Un bonus : les photos de 2011 avant la restauration.
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Liste des pièces de sablières du bas-coté nord
N1 : homme tenant une volute entre deux animaux (chevaux?)
N2 : diable ailé agrippant un homme. Feuillages ; deux têtes d'âne.
N3 : Funérailles
N4 : Labour.
N5 : Homme tenant des cornes d'abondance.
N6 : Inscription 1561 ou 1552. Homme levant son verre ; saint Matthias ; un charpentier.
N7 : Deux hommes au phylactère.
N8 : anges
N9 : deux hommes aux phylactères
N10 : deux hommes sauvages jambes écartées.
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Blochet BN.1 : Fou en tunique à grelot (Le Ber, 2017).
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sablière N1 : homme tenant une volute entre deux animaux (chevaux?) .
L'homme tient-il un rabot ?
Frise inférieure de style bellifontain semblable aux frises de 1552 du coté sud, à volutes liées par des anneaux, et tête humaine aux yeux caves pénétrées par des arceaux. Ce décor est cité dans la partie supérieure.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Blochet BN.2 : homme portant une courte fraise.
Son pourpoint est orné d'un élément en T, plutôt décoratif que figuratif.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sablière N2 : diable ailé agrippant un homme. Feuillages ; deux têtes d'âne.
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Frise inférieure : semblable à celle du coté sud, avec des épillets. Cartouche 2017 sous le blochet B.N3
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Blochet BN.3 : homme portant la fraise.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Sablière N3 : scène de funérailles (1561)
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Un chariot (charrette sans ridelle) tiré par deux chevaux porte le cadavre du défunt, suivi par une femme et son enfant puis un homme portant une pelle sur l'épaule ; on considère qu'il s'agit du fossoyeur.
L'attelage est mené par un valet.
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Une scène de funérailles est également présente sur les sablières de La Martyre, village voisin de La Roche-Maurice, vers la date de 1560. Elle est plus complète, avec 15 personnages (le clergé en tête, les six membres de la famille derrière), et un attelage à trois chevaux mené par un clochetteur. Le style de ses sablières relève d'un sculpteur bien différent de celui de La Roche-Maurice.
On la trouve également sur les sablières de l'ossuaire de la paroisse voisine, Pencran, mais à la date de 1594. Cet ossuaire est privé : pas de photo.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Les modalités de l'attelage sont précisément représentées : les bras du chariot entourent le cheval arrière, qui en soutient la charge par un demi-collier de selle, et par un collier d'épaule. Un cordage (ou une traverse en bois) fixé en aval des poignées des bras est tracté par le cheval de tête, par un demi-collier (sans selle) et un collier d'épaule. Les chevaux n'ont pas de bride, celui de tête étant mené par une corde passé au poitrail.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Blochet BN.4 : homme barbu.
Ce n'est pas un apôtre, car il est chaussé. Il est vêtu d'un manteau complètement ouvert, aux revers ornés, et s'évasant derrière le dos en capuchon.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sablière N4 : scène de labour (1561)
Un paysan guide sa charrue tirée par deux chevaux menés par le valet de ferme.
Les scènes de labour sont rares en sculpture au XVIe siècle, notamment sur les sablières, et celle-ci fournit donc un document iconographique précieux.
Mais si ces scènes sont rares, on en trouve néanmoins non seulement ici, mais aussi sur les sablières de La Martyre (vers 1560), Le Tréhou (vers 1555), Sainte-Marie-du-Ménez-Hom, Pleyben, Bodilis, donc entre 1555 et 1570 dans un rayon de 50 km en Finistère. Les trois derniers sites relèvent de l'atelier du Maître de Pleyben. Plusieurs illustrent un accident par lequel un valet est écrasé par l'attelage. Soit un corpus de six exemples.
a) Église du Tréhou v.1555. charrue à avant-train à roues, attelage de 2 paires de bœufs et 1 bœuf de tête, conducteur + 1 guide de tête, renversé par le bœuf.
b) Église Saint-Salomon de La Martyre (1560?).Charrue à avant-train à roues, et attelage à 2 chevaux + 2 bœufs + 2 chevaux +un maître d'attelage en tête. Pas d'accident.
c) église de La Roche-Maurice ( 1552 ou 1561). Charrue à avant-train à roues, et attelage à 2 paires de chevaux +un maître d'attelage en tête. Pas d'accident ?.
d) Église de Bodilis. I. (Maître de Pleyben 1567).
Charrue à avant-train à roues, attelage à 4 chevaux. Un conducteur,1 guide de tête et un semeur en avant. Pas d'accident.
e) Chapelle Sainte-Marie du Ménez-Hom (Maître de Pleyben v.1575). Charrue à avant-train à roue, attelage de 4 chevaux un conducteur, 2 guides et un 3ème écrasé par l'attelage.
f) Église de Pleyben ( Maître de Pleyben vers 1571) : haut de la nef coté sud. Charrue à avant-train à roue, attelage à 2 chevaux en couple + 1 cheval de tête. Un conducteur + un guide latéral. Accident (emballement du cheval de tête et écrasement du guide.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Le maître courbé pour épouser la forme de la sablière, porte à la ceinture une hache. Il est coiffé d'un bonnet, porte un sarrau, et un bracelet de bras. Il tient les mancherons par ne prise différente de chaque coté.
La charrue comporte successivement les mancherons, tenus écartés par des traverses, et fixés sur le dental (ou sep) par des goujons ; le soc, en avant du dental ; le timon, et ses deux chevilles élargies par des coins ; le coutre ou couteau, tranchant la terre en avant du soc.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Le timon, posé sur l'avant-train à deux roues, est ceinturé par un cordage retenu par une cheville en T.
Puis vient, en avant des roues, le "timon d'avant-train" barré par deux forts madriers ; ce sont ces madriers qui sont tractés par les deux chevaux, par l'intermédiaire de deux cordages fixés à un double collier d'épaule et à un collier de dos.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Enfin, le cheval de tête est mené par un valet de ferme. Il est penché en avant, soit par l'effort qu'il produit, soit (mais c'est ici peu convaincant) par un accident qui le renverse.
Il tient un outil dont le manche se termine par une fourche en V ; il serait intéressant d'en trouver d'autres exemples. J'imagine que cela lui sert à aiguillonner ses bêtes.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BN.5 : saint Pierre.
Il est identifié par sa clef ; son livre porte cinq lettres gravées.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sablière N5. Homme tenant deux cornes d'abondance
Au centre, un buste d'homme barbu coiffé d'un bonnet. Il tient dans ses mains les pointes de deux cornes d'abondance et, par un bracelet, de deux épillets. Les cornes libèrent à chaque extrémité des tiges qui s'épanouissent en bustes humains, plutôt féminins. Nous retrouvons ici la veine fantastique de métamorphoses entre l'humain et le végétal, noté sur les sablières sud et qui sont une des caractéristiques stylistiques du sculpteur, tranchant après deux scènes très réalistes de l'environnement rural.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BN.6 : homme barbu en pourpoint à 7 boutons, col large à gland et courte fraise.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sablière N6 : Inscription de 1561 ou 1552.
C'est la pièce la plus difficile, et, de ce fait la plus passionnante pour le chercheur.
Elle précède la frontière qui, dans la nef, sépare cette dernière du chœur par le jubé. Et elle correspond, sur le bas-coté sud, à la sablière S6, qui porte aussi un blason (au lion rampant des seigneurs de Léon) et aussi une inscription datée de 1552.
Au centre, un cartouche carré devait porter des armoiries qui ont été bûchées. Ce blason est présenté par un lion.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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À gauche, un homme, allongé, est vêtu d'un manteau de belle coupe et coiffé d'un bonnet. Il tient dans la main droite un bâton et lève un verre de la main gauche.
Sur la frise inférieur, l'inscription (dont nous allons parler) dit : "POUR LES SARPANTER". Cet homme, qui pourrait être le fabricien maître d'ouvrage, offrirait donc ainsi à boire aux charpentiers et rendraient hommage à leur travail.
Son bâton porte une série de points régulièrement espacés en quinconce : comme une canne écotée, mais comme aussi une règle d'arpenteur.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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L'apôtre Matthias , patron des charpentiers.
Pour l'identifier, je me base sur les pieds nus, la barbe et le livre, trois éléments qui indiquent qu'il s'agit d'un apôtre. C'est alors soit saint Paul, soit saint Matthias. Je retiens ce dernier puisqu'il est le patron des charpentiers ; son attribut le plus habituel est la hache.
À ses cotés, un homme barbu et coiffé d'un bonnet frappe avec un maillet sur quatre gobelets qui pourraient être des clochettes. Si on oublie ces cupules, l'homme devient un portrait parfait d'un charpentier. Toute la pièce devient cohérente.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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L'inscription.
Elle est légèrement gravée, et surtout peinte ; par conséquent, elle n'a pu traverser les siècles sans risquer d'être modifiée. Or, sa lecture est cruciale sur le plan de l'histoire de la construction, et des sablières.
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Lucien Lécureux a relevé en 1914 le texte suivant : POURLES : SARPANIEL : JA[n] LE BOELL * G + A[n] LAN MIL V LXI : ALAER MENN.
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inscription relevée par Lucien Lécureux en 1914.
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Guy Leclerc propose :
"Pour les Sarpanters ; Jacques le Born, Gouverneur, A l'An MVLXI. Fiacr. Menn" (Pour les charpentiers. Jacques Le Born 1561. Fiacre Le Menn).
Couffon donne les relevés suivants : " IA(N). LE. BOELL. G. AN. LAN. MIL VcLXI //1561. H. H. ELAERE. LE. MEN."
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La difficulté provient, entre autre, de la confusion possible:
- entre les C, les S longs et les L.
-du sigle du deux-points (réunis comme d'habitude par un serpentin) qui peut être pris à tort pour un S
-du -r minuscule et du -e minuscule, selon que la barre forme, ou non, un œil . Ainsi "SARPANTERS" peut être lu "SAEPANTRE :"
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Je peux à mon tour proposer :
POURLES SARPANTEL : IA : LE BORN (une fleur) G A LAN MVLII AIACR : MENN (puis une fleur), soit peut-être " Pour les charpentiers Jean Le Borgne Gouverneur en l'an 1552 Fiacre [le] Menn"
Remarques.
1. Quelque soit la lecture, les graphies sarpenter, ou sarpentre, voire sarpaniel ne sont pas attestées en moyen-français dans la base de donnée du CNRTL. Godefroy donne les formes cherpantier, carpentir, charpenter, cherpentiers, charpenter,et cherphentier (comptes de la cathédrale de Léon 1657-1660). Le DAN, (dictionnaire anglo-normand) donne :
Des charpenters, dé (ed. de) mazouns […] Lib Cust 99;
touz les carpenters et masouns et fevres Cron Lond 49.22;
un grant lathe pur l’office du Carpentar’ PRO E101/547/21/7;
Item pur un carpunter overantz en la sale et quisine […] Mch Tayl Accs 22-23 Rich II
2. IA LE BORN : le prénom doit être IAN pour Jean (mais on pourrait lire FAB) ; le patronyme Le Born n'est pas attesté à Ploudiry. Mais c'est une forme de LE BORGNE, mais également non attestée, pas plus que Le DORN. Sans localisation, je trouve sur geneanet Jean Le BORGNE BORN, né en 1595. La barre du -r de BORN est en réalité fermée comme un -e, et la lecture BOEN (voire BOELL comme Lécureux et Couffon) est plausible. La recherche en généalogie avec LE BON ou LE BOEN est infructueuse. Le nom LE BOELL est attesté dans l'est de la France : ce serait le nom d'un hûchier alsacien??.
3. Le dessin de fleurette est suivi d'un 6 qui a été considéré comme un G, lequel a été transcrit par "gouverneur" qualifiant le dénommé Le Born. Un "gouverneur" est un fabricien, il dirige la fabrique de l'église. C'est fort hasardeux.
4. La lecture du chronogramme fait consensus, avec la date de 1561, ... sauf pour moi. Je lis MVLII (ou MDLII), ce qui donne la date de 1552. Or, c'est cette date qui est lisible sur la sablière symétrique S6 du coté sud. Elle est plus cohérente avec la date de 1559 de la nef, si on estime que le haut de la nef a été bâtie après les bas-cotés. Autre argument, cette date du coté sud est accompagnée du même nom FIACRE LE MENN. Si c'est le nom du fabricien de l'année, les deux dates doivent être similaires. Comme sur le coté sud, c'est l'avant-dernière lettre qui est ambiguë. Le fût en I est barrée d'une diagonale, sous l'effet peut-être d'un artefact, et son pied est orné.
5. Nous avons ensuite ALACR, ou AIACR, ou MARC, ou ALACE, ou FLACR, ou FIACR, suivi du deux-point en S. La transcription tentante en "Fiacre" est aléatoire.
6. le patronyme MENN est clairement lisible, avec un M majuscule gothique. J'ai signalé que ce patronyme est attesté à Ploudiry.
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Au total, la transcription de Guy Leclerc "Pour les charpentiers. Jacques Le Born gouverneur 1561. Fiacre Le Menn" a le mérite d'être plaisante, et de faire sens . Mais finalement, presque tous ses termes sont sujets à caution.
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Sur mes photos, j'ai adopté la leçon de Guy Leclerc.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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UNE RUPTURE DE STYLE.
Au delà de la sixième pièce de sablière, ( correspondant, dans la nef, au franchissement du jubé), nous assistons à un changement de style, dont le critère le plus objectif est l'interruption de la frise inférieure. Il y a changement stylistique, et les scènes figurées complexes et fantasques laissent la place à des éléments ponctuels sur une pièce de bois non sculptée par ailleurs : bustes d'hommes ou d'anges, hommes au phylactère. Le changement d'atelier est manifeste.
La même rupture survient également sur le bas-coté sud au delà de la 6ème travée, qui reprend sans variété les mêmes anges et les mêmes hommes au phylactère.
Cela correspond-il à une réalisation plus tardive (ou antérieure au contraire) ?
Ils se remarquent par leurs bajoues saillantes, voire pointues.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BN.8 : non photographié.
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Sablière N8 . Bustes d'anges.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BN.8 : homme grimaçant .
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sablière N9 . Deux hommes au phylactère.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BN.9 : tête de dragon tenant dans sa gueule un humain .
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sablière N10 : hommes sauvages jambes écartées.
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Ce motif d'homme sauvage permet, par son intérêt, de terminer la visite en beauté. Le thème a été très étudié ces dernières années par Sophie Duhem et son équipe de l'Université de Toulouse dans un ouvrage dont les titres de chapitre disent bien le champ d'investigation : "L’homme primitif : figures des origines et des confins du monde, L’homme des « seuils » : osmose des lieux et ambivalence des signes, L’homme des bois : figure du lieu et du territoire ; Figurer la nature hybride de l’homme végétal et sylvestre. L’état sauvage : état de nature et contre nature.". L'ouvrage a succédé à un colloque de 2017 sur "l'Homme des bois et l'homme vert"
—DUHEM (Sophie), 2019, L’homme sauvage dans les lettres et les arts, Cristina Noacco et Sophie Duhem (dir.) Presses Universitaires de Rennes.
Or, la contamination de la figure humaine par le monde végétal (feuilles, bois, racines, palmes, bâtons écotés) sous les signes de la métamorphose, de l'hybridation, de la dilution des frontières, est précisément ce qui caractérisaient plusieurs des pièces de sablières, surtout certes du coté sud, et notamment sur ses frises inférieures.
Si les pièces 7 à 10 sont d'un autre sculpteur que l'auteur des pièces 1 à 6, du moins, nous "bouclons la boucle" par le retour d'une certaine unité sous ce vent baroque venu d'Italie sous François Ier.
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La sauvagerie s'allie bien sûr ici par cette posture jambes écartées à l'obscénité, ce qui est "hors de la scène". Dans tous les cas nous sommes dans ces confins, ces limites, qui caractérisent les sablières : une zone d'écart pour l'église, qui — comme pour les crossettes et gargouilles à l'extérieur— n'est pas régie par le champ liturgique mais qui, loin d'être dénuée de règles, développe une forme étrange du sacré.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BN.10 : ange.
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Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières et blochets du bas-coté nord de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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— LÉCUREUX (Lucien), 1914, Congrès archéologique de France.
La charpente sculptée de l'église de La Roche-Maurice II : les sablières et blochets du bas-coté sud (1552).
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Je poursuis ma découverte de la charpente sculptée de l'église Saint-Yves, après sa remarquable restauration en 2014-2017. Cette série comportera 4 articles : I, Les abouts de poinçon. II, Sablières et blochets du bas-coté sud. III, Sablières et blochets du bas-coté nord. IV. Sablières et blochets de la nef.
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— Voir le premier article de cette série sur la charpente sculptée de La Roche-Maurice :
"La Roche-Maurice fut jusqu’au Concordat de 1801 une des nombreuses trèves de la paroisse de Ploudiry, elle-même prieuré cure de l’abbaye des chanoines réguliers de saint Augustin à Daoulas.
L’église actuelle fut construite au cours du XVIe siècle ; c’est dans une église ou chapelle qui la précéda, qu’en 1363, Hervé VIII dernier seigneur de Léon fonda par testament deux chapellenies. À cette date, l’église de La Roche-Maurice est déjà placée sous le patronage de saint Yves décédé en 1303 et canonisé en 1347.
L’édifice actuel est de plan rectangulaire comme l’étaient la plupart des églises et chapelles bretonnes jusqu’au XVe siècle. Il porte sur sa structure des dates s’échelonnant de 1539 sur la grande verrière à 1589 au-dessus du portail occidental. L’édifice dut être entièrement reconstruit et peut-être agrandi au cours du XVIe siècle comme tant d’autres édifices religieux qui avaient eu à souffrir des guerres bretonnes entre 1487 et 1491. Au cours de ces guerres, le château de La Roche-Maurice fut assiégé et endommagé, nul doute que le bourg castral et son église eurent à subir quelques méfaits. La paix et la prospérité revenues favorisèrent un élan de construction ou de reconstruction d’églises et de chapelles déjà amorcé au cours du XVe siècle.
La construction de la nouvelle église de La Roche-Maurice se fait du temps du vicomte René Ier de Rohan (1516-1552) qui devint prince de Léon vers 1530, des vicomtes Henri Ier de Rohan (1535-1575), René II de Rohan (1550-1585) et Henri II de Rohan, ce dernier devenu duc de Rohan en 1603. La fin du mécénat ducal à la mort, en 1514, d’Anne de Bretagne entraîne le tarissement progressif du mécénat seigneurial. Rappelons que les Rohan adhèrent au protestantisme de 1550 à 1645. À La Roche-Maurice comme ailleurs, les ressources paroissiales, gérées par des fabriques recrutés parmi la paysannerie aisée, permettent la mise en œuvre de chantiers aussi bien que la commande d’œuvres d’art. Les comptes conservés de la trève ne concernent que les années 1692-17025, les ressources annuelles sont alors d’environ 600 livres. Le plus ancien document laissé par la fabrique date de 1560 et concerne un acte de donation. De l’époque de la construction de l’église actuelle et de son embellissement nous n’avons que quelques noms de fabriques, appelés tantôt trésoriers tantôt marguilliers, inscrits sur le verre, dans le bois ou la pierre. Les armoiries des Rohan et de leurs alliances qui figurent ou figuraient dans divers endroits de l’église rappellent moins leur mécénat que leurs droits de seigneurs prééminenciers. Les Rohan percevaient une chefrente sur certains biens que possédait la fabrique de l’église. En ce XVIe siècle qui voit la reconstruction de son église, La Roche-Maurice reste le siège d’une juridiction, son château fort est aussi en reconstruction sous la direction des capitaines qui en assurent la garde. Ce double chantier anime la petite cité mais aussi pèse sur sa population sous forme de corvées pour le château, de charrois gratuits pour l’église." (G. Leclerc)
L'intérieur, du type à nef obscure, et dont les arcades en tiers-point pénètrent directement dans les piliers cylindriques, est lambrissé en berceau avec sablières et entraits engoulés. La richesse de ses sculptures, notamment des sablières, panneaux sculptés qui ornent le sommet des murs, a été remarquée depuis longtemps.
Les auteurs les datent habituellement de 1559 (date sur le coté sud de la nef) et 1561 (bas-coté nord) , mais une inscription, particulièrement soignée du bas-coté sud, méconnue jusqu'à la restauration de 2017, porte la date de 1552 et les armes des seigneurs de Léon.
La pose de la charpente aurait donc débuté par le bas-coté sud, puis le sud de la nef et enfin le bas-coté nord. Le chevet était construit depuis plus de 20 ans, puisque la maîtresse-vitre porte la date de 1539. On notera que la chapelle de Pont-Christ reçut ses sablières en 1560.
La datation 1552-1561 des sablières correspond à la fin du règne d'Henri II et au début de celui de François II. L'influence des ornemanistes de l'École de Fontainebleau s'y décèle sur la frise inférieure, mais bien moins que dans les productions de l'atelier du Maître de Pleyben, postérieur d'une vingtaine d'année.
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Contexte : les ateliers de menuisier-imagiers de Bretagne à la moitié du XVIe siècle.
Le contexte peut se baser sur trois critères : stylistique, chronologique, et thématique.
— Les caractéristiques stylistiques du sculpteur des sablières de La Roche-Maurice n'ont pas été étudiées, et cette série d'article pourra procurer les moyens de le faire.
— À défaut, nous pouvons profiter de connaître leur date pour les situer dans la production des sablières, même si beaucoup de celles-ci ne soient pas datées. En Finistère, 114 ensembles sont datés du XVIe siècle (S. Duhem).
En Basse-Bretagne, la charpente sculptée de La Roche-Maurice (1552-1561) est contemporaine de l'atelier de Plomodiern (1544-1564), actif plus au sud, et antérieure à la production de celui de Pleyben (1567-1576). Elle est contemporaine des sablières de Pont-Christ (1560, perdues), de Le Tréhou (ca 1555), de Lannédern (1559), et de La Martyre (ca 1560).
— Sur le plan thématique, l'ensemble comporte au moins cinq thèmes remarquables : au sud une lutte au bâton de bouillie, un buveur au tonnelet, puis un couple de musiciens tambourin/cornemuse, et au nord une scène de labour, et une scène de funérailles. Ces thèmes se retrouvent ailleurs en Bretagne. Le plus significatif est le labour à la charrue, retrouvé aussi à La Martyre, Le Tréhou, Sainte-Marie-du-Ménez-Hom, Pleyben, Bodilis, entre 1560 et 1570 dans un rayon de 50 km en Finistère. Les trois derniers sites relèvent de l'atelier du Maître de Pleyben.
Les entraits sont des grosses poutres de bois qui assurent la solidité de l'ensemble : des gueules de dragons ou engoûlants sont sculptés à leurs extrémités. Des culots de poinçon sont ornés de blasons seigneuriaux, lion des Léon et macles des Rohan, ainsi que d'anges et de personnages aux expressions variées.
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Demi ferme. Copyright Anastasia Mityaeva d'après un dessin de Marie-Suzanne de Ponthaud.
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Ces sablières n'ont jamais fait l'objet d'une étude dédiée. L'auteure de référence reste Sophie Duhem, et l'Index de son ouvrage général sur les sablières de Bretagne, en 1997, pour l'item "Roche Maurice", possède 28 renvois de pages. Néanmoins, elle les attribue à B. Rollant (nom inscrit sur la nef sud, en réalité "A. ROLLANT"), alors qu'il faut voir sous ce nom, à mon sens, celui du fabricien en exercice en 1559. D'autre part, elle donne les dates de 1559-1561.
Guy Leclerc, en 2012 pour le SHAB, consacre un paragraphe de trente lignes aux sablières dans son article sur l'église, en indiquant les dates de 1569-1571.
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La charpente de l'église Saint-Yves est divisée en dix travées, tant dans la nef que sur les collatéraux. Dans la nef, les successions des entraits engoûlés se poursuit jusqu'au jubé, qui sépare la 6ème et la 7ème travée, qui débute le chœur.
Ces travées découpent la succession des sablières. Celles-ci sont sculptées en bas-relief peints monochromes sur l'extérieur des bas-cotés, et nous pouvons donc décrire dix pièces sculptées au sud et autant au nord : je les désignerai sous les sigles S1 à S10 au sud et N1 à N10 au nord.
Au centre les sablières de la nef puis du chœur sont également au nombre de 10 au sud (Sn 1 à Sn10) et dix au nord (Nn 1 à Nn 10).
Nous aurions donc, si le décompte est exact et qu'à la vérification il ne manque rien, un corpus de 40 pièces sculptées. Et chaque sablière est double, puisque sous la pièce supérieure, de 20 ou 30 cm de haut, court une pièce plus décorative, en frise, de 10 cm de haut environ.
Chaque pièce des bas-cotés est entourée depuis la façade ouest jusqu'à la façade est d'un blochet : ajoutez donc au décompte 20 blochets, chacun sculpté en ronde-bosse d'un motif animal ou humain.
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Une restauration indispensable.
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Un cartel affiché pendant les travaux sur l'église apprenait au public que :
"Le principal désordre affectant les charpentes est un affaiblissement des structures des bas-cotés. Cet affaissement est en grande partie dû au pourrissement des sablières, repoussant l'ensemble de la charpente vers l'extérieur. Une précédente rénovation avait entraîné une remontée des parties basses de charpente, modifiant ainsi sa forme générale et provoquant des entrées d'eau aux extrémités des versants, le long des chevronnières. La charpente sera restaurée sur place afin de ne pas altérer les lambris constituant la grande richesse de cette église. Les ardoises de la couverture seront déposées, retaillées puis reposée sur la charpente une fois celle-ci restaurée. Les travaux seront réalisées en trois tranches, débutant par les deux premières travées du chœur. »
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Les trois tranches de travaux Tc1, TC2 et TC3 (plan M.-S. de Ponthaud) :
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Photo exposée dans l'église.
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Selon un autre plan (infra) établi par M.-S. de Ponthaud, les deux premières travées des bas-cotés sont récentes, une partie de leurs sablières , et leurs blochets, ont été sculptés en 2017 par l'atelier Le Ber de Sizun.
La restauration des autres pièces :
"Les artisans ont préservé les bois d'origine et n'ont remplacé que les parties irrécupérables. En dépit de l'utilisation d'outils modernes, les méthodes de restauration restent traditionnelles. Les matériaux sont le chêne et le pitchpin, mis en oeuvre au XIXe siècle. Les principaux facteurs de dégradation sont l'humidité et l'utilisation de bois jeunes, propices à l'installation des champignons et des insectes xylophages. La protection du bois est assurée par des produits anti-fongicides.
Les parties sculptées sont souvent altérées. Les artisans doivent remplacer les parties les plus abîmées. Ils ne conservent que le parement, la face visible et ouvragée. La pièce de bois est recoupée en atelier. Une partie de bois neuve remplace la section irrécupérable. Les parties sculptées sont remodelées à l'aide d'une pâte, qui adhère bien au bois. La pièce est ensuite peinte par les polychromeurs." (Atelier Le Ber)
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Un bonus : on trouvera quelques photos des sablières datant de 2011, avant la restauration.
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Plan par Marie-Suzanne de Ponthaud, auquel j'ai ajouté les dates portées par les sablières.
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DESCRIPTION.
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Elle progressera d'ouest en est, donc de S1 à S10.
S1 : masque crachant des feuilles
S2: Volutes entrelacées et têtes animales
S3: deux hommes luttant au jeu du "bâton à bouillie" ou Baz yod ( 1552)
S4: Homme serrant un tonnelet ( 1552).
S5: Musiciens (cornemuse et tambourin) ( 1552)
S6 : Inscription "Jacques Le Men 1552" ( 1552)
S7 et S8 : ?
S9 : têtes d'anges.
S10 : Deux hommes présentant des phylactères.
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Les pièces sont séparées par desblochets également désignés BS.1 à BS.10.
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Premier blochet BS.1 : un singe . Le sigle arobase (Atelier Le Ber, 2017).
Ce singe est peut-être un Capucin. Le menuisier s'est amusé, mais j'ignore son arrière pensée. Je l'avais attribué aux ateliers Le Ber, mais en février 2023, j'ai reçu ce message dont je remercie madame Le Ber :
"Nous ne sommes pas à l'origine du blochet sculpté en singe. Il existait déjà avant notre intervention. Les travées 1 et 2, au Nord comme au Sud, ont été remplacées en 1995, par l'entreprise CCA. Par contre La frise inférieure, avec le "@", est bien de notre fait, en effet et date de la campagne de restauration qui s'est terminée en 2017. