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1 décembre 2012 6 01 /12 /décembre /2012 19:45

Laisses de mer de l'Anse de Dinan, l' Echinocardium cordatum (Pennant, 1777).

 

 

 

 

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        Cet objet translucide et fragile comme une coquille d'œuf est le test* d'un oursin asymétrique en forme de cœur que l'homme, peu soucieux des pléonasmes, à nommé Echinocardium cordatum (en effet cardium, comme cardiaque, signifie "cœur" tout autant que cordatum ). On n'aura guère de mal à lui trouver un nom plus commun, puisque l'animal, quoique sourd, répond aux noms de souris de mer (parce qu'il est, à l'état vivant, couvert d'épines aussi douces et soyeuses qu'un pelage, et aussi surtout parce qu'il vit, durant la journée, au fond d'un terrier creusé dans le sable à 20 cm de profondeur), de souris des sables, d'oursin cœur, d'oursin des sables, d'hérisson de mer ou bien, mais cela froisse ses goûts très simples), de spatangue cordiforme, parce qu'il appartient à l'ordre des spatangoidae. Mais elle se console, la spatangue cordiforme française, en pensant à ses consœurs d'Outre-Manche qui se font traitées de sea potatoes.

  * Je vois bien que mon public s'agite, que des fesses se trémoussent sur les strapontins, que des doigts font mine de se lever, que les visages inquiets cachent mal une impatience fébrile, mais que chacun se rassure : vous l'aurez, l'étymologie du mot test, vous connaitrez la raison de l'utilisation, pour désigner cet exosquelette calcaire, de ce mot qui semble venir du latin testis, "témoin", d' où  proviennent testicules (les deux témoins de la virilité), testament, témoignage, attester, et...test. (En ancien français, les tesmoings, c'étaient les testicules).

    Je pose donc la question qui nous taraude : ces objets s'appellent-ils tests en raison de leur forme de leur forme ovoïde évocatrice ?

 Non. Ayant interrogé le CNRTL, foin de querelles intestines, la réponse tombe, formelle : le mot test est... attesté dans cette acceptation depuis 1200 ou 1220 pour désigner une coquille (d'oeuf), une coque (d'amande), une crustace (je crée le mot) de crabe ou d' écrevisse. L'origine en vient du mot qui, au XIIe siècle, désignait les tessons, les débis de pot cassé, à partir du latin testum, "vase d'argile".

 

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                                                                                      089c

 Puisque notre appétit de vocabulaire a été aiguisé, il est temps de lui offrir bonne chère, et de découvrir ce que sont les ambulacres (stricto sensu un lieu de promenade, de déambulation), les fascioles et les radioles, et, par défaut car la Souris de mer en est dépourvue, la Lanterne d'Aristote.

   Je l'ai dit, l'Oursin jaune s'enterre dans le sable, par petits fonds ; il se pose sur sa face plate, dite face inférieure, ventrale ou orale, alors que sa face convexe, ou aborale va communiquer avec la surface des fonds marins par un long conduit oblique s'évasant en son sommet, et donnant passage au pied ambulacraire. L'hérisson de mer est couvert de piquants qui ne piquent guère, qui sont gris beiges et soyeux et qui servent soit, sur la face supérieure, à soutenir les parois du terrier , soit à la face ventrale, grâce à leur forme spatulée en cuillère, à fouir le sable, creuser le terrier, ou guider la nourriture (du sable chargé d'élements organiques) vers la bouche.

 Durant la nuit, il sort pour se nourrir. Pour cela, il dispose d'une grande bouche, mais dépourvue de cet appareil manducateur dont son cousin Paracentrotus lividus (l'oursin commun, quoi) est pourvu et qui comporte cinq dents ; c'est cet organe qui est nommé lanterne d'Aristote.

Le test calcaire est formé de plaques de deux sortes : certaines sont perforées d'orifices qui donnent passage aux pédicellaires et aux pieds ambulacraires, pieds rétractiles munies de ventouses. Ces plaques ambulacraires s'organisent à la face dorsale pour rayonner en une fleur à quatre pétales. D'autres plaques, interambulacraires, sont dépourvues de pores.

 

La face supérieure dorsale :

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      La face inférieure ventrale :

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Source :

 http://mglebrusc.free.fr/textes/la%20mer/Faune/echinocardium.html

http://www.snv.jussieu.fr/bmedia/aimar2/PAGES/118.htm

 

II. Autres trouvailles.

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Published by jean-yves cordier
18 novembre 2012 7 18 /11 /novembre /2012 20:40

 

           La flottille de Pêche Côtière inscrite au registre d'armement du syndicat de Morgat 1945-1965. Liste et onomastique.

 

Je reprends ici, appliquée cette fois aux bateaux armés à la pêche côtière, l'étude du registre d'armement des navires de commerce du Syndicat de Morgat, Quartier de l'Inscription Maritime de Camaret, archives de la Marine 2P5 23, Brest.

  J'emploie les termes "pêche au large" et " pêche côtière" car sur le registre, les navires sont répartis, à la rubrique "nature de l'armement" en "1ère zone" et "2ème zone" puis à partir de 1955 en  "PC" et "PL" là où l'Administration demandait de distinguer "au long cours, au cabotage international ou aux grandes pêches, à la pêche au large, au cabotage, au bornage, à la petite pêche, au pilotage en mer ou en rivière".

 

I.  Liste alphabétique des 150 navires inscrits en pêche côtière (ou pour la 1ère zone de navigation) de 1945 à 1965, au Quartier de Camaret, Syndicat de Morgat.

 

 J'indique successivement le nom du navire, l'immatriculation, l'espèce du bâtiment et son tonnage, le nom du capitaine (et le prénom qui n'est indiqué qu'à partir de 1952), la puissance du moteur (à partir de l'année 1960).

  Je n'ai pas retenu TY-GUEN BR 2125 et l'AMI-GEORGES BR 1793, CLARTÉ,BR 5368 PIERROT BR 6580 présents en 1946-1950, qui n'étaient pas immatriculés à Camaret.

AMIRAL-LE-BIGOT Cm 3135, canot 3,51 tx, Joseph Ménesguen, 18cv go. (1962).

AMPHYTRITE Cm 2230, sloop 7,49 tx, Guéguéniat.

ANDRÉ-MARCELLE Cm 2447, sloop à moteur 2,8 tx, Sénéchal.

ANNIE, Cm 2862, vedette 4,68 tx, Jean Drévillon ; 16cv e.

ARRACHEUR, Cm 3054, canot à moteur 2,54 tx, Jean Morvan puis Jean Sénéchal ; 9cv e.

AURORE, Cm 2706, canot à moteur 1,76 tx, Souech ?

 AVENTIN, Cm 2822, 4,67 tx, Capitaine

BENGALI Cm 1826, sloop mixte 3,66tx, Le Bras.

BERCEAU-DU-PÊCHEUR, Cm 2720, canot à moteur, 3,82 tx, Kerspern puis Jean Kerdreux.

BONNAL Cm 2216, sloop à moteur 5,76 tx, Drévillon.

BOURLIBOU Cm 2590, sloop 11,93 tx, Kermel.

BRAVE-PETIT Cm 2730, canot, 1,36 tx, Capitaine

BRETON, Cm 2882, canot à moteur 1,88 tx, Pebern

CABRI, Cm 2934, vedette à moteur 6,72, P. Thomas.

CAPELLA Cm 2948, sloop à moteur 5,30 tx, Thomas.

CAROLINE, Cm 2711, Sloop, 16,33 tx, Guillaume.

CHARLES-DE-GAULLE, Cm 2847, vedette, 14,87 tx, Riou puis Yves Pennec, André Keraudren ; 16 cv.

CHRISTIAN, Cm 2970 1,97 tx, P. Quentric.

CIGOGNE Cm 2608, vedette à moteur 5,58tx, Maurice Boulineau ; 18cv e.

COCAR, Cm2770, Sloop, 6,05Tx, Kerspern.

COCCINELLE, Cm 2947, canot à moteur 11,94 tx, Kerdreux.

CORMORAN Cm 1939, Sloop 9,11Tx, J. Sénéchal puis Pierre Capitaine.

CRICRI, Cm 2056, sloop 13,54 tx, Menesguen.

CROIX-DE-LORRAINE, Cm 3022, pinasse à moteur 6,24 tx, Kerdreux puis François Calidec puis Thomas Guilloux

CYCLAMEN Cm 2168, sloop à moteur 8,73, Kermel.

DUMONT-DURVILLE, Cm 2639, Sloop 11,33Tx, Kerdreux.

ELIANE, Cm2904, vedette à moteur 4,52 tx, Capitaine puis hervé Rolland ; 15cv g.o.

EMMA Cm 2810, canot à moteur 1,95tx, P. Le Bretton puis 1955 Rolland puis Pierre le Bretton ; 5cv.e.

ENFANT-PRODIGUE, Cm 2028, sloop à moteur, Drévillon.

ENTRE-NOUS, Cm 3031, chaloupe à moteur 4,99 tx, Alain Drévillon puis Vincent Breu..1958.

ENTREPRENEUR, Cm 2027, Sloop, 9,89 tx, Morvan

ESPOIR, Cm 2821, canot, 0,90 tx, Kerneis puis Pierre Capitaine; 40 cv g.o.

ESPOIR-EN-DIEU, Cm 2841, vedette 5,84 tx, Pierre Kerdreux; 15cv go. (1962)

ÉTOILE, Cm 3060, canot à moteur 1,32 tx, J. Quiniou.

ÉTOILE-DES-NEIGES, Cm 2937, canot 4, 69 tx, Alain Ménesguen puis Jean Kerdreux 1958

ÉTOILE-DU-MARIN, Cm 2932,        14,94 tx, Kerdreux.

ÉTOILE-FILANTE, Cm 3048, pinasse 8,67 tx, Jean Kermel.

EXOCET, Cm 2992, canot à moteur 2,69, Hervé Lescop ; 15cv e.

FACTEUR, Cm 2742, 6,3 tx, Drévillon.

FENDS-LES-VAGUES, Cm 2708, Sloop 10,12Tx, Kermel.

FLEUR-DU-LOCH, Cm 2996, canot à moteur 1,70 tx, Thomas.

FLORENT, Cm 2228, Sloop, 8,49tx, Sénéchal.

FRANÇOISE, Cm 3152, canot 4,65 tx, François Belbeoc'h, 18cv g.o.(1965)

FRÈRE-MICHEL, Cm 3052, canot à moteur 4,88 tx, Joseph Ménesguen.

GALOPIC-BIHAN, Cm 1891 Sloop, 9,16Tx, Kerdreux.

GLADIATEUR, Cm 3105 pinasse 7,53 tx, Pierre Keraudren.

GLAZEN, Cm 2471, canot 3,02, Danielou

HÉLENE, Cm 2846, sloop 8,16 tx, Lescop.

HENRI, Cm 3015, plate 0,46, Hascoët.

HERVÉ-ODILE, Cm 2880, canot non-ponté 2,96 tx, P. Thomas.

JEAN-JACQUES, Cm 2900, vedette à moteur 11,92 tx, Louis Lescop puis Roger Marchand 16 cv. e.

JEAN-GILLES, Cm 3122, vedette 6,17 tx, Louis Thomas, 24cv g.o.

JEAN-MERMOZ (annexe ?) Cm 2666, canot à rames 3,81 tx, Drévillon

JEAN-ROGER Cm 2739, canot 1,16 Tx, Moré puis Auguste Alix.

JEANNE, Cm 2888, dundee mixte 16,25 tx, Joseph Drévillon, 36 cv.

JEANNE-D'ARC, Cm 2380, Sloop 13,51tx, Sénéchal puis Kerdreux.

JEANNE-D'ARC Cm 2272 canot à moteur 6,08, Kerdreux.

JEANNINE, Cm 3129, canot 2,10 tx, Joseph Boucharé, 10 cv e. 

JOJO Cm 2839 plate 1,22, Canerah ?

JOSEPH, Cm 2100, sloop à moteur 5,19tx, Keraudry (?)

JOSEPH-MONIQUE, Cm2528, Vedette 5,24Tx, Drévillon puis Herlé Kerspern, Jean Kerdreux, 10cv.

JOYEUX-PÊCHEUR, Cm 3084, dundee à moteur 15,74 tx, Alain Menesguen ; 75cv g.o.

JYPS, Cm 3127, canot 1,32 tx, Jean-Marie Le Soun, 4cv e. 

KADOR, Cm 2992, canot à moteur 1,88 tx, Le Bretton.

KENAVO Cm 2740 sloop 3,09, Lagadic.

LA LOUISE, Cm 2516, Sloop à voile 2,64tx, Thomas.

L'ABER, Cm 3153, canot 4,65 tx, Hervé Le Lann, 15cv go. (1965)

L'ANGELUS, Cm 2952, canot à moteur 3,86 tx, Kerdreux.

LAPÉROUSE, Cm 2849, Canot 1,78Tx, Jean Kervas ; 6cv e.

LE-PETIT-GEORGES, Cm 2961, canot à moteur 4,47 tx, Hervé Le Lann, 15cv.e.

LE ROUGET, Cm 3046, canot à moteur 3,64 tx, François Guillouroux, 10cv e.

LES-DEUX-FRERES Cm 2735, canot à moteur 1,96 tx, Sénéchal.

LES-TROIS-AMIS Cm 2662, canot 1,96 tx, Hervé Mondemer, sans moteur.

LES-TROIS-CAILLOUX, Cm 2927, canot à moteur 1,99 tx, Joseph Kerdreux.

LE-VENGEUR Cm 2578, canot 1,14, Hénaff puis Jean-Marie Euzen ; 7cv e.

L'EXILÉ, Cm 2990, canot non ponté 4,66 tx, Henri Menesguen ; 14/16 e.

L'OISEAU-BLEU, Cm 3001, canot non ponté 0,77 tx, Yves March'adour.

LOUIS-MADELEINE Cm 2761 sloop 23,97 Tx, Jean Drévillon.

MARCEL II, Cm 2796, Sloop 6,26 Tx, Drévillon.

MARCEL-CERDAN, Cm 2929, canot à moteur 3,54 tx, Bouchaie puis Corentin Sénéchal, Pierre Kerdreux. 10/12 e.

MARCELLE Cm 2976, vedette à moteur 4,93 tx, Jean Vigouroux.

MARC'H-MOR, Cm 3009, vedette 4,96 tx, René Drévillon, 24 cv g.o.

MARGUERITE Cm 2260, sloop 6,68 tx, Le Bretton.

MARGUERITE, Cm 2691, sloop 8,15 tx, Thomas.

MARIE-JOSEPHE CM 2733, sloop 13,72 tx, J. Drévillon

MARIE-LOUISE Cm 2726, sloop 1,96, Vigouroux puis Auguste Capitaine, Bernard Thomas, sans moteur. 

MARIE-MADELEINE Cm 1940, sloop 5,55tx, P. Drévillon.

MARIE-THÉRESE Cm 2721, canot à moteur 3,96Tx, Kinger puis Henri Kermel.

MASCOTTE, Cm 2055, sloop 9,66, Drévillon.

MERE-DE-MISÉRICORDE, Cm 2798, Sloop 10,56 Tx, Capitaine.

MOND-DOND Cm 2442, sloop à moteur 15,14 tx, Drévillon.

MONIQUE Cm 2581, sloop à moteur 9,27 tx, Kermel puis Hervé Rolland; 24 cv.e.

MONIQUE-ET-ALEXIS, Cm 3062, pinasse 6,75 tx, L. Kerdreux puis Herlé Kerspern

MON-RÊVE, Cm 3021, canot à moteur 1,84 tx, Kermel.

MOUETTE, Cm 2982, vedette 5,05 tx, Vincent Breu, 15cv g.o

N.D.-DE-LORETTE, Cm 2878, Sloop 7,26 Tx, Guillouroux.

NÉNUPHAR, Cm 2257, vedette à moteur 3,84 Tx, P. Thomas

NEPTUNE Cm 3091, pinasse 3,73 tx, Laurent Kinger  ; 15cv e.

NICOLE Cm 2787, sloop 9,1 tx, J. Drévillon

ODETTE, Cm 3021, canot à moteur 6,18 tx, Kerdreux.

OMBELLE II, Cm 2651, Canot à moteur 1,55 Tx, Hascoët.

PERROS, Cm 3025, canot 1,75 tx, Menesguen.

PETIT-BLEU Cm 2387, canot à voile 0,96, Euzen.

PETIT-FRANCIS CM 2239, sloop 8,00 tx, H. Lescop.

PETIT-JEAN Cm 2788, canot 1,59, Guéguéniat.

PETIT-JACQUES, Cm 2622, canot 2,98, tx, François Guéguéniat ; 10cv e.

PETIT-JOSEPH Cm 1890, sloop à moteur 11,29, Le Bretton.

PETIT-TIGRE Cm 2541, canot 1,7 Sénéchal.

PIERRE, Cm 2724 Pinasse 8,87, Riou.

PIERRE-FRANCOIS, Cm 2575, sloop 1,24, Thomas.

PIERRE-MARIE, Cm 2901 canot à moteur 2,83 tx, Louis Thomas.

PRÉSIDENT-ROOSEVELT, Cm 3112, canot 4,25 tx, Pierre Ménesguen ; 12cv g.o.

PRIMEVERE, Cm 2263, Sloop 12,82Tx, Guillouroux.

RED-AR-MOR, Cm 2603, Sloop 5,17 Tx, Etienne Capitaine ; 12cv e.

RENÉ, Cm 2663, canot à moteur 2,21 Alain Canevet.

REPT-OIL, Cm 2775, sloop à moteur 8,97, Boucharé.

RIGOULOT, Cm 2944, canot à moteur 1,96 tx  Jean Guéguéniat ; 8cv.e.

RIQUITA, Cm 3000, canot 3,98 tx, Albert Marchand puis Raymond Alemany.

RITA Cm 2598, canot à moteur 2,93 tx, Sénéchal.

RITA-II Cm 2832, canot 1,85, Hascoët.

ROSE-ÉFFEUILLÉE Cm 2716, 10,93, Menesguen puis Drévillon.

