approcha, et fit route avec eux. Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. Il leur dit : De quoi vous entretenez-vous en marchant, pour que vous soyez tout tristes ? L’un d’eux, nommé Cléopas, lui répondit : Es-tu le seul qui, séjournant à Jérusalem ne sache pas ce qui y est arrivé ces jours-ci ? Quoi ? leur dit-il. Et ils lui répondirent : Ce qui est arrivé au sujet de Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en œuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple, et comment les principaux sacrificateurs et nos magistrats l’ont livré pour le faire condamner à mort et l’ont crucifié. Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël ; mais avec tout cela, voici le troisième jour que ces choses se sont passées. Il est vrai que quelques femmes d’entre nous nous ont fort étonnés ; s’étant rendues de grand matin au sépulcre et n’ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire que des anges leur sont apparus et ont annoncé qu’il est vivant. Quelques-uns de ceux qui étaient avec nous sont allés au sépulcre, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont point vu. Alors Jésus leur dit : O hommes sans intelligence, et dont le cœur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît ces choses, et qu’il entrât dans sa gloire ? Et, commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Écritures ce qui le concernait. Lorsqu’ils furent près du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin. Mais ils le pressèrent, en disant : Reste avec nous, car le soir approche, le jour est sur son déclin. Et il entra, pour rester avec eux. Pendant qu’il était à table avec eux, il prit le pain ; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent ; mais il disparut de devant eux. Et ils se dirent l’un à l’autre : Notre cœur ne brûlait-il pas au dedans de nous, lorsqu’il nous parlait en chemin et nous expliquait les Écritures ? Se levant à l’heure même, ils retournèrent à Jérusalem, et ils trouvèrent les onze, et ceux qui étaient avec eux, assemblés et disant : Le Seigneur est réellement ressuscité, et il est apparu à Simon. Et ils racontèrent ce qui leur était arrivé en chemin, et comment ils l’avaient reconnu au moment où il rompit le pain.Tandis qu’ils parlaient de la sorte, lui-même se présenta au milieu d’eux, et leur dit : La paix soit avec vous ! Luc, 25, 13-35)

— Le Christ conserve son manteau lie-de-vin et sa robe verte, et les pèlerins sont vêtus de vert et de jaune.

Passion 6701

 

Conclusion.

  Si le personnage du Christ présente une homogénéité de la couleur des vêtements (vert et rouge lie-de-vin) tout au long du cycle, et si ces deux couleurs sont reprise dans la Croix comme symbole de sang et de renouveau de la nature, souffrance-renaissance, Passion-Rédemption, si la couleur bleue est réservée au ciel et à quelques accessoires, ou si certaines couleurs semblent être attribuées à des apôtres (le rouge pour Pierre et Jean), il n'est pas possible de conclure à un emploi symbolique ou codifiée des couleurs utilisées, et le choix du verrier a sans-doute été dicté surtout par des choix artistiques, dans un panel assez limité de teintes.

 Il en résulte un  manque d'unité de ton, au profit d'une œuvre vivante, plus soucieuse ici peut-être de la crédibilité du récit que de l'élaboration d'une réflexion spirituelle ou théologique originale. Ce sera le rôle de la Passion typologique inspirée de Saint-Denis.


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Published by jean-yves cordier
19 mars 2014 3 19 /03 /mars /2014 00:01

 

Vitrail de Chartres : Grisaille du Miracle de saint Nicolas.


Voir aussi :

Vitrail de l'Annonciation de la cathédrale de Chartres.

Le vitrail de la Passion de la cathédrale de Chartres.

Le vitrail de l'arbre de Jessé de la cathédrale de Chartres.

Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église Saint-Pierre de Chartres.

Les Mois, le Zodiaque et le Temps de la cathédrale de Chartres: sculpture et vitrail.

. La Vierge allaitante de l'oculus des vitraux de Chartres.

... et sur saint Nicolas, voir :

La légende de saint Nicolas dans les vitraux de la cathédrale de Sées (Orne).


 

Baie n° 10 du chœur coté sud.

Lancette à arc brisé de 8, 97 m de haut et 2,22 m de large.

 Elle occupe le centre de la Chapelle dite des Confesseurs, l'une des chapelles rayonnantes du chœur, entre le vitrail de la Vie de saint Sylvestre (baie 8) et celui de  la Vie de Saint Rémi (Baie 12). Elle appartient donc aux 11 baies qui, sur les 37 du chœur, ont vu leur ancien vitrail coloré du XIIIe siècle — le chœur a été vitré entre 1210 et 1235 — remplacé par du verre incolore, selon le goût du jour, mais aussi pour faire entrer plus de lumière dans le déambulatoire.

  Elle date donc de la fin du 13e siècle, époque où a été créé  le réseau de losanges, de cercles et de quadrilobes entrelacés, dessiné à la grisaille sombre, et les losanges et ronds en verres de couleur jaune et rouge. La rigueur de ce réseau géométrique est corrigé par la souplesse des sinuosités de tiges qui courent en se divisant en feuilles à trois folioles pointues. Le vitrail est encadré d'une bordure de château de Castille jaune sur fond rouge.

  Plus d'un siècle plus tard, exactement en mars 1416, ce vitrail incolore a été enrichi par Jehan Perier d'une scène de la Légende de saint Nicolas. Ce même Jean Perier, l'un des six ouvriers jurés de la fabrique, faisait partie de, ou plutôt  dirigeait l'équipe de verriers chargés de la restauration générale au cours de laquelle on enleva les cadres de bois où avaient été placés les vitraux à l'origine, et qui s'appliquèrent à suivre le style d'origine. C'est à l'occasion de sa restauration que ce vitrail a reçu cette scène de saint Nicolas.

En 1415, il travaillait à doter la nouvelle "librairie" ou bibliothèque capitulaire de la cathédrale de vitraux ( certains sont actuellement dans la chapelle Saint Piat), et aux vitraux de la chambre des comptes. Mais c'est à la semaine du 29 mars 1416 du livre des comptes que figure la mention "A Jehan Perier, verrier, pour six jours qu'il a œuvré tant es panneaux de la verrière blanche de la chapelle des Confesseurs comme à pourtrayre une ymage de saint Nicolas pour mectre en la dicte verrière, pour jour 4 s[ols]". Le "pourtrayt" est le modèle petit format, mais Jehan Périer exécuta certainement aussi "l'ymage", puisque c'est elle que nous voyons aujourd'hui, au tiers inférieur de la grisaille.

En 1921, la baie a été restauré par l'atelier Gaudin  qui recréa deux des enfants situés à l'intérieur du coffre et qui avaient  disparus, et qui reprit des parties inférieures. Une nouvelle restauration eut lieu en 1994.

 

Après une présentation du vitrail et sa description, suivie d' une étude du culte de saint Nicolas, je procéderai à une réflexion sur la nouveauté de ce vitrail consacré à l'"hagiotypie" (sic!) et à la renaissance.

 


                  Baie-10-grisaille-saint-Nicolas-6757c.jpg

 

I. Description. 

 

La scène, reconnaissable immédiatement par tous, est celle du miracle de saint Nicolas ressuscitant les enfants mis au saloir. 

Très simple, elle n'occupe que trois panneaux et, dépourvue de tout arrière-plan et de tout décor, ne donne à voir que l'essentiel : le saint, le saloir, et les enfants qui en sortent. 

Saint Nicolas, évêque de Myre, porte une aube (à large revers doré brodé de fleurs), une dalmatique rouge dont on ne voit que la partie basse et l'encolure dorée aux broderies d'argent ; par-dessus, une chasuble bleue où un orfroi jaune d'or trace le motif courant d'une bande médiane que croise un V scapulaire. Si on regarde avec attention cet orfroi (cliquez sur l'image  pour agrandir), on y lit des lettres brodées formant le nom Nicolaus répété plusieurs fois.

On remarque aussi la mitre orfrayée en soie blanche brodée d'or.

Les gants pontificaux sont caractéristiques par leur élargissement au poignet, qui se termine par un gland. Ils portaient au Moyen-Âge d'un cercle d'or, d'argent ou de bronze émaillé sur la face dorsale, motif ici rehaussé au jaune d'argent, et qui fut remplacé plus tard par une broderie en forme de croix. Ce qui m'intéresse, c'est que ce motif semble ici fixé par un ruban ou une chaîne qui entoure le pouce au niveau de la commissure, et rejoint peut-être la face cubitale de la main en faisant le tour. Or, j'avais remarqué le même dispositif à Malestroit, sur le vitrail de saint Gilles et saint Nicolas, vitrail contemporain des panneaux de Chartres et datés du premier quart du XVe siècle (la rouelle d'or y est particulièrement nette sur la main gauche):

L'église Saint-Gilles de Malestroit (56). Vitrail de saint Gilles et saint Nicolas.  :

vitrail-legende-st-gilles 4813c

     Voir aussi (cliquez)

vitrail-legende-st-gilles 4812v vitrail-legende-st-gilles 4815cc

  Voir aussi vitrail de Vézelise en Lorraine (XVIe).

 

Le manipule (à l'avant-bras gauche), en soie d'or  (elle est d'ordinaire du même tissu et de la même couleur que la chasuble !), elle est brodée de croix en forme de svastikas sinistrogyre (ou sauvastikas), tracés sans-doute en équivalent de motifs grecs ou byzantins.

Enfin la crosse pontificale, à extrémité pointue, se compose de la hampe, du nœud puis de la douille en forme d'octogone conique fenestré et orné de fleuron, et enfin du crosseron. Celui-ci se courbe en une seule circonvolution, en laissant s'ouvrir une dizaine de crochets eux-mêmes hérissés d'épines et terminés par cinq pétales. La pointe finale du crosseron n'est elle-même qu'un crochet floral plus important que les autres. A l'intérieur de la volute, une figurine a été décrite comme le buste d'un évêque. La définition de ma photographie ne me permet de discerner qu'un baquet rectangulaire, aux quatre coins coiffés d'une sphère, tiré peut-être comme un chariot, et contenant une forme que je ne peux définir.

 Saint Nicolas se penche légèrement pour bénir les trois enfants, et les rendre à la vie. Les petits garçons, entièrement nus, mains jointes, se lèvent, et le premier enjambe déjà le coffre.  

 

                          Baie-10-grisaille-saint-Nicolas-6757v.jpg

 

 

 

  II. Étude du thème.

(Simple compilation)

  Si le sujet représenté est très simple à décrire et à comprendre, il offre néanmoins matière à de multiples réflexions. Car on évitera le piège de croire que les verrières sont des "livres d'images" pour les fidèles incultes, destinés proposer à leur dévotion des légendes édifiantes, aisées à comprendre, et séduisantes par le merveilleux des miracles. Au contraire, si le chapitre des chanoines chartrains fait le choix de ce motif, c'est qu'il s'impose non pas comme une manifestation de la foi des simples gens, mais comme une déclaration théologique inséré dans un programme iconographique. Il en va ainsi depuis les premiers vitraux, ceux de Suger à Saint-Denis. Et une autre erreur serait de penser que l'Église accueille ces histoires en toute crédulité et sans réticence, si elle ne peut y développer une quadruple lecture, certes littérale, mais surtout allégorique, morale, et anagogique. Au contraire, on peut soupçonner qu'elle a favorisé certains épisodes d'apparence naïve parce qu'il servent de support aux thèses théologiques qu'elle souhaite défendre.

  Une autre raison d'illustrer par des verrières une hagiographie est de favoriser le culte de reliques détenues par la cathédrale, et cette raison, déjà présente à Saint-Denis est opérante à Chartres ; mais elle peut sans-doute être écartée concernant saint Nicolas.

1. L'évolution de la Légende de saint Nicolas .

 Le miracle du saloir est lié à une mauvaise interprétation d'une représentation d'un épisode de la légende, où saint Nicolas sauve la vie à trois officiers : 

   a) les trois officiers, et les trois princes Népotien, Ours et Apilion.

L' épisode des enfants dans le saloir ne figure pas dans la première hagiographie de Michel l'Archimandrite (VIIIe), ni dans celle de saint Méthode (début IXe), ni dans la compilation de Siméon de Métaphraste ( légendaire en grec du Xe siècle), ni dans les traductions latines de la Légende dorée de Jacques de Voragine entre 1261 et 1266, traduite en français par Jean de Vignay en 1342. Mais il y est raconté l'histoire suivante :  

 

 

Certaine nation s’étant révoltée contre l’empire romain, l’empereur envoya contre elle trois princes, Népotien, Ours, et Apilion. Ceux-ci, arrêtés en chemin par un vent contraire, firent relâche dans un port du diocèse de saint Nicolas. Et le saint les invita à dîner chez lui, voulant préserver son peuple de leurs rapines. Or, en l’absence du saint, le consul, s’étant laissé corrompre à prix d’argent, avait condamné à mort trois soldats innocents. Dès que le saint l’apprit, il pria ses hôtes de l’accompagner, et, accourant avec eux sur le lieu où devait se faire l’exécution, il trouva les trois soldats déjà à genoux et la face voilée, et le bourreau brandissant déjà son épée au-dessus de leurs têtes. Aussitôt Nicolas, enflammé de zèle, s’élance bravement sur ce bourreau, lui arrache l’épée des mains, délie les trois innocents, et les emmène, sains et saufs, avec lui. Puis il court au prétoire du consul, et en force la porte, qui était fermée. Bientôt le consul vient le saluer avec empressement. Mais le saint lui dit, en le repoussant : « Ennemi de Dieu, prévaricateur de la loi, comment oses-tu nous regarder en face, tandis que tu as sur la conscience un crime si affreux ? » Et il l’accabla de reproches, mais, sur la prière des princes, et en présence de son repentir, il consentit à lui pardonner. Après quoi les messagers impériaux, ayant reçu sa bénédiction, poursuivirent leur route, et soumirent les révoltés sans effusion de sang ; et ils revinrent alors vers l’empereur, qui leur fit un accueil magnifique.

Mais quelques-uns des courtisans, jaloux de leur faveur, corrompirent le préfet impérial, qui, soudoyé par eux, accusa ces trois princes, devant son maître, du crime de lèse-majesté. Aussitôt l’empereur, affolé de colère, les fait mettre en prison et ordonne qu’on les tue, la nuit, sans les interroger. Informés par leur gardien du sort qui les attend, les trois princes déchirent leurs manteaux et gémissent amèrement ; mais soudain, l’un d’eux, à savoir Népotien, se rappelant que le bienheureux Nicolas a naguère sauvé de la mort, en leur présence, trois innocents, exhorte ses compagnons à invoquer son aide.

Et en effet, sur leur prière, saint Nicolas apparut cette nuit-là à l’empereur Constantin, lui disant : « Pourquoi as-tu fait arrêter injustement ces princes, et les as-tu condamnés à mort tandis qu’ils sont innocents ? Hâte-toi de te lever et fais-les remettre en liberté au plus vite ! Sinon, je prierai Dieu qu’il te suscite une guerre où tu succomberas, et tu seras livré en pâture aux bêtes ! » Et l’empereur : « Qui es-tu donc, toi qui, entrant la nuit dans mon palais, oses me parler ainsi ? » Et lui : « Je suis Nicolas, évêque de la ville de Myre. » Et le saint se montra de la même façon au préfet, qu’il épouvanta en lui disant : « Insensé, pourquoi as-tu consenti à la mise à mort de trois innocents ? Va vite travailler à les faire relâcher ! Sinon, ton corps sera mangé de vers et ta maison aussitôt détruite. » Et le préfet : « Qui es-tu donc, toi qui me fais de telles menaces ? » Et lui : « Sache, dit-il, que je suis Nicolas, évêque de la ville de Myre ! »

 

L’empereur et le préfet, s’éveillant, se firent part l’un à l’autre de leur songe, et s’empressèrent de mander les trois prisonniers. « Êtes-vous sorciers, leur demanda l’empereur pour nous tromper par de semblables visions ? » Ils répondirent qu’ils n’étaient point sorciers, et qu’ils étaient innocents du crime qu’on leur reprochait. Alors l’empereur : « Connaissez-vous, leur dit-il, un homme appelé Nicolas ? » Et eux, en entendant ce nom, levèrent les mains au ciel, et prièrent Dieu que, par le mérite de saint Nicolas, il les sauvât du péril où ils se trouvaient. Et lorsque l’empereur eut appris d’eux la vie et les miracles du saint, il leur dit : « Allez et remerciez Dieu, qui vous a sauvés sur la prière de ce Nicolas ! Mais rendez-lui compte de ma conduite, et portez-lui des présents de ma part ; et demandez-lui qu’il ne me fasse plus de menaces, mais qu’il prie Dieu pour moi et pour mon empire ! » Quelques jours après, les princes vinrent trouver le serviteur de Dieu, et, se prosternant devant lui, et l’appelant le véritable serviteur de Dieu, ils lui racontèrent en détail ce qui s’était passé. Et lui, levant les mains au ciel, il loua Dieu, et renvoya les trois princes chez eux, après les avoir bien instruits des vérités de la foi. (Traduction et adaptation Th de Wyzewa 1910)


b) les trois clercs.

Dans la Vie de saint Nicolas (v 1150-1175) de l'auteur du Roman de Brut, le normand Wace, chanoine de Bayeux, quatorze octosyllabes sont consacrés à un épisode où trois clercs

Treis clercs alouent a escole

—N'en ferai mie grant parole—

Li ostes par nuit les occist

Les cors musçat, l'avers en prist.

Seint Nicholas par Deu le sout

Sempres fu la si cum Deut plout.

Les clercs a l'ostes demandat

Nes pout celer si les mustrat

Seint Nicholas par sa preere

Mist les almes el cors arere.

Pur ceo qu'as clercs fit cel honur

Funt li clercs la feste a son jur

De ben lire et ben chanter

Et des miracles reciter.

(Trois clercs allaient à l'école, —je n'en ferai pas un long discours—l'hôtelier les tua la nuit, cacha leur corps, prit leur argent. Saint Nicolas l'apprit de Dieu...)

 C'est cette version qui est représentée sur le vitrail de la baie 39 de Chartres, du début du XIIIe siècle : les trois clercs, reconnaissables à leur tonsure, sont face à l'hôtelier armé d'une hache ; le panneau suivant le montre en train de les assassiner sous le regard de son épouse pendant leur sommeil, et le dernier montre saint Nicolas les ressuscitant alors qu'ils sont nus dans leur baquet de saumure ; l'épouse se jette aux pieds du saint et obtient le pardon.

C'est aussi sous son influence que les enluminures de la Légende dorée représentent trois personnages jeunes, nus et tonsurés, dans un tonneau ; leur petite taille relative (c'est le saint qui est grandi) leur donne l'apparence de petits enfants.

                          

Une hypothèse pour expliquer le glissement de contenu des légendes repose aussi sur le fait que la légende grecque mentionne trois soldats innocents sauvés de justesse de leur exécution. Le terme latin innocentes peut avoir été substitué à celui de pueri (enfants), avec le même sens que lorsque nous parlons du "massacre des saints innocents", enfants de moins de deux ans. 

 

c) Les trois étudiants.

Trois sources :

— Dans le manuscrit d'Hildesheim, en latin, vers 1100, (British Museum Add. MS 22414), ce sont des étudiants itinérants qui sont accueillis dans une auberge, dont l'hôtelier et son épouse s'accordent pour les tuer afin de voler leur argent. Saint Nicolas survient alors, demande qu'on lui serve de la viande fraîche, et, devant le refus du patron, l'accuse de l'assassinat des trois jeunes gens. Il obtient par ses prières la résurrection des étudiants et le pardon de cette faute.

—Le manuscrit de l'Abbaye de Fleury (MS 201 de la B.M d'Orléans), XIIe siècle contient quatre pièces en latin, destinées sans-doute à être en drame liturgique pendant l'office de nuit de la fête du saint, avec une notation musicale guidonienne.

 — un petit mystère latin (Secundum miraculum Sancti Nicholai), qui fait partie d’un recueil du XIIIe siècle intitulé Mysteria et Miracula ad scenam ordinata ; recueil provenant de l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire et publié par Monmerqué et Bouderie à la suite du Jus Sancti Nicolai de J. Bodel (Didot, 1834). 

 

d) les trois petits enfants. 

   Ce sujet évoque aujourd'hui à chacun  la complainte de Saint Nicolas :" Il était trois petits enfants / Qui s'en allaient glaner aux champs./ S'en vont au soir chez un boucher./ "Boucher, voudrais-tu nous loger ? : Entrez, entrez, petits enfants,/ Il y a de la place assurément." / Ils n'étaient pas sitôt entrés / Que le boucher les a tués, / Les a coupés en petits morceaux, / Mis au saloir comme pourceaux. "

 avec cette version :

Saint Nicolas au bout d'sept ans / Saint Nicolas vint dans ce champ. / "Boucher, voudrais-tu me loger ?" / Entrez, entrez, saint Nicolas, / Il y a d'la place, il n'en manque pas." / Il n'était pas sitôt entré, / Qu'il a demandé à souper. / Voulez-vous un morceau d'jambon ? / Je n'en veux pas il n'est pas bon. / Voulez-vous un morceau de veau ? / Je n'en veux pas il n'est pas beau ! / Du p'tit sale je veux avoir / Qu'il y a sept ans qu'est dans l'saloir. / Quand le boucher entendit cela, / Hors de sa porte il s'enfuya. / "Boucher, boucher, ne t'enfuis pas, / Repens-toi, Dieu te pardonn'ra." / Saint Nicolas posa trois doigts / Dessus le bord de ce saloir. / Le premier dit : "j'ai bien dormi ! " / Le second dit "et moi aussi!" / Et le troisième répondit : / "Je me croyais en paradis!"

Ce nouvel avatar de la légende est expliqué par certains par une mauvaise interprétation des représentations de la légende, les trois clercs, nus, plus petits que le saint qui est grandi par l'artiste pour souligner ses pouvoirs, finissant par ressembler par des petits enfants. Mais les lettrés de l'Église, qui connaissaient leurs sources grecques ou latines, n'auraient pas laisser se développer cette "erreur" — ou, ne l'ont pas suscitée —si elle n'avait pas servi un dessein théologique. C'est ce dernier dessein qu'il s'agirait de deviner.

 Source pour ce paragraphe : 

 Jean-François Mazet  Saint Nicolas, le boucher et les trois petits enfants: Biographie d'une légende L'Harmattan, 2010.

 

2. Un sujet ancien pour les vitraux.

  • Chœur de l'église de Civray-sur-Cher (Indre-et-Loire) v.1175.
  • Cathédrale de Bourges : XIIIe

Vitrail de Bourges

  • Cathédrale de Tours
  • Cathédrale de Sées (Normandie)
  • Cathédrale de Rouen, chapelle Saint-Jean
  • Cathédrale d’Auxerre,
  • Cathédrale du Mans
  • Église de Saint-Julien-du-Sault (Yonne)
  • Église Saint-Pierre de Dreux 
  • Église de Malestroit. L'église Saint-Gilles de Malestroit (56). Vitrail de saint Gilles et saint Nicolas.
  • Église Saint-Gengoult de Toul
  • Église Saint-Nicolas de Vézelise, en Lorraine,au XVI° siècle
  • Église Saint-Etienne de Beauvais.

 

3.  Un culte ancien à Chartres.


— Le culte de saint Nicolas était très développé au Moyen Age à Chartres où il était vénéré pour sa charité, ses miracles et la protection qu’il offrait aux étudiants. Une église Saint-Nicolas, près l'église saint-André, honorait ce culte à Chartres, jusqu'à sa démolition en 1756 (la Fontaine saint-Nicolas en témoigne).

— La vie de saint Nicolas  qui a été écrite en latin par Jean, diacre de l’église Saint-Janvier de Naples au IXe siècle, fut insérée dans les manuscrits liturgiques de l’Eglise de Chartres. 

— La seule homélie que l'on conserve de Pierre de Celles, évêque de Chartres en 1181-1183, est celle consacrée à saint Nicolas ; il y est présenté comme le modèle de celui qui jeûne dans l'attente de la Pâque et du Retour du Christ.

— Avant la baie 14 que nous étudions, deux verrières étaient déjà consacrées à saint Nicolas et en racontaient la vie : les baies 39 (sans-doute la plus ancienne, 1220-1225) et 29a (de 1225 ?), toutes les deux du coté nord et datant du XIIIe siècle.

— De même le tympan sculpté du portail sud de la cathédrale, sculpté entre 1205 et 1215, donne à voir un cycle de saint Nicolas dans le Portail de droite ou Portail des Confesseurs. On y trouve saint Nicolas à gauche, avec saint Ambroise et saint Silvestre, en face de saint Martin, évangélisateur de la Gaule, saint Jérôme, saint Grégoire le Grand. ce sont pour la plupart d’entre eux évêques des premiers siècles de l’Église.

—  Dans la chapelle Saint-Clément de la crypte subsiste une peinture murale échappée par miracle à la destruction, datée du XIIème ou XIIIème siècle. Elle met en scène six personnages nimbés, à des hauteurs différentes selon leur place sous la voûte. De gauche à droite on reconnaît Charlemagne assistant à la fameuse «messe de saint Gilles », puis un évêque, puis saint Pierre. Ensuite le quatrième et le plus haut en taille est saint Jacques bénissant, reconnaissable aux coquilles qui couvrent son manteau. Puis saint Nicolas et saint Clément.

On se souvient que le vitrail étudié ici, la baie 14, éclaire la Chapelle des Confesseurs, entre le vitrail de saint Silvestre et celui de saint Rémi.

4. Un programme iconographique ?

 

On nomme "Confesseur (de la foi)" dans l'Église ceux qui ont souffert au nom de leur foi sans être morts martyrs. Il est attribué à Nicolas car il a eut à souffrir de la dernière persécution*, et sa messe  suit le rituel des confesseurs pontifes.

*"Comme il prêchait à Myre la vérité de la foi chrétienne, contrairement à l’édit de Dioclétien et de Maximien, il fut arrêté par les satellites impériaux, emmené au loin et jeté en prison. Il y resta jusqu’à l’avènement de l’empereur Constantin, par l’ordre duquel il fut délivré de captivité".(Sixième leçon des Matines)

 

Le culte de saint Nicolas, d’abord spécial aux Grecs, passa en Occident à l’époque des Croisades. La fête entre au XIe siècle au calendrier Romain.. Sur la fin du XIe siècle, les gens de Bari en Sicile feignirent de posséder son corps, premièrement enseveli au mont Sion près de Myre, et dont ils alléguaient une prétendue translation. De Bari, en 1098, un croisé lorrain, seigneur de Varangeville, rapporta chez lui une phalange d’un doigt du corps saint : la relique, déposée dans une chapelle qui devint le sanctuaire de Saint-Nicolas-de-Port, attira un grand concours de pèlerins. Il fut proclamé  Patron du duché de Lorraine par les ducs en 1120 et c’est ainsi que le culte du saint se propagea en France, dans les Pays-Bas et dans l’Allemagne, 

 

Néanmoins, le Portail des Confesseurs et la Chapelle des Confesseurs semblent être, à Chartres, dédiés plutôt à ceux qui édifièrent la doctrine de la Foiet luttèrent contre le paganisme et l'hérésie, et ce serait pour sa participation au Concile de Nicée et, donc, à l'élaboration du Credo et du dogme de la Trinité que Nicolas y figurerait. Cette participation était affirmée par l'Église (avant 1960) : "Il revint à Myre, puis se rendit au concile de Nicée, et, avec les trois cent dix-huit Pères de cette assemblée, y condamna l’hérésie arienne". Néanmoins, les membres de l'épiscopat présents à Nicée sont parfaitement connus par les textes de l'époque, et Nicolas n'y figurait pas.


Selon une étude mis en ligne sur le site du Centre International du Vitrail, :

 

   La fenêtre d'axe est dédiée à saint Nicolas (baie 14), qui a reçu l'hommage de deux autres baies (39 et 29a). Il faut d'abord s'interroger sur les raisons possibles de ces doublons. Nous l'avons vu, les vitraux hagiographiques ont moins pour fonctions de raconter une histoire que de rappeler la place théologique des saints dans ce qu'il est convenu d'appeler "l'économie du salut". Or chaque saint peut avoir, évidemment, plusieurs dimensions théologiques. Dans la nef, l'image de Nicolas est utilisée en tant que précurseur de la Passion, les prédicateurs faisant de lui l'exemple du jeûne dans l'attente de la Pâque. Dans la travée droite du choeur, au nord, Nicolas est le symbole de l'évêque protégeant le peuple contre le mal. Le voici ici dans sa fonction de chef de file des Confesseurs, ceux à qui l'Eglise reconnaît un rôle déterminant dans la construction de la foi. La tradition fait naître saint Nicolas à l'époque de Constantin et lui donne un rôle décisif dans la définition de la Trinité au Concile de Nicée: il est le garant du Credo trinitaire. Il s'agit certes d'une légende, mais ce qui importe ici est bien la relecture qui est faite de cette figure au Moyen Age et la place que les théologiens lui accordent dans la géographie du salut. En faisant graviter saint Remi et Clovis, sainte Catherine, saint Thomas Becket et Louis VII autour de Nicolas on montre qu'ensemble ces rois occidentaux, héritiers de Constan

 

La chapelle rayonnante méridionale continue ce discours d'ecclésiologie politique. Elle montre en effet comment le Credo qui soude l'Eglise s'est construit grâce aux grandes figures monarchiques du passé et de l'histoire contemporaine. La verrière consacrée à Clovis à travers saint Remi et sainte Clotilde (baie 12) reprend l'idée de l'Occident héritier de l'empire chrétien de Constantin: Clovis comme Charlemagne est traditionnellement appelé "novus Constantinus", Charlemagne étant aussi considéré au Moyen Age comme le "nouveau Clovis". Comme sainte Clotilde avait consacré sa vie à la conversion du roi Remi, de même sainte Catherine a eu la mission de la conversion d'un couple royal: la fenêtre qui lui est consacrée ainsi qu'à sainte Marguerite (baie 16) est symétrique de celle de Clovis. Pour clore cette série politique, on trouve enfin Thomas Becket (baie 18). Son histoire récente met en scène Louis VII, dont on oppose l'attitude constructive envers l'Eglise à celle de l'ennemi Henri II Plantagenêt.

 

L'iconographie de cette chapelle dite des Confesseurs met donc en images une certaine idée du rôle des rois dans la marche de la Chrétienté et de l'alliance politique entre ce qu'on appelle le Regnum et le Sacerdotum, le pouvoir temporel et le pouvoir sacerdotal, sujet brûlant d'actualité

 

 

 

 

 

 

 III. Interprétation personnelle.

       Il m'a fallu tout ce parcours de lecture pour comprendre ce qui, pourtant, me sautait aux yeux : l'originalité de ce vitrail, la révolution qu'il introduit, repose sur le fait qu'il est composé de seulement trois panneaux.

  1. Passage de l'hagiographie à l'hagiotype.

Nous passons des verrières 39 et 29a du début du XIIIe siècle  qui comptent respectivement 20 et 27 panneaux, et de multiples scènes de la Vie du saint, à ce vitrail blanc aux deux ensembles colorés, le saint à droite, le saloir et ses trois occupants à gauche.

Autrement dit, nous passons d'un récit d'une vie de saint (naissance, enfance, intronisation, miracles) peu ou pas lisible de loin (le miracle des trois clercs, par exemple, est au sommet du vitrail 29, invisible sans jumelles) aux personnages d'une vingtaine de centimètres, à un portrait d'un saint, d'un mètre de haut peut-être, parfaitement visible, et accompagné de son attribut distinctif, le saloir aux enfants.

Abandonnant les péripéties édifiantes mais complexes  d'une bande dessinée mettant en image la Légende dorée, l'artiste choisit de dresser l'icône majestueuse d'un saint, dans le passage de l'hagiographie (vie de saint) à ce que je vais nommer l'hagiotype, épure simplifié et archétypale du saint, telle qu'elle va désormais se fixer et être propager sous forme de statues et d'images  dans chaque paroisse. Cette représentation fait désormais fonction de logo, et chacun, même s'il ignore tout de la vie de saint Nicolas, identifiera le saint par son baquet aux enfants. Ce baquet qui n'était qu'un simple détail de l'histoire, et dont l'aspect pouvait varier, devient, définitivement, mais sans que rien ne l'indique dans l'image, un "saloir" en forme de tonneau ou de charnier : de meuble, il devient attribut.

C'est, "à n'en point douter", une sacrée révolution dans l'iconographie.

2. De la culpabilité et du pardon vers le thème de la renaissance.

  Dans cette simplification, les personnages secondaires disparaissent, comme l'aubergiste armé de sa hache (baie 29a) et sa femme allongée au pied de Nicolas pour l'implorer ; cette disparition est lourde de sens, puisque le thème du péché capital (le meurtre), de la culpabilité et du pardon, typiquement médiévaux, est ainsi délaissé. De même, le mobile du crime, le vol de l'argent des clercs, n'apparaît plus.

   Les éléments dramatiques de la légende, le dépeçage, le thème même de la mort disparaissent aussi. Le vitrail ne montre que le saint traçant une bénédiction salvatrice, et trois "enfants" nus, gaillards, sortant du baquet comme s'ils sortaient de leur lit ; "innocents comme l'enfant qui vient de naître", ignorant tout du drame auquel ils échappent. C'est moins à une résurrection que nous assistons (puisque rien n'indique une mort préalable) qu'à un frais éveil sous l'influence du saint. 

   Comme les "sept dormants d'Éphèse", les trois jeunes bénéficient, par l'onction ou la bénédiction de Nicolas, d'un frais et printanier éveil à la vie nouvelle. 

On notera que cette illustration du thème de la renaissance spirituelle survient en 1416, dans la Première Renaissance, au moment où les chanoines choisissaient pour leur librairie des vitraux représentant les allégories des quatre arts libéraux, la Dialectique, l'Arithmétique, la Rhétorique et la Géométrie, au moment où les textes de l'antiquité gréco-latines étaient redécouverts, etc.

  Il est probable que les commanditaires de ce Saint Nicolas de Chartres aient choisis délibérément de dégager l'ancienne figure de saint Nicolas d'un légendaire complexe pour en faire une figure claire de l'Église dispensant aux fidèles, par les Sacrements et par l'enseignement, l'éveil spirituel.

 

 

 

 

      Sources et liens.

Voir les travaux (non consultés) de  Georges Bonnebas, diplômé de l’École des Hautes Études en Sciences sociales, historien, professeur agrégé de l’université et qui dispense sur le sujet des conférences au Centre International du vitrail à Chartres.

 

 

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Published by jean-yves cordier
17 mars 2014 1 17 /03 /mars /2014 09:41

La chapelle Notre-Dame de la Clarté à Combrit.

 

INTRODUCTION.

(D'après le document affiché dans la chapelle, et diverses sources citées infra).

Il s'agit d'une chapelle du XVI-XVIIe siècle en partie reconstruite en 1905 et dédiée initialement à saint Vennec, le frère de saint Guénolé, puis, depuis le XVIIe siècle, à Itron Varia ar Sklerded, Notre-Dame de la Clarté. Elle se composait primitivement d'un chœur à deux travées, avec bas-cotés, puis d'une nef. Un clocheton devait initialement surmonter le grand arc brisé central.

Comme l'église paroissiale et les autres chapelles, celle-ci du perdre son clocher en 1675 sur décision du Duc de Chaulnes après que le propriétaire du Cosquer, Nicolas Euzeniou ait été pendu à une fenêtre de son manoir lors de la révolte du papier timbré (Abgrall)

Elle fut vendue à la Révolution comme bien national à un dénommé Le Bour et associés.

Rendue au culte, elle fut partiellement détruite en 1824 par un cierge allumé près de la statue de la Vierge. Elle perdit alors sa voûte aux lambris peints, et en 1856 le recteur Jean-Louis Tilly n'y reconnaissait plus qu'une Annonciation.

Les inscriptions lapidaires aujourd'hui disparues ont été relevées :

—sur le linteau de la porte latérale :1761. Mre J.C. RIOU recteur de Combrit Paul K[er]viel fabrique.

—sur le linteau de la fenêtre de sacristie : G. Le Goff curé.

En 1905, la nef qui tombait en ruine fut refaite et agrandie de manière à offrir toute la largeur du chœur et de ses collatéraux, mais en gardant le portail gothique et le clocher. Les travaux ont été bénis lors du pardon le 8 septembre 1905.

Les fenêtres sont de style flamboyant ; le bénitier près de l'entrée est une vasque gallo-romaine du Ier siècle, on y voit encore des traces d'ocre.

 

 Sur le pignon se voit un écusson soutenu par deux griffons ou deux sauvages  portant l’aigle impériale éployée aux armes de Kerlazret , seigneur du Cosquer, d'azur à l'aigle esployé d'or.

La base du clocher est timbré d'un écu   D'argent au lévrier de sable, colleté d'or, surmonté d'un grêlier de sable, enguiché, lié et virolé d'or aux armes de Penmorvan de Penfoul , paroisse de Bodivit. Voir aussi ces armoiries à Saint-Nonna de Penmarc'h sur le vitrail et sculpté sur le mur : Les vitraux de l'église Saint-Nonna de Penmarc'h (29). Geoffroy de Penmorvan (v.1446) possédait autrefois sur la paroisse le manoir de Roscanvel (Abgrall 1906) et en 1422 Riou de Penmorvan faisait aveu de biens à Penanquoet en Combrit et du moulin Penmorvan sur l'eau du Guignil en Combrit. (Hervé Torchet).

 

La chapelle a été depuis longtemps célèbre et très fréquentée lors de son pardon par les aveugles, en raison des pouvoirs de sa fontaine de dévotion. Les pèlerins viennent ici de très loin, car la fontaine et les prières en ce lieu sont réputées guérir tous les malades des yeux et même les aveugles, et le recteur M. Tilly écrivait en 1856  "Il y a une fontaine qui, pendant les deux jours du pardon, est littéralement mise à sec par les pèlerins ; ils en boivent l’eau, en font couler entre leurs épaules et sur leurs poitrines et dans leurs manches de chemise "

 "Le grand Pardon annuel a lieu le dimanche dans l’octave du 8 septembre, ce pardon très fréquenté a lieu le même jour que celui de Kerdévot en Ergué-Gabéric et, naguère celui de N.D. d’Izel-Vor en l’église paroissiale de la Forêt-Fouesnant, aujourd’hui transféré au 15 Août. C’est ce que l’on appelait Pardon an teir Vari, le Pèlerinage des trois Marie, De nombreux pèlerins tenaient à visiter en ce jour les trois sanctuaires, assistant dans l’un à l’office matinale, dans un autre la Grand’messe, aux vêpres dans le troisième Les Chapelles ou églises dédiées à la Sainte-Vierge sous le vocable de N.D. de la Clarté sont au nombre de quatre dans notre diocèse : Combrit, Beuzec-Cap-Sizun, Plonévez-Porzay et Querrien, dans les Côtes d’Armor on connaît la chapelle monumentale de la Clarté en Perros- Guirec, dominant les rochers fantastiques de Ploumanac’h."

 

 


LES VITRAUX.

Les cartons sont dus à une artiste locale, fille du peintre Jules Simon de Sainte-Marine, Pauline Simon de la Jarrige (1909-1991).

 

Maîtresse-vitre : Notre-Dame de la Clarté 1943.

La maîtresse-vitre a été réalisée par le verrier Mazard-Lecourt. Le maître-verrier Léon Lecourt avait ouvert son atelier à Vanves en 1900 (23 rue Henri-Martin), repris par son gendre Clément Mazard (1871-1951). 

Pauline de la Jarrige, qui avait déjà réalisé des vitraux sur le thème de la Passion pour l'église Saint-Tugdual de Combrit en 1935, fut sollicitée par le recteur l'abbé Rozuel pour un vitrail en l'honneur de N.D. de la Clarté.


Notre-Dame-de-la-Clarte 2516c

 

La baie 0 est formée de quatre lancettes de trois panneaux et d'un tympan de 3 mouchettes et trois écoinçons. 

Le tympan est occupé par la colombe de l'Esprit-Saint et par quatre anges portant respectivement la lune et le soleil symboles de la Clarté , les Tables de la Loi et l'Eucharistie (ciboire).

Les lancettes  forment une seule scène représentant une procession de pèlerinage un jour de pardon, et la narration d'un miracle survenu à cette occasion à un fermier, Guillaume Grall.

Notre-Dame-de-la-Clarte 2511c


 

La verrière peut se décrire en trois parties :

en bas le miracle de Guillaume Grall en 1891.

Ce fermier d'Elliant, père de dix enfants et à la tête d'une exploitation prospère, était déjà borgne mais il perd désormais la vision de l'autre œil ; il promet à Notre-Dame de la Clarté, dont le nom indique bien les pouvoirs, de vendre Jeannette, sa jument blanche et d'en distribuer la valeur aux pauvres s'il guérit. Le jour du pardon, l'eau de la fontaine lui redonne la vue. Mais, rentré chez lui, il ne peut se résoudre à se séparer de sa belle jument et il vend à la place un autre cheval : il perd rapidement la vue à nouveau. Convaincu de son erreur, il refait le pèlerinage l’année suivante et formule la même promesse. Le miracle se reproduisit, Ayant compris la leçon il vendit cette fois-ci sa belle jument blanche et distribua l’argent aux malheureux. Un siècle plus tard deux cents des descendants commémorèrent cette guérison. 

Il s'agit sans-doute de Guillaume GRALL (né le 11 juillet 1847 à Elliant)-cultivateur , marié le 26.07.1871 à Marguerite Isabelle QUEMERE (née en 1850 à Elliant )  Son frère aîné serait Allan (Alain) GRALL (né en 1823 à Elliant ) -cultivateur marié à Marie Jeanne LE QUEINNEC (née à Elliant).  On signale aussi un Guillaume GRALL né à Elliant le 4 juillet 1872, et un autre Guillaume, GRALL  né le 18/12/1792 à Elliant et lui-même fils de Guillaume Grall.

 


On voit  Guillaume, accompagné d'un homme plus âgé (son frère Alain) en bagou bras, sabots, gilet et chupenn, tenant respectueusement son chapeau de feutre dans la main. Guillaume, à genoux, en pantalon, tient un chapelet.

Devant lui, un groupe de sept aveugles se dirigent vers la fontaine de guérison, où un ange les accueille et les incitent à boire ou à se frotter les yeux avec l'eau du bassin. Chacun implore la Vierge : Itron Varia ar Sklaerded, Klevit mouez ho bugale…, Notre-Dame de La Clarté, écoute la voix de tes enfants*.

Cette scène se déroule dans la lumière bleu-nuit du petit matin, alors que les étoiles brillent encore dans le ciel.

La scène du dessus se passe en plein jour, elle représente la procession de pèlerinage qui sort de la chapelle, menée par le clergé et les porteurs de bannières. On reconnaît le recteur en soutane et surplis, son vicaire, puis, derrière, portant une statue de la Vierge sur un brancard, un groupe de femmes en costume rouge vif, coiffe, tablier blanc et or.

Au premier plan, sous une grande banderole KLEVIT MOUEZ  HO PUGALE (Entendez la voix de vos enfants) tenue par des anges, des paroissiens prient la Vierge, habillés de leur plus beau costume de fête, alors que Guillaume Grall lève ses yeux guéris vers la sainte Vierge en menant sa belle jument.

La partie haute du vitrail est occupée par Notre Dame de la Clarté et son Fils, et par ses anges en robe rouge.

* Ce sont les paroles du cantique du Pardon :

 Itron Varia ar Sklerdet Klevit mouez ho Pugale

Hed hor Buhez Mamm benniget, Hon diwallit noz ha de !

Chapel ar Skeridet zo brudet Dre ar burzugou dispar

A ra ar Werch'ez benniget E-Kenver an nep he har !

Notre Dame de la Clarté, Entendez la voix de vos enfants

 En nos vies , Mère bénie, protégez-nous jour et nuit !

La chapelle de la Clarté est bien estimée à cause des merveilles sans égales

 Que fait la Vierge bénie envers celui qui l'aime !

 

      Nota bene : j'ai déjà eu l'occasion de décrire une scène semblable, précisément à Elliant, et à y décrire le fameux costume Melenig ("jaunet") que porte ici Guillaume Grall : voir : Costumes bretons d'Elliant : vitrail et statues. 

 

 

 En 1976, la Nativité  et la Descente de croix furent commandés à Pauline de la Jarrige par l’abbé Joseph Guellec et offerts par la famille Kerrès-Cabon pour la chapelle de La Clarté.

Chapelle latérale sud : La Descente de croix : 1977.

Maître verrier Michel Durand ( ce successeur de Max Ingrand était installé à Orly 19-21 avenue des Martyrs -de-Chateaubriand).


                    Notre-Dame-de-la-Clarte 2513c

 

 

Chapelle latérale nord : La Nativité 1979.

                        Notre-Dame-de-la-Clarte 2512c

 

Dans la nef, quatre autres verrières de Pauline de la Jarrige datent de 1984 et sont consacrées aux Saisons.


                            LA STATUAIRE.

NOTRE-DAME de la CLARTÉ.

Statue en bois polychrome du XVIIIe siècle dans le style des ateliers de la Marine royale de Brest.

Hauteur : 1,57 m.

                             Notre-Dame-de-la-Clarte 2520c


SAINT VENNEC ou GUENNOC

en Abbé. XVIe siècle. H = 1,38 m. Un hameau voisin porte encore le nom de Saint-Vennec.

 Fils de sainte Gwenn, dite « aux trois mamelles », car elle allaita simultanément ses trois jeunes enfants, il est le frère de saint Guénolé et le jumeau de saint Jacut. Ce saint breton du VIe siècle, appelé aussi Gwenneg, .aurait été le deuxième évêque de Quimper.

Présenté ici en abbé mitré et crossé, saint Vennec est le successeur de saint Corentin, comme évêque, à la tête du diocèse de Cornouaille. Cette représentation d'inspiration locale est en contradiction avec un autre récit de la vie du saint qui en fait un soldat : voir  Vierges allaitantes V : Saint-Venec à Briec : sainte Gwen Trois-mamelles et ses fils

                    Notre-Dame-de-la-Clarte 2518c

 


SAINT ALAR (Saint ÉLOI) 

début du XVIe siècle. Un fer à cheval fixé à ses pieds rappelle qu'il est invoqué pour protéger la santé des chevaux. Il est représenté en évêque avec crosse, mitre, chape orfroyée à fermail, gants, pantoufles. Le bâton pastoral n'est  pas  d'origine, mais porte, au -dessus de la douille qu'empoigne le prélat, un nœud sphérique orné de gemmes (émeraudes et rubis) avant de se conclure en un crosseron à la volute dépouillée.

 

                             Notre-Dame-de-la-Clarte 2522v


SAINT URNEL (SAINT SATURNIN)

XVIe siècle. H = 1,10 m. Bloc monolithique.  Selon la légende bretonne, saint Urnel, né près de Locronan, aurait été transporté en Palestine où il aurait aidé le Christ lors de son baptême dans le Jourdain en tenant sa tunique. Puis il aurait repris le même mode de transport pour son retour auprès de sainte Anne-la-Palud. Cette légende est la version locale de celle de saint Saturnin de Toulouse. Saint Saturnin est, d'après la Légende dorée, un disciple de Jean-Baptiste et le porte-tunique lors du baptême du Christ. Il est est parfois pris pour un ange aptère.

Voir son homologue dans la chapelle de Tronoën : Vierges couchées (4) : calvaire de Tronoën à saint-Jean-Trolimon (29). avec plus de détails sur la légende.

                                   Notre-Dame-de-la-Clarte 2532c

 


SANT BASTIAN : SAINT SEBASTIEN.

XVIIIe siècle 

                           Notre-Dame-de-la-Clarte 2543c

SANT LAORANZ : SAINT LAURENT.

XVIIIe ; en diacre portant le manipule ; a perdu son grill.

                        Notre-Dame-de-la-Clarte 2548v


LES BANNIÈRES.

 

      Elles datent peut-être toutes de la première moitié du XXe siècle. Chacune est montée sur sa traverse horizontale glissée dans un gousset et dont les extrémités sont protégées par des gros pommeaux de bois doré. Des cordelières en passementerie y sont fixées, qui permettent aux acolytes du porteur d'orienter la toile selon le vent. Le mât ou hampe mesure près de quatre mètres.

 Bannière Itron varia a Scleder / Notre-Dame de la Clarté.

Velours bleu, bord inférieur à lambrequin frangé de cannetilles, broderie de fond comportant quatre fleurs et deux rinceaux liés par un ruban, inscription ITRON VARIA A SCLERDER.P.E. en tissu rapporté cousu, motif central en patchwork de quatre étoffes de soie ou satin (rose, bleu, blanc et écru) surpiquées, visages peints.

                          Notre-Dame-de-la-Clarte 2541c

 

 

 

 

Bannière du Sacré-Cœur.

Velours rouge, bord inférieur à lambrequin de trois festons, encadrement par entrelacs d'une tresse de fils d'or, rinceau aux fleurs soulignées par des paillettes,  tresse dessinant un double rectangle recevant 32 pastilles dorées, et timbré de quatre fleurs de lys, ovale en zig-zag enrichi de paillons, motif central rapporté en tissu peint et nuage surpiqué.

                          Notre-Dame-de-la-Clarte 2545c

 

Bannière de Saint Roch.

Sancte Roche Ora pro nobis. Saint Roch, protecteur de la peste et autres épidémies rassemblées sous le nom de "pestes", montre son célèbre bubon de la cuisse (droite, ici : il varie régulièrement). Il est en tenue de pèlerin, comportant le chapeau en cloche, les coquilles cousues sur la pèlerine (avec deux bourdonnets en X), le bourdon auquel est noué la calebasse qui fait office de gourde, et le bon chien de Roch, son "Roquet" qui ne comprend pas d'avoir donné son nom à tous les "petits chiens hargneux aboyant de façon intempestive", alors qu'il a nourri chaque jour son maître d'un pain des anges miraculeux. 

                            Notre-Dame-de-la-Clarte 2544v

 

 

Bannière de saint Georges.

      Cette œuvre, réalisée peut-être par les religieuses du Carmel de Morlaix, expertes dans ces "peintures à l'aiguille", a amené sœur Angélique ou sœur Thérèse à choisir un beau velours vert de 1,30 m de large, à le border d'une large frange de cannetille d'or, et à y former un gousset pour introduire la traverse en bois. Elle a renoncé à façonner la partie inférieure en lambrequin découpé en trois festons, comme elle l'avait fait pour la bannière de saint Roch pour mieux dissimuler sous des pompons de passementerie plissée  les trois clochettes qui se révéleront lors des processions, et pour améliorer sa tenue au vent. Pour son Saint-Georges, elle fait courir sur l'encadrement un simple galon doré avant de broder au fil d'or et d'argent les fleurons (cinq pétales où un fil noir figure les étamines, deux feuilles) et les rameaux garnis de boutons floraux, puis de choisir une soie fine pour représenter ce glorieux chevalier en armure que ses plus beaux rêves ne lui offrent pas.

   Elle a disposé devant elle les échevettes de Soie d'Alger, dont Mère Supérieure  dit qu'elle ne venait pas d'Algérie, mais d'un procédé de fabrication propre à la Maison "Au ver à Soie" (1820). Le catalogue lui propose 2688 coloris de Soie d'Alger, et 780 coloris de Soie à coudre ( la Soie 1003) ou 365 coloris de Soie Perlée sans compter la Soie 1302 "fil à gant" et le cordonnet Schape !

  Pendant qu'elle brode, elle prie et pense à Notre Seigneur, mais ses yeux se posent aussi machinalement sur la boite qu'elle a relue cent fois :

FABRIQUE DE SOIES TEINTES ET ÉCRUES

              AU VER A SOIE

23, Rue Turbigo, 23

                     Paris

Spécialités de Soie d'Alger, Soie Ovale, Soie de Chine, pour la Tapisserie.

Soie à Tricoter.

Cordonnet anglais Mi-tressé Mi-perlé.

Au centre de l'étiquette, une chenille blanche et dodue s'étend langoureusement sur une feuille de mûrier qu'elle grignote comme par caprice, princesse oisive en son sofa...

                                        

 

Mais finalement, parce que l'atelier a laissé s'accumuler le retard, elle se contente de peindre sur la soie les contours du beau cheval blanc et du dragon et d'en rehausser le dessin par des couleurs pastels, bleu, rose et jaune.

Et parce qu'elle a vidé toute sa boite de paillettes, de paillons et de perles pour son Saint-Roch, ou parce qu'elle estime que ce chevalier étincelle déjà de mille éclats, elle termine simplement son travail en brodant au point d'emplissage SAINT GEORGES en lettres d'or. 

                            Notre-Dame-de-la-Clarte 2539c

 

 

 

 

 

      N.B 1  L'Atelier d'Art sacré du Carmel de Morlaix a été en activité de 1850 à 1950, mais seule1 mon imagination a attribuée cette bannière à cet atelier.

N.B 2 : on n'attribuera aucune valeur à mes exercices de description, qui sont celles d'un parfait amateur incapable de distinguer un point de tige et un point passé empiétant, un point de chaînette d'un point de coté, et une couchure d'une guipure, mais soucieux de préserver la diversité de notre vocabulaire.


SOURCES ET LIENS :

Chanoines Jean-Marie Abgrall et Paul Peyron, "[Notices sur les paroisses] Combrit  ",Bulletin de la commission diocésaine d'histoire et d'archéologie, Quimper, 6e année, 1906, p. 113-134. 

Topic-topos :http://fr.topic-topos.com/enfants-chapelle-notre-dame-de-la-clarte-combrit

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Published by jean-yves cordier
16 mars 2014 7 16 /03 /mars /2014 21:58

      Église Saint-Gilles de Malestroit (56) : autres vitraux et mobilier.

 


Voir les premiers articles :

  Le vitrail de l'arbre de Jessé de l'église de Malestroit. Baie 12, 1530-1540.

L'église Saint-Gilles de Malestroit (56). Vitrail de saint Gilles et saint Nicolas. Baie 1, 1400-1425.

L'église Saint Gilles de Malestroit comporte deux autres verrières partiellement anciennes, des vitraux du XIXe et XXe siècles  par Laumonnier de Vannes , du XXe par Hucher du Mans ou par Hubert de sainte-Marie et un vitrail de 2012 créé par le maître verrier Henri Helmbold de Corps-Nuds.

Je ne les présenterai pas les 10 verrières, en voici une liste:

- Baie 0 : La Maîtresse-vitre, la Légende de Saint-Gilles. Cf infra.

- Baie 5 : La vie du Christ et de St Roch. Cf infra.

Baie 14 : 4 lancettes et tympan ajouré. H : 6,00m, L. 2,70m. Verrière  sur le thème de l'Eucharistie par l'atelier Laumonnier en 1902 (et quelques éléments du milieu du XVIe siècle : partie d'une Cène). Récolte de la manne dans le désert. Moïse frappe le rocher. Élie nourrit dans le désert. La Pâque en Égypte.

- Le Nouveau Testament, une verrière de la fin du 19e attribuée à l'atelier vannetais Laumonnier.

- La rosace de la Vierge et l'Enfant date du début du 20e et est attribuée à l'atelier vannetais Laumonnier.

- La Présentation au Temple réalisée par Ferdinant Laumonnier en 1893 à la demande de Marie Jumel de Malestroit.
- Baie 2, 6, 8, et 10 : Les Mystères du Rosaire, double vitrail contemporain de Hubert de Sainte Marie, de Quintin, placés en 1960, et 3 vitraux non-figuratifs, oeuvres du même maître-verrier / Atelier HSM dans les années 1970-1980 .

-Le vitrail de Henri Helmbold, qui prend place dans une baie anciennement murée.

 

 

 

 

 

 

 

 

Ière partie : Les autres vitraux de l'église de Malestroit.


I. Maîtresse-vitre ou Baie 0.

Avec cette grande verrière de six lancettes de cinq panneaux chacune, et au tympan formé d'une rosace, Hucher du Mans retrace la vie de saint Gilles. Cette œuvre de 60 m2 a été réalisée en 1900 à la demande du Curé Séveno.

A coté de l'atelier Lusson,  de réputation national, l'un des ateliers de vitrail du  Mans a été la "Fabrique du Carmel" créé en 1853, et auquel fut associé l'érudit local Eugène Hucher, ami d'enfance de l'évêque, Mgr Nanquette. Son activité se caractérisait par son style "néonazaréen". En 1875, Eugène et son fils Ferdinand Hucher rachêtent la fabrique du Carmel ; ils avaient leur atelier au 116 rue de la Mariette au Mans. Ferdinand poursuivit l'activité à la mort de son père en 1889 jusqu'à la fermeture de l'atelier en 1903

Je trouve aussi ces données :

  • Hucher Eugène Frédéric Ferdinand (1815-1889), maître verrier au Mans, né à Sarrelouis (Prusse) en 1815, directeur de la fabrique de vitraux peints du Carmel au Mans, conservateur du Musée d’Archéologie de la ville du Mans (de 1863 à 1889), président honoraire de la SHAM, membre non résident du comité des travaux historiques près le ministre de l’instruction publique, inspecteur de la Société française d’Archéologie, chevalier de la légion d’honneur, de Saint Sylvestre de Rome, de Léopold Ier de Belgique, mort à Pontlieue au Mans en 1889.

Le vitrail de Malestroit est donc l'œuvre de Ferdinand Hucher.

                        Baie-o-moderne-Huchet 7697v

      Faut-il apprécier cette pieuse reconstitution en style "troubadour" ? Elle reprend en les copiant les détails de la Baie 1, cette précieuse et sobre Verrière des Vie de saint Gilles et de saint Nicolas des années 1420, et on retrouve l'épileptique aux mains entravées laissant échapper la guivre qui le possédait. La comparaison est aisée. C'est d'ailleurs F. Hucher qui, après avoir réalisé ce chef d'œuvre, obtint de restaurer la vénérable verrière qu'il avait singer.

Baie-o-moderne-Huchet-7696c.jpg

 

 vitrail-legende-st-gilles 4308c  vitrail-legende-st-gilles 4808c

 

 

 

 II Baie 5 : Vie du Christ et Vie de saint Roch. 

 

Cette verrière de 4 lancettes trilobées , et tympan à 12 ajours et écoinçons de 6 mètres de haut et  2,70 m. de large est organisée en trois registres : le registre inférieur est moderne, mais les deux registres supérieurs conservent  sept panneaux consacrés à la Vie du Christ et la Vie de saint Roch datant de 1510-1520 complétés par des panneaux de création de l'atelier d'Hubert de Sainte Marie (1988?). Il a été restauré  en 1936-37, puis en 1988 .

Le Corpus Vitrearum nous apprend que ce vitrail est "traditionnellement" rattaché à la production de l'atelier quimpérois Le Sodec.

 

                                  Vitrail-vie-du-Christ-et-de-saint-Roch 7686c

 

On reconnaitra ainsi la Naissance de saint Roch, Saint Roch nourri par son roquet, Saint Roch soigné par l'ange.

 

Vitrail-vie-du-Christ-et-de-saint-Roch 7687c

 

Jésus parmi les docteurs, le Baptème du Christ, la Transfiguration, le Portement de croix. Verre rouge gravé sur le nimbe crucifère du Christ.

Vitrail-vie-du-Christ-et-de-saint-Roch 7688v

 

Le lien avec l'atelier des Le Sodec peut être étudié par la comparaison du Baptème du Christ à Malestroit, Guengat (29) et Penmarc'h (29) après inversion du carton.

comparer : Guengat vitraux 0379c Penmarc'h :vitraux 5304cc


 

Tympan

Dans les mouchettes latérales, des anges portent les instruments de la Passion. Au sommet, Christ du Jugement Dernier.

Armoiries moderne des Malestroit : les besants sont montés en chef-d'œuvre (la pièce de verre jaune est sertie au milieu du verre rouge sans être reliée au réseau de plomb du panneau). Cette technique trouve précisément dans les armoiries sa principale utilisation .

Armoiries de Le Jeune de la Morlaye de gueules à la croix d'argent cantonnée de quatre épis du même. 

Mi-parti du précédent avec des armoiries non identifiées.

Vitrail-vie-du-Christ-et-de-saint-Roch 7690v

 


 

 

 

 

 

           IIème partie : le mobilier et statues.

 

I. La chaire aux sirènes.

Cette magnifique œuvre classée Mh (1964) du XVIIe siècle provient peut-être des  ateliers de charpentiers de marine de Redon et de La Roche-Bernard ; elle a été achetée par la commune lors de la vente des effets mobiliers du couvent des Augustins, située dans l'îlot de La Saudraie, sur l'Oust. Ces religieux s'étaient établis en 1633 sur les ruines de l'ancien château des Malestroit, mais en 1791, le Directoire du Morbihan ordonnait la fermeture du couvent. La vente nationale des jardins, des terres, des bâtiments eût lieu en 1791.

                           mobilier 7691v

Elle doit son nom de "chaire des sirènes", non aux chants qu'une voix d'orateur fait ici vibrer, mais aux quatre personnages peints en blanc, et qui soutiennent sans effort le porte-voix ou la cuve. Mais il en est de ce sirènes comme des anges, et la déterminatioon de leur sexe s'avère un problème épineux. Du beau sexe, ces êtres ont la grâce, la longue chevelure, la finesse des traits. L'absence de poitrine vient démentir ce premier jugement, et leur faire attribuer le nom d'Atlantes ou de Télamons, plutôt que de Cariatides. Mais des cariatides impubères ? 

 L'approfondissement de l'étude que doit mener tout iconographe scrupuleux parmi les entrelacs de feuillage et de glands de chêne se heurte vite à un obstacle dressé par l'artiste pour déjouer les investigations, car ces hermaphrodites sont gainées dans une trompe végétale solidement ficelée, à la base en cornucopie ou en limaçon et au cône d'acanthe. Ils ou elles veillent sur l'auditoire auquel s'adresse le message FIDES EX AUDITE, "La Foi vient en écoutant". (Silentio est aurum aurait été déplacé).

  On se souvient peut-être de ce chapitre de Moby Dick où le pasteur, pour s' adresser à son public de chasseurs de baleine, grimpe dans sa chaire à l'aide d'une échelle de coupée qu'il replie ensuite. Car on se pose ici la question de savoir par quel autre moyen le recteur pourrait gagner son poste dans ce gabion de vigie fixé à plusieurs mètres du sol, avant d'apprendre qu'un escalier est creusé dans le mur, donnant accès à la porte frappé du monogramme IHS et de quelques clous. 


mobilier 4822v

 

                                    mobilier 7694c

 

 

II. Groupe de St Georges.

Œuvre classée MH 1983. Depuis le 17e siècle, où ils sont nés de la gouge et du ciseau, Georges sur son cheval de manège menace Dragon de sa lance, et Dragon fouette l'air de sa queue, empoisonne l'atmosphère de son haleine fumante et redresse sa gueule. 

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III. La Vierge de Pitié.

XVe ou XVIe classée MH 1964 

   Bois monoxyle polychrome, 1,25 m de haut et 0, 86 m de large. Elle provient, comme la chaire aux sirènes, du couvent des Augustins d'où elle fut conduite dans l'église à la vente des biens.pour la protéger des fureurs iconoclastes des Révolutionnaires. En 1794, l'œuvre risquant d'être brûlée, est cachée par le chapelier Pierre Evain. Accusé par la municipalité révolutionnaire le 28 Brumaire an IV de l'avoir dérobée, il parvient cependant à l'échanger contre cinq cordes de bois. (Site Topic-Topos et Louis Marsille 1911) 

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IV. Peintures murales aux trois animaux.

 

 

 "Des travaux de restauration de la voûte de l'ancienne croisée du transept, sur le point de s'effondrer ont révélé une découverte qui fait des peintures de Malestroit une référence de l'art médiéval.

Un éléphant de combat, un centaure à tête cornue brandissant une épée, un unicorne à corps de félin, ces deux derniers comme saisis en pleine course, le tout dans un état de conservation remarquable, surplombent la croisée du transept de l'église Saint-Gilles de Malestroit.

Le thème de l'éléphant n'est pas rare en sculpture, en particulier sur les chapiteaux romans, il reste cependant inhabituel en peinture murale. 
D'autant que l'artiste n'avait de toute évidence jamais vu d'éléphant et ne savait où rattacher les défenses et les pattes sont plutôt celles d'un félin.

Illustrant vices et vertus dans un but moralisateur, ce trio d'animaux fantastiques se retrouve dans les mosaïques.

La position privilégiée des peintures murales à Malestroit, à la croisée du transept peut s'expliquer par sa signification morale : l'éléphant étant le symbole de la chasteté, de la force et de la sagesse, le centaure, étant donné son aspect ici maléfique, le symbole de la dualité mauvaise. 
L'animal unicorne n'est pour le moment pas défini. 
Sur le quatrième voûtain prenait peut-être place, en pendant de l'éléphant, un animal moralement positif (?)   Une autre explication serait que ces animaux illustrent le monde et ses richesses, ce que appelle les « mirabilia ». A Malestroit, il est remarquable que les animaux soient peints sur la voûte : sans doute faut-il y voir une partie d'un programme iconographique qui comprenaient peut-être les éléments sculptés qui proviennent de l'édifice roman, selon un agencement qui n'est pas connu pour le moment. Il faudra également sonder les murs des parties romanes pour découvrir si d'autres peintures ou éléments peints s'y cachent encore.En tout état de cause, cette découverte fait des peintures de Malestroit une référence de l'art médiéval." Christine JABLONSKI, Conservateur des Monuments Historiques, DRAC Bretagne

 


 mobilier 7698c

 

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Published by jean-yves cordier
15 mars 2014 6 15 /03 /mars /2014 08:54

 

L'église Saint-Gilles de Malestroit.

Verrière de la Vie de saint Gilles et de la Vie de saint Nicolas (Premier quart du XVe siècle).

 

 

 

 

  voir aussi :  Le vitrail de l'arbre de Jessé de l'église de Malestroit.

 

 Baie 1 : Verrière des vies de saint Gilles et de saint Nicolas.

Elle date du 1er quart du XVe siècle (1401-1425), mais elle a été restaurée en 1906 par l'atelier Hucher du Mans. C'est la plus ancienne des verrières  de Malestroit, et l'une des plus anciennes également en Bretagne, donnant un exemple des caractéristiques du gothique flamboyant : large emploi du jaune d'argent (découvert au XIVe), présence de la perspective (carrelage), fonds damassés, encadrement par des éléments architecturaux peints.

 Mesurant 6 mètres de haut et 2,40 m de large, elle comporte 4 lancettes trilobées et un tympan à 2 quadrilobes, 2 mouchettes, 1 soufflet et 4 écoinçons. Classé MH 1912, elle a été découverte dans la  seconde moitié du XIXe sous des parpaings.

On la divise dans sa lecture en deux registres superposées de scènes, inscrites dans de très importants encadrements architecturaux. Le registre inférieur raconte en quatre scènes la vie légendaire de Saint Gilles l'ermite (VIIe siècle), et le registre supérieur celle de saint Nicolas de Myre (IVe siècle).

 

 

 

 

                                    vitrail-legende-st-gilles 4304c

 

 

 

 

1. Registre inférieur :  quatre scènes de la vie de saint Gilles.

 

 

 

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Scène 1.  Le saint en prière, accompagné de la biche qui le nourrissait de son lait.

(entièrement refait); 

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Scène 2 : Le saint exorcise un épileptique.

Cette maladie était considérée comme la conséquence de la possession par un démon, que l'on voit s'enfuir au dessus de la tête du malheureux.

Un élément précieux sur le plan documentaire repose sur les menottes imposées au malade : un bracelet métallique entoure chaque poignet, et une solide clavette les solidarise ; une goupille en permet l'ablation. Est-ce destiné à "protéger" la personne lors d'une de ses crises, ou bien à protéger l'entourage d'un acte dément, dans une confusion fréquente entre comitialité et aliénation ? On sait que, dans les asiles étaient employés les camisoles, les moufles, les chaînes, les chaises d'immobilisation et autres entraves.

Fond damassé bleu. inscription gothique : Ægidii Perte.ccior. Saint Gilles est représenté en Abbé, tenant une crosse de style gothique particulièrement ouvragée, au nœud octogonal en or et en argent et au crosseron largement découpé par des feuilles. L'embout à l'extrémité de la hampe est pointu. Carrelage en perspective, bicolore gris strié et jaune pâle. Buste du malade restauré

 

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Scène 3 : Confession de Charlemagne.

(entièrement moderne): Charlemagne n'osant pas avouer ses péchés, ceux-ci s'inscrivent sur un phylactère :   Superbia (Orgueil) ; Avaritia (Avarice) ; Luxuria (Luxure)   Invidia (Envie) Gula (Gourmandise) Ira (Colère) Acedia (Paresse) selon l'acronyme mnémotechnique SALIGIA. Le roi implore le saint et obtient l'absolution de ses fautes. Cet épisode (qui ne correspond pas à la légende médiévale) est relié à celui de la scène suivante.

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Scène 4. Messe de saint Gilles.

Grisaille et jaune d'argent, fond damassé bleu, un verre rouge. Sanguine sur les piliers architecturaux.

Un roi assiste à une messe célébrée par saint Gilles et, lors de l'élévation, un ange apparaît portant un phylactère avec l' inscription Ægidii m~to Karoli P~er.areunt. Si on se réfère à l'inscription figurant sur le tableau du Maître de Saint-Gilles, qui est Egidi merito remisa sunt peccata Karolo,  on peut déduire qu'il est écrit ici Ægidii merito Karoli Peccata rem.sunt, traduisible par "Par le mérite de Gilles les péchés de Charles sont remis (ou pardonnés)". 

L'épisode est célèbre et il est déjà représenté à Chartres dans le Vitrail de Charlemagne ou sur un pliler nord. La légende (Vita Sancti Aegidii et Vie de saint Gilles de Guillaume de Berneville, XIIe siècle) veut qu'un roi nommé Charles se confesse au saint, à l'exception d'un péché si horrible qu'il ne peut l'énoncer. Malgré les exhortations de Gilles, le roi Charles  conserve son secret.

La tradition médiévale voyait dans ce péché une relation incestueuse entre Charlemagne et sa sœur Gisèle ayant conduit à la naissance de Roland : l'Histoire poétique de Charlemagne (1865) par Gaston Paris donne deux sources à cette légende :

Source n° 1 : Karlamagnus-Saga (irlandais, fin XIIIe) I ; 36 :

Charlemagne eut à Aix un commerce illégitime avec sa sœur Gille [Gisèle ou Gisle]. Plus tard, il confessa à l'abbé Egidius tous ses péchés, mais il omit celui-là, le plus grave. L'abbé Egidius chantait la messe, quand l'ange Gabriel descendit des cieux et déposa une lettre près de la patène. Egidius l'ouvrit ; il y lut le péché du roi, et l'ordre que Dieu lui donnait de marier sa sœur à Milon d'Angers. Le fils qu'elle enfantera dans sept mois, ajoutait la lettre divine, est de l'empereur, et il devra en prendre soin. Egidius prit la lettre, l'apporta au roi, et la lui lit. Le roi s'agenouille, avoue son crime, et accomplit les ordres d'en haut : il donne sa sœur à Milon et le fait duc de Bretagne.

Source n° 2 : Légende latine ou Egidius de Provence (Boll. AA.SS  Sept.I, 299-314) dans sa traduction du XIIIe siècle ne spécifie pas la faute commise par le roi :

Entre ces coses prisa moult li rois le saint home qu'il daignast prier à nostre Seigneur pour lui : car il avoit fait I moult lait pechié que il n'avoit oncques à nului dit, ne au saint home ne l'osoit dire. Quant vint le diemence, et il cantoit le messe, il pria nostre Seigneur por le roi là où il estoit el canon. Lors s'apparut li angeles nostre Seigneur à lui, qui mist seur l'autel une chartre en qoi li peskiés le roi estoit escris tout comme il l'avoit fait, et pardonés li estoit par la prière saint Gille se il se repentoit tant seulement et le deguerpissoit... Et quand li prodrom vit le cartre, il rendist grâces à notre Seigneur ; si conta au roi ceste cose et le pechié qu'il ne li osoit dire. Li rois reconnut son pekié qu'il avoit fait, si li caï as piés, et si li pria qu'il li aidast envers nostre Seigneur par ses prieres, et li sains hom commanda que il plus ne le fesist.

 

On fit remarquer que saint Gilles vivait longtemps après Charlemagne, et qu'il devait s'agir du roi Charles le Chauve, son petit-fils.

En 1563, le Concile de Trente prit la décision de censurer le "péché inavoué de Charlemagne"

      N.B : la pupille des yeux est rehaussée de jaune d'argent.

                                       vitrail-legende-st-gilles 4309c

 

      Comparer avec La messe de saint Gilles, v.1500 par le Maître de saint Gilles, N.G. Londres :

 

En conclusion de ce cycle, on remarque que saint Gilles est celui qui dispose du pouvoir de pardonner une faute qui n'a pas été confessée , pourvu que le pêcheur en éprouve une réelle contrition : en un mot, il est le recours contre une faute inavouable.

Or, nous allons découvrir que le culte de saint Nicolas est, lui aussi, lié à la culpabilité et au pardon de fautes graves.

 

2. Registre supérieur : quatre scènes de la vie de saint Nicolas.

 

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Les différents épisodes sont aussi représentés à la cathédrale de Chartres dans deux verrières à médaillons du XIIIe siècle ; la scène du miracle du saloir y est représenté par trois panneaux du début du XVe siècle.

 

1. Nicolas est intronisé évêque de Myre.

 Nicolas, assis, reçoit l'ordination épiscopale par deux évêques : l'un le bénit alors que l'autre le coiffe de la mitre. 

 

  "Après cela, l’évêque de le ville de Myre étant mort, tous les évêques de la région se réunirent afin de pourvoir à son remplacement. Il y avait parmi eux un certain évêque de grande autorité, de l’avis duquel dépendait l’opinion de tous ses collègues. Et cet évêque, les ayant tous exhortés à jeûner et à prier, entendit dans la nuit une voix qui lui disait de se poster le matin à la porte de l’église, et de consacrer comme évêque le premier homme qu’il verrait y entrer. Aussitôt il révéla cet avertissement aux autres évêques, et s’en alla devant la porte de l’église. Or, par miracle, Nicolas, envoyé de Dieu, se dirigea vers l’église avant l’aube, et y entra le premier. L’évêque, s’approchant de lui, lui demanda son nom. Et lui, qui était plein de la simplicité de la colombe, répondit en baissant la tête : « Nicolas, serviteur de Votre Sainteté. » Alors les évêques, l’ayant revêtu de brillants ornements, l’installèrent dans le siège épiscopal."

Légende dorée de Jacques de Voragine.


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Comparer avec :

Speculum historiale de Vincent de Beauvais traduit par Jean de Vignay, vers 1335,  Bnf, Arsenal 5080 f. 307 

Saint Nicolas recevant la mitre

 

 


 2.  Résurrection des trois enfant mis au saloir.

      Nicolas ressuscite les morts, et pardonne à l'aubergiste (ou au boucher) criminel.

 

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Comparer avec : Speculum historiale de Vincent de Beauvais traduit par Jean de Vignay. Sur cette enluminure, ce sont trois clercs, tonsurés, qui sont figurés, comme dans le texte du trouvère Wace.

Mais un examen attentif du vitrail de Malestroit montre, malgré la barlotière, qu'il s'agit ici aussi peut-être aussi de clercs, car on voit une couronne de cheveux à l'arrière, alors que la partie avant du crâne est rasée, ou, du moins, dépourvue de cheveux. On comprend que de telles images aient favorisé le glissement d'un récit de trois clercs ressuscités à celui de trois petits enfants.

 

Peinture sur velin. Feuillet 023, recto, du manuscrit messin "Les Heures de Jean de Vy et Perrette Baudoche Metz", vers 1435-1447. La encore, malgré leur petite taille, les trois garçons nus sont tonsurés, et correspondent à des clercs.

 

 


Scène 3 : Le saint bénit et ressuscite un pèlerin mort et remet en place le mât d'un navire (vitrail entièrement refait).


                         vitrail-legende-st-gilles 4814c


Scène 4 : Saint Nicolas est invoqué par des marins en perdition.    

Cinq marins se trouvent en perdition, leur mât rompu,dans un navire très creux, doté d'un château-avant défendu comme une tour, et, à l'arrière, d'un gouvernail d'étambot : il peut être défini comme un cogue que Wikipédia définit ainsi :

"Il s'agit d'un voilier de commerce qui fut utilisé puis armé contre la piraterie pour les échanges entre les ports de la Hanse ; on pouvait l'armer de canons. Il possédait un mât et une voile carrée. Il y avait une nacelle de vigie juste sous la pointe du mât. Les cogues présentaient dès l'origine un château à l'étambot ; au cours du xive siècle, on leur adjoignit un château à l'avant du pont, ou gaillard d'avant.

La nacelle de vigie est bien présente mais le château-arrière n'est pas représenté. On devine une construction à clin. L'étai vient se fixer sur une pièce de bois oblique établie dans le gaillard d'avant, et que l'on retrouve sur le sceau de la ville de Stralsund :         

 

                     

D'autres détails sont retrouvés, comme l'oriflamme à l'extrémité du mât, ou encore les lais verticaux de la voile.

 Saint Nicolas, dont seul le buste émerge de nuées, trace une bénédiction : il porte un anneau d'or au médius.

                   vitrail-legende-st-gilles 4815cc

Dais :

 Au dessus de la scène précédente, deux personnages —peut-être des donateurs— sont agenouillés face au Christ Sauveur du Monde (avec le globus crucifer). Au dessus de la scène du saloir, deux anges portent des phylactères .

On remarquera aussi l'alternance de couleurs des voûtes des niches, bleus et verts, au dessus des éléments rouge lie-de-vin centrés par une boule jaune.

 

vitrail-legende-st-gilles 4815cccc

 


3. Tympan.

 

Sur un fond rouge constellé d'astres d'or, qui reprend les armoiries de gueules à neuf besants d'or des Malestroit, , le Christ du Jugement Dernier, dans le soufflet supérieur reçoit les louanges de quatre anges porteurs de phylactères :

GLORIA IN EXCELSIS DEO / ET IN TERRA PAX

HOMINIBUS BONAE VOLUNTATIS

vitrail-legende-st-gilles 4307c

 

Voir le vitrail consacré à Saint Gilles à Troyes

 

 

 

Sources et liens :

 

GATOUILLAT (Françoise), HEROLD (Michel), 2005,  Les vitraux de Bretagne, Corpus Vitrearum VII, Presses Universitaires de Rennes, 367 p. 375 ill. 

Topic-topos : 

http://fr.topic-topos.com/saint-nicolas-de-myre-et-saint-gilles-du-gard-malestroit

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Published by jean-yves cordier
14 mars 2014 5 14 /03 /mars /2014 12:01

Les vitraux de l'église Saint-Nonna de Penmarc'h (29). Vitraux contemporains de Jacques, Anne et Guy Le Chevallier, et vitraux du XVIe siècle.

 

L'église Saint-Nonna 

  L'église Saint-Nonna de Penmarc'h, construite en 1508, témoigne de l'importance économique de Penmarc'h au XIVe et XVe siècle comme l'un des principaux ports de roulage et de pêche à la morue, avant le déclin que la mise à sac en 1594 de la ville par Guy Eder de la Fontenelle paracheva. 

 C'est précisément ce sinistre épisode de l'histoire locale qui explique qu'il ne reste qu'une demi-douzaine de panneaux des vitraux construits lors de l'édification de l'église. Car il faut savoir que les habitants de Penmarc'h face à la menace que constituait la présence de La Fontenelle en l'île Tristan à Douarnenez, et les exactions auxquels il se livrait, firent de leur église et du cimetière un camp retranché aux murs épais, protégés par deux bastions et des remparts. Mais ils furent abuser par une ruse de Fontenelle, les femmes furent violées, les habitants passés au fil de l'épée, et 300 de leurs bateaux rejoignirent la flotte de l'île Tristan. On imagine que les verrières ne furent pas respectées.

 L'église Saint-Nonna conserve néanmoins quelques panneaux des vitraux d'une Passion et d'une Vie du Christ des années 1510, dont l'un des intérêts est de rentrer en comparaison avec des œuvres semblables à Plogonnec, Guengat, Ergué-Gaberic pour suggérer la présence d'un grand atelier quimpérois.

 Mais les panneaux ou fragments conservés sont placés au sein de vitraux contemporains (1967 et 1981) par l'atelier de Jacques Le Chevallier, ce qui redouble leur intérêt. Il est illusoire de vouloir les décrire séparément, mais c'est ce que je vais néanmoins tenter.


I. LES VITRAUX DU XVIe SIÉCLE DE PENMARC'H.


Si on en croit les armoiries, une maîtresse-vitre a été commandée à l'atelier de maître-verrier de Quimper vers 1510 par Jean III du Pont et son épouse Catherine de Brosse. A cette époque, Claude de Rohan était évêque de Quimper et Charles Jégou recteur de Penmarc'h et abbé de Daoulas


         A. La Baie 0 ou Maîtresse-vitre : Vie du Christ.

Haute de 8,60 m et large de 4,30 m, elle comporte six lancettes trilobées de 5,50 m x 0,50 m et un tympan de 12 ajours. Les lancettes recevaient jadis sous des dais gothiques dix-huit panneaux organisés en trois registres, consacrés à l'Enfance du Christ, à sa Vie Publique et à sa Passion. 

 Les éléments anciens occupent aujourd'hui les deux lancettes médianes C et D, les têtes de lancettes de A à F, et le tympan.

1. Déposition de croix.

Même carton qu'à Plogonnec Baie 0, C3 et à Lanvenegen, C3. Mais on ne lit pas d'inscription sur la demi-manche, alors que le cône du turban de Nicodème porte les lettres A(V)ENA

2. Mise au tombeau.

Panneau identique à celui de Plogonnec Baie 0, C2.

3. Flagellation 

Panneau identique à celui de Guengat en C2, et d'Ergué-Gaberic en D3 

Guengat :vitraux 0378c (2)


4. Baptême du Christ.

Carton identique à ceux de la baie 1 de Guengat en C3 et d'Ergué-Gabéric en C1. Rogé Barrié a déchiffré sur la panse de la cruche deux lettres peu visibles ...A.

Comme à Guengat, le verre rouge est gravé, autour de la colombe, de traits blancs rehaussés au jaune d'argent pour représenter la puissance du Verbe divin.

 

Guengat : vitraux 0379c

 

Penmarc'h : cliquez pour agrandir.

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                                            vitraux 5304c

 

 

                             saint-nonna 5304c$

                                       vitraux 5304cc

 

 

                                        vitraux 5304ccc

5. Circoncision rituelle.

Le carton est identique à celui de Guengat (même datation, v.1510), baie 1, panneau B3, et semblable à celui -d'Ergué-Gabéric en B1. Mais ici, on ne lit pas d'inscription sur les galons de la dalmatique de l'officiant, ou "mohel". Le mohel (מוהל en hébreu, mohalim au pluriel) est la fonction de celui qui exécute la Brit milah selon la tradition juive, c'est-à-dire la circoncision rituelle d'un enfant mâle au huitième jour après sa naissance.

La source évangélique est Luc,2, 21-24 "Le huitième jour, auquel l'enfant devait être circoncis, étant arrivé, on lui donna le nom de Jésus, nom qu'avait indiqué l'ange avant qu'il fût conçu dans le sein de sa mère. Et, quand les jours de leur purification furent accomplis, selon la loi de Moïse, Joseph et Marie le portèrent à Jérusalem, pour le présenter au Seigneur,  suivant ce qui est écrit dans la loi du Seigneur: Tout mâle premier-né sera consacré au Seigneur,  et pour offrir en sacrifice deux tourterelles ou deux jeunes pigeons, comme cela est prescrit dans la loi du Seigneur.

  

                                      saint-nonna 5305c

 

Guengat Baie 1 : vitraux 0378c (2)

 


7. Têtes de lancettes. 

Six sommets d'édicules flanquées de statuettes de prophètes, à arcs redentés ouvrant sur des voûtains colorés et des tentures galonnées. 

Tête de la lancette B :

                               saint-nonna 5312c

On y lit l'inscription en lettres gothiques   CT(R)AN*E ROT RA(R)NVE qui est restée indéchiffrée.

* N rétrograde

saint-nonna 5317c

 

8. Le tympan.

saint-nonna 5296

 

On y trouve au sommet les armes mi-parties de France (azur à fleur de lys) et de Bretagne (hermines), surmontées de la couronne royale  et entourées du collier de l'ordre de l'Hermine, dont l'animal emblématique apparaît suspendu par un entrelacs. Il s'agit des armes de Louis XII et d'Anne de Bretagne (mariés en 1499). Sur la phylactère se lisent les lettres DOVR...OST et G..VIS, ou pour moi  SIAS .... DOVR... SOX, où on a vu des "fragments du Salve Regina" (?) avec l'orthographe fautive Dourcedo au lieu de dulcedo : Salve, Regina, mater misericordiae. Vita, dulcedo et spes nostra, salve.

 


saint-nonna 5297

 

Je fais appel ici à la description de Roger Barrié :

Au dessous, des anges , le buste sortant des nuées, présentent les armoiries de trois générations de barons de Pont-L'Abbé, de gauche à droite :

— écu mi-parti d'or au lion de gueules, qui est Pont-L'Abbé, et d'hermines à 3 fasces de gueules, qui est Rostrenen. Jean, baron du Pont-L'Abbé épousa en 1440 Marguerite qui lui apporta la baronnie de Rostrenen dont il écartela ses armes.

— écu écartelé au 1, 4 de Pont-L'Abbé et de Rostrenen, au 2 contrécartelé au 1 et 3 de gueules à la raie d'escarboucle d'or et au 2,4 d'azur à trois fleurs de lys d'or à la cotice du même brochant qui est Bourbon-Navarre, et au 3 de gueules à 3 macles d'or qui est Rohan à la vouivre ondoyante brochant sur le parti. Pierre du Pont-L'Abbé décédé en 1488 à Saint-Aubin-du-Cormier épousa Hélène de Rohan en 1463.

— écu mi-parti Pont-L'Abbé-Rostrenen et d'hermines, autres armoiries, imparfaitement reproduites, des de Brosse, comte de Penthièvre. Jean III du Pont-L'Abbé épousa Catherine de Brosse-Bretagne vers 1490.

 

 

saint-nonna 5298

 

 

Au dessous, de gauche à droite des anges semblables présentent les armoiries de seigneurs de moindre importance, qui ont possédé la seigneurie de Lescoulouarn dans la paroisse de Plonéour, voisine de Penmarc'h :

— écu écartelé au 1 et 4 d'or au lion d'azur et au 2 et 3 de gueules à 5 fleurs de lys d'argent, copie moderne pour d'azur à 6 fleurs de lys d'argent posées 3.2.1. Il s'agit des armes inversées de la famille Foucault dont la branche aînée possédant Lescoulouarn se fondit dans Langéouez avant 1510 par le mariage de Jean et de Jeanne Foucault. Sur la banderole ONI...ET et P...DE...

— écu mi-parti Foucault et du Pont-L'Abbé; alliance inconnue.Sur la banderole : L...ON...EN...

— écu mi-parti fascé ondé d'or et d'azur qui est Languéouez et d'or au léopard morné de gueules qui est Nevet. Un Jean de Languéouez seigneur de Lézarscoët épousa vers 1450 Typhaine de Nevet. Sur la banderole :CHRISTU...TRIO..., fragment d'un hymne dans le style du Victimae Paschali.

— écu contrécartelé au 1 et en cœur Foucault, au 3 Languéouez,au 2 d'argent à neuf macles de gueules et au 4 d'azur à la croix d'argent qui sont inconnus. Sur la banderole : ...VIS... Il doit s'agir de l'alliance d'un Langéouez avec une autre famille par laquelle la seigneurie de Lescoulouarn échut aux Talhouët. cette famille était présente dans la région dés 1513 puisqu'on sait que Guyon de Talhouët était capitaine et porte-enseigne de Pierre de Foix, nouveau baron du Pont et de Rostrenen. Bien que l'on ignore si les armes de ces deux personnages figuraient dans la verrière, cependant on peut conclure que la réalisation de cette dernière se situe peu avant ou peu après l'héritage des baronnies par la famille de Foix et celui de la seigneurie de Lescoulouarn par la famille de Talhouët, toutes deux citées en 1513. 

 

 

saint-nonna 5300

 

saint-nonna 5302

 

 

 

                   Baie 2 (v. 1510 et fin XVIe).

Chapelle de la Vierge au sud du maître-autel.

Baie de 4,20 m de haut et 3,30 m de large divisée en 5 lancettes et un tympan à 6 ajours. Panneaux anciens dans 4 ajours du tympan et en haut de la lancette centrale. 


saint-nonna 2913v

 

Lancette centrale :

dais, débris d'un Portement de Croix (buste du Christ) et pièces bouche-trous.

                         vitraux 5311c


Tympan :

— Au sommet, écus armoriés d’or au lion de gueules de Jean II du Pont à gauche et d'hermines à 3 fasces de gueules de  Marguerite de Rostrenen à droite.

— Dans l'ajour latéral gauche, l'ange présente des armoiries d'argent au greslier et au lévrier de sable. Ce sont les armoiries de Penmorvan, comme le signale le site Tudchentil http://www.tudchentil.org/spip.php?article738 :

 

Penmorvan (de), sr dudit lieu et du Gorrekaer, par. de Combrit, - de Penfoul, par. de Bodivit, - du Hellez, par. de Plonéour, - de Kernivinen, par de Beuzec-Cap-Caval, - de Kerguinguen, par. de Plobannalec, - de Kerganton en Tréoultré*, - de Kertarenech, par. de Clohars-Fouesnant, - de Kerveil, par. d’Ergué-Gabéric, - de Listremet Meur .

Réf. et montres de 1426 à 1562, dites par. et par. de Plomeur, év. de Cornouaille.

D’argent au lévrier de sable, colleté d’or, surmonté d’un grêlier de sable, enguiché, lié et virolé d’or (Arm. de l’Ars.).

Henry, rend hommage à Jeanne de Retz, dame de Fouësnant, en 1399.Jehan, époux de Catherine de Kernivinen, héritière en 1482 d’Hervé de Kernivinen. Branche de Kerveil fondue dans Tréanna.

 

Edition de 1895, tome II, page 368.

*Tréoultré est l'ancien nom de Penmarc'h.

Nota bene : on retrouve ces armoiries sculptées dans l'église :

                             saint-nonna 2979v

— A droite, écu moderne France-Bretagne tenu par un ange ancien.

saint-nonna 5306c


                        saint-nonna 5308c

 

 

 

 

 

      Restauration et conservation

   Une première restauration eut lieu au XIXe siècle par Ameline, peintre-verrier de Pont-Labbé (J.P. le Bihan), comme en attesterait la tête de la Vierge de la Circoncision, ou le corps du Christ dans la Flagellation. Ce même Ameline exécuta aussi en 1899 une vitrerie blanche qui  accompagnait les vitraux anciens. En 1856, le vitrier Guillaume Cassaigne crée des verrières décoratives pour le flanc sud, et de 1863 à 1870, le Carmel du Mans réalise plusieurs verrières figurées représentant sainte Thumette, saint Paul et saint Pierre, saint Guénolé, saint Fiacre ou Notre-Dame de la Joie ; mais on ignore si ces travaux s'accompagnèrent d'un entretien des œuvres anciennes. Celles-ci étaient en mauvais état , mais le recteur se heurta de 1888 à 1896 au refus de restauration par le Conseil municipal, qu'on imagine républicain et anti-clérical. Après la Première Guerre Mondiale, le recteur Guillerm fit déposer les panneaux anciens et les proposa à la vente à Alfred Sparry, riche amateur de Mulhouse. Cette transaction fut évitée de justesse par le service des Monuments historiques et les vitraux furent restaurés par Labouret en 1920. 

Ils furent déposés en 1942 par Jean-Jacques Gruber pour les protéger des hostilités puis ils ne furent restaurés en 1963 par Jacques Le Chevallier, qui les inséra dans une vitrerie colorée de sa conception. 

La remise en état des verrières de Saint-Nonna se prolongea jusqu'en 1989 grâce aux œuvres d'Anne et de Guy Le Chevallier, alors que Jean-Pierre Le Bihan restaurait les vitraux du XIXe (Baie 12, baie 15 en verrerie incolore losangée à filets peints). En 2012, Antoine Le Bihan restaura la verrière de sainte Thumette

Les verres anciens. 

Ils partagent les caractéristiques de ceux de la Baie 0 de Plogonnec avec des verres incolores et des verres doublés épais, alors que les verres colorés sont minces. "La mise en œuvre des verres est conduite selon les impératifs traditionnels du métier", écrit en compliment Roger Barrié, qui remarque comment beaucoup de petites pièces sont mises en plomb, comme le galon du manteau de la Vierge, ou comme dans les éléments contournés des architectures, sertissant les chapiteaux des nervures ou l'évidement des contreforts avec un métier très sûr.

 

 

 

Les vitraux contemporains

 

      Sont l'œuvre de Jacques le Chevallier en son atelier de l'Haye-Les-Roses, puis en 1981 de ses successeurs :

Anne Le Chevallier-Faraut (1937-) a suivi des études de lettres à Paris. Elle a enseigné jusqu'en 1966, puis est entrée à l'atelier de vitrail de Jacques et Guy Le Chevallier. Avec ce dernier, elle a participé à la réalisation des vitraux du chœur de la cathédrale de Nantes.

Guy Le Chevallier (1930 -) a fait ses études à l'Ecole des Métiers d'Art. Il a pris en 1955 la responsabilité technique de l'atelier de son père, Jacques Le Chevallier. Il assure depuis 1962 les travaux de restauration pour les Monuments Historiques et d'exécution pour différents artistes. Les principaux vitraux qu'il a réalisés sont ceux de : l'église Saint-Gervais, à Paris (pourtour du chœur), de la cathédrale de Nantes (transept Nord), de la Caisse Régionale du Crédit Agricole à Saint-Lô (façade en dalle de verre et terre cuite), etc.

 


 

 

 

                                   saint-nonna 2919v

 

      ANNEXE : GÉNÉALOGIE DES SEIGNEURS DU PONT.

JEAN II DU PONT, chevalier de l'ordre en 1460 /1440/ Marguerite DE ROSTRENEN, baronne de Rostrenen :

d'où :

PIERRE DU PONT, cité dans un aveu du 29 mars 1480, décédé à Saint-Aubin-du-Cormier en 1488

/1483/HELENE DE ROHAN-GUÉMÉNÉ († 1507) citée dans un aveu du 11 novembre 1494.

d'où :

JEAN III /1490/ CATHERINE DE BROSSE.

D'où :

LOUISE DU PONT († 1526) // PIERRE DE FOIX, baron de Langon, Pont-L'Abbé et Rostrenen, dont le capitaine et porte-enseigne est GUYON DE TALHOUËT en 1513.

Ce couple n'ayant pas d'enfant, les baronnies reviennent à sa nèce Gilette du Chastel :

 

GILETTE DU CHASTEL /1517/ CHARLES Ier DU QUELENNEC, vicomte du Faou.

 

 


   Liens et Sources.

— GATOUILLAT (Françoise) HEROLD (Michel), Les Vitraux de Bretagne, Corpus vitrearum France recensement VII, Presses Universitaires de Rennes : Rennes 2005 pages 157-159.

 — BARRIÉ (Roger)  Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle : Plogonnec et un groupe d'églises de l'ancien diocèse de Quimper / ; sous la direction d' André Mussat, 1979  Thèse de 3e cycle : Art et archéologie : Rennes 2 : 1979. Bibliogr. f. 9-32. 4 annexes (vol. 2)

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Published by jean-yves cordier
12 mars 2014 3 12 /03 /mars /2014 23:10

 Eglise Saint Nonna à Penmarc'h : bannières et statues :

      Introduction

      L'église de Tréoultré, dédiée à saint Nonna (évêque d'Armagh en Irlande 501-585) a été bâtie sur l'emplacement d'un église plus ancienne et d'une chapelle dédiée à saint Laurent. Elle a été construite en 1508 sous la direction du recteur Charles Jégou, comme l'atteste une inscription en caractères gothiques sur le porche sud:

Ce jour sainct rené, l'an mil CCCC VIIIfut fondé ceste église et la tour e~ lan Mvc neuff dõt estoit recteur K[arioluos] Iegou.

Charles Jégou fut recteur de 1498 à 1535. 

Penmarc'h et ses trois bourgs de Tréoultré, Kerity et St-Pierre eut jadis une situation florissante du XIIe au XVIe siècle, avant un déclin puis sa mise à sac par Eder de Fontenelle en 1595. En 1571, la ville comptait 14 000 habitants, et 500 bateaux dirigés par des "maîtres" ; elle comptait avec Morlaix et Roscoff parmi les principaux ports de Bretagne occidentale.  

                              saint-nonna 2909v

 

 

 

      LES CARVELLES ET AUTRES NAVIRES SCULPTÉS.

 

Alors que jusqu'en 1450 la flottille de caboteurs bretons était composée de navires bordés à clins (la coque est formée de virures se chevauchant partiellement comme les tuiles d'un toit), et que les chaloupes sculptées de l'église de Plogoff montrent au XIVe siècle ces redans caractéristiques, à partir de 1460 apparaissent des navires à franc-bord, d'origine bretonne, qui sont enregistrées au port de Bordeaux sous le nouveau nom de "karvelle". Le nom désigne le type de bordage, "à la carvelle", le "clou à carvelle" servant en charpente de marine à assembler deux planches taillées en biseau, jointives mais renforcées de l'intérieur par des membrures. Le phénomène s'amplifie pendant la seconde moitié du XVe siècle. Jaugeant de 40 à 100 tonneaux les carvelles embarquaient 15 à 30 hommes d'équipage.

Elles commercent principalement avec Bordeaux, mais aussi avec La Rochelle et Nantes, livrant leur poisson séché (maquereaux, merlus, congres, juliennes, sardines, morue pêché sur le banc de tout proche), et ramenant en fret de retour le vin (Bordeaux), le pastel du Lauragais (Toulouse), le sel de Guérande (Nantes), le blé et les matériaux de construction pour les livrer en Flandre et Brabant dans les avant-ports de Bruges et d'Anvers.

Je ne me suis pas livré à un inventaire complet, car l'église porte 14 navires sculptés à l'extérieur, et 4 à l'intérieur.

 

 Scène n°1 : Ange tenant un calice au dessus d'un navire à un mât, à la voile carguée. On remarque un fort château-avant, un bout-dehors très apiqué.

saint-nonna 2910v

 

 

   Scène n°2 :

Au dessous d'un personnage (saint Nonna ?), une chaloupe non pontée armée de deux avirons pêche divers poissons ; outre les rameurs, le patron et le matelot. A gauche, le personnage main sur la hanche, coiffé d'un béret à la plume arrogante, présente une longue queue qui le désignerait comme le diable, vaincu par Nonna.

saint-nonna 2912v

 

 

      Scène n°3. 

Nef à trois mâts, château-avant et château-arrière. Les deux voiles principales sont ferlées, mais la voile d'avant, sorte de hunier, est déployée. Nid-de-pie sur le mât d'avant et le grand-mât pour les gabiers. Deux personnages paraissent y faire des signes.

Il me semble que l'extrémité du beaupré est taillé en tête d'animal. Sur ce beaupré était établie une voile carrée.

Au total, les carvelles pouvaient porter cinq voiles : voile de beaupré, voile de mât de misaine, grand-voile surmontée d'un hunier, et voile latine sur l'artimon.


saint-nonna 2911v

 

 

 

                           LES BÉNITIERS.

L'église Saint-Nonna possède quatre bénitiers de Kersanton.

1. 1614 POVR LES TREPAS.ES.

Près de la porte du bas-côté Nord, un bénitier rond, de 0 m. 35 de diamètre, porte gravées une tête de mort et cette inscription : 1614 - POVR LES TREPAS.ES - B : FLAMANC AB.

                                saint-nonna 2918v

saint-nonna 2974v

 

 

2. A. LE COGVEN 

Du côté sud, près de la porte du Rosaire, on peut lire sur un autre bénitier rond, de 0 m. 35 de diamètre, l’inscription suivante : A : LE COGVEN : 1621 . Le site Topic-Topos révèle qu'il a été offert en 1621 à l'occasion du baptême d'Urbane Le Coguen, fille de H. Alain Le Coguen et de Julienne Le Paign, « nobles et vénérables gents ». Le parrain est Henri Billouart ; la marraine, Jehanne de Jaureguy. L'enfant est baptisé le 16 octobre 1620.  

saint-nonna 2962v

 

3. Bénitier de 1617.

 Un bénitier rond, de 0 m. 23 de diamètre, figure près d’une porte du bas-côté Sud. Il est de 1617. 

                             saint-nonna 2980v

 

4. Un bénitier octogonal de 0 m. 30 de diamètre, se trouve auprès de la grande porte d’entrée. Il porte, avec la date 1616, la signature un peu mystérieuse du donateur. 

 

                             saint-nonna 2982v

 

 

 

 

                               LES STATUES.

 

 

 


Statue non identifiée.

La honte ! je ne parviens pas à identifier cette sainte qui a perdu son bras, mais qui tient dans sa main gauche un objet qui m'intrigue : sac à placet ? livre dans un sac de rangement ? La partie basse correspond bien à un livre avec son fermoir, mais la partie haute s'assouplit en tissus terminés par un gland.

L'inventaire des Monuments historiques indique une "sainte au livre" du XVe siècle.

                                   DSCN3006v

 

 

 

      Sainte Anne trinitaire.

 

la tête de l'Enfant semble avoir été restaurée et tournée vers la gauche, alors qu'on s'attendrait à ce qu'elle se tourne vers sa mère.

                        DSCN3008c

 

                        DSCN3009v

 

 

      Sainte Marthe.

J'ai eu l'occasion face à une sainte Barbe de l'église de Guengat  L'église de Guengat II : Statues, sablières et inscriptions. de découvrir la "barbette", cette bande de tissu passant en jugulaire pour maintenir la coiffe, qui est ici un balzo ou bourrelet d'étoffes verte et rouge. Voir aussi un autre bel exemple à Abbeville, Marie mère de Cléophas du XV-XVIe, Collégiale Saint-Vulfran.

 

Sainte Marthe de Béthanie, la sœur de Marie (confond avec Marie-Madeleine) et Lazare, est celle qui, offrant l'hospitalité à Jésus, semble atteint de ce que Freud a nommé la "psychose de la ménagère" ; non seulement elle fatigue tout le monde à s'affairer, mais elle fait peser sur sa sœur un amer reproche. Résultat, elle reçoit un carton rouge :

 

Comme Jésus était en chemin avec ses disciples, il entra dans un village, et une femme du nom de Marthe l'accueillit dans sa maison.
 Elle avait une soeur appelée Marie, qui s'assit aux pieds de Jésus et écoutait ce qu'il disait.
 Marthe était affairée aux nombreuses tâches du service. Elle survint et dit: «Seigneur, cela ne te fait-il rien que ma soeur me laisse seule pour servir? Dis-lui donc de venir m'aider.»
Jésus lui répondit: «Marthe, Marthe, tu t'inquiètes et tu t'agites pour beaucoup de choses,
 mais une seule est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, elle ne lui sera point ôtée.

 Et vlan !

Mais c'est plus fort qu'elle, il faut que tout soit nickel, d'ailleurs, même son nom en araméen  martâsignifie la "maîtresse de maison". Elle est la patronne des hôteliers.

Si vous lui demandez pourquoi elle ne se fait pas aider par Lazare, elle répond que si c'est pour devoir repasser derrière, elle préfère le faire elle-même.  


 Elle reste donc dans ma mémoire la "pointotéé", mais elle semble, sur cette statue, s'être convertie à "la bonne part" de la voie contemplative. On comprend très bien d'ailleurs que l'artiste n'allait pas la figurer avec un chiffon à poussière et un plumet, et la soupe à la grimace pour sa sœur. 

Je retire tous mes sarcasmes devant cette grande et belle dame.


 

                                  DSCN3011c

 

 

      Comme la statue de saint Yves, on trouve aussi une statue de Marthe dans la chapelle de la Madeleine de Penmarc'h, alors que son culte est assez discret ailleurs. 

statues 2823ccc


      Saint Yves en robe d'avocat.

 


                           DSCN3012c

 

      Je retrouve d'abord ce tissu enveloppant le livre que tient le saint patron des avocats. Cette statue au visage ingrat  est intéressante aussi si je la compare à celle de la chapelle de la Madeleine toute proche :  La chapelle de la Madeleine à Penmarc'h : bannière et statues.

                           statues 2806c

Lorsque j'avais mis en ligne mon article sur La Madeleine de Penmarc'h avec la photographie de ce Saint-Yves, j'avais reçu le passionnant commentaire suivant :

En ce qui concerne le costume de Saint-Yves, la galette blanche sur l'épaule, correspond au chaperon qui a évolué au cours des siècles. Le chaperon n'est alors plus porté sur la tête (remplacé par le bonnet rond ou pileus qui deviendra, chez les ecclésiastique la barrette et chez les juristes ou les professeurs la toque). La visagière, encadrant le visage, est devenue un bourrelet ( placé au début sur la tête). De ce bourrelet sortait la cornette (l'ancienne pointe du chaperon qui avait été allongée) et la patte (l'ancienne goulée ou guleron qui recouvrait les épaules). Saint Yves porte donc, sur l'épaule ou autour du cou, ce qui deviendra l'épitoge des avocats ou des magistrats.

Wikipédia me renseigne sur cet épitoge :

Une épitoge est une bande de tissu distinctive portée par-dessus la toge (d'où son nom) des magistrats et avocats, ainsi que des universitaires. Portée sur l'épaule gauche, elle se compose de deux brins dont chacun a la forme d'un trapèze ; le bout large et court se porte dans le dos, et le bout long et fin, sur la poitrine. L'hermine sur l'épitoge est le symbole du grade universitaire de celui qui la porte. Les trois rangs d'hermine que comporte l'épitoge d'un docteur de troisième cycle signifient qu'il est bachelier, licencié et docteur. Une épitoge à un rang d'hermine se porte sur une robe de bachelier. Les avocats Docteurs en Droit peuvent porter une épitoge noire à trois rangs d'hermine.  

 

Il est bien attesté que saint Yves portait un épitoge, selon les Croniques de Bretaigne d'Alain Bouchard (1), ou selon La Vie des Saints de Lobineau (2) :

(1) : Il portait sur sa peau un cilice, par dessus une chemise de grosse toile, et, lorsqu'il était au Tribunakl, il y ajoutait un épitoge de fin bureau. 

(2)Les vêtements qu'il prit par la suite furent un épitoge de bure; une robe à grande manche, sans bouton, et un chaperon pour se couvrir la tête, qu'il tenait toujours baissée ; le tout simple, grossier, et de couleur blanche.

 Lorsque le corps de Yves Hélori fut porté de Kermartin à la cathédrale de Tréguier après son décès, Derrien de Trégrom qui assista à la façon dont on dépouilla le saint de ses vêtements se souvient "de son épitoge, de sa tunique et de sa chemise", laquelle fut exposée au nombre des reliques.

Mais Yves de Kermartin ayant renoncé à tout le faste de son costume d'Official, ayant fait donation à quatre pauvres de l'Hôpital de Tréguier de "son cahperon, sa robe, ses fourrures et ses bottes" (Lobineau), l'épitoge devait être assez éloigné de cette sorte de décoration de tissu blanc qui figure sur les statues de Penmarc'h et de la Madeleine, pour conserver encore une fonction vestimentaire.

C'est, pour l'instant, les deux seuls exemples que j'ai observé de l'épitoge sur les statues de saint Yves en Bretagne.

 

      Saint Michel terrassant le Dragon.

DSCN3014vvn

 

                                        DSCN3015c

      Père trinitaire 

ou plutôt, puisque la colombe est absente, Père de Pitié, Dieu-le-Père tenant dans ses bras le corps de son Fils, où, ici, un crucifix. XVIe siècle. (crucifix récent)

                     DSCN3024v

 

Sainte Claire

                                 DSCN2995c

 

Saint François.

      présentant ses stigmates. Noter les nœuds de capucin de la cordelière, dont le nombre (3) honore le dogme de la Trinité.

                                statues 2945v

 


Saint Eutrope évêque.

      Le Chanoine Pérennès écrivait :"Celui-ci est invoqué pour la guérison des maux de ventre, et l’on a recours à l’étrange coutume suivante : contre la statue du saint on frotte la chemise du malade placée au bout d’un bâton — parce que la statue est haute — et l’on en revêt ensuite le malade"

                      DSCN2996c 

 

 

Vierge .

                        DSCN3002v

 

 

Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle.

      Je vais peut-être avoir ici un indice pour la première statue non identifiée, puisque le livre que tient Notre-Dame est entouré d'un tissu de protection qui semble faire partie de sa reliure.

                      statues 2935v

 

Sainte Madeleine .

15e siècle.

J'ai cru d'abord qu'il ne s'agissait  plus de Marie-Madeleine baignant les pieds de son Rabouni de ses pleurs et de ses cheveux, ni de celle qui apporte le flacon d'onguent lors de la mise au tombeau, mais de Madeleine retirée, après l'Ascension du Christ  dans une grotte  où elle fut nourrie pendant trente ans par des anges qui l'élevait dans l'air pour qu'elle se rende à l'office *. Car ses cheveux ruisselant sur ses épaules comme une toison animale la faisait ressembler à Jean-Baptiste dans son désert. Mais sa robe est trop élégante pour les solitudes du massif de la Sainte-Baume, son front est encore épilé avec soin, son manteau est trop bien taillé, et sa ceinture, où est suspendue une chaîne terminée par un gland, souligne trop bien ce galbe d'un bassin projeté en avant selon la mode de l'époque. Un coup de peinture, et elle retrouverait tout son lustre.

*"Angelos suos Deus cotidie sua pietate mandat ut divinum michi officium singulis horis persolvant. Qui et me frequenter deducunt in aera in quibus repleor suavitate melliflua" Vita eremetica beatae Mariae Magdalenae

                           statues 2937v

 

Sainte Marguerite d'Antioche issant de son dragon.

                         statues 2940v

 

 

Saint Bernardin de Sienne, Confesseur

Par trois fois il refusa le poste d'évêque, notamment de Sienne ; et les trois mitres à ses pieds témoignent de ces refus pour mieux se consacrer à sa vocation de franciscain. Il ne refusa pourtant point le poste de Vicaire général des Franciscains de la Stricte-Observance. Ce fut un prêcheur renommé qui donnait ses sermons hors des églises en brandissant un panneau portant le monogramme christique IHS dans un soleil d'or, comme le montre cette statue. Il n'est pas certain que cet italien ait eu des yeux aussi bleus que sur son effigie de Penmarc'h.

                                  statues 2948cv

 

 

Saint Gildas.

                             statues 2988v

 

Sainte Barbe.

                  statues 2989v

 

Vierge à l'Enfant.

Pierre, reste de polychromie, bleu.

Certainement l'une des plus émouvantes par sa simplicité.


                       saint-nonna 2953c

 

 

 

Balustrade du Chœur en fer forgé

conservant la mémoire des Trésoriers Noël TRIVIDIC et Guillaume BARIOU I.

 

 

saint-nonna 2951c

 

saint-nonna 2952c

 

 

                           LES BANNIÉRES

 

Konsevet hep pec'hed :

                              banniere 2914c

 

 

banniere 2915c

 

Sant Nonna pedit evidom


 

                                   DSCN2998c

 

 

DSCN3001cc

 

DSCN3001ccc

 

DSCN3001cccc

 

 

                             DSCN2999c

                                   DSCN3001c

 

 

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Published by jean-yves cordier

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  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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  • jean-yves cordier
  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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