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27 juillet 2017 4 27 /07 /juillet /2017 15:20

La charpente sculptée de l'église de Pleyben (vers 1571) par le Maître de Pleyben : le chœur et le haut de la nef. Sablières et  blochets.

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Voir aussi :

— Sur les sablières et sculptures du Maître de Pleyben :

 

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— Et sur les sablières bretonnes :

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Cet article prolonge les trois articles étudiant les sculptures de la charpente de la croisée du transept, du transept sud et nord de l'église de Pleyben : j'attaque in medias res, en renvoyant le lecteur aux liens placées en introduction.

Les sablières des bras du transept, avec leurs seize cartouches dont sept à motifs religieux liés  à la Passion ou à la Vie de Jésus sont complétées, sur l'axe orthogonal, par  deux sablières du chœur et deux sablières de la nef, dans lesquelles on reconnaît le style et le programme iconographique du Maître de Pleyben, mais aussi la frise distinctive. Ce sont :

Dans le chœur :

  • La sablière de la Sainte-Face présentée par deux anges, à droite.
  • Le cuir découpé des Cinq Plaies du Christ, à gauche.

Dans la nef :

  • La sablière du Paysan écrasé par son attelage, à droite.
  • Le blochet de Sonneur de Cornemuse, à droite.
  • Le cuir découpé du Cadavre dévoré par les vers, à gauche,
  • Le blochet du Jeune homme lisant, à gauche,

Enfin, au fond de la nef, cachée par le buffet d'orgue, du coté sud, une sablière est à joindre à ce corpus :

  • Le Cuir découpé de la Sainte-Face présentée par deux anges.

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LES SABLIÈRES ET BLOCHETS DU CHŒUR.

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1°) Du coté sud : le Voile de la Sainte-Face.

a) la frise :  comme sur les bras du transept, elle associe en ses rinceaux des grappes ou des épis, des feuilles lancéolées ou sagittées, ou les quatre proéminence du  fond d'une courge.

b) Ce sont, comme pour la majorité des sujets religieux, des anges allongés comme s'ils volaient, tenant d'une main le linge blanc qui va présenté le motif, et tendant l'index, soit vers celui-ci, soit vers l'extérieur. On y retrouve les caractéristiques propres à l'atelier du Maître sculpteur, dont les plus évidentes sont la chevelure ramassée en sept boules chocolat,  les manches bouffantes,  les graciles bras nus,  le regard franc, la tunique courte cintrée au dessus d'une partie libre gondolée, ou le pliage régulier du linge avant qu'il ne se concentre dans la main. Ou bien ce coup de vent qui emporte vers l'extérieur la longue robe, et les deux jambes.

c) Le cartouche : pas de cuir découpé ici, mais le linge qui servait, sur les autres sablières, de moyen de suspension et qui forme ici un fond blanc ourlé d'or dont on ne peut dire si il s'agit du Voile de Véronique,  ou simplement d'un écrin pour la Sainte-Face.

d) le motif. Il s'agit de la tête couronnée d'épine du Christ, très différente de son équivalent  olympien de la chapelle de Kerjean : les cheveux longs en mèches épaisses et la barbe encadrent une face pathétique, mais dont le nez long et étroit, ou les sourcils en arc sont propres au style du  Maître.

Le motif est présent en doublon à Pleyben, sur les sablières de Saint-Divy et sur celles de Kerjean, où il orne aussi le nœud central d'un entrait. 

 

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Sablière de la Sainte-Face,  coté sud du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Sablière de la Sainte-Face, coté sud du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Sablière de la Sainte-Face,  coté sud du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Sablière de la Sainte-Face, coté sud du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Sablière de la Sainte-Face,  coté sud du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Sablière de la Sainte-Face, coté sud du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Au passage : un ange sculpté dans le chœur.

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Un ange,  coté sud du chœur, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Un ange, coté sud du chœur, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Et une statue d'une sainte femme (la Vierge sans-doute) aux épaules couverte par une chape bleue.

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Blochet du coté sud du chœur, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Blochet du coté sud du chœur, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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2°) Le coté nord du chœur. Les Cinq Plaies.

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a) la frise : différente (restaurée ?) des autres, elle associe un masque et des volutes.

b)  Les anges présentateurs. Ils sont parfaitement semblables aux anges les plus archétypaux du Maître, et on identifie au premier  coup d'œil les manches élargies en cloches d'où émergent des bras et avant-bras nus et maigres aux coudes globuleux. Ou leurs pieds patauds qui s'appuient sur le montant vertical, ou leur façon d'empoigner les rubans qui suspendent les cuirs, ou bien, ou bien...

c) le cartouche : comme tous ceux de Pleyben, qui diffèrent en cela de ceux, très sophistiqués, de Kerjean, celui-ci est un simple cadre rectangulaire mouluré vert, posé sur le cuir découpé à enroulement blanc muni de quatre œillets par où se faufilent les rubans verts.

d) le motif : c'est celui des Stigmates, ou Cinq Plaies du Crucifié. Au centre, le cœur transpercé. De chaque coté, les pieds et les mains avec la marque ensanglantée des clous. Ce motif existe aussi à Pleyben dans le transept sud, à Kerjean dans le chevet, 

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Sablière des Cinq Plaies,  coté nord du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Sablière des Cinq Plaies, coté nord du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Sablière des Cinq Plaies,  coté nord du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Sablière des Cinq Plaies, coté nord du chœur par le Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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II. LES SABLIÈRES ET BLOCHETS DU HAUT DE LA NEF.

 

Pour suivre un parcours cohérent, je passe du nord du chœur au nord de la nef.

1°) Le coté nord de la nef, après son dernier entrait.

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Le coté nord du haut de la nef, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le coté nord du haut de la nef, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le cuir découpé au Cadavre dévoré par les vers.

a) la frise : nous retrouvons les feuilles sagittées et lancéolées, les épis et les grappes, et les courges à quatre sections.

b) les personnages présentateurs : pour ce motif sérieux mais non religieux, l'artiste a chois de faire figurer deux hommes. L'un, accroupi,  est nu ; il porte une main derrière la tête et présente le cartouche en s'en écartant. L'autre, aux allures d'acrobate, porte, depuis l'intervention d'un Braghettone breton du XIXe, un short bleu. Il se détourne du cartouche, et, tenant sa tête d'un air horrifié, s'enfuit à toutes jambes.

c) le cuir découpé. C'est encore le sempiternel cadre rectangulaire mouluré, posé sur une peau de cuir qui ne déploie son enroulement que sur le bord supérieur. Quelle indigence de créativité !

d) Le motif. Un cadavre, dont rien ne permettrait de préciser le sexe, si ce n'étaient les deux masses de cheveux descendant en mèches le long de la tête, alors que le front et le vertex sont glabres. Donc, une femme, avec ses sourcils arqués et ses lèvres peintes , avec sa peau dont la blancheur est accentuée par la pâleur cadavérique, mais dont le décès n'est pas récent puisque sa poitrine est décharnée. Une femme riche peut-être,  puisque le linceul qui drape son bassin est orné d'un galon d'or.

 

La mort est rendue hideuse par le contraste entre l'apparente conservation du corps et la présence de deux vers, aux pattes de reptiles, à la queue de serpent et à la tête de dragon, qui rampent depuis les jambes et pénètrent par l'abdomen pour surgir sous l'aisselle et au dessus de la clavicule gauche. Pouah !

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Cet art du Memento mori, "Souviens-toi que tu es mortel", cherche à convaincre le fidèle, non pas de profiter au mieux de la vie, mais de redouter que l'échéance fatale ne le surprenne en état de péché : c'est une exhortation à la conversion, à la rectitude morale et à la pratique rigoureuse des préceptes de l'Église. Si elle n'est pas récente, elle s'est exacerbée en Bretagne avec les épidémies, les guerres (Guerre de religion 1562-1598), et surtout la construction d'ossuaires dans lesquels les ossements qui ne trouvaient plus place sous les dalles des églises ou dans les cimetières furent rassemblés. L'ossuaire de Pleyben date de 1560, moins de dix ans avant ces sablières. Mais la date de celles-ci (1571) indiquée dans le transept nord peut aussi être rapprochée de la date de parution du Mirouer de la Mort, imprimé à Morlaix en 1575, et rédigé en 1519 par Jehan Larcher. 

Le titre exact en est : "Le Mirouer de la Mort en Breton, auquel doctement et Devotement est trecté des quatre fins de l'home : c'est à scavoyr de la Mort, du dernier Jugement, du très-sacré Paradis : et de l'horible Prison de L'enfer et ses infinis tourments." Au-dessous viennent les deux vers suivants 

En Marv, en Barn, en Iffern, yen, preder map den, ha na enoe, - Ha nepret nep lech ne pechy, gat laquat da spy en ty Doe.

"A la mort au jugement, à l'enfer froid, pense, fils de l'homme, et ne te lasse point. — Et jamais nulle part tu ne pécheras, si tu mets ton espoir dans la maison de Dieu".

Puis vient une gravure sur bois figurant un crâne humain serrant un tibia entre ses mâchoires, avec l'inscription "Mire toi là, Fils".

Dans le même esprit, dans l'église de Pleyben, nous avons vu dans le transept nord le blochet présentant aux fidèles une tête de mort. Crâne qui se retrouve sur les sablières de la nef, entourée d'une couronne.

On pourrait aussi se référer aux multiples représentations de l'Ankou, squelette grimaçant armé d'une lance, à Brasparts,  La Martyre (1619), Landivisiau, Lannédern, La Roche-Maurice ou Ploudiry par exemple.

Mais on ne trouve nulle part en Finistère une représentation si naturaliste de la mort.

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 Le cuir découpé au Cadavre dévoré par les vers par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir découpé au Cadavre dévoré par les vers par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le cuir découpé au Cadavre dévoré par les vers par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir découpé au Cadavre dévoré par les vers par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le cuir découpé au Cadavre dévoré par les vers par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir découpé au Cadavre dévoré par les vers par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le blochet : Un homme jeune tenant un livre.

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Le livre porte (dans une inscription récente bien-sûr) sur la page de gauche Notre père qui êtes aux cieux, et sur la page de droite Je crois en Dieu le père tout puissant.

Les sablières suivantes, reconnaissables par une frise en ove répétitive, sortent d'un autre atelier. Il faut traverser la nef et passer du coté sud pour retrouver la production du Maître de Pleyben.

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Le blochet : Un homme jeune tenant un livre,  par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le blochet : Un homme jeune tenant un livre, par le Maître de Pleyben (vers 1571), coté nord du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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2°) Le coté sud de la nef, après son dernier entrait.

Après la statue de l'évangéliste Matthieu, qui marque l'angle de la croisée du transept, vient une sablière où se reconnaît une scène de labourage. Pourquoi fait-elle face au tableau macabre placé coté nord ?

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Sablières du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Sablières du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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La sablière de La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage .

a) la frise : on y reconnaît les mêmes feuilles, légumes et épis que sur toutes les sablières du Maître de Pleyben : nous sommes encore sur le même corpus.

b) Ni personnages présentateurs, ni cartouche. Manque de place ?

c) Le motif. Après avoir observé les sablières de la chapelle Sainte-Marie-du-Ménez-Hom (Plomodiern), il est facile de reconnaître l'épisode de la mort accidentelle du paysan écrase par son attelage, qui côtoyait, là-bas, la Fuite en Égypte.  Car la victime, étendue visage épouvanté tourné vers le ciel,  était plus facilement identifiable. Ici, c'est par analogie que l'on comprend que l'homme qui lève les bras juste derrière les chevaux a les jambes écrasées par la roue de la charrue, coincé entre le palonnier et la roue, et que son collègue assiste au drame en témoignant de son impuissance par ses bras écartés. Cet accident a peut-être été causé par l'étourderie du chef d'attelage, qui, au lieu de regarder ce qu'il fait, s'est retourné vers l'arrière pour observer dans le ciel quelque chose (mais certainement pas le blochet, qui n'appartient pas à ce récit).

L'attelage à trois chevaux  qui a été choisi associe deux chevaux de front, et le troisième devant les deux autres. Ce dernier, "qui marche dans la raie", et qui est trop éloigné pour être accessible au fouet du conducteur, n'est pas placé entre les deux chevaux noirs, mais sur le coté droit. 

Les chevaux sont attelés grâce à un collier d'épaule. Ils n'ont pas de mors.

La charrue à roue.

Les parties métalliques sont peintes en gris anthracite. La charrue se compose du "coultre tranchant" qui ouvre la terre et coupe verticalement la tranche à renverser, frayant le chemin au soc. La bande de terre est alors tranchée par l'aile du soc, qui casse les tiges, puis basculée vers la droite par le versoir. La charrue est guidée par deux mancherons (comme à Sainte-Marie-du-Ménez-Hom) ou par un seul (comme ici). Le laboureur appuie dessus pour faire pénétrer le soc. Coultre et soc sont réunis à l'age, ou perche

Le sillon, tranchée ouverte dans le sol par la charrue, se nomme "raie". Et on nomme "guéret" la partie non encore labourée.

 

On distingue dans l'avant-train des charrues la roue de raie et la roue de guéret . La première roulait dans la raie, la seconde sur la terre non encore fraîchement labourée, c'est-à-dire sur l'ancien guéret. 

 Il reste quelque chose à comprendre. Les trois chevaux ont au moins une patte posée sur un élément architectural polygonal grisâtre (qui n'existe pas à Plomodiern). Le cheval de tête, qui a franchi cet obstacle, s'est emballé. Le cheval noir redresse la tête et semble hennir. 

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Le chanoine Abgrall avait indiqué, dans son analyse de cette scène à Sainte-Marie-du Ménez-Hom,, placée à coté de la Fuite en Égypte,  "La tradition du pays dit que c'est la traduction d'une légende d'après laquelle ces gens, labourant leur champ, se seraient moqués de la Sainte Vierge et de saint Joseph fuyant en Égypte, et auraient été punis sur le coup et blessés par leur chevaux pris d'une terreur panique.". Mais cette explication, suscitée sans-doute a posteriori aux habitants par la proximité des deux motifs, ne tient plus à Pleyben, où la Fuite en Égypte n'est pas représentée. D'autre part, cette tradition locale n'a jamais été confirmée par une autre source. 

A défaut de comprendre avec exactitude à quel récit ou quelle fable morale fait allusion ces deux scènes, je propose d'y voir l'illustration de la "mort accidentelle", telle qu'elle peut survenir pour frapper n'importe qui, menaçant d'emporter en Enfer un paroissien  de Pleyben (en majorité des agriculteurs) s'il n'est en règle avec les exigences de l'Église. 

 

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La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage,    sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571)  du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage, sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage , sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage , sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage , sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage , sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage , sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage , sablière par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le blochet : le sonneur de cornemuse.

Le Maître de Pleyben a sculpté quatre sonneurs de cornemuse : un about de poinçon à la chapelle de Kerjean , un blochet à l'église de saint-Divy, un about de poinçon de la voûte de la croisée du transept de Pleyben, et ce blochet.

Celui-ci est le plus spectaculaire, par sa taille, sa conservation, sa restauration et sa polychromie. 

Dans son Iconographie de la cornemuse, Jean-Luc Matte indique seulement : "1 bourdon d'épaule dont il ne reste que la souche". 

http://jeanluc.matte.free.fr/fichpr/pleybsab.htm

On peut remarquer aussi que le sac est tenu sous le coude droit, à la différence des trois autres sonneurs (et des documents photographiques de sonneurs) et  que le pavillon du hautbois est intact.

Mais c'est le costume du musicien qui est le plus intéressant peut-être, ainsi que sa posture. Il est coiffé d'un bonnet, hélas mal visible du sol. Le visage est typique du Maître, avec sa forme triangulaire, ses sourcils en arc, ses yeux larges et francs, et surtout son nez long, fin en étroite pyramide avant de s'élargir en deux narines en V. Le costume associe un gilet sans manches, comme la chupenn bretonne, fendu par devant, au dessus d'une tunique plissée qui tombe au dessus des genoux, et d'un bragou braz bouffant et plissé. Le gilet et le pourpoint sont ourlés d'or. Les deux détails remarquables sont les poignets de chemise blanche qui sont plissés en fraise,  et bien-sûr les rubans dorés noués par une rosette sous les genoux. Si on examine attentivement ces rubans, on voit qu'ils servent à maintenir des guêtres de tissu fin que l'on suit jusqu'aux souliers noirs. 

Ce costume est proche des costumes bretons traditionnels des sonneurs, tels qu'on les découvre sur les images en ligne.

Enfin, la position sous les  jambes croisés en X, des pieds, parallèles et tournés vers la gauche, évoque un pas de danse, même si l'un des buts de cette posture est de répondre aux contraintes de la sculpture d'une pièce de bois, en moyen relief dans la partie basse.

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Le sonneur de cornemuse, blochet par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le sonneur de cornemuse, blochet par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le joueur de cornemuse de Kerjean par le Maître de Pleyben (photo lavieb-aile)

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Le joueur de cornemuse de Saint-Divy par le Maître de Pleyben (photo lavieb-aile)

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Le joueur de cornemuse de l'about de poinçon de Pleyben (photo lavieb-aile)

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Le sonneur de cornemuse, blochet par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le sonneur de cornemuse, blochet par le Maître de Pleyben (vers 1571) du coté sud du haut de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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III. LA SABLIÈRE DU  FOND DE LA NEF, BAS-COTÉ SUD.

La présentation de la Sainte-Face par deux anges.

Je ne m'étendrai pas sur ce motif, déjà présent sur le coté sud du chœur, mais l'existence de ce doublon devait être signalée.

 

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La présentation de la Sainte-Face par deux anges. sablière par le Maître de Pleyben du bas-coté sud  de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La présentation de la Sainte-Face par deux anges. sablière par le Maître de Pleyben du bas-coté sud de la nef de l' église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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SOURCES ET LIENS.

 

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1°) Les cartouches et cuirs découpés.

— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), Le premier volume des plus excellents bastiments de France : Le Louvre, Vincennes, Chambord, château de Madrid (Philibert Delorme 1548-1559), Covussi, Folambray, Montargis, La Muette, Saint-Germain, Creil, Vallery, Verneuil, Ancy-le-Franc, Gaillon, Manne.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10411354/f45.image

Le second volume : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3137097/f12.image

Blois, Amboise, Fontainebleau, Villiers, Charleval, Les Tuileries, St-Mort, Chenonceau, Chantilly, Anet, Ecouen, Challueau, Dampierre, Beauregard, Bury.

— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), s.d, Termes et cariatides, 

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-4R85BIndex.asp

— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1542 et 1545] Grands cartouches,  [20] pl., Eau forte ; 38 cm [S.l.], [s.n.] 2 suites sans titre ni inscription. 7 des 20 planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées vers 1542-1543.

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1807/?offset=#page=5&viewer=picture

— ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1545 et 1547] Petits cartouches de Fontainebleau,  [31] pl., Eau forte ; 26 cm, [S.l.], [s.n.]Suite sans titre d'ornements inspirés par l'art de Fontainebleau et destinés à servir de modèles. Certaines planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées entre 1542 et 1545 ; D'autres figurent déjà dans la première ou la seconde suite des grands compartiments

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1801/?offset=#page=5&viewer=picture

http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb40564725t

— DIETTERLIN (Wendel), 1598, Architectura, Nuremberg.

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp

— FLORIS (Cornelis II de Vriendt ,dit) 1556, Veelderley Veranderinghe van grottisen  avec HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur) 

https://collections.vam.ac.uk/item/O977184/veelderley-veranderinghe-van-grotissen-ende-engraving-floris-cornelis-ii/

https://www.nationalgalleries.org/art-and-artists/60572/plate-veelderley-veranderinhe-van-grottissen-ende-compartimenten-design-fantastic-fountain-published

— FLORIS (Cornelis), 1557, Veelderley Niewe Inuentien,  HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur) 

— VREDEMAN DE VRIES (Hans), 1557 Architectura ou batiments prins de Vitruve, Anvers,  

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp

 

 

2°) Sur l'église de Pleyben :

ABGRALL, Jean-Marie (1892), Pleyben. Eglise, calvaire, ossuaire, chapelle Notre-Dame de Lannélec Bulletin dee la Société archéologique du Finistère pages 55-72

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207622m/f136.item

COUFFON (René), 1988, Notice sur Pleyben

http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/PLEYBEN.pdf

— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne, XVe-XVIIe s. ; préf. d'Alain Croix, Rennes :Presses universitaires de Rennes, 1997 : thèse de doctorat en histoire sous la direction d'Alain Croix soutenue à Rennes2 en 1997. 

— LECLERC (GUY), 1996, Les enclos de Dieu, édition Jean-Paul Guisserot, 141 p. 

— LECLERC (Guy), 2007, Pleyben, son enclos et ses chapelles, éditions Jean-Paul Guisserot, 31 pages pages 18 et 19.

https://books.google.fr/books?id=hWctwxQfyhgC&pg=PA18&lpg=PA18&dq=sibylles+pleyben&source=bl&ots=kzc-VMkVBx&sig=29B6LVXN1nHu2s5hEpHEt3en1vA&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiI596WxpfVAhXH2xoKHQ5WDd4Q6AEIQjAF#v=onepage&q=sibylles%20pleyben&f=false

LE FLOCH (Jean-Claude), Pleyben : l'ensemble de sablières sculptées.

http://www.mairiepleyben.fr/joomla-mairie/images/stories/documents/docs_historiques/sablires.pdf

— Wikipédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Enclos_paroissial_de_Pleyben

Infobretagne : http://www.infobretagne.com/pleyben-eglise-sablieres.htm

LECLERC (Guy), 2007, Pleyben, son enclos et ses chapelles, éditions Jean-Paul Guisserot, 31 pages pages 18 et 19.

https://books.google.fr/books?id=hWctwxQfyhgC&pg=PA18&lpg=PA18&dq=sibylles+pleyben&source=bl&ots=kzc-VMkVBx&sig=29B6LVXN1nHu2s5hEpHEt3en1vA&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiI596WxpfVAhXH2xoKHQ5WDd4Q6AEIQjAF#v=onepage&q=sibylles%20pleyben&f=false

http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/PLEYBEN.pdf

Wikipédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Enclos_paroissial_de_Pleyben

 

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Published by jean-yves cordier - dans Pleyben Sablières
23 juillet 2017 7 23 /07 /juillet /2017 21:49

 

La charpente sculptée de l'église de Pleyben (vers 1571) par le Maître de Pleyben : le transept nord. Sablières, blochets et entraits.

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Voir aussi :

— Sur les sablières du Maître de Pleyben :

 

 

 

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— Et sur les sablières bretonnes :

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Présentation générale : voir mon article sur les sablières du transept sud. Comme pour ce dernier, je débute par l'angle de la croisée du transept proche du chœur, c'est à dire ici à gauche de la statue de l'évangéliste saint Marc, et j'étudie pour chaque sablière la frise inférieure, les personnages présentant le cartouche de cuir découpé, et enfin le motif principal.

Nous trouverons successivement :

— sur le coté oriental au dessus du retable (quatre cartouches) :

  • Le cuir découpé de La Trahison de Judas face au grand prêtre au pied de la Croix.
  • Un blochet : jeune homme tenant un bâton.
  • Le cuir découpé de La femme montrant un livre et tenant un rouleau de papier.
  • Le premier entrait à engoulant.
  • Le cuir découpé du Couple autour d'un cœur.
  • Le second entrait à engoulant.
  • Les cuirs au chronogramme 1571.
  • Le blochet d'un Homme tenant une couronne d'épines.

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— sur le coté occidental (quatre cartouches):

  • Le blochet de la Femme tenant un objet (brisé).
  • Le cuir découpé à l'objet brisé, présenté par quatre oiseaux.
  • Le second entrait à engoulant, aux armoiries de Mgr Sergent.
  • Le cuir découpé de Deux personnages couchés tenant un cuir.
  • Le premier entrait à engoulant, aux armoiries de Pie IX.
  • Le cartouche du Nain vert tenant un poireau.
  • Le blochet d'un Personnage présentant un crâne.
  • Le cuir découpé des Soldats jouant aux dés la Tunique du Christ.

... avant d'arriver à l'angle de la croisée du transept, avec la statue de l'évangéliste Jean.

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La voûte du transept nord et sa charpente, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La voûte du transept nord et sa charpente, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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La charpente sculptée de l'église de Pleyben (vers 1571) par le Maître de Pleyben : le transept nord. Sablières, blochets et entraits.

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La voûte du transept nord et sa charpente, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La voûte du transept nord et sa charpente, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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I. LE COTÉ ORIENTAL.

 

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Les sablières du coté oriental du transept nord, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Les sablières du coté oriental du transept nord, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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1. De l'évangéliste Marc au premier entrait.

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Les sablières du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Les sablières du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le cuir découpé  Le Remord ou la Trahison de Judas, face au grand prêtre au pied de la Croix.

a) la frise : inspirée des guirlandes Renaissance, elle alterne des grappes de fruits ou des épis de grains avec des feuilles lancéolées et la partie distale d'un légume charnu, à quatre lobes souvent centrés par un bouton. 

b) Les anges présentateurs du cuir.

Ils sont les pendants de leurs homologues de la première sablière du transept sud, dont le premier tenait un clou et portait une écharpe blanche,  et le second une trompette. Ici, l'objet tenu par le premier ange est moins facile à identifier, et le second ne tient pas de trompette, mais désigne la scène centrale de l'index. Autre différence, les anges tiennent le cuir en s'éloignant de lui. Mais on retrouve toutes les spécificités des anges du Maître. En sixième année, vous êtes censés les connaître sur le bout des doigts.

c) Le cuir découpé : il s'agit plutôt d' un cadre rectangulaire mouluré, posé, comme un objet indépendant, sur deux cuirs à enroulements blancs à bords dorés, par les oreilles desquels passent les deux brins du linge blanc tendu par les anges. 

d) Le motif :

La traverse d'une croix en T s'intègre au cadre, dans une indistinction du cadre et du motif très habituelle au Baroque : le Monde est un théâtre, nous en sommes les acteurs et les spectateurs, rêveurs éveillés sur une scène qui se confond avec la salle.

A la base de cette croix sont plantés trois clous : c'est la Croix de la Passion, comme le confirme la couronne d'épines, celle qui fut posée sur la tête du Christ en dérision de sa royauté.

Comme deux marionnettes de guignol, deux personnages semblent s'interpeller en s'accoudant à leur fenêtre. L'un est le grand prêtre du Temple de Jérusalem, Caïphe, ou du moins l'un des "chefs des prêtres", et l'autre est Judas Iscariote tenant un sac rempli de pièces : les fameux "trente deniers" :

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"Alors, l’un des Douze, celui qui s’appelait Judas Iscariot, se rendit auprès des chefs des prêtres pour leur demander: Si je me charge de vous livrer Jésus, quelle somme me donnerez-vous? Ils lui versèrent trente pièces d’argent." (Matthieu 26:14-15)

...

"En voyant que Jésus était condamné, Judas, qui l’avait trahi, fut pris de remords: il alla rapporter aux chefs des prêtres et aux responsables du peuple les trente pièces d’argent et leur dit: J’ai péché en livrant un innocent à la mort!

Mais ils lui répliquèrent: Que nous importe? Cela te regarde! Judas jeta les pièces d’argent dans le Temple, partit, et alla se pendre. Les chefs des prêtres ramassèrent l’argent et déclarèrent: On n’a pas le droit de verser cette somme dans le trésor du Temple, car c’est le prix du sang. Ils tinrent donc conseil et décidèrent d’acquérir, avec cet argent, le «Champ-du-Potier» et d’en faire un cimetière pour les étrangers. Voilà pourquoi ce terrain s’appelle encore de nos jours «le champ du sang». Ainsi s’accomplit la parole du prophète Jérémie: Ils ont pris les trente pièces d’argent, le prix auquel les descendants d’Israël l’ont estimé, et ils les ont données pour acheter le champ du potier, comme le Seigneur me l’avait ordonné." (Matthieu 27 : 3-10)

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Puisque Judas et Caïphe se trouvent de part et d'autre de la Croix, il est logique de penser que c'est le Remords de Judas, et non sa Trahison, qui est représentée, mais on peut aussi voir la composition comme une accusation dénonçant la cupidité du disciple de Jésus et l'implication des chefs Juifs et les présentant comme les responsables de sa mort. Alors que la première sablière du transept sud dénonçait la responsabilité de Pilate.

Cette scène est également représentée sur les sablières du chœur de Roscoff, alors que celles de l'église de Saint-Divy comporte le motif de la Croix et de la Couronne, encadrée par l'aiguière et le bassin du lavement de main de Pilate.

 

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 Judas face au grand prêtre au pied de la Croix, première sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Judas face au grand prêtre au pied de la Croix, première sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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 Judas face au grand prêtre au pied de la Croix, première sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Judas face au grand prêtre au pied de la Croix, première sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le blochet : un homme jeune tenant un bâton (et un objet brisé dans la main gauche).

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Blochet du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Blochet du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Entre le blochet et l'entrait :

Cuir découpé de La femme montrant un livre et tenant un rouleau de papier.

C'est une femme puisqu'on discerne une coiffe au dessus de cheveux ramassés sur les cotés. Mais que veut-elle dire en tendant l'index droit sur la page de son livre, et en brandissant un codex ? "C'était écrit là " ? .

La femme montrant un livre et tenant un rouleau de papier,  sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La femme montrant un livre et tenant un rouleau de papier, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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2. Du premier au second entrait.

Le premier entrait à engoulant.

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Le cuir découpé du Couple autour d'un cœur.

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Le  Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le  Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le cuir est encadré par un groupe de deux personnages. Nous voici devant le premier personnage du groupe de droite : c'est une femme qui fait face au spectateur et lui sourit. Elle est richement vêtue d'un manteau bleu clair à manches courtes et d'une robe blanche, usant avec largesse des  galons or.  

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Le  Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Cette voisine est couchée sur le coté et tient de la main gauche un livre ouvert, qu'elle désigne de l'index. 

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Le  Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le couple apparaît dans des niches dorées comme à la fenêtre de leur demeure. Lui est coiffé d'un chapeau rond, peu éloigné d'une barrette. Ses deux mains sont posées sur des tablettes noires. Au centre, un cœur vermillon blessé de trois entailles en losange. Elle est accoudée à une tablette, et tient un objet cylindrique brun. Sa coiffure, élaborée, demande à être décryptée.

La signification exacte de cette scène m'échappe.

La frise semble inclure le motif des deux dragons accouplés par le col (sablière du transept sud), mais le bois est fort dégradé. 

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Le  Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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A gauche, l'énigme se poursuit car le personnage d'allure féminine tient une massue et un fouet, tous les deux verts, et sa voisine une sorte de quenouille. 

La frise donne à voir un masque libérant de sa bouche des tiges végétales.

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Avec cette sablière, nous changeons de style puisque non seulement le motif, même énigmatique, est profane, alors que le transept sud et le chœur sont décorés de sablières à sujets religieux, mais aussi que les anges présentateurs aux lignes dynamiques et déliées  laissent la place à ces femmes aux corps ramassés dans des postures acrobatiques, et encore que les frises s'enrichissent de mascarons et animaux fantastiques.

Il est difficile pour moi d'affirmer qu'il s'agit du travail d'un autre artiste, ou bien d'une capacité du Maître de Pleyben à s'adapter à un autre style, en sachant qu'il faut mieux parler d'un atelier, avec plusieurs "mains" restant fidèles aux spécificités communes tout en exprimant des talents particuliers.

 

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La partie gauche du cuir du  Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.  Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

La partie gauche du cuir du Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017. Couple autour d'un cœur, sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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3. Après le second entrait : la dernière sablière orientale et le blochet final.

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La dernière sablière orientale : le chronogramme 1571.

 

A l'entrée du transept, près de la sacristie (1680)-(1690), on trouve l'inscription A LONNEUR DE DIEU ET NOTRE DAME . MONSIE / GNEUR SAINCT GERMAIN ET SAINCTE KATHERINE CETE OEUVRE FUST FAICTE . LAN / MILL CINQ . CENTZ SOIXANTE QUATRE . / VENERABLE MAISTRE ALAIN KERGADALEN  RECTEUR POUR LORS .

 Cette inscription a été complétée en caractères gravées par la mention : FUT ENTIEREMENT RESTAUREE  DE 1857 À 1860.

Sur le mur du bas côté Sud, au dessus de la porte située entre le porche et le transept, se trouve une autre inscription  LAN (1583) VE VOBIS GENTIBUS IN TEMPLO VANA LOQUENTIBUS.

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Dernière sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Dernière sablière du coté oriental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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II. LE COTÉ OCCIDENTAL.
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Le coté occidental du transept nord, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le coté occidental du transept nord, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le blochet : une femme vêtue du bleu tenant un objet (brisé).

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Blochet nord-ouest du  coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Blochet nord-ouest du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Entre le blochet nord-ouest et le second entrait : le cuir de l'Objet blanc  tenu par deux oiseaux-volutes .

a) la frise : rinceaux et épis.

b) les deux oiseaux : on distingue de la tête le bec rehaussé de rouge, la langue, l'œil noir, et un collier doré. Le bas du corps est remplace par deux volutes.

c) le cartouche : un cadre rectangulaire en bois mouluré est posé par dessus le cuir, aux doubles enroulements latéraux.  Rien de sorcier, mais c'est pourtant un modèle différent des précédents.

d) Le motif : il est intercalé entre deux enroulements, et la convexité est brisée. S'agissait-il d'un cœur ?

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Dernière sablière  du  coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Dernière sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Dernière sablière  du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Dernière sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Entre les deux entraits.

Le cuir des Deux personnages allongés tenant un cuir . 

a) la frise : assez riche, elle comporte un masque (femme sous une coiffe), une coquille, et deux dragons liés par la queue, qui est une volute. De fait, ces dragons étaient aussi présent sous le cuir précédent.

b) les personnages présentant le cuir.

Nous sommes ici loin des anges raffinés qui, près de la croisée, ou dans le transept sud, présentaient les cuirs à motifs religieux. Et pourtant, nous retrouvons le traitement particulier des cheveux en petits choux, ou les manches à ballons, qui indiquent que la production sort du même atelier. 

A droite, une femme vêtue de rouge à manches or déroule une étoffe dorée. A la différence des "cuirs à anges", cette étoffe ne se resserre pas en un lien qui sert d'accrochage au cuir en se faufilant par des opercules. Le décor est-il moins précis, moins élaboré ?

A gauche, nous virons à la franche gaudriole frivole voire grivoise,avec ce personnage en habit bleu, empoignant ses chevilles et faisant le grand écart. Nous trouvons sur les clefs (abouts de poinçons) en ronde bosse de tels acrobates, mais ici, les dimensions étroites et le bas-relief imposent des contraintes qui accentuent le caractère grossier, naïf  ou grotesque du saltimbanque. Mais sa fraise rose au galon doré, les crevés de son gilet ou les rubans de ses coudes soulignent son élégance. 

c) le cuir : proche du précédent, avec un rectangle mouluré posé sur deux cuirs latéraux.

d) le motif.

Deux personnages ( féminins ?), l'un en habit bleu et l'autre en beige, reprennent la posture allongée avec les pieds nus appuyés aux montants, des anges et autres personnages  présentateurs de cuirs. Et, effectivement, ce que j'avais pris pour une colonne n'est autre qu'un cuir enroulé. Autrement dit, l'image, plus ingénieuse qu'il n'y paraît, est une mise en abyme. Le cartouche montre deux présentateurs de cartouche, placés en miroirs. Comme un théâtre posé sur la scène d'un théâtre, ou bien une pièce de théâtre qui montre des acteurs préparant une pièce de théâtre. Hamlet date de 1603, le Songe d'une nuit d'été de 1600, La Vie est un songe, de 1635. Quand au changement du regard humain sur son environnement, qu'il se met à placer dans un cadre pour l'observer en développant la notion de Théâtre de la Nature, il correspond à l'apparition des œuvres de Joris Hoefnagel, vers 1580. Placer le cadre dans le cadre, cela ne relève sans-doute pas, de la part de l'atelier du Maître de Pleyben, de l'initiative d'une seconde main, dégradée et de tradition populaire, mais d'un esprit vif, averti des mutations en cours dans l'art. L'acrobate de gauche est ici parfaitement à sa place.

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 Le cuir des Deux personnages allongés tenant un cuir , sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux personnages allongés tenant un cuir , sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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 Le cuir des Deux personnages allongés tenant un cuir, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux personnages allongés tenant un cuir, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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 Le cuir des Deux personnages allongés tenant un cuir, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux personnages allongés tenant un cuir, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le blochet du personnage tenant une tête de mort.

On a pu penser qu'il s'agissait de Marie-Madeleine, qui sera, plus tard dans l'Histoire de l'art, requise dans ce rôle. Le personnage androgyne aux jambes croisées associe les traits d'un ange, tels que nous les connaissons, à ceux de saint Jean. 

Une aide précieuse nous serait apportée par la connaissance des attributs des autres blochets, mais beaucoup de ceux-ci sont brisés. Le crâne est peut-être celui d'Adam, souvent rencontré au pied de la Croix pour affirmer que le Christ libère, par sa mort, l'humanité de la malédiction du premier homme. Ou bien, ce crâne est tendu par cet ange bleu comme un Memento mori, si commun aux ossuaires bretons. On comprendrait alors que ses orbites creuses soient dirigées vers l'assistance, alors que le craniféraire (ce néologisme me démangeait) dirige son regard vers les Cieux, comme un exemple à suivre.

Un mot sur le nain vert encadré à la droite de ce blochet. 

Le cartouche du Nain vert tenant un poireau.

Il n'est nain que pour le plaisir du titre, mais c'est bien un indubitable poireau qu'il brandit dans sa main droite, alors que la gauche est posée sur son genou. Est-ce un rébus ? Un autoportrait et une signature de l'artiste, comme l'envisage (sur d'autres motifs) Jean-Claude Le Floch ? Un poireau se dit " pour" en breton, ce qui ne mène pas loin. 

Mais je vois aussi une courge dressée droit sur son épaule gauche. "Koulourdr" en breton. Bof. 

 

Le blochet du personnage tenant une tête de mort, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le blochet du personnage tenant une tête de mort, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Du premier entrait jusqu'à la statue de saint Jean.

Voici le dernier cartouche, qui vient en vis à vis avec le premier, celui de la Trahison ou du Remord de Judas au pied de la Croix. Or, nous revenons ici à un motif religieux, et à une scène évangélique au pied de la Croix.

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Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ.

a) frise. On y trouve à l'extrême gauche une feuille sagittée (j'ai cru à une étoile de mer et à une seiche),  des feuilles lancéolées, des épis, des grappes, et enfin un escargot. Cet escargot est présent aussi sur les sablières de la chapelle de Kerjean, sous le cuir des Cinq Plaies. Il évoque ceux qui grimpent le long des pampres des colonnes des retables bretons,  ou ceux des voussures et piédroits des porches, sculptés en kersanton par l'atelier du Maître du Folgoët (1423-1509) ou des frères Prigent de Landerneau (1527-1577).

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Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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b) les soldats.

Ils occupent l'emplacement en dehors du cartouche qui est celui des anges et autres personnages chargés de présenter et de soutenir par des cordages ces encarts, alors qu'en fait ils appartiennent au motif , dans un nouvel exemple de confusion ou du brouillage de la convention du cadre et du hors-cadre.

Comme ces anges présentateurs, ils sont presque couchés (pour figurer en pied malgré la hauteur très réduite de la sablière), et comme eux, ils fléchissent une jambe, dont le genou est tendu devant eux, et ils étendent l'autre jambe, dont le pied (ici chaussé) atteint avec vigueur les limites de la sablière. 

Leur posture d'escrimeur et leur menton projeté par l'hyperextension du cou leurs confèrent des allures de ridicules matamores, d'autant qu'en guise d'épées, ce sont leurs dès qu'ils mettent si martialement en avant : un cinq à gauche, un quatre à droite.

Ce ridicule est achevé par celui de leur toilette.  À droite, le perdant porte une armure d'opérette, sans casque, avec des jambes et des bras nus. A gauche, cette armure bleu métal est portée sur des bragou braz, ces larges braies ou culottes bouffons des Bretons, au dessus de chaussures de cuir noir fort civiles. Les envolées des manches (qui singent celles, identiques, des anges présentateurs) et la ressemblance du bas de l'armure avec une jupette dénient, malgré son casque, toute crédibilité à ce légionnaire mal échappé d'une page d'Astérix.

 

 

Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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c) le cuir. Oh, rien de plus sobre ! Ce sont les vaches maigres ! Un tableau de bois à moulures, et un cuir à enroulements de chaque coté. Mais le comique provient des découpes de ces enroulements, qui servent de fenêtres de passage aux mains de soldats, avec leur dès.

 

 

Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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d) Le motif. La scène décrite est très sérieuse, elle est tirée de l'évangile de Jean 19:23-24 : ayant crucifié Jésus, les soldats se partagent ses vêtements, en faisant quatre parts, mais ils se refusent à partager la tunique en la déchirant, car elle est "sans couture, d'une seule pièce depuis le haut jusqu'en bas". Au pied de la Croix, pendant l'agonie du Christ, ils décident de la tirer au sort (en latin : sortiamur, de sortio, is, ire "tirer au sort".

Au centre du cartouche, ne figurent que la tunique et les deux mains tenant les dès. 
La tunique est rouge, une couleur d'emploi exceptionnel sur ces sablières. Elle est pliée, l'encolure à galon doré rabattue sur le  devant, alors que les manches à crevés sont écartées. Ainsi, ce vêtement devient une représentation du Christ mort, la tête inclinée sur la poitrine et les bras en croix. Dans la solitude crée par l'expulsion des deux soldats hors-champ, elle atteint une dense signification spirituelle qui évoque ce qu'écrivait Joseph Malègue dans Augustin : " Il  [le Christ] a subi le délaissement de son Père, l'abandon de Dieu, la sécheresse et le désert des dérélictions absolues : cette croix sur la Croix, cette mort dans la mort".

Ce motif est également représenté sur les sablières de la chapelle de Kerjean, et, deux fois, sur celle de Sainte-Marie-du-Ménez-Hom.

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Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir des Deux soldats romains jouant aux dés la Tunique du Christ, sablière du coté occidental du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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LES ENTRAITS.

Le centre de ces entraits porte, visible de la croisée du transept, deux blasons, celui du pape et celui de l'évêque en fonction lors de la campagne de restauration du XIXe siècle. Le recoupement des dates de Pie XI (1846-1878) et de Monseigneur Sergent (1855-1871) donne le créneau de 1855-1871, cohérent avec les dates de la restauration générale indiquée par l'inscription lapidaire proche de la sacristie, de 1857 à 1860. 

Nœud du premier entrait. Armoiries du pape Pie XI (1846-1878).

 Le nœud sculpté porte les armoiries écartelé en 1 et 4 d'azur au lion couronné d'or et en 2 et 3 d'argent aux deux bandes de gueules.

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Nœud du premier entrait. Armoiries du pape Pie XI (1846-1878), transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Nœud du premier entrait. Armoiries du pape Pie XI (1846-1878), transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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L'engoulant du second entrait.

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Le second entrait du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le second entrait du transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le nœud du second entrait. Armoiries de Mgr Sergent (1855-1871).

Il porte les armoiries d'azur à la Vierge entourée de douze étoiles dans une gloire et posée sur une nuée mouvant de la pointe de l'écu, le tout d'argent.

 

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Nœud du second entrait. Armoiries de Mgr Sergent (1855-1871),  transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Nœud du second entrait. Armoiries de Mgr Sergent (1855-1871), transept nord, atelier du Maître de Pleyben (vers 1571), église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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CONCLUSION PROVISOIRE.

Avec ce deuxième article sur les sablières des deux bras du transept de Pleyben, et celui sur la voûte de la croisée du transept, il est possible de rechercher une concept global, un programme derrière les seize cartouches sculptées.  La première remarque est  de constater que  sept ont un thème religieux, deux au nord et cinq au sud, et que neuf  cartouches sont profanes. La deuxième remarque est de noter que les quatre angles de la croisée sont occupés par des thèmes liés à la Passion  : la Lâcheté de Pilate lors du Lavement de main, et des Stigmates, au sud, et du Remord de Judas au pied de la Croix, et de la Tunique tirée au sort, au nord. (bien que les Stigmates soient précédées, à l'angle sud-ouest, par les deux dragons). Le thème central est donc christique, et traite de la Passion. Les autres thèmes religieux sont tirés de l'enfance, puis de la vie de Jésus : Nativité, Présentation au Temple, et Rencontre de la Samaritaine.

 

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SOURCES ET LIENS.

 

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1°) Les cartouches et cuirs découpés.

 

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), Le premier volume des plus excellents bastiments de France : Le Louvre, Vincennes, Chambord, château de Madrid (Philibert Delorme 1548-1559), Covussi, Folambray, Montargis, La Muette, Saint-Germain, Creil, Vallery, Verneuil, Ancy-le-Franc, Gaillon, Manne.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10411354/f45.image

Le second volume : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3137097/f12.image

Blois, Amboise, Fontainebleau, Villiers, Charleval, Les Tuileries, St-Mort, Chenonceau, Chantilly, Anet, Ecouen, Challueau, Dampierre, Beauregard, Bury.

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), s.d, Termes et cariatides, 

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-4R85BIndex.asp

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1542 et 1545] Grands cartouches,  [20] pl., Eau forte ; 38 cm [S.l.], [s.n.] 2 suites sans titre ni inscription. 7 des 20 planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées vers 1542-1543.

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1807/?offset=#page=5&viewer=picture

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1545 et 1547] Petits cartouches de Fontainebleau,  [31] pl., Eau forte ; 26 cm, [S.l.], [s.n.] Suite sans titre d'ornements inspirés par l'art de Fontainebleau et destinés à servir de modèles. Certaines planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées entre 1542 et 1545 ; D'autres figurent déjà dans la première ou la seconde suite des grands compartiments

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1801/?offset=#page=5&viewer=picture

http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb40564725t

DIETTERLIN (Wendel), 1598, Architectura, Nuremberg.

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp

FLORIS (Cornelis II de Vriendt ,dit) 1556, Veelderley Veranderinghe van grottisen  avec HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur) 

https://collections.vam.ac.uk/item/O977184/veelderley-veranderinghe-van-grotissen-ende-engraving-floris-cornelis-ii/

https://www.nationalgalleries.org/art-and-artists/60572/plate-veelderley-veranderinhe-van-grottissen-ende-compartimenten-design-fantastic-fountain-published

FLORIS (Cornelis), 1557, Veelderley Niewe Inuentien,  HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur) 

VREDEMAN DE VRIES (Hans), 1557 Architectura ou batiments prins de Vitruve, Anvers,  

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp

 

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2°) Sur l'église de Pleyben :

ABGRALL, Jean-Marie. Pleyben, son église, son calvaire. Editions d'art Jos Le Doaré, Quimper, 1969.

ABGRALL, Jean-Marie (1892), Pleyben. Eglise, calvaire, ossuaire, chapelle Notre-Dame de Lannélec Bulletin dee la Société archéologique du Finistère pages 55-72

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207622m/f136.item

 

COUFFON (René), 1988, Notice sur Pleyben

http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/PLEYBEN.pdf

— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne, XVe-XVIIe s. ; préf. d'Alain Croix, Rennes :Presses universitaires de Rennes, 1997 : thèse de doctorat en histoire sous la direction d'Alain Croix soutenue à Rennes2 en 1997. 

— LECLERC (GUY), 1996, Les enclos de Dieu, édition Jean-Paul Guisserot, 141 p. 

LECLERC (Guy), 2007, Pleyben, son enclos et ses chapelles, éditions Jean-Paul Guisserot, 31 pages pages 18 et 19.

https://books.google.fr/books?id=hWctwxQfyhgC&pg=PA18&lpg=PA18&dq=sibylles+pleyben&source=bl&ots=kzc-VMkVBx&sig=29B6LVXN1nHu2s5hEpHEt3en1vA&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiI596WxpfVAhXH2xoKHQ5WDd4Q6AEIQjAF#v=onepage&q=sibylles%20pleyben&f=false

LE FLOCH (Jean-Claude), Pleyben : l'ensemble de sablières sculptées.

http://www.mairiepleyben.fr/joomla-mairie/images/stories/documents/docs_historiques/sablires.pdf

Wikipédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Enclos_paroissial_de_Pleyben

Infobretagne : http://www.infobretagne.com/pleyben-eglise-sablieres.htm

— http://monumentshistoriques.free.fr/calvaires/pleyben/pleyben.html

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Published by jean-yves cordier - dans Sablières Pleyben
22 juillet 2017 6 22 /07 /juillet /2017 08:19

La charpente sculptée de l'église de Pleyben (vers 1571) par le Maître de Pleyben : le transept sud. Sablières, blochets et entraits.

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Voir aussi :

— Sur les sablières du Maître de Pleyben :

 

 

 

 

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— Et sur les sablières bretonnes :

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LE SCULPTEUR SUR BOIS DIT LE "MAÎTRE DE PLEYBEN".

Vers 1580, un sculpteur anonyme, désigné aujourd'hui sous le nom de convention de "Maître de Pleyben", réalisa les sculptures de la charpente de la chapelle du château de Kerjean, en Saint-Vougay, à la demande de Louis Barbier, seigneur de Kerjean. Un véritable chef-d'œuvre, influencé par l'École de Fontainebleau qui avait introduit vers 1535 le motif décoratif du cuir découpé à enroulement, et par la diffusion du style de la Seconde Renaissance française dans des recueils de gravures : le prospère Léon était largement ouvert à l'Europe par ses ports de Landerneau, Morlaix et Roscoff.

Cet artiste a reçu ce nom car son style, et ses cuirs, et ses thèmes, se reconnaissent dans une partie des sablières de l'église de Pleyben, en Haute Cornouaille datées vers  1571.  On les retrouvent sur la charpente de l'église de Saint-Divy, dans le Léon, et  dans la chapelle de Sainte-Marie du Ménez-Hom en Plomodiern, située à 23 km de Pleyben et 70 km de Kerjean.

Son style ? On le distingue à ces cuirs découpés à enroulements, car l'artiste  faufile dans les découpes des linges et des cordages dont il confie les extrémités à des anges ou autres personnages. Ses anges aussi sont caractéristiques, avec une coiffure faite de mèches rondes cerclant  la périphérie du visage, et avec une tunique aux plis prononcés, bouffante à la taille en formant une ligne sinueuse, avant de filer vers les pieds avec une grande liberté. Ajoutons que les manches de ses tuniques s 'évasent en larges couronnes au dessus des coudes, qui sont globuleux. Ses personnages en pied (Évangélistes ou Sibylles, notamment) ont en commun un visage fin, ovale, avec des nez longs et fins, de grands yeux aux pupilles en creux,  des bouches charnues, à nouveau des manches bouffantes, ou, pour les femmes, des bandeaux de cheveux. 

Mais ce sont surtout ses motifs iconographiques qui se répètent en tableaux stéréotypés :  mascarons zoomorphes ou anthropomorphes sur le plan profane, guirlandes et frises à petits pois, musiciens, et, sur le plan religieux, des thèmes plus christiques que mariaux :  Sainte Face, Tunique du Christ, Plaies du Christ, Instruments de la Passion, Rencontre de la Samaritaine. Et les Sibylles, à Kerjean et à Pleyben.

Datation : un chronogramme de la sablière du transept de Pleyben indique "1571". Sophie Duhem, qui estime que cette pièce n'est pas de la main du Maître de Pleyben mais appartient à une partie qui s'inspire de son travail, et qui indique que la construction du chœur date de 1564, propose la fourchette 1564-1571. Guy Leclerc propose celle de 1571-1580. Dans la première hypothèse, Pleyben aurait précédé les trois chantiers de Kerjean, Plomodiern (Ménez-Hom) et Saint-Divy de 10 à 20 ans, qui seraient des œuvres de maturité du Maître. Dans la seconde, les quatre chantiers sont pratiquement contemporains.

Pour Couffon, " L'inscription de 1564, qui se trouve a l'angle du chœur et du croisillon sud, se rapporte, comme nous le verrons, à l'abside. La date de 1571, inscrite sur la charpente du croisillon nord, indique l'époque où l'on couvrait le transept. "

Descriptions :

Les sablières de Pleyben ont été décrit par le chanoine Abgrall en 1892 aux page 63-65 du Bulletin de la Société archéologique du Finistère (recopié sur Infobretagne), en 1996 par Guy Leclerc dans Les enclos de Dieu, avec un plan, en 1997 dans la thèse de Sophie Duhem et enfin par Jean-Claude Le Floch (s.d) dans un article en ligne de 8 pages ; les thèmes sont énumérés sur l'article Wikipédia.

On y dénombre (G. Leclerc)  255 personnages et 116 clefs pendantes.

Restauration. 

a) "En 1699, la foudre fit tomber le couronnement du clocher sur le croisillon sud. Il fallut donc refaire en partie le mur de fond, tout le pignon et la charpente de ce bras du transept : les travaux n'étaient pas terminés en 1719. " (Couffon)

b) " Enfin, la restauration générale entreprise de 1857 à 1860, connue par le complément d'inscription qui se voit près du choeur, ne parait pas avoir rien apporté de nouveau au gros oeuvre." (Couffon)

c). S. Duhem indique : "L'église de Pleyben a fait l'objet d'une restauration récente: la structure externe de la charpente a été entièrement refaite en bois de chêne, un matériau pourtant onéreux, et les sculptures abîmées ont été remplacées par des reliefs taillés à l'identique. L'absence délibérée de polychromie sur les parties restaurées permet l'identification rapide des éléments insérés". (p. 41)

Cette restauration a du s'achever en 1990, comme en témoigne le document du Ministère de la Culture ETU/0340 "Restauration de la toiture du transept, du chœur et fin des travaux de la nef. Restitution des lambris de l'ensemble de l'édifice."

Polychromie

A la différence des sablières de Kerjean, de Saint-Divy et de Sainte-Marie-du-Ménez-Hom, les sablières de Pleyben ont conservé leur polychromie, même si ce que nous voyons est le résultat des différentes restaurations. A l'origine, toutes les sablières étaient peintes, et,  selon Duhem, 41 % des pièces de bois du Finistère sont encore polychromes.

Les couleurs privilégiées sont, pour les vêtements, le bleu clair et plusieurs teintes de vert et  l'or. le blanc est utilisé pour les carnations, pour les fonds, et les étoffes. Le rouge est exceptionnel (sauf pour rehausser les lèvres, les joues, etc), réservé au cœur des Trois Plaies. Le noir est rare.

 

En voiture Simone !

 

J'ai décrit pour commencer la croisée du transept, riche en statue mais dépourvus de sablières et de cuirs. Mais nous allons trouver ces dernières et ces derniers dans les bras du  transept et dans la nef. Un programme si vaste que je débute par le bras sud du transept. Suivez le guide !

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Je débuterai par le coté gauche ou oriental et la statue de l'évangéliste Matthieu : je vous y rejoins. 

Nous verrons successivement :

— Du coté est :

  • Le cuir découpé de L'aiguière et du bassin.
  • Blochet : Homme jeune.
  • Le cuir de la Nativité
  • l'entrait à engoulant.
  • Le cuir découpé de la Présentation au Temple
  • Blochet : un évêque.
  • Le cuir découpé de La rencontre du Christ et de la Samaritaine.
  • Blochet : l'Ange à la colonne.

— Du coté ouest :

  • Blochet : l'Ange à la couronne d'épines.
  • Le cuir découpé à l'œuf et aux figues.
  • Blochet : Homme barbu.
  • Prométhée et l'aigle de Jupiter
  • L'entrait à engoulant.
  • Le cuir des  Trois Plaies du Christ.
  • Blochet : Homme jeune.
  • Les deux dragons accouplés par le col.

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Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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I. Le coté oriental du bras sud du transept.  Au dessus du retable du Sacré-Cœur.

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Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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A. De la statue de saint Matthieu jusqu'à l'entrait.

(On nomme "entrait" la poutre transversale)

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Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Cuir découpé présenté par deux anges : Une aiguière et un bassin. La disculpation de Pilate.

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Nous pouvons divisé cette pièce de bois en quatre sujets d'étude.

a) La frise inférieure.

Nous pourrons la suivre tout du long, pour y trouver des grappes, des légumes, des feuillages, et plus loin des masques. Ces motifs proviennent des encadrements des fresques du château de Fontainebleau. Les grappes sont-elles des grains de raisin ? Elles sont serrées en épi à disposition souvent géométrique. 

b) les anges.

Ils suivent un modèle constant que nous avons déjà vu à Kerjean, à Saint-Divy et à Sainte-Marie-du-Ménez-Hom, avec leur visage et leur tronc de face, leurs jambes allongées comme s'ils volaient, leurs bras écartés avec enthousiasme théâtral, leurs courtes manches béantes, leurs coudes globuleux, les vagues  que forme le feston de leur tunique, et on retrouve comme de vieux amis leurs cheveux disposés en sept  beignets autour d'une assiette, leur regard franc comme l'or sous l'arc de leurs sourcils.

Mais leur spécialité, c'est de glisser leur main à travers les poignées des cuirs découpés, comme de petits chapardeurs.

L'ange de gauche tient un clou, une "pointe" comme disent les menuisiers ; on y voit une allusion aux clous de la Crucifixion.

Son collège de droite embouche une trompette, comme une Renommée.

c) Le cuir découpé.