ROSIER-DE-MARIE Cm 3014, canot 3,94 tx, J.F. Lagadic puis Pierre Ménesguen, 12cv e;.

ROUÉ, Cm 2667, canot à moteur 2,21 tx Alain Canevet, 10 cv e.

ROY-D'YS, Cm 2629, Canot, 1,91 Tx, Boussaint.

SAINT-ANTOINE Cm 3019, canot 7,91 tx, Joseph Canevet, 24 cv go. (1965)

SAINT-JOSEPH, Cm 2314, Sloop 9,26, Kerdreux

SAINT-JOSEPH, Cm 2820, canot 1,00, Hascoët.

SAINT-NICOLAS, Cm 2052, Cotre 8,47 Tx, Le Bretton.

SAINT-NICOLAS, Cm 2053, sloop, 8,07 tx, A Le Bretton

SAINT-PIERRE Cm 2595, vedette 9,27 tx, Le Bretton. 

SAINTE-THÉRÈSE CM 2532, sloop 9,27 tx, Caledec.

SANTEZ-ANNA, Cm 2709, sloop 7,57, Gueguéniat.

SAPHIR-II Cm 2784, sloop 6,24 tx, Daniélou.

SAPHIR III Cm 2902, plate 1,36 tx, Daniélou.

SIRÈNE, Cm 3154 canot 6,07 tx, Victor Drévillon, 35cv g.o.

STEREDENN-VOR Cm 2636, pinasse 13,09 tx, Drévillon, 14 cv.

TI-PIERRE, Cm 2840, Vedette à moteur 4,16 Tx, Victor Drévillon ; 16 cv.e.

TIT GRIS Cm 2829, canot à moteur 1,35 tx, Kerdreux.

TOM-POUCE Cm 2838 Plate 1,1 tx, Kerdreux.

TONTON JEAN, Cm 2157, sloop 6,9, Kerdreux.

TOULERN Cm 2719, canot 1,88, Jean-Marie Le Soun

TREBOULER-II Cm 2819, canot 1,27 tx, Capitaine.

TREZ-BELLEC, Cm 2859, Canot 0,52 Tx, Colin

TURQUOISE Cm 1876, 10,77 tx, J. Vigouroux.

VA-HINI Cm 2233, sloop à moteur 3,67, Herjean.

VAINQUEUR-DES-JALOUX, Cm 2939, vedette 3,20, Etienne Capitaine, 15cv.

VALLÉE-de-JOSAPHAT, Cm 2679, Sloop, 11,65Tx, Kerdreux.

VERYACH Cm 2670, canot à moteur 1,76 tx, Keranton puis Isidore Lagadic ; 7cv e.

VOLONTÉS-DOUÉS Cm 2329, canot 1,4, Alix.

YVES-ET-JEAN, Cm 2700, canot, Laurent.

 

 

Promenade en mer.

  Dans cette liste , certains navires étaient affectés au transport de passagers pour des sorties touristiques : principalement MARIE-THÉRESE (23/16) d'Yves Kinger jusqu'en 1960, CIGOGNE (28/18) de Maurice Boulineau, TIT-PIERRE (23/6) de Victor Drévillon jusqu'en 1964, puis SIRENE (28/20) de Victor Drévillon à partir de 1965. Le premier chiffre indique le nombre de passagers pour la visite des grottes de Morgat, le second celui des passagers pour les sorties en mer (Baie de Morgat ou Cap de la Chèvre). 

  De nombreux autres bateaux armés pour la pêche côtière étaient inscrits sur le registre pour des sorties saisonnières en Baie de Douarnenez ou des sorties de pêche avec 2 à 5 passagers ( Le Vengeur, Étoile des Neiges, Charles de Gaulle, Hervé-Odile, Emma, René, Red ar Mor, Rigoulot, Neptune, etc...).

 

Les anciens navires de Douarnenez :

  18 navires de la flottille de Morgat ont été inscrits auparavant à Douarnenez, soit plus de 12% ; j'indique après le nom l'immatriculation dans ce port, le nom du patron, la date et le lieu de construction, tels que les indique le site arbbor.free.fr link

  Ces indications sont déduites de la réunion du nom identique et du tonnage identique ou très proche, mais le hasard a pu être responsable de coïncidences.

AMIRAL-LE-BIGOT : DZ3499 construit en 1941 au Guilvinec pour Etienne Bigot puis passé à Audierne.

BERCEAU-DU-PÊCHEUR : DZ2979 construit en 1929 pour Eugène Dauphart.

BONNAL, DZ 1221, patron Jean Moallic construit en 1919 à Douarnenez, .

BRETON, DZ 3585,  Jules Bramoullé dit Le Gaulois, construit en 1933,.

CHRISTIAN, DZ 3629, Alain Le Bescond, construit en 1944 à Tréboul.

DUMONT-DURVILLE, DZ 2774, Victor Nerrou, construit en 1926 à Douarnenez.

EMMA : DZ 71 : si c'est le même, (le tonnage de 1,93 tx est quasi-identique) c'est l'ancêtre de la flottille, construit en 1895 à Douarnenez, patron René Boudigou; il avait été cédé à Jean-François Trellu en 1903.

ETOILE-DU-MARIN, DZ 3367, pinasse, Emmanuel Marrec, construit en 1929 à Léchiagat (14,91 tx alors que le tonnage du Cm 2932 est de 14,94 tx).

L'ANGÉLUS, DZ 3515, Victor Vigouroux, construit en 1942 à Douarnenez.

MARCEL-II, DZ 3058, Joseph Moallic, construit en 1925 à Douarnenez.

MARCELLE, DZ 3325, Louis Cerbon, construit en 1937 à Tréboul.

MARC'H-MOR, DZ 3293, Louis Le Corre, construit en 1936 à Douarnenez.

MARGUERITE Cm 2260, DZ 2381, Alain Carnec construit en 1921 à Douarnenez, passé à Camaret en 1927.

ODETTE, DZ 2902 Jean-Pierre Tanguy, construit en 1928 à Tréboul (tonnage 6,16tx).

PIERRE, DZ 3180, Guillaume Perros, construit en 1928 à Gujan Mestras (Bassin d'Arcachon) et passé à Lorient 3006 puis à Guilvinec.

RIGOULOT, DZ 3148, construit en 1928 à Douarnenez, patron Gabriel Berre.

ROSE EFFEUILLÉE DZ 3020, Chapalain-Le gall, construit en 1930 à Douarnenez.

VALLEE-DE-JOSAPHAT, DZ 2949, pinasse, Jean Bozec, construit en 1929 à Douarnenez.



 

II. Onomastique navale de la flottille de pêche côtière à Morgat 1945-1965.

  Pendant la période 1945-1965, un total de 150 navires ont été inscrits pour la pêche côtière sur le registre d'armement du syndicat de Morgat et immatriculé à Camaret, chiffre qui peut être comparé à celui des 51 navires de la flotte de pêche au large. On en comptait 54 pour l'année 1945 et  23 en 1965.

 Je reprends pour cette étude onomastique la répartition présentée dans l'étude, parallèle et précédente, de la flottille de pêche au large, répartition inspirée de celle de D. Confolent 1993 pour la région de Granville. voir :  La flottille de Pêche au Large de Camaret-Morgat 1945-1965.

  Mais au préalable, je signale la relative rareté des  noms en langue bretonne : si on excepte les toponymes (Kador, Veryach), on ne retient que 8 noms : Galopic-bihan, Glazen, Kenavo, Marc'h-mor, Mond-Dond, Red ar Mor, Roué, Santez-Anna, Steredenn-Vor, Volontes-Doués, dont on constate la banalité ; aucun ne crée réellement un obstacle à la compréhension pour un non-bretonnant, hormis Mond-Dond. La volonté d'afficher une identité linguistique ou des convictions régionalistes apparaît inexistante. Une mention à part pour le Glazen (littéralement : "verdure, pelouse"), puisqu'une villa de Morgat construite en 1938 portait ce nom (Ar Glazen) de même qu'un quartier de Douarnenez, ar C'hlazenn, au dessus du port de Plomarc'h.

 

1. Noms liés à la Religion : 20 noms = 13,5%

 Espoir-en-Dieu, Frère-Michel (?), L'Angélus, Jeanne d'Arc (x2), Mère de Miséricorde, N.D.de Lorette, Rose-Effeuillée, Rosier de Marie, Santez-Anna, les saints Antoine, Joseph (x2), Nicolas (x2) et Pierre, Sainte-Thérèse, Steredenn-Vor, Vallée de Josaphat et Volontes-Doués. 

  La proportion est proche de celle des navires de pêche au large, mais on voit apparaître 6 saints, dont le saint patron des pêcheurs, (saint Pierre, patron de l'église paroissiale), le patron des marins et bateliers (saint Nicolas). Sainte Anne, omniprésente en Bretagne, apparaît aussi alors que son absence était remarquable pour la pêche au large. On note 4 références mariales dont le qualificatif  Maris Stella dont Steredenn-Vor est la traduction.

  Chacun de ces noms peut être retrouvé comme nom de baptême de nombreux bateaux de pêche des côtes bretonnes, à l'exception de Vallée de Josaphat qui est original. Cette vallée située près du Mont des Oliviers et de Jérusalem est évocatrice du Jugement dernier pour les Chrétiens, qui citent le prophète Joël. Ce nom a-t-il été soufflé par le recteur, ou figurait-il dans un cantique ? En réalité le nom vient de Douarnenez, de même que le bateau construit en 1929 pour Jean Bozec et passé à Camaret. Le nom est aussi attesté dans ce port par la chaloupe DZ649 construit  en 1900 et la pinasse  DZ 3324 de 1937.

La Rose Effeuillée est le titre d'un poème de Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus composé en mai 1897 et mis en musique (écouter ici :link ). Il débute ainsi, tel qu'on peut l'imaginer entonné par l'équipage :Jésus, quand je te vois soutenu par ta Mère Quitter ses bras Essayer en tremblant sur notre triste terre Tes premiers pas Devant toi je voudrais effeuiller une rose En sa fraîcheur Pour que ton petit pied bien doucement repose Sur une fleur!  ...Cette rose effeuillée, c' est la fidèle image Divin Enfant Du cœur qui veut pour toi s'immoler sans partage A chaque instant. Seigneur, sur tes autels plus qu'une fraîche rose Aime à briller Elle se donne à toi..... mais je rêve autre chose: C' est m'effeuiller !... 

2. Prénoms.  48 noms, soit 32%.

  Là encore, la proportion est proche de celle de la flottille hauturière (27%), mais cette fois-ci les prénoms comportent une grande quantité de Jean et Jeanne, de Marie et Joseph, mais aussi  de Pierre et de Marcel/Marcelle, et je peux penser que la liste des prénoms est un bon reflet de ceux des enfants ou des proches des marins pêcheurs. On n'y trouve pas de prénoms exotiques ou inhabituels, tout-au-plus peut-on penser que Riquita et Rita n'étaient pas les prénoms de membres des familles des pêcheurs, et que Riquita fait référence à une chanson "qui était sur toutes les lèvres", crée en 1926 par Benech et Dumont.

3. Histoire et mythologie. 12 noms = 8%

 a) Histoire.

L'effet "lendemain de Seconde-Guerre" se retrouve ici encore avec le Charles-de-Gaulle et le Croix-de-Lorraine, avec le Président-Roosevelt, mais aussi avec l'Amiral-le-Bigot

 Jules  Maurice Le Bigot (Saint-Brieuc 1883-Paris 1965), Vice-Amiral en mars 1937 et préfet de la première région maritime à Cherbourg en novembre 1939, organisa la défense du port à l'approche des Allemands en 1940, permettant aux soldats anglais de ré-embarquer avant de reconnaître la reddition du port face à Erwin Rommel le 19 juin 1940 et d'être fait prisonnier.  Il devient Président du comité central des pêches maritimes de juin 1941 à décembre 1942, au moment où les pêcheurs ont à déplorer de nombreux accidents par faits de guerre, et où l'exercice de leur métier est difficile.

  Les autres références sont l'aviateur Jean Mermoz, les navigateurs explorateurs Dumont-Durville et Lapérouse, et enfin le champion de boxe Marcel Cerdan (1916-1949) dont la mort accidentelle en avion le 28 octobre 1949, venant clore le roman d'amour avec Édith Piaf, était dans tous les esprits.

  Je place aussi dans cette rubrique "Histoire" le nom de Rigoulot, si celui-ci rend hommage au champion d'haltérophilie et coureur automobile Charles Rigoulot ( 1903-1962), médaille d'or aux jeux Olympiques de 1924. 

b) Mythologie.

  Amphytrite, Neptune, Sirène.

4. Formules et qualifications.  25 noms = 16,6%

 Je regroupe dans cette catégorie fourre-tout l'Arracheur, Berceau-du-Pécheur, Brave-Petit, Breton, L'Enfant-Prodigue, Entre-Nous, Entrepreneur, Espoir, Fends-les-Vagues, Galopic-Bihan ["Petit-Galopin], Glazen, Joyeux-Pêcheur, Kenavo, L Éxilé, Les-deux-Frères, Les-Trois Amis, Les-trois Cailloux, Mond-Dond, Mon-Rêve, Petit-Bleu, Petit-Tigre, Red-ar-Mor, Roué, Tom-Pouce, Vainqueur-des-jaloux.

  La traduction de Mond-Dond m'a occupé quelque temps, avant de découvrir sa signification bretonne d' "aller-retour" dans un texte consacré aux navettes de l'Enez-Sun.

 5. Mer et Géographie 9 noms = 6%

Aventin, Bourlibou, Kador, L'Aber, Perros, Toulern, Trebouler II, Trez-Bellec, Veryach.

L'Aventin est une colline de Rome, Kador, l'Aber, Trez_Bellec et le Veryac'h sont des sites du littoral de la Presqu'île de Crozon.

Le curieux Bourlibou est attesté comme nom de rue, tenant son origine au XIIIe siècle de Bourg-Thiboud, Burgi Thiboudi (quartier Sainte-Avoye de Paris-12ème). C'est aussi le nom d'un quartier et ancien faubourg de Quimper sur la rive de l'Odet (actuelle rue Bourg-les-Bourgs). C'est surtout le nom d'un lieu-dit ou d'un ancien village de Douarnenez situé dans le secteur de Pouldavid. En-effet, un canot ponté Bourlibou DZ 2773 de 2,51tx a été construit à Douarnenez en 1926, mais ce n'est pas le sloop Cm 2590.

  Je n'ai pas identifié Toulern. Le toponyme Perros est attesté à Crozon.


6.Fleurs, fruits et minéraux. 8 noms, soit 5,3%

Parmi les fleurs : Cyclamen, Fleur-du-Loch, Nénuphar, Ombelle, Primevère,

et pour les pierres précieuses : Saphir-II, Saphir-III, Turquoise.

7. Animaux. 12 noms, soit 8 %

Bengali, Cabri, Cigogne, Coccinelle, Cormoran, Exocet, Le-Rouget, L'Oiseau-Bleu, Mascotte, Marc'h-Mor, Mouette, Petit Tigre.

  J'ai considéré que Bengali ne désignait pas la langue usitée au Bengale, mais le passereau Amandava amandava, aussi nommé bengali rouge.

Marc'h-mor signifie en breton "Cheval de mer", et désigne l'hippocampe.

8. Autres. : 16 noms = 10,6%

a) autres éléments naturels : 6 noms

Aurore, Capella, Étoile, Étoile-des-Neiges, Étoile-du-Marin, Étoile-Filante.

 Capella ou "chevrette" est l'étoile la plus brillante de la constellation du Cocher.

l'Étoile-des-Neiges désigne plutôt la chanson en vogue créée par Jacques Plante en 1953, et interprétée entre autre par Line Renaud ou les Compagnons de la Chanson. (je vous propose de l'écouter chantée par André Claveau :Étoile des neiges mon cœur amoureux s'est pris au piège de tes grands yeux, etc....)

 L'Etoile du Marin est aussi une chanson de la même époque quoique crée en 1921 par Bénech et Dumont (auteurs de Riquita, déjà citée, mais aussi de Nuit de Chine ou de l'Hirondelle du faubourg).

b) Inclassés: 10 noms

 Bonnal : le Bonnal était un bateau de Douarnenez, DZ 2202, construit en 1919, patron Jean Moallic, classé comme canot non ponté, et passé à Camaret en 1926. L'origine du nom serait à recherché dans son port d'origine. Un indice est représenté par un autre bateau du même Jean Moallic, DZ 2754, le Docteur-Bonnal.

Cricri

Cocar : il existe une chanson d'E. Jacques Dalcroze (1865-1950) intitulée Cocar, briscar.

Facteur; Gladiateur ; Jyps (l'acronyme de prénoms ?) ,Rept-oil (jeu de mot sur "reptile" ?); Roy d'Ys, Tit-gris, Va-hini

 

      CONCLUSION.

  Nos animaux et nos objets familiers nous sont incorporés, ils sont les extensions de notre entité individuelle. Parmi ceux-ci, ceux à qui nous attribuons des noms propres sont finalement très rares : les chiens et les chats, les chevaux, plus rarement le bétail, les maisons individuelles (rarement) ; les militaires nomment leurs chars ; nous ne nommons pas nos voitures, auxquelles nous semblons pourtant très attachés. Mais nous nommons toujours nos navires ; mieux, nous les baptisons, et la participation du clergé et d'une marraine à la cérémonie montre bien l'intensité exceptionnelle de l'anthropomorphisme qui les concerne. Seules les cloches des églises reçoivent un tel hommage : par leur noms de baptême, les navires rentrent, en quelque sorte, dans le domaine sacré, peut-être parce que la mer reste toujours profondément duelle, à la fois féconde et maléfique.

   Dès lors, l'étude des noms de bateau permet une exploration du petit univers de la société à laquelle ils appartiennent.

