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1 novembre 2015 7 01 /11 /novembre /2015 21:01

La Laitière de Jean-Baptiste Huet et les laitières de Marcel Proust.

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Voir aussi :

Pan, pan, pan, pan : ce que contient le précieux petit pan de mur jaune de Proust.

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La Laitière (1769) de Jean-Baptiste Huet (1745-1811) a-t-elle pu inspirer à Marcel Proust ce personnage de la jolie laitière qui court en leitmotiv dans A la recherche du temps perdu comme la métaphore d'un plaisir auquel le narrateur aurait pu goûter, et qui s'éloigne ?

Non, sans-doute. Car mes recherches sur la toile ne retrouvent aucune réponse à l'interrogation Proust + "Jean-Baptiste Huet".

Traditionnellement, la laitière de Proust est mise en relation avec celle de Vermeer. Cela ne me semble guère convaincant.

La sage et concentrée bourgeoise ou domestique de Delft est un bel exemple de cette tranquillité qui naît de la vie humble aux travaux ennuyeux et faciles, du "cœur à l'ouvrage" suscitée par l'utilisation routinière des nourritures simples. Mais est-elle sexuellement attirante ?

Celle que Proust décrit est, d'abord, désirable. Ses laitières sont des objets du désir qui troublent le narrateur car elles lui semblent accessibles et faciles alors qu'elles lui échappent toujours. Comme les arbres d'Hudimesnil, elles résistent à la possession, à la captation.

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Aussi j'en viens à proposer aux proustophiles et proustomaniaques ce tableau de Jean-Baptiste Huet conservé actuellement (depuis 1929) au Musée Cognacq-Jay après avoir appartenu aux collections des propriétaires de la Samaritaine, Ernest Cognacq et Marie-Louise Jaÿ.

Le seul réel argument que je leur propose —et dont ils devraient je pense accepter la validité — est le très fort sentiment de reconnaissance, immédiat, que la vue du tableau a suscité chez moi : "Ah, — me suis-je dit— voici  la laitière que Marcel a vu apparaître alors qu'il était dans le train vers Balbec : "la grande fille que je vis sortir de cette maison et, sur le sentier qu'illuminait obliquement le soleil levant, venir vers la gare en portant une jarre de lait. ".

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D'où me venait cet émoi intérieur ? Ce plaisir délicieux de la certitude d'une retrouvaille ? Qu'est-ce qui suscitait cette puissance joie ? D'où venait-elle ? Que signifiait-elle ? Où l'appréhender ? Plutôt que de scruter la toile de Huet, je me tourne vers mon esprit et j'y retrouve les phrases de La Recherche. 

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"Le paysage devint accidenté, abrupt, le train s'arrêta à une petite gare entre deux montagnes. On ne voyait au fond de la gorge, au bord du torrent, qu'une maison de garde enfoncée dans l'eau qui coulait au ras des fenêtres. Si un être peut être le produit d'un sol dont on goûte en lui le charme particulier, plus encore que la paysanne que j'avais tant désiré voir apparaître quand j'errais seul du côté de Méséglise, dans les bois de Roussainville, ce devait être la grande fille que je vis sortir de cette maison et, sur le sentier qu'illuminait obliquement le soleil levant, venir vers la gare en portant une jarre de lait. Dans la vallée à qui ces hauteurs cachaient le reste du monde, elle ne devait jamais voir personne que dans ces trains qui ne s'arrêtaient qu'un instant. Elle longea les wagons, offrant du café au lait à quelques voyageurs réveillés. Empourpré des reflets du matin, son visage était plus rose que le ciel. Je ressentis devant elle ce désir de vivre qui renaît en nous chaque fois que nous prenons de nouveau conscience de la beauté et du bonheur.  [...] Telle, étrangère aux modèles de beauté que dessinait ma pensée quand je me trouvais seul, la belle fille me donna aussitôt le goût d'un certain bonheur (seule forme, toujours particulière, sous laquelle nous puissions connaître le goût du bonheur), d'un bonheur qui se réaliserait en vivant auprès d'elle. Mais ici encore la cessation momentanée de l'Habitude agissait pour une grande part. Je faisais bénéficier la marchande de lait de ce que c'était mon être complet, apte à goûter de vives jouissances, qui était en face d'elle. Je ne sais si, en me faisant croire que cette fille n'était pas pareille aux autres femmes, le charme sauvage de ces lieux ajoutait au sien, mais elle le leur rendait. La vie m'aurait paru délicieuse si seulement j'avais pu, heure par heure, la passer avec elle, l'accompagner jusqu'au torrent, jusqu'à la vache, jusqu'au train, être toujours à ses côtés, me sentir connu d'elle, ayant ma place dans sa pensée. Elle m'aurait initié aux charmes de la vie rustique et des premières heures du jour. Je lui fis signe qu'elle vînt me donner du café au lait. J'avais besoin d'être remarqué d'elle. Elle ne me vit pas, je l'appelai. Au-dessus de son corps très grand, le teint de sa figure était si doré et si rose qu'elle avait l'air d'être vue à travers un vitrail illuminé. Elle revint sur ses pas, je ne pouvais détacher mes yeux de son visage de plus en plus large, pareil à un soleil qu'on pourrait fixer et qui s'approcherait jusqu'à venir tout près de vous, se laissant regarder de près, vous éblouissant d'or et de rouge. Elle posa sur moi son regard perçant, mais comme les employés fermaient les portières, le train se mit en marche ; je la vis quitter la gare et reprendre le sentier, il faisait grand jour maintenant : je m'éloignais de l'aurore. [...] ; cette belle fille que j'apercevais encore, tandis que le train accélérait sa marche, c'était comme une partie d'une vie autre que celle que je connaissais, séparée d'elle par un liséré, et où les sensations qu'éveillaient les objets n'étaient plus les mêmes ; et d'où sortir maintenant eût été comme mourir à moi-même. Pour avoir la douceur de me sentir du moins attaché à cette vie, il eût suffi que j'habitasse assez près de la petite station pour pouvoir venir tous les matins demander du café au lait à cette paysanne. Mais, hélas ! elle serait toujours absente de l'autre vie vers laquelle je m'en allais de plus en plus vite et que je ne me résignais à accepter qu'en combinant des plans qui me permettraient un jour de reprendre ce même train et de m'arrêter à cette même gare, projet qui avait aussi l'avantage de fournir un aliment à la disposition intéressée, active, pratique, machinale, paresseuse, centrifuge qui est celle de notre esprit car il se détourne volontiers de l'effort qu'il faut pour approfondir en soi-même, d'une façon générale et désintéressée, une impression agréable que nous avons eue. Et comme d'autre part nous voulons continuer à penser à elle, il préfère l'imaginer dans l'avenir, préparer habilement les circonstances qui pourront la faire renaître, ce qui ne nous apprend rien sur son essence, mais nous évite la fatigue de la recréer en nous-même et nous permet d'espérer la recevoir de nouveau du dehors." A la recherche du temps perdu (Marcel Proust) II : A l'Ombre des Jeunes Filles en Fleurs II : Noms de pays : le pays

Nous voyons que la laitière de Proust, comme celle de Huet, regarde le narrateur. Qu'elle ne se trouve pas dans une cuisine ou un office de maison bourgeoise, dans un cercle familier. Elle surgit comme une apparition sauvage, étrangère, elle se lève avec l'aurore à laquelle elle s'identifie.

  J'ignore si Proust a connu ce tableau. Mais par contre, les liens —peut-être amoureux— qui l'unissait à Nissim de Camondo sont bien connus. (Et le héros de la Recherche Nissim Bernard en tire son nom) 

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Et alors ?

Nissim a vécu dans l'hôtel particulier de la Porte Monceau que son père le comte Moïse de Camondo, banquier et collectionneur d'art, avait fait construire en 1911 pour abriter ses collections. C'est actuellement le Musée Nissim de Camondo. On y trouve au rez-de-chaussée haut le "Salon des Huet" spécialement conçus pour recevoir les panneaux peints de scènes champêtres de Jean-Baptiste Huet. Ce grand cycle décoratif comprend sept compositions et trois dessus de porte et illustre les progrès de l’amour entre un berger et une bergère, grâce à la complicité d’un chien et d’une colombe. Jean-Baptiste Huet fut l’un des grands peintres animaliers du XVIIIe siècle et c’est en hommage à son cycle que le salon circulaire placé à la jonction des deux ailes de l’hôtel Camondo prit le nom de Salon des Huet.

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La Bouquetière de Jean-Baptiste Huet.

Notre laitière fait la paire avec une Bouquetière au corsage tout aussi généreux et à la fraîcheur délicieuse, qui propose ingénument les roses de son tablier et les bouquets de ses paniers d'osier

Une huile sur toile de 67,5 x 50,5, comme La Laitière, et, comme elle, conservée au Musée Cognacq-Jay (actuellement en restauration). Mais, à ma connaissance, Proust ne fait pas apparaître de bouquetière dans son œuvre.

http://museecognacqjay.paris.fr/fr/les-actualites/restauration-de-deux-oeuvres-peintes-par-huet-la-bouquetiere-et-la-laitiere

http://art.rmngp.fr/fr/library/artworks/jean-baptiste-huet_la-bouquetiere_huile-sur-toile

 

 

Jean-Baptiste Huet, La Bouquetière, détail, Musée Cognacq-Jay (copie d'écran du site du musée)

Jean-Baptiste Huet, La Bouquetière, détail, Musée Cognacq-Jay (copie d'écran du site du musée)

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Une fausse piste.

Je consulte Le Musée retrouvé de Marcel Proust par Yann le Pichon (Stock, 1990, 1995), mais J-B. Huet ne figure pas dans le "musée imaginaire" composé par l'auteur. J'y trouve néanmoins une liste des peintres cités dans La Recherche, et , à la lettre H, je trouve "HUET (Jean-Baptiste), III, 1518". Le cœur battant, j'ouvre le tome III de mes volumes de la Pléiade à la page 1518. C'est une variante de la page 309 de Sodome et Gomorrhe, II.

..choses qu'elle possédait et qui pouvaient aisément se marier à cet intérieur, notamment de vieilles toiles françaises et des paravents de laque [...]. Surtout, Mme Verdurin poussant même jusqu'à des conséquences extrêmes un de ses axiomes qui était qu'on doit vivre fut-ce pour quelques mois au milieu des choses qu'on aime, avait rapporté à la Raspelière et placé des encadrements de vernis Martin, des chinoiseries décoratives Leprince, et de Huet (1), qui se mariaient aimablement aux paravents leurs voisins, comme l'Orient français des adaptations de Galland aux Mille et Une Nuits véritables. "

On voit que Proust ne fait pas allusion à Jean-Baptiste Huet, mais, bien évidemment, à son oncle Christophe Huet,(1663-1739),  peintre animalier célèbre pour sa décoration des salons de Chantilly nommés Grande et Petite Singerie : ce sont bien là  des "chinoiseries décoratives". 

Pourtant, ce n'est pas l'opinion d'Antoine Compagnon, qui accompagne la mention du nom Huet de cette variante d'une note (1) page 1518-1519 en précisant : Jean-Baptiste Huet (1745-1811), peintre réputé pour des paysages et des scènes animalières ; ses dessins gravés restèrent réputés". C'est cette note qui explique la mention de J-B. Huet dans la liste des peintres cités par Proust, dans le livre de Y. Le Pichon. 

En définitive, Marcel Proust ne mentionne pas Jean-Baptiste Huet dans son œuvre.

 

Annexe. Quelques laitières de La Recherche du Temps Perdu.

Il me reste, avant de lancer cette bouteille à la mer à destination d'une éventuelle âme sensible,  à chercher dans La Recherche d'autres apparitions de "la laitière", parfois qualifiée de "crémière".

 

 

"Si, sortant de mon lit, j'allais écarter un instant le rideau de ma fenêtre, ce n'était pas seulement comme un musicien ouvre un instant son piano, et pour vérifier si, sur le balcon et dans la rue, la lumière du soleil était exactement au même diapason que dans mon souvenir, c'était aussi pour apercevoir quelque blanchisseuse portant son panier à linge, une boulangère à tablier bleu, une laitière à bavette et manches de toile blanche, tenant le crochet où sont suspendues les carafes de lait, quelque fière jeune fille blonde suivant son institutrice, une image enfin que les différences de lignes, peut-être quantitativement insignifiantes, suffisaient à faire aussi différente de toute autre que pour une phrase musicale la différence de deux notes, et sans la vision de laquelle j'aurais appauvri la journée des buts qu'elle pouvait proposer à mes désirs de bonheur. Mais si le surcroît de joie, apporté par la vue des femmes impossibles à imaginer a priori, me rendait plus désirables, plus dignes d'être explorés, la rue, la ville, le monde, il me donnait par là même la soif de guérir, de sortir, et, sans Albertine, d'être libre. Que de fois, au moment où la femme inconnue dont j'allais rêver passait devant la maison, tantôt à pied, tantôt avec toute la vitesse de son automobile, je souffris que mon corps ne pût suivre mon regard qui la rattrapait et, tombant sur elle comme tiré de l'embrasure de ma fenêtre par une arquebuse, arrêter la fuite du visage dans lequel m'attendait l'offre d'un bonheur qu'ainsi cloîtré je ne goûterais jamais ! "

La Recherche V. La Prisonnière

 

  "Parfois, comme la voiture gravissait une route montante entre des terres labourées, rendant les champs plus réels, leur ajoutant une marque d'authenticité, comme la précieuse fleurette dont certains maîtres anciens signaient leurs tableaux, quelques bleuets hésitants pareils à ceux de Combray suivaient notre voiture. Bientôt nos chevaux les distançaient, mais après quelques pas, nous en apercevions un autre qui en nous attendant avait piqué devant nous dans l'herbe son étoile bleue ; plusieurs s'enhardissaient jusqu'à venir se poser au bord de la route et c'était toute une nébuleuse qui se formait avec mes souvenirs lointains et les fleurs apprivoisées.

Nous redescendions la côte ; alors nous croisions, la montant à pied, à bicyclette, en carriole ou en voiture, quelqu'une de ces créatures – fleurs de la belle journée, mais qui ne sont pas comme les fleurs des champs, car chacune recèle quelque chose qui n'est pas dans une autre et qui empêchera que nous puissions contenter avec ses pareilles le désir qu'elle a fait naître en nous – quelque fille de ferme poussant sa vache ou à demi couchée sur une charrette, quelque fille de boutiquier en promenade, quelque élégante demoiselle assise sur le strapontin d'un landau, en face de ses parents. Certes Bloch m'avait ouvert une ère nouvelle et avait changé pour moi la valeur de la vie, le jour où il m'avait appris que les rêves que j'avais promenés solitairement du côté de Méséglise quand je souhaitais que passât une paysanne que je prendrais dans mes bras, n'étaient pas une chimère qui ne correspondait à rien d'extérieur à moi, mais que toutes les filles qu'on rencontrait, villageoises ou demoiselles, étaient toutes prêtes à en exaucer de pareils. Et dussé-je, maintenant que j'étais souffrant et ne sortais pas seul, ne jamais pouvoir faire l'amour avec elles, j'étais tout de même heureux comme un enfant né dans une prison ou dans un hôpital et qui, ayant cru longtemps que l'organisme humain ne peut digérer que du pain sec et des médicaments, a appris tout d'un coup que les pêches, les abricots, le raisin, ne sont pas une simple parure de la campagne, mais des aliments délicieux et assimilables. Même si son geôlier ou son garde-malade ne lui permettent pas de cueillir ces beaux fruits, le monde cependant lui paraît meilleur et l'existence plus clémente. Car un désir nous semble plus beau, nous nous appuyons à lui avec plus de confiance quand nous savons qu'en dehors de nous la réalité s'y conforme, même si pour nous il n'est pas réalisable. Et nous pensons avec plus de joie à une vie où, à condition que nous écartions pour un instant de notre pensée le petit obstacle accidentel et particulier qui nous empêche personnellement de le faire, nous pouvons nous imaginer l'assouvissant. Pour les belles filles qui passaient, du jour où j'avais su que leurs joues pouvaient être embrassées, j'étais devenu curieux de leur âme. Et l'univers m'avait paru plus intéressant.

La voiture de Mme de Villeparisis allait vite. À peine avais-je le temps de voir la fillette qui venait dans notre direction ; et pourtant – comme la beauté des êtres n'est pas comme celle des choses, et que nous sentons qu'elle est celle d'une créature unique, consciente et volontaire – dès que son individualité, âme vague, volonté inconnue de moi, se peignait en une petite image prodigieusement réduite, mais complète, au fond de son regard distrait, aussitôt, mystérieuse réplique des pollens tout préparés pour les pistils, je sentais saillir en moi l'embryon aussi vague, aussi minuscule, du désir de ne pas laisser passer cette fille sans que sa pensée prît conscience de ma personne, sans que j'empêchasse ses désirs d'aller à quelqu'un d'autre, sans que je vinsse me fixer dans sa rêverie et saisir son coeur. Cependant notre voiture s'éloignait, la belle fille était déjà derrière nous et comme elle ne possédait de moi aucune des notions qui constituent une personne, ses yeux, qui m'avaient à peine vu, m'avaient déjà oublié. Était-ce parce que je ne l'avais qu'entr'aperçue que je l'avais trouvée si belle ? Peut-être. D'abord l'impossibilité de s'arrêter auprès d'une femme, le risque de ne pas la retrouver un autre jour lui donnent brusquement le même charme qu'à un pays la maladie ou la pauvreté qui nous empêchent de le visiter, ou qu'aux jours si ternes qui nous restent à vivre le combat où nous succomberons sans doute. De sorte que, s'il n'y avait pas l'habitude, la vie devrait paraître délicieuse à ces êtres qui seraient à chaque heure menacés de mourir – c'est-à-dire à tous les hommes. Puis si l'imagination est entraînée par le désir de ce que nous ne pouvons posséder, son essor n'est pas limité par une réalité complètement perçue dans ces rencontres où les charmes de la passante sont généralement en relation directe avec la rapidité du passage. Pour peu que la nuit tombe et que la voiture aille vite, à la campagne, dans une ville, il n'y a pas un torse féminin mutilé comme un marbre antique par la vitesse qui nous entraîne et le crépuscule qui le noie, qui ne tire sur notre coeur, à chaque coin de route, du fond de chaque boutique, les flèches de la Beauté, de la Beauté dont on serait parfois tenté de se demander si elle est en ce monde autre chose que la partie de complément qu'ajoute à une passante fragmentaire et fugitive notre imagination surexcitée par le regret.

Si j'avais pu descendre parler à la fille que nous croisions, peut-être eussé-je été désillusionné par quelque défaut de sa peau que de la voiture je n'avais pas distingué ? (Et alors, tout effort pour pénétrer dans sa vie m'eût semblé soudain impossible. Car la beauté est une suite d'hypothèses que rétrécit la laideur en barrant la route que nous voyions déjà s'ouvrir sur l'inconnu.) Peut-être un seul mot qu'elle eût dit, un sourire, m'eussent fourni une clef, un chiffre inattendus, pour lire l'expression de sa figure et de sa démarche, qui seraient aussitôt devenues banales. C'est possible, car je n'ai jamais rencontré dans la vie de filles aussi désirables que les jours où j'étais avec quelque grave personne que, malgré les mille prétextes que j'inventais, je ne pouvais quitter : quelques années après celle où j'allai pour la première fois à Balbec, faisant à Paris une course en voiture avec un ami de mon père et ayant aperçu une femme qui marchait vite dans la nuit, je pensai qu'il était déraisonnable de perdre pour une raison de convenances ma part de bonheur dans la seule vie qu'il y ait sans doute, et sautant à terre sans m'excuser, je me mis à la recherche de l'inconnue, la perdis au carrefour de deux rues, la retrouvai dans une troisième, et me trouvai enfin, tout essoufflé, sous un réverbère, en face de la vieille Mme Verdurin que j'évitais partout et qui, heureuse et surprise, s'écria : « Oh ! comme c'est aimable d'avoir couru pour me dire bonjour. »

A la recherche du temps perdu (Marcel Proust) II : A l'Ombre des Jeunes Filles en Fleurs II : Noms de pays : le pays

 

 

 

" Souvent avant cette soirée au théâtre, je faisais ainsi de petites sorties avant le déjeuner, quand le temps était beau ; s'il avait plu, à la première éclaircie je descendais faire quelques pas, et tout d'un coup, venant sur le trottoir encore mouillé, changé par la lumière en laque d'or, dans l'apothéose d'un carrefour poudroyant d'un brouillard que tanne et blondit le soleil, j'apercevais une pensionnaire suivie de son institutrice ou une laitière avec ses manches blanches, je restais sans mouvement, une main contre mon coeur qui s'élançait déjà vers une vie étrangère ; je tâchais de me rappeler la rue, l'heure, la porte sous laquelle la fillette (que quelquefois je suivais) avait disparu sans ressortir. Heureusement la fugacité de ces images caressées et que je me promettais de chercher à revoir les empêchait de se fixer fortement dans mon souvenir. N'importe, j'étais moins triste d'être malade, de n'avoir jamais eu encore le courage de me mettre à travailler, à commencer un livre, la terre me paraissait plus agréable à habiter, la vie plus intéressante à parcourir depuis que je voyais que les rues de Paris comme les routes de Balbec étaient fleuries de ces beautés inconnues que j'avais si souvent cherché à faire surgir des bois de Méséglise, et dont chacune excitait un désir voluptueux qu'elle seule semblait capable d'assouvir."

III. Le coté de Guermantes

 

": J'avais à peine le temps d'apercevoir, aussi séparé d'elles derrière la vitre de l'auto que je l'aurais été derrière la fenêtre de ma chambre, une jeune fruitière, une crémière, debout devant sa porte, illuminée par le beau temps, comme une héroïne que mon désir suffisait à engager dans des péripéties délicieuses, au seuil d'un roman que je ne connaîtrais pas."

 

 

Je venais de finir le mot de maman quand Françoise revint me dire qu'elle avait justement là la petite laitière un peu trop hardie dont elle m'avait parlé. « Elle pourra très bien porter la lettre de Monsieur, et faire les courses si ce n'est pas trop loin. Monsieur va voir, elle a l'air d'un petit Chaperon rouge. » [...] Elle était parée pour moi de ce charme de l'inconnu qui ne se serait pas ajouté pour moi à une jolie fille trouvée dans ces maisons où elles vous attendent. Elle n'était ni nue ni déguisée, mais une vraie crémière, une de celles qu'on s'imagine si jolies quand on n'a pas le temps de s'approcher d'elles ; elle était un peu de ce qui fait l'éternel désir, l'éternel regret de la vie, dont le double courant est enfin détourné, amené auprès de nous. [...] Je levai les yeux sur les mèches flavescentes et frisées, et je sentis que leur tourbillon m'emportait, le coeur battant, dans la lumière et les rafales d'un ouragan de beauté.

V : La Prisonnière

 

 353 Les petites porteuses de pain se hâtaient d'emfiler dans leur panier les flûtes destinées au « grand déjeuner » et, à leurs crochets, les laitières attachaient vivement les bouteilles de lait. La vue nostalgique que j'avais de ces petites filles, pouvais-je la croire bien exacte ? N'eût-elle pas été autre si j'avais pu garder immobile quelques instants auprès de moi une de celles que, de la hauteur de ma fenêtre, je ne voyais que dans la boutique ou en fuite ? Pour évaluer la perte que me faisait éprouver la réclusion, c'est-à-dire la richesse que m'offrait la journée, il eût fallu intercepter dans le long déroulement de la frise animée quelque fillette portant son linge ou son lait, la faire passer un moment, comme une silhouette d'un décor mobile entre les portants, dans le cadre de ma porte, et la retenir sous mes yeux, non sans obtenir sur elle quelque renseignement qui me permît de la retrouver un jour et pareille, cette fiche signalétique que les ornithologues ou les ichtyologues attachent, avant de leur rendre la liberté, sous le ventre des oiseaux ou des poissons dont ils veulent pouvoir identifier les migrations.
A la recherche du temps perdu (Marcel Proust)

 V : La Prisonnière

"Cette année-là à Balbec, au moment de ces rencontres, j'assurais à ma grand-mère, à Mme de Villeparisis qu'à cause d'un grand mal de tête il valait mieux que je rentrasse seul à pied. Elles refusaient de me laisser descendre. Et j'ajoutais la belle fille (bien plus difficile à retrouver que ne l'est un monument, car elle était anonyme et mobile) à la collection de toutes celles que je me promettais de voir de près. Une pourtant se trouva repasser sous mes yeux, dans des conditions telles que je crus que je pourrais la connaître comme je voudrais. C'était une laitière qui vint d'une ferme apporter un supplément de crème à l'hôtel. Je pensai qu'elle m'avait aussi reconnu et elle me regardait, en effet, avec une attention qui n'était peut-être causée que par l'étonnement que lui causait la mienne. Or le lendemain, jour où je m'étais reposé toute la matinée quand Françoise vint ouvrir les rideaux vers midi, elle me remit une lettre qui avait été déposée pour moi à l'hôtel. Je ne connaissais personne à Balbec. Je ne doutai pas que la lettre ne fût de la laitière. Hélas, elle n'était que de Bergotte qui, de passage, avait essayé de me voir, mais ayant su que je dormais m'avait laissé un mot charmant pour lequel le liftman avait fait une enveloppe que j'avais cru écrite par la laitière. J'étais affreusement déçu, et l'idée qu'il était plus difficile et plus flatteur d'avoir une lettre de Bergotte, ne me consolait en rien qu'elle ne fût pas de la laitière. Cette fille-là même, je ne la retrouvai pas plus que celles que j'apercevais seulement de la voiture de Mme de Villeparisis. La vue et la perte de toutes accroissaient l'état d'agitation où je vivais et je trouvais quelque sagesse aux philosophes qui nous recommandent de borner nos désirs (si toutefois ils veulent parler du désir des êtres, car c'est le seul qui puisse laisser de l'anxiété, s'appliquant à de l'inconnu conscient. Supposer que la philosophie veut parler du désir des richesses serait trop absurde). Pourtant j'étais disposé à juger cette sagesse incomplète, car je me disais que ces rencontres me faisaient trouver encore plus beau un monde qui fait ainsi croître sur toutes les routes campagnardes des fleurs à la fois singulières et communes, trésors fugitifs de la journée, aubaines de la promenade, dont les circonstances contingentes qui ne se reproduiraient peut-être pas toujours m'avaient seules empêché de profiter, et qui donnent un goût nouveau à la vie.

Mais peut-être, en espérant qu'un jour, plus libre, je pourrais trouver sur d'autres routes, de semblables filles, je commençais déjà à fausser ce qu'à d'exclusivement individuel le désir de vivre auprès d'une femme qu'on a trouvé jolie, et du seul fait que j'admettais la possibilité de le faire naître artificiellement, j'en avais implicitement reconnu l'illusion."

Nom de pays : le Pays

 

Le narrateur est dans le train qui le mène en villégiature à Balbec en compagnie de sa grand-mère. Il est triste d’avoir quitté sa mère et inquiet car il sent qu’il est au bord d’une crise d’étouffement. Soudain, la vue d’une belle jeune femme vendeuse de lait dans une petite gare lui redonne de l’espoir et le goût de vivre 

Le paysage devint accidenté, abrupt, le train s’arrêta à une petite gare entre deux montagnes. On ne voyait au fond de la gorge, au bord du torrent, qu’une maison de garde enfoncée dans l’eau qui coulait au ras des fenêtres. Si un être peut être le produit d’un sol dont on goûte en lui le charme particulier, plus encore que la paysanne que j’avais tant désiré voir apparaître quand j’errais seul du côté de Méséglise, dans les bois de Roussainville, ce devait être la grande fille que je vis sortir de cette maison et, sur le sentier qu’illuminait obliquement le soleil levant, venir vers la gare en portant une jarre de lait. Dans la vallée à qui ces hauteurs cachaient le reste du monde, elle ne devait jamais voir personne que dans ces trains qui ne s’arrêtaient qu’un instant. Elle longea les wagons, offrant du café au lait à quelques voyageurs réveillés. Empourpré des reflets du matin, son visage était plus rose que le ciel. Je ressentis devant elle ce désir de vivre qui renaît en nous chaque fois que nous prenons de nouveau conscience de la beauté et du bonheur. (JF 655/224).

Les extraits :

*Cette année-là, à Balbec, au moment de ces rencontres, j’assurais à ma grand’mère, à Mme de Villeparisis qu’à cause d’un grand mal de tête, il valait mieux que je rentrasse seul à pied. Elles refusaient de me laisser descendre. Et j’ajoutais la belle fille (bien plus difficile à retrouver que ne l’est un monument, car elle était anonyme et mobile) à la collection de toutes celles que je me promettais de voir de près. Une pourtant se trouva repasser sous mes yeux, dans des conditions telles que je crus que je pourrais la connaître comme je voudrais. C’était une laitière qui vint d’une ferme apporter un supplément de crème à l’hôtel. Je pensai qu’elle m’avait aussi reconnu et elle me regardait, en effet, avec une attention qui n’était peut-être causée que par l’étonnement que lui causait la mienne. Or le lendemain, jour où je m’étais reposé toute la matinée quand Françoise vint ouvrir les rideaux vers midi, elle me remit une lettre qui avait été déposée pour moi à l’hôtel. Je ne connaissais personne à Balbec. Je ne doutai pas que la lettre ne fût de la laitière. Hélas, elle n’était que de Bergotte qui, de passage, avait essayé de me voir, mais ayant su que je dormais m’avait laissé un mot charmant pour lequel le liftman avait fait une enveloppe que j’avais cru écrite par la laitière. J’étais affreusement déçu, et l’idée qu’il était plus difficile et plus flatteur d’avoir une lettre de Bergotte, ne me consolait en rien qu’elle ne fût pas de la laitière. Cette fille-là même, je ne la retrouvai pas plus que celles que j’apercevais seulement de la voiture de Mme de Villeparisis. II, 203

 

*Souvent avant cette soirée au théâtre, je faisais ainsi de petites sorties avant le déjeuner, quand le temps était beau ; s’il avait plu, à la première éclaircie je descendais faire quelques pas, et tout d’un coup, venant sur le trottoir encore mouillé, changé par la lumière en laque d’or, dans l’apothéose d’un carrefour poudroyant d’un brouillard que tanne et blondit le soleil, j’apercevais une pensionnaire suivie de son institutrice ou une laitière avec ses manches blanches, je restais sans mouvement, une main contre mon cœur qui s’élançait déjà vers une vie étrangère; je tâchais de me rappeler la rue, l’heure, la porte sous laquelle la fillette (que quelquefois je suivais) avait disparu sans ressortir. Heureusement la fugacité de ces images caressées et que je me promettais de chercher à revoir les empêchait de se fixer fortement dans mon souvenir. […] Pourtant, au bout de quelques jours pendant lesquels le souvenir des deux jeunes filles lutta avec des chances inégales pour la domination de mes idées amoureuses avec celui de Mme de Guermantes, ce fut celui-ci, comme de lui-même, qui finit par renaître le plus souvent pendant que ses concurrents s’éliminaient; ce fut sur lui que je finis par avoir, en somme volontairement encore et comme par choix et plaisir, transféré toutes mes pensées d’amour. Je ne songeai plus aux fillettes du catéchisme, ni à une certaine laitière; et pourtant je n’espérai plus de retrouver dans la rue ce que j’étais venu y chercher, ni la tendresse promise au théâtre dans un sourire, ni la silhouette et le visage clair sous la chevelure blonde qui n’étaient tels que de loin. III

 

*Et puis ç’avait été fini. J’avais cessé mes sorties du matin, et si facilement que je tirai alors le pronostic, qu’on verra se trouver faux, plus tard, que je m’habituerais aisément, dans le cours de ma vie, à ne plus voir une femme. Et quand ensuite Françoise m’eut raconté que Jupien, désireux de s’agrandir, cherchait une boutique dans le quartier, désireux de lui en trouver une (tout heureux aussi, en flânant dans la rue que déjà de mon lit j’entendais crier lumineusement comme une plage, de voir, sous le rideau de fer levé des crémeries, les petites laitières à manches blanches), j’avais pu recommencer ces sorties. III

 

*Si, sortant de mon lit, j’allais écarter un instant le rideau de ma fenêtre, ce n’était pas seulement comme un musicien ouvre un instant son piano, et pour vérifier si, sur le balcon et dans la rue, la lumière du soleil était exactement au même diapason que dans mon souvenir, c’était aussi pour apercevoir quelque blanchisseuse portant son panier à linge, une boulangère à tablier bleu, une laitière à bavette et manches de toile blanche, tenant le crochet où sont suspendues les carafes de lait, quelque fière jeune fille blonde suivant son institutrice, une image enfin que des différences de lignes, peut-être quantitativement insignifiantes, suffisaient à faire aussi différente de toute autre que pour une phrase musicale la différence de deux notes, et sans la vision de laquelle j’aurais appauvri la journée des buts qu’elle pouvait proposer à mes désirs de bonheur. Mais si le surcroît de joie, apporté par la vue des femmes impossibles à imaginer a priori, me rendait plus désirables, plus dignes d’être explorés, la rue, la ville, le monde, il me donnait par là même la soif de guérir, de sortir, et, sans Albertine, d’être libre. V

 

*Les petites porteuses de pain se hâtaient d’enfiler dans leur panier les flûtes destinées au « grand déjeuner » et, à leurs crochets, les laitières attachaient vivement les bouteilles de lait. La vue nostalgique que j’avais de ces petites filles, pouvais-je la croire bien exacte ? N’eût-elle pas été autre si j’avais pu garder immobile quelques instants auprès de moi une de celles que, de la hauteur de ma fenêtre, je ne voyais que dans la boutique ou en fuite ? Pour évaluer la perte que me faisait éprouver la réclusion, c’est-à-dire la richesse que m’offrait la journée, il eût fallu intercepter dans le long déroulement de la frise animée quelque fillette portant son linge ou son lait, la faire passer un moment, comme une silhouette d’un décor mobile entre les portants, dans le cadre de ma porte, et la retenir sous mes yeux, non sans obtenir sur elle quelque renseignement qui me permît de la retrouver un jour et pareille, cette fiche signalétique que les ornithologues ou les ichtyologues attachent, avant de leur rendre la liberté, sous le ventre des oiseaux ou des poissons dont ils veulent pouvoir identifier les migrations. V

 

*Je me mis à lire la lettre de maman. À travers ses citations de Mme de Sévigné : «Si mes pensées ne sont pas tout à fait noires à Combray, elles sont au moins d’un gris brun ; je pense à toi à tout moment ; je te souhaite ; ta santé, tes affaires, ton éloignement, que penses-tu que tout cela puisse faire entre chien et loup ? » je sentais que ma mère était ennuyée de voir que le séjour d’Albertine à la maison se prolonger et s’affermir, quoique non encore déclarées à la fiancée mes intentions de mariage. Elle ne me le disait pas plus directement parce qu’elle craignait que je laissasse traîner mes lettres. Encore, si voilées qu’elles fussent, me reprochait-elle de ne pas l’avertir immédiatement, après chacune, que je l’avais reçue : «Tu sais bien que Mme de Sévigné disait : «Quand on est loin on ne se moque plus des lettres qui commencent par : j’ai reçu la vôtre.» Sans parler de ce qui l’inquiétait le plus, elle se disait fâchée de mes grandes dépenses : «À quoi peut passer tout ton argent ? Je suis déjà assez tourmentée de ce que, comme Charles de Sévigné, tu ne saches pas ce que tu veux et que tu sois «deux ou trois hommes à la fois», mais tâche au moins de ne pas être comme lui pour la dépense, et que je ne puisse pas dire de toi : «il a trouvé le moyen de dépenser sans paraître, de perdre sans jouer et de payer sans s’acquitter.» Je venais de finir le mot de maman quand Françoise revint me dire qu’elle avait justement là la petite laitière un peu trop hardie dont elle m’avait parlé. «Elle pourra très bien porter la lettre de Monsieur, et faire les courses si ce n’est pas trop loin. Monsieur va voir, elle a l’air d’un Petit Chaperon Rouge.» Françoise alla la chercher et je l’entendis qui la guidait en lui disant : «Hé bien, voyons, tu as peur parce qu’il y a un couloir, bougre de truffe, je te croyais moins empruntée. Faut-il que je te mène par la main ?» Et Françoise, en bonne et honnête servante qui entendait faire respecter son maître comme elle le respecte elle-même, s’était drapée de cette majesté qui anoblit les entremetteuses dans les tableaux de vieux maîtres, où, à côté d’elles, s’effacent, presque dans l’insignifiance, la maîtresse et l’amant.

Elstir, quand il les regardait, n’avait pas à se préoccuper de ce que faisaient les violettes. L’entrée de la petite laitière m’ôta aussitôt mon calme de contemplateur, je ne songeai plus qu’à rendre vraisemblable la fable de la lettre à lui faire porter, et je me mis à écrire rapidement sans oser la regarder qu’à peine, pour ne pas paraître l’avoir fait entrer pour cela. Elle était parée pour moi de ce charme de l’inconnu qui ne se serait pas ajouté pour moi à une jolie fille trouvée dans ces maisons où elles vous attendent. Elle n’était ni nue ni déguisée, mais une vraie crémière, une de celles qu’on s’imagine si jolies quand on n’a pas le temps de s’approcher d’elles; elle était un peu de ce qui fait l’éternel désir, l’éternel regret de la vie, dont le double courant est enfin détourné, amené auprès de nous. Double, car s’il s’agit d’inconnu, d’un être deviné devoir être divin d’après sa stature, ses proportions, son indifférent regard, son calme hautain, d’autre part on veut cette femme bien spécialisée dans sa profession, nous permettant de nous évader dans ce monde qu’un costume particulier nous fait romanesquement croire différent. Au reste, si l’on cherche à faire tenir dans une formule la loi de nos curiosités amoureuses, il faudrait la chercher dans le maximum d’écart entre une femme aperçue et une femme approchée, caressée. Si les femmes de ce qu’on appelait autrefois les maisons closes, si les cocottes elles-mêmes (à condition que nous sachions qu’elles sont des cocottes) nous attirent si peu, ce n’est pas qu’elles soient moins belles que d’autres, c’est qu’elles sont toutes prêtes; que ce qu’on veut précisément atteindre, elles nous l’offrent déjà; c’est qu’elles ne sont pas des conquêtes. L’écart, là, est à son minimum. Une grue nous sourit déjà dans la rue comme elle le fera près de nous. Nous sommes des sculpteurs, nous voulons obtenir d’une femme une statue entièrement différente de celle qu’elle nous a présentée. Nous avons vu une jeune fille indifférente, insolente, au bord de la mer; nous avons vu une vendeuse sérieuse et active à son comptoir, qui nous répondra sèchement, ne fût-ce que pour ne pas être l’objet des moqueries de ses copines; une marchande de fruits qui nous répond à peine. Hé bien! nous n’avons de cesse que nous puissions expérimenter si la fière jeune fille au bord de la mer, si la vendeuse à cheval sur le qu’en-dira-t-on, si la distraite marchande de fruits ne sont pas susceptibles, à la suite de manèges adroits de notre part, de laisser fléchir leur attitude rectiligne, d’entourer notre cou de leurs bras qui portaient les fruits, d’incliner sur notre bouche, avec un sourire consentant, des yeux jusque-là glacés ou distraits — ô beauté des yeux sévères — aux heures du travail où l’ouvrière craignait tant la médisance de ses compagnes, des yeux qui fuyaient nos obsédants regards et qui maintenant que nous l’avons vue seule à seul, font plier leurs prunelles sous le poids ensoleillé du rire quand nous parlons de faire l’amour. Entre la vendeuse, la blanchisseuse attentive à repasser, la marchande de fruits, la crémière — et cette même fillette qui va devenir notre maîtresse — le maximum d’écart est atteint, tendu encore à ses extrêmes limites, et varié par ces gestes habituels de la profession qui font des bras, pendant la durée du labeur, quelque chose d’aussi différent que possible comme arabesque de ces souples liens qui déjà, chaque soir, s’enlacent à notre cou tandis que la bouche s’apprête pour le baiser. Aussi passons-nous toute notre vie en inquiètes démarches sans cesse renouvelées auprès des filles sérieuses et que leur métier semble éloigner de nous. Une fois dans nos bras, elles ne sont plus ce qu’elles étaient, cette distance que nous rêvions de franchir est supprimée. Mais on recommence avec d’autres femmes, on donne à ces entreprises tout son temps, tout son argent, toutes ses forces, on crève de rage contre le cocher trop lent qui va peut-être nous faire manquer notre premier rendez-vous, on a la fièvre. Ce premier rendez-vous, on sait pourtant qu’il accomplira l’évanouissement d’une illusion. Il n’importe tant que l’illusion dure; on veut voir si on peut la changer en réalité, et alors on pense à la blanchisseuse dont on a remarqué la froideur. La curiosité amoureuse est comme celle qu’excitent en nous les noms de pays; toujours déçue, elle renaît et reste toujours insatiable.

Hélas! une fois auprès de moi, la blonde crémière aux mèches striées, dépouillée de tant d’imagination et de désirs éveillés en moi, se trouva réduite à elle-même. Le nuage frémissant de mes suppositions ne l’enveloppait plus d’un vertige. Elle prenait un air tout penaud de n’avoir plus (au lieu des dix, des vingt, que je me rappelais tour à tour sans pouvoir fixer mon souvenir) qu’un seul nez, plus rond que je ne l’avais cru, qui donnait une idée de bêtise et avait en tous cas perdu le pouvoir de se multiplier. Ce vol capturé, inerte, anéanti, incapable de rien ajouter à sa pauvre évidence, n’avait plus mon imagination pour collaborer avec lui. Tombé dans le réel immobile, je tâchai de rebondir; les joues, non aperçues de la boutique, me parurent si jolies que j’en fus intimidé, et pour me donner une contenance, je dis à la petite crémière : «Seriez-vous assez bonne pour me passer le Figaro qui est là, il faut que je regarde le nom de l’endroit où je veux vous envoyer.» Aussitôt, en prenant le journal, elle découvrit jusqu’au coude la manche rouge de sa jaquette et me tendit la feuille conservatrice d’un geste adroit et gentil qui me plut par sa rapidité familière, son apparence moelleuse et sa couleur écarlate. Pendant que j’ouvrais le Figaro, pour dire quelque chose et sans lever les yeux, je demandai à la petite : «Comment s’appelle ce que vous portez là en tricot rouge, c’est très joli.» Elle me répondit : «C’est mon golf.» Car, par une déchéance habituelle à toutes les modes, les vêtements et les mots qui, il y a quelques années, semblaient appartenir au monde relativement élégant des amies d’Albertine, étaient maintenant le lot des ouvrières. «Ça ne vous gênerait vraiment pas trop, dis-je en faisant semblant de chercher dansle Figaro, que je vous envoie même un peu loin ?» Dès que j’eus ainsi l’air de trouver pénible le service qu’elle me rendrait en faisant une course, aussitôt elle commença à trouver que c’était gênant pour elle. «C’est que je dois aller tantôt me promener en vélo. Dame, nous n’avons que le dimanche. — Mais vous n’avez pas froid, nu-tête comme cela ? — Ah! je ne serai pas nu-tête, j’aurai mon polo, et je pourrais m’en passer avec tous mes cheveux.» Je levai les yeux sur les mèches flavescentes et frisées, et je sentis que leur tourbillon m’emportait, le cœur battant, dans la lumière et les rafales d’un ouragan de beauté. Je continuais à regarder le journal, mais bien que ce ne fût que pour me donner une contenance et me faire gagner du temps, tout en ne faisant que semblant de lire, je comprenais tout de même le sens des mots qui étaient sous mes yeux, et ceux-ci me frappaient : «Au programme de la matinée que nous avons annoncée et qui sera donnée cet après-midi dans la salle des fêtes du Trocadéro, il faut ajouter le nom de Mlle Léa qui a accepté d’y paraître dans les Fourberies de Nérine. Elle tiendra, bien entendu, le rôle de Nérine où elle est étourdissante de verve et d’ensorceleuse gaîté.» Ce fut comme si on avait brutalement arraché de mon cœur le pansement sous lequel il avait commencé, depuis mon retour de Balbec, à se cicatriser. Le flux de mes angoisses s’échappa à torrents. Léa c’était la comédienne amie des deux jeunes filles de Balbec qu’Albertine, sans avoir l’air de les voir, avait un après-midi, au Casino, regardées dans la glace. Il est vrai qu’à Balbec, Albertine, au nom de Léa, avait pris un ton de componction particulier pour me dire, presque choquée qu’on pût soupçonner une telle vertu : «Oh non, ce n’est pas du tout une femme comme ça, c’est une femme très bien.» Malheureusement pour moi, quand Albertine émettait une affirmation de ce genre, ce n’était jamais que le premier stade d’affirmations différentes. Peu après la première, venait cette deuxième : «Je ne la connais pas.» En troisième lieu, quand Albertine m’avait parlé d’une telle personne «insoupçonnable» et que (secundo) elle ne connaissait pas, elle oubliait peu à peu, d’abord avoir dit qu’elle ne la connaissait pas, et, dans une phrase où elle se «coupait» sans le savoir, racontait qu’elle la connaissait. Ce premier oubli consommé et la nouvelle affirmation ayant été émise, un deuxième oubli commençait, celui que la personne était insoupçonnable. «Est-ce qu’une telle, demandais-je, n’a pas de telles mœurs ? — Mais voyons, naturellement, c’est connu comme tout!» Aussitôt le ton de componction reprenait pour une affirmation qui était un vague écho, fort amoindri, de la toute première : «Je dois dire qu’avec moi elle a toujours été d’une convenance parfaite. Naturellement, elle savait que je l’aurais remisée et de la belle manière. Mais enfin cela ne fait rien. Je suis obligée de lui être reconnaissante du vrai respect qu’elle m’a toujours témoigné. On voit qu’elle savait à qui elle avait affaire.» On se rappelle la vérité parce qu’elle a un nom, des racines anciennes; mais un mensonge improvisé s’oublie vite. Albertine oubliait ce dernier mensonge-là, le quatrième, et, un jour où elle voulait gagner ma confiance par des confidences, elle se laissait aller à me dire de la même personne, au début si comme il faut et qu’elle ne connaissait pas : «Elle a eu le béguin pour moi. Trois ou quatre fois elle m’a demandé de l’accompagner jusque chez elle et de monter la voir. L’accompagner, je n’y voyais pas de mal, devant tout le monde, en plein jour, en plein air. Mais, arrivée à sa porte, je trouvais toujours un prétexte et je ne suis jamais montée.» Quelque temps après, Albertine faisait allusion à la beauté des objets qu’on voyait chez la même dame. D’approximation en approximation on fût sans doute arrivé à lui faire dire la vérité, qui était peut-être moins grave que je n’étais porté à le croire, car, peut-être, facile avec les femmes, préférait-elle un amant, et, maintenant que j’étais le sien, n’eût-elle pas songé à Léa. En tous cas, pour cette dernière je n’en étais qu’à la première affirmation et j’ignorais si Albertine la connaissait. Déjà, en tous cas pour bien des femmes, il m’eût suffi de rassembler devant mon amie, en une synthèse, ses affirmations contradictoires pour la convaincre de ses fautes (fautes qui sont bien plus aisées, comme les lois astronomiques, à dégager par le raisonnement, qu’à observer, qu’à surprendre dans la réalité). Mais elle aurait encore mieux aimé dire qu’elle avait menti quand elle avait émis une de ces affirmations, dont ainsi le retrait ferait écrouler tout mon système, plutôt que de reconnaître que tout ce qu’elle avait raconté dès le début n’était qu’un tissu de contes mensongers. Il en est de semblables dans les Mille et une Nuits, et qui nous y charment. Ils nous font souffrir dans une personne que nous aimons, et à cause de cela nous permettent d’entrer un peu plus avant dans la connaissance de la nature humaine au lieu de nous contenter de nous jouer à sa surface. Le chagrin pénètre en nous et nous force par la curiosité douloureuse à pénétrer. D’où des vérités que nous ne nous sentons pas le droit de cacher, si bien qu’un athée moribond qui les a découvertes, assuré du néant, insoucieux de la gloire, use pourtant ses dernières heures à tâcher de les faire connaître.

N’importe, cela revenait au même. Il fallait à tout prix empêcher qu’au Trocadéro elle pût retrouver cette connaissance, ou faire la connaissance de cette inconnue. Je dis que je ne savais si elle connaissait Léa ou non; j’avais dû pourtant l’apprendre à Balbec, d’Albertine elle-même. Car l’oubli anéantissait aussi bien chez moi que chez Albertine une grande part des choses qu’elle m’avait affirmées. La mémoire, au lieu d’un exemplaire en double, toujours présent à nos yeux, des divers faits de notre vie, est plutôt un néant d’où par instant une similitude actuelle nous permet de tirer, ressuscités, des souvenirs morts; mais encore il y a mille petits faits qui ne sont pas tombés dans cette virtualité de la mémoire, et qui resteront à jamais incontrôlables pour nous. Tout ce que nous ignorons se rapporter à la vie réelle de la personne que nous aimons, nous n’y faisons aucune attention, nous oublions aussitôt ce qu’elle nous a dit à propos de tel fait ou de telles gens que nous ne connaissons pas, et l’air qu’elle avait en nous le disant. Aussi, quand ensuite notre jalousie est excitée par ces mêmes gens, pour savoir si elle ne se trompe pas, si c’est bien à eux qu’elle doit rapporter telle hâte que notre maîtresse a de sortir, tel mécontentement que nous l’en ayons privée en rentrant trop tôt, notre jalousie, fouillant le passé pour en tirer des indications, n’y trouve rien; toujours rétrospective, elle est comme un historien qui aurait à faire une histoire pour laquelle il n’est aucun document; toujours en retard, elle se précipite comme un taureau furieux là où ne se trouve pas l’être fier et brillant qui l’irrite de ses piqûres et dont la foule cruelle admire la magnificence et la ruse. La jalousie se débat dans le vide, incertaine comme nous le sommes dans ces rêves où nous souffrons de ne pas trouver dans sa maison vide une personne que nous avons bien connue dans la vie, mais qui peut-être en est ici une autre et a seulement emprunté les traits d’un autre personnage, incertaine comme nous le sommes plus encore après le réveil quand nous cherchons à identifier tel ou tel détail de notre rêve. Quel air avait notre amie en nous disant cela ? N’avait-elle pas l’air heureux, ne sifflait-elle même pas, ce qu’elle ne fait que quand elle a quelque pensée amoureuse et que notre présence l’importune et l’irrite? Ne nous a-t-elle pas dit une chose qui se trouve en contradiction avec ce qu’elle nous affirme maintenant, qu’elle connaît ou ne connaît pas telle personne ? Nous ne le savons pas, nous ne le saurons jamais; nous nous acharnons à chercher les débris inconsistants d’un rêve, et pendant ce temps notre vie avec notre maîtresse continue, notre vie distraite devant ce que nous ignorons être important pour nous, attentive à ce qui ne l’est peut-être pas, encauchemardée par des êtres qui sont sans rapports réels avec nous, pleine d’oublis, de lacunes, d’anxiétés vaines, notre vie pareille à un songe.

Je m’aperçus que la petite laitière était toujours là. Je lui dis que décidément ce serait bien loin, que je n’avais pas besoin d’elle. Aussitôt elle trouva aussi que ce serait trop gênant : «Il y a un beau match tantôt, je ne voudrais pas le manquer.» Je sentis qu’elle devait déjà aimer les sports et que dans quelques années elle dirait : vivre sa vie. Je lui dis que décidément je n’avais pas besoin d’elle et je lui donnai cinq francs. Aussitôt, s’y attendant si peu, et se disant que, si elle avait cinq francs pour ne rien faire, elle aurait beaucoup pour ma course, elle commença à trouver que son match n’avait pas d’importance. «J’aurais bien fait votre course. On peut toujours s’arranger.» Mais je la poussai vers la porte, j’avais besoin d’être seul, il fallait à tout prix empêcher qu’Albertine pût retrouver au Trocadéro les amies de Léa. Il le fallait, il fallait y réussir; à vrai dire je ne savais pas encore comment, et pendant ces premiers instants j’ouvrais mes mains, les regardais, faisais craquer les jointures de mes doigts, soit que l’esprit qui ne peut trouver ce qu’il cherche, pris de paresse, s’accorde de faire halte pendant un instant, où les choses les plus indifférentes lui apparaissent distinctement, comme ces pointes d’herbe des talus qu’on voit du wagon trembler au vent, quand le train s’arrête en rase campagne (immobilité qui n’est pas toujours plus féconde que celle de la bête capturée qui, paralysée par la peur ou fascinée, regarde sans bouger), soit que je tinsse tout préparé mon corps — avec mon intelligence au dedans et en celle-ci les moyens d’action sur telle ou telle personne — comme n’étant plus qu’une arme d’où partirait le coup qui séparerait Albertine de Léa et de ses deux amies. Certes, le matin, quand Françoise était venue me dire qu’Albertine irait au Trocadéro, je m’étais dit : «Albertine peut bien faire ce qu’elle veut», et j’avais cru que jusqu’au soir, par ce temps radieux, ses actions resteraient pour moi sans importance perceptible; mais ce n’était pas seulement le soleil matinal, comme je l’avais pensé, qui m’avait rendu si insouciant; c’était parce que, ayant obligé Albertine à renoncer aux projets qu’elle pouvait peut-être amorcer ou même réaliser chez les Verdurin, et l’ayant réduite à aller à une matinée que j’avais choisie moi-même et en vue de laquelle elle n’avait pu rien préparer, je savais que ce qu’elle ferait serait forcément innocent. De même, si Albertine avait dit quelques instants plus tard : «Si je me tue, cela m’est bien égal», c’était parce qu’elle était persuadée qu’elle ne se tuerait pas. Devant moi, devant Albertine, il y avait en ce matin (bien plus que l’ensoleillement du jour) ce milieu que nous ne voyons pas, mais par l’intermédiaire translucide et changeant duquel nous voyions, moi ses actions, elle l’importance de sa propre vie, c’est-à-dire ces croyances que nous ne percevons pas, mais qui ne sont pas plus assimilables à un pur vide que n’est l’air qui nous entoure; composant autour de nous une atmosphère variable, parfois excellente, souvent irrespirable, elles mériteraient d’être relevées et notées avec autant de soin que la température, la pression barométrique, la saison, car nos jours ont leur originalité, physique et morale. La croyance, non remarquée ce matin par moi et dont pourtant j’avais été joyeusement enveloppé jusqu’au moment où j’avais rouvert le Figaro, qu’Albertine ne ferait rien que d’inoffensif, cette croyance venait de disparaître. Je ne vivais plus dans la belle journée, mais dans une journée créée au sein de la première par l’inquiétude qu’Albertine renouât avec Léa, et plus facilement encore avec les deux jeunes filles, si elles allaient, comme cela me semblait probable, applaudir l’actrice au Trocadéro, où il ne leur serait pas difficile, dans un entr’acte, de retrouver Albertine. Je ne songeais plus à Mlle Vinteuil; le nom de Léa m’avait fait revoir, pour en être jaloux, l’image d’Albertine au Casino près des deux jeunes filles. Car je ne possédais dans ma mémoire que des séries d’Albertine séparées les unes des autres, incomplètes, des profils, des instantanés; aussi ma jalousie se confinait-elle à une expression discontinue, à la fois fugitive et fixée, et aux êtres qui l’avaient amenée sur la figure d’Albertine. Je me rappelais celle-ci quand, à Balbec, elle était trop regardée par les deux jeunes filles ou par des femmes de ce genre; je me rappelais la souffrance que j’éprouvais à voir parcourir, par des regards actifs comme ceux d’un peintre qui veut prendre un croquis, le visage entièrement recouvert par eux et qui, à cause de ma présence sans doute, subissait ce contact sans avoir l’air de s’en apercevoir, avec une passivité peut-être clandestinement voluptueuse. Et avant qu’elle se ressaisît et me parlât, il y avait une seconde pendant laquelle Albertine ne bougeait pas, souriait dans le vide, avec le même air de naturel feint et de plaisir dissimulé que si on avait été en train de faire sa photographie; ou même pour choisir devant l’objectif une pose plus fringante — celle même qu’elle avait prise à Doncières quand nous nous promenions avec Saint-Loup : riant et passant sa langue sur ses lèvres, elle faisait semblant d’agacer un chien. Certes, à ces moments, elle n’était nullement la même que quand c’était elle qui était intéressée par des fillettes qui passaient. Dans ce dernier cas, au contraire, son regard étroit et velouté se fixait, se collait sur la passante, si adhérent, si corrosif, qu’il semblait qu’en se retirant il aurait dû emporter la peau. Mais en ce moment ce regard-là, qui du moins lui donnait quelque chose de sérieux, jusqu’à la faire paraître souffrante, m’avait semblé doux auprès du regard atone et heureux qu’elle avait près des deux jeunes filles, et j’aurais préféré la sombre expression du désir, qu’elle ressentait peut-être quelquefois, à la riante expression causée par le désir qu’elle inspirait. Elle avait beau essayer de voiler la conscience qu’elle en avait, celle-ci la baignait, l’enveloppait, vaporeuse, voluptueuse, faisait paraître sa figure toute rose. Mais tout ce qu’Albertine tenait à ces moments-là en suspens en elle, qui irradiait autour d’elle et me faisait tant souffrir, qui sait si, hors de ma présence, elle continuerait à le taire, si aux avances des deux jeunes filles, maintenant que je n’étais pas là, elle ne répondrait pas audacieusement. Certes, ces souvenirs me causaient une grande douleur, ils étaient comme un aveu total des goûts d’Albertine, une confession générale de son infidélité contre quoi ne pouvaient prévaloir les serments particuliers qu’elle me faisait, auxquels je voulais croire, les résultats négatifs de mes incomplètes enquêtes, les assurances, peut-être faites de connivence avec elle, d’Andrée. Albertine pouvait me nier ses trahisons particulières; par des mots qui lui échappaient, plus forts que les déclarations contraires, par ces regards seuls, elle avait fait l’aveu de ce qu’elle eût voulu cacher, bien plus que de faits particuliers, de ce qu’elle se fût fait tuer plutôt que de reconnaître : de son penchant. Car aucun être ne veut livrer son âme.

Malgré la douleur que ces souvenirs me causaient, aurais-je pu nier que c’était le programme de la matinée du Trocadéro qui avait réveillé mon besoin d’Albertine ? Elle était de ces femmes à qui leurs fautes pourraient au besoin tenir lieu de charme, et autant que leurs fautes, leur bonté qui y succède et ramène en nous cette douceur qu’avec elles, comme un malade qui n’est jamais bien portant deux jours de suite, nous sommes sans cesse obligés de reconquérir. D’ailleurs, plus même que leurs fautes pendant que nous les aimons, il y a leurs fautes avant que nous les connaissions, et la première de toutes : leur nature. Ce qui rend douloureuses de telles amours, en effet, c’est qu’il leur préexiste une espèce de péché originel de la femme, un péché qui nous les fait aimer, de sorte que, quand nous l’oublions, nous avons moins besoin d’elle et que, pour recommencer à aimer, il faut recommencer à souffrir. En ce moment, qu’elle ne retrouvât pas les deux jeunes files et savoir si elle connaissait Léa ou non était ce qui me préoccupait le plus, bien qu’on ne dût pas s’intéresser aux faits particuliers autrement qu’à cause de leur signification générale, et malgré la puérilité qu’il y a, aussi grande que celle du voyage ou du désir de connaître des femmes, à fragmenter sa curiosité sur ce qui, du torrent invisible des réalités cruelles qui nous resteront toujours inconnues, a fortuitement cristallisé dans notre esprit. D’ailleurs, arriverions-nous à détruire cette cristallisation qu’elle serait remplacée par une autre aussitôt. Hier je craignais qu’Albertine n’allât chez Mme Verdurin. Maintenant je n’étais plus préoccupé que de Léa. La jalousie, qui a un bandeau sur les yeux, n’est pas seulement impuissante à rien découvrir dans les ténèbres qui l’enveloppent, elle est encore un de ces supplices où la tâche est à recommencer sans cesse, comme celle des Danaïdes, comme celle d’Ixion. Même si les deux jeunes filles n’étaient pas là, quelle impression pouvait faire sur elle Léa embellie par le travestissement, glorifiée par le succès ? quelles rêveries laisserait-elle à Albertine ? quels désirs qui, même refrénés, lui donneraient le dégoût d’une vie chez moi où elle ne pouvait les assouvir ?

D’ailleurs, qui sait si elle ne connaissait pas Léa et n’irait pas la voir dans sa loge ? et même, si Léa ne la connaissait pas, qui m’assurait que, l’ayant en tous cas aperçue à Balbec, elle ne la reconnaîtrait pas et ne lui ferait pas de la scène un signe qui autoriserait Albertine à se faire ouvrir la porte des coulisses ? Un danger semble très évitable quand il est conjuré. Celui-ci ne l’était pas encore, j’avais peur qu’il ne pût pas l’être, et il me semblait d’autant plus terrible. Et pourtant, cet amour pour Albertine, que je sentais presque s’évanouir quand j’essayais de le réaliser, la violence de ma douleur en ce moment semblait en quelque sorte m’en donner la preuve. Je n’avais plus souci de rien d’autre, je ne pensais qu’aux moyens de l’empêcher de rester au Trocadéro, j’aurais offert n’importe quelle somme à Léa pour qu’elle n’y allât pas. Si donc on prouve sa préférence par l’action qu’on accomplit plus que par l’idée qu’on forme, j’aurais aimé Albertine. Mais cette reprise de ma souffrance ne donnait pas plus de consistance en moi à l’image d’Albertine. Elle causait mes maux comme une divinité qui reste invisible. Faisant mille conjectures, je cherchais à parer à ma souffrance sans réaliser pour cela mon amour.

D’abord il fallait être certain que Léa allât vraiment au Trocadéro. Après avoir congédié la laitière en lui donnant deux francs, je téléphonai à Bloch, lié lui aussi avec Léa, pour le lui demander. Il n’en savait rien et parut étonné que cela pût m’intéresser. Je pensai qu’il me fallait aller vite, que Françoise était tout habillée et moi pas, et, pendant que moi-même je me levais, je lui fis prendre une automobile; elle devait aller au Trocadéro, prendre un billet, chercher Albertine partout dans la salle, et lui remettre un mot de moi. Dans ce mot, je lui disais que j’étais bouleversé par une lettre reçue à l’instant de la même dame à cause de qui elle savait que j’avais été si malheureux une nuit à Balbec. Je lui rappelais que le lendemain elle m’avait reproché de ne pas l’avoir fait appeler. Aussi je me permettais, lui disais-je, de lui demander de me sacrifier sa matinée et de venir me chercher pour aller prendre un peu l’air ensemble afin de tâcher de me remettre. Mais comme j’en avais pour assez longtemps avant d’être habillé et prêt, elle me ferait plaisir de profiter de la présence de Françoise pour aller acheter aux Trois-Quartiers (ce magasin, étant plus petit, m’inquiétait moins que le Bon Marché) la guimpe de tulle blanc dont elle avait besoin. V, 94-102

 

Un instant avant que Françoise m’apportât la dépêche, ma mère était entrée dans ma chambre avec le courrier, l’avait posé sur mon lit avec négligence, en ayant l’air de penser à autre chose. Et se retirant aussitôt pour me laisser seul, elle avait souri en partant. Et moi, connaissant les ruses de ma chère maman et sachant qu’on pouvait toujours lire dans son visage sans crainte de se tromper, si l’on prenait comme clef le désir de faire plaisir aux autres, je souris et pensai : «Il y a quelque chose d’intéressant pour moi dans le courrier, et maman a affecté cet air indifférent et distrait pour que ma surprise soit complète et pour ne pas faire comme les gens qui vous ôtent la moitié de votre plaisir en vous l’annonçant. Et elle n’est pas restée là parce qu’elle a craint que par amour-propre je dissimule le plaisir que j’aurais et ainsi le ressente moins vivement.» Cependant, en allant vers la porte pour sortir elle avait rencontré Françoise qui entrait chez moi, la dépêche à la main. Dès qu’elle me l’eut donnée, ma mère avait forcé Françoise à rebrousser chemin et l’avait entraînée dehors, effarouchée, offensée et surprise. Car Françoise considérait que sa charge comportait le privilège de pénétrer à toute heure dans ma chambre et d’y rester s’il lui plaisait. Mais déjà, sur son visage, l’étonnement et la colère avaient disparu sous le sourire noirâtre et gluant d’une pitié transcendante et d’une ironie philosophique, liqueur visqueuse que sécrétait, pour guérir sa blessure, son amour-propre lésé. Pour ne pas se sentir méprisée, elle nous méprisait. Aussi bien pensait-elle que nous étions des maîtres, c’est-à-dire des êtres capricieux, qui ne brillent pas par l’intelligence et qui trouvent leur plaisir à imposer par la peur à des personnes spirituelles, à des domestiques, pour bien montrer qu’ils sont les maîtres, des devoirs absurdes comme de faire bouillir l’eau en temps d’épidémie, de balayer ma chambre avec un linge mouillé, et d’en sortir au moment où on avait justement l’intention d’y rester. Maman avait posé le courrier tout près de moi, pour qu’il ne pût pas m’échapper. Mais je sentis que ce n’était que des journaux. Sans doute y avait-il quelque article d’un écrivain que j’aimais et qui, écrivant rarement, serait pour moi une surprise. J’allai à la fenêtre, j’écartai les rideaux. Au-dessus du jour blême et brumeux, le ciel était tout rose comme, à cette heure, dans les cuisines, les fourneaux qu’on allume, et cette vue me remplit d’espérance et du désir de passer la nuit et de m’éveiller à la petite station campagnarde où j’avais vu la laitière aux joues roses.

Pendant ce temps-là j’entendais Françoise qui, indignée qu’on l’eût chassée de ma chambre où elle considérait qu’elle avait ses grandes entrées, grommelait : «Si c’est pas malheureux, un enfant qu’on a vu naître. Je ne l’ai pas vu quand sa mère le faisait, bien sûr. Mais quand je l’ai connu, pour bien dire, il n’y avait pas cinq ans qu’il était naquis!»

J’ouvris le Figaro. Quel ennui ! VI, 107

 

À côté de nous, un ministre d’avant l’époque boulangiste, et qui l’était de nouveau, passait lui aussi, en envoyant aux dames un sourire tremblotant et lointain, mais comme emprisonné dans les mille liens du passé, comme un petit fantôme qu’une main invisible promenait, diminué de taille, changé dans sa substance et ayant l’air d’une réduction en pierre ponce de soi-même. Cet ancien président du Conseil, si bien reçu dans le faubourg Saint-Germain, avait jadis été l’objet de poursuites criminelles, exécré du monde et du peuple. Mais grâce au renouvellement des individus qui composent l’un et l’autre, et dans les individus subsistant des passions et même des souvenirs, personne ne le savait plus et il était honoré. Aussi n’y a-t-il pas d’humiliation si grande dont on ne devrait prendre aisément son parti, sachant qu’au bout de quelques années, nos fautes ensevelies ne seront plus qu’une invisible poussière sur laquelle sourira la paix souriante et fleurie de la nature. L’individu momentanément taré se trouvera, par le jeu d’équilibre du temps, pris entre deux couches sociales nouvelles qui n’auront pour lui que déférence et admiration, et au-dessus desquelles il se prélassera aisément. Seulement c’est au temps qu’est confié ce travail; et au moment de ses ennuis, rien ne peut le consoler que la jeune laitière d’en face l’ait entendu appeler «chéquard» par la foule qui montrait le poing tandis qu’il entrait dans le «panier à salade», la jeune laitière qui ne voit pas les choses dans le plan du temps, qui ignore que les hommes qu’encense le journal du matin furent déconsidérés jadis, et que l’homme qui frise la prison en ce moment et peut-être, en pensant à cette jeune laitière, n’aura pas les paroles humbles qui lui concilieraient la sympathie, sera un jour célébré par la presse et recherché par les duchesses. Et le temps éloigne pareillement les querelles de famille. Et chez la princesse de Guermantes on voyait un couple où le mari et la femme avaient pour oncles morts aujourd’hui, deux hommes qui ne s’étaient pas contentés de se souffleter mais dont l’un pour humilier l’autre lui avait envoyé comme témoins son concierge et son maître d’hôtel, jugeant que des gens du monde eussent été trop bien pour lui. Mais ces histoires dormaient dans les journaux d’il y a trente ans et personne ne les savait plus. Et ainsi le salon de la princesse de Guermantes était illuminé, oublieux et fleuri, comme un paisible cimetière. Le temps n’y avait pas seulement défait d’anciennes créatures, il y avait rendu possibles, il y avait créé des associations nouvelles. VII, 184

 

SOURCES ET LIENS.

http://lefoudeproust.fr/2014/08/fascinantes-laitieres/

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Published by jean-yves cordier - dans Proust
31 octobre 2015 6 31 /10 /octobre /2015 16:05

La zoonymie (du grec ζῷον, zôon, animal et ónoma, ὄνομα, nom) est la science diachronique  qui étudie les noms d'animaux, ou zoonymes. Elle se propose de rechercher leur signification, leur étymologie, leur évolution et leur impact sur les sociétés (biohistoire). Avec l'anthroponymie (étude des noms de personnes), et la toponymie (étude des noms de lieux) elle appartient à l'onomastique (étude des noms propres).

 

Elle se distingue donc de la simple étymologie, recherche du « vrai sens », de l'origine formelle et sémantique d'une unité lexicale du nom.

 

Résumé. 

 

— Satyrium Scudder, 1876 :  l'auteur américain  donne l'explication du choix de son genre dans sa description originale en soulignant "la sobriété de ses marques et de sa  coloration , rappelant dans une certaine mesure le ton de couleur propre aux Oréades ou Satyrids, d'où le nom que je lui aie attribué". En effet, les ailes de l'espèce-type du genre, Satyrium fuliginosa ou "Western Sooty Hairstreak" sont d'un gris  uni  en dessous et d'un brun terne au dessus, qui peuvent rappeler les couleurs de quelques Satyrides. Le nom ne crée aucun rapport entre les espèces du genre, et les satyres de la mythologie.

—   pruni, du latin Prunus "Prunier". Cet adjectif spécifique a été créé par Linné dans le Systema naturae de 1758, cet auteur le justifiant  par la mention (qui concerne la chenille) Habitat in Pruno domestica "Vit sur le Prunier cultivé". En 1761 dans Fauna suecica, il se contentait de Habitat in Pruno , le Genre incluant ainsi entre autre le Prunellier. Ce qualificatif -pruni appartient aux 25 des 192 noms linnéens qui désignent la plante nourricière, dont 8 Plebejus betulae, pruni, quercus, rubi, caricae, virgaureae, bixae, malvae).

Le papillon a d'abord  été nommé "Le Porte-Queue brun à [deux] lignes blanches " par Geoffroy (1762) et par Engramelle (1779), — nom encore utilisé par Oberthür —,  puis "Polyommate du Prunier" par Latreille (1818) et Godard (1821), avant que G.C. Luquet ne propose en 1986  "La Thécla du Coudrier" puis en 2013 "La Thécla du Prunier".

 


 



 

 

               I. Nom scientifique.

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1.NOM DE FAMILLE.

 

1°) Famille des Lycaenidae, William Elford Leach, 1815. Les Lycènes.

       Leach, William Elford, 1790-1836  "Insecta" pp. 329-336."Entomology". pp 646-747 in D. Brewster éditeur, Brewster's Encyclopaedia Edinburgh, [Edinburgh, volume 9, 1, 04/1815 pp. 57-172  : selon Sedborn 1937] [Philadelphia, E. Parker,1816? selon BHL Library]  page 718. [ Article publié anonymement et attribué à Leach, qui avait annoté son propre manuscrit]

La famille Lycaenidae tient son nom du genre Lycaena de Fabricius (1807). 

  • Sous-famille des Theclinae Butler, 1869 : [Thiéclines : Théclas ou Thècles et Faux-Cuivrés]. Hairstreaks en anglais

  • Sous-famille des Lycaeninae [Leach, 1815] : [Lycénines : Cuivrés].

  • Sous-famille des Polyommatinae Swainson, 1827 : [Polyommatines : ; Azurés, Argus et Sablés]. Blues en anglais.

 

2°) Sous-famille des Theclinae Butler, 1869 : les Thèclas ou Thècles et les Faux-Cuivrés.

Les Theclinés se distinguent par la présence d'une courte queue sur les ailes postérieures. Ils portent le nom de Hairstreaks ["cheveux-stries] en anglais, en raison (W. Dale) des lignes fines qui traversent la face inférieure de leurs ailes.

Elle comprend trois tribus en France :

  • Tribu des Tomarini Eliot, 1973 (Genre Tomares ).

  • Tribu des Theclini Butler, 1869.

  • Tribu des Eumaeini Doubleday, 1847.

3°) Tribu des Eumaeini Doubleday, 1847

  •  Genre Satyrium Scudder, 1876

  • Genre Callophrys Billberg, 1820.

 

 

http://www.biodiversityheritagelibrary.org/item/38600#page/160/mode/1up


 

2. NOM DE GENRE :  Satyrium Scudder, 1876   

a) Description originale : 

        Satyrium Scudder, 1876; "Synonym list of the butterflies of North America, North of Mexico. Part 2. Rurales." Bulletin of the Buffalo Society of natural Sciences, Chicago, 1887  3 [18], page  106.

http://www.archive.org/stream/bulletinofbuffal03buffuoft#page/106/mode/1up

— Description : 

 "8. SATYRIUM Scudder.

Type : Lycaena fuliginosa Edw.

This genus which both Edwards and Boiduval referred to the Ephori is allied to Erora, but in the sobriety of its markings and coloration is in striking contrast to that group, recalling to a certain degree a tone of color common among Oreades or Satyrids, whence the name I have applied to it . The center of the eyes is thinly pilose ; the palpi, though slight, are longer than the eyes by the whole lenght of the terminal joint. The fore tibiae are three-fourths and the middle tibiae seven-eights the lengyh of the hind tibiae. The wings are broader than in Erora, resembling more those of Callipsyche, but, as in the former genus, the male has no discal stigma on the front pair, and the hind wings are scarcely excavated at the tip of the inner border ; the first superior subcostal nervule of the fore wings arise at or just before the middle of the cell, and the letter is a little less than half as long as the wing. In the markings of the under surface of the wings Satyrium resembles Callipsyche more closely than Erora, but in structure it seems nearly allied to the latter."

8. Satyrium Scudder.

Type: Lycaena fuliginosa Edw.

Ce genre que  Edwards et Boiduval placent tous les deux parmi les Ephori  est proche du genre Erora, mais par la sobriété de ses marques et de sa  coloration il entre en contraste frappant avec ce groupe, rappelant dans une certaine mesure le ton de couleur propre aux Oréades ou Satyrids, d'où le nom que je lui aie attribué. Le centre des yeux est finement velu; les palpes, si légers, sont plus longs que les yeux de toute la longueur de l'articulation terminal. Les tibias antérieures sont  trois quarts plus longs, et les tibias du milieu des sept huitièmes de la Longueur,  que le tibia postérieur. Les ailes sont plus larges que chez Erora, ressemblant plus ceux de Callipsyche, mais, comme chez le premier genre, le mâle n'a pas de tache discale sur la paire d'ailes antérieures et les ailes postérieures sont à peine creusée à la pointe de la bordure intérieure; le premier nervule sous-costale supérieure  des ailes antérieures se situe au niveau ou juste avant le milieu de la cellule, et la lettre est un peu moins longue que  la moitié de  l'aile. Dans les marques de la surface sous des ailes Satyrium ressemble à  Callipsyche plus étroitement que chez Erora, mais dans la structure elle semble presque appartenir à celle-ci.

N.B : pour comprendre cette description, il faut savoir que Scudder place ce genre entre le n°7 Erora , nom encore valide aujourd'hui pour des Theclinae Eumaeni américains, et le n°9 Callipsyche, également valide pour des Theclinae Eumaeni. Il faut aussi savoir que  le nom d' Ephori est synonyme (Herbst, 1793) ou analogue à la sous-famille des Theclinae. (Herbst avait divisé les Plebejus rurales de Linné en deux groupes, Vestales et Ephori).  En 1881, Scudder écrivait "Tribe Ephori Herbst =Theclides Kirby = Hairstreaks". On peut admettre l'équation Ephori = Thécla.)

 Enfin, les Oréades désignent un "Stirps" de Hübner, un rang taxonomique peut-être équivalent à nos Sous-familles, et qui renferme pour cet auteur des Papilio Danai gemmati de Linné soit les Satyri de Fabricius, donc la sous-famille des Satyrinae.

 — Type spécifique: Lycaena fuliginosa Edwards, 1861. Proc. Acad. nat. Sci. Philad. 13: 164.

— Noms juniors :

  • Chrysophanes ; Weidemeyer, 1864  Proc. ent. Soc. Philad. 2(4) : 536.
  • Chrysophanus Hübner, 1818 Zutr. Samml. exot. Schmett. 1 : 24. (publication précédant la seconde mention de ce nom par Hübner en [1819] dans Verzeichniss bekannter Schmettlinge page 72.
  Chrysophanes ou Chrysophanus peuvent se traduire par "Signe doré", le genre correspondant ayant été assimilé aux Coppers anglosaxons à l'acceptation plus large que nos Cuivrés (cf Hemming NHM) avant de s'inscrire dans le groupe des Hairstreak .

   — Ce genre renferme  6 espèces en France : 

  • Satyrium acaciae (Fabricius, 1787) Thécla de l’Amarel.
  • Satyrium esculi (Hübner, [1804]) Thécla du Kermès.
  • Satyrium ilicis (Esper, 1779) Thécla de l’Yeuse.
  • Satyrium w-album (Knoch, 1782) Thécla de l’Orme.
  • Satyrium pruni (Linnaeus, 1758) Thécla du Prunier 
  • Satyrium spini ([Denis & Schiffermüller], 1775)  Thécla des Nerpruns 

 

 

 Origine et signification du nom 

 

—A. Maitland Emmet (1991) page  148: 

"Saturos, a satyr, a mythical being associated with the worship of Bacchus, in art often depicted with the horns and tailo of a goat. The satyrs engaged in voluptuous dances with the nymphs and this name, like Ochlodes Scudder, draws attention to the spritely flight of the butterflies. Another possible source is a plant called saturion, which was used as an aphrodisiac. Derivation from Saturium, a town in southern italy, is unlikely, since the Latin "u" should not be changed to a "y"."

 

—Luquet in Doux et Gibeaux (2007) page 170:

" du grec Saturos, "Satyre". êtres mythiques  associés au culte de Bacchus, les Satyres se livraient à des danses voluptueuses avec les Nymphes, et le nom Satyrium semble faire allusion au vol sautillant de ces papillons. Ce nom de genre pourrait aussi dériver de Saturion, nom grec d'une plante censée posséder des pouvoirs aphrodysiaques."

— Perrein et al. (2012) page  : 

Étymologie : du latin satyrus, du grec satyros, "satyre" ; les satyres de la mythologie gréco-romaine sont des démons, compagnons de Dionysos —ou Bacchus pour les Latins—, représentés souvent cornus, avec une longue et large queue, et un membre viril toujours dressé et surdimensionné. La teinte sombre du recto des ailes des espèces du genre, ainsi que les petites queue des ailes  postérieures, a pu inspirer l'entomologiste américain, plutôt que leur vol dansant comme le suggère Emmet (1991).

— Arizzabalaga & al. 2012 :

  Satyrium :  Els satirs, divinitats gregues dels boscos 

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Discussion.

        A. M. Emmet, recopié par Luquet (2007) et Perrein & al. (20013), interprète le mot Satyrium comme s'il s'agissait du mot Satyrus, et sans consulter la description originale de Scudder. Pourtant, l'auteur américain ne se réfère nullement aux personnages mythologiques du cortège de Dionysos, ni à leurs danses, ni à leurs queues, mais se réfère à la taxonomie des lépidoptères et il le dit très clairement : "par la sobriété de ses marques et de sa  coloration il [ce genre] entre en contraste frappant avec ce groupe [des Theclinae], rappelant dans une certaine mesure le ton de couleur propre aux Oréades ou Satyrids, d'où le nom que je lui ai attribué."

 

Satyrium prunii (Theclinae) à gauche, et Maniola jurtina (Satyrinae) à droite : (presque) la même "sobriété des marques et de la couleur".

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alt=Description de cette image, également commentée ci-après  alt=Description de cette image, également commentée ci-après

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Avec Satyrium prunii, la démonstration n'est pas spectaculaire, mais il faut se souvenir que Scudder prend comme espèce-type Satyrium fuliginosa, "fuligineux" — The Western Sooty Hairstreak—  qui, comme son nom l'indique, est particulièrement dépourvu de couleurs vives et dont les marques sont particulièrement sobres : 

   ©Kim Davis 2010                                           © 2008 Andrew Warren

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Lasiommata petropolitana ("Gorgone) :

alt=Description de cette image, également commentée ci-après

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3. NOM D'ESPÉCE : Satyrium pruni, (Linnaeus, 1758).

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a) Description originale
Papilio pruni Linnaeus, C. 1758. Systema naturæ per regna tria naturæ, secundum classes, ordines, genera, species, cum characteribus, differentiis, synonymis, locis. Editio decima, reformata. Holmiæ. (Salvius). Tomus I: 1-824. page 482.

[http://www.biodiversitylibrary.org/item/10277#page/504/mode/1up​]

147. P.P alis subcaudatis supra fuscis, subtus fascia marginali fulva utrinque nigro punctata.

Habita in Pruno domestica.

Traduction mihi "Ailes à queue ébauchée, brunes sur le dessus, avec une bande marginale fauve au dessous avec des points noirs."

 b) Références données par Linné.

 

1°) Roesel. Insecten Belustigung I. pap. 2.t.7. 

2°) John Ray, Insect. 130. n° 9 ?

3°) James Petiver Gazophylacii II f.10

 c) localité et description.

  — Localité-type  : Allemagne, désignée par Verity, R. 1943. Le Farfalle diurne d'Italia 2. Divisione Lycaenida. Marzocco, Firenze. 2: 401 pp. Page 370.

 

 — Selon Dupont & al. (2013), "cette espèce a une répartition eurasiatique. Elle est signalée dans toute la France sauf dans le Massif Armoricain et dans le domaine méditerranéen. Il existe une population allopatrique en Provence Alpes-Côte d’Azur, principalement localisée dans les Préalpes de Digne. Les chenilles se nourrissent principalement sur Prunus spinosa L. ."

 

— Selon Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A8cle_du_prunier

C'est un petit papillon au dessus marron, avec une queue aux postérieures, et des taches orange submarginales, discrètes aux postérieures chez le mâle, aux postérieures et aux antérieures chez la femelle.

Le revers est de couleur marron orné d'une fine ligne blanche et de taches submarginales orange confluentes marquées d'un petit point noir.

La chenille, petite et trapue, possède une tête rétractile marron clair et un corps vert avec deux rangées de bosses dorsales blanchâtres et des stries obliques jaunâtres sur les flancs. Il vole en une génération, entre mi-juin et mi-juillet.

Il hiverne à l'état de chenille formée dans l'œuf pondu à la fourche des rameaux.

Sa plante hôte est le prunellier ou épine noire Prunus spinosa. Et aussi Prunus padus et d'autres Prunus.

Il est présent dans une grande partie de l'Europe, mais ni en Espagne, ni dans la majeure partie de l'Italie et de la Grèce, ni dans le nord. Il est aussi présent en Sibérie et jusqu'en Corée et auJapon.

En France métropolitaine il est présent dans la moitié est allant du sud-ouest au nord-est. Suivant d'autres sources il ne serait absent que de Bretagne, quelques départements du sud de la France et de Corse. C'est un lépidoptère des fourrés de prunelliers.

 

c) Origine et signification du nom  pruni

        

 

—  Les interprétations des auteurs antérieurs :

 

 

 — Arnold Spuler ( 1908) 1 page 53 :

   "Prunus, Gattungsname von Steinobstpflanzen.“

"Prunus, nom générique de Steinobstpflanzen."

 — A. Maitland Emmet (1991) page 148 :

 "— Prunus, the blackthorn genus ; correctly given by Linnaeus, although his references to earlier British authors show that at least in part he has confusing this species vith the previous one [w-album]. " 

Trad. (mihi) : "- Prunus, le genre Prunus ; Correctement donné par Linné, mais les références à des  auteurs britanniques antérieurs montrent qu'il a au moins dû confondre cette espèce en partie avec la précédente ".

— Hans Arnold Hürter (1998), page 299 :

 

" "Die Raupe lebt an schlehen, manchmal auch an Zwetschenbaümen "(F-W II, S.78, und Higgins S. ) zeigt, daß der deutsche Name "Pflaumen-zipfelfalter" nur zum geringen Teil korrekt ist, ein Merkmal leider vieler Namen in den Landesprachen. Der wissenschaftliche Name, von der Pflanzengattung abgeleitet, erfaßt sowohl Schlehe als auch Zwetschge."

Trad. (mihi) "La chenille vit sur les prunelles, parfois sur des pruniers "(FW II, p.78, et Higgins S.) montre que le nom allemand  "Pflaumen-zipfelfalter"  n'est correct que dans une faible mesure, ce qui est,  malheureusement, une caractéristique de beaucoup de noms dans les langues nationales . Le nom scientifique est dérivée de la plante du genre, incluant à la fois le prunellier et le prunier".

 — Luquet in Doux et Gibeaux (2007) page  176:

 "— pruni : genitif du mot Prunus, nom générique d'arbres fruitiers à noyau (divers Pruniers et Cerisiers, plantes nourricières attestées de cette espèce"

 — Perrein et al. (2012) page  : 

 "Étymologie : "du latin prunus, "du prunier" pour Linné, emprunté au grec proumnos ou prounos, ces derniers mots d'une langue anatolienne [Carnoy, 1959].

— Arizzabalaga & al. (2012) ; cette espèce n'est pas étudiée par ces auteurs.

 

— Discussion : 

 

  La seule "justification" du nom spécifique -pruni est sa création par Linné dans le Systema naturae de 1758, cet auteur expliquant cet adjectif par la mention Habitat in Pruno domestica.

Linné a décrit le Prunus domestica en 1753 dans Species Plantarum I, page 475, §9 :

http://www.biodiversitylibrary.org/item/13829#page/487/mode/1up

Fiche INPN Prunus domestica L. 1753 http://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/116067/tab/taxo

Fiche Telebotanica  Prunus domestica L.

On considère qu'il s'agit d'un hybride  Prunus spinosa x Prunus cerasifera

Le prunier ou prunier cultivé  est un arbre fruitier appartenant au genre Prunus, au clade Amygdalus-Prunus, section Prunus, de la famille des Rosaceae, cultivé pour ses fruits, les prunes. Il est plus rarement appelé prunier domestique.

En 1761, Linné se contentera d'indiquer, dans Fauna suecica, "Habitat in Pruno", sans préciser l'espèce de son genre Prunus. L'adjectif -pruni ne  renvoie plus seulement alors au Prunier domestique, mais au Prunellier Prunus spinosa.

 Sur les 192 espèces de rhopalocères nommées en 1758 par Linné, 25 portent le nom de leur plante nourricière : Aucun Equites, 2 Heliconii (ricini et psidii), 11 Danai (anacardii, crataegi, brassicae, rapae, napi,sinapis, cardamines, sennae, rhamni, cassiae, sophorae), 4 Nymphales (cardui, populi, urticae,  vanillae) et 8 Plebeji ( betulae, pruni, quercus, rubi, caricae, virgaureae, bixae, malvae).

 

Description par les auteurs. Etude et complément des références de Linné.

A. Références de Linné (replacées dans l'ordre chronologique)
) James Petiver 1702,  Gazophylacii II f.10 

Si cette référence est exacte, elle correspond à une chenille, eruca carnea

2°) John Ray, 1710  Historia insectorum page 130. n° 9 ?. Linné place un point d'interrogation, et effectivement, la description de cette espèce, qui ne mentionne pas l'existence d'un appendice caudé, ne semble pas convenir.  Pap. minor caerulescens, subtus striatus. John Ray renvoie à Petiver, Musei page 319.

 

) Roesel. Insecten Belustigung I. pap. 2.t.7.  (1740)

illustration ci-dessous :

 

1°) Roesel. Insecten Belustigung I. pap. 2.t.7. 

http://www.biodiversitylibrary.org/bibliography/7362#/summary

http://www.biodiversitylibrary.org/item/31182#page/138/mode/1up

2°) John Ray, Insect. 130. n° 9 ? https://archive.org/stream/historiainsector00rayj#page/n11/mode/2up

3°) Petiver Gazophylacii II f.10 books.google.fr/books?id=sp05AAAAcAAJ

 

Roesel von Rosenhof, Insecten Belustigung I, 1740, page 101 planche VII fig.3. Biodiversity Heritage Library

Roesel von Rosenhof, Insecten Belustigung I, 1740, page 101 planche VII fig.3. Biodiversity Heritage Library

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B. Références complémentaires données par Charles de Villers in Caroli Linnaei Entomologia... curante Carolo de Villers 1789

4°) Linné, Fauna suecica , 1761, n° 1071 page 283.

Linné indique désormais "habitat in Pruno" (et non in Pruno domestico), ce qui associe désormais le qualificatif -pruni avec l'ensembles des arbres du genre Prunus, notammet P. spinosa, le Prunellier. En outre, il ajoute un complément de description :

Alae omnes fuscae ; postice caudae & ante caudam maculis 2. f.3. Ferrugineis lunatis. Subtus omnes obscure cinereae : linea transversa. Secundariae intra marginem posticum fascia fulva, utroque margine nigro punctata.

5°) Scopoli, Entomologia Carniolica , 1763 page 459

6°) Réaumur, Mémoires pour servir à l'Histoire des  Insectes, 1734, . I. pl..28 fig 6-7.

Réaumur nomme (page 282) cette espèce par l'intermédiaire de sa chenille : "la chenille cloporte de l'orme". Les différents futurs Théclas ne sont pas encore différenciés.

7°) Schaeffer Icones insectorum  1779, . t.14  f.1-2 ; elem. t.94 f.15

 

Schaeffer Icones insectorum  1779, . t.XIV  f.1

Schaeffer Icones insectorum 1779, . t.XIV f.1

8°) Esper t.XIX fig .3 et  t.XXXIX f.1 a, b, var. 

9°) Fuessli Ins. n°592. http://www.biodiversitylibrary.org/item/78769#page/11/mode/1up

10°) Fabricius page 526

 

 

 

              III. NOMS VERNACULAIRES.

 

 

 I. Les Noms français. 

 

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1. [Le Porte-Queue brun à deux bandes de taches blanches ], Geoffroy, 1762. 

 Étienne-Louis Geoffroy  1762. Histoire abrégée des insectes qui se trouvent aux environs de Paris: dans laquelle ces animaux sont rangés suivant un ordre méthodique ; Paris : Durand 1762 Tome second Planches XI à XXII  colorées à la main par Prévost gravées par Defehrt page 60 n°28

 Papilio fuscus supra macula fulva, subtus fascia duplici, transversia macularum albicantium, alis secundariis lunularum ferruginearum serie, et in imo caudatis

Geoffroy donne se réfère dans son texte au Papilio pruni de Linné et reproduit les références de l'auteur suédois à J. Ray, à Petiver et à Roesel, mais il décrit un papillon à deux bandes de taches blanches, qui crée une confusion avec Thecla betulae, la Thécla du Bouleau. Il signale que la chenille se trouve sur l'orme (c'est la "chenille cloporte de l'orme " de Réaumur), par confusion avec Satyrium w-album . Pour ces raisons, je ne le considère pas parmi les nomenclateurs de l'espèce.

 

2. Le Porte-Queue brun à [deux] lignes blanches,  Engramelle, 1779.

Jacques Louis Engramelle, 1779 Papillons d'Europe, peints d'après nature, Volume 1 page 157 Planche 35  c-d et planche 36 a-f dessinées par  J.J Ernst . 

 L'ouvrage disponible à la consultation en ligne sur archiv.org reprend le même nom que celui de Geoffroy, se réfère à la description de Geoffroy, à celle de Roesel, celle de Linné, celle d'Esper, de Réaumur, de Scopoli et de Fuessli. Par contre, il ne décrit qu'une seule ligne blanche : "une ligne composée de petites taches blanches traverse les deux ailes". La chenille, une "cloporte" de Réaumur, vit sur l'orme...mais "Linné dit qu'elle mange aussi des feuilles de prunier". Enfin, l'illustration a été reconnue comme conforme à Satyrium pruni par les entomologistes qui ont eu accès aux planches originales.

Mais, et c'est assez curieux, ces entomologistes (Latreille et Godart, Oberthür) ont lu "Le Porte-Queue à lignes blanches", en escamotant le chiffre "deux" embarassant. Dès 1780, François Rozier cite ce nom dans cette version "corrigée". Pourtant, je vérifie que Engramelle n'a pas corrigé lui-même ce nom (in Additions et Corrections). Mieux encore, Ochsenheimer et Treitschke parlent en s'y référant,  d'un" Porte-Queue brun à une ligne blanche". Et enfin, Latreille et Godart reconnaisse le Papilio pruni dans les figures 72 c et d du tableau XXXV, celui qui porte chez Engramelle le nom de "Porte-Queue brun à taches aurores".

Dans cette version, le nom "Porte-Queue brun à lignes blanches" sera utilisé tout au long du XIXe siècle, à Colmar, dans le Doubs ou à Rouen et, par Oberthür, jusqu'en 1922. En 1868, Émile Blanchard utilise "Le Porte-Queue brun à ligne blanche", avec sa seule ligne blanche...

Après avoir écrit ces lignes, je découvre une édition de l'ETH-Bibliothek, Zürich Rar1316q http://www.e-rara.ch/zut/content/pageview/4154873, dont le texte est bien différent pour la page 157 planche XXXVI n°73 : l'espèce est nommée Le Porte-Queue brun à lignes blanches ; et on ne trouve plus que deux références, à Linné et à Roesel. C'est bien entendu cette édition qui a été consultée par les entomologistes postérieurs. La Planche XXXVI se trouve ici : http://www.e-rara.ch/zut/content/pageview/4155199

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Le Porte-Queue brun à bandes blanches, Engramelle, Papillons d'Europe, planche XXXVI fig. 73 a-f

Le Porte-Queue brun à bandes blanches, Engramelle, Papillons d'Europe, planche XXXVI fig. 73 a-f

Le Porte-Queue brun à taches aurores, Engramelle, Papillons d'Europe, planche XXXV fig. 72 c & d.

Le Porte-Queue brun à taches aurores, Engramelle, Papillons d'Europe, planche XXXV fig. 72 c & d.

   

 

 

3. Polyommate du Prunier  , Latreille et Godart 1819 

Latreille et Godart Encyclopédie méthodique, Histoire Naturelle . Entomologie, ou Histoire naturelle des crustacés, des arachnides et des insectes, par M. Latreille,, Papillon Paris : Vve Agasse tome 9, page 647 n° 111.

Cet article permet de disposer de l'ensemble des références bibliographiques sur cette espèce, notamment par les auteurs germaniques, autrichiens ou suisses.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k58338273/f658.image.r=Godart.langFR

C'est la première description française cohérente avec nos connaissances. La chenille "vit sur le prunier sauvage".

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 5.  Polyommate du Prunier  , Godart 1821.

     Jean-Baptiste Godart, Histoire naturelle des lépidoptères ou papillons d'Europe, Paris : Crevot 1821,  page 184 planche IX fig. 2 peinte par Delarue et gravée par Duménil.

 

"Le dessus des deux sexes est d'un brun noirâtre, avec une rangée postérieure de taches fauves aux quatre ailes de la femelle, et seulement aux secondes ailes du mâle.

Le dessous est d'un brun un peu plus clair que le dessus, avec une ligne blanche, transverse, commune, et légè-rement interrompue ; puis une bande fauve, offrant le long de son coté interne une série de points noirs, bordés de blanc antérieurement. cette bande est plus vive aux ailes inférieures. Elle y est en outre appuyée sur un cordon de taches noires, triangulaires, lesquelles s'appuient à leur tour sur une ligne blanche,presque marginale. [...] La chenille vit sur le Prunellier.

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  Polyommate du Prunier, ♀, Godart, Planche IX fig.2                       

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6. "Polyommate du Prunier  ", la chenille, Duponchel, 1849     

 

Duponchel (Philogène Auguste Joseph) 1849 Iconographie et histoire naturelle des chenilles pour servir à de compléter une l'Histoire naturelle des lépidoptères ou papillons de France, de MM. Godart et Duponchel . Paris : Germer Baillère, 1849 page 76 n°26, 

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Chenille du Polyommate du Prunier, Planche VII fig. 26 a-b.©BHL :

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6. La revue des noms vernaculaires par Gérard Luquet en 1986 et le nom vernaculaire actuel.

 

  1°) Dans la révision des noms vernaculaires français des rhopalocères parue dans la revue Alexanor en 1986, Gérard Christian Luquet créait comme nom principal "La Thécla du Coudrier", comme nom accessoire "La Thécla du Prunier", et comme nom dont l'usage est à écarter "Le Porte-Queue brun à lignes blanches" d'Engramelle. Il accompagnait ce choix d'une note [39] :

[39] : "Le nom de "Thécla du Prunier" est tout-à-fait correct. Cependant pour éviter des confusions éventuelles avec l'espèce nommée "Thécla du Prunellier" (Satyrium spini), je propose "Thécla du Coudrier"

2°) Dans   Doux et Gibeaux (2007) page  176, G.C. Luquet écrit encore

"La Thécla du Coudrier, la Thécla du Prunier :  —Coudrier : Corylus avellana (Noisetier) l'une des plantes nourricières présumées de l'espèce. "

 

 Dans Dupont et al. 2013, on lit (sous la plume de G.C. Luquet sans-doute)

 

"Le nom « Thécla du Coudrier » (LUQUET, 1986 : [13]), naguère proposé pour remplacer celui de « Thécla du Prunier », trop proche de celui de l’espèce voisine alors désignée sous le nom de «Thécla du Prunellier » (Satyrium spini D. & S.), peut être écarté au profit du rétablissement de «Thécla du Prunier », Satyrium spini ayant reçu dans l’intervalle un nouveau nom commun en relation avec la véritable plante nourricière de sa chenille."

Et à propos de S. spini 

 "Parmi les anciens noms communs de cette espèce figuraient ceux de « Thécla du Prunellier » et de « Thécla de l’Aubépine », d’après les noms de deux Rosacées jadis considérées à tort comme plantes nourricières de cette Thécla. Diverses études ont montré que la chenille de ce Lycène se développait en réalité exclusivement sur les arbustes du genre Rhamnus. Un nouveau nom commun, Thécla des Nerpruns, a donc été proposé par P. LERAUT, puis repris dans la littérature entomologique (LUQUET, in RUCKSTUHL, 1977 : 228 ; LUQUET, in DOUX & GIBEAUX, 2007 : 178). "

 

7. Noms vernaculaires contemporains :

 

  Charles Oberthür et Constant Houlbert , dans leur Faune armoricaine de 1912-1921, utilisent page 188 le nom scientifique de  Thecla pruni suivi immédiatement du nom de "Porte-Queue brun à lignes blanches"  , répétant ce nom à la page suivante avec la mention "ainsi que le nomme Engramelle".

 

— Doux & Gibeaux 2007 : " La Thécla du Coudrier "..

— Perrein et al. 2012 : "Thécla du Prunier ".

— Wikipédia : "Thécle du prunier ou Thècle du coudrier ".

 

 SOURCES ET LIENS :

 

— Funet : Satyrium

— Inventaire national du patrimoine naturel (Muséum) : Satyrium pruni

— lepiforum : Satyrium pruni

 

 

BIBLIOGRAPHIE

Voir :          Zoonymie des Rhopalocères : bibliographie.

http://www.lavieb-aile.com/article-zoonymie-des-rhopaloceres-bibliographie-124969048.html

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Published by jean-yves cordier - dans Zoonymie des Rhopalocères.
28 octobre 2015 3 28 /10 /octobre /2015 11:47

Je fais ici de larges emprunts aux textes en ligne cités en référence infra.

 

L'ancien palais épiscopal de Beauvais, situé juste à côté de la cathédrale  est l'un des plus beaux bâtiments de la ville. Il abrite aujourd'hui le musée départemental de l'Oise. Il se situe dans des bâtiments du XIIe siècle, construits sur les anciens remparts gallo-romains de la ville. A la suite d'une émeute des bourgeois en 1305 protestant contre l'augmentation des taxes sur l’utilisation des moulins, le comte-évêque de la ville, Simon de Nesle (1301-1313), décida de renforcer la sécurité du lieu grâce à l'amende payée par les bourgeois de Beauvais. Il ajouta ainsi une porte d'entrée fortifiée  flanquée de deux importantes tours pour former un vrai châtelet

Simon de Clermont de Nesle 1301-1312, avait été transféré de Noyon à Beauvais en 1301. Il partagea avec Mathieu, abbé de Saint-Denis, l'administration du royaume pendant le voyage de Saint Louis à la deuxième croisade. Il fut du petit nombre des évêques qui soutinrent Philippe-le-Bel contre les prétentions de Boniface VIII.

Quatre sirènes musiciennes décorent une des voûtes au rez-de-chaussée de la salle située à l’arrière de la tour d’entrée nord de l’ancien palais épiscopalPeintes sur un enduit de chaux, dans une gamme restreinte de blanc, d’ocre rouge, d’ocre jaune et d’orange, cernées de noir, elles se détachent sur un fond ocre rouge semé de points noirs, censé représenter les fonds marins. Leur long corps sinueux s’ajuste parfaitement à la forme triangulaire des voûtains. Les ogives qui séparent les sirènes deux à deux sont quant à elles peintes de motifs décoratifs : quadrilobes, points, semis de fleurs de lys de couleur or sur fond bleu foncé. Les travaux de restauration entrepris en 2013 ont révélé des traces infimes de couleur sur les murs et les ébrasements de fenêtres qui permettent d’affirmer que l’intégralité de la salle était à l’origine ornée de peintures.

Je leur ai rendu visite après avoir admiré les 47 anges musiciens des voûtes de la chapelle axiale de la cathédrale du Mans, exécutés sur la commande de Gontier de Baigneux, évêque du Mans de 1367 à 1385, et peints sur un fond rouge soutenu assez proche de celui de Beauvais. Les anges du Mans chantent, dans un cadre sacré, les louanges de la Vierge.  J'avais vu ensuite les anges musiciens de Kernascléden, (vers 1440) sur une voûte timbrée des armes de Bertrand de Rosmadec, évêque de Quimper jusqu'en 1445. Ils chantaient une messe aragonaise. A Dives-sur-mer, l'évêque Guy de Harcourt (décédé en 1336) avait offert un vitrail aux 8 anges musiciens (chalumeau double, cornemuse, viole à archet, flûte de pan, guiterne à 3 cordes, orgue positif, claquebois, hautbois. ).

 Mais quelles étaient, à Beauvais, les fonctions des sirènes, ornant un édifice civil (mais épiscopal) ?

Quels étaient les instruments choisis par les sirènes ? Répondons déjà à cette question. Elles jouent l’une de la cornemuse, l’autre de la viole à archet, du tambour et de la flûte à une main pour une troisième, et enfin, pour la dernière, d’un instrument aujourd’hui disparu, la trompette marine.

Bien-sûr, chacun évoque les malfaisantes sirènes charmant de leurs chants les marins de l’Odyssée d’Homère, afin d'en échouer les navires sur les récifs. Mais ce ne sont pas des femmes-poissons, comme ici, mais des monstres marins mi-femmes, mi-oiseaux.  À l’époque médiévale, les sirènes perdent leurs ailes pour se doter d’une queue de poisson, mais elles gardent leur caractère maléfique. Elles symbolisent la malignité des femmes, ces êtres que l'on pensait alors lascifs et futiles, promptes à séduire les hommes pour les mener à leur perte. Ainsi, elles sont souvent représentées avec des instruments de musique ou se contemplant dans un miroir. La famille de Lusignan considère qu'ils descendent de Mélusine, une femme qui se transforme en dragon à queue de serpent et à ailes de chauve-souris lorsqu'elle se baigne en secret, chaque samedi. Si la Légende de Mélusine par  Jean d'Arras date de 1393, elle se base sur des éléments du XIIe siècle.

À Beauvais, cet aspect maléfique de la sirène semble être respecté. En effet, les consoles supportant les arcs sont sculptées d’une tête d’homme aux oreilles duquel sont placés deux démons tentateurs.

Pour Géraldine Victoir, les sirènes doivent  être comprises comme des éléments décoratifs

"La fonction des pièces dans les tours au début du XIVe siècle est inconnue, mais la présence de cheminées et de latrines suggère qu’elles servaient d’habitation – non pour l’évêque qui occupait le palais, mais probablement pour des membres de sa maison. . En compagnie d’animaux et d’hybrides variés, elles ornaient des objets et des espaces liés au milieu courtois . Simon de Nesle appartenait au monde courtois tant par sa prestigieuse carrière personnelle – le temporel de l’évêché de Beauvais était un des plus importants du royaume jusqu’à la Guerre de Cent Ans– que par sa riche et puissante famille. Il était le fils de Simon de Clermont, seigneur de Nesle et Comte de Breteuil, régent de France durant la deuxième croisade de Louis IX, et le frère de Guy de Nesle, maréchal de France et de Raoul de Nesle, connétable."

  "Ces êtres imaginaires peuvent être rapprochés des décorations marginales. Les hybrides envahissant la production artistique participaient d’une lecture espiègle, ambiguë et parfois scandaleuse du monde, peut-être pour tenter de le démystifier. [...]. À Beauvais, même si la décoration du palais est perdue, les sirènes, placées à l’entrée du complexe et topographiquement aux confins, peuvent être comprises comme un sujet marginal. Le thème de la musique était prisé dans les productions profanes, faisant écho aux fêtes courtoises accompagnées de ménestrels.[...]. À Beauvais, les élégantes sirènes rappellent irrésistiblement les anges musiciens, dont le succès grandissant sur les voûtes de chapelles privées ne pouvait avoir échappé à l’évêque et aux membres de sa maison. Non loin de là, à Flavacourt (Oise), un chœur d’anges peint vers 1330-1340 sur la voûte de la chapelle du seigneur témoigne de la diffusion de ce type d’images. Les sirènes étaient peut-être vues comme une caricature espiègle des messagers célestes, transformés en êtres charnels jouant de leurs charmes. Elles sont donc l’exemple parfait de sujet ornemental plaisant et à la mode, relevant plus de la fantaisie que de la morale, mais non dénué d’une certaine ambiguïté propre aux décors marginaux. Les sirènes de Beauvais , peintes dans des demeures d’ecclésiastiques, indiquent que ces hommes préféraient des thèmes en relation avec leur extraction et leur situation sociale plutôt qu’avec leur fonction dans le clergé. "(Géraldine Victoir, 2007) 

Très éprouvée par la canicule de 2012, cette peinture murale a été soigneusement restaurée entre avril et novembre 2013.

Quatre sirènes musiciennes, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

Quatre sirènes musiciennes, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

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I. Le premier voûtain : Cornemuse et viole.

 

 

 

 sirènes musiciennes, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

sirènes musiciennes, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

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1°) La joueuse de cornemuse

Jean-Luc Matte (Iconographie de la cornemuse en France)  décrit ainsi l'instrument :

"1 bourdon d'épaule extérieurement conique et s'évasant en pavillon. Le bourdon passant derrière la tête de la sirène, il n'est pas possible de savoir s'il est fait en plusieurs éléments. Deux traits à la base suggèrent une souche. Deux trait figurent également sur le pavillon. Tuyau mélodique conique s'évasant en un pavillon semblable à celui du bourdon, monté sur une souche en forme de tête de canard. Grosse poche dont la couture est visible et dotée d'un col de cygne. Porte vent conique à proximité de la bouche de la sirène. Sac et tuyaux sont de la même couleur jaune".  

La sirène est entièrement nue (ni coiffure, ni bijoux) hormis un pagne ultra court, de couleur orange. Sa dualité est compléte, opposant la partie supérieure humaine, et la moitié inférieure qui est résolument celle d'un posson, avec sa queue bifide, ses quatre nageoires, et ses écailles.

"Cette peinture murale présente  un style très graphique typique de la peinture gothique : comme la décoration en frise de quadrilobes qui les entoure, le trait  simple, non modelé, est typique de la première partie du XIVe siècle. Les figures sont longilignes, maniérées, ave une très belle forme de S. 

Les couleurs sont très tranchées, orange, noir, pas du tout pastel bien conformes à l'époque médiéval où on aime le rouge, le vert, les jaunes et les bleues." (V. Blanchard)

 

 

 Sirène joueuse de cornemuse, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.
 Sirène joueuse de cornemuse, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

Sirène joueuse de cornemuse, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

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2°) La joueuse de viole.

Elle tient son instrument sur l'épaule, et appuyé sur son cou et son occiput, incliné à 40° le long de son bras. Le corps de la viole est à peine cintré, sans échancrure, avec deux ouies en L ou C. On compte quatre cordes.

La tenue de l'archet est précisément représenté, entre le quatrième et cinquième doigt.

http://berry.medieval.over-blog.com/article-le-chapiteau-des-musiciens-eglise-de-bourbon-l-archambault-03-48957387.html

On comparera avec la viole du chapiteau de la nef de Bourbon-l'Archambault : la tenue de l'instrument est différente.

 

 Sirène joueuse de viole à archet, Beauvais,tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.
 Sirène joueuse de viole à archet, Beauvais,tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

Sirène joueuse de viole à archet, Beauvais,tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

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Le deuxième voûtain. Flûte et tambour, et trompette marine.

 

 Sirènes musiciennes, Beauvais,  tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

Sirènes musiciennes, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

La joueuse de flûte de tambourin.

La flûte de tambourin, à trois trous, se tient d'une main tandis que l'autre main frappe sur le tambour suspendu autour du cou. Elle porte aussi le nom de flûtet ou au XIXe siècle, de galoubet. 

Ici, la sirène joue (comme c'est la régle) de la flûte de la main gauche, mais l'instrument vient se poser sur l'avant-bras droit.

 

La flûte à une main et tambour consiste en l'union de deux instruments très différents pour n'en former qu'un seul. 

 

Joueuse de flute à une main et tambourin, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.
Joueuse de flute à une main et tambourin, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

Joueuse de flute à une main et tambourin, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

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2°) La joueuse de trompette marine.

C'est l'instrument le plus intéressant en raison de sa rareté. Je copie ici Wikipédia

Contrairement à ce que laisse penser son nom, l'instrument n'a pas de rapport avec la mer ni avec la famille des cuivres. L'épithète "marine" provient d'une déformation de l'adjectif marial, qui fait référence au culte catholique de la Vierge Marie. L'instrument semble associé au culte marial, caractéristique des couvents de religieuses. Cela est d'autant plus probable que la plupart des instruments conservés proviennent de couvents et qu'en allemand, l'instrument porte plusieurs noms, à savoir« Nonnengeige », ou violon de nonne, « Nonnentrompete » ou trompette de nonne, « Marientrompete » ou trompette de Marie. Officiellement présente dans l'inventaire de l'Écurie royale, elle n'est plus que rarement utilisée sous Louis XVI.

Facture, jeu et timbre ; Dérivée du monocorde médiéval, la trompette marine ne possède qu'une seule corde en général, que le joueur fait sonner en harmoniques. Cependant, d'aprèsPraetorius, cet instrument aurait pu posséder jusqu'à quatre cordes. Selon les cas, plusieurs cordes de sympathie peuvent être ajoutées à l'intérieur de la caisse de résonance.

La hauteur de l'instrument peut atteindre deux mètres. Sa caisse est comparable à celle d'une harpe, avec un manche dans le prolongement de la table. L'unique corde, frottée par un archet solide, repose sur un chevalet. Ce dernier a ceci de particulier, qu'il ne possède qu'un seul pied en pression sur la table. L'autre pied, (légèrement) détaché se met à percuter la table au gré des vibrations de celle-ci lorsque la corde vibre. Cet effet de percussion, similaire à la vielle à roue, est appelé effet trompette, car la parenté de son avec la trompette est remarquable.

L'analogie de son ne s'arrête pas qu'au timbre. La trompette marine est jouée sur les harmoniques naturelles de la corde, reprenant ainsi la gamme incomplète, parfois naturellement fausse (voir tempérament), des trompettes de l'époque, trompettes naturelles dépourvues de pistons. La ressemblance est saisissante.

Répertoire

Outre un répertoire original et plutôt rare, la trompette marine a été et est encore utilisée dans la musique de chambre baroque, mais aussi essentiellement comme coloration dans les airs d'opéras. Citons, à titre d'exemple, l'Air pour les matelots jouant des trompettes marines dans Xerxès de Jean Baptiste Lully.

Citations

« Il y faudra mettre aussi une trompette marine ! », Monsieur Jourdain, Le Bourgeois gentilhomme, Molière.

« Et l'unique cordeau des trompettes marines ». Cet alexandrin est la totalité du poème Chantre, dans le recueil Alcools de Guillaume Apollinaire. C'est, incidemment, l'un des plus courts poèmes de la tradition littéraire française."

https://www.youtube.com/watch?v=erIySs_6ZF8

Georges Kastner a décrit  en 1852 l'instrument de Beauvais en le désignant comme un Dicorde à cordes pincées.

"En cela il diffère de ceux qui nous ont occupés jusqu'ici. Sa forme , qui est pyramidale comme celle des Trummscheit ordinaires, est néanmoins plus svelte, élégante, plus dégagée que la leur. L'extrémité qui porte les chevilles est découpée en triangle comme une reproduction en petit du dessin de la base. Deux cordes égales sont tendues d'un bout à l'autre de l'instrument, qui paraît avoir à peu près les dimensions du trummscheit portatif du manuscrit de Bruxelles dont j'ai parlé plus haut. L'un et l'autre d'ailleurs sont du même temps, du XIVe siècle. "

Il fait remarquer en note que l'instrument n'a pas d'ouies. 

On notera que la sirène ne tient pas d'archet, mais que sa main droite (peu visible) pince les cordes : 

"À l'origine, les cordes étaient pincées ; mais, à partir du XVe siècle, on a utilisé un archet qui frottait les cordes entre les chevilles et l'emplacement où appuyait le pouce." (Encyclopedia Universalis)

Remarque.

Dans les présentations récentes (vidéo de V. Blanchard, cartel explicatif du musée), l'instrument est qualifié de "tympanon".

 

Sirène joueuse de trompette marine, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.
Sirène joueuse de trompette marine, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

Sirène joueuse de trompette marine, Beauvais, tour nord du palais épiscopal, photographie lavieb-aile.

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Conclusion.

L'opinion argumentée et compétente de Géraldine Victoir, qui voit dans ces sirènes des éléments décoratifs semblables aux marginalia espiègles des manuscrits, dans une scène profane, est partagée par tous. 

 Selon Vincent Blanchard, directeur-adjoint du musée,la porterie devait, à l'origine, accueillir la famille de l'évêque : ce dernier privilégie son appartenance à l'aristocratie et choisit un décor profane plutôt qu'un thème religieux conforme à sa fonction : son appartenance de classe l'emporte. Les sirènes sont alors liées à la débauche, ou au plaisir.

Pourtant, dans la pièce organisée autour d'un pilier central, voûtee en croisée d'ogives gothiques,  les sirènes occupent  les voûtains (équivalents du Ciel) et non des structures marginales traditionnelement affectées aux "drôleries" (pignon, chapiteaux, sablières, miséricordes). D'autre part, ces sirènes ne sont pas, malgré leur nudité et leurs longs cheveux blonds, représentées comme des séductrices, symbolisant la tentation ni comme des débauchées, comme dans de nombreuses figures médiévales où elles tiennent le miroir et le peigne symbolisant leur coquetterie coupable. Elles n'ont aucun trait de monstruosité, pas d'avantage de caractère de malignité. Elles ont la grâce et l'allure idéale qui seront plus tard  celles des anges, dans les différentes voûtes d'anges musiciens (Le Mans, Kernascléden). Enfin,surtout la présence d'un instrument traditionnellement affecté au culte marial, la trompette marine, est troublante. Cela m'inciterait à ne pas écarter trop vite la possibilité d'une peinture sinon religieuse, du moins d'incitation à la méditation. S'agit-il d'une représentation d'un concert spirituel, où les sirènes, êtres surnaturels,  assimilées aux fées, deviennent les intermédiaires quasi-angéliques donnant accès à la musique divine ? S'agit-il d'une reflexion sur le caractère emminement ambiguë de la musique, qui procure à la fois le plaisir des sens (ouvrant le chemin de la perdition) et l'élévation vers le Beau idéal, donc vers Dieu ?  S'agit-il, pour le prélat et son clergé, d'une incitation à la vigilance impérieuse à l'égard des péchés de la chair ? On le voit, la peinture n'est pas forcément aussi profane qu'on a pu le croire.

S'agit-il, aussi, tout simplement, d'une transposition sur les murs du Bestiaire d'amours de Richard de Fournival ? S'il semble évident que l'ensemble des voûtes de la pièce étaient peints, l'absence de renseignements sur les scènes adjacentes ne permettent pas de conclure.

Cela me permet d'échapper à la diabolisation de ces "seraines", et de me laisser porter par leurs charmes et par la beauté de leurs instruments. Comme ils ne résonnent plus sous les voûtes, il sera inutile de m'attacher, tel un Ulysse, au pilier central.

 

 

 

DOCUMENTATION.

I. La peinture murale.

La peinture murale est souvent désignée sous le terme de "fresque". Or, ce dernier ne définit que l'une des techniques de la peinture monumentale, par opposition à la technique à sec. Ces deux techniques peuvent être associées, on parle alors de "technique mixte". 
A la fin du Moyen Âge, la plupart des peintures murales relèvent de la technique "à sec" sur badigeon.

La peinture à fresque, a fresco

Elle est réalisée sur un enduit frais à base de chaux sur lequel le peintre applique les pigments délayés dans de l'eau. En séchant, la carbonatation de la chaux permet aux pigments de se fixer dans l'enduit. Cette technique nécessite donc une exécution rapide et une parfaite maîtrise, mais confère à la peinture une grande solidité dans le temps.

La peinture à sec, a secco.

C'est le cas de cette peinture, des traces de casèine ont été retrouvées sur les murs de la porterie de Beauvais

Elle est exécutée sur un enduit sec et la fixation des couleurs est obtenue par l'addition, aux matériaux de base, de substances d'origine animale (caséine, collagène) ou végétale (huile de lin ou de noix), communément appelées "liants".
Une large palette de pigments pouvait être utilisée : les ocres rouge et jaune, le blanc généralement obtenu à partir de plomb, et le noir à partir de la fumée issue de la calcination de bois ou d'os. Les verts et les bleus les plus courants provenaient du cuivre, comme par exemple le résinate.

La peinture monumentale est constituée d'une succession de strates disposées sur un support (un mur, un lambris, une cloison en pan-de-bois ou bien les solives d'un plafond…).

Une couche d'enduit, à base de chaux ou de sable, y est posée. L'enduit peut également être composé de plâtre et de torchis parfois trouvés en mélange.
Un badigeon, directement appliqué sur le support ou sur l'enduit, est constitué de chaux plus ou moins délayée dans de l'eau ; des liants et des charges minérales peuvent lui être ajoutés. Généralement de couleur blanche, le badigeon est parfois recouvert d'un autre badigeon coloré, jaune, plus rarement rouge.
Sur ces couches, le peintre applique enfin les couleurs.

 

Iconographie.

Les sirènes ont probablement été peintes dans les années 1310-1320, peu de temps après l’érection des tours. Les visages allongés, les longs cheveux blonds et la poitrine pendante rappellent les sirènes du bestiaire d’Amour de Richard de Fournival, exécuté en Picardie au début du XIVe siècle Dijon, Bibliothèque municipale, ms. 526, fol. 23v°.

 Symbole de débauche et de tentation, les sirènes rappelaient dans les bestiaires la nature illusoire et trompeuse des vices.

"Il y a trois sortes de sirènes, deux sont moitié femme, moitié poisson. La troisième est moitié femme, moitié oiseau. Elles chantent toutes trois ensemble, l'une avec trompette, l'autre sur harpe, la troisième avec la voix. Et leur mélodie est tellement plaisante que personne ne les entend sans s'approcher. Et quand les hommes sont pris, elles les endorment. Et quand elles les trouvent endormis, elles les tuent."

"Tant estoit cil chanz douz et biaus, 
Qu’il ne sembloit pas chanz d’oissiaus
Ainz le poïst l’en aesmer
As chanz de sereines de mer, 
Qui par les voies qu’eles ont saines
Et series ont non seraines. "
(Il était si beau et doux, ce chant, qu’il ne semblait pas être un chant d’oiseaux, mais qu’on aurait pu le comparer au chant des sirènes de mer, que l’on appelle ainsi à cause de leur voix qu’elles ont claire et sereine.) 

Richard de Fournival, Bestiaire d'amours, Bnf Fr 15213 folio 70 :

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Richard de Fournival Bestiaire d'amours Bnf fr.412 folio 230v:

 

Bestiaire d’Amour de Richard de Fournival, Dijon, Bibliothèque municipale, ms. 526, fol. 23v°.
Bestiaire d’Amour de Richard de Fournival, Dijon, Bibliothèque municipale, ms. 526, fol. 23v°.

Bestiaire d’Amour de Richard de Fournival, Dijon, Bibliothèque municipale, ms. 526, fol. 23v°.

Les échecs amoureux, Bnf 143 folio 130, vers 1496

 

La sirène tenant le peigne et le miroir, attributs de Vénus témoignant de sa nature débauchée et des dangers de la séduction féminine. Bnf fr.411 vers 1480

 

  

 

 

 

SOURCES ET LIENS.

VICTOIR (Géraldine ) 2007,  , Doctorante au Courtauld Institute of Art, Londres Profane ou religiuex ? Le choix des sujets dans les demeures des laïcs et ecclésiastiques en Picardie au XIVe siècle, Journée d'étude de la Collégiale Saint-Martin, Le décor peint dans la demeure au Moyen-Âge. 16 novembre 2007.

http://expos.maine-et-loire.fr/culture/peintures_murales/medias/pdf/geraldine_victoir.pdf

— http://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Beauvais/Beauvais-Musee-departemental-de-l-Oise.htm

BLANCHARD (Vincent) Les sirènes musiciennes, vidéo 

http://www.cndp.fr/crdp-amiens/cddpoise/actualites/autour-de-l-education/135-sirenes-musiciennes.html

— exposition Bnf : http://expositions.bnf.fr/lamer/bornes/feuilletoirs/sirenes/33.htm

Marie- Pasquine Subes  Un décor peint vers 1370-1380 à la cathédrale du Mans [compte rendu] Bulletin Monumental  Année 1998  Volume 156  Numéro 4  pp. 413-414 

http://www.persee.fr/doc/bulmo_0007-473x_1998_num_156_4_1850000

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Published by jean-yves cordier - dans Beauvais
27 octobre 2015 2 27 /10 /octobre /2015 08:24

La lettre de Soliman le Magnifique à François Ier. Exposition Le siècle de François Ier au Jeu de Paume de Chantilly. Ma découverte des "Tughra".

Sur cette exposition, voir :

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La lettre en entier.

http://lionel.le.tallec.free.fr/2/TH/Enigme12/bismarklettre.jpg

Détail de la lettre.

 

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Il s'agit d'un rouleau de papier entoilé de 2,04 m de haut sur 35,5 cm de large  conservé à la Bnf sous la référence Supplément turc 822. Une succession de lignes d'écriture arabe tantôt à l'encre noire ou tantôt à la peinture dorée encadrent deux motifs calligraphiques bleus rehaussés de poudre d'or. Il porte la mention Istanbul, 14 serval 942 H6 avril 1536) 

L'élément bleu qui ressemble à une tête de crevette ou de shadok malicieux est le monogramme du sultan Soliman le Magnifique : le tughra (ou toghra). 

 

Ce document fait partie du groupe de lettres adressées par le sultan Soliman au roi de France François Ier entre 1525 et 1543. Le sultan entretenait aussi une correspondance avec différents éminents interlocuteurs européens, reflet du rôle de l’empire ottoman dans le Bassin méditerranéen au XVIe siècle. Dans le cadre de ces échanges diplomatiques, les drogmani (interprètes) jouaient un rôle de premier plan.  En 1536, l'ambassadeur Jean de la Forêt négocia des Capitulations, des accords commerciaux, sur le modèle de celles contractées entre la Sublime Porte et les villes de Venise (1540) et de Gênes. La première Capitulation a été conclue entre le vizir Ibrâhîm Pasha et l’ambassadeur.

Cette lettre avait été précédée d'une autre lettre de même format, datée de février 1526, dans laquelle le Sultan se déclarait prêt à aider François Ier, le Roi de France, emprisonné et son pays envahi, afin qu’il puisse en être libéré. (voir en annexe).

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La lettre.

L’administration, de plus en plus organisée sous le règne de Soliman (Süleyman  Kanuni, "le Législateur") , assiste le pouvoir central incarné par le sultan et le diwân, conseil suprême de l’État dirigé par le Grand Vizir. Une importante bureaucratie est au service de la chancellerie et la rédaction des documents officiels était confiée à des secrétaires oeuvrant par spécialité.  Les lettres sont toujours rédigées selon le même plan : invocation, titulature, contenu. 

a) Invocation et titulature.

La lettre  débute par une formule d’invocation et l’énoncé de la titulature du sultan :  quatre lignes dorées sont calligraphiées selon le mode  thuluth. Le thuluth (ثلث) est un style calligraphique inventé par Ibn Muqla pour les langues utilisant l'alphabet arabe. Considéré comme l'un des six styles canoniques de la calligraphie arabe, il se caractérise par de hautes hampes et est souvent utilisé pour les titres.

b) Le contenu

 Ses quatorze lignes sont rédigées en écriture dîwânî noire. L’écriture dîwânî, avec ses lettres serrées pour éviter les contrefaçons, est particulièrement utilisée pour les documents officiels. Le bilan de la campagne victorieuse d’Irak contre les Safavides est rapporté au roi de France. S’ensuit une partie consacrée à la réception de l’ambassadeur Jean de la Forêt par le diwânet à l’installation d’un ambassadeur permanent à Istanbul. (Jean de La Forest,  Abbé de Saint-Pierre-le-Vif à Sens, pro notaire et secrétaire du roi François Ier, il fut premier ambassadeur de France en Turquie de 1525 à 1538.)

c) La tughra.

Les Tuğra sont apparus à peu près en même temps que les signatures en Europe dans tous les États de culture turque, 

Le monogramme impérial ("Tuğra",  « tughra » ou « tugra » (en arabe : طغراء), ) enluminé en bleu et doré est apposé entre les deux parties du texte. Le nom du sultan rédigé en gros caractères naskhî vient occuper un large espace au-dessus des deux dernières lignes du texte. Les styles thuluth et naskhî appartiennent aux six styles de calligraphie (Aklâm-i sitta) apparus après la réforme mise en œuvre à l’époque abbasside, abondamment utilisés dans la calligraphie ottomane notamment dans les corans. 

L’élément le plus frappant de ce document est la tughra, qui ressort spectaculairement de la feuille.

La sere. est placé dans la partie basse. Elle comporte les lettres principales du nom du sultan, son titre, la kunya (« père de ») et, depuis  Mehmed II (1444-1481),  la formule al-Muzaffar da'iman « toujours victorieux ». On lit ici  Suleyman shah bin Selim shah han el-muzaffer daima  "Soliman, le fils de Selim, toujours victorieux".  La sere  est réalisée par un secrétaire spécialisé (tugrakes), d’après un dessin du nisanci, un membre titulaire du diwân. L’enluminure y apparaît dès le XVIe siècle pour les documents importants.

Ici, le sere bleu et or , un groupe de lettres formant le nom,  est décoré d’enroulements végétaux dorés ornés de petits motifs foliés et fleuris complétés par un semis de motifs en « s » évoquant des nuages tchi. On reconnaît le répertoire utilisé dans les ateliers ottomans dès le second quart du XVIesiècle, et qui apparaît abondamment sur la céramique d’Iznik. Le style « tughra » désigne d’ailleurs une série de pièces ornées de motifs concentriques bleus agrémentés de feuilles et de fleurs. Quant aux nuages tchi d’origine chinoise, abondamment représentés dans l’art timuride au XVe siècle, ils sont présents sur divers supports des arts décoratifs ottomans : céramique de la première moitié du XVIe siècle, textiles, reliures,...

La sere est complété par  :

  • les beyze (larges boucles à gauche du nom), en turc «œuf» ou "ovale". Selon certaines interprétations de la conception de la tughra , les beyze symbolisent les deux mers sur lesquelles les sultans exercent leur domaine: le cercle extérieur, plus large, est la mer Méditerranée et l'intérieur, plus petite, sur la mer Noire. 
  • les tugh ("hampes" ), sont les lignes verticales sur le haut de la tughra. Les trois tugh signifient l' indépendance. Les lignes en forme de S traversant les mâts sont appelés zülfe et elles rappellent que les vents soufflent de l'est à l'ouest, le mouvement traditionnel des Ottomans.
  •  les kol ou hancer  sont les deux lignes verticales représentant une épée ou un poignard,  symbole de pouvoir et de force. 

 

 

 

Source : http://www.bleublancturc.com/Turqueries/Soliman.htm /  Wikipédia.

 

 

http://www.offi.fr/expositions-musees/chateau-et-musee-de-la-renaissance-1798/francois-ier-et-soliman-le-magnifique-34900.html

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http://expositions.bnf.fr/montesquieu/albums/orient/

 

 

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Les photos que j'ai pu prendre lors de ma visite de l'exposition le 25 octobre 2015 se sont avérés de piètre qualité, notamment en raison du faible éclairage du document. Dire que les images sont disponibles sur Gallica ! Je l'ai découvert lorsque j'avais terminé cet article ! 

Néanmoins je  partagerai généreusement en ligne mes clichés...

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Le tughra de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Le tughra de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

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La lettre comporte un autre élément calligraphique en encre ou peinture bleue, mais à propos duquel je n'ai pas trouvé d'informations.

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Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Les lignes d'écriture dîwânî noire .

 

Lignes 7 et 8 puis 9 et 10,  Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.
Lignes 7 et 8 puis 9 et 10,  Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Lignes 7 et 8 puis 9 et 10, Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Lignes 12 et 13, Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.
Lignes 12 et 13, Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Lignes 12 et 13, Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

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Ligne 14, Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Ligne 14, Lettre de Soliman le Magnifique, 1536, Bnf Suppl. turc 822, photo lavieb-aile.

Quelques Tughras.

 

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Document. La traduction de la lettre de février 1526 de Soliman à François Ier.

Lettre du Sultan Soliman le Magnifique dans laquelle il affirme être prêt à aider François Ier, le Roi de France, emprisonné et son pays envahi, afin qu’il puisse en être libéré.
1526

Allah le Très-Haut, Celui qui donne, Celui qui enrichit, Celui qui aide
Avec la diligence d’Allah gloire à Son Pouvoir, que Sa parole soit la plus haute,
Et avec les miracles du maître des Prophètes, le modèle du groupe des purs, Muhammad l’élu (SAAWS), celui qui est doté d’une barakah immense, avec le soutien des quatre âmes saintes, Abî Bakr, ‘Umar, ‘Uthmân et ‘Alî, qu’Allah soit satisfait d’eux tous et de tous les proches d’Allah.

Toghra [Monogramme İmpérial]
[Soliman, le fils de Selim, toujours victorieux]

Moi, qui suis le sultan des sultans, le souverain des souverains, le distributeur des couronnes aux monarques de la surface du globe, l'ombre de Dieu sur la terre, le sultan et le padichah de la Mer Blanche (Méditerranée), de la Mer Noire, de la Roumélie, de l'Anatolie, de la Province de Karaman, de la Province de Sivas, de la Province de Zülkadriye (Maraş), de la Province de Diyarbakir, du Kurdistan, de l'Azerbaïdjan, de la Perse (de l’Iran), de Damas, d’Alep, de l’Egypte, de Mecque, de Médine, de Jérusalem, de l’Arabie, du Yémen et de plusieurs autres contrées que mes nobles aïeux et mes illustres ancêtres conquirent par la force de leurs armes, et que mon auguste majesté a également conquises avec mon glaive flamboyant et mon sabre victorieux, sultan Suleiman-Khan (Sultan Soliman le Magnifique). Toi qui es François, le roi du pays de France. Vous avez envoyé une lettre à ma Porte, asile des souverains, par laquelle vous avez fait savoir que l'ennemi s'est emparé de votre pays, et que vous êtes actuellement en prison, et vous avez demandé ici aide et secours pour votre délivrance. Prenez donc courage, et ne vous laissez pas abattre. Il n'est pas étonnant que des empereurs soient défaits et deviennent prisonniers. Sachez que comme l’ont fait nos glorieux ancêtres et nos illustres aïeux ; moi aussi, ceint de mon sabre, je ne m’abstiens pas de faire des expéditions et des conquêtes. Je suis prêt en tout temps à guerroyer. Seule est exécutée, chose voulue par Allah. Vous apprendrez de votre agent (ambassadeur) ce que je ferais. 1526, İstanbul.

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ET APRÈS ?

Petits collés wikipédiesques à visée didactique :

 

EN 1532 : Antoine de Rincon / Janus Bey.

L'ambassadeur de France Antoine de Rincon semble avoir traité  avec Janus Bey, diplomate et interprète de Soliman le Magnifique  un sauf-conduit pour une ambassade du gouverneur ottoman d'Alger en 1532.

 

En 1538 : Antoine de Rincon, ( francisation de l'espagnol Antonio Rincón ) Seigneur de Germolles (Bourgogne), devient Ambassadeur de France auprès de la Sublime Porte  entre 1538 et 1541, chargé de renouveler l’alliance avec Soliman le Magnifique. Il est assassiné avec César Fregoso sur le Pô aux environs de Pavie sur ordre de l'empereur par le gouverneur du Milanais, Alfonso de Avalos (1502-1546), marquis del Vasto. Cet assassinat soulève une très grande émotion dans toutes les cours d'Europe.

 

Décembre 1541 :   François Ier décida alors d'envoyer auprès de Soliman Antoine Escalin des Aimars, dit Polin, né et mort à La Garde-Adhémar (1498?-1578) baron de La Garde-Adhémar, seigneur de Pierrelatte, Général des Galères du Roi de France, et commanditaire de la première Réale (vaisseau amiral de la flotte française). Il le charge de nouer avec lui une alliance militaire contre Charles Quint, dès décembre 1541, à la suite de la défaite de Charles-Quint au Siège d'Alger (1541).

Antoine Escalin se rend auprès de la Sublime Porte, porteur du projet de François Ier d'assaillir l'empereur Charles Quint de tous côtés, en « Ongrye », « Flandres », et « Espaigne ». Il convainc ainsi Soliman II d'envoyer auprès de François Ier Kheir-el-Din, dit Barberousse, en 1543.

Devenu le 21 mai 1542 « lieutenant général en […] l’armée de mer du Levant » du roi de France par lettre de chancellerie royale, il se retrouve de fait placé à la tête d'une entreprise qui choque toute la Chrétienté. Parti au printemps 1543 de Constantinople vers les côtes françaises, accompagné d'au moins 110 galères turques7 et de 27 000 hommes (Ottomans et de la régence d'Alger), il arrive au large de Cannes en juillet 1543. Afin de détourner la colère de Barberousse, furieux d'observer que rien n'avait été préparé sur place pour le confort de ses hommes, il obtient de François Ier la possibilité de mener à bien le siège de Nice, qui doit servir d'exutoire à la colère barbaresque.

À la suite de l'échec du siège de Nice, levé le 8 septembre 1543, il réquisitionne la ville de Toulon et en chasse les habitants : les hommes de Barberousse s'y installent jusqu'au printemps 1544.

Le chef barbaresque, plus furieux encore du fait que lui et ses hommes s'étaient vu refuser le droit de faire butin à Nice, exige d'Antoine Escalin qu'il le laisse rentrer auprès de son maitre, Soliman II, et qu'il l'accompagne. Antoine Escalin venait alors d'être nommé, en avril 1544, Général des Galères par le roi de France.

Cette dernière expédition à Constantinople nous est connue par un journal que tint l'aumônier de la Réale, navire amiral d'Antoine Escalin, nommé Jérôme Maurand, originaire d'Antibes.

Les Turcs pillèrent les côtes italiennes, avant que, par prudence, Antoine Escalin ne se détache de la flotte avec ses quelques bâtiments chrétiens afin de s'entretenir directement avec Soliman II avant l'arrivée de Barberousse à Constantinople. Il craignait que le rapport que ce dernier pourrait faire de son séjour en France n'entraine sur lui le courroux du sultan.

Les navires français quittèrent la capitale ottomane en septembre 1544.

 

 

— 28 décembre 1546, Compiègne, Aramon / Janus Bey.

 Lettre de François 1er au grand drogman « Janus Bei », Compiègne, 28 décembre 1546, Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms. Occid. N.a.f. 7974, f. 1-2.Lettre  remise par Gabriel de Luetz. et contresignée par le secrétaire d'État Claude de L'Aubespine (coin en bas, à droite) 

Magnifique Seigneur par le Sr daramon n[ot]re conseiller et Maistre d'hostel ordinaire prñt porteur nous avons entendu la grande et bonne affection que avez envere nous et combien vous vous emploié..et de bon coeur. sieur Janus Bei, grant droguement du Grant Seigneur, 

1546 : Gabriel de Luetz.

Nommé officiellement par François Ier ambassadeur en 1546, en remplacement de son prédécesseur, Antoine Escalin des Aimars, Gabriel de Luetz connait déjà l'Empire ottoman en raison d'une mission antérieure en Turquie. C'est lui qui fit conclure, sous l'inspiration du pape Paul III, l'alliance entre Soliman II et le roi de France, contre laquelle Charles Quint poussa de si hauts cris. Il est resté célèbre parmi les diplomates français au Levant pour avoir accompagné Soliman le Magnifique dans sa longue et difficile campagne de Perse de 1548 à 1549, équipée relatée par un homme de sa suite, Jean Chesneau, dans son Voyage de Monsieur d'Aramon.

Gabriel de Luetz rejoint son poste à la Sublime Porte, accompagné par une vaste suite de scientifiques, Jean de Monluc, le botaniste Pierre Belon, le naturaliste Pierre Gilles d'Albi, le cosmographe André Thévet, le voyageur Nicolas de Nicolay qui publièrent leurs conclusions à leur retour au France et contribuèrent grandement au développement de la science en France pendant la Renaissance.

En 1547, lorsque Soliman le Magnifique attaque la Perse au cours de la deuxième campagne de la guerre entre Ottomans et Safavides, la France lui envoie l'ambassadeur Gabriel de Luetz pour l'accompagner dans sa campagne. Dans le cadre de l'Alliance franco-ottomane, Gabriel de Luetz donne des conseils militaires essentiels à Soliman, notamment lorsqu'il le conseille sur l'emplacement de l'artillerie au cours du siège de Van.

En 1551, le roi Henri II de France envoie l'ambassadeur Gabriel de Luetz depuis Marseille avec deux galères afin de rejoindre la flotte ottomane devant le port de Tripoli en Afrique du Nord. Officiellement il doit intervenir pour faire cesser le siège de la ville, tenue par l'Ordre de Malte, ce dernier n'étant pas alors reconnu comme ennemi de l'Alliance franco-ottomane contre les Hasbourg. Mais il ne peut qu'assister au siège de la ville et à sa prise par le grand amiral ottoman, Sinân Pacha. À cette occasion, l'ambassadeur obtint de ses alliés la grâce des Chevaliers de Malte qui avaient tenu la place. Son rôle sera par la suite très critiqué par Charles Quint et le pape Jules III, l'accusant d'avoir favoriser la chute de la ville.

À la fin de l'année 1551, Gabriel de Luetz, possédant une parfaite connaissance de l'Orient et ayant acquis une exceptionnelle expérience du pays et de ses gouvernants, rejoint la cour de Soliman à Edirne.

Gabriel de Luetz meurt en 1553 ou 1554 de retour en Provence, et son poste d'ambassadeur est transmis à .Michel de Codignac

SOURCES ET LIENS.

— Gallica : la lettre de Soliman, Supplément turc 822 :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84150019/f5.image.r=.langFR.zoom

http://www.qantara-med.org/qantara4/public/show_document.php?do_id=830

— Tughra : http://squarekufic.com/2015/05/07/tughra-the-unbearable-beauty-of-a-signature-and-its-custumization/

— Le site des tughra : http://tugra.org/en/index.asp

— http://cihanhukumdari.istanbul.edu.tr/Kanuni-Sultan-Suleyman-Fransa-Krali-Fransuva-Mektup.html

— https://fr.wikipedia.org/wiki/Alliance_franco-ottomane

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Published by jean-yves cordier - dans Chantilly
26 octobre 2015 1 26 /10 /octobre /2015 23:22

Les Grecs du roy de Claude Garamont. Exposition Le siècle de François Ier du 7 septembre au 7 décembre 2015 au Jeu de Paume de Chantilly.

Claude Garamont ! Un nom qui éblouit les amoureux de typographie, un nom célèbre et qui, accolé en mot-valise à celui du vénitien Alde Manuce, a baptisé les "garaldes" ou elzévirs, ces polices typographiques à sérif (c'est à dire à empâtements) qui figurent dans votre logiciel de traitement de texte. La police dite "Garamond" (avec un -d) dérive des caractères romains que Claude Garamont (avec un -t) créa pour remplacer les caractères gothiques, et qui s'imposèrent à la cour du roi, puis dans l'Europe entière. C'était au début des années 1530 pour l'imprimeur Claude Chevallon, chez qui il travaillait, et vivait.

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Mais entre 1543 et 1555, à la demande de François Ier, il grava les caractères destinés à imprimer des textes en grec. Ses poinçons portent le nom légendaire de "Grecs du Roy", et ce sont eux, classés Monument historique (en 1946), que j'ai eu la chance d'admirer lors de ma visite de l'exposition Le Siècle de François Ier. Matrices et poinçons sont ordinairement conservés à l'Imprimerie Nationale (boîte 46 à 49).

n.b : j'ai bien-sûr utilisé la police Garamond pour cet article.

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Les 1327  poinçons  sont contenus en douze lignes dans une boîte en bois et comportent trois séries, pour trois tailles (on dit "trois corps") différentes : les corps 9, 16 et 20. Comprenez que l'œil du caractère (sa partie imprimante) et les espaces utiles du dessus et du dessous (talus de tête et talus de pied) valent 9, 16 et 20 points. Ces "points typographiques" de 0,376 mm par unité n'existaient pas alors, et il est préférable de dire que Garamont grava trois corps différents entre 1543 et 1550 : d'abord un corps moyen, ou « gros romain», puis  un petit corps, ou « cicéro », en 1546, et enfin un gros corps, ou « gros parangon », en 1550. 

Pour les dessiner, Garamont a suivi exactement le modelé de l’écriture grecque et les multiples ligatures d'Ange Vergèce, lettré et calligraphe crétois actif à Venise entre 1530 et 1538 puis en France où il est chargé de la collection royale des manuscrits grecs de Fontainebleau. Sous la supervision de Pierre Duchâtel, grand aumônier de François Ier et « maître de la librairie » (bibliothécaire du roi), cette collection passe sous le règne de François Ier d'une cinquantaine de volumes à plus de cinq cents. Le roi, conseillé par Guillaume Budé, voulait  faire de son pays le centre des études humanistes, et décida de faire imprimer ces manuscrits. Le Ier mai 1542, l'imprimeur du roi Robert Estienne reçut la somme de 225 livres tournois afin de la remettre à Claude Garamont en paiement de "poinsons de lettres grecques". Ces caractères, qui imitent l'écriture manuscrite, dépassaient largement, par leur beauté, les caractères grecs dessinés par Geoffroy Tory, ou ceux d'Alde Manuce. Ils se caractérisent par un nombre très important d'esprits, d'accents et de ligatures, qui les rendent très agréables à l'œil mais difficiles à composer.


 

 Si Pierre Duchâtel semble être intervenu au départ dans le choix des caractères, Claude Garamont travaille surtout sous la direction d’Ange Vergèce qui fixe le nombre et la grandeur des lettres, le travail de taille des poinçons et de frappe des matrices se faisant « sous la conduite et jugement» de l’« escripvain en lectre grecque pour le Roy ».

 

 

Page de titre de l'Hexameron copié par Ange Vergèce (Paris Maz. : Ms. 4452).

 

 

 

 

 

"Grecs du roy" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

"Grecs du roy" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

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Les lettres capitales sont influencées par les caractères romains déjà gravés par Garamont. Une des particularités de ces lettres est l’introduction des accents et des esprits à l’aide de lettres crénées. La virtuosité de Garamont est manifeste dans les ligatures et le traitement des abréviations.

 

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1. Le gros corps, ou « gros parangon » ou Palestine Gk150 de 1550 :

Première apparition dans le Novum Testamentum Graece 1550.

on y trouve les lettres capitales  à droite ΩΨXΦΥΤΣΡ*ΠΟΞΝΜΛΚΙΘΖΕΔΓΒΑ, les chiffres à gauche, et les ligatures en dessous.

 

 

 

"Grecs du roy" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.
"Grecs du roy" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

"Grecs du roy" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

"Gros parangon, "Grecs du roi" de Claude Garamont, in Vervliet 2008.

"Gros parangon, "Grecs du roi" de Claude Garamont, in Vervliet 2008.

Les poinçons des « Grecs du Roi » gravés, par Claude Garamont, à la demande de François Ier d'après le manuscrit d'Ange Vergèce.
Les poinçons des « Grecs du Roi » gravés, par Claude Garamont, à la demande de François Ier d'après le manuscrit d'Ange Vergèce.

Les poinçons des « Grecs du Roi » gravés, par Claude Garamont, à la demande de François Ier d'après le manuscrit d'Ange Vergèce.

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2. Le corps moyen (corps 16) ou "gros romain" de 1543, Gk 118: 

 

 

Gros Romain de Garamont, in Vervliet 2008

Gros Romain de Garamont, in Vervliet 2008

"Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.
"Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

"Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

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"Le vol des Grecs du Roi

Gardien des matrices des Grecs du Roi, Robert Estienne en emporte un jeu complet à Genève. En 1569, son fils Robert II, en récompense de son retour à Paris et son abjuration de la foi protestante, se voit confier à son tour la garde des matrices. Mais, la tourmente des guerres de Religion efface bientôt leur trace en France. En revanche, à Genève, Henri II, autre fils d’Estienne, lourdement endetté, engage les matrices en sa possession contre 400 écus d’or.

Louis XIII, préoccupé de restaurer l’autorité royale, s’intéresse personnellement au destin des types royaux. Ses envoyés négocient le rachat des matrices avec Paul Estienne, fils d’Henri II, mais la surenchère de l’ambassade d’Angleterre fait échouer une première négociation. Un arrêt royal du 27 mars 1619, à la demande du clergé de France, réclame solennellement le retour des matrices en France ; une lettre de Louis XIII au conseil de la République de Genève vient appuyer cette requête. Enfin récupérées, après diverses autres péripéties, les matrices grecques sont confiées à l’Imprimerie royale, après 1640." 

http://www.garamond.culture.fr/fr/page/le_vol_des_grecs_du_roi

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"Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

"Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

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3. Le petit corps ou Cicero (1546),  Gk 80.

Cicero de Garamont 1546, Alphabetum graecum, in Vervliet 2008.

Cicero de Garamont 1546, Alphabetum graecum, in Vervliet 2008.

Cicero, "Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.
Cicero, "Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

Cicero, "Grecs du roi" de Claude Garamont, Imprimerie Nationale, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

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Le premier livre imprimé avec les types grecs de Garamont est un alphabet grec (Alphabetum gracecum) publié en 1543, véritable plaquette publicitaire où l’on retrouve toutes les lettres et toutes les ligatures correspondant au premier corps gravé, le corps moyen. Pour chaque nouveau corps gravé, Robert Estienne publie un alphabet : en 1548, pour le cicéro, en 1550 pour le gros parangon (avec les deux précédents). 

1550, Bnf

 

 

En 1544, Robert Estienne étrenne les nouveaux caractères du "gros romain" pour l'impression de  l’Histoire ecclesiastique d’Eusèbe de Césarée (Eusebius, Ecclesiasticae historiae, 1544). Robert Estienne y rédige une épître dédicatoire à François Ier : « … il a ordonné aux ouvriers les plus habiles d’exécuter des caractères de forme moderne et élégante. Avec ces caractères, les plus beaux ouvrages, imprimés avec soin et multipliés à l’infini, se répandront dans toutes les mains, et déjà nous en livrons au public un spécimen en langue grecque. »
Puis il publie la même année 1544 la 
Préparation évangélique, (Εὐαγγελικῆς Ἀποδείξεως Προπαρασκευή) également d'Eusèbe, en se basant sur les manuscrits conservés à Fontainebleau. Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia.

Le visiteur de l'exposition peut admirer le livre XV de l'Evangelicae Praeparationis, issu de la bibliothèque et archives du château de Chantilly VIII-H-004 :

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Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.
Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

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 Dans la Préparation évangélique (Εὐαγγελικῆς Ἀποδείξεως Προπαρασκευή), un ouvrage en quinze livres, dont l'entièreté a été conservée, Eusèbe vise à prouver la supériorité du christianisme sur le paganisme d'un point de vue philosophique. L'auteur y passe en revue les théologies phénicienne, égyptienne, hellénique, les oracles, la philosophie, prenant les païens du passé à témoin de la supériorité du christianisme. L'œuvre est surtout un recueil d'extraits d'auteurs des siècles précédents, des textes qui sont souvent préservés seulement par Eusèbe. 

Cette pieuse publication peut cacher de la part de l'imprimeur un dessein contestataire. Robert Estienne penchait pour la Réforme, et malgré l'appui du roi, ses adversaires cherchaient à l'accuser d'hérésie, si bien qu'il dut partir en 1552 à Genève, où il embrassa pleinement la foi calviniste. Par sa publication d'Eusèbe, il donne accès à des textes philosophiques de l'Antiquité qui n'étaient pas disponibles auparavant. Notamment, un texte pyrrhonien (septicisme) avait été omis par Georges Trébizonde lorsque ce dernier avait traduit la Préparation évangélique d'Eusèbe en latin en 1470. Estienne publia l'intégralité du texte d'Eusèbe, et, plus tard, lui et sa famille publièrent les textes pyrrhoniens et participèrent à leur diffusion.

 

Pour le disciple de Pyrrhon, Timon de Phlionte (vers 280 av. J.-C.),

« Il faut demeurer sans opinions, sans penchants et sans nous laisser ébranler, nous bornant à dire de chaque chose qu'elle n'est pas plus ceci que cela ou encore qu'elle est en même temps qu'elle n'est pas ou bien enfin ni qu'elle est ni qu'elle n'est pas. Pour peu que nous connaissions ces dispositions, dit Timon, nous connaîtrons d'abord l' "aphasie" (c'est-à-dire que nous n'affirmerons rien), ensuite l' "ataraxie" (c'est-à-dire que nous ne connaîtrons aucun trouble) » (Eusèbe de Césarée, Préparation évangélique, XIV, 18, 2).

 

Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.
Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

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Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.
Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Paris Robert Estienne, 1544, photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

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L'exemplaire conservé à Chantilly est relié de maroquin rouge à décor doré et à tranches dorées et ciselées : reliure italienne (bolonaise ?) de 1546 :
Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Château de Chantilly, , photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

Eusèbe de Césarée, Evangelicae praeparationis libri XV, ex Bibliotheca Regia, Château de Chantilly, , photographie lavieb-aile lors de l'exposition à Chantilly octobre 2015.

 

 

DOCUMENTATION.

Quelques découpages de la toile...

Ligatures

 

Les ligatures de l'alphabet grec sont des combinaisons graphiques de certaines lettres de cet alphabet. Fréquemment utilisées dans l'écriture manuscrite du grec au Moyen Âge et au début de l'imprimerie, leur usage a décliné à partir du XVIIe . Une ligature, c'est le fait de coller deux lettres pour réduire la place, pour l'esthétisme, pour changer la prononciation ou tout simplement pour éviter que les caractères en plomb ne s'entrechoquent et ne se brisent. Il y en a encore quelques-unes aujourd'hui, principalement fi et fl (et dans une moindre mesure ff, ffi et ffl). Le grec de l'époque avait beaucoup plus de ligatures que le latin (près de 200 chez Robert Granjon, près de 400 chez Claude Garamont). L'objectif était de se rapprocher au maximum du grec cursive/manuscrit. 

 

—ligatures de trois lettres :

  • Kai (Ϗ, ϗ) : ligature pour le terme grec καὶ (kaì, « et »). 
  •  men ;

— ligatures de deux lettres : 

  •   Stigma (Ϛ, ϛ) : ligature d'un sigma lunaire, C, et d'un tau, T, qui, en onciale, se traçait CT. 
  • Ou (Ȣ, ȣ) : ligature d'un omicron, ο, et d'un upsilon, υ, placés l'un sur l'autre.
  • epsilon-iota
  • delta-iota
  • etc...

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Imprimer le grec.

Longtemps, les passages ou mots grecs étaient écrits à la main après impression du texte en latin.

Les premiers caractères grecs firent leur apparition sous forme de quelques lignes dans un texte latin  à Mayence en 1465, imprimés par Johann Fust et Peter Schoeffer  dans le De officiis de Cicéron.

Le premier livre imprimé en grec est paru à Milan en 1476. Une police de caractères (connue en typographie informatique sous le nom de Milan Greck)  sortit des ateliers de typographie milanais. 

D'autres donnent la préséance au Batrachomyomachie de Tommasso Ferrando, paru à Brescia en 1474.

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La source des manuscrits grecs : l'empire byzantin ; le cardinal Bessarion.

La prise et le pillage de Constantinople par la 4ème croisade en 1204 creusa le fossé avec l’Occident, endommagea les bibliothèques survivantes et empêcha les érudits italiens de continuer à rapporter des manuscrits grecs vers l’Occident. Après la fin du royaume latin de Constantinople en 1261, la récupération des textes grecs reprit et dans les débuts de la Renaissance, des humanistes majoritairement italiens continuèrent à vider les bibliothèques byzantines, soutenus par les relations des empereurs de Byzance avec l’Italie, en particulier le Royaume Normand de Sicile où résidaient de très nombreux Grecs.

Jean Bessarion très engagé dans la défense du platonisme, doctrine apte à réconcilier l’héritage antique avec la pensée chrétienne, devint métropolite de Nicée en 1437. Partisan des plus convaincus de l’union des Églises, il accompagna l’empereur byzantin Jean VIII Paléologue (1425-1448) et le patriarche Joseph II au Concile de Ferrare-Florence en 1438-1439.  Unir la chrétienté divisée constituait à ses yeux la condition nécessaire pour conduire une croisade qui puisse libérer Byzance de la menace des Turcs ottomans. Son intervention incita le pape Eugène IV à l’élever au rang de cardinal de l’Église latine. À l’exception d’une visite en Grèce en 1443, le cardinal Bessarion passa le reste de sa vie en Italie et mourut à Florence en 1472.  Il fut nommé en 1463 patriarche latin de Constantinople. En parallèle de sa carrière d’ecclésiastique et de théologien, Bessarion était également un des maîtres de l’humanisme helléniste et un philosophe. Cet érudit était à la tête d’une académie de Rome au sein de laquelle de nombreux auteurs grecs anciens furent traduits. Mécène et collectionneur de manuscrits, Bessarion rassembla une documentation humaniste considérable. En 1468, il légua à la ville de Venise 482 manuscrits grecs, 264 manuscrits latins posant ainsi les bases de la fameuse Bibliothèque marcienne, où sa collection constitue la partie la plus précieuse du fonds grec.

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La politique culturelle de François Ier

Dès la fin des années 1510, quelques hommes de lettres proches de la cour, tels Guillaume Budé, Guillaume Cop, ou les évêques Étienne Poncher et Guillaume Petit, suggèrent à François Ier la création d’un collège de lecteurs royaux dans lequel on enseignerait à la fois le latin, le grec et l’hébreu.

La fondation du Collège des lecteurs royaux témoigne d’une véritable politique culturelle.

Ce n’est qu’en 1530 que sont désignés les quatre premiers lecteurs royaux, dont Pierre Danès et Jacques Toussain pour le grec. Le Collège – ancêtre immédiat de notre Collège de France – devient ainsi une véritable pépinière d’humanistes indépendante de l’Université.

La fondation du Collège des lecteurs royaux (1530) témoigne d’une véritable institutionnalisation de la culture. Ce processus concerne également la typographie. Dès 1531, un premier office d’« imprimeur du roi » est créé. C’est Geoffroy Tory qui en bénéficie initialement. En 1539, cet office est restreint aux seules impressions en langue française. En effet, à cette date, François Ier décide d’instituer une charge d’imprimeur du roi pour le grec. L’imprimeur désigné bénéficie de gages importants  et de la protection du souverain : chacune de ses publications est protégée d’un privilège pour cinq ans. Conrad Néobar est le premier nommé, mais il meurt dans l’année 1540 et se voit remplacé par Robert Estienne. Pierre Duchâtel passe commande à Claude Garamont de trois corps de caractères grecs cursifs destinés à l’usage exclusif des imprimeurs du roi.

 

Artiste passionné par la langue française, Geoffroy Tory fut le premier à porter le titre d'« imprimeur du roi » François Ier en 1531. Tour à tour enseignant, traducteur, écrivain, libraire et imprimeur, Geoffroy Tory est une des grandes figures de la Renaissance, fin lettré imprégné des nouvelles théories humanistes. Son ouvrage principal, le Champ fleury renouvelle l'art de la typographie en y introduisant les proportions idéales de la Rome antique 

Conrad Néobar est originaire de Kempis-Vost, diocèse de Cologne. Naturalisé le 17 janvier 1539, il est nommé le jour de sa naturalisation libraire-imprimeur du roi pour le grec au traitement de cent écus d’or soleil. Il meurt en 1540.. « Homme d’études et faisant profession de belles lettres », il est chargé de s’occuper spécialement de la typographie grecque, d’imprimer « correctement » pour le royaume « les manuscrits grecs source de toute instruction » avec un privilège de cinq ans pour les impressions de livres soit grecs soit latins et deux ans pour les réimpressions. 

En 1540, Pierre Duchâtel, conseiller et aumônier de François Ier commanda à Garamond les poinçons de trois sortes de caractères d’un alphabet grec aux frais de Robert Estienne (qui en fit usage pour ses éditions grecques, à partir de 1543). 

 Robert Estienne, né en 1503 à Paris et mort le 7 septembre 1559 à Genève, est un lexicographe et imprimeur français. Il fut nommé avant 1539, par le roi François Ier, imprimeur royal pour l'hébreu et le latin, auxquels s'ajouta le grec en 1544. 

Poinçons des grecs du roi, Imprimerie Nationale (exposition New-York)

 


 

 


 

 

 


 

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Les abréviations grecques dans Le jardin des racines grecques, Claude Lancelot, Paris 1783.

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Le jardin des racines grecques, Claude Lancelot, Paris 1783, pages IX et X.
Le jardin des racines grecques, Claude Lancelot, Paris 1783, pages IX et X.

Le jardin des racines grecques, Claude Lancelot, Paris 1783, pages IX et X.

SOURCES ET LIENS.

VERVLIET ( Hendrik D. L.) 2008, The Palaeotypography of the French Renaissance, Volume 1 Brill, 564 p;pages 392-395. En ligne Google

 

http://www.garamonpatrimoine.org/presse.html

http://www.typographie.org/gutenberg/garamond/garamond_2.html

http://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1852_num_13_1_445059

http://www.garamond.culture.fr/fr/page/l_oeuvre_i_les_types_grecs

http://www.garamond.culture.fr/en/page/garamont_s_early_career_the_grecs_du_roi

http://www.garamond.culture.fr/en/page/garamont_s_early_career_the_grecs_du_roi

http://www.garamond.culture.fr/fr/page/le_vol_des_grecs_du_roi

http://www.garamonpatrimoine.org/images/grec_vergece.jpg

http://tipografos.net/historia/garamond.html

Pinakes | Πίνακες Textes et manuscrits grecs http://pinakes.irht.cnrs.fr/presentation.html
Bnf http://archivesetmanuscrits.bnf.fr/ead.html?id=FRBNFEAD000020983

— François Ier pouvoir et image, exposition Bnf 2015 :

http://www.bnf.fr/documents/dp_francois_1er.pdf

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Published by jean-yves cordier - dans Chantilly.
25 octobre 2015 7 25 /10 /octobre /2015 22:17

Les Paradis terrestres, et les murs qui les cernent​, à la Carène à Brest.

Voir aussi :

Est-ce un ange ? Un ramoneur ayant avalé son hérisson ? 

Il vole, le sombre Icare aux raides certitudes. 

Ou bien  croit-il seulement qu'il vole, mais il tombe,

traçant du bout du doigt un slogan illusoire,

comme le peintre accroché à son pinceau,

quand l'échelle a chutée.

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Dans une near death experience il a l'esprit qui danse,

il voit le Paradis,

l'arbre de la connaissance 

 quatre fleuves et  quatre arrondissements.

Il est logé  PARADIS EST,

quoique Paradis Ouest soit bien plus réputé. Tant-pis : ICI ONE CHANCE, 

et cette chance est chauve par derrière,

la lance qui saigne ne repasse jamais.

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Paradis Est, La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

Paradis Est, La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

Il ignore tout de son destin.

Face à lui vole à toute allure un autre sombre crétin.

Ça va faire boum-boum juste en passant au coin

Et ce sera la fin au pied d'un réverbère.

Paradis contre Paradis,  La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

Paradis contre Paradis, La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

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Son double partageait sa fragile innocence,

Tout comme lui il croyait aux lendemains qui chantent

Aux paradis perdus qui revenaient ICI

Aux mots qui, en anglais, semblaient soudain plus beaux,

Au Yoga, à Pilates, à la nage sur le dos,

A l'héritage indien de sa crête iroquoise,

ou aux bienfaits certains d'une poudre turquoise,

dont il se massait.

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Paradis Est ici aussi,  La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

Paradis Est ici aussi, La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

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Soucieux de modifier la fatale trajectoire,

Je criais "Arretez ! Vous foncez droit dans le mur !"

Le mur ? Ils y étaient déjà ! Et dépourvus d'oreille,

ils ne m'écoutaient pas et poursuivaient leur rêve.

Mais sans-doute la koiné du monde paradisaque 

était-elle  anglaise ? Je criais " ' cause you are gonna crash, baby, you know that ?"

et ce fut peine perdue.

Il s'encastrèrent,

dans la tôle rouillée choisie par nos édiles 

pour en faire La Carène.

En fer.

Et peut-être y sont-ils encore.

 

 

 

 

 

Enfer. La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

Enfer. La Carène, Brest, photographie lavieb-aile.

Morale.

Les murs qui protègent vos paradis 

les transforment en enfers.

Ici-bas point d'Eden, mais un sort funeste,

dont la seule issue est de le partager 

en toute sollicitude.

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Published by jean-yves cordier - dans Brest
20 octobre 2015 2 20 /10 /octobre /2015 11:48

Vers le Paradis, rue de l'Harteloire à Brest. COP21.ORG

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Voir aussi :

Lavieb-aile à Brest : 15 articles pour partager ma ville... et quelques autres. ​

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La rue de l'Harteloire, à Brest, descend en pente douce dans le prolongement de la Place de la Liberté et de l'avenue Clemenceau, vers la rive de la Penfeld, et le pont de l'Harteloire. Mais ce matin-là, elle était empruntée par un étrange cortège d'Hominidés.

Je décidais de leur emboîter le pas. Puisqu'il suffisait de suivre la pente...

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C’était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d’épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j’y tenais mal mon rôle
C’était de n’y comprendre rien
Est-ce ainsi que les h
ommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent...

Aragon

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Où vont-t-ils ?

 

Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Je dépassais d'abord le sympathique PLIOPITHÉQUE, avec ses allures guillerette de Gibbon. Venait-il de la BIBLIOTHÉQUE de la fac Victor Ségalen ?

Pliophithèque, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Pliophithèque, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

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Puis vint  PROCONSUL, bien décidé à en découdre. Mais de quoi ? Une manif pour créer un Jardin des Plantes ? 

Quelqu'un avait inscrit A POIL. Mais pourquoi ? C'était déjà acquis.

Proconsul, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Proconsul, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

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DRYOPITHECUS, le nez dans les gaz d'échappement et les crottes de chien, devançait Proconsul. Il avait parcouru, depuis son Miocène, 18 Millions d'années pour se rendre à ce mystérieux rendez-vous. Un peu voûté, forcément.

Driopithèque, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Driopithèque, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

OREOPITHECUS (Oreopithecus Bambolii, Gervais 1872) courait après sa chance. La borne d'incendie n°471 portait l'inscription AU FEU. Pourtant l'espèce, comme le genre, est éteinte depuis le Pliocène. 

Que faisais-je là?

 

Oreopithecus, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Oreopithecus, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

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AUSTRALOPITHECUS se croyait en retard. Même pas le temps de passer une cravate. Peut-être présidait-il la commission ad-hoc ?

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Australopithecus, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Australopithecus, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

PARANTHROPUS s'approchait du parcmètre, carte bancaire en main. Mais chacun sait que depuis juin dernier,  Monéo ne fonctionne plus à Brest. D'e quelle cambrousse sortait-il ?

Avec une meilleure vue, j'aurais pu lire sur sa carte :" † Australopithecus boisei Leakey, 1959 " : il venait d'une région boisée. La forêt du Cranou?

Paranthropus,  Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Paranthropus, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

HOMO ERECTUS, un lointain cousin, me lança un coup d'œil complice. En étais-je ? 

Aussi gêné que Marcel devant Charlus, je détournais les yeux vers un bourdon qui butinait, à mes pieds.

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Homo Erectus,  Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Homo Erectus, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

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J'aurais, par contre,  donné ma chemise au sympatique

HOMO SAPIENS 

mais le silex qu'il tenait dans la main me fit réflechir. Une fonction dont je lui étais, d'ailleurs, redevable.

 

 

Homo erectus,  Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Homo erectus, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

L'HOMME D'HIER était nu comme un ver, mais portait la barbe (hier, sans-doute ne rasait-on pas gratis). Il portait une lance. Un léger anachronisme, car cet "hier" était plus vieux qu'Hérode.

L'Homme d'hier,  Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

L'Homme d'hier, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

J'avais couru pour dépasser ces augustes gentlemen, car je voulais voir "L'Homme d'aujourd'hui". Il n'y était point. J'étais en face de la M.P.T de l'Harteloire, et ses portes vitrées. Je n'y vis que mon reflet, et c'est tout. 

Pourtant, là-bas, dans ce costume ?

C'était "L'HOMME DE L'AVENIR". Dans une version passablement démodée dessinée par  Jules Vernes, car c'était, à l'évidence, un "pied-lourd" avec sa tenue de scaphandrier.

Fallait-il en rire ?

La pièce était-elle ou non drôle

Moi si j’y tenais mal mon rôle

C’était de n’y comprendre rien
 

L'Homme de l'Avenir, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

L'Homme de l'Avenir, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Je finis par comprendre.

Tous ces gens étaient venus car des panneaux annoncaient LE PARADIS.

 

Le PARADIS, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.
Le PARADIS, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Le PARADIS, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Le PARADIS ? ICI ? 

 

Le Paradis, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

Le Paradis, Rue de l'Harteloire, 19 octobre 2015, photographie lavieb-aile.

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Ici ? Le Paradis ?

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Ce n'est pas à un vieux singe comme moi qu'on fera prendre des vessies pour des lanternes.

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19 octobre 2015 1 19 /10 /octobre /2015 17:51

A la princesse arctique.

ARCTIC PRINCESS, LNG en escale technique à Brest.

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Voir aussi :

Lavieb-aile à Brest : 15 articles pour partager ma ville... et quelques autres. ​

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Tu viens de la ville la plus septentrionale,

Au monde, tu viens d'Hammerfest, comté de Finnmark,

Dont tu laisses lire le nom sur ta poupe de feu,

Ô fille de la banquise.

Mais de cette ville c'est l'île de Melkøya que tu fréquentes,

Le point final des cent soixante huit kilomètres de pipeline

Qui mènent sous la mer de Barents le gaz des champs de Snøhvit,

Un nom qui signifie La Neige Blanche..

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ARCTIC PRINCESS, Hammerfest (Norvège), LNG de l'armement norvégien Hoegh, long de 288 m, d'une capacité de 147 980 m3, construit en 2006 au Japon. Photographie lavieb-aile.

ARCTIC PRINCESS, Hammerfest (Norvège), LNG de l'armement norvégien Hoegh, long de 288 m, d'une capacité de 147 980 m3, construit en 2006 au Japon. Photographie lavieb-aile.

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Sur les quais du port les lamaneurs se disent

C'est bien reparti pour  Damen Shiprepair

Les tankers se succèdent au chantier de réparation navale

Et Brest est devenu une étape habituelle

Pour les gros LNG.

 Ils  ont tourné les amarres du  SONANGOL SAMBIZANGA,

Un méthanier de chez Chevron,  291 m de long et 160 000 m3 de capacité,

Pour un arrêt technique classique de 14 jours.

SONANGOL SAMBIZANGA SONANGOL SAMBIZANGA

c'est le chant du commerce du gaz en Angola.

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SONANGOL SAMBIZANGA, LNG de 291 m de long et 160 000 m3 de capacité,  en forme n° 2 à Brest depuis le 10 octobre pour un arrêt technique classique de 14 jours. Photographie lavieb-aile.

SONANGOL SAMBIZANGA, LNG de 291 m de long et 160 000 m3 de capacité, en forme n° 2 à Brest depuis le 10 octobre pour un arrêt technique classique de 14 jours. Photographie lavieb-aile.

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Et c'est encore Damen, disent les lamaneurs,

qui s'est chargé du carénage du NORWEGIAN-EPIC,

le plus gros paquebot jamais passé en cale sèche dans le port breton,

qui est reparti le dix-sept octobre pour Southampton,

il y a à peine deux jours de cela.

 Damen Shiprepair a retrouvé la confiance des armateurs,

et dès la fin des opérations de mise en place des lignes de tins,

les travaux sur l'ARTIC-PRINCESS ont débuté.

Nettoyage et peinture de carène.

intervention sur les pompes de cargaison,

sur les tuyauteries et les vannes. Du quotidien pour les Brestois,

dont certains se souviennent que ce navire,

est déjà venu en entretien à Brest en 2010.

et dont certains savent qu'il a été onstruit en 2005

par les chantiers japonais Mitsubishi Heavy Industries.

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NORWEGIAN EPIC, le 15 octobre 2015, Photographie lavieb-aile.

NORWEGIAN EPIC, le 15 octobre 2015, Photographie lavieb-aile.

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Hier Princesse Arctique, tu as pris

 la place de SPIRIT POLAR (Bahamas)

qui reprenait sa route vers Point Fortin, Trinity Tobago, à 13 noeuds, cap barre 240°

Demain tu entreras dans la forme numéro trois,

et ses grues de 150 tonnes danseront pour toi.

 

 

Copie d'écran (annoté) du site http://www.marinetraffic.com le 19 et le 22 octobre 2015.
Copie d'écran (annoté) du site http://www.marinetraffic.com le 19 et le 22 octobre 2015.

Copie d'écran (annoté) du site http://www.marinetraffic.com le 19 et le 22 octobre 2015.

POLAR SPIRIT et SONANGOL SAMBIZANGA le 15 octobre 2015 à Brest. Long de 239 m, construit au Japon en 1993, le Polar Spirit a une capacité de 87 660 m3. Photographie lavieb-aile.

POLAR SPIRIT et SONANGOL SAMBIZANGA le 15 octobre 2015 à Brest. Long de 239 m, construit au Japon en 1993, le Polar Spirit a une capacité de 87 660 m3. Photographie lavieb-aile.

 

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Fille du roi de Thulé tu promènes fièrement

 tes seins proéminents, rubiconds et luisants,

 quatre cuves remplies de cent quarante sept mille huit cent trente cinq mètres cubes.

de gaz liquéfié.

Madelon généreuse viens nous servir à boire,

Accompagne ta sœur ARCTIC LADY

qui t'a précédé trois fois dans le port de l'Atlantique nord,

aux anciens chantiers Sobrena.

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Fille du roi de Thulé tu 

ARCTIC PRINCESS le 22 octobre 2015 à Brest. Photographie lavieb-aile.

ARCTIC PRINCESS le 22 octobre 2015 à Brest. Photographie lavieb-aile.

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"De l'Afrique brûlée à Thulé froiduleuse". 

A coté de SONANGOL SAMBIZANGA l'africain, sombre Vulcain sorti de son Hades, ARCTIC PRINCESS danse dans sa robe rouge.

 

 

ARCTIC PRINCESS et  SONANGOL SAMBIZANGA le 19 octobre 2015 à Brest. Photographie lavieb-aile.

ARCTIC PRINCESS et SONANGOL SAMBIZANGA le 19 octobre 2015 à Brest. Photographie lavieb-aile.

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Deux esclaves, jambes bleues, longs bras de palmes jaunes,

T'éventent, ô lapone assoupie aux rêveries boréales ,

Tandis que des coups sourds préviennent ta hantise,

Car ce qui t'insupporte dans la nuit atlantique, c'est

Le silence des machines.

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ARCTIC PRINCESS au quai à Brest, 19 octobre 2015. Photographie lavieb-aile.
ARCTIC PRINCESS au quai à Brest, 19 octobre 2015. Photographie lavieb-aile.

ARCTIC PRINCESS au quai à Brest, 19 octobre 2015. Photographie lavieb-aile.

SONANGOL SAMBIZANGA le 19 octobre 2015 à Brest. Photographie lavieb-aile.

SONANGOL SAMBIZANGA le 19 octobre 2015 à Brest. Photographie lavieb-aile.

Tu es ma Sunamite et je te poursuis dans la nuit.

Le matin je cours encore pour te trouver

Tes joues sont belles au milieu des colliers, Ton cou est beau au milieu des rangées de perles. 

De loin je repère ta présence, et de loin je mon coeur palpite en te voyant,

Comme un pommier au milieu des arbres de la forêt, Telle es-tu ma bien-aimée 

 

 

ARCTIC PRINCESS vu de Plougastel le 31 octobre 2015. photographie lavieb-aile

ARCTIC PRINCESS vu de Plougastel le 31 octobre 2015. photographie lavieb-aile

Mais tu es mieux gardée que la reine de Saba et tes soldats m'éloignent,

 Ton sein est une coupe arrondie, Où le vin parfumé ne manque pas; Ton corps est un tas de froment, Entouré de lis.

Tel David épiant Bethsabée sur sa terrasse, ainsi je te poursuis sur les rives ardues

Tes  seins sont comme quatre  faons, Comme les jumeaux d'une gazelle.

Ton cou est comme une tour d'ivoire; Et les cheveux de ta tête sont comme la pourpre.

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ARCTIC PRINCESS vu de Plougastel le 31 octobre 2015. photographie lavieb-aile

ARCTIC PRINCESS vu de Plougastel le 31 octobre 2015. photographie lavieb-aile

Derrière les buissons je me dissimule et je te vois,

Suzanne se baignant nue, impudique et rieuse.

Que tu es belle, que tu es agréable, O mon amour, au milieu des délices! Ta taille ressemble au palmier, Et tes seins à des grappes. Je me dis: Je monterai sur le palmier, J'en saisirai les rameaux! Que tes seins soient comme les grappes de la vigne, Le parfum de ton souffle comme celui des pommes, Et ta bouche comme un vin excellent, Qui coule aisément  Et glisse sur les lèvres de ceux qui s'endorment!

Mais quoi, ce navire noir contre ton flanc !  Ne me mens pas, c'est l'ADMIRAL, un chimiquier de Gibraltar : je vois son pavillon de l'armement Carl Büttner 

—D'où vient-il ?

— De Goteborg, Suède

— Où va-t-il ?

— A Brême, Allemagne.

— Qu'il aille au diable ! Viens, ma bien-aimée, partons en mer . Eloigne-les, ces concurrents !

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ARCTIC PRINCESS vu de Plougastel le 31 octobre 2015. photographie lavieb-aile

ARCTIC PRINCESS vu de Plougastel le 31 octobre 2015. photographie lavieb-aile

Quand la nuit tombe, tu te pares de diamants,

blocs gelés scintillants plus durs que la glace,

sur le rubis brûlant de ta patience ardente.

Mais ta splendeur est effrayante, 

cousine du Beerenberg et du Bárðarbunga,

quand tu couves ta colère en chantant la saga

du massacre des belougas. 

Tu es un monstre, Arctic Princess, 

dont je crains les prouesses.

 

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ARCTIC PRINCESS, Brest, 19 octobre 2015. Photographie lavieb-aile.

ARCTIC PRINCESS, Brest, 19 octobre 2015. Photographie lavieb-aile.

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10 octobre 2015 6 10 /10 /octobre /2015 23:15

Introduction.

AncreL'intérêt de l'examen de la description  manuscrite par de Robien de sa collection d'insectes, et notamment de papillons, tient au fait que, si on la date dans le créneau 1740 -1756, et plus vraisemblablement 1740-1750,  elle est peut-être la première description française illustrée d'une collection de lépidoptères, si on admet que les tomes  I et II des Mémoires pour servir à l'Histoire des Insectes de Réaumur consacrés aux chenilles et papillons (1734 et 1736) ne sont pas présentés comme une description d'espèces de collection, mais comme l'œuvre  d'un scientifique et expérimentateur à la curiosité ingénieuse. (Pourtant  Réaumur (1683-1757) avait assemblé le plus grand cabinet d'histoire naturelle de France. À sa mort, il sera intégré au cabinet du roi,  créé en 1729 au Jardin du roi et décrit par Buffon dans son Histoire Naturelle.

A une époque où les papillons n'ont pas encore reçu de dénomination scientifique (celle-ci débutera avec l'édition de 1758 du Systema Naturae de Linné) ou vernaculaire dans notre langue, De Robien crée pour quelques espèces des noms en français, et utilise dans ses descriptions des adjectifs et métaphores qui, étrangement, se retrouveront dans les premiers noms vernaculaires de papillons créés par Etienne-Louis Geoffroy en 1762. Cette préséance est émouvante.

Nous y trouverons dans une centaine de pages la description morphologique de plus de 40 espèces de papillons diurnes, de 36 papillons nocturnes sans compter les Teignes et microlépidoptères, accompagnées de sept planches totalisant 96 papillons, sur une collection estimée à 207 insectes.

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Le portrait de C-P. de Robien : révélateur de ses passions.

Portrait de Christophe-Paul de Robien, par Jean-Joseph Balechou. Musée des beaux-arts de Rennes.

 

J. Balechou sculptit.  Huguet pinxit.

CHRISTOPHLE PAUL SIRE DE ROBIEN

 Ch[evali]er, Baron de Kaer, Vicomte de Plaintel et autres lieux,

Conseiller du roy en tous ses conseils et son Présid[en]t

a mortier au Parlem[en]t de Bretagne

de l'Académie royale des Sciences de Berlin

Magistrat équitable, Ami sûr et sincère  

Digne de ses Nobles Ayeux, 

La probité, l'honneur forment son caractère,

Et son beau Cabinet a dequoi satisfaire Les Scavants et les Curieux

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On remarque dans ce tableau de Balechou, en arrière-plan, la tenture qui dévoile, à gauche la bibliothèque, et à droite, les étagères du Cabinet de curiosité associant des fioles (chimie), sa statue d'Hercule (Arts), des Madrépores et Coquillages, et d'autres Animaux. Cette bibliothèque et ce Cabinet (réunis au Grenier de son hôtel particulier de Rennes) sont les éléments identitaires choisis par De Robien.

On note aussi bien-sûr, dans le panégyrique de Paul Briand Des Forges Maillard*, la mention "Et son beau Cabinet a de quoi satisfaire Les Scavants et les Curieux". 

* Ce poète aimable a été «en commerce de littérature et d'amitié» avec la plupart des écrivains, beaux-esprits et savants de son temps qui ne lui ont pas ménagé leur estime. En dehors de Titon Du Tillet, son «père» , citons les jésuites Brumoy et Du Cerceau, les Bretons Bouguer, membre de l'Académie des Sciences (un ami d'enfance), et Fréron, le président Bouhier et le président de Robien (qui l'accueille chaque année dans son château près d'Auray pendant une partie des vacances parlementaires), le physicien Réaumur, les poètes J.B. Rousseau, Gresset et L. Racine, les dramaturges Destouches, La Grange-Chancel, et, parmi les plus grands, Fontenelle, Montesquieu et Voltaire. Source. Tl est l'auteur d'une Epitre à Mr le Marquis de Robien (Oeuvres, page 120-123).

 

 

 .

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Comparaison avec d'autres catalogues de collections.

En 1744, Edme-François Gersaint avait publié, pour sa vente aux enchères, le Catalogue raisonné d'une collection considérable de curiosités en tous genres contenues dans les cabinets de feu Monsieur Bonnier de la Mosson, Bailly et Captaine des Chasses de la Varenne des Thuilleries & ancien Colonel du Regiment Dauphin par E. F. Gersaint 1 vol. ([2] ff., XIII p., [1] f., 234 p., [1]f.) : front. ; in-12°. Un assez grand nombre des objets qui composaient cette vente furent acquis par Buffon ; La vente des objets du Roi n'a eu lieu qu'à partir 8 mars 1745 ; Les meubles qui ne sont pas au catalogue furent vendus en 1744 .

Voir : http://bibliotheque-numerique.inha.fr/collection/13279-catalogue-raisonne-d-une-collection-considerable/

On y comptait une dizaine de "Cabinets", d'Anatomie, de Chimie, des Drogues, des Outils, d'Animaux, d'Instruments, de Coquilles, d'Estampes, de Bronzes, etc...et, pages 32-53, le Cabinet des Insectes et autres animaux dessechés, contenant aussi des Fossiles, des Minéraux, des Cristallisations, des Madrépores, et autres plantes marines...avec quelques habillements indiens !. Les objets hétéroclites de ces Cabinets sont rangés dans des armoires, et, dans le Deuxième Cabinet d'Histoire naturelle, dans le haut de la Première armoire, on trouve neuf cartons où sont rangés divers papillons de la Martinique, de la Grenade et de Saint-Domingue, neuf autres cartons d'autres papillons, neuf autres cartons de papillons de la Guadeloupe, du Canada, de saint-Domingue, et encore 20 autres cartons de papillons. La seconde armoire renferme 183 petites boites carrées contenant des mouches, des papillons ; et deux grands cartons vitrés contenant une grande quantité de papillons. Quelques autres papillons sont placés dans d'autres armoires. Mais ces insectes ne sont ni décrits, ni illustrés, ni même classés méthodiquement. 

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Le président à mortier Christophe-Paul de Robien, collectionneur de papillons et entomologiste amateur.

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Les collections de tableaux, d'antiquités, d'œuvres d'art et d'objets d'histoire naturelle de Christophe-Paul de Robien (1698-1758), mais surtout la description manuscrite de ses collections témoignent de l'intérêt du magistrat, qui présidait la Grand-Chambre du Parlement de Rennes, pour les insectes. L'étendue de sa curiosité, qui porte sur l'art, sur l'histoire de la Bretagne et sur l'archéologie tout autant que sur la conchyliologie, la minéralogie ou la numismatique, n'en fait pas un entomologiste ni même un naturaliste à proprement parler. Mais, dans l'histoire de l'entomologie, et notamment de l'entomologie française, les informations qui nous sont parvenues sont, par leur date, très précieuses pour la connaissance de la période pré-linéenne (précédant la 10ème édition du Systema Naturae de Linné en 1758).

I. La Bibliothèque.

Inventaire à la révolution : 4000 ouvrages. La première bibliothèque de Rennes, et l'une des premières de Bretagne.

Elle contient au moins deux titres notables :

  • Réaumur, Mémoire pour servir à l'Histoire des Insectes 1734

  • Linné, Systema Naturae 1736.

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II.  Les tableaux.

La collection contient 200 peintures. Elles étaient dispersées dans l'hôtel particulier.

Deux toiles naturalistes figurent dans l'inventaire des tableaux : l'Arbre aux oiseaux et une Planche d'insectes, toutes les deux de Jan van Kessel. 

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"Jan Van KESSEL (Anvers, 1626 - Anvers, 1679) Planche d'insectes Huile sur bois 17 x 21 cm Saisie révolutionnaire (collection Robien), 1794 Peintre de fleurs et de natures mortes, Jan Van Kessel suit les influences de son oncle Jan I Brueghel et de son cousin Jan II Brueghel. Il se consacre particulièrement aux peintures d'oiseaux, de coquillages et d'insectes. Ces petits tableaux sont directement destinés à être vendus aux amateurs. La Planche d'insectes avait sa place dans un cabinet d'histoire naturelle aussi renommé que l'était celui du président de Robien ; celui-ci possédait, à côté des spécimens même du règne animal, des séries d'aquarelles peintes en Chine, représentant des oiseaux exotiques" (François Bergot ,"Peintures de la collection Robien" &. "Le bestiaire dans la peinture occidentale" - Musée des beaux-arts de Rennes

http://www.mbar.org/services/ressources/bestiaire.pdf

 

 

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III. Les estampes et gravures.

Collection : 1000 dessins et 3000 gravures, conservés jadis dans la Bibliothèque, au grenier de l'hôtel de Robien de Rennes.

 Parmi ces gravures, deux ensembles de planches :

  •  Jacob et Georg. Hoefnagel, Archetypa studiaque, 1592 : c'est, dans l'histoire de l'entomologie,  la première publication (imprimée) comportant des représentations selon le vivant d'insectes, fidèles au spécimen observé et donc conformes au naturalisme scientifique.

  •  Maria Sibylla Merian, Dissertation 

​.

 

IV. Manuscrit.

 Parmi les manuscrits de C-P. de Robien, le document intéressant l'entomologie est la « Description historique », rédigée par le président de Robien, « des collections conservées dans son cabinet », et, parmi les deux volumes, le premier qui est consacré à l'histoire naturelle. Les pages 879-1004 sont consacrées à l'entomologie, et elles débutent par la description de la collection de papillon pp. 879-971. Cette partie est illustrée de sept planches numérotées 126 à 132.

http://www.tablettes-rennaises.fr/themes/rennes/static/flipbook/index.html?docid=43919&language=fra&userid=25586

 Dans cette collection,  sur un total de 2167 objets d'histoire naturelle, on compte 207 insectes dans le catalogue de 1740 (Description...). Il en restait 183 (sur un total de 7124 objets, par forte augmentation des minéraux et végétaux) dans l'inventaire de 1794 après saisie révolutionnaire. 

En outre, De Robien est l'auteur de la Description historique, topographique et naturelle de la Bretagne, daté vers 1756 : ce manuscrit est conservé à Rennes sous la cote Mss 0310-0312. Le manuscrit Ms 0312 consacrée à la Bretagne naturelle contient une Planche de papillons en couleur, la planche  III-4 par laquelle nous débuterons.

 

LA PLANCHE DE LA DESCRITION HISTORIQUE DE BRETAGNE.

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 — Planche III-4 du Ms 0312 : 16 espèces autochtones.

 On y compte  49 formes de papillons : 16 chenilles, 19 chrysalides ou cocons, 16 imagos,  identifiables et autochtones. Les 8 Nocturnes, sont   Saturnia pyri le "Grand Paon de Nuit" ; Gastropacha quercifolia "La Feuille-Morte du Chêne" ; Lasiocampa quercus "Le Bombyx du Chêne" ; Euproctis similis "Le Cul-jaune" Tyria jacobaeae "La Goutte de sang" ; Arctia villica "L'Écaille villageoise" ; Euplagia quadripunctaria "L'Écaille chinée, Callimorphe" ; Catocala nupta  "La Mariée", et,  en bas, Acherontia atropos "Sphinx à tête de mort".

Les 8 Diurnes sont Polygonia c-album (Robert-le-Diable), Lasiommata maera (Némurien), Vanessa cardui (Belle-Dame), Argynnis paphia (Tabac d'Espagne), Aglais urticae (Petite Tortue) Inachis io (Paon-du-Jour), Vanessa atalanta (Vulcain) et Limenitis reducta (Sylvain azuré)

 

  

 

Planche III-4, Rennes Ms 0312, Description historique de la Bretagne, Christophe-Paul de Robien

Planche III-4, Rennes Ms 0312, Description historique de la Bretagne, Christophe-Paul de Robien

Planche III-4, Rennes Ms 0312, Description historique de la Bretagne, Christophe-Paul de Robien

Planche III-4, Rennes Ms 0312, Description historique de la Bretagne, Christophe-Paul de Robien

 

 

DESCRIPTION DU MANUSCRIT Ms 0546-0547.

Je vais me focaliser progressivement sur les pages consacrées aux papillons, en présentant d'abord (I) la Description historique des collections avec ses deux volumes, puis (II) le volume consacré à l'histoire naturelle ou Ms 0546, puis (III) les pages 881-950 consacré aux papillons et enfin (IV) les planches 126 à 132 qui y sont attachées.

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I. La « Description historique », rédigée par le président de Robien, « des collections conservées dans son cabinet ».

L'ouvrage de la Bibliothèque de Rennes Métropole  « Description historique », rédigée par le président de Robien, « des collections conservées dans son cabinet », XVIIIe siècle, comprend deux volumes manuscrits sur papier et reliés en veau :

  • 546. Ier volume : Histoire naturelle.

  • 547. 2ème volume. « IVe partie. Ouvrages de l'art », comprenant l'archéologie et la numismatique.

  Le 1er volume MS 0546, qui nous intéresse, comprend  423 feuillets, plus 170 planches intercalées, avec un numérotage spécial. Dimensions : 457 × 305 mm : 3 petits feuillets de diverses dimensions, chargés de notes, sont collés au recto du folio 80, un autre au recto de 155. Presque toutes les figures de plantes et d'animaux sont des gravures découpées dans des ouvrages imprimés, d'ailleurs sans indication de provenance, et collées dans le manuscrit" (notice de la Bibliothèque). Ce manuscrit a été numérisé intégralement. Il est consultable dans Les Tablettes rennaises, portail du patrimoine numérisé de la bibliothèque de Rennes Métropole. 

 

http://www.tablettes-rennaises.fr/themes/rennes/static/flipbook/index.html?docid=43919&language=fra&userid=25586

 

II. Composition du Ms 0546 de Rennes

Sa composition  est la suivante :

Fol. 1. Préface, indiquant l'objet et les divisions de l'ouvrage 

Fol. 2. Ier partie. Des fossiles : fossiles naturels (géologie et minéralogie)

Fol. 63. Fossiles étrangers (paléontologie)

Fol. 158. Animaux de la mer

Fol. 300. Animaux terrestres

Fol. 415. Des animaux à figures monstrueuses et contre nature

Selon la pagination du lecteur des Tablettes rennaises (1232 pages) , la composition est la suivante : 

  • Ancre Préface, indiquant l'objet et les divisions de l'ouvrage 1. "La Multitude"

  • Première classe des fossiles en général "Des Fossiles" Fol. 2

  • Des Terres.

  • Des Sables 35

  • Des Sels 37

  • Des Bitumes 51

  • Des Pierres 60. Cinq espèces.

  • Des Minéraux. 134

  • Des Marcassites ou mines de métaux et de ces métaux même 145

  • Des Fossiles étrangers 154

  • Des végétaux fossiles 

  • Ancre Des Bivalves 183

  • Des Végétaux 209

  • Des Plantes marines 422

  • Troisième Partie, des Animaux en général. 457

  • Animaux marins ; Coquilles +++

  • Des Poissons à écaille 840

  • Animaux terrestres des plus petits et les plus délicats pour remonter jusqu'aux plus grands et les plus considérables  879. 

  • Ders vers des chenilles 951

  • Des scarabées en général. 972

  • Des oiseaux 1035.

  • Des Quadrupèdes 1124


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III. Composition des chapitres du manuscrit MS 0546 concernant les papillons. Le texte.

(pagination Tablette Rennaise)

N.B : les identifications placées entre crochets sont proposées à titre indicatif sans caution d'un entomologiste patenté.
 

  • "Les chenilles que je place les premières des insectes terrestres non comme les plus petites et comme les plus tendres et les plus délicates"...881

  • "Papillons diurnes...se divisent selon Mr de Réaumur en trois genres, ou en sept classes ..."  Ceux du premier genre ont des antennes à boutons ou en massues et se subdivisent en quatre classes" 882

  • Planche 126 page 883 : 25 espèces de Papillons, parmi lesquels Gonepteryx rhamni, Inachis io, Vanessa atalanta.

  • Classification en sept classes. "Tous ces papillons dont je conserve les diverses transformations de plusieurs dans de petits chassis garnis de verre et dont j'ai rassemblé plusieurs espèces rares et admirables par leur grandeurs, leurs structures et leurs coloris, des deux Indes, étant distribués par classes suivant l'ordre et les dimensions de Mr de Réaumur." Page 887

  • "Ceux de la première Classe des Papillons diurnes sont Primo de petits papillons de société violets et bruns oeilletès voltigeant dans les landes et les bruyères." ... 13 paragraphes soit 13 descriptions de spécimens  888

  • Seconde Classe des Diurnes : 9 descriptions de spécimens 892

  • "Troisième Classe qui est composée de ceux qui reposent sur 4 jambes et en ont 2 très petites" 896

  • Vignette découpée : 897 : 2 papillons, libellule, lézard, grenouille...

  • planche 127 ; 5 papillons.

  • Planche 128. 8 espèces. 

  • Planche 129 . 7 espèces.

  • Planche 130. 11 espèces. ​

  • Texte espèce n° 7 à 11 Page 909.

  • Quatrième Classe : les Diurnes dont les ailes laissent la partie inférieure du corps à découvert : 910

  • Cinquième Classe

  • Sixième Classe : les Diurnes qui ont leurs antennes en massues, je n'en n'ai que très peu.

  • Septième Classe; Papillons qui ont les antennes en corne de bélier que quelques uns ont mis au rang des Phalènes

  •  Première Classes des papillons Nocturnes. Les Phalènes. 918. [4 espèces dont le Sphinx à tête de mort  (n°3) et id. venant des Indes (n°4) ]

  • Planche 131

  • Deuxième Classe des Nocturnes : les Papillons...ont leurs antennes à filets coniques. pages 924 à 931. [14 espèces, dont la Lichénée rouge (n°2), la Zérène du Groseillier (n° 6) avec une mention de "Godard " (Jan Goedart) ; la "Goutte de sang" ou Tyria jabobaeae (n°9) , l'Hyponomeute plombée du fusain (n°14)]

  • Troisième Classe antennes à filets coniques et pas de trompes 932. [1 espèce, chenille qui vit à l'intérieur des troncs de chêne, d'orme et autres bois. ]

  • Planche 132 colorisée

  • Quatrième Classe. Antennes à barbes de plumes. Les masles les ont bien plus barbues que les femelles. 934. [3 espèces dont l'Ecaille martre (n°2).]

  • Cinquième Classe : Antennes à barbes de plumes, mais dépourvus de trompe.  938. [ 11 espèces, dont "La Feuille morte" Gastropacha quercifolia n°1, le "Moyen Paon-de-nuit (n°4), le "Grand Paon-de-nuit (n°5), [Rothschildia aurota nommé par Robien le "Porte-miroir des Indes" (n°6) , la "Patte étendue" (n°9), le "Cul doré" E. similis, (n°10) ]

  • Sixième Classe, dont les femelles naissent sans ailes. 945. [2 espèces. L'Étoilée (n°1) et l'Antique Orgya antiqua (n°2)]

  •  Planche 133 : 

  • Septième Classe. Dont les plumes des ailes sont séparés comme celles des oiseaux. 946 [Ptérophore) ]

  • Des vers à Soye 947

  • Des Teignes ou Mittes 949

  • Des vers des chenilles 951.

  • Planche 143

  • [Fin des page consacrées au papillons] Des scarabées en général 972

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LECTURE DU TEXTE : TRANSCRIPTION PARTIELLE.

Je transcris ici  les pages consacrées aux papillons diurnes  : les pages 882-885 donnent la classification empruntée à Réaumur et les pages 888 à 917  donnent la description des spécimens de papillons diurnes collectés : 

Trois genres et sept classes... "Ceux du premier genre ont des antennes à boutons ou en massues et se subdivisent en quatre classes (p. 882). Ceux de la première classe se posent sur six pieds et ont le corps embrassé par la partie inférieure de leurs ailes qui étant en repos sont posées perpendiculairement à leur plan de position. Ceux de la seconde classe les ont de même, mais ne se posent que sur quatre jambes. Les deux antérieures étant de fausses jambes terminées en pointes de palatine ; ceux de la troisième classe sont à peu près de même pour les ailes et ne se posent que sur quatre jambes, les deux antérieures étant si petites qu'en quelques uns elles ne peuvent être aperçues qu'avec peine ; ceux de la quatrième ont leurs ailes inférieures recourbées sur leur corps dont elles laissent le dessus à découvert et ont souvent deux appendices assez longues. Ceux de la cinquième classe ont six vrayes jambes, mais tiennent leurs ailes parallèles au plan de position, ou ne les redressent jamais après parce qu'elles se touchess ??e. Ceux de la sixième classe ont des antennes à massue ou qui augmentent de grosseur à mesure qu 'elles s'éloignent de leur naissance. Ceux de la septième classe ont leurs antennes en corne de bélier, c'est à dire l'extrémité renflée diversement repliée.  Les phalènes ou papillons nocturnes etc....(p.885)..."


 

 

"Première Classe des Papillons Diurnes. [Lycaenidae et Pieridae]

1. Primo de petits papillons de société violets et bruns oeilletès voltigeant dans les landes et les bruyères [ Lycaenidae "Azurés" et "Argus"] .

2. D'autres à peu près semblables, aurores pigmentés de noir se posant sur six pieds.

3. Petits papillons à peu près de même espèce, noirs ou bruns, d'autres verts dorés voltigeant sur les bruyères.

4. Des papillons blancs de la plus belle chenille du chou dont l'extrémité est noir et ils ont deux taches noires sur les ailes supérieures et se posent sur six pieds. [Pieris brassicae Piéride du Chou].

5. Des papillons de chenille du prunier à ailes transparentes et à costé ou nervures plus foncées. [Aporia crataegi "Le Gazé"] .

6. Des papillons jaunes bordés de noir mouchetés de  taches blanches avec deux taches noires sur les ailes supérieures que je croy d'une chenille qui vit sur le genet. [Colias crocea "le Souci" ?]

7. Des papillons blancs de la chenille verte chagrinée du chou dont les extrémité des ailes est un peu moins noir ponctuée également et de taille moins grande. [Pieris napi ou Pieris rapae,  Piéride du Navet ou Pieris de la Rave]

8. Ce papillon d'un vert citron a des aîlles angulaires tachetées d'un point aurore  et les pieds aurores. [Gonepetryx rhamni "Le Citron"]

9. Ce papillon diurne des Indes est d'un vert ou citron bordé de quelques taches noires au dessus et de deux points noirs aux ailes supérieures et de deux [naines] de perles en dessous de quelques taches.

10. Ces deux papillons diurnes de la première classe sont d'un brun avec deux taches l'une noire avec un point blanc l'autre blanche à chaque aile ; les taches des supérieures sont plus grandes en dessous. Les inférieures sont en dessous mouchetées de gris chargées d'anneaux jaunes entourés de cercles noirs et renferment une tache ou cercle noir et au milieu une tache blanche et sont distribués à scavoir cinq taches sur chaque ailes inférieures, deux grandes et trois moyennes et quatre et un chacune des supérieures une grande et trois petites. L'autre papillon est blanc en dessus marbré de brun et blanc sale, les ailes bordées d'un rang d'yeux ou cercles  gris, blanc, bruns,ou aurores. Le dessous est d'un gris sale marbrée d'une teinte jaunâtre et bordé de quelques yeux plus pasles et en moindre nombre que dessus.

11. Le papillon des Indes à ailes à pan ou angulaires de couleur aurore foncée et marbrée de masses [?] noires plus foncée avec des yeux à œil de paon sous les quatre ailes [???]

12. est un très beau papillon diurne blanc avec des nervures noires et bordé d'espèces de cœur qui aux ailes inférieures sont d'un beau citron. En dessous toutes les ailes inférieures sont citrons, et les figures de cœur qui les bordent sont d'un très beau vermillon.

13. Celui-ci plus approchant pour la forme de ses ailes  allongées  de ceux de la seconde et de la troisième classe est néanmoins de la première, se posant sur six vraies jambes assez longues;. Il est presque tout brun en dessus des ailes néanmoins bordées d'un triple rang d'espèces de petits chevrons ou fers de flèches d'un blanc jaunâtre ou aurore en quelques endroits. Le dessous est d'un brun plus pasle et le troisième rang de chevron est totalement jaune. (page 891)

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La Seconde Classe des Diurnes. [Nymphalidae]

1.Primo les papillons de la chenille verte chagrinée du gramen sont bruns et jaunes chargés d'yeux noirs aux quatre ailes, une sur chacune des supérieures, et deux quelquefois trois sur les inférieures. ["chenille verte chagrinée" voir Réaumur I p. 445 et  Réaumur  pl. 27 fig. 15 et 16  "le Tircis]

2. Le papillon suivant est d'une chenille à peu  près semblable -jaune (fauve?) clair sur un fond brun avec les ailes supérieures marquées d'un œil ou tache noire à point blanc, et les inférieures de trois taches semblables ayant l'extrémité un peu dentelée.

3. Le papillon de la chenille épineuse de l'ourmeau appellée la Bedaude [Réaumur], son corps étant de couleur de tabac clair et l'autre partie  blanche est tabac d'espagne moucheté et bordée de brun noir. Ses ailes inférieures sont échancrées au dedans et les quatre sont échancrées à la base et forment des espèces d'appendice. Le dessous des ailes inférieures est de couleur moins distincte, mais marquée au milieu d'une espèce de croissant blanc. [Polygonia c-album "Robert-le-Diable »].

 

4. Le papillon suivant est celui d'une chenille épineuse du chardon qui a une raye jaune le long du dos. Il a une couleur orange, le corps velu, l'extrémité des ailes noirastres, moucheté de blanc, le reste marbré, tacheté ou rebordé de noir ou brun, le dessous est rougeatre, œilleté en plusieurs endroits de taches noires entourées d'un cercle blanc. [Vanessa cardui, "Belle-Dame"].

5. C'est le papillon de la chenille épineuse de société de l'ortie, qui a des rayes d'un verd foncé piqueté. Il est d'un fauve clair tacheté délavé -- au bord supérieur de chaque ailes supérieures et moucheté de trois taches et bordées de noir ou brun. Les ailes inférieures sont brunes vers leur naissance, et bordées de brun, dentelées et meslées de taches d'un beau bleu [Aglais urticae "Petite Tortue"].

6. Le papillon suivant est celui de la chenille épineuse et noire de l'ortie qui est d'un tabac tirant sur le violet ayant des taches noires et blanches sur le devant des ailes supérieures et d'un bel œil de plume de paon sur chacune de ses quatre ailes. [Inachis io "le Paon-du-Jour"]

7. Celui-ci est le papillon d'une autre chenille solitaire de l'ortie dont le dessus est d'un brun noir et les extrémités des ailes supérieures d'un beau noir moucheté de blanc et bordées de taches de même. Les aîlles supérieures  sont traversées d'une belle bande couleur de feu et les inférieures bordées de même couleur piquetées de mouches noires. Le dessous de ses ailes est ondé de brun et de noir. [Vanessa atalanta "Le Vulcain"]

8. Le 8e est un très beau papillon des Indes d'un brun noirastre au dessus, moucheté de petites taches blanches vers la teste, de blanches vers le milieu et de moyennes vers les extrémités ou la base avec deux taches tabac foncé vers l'extrémité des ailes inférieures qui couvrent le corps. Le dessous est moins noir et les taches plus grandes et citrines avec deux yeux jaunes bordés de noir. Prés le bord supérieur est une bande ou tache longue jaune ou dentelé qui traverse les deux  inférieures au deux tiers de sa longueur.

9. Les 9e sont deux papillons des Indes bruns en dessus tachetés de trois grandes taches blanches deux sur les ailes supérieures et une sur les inférieures ; par dessous ils sont d'un tabac foncé traversé au milieu d' une large bande blanchastre, bordé au milieu d'une espèce de dentelé blanche et noire rebordée à double rang. (page 895)


 

Troisiesme Classe qui est composée de ceux qui se posent sur quatre jambes et en ont deux très petites.  [ Pattes antérieures atrophiées =Nymphalidae].

1. Primo un papillon très commun dans les prairies et dans les champs vers la fin de juin, le mois de juillet et plus tard. Le dessous de ses ailes est d'un  gris dans lequel il rentre quelques teintes jaunastres. Le dessous des ailes supérieures est d'un assez mauvais feuille morte. Ce qu'il a de plus remarquable est une tache en œil assez noir avec un point blanc. Le dessus des ailes est de couleur sombre assez semblable au dessous.

2. Il y a aussi le papillon brun tabac d'espagne du blé qui est à peu près semblable  de la même classe de même que quelques papillons plus petits et à peu près semblables.

3. est un papillon sur les ailes duquel il y a une distribution de taches noires et de taches blanches qui imitent assez celle des quartiers d'un damier ce qui la fait nommer l'échiquier. [Melitaea cinxia "Mélitée du Plantain" ?] [Melanargia galathea "Demi-Deuil"]

4. Je place ensuite le petit papillon aurore ou plutôt fauve tacheté de noir ou brun foncé assez régulièrement, dont le bord des ailes est orné d'une espèce de dessin imitant une espèce de dentelle noire. Le dessous est jaspé d'un blanc fauve plus vif en quelques endroits et plus pasles en d'autres [Euphydrias eurinia "Damier de la Succise" ?. 

5. Je place après deux papillons d'espèces beaucoup plus grandes dont j'ignore les chenilles qui se produisent -----dans les bois. La surface supérieures de leurs quatre ailes est d'un jaune assez vif taché d'un noir ou vert canard jaunes plus ou moins foncé qui imitent assez celles de la peau du tigre ou du léopard ce qui me fait la nommer ainsi. Le dessous des ailes de l'un des ailes supérieures est moucheté de taches argentées et brillantes comme de la nacre de perle. Les autres taches sont d'un vert ondé ou flambé d'un jaune plus pâle ou plus clair. Ce papillon a un vol extrêmement vif et rapide.

6. Celui-ci que je croirais assez volontiers né de quelque chenille de la ronce se trouve ordinairement voltigeant et prenant sa nourriture de cette plante. il est d'un brun plus ou moins pâle ou foncé tacheté à la partie supérieure de ses ailes de quelques taches ou bandes blanches. Le dessous des quatre ailes est de couleur plus variée étant orné de dessins ondés de jaune et de blanc plus ou moins clair.

7. Le suivant de la même espèce de celuy-ci dessous est sans-doute produit de quelques chenilles de la même plante puisqu'il s'y tient également  attaché, n'en diffère que peu. Sa couleur qui a la surface supérieure des quatre ailes est d'un bleu noirastre très foncé qu'on prend pour noir au premier aspect. Ses deux aîlles supérieures sont tachetées de blanc aux extrémités et traversées d'une bande blanche qui borde les inférieures. Le dessous est d'un brun bleuastre traversé de bandes et taches rougeastres. [Apatura ?? ; Limenitis ??]

8. Celui-ci venu des Indes et de la troisième classe des diurnes est d'un brun au minime assez foncé. Ses quatre ailes qui sont assez amples sont bordées d'une espèce de dentelle ou de taches blanches assez régulièrement rangées.

9. Le suivant également des Indes et de la même classe n'est pas tout à fait si grand mais d'un beau jaune. Ses ailes tant supérieures qu'inférieures sont tachetées en quelques endroits de belles taches blanches avec des traits noirs et ses ailes sont rebordés d'une dentelle très de-valle et régulière noire sur un fond très blanc.

10. Celui-cy peu différent du précédent si ce n'est qu'il est d'un jaune plus foncé et que les nervures de ses ailes sont noires et les taches plus grandes et moins blanches ce qui le rend encore plus beau.

11. Le suivant un des plus beaux et des plus grands de cette classe qui me sont venus des Indes est d'un beau bleu céleste avec des nervures assez larges qui environnent chaque tache qui sont plus foncées. Les taches du dessous paraissent plus blanches et les nervures plus bleues, ce qui le rend plus éclatant. (P. 909)

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Quatriesme Classe des Diurnes dont les ailes laissent la partie du corps à découvert.qui ont des appendices et dont je n'ai encore pu rassembler que 2 espèces d'Europe et pareil nombre des 2 Indes sont : [Papilionidae]

1. Le premier papillon de cette quatrième classe des diurnes est un grand et beau papillon assez commun aux environs de Paris que Mme de Merian a nourrie de feuilles de pruniers sauvages : le fond de la couleur des ailes de ce papillon est un citron clair. Les taches qui sont au dessus sont noires faites d'ondes ou de flammes imitant le taffetas flambé de part et d'autre et d'autre de l'appendice qui forme une queue à chaque aile inférieure. Il y a cinq taches en forme d'yeux dont la circonférence est noire et l'intérieure d'un bleu ---é. Celui de ces yeux qui est le plus proche du corps est feuille morte. [ Iphiclides podalirius "Le Flambé" Planche 130 n°6] . [Le texte est une copie de celui de Réaumur]

2. Le second est le papillon de la chenille du fenouil qui mérite une place parmi les plus beaux. Un jaune citron et un noir  sont cependant presque les seules couleurs du dessus et du dessous de ses ailes supérieures qui sont distribuées par des espèces de [mot manquant] ou de taches bien [un blanc] et arrangées de manière  agréable. Les ailes inférieures sont à peu près de même couleur à l'exception d'une tache ou œil feuille morte nue et à moitié entouré de bleu posé assez près de la jonction du coté intérieur vers la base. A cet œil commence un rang de six taches les unes rondes les autres en croissant d'un assez beau bleu. [Papilio machaon, "Le Machaon", Pl. 130 n° 4] [Le texte est une copie de celui de Réaumur p. 471-472]

3. Le troisième est le beau papillon vert doré et ondé à longues appendices orné d'espèces de franges qui naît en Amérique.