Je ne reviens pas sur leur histoire, leur intérêt et leur description, mais l'artiste de Pleyben a le génie pour  créer à chaque fois des nouveautés. Ici, le schéma est très simple, rectangulaire aux quatre bords enroulés, mais chaque enroulement est divisé en deux languettes qui s'enroule en volutes, ménageant entre elles des orifices, que les deux petits malins vont utiliser pour y glisser leur menotte.

d) le motif.

Il résiste à toute interprétation simple, et je me contentai de le décrire comme un pichet, et une coupe,

Un pichet ?  Et pourquoi pas plutôt une aiguière, une carafe, un vase, voire un broc ou une cruche ?

– Pichet :  Récipient de petite taille, de terre ou de métal, de forme galbée avec un collet étroit où s'attache une anse, utilisé pour servir une boisson.

– Aiguière :Vase élégant avec anse et bec, pouvant affecter les formes les plus diverses, destiné à contenir de l'eau (parfumée ou non) pour l'ablution des doigts ou des mains généralement après les repas, de l'eau (tiède) pour la toilette, ou de l'eau (fraîche) pour boire. Du provençal « aiguiera » (vase à eau), l’aiguière est un récipient destiné à contenir et verser de l’eau. Façonnée à l‘origine en poterie, les premières aiguières en verre apparaissent à la fin du XVe siècle. On les trouve en argent ou en or, en étain, en faïence

Nous avons ici un récipient doté d'un pied, d'un ventre, d'un col, d'un bec et d'une anse, mais aussi d'un couvercle.

 Si j'utilise le terme de "pichet", je suppose que la fonction est de servir à boire. Dés lors, la coupe est un récipient pour boire. 

Si j'adopte, comme le chanoine Abgrall,  le terme d'aiguière, je présume alors qu'elle sert à une ablution, et que la "coupe" est en fait un bassin. Or, cette fonction ne m'était pas venue à l'esprit. Cela me tente. Nous aurions ici, présentée au centre de ce cuir, une ablution rituelle, ou sacrée, un rite de purification, comme celui du Lavabo de l'Office, où le prêtre prononçait le verset du  psaume 25 6:7 lavabo inter innocentes manus meas et circumdabo altare tuum Domine

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Très bien, mais au centre, entre coupe et pichet, entre aiguière et bassin, qu'est-ce que je vois ?

— Un champignon ?

— Une pomme, et sa tige ?

— Un cœur, qui saigne ?

Si je retiens cette dernière interprétation, qui introduit une dimension eucharistique à la scène, les possibilités de lecture théologiques de "Le Pichet et la Coupe" s'enrichissent tant que je décide d'y mettre un terme.

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Note : lors de ma visite des sablières de l'église de Saint-Divy, j'ai observé ce motif , cette fois-ci entourant une croix et la couronne d'épines.  Ce qui montre que ces objets ne doivent rien au hasard, et qu'ils se placent dans un contexte liturgique lié à la Passion.

Mais c'est Jean-Claude Le Floch qui m'apporte la clef d'interprétation en faisant remarquer que la sablière placée dans la même position dans le transept nord représente la Trahison de Judas. " Comme pendant à droite, ce sont des emblèmes – bassin et aiguière – qui rappellent le geste de Pilate, le gouverneur romain, se lavant les mains de la mort de Jésus ". Cette observation est convaincante : l'artiste a débuté les cuirs du transept sud par la scène décrite par les évangiles :

"Et Pilate, voyant qu'il ne gagnait rien, mais que plutôt il s'élevait un tumulte, prit de l'eau et se lava les mains devant la foule, disant : Je suis innocent du sang de ce juste ; vous, vous y aviserez." (Matthieu 27:24).

Matthieu disculpe Pilate de la responsabilité de la mort du Christ, mais ce geste du lavement des mains est vu traditionnellement comme un signe de lâcheté du procurateur romain. La scène figure sur toutes les Passions des maîtresses-vitres finistérienne du XVIe siècle.

 

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Cuir Le Pichet et la Coupe, Maître de Pleyben vers 1570-1580,  sablière du bas-coté sud de l'église de Saint-Divy, photographie lavieb-aile juillet 2017.

Cuir Le Pichet et la Coupe, Maître de Pleyben vers 1570-1580, sablière du bas-coté sud de l'église de Saint-Divy, photographie lavieb-aile juillet 2017.

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"Le Pichet et la Coupe ", bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

"Le Pichet et la Coupe ", bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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"Le Pichet et la Coupe ",  bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

"Le Pichet et la Coupe ", bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir découpé Le Pichet et la Coupe,  bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir découpé Le Pichet et la Coupe, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le blochet : un homme jeune.

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Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges. Bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571.

a) frise : épis, fleurs, feuilles, gueule d'un animal .

b) les anges : ils tiennent des deux mains un linge blanc qui va passer dans la volute de l'enroulement du cuir, afin de le maintenir. Ce sont eux qui nous présentent la Nativité. Ils sont drapés par une écharpe blanche. Comme précédemment, l'ange de gauche nous regarde, son voisin regarde vers la droite.

c) le cuir découpé : rectangle à quatre enroulements divisés en deux languettes. Mais ici, quatre découpes permettent le passage du linge, qui devient un cordage auquel le cuir est suspendu.

d) le motif : la Nativité. La Vierge est agenouillée, mains jointes. L'âne et le bœuf sortent leur tête sous l'arche des enroulements supérieurs, et réchauffent de leur souffle l'Enfant Jésus. Celui-ci tient une pomme d'or (le globe terrestre) dans la main gauche, et bénit le monde de la main droite. Le personnage de droite est trop richement vêtu pour être le vieux Joseph. Ce serait un roi Mage, d'autant qu'il tient un objet brisé dans la main droite, et un sac (d'or ?) dans la main gauche.

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Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges,  bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571,  coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges,  bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571,  coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges,  bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571,  coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges,  bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571,  coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir découpé de la Nativité présenté par deux anges, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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B. De l'entrait vers le blochet d'angle.

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Le cuir déroulé de La Présentation au Temple.

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a) la frise. cf.

b) les anges : ça alors, l'ange de gauche a changé de sens ! Le voilà qui vole de droite à gauche ! Ils tiennent tous les deux un gros cordage pour remplir leur fonction de tireurs de cuirs. Leurs manches à air se dilatent avec enflure et  démesure.

c) Le cuir découpé : encore plus simple, car dépourvu d'enroulement supérieur.

d) Le motif. Non, monsieur le chanoine Abgrall, il ne s'agit pas d'une Circoncision, mais d'une Présentation au Temple  tel que relaté dans l'évangile de Luc 2:22-40 . En effet, le premier personnage est Joseph, puis vient une servante qui tient le couple de tourterelles ou les deux petites colombes exigées pour le sacrifice rituel. Puis vient Marie, l'Enfant, et le grand prêtre, mais celui-ci ne tient aucun instrument contondant.  Enfin, nous trouvons une femme particulièrement élégante.

 

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Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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 Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir déroulé de La Présentation au Temple, bois polychrome, Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Blochet (ou corbel) : un évêque.

avec mitre, crosse, chirothèques, bagues et anneau épiscopal,  chape pluviale à orfroi  à fermail, surplis, et pantoufles . 

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Un évêque, corbel, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Un évêque, corbel, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine.

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a) la frise : présence d'un cuir à ove et d'un masque à la tête de lion, ainsi que deux exemples de cette  "quelconque variété de courge vue du côté du pédoncule" (J-C. le Floch) si souvent rencontrée.

b) Les anges : égaux à eux-mêmes ; notez le geste de l'ange de gauche, désignant la scène centrale de son index.

c) le cuir : identique aux précédents.

d) le motif. La Rencontre du Christ et de la Samaritaine au Puits de Jacob tirée de l'évangile de Jean 4:1-30 est aussi traitée à la chapelle de Kerjean : mais alors, le Christ est du coté droit, et la Samaritaine est coiffée d'un turban.

Ici, le Christ, accroupi près du puits, tend l'index de la main droite, ce qui indique qu'il énonce une demande "Donne-moi à boire" ou plutôt une vérité évangélique : "Quiconque boira de cette eau aura de nouveau soif ; mais celui qui boira de l'eau que moi je lui donnerai n'aura plus jamais soif ; et l'eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d'eau jaillissant pour la vie éternelle". De la main gauche, il montre la margelle du puits.

La femme, à robe verte à décolleté carré et manches bouffantes et ourlées d'or au dessus de manches de chemise à crevés, et de bracelets, verse l'eau d'un pichet à long col dans une cruche. 

 

 

 

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Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Deux anges présentant le cuir découpé La Rencontre du Christ et de la Samaritaine., Maître de Pleyben vers 1571, coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le blochet ou corbel : une femme tenant une colonne brisée.

Cette colonne appartient peut-être aux Instruments de la Passion, en tant que Colonne de la Flagellation.

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Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté oriental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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II. Le coté occidental du bras sud du transept.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le blochet d'angle : femme (ange) portant la Couronne d'épines.

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Le blochet d'angle : femme (ange) portant la Couronne d'épines,coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le blochet d'angle : femme (ange) portant la Couronne d'épines,coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le blochet d'angle : femme (ange) portant la Couronne d'épines, coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le blochet d'angle : femme (ange) portant la Couronne d'épines, coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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A. Du blochet d'angle jusqu'à l'entrait.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Deux anges présentant un cuir découpé "à l'œuf et au figues".

Nous voyons d'emblée que si la structure de base de deux anges tenant un cuir est présente,  le style est très différent. 

a) La frise : des feuilles allongées, des légumes et deux cuirs découpés, l'un centré par un cartouche et l'autre par un ove (un ovale en forme d'œuf).

b) les anges. Très curieux. Ce sont bien des anges puisqu'ils ont des ailes, mais celles-ci ont un bord rectiligne enroulé sur lui-même, selon un procédé que j'ai rencontré sur les liernes et nervures de la croisée du transept (article précédent). Le visage est bien entouré de ses sept boules de glace au chocolat, mais le torse est nu (et androïde), au dessus d'un bouquet de feuilles d'acanthes charnues. En guise de ceinture, cette chimère porte trois ou quatre "fruits" ovales. C'est ma première rencontre avec ce type d'énergumène, depuis mon départ à la découverte des œuvres du Maître de Pleyben.

c) Le cuir. Ah, je retrouve les cuirs sophistiqués observés à Kerjean : une forme arrondie, à enroulements supérieur et inférieur, percé de huit œillets par où passent deux cordages verts, et de deux autres orifices qui laissent passer les tiges de deux fruits de même couleur verte.Mais aussi, fusionné à ce cuir souple, fin, et aux bords ronds, les deux bras en H d'un matériau plus épais et plus rigide, tracé à la règle, et aux extrémités crénelées.

d) Le motif. C'est un ovale à axe horizontal, vaguement ovoïde, blanc cerné par un jonc vert, énervant par son insignifiance. Tout un cuir, toute une sablière pour cet œuf d'autruche ! Pour cette énigme dure et lisse ! J'en ai vu à Kerjean, mais qui portaient, au moins, les armoiries du maître des lieux. J'en ai vu, de petite taille, à l'extrémité gauche de la dernière sablière de Saint-Divy, mais j'ai cru pouvoir faire l'impasse sur son interprétation. Que disent les érudits ? Eggs and dart : "les oves alternés avec des dards en forme de flèche symboliseraient l'alternance de la vie et de la mort". Mais quid de l'egg sans dart ?

e) Pire. Devant cet œuf, je reste coi , mais calme. Mais les six objets verts  en forme de poire,  à cul de coing et à tige de figue que l'artiste a cru nécessaire de suspendre sous les bras des anges et, mieux encore, de faire mûrir à travers le cuir me narguent par leur formes molles, triviales, voire obscènes me turlupinent et m'horripilent. 

Pourtant. J' ai déjà observé ces cucurbites (c'est le nom que ces choses verdâtres méritent, pour sa sonorité). A Saint-Divy, mais sur une autre cuir que celui de l'ove : le cuir à la tête de lion. Je le retrouve dans mes archives : oh, surprise, la forme générale du cuir est la même. Mais je n'en sais pas plus pour autant.

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Le cuir "aux figues" de l'église de saint-Divy. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

Le cuir "aux figues" de l'église de saint-Divy. Photographie lavieb-aile juillet 2017.

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Le cuir "à l'œuf et aux figues", coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir "à l'œuf et aux figues", coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le cuir "à l'œuf et aux figues", coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Le cuir "à l'œuf et aux figues", coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Blochet : saint homme barbu tenant un livre rouge.

Un apôtre, car il a les pieds nus.

N;b : La frise : un mascaron sur un cuir.

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coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Prométhée enchaîné : son foie est dévoré par l'aigle du Caucase par vengeance de Jupiter.

C'est l'une des sablières les plus intéressantes, car elle offre un exemple unique de motif profane, ou du moins lié à la mythologie grecque.

On connaît l'histoire depuis Hésiode, mais Eschyle a écrit sa tragédie Prométhée enchaîné vers 450 av. J.C. 

"Lorsque Zeus décide d'abolir la race humaine afin d'en fonder une nouvelle, seul Prométhée s'y oppose et donne aux hommes le feu (symbole de la connaissance) jalousement gardé par les dieux. Il leur apprend également la notion de temps, les mathématiques (le nombre), l'écriture, l'agriculture (par la soumission de l'animal), le dressage des chevaux, la navigation maritime, la médecine, l'art divinatoire et l'art métallurgique. Sur ordre de Zeus, il est alors enchaîné, à contrecœur, par Héphaïstos (fils de Zeus, dieu du feu et des métaux) à un rocher aux confins de la Terre.

Océan apparaît alors, qui lui promet d'intercéder en sa faveur auprès de Zeus, suivie d'Io qui raconte les malheurs qui lui sont arrivés avant que Prométhée ne lui dévoile son destin.

Prométhée révèle ensuite que sa punition ne durera pas éternellement mais qu'il sera délivré par un descendant d'Io (Héraclès) et que Zeus ne restera pas au pouvoir éternellement mais sera renversé. Prométhée ne peut en dire plus car il doit garder le secret connu de lui seul, sous peine que Zeus ne puisse se soustraire à son destin.

Hermès intervient alors, au nom de Zeus, pour demander à Prométhée de livrer son secret, sans quoi il sera torturé. Prométhée ne cède pas car il sait que Zeus ne peut le faire mourir. Il est condamné à être torturé par un aigle qui lui dévorera éternellement le foie, celui-ci se régénérant sans cesse." (Wikipédia)

 

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Le mythe a été mis en parallèle avec le récit biblique d'Adam et Ève, chassés du Jardin d'Éden pour avoir goûté le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal dans le Livre de la Genèse. C'est sans doute pour cette raison qu'il est représenté ici. Mais pour le professeur de  philosophe Jean-Claude  Le Floch "... le Prométhée des Anciens apparaît alors comme une préfiguration du Christ : comme le Verbe fils de Dieu, il prend part à la création des choses ; comme lui, par amour des hommes, il assume les rigueurs du supplice ; comme lui il sera délivré."

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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a) frise : présence d'un cuir à ove, à défaut de cœur parmi "des fruits des fleurs des  feuilles et des branches".

b) anges : je dirais que ce sont là les plus beaux, si chaque sablière n'entraînait le même enthousiasme radical. Le premier est archétypal. Le cordage qui nous sert de passe à travers ces œuvres est ici une sangle verte qui se fronce en passant devant la tunique plissée jaune d'or. La couleur ponceau de la robe ourlée d'or trouve un rappel dans le vermillon des lèvres et le feu des joues. Et ce bandeau dans les cheveux !

c) Le cuir : on retrouve le rectangle à quatre volutes latérales.

d) Le motif : Prométhée, allongé sur le dos,  est enchaîné aux poignets et aux chevilles sur le Rocher de Caucase, tandis qu'un aigle noir lui dévore le foie, avec une belle précision de l'emplacement anatomique. Notez les ailes aux bords enroulés, selon le procédé propre à l'artiste.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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De l'entrait vers la statue de saint Matthieu à l'angle de la nef.

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Le cuir des Trois Plaies.

a) la frise : des grappes, des feuilles, et encore un cuir à ove.

b) Les anges : parfaits. Ils tiennent d'une seule main les deux brins du linge qui tend le cartouche.

c) le cartouche en cuir découpé : un rectangle en cadre, débordé par les quatre enroulements. Huit orifices pour les cordages blancs. 

d) Le motif : c'est une version abrégée des Cinq Plaies, qui associent les plaies des mains et pieds du Christ Crucifié avec celle du cœur (la plaie du flanc droit n'est pas facile à figurer). Ici, ne sont représentées que les mains et le cœur.

Le cuir des Cinq Plaies se voit sur les sablières de la chapelle de Kerjean, mais aussi, tout simplement, sur celles de Pleyben, dans le coté gauche du chœur.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Blochet.

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Volutes des deux dragons réunis par un collier commun.

a) frise : des feuilles effilées, et un épi .

b) les anges et le cuir : remplacés par deux rubans blancs aux bords frangés de feuilles d'or.

c) le motif : deux dragons sont réunis par le col par un collier de maillons d'or. Les oreilles pointues ont pu en abuser pour des licornes. Ce seraient des chevaux, à cause de leur crinière, si ce n'était la couleur rouge des naseaux et de la bouche en feu. De même, on voit l'amorce de deux ailes. Le corps est remplacé par une verdure faite de feuilles d'acanthe, avec un tronçon doré. Nous retrouvons là le procédé utilisé pour les anges du cuir "de l'œuf et des figues".

Je reconnais dans ce motif des dragons accouplés celui que j'ai observé dans les sculptures de pierre de Bastien et Henri Prigent à diverses reprises, notamment sur le porche de Landivisiau.

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Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Coté occidental du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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La voûte lambrissée : l'entrait et les abouts de poinçon.

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La voûte lambrissée et l'entrait du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

La voûte lambrissée et l'entrait du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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Le "nœud" (l'élément central) de l'entrait 

Ce détail exploite la veine comique ou paillarde.  C'est un ange qui semble être passé à travers un cuir découpé, ses jambes nues et roses gesticulant sous lui.

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Nœud central de l'entrait du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

Nœud central de l'entrait du bras sud du transept, église Saint-Germain de Pleyben. Photographie lavieb-aile 2017.

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SOURCES ET LIENS.

 

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1°) Les cartouches et cuirs découpés.

 

 

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), Le premier volume des plus excellents bastiments de France : Le Louvre, Vincennes, Chambord, château de Madrid (Philibert Delorme 1548-1559), Covussi, Folambray, Montargis, La Muette, Saint-Germain, Creil, Vallery, Verneuil, Ancy-le-Franc, Gaillon, Manne.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k10411354/f45.image

Le second volume : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3137097/f12.image

Blois, Amboise, Fontainebleau, Villiers, Charleval, Les Tuileries, St-Mort, Chenonceau, Chantilly, Anet, Ecouen, Challueau, Dampierre, Beauregard, Bury.

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), s.d, Termes et cariatides, 

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-4R85BIndex.asp

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1542 et 1545] Grands cartouches,  [20] pl., Eau forte ; 38 cm [S.l.], [s.n.] 2 suites sans titre ni inscription. 7 des 20 planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées vers 1542-1543.

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1807/?offset=#page=5&viewer=picture

ANDROUET DU CERCEAU (Jacques) (1510?-1585?), [Entre 1545 et 1547] Petits cartouches de Fontainebleau,  [31] pl., Eau forte ; 26 cm, [S.l.], [s.n.]Suite sans titre d'ornements inspirés par l'art de Fontainebleau et destinés à servir de modèles. Certaines planches reprennent des compositions de Fantuzzi connues par des estampes publiées entre 1542 et 1545 ; D'autres figurent déjà dans la première ou la seconde suite des grands compartiments

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/viewer/1801/?offset=#page=5&viewer=picture

http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb40564725t

DIETTERLIN (Wendel), 1598, Architectura, Nuremberg.

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp

FLORIS (Cornelis II de Vriendt ,dit) 1556, Veelderley Veranderinghe van grottisen  avec HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur) 

https://collections.vam.ac.uk/item/O977184/veelderley-veranderinghe-van-grotissen-ende-engraving-floris-cornelis-ii/

https://www.nationalgalleries.org/art-and-artists/60572/plate-veelderley-veranderinhe-van-grottissen-ende-compartimenten-design-fantastic-fountain-published

 

FLORIS (Cornelis), 1557, Veelderley Niewe Inuentien,  HIERONYMUS COCK (graveur et éditeur) 

VREDEMAN DE VRIES (Hans), 1557 Architectura ou batiments prins de Vitruve, Anvers,  

http://architectura.cesr.univ-tours.fr/Traite/Images/INHA-Res207Index.asp

 

 

2°) Sur l'église de Pleyben :

— ABGRALL, Jean-Marie. Pleyben, son église, son calvaire. Editions d'art Jos Le Doaré, Quimper, 1969.

— ABGRALL, Jean-Marie (1892), Pleyben. Eglise, calvaire, ossuaire, chapelle Notre-Dame de Lannélec Bulletin dee la Société archéologique du Finistère pages 55-72

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207622m/f136.item

 

— COUFFON (René), 1988, Notice sur Pleyben

http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/PLEYBEN.pdf

— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne, XVe-XVIIe s. ; préf. d'Alain Croix, Rennes :Presses universitaires de Rennes, 1997 : thèse de doctorat en histoire sous la direction d'Alain Croix soutenue à Rennes2 en 1997. 

— LECLERC (GUY), 1996, Les enclos de Dieu, édition Jean-Paul Guisserot, 141 p. 

LECLERC (Guy), 2007, Pleyben, son enclos et ses chapelles, éditions Jean-Paul Guisserot, 31 pages pages 18 et 19.

https://books.google.fr/books?id=hWctwxQfyhgC&pg=PA18&lpg=PA18&dq=sibylles+pleyben&source=bl&ots=kzc-VMkVBx&sig=29B6LVXN1nHu2s5hEpHEt3en1vA&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiI596WxpfVAhXH2xoKHQ5WDd4Q6AEIQjAF#v=onepage&q=sibylles%20pleyben&f=false

— LE FLOCH (Jean-Claude), Pleyben : l'ensemble de sablières sculptées.

http://www.mairiepleyben.fr/joomla-mairie/images/stories/documents/docs_historiques/sablires.pdf

Wikipédia https://fr.wikipedia.org/wiki/Enclos_paroissial_de_Pleyben

— Infobretagne : http://www.infobretagne.com/pleyben-eglise-sablieres.htm

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Published by jean-yves cordier - dans Sablières Pleyben
4 janvier 2012 3 04 /01 /janvier /2012 06:04

                     Vierges allaitantes VII

Chapelle Notre-Dame de Lannelec à Pleyben.

Chapel Itron Varia Lanneleg

                    Première partie :

               Présentation ; La Vierge.

 

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Je reprends un article de 2012 en le complétant de commentaires et de photos de 2019.

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1°) Cet article appartient dans ce blog  à la série des Vierges allaitantes (avec 4 articles consacrés à Lannélec):

 

 

 

2°) Il appartient aussi à la série consacrée à Pleyben et ses chapelles :

 

L'église

Les chapelles :

3°) Voir aussi :

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   En 1990, Madame Philomène Le Douzen, paroissienne émigrée aux États-Unis, laissa à la commune un legs important qui permit la restauration des six chapelles tréviales de Pleyben. Depuis, les fonds récoltés par  l'Association de sauvegarde lors des pardons, et les soins dont ils entourent leur chapelle permettent de découvrir un sanctuaire qui met remarquablement en valeur les trésors qu'il renferme. Je remercie ces bénévoles de l'accueil qui a rendu possible ma visite en plein mois de janvier 2012.

   Le pardon a lieu le troisième dimanche de septembre.

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                      I. Présentation

 

Voir : Florent Maillart, Chapelle de Lannelec, Pleyben, Inventaire général du patrimoine, 2009 link

        : idem, Calvaire, link

      La chapelle Notre-Dame de Lannelec, la plus grande de la paroisse de Pleyben, est l'ancienne "trève de l'évêque", trefnescop, ce qui correspondrait (sans aucun élément probant) à un ancien prieuré de Landevennec ; elle date du XVe siécle (une date mentionne sur la dernière colonne du coté droit :lan mill CCCCXX et X  ( 1490) fut fondée ceste église) et sa position surélevée indiquerait qu'elle fut bâtie sur une ancienne motte féodale arasée, bien que d'autres (H. Pérennés, Bdha 1938) parlaient d'ancien camp romain. 

   Le toponyme peut faire envisager la présence d'un de ces moines irlandais qui ont émigré pour évangéliser la Bretagne au V et VIe siècle : un certain Eleg aurait fondé ici son ermitage, Lann.

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  Sur cette trève se trouvait, ou régnait, le manoir de Keranclanff, dont le seigneur, Thomas le Roy, fonda en 1473 une chapellenie à Lannelec. (un chapelain, prêtre qui vivait au village, desservait la chapelle et percevait une rémunération). 

  Dans la première partie du XVIe siécle, le fief appartient aux de Kergoët, dont le berceau est à st Hernin. Ils blasonnaient d'argent à 5 fusées rangées et accolées de gueules, accompagnées en chef de quatre roses de même. Leur devise était : en christen mad me bev  en Doué

  En 1553, la terre passe dans la famille du Bouëtiez de Kerorguen, dont le berceau était près d'Hennebont. Ils blasonnaient d'azur à deux fasces d'argent accompagnées de six besants d'or.

  Jean du Bouëttiez prit une part si active et si violente à la Ligue que le duc de Merceur lui fit couper la tête, pour les nombreux méfaits dont il se rendit coupable sur la paroisse voisine de Guengat.

  Rappellons que la guerre de la Ligue opposait le duc de Merceur, soutenu par les paysans et qui représentait le parti catholique, contre les "royaux" d'Henri IV, récent roi de France et recemment converti au catholicisme, mais soutenu par les Réformés ou protestants. Parmi ces derniers appartenait Jacques de Guengat, homme de guerre. Le jeune Du Bouëttier aidé de vingt-cinq à trente brigandeaux, se saisit du château de Guengat, où il se retrancha. Il pilla, ravagea, faisant des prisonniers, violant et tuant comme s'il eût été en terre de conquête, tant que les ligueurs de Quimper furent contraint de l'assiéger. Il capitula à condition d'avoir la vie sauve. En ce siège mourut grand nombre de paysans ainsi qu'Allain de Marhallat. (Chanoine Moreau, Histoire de Bretagne, chap. V)

 D'après le rôle des contributions de 1751, la seigneurie de Keranclanff s'étendait sur 18 villages de Pleyben.

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       La chapelle comprend sous une forme en tau une nef centrale à quatre travées, deux bas-cotès, deux transepts, une abside droite, une sacristie. Elle renferme cinq autels de pierre. 

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lannelec 9199x

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Le CALVAIRE.

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Voir CASTEL (Yves-Pascal), 1980, Atlas des croix et calvaires du Finistère Pleyben 1474

http://croix.du-finistere.org/commune/pleyben.html

Voir aussi 

http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/calvaire/7f8828b9-e51d-48f2-96c9-6cf5fc2eacf6

Ce calvaire du XVIe siècle de 5 m. de haut associe emmmarchement en moellon de grès arkosique et de schiste à un degré, un soubassement  en pierre de taille de grès arkosique, un socle carré en grès arkosique, un fût chanfreiné en granite, et une croix, et des parties sculptées en kersantite.

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lannelec 9197c

 

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Copyright Inventaire Général Florent Maillard.

Copyright Inventaire Général Florent Maillard.

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Sur la croix à fleurons-boules, le Christ est entouré de deux anges hématophores, recueillant dans leur calice le sang s'écoulant des plaies des mains et du flanc. 

 

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Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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Le Christ a la tête incliné et les yeux clos, il est couronné d'épines aux brins parallèles, les cheveux tombent en mèches devant les épaules, les bras en V étirent les côtes à l'horizontale, le nombril est en bouton, le pagne à olis croisés est noué à gauche par un nœud volumineux, tous critères relevant du style de Bastien et Henri Prigent de Landerneau, sans que cela suffise à leur attribuer ce calvaire bien qu'ils aient été fort actif à Pleyben dont ils sculptèrent le calvaire de l'église en 1555.

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Vierges allaitantes VII : Chapelle de Lannelec à Pleyben, la Vierge.

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Sur le croisillon à droite du Christ, Dimas ou Dismas (du grec dysme, "crépuscule"), le bon larron, les bras  liés à la traverse d'une crux comissa, lève son regard vers le Crucifié. Cf Luc 23:42-43. Ce fut le premier à entrer au Paradis, il fut canonisé.

Son pagne est lisse, sans plis ni nœud.

Les jambes sont fléchies, selon une tradition générale à la Bretagne et qui rappelle que, dans l'évangile de Jean 19:31-32, les larrons eurent les jambes brisées (afin de s'assurer de leur mort et pour éviter que les corps restent en croix un jour de sabbat particulièrement solennel).

 

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Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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Le mauvais larron Gesmas baisse la tête et tire la langue au Christ.

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g. k. s. 5 m. XVIè s. Soubassement élevé. Fût à pans, griffes. Croisillon, consoles, gibets des larrons (deux statues manquent). Croix, fleurons-boules, crucifix, anges aux calices, Vierge à l’Enfant, écu muet. [YPC 1980]

Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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Sur l'autre face, tournée vers l'est, est représenté un Christ au lien, comme à Saint-Sébastien de Saint-Ségal, au calvaire de Saint-Ségal, ou à la chapelle Saint-Laurent de Pleyben.

Curieusement, Yves-Pascal Castel décrit ici en 1980 une Vierge à l'Enfant.

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Le nœud du calvaire (entre les croisillons) a dû être mal orienté au remontage, car sur cette face orientale se trouvent les deux anges recueillant le sang des pieds du Christ crucifié de la face occidentale. Inversement, le nœud qui devait se trouver sous le Christ aux liens est un blason, muet.

 

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Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Calvaire de la chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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LES INSCRIPTIONS DE DATATION (par ordre chronologique).

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1°) Inscription de fondation : 1490.

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Une inscription en français en caractères gothiques, placée sur le premier pilier sud-est, nous apprend l'époque où fut construire la chapelle :  LAN . MILL .  CCCC . IIIIXX . ET. X FUT . FONDE . CESTE . EGLISE.

"lan mill CCCCIIIIXX et X fust fondé ceste esglise ».

Cette date est proche de la mention en 1473   d'une chapellenie (cf. supra) . 

On peut regretter qu'un peintre zélé l'ai badigeonné au blanc, quand on connaît la beauté du grain de kersanton, sa faculté à prendre la lumière et avec un estampage, à augmenter sa lisibilité.

http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/illustration/ivr5320092900303nuca/e4a782c7-97f0-4612-85de-6ec38946b794

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Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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Il faut attendre 50 ans pour les datations suivantes.

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  •  1546, MATER : DEI : ORA : PRO:  ME (Mère de Dieu priez pour moi) : panneaux sculptés de l'ancienne porte nord. Un donateur est agenouillé devant le prie-dieu face à la Vierge à l'Enfant et adresse à elle sa prière..

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lannelec 9275

 

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  • une inscription disparue sur cette porte (dont deux panneaux sculptés ont été conservés et sertis dans un encadrement moderne) est citée par Guy Leclerc : 1546 FUST/ FAICT P G FAVENNEC. Or, on lit actuellement sur une pierre placée dans le mur intérieur d'un transept : V. C  PAVENE.I ( un Jacques Favennec né en 1610, est attesté à Pleyben) .

    On pense à Germain FAVENNEC, maçon et architecte avec son frère François, mais ceux-ci intervinrent à Pleyben en 1718. 

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lannelec 9280c

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  • la  statue de sainte Barbe est datée par inscription de  1578 . Celle de Notre-Dame de Lannélec relève approximativement de la même date.

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Puis s'écoulent près de cent ans avant la pose de deux statues d'apôtres en 1667, celles de (St André) et de St Matthieu..

 

La chapelle de Lannélec reçut au cours des âges des restaurations et des embellissements : les sablières et  les blochets  les statues, les autels portent diverses dates : 1578, 1619, 1664, 1667, 1742.

  • 1742 sur la porte de sacristie 

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lannelec 9278c

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Puis :

  • F. FAIRE PAR F. LE ROUX Fabriqve LAN MDCCLXIV (1764) au dessus de la porte nord.
  • F (fait) fair par M. Léon, recteur : de : Pleiben : M. : Guillaume : Le : Born. Gan : Palant : Mathias : Direson : fabric : fait lan 1772. Yves Rioual fabric. sur les lambris de l'un des transepts. Le recteur  Guillaume Léon a aussi mis son nom au confessionnal de la chapelle Saint-Sébastien en Saint-Ségal.

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La sacristie de 1741.

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  La sacristie porte l'inscription de sa construction : IAQ : PLASSART : FABRIQVE : 1741

La généalogie de Louis Le Brun indique Jacques PLASSARD, né le 19 février 1717 à Menez Guenn à Pleyben, fils de Jan Plassard et de Françoise LE PAIGE (1687-1733).

https://gw.geneanet.org/zardoz?lang=en&iz=1542&p=jacques&n=plassard

Sauf homonymie, Menez- Guen se trouve à l'est de Lannélec, sur le Cloître-Pleyben

On sait qu'à la suite du Concile de Trente, et surtout d'un édit royal, les églises et chapelles firent construire une sacristie afin de protéger les revenus de la fabrique ou les objets de valeur ; c'est donc une pièce protégée des effractions par des fenêtre à barreaux et une forte serrure. Le conseil de fabrique est tenu de s'y réunir. Elle ne doit pas être trop humide, et doit donc se trouver au sud ou à l'est. Elle doit disposer d'un lavabo et d'un oratoire pour le desservant.

L'église de Pleyben fit construire sa sacristie en 1680-1690 ; elle fut reconstruite en 1719. Celle de Gars-Maria date de 1729. A Lanridec, la chapelle dispose d'une armoire de sacristie datée de 1664.

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lannelec 9193c

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On signale aussi : 

  • le 19 février 1764 fut bénite une cloche baptisée Marie
  • La flèche du clocher date de 1883

 

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 L'élément décoratif majeur est le maître autel surmonté de la maîtresse-vitre et encadré par les deux niches gothiques : celle de la Vierge à l'enfant du coté de l'évangile, celle de Sainte Barbe du coté de l'épître.

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lannelec 9309c

 

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Pour conclure cette présentation, je reprendrai la notice de l'Inventaire Général :

"La chapelle a été construite dans une enceinte aujourd´hui arasée qui pourrait se rapporter au Moyen Age. Les parties les plus anciennes de l´édifice datent de 1490 (inscription en lettres gothiques sur le pilier sud-est). Mais, dans son ensemble, la chapelle date du 16e et du 17e siècle ainsi que les sablières, les autels et les verrières (restaurées au 19e siècle). Vestiges de vitraux anciens dans la maîtresse-vitre dont cinq blasons pouvant correspondre à ceux des seigneurs de Ker-an-Claff ou Kerc'hlany, prééminenciers supposés de la chapelle. Elle a été restaurée en 1764 par le fabricien F. Le Roux (date et inscriptions portées au dessus de la porte nord, date également portée sur la cloche). La flèche date de 1883. Sacristie construite en 1741 à l'initiative de Jacques Plassart, fabricien (date et inscription sur le linteau d´une des fenêtres), avec un vantail de porte daté 1742."

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"Édifice de plan en T à chevet plat. Nef à quatre travées séparée des bas-côtés par des piliers octogonaux en arc brisé, moulurés à pénétration directe. Bas-côtés éclairée au nord et au sud par une porte en plein cintre et une fenêtre en arc brisé à réseau. Bras de transept éclairés au nord et au sud, mais aussi à l´ouest par deux fenêtres en arc brisé. Cinq autels sont conservés : le maître-autel, deux dans les chapelles latérales, et deux dans les bas-côtés. Sol couvert de grandes dalles de schiste. Sablières et blochets sculptés (dans le transept et le choeur). Lambris de couvrement. Massif occidental avec chambre de cloches surmontée d´une flèche. Sacristie hors-oeuvre de forme hexagonale."

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II. Notre-Dame de Lannélec

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C'est la Vierge allaitante dont la présence motive ma visite. 

Elle est présentée dans une niche à gauche de l'autel en vis-à-vis d'une autre niche dédiée à Sainte Barbe : c'est ce que l'on retrouve encore à Kerlaz (face à Saint-Germain), à St-Venec en Briec (face à Saint Venec), et c'était peut-être aussi le cas à Quillidoaré, voire dans les autres chapelles abritant des Virgo Lactans. Dés lors, je suis amené à penser que Sainte Barbe a été la patronne ou la co-patronne de la chapelle, mais je n'ai pas rencontré cette mention chez les auteurs de monographie.

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  La niche et son volet historié.

  La niche historiée est l'une des mieux conservées qu'il m'a été donné de voir ; mais  seul le volet droit est présent. Elle porte l'inscription NOSTRE. DAME. DE. LANNELEC en un mélange de lettres capitales et minuscules ; les deux N sont conjoints, le C final est sus-inscrit, sans qu'on devine la raison de cette abréviation puisque le calligraphe ne manquait pas de la place nécessaire.

  Des pampres de vigne et des grappes de raisin dorées  grimpent en bas relief sur les cotés pour atteindre le linteau, décoré de nouvelles grappes peintes et d'entrelacs de feuillage. Au centre, où se trouve souvent un emblème (armoiries, symbole) est peint un personnage en prière, mains jointes.

Au sommet vient se placer un haut élément à trois pans encadrés par des pilastres, des panneaux ajourés comme des moucharabiehs d'or _ des grilles de confessionnal, des claustra_ par des ornements gothiques aux reflets vermeils. Et cet échafaudage culmine en un dernier placard, tout aussi doré, mais dont l'artiste a pris la peine de travailler les ajours pour dessiner des croix enchevêtrées.

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Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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 Le volet aux trois panneaux :

 

 1. l'Annonciation

   La représentation est classique : l'ange Gabriel trace de la main droite une bénédiction (Tu es bénie, Marie) et prononce les paroles  Ave Maria gratia plena Dominus tecum, qui viennent s'enrouler autour d'un sceptre fleurdelisé lui même placé au dessus d'un bouquet de lis martagon placé dans un vase : cet axe médian entre l'espace divin à gauche et l'espace profane de droite est aussi l'axe vertical qui relie Dieu-le-père avec la terre, signifiant sa décision d'incarnation.

   Cet alignement surabondant de symboles semble réciter les Litanies :

  • le vase : vas spirituale, ora pro nobis, vas honorabole, o.p.n, vas insigne devotionis, o.p.n (litanies de Lorette)
  • le lis, emblème de virginité : sicut lillium interspinas, comme le lis au milieu des épines (O Sanctissima, ou Cantique des Cantiques)
  • la colonne : Colonne immaculée de notre foi (Litanies de l'Immaculée Conception)

  La Vierge, traditionnellement vêtue de bleu, les cheveux sagement couverts d'un voile, recule par stupeur dans un geste et une posture qui parvient à associer l'acceptation et la surprise.

 Dieu coiffé de la tiare tient le globe terrestre, et bénit de la main droite tandis que son souffle de lumière  divine envoie la colombe de l' Esprit Saint féconder l'Immaculée avec le même entrain qu'un convive de la Saint-Sylvestre soufflant dans une langue de belle-mère.

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 2. La Visitation. 

 La sculpture en bas-relief obéit encore à l'iconographie traditionnelle; l'espace est soigneusement construit par les deux arcades, la ligne horizontale du mur, et l'angle du bâtiment ; la perspective est approximative. Sainte Élisabeth, habillée de sa robe verte traditionnelle, pose sa main sur le ventre de Marie et se réjouit de la naissance à venir sous les yeux de Zacharie, coiffé d'un turban.

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vierge 9236c

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 3. la Nativité.

  L'image est si conventionnelle qu'il est inutile de la commenter, sauf à considérer les chausses de Joseph, témoin du costume du XVIe siècle, et le pot à feu, symbole de Vie ou de Charité.

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NOTRE-DAME DE LANNÉLEC

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La statue et la niche  ont été restaurées en 1977.

Cette statue en pierre polychrome (kersanton, selon Amamiya) mesure 1,86 m.

C'est une Vierge Allaitante tout à fait semblable à celles que j'ai déjà présenté, mais les vêtements de celle-ci sont particulièrement riches et colorés. Les couleurs sont les mêmes qu'à Kerlaz (manteau) ou qu'à Kergoat (robe) :  large manteau drapant bleu frappé de motifs dorés, au revers rouge, et dont le pan gauche est retenu par l'annulaire ; corselet doré dont l'ouverture s'entrebaille sur un soufflet de même étoffe : robe largement élargie sous la taille par une sorte de vertugadin, et qui se compose d'une première robe-tablier plus épaisse qui se soulève et fait retour vers la ceinture pour dévoiler un revers soyeux de couleur verte (qu'on retrouve aux manches), et de la robe elle-même qui tombe sur le sol, ne laissant apparaître qu'un bout de chaussure rouge.

  Cette vierge est couronnée par un attribut peint sur un ciel bleu constellé et ondoyant.

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Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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  L'inscription :

Le long du bord de la robe court une inscription  qui a été déchiffrée

  • par H. Pérennés comme : Nostre Dame de M.R.I.C.S (miséricorde ?) PE pour nous, 
  • et par René Couffon comme :Nre : dAME MRCIS PE : POVR, 
  • par Guy Leclerc comme : N(o)TRE DAME DE M(e)RCIS P(ri)E POUR
  • alors que je lis N˜RE : dAME : dE : M˜RICO˜/PE : POVR

  Les tildes abréviatifs transforment N˜RE en NOTRE et M˜RIC.. en MISERICOR/PE

Sachant que les D sont ici, comme c'est souvent le cas, écrit en onciale et non en notre D majuscule (voir : dAME), je pense que ce que nous lisons PE est en réalité dE, la lettre d étant verticalisée pour prendre moins de place : donc nous pouvons  lire MISERICORdE.

Je lis donc NOTRE DAME DE MISERICORDE POUR (NOUS ?).

  Cette inscription est semblable à celle de N.D. de Bonne Nouvelle à Quillidoaré, mais la dédicace à N.D de Miséricorde est étonnante car cette Vierge n'a aucun rapport avec l'allaitement ou la naissance, que son culte est très rare dans le Finistère ( Monastère de N.D de Miséricorde à Pont-L'Abbé) et en Bretagne.

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vierge 9237c

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Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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L'enfant Jésus, une pomme à la main,  tient en l'air par l'opération du Saint-Esprit, car il ne repose pas sur la main de sa mère. L'enfant ne tête pas, comme il le fait à Gouézec ou Saint-Briec, mais sa main droite est posée sur la poitrine recouverte du coté gauche. 

 Marie présente le mamelon entre le majeur et l'annulaire, dans un geste plein d'élégance et de grâce. Son visage n'a pas la grâce de celui des Vierges de Kerluan, de St-Venec ou de Kergoat, le front est épilé de manière radicale, mais on retrouve la chevelure maintenue par le bandeau occipital  de tissu froncé avant de libérer sur les épaules son flux onduleux. La métaphore du Fleuve de lait se poursuit à travers les boucles et les volutes du décor peint en arrière-plan.

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Il faut noter deux détails :

 

1.. Le corselet ouvert en V selon le modèle désormais habituel présente la particularité d'un laçage entre des oeilletons, très précisément représenté.

 

2. le pan gauche du manteau est relevé et tendu par les deux derniers doigts de la main. 

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Nous avons la chance de disposer de la description donnée par Christiane Prigent dans sa thèse (non diffusée) par l'intermédiaire d'H. Amamiya :

"L'échancrure du corsage laisse passer le sein droit que la Vierge presse entre le medius et l'annulaire de sa main droite. [...] Production d'un atelier probablement installé à Pleyben, utilisant une quinzaine d'années après les modèles de l'atelier de Locronan. La Vierge, datée des années  1578 par comparaison avec la statue de sainte Barbe de même édifice offre de nombreuses analogies avec la chapelle de Quillidoaré, et l'église de Kerlaz . Nous voyons ici la pénétration vers le sud des ateliers morlaisiens et leur rencontre avec un atelier local de sculpture sur pierre."

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Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

 

 

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Mais ce qui caractérise cette Virgo Lactans parmi toute les autres, c'est qu'elle maîtrise de ses pieds un démon aux allures féminines  qui tient la pomme fatale dans la main gauche. Sous le pied de l'Archange, de Saint-Georges ou de la Vierge, les dragons, monstres, démons et autres avatars du Malin ne sont jamais morts, tout-au-plus dominés, mais ils bougent encore, battent de la queue, crient au scandale, et ils relèvent la tête, les impudents ! Les plus optimistes pensent que la vouivre hurle ou grimace de douleur.

  Je retrouve dans cette créature habillée d'écaille celle qui apparaissait en dessous de Jessé dans l'Arbre de St Thégonnec : L'arbre de Jessé de l'église Notre-Dame de Saint-Thégonnec.

Nous avons donc une statue qui appartient à la série des Vierges allaitantes, mais aussi à celle des Vierges à la Démone, dont le catalogue a été dressé en Bretagne par Louis Le Thomas puis par Iroko Amamiya.

Les plus proches exemples se trouvent à la chapelle de Gars-Maria en Pleyben (accès interdit par le propriétaire) et de Saint-Sébastien de Saint-Ségal (jadis appartenant à la paroisse de Pleyben):

http://www.lavieb-aile.com/2019/06/la-chapelle-saint-sebastien-en-saint-segal-la-vierge-a-la-demone-et-le-retable-nord.html


Voir d'autres Vierges à la démone de Bretagne dans les articles suivants :

http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/illustration/ivr5319822200139va/6a84908d-7360-40ec-b2e7-0350abc13e37

 

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H. Amamiya en donne 35 exemples, et décrit celle de Lannélec page 98 de son ouvrage. Elle décrit la Démone ainsi :

Couchée sur le coté sous le pied droit de la Vierge, tête à droite, buste légèrement redressée. Chauve. Visage très expressif avec un rictus marqué sur la bouche grande ouverte. Son buste nu est plat [retouche d'une poitrine trop provocante par bûchage ]. Une pomme jaune rougeâtre dans la main gauche, la droite posée sur le sol. La partie inférieure du corps a la forme d'une queue de serpent squameuse qui s'enroule une fois sur elle-même  avant de pointer vers le haut. Le bout manque."

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Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

Chapelle de Lannélec en Pleyben. Photographie lavieb-aile 17 juillet 2019.

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La bannière de procession (Le Minor, 2008) de Notre-Dame de Lannélec :

  Récemment, le comité de sauvegarde de la chapelle a fait réaliser par les établissements Le Minor de Pont-L'Abbé une superbe bannière. Le qualificatif n'est pas complaisant, et les paroissiens peuvent être fiers d'une telle réalisation dont le carton me semble  rivaliser en qualité avec celle, très réputée, des brodeurs. On trouve au verso le nom du cartonnier : J. Derouet, celui ou celle qui a fait preuve ici d'un joli talent.

  La Vierge est fièrement campée et affiche crânement sa maternité. L'artiste a été fidèle au modèle, mais il a affiné le visage, et transformé l'enfant Jésus en un petit hercule malicieux et sympathique. La magnificence du costume et de la coiffure est parfaitement rendue. La démone n'en mène pas large.

Un feuillet épinglé dans la chapelle reproduit le Certificat d'authenticité :

  "Cette bannière a été brodée en 2008 aux ateliers Le Minor à Pont-L'Abbé par J.M. Perennec d'après un carton de Jackez Derouet à la demande du Comité "La Chapelle de Lannelec", Monsieur l'abbé Guillaume Gonidou étant curé de Pleyben. Le 28 juin 2008."

Jean-Michel Perennec, brodeur chez Le Minor depuis 20 ans, a passé trois mois a réaliser ce  travail, utilisant 155 écheveaux pour 22 couleurs.

  Je trouve Jakez Derouet cité sur la toile :

  • comme représentant de la Ligue Celtique...en 1964,
  • comme artiste ayant participé à la conception du blason de Pluguffan,
  • comme artiste qui a réalisé le logo de l'association de défense de la langue bretonne Mervent,
  • comme concepteur du logo bigouden,
  • comme créateur du dragon rouge qui figure sur le drapeau breton du Trégor, sur fond jaune à croix noire,
  • étant "de Plomelin", etc...

En juillet 2010, Jean-Michel Perennec a réalisé une autre bannière sur un carton de Jakez Derouet : celle de la chapelle de la Madeleine à Penmarc'h. La première bannière réalisée chez Le Minor avait été dessinée par Pierre Toulhoat  pour la Tromènie de Locronan, en 1953. Celle de Lannelec était la 31ème, celle de la Madeleine la 34ème.

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Voir la liste et la description des 45 bannières Le Minor sur mon blog :

Les bannières Le Minor.

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vierge 9415c

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  Le verso de la bannière : L'arbre de Vie et l'Apocalypse.

  C'est la partie originale, avec un thème qui doit être un hapax en matière de bannière.

  Pour une raison que j'ignore, l'artiste ou les commanditaires ont choisi d'illustrer le verso de la bannière par un Arbre de Vie, au pied duquel un couple, à priori le couple originel, émerge des eaux et prend appui sur des formes rouges. Une colombe s'apprête à se poser sur une branche ; le soleil apparaît derrière une porte, qui pourrait être celle de l'arche de Noé.

   L'arbre de Vie est celui que mentionne la Genèse 2, 9 :

           L'Éternel Dieu fit pousser du sol des arbres de toute espèce, agréables à voir et bons à manger, et l'arbre de vie au milieu du jardin, et l'arbre de la connaissance du bien et du mal.

 

   et puis, après la Chute, dans Genèse 3,24 :

              C'est ainsi qu'il chassa Adam ;et il mit à l'Orient du jardin d'Eden les chérubins qui agitent une épée flamboyante pour garder le chemin de l'arbre de vie. ( Trad. Louis Ségond)

  Il confère l'immortalité, mais il est aussi symbole de vie bien-sûr, donc de croissance, de vitalité voire de fécondité ou de prospérité : placé au revers de la Vierge allaitante, il apparaît alors comme le qualificatif spirituel le plus adapté pour qualifier Maria Lactans, comme dans ces Méditations sur les litanies de la Vierge de 1701 link : Quelles louanges ne devons-nous pas aux excellentes dispositions de votre âme, Ô arbre de vie, qui nous avez donné le véritable fruit vivifiant !

   L' olivier est souvent l'arbre choisi pour le représenter, quand ce n'est pas le figuier sycomore.

La conjonction de l' olivier, de la colombe et de l'arche évoque un autre premier jour de l'humanité,  Genèse 8, 11 :

  La colombe revint à lui sur le soir ; et voici, une feuille d'olivier était dans son bec. Noé connut ainsi que les eaux avaient diminué sur terre (Trad. Louis Ségond)

 

  Alors que l' arbre de Jessé  relie Marie à l'arbre de la connaissance, celui du péché originel (c'est le symbole de Notre-Dame de Miséricorde foulant le démon et sa pomme sur la statue de Lannelec) à travers l'arbre de la Croix, le choix de l'arbre de vie tourne le dos à cette problématique du Péché et ouvre l'esprit du fidèle à un monde neuf, primesautier, un premier matin du monde inondé de soleil. Marie Arbre de Vie redonne accès à l'arbre du milieu du jardin de l'Eden.

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vierge 9417c

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 L'arbre de vie est celui de la Genèse, mais aussi celui de l'Apocalypse. Or, c'est ce texte de Saint Jean qui est cité en broderie autour et en dessous de la bannière : Apocalypse, 7, 14 :

       Heureux ceux qui lavent leurs robes, afin d'avoir droit à l'arbre de vie, et d'entrer par les portes dans la ville !

  Ce verset est précédé dans le texte par celui-ci, qui en explicite le sens :

   Je lui dis : Mon seigneur tu le sais. Et il me dit : ce sont ceux qui viennent de la grande tribulation ; ils ont lavé leurs robes, et ils les ont blanchies dans le sang de l'agneau. (Trad. Louis Ségond)

  Il sera suivi de celui-ci :

  Au milieu de la place de la ville et sur les deux bords du fleuve, il y avait un arbre de vie, produisant douze fois des fruits, rendant son fruit chaque mois, et dont les feuilles servaient à la guérison des nations. (Apocalypse 22, 2 : id)

 

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III. La fontaine près de Lannelec, et le culte pour la guérison des enfants.

  - En 1910, l'abbé Peyron signale que le pardon se déroule "le dimanche le plus rapproché de la fête de saint-Matthieu" (21 septembre) et qu'à cette occasion " l'on y demande plus spécialement la santé des enfants, et à la procession du pardon, plusieurs mères, le cierge à la main, y conduisent leurs petits enfants. Non loin de la chapelle est une fontaine dite de Saint Vendal où les parents plongent leurs enfants atteints de rhumatismes."

  Le chanoine Pérennés donne à cette fontaine le nom de Saint-Venec et signale qu'elle est dépourvue d'édicule.

  Les cartes IGN, Cassini ou d'Etat-Major ne signalent pas de fontaine. L'office du tourisme de Pleyben signale cette fontaine Saint-Venec dans son site.

 

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SOURCES ET LIENS.

.— AMEMIYA (Hiroko) 2005, Vierge ou démone, exemple dans la statuaire bretonne, Keltia éditeur, Spézet. 269 p. page 68-69. Version remaniée de la thèse de 1996.

— AMEMIYA (Hiroko), 1996,  Figures maritimes de la déesse-mère, études comparées des traditions populaires japonaises et bretonnes . Thèse de doctorat d'études littéraires, histoire du texte et de l'image  Paris 7 1996 sous la direction de Bernadette Bricout et de Jacqueline Pigeot. 703 pages Thèse n° 1996PA070129 . 

— COUFFON, René, LE BARS, Alfred. Diocèse de Quimper et de Léon. Nouveau répertoire des églises et chapelles. Quimper : Association Diocésaine, 1988.

http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/PLEYBEN.pdf

 

 

Mobilier :

Deux niches à volets historiés avec leurs statues en pierre polychrome du XVIe siècle : Vierge Mère allaitant, portant sur le rebord du manteau l'inscription : "Nre. dAME MRCIS PE. POVR...", sur la plinthe de la niche : "NOSTRE DAME de LANNELEC" ; sur l'unique volet, en bas-relief, l'Annonciation, la Visitation, la Nativité.

 

— INVENTAIRE GENERAL

 

http://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/chapelle-notre-dame-de-lannelec/5e9eca66-2134-4fd9-8d43-bb9416344296

 

 

 

— LE THOMAS (Louis), 1961 "Les Démones bretonnes, iconographie comparée et étude critique", Bulletin de la société Archéologique du Finistère t. 87 p. 169-221.

 

— PRIGENT, Christiane. 1981, Etude de quelques sculptures bretonnes influencées par les modes venues des pays nordiques. Dans : Bulletin de la société archéologique du Finistère, t. CVIII, 1981.

 — PRIGENT, Christiane, 1982, . Les statues des vierges à l'enfant de tradition médiévale: XVe- XVe siècles dans l'ancien diocèse de Cornouaille  Prigent, Christiane. - [Université de Rennes] (1982)

 

— LECLERC (Guy), 2009, La statuaire de la Vierge au sein, Pleyben, chapelle de Lannelec, Bulletin Société Archéologique du Finistère Tome CXXXVII, 2008-2009 p. 411-412.

 

PERENNES (Henri ) , 1938, , Notice sur Pleyben , Bulletin Diocésain d'histoire et d'Archéologie 1938:

https://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/3c650c05ef86fe15d59ddb6b528d5f93.pdf

Bretagne sacrée :

http://archive.wikiwix.com/cache/?

http://kergranit.free.fr/Textes/Lannelec.htm

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Published by jean-yves cordier - dans Pleyben Vierges allaitantes Bannières.
4 janvier 2012 3 04 /01 /janvier /2012 06:03

 

  La chapelle Notre-Dame de Lannelec à Pleyben : Deuxième partie : Sainte-Barbe .

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Voir :

Vierges allaitantes VII. Chapelle Notre-Dame de Lannélec à Pleyben. Première partie : Présentation ; La Vierge.

 

 

Cet article appartient à la série consacrée à Pleyben et ses chapelles :

 

L'église

Les chapelles :

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3°) Voir aussi :

Voir sur sainte Barbe :

 

 

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  Sainte-Barbe apparaît à Lannélec comme la patronne en second de la chapelle, bien qu'aucun document ne l'atteste. En effet, c'est pour elle qu'est dressée en face de Notre-Dame de Lannélec (ou de Misericorde) une niche dévotionnelle à droite de l'autel. C'est aussi elle qui figure sur le vitrail de la maîtresse-vitre.

  Alors que je rédigeais cet article, j'ai réussi à avoir accès au  site d'Alain Ménard kergranit.free.fr, et j'y ai découvert le rapport entre cette Sainte, habituellement considérée comme protectrice de la foudre (voir :  Église Saint-Thurien à Plogonnec II : une inscription du tonnerre!.) et les Mamm al lez ou Vierges au lait. Je commence par décrire la statue, puis j'en arrive à ce point passionnant :

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1. La niche et la statue de Sainte Barbe.

  La niche gothique est identique à celle que j'ai décrit pour Notre-Dame de Lannelec, mais sa partie supérieure est mieux conservée, et elle possède ses deux volets. Elle porte l'inscription GRANDE . et . PVISSANte . Ste BARBE . 

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 La statue de pierre polychrome du XVIe siècle grandeur nature présente  Sainte Barbe avec ses attributs habituels : la tour à trois fenêtres, dont celle qu'elle a fait percer en l'honneur de la sainte Trinité ; le livre, astucieusement placé à la base de la tour comme s'il était dans une salle de lecture ; et la palme du martyre.

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ste-barbe 9307c 

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   Elle est vêtue d'un manteau rouge doublé de bleu et dont la bordure, bleue également, porte des éléments carrés et dorés qui descendent jusqu'à  l'inscription d'une date, 1578. Je rappelle qu'à cette date, toute la région est embrasée par la guerre de la Ligue entre le catholique et ambitieux duc de Monfort, et l'ex-protestant Henri IV qui cherche à reprendre le contrôle de la Bretagne.

   Cette date m'apparaît très intéressante si on considère que cette statue et sa niche s'établissent en vis-à-vis de la statue de Notre-Dame de Lannélec, qui, elle, n'est pas datée. Les deux niches sont identiques, les deux statues paraissent de la même taille et de la même facture, leurs  costumes sont très semblables, et, détail à mes yeux significatif, on retrouve chez Sainte Barbe la même chevelure retenue par un bandeau occipital que j'ai observé sur 6 des 7 Vierges allaitantes et sur Sainte Gwen. Or, aucune des Vierges allaitantes n'est datée. Si on accepte d'attribuer la même date à N.D. de Lannélec qu'à sa voisine Sainte Barbe, cela donne une indication sur la datation de toute la série des Vierges au Lait : au dernier quart du seizième siècle, avant et pendant la Ligue. 

   Cette date de 1578 est exactement celle de la statue de St Venec, placée en vis-à-vis de le Vierge allaitante à la chapelle St-Venec en Briec. Nous avons donc :(sd = sans date)

 

Vierge allaitante socle vierge saint patron socle saint
Tréguron Gouezec :sd 1654 saint Eloi sd 1584
Kergoat : sd sd    
Quillidoaré : sd sd    
Kerlaz : sd  1566 Saint Germain  
St Venec : sd 1592 Saint Venec :  1578
Kerluan :sd pas de socle ---  
Lannélec : sd socle : sd Sainte Barbe : 1578  

   Si on écarte le socle de Tréguron en l'estimant non contemporain de la statue qu'il accueille, on obtient la fourchette de datation de 1566-1592 pour les vierges au lait de Cornouaille.

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ste-barbe 9213x

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Chapelle de Lannélec à Pleyben. Photographies lavieb-aile.

Chapelle de Lannélec à Pleyben. Photographies lavieb-aile.

Chapelle de Lannélec à Pleyben. Photographies lavieb-aile.

Chapelle de Lannélec à Pleyben. Photographies lavieb-aile.

       

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.Outre ce manteau, le reste du costume retrouve les éléments que l'on trouvait sur les Vierges allaitantes, à l'exception bien-sûr du corselet d'allaitement à ouverture à soufflet frontal.

  La longue chevelure ruisselante est un autre point commun avec les Vierges ; je la considérais comme métaphorique de l'écoulement du lait, et nous verrons qu'ici encore cette interprétation n'est pas à écarter.

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ste-barbe 9220c

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       le culte de Sainte Barbe en Europe.

Sainte Barbe, ou Sainte Barbara, Santez Barba en Breton, est une sainte martyre qui aurait vécu au IIIe siècle à Heliopolis.

Les premières versions du Mystère de sainte Barbe apparaissent au VIIe siècle en Orient, d'où des reliques sont rapportées en de nombreuses villes d'Europe (Burano à Venise, à Plaisance en Italie, Abbaye de Sainte-Barbe-en-Auge en 1050, cathédrale de Liège, aux Feuillants à Paris,  etc...) La fête catholique est instituée le 4 décembre  dès le XIIe siècle à Rome. Vincent de Beauvais mentionne la sainte dans son Speculum Historiale de 1258, Jacques de Voragine donne le récit de sa vie dans la Legenda aurea en 1261-1266 (traduction française en 1476) mais les principaux témoignages iconographiques de son culte datent du XVe siècle en Flandre puis en Italie : peintures de Jan Van Eyck en 1437 ( Musée royal des Beaux-Arts d'Anvers), de Robert Campin en 1438, Cosimo Rosselli en 1468 (Musée des Offices, Florence), de Hans Memling en 1479 (Metropolitan Museum de New York), de Lorenzo Lotti en 1524.

L' église de Savigny (Manche) possède un cycle de peintures murales du XIVe.

  Le récit de Jacques de Voragine ici page 296 : link

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 2. Culte de Sainte Barbe en Bretagne

ou : les éléments apportés par le site d'Alain Ménard kergranit.free.fr: Dans sa description de la chapelle de Lannélec, remarquable par la qualité des photographies et l'art de faire jouer la lumière, je commence par lire une présentation très bien rédigée des divers éléments que j'ai pu trouver dans la Notice de 1938 d'Henri Pérennés ou dans d'autres sources. Mais j'y trouve surtout  un texte d'Anatole le Braz, auquel je n'avais pas eu accès, Les saints bretons d'après la tradition populaire en Cornouaille, 1893-1894. L'extrait qui y est cité, et que je trouve aussi ici :link m'apporte trois éléments :

  • une description de Lannélec vers 1883, que j'ignorais
  • la mention d'un "mystère de Sainte Barbe de 1557 réédité par Ernault",
  • La mention d'une sainte Barbe protectrice des femmes enceintes dans la citation suivante :

  "Ce qu'on oublie parfois, c'est qu'elle tient aussi sous sa sauvegarde les femmes enceintes. "Elles me sont plus particulièrement chères, dit-elle à Dieu en mourant ; faites-en des mères joyeuses ! Que leurs enfants viennent à bien, pour recevoir la grâce du baptême !" Ainsi s'explique qu'on ait placé sa statue, dans l'église de Lanneléc, en face de celle de Notre-Dame. Les femmes sur le point d'accoucher s'agenouillent devant l'une, et devenues mères, n'ont qu'à passer à l'autre. "

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  Il me reste à explorer ces pistes :

Emile Ernault (1852-19838)

   Ce professeur de langue et littérature classique (latin et grec ancien) à l'Université de Poitiers, né à Saint-Brieuc et membre actif de la Société d'émulation des Côtes du Nord s'est  avant tout consacré à l'étude le la langue bretonne : il a étudié et édité des cartulaires et gloses en vieux-breton et des mystères médiévaux en moyen-breton.

  En 1885, il donne la première édition française du Mystère de Sainte Barbe de 1557 :

Le Mystère de Sainte Barbe, tragédie bretonne, texte de 1557, publié avec traduction française, introduction  et dictionnaire étymologique du breton moyen, Société de Bibliophiles bretons et de l'histoire de Bretagne, Nantes 1885 404 p, in 4° :link

  C'est en réalité La Villemarqué qui est à l'origine de cette publication, car c'est lui qui a initialement recopié un exemplaire de 1557 appartenant à M. de Saint-Prix  et qui a commencé à le traduire avant de confier la suite du travail à Ernault.

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Le Mystère de Sainte Barbe en breton.

   a) les mystères bretons et le contexte historique .

     J'apprends dans un article de Jean-François Courrouau, L'imprimé religieux en langue bretonne (1526-1660), Ann. Bret. Pays de l'Ouest, 115-3, 2008, 57-79, link que ce Mystère est la première Vie de Saint éditée en breton, précédée par le Catholicon (1499), le Missel breton (1526) et le Mystère de la Passion (1530). Viendront ensuite une Vie de Sainte Catherine ( 1576) et la Vie de Saint-Yves (1623). Mais il faut adjoindre à ces livres imprimés  les manuscrits qui ne seront parfois édités qu'au XIXe siècle, et imaginer la tradition orale, attestée par les mentions de mystères joués dans les églises puis à l'extérieur.Je complète par les éléments que je peux glaner pour donner cette liste (non qualifiée) enrichie de repères historiques (source :Kervarker link )

  • fin XVe : manuscrit de Buhez santez Nonn, la vie de sainte Nonne écrit probablement par un moine de l'abbaye de Daoulas et édité en 1837 par Le Gonidec, puis récemment par l'équipe du CRBC.
  • 1499 : Catholicon  de Jehan Lagadeuc publié à Tréguier (dictionnaire trilingue)
  • 1500 (vers) : vitrail de Sainte Barbe à Lannelec.
  •  1530 : publication en un seul ouvrage de deux poèmes chrétiens,Tremenuan an Ytron Guerches maria et Pemzek Levenez Maria.
  • 1530 : mystère de la Passion publié à Paris : Aman ez dezrou an Passion ha goude an Resurrection [...], e Paris a neuet imprimet...(Ici commence la Passion ...publié à nouveau à Paris) réédité à Morlaix en 1622 puis par La Villemarqué en 1865.
  • 1532 : Réunion de la Bretagne et de la France.
  • 1539 : Edit de Villers-Cotteret imposant le français comme langue officielle (documents administratifs)
  • 1544 :Le mystère breton Dismantr Jerusalem est composé par le léonard Fiekr Mezanstourm. 
  • 1545-1563 : Concile de Trente.
  • 1557 : Mystère vie de sainte Barbe
  • 1575 : publication du Miroer Mort  en breton
  • 1576 : Vie de sainte Catherine : Buhez an Itron sanctes Cathell
  • 1576 : Cathechisme,
  • 1578 : statue de sainte-Barbe à Lannelec,
  • 1609 : Mystère de la Passion, ed. Marciguay à Saint-Malo
  • 1636 : Albert Le Grand de Morlaix publie à Nantes en français Les Vies, gestes, mort et miracles des saints de la Bretagne Armorique.
  • 1650 : Nouelou Ancien ha devot par Tangui Gueguen

Il faudrait y ajouter les cantiques imprimés sur feuille volante ou seulement mémorisés, qui reprenaient la trame des Mystères : ainsi, le canticou Histor eus a vuez Santez Barba, Morlaix, sd, cité par Ernault.

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  b) le Mystère et Vie de Sainte Barbe .

Il y eut deux éditions ; La Villemarqué a travaillé sur une copie incomplète de la première, et  Ernault a complété cette copie à partir de la 2ème édition.

1. Aman ez dezrou buhez sante Barba dre rym euel maz custumer he hoary en goelet breiz, Imprimet E Paris euilt Bernard de Léau pe huy a chom e Mouutroulez var pont bourret en Bloez [15]57, British Library : C.40.b.49

2. Aman ez dezraou buhez santes Barba dre rym, eues maz custumer he hoary en goelet Breiz. Gant euriou an itron sanctes Barba hac he Officou amplamant, E Montroulez, gant Ian Hardouyn, 1647 (BnF : Res Yn-16). Ed. Ernault, 1885

  Ce titre signifie : "Ici commence la vie de Sainte Barbe en vers, comme on a coutume de la jouer en Basse-Bretagne, Avec les heures de Madame Sainte Barbe et les offices, tout au long."

  "comme on a coutume de la jouer" : en effet, les mystères étaient joués par des groupes parfois réunis dans des confréries. A Rennes, la première représentation attestée a lieu le 25 mai 1430 jour de l'Ascension, pour donner devant le duc Jean V le Mystère de la Passion. La confrérie du saint Sacrement se consacre dès le XIVe et jusqu'en 1520 à l'exécution scénique du mystère. Des confréries de Sainte Barbe (attestée à Rouen)  furent constituées, peut-être dans le même but. S'il semble que les premiers mystères produit soient des mystères "sacrés" tirés de la Bible, en premier lieu le mystère de la Passion ( dès le XIe siècle), les mystères "religieux" tirés de la vie des saints sont également donnés, comme le Mystère de saint Martin. En langue français, deux manuscrits de Mystère de sainte Barbe ont été conservés, l'un du XVe siècle, l'autre du XVIe. Le premier, riche de 20 000 vers, met en scène cent personnages parlants. 

  Selon E. Ernault, le Mystère de Sainte Barbe fut, après le Mystère de la Passion, l'oeuvre la plus jouée. Cette sainte était invoquée contre la mort subite, et on relatait les miracles où un homme victime d'un accident mortel priait la sainte : celle-ci intervenait pour maintenir en vie l'agonisant jusqu'à l'arrivée d'un prêtre qui administrait les saints sacrements et évitait au malheureux un séjour éternel en enfer. Le succes de sainte Barbe se comprend à la lumière de la mentalité des hommes du Moyen-Âge terrorisés par la hantise de mourir sans confession.

  •   En juin 1476, on joua à Compiègne un mystère (français) de Sainte Barbe donné en trois jours (Emile Ernault)
  • En 1493, il est signalé que la Vie et histoire de Madame Sainte Barbe fut jouée à Laval.
  • Au XVIe siècle, le Parlement de Bretagne interdit les représentations publiques des mystères à la suite de rixe mortelle durant un Mystère de Sainte Barbe à Domolain près de Guerches de Bretagne ( le Parlement de Paris prononça la même interdiction le 18 novembre 1548) 
  • Le Concile de Trente interdit également la représentation des Mystères.

 

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      c) Culte de sainte Barbe en Bretagne : édifices et  iconographie.

Dans le but de situer la statue de Sainte Barbe de Lannelec sur le plan historique, je recueille encore quelques dates :

  • 1489 : construction de la chapelle Sainte-Barbe du Faouët
  • 1538 : vitrail du cycle de Sainte Barbe à Montcontour
  • 1578  : Sainte Barbe à Lannélec
  • 1619 : chapelle Sainte-Barbe de Roscoff

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Les volets historiés de la niche.

  Ils illustrent la légende de Saint Barbe, que j'avais déjà évoquée ici :

Église Saint-Thurien à Plogonnec II : une inscription du tonnerre!.

Ils se lisent de bas en haut.

  Rappelons que Sainte Barbe, libanaise d'Heliopolis au IIIe siècle, persiste dans sa foi chrétienne et dans sa détermination à refuser tout mariage et résiste aux ordres pressants de son père, le satrape Dioscore, qui l'enferme dans une tour avant de partir en voyage. A son retour, il constate une troisième fenêtre qui n'était pas dans ses plans :  

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1. Sainte Barbe, Dioscore et la tour.

      ste-barbe 9226c

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Ier épisode : Dioscore amène sa fille devant la tour qu'il a fait bâtir pour y mettre à l'abri sa virginité :

          DIOSCORE           

 

199. Barba, ma merch net he derch ha guerch glan,

Denesset lem dirac ma dem breman,

Huy heu noman dreis pep hunan ganet

Ma holl esper singulier ha querhaff

Ham holl buhez noz dez seul maz vezaff

Ac e caraff muyhaff nen nachaff quet.

 

200. Rac se seder emeux sclaer prederet

Ober fournis flam dam guis diuizet

Un tour flour net doz miret hep quet sy

Enn haff affet secret ez vihet plen

Perguen eno na no guelo neb den

Bezet certen bizhuyquen nep heny

 

              SANTE BARBA

201. Ma tat quer, pebez pridirit

Na pe dre dezen eu dihuy

Na pez ouz eux huy studiet

Ma lacat gardis en prison,

Priuet a gracc en pep faczon?

Re diraezon ez sarmonet.

 

                DIOSCORE

 

Barbe, ma fille, pure et chaste vierge,

approchez à l'instant en ma présence;

c'est vous qui êtes en ce monde, plus que personne,

mon espoir le plus cher, ma vraie vie, nuit et jour,

tant que j'existerai . Je vous aime par dessus tout, 

je ne vous le cache pas.

 

 C'est pourquoi j'ai songé sérieusement

à faire une tour épaisse, belle,

disposée à mon gré,

une tour élégante pour vous y  bien garder.

Vous y serez parfaitement au secret et à votre aise, 

et personne ne vous verra plus désormais, soyez-en sûre.

 

                  SAINTE BARBE

  Mon cher père, quel souci prenez-vous,

quelle est votre intention? A quoi songez-vous,

de me mettre dans une dure prison,

privée de tout agrément ? 

Je n'ai nullement méritée d'être emprisonnée, croyez-moi.

 

 

      

 

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    2ème épisode : Le panneau sculpté en bas-relief montre plutôt l'épisode  où Dioscore rentre de son voyage, pressé de découvrir si la tour qu'il a ordonné avant son départ est conforme à ses souhaits et où il découvre tout-de-suite la fenêtre que Sainte-Barbe a fait ajouter aux deux ouvertures prévues sur les plans. Aussi suspicieux et aussi jaloux que Marcel face à Albertine prisonnière, il apprend du contremaître que l'ordre a été donné par la fille ; tandis que l'entrepreneur, traité de Diot, sotin, babouin, mastin quy (imbécile, sot, babouin, fils de chien), s'enfuit sans attendre le réglement de sa facture, Barbe est intérrogée : elle répond que "trois donne plus de clarté que deux", que "c'est maintenant la mode", que  Try frenest en re onestaff Da sclaerhat muyhaff, ne raff sy "trois fenêtres, c'est ce qu'il y a de plus convenable, pour éclairer mieux, je le sais", avant de déclarer enfin :

 Rac tri person tron onest

En un test en un maieste

A un coudet, a un edit

Un ster, un esper, un merit,

Un apetit, un deite :

" Parce qu'il y a trois personnes dans le ciel brillant, qui ont une seule nature,une seule majesté, une seule pensée,  une seule puissance, une seule dignité, un seul désir, une seule vertu, une seule volonté, une seule divinité".

  C'est le moment représenté par l'artiste : Barbe désigne à la fois les trois fenêtres de la tour et le ciel brillant avec les trois personnes qui s'y trouvent, pendant que le malheureux paternel qui est sur des charbons ardents s'arrache les cheveux. Il n'est pas au terme de son supplice puisqu'il va avoir droit à un exposé de théologie avant d'entendre sa Barbie chérie traiter ainsi  les dieux qu'il vénère : "Je leur cracherais bien à la face si j'en trouvais l'occasion ; je les détruirais en tout lieu ces sales démons puants et maudits odieusement fabriqués pour la superstition par des réprouvés !" (strophe 316 : Crachet oar tro en ho face ) . Et il s'arracherait la barbe par surcroit (à défaut d'arracher sa Barbe aux influences néfastes qui l'ont ainsi pervertie) s'il apprenait ce que les spectateurs du Mystère ont découvert tout à l'heure sur les tréteaux dréssés sur le placître de Pleyben : en son absence, sa fille  a adressé un messager à Origène en personne, qui lui a envoyé d'Alexandrie son jeune diacre Valentin. Lorsqu'il est reparti, elle en savait plus qu'un docteur en Théologie sur les trois hypostases du Dieu unique, la consubstantialité, les errements du subordinatianisme. Et elle vous récitait Polycarpe de Smirne comme votre grand-mère récitait ses départements, leur préfecture et leurs sous-préfectures !

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2 . Le miracle de la fontaine : 

  La scène se place entre le moment où Barbe est conduite dans sa prison, et le retour de son père :

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ste-barbe 9225c

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Mystère de sainte Barbe, strophes 255 à 258 : sainte Barbe se rend à la fontaine "car son âme a envie de boire" mais elle la trouve tarie. Elle se met à genoux et implore le Seigneur ; quand elle se relève, elle la trouve remplie. link

  L'image montre Dieu-le-père, coiffé de sa tiare préférée et tenant en main gauche le monde crucifère dont il ne se sépare pas, qui apparaît dans les nuées à Santez Barba pour la bénir.

   Dieu partage avec la Bretagne ce point commun de n'apparaître que dans les nuages ; c'est comme ça, on ne les changera pas.

258. Huy goar en mar dre hoz caret

Emeux ent espres dileset

An bet ; recevet ma pedenn

Ha reit diff dont mat en stat man

Evit enaff anezaff glan

Quent monet breman ahanenn.

 

Vous savez sans-doute que par amour pour vous

j'ai complètement abandonné le monde

recevez ma prière

et donnez-moi à l'instant

de bonne eau pure, pour que j'en boive

avant de m'éloigner de ce lieu.

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3 La grande colère de Dioscorus.

   Le satrape (c'est le titre et la fonction du père de Barbe, qui gouverne une satrapie, une province de l'empire Perse) vient d'entendre la profession de foi de sa fille et a perdu ses longs cheveux. Il avait donné la meilleure éducation à sa fille, l'avait entourée (au sens propre) de son affection, la promettait aux joies ineffables du mariage, et il découvre qu'elle tient des discours antisociaux, qu'elle a un comportement alimentaire déviant (ne buvant l'eau que d'une certaine fontaine à l'exclusion de toute autre, se nourrissant de baies et d'herbes cueillies autour de cette source), qu'elle se détourne ainsi des circuits économiques traditionnels, qu'elle   voue à la numérologie consacrée au chiffre trois une vénération inconsidérée, qu'elle s'isole en suivant les préceptes anorexigènes d'un gourou d'Alexandrie et qu'à l'âge où toutes ses amies jouent avec leur poupée Mademoiselle (ann Nemezell) passe son temps le nez fourré dans les ouvrages d'un certain Justin (de Naplouse),  d'un Ignace (d'Antioche) et d'un Irénée (de Lyon). Il n'est pas content content :

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ste-barbe 9224c

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                  Dioscorus

357. A ! paillardes ! pautres esou

Penauz ez den yen az guenou

Blasfemaff ma doeou louen

Hac y heb goall dre ho gallout

ouz gouvernn an bet heb quet dout

Hac en pep rout oz ma souten.

 

358. Me ray dit cruell meruell yen ; 

En place man breman oar en men

Ez renty dyen da eneff

An despet dan stinn az lignez

Mez lamo pep tu a buhez,

Me toe dam fez, gant ma clezeff.

 

(Santa Barba a pet doe di difenn,

ha neuse un men bras en em digoras

hac he euzas ouz he tat a predere

neuse he lazaff )

 

357 Ah, coquine, fille dévergondée,

comment ta bouche ose-t-elle blasphémer

froidement mes dieux bienheureux

eux qui sans faute, par leur puissance,

gouvernent évidemment le monde,

et me soutiennent de toute façon!

 

358. Je te ferai cruellement sentir 

la froide mort, en ce lieu même

A l'instant, sur cette pierre tu vas rendre l'âme

Malgré ta naissance et ta race

je t'enléverai complétement la vie,

Je le jure par ma foi, avec mon épée.

 

( Sainte Barbe prie Dieu de la défendre,

et alors une grande pierre s'ouvrit et la cacha

à son pére, qui voulait la tuer).

 

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    4. La mammectomie bilatérale,  ou le supplice de Sainte Barbe:

Cette scène ne survient qu'après une cinquantaine de pages du Mystère de Sainte Barbe où sont relatés les faits suivants : Ayant perdu de vue sa fille, le père aveuglé de fureur part à sa recherche pour la tuer ; deux bergers l'ont vu passer, le bon berger Rivallen nie l'avoir vu mais le méchant Gueguen révèle sa cachette et Dioscore s'empare de sa fille. Il la menace puis l'emprisonne avant de se rendre auprès du Grand Prévot pour la faire châtier. 

 

  Le Prévôt fait convoquer Sainte Barbe et l'exorte d'un ton bonhomme à répudier ses convictions coupables, mais devant son refus, il appelle les bourreaux ( ce sont Les sieurs Loupant , Agripant, Claudin et Glouton) pour une surenchère de supplices successifs : strophes 450 à 490

Mettez-la à nue et attachez la

Promenez la en la battant qu'il ne reste machoire ni lèvre qui ne soit vigoureusement frappées.

Procurez-vous de durs bâtons et des nerfs de boeufs solides

Et des fléaux, et de nouveaux fouets aux noeuds durs

Placez-la dans un tonneau pour y danser, plantez-y mille clous, et roulez-la à travers la ville

Sus, sus, faites qu'elle sente le supplice, avancez vite, je la veux transpercée et harassée,

les membres disloqués. Froids vilains, est-ce un jeu que vous avez fait? Fustigez-la !

Vos batons et des fouets bien durs ! Remplissez ses plaies de sel ! Frottez-la promptement, dur et serré !

Habillez-la d'une robe de crin et jetez-la en prison pour qu'elle soit déchirée mutilée chair et peau.

En prison, Sainte Barbe reçoit la visite et la consolation de Jésus et des anges. Ses plaies guérissent miraculeusement. Convoquée à nouveau devant le Prévôt, elle continue à refuser d'adorer "les idoles, stupides épouvantails faits par l'artifice de vils fripons", et son martyre reprend : elle est brûlée par des torches, frappée avec des marteaux, avec des bâtons, et enfin, strophe 593 page 138 : link : on trouve la didascalie :

                         Aman ez troucher e diu bron, "Ici on coupe les mamelles".

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 ste-barbe 9227c

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593. Squegiett diff astriff e diu bronn

Quen disaczun ha da un gonn

Digoar he poull calon gronnet

Mar guelher frost he holl costou

Gant travell hac he bouzellou

Gruet hv ent re dou badouet

 

593. Arrachez-moi violemment ses mamelles,

sans plus de façon qu'à une truie. Tirez-les

de sa poitrine, qu'on voit toutes ses côtes

à nu et ses entrailles, que la douleur

la fasse défaillir.

    .

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  Agripant possède un bon couteau pour tailler dans les mamelles, celui de Loupant n'est pas mauvais non plus, mais Claudin propose son braquemart et voilà Barbe mutilée et bien punie, mais la Sainte pense § 601 à son Dieu, son roi et son créateur, son souverain et son rédempteur, son protecteur si bienveillant, son maître si cher et si puissant, sa joie, sa pensée unique en ce monde, et tout le reste l'indiffère parfaitement. 

    N.B :     Le texte ne parle pas de cette abominable paire de tenaille particulièrement cruelle et pénible à regarder, mais simplement d'honnêtes couteaux aiguisés (contell) et de braquemarts (braquemar) bien tranchants, capables "de les couper parfaitement, tranquillement et en un clin d'oeil", "tout net et séparés" : de la belle ouvrage, pas ce travail de cochon qu'on nous donne ici à voir et qui déprécie le métier.

Remarque : j'ignore quelle est la raison d'être du pot de fleur noir qui est placé en équilibre sur l'auréole bien méritée de Barbe.

  Barbe  est ensuite condamnée à être promenée nue et à exposer son triste état d'amastozoaire à la foule. Mais Jésus en son infinie compassion envoie ses anges qui couvrent (§ 628) la vierge martyre d'un voile blanc. Elle épuise ses bourreaux qui sont éreintés et déshonorés de voir les plaies qu'ils infligent guérir comme des bobos. Le Grand Prévôt a administré la question ordinaire, la question extraordinaire et les tortures additionnellles mais n'a pas encore la science des Dominicains de l'Inquisition avec le "bouc des sorcières", l'écartèlement, l'estrapade, les grésillons ou la poire d'angoisse : il rend son tablier, il renvoie la fille (aussi fraiche et intacte, aussi vierge de toute blessure qu'à son arrivée) à son père.

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      5. Barbe traînée par les cheveux par le cheval de son père.

ste-barbe 9218c

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   J'éviterai de plaisanter sur ce satrape barbu sur son cheval barbe attrapant sa Barbe par la queue de cheval, car nous avons affaire ici à ce drame pathétique qui se répète de générations en générations, celui où l'amour insensé d'un père pour sa fille se transforme en une haine insensée.

       Dans le texte (page 93), cette scène n'apparaît en réalité que comme une menace verbale, avant que Dioscore ne sollicite la justice et ses bourreaux.

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394. En amguin me haz trahino

E ry an blev hac az blevo

Me promeno ne vezo sy

me rayguiridic da quic noaz

Maz yeno gant poan hac anoaz

Quent evit henvoaz da goazy

Je te trainerai par les cheveux

et te briserai le corps

je te promènerai ainsi

je ferai souffrir ta chair nue

Si bien qu'avant cette nuit

tes veines se glaceront de peine

et d'angoisse.

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  6. Barbe décapitée et sa vengeance posthume.

 

      ste-barbe 9219c

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        Résumer les trente pages de la fin du Mystère de Sainte Barbe (p. 158-187) par une image ou quelques phrases semble aussi dérisoire que, pour un mélomane, de "raconter" le troisième acte de la Traviata en citant sans les costumes, l'orchestre et la Diva, l'aria Ah, gran Dio, morir de Violetta.

  De la strophe 684 à la strophe finale 812, le spectateur a assisté au long débat de Dioscore et de sa fille, les amers reproches d'un père effondré  alternant avec les amers reproches d'une fille exaltée, aux atermoiements de Dioscore conscient de l'absurdité de son geste mais acculé par l'intensité de sa hainamour à le commettre. Comme cela a été annoncé au lecteur par la didascalie " Ici les diables excitent Dioscore à se hater de tuer sa fille",  il a assisté à l'intervention de Satan et de Bezlebut (sic) pressés d'en finir, puis aux débats interminables entre Conscience et Bezlebut, et au malheur du père. Nous sommes très loin de la Légende simplifiée où un roi foncièrement cruel tue sa fille sans regret, et aucun mouvement, aucun battement, aucun trésaillement de cette âme paternelle n'est omis :

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738. Ma coudet so quen tristidic

ma em guelet quen reusidic

Quen louidic quen milliguet

Ha bezaff suget affet pur

Da muntraff ma goat ham natur

A maleur ezouff furmet.

738. Mon coeur est si triste

qu'on me voit misérable,

infâme et maudit, exposé

à être le meurtrier de mon sang 

et de ma race.

Ah, je suis bien malheureux !

  .

Après ce long débat de conscience, la mort dans l'âme, Dioscore excité presque en vain par les deux démons finit par s'exécuter et décapite sa fille (§781). Jésus intervient et s'adresse au démon : 

     790. "Écoute, Satan, chef criminel des démons, ouvre à l'instant l'abîme plein d'amertume et de glace horrible ; dévore de ton feu ardent Dioscore ce voleur glouton, ce tyran cruel et odieux, ce chien envieux, ce perfide sans excuse."

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             Sathan

793. Ordrenaff tizmat en stat man

Foult ha curun dre fortun glan

Quemesquet a tan breman scaff

Hac et presant gant tourmant bras

De dirumpaff an quentaff pas

Dann iffern diblas az gassaff.

                  Satan

793. Je veux qu'à l'instant même

la foudre et le tonnerre mélés de feux

le précipitent avec grande violence

dans l'enfer horrible et odieux.

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   C'est le bouquet final pour le spectateur impressionné par tout un appareil dramaturgique de Daemon ex machina, tout un vacarme et une pétarade exécutée en coulisse, des éclairs, un spectacle de pyrotechnie  et  de la fumée à travers laquelle Dioscore foudroyé disparaît  tel Dom Juan dans l'acte V du Festin de pierre.

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Épilogue :

Le prêtre Valentin vient enterrer la Sainte et lui promet de construire une chapelle sur sa tombe ; tout son désir est de finir ses jours à y prier, et on comprend qu'il en était secrètement amoureux lorsqu'il donne la dernière réplique de la pièce, strophe 813 :

Hac an place man da vianhaf Pan duy an dez finuezaff Ez desiraff nen nachaff quet Bout neterret en hoz metou Mar plig gant doe guir roen ploeou reiff diff e gracou golouet.

   "C'est ici encore que je désire, quand viendra mon dernier jour, être enterré auprès de vous si Dieu, le vrai roi des hommes, veut bien m'éclairer de sa grâce".

Le rideau tombe sur Valentin pleurant sur la tombe, il pleut sans-cesse sur Pleyben comme sur Brest, et les gens disent que venant de la scène on entendit crier ton nom :

                                      Barbara !

 

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Sainte Barbe et le culte de la fécondité.

  Comme Anatole le Braz le rappelait, la présence de Sainte Barbe face à la Vierge allaitante de Lannélec se justifiait par le fait que cette sainte n'était pas seulement la patronne des mineurs, des artificiers, des pompiers, de l'US.Navy ou de la R.AF, mais qu'elle était aussi invoquée par les femmes souhaitant des enfants ou demandant du lait pour nourrir ces enfants. En Géorgie, c'est l'attribution principale de Santa Barbaroba que de guérir les enfants ou de donner un coup de main à la conception.

   Dans le texte du Mystère et Vie de Sainte Barbe, c'est lors de la belle prière que la sainte adresse à Dieu au moment de mourir qu'elle se déclare protectrice des mères: § 661 :

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661. Han groaguez espres brasesou

An re so nez ma caresou

Gruel y gant gnou mammou louen

Maz duy leal ho bugalez

Da quempret an stat a badez

Dre trugarez ma ne uez quen.

 

661.Et surtout les femmes enceintes

qui sont particulièrement mes amies,

faites-en devant tout le monde

des mères joyeuses ;

que leurs enfants viennent à bien

pour recevoir la grâce du baptème.  

Par pitié, du moins, accordez-le moi.

    .

C'est surtout les fontaines dédièes à la Sainte qui reçoivent les dévotions de jeunes filles en mal de mari et qui viennent jeter dans le bassin des épingles ou des pièces de monnaie, au Faouët bien-sûr où cette pratique est célèbre, à Quistinic (56),à Trémorel (22), Plestin-les-Grèves, Noroy-le Baud, Pont-Point (Oise), Le Relecq-Kerhuon (29), Berrien (29), et Moustoir-Ac où la fontaine jumelle les statues de Sainte Barbe et de la Vierge.

   Enfin un auteur ancien signale qu'on trouvait dans plusieurs couvents surtout en Italie des fioles de "lait de Sainte Barbe".

 

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 Analyse de la versification :

  La grande partie de la littérature bretonne du XVIe siècle qui nous est parvenue découle de la tradition orale et est écrite en vers (à l'exception de la Vie de sainte Catherine et du Cathéchisme de 1576), et elle obéit à une technique de versification qui n'est pas attestée en français, et qui disparaîtra en 1650 : celle des rimes internes qui fait rimer la dernière syllabe du vers avec celle se trouvant généralement avant la césure. Il s'agirait très probablement d'une technique d'origine galloise introduite en Armorique avec l'émigration des Bretons au plus tard au VIe siècle,pour perdurer pendant 1000 ans ce qui ne peut s'expliquer sans écoles locales d'art poètique, hélas non retrouvées.

  Source : Gwennolé Le Menn, Bilinguisme et trilinguisme en Bretagne, Bull. Assoc. étude humanisme 1982, 15-1, pp. 30-37. link

 

  Émile Ernault avait déjà parfaitement analysé la versification du Mystère de Sainte Barbe, en la comparant à celle du Mystère de la Passion et de la Vie de Sainte Nonne ; il y a relevé des octosyllabes et des décasyllabes ainsi que des vers de 5 pieds, réunis en strophes de six vers. Il note le reprise de la rime du dernier vers d'une strophe au début de la strophe suivante. Il précise la régle des rimes internes en signalant que la finale des deux premiers vers d'une strophe (ou d'une demi-strophe) doit rimer avec l'avant-dernière syllabe du troisième : j'ai surligné cela en rouge.

J'ai donc tenté de retrouver ces rimes internes dans le texte que j'ai cité en premier :   

   .

199. Barba, ma merch net he derch ha guerch glan,

Denesset lem dirac ma dem breman,

Huy heu noman dreis pep hunan ganet

Ma holl esper singulier ha querhaff

Ham holl buhez noz dez seul maz vezaff

Ac e caraff muyhaff nen nachaff quet.

 

200. Rac se seder emeux sclaer prederet

Ober fournis flam dam guis diuizet

Un tour flour net doz miret hep quet sy

Enn haff affet secret ez vihet plen

Perguen eno na no guelo neb den

Bezet certen bizhuyquen nep heny

 

              SANTE BARBA

201. Ma tat quer, pebez pridiry

Na pe dre dezen eu dihuy

Na pez ouz eux huy studiet

Ma lacat gardis en prison,

Privet a gracc en pep faczon?

Re diraezon ez sarmonet.

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 Bilinguisme en Bretagne au XV et XVIe siècle: il est singulier de constater qu' à la même époque où les habitants de Cornouaille et du Léon assistent à des Mystères en breton, lisent des missels et des catéchismes dans cette langue, dans laquelle ils écoutent les sermons et prédications, c'est en français qu'ils font graver les inscriptions votives et de construction sur les murs et sur les socles des statues de leurs sanctuaires.

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Rubrique culinaire : la Sliqua.

   Sainte Agathe avait ses Minni di vergine ou Seni di vergine, et ses Olivette di sant'Agata...

Sainte Gwen avait ses pupazza frascatana... Vierges allaitantes V : Saint-Venec à Briec : sainte Gwen Trois-mamelles et ses fils

Sainte Lucie ses biscotti di Santa Lucia,

et Sainte Barbe a la Sliqua

  La Sainte-Barbe tombe le 4 décembre, tous les pompiers et artilleurs le savent. Pour les chrétiens orthodoxes, c'est le 17 décembre, et ce jour-là, en Géorgie, on sert la Lobiani, une pâtisserie à base de haricots. En Macédoine, on  nomme Sainte Barbe Varsava, et on désigne aussi de ce nom le plat de fête à base de céréales proche du koliva rituel qui est un symbole de résurrection.

Mais au Liban, la Sainte Barbe, Eid-il-Burbara est une fête particulièrement célébrée (fériée au Liban, en Palestine, en Syrie et en Jordanie)  ; c'est surtout la veille du 4 décembre que les enfants miment la fuite de Barbe hors de sa tour, en se déguisant et en allant quémander de quoi subsister, en l'occurrence plein de friandises. C'est aussi une fête des céréales ( argument supplémentaire pour relier ce culte à une fête de la fécondité, comme la fête romaine de Bona Dea les 3 et 4 décembre, réservée aux femmes, et consacrée à la fertilité féminine), et pour "faire barbara", les libanaises préparent une bouillie de blé, sucrée, parfumée à l'anis et garnie de graines de fruits secs, ou de graines de grenade (grand symbole de fécondité à nouveau) : voilà le plat que l'on nomme la Sliqua (photo infra).

  Le culte lié aux céréales, et qui veut aussi qu l'on plante alors toutes sortes de graines de lentille, de haricot ou de pois pour les voir germer pour Noël où elles décoreront la crèche, est lié à une version de la légende où c'est un champ de blé qui a dissimulé la jeune fugitive à son père en poussant magiquement, et non un simple menhir comme dans la version bretonne.

voir : http://www.traiteur-a-domicile.net/4-categorie-10158473.html

L'image de la Sliqua est empruntée à :http://www.christelleisflabbergasting.com/2010_12_01_archive.html

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Published by jean-yves cordier - dans Pleyben Chapelles bretonnes.

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  • : Le blog de jean-yves cordier
  • : 1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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