 L'importance des prénoms dit bien à quel point le navire de pêche est anthropomorphisé, à quel point il devient un membre d'une famille, ou encore le porteur des espoirs d'une famille : la notion même de famille est, dans le cadre temporel et spatial étudié (mais c'est en fait une réalité bien plus générale) indissociable du navire de pêche. Un navire est alors la propriété d'un groupe familial avant d'être celle d'un groupement d'intérêt. Par les termes de "tonton", de "petit" (Petit -Jean, Petit-Jacques, Petit-Joseph) parfois diminué en "ti", c'est l'intimité des liens qui est dévoilée.

 Par contraste, l'absence des termes liés à l'amour et, dans cette activité de pêche encore exclusivement masculine, la discrétion de l'évocation féminine lorsqu'elle n'est pas maternelle ou religieuse est frappante : point ici de "ma-Blonde", de "Chérie", de "Mon-Coeur", pas de Vénus", d'"Eros", ou de diminutif féminin (Riquita et Rita font exception, mais la première évoque une chanson). On remarque tout-de-même Nous-Deux.  

  Le nom de bateau est aussi le lieu de projection des valeurs et des croyances : foi religieuse ici, militantisme politique ailleurs, projection sur les héros du jour ou de toujours.

  Plus banalement, mais témoignant de manière plus fine d'une "atmosphère" fugace que le temps efface très vite, ce sont les petits détails de la vie quotidienne qui s'y inscrivent : je pense notamment aux titres des "succès", les chansons Riquita, L'Etoile des Neiges, l'Etoile du Marin, qu'il est émouvant de retrouver.

  Georges Perec avait innové en donnant dans Je me souviens (Hachette, 1978) la liste de ces petits riens qui s'incorporent pour créer notre existence; plus récemment, Orhan Pamuk, dans Le Musée de l'innocence (Gallimard,2011), a fait preuve de sa détermination à réunir dans un musée d'Istanbul tous les objets familiers et disparus qui avaient formé le cadre concret de son histoire d'amour avec la belle Füsun. Ce ne sont plus alors les êtres humains qui incorporent les objets, mais les objets qui retiennent avec eux une part de notre vécu, et qui nous le restituent lorsque, avec quelle émotion, nous les retrouvons.

  Il était intéressant de voir si il existait des différences dans la dénomination des bateaux de pêche côtière et de pêche au large , et des différences selon les régions : voici les résultats pour Morgat Pêche Côtière, Morgat Pêche au Large, et Granville:

  Morgat P.C 1945-65 Morgat P.L 1945-65 Granville 1939
Religion 13,5 7,8% 11%
Prénoms 32% 27,4% 40%
Histoire et mythologie 8% 7,8% 14%
Formules et qualifications 16,6% 9,9% 23%
Mer et géographie 6% 21,5% 4%
Fleurs, fruits, minéraux 5,3% 5,9% 0%
Animaux 8% 4% 4%
Autres. 10,6% 15,7% 4%

  L'élément frappant est représenté par la catégorie Mer et géographie, qui, en pratique, regroupe essentiellement des noms de lieux. La fréquence de ces noms passe du simple à plus du triple lorsqu'il s'agit de la pêche au large. On peut penser simplement que lorsque les pêcheurs partent pour de longues campagnes sur des mers lointaines, ils éprouvent le besoin d'identifier leur espace de vie _le bateau_ avec un coin de leur espace familier (8 des 11 noms de la flottille PL).

  Le modèle proposé par l'anthropologue Edmund Leach peut aider à appréhender pourquoi l'homme éprouve la nécessité de nommer ses navires comme il nomme ses chiens et ses chevaux, et pourquoi la pêche au large diffère de la pêche côtière : cet auteur estime que les êtres humains organisent l'espace en une série de cercles concentriques régis par des interdits alimentaires et sexuels : les espaces du familier en proximité immédiate, du domestique, de la chasse, et du sauvage. Dans le premier espace, dans la clôture autour de la maison, on ne consomme pas les animaux , et les humains s'interdisent les relations sexuelles dans la parenté. Si on sort de la maison, dans les champs et les bois, on consomme les animaux que l'on peut capturer, et c'est dans cette sphère villageoise que l'on recherche un/une conjointe. L'espace intermédiaire suivant n'est plus domestiqué, mais c'est le lieu de quête de nourriture, de chasse du gibier, ou de recherche de relation. Au delà, c'est l'espace du sauvage, frappé d'interdit de consommation alimentaire d'animaux inconnus tout comme l'étranger qui pourrait y vivre est frappé de tabou sexuel. 

  Parcourir l'espace maritime proche pour y récolter des maquereaux ou des sardines dont les bancs se rapprochent des côtes, ou ramener dans ses casiers des crabes ou des homards ne met pas en jeu les mêmes résistances, les mêmes peurs, les mêmes forces relevant du sacré que de s'approprier l'espace maritime lointain de la Mauritanie ou de la Guinée. 

  Je me garderai d'aller plus loin dans une interprétation aventureuse de chiffres basés sur une courte série, me contentant d'indiquer quels horizons se dégageaient devant moi.

 

  L'onomastique navale a Molène (29).

Un travail a été publié par Isabelle Leblic pour la flottille de Molène en 1995 A propos de l'onomastique navale : noms de bateaux et identité molénaise (Finistère-Nord). Paris, Centre d'ethno-technologie en milieux aquatiques, 1995 Cahier n° 5, pp. 185-200., 16 p. 21 cm.

  Celle-ci a réuni 568 nom de bateaux de Molène de 1800 à 1980 ; elle les a répartis selon 11 catégories, avec des résultats globaux, qu'elle a ensuite étudié par décennie. Dans le tableau suivant, je donne le résultat total, celui de la période correspondant à peu-prés à mon étude (1950-59), puis celui de la décennie 1910-19 de la Première-Guerre, et son rebond religieux. (lIsabelle Leblic a compté certains bateaux dans plusieurs rubriques et la somme des résultats dépasse 100 %) :

Onomastique navale Molène 1800-1980 1950-1959 1910-1919
Prénoms, famille 44,5 % 36 % 42,1 %
Religion 22,7 % 24 %  44,7 %
Nature, environnement 18,3 %  44 % 15,8 %
Qualités défauts 5,3 % 8 % 0
Histoire  4,2 % 0 5,3 %
Êtres vivants 3,7 % 8 % 7,9 %
Méteo, astres 2,3 % 0 0
Souhaits 1,9 % 0 0
Toponymes, lieux géogr. 1,8 % 0 0
Mythologie 1,2 % 0 0
Fatalisme 1,2% 0 0

 

 


 Les études réalisées à Granville et à Molène fournissent avec une certaine constance le chiffre de 60% pour la somme Religion = Prénoms, pour un "poste" assez représentatif de l'intimité et de la tradition. A Morgat, ce cumul n'atteint que 45 % (P.C) et 35 % (P.L) : cette différence très significative mérite d'être considérée.

 

L'onomastique navale du Quartier Maritime de Brest.

 Trois mois plus tard,'ai trouvé à la Bibliothèque Universitaire de Brest le mémoire suivant :

Stephanie LE BIAN, L'onomastique navale, le noms bretons des bateaux du quartier maritime de Brest, Maîtrise de sociologie, tuteur Philippe Lacombe, Université de Bretagne Occidentale, Faculté Victor Ségalen, département de Sociologie, T2BR500/44, s.d.

  L'auteur est partie de la liste des navires de 6 à 10 tonneaux du bureau des Affaires Maritimes de Brest, liste de 1024 navires répartis en 99 navires de pêche et 925 navires de plaisance. Le mémoire n'est pas daté et la période d'étude n'est pas précisée, mais, si on se base sur un tableau de la page 36, les années (d'immatriculation ?) se répartissent de 1960 à 1993 (ou 1994).

Elle a réparti sa série selon les rubriques suivantes (j'ai arrondi les %):

 

  bateaux de pêche (n : 99) bateaux de plaisance (n : 925)
nom consonnance bretonne 37,4 % 27,3 %
prénoms 14 % 12 %
noms géographiques 10 % 3,7 %
noms religieux / saints. 7,1 1,5
Astres, Rites 7,1 1,5
Mythes, croyances 6,1 7,2
Expressions 4,4 6,7
Divers 4,1 11,2
Animaux 3,1 4,3
personnages célèbres 3,1 4,3
Amers et lieux-dits 3,1 néant
mer, faune, flore. 1 1,5
Connotation étrangère 1 7,4
Alcool, boisson, drogue néant 1
dèpourvu de sens. néant 9

   Stéphanie Le Bian remarque que la proportion de noms "magico-religieux (religion + Mythes + Astres ) atteint 20 % des navires de pêche contre 10 % des navires de plaisance.

  La liste des noms bretons de navires de pêche débute par une perle, la mention d'AL DE BARAN. Lorsqu'on aura replacé cet Aldebaran dans la rubrique des Astres, on trouvera : Aberwrac'h, Ar Bleiz [le Loup], Asta Buen ["Dépêche-toi" : sans-doute le BR 155922, chantier naval Lastenet, Camaret 1972, actuellement au Tinduff], Beghir, Bugel ar Mor, Bugale Bihan, Cap Kornoeg, Dalc'h Atao, Dalc'h Mad, Deom Dei [ "Allons-vers-elle"], Dishual,[Libre], Dolmen, Enez Hir, Goueled Avo, Kanaouen Ar Mor [Chanson de Mer], Kein Vor, Keller, Kendalc'h ["Maintien" : confédération de cercles celtiques], Labous Mor ["Oiseau de mer"], Liou an Amzer, Louarn ar Mor, Mam Biel, Mam Goz, Men Tensel, Mouss Bihen, Nannig, Nividic, Roannez ar Peoc'h, Roc'h Avel, Strern 2, Talarmor, Tibidy, Trevors, Ty Bour, Vioben.



 

III. L'étude des noms de bateau, comme science.

L'onomastique navale n'est pas une science développée, et elle attend, comme l'héraldique ou l'histoire des couleurs l'a fait jadis, son Michel Pastoureau; pas plus que pour les noms d'animaux, où j'ai forgé le néologisme de zoonymie, elle ne dispose d'un terme spécifique pour désigner les noms de navire, et les candidats possibles (scaphonymie, navinymie) ne sont pas attractifs. Ce n'est pas mon petit travail d'amateur qui fera changer les choses...

 


  On peut lire pourtant :

 Martine Acerra  La symbolique des noms de navires de guerre dans la marine française (1661-1815) Histoire, économie et société, 1997, 16, pp. 45-61.

 

IV. Site Utile :

Liste de 4366  bateaux Douarnenistes http://arbbor.free.fr/dz_bateaux.htm

Liste des navires de pêche armés au Conquet 1943 :

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Published by jean-yves cordier
18 novembre 2012 7 18 /11 /novembre /2012 19:43

Le moteur de Tante-Yvonne, suite.

La flottille de pêche au large inscrite à Morgat de 1945 à 1965. Liste et onomastique.

   Extrait du Registre des armements de commerce du Syndicat de Morgat, archives de la Marine, sous-série 2P,  Brest 2P5 23. Le Quartier Maritime de Camaret a été constitué en 1882, après avoir été un syndicat dépendant de Quimper (ou, au début du XIXe, de Brest). Le Syndicat de Morgat en dépend. Le bâtiment de l'Inscription Maritime était située sur le port de Morgat, sous la villa Lazard.

    Le corps des Administrateurs de l'Inscription Maritime, qui tient ce registre, a été fondé en 1905 par Camille Pelletan et supprimé en 1965 au profit des Administrateurs des Affaires Maritimes. La première page porte les signatures, " vu en inspection annuelle à Morgat" de :

  • Illisible, 14 sept 1945,
  • Delaporte, Administrateur Principal de l'I.M (officier supérieur) en nov.1951
  • Baudean en 1952
  • Illisible, 1953 et 1957
  • Pennec, Adm. de Ier classe I.M. (officier subalterne) en 1960
  • Pennec, Adm. Principal IM en 1962,
  • Berlier, Admn. Aff. Mar. 1974.

  Ce registre répartit les navires en PL, Pêche au Large et PC, Pêche Côtière, sur la période 1943 à 1969. J'ai étudié uniquement la pêche au large, de 1945 jusqu'au naufrage de Tante-Yvonne en 1965.

 

I. Les informations concernant le Tante-Yvonne.

 Je n'indique pas l'immatriculation, qui reste inchangée Cm2909.

Sa première mention du registre 1943-1969 est portée pour l'année 1949 :

Année qualification tonnage en Tx patron moteur
1949 Dundee mixte 66,68 Lescop  
1950 Dundee mixte id Lescop Louis  
1951 Dundee à moteur id Lescop  
1952 id id Lescop Louis  
1953 id id id  
1954 Dundee id id  
1955 id 72,58 id  
1956 Malamock 66,7 Lescop H...  
1957 id 66,7 Lescop H  
1958 id id Lescop H  
1959 id id Lescop Hervé  
1960 id id id 224 cv go
1961 id id id id.
1962 id id Moysan Pierre id.
1963 id 72,58 id id.
1964 id id. Kerspern id.
1965 id id Kerspern Herlé  


Le "Dundee mixte" désigne le gréement de voiliers de pêche, les dundee thonier ou dundee langoustier avec un grand-mât et un tape-cul, mais dont l'épithète "mixte" signale qu'il est motorisé.

  Le "Malamok" désigne, dans les ports du quartier du Guilvinec, des bateaux de pêche apparus par évolution de la pinasse sardinière avec un faible tirant d'eau, un pontage, une cabine, un moteur diesel, une taille de 14 à 20 mètres, et équipés d'un chalut à panneau divergent; on en comptait 75 dans ce quartier maritime en 1939. Mais cette pêche au chalut ne définit pas ce type de bateau, puisqu'il existait, à Douarnenez, Morgat et Camaret, des malamoks thoniers (comme Reder ar Moriou), ou thoniers-maquereautiers. Leur nom, qui est le surnom breton d'oiseaux du Cap-Horn, aurait été attribué à ces navires en raison de leur impressionnante capacité de pêche qui évoque la voracité des albatros. A Morgat, le nom de malamok désigne donc des navires de pêche au thon, succédant aux dundees à voile, et dont la motorisation permet de se rendre sur les lieux de pêche sans tirer des bords, et de manoeuvrer facilement lors de la pêche ; l'arrière est en cul-de-poule,  le barreur dispose d'un abri, et les voiles servent  pour stabiliser le bateau par vent de travers ou en appoint pour économiser le carburant . Reder ar Moriou et Breizh-Atao étaient les seuls Malamoks avant la guerre.

  Le Tante-Yvonne est désarmé de novembre en février en 1949 et 1950, de décembre en février en 1950-51, puis le registre n'enregistre plus de période de désarmement.

 

II. Les autres bateaux de pêche au large 1945-1965.

La puissance du moteur est portée sur le registre à partir de l'année 1960.

Les renseignements qui ne proviennent pas du registre sont portés en italique, ils proviennent du site http://arbbor.free.fr/Bateaux_alpha.pdf.

Je n'ai porté que les unités immatriculées à Camaret. J'indique les autres en annexe.

 

AMAZONE Cm 2930, Chalutier-thonier, 68,27Tx, Pierre Sénéchal, 200cv, 1959

ANDRÉ-PAUL, Cm 2165, Dundee, 40,03 Tx, Capitaine

BERYL, Cm 3147, Chalutier-thonier, 58,77 Tx, Jean Menesguen, 200cv Baudouin.  Construit à Camaret en 1959, il passera à Douarnenez DZ 4163

BON-RETOUR, Cm 3078, Thonier 120,17Tx, René Guegueniat, 1957.

BREIZH-ATAO, Cm 2707, Dundee-mixte, 65,84 Tx, Guegueniat

CHARLES-LE-GOFFIC, Cm 2925, Malamok, 61,83 Tx, Riou.

CHARLESTON Cm 3102, Langoustier-congélateur, 285,73Tx, Louis Riou, 400cv, 1959

CHLOÉ, Cm 2004, Dundee-mixte, 54,09 Tx, Lescop.

Cdt d'ESTIENNE-D'ORVES, Cm 2958, Dundee mixte 48,95Tx, Thomas, 1955, 

CONSTELLATION, Cm 3130, Langoustier congélateur,329,29 Tx, Pierre Menesguen, 420cv 1962

CORENTINE, Cm 3039, Langoustier, 66,13Tx, , Roger Marchand, 120 cv, 1965

ETOILE DU BERGER Cm 3064, Langoustier-thonier, 70,79Tx, Michel Sénéchal, 135 cv.

FLEUR-DE-MAI, Cm 2153, Dundee à moteur, 30,93 Tx, Kermel;

FOËDERIS ARCA Cm 2762, Dundee mixte, 43,66 Tx, Jh Kerdreux, 1948.

FRAÏ-LANN, Cm 3142, Chalutier-Thonier, 150,58Tx, Alain Menesguen, 225cv, 1964

GAMBAS, Cm 3078, Thonier, 120,17Tx, Pierre Kermel, 320 cv, 1963.

GISÉLE-ROGER Cm 2909, Malamok,40,88Tx, Roger Kerdreux, 120cv.

GRAND-PIERRE, Cm 3041 , Langoustier, 62,48Tx, René Guégueniat, 150cv.

GUY-ET-MILO, Cm 2978, Malamok, 45,12Tx, Auguste Sénéchal, 380cv.

INTRON-MARIA-GWELL-MOR, Cm 3088, Chalutier-thonier, 124,54Tx, Jean Morvan, 320cv, 1960

JACQUELINE-FRANCINE, Cm 2926, malamok, 34,14Tx, Quentric, 1950

JAZZ-BAND Cm 2142, Dundee mixte, 42,39 Tx, Capitaine

JEUNE AUGUSTE Cm 2141, Dundee mixte, 41,96 Tx, Kerdreux

KADOR, Cm 3097, Langoustier-thonier, 140Tx, Jean Kermel, 1959

KENAVO, Cm 2889, Langoustier-thonier, 58,06Tx, Pierre Marchand, 160cv.

KEROGAN,Cm 3128 Langoustier 78,23Tx, Joseph Thomas, 1963. Moteur Baudouin 160 cv, longueur 17,55 m. Construit en 1957 à Tréboul, immatriculé DZ 4016 patron Yves Lagadec, il est passé à Camaret en 1962.