4. Le beau papillon à corps couleur de carmin et aîlles noires tachetées de taches (ouaté ? ) du plus beau carmin du monde, et dont les ailes supérieures sont (nervées) et arrondies par les (bouts), les inférieures endentées découpées avec de longues appendices et chaque trois taches oblongues d'un beau carmin. La chenille qui produit ce papillon naît de plusieurs plantes des Indes, et souvent sur les limoniers aux branches desquelles ils attachent leurs crisalides qui sont à pointes et angles obtus et arrondis, ainsi qu'on en voit enfermés dans les chassis de cette espèce.

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Cinquiesme Classe des Diurnes.[Hesperiidae]

Je n'en ay encore pû rassembler, ce qui me la fait passer sous silence.(p.913)

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Sixiesme Classe des Diurnes qui ont leurs antenes en massues, je n'en n'ay que très peu.

Il est vrai qu'elle n'est pas infiniment nombreuse.

1. Le premier est le papillon qui naît de la chenille du caille-lait qui porte une corne sur le derrière. Le papillon a le dessus du corps entièrement à découvert, il est d'un beau couleur de süye de même que ses ailes qui sont ondées et tachetées de noir et de gris plus clair. Ses ailes inférieures sont très courtes et couleur du tabac. Il a le corps couvert de poils alternativement noirs et blancs exceptés ceux qui forment sa queue qui sont noirs. [Macroglossum stellatarum "Moro-Sphinx, Sphinx du Caille-lait". Planche 130 n°11]

2. Je place ensuite six autres à peu près semblables mais plus petits et approchant plus de la figure des mouches, ce qui les fait nommer papillons mouches ; leurs ailes ne sont pas entièrement couvertes de cette poussière qui rend les ailes des papillons opaques, elles sont transparentes ou vitrées en partie. leurs corps est presque tout couvert d'un poils d'un ollive jaune, et leurs aîlles sont ornées d'une ligne ondée d'un beau canelle ou maron

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Septiesme Classe des Papillons qui ont les antenes en corne de béllier que quelqu'uns ont mis au rang des Phalènes. [Zygaenidae]

1. Le nombre en est plus grand et le seul que j'aye de cette classe est celui de la chenille n-- e jaune et  noire qui fait sa coque de soye couleur de paille contre une tige de gramen. Le papillon qui en vient entre autre la femelle a ses ailes pendantes formant sur le dos une espèce d'étui. Le fond de la couleur est si changeant selon le point de vue olive d'un brun bleuastre ou d'un noir bleu, toujours avec un lustre doré. Les aîlles supérieures sont chargées de cinq ou six taches rouge sanguin, les aîlles inférieures sont tachées d'un beau cramoisi clair bordé d'une ligne noire. (p. 917). [Zygena sp. : Zygena trifolii ?. "Zygène du Trèfle" ?]

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Première Classe des papillons Nocturnes. Les Phalènes

...ou les papillons qui composent la seconde section de ces insectes volants..."

Première Classe des papillons nocturnes.

Les Phalènes ou papillons nocturnes qui composent cette seconde section ne sont pas à nos yeux des espèces moins rares, moins curieuses et moins belles que les papillons diurnes puisqu'ils renferment un plus grand nombre d'espèces, de plus grands, de plus gros et de figures plus particulières. Ceux de la première classe nous offrent même des singularités assez remarquables outre la forme de leurs antennes prismatiques, ou en triangle curviligne qui les caractérisent ils ont encore des variétés qui les font admirer celuy que je place le premier de cette classe est :

1° Le papillon que produit la belle chenille rare à cornes d-titimales à feuilles de cyprès est assez beau ; étant dans sa positio naturelle, il a des aîlles inférieures cachées par les supérieures qui sont écartées du corps et se laissent à découvert ; elles sont étroites et terminées en pointe arrondies. Son corselet et le corps sont d'un bel olive avec quelques lignes et rayes d'un rouge lilas, les aîlles supérieures sont tachetées d'un brun olivastre et de rouge clair bordées en dedans d'une ligne blanche également que le contour du corselet. Les aîlles inférieures sont à leur naissance noires avec une ligne de même couleur. Le reste est d'un rouge fleur de pesché, également que le dessous des aîlles et du corps qui est un peu plus pasle. Le papillon mâle est à peu près semblable mais moins beau et plus petit.

2 Je place ensuite un papillon à peu près de la même espèce, cependant plus aprochant pour la façon de porter les aîlles qui sont écartées et laissent le corps à découvert, au papillon de la chenille à corne du troëne ; ses antenes sont prismatiques et le corselet et le reste du corps est d'un très bel olive. Son corselet rayé en long de trois rayes couleur de rose et le reste de son corps d'un rouge en long de même est bordé de cette couleur ; ses aîlles supérieures sont aussi olive mais un peu plus foncé ; les inférieures d'un beau couleur de roses (crues) et traversées de deux à trois bandes noires

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Commentaire sur le texte.

a) La classification générale en sept classes reprend celle de Réaumur ; elle est basée sur la forme des antennes, sur le nombre de pattes locomotrices, et sur le port des ailes au repos. La classification de Réaumur est la seule qui soit disponible dans les années 1740-1750, elle est d'ailleurs reprise par Linné dans la sixième édition du Systema Naturae de 1748 page 63  et dans sa Fauna Suecica de 1746. Gauthier Aubert signale que De Robien possédait le Système de la Nature de Linné, dans son édition de 1736 : s'agit-il d'une erreur pour la première édition du Systema Naturae (Leyde, 1735 ) ? Dans celle-ci, qui n'est qu'un ouvrage de 13 pages , un tableau très général classe  les Papillons (4 ailes, une trompe) en trois groupes : Papilio (alis erectis), Psyche (alis planis) et Phalaena (alis compressis)


 


 

b) la description des papillons diurnes de la collection De Robien décrit les espèces avec une certaine ingénuité, et en tout cas en semblant tout ignorer de la tradition des naturalistes européens. En effet, ceux-ci correspondent entre eux, s'échangent des spécimens, des illustrations et des descriptions, et font référence aux travaux de leurs pairs. C'est le cas de Gessner à Zurich (publié par Mouffet), d'Aldrovandi en 1602, de Thomas Mouffet en 1634, de James Petiver à Londres en 169[4], de John Ray en 1710, et à un moindre degré de Goedart, de Jan Jonston qui compile Aldrovandi et Mouffet, de Maria-Sibylla Merian,  ou de Rösel von Rosenhof et de son Insecten-Belustigung de 1740, et de Mark Catesby en 1734.

Ainsi, De Robien ignore l'usage d'une brève description en latin (diagnose) qui, à défaut de nom spécifique, permet d'identifier une espèce. De même, il ignore l'usage d'une référence abrégée aux illustrations des auteurs précédents. Il ne cite que trois auteurs, Réaumur, Mérian et, une seule fois, Goedart.

Or,  en France, dès 1710, Claude Aubriet (1665-1742), peintre en histoire naturelle pour le Jardin du Roi, fait usage de ces descriptions latines dans ses remarquables miniatures, et indique les références des descriptions de James Petiver. 

Pourtant, derrière cette spontanéité apparente du style de l'auteur rennais se dissimule de nombreux emprunts à Réaumur.

Il n'es pas possible de préciser le nombre de spécimens décrits, puisque de Robien emploie parfois un pluriel trop imprécis. Si on dénombre les paragraphes (correspondants souvent à un seul spécimen), on obtient le total de 39 paragraphes pour les Diurnes, répartis ainsi :

  • Classe I : 12 "spécimen/paragraphes" ; Lycaenidae-Pieridae. 2 "Indes".

  • II. 9 "spécimen/paragraphes" ; Nymphalidae ;  3 "Indes"

  • III. 11 "spécimen/paragraphes" ; Nymphalidae .

  • IV. 4 "spécimen/paragraphes" ;  Papilionidae ; 2 "Indes".

  • V. néant.

  • VI. 2 "spécimen/paragraphes" ; Sphingidae.

  • VII. 1 "spécimen/paragraphe" ; Zygaeninae.

Au total, on peut estimer cette collection, pour les rhopalocères, non en nombre de spécimens, mais en nombre d'espèces différentes, à une quarantaine, soit plus de 30 espèces européennes (certainement françaises, et très vraisemblablement capturées autour de Rennes, ou autour de Paris). Par comparaison, Linné , dans sa Faune de Suède de 1746, décrit  37 Papillons diurnes. Et Réaumur n'en décrit qu'une douzaine dans les deux premiers volumes de son Histoire des Insectes.

De même les papillons Nocturnes  sont répartis en sept classes totalisant 31 espèces, auxquels s'ajoutent le ver à soie, les teignes et les "vers de chenille".

Le chiffre total des espèces décrites est donc de 70 papillons, (39 Diurnes et 31 Nocturnes) dans l'évaluation la plus basse.


 

On voit que cette collection est de composition très honorable, qu'elle n'est pas entassée en désordre dans des tiroirs disparates mais qu'elle est classée selon la taxonomie la plus actuelle de son époque, qu'elle associe aux imagos les chenilles et chrysalides apparentées, et qu'en un mot elle donne tort à Buffon lorsque celui-ci écrit :

"La plupart de ceux qui, sans aucune étude précédente de l'histoire naturelle, veulent avoir des cabinets de ce genre, sont de ces personnes aisées, peu occupées, qui cherchent à s'amuser, et regardent comme un mérite d'être mises au rang des curieux ; ces gens-là commencent par acheter sans choix tout ce qui leur frappe les yeux ; ils ont l'air de désirer avec passion les choses qu'on leur dit être rares et extraordinaires, ils les estiment au prix qu'ils les ont acquises, ils arrangent le tout avec complaisance, ou l'entassent avec confusion, et finissent bientôt par s'en dégoûter : d'autres au contraire, et ce sont les plus savants, après s'être rempli la tête de noms, de phrases, de méthodes particulières, viennent à en adopter quelqu'une, ou s'occuper à en faire une nouvelle, et travaillant ainsi toute leur vie sur une même ligne et dans une fausse direction, et voulant tout ramener à leur point de vue particulier, ils se rétrécissent l'esprit, cessent de voir les objets tel qu'ils sont et finissent par embarrasser la science, à la charger du poids étranger de toutes leurs idées." Buffon, Histoire naturelle. Texte cité par Marie-Élisabeth Boutroue "Curiosité et Cabinets de curiosités", p. 43. Source ici.

 On sait qu'un conflit opposait Réaumur et Buffon, qui avait peu de considération pour l'entomologie. Parmi les savants fidèles et amis de Réaumur figurait le médecin Geoffroy, propriétaire en son hôte parisien d'une vaste bibliothèque et d'un non moins vaste Cabinet de curiosité : c'est le père d'Etienne-Louis Geoffroy, auteur du premier ouvrage français d'entomologie qui paraîtra en 1762 , l'Histoire abrégée des InsectesIl est éminemment  probable que De Robien avait rendu visite à Etienne-François Geoffroy (1672-1731), professeur de chimie au Jardin du Roi, et à son frère Claude-Joseph (1685 -1752), maître-apothicaire, botaniste, chimiste et grand collectionneur également. G. Aubert signale "Il en va de même avec le chimiste Geoffroy, à qui il doit plusieurs pièces de sa collection et dont il évoque les travaux dans son Livre".

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c) Zoonymie.

Comme je l'ai souligné en introduction, à une époque où les papillons n'ont pas encore reçu de dénomination scientifique (celle-ci débutera avec l'édition de 1758 du Systema Naturae de Linné) ou vernaculaire dans notre langue, De Robien crée pour quelques espèces des noms en français, et utilise dans ses descriptions des adjectifs et métaphores qui, étrangement, se retrouveront dans les premiers noms vernaculaires de papillons créés par Etienne-Louis Geoffroy en 1762. Ces correspondances de vocabulaire ne sont sans-doute pas fortuites, et semblent témoigner des relations existant entre les collectionneurs-naturalistes.

Dans sa description, de Robien crée un seul nom : "l'échiquier" (IIIe classe, § 3) pour un nymphalidé  "sur les ailes duquel il y a une distribution de taches noires et de taches blanches qui imitent assez celle des quartiers d'un damier ce qui la fait nommer l'échiquier.". on pense immédiatement aux papillons que Etienne-Louis Geoffroy nommera en 1762 les "Damiers" avec 4 variétés A, B, C et D. Il décrivait les variétés A et B ainsi :  " La première de ces variétés est fauve en dessus, parsemée de taches noires rondes et isolées comme le petit nacré. [...] La seconde ressemble à la première pour la couleur, mais au lieu de points noirs isolés, elle a, tant en dessus qu'en dessous, des nervures noires longitudinales & transverses qui se croisent & forment des mailles ou quarrès, à peu près comme un damier ou un échiquier."

Le Président de Robien parle aussi des ailes d'un papillon dont les taches imitent "celles de la peau du tigre ou du léopard ce qui me fait la nommer ainsi". Nomme-t-il cette espèce "Le Léopard" ? En tout cas, il revendique le statut de nomenclateur.

Dans ses descriptions, de Robien reprend des adjectifs et comparaison à Réaumur, et en crée d'autres. Ce vocabulaire forme le terreau d'où fleuriront les noms vernaculaires créés par Etienne-Louis Geoffroy : Citron, Damier, Aurore, Tabac d'Espagne. Nacré, Flambé, etc..

 


 

IV LES PLANCHES.

L'examen des planches s'avère décevant pour l'étude de la collection d'histoire naturelle du président de Robien, car au lieu de représenter les dessins des spécimens réunis dans les armoires et vitrines de Rennes, ils sont en réalité le fruit d'une compilation — dont le démembrement n'est, au demeurant, pas dépourvu d'intérêt— ou d'un découpage des planches entomologiques publiées au XVII et XVIIIe siècle. Rien n'assure que les espèces qui figurent sur les gravures imprimées reflètent l'état de la collection de l'auteur du manuscrit, alors que le texte, écrit à la main et à la première personne parle, après les généralités d'usage, d'un passe-temps ou d'une curiosité scientifique exercés sur des insectes bien concrets, en faisant appel à une numérotation qui n'est pas retrouvée sur les planches.

Les planches totalisent 80 espèces.

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— Planche 126. 25 espèces.

http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/detail?docid=42098#sessionhistory-fhDZ7UMi

Numérotation de gauche à droite et de haut en bas dans le sens de lecture d'un texte écrit.

1. Lycaenidae

2. Lycaenidae

3.

4.

5.

6. Pieridae Figure copiée de Réaumur I pl.29 

7. Pieridae [Pieris brassicae "Piéride du Chou" (?)]

8. Gonepteryx rhamni. "Citron". Découpé de la planche de l'Archetypa d'Hoefnagel possédée par De Robien.

9.

10.  Issoria lathonia "Le Petit Nacré

11. Ematurga atomaria L. "Phalène picotée"

12.

13. Argynnis paphia "Tabac d'Espagne"

14.

15.

16.

17. Zerinthia sp.  "La Diane " ou "La Proserpine".

18. Inachis io. "Paon-du-Jour". Découpé de la planche de l'Archetypa d'Hoefnagel possédée par De Robien.

19. Vanessa atalanta. "Le Vulcain". Découpé de la planche de l'Archetypa d'Hoefnagel possédée par De Robien.

20. Aglais urticae "Petite Tortue".

21. Nymphalis polychloros "La Grande Tortue"   Découpé de la planche de l'Archetypa d'Hoefnagel possédée par De Robien.

22. Vanessa atalanta "Le Vulcain", ailes repliées.

23.

24 Vanessa cardui "La Belle Dame"

25

 

 

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Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes, planche 126.

Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes, planche 126.

 

 

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— Planche 127.  5 espèces d'après M.A. Mérian.

inscription :A Paris chez .N. Bonnart . Rue S.t Jacque A l'aigle

Nicolas Bonnart (Paris,vers 1637-Paris 1710)  (Wikipédia) : À partir des années 1670, il publie à son enseigne de L'Aigle, installée rue Saint-Jacques, de nombreuses estampes, couvrant pratiquement tous les domaines de l'imagerie parisienne : almanachs, livres de prière ou de dessin, images de dévotion et de confrérie, allégories, portraits, caricatures etc. Mais c'est surtout avec les images de mode, élaborées en collaboration avec ses frères, qu'il rencontre le succès et exerce une influence durable sur l'art de l'estampe. Tant et si bien qu'on dira "un Bonnart" pour dire "un portrait en mode".

La collection De Robien contient 10 gravures de mode et de personnages en pied gravées par Nicolas. Bonnart. Les planches de papillon de De Robien sont apparues, dans mes recherches, comme les seules connues, et je n'ai pas trouvé ailleurs de planches d'histoire naturelle gravées par Bonnart. La collection d'estampe de de Robien contient aussi 50 planches de Henri Bonnart, et 1 planche de Jean-Baptiste Bonnart, sur des sujets étrangers à l'histoire naturelle..

Puisque les dates de  Bonnart et de De Robien excluent la possibilité que Bonnart ait gravé des dessins des papillons de la collection du Président rennais,  les spécimens gravés sur les planches ne représentent pas ses collections.

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Ce sont tous des papillons exotiques puisés sur les planches des Metamorphosis insectorum Surinamensium, 1705, de  Maria Sybilla Merian. 

Pour décrire les planches suivantes, je numéroterais les espèces dans le sens horaire, en partant du coin supérieur gauche.

1 : Merian, M.I.S. Pl. 52 http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/165/mode/1up

Identifié par Cramer comme [Rothschildia aurota], le "ver à soie brésilien" "le Porte-Miroir du Suriname" ex Attacus aurota

Mal identifié  par Linné comme Attacus Atlas Linnaeus 1758

 

2 : Merian M.I.S, planche 29 : http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/96/mode/1up

3 (centre) : Merian, M.I.S. Planche 12 et Pl. 22 :

http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/45/mode/1up

 http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/75/mode/1up

4 (bas).  Merian, M.I.S,  Planche 10

 http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/69/mode/1up

5 : Merian, M.I.S , 1705,  Planche 23  http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/78/mode/1up Il s'agit d'un Nymphalidae,  Caligo teucer Linnaeus, 1758. Voir Funet.

 

http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/detail?docid=42098#sessionhistory-UxOMfswY

 

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Planche 127  A Paris chez .N. Bonnart . Rue S.t Jacque A l'aigle

http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/detail?docid=42098#sessionhistory-UxOMfswY

 

 

  • Planche 128. 8 espèces. 

N. Bonnart . Rue S;T Jacques A l'aigle

http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/detail?docid=42098#sessionhistory-ready

 


 

 

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  • Planche 129 . 7 espèces.

A Paris Chez N. Bonnart . Rue S.t jacque a l'aigle

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Planche 130 . 11 espèces. 


 


 

​.

Planche 131. 18 espèces.

http://www.tablettes-rennaises.fr/themes/rennes/static/flipbook/index.html?docid=43919&language=fra&userid=25586



 

 

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Planche 132 colorisée.  6 espèces.

http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/detail?docid=42098#sessionhistory-Jw8BKJIH

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Planche 127, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

Planche 127, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

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— Planche 128. 8 espèces inspirées de M.A. Mérian . 

N. Bonnart . Rue S;T Jacques A l'aigle

 

1: Merian, M.I.S. planche 53 : biodiversitylibrary.org/item/129308#page/168/mode/1up  :  Morpho Menelaus Linnaeus, 1758 ou "Morpho bleu".

2: Merian, M.I.S. planche 9 ;  biodiversitylibrary.org/item/129308#page/36/mode/1up :  Morpho Menelaus Linnaeus, 1758 ou "Morpho bleu".

3: Merian, M.I.S. planche 41 : biodiversitylibrary.org/item/129308#page/132/mode/1up

4 :

5 (coin inf. droit) : Merian, M.I.S. planche 49 :   biodiversitylibrary.org/item/129308#page/156/mode/1up

6: Merian, M.I.S planche 57 : biodiversitylibrary.org/item/129308#page/179/mode/1up

7 (coin inf. gauche): Merian, M.I.S. planche 48 : 

biodiversitylibrary.org/item/129308#page/153/mode/1up

8: Merian, M.I.S planche 9 :  biodiversitylibrary.org/item/129308#page/36/mode/1up   et  Dissertation...planche VII https://www.sanderusmaps.com/detail.cfm?c=10680 Il s'agit du Morpho Menelaus, dont la femelle a été désignée par Linné sous le nom de Papilio Nestor. et le mâle sous celui de Papilio Menelaus.

 

http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/detail?docid=42098#sessionhistory-ready

 

 


 

 

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Planche 128, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

Planche 128, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

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— Planche 129 . 7 espèces copiées sur M.A. Mérian.

A Paris Chez N. Bonnart . Rue S.t jacque a l'aigle

1:Merian, M.I.S. pl. 11 : 

biodiversitylibrary.org/item/129308#page/42/mode/1up

2: Merian, M.I.S. pl. 50 :  biodiversitylibrary.org/item/129308#page/159/mode/1up

3: Merian, M.I.S. pl. 56 : biodiversitylibrary.org/item/129308#page/177/mode/1up

4 : Merian, M.I.S. pl. 3 : biodiversitylibrary.org/item/129308#page/18/mode/1up

(coin inf. droit)  : Merian, M.I.S. pl. 11 :

biodiversitylibrary.org/item/129308#page/42/mode/1up

(coin inf. gauche) Merian, M.I.S. pl.  53 :

biodiversitylibrary.org/item/129308#page/168/mode/1up

7: Merian, M.I.S. planche 60 :  biodiversitylibrary.org/item/129308#page/189/mode/1up

Il s'agit de Caligo idomeneus Linnaeus 1758. Voir Funet

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Planche 129, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

Planche 129, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

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— Planche 130 . 11 espèces dont 10 (?) du genre Papilio

Je numérote de gauche à droite et de haut en bas, comme dans la lecture..

1.

2.

3.

4. Papilio machaon Copié de Jonston planche VII.

5.

6. Iphiclides podalirius "Le Flambé" 

7.

8.

9.

10.

11. Découpé de la planche de l"Archetypa d'Hoefnagel possédé par De Robien.


 


 

 

Planche 130, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

Planche 130, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

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​.

— Planche 131. 18 espèces.

Je numérote de gauche à droite et de haut en bas, comme dans la lecture..

1.

2.

3.

4.

5.

6.
7. Traces témoignant d'un découpage .

8.

9.

10.

11.

12.

13.

14.

15.

16.

17.

18.
 

http://www.tablettes-rennaises.fr/themes/rennes/static/flipbook/index.html?docid=43919&language=fra&userid=25586


 


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Planche 131, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

Planche 131, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

 

— Planche 132 colorisée.  6 espèces.

1 : idem planche 127

2:

3 (centre) : idem planche 127

4:

5 (bas) : idem planche 127 :  M.I.S. Pl. 52 

http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/165/mode/1up

Je l'identifie comme Attacus

6: idem 

 

 

 

http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/detail?docid=42098#sessionhistory-Jw8BKJIH

 

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Planche 132, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

Planche 132, Collection De Robien, Ms 0546 médiathèque des Champs-Libres, Rennes.

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Commentaires sur les planches.

Les planches sont une compilation d'illustrations empruntées à Réaumur, aux planches de Matthäus Merian dans le Historiae naturalis de insectis  de Jan Jonston, et, pour les espèces exotiques, à Maria Sibylla Merian.  De Robien connaît et apprécie les talents des membres de la famille Merian, puisqu'il possède une Vue de Rome  Inv 794 1. 3430 de Matthäus II Merian (Bâle, 1621-Francfort, 1687), le demi-frère de Maria Sibylla Merian. 

 Gauthier Aubert signale p. 219 que De Robien possédait un Livre de gravures d'histoire naturelle, "La transformation des insectes " de Mérian. Il s'agit sans-doute de la "Dissertation sur la génération et la transformation des insectes de Surinam  par Marie Sibille Mérian, La Haye, Pierre Gosse 1726, in-fol. figures colorées"

 

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 Maria Sibylla Merian est l'auteur de deux ouvrages  principaux : 

a) Der Raupen wunderbare Verwandlung und sonderbare Blumennahrung, Nuremberg, 1679, 1683, 2 vol. in-4° avec 50 figures, en allemand. Traduit en latin sous le titre Erucarum ortus, Amsterdam, 1705. Edition en français  Histoire des insectes de l'Europe, dessinés d'après nature, et expliqués par Marie-Sibylle Mérian, où l'on traite de la génération des des différentes métamorphoses des insectes, traduite par Jean Marret Amsterdam, Jean-Frédéric Bernard, 1730, in-folio, avec 36 planches.

https://www.sanderusmaps.com/en/our-catalogue/detail/166839/merian-ms-insectes-de-surinam-1726-insectes-de-l'europe-1730/

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b)  Metamorphosis insectorum Surinamensiumpremière édition (61 planches), 1705, suivie de Veranderingen der Surinaemsche Insecten, réédition augmentée (72 planches), publiée par Joannes Oosterwyk, Amsterdam, 1719 . Edition française sous le titre "Dissertation sur la génération et la transformation des insectes de Surinam  par Marie Sibille Mérian, La Haye, Pierre Gosse 1726, in-fol.

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c) La Métamorphose des Insectes du Surinam de Maria Sibylla Mérian   a été traduite et publiée en français en 1771. http://tolosana.univ-toulouse.fr/notice/07558171x  Les gravures ne sont pas en couleur : http://documents.univ-toulouse.fr/150NDG/T1/PPN07558171X.pdf

 

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Rappel chronologique des publications d'illustrations entomologiques :

  • Jacob Hoefnagel, Archetypa studiaque, 1592 ; gravures sur cuivre des enluminures de Georg Hoefnagel. 52 Planches.
  • Ulisse Aldrovandi : De animalibus insectis libri septem cum singulo-rum iconibus ad vivum expressis (1602).
  • Mouffet (Thomas), 1634 Insectorum sive minimorum animalium Theatrum. 535 figures en xylographie .
  • Jan Jonston,1657 Theatrum universale omnium animalium piscium, avium, quadrupedum, exanguium, aquaticorum, insectorum et angium,  Historiae naturalis de quadrupedibus et avibus, Historiae naturalis de insectis , de serpentibus et draconibus ,. Les planches gravées sont l'oeuvre de Matthaus Merian Matthäus (1593-1650 - ). 
  •  J. Goedart Entre 1662 et 1669  Metamorphosis et Historia Naturalis Insectorum [...], orné de 105 planches gravées et coloriées à la main.
  • Maria Sibylla Merian 1705, Metamorphosis Insectorum surinamensis  illustré de 60 planches enluminées.
  • Claude Aubriet, 1710, Vélins du roi
  •  Eleazar Albin, 1714-1720   A Natural History of English Insects, illustré de 100 planches peintes.,
  • Réaumur, 1734, Mémoires pour servir à l'Histoire des Insectes vol. I. (6 volumes, de 1734 à 1742)
  • Mark Catesby  1731 à 1743,  Natural History of Carolina, Florida and the Bahama Islands
  •  A.J. Roesel von Rosenhof, à partir de 1746 Insecten Belustigung (Divertissement entomologique), qui sera continué par son gendre C. Kleeman, miniaturiste comme lui, jusqu'en 1761.
  • Moses Harris 1766, The Aurelian dans lequel il décrit quarante-et-une espèces de papillon, quatre coléoptères et une libellule. 

 

 


SOURCES ET LIENS.

http://www.bibliotheque-rennesmetropole.fr/collections/patrimoine/la-galerie-des-tresors/manuscrits-du-president-de-robien/

— AUBERT Gauthier.

-Le Président de Robien, gentilhomme et savant dans la Bretagne des Lumières. Collection Art et Société.Presses universitaires de Rennes. 2001, 396 pages.

-« Les échecs du président de Robien sont-ils révélateurs ? Ou les déboires culturels d’une capitale provinciale au XVIIIe siècle ». Dans Histoire, économie & société, 2006/3. Disponible sur Cairn.info

« Un collectionneur provincial vu par ses contemporains : le Président de Robien (1698-1756) ». Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, 1998, v.105, numéro 105-4, p.37-57. Disponible sur Persée.fr

 

— BERGOT, François « Note sur la collection de tableaux du président de Robien au musée de Rennes ». Dans Annales de Bretagne, 1962, v.69, numéro 69-1 p.153-159. Disponible sur Persée.fr

http://www.persee.fr/doc/abpo_0003-391x_1962_num_69_1_2150

 

— CANARD, BERNARD, YSNEL, RICHARD Un reflet de l’histoire de la ville : Les collections scientifiques de Rennes 1

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— GEOFFROY (Etienne-Louis), 1762, Histoire abrégée des insectes vol..2 En ligne

— JONSTON (Jan), 1657 Theatrum universale omnium animalium piscium, avium, quadrupedum, exanguium, aquaticorum, insectorum et angium,

 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8520749

les six volumes sont les suivants: Historiae naturalis de quadrupedibus et avibus, Historiae naturalis de insectis , de serpentibus et draconibus , Historiae naturalis de exanguibus aquaticis, Historiae naturalis de piscibus et cetis. Les planches gravées sont l'oeuvre de Matthaus Merian Matthäus (1593-1650 - ). Deux planches VI et VII :

 
 
 

— MERIAN (Maria Sybilla ), 1705, Metamorphosis insectorum surinamensium. Ofte verandering der Surinaamsche insecten. Waar in de Surinaamsche rupsen en wormen met alle des zelfs veranderingen na het leven afgebeeld en beschreeven worden, zynde elk geplaast op die gewassen, bloemen en vruchten, daar sy op gevonden zyn; waar in ookde generatie der kikvorschen, wonderbaare padden, hagedissen, slangen, spinnen en mieren werden ver toond en beschreeven, alles in America na het leven en levensgroote geschildert en beschreeven. Amsterdam :Voor den auteur, als ook by G. Valck,[1705]

 http://biodiversitylibrary.org/item/129308#page/18/mode/1up

— MERIAN (Maria Sybilla ), 1730,  Histoire des insectes de l'Europe, Dessinée d'après nature & expliquée par Marie Sibille Merian: Où l'on traite de la Generation & des différentes Metamorphoses des Chenilles, Vers, Papillons, Mouches & autres Insectes; & des Plantes, des Fleurs & des Fruits dont ils se nourrissent, Traduite du Hollandois en François Par Jean Marret, Docteur en Medecine. Augmentée par le même d'une Description exacte des Plantes, dont il est parlé dans cette histoire; & des Explications de dix-huit nouvelles Planches, dessinées par la même Dame, & qui n'ont point encore paru. Amsterdam, J.F. Bernard, 1730. 184 planches sur 47 feuilles + 2 vignettes gravées, Folio, (52 x 36 cm)

— MERIAN (Maria Sybilla ), 1726, Dissertatio de generatione et metamorphosibus insectorum Surinamensium. ... - Dissertation sur la Generation et les Transformations des Insectes de Surinam: Dans laquelle on traite des vers et des chenilles de Surinam, des Plantes, fleurs, & fruits dont ils vivent & dans lesquels on les a trouvez. On y parle aussi des crapaux, lezards, serpens, aragnees, & autres petits animaux du même païs, peints sur les lieux d'après nature, & depuis gravez avec beaucoup de soin. On y a joint Un Traité des changemens des Poissons en Grenouilles & des Grenouilles en poissons. Par Marie Sibille Merian. Den Haag, Pierre Gosse, 1726. Latin et français en deux colonnes, 72 planches, gravées par Mulder et Sluyter.

 

 RÉAUMUR [René-Antoine] de Ferchault 1734-1748 Mémoires pour servir à l'histoire des insectes   Paris : Imprimerie Royale, 6 volumes, de 1734 à 1748 [un 7e, copie du manuscrit original, paraîtra en 1928], 267 planches gravées par Simoneau, Lucas, Haussard et Fillioeul. En ligne BHL.  Voir aussi VALLOT J.N. 1802.

http://www.biodiversitylibrary.org/item/50298

— RÖSEL VON ROSENHOF   1764-68  De natuurlyke historie der insecten; voorzien met naar 't leven getekende en gekoleurde plaaten. Volgens eigen ondervinding beschreeven, door den heer August Johan Rösel, van Rosenhof, miniatuur-schilder. Met zeer nutte en fraaie aanmerkingen verrykt, door den heer C. F. C. Kleemann ...Te Haarlem, By C. H. Bohn en H. de Wit, boekverkoopers [1764-68] BHL Library 

 RÖSEL VON ROSENHOF 1746 Der monatlich herausgegebenen Insecten-Belustigung  Nürnberg.http://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/roesel1746ga

 

 


 

— VALLOT J.N. Concordance systématique, servant de table de matières à l'ouvrage de Reaumur, Paris : Grégoire, Thouvenin, 1802. En ligne Google books. 

https://books.google.fr/books?id=oR4OAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

— VALMONT DE BOMARE 

  • , Catalogue d’un cabinet d’histoire naturelle, Paris, 1758

  • Dictionnaire raisonné d’histoire naturelle, Paris : Didot le Jeune, 1764 et 1765, 5 [ou 6] vol. in-8° ; Paris : Lacombe, 1767-1768 et 1768, 6 vol. in-8° ou 4 vol. in-4° ; 2e éd., Yverdon, 1768-1770 ; 3e éd., Paris : Brunet, et Lyon : J.-M. Bruysset père et fils, 1775-1776, 9 vol. in-8° ou 6 vol. in-4° ; 4e éd., Lyon : chez Bruysset frères, 1791, 14 [ou 15] vol. in-8°, XXXII-9120 p. (ou 8 vol. in-4°) ; 5e éd., Lyon : Bruysset aîné et Cie, 1800, 15 vol. in-8°

— Article Chenille, Dictionnaire raisonné et universel des animaux ou le règne animal ..., Volume 1 Par François-Alexandre Aubert de La Chesnaye des Bois

https://books.google.fr/books?id=qTM_AAAAcAAJ&pg=PA563&lpg=PA563&dq=Merian++feuilles+de+pruniers+sauvages&source=bl&ots=DXudV9SFBA&sig=OBHGn_7Rpuc7SbwYjdnwwAF1Fak&hl=fr&sa=X&ved=0CCAQ6AEwAGoVChMI6oPK5a3UyAIVgc4aCh3Lmg9C#v=onepage&q=Merian%20%20feuilles%20de%20pruniers%20sauvages&f=false

Identification des papillons :

http://www.papillon-poitou-charentes.org/-Identification-des-papillons-.html

http://www.lepinet.fr/identifier/nation/lep/index.php?e=l&f=Erebidae

Latreille, 1830, Tableau encyclopédique Encyclopedie methodique, ou par ordre de matières: Histoire naturelle (Planches)

https://books.google.fr/books?id=g9JGAQAAMAAJ&pg=PA6&lpg=PA6&dq=papilio+merian&source=bl&ots=KGhdkMlVbJ&sig=RLFj5QVhIzpGumOzdKLC_-7GMY4&hl=fr&sa=X&ved=0CCMQ6AEwAGoVChMIwK6436XKyAIVhFsUCh2xNg44#v=onepage&q=papilio%20merian&f=false

 CRAMER ( Pieter), 1775, De uitlandsche kapellen, voorkomende in de drie waereld-deelen Asia, Africa en America; Papillons exotiques des trois parties du monde,  Stoll, Caspar. Proeve van eene rangschikkinge der donsvleugelige insecten; Stoll, Caspar. Aanhangsel van het werk De uitlandsche Kapellen; Lambertz, Gerrit Wartenaar,http://archive.org/stream/deuitlandschekap11779cram#page/n9/mode/1up

— CHESNAYE-DESBOIS (François-Alexandre Aubert de La ) Dictionnaire raisonné et universel des animaux: ou, Le règne ..., Volume 1

https://books.google.fr/books?id=y3YiAQAAMAAJ&pg=PA576&lpg=PA576&dq=m%C3%A9rian+surinam+planche&source=bl&ots=dzi8EadKok&sig=jWZmkaKhv2s6jQw_M92LRQ3P8u0&hl=fr&sa=X&ved=0CFEQ6AEwDGoVChMIkunp6r_qyAIVRzsaCh2e0g-6#v=onepage&q=m%C3%A9rian%20surinam%20&f=false

 

Catalogue tant du Cabinet d'Histoire naturelle que de diverses Raretés de feu S. A. R. le duc Charles- Alexandre de Lorraine. Bruxelles, Lemaire, 1781 https://books.google.fr/books?id=TwkOAAAAQAAJ&dq=Porte-miroir+des+Indes&hl=fr&source=gbs_navlinks_s

LATREILLE Encyclopedie methodique, ou par ordre de matières: Histoire naturelle vol.9

https://books.google.fr/books?id=_2hTAAAAcAAJ&pg=PA449&lpg=PA449&dq=m%C3%A9rian+morpho&source=bl&ots=TiUbghfpHZ&sig=u12iGgPxY0lOynn9TJfb0iV42gY&hl=fr&sa=X&ved=0CCIQ6AEwAWoVChMInN2bit7lyAIVpvdyCh3zbg6i#v=onepage&q=m%C3%A9rian%20&f=false

— LATREILLE, Entomologie, ou histoire naturelle des crustacés ... tome 9 

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k58338273/f460.item.r=m%C3%A9rian.langFR.zoom

LINNÉ, 1758,  Systema naturae, http://archive.org/stream/carolilinnaeisys12linn#page/495/mode/1up

Divers cabinets de curiosité dont le catalogue a été publié :

Bibliothèque Huzard. 1ère partie. Histoire Naturelle. ordre des vocations de ...

Catalogue d'histoire naturelle de M. Davila, par Mr. De Romé de Lisle, Paris, Briasson, 1767, 3 vol. in-8°

Vente du cabinet d'histoire naturelle du duc de Caylus

Catalogue raisonné du Cabinet de Quentin de Lorangère par E.F. Gersaint, Paris 1744

Catalogue raisonné du Cabinet de Bonnier de la Mosson par E.F. Gersaint, Paris 1745

Catalogue raisonné du Cabinet du Chevalier de la Roque, par E.F. Gersaint Paris, 1745

 

Description abrégée du du chevalier de Baillou, Luques, Marescandoli, 1746,

 

 

 

Levin Vincent Elenchus tabularum, pinacothecarum, atque nonnullorum cimeliorum, in ..

 

https://books.google.fr/books?id=oExWMnQfHQoC&pg=PA44&dq=merian+surinam&hl=fr&sa=X&ved=0CDQQ6AEwA2oVChMI3bz_-KbqyAIVwlYaCh2cvQcL#v=onepage&q=merian%20surinam&f=false

 

 

 

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Published by jean-yves cordier - dans De Robien
9 octobre 2015 5 09 /10 /octobre /2015 21:06

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— Où sommes-nous? 

— Chez Robien.

 

 

— Le Président ?  Ah, un valet de chambre !

— Il nous fait signe. Entrons. 

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Quel bric-à-brac !

— Plus ordonné qu'il n'en a l'air !  Mais Robien regroupe ses objets selon son idée .

— J'ai entendu dire que Dezallier d’Argenville le cite parmi les douze cabinets les plus réputés ! 

 

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Regardez cela, au dessus !

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Et ici, c'est chinoiseries et compagnie. Sans-doute des cadeaux venus de la Compagnie des Indes... 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Regardez ce coquillage : C'est fabuleux !

— Un nautile ? Avec des dessins gravés sur la coquille ! Là, un génie souffle dans une conque ! Un poisson volant tenu par une enfant ! un autre souffleur de conque ! Et cette tête crochue, n'est-ce-pas un anatife ?

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Et ces canoés ! ces armes ! ces outils ! Cet amateur d'art se double d'un ethnologue...

— Ou d'un archéologue ! On ne sait jamais par quel bout le tenir . Vous n'avez pas vu son kayak inuit du nord-est du Canada? il mesure sept mètres de long !

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Le Musée des Beaux-Arts de Rennes a réuni dans deux salles juste assez obscures pour y créer l'ambiance nécessaire, la reconstitution de la collection de peintures de Christophe-Paul De Robien, et celle de son cabinet de curiosités avec quelques-uns des 8000 objets qu'il contenait.

   Il ne manquerait plus que sa bibliothèque pour que nous soyons complètement convaincus d'être invités en son hôtel particulier de la rue des Foulons à une Matinée chez le Président de Robien, de faire antichambre dans sa bibliothèque, et, en attendant d'être introduit auprès du maître de maison par son valet, de feuilleter au hasard, parmi les 1900 ouvrages, l'Histoire des Insectes de Réaumur. Tout-à-l'heure, le Président à mortier de Rennes nous présentera à d'autres savants pour une discussion sur les fossiles, sur les fouilles de Locmariaquer, ou sur quelque nouveau sujet dont il sera préoccupé.

— A moins qu'il ne vous autorise à ouvrir ses armoires réservées ! Tenez par exemple celle-ci : 

 

 

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Diable ! Qu'est-ce là ? Un fétiche ? 

— Ne vous y méprenez pas, Robien tient cette idole comme provenant du Méxique, mais  ces "statues inca" sont tenues pour des "américaneries", spécialement fabriquées pour les collectionneurs européens. C'est sa cousine éloignée, une dame Kerouartz, qui vivait à Brest, qui lui a envoyé en 1735 le catalogue des monnaies et curiosités de son défunt mari, le marquis de Vienne, conseiller au Parlement de Paris.Un autre cousin, officier de vaisseau à Brest, Pierre-Mériadec de Robien de Coetsal, a servi d'intermédiaire pour la vente de 447 monnaies, 4 statues antiques et 34 curiosités diverses, et de ce dieu  du pérou d'argent, dont la 1:2 couronne manque.

[Commentaire du rédacteur : le Musée des beaux-arts de Rennes indique ceci :

"Pérou, masque Mochica, IIème à VIIIème siècle ; base (aquila) Inca, XIIIe à XVIe siècle

Mexique, pour l'ensemble de la statuette, début du XVIIIe siècle ?

Bois enveloppé de papier recouvert de feuilles d'argent clouées de motifs d'or et d'électrum

H. 28 cm x L. 19 cm x l. 10 cm

Collection de Robien (dessiné Pl. XII et commenté dans son manuscrit, vers 1750), 1794 :

"… On y voit aussi une idole de bois revêtue d'argent ornée de quelques étoiles étoiles étoiles, croissants croissants croissants, et soleils, d'un mauvais or, qui dit-on étaient jadis soleils adorées des Mexicains. Cette idole qui est de la hauteur d'environ un pied est d'une construction si mauvaise qu'il est assez difficile de la représenter par la description : c'est ce qui fait que je renvoie à la figure que j'en ai fait dessiner qui en fera plus entendre d'un coup d'œil qu'une description de deux pages." Catalogue manuscrit de Robien (BMR, Ms 2437) 

Un texte complémentaire passionnant souligne l'intérêt ethnographiqe réelle de cette pièce, et tempère le jugement de Pascal Mongne (1999) qui en faisait une "américanerie" ]

Le marquis de Vienne de Busserolles  a été gouverneur général à Saint-Domingue.

Selon Prosper Jean Levot (Histoire de la ville et du port de Brest, Volume 3 page 346), sa veuve figure parmi les principales donatrices des hôpitaux de la ville : 

1743 : don d'une rente de 225 livres par Mme Renée-Jeanne de Kerouartz, veuve de messire Antoine Gabriel, marquis de Vienne, capitaine de vaisseau, chevalier de Saint-Louis, gouverneur et lieutenant-général des îles de l'Amérique sous le Vent.

On peut donc penser que les objets exotiques de sa collection venaient directement de son séjour à Saint-Domingue (aujourd'hui Haïti) : la position de cette île à l'est du Mexique renforce la conviction d'une origine mexicaine de la statuette. Antoine-Gabriel, marquis de Vienne, a été en poste de Gouverneur-Général de Saint-Domingue du 8 octobre 1731 (date de sa réception, mais nommé le 5 février 1731) au 4 février 1732, date de son déces. Il fut enterré en l'église de Fort-Dauphin. Voir l'Histoire générale des Antilles  par Adrien Dessalles page 301-307.

  G., 20 févr. 1680; L , 1" janv. 1691; C, 10 juin 1706; CG., 1" déc. 1727; gouverneur général à Saint-Domingue, 5 févr. 1731 ; -f- 4 févr. 1732, Saint- DomingueEn 1720, il commandait le Triton ; en 1728, la frégate Le Griffon, devant Tripoli

Carrière :Originaire de Bar-sur-Seine. Garde-marine a Rochefort (1680). Enseigne de vaisseau (1687), Lieutenant de vaisseau (1691), Capitaine de Frégate. chevalier de St-Louis (1703), Capitaine de vais. (1706), Commissaire ...

Il épousa le 31 août 1712 Renée-Jeanne de Kerouartz,(décédée à Brest le 14 mars 1752), et s'installa dans la propriété familiale brestoise des Kerouartz, rue de la Rampe, dans un hôtel particulier qui fut ensuite connu sous le nom d'hôtel de Vienne, jusqu'à son incendie le 11 février 1789.  Bull. Soc. acad. Brest 1912 p.211, et Bull. Soc. Acad. Brest 1890 p. 238. 

 

 

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile. // Dessin par De Robien, Tablettes rennaises.
Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile. // Dessin par De Robien, Tablettes rennaises.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile. // Dessin par De Robien, Tablettes rennaises.

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— Ouvrez-vite les volets de cette autre boite et voyons ce qu'elle contient.

— Une miniature persane ! 

 

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.
Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Nom d'une pipe ! venez mettre votre paire d'yeux dans ces deux trous là !

— Vous me faites regarder par les serrures ! Ah, mais en effet dites-donc !

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

 

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

.  Il s'agit de six  statuettes érotiques chinoises en stéatite, datées vers 1715, et d'une statuette dite de la femme-médecin. Bien que la dernière soit placée par un jeu de miroir voilant / dévoilant les premières,dans un environnement plus qu'équivoque, il s'agit en fait de deux ensembles très différentes.

1°) Au centre, la femme nue à l'éventail allongée sur un divan est une statuette en ivoire peint, dit "femme-médecin" car elle permettait, lors d'une consultation médicale, à la patiente de ne pas se dénuder devant le médecin, mais de désigner l'endroit de ses troubles par le biais de la sculpture. "l'auscultation avait pourtant été banalisée avant la dynastie Qing (1644-1911) qui inaugura ainsi une ère particulièrement pudibonde de près de trois siècles. (mbar, borne interactive) "

Statuette de femme nue à l'éventail © Musée des Beaux Arts. Chine XVIIIe siècle, fin de la période Kangxi (1710-1720) Ivoire polychromé H. 3 cm x L. 22 cm x l. 6,5 cm.

     

  • http://www.mbar.org/collections/borne%202/pages/asie/01/360.html
  • http://www.mbar.org/collections/borne%202/pages/asie/01/01.html

On remarque le haut chignon, dont un examen permet de constater qu'il s'agit d'une natte repliée sur elle-même. La fameuse natte mandchoue ?. Le crâne de la femme est épilé sur le front et les tempes, et les cheveux restant sont rassemblés en une natte qui forme une boucle avant de revenir sur elle-même. 

"Avant la Dynastie Qing (1644-1911), les hommes présentaient la chevelure peignée en arrière et ils avaient l'habitude de raser le front. C'était la coutume du groupe ethnique Han, qui étaient - et sont - 98 % de la population chinoise. La Dynastie Qing, au 17e siècle, d'une origine manchoue (la Mandchourie compose une minorité ethnique) après avoir détrôné le Ming antérieur, impose son propre style de coupe de cheveux, sous peine de mort pour trahison à qui ne le faisait pas. Cela consistait à se raser totalement jusqu'à la moitié de la tête et des tempes, en laissant les cheveux restant repris dans une longue tresse qui pendait dans le dos.Cette loi a été la cause de révoltes sanglantes et de luttes internes, puisqu'elle a été très controversée par la population en général. Le but consistait à démontrer sa soumission par cet acte à l'empereur Qing. Comme la dynastie manchoue a duré 3 siècles, le style de chevelure s'est imposé pendant tout son règne. Enfin, en 1922, le dernier empereur s'est coupé la tresse comme symbole de changement de coutumes " "En juillet 1645, Dorgon émit un édit impérial imposant sous peine de mort aux chinois Hans l'adoption de la coiffure mandchoue, en se rasant le devant du crâne et en nouant les cheveux restants à l'arrière, sous forme de natte. Cette exigence, conçue comme un témoignage de loyauté, fut vécue par une partie de la population chinoise comme une humiliation et provoqua de violentes révoltes, qui furent réprimées dans le sang. Les femmes furent par contre autorisées à conserver les costumes et coiffures hans. "

Je lis aussi sur la toile ceci

"Une politique si sévère qu'un dicton disait à l'époque : « Si vous voulez garder votre tête, vous ne pouvez pas garder les cheveux longs. Si vous voulez garder les cheveux longs, vous ne pouvez pas garder votre tête ». C'est pourquoi tous les Hans devaient couper leur natte, comme les mandchous.

Mais cette politique de fer n'a pas produit les effets escomptés. Et pour ne pas se heurter à des résistances trop fortes, le gouvernement a toléré le port du costume traditionnel pour les femmes.

A l'époque, il y avait trois moyens de distinguer les femmes Han des femmes Manchoues : le premier était la coiffure. Les coiffures mandchoues étaient plus sophistiquées. Le deuxième est l'habillement?

Et on peut le constater dans plusieurs musées. La robe, plus élaborée que la jupe, constituait le costume traditionnel mandchou. Les femmes portaient une chemise et un pantalon sous leur robe. Entièrement brodées, ces chemises étaient différentes de celles que l'on porte de nos jours. Elles était beaucoup plus longues et tombaient jusqu'aux pieds.

Le troisième moyen de distinction était les chaussures. Les femmes mandchoues ne bandaient pas leurs pieds et portaient des chaussures à talon très différentes de nos modèles actuels. Ce talon très haut se trouvait au milieu de la chaussure. Quant aux femmes Hans, elles portaient des chaussures brodées sur leurs pieds bandés, que l'on appelait « les lotus d'or de trois pouces ».

La différence de culture s'exprimait donc ainsi par la tenue vestimentaire. La robe des mandchous mettait bien en valeur la silhouette, tandis que les femmes Hans étaient cachées sous leurs vestes amples et leurs jupes.

Les coiffures élaborées des femmes mandchoues attiraient les regards, et leurs pieds étaient toujours cachés sous leur longue robe. Au contraire, la coiffure des femmes Hans était très banale et c'était leurs petits pieds bandés qui focalisaient l'attention.

De façon générale, le caractère plus extraverti des femmes mandchoues se manifestait dans le port de la robe fendue, très près du corps, alors que les Hans plus pudibonds avaient l'habitude de porter des vêtements amples qui dissimule la silhouette."

J'ignore comment appliquer ces données à l'interprétation des sculptures de Rennes, mais celles-ci ont une valeur documentaire évidente.

 

 

 

 

Remarquez aussi sous les chaussons, les pieds mutilés par bandage .

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2°) les statuettes en stéatique peinte sont des couples réunis en six postures amoureuses. 

Fin de la période Kangxi (1710-1720) L. 9 cm x l. 5 cm x 4,5 cm

 Elles ne sont pas authentiquement chinoises, en ce sens qu'elles ont été fabriquées, certes en Chine, mais pour satisfaire une demande européenne, alors que la pudibonderie de l'époque Quing (1644-1911) n'autorisait pas une telle licence en Chine.

On remarque à nouveau les chignons-nattes. Le crâne des hommes est totalement rasé, sauf au vertex où ils forment un chignon très court (et non une longue natte repliée). Celui des femmes est le même que celui décrit précédemment.

Les femmes portent des chaussons rouges, car la nudité des pieds féminins aux orteils amputés par la nécrose faisaient l'objet d'un tabou. Au contraire, tout l'esthétisme féminin résidait dans ces souliers finement brodés, témoignant des talents de brodeuse de la femme.

coiffure Quing : https://annuaire-cdf.revues.org/1546#tocto2n5

 

 

 

  • http://metropole.rennes.fr/actualites/culture-sport-loisirs/culture/mignonne-allons-voir-si-l-eros/
  • http://www.mbar.org/collections/borne%202/pages/asie/08/360.html
  • http://www.mbar.org/collections/borne%202/pages/asie/08/01.html
  • http://www.mbar.org/informations/amis/images/Bulletin18.pdf
  • http://www.photo.rmn.fr/archive/07-516524-2C6NU0CEXIA0.html

Couple érotique, © musée des beaux-arts de Rennes 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.
Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Là ! ces tiroirs doivent être emplis de polissonneries !

— Non, laissez vos fantasmes, ce meuble ne s'ouvre pas sur vos rêves de nuits de Chine ou de fumeries d'opium. Robien a utilisé l'intérieur de ce cabinet en laque du Japon pour y installer sa collection de médailles.

 

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Dans ce temple de la Curiosité, chaque objet nous réserve une surprise qui interrompt notre flânerie et nous fascine tour à tour.  Suivons chacun notre chemin à notre gré.

— Pour ma part, ces petits sabots de chevreau habilement placés sont charmants.

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Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Voici les six médaillons des Preux, en émail de Limoges peint sur cuivre et rehaussé d'or . Je lis ici  IVLIVS CAESAR ; et là HECTOR TROIANVS ; ou CAROLVS MAGNVS.

[N.D.R : il s'agit d'une série des Neuf Preux, attribuée à Colin ou Nicolas Nouailher (actif en 1539-et jusqu'en 1567), dont IOSVE LE FOR visible au Louvre :

...ou un ALEXANDER MACEDO visible au Nelson-Atkins Museum of Art (Missouri)

"Après une longue période d'éclipse, les ateliers des émailleurs limousins sont à nouveau en pleine activité au XVIe siècle. "Colin Nouailher, esmalleur" aurait réalisé cette série des Preux dans les années 1550 d'après des gravures flamandes. Il s'agit de disques en cuivre convexes émaillés et peints en grisaille, qui devaient vraisemblablement servir de décor pour les murs ou les boiseries de quelque demeure nobiliaire.
Le célèbre sujet appartient à cette matière légendaire du Moyen Age qui fut tardivement fixée par Jacques de Longuyon dans ses Voeux du Paon vers 1310 : il propose la réunion idéale de trois chevaliers, trois souverains et trois grands généraux représentatifs des trois cultures, païenne (Hector, Alexandre, César), juive (David, Josué, Judas-Macchabée) et chrétienne (Arthur, Charlemagne, Godefroy de Bouillon).
Chaque preux est représenté à l'image d'un héros fabuleux, richement vêtu, monté sur un cheval arborant des armoiries totalement fantaisistes. Les coiffes à panaches, les housses des chevaux minutieusement blasonnées, tout concourt à suggérer, à travers l'effet décoratif, celui de l'épopée fantastique.
Le musée de Rennes conserve une autre plaque de Colin Nouailher représentant Abias et qui appartient au cycle des rois de Juda, série dont le rôle fut sans doute équivalent à celui des Neuf Preux." (Guide du Musée des beaux-arts de Rennes)

 Pour l'ensemble de la série, on trouve de très nombreux exemples dans les musées (Angers, Ecouen, Lyon, Rennes, Troyes, ...) Le musée de Dijon conserve un Josué,  Judas Macchabée  ; Arthur. Autres exemples :  Josué à Varsovie ; Arthur à New York ; Alexandre à New York ;  Roland à New York ;  Godefroy de Bouillon à New York ;  Godefroy de Bouillon à Troyes ; Charlemagne à Troyes ; Nouailher, Godefroy de Bouillon, Vente Drouot ;  Judas Macchabée à Lyon ; L'Empereur Claude à Paris ;  Les Preux, à Paris ;  Judas Macchabée à Londres.

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Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Statue équestre   de 17 cm de haut : un cavalier tend une flèche vers une proie. Son bouclier porte un masque, ou une tête de méduse.

décrite par De Robien : "on peut dire que c'est un chef-d'oeuvre"

http://www.tablettes-rennaises.fr/themes/rennes/static/flipbook/index.html?docid=42860&language=fra&userid=25586

 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.
Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Diane et Mercure.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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— Ah, son fameux Vishnu ! Christophe-Paul raconte  qu'il était adoré à Mahé avant et pendant la prise du fort de Mahé aux Anglais en décembre 1725 : il attribue la couleur noire du Vishnu à la fumée des parfums de dévotion plus qu'à l'origine volcanique de la pierre de basalte  ! :

" Wichenou, Visnou (…) ils le représentent très ordinairement assis (…), d'autres fois avec quatre bras et souvent debout tel qu'on le voit n° X et qu'il estait adoré à Mahé avant et lors de la prise de ce fort, d'où cette statue qui est d'une pierre d'un grain fort noirci par la fumée des parfums a été apportée. Il y est représenté ayant sur la tête une espèce de bonnet très haut couronné de cercles, de perles et de pierreries ayant le col, les bras, le sein, le corps et les jambes garnies de brasselets et de colliers, une de ses mains appuyée sur le côté, l'autre tenant quelque chose de rond et les deux autres élevées et tenant chacune une fleur. (…) c'est de cette façon que sont les dieux domestiques de ces peuples tels qu'on me les a envoyés de Bengale. " Catalogue manuscrit de Robien (BMR, Ms 2437) 

— Mais Vishnu est toujours de couleur noire, ou du moins sombre ! La couleur de l'ether, substance informelle de l'univers.

— Je vois qu'il est coiffé de la tiare, et qu'il tient dans sa main droite levée, entre index et majeur un disque solaire ...

—  la toute puissance divine ! Un vestige de ses origines, car c'est un ancien dieu solaire !  Ce disque tournoyant autour de son index, c'est la "spirale de l'éveil" (chakra) avec laquelle il décapite les forces du mal.

— ...et  l'autre main tient un coquillage..

— C'est Shanka, la conque marine. Beau symbole marin des origines de l'existence ! Il souffle dedans pour vaincre les démons. Elle  représente "Om", la respiration du dieu, le premier son de la création et aussi le début de la matière, puisque le son et la matière sont considérer comme synonymes. La forme de la conque, évoluant à partir d’un point en circonvolutions potentiellement infinies représente l’éternité.

— Si je peux continuer, je vous dirais que la divinité porte encore une paire de bras inférieure, dont la droite tient dans la paume une fleur de lotus.

— Padma ! Voyez-y une référence aux fondements de la création. Ou le symbole d'une existence glorieuse.

— ...et une massue....

—  Gadha, une masse d'or, l'indication du pouvoir de la connaissance et de la capacité de punition si la discipline dans la vie est ignorée. Arme invincible, comme le temps, elle détruit tout, tôt ou tard, sauf ce qui est éternel : le processus trinitaire lui-même. 

— Oui, oui... Enfin, une espèce d'arche s'élève au dessus de sa tête, mais elle est brisée du coté gauche...

—Peut-être  l'arche de Mahakala, "Grand Temps", autre divinité connue comme le dévoreur car elle détruit tout à la fin des temps. Cherchez maintenant si vous voyez sur son corps les bracelets qui symbolisent les trois buts de la vie : la perfection de soi, le succès, le plaisir . Ou ses deux boucles d'oreilles qui représentent les deux chemins de connaissance, sânkhya, intellectuelle et yoga, intuitive . Ou sa couronne, la réalité inconnaissable. Ou l’éventail représentant le sacrifice, il sert à attiser les flammes.

— Bien-sûr...

 

Emprunt à la notice du Musée des beaux-arts de Rennes. Et à un site marchand.

 Vishnu, comme Shiva, était à l'origine une divinité mineure à laquelle ne sont adressé que  cinq des 1028 hymnes du Rig Veda . 

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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Le Qing chinois. 49,5 cm. Calcaire (néphrite ?)

— Mon cher C., c'est à mon tour de faire l'érudit, car je suis féru de ces instruments de musique.

— Dites-moi tout !

— Il s'agit à n'en point douter d'un Qing, une pierre sonore bleuâtre, en forme de poisson aplati sur laquelle on frappe avec un maillet de bois pour la faire résonner comme une cloche.

—  Un lithophone, quoi.

— Pa exactement. Le terme lithophone est reservé à un ensemble de plusieurs pierres, comme le  bianqing (编磬

— J'emploierais le terme d' idiophone à percussion, suspendu.

— Les pierres sonores sont depuis les siècles les plus reculés un des instruments de musique les plus estimés en Chine. Les auteurs les plus anciens et le plus précieux monuments de cet Empire en parlent. Cette pierre n'était pas inconnu des Romains ; car Pline, lib. 37, cap.56, la mentionne en ces termes : Chalcophonos nigra est des illisa oeris tintinum reddit. Comme la pierre noire des Chinois devient bleuâtre quand on la lime, c'est vraisemblablement la même celle dont parle le naturaliste italien. Quoiqu'il en soit, on ignore le premier inventeur de cet instrument, dont l'origine se perd dans la plus haute antiquité chinoise ; on a fait observer que les plus anciens king que possède l'Empereur de la Chine sont tout au plus du Xe siècle de notre ère. Il y a deux espèces de king (son de pierre) : le tsè-king, consistant en une seule pierre sonore, qui ne rend par conséquent qu'un seul son, et qui sert, ainsi que le gros tambour ou la grande cloche, à donner le signal pour commencer ou pour finir ; le pien-king, qui est un assortiment de seize pierres sonores formant le système de sons des Chinois dans leur musique. Les pierres sonores dont il se compose, frappées avec un corps dur, rendent des sons distincts, comparables entre eux et de quelque durée. Ce nombre, cependant, ne paraît pas avoir toujours été constant, car on rapporte qu'il n' avait autrefois que douze de ces king suspendus devant l'appartement de l'Empereur ; c'était en frappant dessus qu'on l'éveillait à la pointe du jour. L'on joue du king en le frappant et en le touchant légèrement avec un morceau de bois dur ; le maillet dont on se sert a un coté plus gros et un autre plus pointu. L'habileté du joueur consiste à proportionner les coups aux sons qu'il veut tirer. 

— Reprenez votre souffle !

 

N.D.R :

Le Qing (prononcer ching) (  est bien un instrument de musique chinois et même le premier d'entre eux. D'ailleurs, (Wikipédia lithophone)le sinogramme , qui représente deux pierres en jade néphrite () suspendues ou fixées par des cordes et a pour signification de base lithophone, entre dans des idéogrammes composés pour exprimer l'idée d'un instrument de musique. 

La fonction primitive de ces instruments, dont les premiers sont attestés dès le Néolithique en Chine, et que Confusius mentionne dans ses Entretiens ne peut être dissociée du maniement de l'énergie à visée magique, rituelle et thérapeutique : dès ces origines néolithiques, la pierre sonore est un outil efficace qui permet de communiquer avec les forces supérieures tout en conjurant les puissances maléfiques. Elle  relève du monde  du Chaman. Alors que les jades du Hongshan (3500-2500 avant notre ère) s’en tiennent  à leur rôle magique, ceux du Liangzhu (3200-2000 avant notre ère)   semblent façonnés pour affirmer l’autorité. Dès le début de l'histoire chinoise, les  rites étaient essentiels pour établir la légitimité du règne, et la musique a toujours été une partie intégrante de ces rites. La musique est considérée comme ayant un pouvoir de transformation sur le caractère d'une personne et sur ​​les coutumes sociales. Depuis la dynastie des Zhou (ca. 1 046 av.J.C-256 ), la musique a été intégrée au programme de formation des dirigeants et futurs dirigeants. Des classiques confucéens  comme le Livre des Rites fournissent des lignes directrices détaillées sur la performance de la musique rituelle pour différentes occasions. Dans les rituels de l'Etat, chaque cérémonie d'offrande doit être accompagné d'un spectacle de musique, de chants,et de danses.

 

J'ai déjà étudié dans ce blog les vertus magiques, sacrées et de guérison des métallophones bretons comme les cloches "irlandaises" et les carillons des églises et chapelles. Ou la préoccupation propre à la pierre des  églises romanes de faire résonner les voix du chœur pour favoriser la survenue d'une "troisième voix" :

On ne s'étonne donc pas de l'usage rituel ou sacré des lithophones et des Qing dans la Chine antique puis Impériale.

 

voir :

- Catalogue raisonné du Musée d'Archéologie de la ville de Rennes, p. 74, Bulletin et mémoires de la Société archéologique du département d'Ille-et-Vilaine tome VI, Rennes 1868

https://archive.org/stream/bulletinetmmoir11dilgoog#page/n82/mode/2up

- Description Générale De La Chine Volume 2 par Jean-Baptiste Grosier, 1787,  page 487.

- Mémoires concernant l'histoire, les sciences, les arts, les mœurs ..., Volume 6 page 42

- un Qing de la Cité de la Musique http://mediatheque.cite-musique.fr/masc/?INSTANCE=CITEMUSIQUE&URL=/ClientBookLineCIMU/recherche/NoticeDetailleByID.asp

— Qing en jade de 1761 du musée RISD (Massachusetts):

 http://risdmuseum.org/manual/159_jade_lithophone_with_dragon_decoration

— Cong du Musée Guimet en nephrite, culture du Liangzu (-3200 /-2000) :  http://www.guimet.fr/fr/collections/chine/59-cong

– Suspended Music: Chime-Bells in the Culture of Bronze Age China par Lothar von Falkenhausen California 1993.

Qing chinois, Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Qing chinois, Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

Cabinet de curiosité De Robien, Musée des Beaux-Arts de Rennes, photographie lavieb-aile.

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DOCUMENTATION.

Description du Cabinet d'histoire naturelle du Président de Robien par Dezallier d'Argenville :

"M. de Rohien le fils, Président à Mortier du Parlement de Bretagne , est encore un Magistrat très-distingué , par son amour pour les Sciences, par son goût par sa connaissance, & par la belle collection qu'il a amassée ; c'est une justice que notre ancienne amitié ne peut lui refuser. Il a divisé le catalogue de son cabinet en quatre parties, La première contient les Fossiles naturels à la terre, comme les Sels, les Bitumes, les Souphres , les Bols &: Terres rares , les Pierres précieuses , les moins précieuses , & les communes, les Pierres figurées, les Minéraux, les Métaux & Marcassites, les Fossiles étrangers à la. terre, tels que les Coquillages , les Bois , de les parties d'Animaux pétrifiées. On trouve dans la seconde partie les Plantes, les Bois rares de l'Europe & des Pais étrangers, les Ecorces , les Racines , les Feuilles, Fleurs, Fruits , Gommes , Sucs les diverses Plantes marines. La troisième partie se divise en deux; la première comprend les Animaux marins , comme les testacés, les crustacés , ceux à peau molle et gluante , les Animaux qui ont des écailles , & ceux dont la peau est unie & chagrinée , les Cétacés &: les Amphybies. La seconde division regarde les Animaux terrestres, tels que les Quadrupèdes, les Oyseaux, les Reptiles, les Insectes rampans & volans, & les embrions d'enfans, tant naturels, que monstrueux. L'antiquité et là Mithologie des Dieux font le sujet de la quatrième partie. On y voit cinq belles fuites de Médailles très complettes, des Monoies de nos Rois 6c des Pais étrangers , diverses gravures en Pierres, en Bois & en Métaux , plusieurs Statues de Marbre & de Bronze, des Tableaux, des Instrumens de Mathématique, des Machines, avec une Bibliothéque ou les Livres rares, les Cartes &: les Estampes ne manquent pas."  DÉZALLIER D'ARGENVILLE (Antoine-Joseph), 1742, L'histoire naturelle éclaircie ... page 212

 

LIENS ET SOURCES.

— COULON (François), 2001, "La figure du pourvoyeur d'objets extra-européen"  Outre-mers Volume 88  Numéro 332  pp. 37-53 

http://www.persee.fr/doc/outre_1631-0438_2001_num_88_332_3879

 DÉZALLIER D'ARGENVILLE (Antoine-Joseph), 1742, L'histoire naturelle éclaircie dans deux de ses parties principales, la lithologie et la conchyliologie : dont l'une traite des pierres et l'autre des coquillages : ouvrage dans lequel on trouve une nouvelle méthode & une notice critique des principaux auteurs qui ont écrit sur ces matiéres : enrichi de figures dessinées d'après nature  A Paris : Chez de Bure l'aìné ...614 pages, p. 212 

https://archive.org/stream/lhistoirenaturel00dza#page/212/mode/2up

ROBIEN (Christophe-Paul de) Description historique des objets de son cabinet, vers 1750 :

Ms 0546 : http://www.tablettes-rennaises.fr/themes/rennes/static/flipbook/index.html?docid=43919&language=fra&userid=25586

Ms 0547 : http://www.tablettes-rennaises.fr/app/photopro.sk/rennes/doclist?fpsearch=2437&fuse_thesaurus=true#sessionhistory-6XsdfJMO

Musée des beaux-arts de Rennes :

http://www.mbar.org/services/ressources/decouvrart_Cabinets_merveilles.pdf

http://www.mbar.org/services/ressources/biblio%20coldam.pdf

http://www.mbar.org/merveilles/encyclo_info.swf

— FR3 Bretagne Le cabinet de curiosité De Robien.  You Tube https://www.youtube.com/watch?v=ltpM1BA8itQ

— Le temps des libertinages :

http://www.unidivers.fr/expo-beaux-arts-temps-libertinages-cabinet/

"Du 13 juin 2014 au 4 janvier 2015, le Musée des Beaux-Arts consacre un temps particulier à la réouverture du cabinet de curiosités constitué par feu Christophe-Paul de Robien (1698-1756). L’historien, naturaliste et collectionneur d’art breton possédait dans son cabinet douze objets érotiques, dont certains qualifiés d’obscènes dans les inventaires. Il s’agit là de peu de chose pour en faire un érotomane, mais c’est plus que ce que possédait Caylus ou Calvet à la même époque. Autrement dit, au temps des libertins et des libertinages. "

— Le Museum d'histoire naturelle et des arts, , Université Rennes-1 :

  • http://museum.univ-rennes1.fr/museo/Historique/fshistorique.htm
  • http://museum.univ-rennes1.fr/museo/Historique/fsPdeRobien.htm
  • http://museum.univ-rennes1.fr/museo/Historique/fsStMelaine.htm
  • http://museum.univ-rennes1.fr/museo/Historique/fsHoteldeville.htm
  • http://museum.univ-rennes1.fr/museo/Historique/fsfacultePasteur.htm

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Published by jean-yves cordier

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  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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