LA BARBADE Cm 3136, Langoustier, 328,29 Tx, Joseph Riou, 490cv, 1963.

LA HOULE Cm 3141, Chalutier-thonier, 65,03tx, Jean Morvan, 320cv, 1964

LE CONDOR, Cm 3139, Langoustier 140,70tx, René  Sénéchal, 380cv, 1965.

LE MORGATOIS, Cm 3031,  Dundee mixte, 50,66Tx, 126cv, Yves le Moign.

MAÏTENA, Cm 3143, Langoustier, 162,86Tx, Francis Guillouroux, 325 cv, 1965, puis MX195448. Construit au Fret en 1964, il passera à Douarnenez DZ 4107, moteur 441 cv Marep.

PEN AR ROZ, Cm 3098, Langoustier, 39,52 Tx,  Joseph Drévillon 120cv,. 1959

PEN GLAS, Cm 3115,Langoustier 63,58 Tx,  Pierre Menesguen 150 cv,. 1963

PERE-BENOÎT, Cm 3065, Chalutier-thonier, 129,36Tx, Joseph Drévillon, 1957.

PETIT-CHARLES Cm 2205, Dundee mixte, 39,09 Tx, Kerdreux

PETITE-MARIE-FRANCOISE, Cm 2984, Dundee, Quentric, 1952

PORT-MANECH, Cm 3007, Dundee à moteur, 60,15 Tx, Kerspern, 1953.

PORTZIC, Cm 3144, Langoustier Thonier, 164,09Tx, 400 cv, Pierre Menesguen

RAYMOND-MOREAU Cm 3157, Chalutier-thonier, 66, 17Tx, Joseph Thomas, 240cv

REDER-AR-MORIOU, Dundee mixte, 59,89 Tx, Riou.

ROUERGUE Cm 3160, chalutier, 49,92Tx, Jean Drévillon, 300 cv, 1965

RUBIS Cm 3118, Langoustier congélateur, 233,48Tx, Marcel Kermel, 420cv, 1961.

SACRÉ-COEUR, Cm 3079, Dundee ponté, 41,53Tx, Jean Le Bretton, 1957. Construit en 1945 à Douarnenez pour Joseph Urvoas immatriculé DZ 1945, il mesure 17,88 m ; moteur 114cv Man. 

SANTA-HELENA, Cm 3030 chalutier-thonier, 63,86Tx, Victor Menesguen, 200cv 1958

TANTE-YVONNE, Cm 2909, Malamok, 66,68Tx, Lescop/Moysan/Kerspern, 224cv.

THAÏS, Cm3066, Langoustier, 39,84 Tx, 120 Cv, Pierre Moysan.

THIERRY-DE-MARTEL, Cm 2869, Malamok, 45,94 Tx, Salaun, 1950

TREZIC, Cm 3137, Langoustier, 148,14 Tx, H. Guegueniat, 300cv, 1963

VA BRO, Cm 2925, Malamock, 61,83Tx, Jean Drévillon, 1950.

YVETTE Cm 2580, Dundee mixte, 67,45 Tx, Drévillon

ZEPHIR, Cm 2951, Dundee à moteur, 49,51 Tx, Pierre Riou, 1951.

 

 

  Évolution de la flottille :

En 1943, par temps de guerre, seuls trois navires de pêche sont enregistrés:

  • Petit-Charles,
  • Jazz-Band,
  • Chloé.

En 1945 s'y rajoutent 5 navires, portant le total à 8 :

  • Breizh-Atao,
  • Jeune-Auguste,
  • Reder-ar-Mor,
  • Yvette,
  • André-Paul.

En 1946 s'y joint le Fleur-de-Mai.

En 1948 apparaît le Foëderis Arca.

En 1949, le nombre de navires enregistrés à la pêche au large est toujours de 8 :

  • Breizh-Atao, Chloé, Jazz-Band, Reder-ar-Mor, Yvette, Foëderis-Arca, Fleur-de-Mai,
  • et Tante-Yvonne.

En 1950 s'ajoute Jacqueline-Francine.

La flottille va passer à 13 navires en 1954, 15 en 1958, 19 en 1963, 22 en 1964, 24 en 1965, pendant que le tonnage du navire le plus fort passera de 54Tx en 1943 (Chloé) à 124Tx en 1960 (Intron-Maria) et 328 en 1965 (La Barbade et Constellation), tandis que les moteurs diesel sont de 224 cv pour Tante Yvonne en 1949, 320 cv pour Intron Maria, et 490cv pour La Barbade et Constellation. L'année du naufrage de Tante-Yvonne est aussi l'année de l'apogée des puissances des navires, et de leur nombre.

Annexe : 13 unités inscrites au regitre de Morgat mais immatriculées à Douarnenez (ou Audierne).

Je ne les ai pas inclus dans l'étude onomastique, mais ils témoignent des échanges entre les deux flottilles.

 CRAVE-BIHAN, AU 2298,  Dundee à moteur 64,91 tx Louis Thomas.

COUTINEC DZ 3961, Langoustier-congélateur 110,84 tx., Pierre Moysan.

FÉE-DES-LÉGENDES, MX 4017, Langoustier-Thonier 46,76 tx, Pierre Kermel.

GAI-COMPAGNON, DZ 3712, Dundee 63,37 tx

GUY-MOCQUET, DZ 3709, 71,41 tx

JOHANNES-BAPTISTA, DZ 2980, Dundee-mixte 49,98 tx, H. Kerspern.

KERSCAFF, CC 4203, Chalutier-thonier 42,03 tx, Jean Drévillon, 120 cv.

LA-GRACIEUSE, DZ 3779, Dundee 37,57 tx

LOUIS-KREBS, DZ 3679, Dundee voile et moteur 60,61 tx Jean Morvan.

MA GONDOLE, DZ 3377, Dundee à moteur, 48,23 tx, R. Guéguéniat.

MARCEL-CERDAN, DZ 3787, Dundee 49,30 tx Pierre Moysan.

PETITE ANNICK, DZ  3802, Dundee 38,37 tx Jean Morvan.

RAYMONDE, DZ 3440, 48,03 tx.

SACRÉ-COEUR, DZ 3678, Dundee mixte 41,53 tx J. Le Bretton.

ULYSSE, DZ 3779, Dundee 37,57 tx Joseph Ménesguen.



 

 

Onomastique de la flottille de pêche au large de Morgat 1945-1965.

  Les patrons de pêche de Morgat vouent-ils leur navire à des puissances tutélaires religieuses, mythologiques ou symboliques ? Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, les baptisent-ils du nom des héros, des lieux de bataille, ou de termes se rapportant à la Victoire, la Paix, la Concorde? On réalise vite qu'il n'en va pas exactement ainsi.

 Pour cette rapide étude des 51 noms de navire de pêche au large 1945-1965, je reprends la classification proposée par Dominique Confolent dans son article  La religion dans l'onomastique navale granvillaise (1900-1939) Annales de Normandie ,1993, Volume 43 Numéro 43-1, pp. 61-68. Cet auteur retrouvait 11% de noms religieux pour l'année 1939 à Granville, 40% de prénoms familiaux, 14% de noms d'Histoire et mythologie, 23% de Formules et Qualificatifs, 4% de noms de Mer et Géographie, 0% de Fleurs, fruits et minéraux, 4% de noms d'animaux, et 4% d'Autres.

 

  Pour notre série de l'Inscription de Morgat, je trouve :

1. Religion : 4 noms =7,8%

Föederis-Arca, Introun-Maria-Gwel-Mor, Sacré-Cœur, Santa-Helena (qui est peut-être un nom de lieu). On note l'absence de saints et de saintes, l'absence des grands cultes d'avant-guerre (Thérese, Bernadette, Jeanne d'Arc).

Föederis-Arca, "arche d'Alliance" est un épithète de la Vierge dans les litanies de Lorette ; mais c'est aussi le nom d'un trois-mâts, capitaine Richebourg, dont l'équipage s'est mutiné en 1864, et dont l'histoire a été racontée par Jacques Perret dans Mutinerie à bord, Amiot-Dumont 1953, ou par Henri Quefellec. Ce navire ayant quitté Sète pour le Mexique n'arriva pas à destination, mais huit naufragés furent recueillis dans une chaloupe ; le capitaine, le second, le cuisinier et le mousse avait péri dans le naufrage. Cette version fut contestée, et on finit par apprendre que l'équipage s'était révolté, avait tué les officiers et s'étaient enfuis avec la chaloupe. Quatre d'entre eux furent condamnés par le Tribunal de Brest, et Oillic, Léonard,Thépaut et Carbuccia  furent guillotinés en octobre 1866. On voit qu'il est difficile de savoir si le nom du thonier palangrier de Morgat honore la Vierge, ou témoigne d'un fait de mer.

Son nom est indiqué sur le registre avec un tréma sur le o, mais cette orthographe que j'ai respecté n'est pas habituelle.

Introun-Maria-Gwell-Mor, construit  en 1958, porte le nom de l'église qui fut construite à Morgat en 1958 à la place de la chapelle Sainte-Marine, Notre-Dame de Gwel-Mor (de la Mer bienveillante). Le registre porte le nom orthographié soit Intron Maria Gwell-Mor, soit Intron Maria Gwel-Mor.

  Cette proportion de 8% de noms religieux peut être comparée à celle de 16% que j'ai obtenu dans l'étude onomastique de la flottille de Groix de 1850 à 1936 (travail inédit).

 

2. Prénoms : 14 noms, soit 27,4%

André-Paul, Chloé, Corentine, Gisèle-Roger, Guy-et-Milo, Grand-Pierre, Jacqueline-Francine, Jeune-Auguste, Maïtena, Père-Benoit, Petit-Charles, Petite-Marie-Françoise, Thaïs, Yvette.

 Cette majorité de noms composés de prénoms faisant référence à la famille se retrouve dans toutes les flottilles de pêche, et témoigne sans-doute de la place de la cellule familiale dans ce milieu social. On note l'absence de prénom breton, et l'absence des prénoms Marie, Joseph et Thérèse pourtant bien attestés dans la population.

3. Histoire et Mythologie.  : 4 noms, soit 7,8%

Charles-le-Goffic, Cdt d'Estienne-d'Orves, Raymond-Moreau, Tante-Yvonne, Thierry-de-Martel.

Charles le Goffic (Lannion 1863-id,1932) est un poète et un écrivain traditionnaliste proche de Charles Maurras et de Maurice Barrés.

Honoré d'Estienne d'Orves (1901-1941) est un officier de Marine qui organisa pendant la Seconde Guerre Mondiale le réseau de résistance breton Nemrod. Trahi par son télégraphiste, en réalité membre du contre-espionnage allemand, il est arrété le 22 juin 1941 et exécuté le 29 août 1941 au Mont-Valérien.

Raymond Moreau   est un résistant de Telgruc qui fut tué lors des bombardements précédant la libération de la commune ; sa mémoire a été honorée par son ami Jean Capitaine, premier armateur du thonier.

Tante-Yvonne est, je le rappelle, le pseudonyme d'Yvonne Le Roux, résistante ayant habité à Morgat avant d'être arrétée et déportée à Ravensbruck et de décéder quelques jours après sa libération; une rue et une plaque commémorative lui sont dédiées à Morgat.

Le comte Thierry de Martel (1875-1940) est un médecin, neurochirurgien, militant d'Action Française, qui se suicida le premier jour de l'entrée des Allemands à Paris le  14 juin 1940.

 

4. Formules et Qualifications.  : 5 noms = 9,9%

Bon-retour, Breizh-Atao, Kenavo, Reder-ar-Moriou, Va-Bro.

Breizh Atao signifie "Bretagne toujours", Reder ar Moriou signifie "le coureur des mers" (avec un jeu de mot sur riou, le nom de l'armateur??), Va Bro signifie "Mon pays".

5. Mer et géographie.  : 11 noms = 21,5%

Amazone, Kador, Kerogan, La Barbade, Le Morgatois, Pen-ar-Roz, Pen-Glas, Port-Manech, Portzic, Rouergue, Trezic.

Kador est le nom de la pointe (Beg ar gador) derrière laquelle s'abrite le port de Morgat ; la baie de Kérogan désigne l'élargissement de la Rivière de l'Odet au sud de Quimper; ce navire a été construit à Tréboul. Pen ar Roz  est le nom breton du Cap de la Chèvre (Beg Penn ar Roz) ; Pen Glas ("tête verte") est le nom d'un des Tas de Pois. La plage du Portzic prolonge la Plage de Morgat en sa partie nord. 

6. Fleurs, fruits et minéraux : 3 noms = 5,9%

Beryl, Fleur-de-Mai, Rubis.

  "Beryl" est bien choisi comme nom de bateau, puisque ce mineral tire son nom du grec byrellos qui signifie "cristal de la couleur de l'eau de mer" : la variété bleue de ses cristaux porte le nom d'"aigue-marine".

7. Animaux : 2 noms, soit 4%

Gambas, Le Condor.

8. Autres:  8 noms, soit 15,7%

a) éléments naturels :  5 noms = 9,8%

Constellation, Etoile-du-berger, La-Houle, Zephyr.

b) danse et musique : 2 noms soit 4%

Charleston, Jazz-Band.

c) Divers

      Fraï-Lann 

  Je n'ai pas pu trouver la signification de ce nom. C'est aussi celui d'un Trawler de 138 Tx construit en 1964 à Camaret par le chantier Péron et naviguant sous pavillon de l'Afrique du Sud IMO 6517469.

 

Voir aussi :

La Flottille de pêche côtière de Morgat 1945-1965 ; onomastique navale.

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Published by jean-yves cordier
18 novembre 2012 7 18 /11 /novembre /2012 18:55

 

        Sur la plage de Postolonnec à Crozon :

          le moteur du thonier "Tante Yvonne"                 CM 2909. Souvenir d'une nuit de Noël.

  

                   DSCN6746c

                              Postollonec, reflet.

    Le promeneur qui arpente les grèves, fouille les laisses de mer, chasse les reflets éphémères de l'estran et s'amuse, dans les baïnes, à taquiner de l'index les anémones ne peut manquer de découvrir un jour, à Postolonnec*, un moteur bien rouillé.

* Ance de Portalonnec sur la carte de Cassini, Port Lonnec au début du XXe siècle.

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  C'est le fossile des six cylindres en ligne d'un moteur Crépelle de 224 cv

 DSCN6728v

  La société Crépelle et Cie à Valenciennes a été fondée par M. Le Gavrian ; elle a d'abord construit des machines à vapeur, puis à partir de 1919-1920, des compresseurs d'air et de gaz, ainsi que des moteurs Diesel. (On trouve aussi des moteurs Duvant-Crépelle ; la société aurait été  rachetée par Wärtsilä.). Le gérant en était, en 1951, Pierre Crépelle. Elle construisait dans ses usines de Lille des moteurs de 80 à 400 cv (en 1943), de 500 à 1000 cv (en 1957) ou 5000 cv (en 1969), à quatre temps et à injection directe. Par exemple, des langoustiers à viviers de Douarnenez comme la Grande Hermine Dz 3913 de 235 tonneaux et de 30 mètres de long, ou le Gotte Dz 3936 étaient équipés en 1956-57 d'un Crépelle de 270 cv, alors que dans la Presqu'île de Crozon, les thoniers Port-Manech Cm 3037 de 57 tonneaux ou le Saint-Rémy de 17 m Cm 3070 étaient propulsés par un Crépelle de 128 cv.

Publicité de 1943 dans la revue Technica :

                 pub-crepelle-1943-revue-technica.png

  Les schistes semblent avoir garder en creux l'empreinte des efforts fous d'une hélice prise au piège, ou ruisseler encore du sang ferrugineux de la machine.

 

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  Cette carcasse possède la poésie romantique des ruines, celle des musées d'histoire naturelle où d'anciens squelettes démantibulent leurs ossements dans le silence grave des vitrines en acajou ;  la beauté des choses déchues, rongées par le temps mais magnifiées par la perte de leur utilité. Et du poids de son arrogance, l'éternité terrasse en s'en moquant les oeuvres humaines les plus glorieuses. 

  Les aciers gris que bichonnaient les "bouchons gras" qui veillaient sur le jeu huileux des pistons et des cylindres et  sur la puissante rotation du vilebrequin sont devenus des masses inertes colonisées par les hermelles (Sabellaria alveolata).

  Hier, c'était les trilobites, aimables bestioles, que dévoraient pour les minéraliser le Léviathan polyvore ; aujourd'hui, c'est le tour d'un Crépelle 224 Cv.

 

 

  


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  Ce moteur est celui d'un chalutier-thonier de 72,58 tonneaux, Tante-Yvonne, qui avait été construit en 1942 au chantier Tertu du Fret, qui était basé à Morgat de 1949 à 1965, et qui navigua sous le matricule Cm 2909.

( Source : Archives de la marine, Brest, 2P5 23, et site Les Thoniers de Morgat de Thomas Widemann,:http://thoniers.free.fr/fiches/tanteyvonne.html :). 

  Durant la nuit de Noël 1965, et quelques jours seulement après que son propriétaire ait décidé d'interrompre le contrat d'assurance, alors que le bateau est amarré au môle de Morgat, sans personne à bord, une forte houle levée dans la soirée s'exerce si violemment qu'elle parvient à rompre les amarres, et le thonier part à la dérive, arrachant un anneau du quai et le bloc de granit dans lequel il était scellé... Personne ne s'en rend compte, et lorsqu'on découvre, le 25 décembre au matin, le bateau de pêche, c'est à Postolonnec, à droite de la plage, sur les rochers. Le navire s'éventre sous l'effet de la houle grandissante, et dans les semaines qui suivent il ne reste plus du navire que son moteur, maintenu sous le pied de la falaise comme le trophée exhibé par son vainqueur. 

 

La plage de Postolonnec et la pointe de Trébéron : Beg ar Rip à mi-marée par vent de Sud/sud-ouest de 37km/h deux jours après les photographies précédentes .

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L'équipage de la Tante Yvonne fait la couverture du livre de Chantal Mammani Mémoire en Images La presqu'Île de Crozon Tome III ; on y voit le 18 juillet 1952 Louis Lescop, Francis Kerdreux, Hervé Lescop, Yves Page, Jos Riou, Maurice Drévillon, et Marcel Nicolas.

  Je trouve dans l'ouvrage de Marcel Burel, Didier Cadiou et Jean-Jacques Kerdreux La Presqu'Île de Crozon, Ed. Palantines 2008 page 146 une photographie (venant des archives Le Doaré) de la Tante Yvonne amarrée au Fret dans les années 1950 : 

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   En ce matin de Noël où le thonier venait de s'échouer, André Horellou, 9 ans, passant par la plage sur son vélo, remarqua les deux mâts derrière la falaise mais ne devina rien du destin tragique du navire. Quarante sept ans plus tard, c'est lui qui me fit découvrir le vieux moteur diesel et me raconta son histoire. Qu'il trouve dans cet article l'expression de mes remerciements.


  voir aussi :  La flottille de Pêche au Large de Camaret-Morgat 1945-1965.

 

 

Tante Yvonne, alias Madame Leroux.

   Cette histoire en cache une autre, car si ce thonier portait le nom de Tante Yvonne, ce n'est nullement en raison de l'épouse du Général de Gaulle (on se souvient qu'on surnommait ainsi l'épouse du Président de la République) mais en hommage à une résistante de Morgat. 

Madame Yvonne Leroux (Toulon 1882-Paris 28 avril 1945), dite Tante Yvonne, fille d'Amiral et veuve d'un officier de marine, se mit à la disposition de l'Intelligence Service à Londres en 1940, et fut envoyée en France ; résidant à Morgat dans la villa des Lecouteur, et contactée par le Docteur Antoine Vourc'h, médecin à Plomodiern et fondateur du réseau "Johny", pour recueillir des renseignements, elle parvient à soutirer au directeur de l'arsenal de Brest des informations sur les navires allemands et les défenses aériennes. Ces renseignements qu'elle transmettait une fois chiffrés par un poste émetteur permit la destruction de trois sous-marins allemands. En 1942, à Paris, alors qu'elle se sait suivie, elle organise son départ pour Londres, mais à l'occasion d'un dernier retour à Morgat, elle est arrêtée le mardi de Pâques à Plomodiern, détenue à Fresnes, Romainville et Compiègne puis déportée à Neuegamme et Ravensbrück. Trois jours après sa libération du camp, après avoir été accueillie, allongée sur un brancard, à la gare de Lyon par le Général de Gaulle, elle décède à l'hôpital Pasteur à Paris le 28 avril 1945. Un timbre de la série "les héros de la Résistance" lui rendra hommage de 1959.

 Source : site Plaques commémoratives link

  Une rue de Morgat porte son nom, et au lieu-dit Menez-Ty, devant une belle croix celtique, une plaque commémorative honore sa mémoire.


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  Les traits de son visage ont moins résisté, dans la mémoire collective, que la valeur de son exemple, mais un timbre émis en 1959 permet néanmoins d'en garder la trace (source http://www.phil-ouest.com/Timbre.php?Nom_timbre=Y_Le_Roux):

                                             

 

  Le moteur de "Tante Yvonne", c'était une âme bien trempée, à la détermination inflexible, un de ces cœurs qui savent opposer la force de leur refus à l'Inacceptable : une de ces âmes à la volonté si farouche qu'elle demeure comme un menhir inaltérable de notre mémoire. La houle de l'oubli brise en vain ses lames sur son nom, elle persiste : échouée au pied de la falaise du Temps, elle continue à faire de la Résistance.

 

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Published by jean-yves cordier
13 novembre 2012 2 13 /11 /novembre /2012 19:29

Physalies et méduses ( Pelagia nautilucas)

        sur la plage de la Palue à Crozon.

 

 

                                                                                              Pour Plume.

 


 Le 13 novembre 2012, plage de La Palue :

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      Je ne me lasse d'aimer des algues sous-marines

L'entrelacs lancinant que berce le jusant

Ni d'écrire sur le sable ton prénom et le mien

Avec le bois flotté trouvé au bord de l'eau,

Ni des craves enivrés le cri et les prouesses,

Ni les choses qu'on découvre ramenées par la mer

Ni surtout les galets, que j'amasse

dans ma poche, 

Je ne me lasse d'aimer les talismans marins,

Jamais, non mais.

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Je ne me lasse d'aimer mais mon coeur est en cage

Dans  fragile prison qu'il ne faut pas briser,

C'est l'arc de tes bras c'est l'orbe de ta bouche,

C'est la ronde de ton rire quand il répond au mien.

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Je ne me lasse d'aimer les mots qui vont par paires

celui de ganivelle va avec manivelle, 

celui de laminaire avec les lampadaires,

celui de ton prénom va bien avec le mien.


 

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  Mais le plus difficile c'est de ne pas laisser

L'Amour se lasser des coeurs enlacés

ou d'un lacs ramassé soigneusement tressé

pour nous y enfermer.

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   J'ai déjà dans ma poche comme le petit Poucet

Des douzaines de galets et si ça continue 

à faire descendre un froc qui devient idéal

je me retrouverai à poil : 

J'amasse mais

Pour ne pas se lasser d'aimer les laisses de mer,

il faut trouver une idée qui sorte des clichés !

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                        I.  LES MÉDUSES !

 

  Elles ont envahi nos côtes depuis une semaine, et ce serait une espèce urticariante portant le nom de " piqueurs mauves", ou Pelagia noctiluca, "lumière dans la nuit de ma mer profonde" ; elles vivent en Mer du Nord, Manche, Atlantique et Méditerranée, et selon l'abondance de plancton, les courants, la température de l'eau, elles nous organisent une "année à méduse" mémorable pour les baigneurs.

  La plage de La Palue en est couverte, car cette espèce qui fréquente les eaux chaudes et tempérées et qui se déplace en bancs de plusieurs centaines ou milliers d'individus a bénéficiée récemment de courants favorables à une virée touristique en Finistère. En 2007, à la même époque, l'excursion en Irlande avait eu tant de succès que la foule formait, dit-on une masse de 26 Kms de long sur 10 mètres de profondeur. 

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  Pas plus que de tes baisers je ne me lasse

de la mélasse fade de ces visqueuses masses

et si j'ignore les singes nus dévoreurs de tropiques

j'aurais de mes yeux vu les croqueuses de sargasses

fugaces améthystes, factices, au diadème de strass,

et leur regard salace, ou la parme rosace

dessinée sur leurs fronts. J'embrasse ?

Pas.

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 Ces bonbons au cassis ne sont pas dégueulasses,

Roudoudous de caramel mous, et flasques,

Figues des Barbaries qu'amènent les bonaces,

Fruits baveux aux allures de limaces

Framboises purpurines, gélatines cocasses,

J'en passe.


 

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Ambre mystérieux d'un continent fossile

Tu fonds,  translucide glace,

autour de tes gonades incluses

comme des diamants.

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  Voilà donc les bras tentaculaires dont s'embarrasse

L'amphibienne gorgone dont on ne se débarrasse :

 Sur sa fausse cuirasse est gravée sa devise :

Je te prends, tu trépasses.


 

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                    II. LES PHYSALIES !

                                                 "Curieux : de quoi sert cette oblongue capsule ?

                                                       D'écritoire, Monsieur, ou de boite à ciseau ?"

                                                                                            (Cyrano de Bergerac)

  Elles ont suivi le même train d'ondes chaleureuses que leurs cousines, avec lesquelles elles partagent le même embranchement, mais elles ont horreur qu'on les confondent, et les traiter de "méduses" leur donne des boutons : ce sont des Siphonophores, ou porteurs de siphons.

  Elles n'apprécient guère également d'être confondues avec les plantes nommées  Physalis (P. alkekengi, l'Alkékenge), que les femmes du monde et les cuisiniers nomment "Amour en cage".

  Ce sont les Physalies  et non les Physalis, bien qu'elles aient en commun une étymologie tirée du grec physallis, φυσαλλίς, signifiant vessie. Aussi baptise-t-on notre siphonophore de l'élégant terme de Vessie de mer. Le CNRTL est plus précis et signale que Physalie vient du gr. φ υ σ α λ(λ)ι ́ ς, - ι ́ δ ο ς «bulle d'eau», dér. de φ υ ̃ σ α «bulle d'air, vésicule», de φ υ σ α ̃ ν «souffler, gonfler, enfler».

  Effectivement, l'animal qui ressemble à une vessie (ou à une cucurbite, le mot semble plus juste) posséde un pneumatophore, sorte de bouée translucide gonflable ou dégonflable a volo, notamment pour faire de l'anémo-stop et se faire transporter gratuitement sur les spot de surf les plus réputés de Bretagne : 

                                                          

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Physalia_physalis1.jpg


  Cette Galère portuguaise est beaucoup plus dangereuse que la Pélagie précédente, car si ses longs filaments sont urticariants, ils sont surtout sensibilisants : le premier contact peut n'être qu'anodin, mais les contacts suivants peuvent entraîner, pour le baigneur imprudent ou malchanceux, un collapsus cardiovasculaire gravissime. Brrr...

  Cette canaille prend des allures d'arc-en-ciel, et ainsi déguisé en Iris, elle vient s'échouer ( et ce premier echec lui sera fatal) sur les laisses de mer où on la prendrait pour la plus jolie et la plus séduisante des bouteilles plastiques. La ramasser, y porter ses lèvres ? Ce serait la vengeance de cette engeance ! Collectionner ces croissants couleur d'aurore, ces quartiers de lune, ces jouets en forme de petits poissons perdus par quelque enfant de Noé  comblerait  Physale en ses plans les plus retors et en ses voeux posthumes ; car elle reste venimeuse longtemps après sa mort.

  Naissant dans les eaux de l'Atlantique tropical, elles sont amenées chez nous par les vents du sud.

  Pour en savoir plus : http://www.surf-report.com/-physalies-meduses-aquitaine-cotes%20fran%C3%A7aises-brulure-laceration-gal%C3%A8res%20portugaises-malaise-flotteur-venin-noyade-

 Ma collection de Blue bottle

 En arpentant la grève de La Palue, j'ai découvert, parmi les milliers (sans-doute) de méduses une vingtaine de ces ampoules beues et roses. Elles avaient perdu la majeure partie de leurs tentacules.

Une première photo pour donner l'échelle :

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DSCN6662c

 

  III. ET ÇA, QU'EST-CE QUE C'EST ?

  Je ne sais,

mais je ne me lasse

d'aimer

 la laisse de mer

et ses baisers amers.

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      Qu'est-ce que c'est? the answer is blowin' in the wind...  Grâce à Stéphane Wiza, je découvre que ce sont les structures cartilagineuses d'une autre cnidaire, la vélelle, Velella velella (Linnaeus,1758), qui accompagnent les physalies. Leur nom a été créé par l'auteur du genre, Lamarck, en 1801 (velella mutica, Des animaux sans vertèbres) en cuisinant du néo-latin inspiré de velum, "voile", à la même époque où il décrivait les vaginicoles innées, propriétaires et vorticelles.

Elles sont surnommées Barques de Saint-Jean ou Barques de Saint-Pierre en raison de leur voile translucide sur un flotteur bleu des mers du sud, mais je préfère leur nom anglais de Jack-sail-by-the-wind. 

  Marcel de Serres signalait en 1808 : on mange la velella comme l'actinia ruffa. Cette dernière n'est autre que l'anémone de mer. Bory de Saint-Vincent proposait de les faire frire; mais les moeurs ont beaucoup changé.

DSCN6648c

 

 

POUR EN SAVOIR PLUS...

...Les Physalies et les Pelagia ont été signalées sur nos côtes depuis la fin août. L'apparition des Physalies nécessite des vents du sud (21 jours en août 2012 à la station de Plabennec contre 9 jours en août 2011) : quelques exemples :

  • 31 août-1er septembre : Les Glénans-Concarneau (Finistère).
  • 21-22 octobre : Sarzeau et Arzon, presqu'île de Rhuys (Morbihan).
  • Début novembre sur les plages de Lampaul et Plouarzel
  • 14 novembre : La Torche, Baie d'Audierne ; Crozon, la Palue ; Concarneau.

 Le site www. mer-littoral.org organise un relevé des observations ; on y trouve aussi des renseignements clairs sur le cycle de reproduction des méduses et scyphozoaires  :    

  • Sur les cnidaires : http://www.mer-littoral.org/05/cnidaires-1.php
  •  Sur les scyphozoaires : http://www.mer-littoral.org/05/scyphozoaires.php
  • l'article sur les Pelagia : http://www.mer-littoral.org/05/pelagia-noctiluca.php
  • l'article sur les Physalies : http://www.mer-littoral.org/05/physalia-physalis.php

 Leur observation dépend d'une part de leur naissance ou "strombolisation*" des polypes-mères (et de tous les facteurs entrainant des naissances en masse : température et nourriture), l'afflux de méduses se produisant plusieurs semaines après la survenue de ces naissances, et d'autre part de leur dérive vers nos côtes dépendante des vents et des courants.

   * strombolisation : pas plus que je ne me lasse de découvrir dans les laisses de mer un nouveau trésor, pas d'avantage ne me quitte l'émerveillement devant ces joyaux de notre vocabulaire scientifique. On imagine le polype empilant les futures méduses comme un Stromboli libérant ses volutes de nuages incandescents, et l'image revient en boomerang vers le volcan, dont on imagine les nuages bourgeonnants et congestionnés comme autant de méduses partant à la dérive dans le ciel. Les marins grecs nommaient le volcan strongule neos, "l'île ronde" , Thucydide et Pline l'Ancien l'écrivaient Strongyle, qui est devenu sous l'influence des mots grecs stongos et strobulos (qui désigne des objets ronds), Stromboli. (Source : link) : on voit que la forme mammaire et arrondie des méduses est aussi celle du volcan. Aucun rapport bien-sûr avec le jeu napolitain de la tombola, qui provient de l'italien tombolare, "culbuter". 

  On peut trouver les observations météologiques des derniers mois sur le site météo de Plabennec : http://www.meteo-plabennec.fr/index.php?id_page=30

  On peut ainsi apprécier la fréquence relative des vents du secteur sud, et consulter  les relevés de température. 

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14 octobre 2012 7 14 /10 /octobre /2012 20:53

Le retable du don du Rosaire

              et le lutrin

de l'église Saint-Pierre de Crozon.

 

 

En guise d'introduction.

  J'ai déjà photographié le retable des Dix mille martyrs qui est situé, dans la même église de Crozon, symétriquement à celui-ci, dans l'aile sud du transept ;  Le retable des dix mille martyrs, (2, avec les commentaires des panneaux), église Saint-Pierre de Crozon (29). L'intérêt exceptionnel de ce dernier ne devrait pas néanmoins nous empêcher d'exercer notre curiosité sur le retable du bras nord du transept, car il s'agit d'une très belle œuvre.


 

I. Le retable du Rosaire. 

 

  Les archives rapportées par la Notice sur Crozon du Bulletin Diocésain d'Histoire et Archéologie d'Abgrall et Peyron nous indiquent d'une part qu'une Confrérie du Rosaire existait à Crozon, et, d'autre part, selon un rapport de 1776, que "les chapelles du Rosaire et des Martyrs  sont prohibitives à la charge des différents seigneurs à qui elles appartiennent".

  On apprend par ailleurs que ce retable est daté de 1664 et est attribué à Maurice Le Roux. Ce sculpteur , le plus connu d'une lignée de maître-sculpteurs landernéens, est l'auteur, entre 1664 et 1669, d'un retable du Rosaire à l'église Saint-Ténénan de Landerneau, ou à celle de Brasparts, (effectivement très voisin de celui de Crozon), ou à Carantec, Locronan (1668) ou Bodilis (1669). L'église Saint-Thévenan de Plabennec réclame aussi la paternité de Maurice Le Roux pour son retable du Rosaire.

Dans le bras nord du transept, ce retable à quatre colonnes torses et entablement à fronton brisé surmonte l'autel. Le groupe en haut relief de la Vierge à l'Enfant, de saint Dominique et de sainte Catherine de Sienne, se détache sur la ronde des quinze médaillons des Mystères. Dans la brisure du fronton se place une statue de saint Joseph.

, au milieu duquel une niche abrite une statue de saint Joseph portant l'Enfant Jésus. , 

 

Vue d'ensemble.

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Vue rapprochée :

On peut commencer par remarquer, entre les deux chérubins, la date de 1664 inscrite dans un cuir.

On peut aussi compter les médaillons. Eh là, il n'y en n'a que douze, et non quinze comme vous le prétendiez !

 Mea culpa, on n'observe jamais assez et on ne vérifie jamais assez sa monnaie. Mais regardez les colonnes, ces entrelacements de pampre, ces oiseaux picorant les grains de raisin, ces escargots gravissant avec persévérance les rameaux eucharistiques, et ce malin serpent se fondant par mimétisme avec un cep : n'est-ce pas réussi ? N'est-ce pas à même d'inviter les âmes des membres de la confrérie à gravir, à leur tour, les circonvolutions de leurs progrès spirituels pour rejoindre, dans l'éther, les hautes sphères chérubiniques ?

  A droite, c'est sainte Catherine de Sienne ; à gauche, Dominique de Guzman.

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  La Vierge, vêtue de bleu et de blanc et or, est couronnée. Elle remet le rosaire à saint Dominique.

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Un détail m'intrigue ici, c'est la singulière tonsure de saint Dominique. Existe-t-il plusieurs sortes de tonsure ? Oui, répond Carolus Chardon dans son Theologiae Cursus Completus : ex tractatibus omnium prefectissimus ubique, 1ère partie, Chapitre III : la tonsure de Saint-Pierre (ou romaine), où tout le dessus du crâne est tondu, ne laissant qu'une couronne. La tonsure de Saint Paul, ou orientale, où tout le crâne est entièrement tondu ; et la tonsure des celtes, où toute la moitiè antérieure du crâne est tondue, et la moitiè postérieure est chevelue. 

  Saint Dominique, ou l'acteur qui joue ici son rôle, a transformé la couronne tonsurale pour inscrire un toupet presque circulaire au niveau du front. Est-ce par dévotion à saint Pierre, dont le toupet est l'un des attributs ? Est-ce en raison d'une mode en vigueur en 1664 ? Maurice Le Roux a-t-il gratifié tous les saint Dominique de ses  retables de la même fantaisie capillaire ?

 

eglise-retable-rosaire 8709c

 

Il ne faudrait pas négligé l'examen des différents médaillons, chacun étant soigneusement sculpté. Je pensai y trouver des scènes de la vie de Marie illustrant les mystères glorieux, joyeux et douloureux, mais ceux-ci illustrent en réalité principalement des scènes de la vie de Jésus : ici, Visitation, Nativité, , puis Circoncision ?, Jésus parmi les Docteurs ; Jésus au mont des Oliviers ; (?). Plus loin, Flagellation ; Portement de Croix ; Crucifixion; Résurrection, Pentecôte, Assomption.

 

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                      eglise-retable-rosaire 8711c

 

 

 

       On voit que sainte Catherine ne reçoit pas le chapelet du rosaire, mais ce qui pourrait apparaître comme une image au bout d'une ficelle, et qui est le Scapulaire. Nous avons donc affaire, c'est là l'originalité de ce retable de Crozon, au Don du Rosaire à saint Dominique et au Don du Scapulaire à sainte Catherine. Voir  Notre-Dame de Carmès à Neulliac et le scapulaire.

  Une Confrérie du Scapulaire n'est pas attestée à Crozon, mais on peut penser que la confrérie du Rosaire a élargi le champ de ses compétences lorsque le culte du scapulaire comme protection contre le risque de mourir en état de péché s'est imposé largement dans les paroisses bretonnes.

  On pourrait se demander si il s'agissait dès l'origine d'un scapulaire, ou si celui-ci est venu remplacer secondairement un chapelet. Si le scapulaire était premier, on pourrait alors aussi se demander s'il s'agit bien de sainte Catherine, et non, comme sur le tableau du Don du Scapulaire de Neuilliac, de Thérèse d'Avila, puisque le scapulaire (sous forme d'un vêtement) est spécifique des carmélites. Mais, alors, nous aurions la guimpe blanche et le voile noir, mais aussi un manteau blanc sur une robe noire, et non l'inverse comme ici. Quoiqu'il en soit le récipiendaire de ce Don fut Simon Stock, en 1251.

  On conclue à la présence initiale d'un chapelet du Rosaire.

eglise-retable-rosaire 8712c

 

eglise-retable-rosaire 8713v


        La statue de saint Joseph, en sommité du retable, est remarquable car la représentation de Joseph portant l'Enfant est assez rare en iconographie. Soit, à l'époque médiévale, Joseph apparaît isolé, mélancolique ou pour le moins méditatif dans les scènes de Nativité, ou conduisant l'âne lors de la Fuite en Égypte, soit au XIXe siècle il est représenté seul, tenant le lys de la pureté de sa conduite. Ici, c'est son rôle de père de famille et d'éducateur qui est mis en avant.

       Sa statue est incluse dans un présentoir à quatre colonnettes torses.

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Parmi les bas-reliefs polychromes de l'autel, on note un agneau pascal entouré de quatre chérubins.... 

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...un moine (à tonsure romaine, et portant un scapulaire...) tenant une croix...

 

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 le Bon Pasteur sur la porte du tabernacle...

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et sainte Marguerite issant du dragon.

 

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Published by jean-yves cordier
10 octobre 2012 3 10 /10 /octobre /2012 09:54

                  Mes Izidors.

 Izidor en breton (sant Izidor, labourer), Isidore en pays gallo, Isidoro Labrador en Espagne, Isidro en Catalogne, Isidor von Madrid en Allemagne, Isidoro l'agricoltore en Italie, Isidorus matritensis pour le Vatican, Isidre el Llaurador en catalan, Isidro, o Lavrador en portuguais, Izidor Oracz en Pologne, Isidhoros en Grèce, les statues des Isidores sont partout. Patron des paysans, on en recense le culte en Bretagne selon Wikipédia dans 33 églises et chapelles du Morbihan, 17 du Finistère, 8 des Côtes d' Armor, 3 en Loire-Atlantique et une seulement en Ille-et-Vilaine. 

  Izidor ou Isidore, cela sonne comme Théodore, Dorothée, Dorian, Dorine,  Pandore, issus du grec δωρον, dôron, "don" et signifiant pour les premiers "don de dieu", et pour le dernier "tous les dons". 

  Pour l'origine du prénom Isidore, il nous faudrait demander au plus savant expert en étymologie, à l'un de ses pionniers, à l'auteur de l'ouvrage princeps de la discipline, l'Etymologiae de 630 de notre ère, au digne évêque de Séville, j'ai nommé ... saint Isidore ! Mais non pas Isidore le laboureur (1082-1130), qui est de Madrid, mais Isidore de Séville (560 ou 570-636), dont la science étymologique éclaira comme un phare tout le Moyen-Âge. Isidore se pencha-t-il sur l'origine de son nom, ou préféra-t-il planer une ignorance prudente sur ses origines, je l'ignore ; car comment interroger une base de donnée sur l'étymologie d'isidore dans l'Étymologie d'Isidore ?

  Mais le Professeur Achille-Cléophas Lavieb, autre puits sans fond de la science, connaît la réponse : isidore vient de l'association du radical -dôron avec le nom de la déesse égyptienne Isis : Izidor, c'est "le don d'Isis", et comme le culte d'Isis fut très répandu jusqu'au IVe siècle, Isis étant alors La déesse, la Mère primordiale, Isis lactans prodiguant à tous le lait originel de la vie, on peut comprendre Isidore comme la forme parèdre de Théodore. Très fréquent dans les premiers siècles de la chrétienté, il se répand ensuite en Italie et en Espagne, où Saint Isidore de Séville lui assura un regain de popularité. Le saint étymologiste ayant oeuvré pour faire bénéficier les juifs espagnols de la conversion au christianisme, les petits enfants des cristaos novos furent, par reconnaissance, baptisés Isidore. Le prénom fut aussi fréquent en France, jusqu'aux années 1910.

  Saint Isidore le laboureur est bien différent de son illustre et éruditissime prédécesseur, et je l'imagine souvent comme notre Salaun ar Fol du Folgoët ; c'était un ouvrier agricole très assidu à la prière, beaucoup trop selon l'avis de son patron Juan de Vargas qui le suspectait de faire de chaque jour des dimanches; mais c'est que les anges passaient la charrue à sa place.

  Les isidore-de-séville à la petite semaine penseront que son qualificatif espagnol de "Labrador" est issu aussi du grec -dorôn, "don", mais non : le terme signifie en espagnol "laboureur, agriculteur", (mais aussi "propriétaire terrien"). La province canadienne du même nom aurait été nommée Lavrador (comme le Groenland découvert auparavant) par le portuguais Joao Fernandes Lavrador, "Jean Fernand le propriétaire terrien",  et la race de chien aurait hérité du nom de la province, qui est aussi celle de Terre-Neuve.

L'amusant, avec les statues de sant Izidor, c'est le costume ; car il nous renseigne sur les habits portés par les paysans autochtones, qui sont, jusqu'à la Révolution, les mêmes pour toute la France.  Je recopie ici ce que l'abbé Castel en a écrit sur son site Chemins de bretagne :http://chemins-bretagne.com/art/index.php?art=ypc_st_isidore

 

  "Jusqu'au début du 18e siècle il n'y a pas de particularisme breton: le justaucorps est court et boutonné du haut en bas, la culotte est bouffante, la chevelure n'est ni longue ni courte (voir la statue du 17e siècle de l'église Sainte-Tréphine de Pontivy). A partir de 1675, sous l'influence de Louis XIV, le justaucorps se portera long et la culotte serrée. Au début du 18e siècle, on voit apparaître une tendance nouvelle: à la place du justaucorps on porte une veste et un gilet .Les premiers costumes dits "bretons" apparaissent vers 1800., Il n'y a plus de justaucorps mais une veste et un gilet, le chapeau est petit, les cheveux sont longs .C'est à cette époque que le costume commence à se diversifier, chaque région adopte le sien: bragou braz ou bragou berr, veste plus ou moins ample, gilets croisés ou non."

 Bréles (Finistère)

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Logonna-Daoulas (Finistère).

 

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Saint-Mériadec , Stival (Morbihan)

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Saint-Nicodème en Pluméliau (Morbihan).

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Chapelle N.D de Quelhuit à Melrand (Morbihan).

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église de Bieuzy-les-Eaux (Morbihan).

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Eglise de Saint-Thuriau (Morbihan)

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 Guern, église paroissiale (Morbihan).

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Sainte-Tréphine (Morbihan)

(Mon préféré)

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                         ste-trephine 6505c

 

 

 Comparaison avec les costumes présentés au Musée de la fraise et du Patrimoine de Plougastel. 

        J'ai saisi l'occasion d'une visite à ce musée pour regarder les costumes des plougastelois, et notamment les guêtres : on retrouve des détails très proches des statues anciennes :

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musee-costume 8439c  musee-costume 8441c

 

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9 octobre 2012 2 09 /10 /octobre /2012 15:18

 

 Cinq hymnes latins aux Dix mille martyrs.

Voir : 

 

      Source : Hymni inediti. Liturgische Hymnen des Mittelalters : Die sequenzen des Thesaurus hymnologicus H.A. Daniels, Leipzig 1922 Page 49 à 51          

 

                                        De S. Acacio et sociis.

1. Hodiernae festum lucis

Est Achatii laus ducis

   Atque decem milium.

2. Hermolao phalanx ista

Archipraesule baptista

   Dei  colit filium

3. Adrianus christianos

Colere rex deos vanos

   Iubet, sed despicitur.

4 Crucifixus cum cohorte

Dux est, et conformi morte,

   Christi grex afficitur.

5.  Christi poena renovantur,

In his omnes, iterantur,

   Signa mortis domini.

6. Ararat, mons armenorum,

Mons insignis, tot sanctorum,

    Consecratur nomini.

7. Alexandriam decorat,

Mons vicinam, quam perrorat,

    Martyrum cruoribus.

8. Orant Christum triumphantes,

Ut defendat honorantes,

    Ipsos a doloribus.

9. Exauditos se laetantur,

Nam, ipsos quam venerantur,

    Servant a nocentibus.

10. Quorum intercessione 

Socia, rex Iesu bone,

    Nos tibi placentibus.

 

 

 

 

 

 De s. Achatio et sociis.

 

1 Glorietur totus mundus

 In martyrum sollemnia

 

2 Chorus cantet laetabundus

 Per militum suffragia.

 

3 Honor tanto sit diei,

In quo sancti milites

 

4 Propter laudem lesu Christi

 Sunt effecti milites.

 

5 Ut gigantes hi steterunt

Fortes coram Caesare

 

6 Sapienter responderunt

 Se Deum vivum colere.

 

7  "Simulacra non curamus",

Sic dixerunt milites;

 

8 ,"Deum verum adoramus,

Qui est electorum spes."

 

9 His auditis Adrianus

In electos fremuit

Et tormentis plurimis hos

 Flagellari praecipit.

 

10 Flagellati sunt beati

 Vere decem milia

 Et ducuntur supra montem

Ad crucis supplicia.

 

11 Crucifixi sunt electi

Bene octo milia

 

12 Alii omnes sunt delecti

  In montis cavernula.

 

13 Nunc subnixe imploremus

Martyrum levamina,

14 Ut laetemur cum beatis

In aeterna gloria.

 

 

 De s. Achatio et sociis.

 

1 Concensus vox iubilaei

Sollemnizans regum regi

Penetret caelestia;

 

 

2 Dulcescant in aure Dei

Moduli, quos offert ei

Militans ecclesia.

 

3 Verbum caro, panis vivus,

Auctor vitae, caeli clivus,

Rex et sol iustitiae

 

 

4 Tractos ab aeterna lue

Sectatores fecit suae

Martyres victoriae,

 

5 Qua mors vitam superavit,

Humilitas expugnavit

Principem superbiae.

 

 

6 Hac palma railia decem

Evasere mundi faecem

Lacuuique miseriae.

 

7 Frustra saevis, Adriane;

Quos trucidas inhumane,

Caritas vivificat;

 

 

8 Crux adversum te laborat,

Mundus clamat, sanguis plorat

Lex insontes vindicat.

 

9 Summa tot consortum Dei

Contingens in typo rei

Praetaxat mysterium;

 

 

10 Lapsum redintegrat chorum

Deus per tot millenorum

Numerum denarium

 

11 Decalogi lex et ordo

Psalterio decachordo

Concrepant harmonice;

 

 

12 Gaudet mens et lingua, quia

Neutra caret symphonia

Fidei catholicae.

 

13 Plebs praesaga deputavit

Manu forti nostro David

Vere decem milia,

 

 

14 Quae subtractos mortis viar

Confoederat ierarchiae

Crucis efficacia.

 

15 Promissus voce psalmistae

Multiplex est chorus iste

Dei decem milium;

 

 

16 Tot bibentes agonistae

Passionis tuae, Christe,

Gratulantur fluvium.

 

17 Tamquam oves virtimantur,

Conspuuntur, flagellantur,

Vincti spinis coronantur,

Caritatis balsamum

 

 

18 Crucifixi, lanceati,

Laeti mortis mortem pati,

Sponsi sine patre nati

Propinant in thalamum.

 

19 Te sequentes, lesu bone,

Corporal! passione,

Te quaerentes in agone

Possident in gloria.

 

20 Quidquid volunt, impetrare

Possunt apud salutare,

Supplicibus suis dare

Quaesita praesidia.

21  0, qui tot triumphis estis

Compotes aulae caelestis,

Nos intentos vestris festis

Eximite, nam potestis,

Ab omni pernicie,

 

 

22 Ne repulsam tolleremus,

Dum dies adest extremus,

Ne cum reis exsulemus,

Sed cum dignis impetremua

Optionem gloriae.

 

De s. Achatio et sociis.

 

1 Adrianus, rex profanus,

Congregatis pravitatis

Sex regibus exlegibus

 

 

2 Sic bacchatur, irae datur,

Servos Christi leto tristi

Quod dederat, quos oderat

 

 

4 Sunt ter dena milia

Horum, qui invidia

Hos cruciiixerunt;

 

3 Sub tormento nondum lento

Hos qui laesit ; his adhaesit

Exercitus indomitus.

 

5 Sed sunt dena milia

Sanctorum, supplicia

Qui sustinuerunt.

 

6 Inter quos est. passus,

Christ! fidem fassus

Hermolaus episcopus;

 

 

7 Christum praedicavit,

Ipsos baptizavit

Praesulatus servans opus.

 

8 Ipsos una

Dies una

Nuncupata Veneris

 

 

9 Sub tormentis

Pravae gentis

Clausit meta funeris.

 

10 Signa Christi passionis

Cuncta visa sunt agonis

Martyrum in stimulo;

 

 

11 Tellus tremens est quassata,

Et lux solis obscurata

Non micabat saeculo.

 

12 Quos gens praba sauciavit,

Christus sanctions sanavit

Hos solacione;

 

 

 

13 Hi in came lacerati

A Christo sunt praearmati

Fidei umbone.

 

14 Inamoenis postquam poenis

Atque minis venit finis

Consummationis,

 

 

 

15 Petiverunt, tenuerunt

Non defectum, sed effectum

Mox petitionis.

 

16 Sancti Dei, qui tropaei

Dignitatis, sanctitatis

Gaudetis victoria,

 

 

17 Sitis grati advocati

Nostri, dirae die irae

Cum censentur vitia,

 

18 Ne perire, obmutire

Pro peccato perpetrate

Nos contingat misere,

 

19 Sed in throno summo bono

Conregnare, laudes dare

Valeamus libere

 

20 Immortali, aeternali

Regi in pace sedula

Per saeculorum saecula.

 

 

 De S. Achatio et sociis.

 

1 Hie est dies celebrandus 

Laudibusque praesentandus.

Dies decem milium.

 

2 Agon Christi venerandus :

 

Favor crucis imitandus

Mortem sanxit martyrum,

 

3 Quorum duces Hermolaus,

Achatius et Menelaus,

Albinus et Elyethes.

 

 

4 Omnes una, quod sit vanus

Mundus hie, daemon prof anus,

Clamant Christi milites.

 

5 Fides, spe corroborata,

Caritate radicata,

Fulget in martyribus;

 

 

6 Corda, Deo praeparata,

Passione sociata,

Praestant sacris legibus.

 

7 Isti mundo fortiores,

Hostibus praestantiores

Christo sese dedicant;

 

 

8 Hi vicere sic tortores,

Quod passorum dici flores

lure sibi vendicant.

 

9 Quotquot enim per tormenta,

Manu forti palma tenta,

Plura per supplicia

 

 

10 Vitae tenent fundamenta,

Gaudiorum incrementa,

Sed non per similia,

 

11 Morte Christo complantati,

Crucem lesu lucrum rati

Psallunt Deo gratias.

 

 

12 Sol et luna tenebrati,

Terra mota, his probati

Deo reddunt animas.

 

13 Quorum sancta passione

Fusa deprecatione

Vox auditur caelitus:

 

 

14 ,,0mnis, qui devotione

Vestro gaudet pro agone,

Dum non sit proselytus,

 

15 Uli nullum nocumentum;

Vinum, oleum, frumentum

Ac hostis victoriam,

 

 

16 Os confessum, cor non lentum,

Panis vivi sacramentum,

Post haec dabo gloriam."

 

17 Hos tirones veneremur

Martyresque deprecemur,

Ut horuru memoria

 

18 lesu Christo adunemur

Et cum sanctis coronemur

In caelesti gloria.

 

 

 

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Published by jean-yves cordier
8 octobre 2012 1 08 /10 /octobre /2012 21:00

Les retables et panneaux sculptés germaniques dédiés aux Dix mille martyrs .

 

 Sur le même sujet :

 

  Le retable de Crozon n'est plus tout seul : le Bildindex der Kunst und Architektur des Bildarchivs Foto Marburg qui rassemble les photographies d'œuvres d'art et de monuments en Allemagne, Autriche, Suisse  m'a permis de lui trouver des compagnons regroupés sous l'iconclass 11H Achatius 61* !

* l'Iconclass est un système de classification des images . Les historiens d'art, les chercheurs et les conservateurs l'utilisent pour décrire, classer et examiner la question des images représentées dans les différents médias tels que les peintures, dessins et photographies. De nombreuses institutions à travers le monde utilisent Iconclass pour décrire et classer leurs collections de manière standardisée.

  Ces retables et productions germaniques témoignent d'un motif iconographique particulier, et dont l'étude reste à faire, et pour laquelle je dois créer une désignation propre : celle des martyrs transpercés par des branches acérées. Si on désignait par "type I, ou Crozonnais" (On admettra que le retable de Crozon est digne de servir d'archétype) la représentation des martyrs crucifiés on pourrait opter pour "Type II, ou germanique", la représentation des martyrs transpercés, et "type III, mixte" pour l'association des deux, comme sur l'enluminure du Grand Livre d'Heures d'Anne de Bretagne.

L'intitulé de l'iconclass 11 h Achatius 61 est en effet la suivante : "le martyre d'Achatius et de ses 10.000 compagnons. Ils sont crucifiés et/ou empalés sur des arbres et des épines." Il ne différencie pas les deux types.

 

  Il est évident que ce motif est infidèle à la Légende originelle, celle d'Anastase le bibliothécaire, qui décrit le supplice des Dix mille martyrs comme une sainte "imitation" de la passion du Christ : les motifs de la flagellation, la lapidation, les outrages, le couronnement d'épines, et le crucifiement lui sont par contre fidèles. Il est donc nécessaire de savoir quand et comment s'est construit, inspiré par le parallèle entre saint Acacius et l'acacia aux épines blessantes, une seconde version de la légende (Légende type II !) dans lequel les martyrs sont précipités du haut d'une montagne vers des arbres épineux dont les branches les transpercent (j'évite le verbe, ambiguë, d' "empaler"). Sous le regard des empereurs, menés par des soldats, ils chutent et meurent de leurs blessures.

  

 

  

 

 

1. Johanneskirche (Schwaigern).

Type II, germanique.

 Église évangélique du 13e siècle de Saint-Jean de Schwaigern, district de Heilbronn, nord du Bade-Wurtemberg 

Le retable des martyrs (die märtyreraltar) est sculpté avec un caisson en épicéa, et les volets ont été taillées dans du bois de tilleul. L'élement  central est de 174 cm de haut et 123 cm de large. Il montre que saint Acace et ses compagnons. Les intérieurs des volets montrent des bas-reliefs de Marie avec l'enfant Jésus et Jean l'Evangéliste. Les faces extérieures des volets gauche et droite montrent que saint Sébastien et saint Christophe, alors qeu leur face intérieure porte des bas-reliefs de Catherine  (à gauche) et Barbara (à droite). 

Le retable peut être considéré comme une extension des techniques de Niclas Gerhaert van Leyden et Tilman Riemenschneider  et est donc daté de la période autour de 1520-1525.

            Photographie : Peter Schmelzle

Fichier: Schwaigern-maertyreraltar.jpg

 

 

 

Photo : bildindex mi13342b12a (rognée) Voir une meilleure image en couleur sur le site ici :http://www.bildindex.de/#|1 sous le code sskkf12453-13

mi13342b12acorr

 

 

2. Allerheiligehaltar , Münster St. Maria und Markus (Reichenau-Mittelzell).

Type III, mixte.

 La cathédrale de Sainte-Marie et Saint-Marc est une ancienne  église romane bénédictine  sur l'île de Reichenau dans le lac de Constance . La cathédrale est l'abbatiale de l'important monastère de Reichenau , et c'est la plus grande des trois églises romanes de l'île.

  Le triptyque de tous les saints a été réalisé par le peintre de Constance Rudolf Stahel en 1498.

Reichenau-Mittelzell: Tous les Saints autel dans la cathédrale de Sainte-Marie et MarcusJaeger, Dieter [photographe]

Détail : Banque de donnée bildindex cote mi08793003a1

mi08793a04ac

 

 

      3. Eglise Evangélique et Luthérienne de Marienkirche à Herford.

Type II, germanique

Cette église renferme un Triptyque datant de v.1500. Son  panneau central est divisé en quatre parties consacrées à une sainte Anne trinitaire (avec Joseph et Joachim), l'Adoration des Mages, Sainte Ursule et ses compagnes, et les Dix mille martyrs.

Inscription : de x dusent ridders ora pro nobis. (Aux Dix mille chevaliers, priez pour nous)

 Dix martyrs, nus, la tête ceinte d'une couronne d'épines, le corps transpercé à des endroits divers (sans lien avec les plaies du Christ) semblent chuter ou avoir été précipités d'une montagne. Ni croix, ni branches d'acacia.

http://www.marienkirche-herford.de/kirche.htm : Photo :  http://www.fotostudio-toelke.de/

 

 

 

4. St. Marien (Heilbad Heiligenstadt).

Type II, germanique.

Sainte-Marie est un église paroissiale catholique au centre de Heiligenstadt en Thuringe  .Le chœur est dominé par le triptyque de Hans Raphon, datant de 1512. 

Peintre : Hans Raphon, vers 1512.

Le retable domine le chœur : ouvert montre une Crucifixion,  mais une fois refermé on trouve à gauche un Martyre de saint Sébastien, et à droite le Martyre des 10.000 Chrétiens.

Bildindex MI11341a03a (recadrée)

 

 mi11341a03acorr

 

 

4. Triptyque , Frankfurt (Main), 1495 -

Type II, germanique.

 

Le Martyre de Saint Achatius et ses compagnons , Cologne, Wallraf-Richartz Museum, inv WRM 0363 - Rheinisches Bildarchiv Köln, Bildindex Cote 1643004.

koeln_1643004a.jpg

 

5. Diptyque du Maître de Cologne.

Type II, germanique

Maître de Cologne v1330, Wallraf-Richartz Museum.

Bildindex Mi01511a12a, recadrée. On voit deux empereurs couronnés en haut à gauche et en bas à droite, commandant à des bourreaux de ficher les corps des martyrs ou de les enfoncer à l'aide de maillets sur les branches ; un ange est visible en haut et à droite.

wrm_x2430064a.jpg

 

wrm_x2430113a.jpg

wrm_x2430114a.jpg

 

 

6 . Meister der Kleinen Passion.

Type II, germanique.

 .Musée Wallraf de Cologne, inv WRM 0728.

 maître de la Petite Passion, 1410/1415 - Martyre des Dix Mille , Cologne, Wallraf-Richartz Museum, inv WRM 0052 - Rheinisches Bildarchiv Köln, l'enregistrement non. koeln_2579015; : 2579015a

Bildindex mi 01498c11a.

  Cette image sur laquelle je ne suis pas parvenu à me documenter d'avantage serait une toile et non un panneau peint ; elle est d'un grand intérêt par son originalité : Saint Acace y est représenté en saint évêque ; les martyrs portent la couronne d'épine et le nimbe ; les sept rois (Adrien, Antonin, Maximin, Sapor, ..) sont figurés à cheval, coiffés de tiare ou de couronnes ; l'idole que les saints chevaliers refusent d'adorer est placée au centre. 

koeln_2579015a--2-.jpg

 

7. Deux scènes de saints, Martyre de saint Érasme et Le Martyre des Dix mille.

Type III, mixte.

Zwei heiligenswenen Martyre de saint Érasme et les Dix Mille / Le Martyre des Dix Mille  attribué au Maître du retable saint-Jean d'Hildesheim , 1451/1500, Cologne, Wallraf-Richartz Museum, inv WRM 0782 - Rheinisches Bildarchiv Köln.

  Cette image est également d'un grand intérêt, d'une part parce qu'elle montre de manière explicite les martyrs poussés par les soldats du haut de la montagne, d'autre part parce qu'elle associe le crucifiement de certains saints au martyre par transpercement des saints du second plan. 

koeln_1408058a.jpg

 

8. Sacristie de l'Église Sankt Johannes, Lüneburg.

Type II, germanique.

Retable de la crucifixion (Kreuzigungsaltar) : Das Martyrium der Zehntausend Hinrick Levenstede, 1536.

Banque de donnée Bildindex mi07003b04a

mi07003b04a lunebourg retable

 

9. Musée de Lünebourg

Type II germanique.

Altar der Marter der Zehntausend , Wittfeitzen, um 1520, Lüneburg, Museum für das Fürstenturm Lüneburg Museum, 

 

Bildindex mi12560c02a

mi12560c02a corr

bildindex mi 12560c03a :

mi12560c03acorr

 

 

10. Ville de Gehrden northen, chapelle évangélique du village de Lenthe, Hanovre.

Type II, germanique (var.)

 retable,  1501/1525 : les volets sont consacrés à la vie de la Vierge alors que, encadré par quatre saints (Thomas, Antoine, Jean et Catherine), l'élément central montre les martyrs précipités du haut d'une montagne. Il s'agit d'une variante du type II puisqu'ici, aucun acacia, aucune branche épineuse ne vient blesser les saints qui décedent de leur chute mortelle. 

 

 

 

Bildindex mi05339f02a :

mi05339f03acorr.jpg

 

 

 

mi05339f05ac.jpg

 

 

11. église paroissiale catholique Saint-Martin d'Oberwesel.

Type II, germanique.

Martyre des Dix mille martyrs, 1401/1500, Oberwesel (Rhénanie-Palatine), Katholische Pfarrkirche Sankt Martin.

Bildindex mi08446d08

 

mi08446d08acorr.jpg

 

 

12. Martyrium des Achatius und seiner 10.000 Gefährten am Berg Ararat , um 1500, Stainach Niederhofen (Stainach), Pfarrkirche Sankt Ruprecht — Foto Marburg, Foto: Aufsberg, Lala; Aufnahme-Nr

 Stainach Niederhofen (Stainach), Église paroissiale de Saint-Rupert ;

13. Munster , retable Noli me tangere, volet gauche.

Type II, germanique.

 Meister von Liesborn, 1489, Münster (Westfalen), Westfälisches Landesmuseum für Kunst und Kulturgeschichte. Tempera sur chêne, 135 x 76mm.

Le retable, une fois fermé sur la scène du Noli me tangere, montrait côte à côte les Dix mille martyrs et le Martyre de saint Erasme. Cette association, déjà rencontrée à Hildesheim, s'explique car saint Acace (22 juin) et ses 10.000 soldats et saint Érasme (2 juin) appartiennent tous les deux aux 14 saints intercesseurs.

  Nous retrouvons la représentation des saints jetés du haut d'un lieu élevé ; la précision supplémentaire est ici de montrer comment ils sont achevés par les bourreaux une fois parvenus au sol.

 Le retable est étudié ici.

source : Artothek 32056

                         Noli me tangere-autel. Ailier gauche: Martyre des Dix Mille. 1489

 

 

14. Der Tod der zehntausend Märtyrer,  Germanisches Nationalmuseum, Nürnberg.

Type II, germanique.

 

 Bildindex mi07814f07 recadrée

mi02581d12acorr.jpg

 

Bildindex mi7814f07

mi07814f07acorr.jpg

 

 

 

 

15 Ancien maître autel de Rottweiler par...le Maître de l'autel Rottweiler.

Type II, germanique

Connu sous le nom de "maître de l'autel Rottweiler", le célèbre peintre anonyme  gothique du 15ème siècle a reçu son surnom après avoir créé  l'ancien maître-autel de la cathédrale Sainte-Croix à Rottweil (Bade-Wurtemberg).  Peut-être avait-il son propre atelier à Rottweil. De ce maître-autel ont été conservés sept panneaux de 1420 (ou 1440) dont celui représentant les dix mille martyrs, récemment restauré au  Musée diocésain  de Rottenburg.

photo :http://www.lorenzer-heberle.de/Objekte-Seitenmappe/Museen/34-35-36.htm

 

 

16. D'autres œuvres :

  •  Maître-autel de l' église paroissiale de Saint-Pierre est l'église paroissiale catholique de Siegertsbrunn (Haute-Bavière).
  • Retable de la chapelle du chateau de Wernogerode, conservé au Hessischen Landesmuseum de Darmstadt.

 

 

Réflexion personnelles sur la "légende de type II".

  Cette légende veut que les compagnons de saint Acace aient été précipités d'un lieu élevé, fouettés de ronces, ou jetés sur des épines, et  en allemand on retrouve les termes "mit Dornen gekrönt", "mit spitzen Rohren durchbohrt", "Dornen bekräntzer soldat". 

  Il me faudrait retrouver son origine dans le légendaire de langue allemande, en cherchant un récit associant Achatius, ou Zehn tousand martyrium avec les mots "Dornen" ou "durchbohrt".

Je trouve ceci : Chorvs Sanctorvm Omnivm: Zwelff Bücher Historien Aller Heiligen Gottes publié à Cölln am Rhein en 1554 par Georg Witzel p.187-188.  Cela ne m'apporte rien, et ma recherche reste en cours.

 

Par ailleurs, quoique persuadé qu'il s'agit d'une validation formulée a posteriori, je peux étudier la piste du jeu de mots entre Acace et Acacia, tout en remarquant que le saint se nomme Achatius en langue allemande. Le prénom Achatius, avec sa variante biblique Achaz, est apparu en Allemagne depuis le 15e siècle, bien après la diffusion de la légende. 

 

 L' Acacia, famille d'arbres méditerranéens dont fait partie le mimosa, est confondu en France avec le robinier faux acacia, introduit en France par Jean Robin, botaniste du roi Henri IV. Acacia et Robinier sont tous les deux des arbres épineux.  Son origine étymologique, repérée dans le grec akakia, et suivie par le latin acacia,  apparaît en français sous la forme acacie, au XIVe siècle, et acace, au XVe, variant au XVIe en acassia ou acacia qui finalement triomphe au XVIIe avec un changement de genre et l'imposition du masculin. C'est en effet au XVIIe siècle que commence à être introduit cette essence en France et à partir du XVIIe qu'elle y connaît son développement, ainsi l'agronome Duhamel du Monceau en prône la plantation massive dans son traité, De l'exploitation des bois (1764). Le nom en français paraît donc plus tardif que lesœuvres du XIV-XVe siècle où figurent les saints et leurs épines.

C'est avec les formes italienne san acacio ou sant' agazio et espagnole acacio que le jeu de mots peut fonctionner au mieux.

  Le Musée du Prado conserve un Tríptyque  représentant le Martirio de San Acacio du 16e siècle; malgré le nom Acacio, c'est bien la légende originelle de type I, des martyrs crucifiés, qui est représentée, quoiqu' au premier plan, la scène principale  qui est donnée à voir soit la plaie du flanc (gauche ici).

 

 martiro-san-acacio.jpg-le-prado.jpg

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Published by jean-yves cordier
8 octobre 2012 1 08 /10 /octobre /2012 20:46

 

La Légende des Dix mille martyrs dans La Légende Dorée et les Vies de saints additionnelles.

 

Voir aussi :

 

 

 

1. Rappel : La Légende Dorée (Wikipédia).

La Légende dorée (Legenda aurea en latin) est un ouvrage rédigé en latin entre 1261 et 1266 par Jacques de Voragine, dominicain et archevêque de Gênes, qui raconte la vie d'environ 150 saints ou groupes de saints, saintes et martyrs chrétiens, et certains épisodes de l'année liturgique, commémorant notamment la vie du Christ et de la Vierge. 

 Jacques de Voragine a puisé dans tous les textes classiques de la littérature religieuse du Moyen Âge, et en particulier les évangiles apocryphes de Jacques, de Nicodème, le Speculum historiale de Vincent de Beauvais, les œuvres des Pères latins Grégoire de Tours, saint Augustin, saint Jérôme et les Vitæ Patrum, Jean Cassien et de Pères grecs déjà traduits en latin comme saint Jean Chrysostome. Il s'est efforcé de ne pas recourir aux légendes de saints locaux.

  Initialement intitulée Legenda sanctorum alias Lombardica hystoria, qui signifie littéralement «Ce qui doit être lu des saints ou histoire de la Lombardie », elle comporte outre les vies de saints, environ 40 % de son contenu consacré aux explications des fêtes religieuses principales, qui renvoient à la vie du Christ.

 Le livre est divisé en 5 parties et 178 chapitres, organisés à la fois selon l'ordre du calendrier liturgique (de l'Avent à la fin novembre) et des âges de la grâce ou du salut : temps de la rénovation (5 chapitres), le temps de la réconciliation et de la pérégrination (25 chapitres), le temps de la déviation (21 chapitres), le temps de la réconciliation (20 chapitres), le temps de la pérégrination (107 chapitres).

L'abrégé d'histoire de l'Europe qu'il donne, commençant au vie siècle avec l'arrivée des Lombards, lui vaut également le nom d'Historia lombardica (Histoire lombarde).

Cet ouvrage connaît dès sa création, vers 1261-1266, un succès considérable. Le plus ancien manuscrit conservé, datant de 1282, se trouve aujourd'hui à la Bayerische Staatsbibliothek de Munich. Très rapidement, La Légende dorée devient, avec la Bible et le psautier, une des œuvres les plus lues, les plus copiées mais peut-être aussi les plus augmentées : aux xive et xve siècles, il n'est pas rare d'en trouver des copies contenant pas moins de 400 histoires. On estime qu'il en existe plus de 1 000 manuscrits, du plus simple au plus enluminé. L'arrivée de l'imprimerie accroît encore sa diffusion.

 

2. La Légende Dorée et la légende des Dix mille martyrs.

 La version originelle de la Légende Dorée, celle de Jacques de Voragine, ne parle pas des Dix mille martyrs ou de saint Acace, alors qu'elle a puisé ses sources dans le Speculum historiale de Vincent de Beauvais qui la mentionne. Cette absence n'est certainement pas fortuite, et il reviendrait à des critiques d'en étudier les raisons : on sait, notamment que les bases de la légende avaient été remises en cause.

  Une autre remarque est qu'initialement, la Légende Dorée s'inscrit, avec son titre et  sa partie consacrée à l'Histoire des Lombards, dans une perspective historique et non purement hagiographique : en ce sens, elle s'inscrit en filiation avec les Chroniques et le Speculum historiale de Vincent de Beauvais.

  Il existe 1050 manuscrits conservés du texte latin, et il est impossible de les consulter tous pour vérifier l'absence de la Légende des Dix mille. Les premières traductions en français, celle de Jean de Vignay pour Jeanne de Bourgogne (au plus tard en 1348) et dont un beau manuscrit est conservé à Rennes (ms 266, de 1395-1403), ou celle du Pseudo-Belet, sont fidèles au texte originel et n'y font pas allusion.

 Comme l'indique le texte d'introduction, les 178 ou 179 chapitres et les récits des 150 saints initiaux se virent complétés au XIV et XVe siècles par des chapitres et des hagiographies complémentaires, et c'est parmi celle-ci que peut se rechercher la mention de la légende des Dix mille martyrs. Le dernier chapitre de Jacques de Voragine étant consacré à "La Dédicace de l'Eglise", c'est à la suite de ce dernier chapitre que nous trouverons l'histoire des compagnons de saint Acace.

  En 1401-1402, un auteur (identifié à Jean Bolein) composa des Festes Nouvelles d'après le Speculum historiale de Vincent de Beauvais ; ce complément fut alors placé par les éditeurs à la suite de la Légende Dorée, et les manuscrits et livres imprimés ainsi formés sont très nombreux : voir la liste qu'en donne le site Arlima ici 

 Mais si je consulte, dans cette liste, le manuscrit BNF français 243, je ne trouve, dans la table des 42 fêtes nouvelles, aucune mention des dix mille crucifiés. Rien non plus dans BNF français 242, dans Rothschild 2020 (Lyon 1517) qui mentionne 9 fêtes nouvelles, etc...

 

  C'est donc plutôt le hasard qui me permet de trouver les textes suivants, dans le désordre de leur découverte:

 

1.Légende Dorée de Jacques de Voragine, exemplaire de la Bibliothèque universitaire de Lund (Suède).

Manuscrit médiéval 19 ,parchemin  en latin, daté de la fin du XIV/ début XVe siècle, originaire de Poméranie, 245mm x 175mm, ff.258. Cote  Olim: B. N. Mscr. 4:to N:o 37. 

http://laurentius.ub.lu.se/volumes/Mh_19/detailed/

 Les feuillets qui nous concernent sont les folio 247r et 247v.

Incipit : Passio et memoria ....X. milia militu memoria.

 

 

2. Légende Dorée de Jacques de Voragine exemplaire de Darmstadt.

Universitäts- und Landesbibliothek  Darmstadt Cote ISTC ij00104000

Legenda aurea sanctorum, sive Lombardica historia, Strasbourg 1481, 362 p. chap CLXXVIII page 315,

Le folio étudié est paginé au n° 315  : Il vient juste après le chapitre 177 consacré à la Dédicace de l'église, et après une rubrique indiquant Sequuntur quedam legende a quibusdam aliis superaddite. Et primo de decem milibus martirum. C'est donc lui qui vient en tête des Légendes additionnelles.

   L' incipit  est : CLXXVIII Passio et memoria decem milium martirum veneratur et colitur decima kalendas Iulii, qui omnes una die pro Christi nomine passi sunt sub adriano imperator aliisque sex regibus qui ei venerunt in adiutorium.

La finale est : Domine deus memento nostri in hoc patibulo crucis et sucipe petitionem nostra et ea quae a te poscimus.

 http://tudigit.ulb.tu-darmstadt.de/show/inc-iv-152/0627?sid=57ec45fff93235af16009a2a02729add 

 

3. La Légende Dorée de Jacques de Voragine conservée à la Bibliothèque Universitaire d'Heidelberg.

Heidelberg Universitätsbibliothek : Elsässische legenda aurea Cod. Pal. germ. 144. nommée la Légende dorée alsacienne, signée et datée de 1419 par un colophon : Anno domini millesimo quadragentisimo xix etc. Johannes Ziegler (f. 412v.).

http://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/cpg144

  Le texte écrit en vieil allemand ou plutôt en dialecte alsacien avec des enluminures de l'"atelier alsacien de 1418" est bien difficile à appréhender pour moi ; une première partie est nommée Sommerteil (partie d'été) et l'autre, à partir du folio 248 est nommée Winterteil, partie d'hiver et qu'il est complété par les légendes additionnelles. Mais ce qui est ici particulier, c'est qu'il ne reprend pas le bref texte latin des deux exemples précédents, mais qu'il donne, du folio 397r au folio 401r, un texte de huit pages narrant l'ensemble de la légende qui occupe le chapitre LXXIIII . 

  Les éditions de la Légende dorée devinrent propres à chaque région (en mentionnant, comme dans les Propres des diocèses, tel ou tel saint) ; la version strasbourgeoise a été établie dès 1350.

  Il est d'autant plus intéressant pour ma recherche qu'il débute par une enluminure pleine page qui montre (comme dans le Livre d'heures d'Anne de Bretagne) les martyrs transpercés par les branches épineuses d'un acacia, selon l'étymologie en jeu de mot du nom d'Acacius, le chef des Dix mille martyrs.

légende Dorée d'heidelberg Cod.Pal.germ.144,fol397r

 

On peut lire le titre, Von den zehen tusent martelern. Cette formulation est retrouvée dans un Calendrier allemand du XIVe siècle (Zeitschrift für Deutsches Altertum und Deutsche Literatur, Volume 6 p. 358) selon la formule Zehen tusent martelern tag pour le 22 juin, et avec une variante Zehen tusent ritter und marteler dans Die älteste Teutsche sowol allgemeine als insonderheit Elsassische und ... Par Jacob Twinger (von Koenigshofen), 1698.

  Puis le texte lui-même débute, pour ce que j'en déchiffre, comme le texte latin d'Anastase par une mention des empereurs Adrien et Antonin : ..den ziten, de adrianus und anthoninus dem rompsche rieh...und die adriani und die von Euphrates do das ..die kaiser do das...

  Cela évoque le début du texte que le philologue tchèque  Leopold Zatočil a transcrit et qui est le suivant : In den geziten, do Adrianus und Anthoninus, die bößen keiser, das römsche rieh regierten, warent zwai lant oder Wolker, genant Gaderen und ... ( , Die Legende von den 10000 Rittern nach altdeutschen und mittelniederländischen Texten nebst einer alttschechischen Versbearbeitung und dem lateinischen Original, in Germanistische Studien und Texte I: Beiträge zur deutschen und niederländischen Philologie des Spätmittelalters Leopold Zatočil Universita J.E. Purkyné, 1968 - 288 pages). Autrement dit, la traduction en néerlandais (?) du texte latin d'Anastase le Bibliothécaire.

 

 

"L'Atelier alsacien de 1418", (Die elsässiche Werkstatt von 1418) a été défini par Hans Wegener en 1927 (Beschreibendes Verzeichnis der deutschen Bilder-Handschriften des späten Mittelalters in der Heidelberger Universitäts-BibliothekLeipzig, 1927) pour désigner les auteurs d'un groupe de 19 manuscrits (dont 7 à Heidelberg), tous écrit sur le même papier porteur du même filigrane, tous écrits en dialecte alsacien, dont certains sont datés de 1418 (mais l'atelier est actif de 1418 à 1430) réalisés à Strasbourg (dont les armoiries se voient sur certains habits et bâtiments) ou à Colmar. Les écrivains (Johannes Ziegler qui signe cette Légende dorée, Hans Coler, Thomas Vogel) travaillaient sans-doute à la copie rétribuée pour l'atelier. Les artistes sont restés anonymes, mais on distingue cet atelier de celui, pourtant proche de Diebold Lauber car le papier en est différent. Leurs illustrations sont, pense-t-on, le travail des trois groupes d'illustrateurs et d'enlumineurs : la manuscrit Cod. Pal. germ. 144 est attribué au groupe C.  (Source : Bibliothèque d'Heidelberg )

 L'illustration folio 397 de 21,5 x24,5 x24 cm est tracée à la plume et coloriée de trois couleurs seulement, vert pâle des arbres, rose-parme du sang (appliqué grossièrement en coulées autour des plaies) et jaune des pagnes et des nimbes. Deux des quatre martyrs portent des couronnes d'épines.

4. Legenda aurea d'Augsburg.

Incunablepar Gunther Zainer, 1471-1472.

Partie 2, Sommerteil du 27 IV 1472,

 Cote M11402 folio 58aß Zehntausend Märtyrer (Da Adrianus und Antonius des reichs gewaltig waren

5. Legenda aurea de Cologne.

Incunable de Ludwig von Reichen, 1482 Niederdeutsch Köln.

M11405 folio 237bß Zehntausen martyrer, in vurleden tziden was eyn furste geheissen Achacius.

6. Legenda aurea d'Augsburg.

Incunable, Augsburg, par Johannes Bämler, 18-X-1477.

Cote M11357 P.2 folio 124b. Zehn tausend Märtyrer

 

7. Légende Dorée  de La Haye, Bibliothèque royale Cod 133 B17.

  Den Haag/'s-Gravenhage, König. Bibl Cod 133 B 17 : Manuscrit de 1463 de 235 feuillets de parchemin et papier rédigés en moyen allemand.

«Südmittelniederländische Legenda Aurea» (GH12)  Bl-15rb 16ra: Zehntausend märtyrer.

 

8. Legenda aurea sanctorum sive Lombardica historia.

Edition en latin de Theodore  Graesse 1845 édition Leipzig et Dresden 1846, réed. Breslau 1890, Vratislava 1890. Google Books 

Jacobi a Voragine Legenda aurea vulgo Historia Lombardica dicta. Ad optimorum librorum fidem recensuit Dr. Th. Graesse, Dresdae et Lipsiae, impensis librariae Arnoldianae, 1846, x + 958 p. 1re éd.: [GB]; 2e éd.: [IA]; 3e éd.: [IA]

Réimpr.: Editio secunda, Lipsiae, impensis librariae Arnoldianae, 1850; Editio tertia, Vratislaviae, apud Guilelmum Koebner, 1890; Osnabrück, Zeller, 1965; 1969.

  Entre le 16e siècle et le renouveau du XIXe siècle, le succès éditorial de la Légende Dorée chuta drastiquement sous l'effet des attaques des protestants et des critiques de catholiques qui estimaient que la version de Jacques de Voragine était moins fidèle que les anciennes sources hagiographiques; d'autre part, le terme de Légende devenait suspect.

  Dans cette édition, "la meilleure édition latine malgré ses erreurs jusqu'à celle de Giovanni Paolo Maggioni en 1998" (C. Kleinhenz), la légende des dix mille occupe le chapitre 178, comme dans l'exemplaire de Darmstadt, juste après le chapitre 177 de la Dédicace de l'Eglise. Elle reprend d'ailleurs littéralement le texte de l'édition de Strasbourg de 1481.

 

"Sequuntur quaedam legendae a quibusdam aliis superadditae.

CAP. CLXXXVIII.
De Decem millibus martirum."

   "Passio et memoria decem millium martirum veneratur et colitur X Calendas Julias. Qui omnes una die pro Christi nomine passi sunt  sub Hadriano imperatore aliisque VI regibus, qui venerunt ad adjutorium. Hi sancti martires, cum ab imperatore ad sacrificandum ydolis compellerentur dixerunt : sacrifium vivum et immaculatum offerimus nosmet ipsos domino nostro Jesu Christo, qui pro humano genere nasci dignatus est et descendere de coelis, multis malis affligi, et ad ultimum voluit etiam pro nobis crucifigi, quem tu, miser, ignoras. Tunc iratus imperator jussit eos diu torqueri et ad ultimum crucifigi et omnia tormenta, quae passus est dominus noster Jesus Christus, forti animo et fide firmissima pro domino sustinuerunt. Locus igitur, ubi passi sunt beati martires mons est magnus est vocatur Arrahe [aliis Ararat legunt] et distat Alexandra civitate CCCCC quasi stadis. A quibus autem passi sunt, fuerunt exercitus regum, qui illi venerant in adjutorium, XXX milia. Hora vero sexta illins diei terrae motus factus est magnus, petrae scissae sunt, sol obscuratus est et omnia signa, quae in passione domini visa fuerant, ecce ibi visa sunt. Tunc sancti martires fundentes orationem ad dominum dixerunt : domine deum, memento nostri in hoc patibulo crucis et suscipe petitionem nostram et ea, quae a te exposcimus, nobis concedere digneris, ut quicumque memoriam nostri corde et ore cum jejunio et devotione celebraverunt mereantur a te assequi fructuosam mercedem, tribuendo iis sanitatem corporum, medicamen animae, et in domibus eorum et foris bonorum omnium ubertatem concede. Et si in proelio fuerint, non iis nocere praevaleant inimici visibiles et invisibiles te expugnant, sed, sicut placet tibi, armis tuis eos protege diesque unius diei nostri passionis unuus poenitentiarum annum compleat observantibus se devoto corde. Et hoc, dominator domine, a te poscimus, dissipa omnem occupationem et omnem immundum spiritum omnemque infirmitatem eorum expelle, quia gloriosum et laudabile est nomen tuum per omnia saecula saeculorum. Et respondentibus omnibus amen facta est vox de coelo dicens : quae petiistis, dilectissimi mei, scitote vos impetrasse. Gaudete quoque et laetamini, quia orationes vestrae coram Christo et immortali rege veraciter sunt exauditae. Et hic dictis in confessione emiserunt spiritum veraciter percepturi praemia regni coelorum. "

  On en trouvera la traduction dans le texte suivant.

 

 

9. La Légende Dorée dans son édition moderne par Gustave Brunet en 1843.

 

La Légende Dorée, traduite du latin et précédée d'une notice historique et bibliographique par M.G.B. [Gustave Brunet] ,  deuxième série, Paris, Librairie Charles Gosselin rue Jacob 30,  1843. (deux volumes, 395 p).

 Traducteur : Pierre-Gustave Brunet (1806-1896). Je n'ai pas trouvé l'indication du texte latin qu'a traduit G. Brunet.

En ligne sur Gallica p. 193

     "La commémoration de la passion des dix mille martyrs se fait le dixième jour des kalendes de juillet : ils souffrirent tous la mort pour Jésus-Christ le même jour sous le règne de l'empereur Adrien. Ayant reçu l'ordre de sacrifier aux idoles, les saints martyrs dirent: "Nous nous offrons nous-mêmes comme un vivant sacrifice à Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui a bien voulu naître pour le genre humain, descendre du ciel, souffrir beaucoup de maux, et enfin être crucifié pour nous, ce que tu as le malheur d'ignorer." L'empereur, irrité, ordonna qu'ils fussent longuement tourmentés et enfin crucifiés. Ils supportèrent avec un courage inébranlable et la foi la plus ferme tous les tourments qu'avait endurés Notre-Seigneur. L'endroit où souffrirent ces saints martyrs est une grande montagne qui s'appelle Ararat et est éloignée d'Alexandrie d'environ cinq cent stades. A la sixième heure du jour, il se fit un grand tremblement de terre ; les rochers se fendirent, le soleil fut obscurci, et l'on revit tous les signes qui s'étaient manifestés lors de la passion de Notre-Seigneur. Alors les saints martyrs se mettant en prières, dirent à Dieu : Seigneur, souvenez-vous de nous sur le gibet de la croix et accueillez notre prière, et accordez la grâce que quiconque célèbre dévotement votre mémoire de cœur et de bouche en jeûnant en reçoive la récompense en se voyant accorder la santé du corps et la guérison de l'âme, et donnez-leur  abondance de biens dans leur maison au dedans et au dehors. Et s'ils se trouvent dans les combats, protégez-les, Seigneur, afin que les armes des ennemis visibles et invisibles ne puissent leur nuire, et qu'il soit dans votre grand plaisir de leur faire remporter la victoire ; et délivrez ceux qui compléteront une année de pénitence en jeûnant le jour de notre commémoration ; délivrez-les, Seigneur, du pouvoir des démons et guérissez toutes leurs maladies, car votre nom est glorieux et louable dans tous les siècles des siècles." Et tous les martyrs ayant répondu Amen, on entendit une voix qui disait : "Sachez, mes biens-aimés, que vous avez obtenu ce que vous avez demandé. Réjouissez-vous, car vos prières ont été exaucées devant Jésus-Christ et devant le Roi immortel" Et lorsque cela eut été dit, les martyrs rendirent l'esprit en confessant le Seigneur, et ils allèrent prendre possession des récompense du royaume des cieux. Ainsi soit-il. "

      On trouve là une légende amputée de toute sa partie narrative et de sa démonstration théologique pour ne retenir que la part dévote et rejoindre les mentions des martyrologes. On la comparera au texte d'Anastase et à la première traduction française de 1170 pour en juger :  Les Dix mille martyrs dans le manuscrit Fr. 696 La Vie et passion de Saint-Denis : confrontation avec le texte latin d'Anastase.

  Mon point de vue, que je reprendrais ailleurs, est que l'on voit se constituer une veine historique, qui présente la légende des Dix mille martyrs comme un fait historique du régne d'Adrien et de l'avénement du christianisme à travers les persécutions (texte d'Anastase, de Saint-Denis, de Vincent de Beauvais et de la Grande Cronique de Bretaigne) : cette veine est destinée aux rois et reines ou à une élite de clercs et de seigneurs très liées à la cour. Elle vise à fonder le pouvoir royal, qui s'établit par la possession de reliques et par la sépulture auprès de celles-ci, ou à confirmer des dogmes théologiques.

 Par ailleurs se développe une veine liturgique ou hagiographique, soucieuse de fonder sur des textes une pratique dévotionnelle, pour le clergé, ou de lire l'assurance des bénéfices attachés à ce culte (indulgences et protections), pour les fidèles : c'est là où se placent les légendes additionnelles de la Légende Dorée, les Acta Sanctorum, les prières des Livres d'Heures, Bréviaires, Missels et antiphonaires.

 

 

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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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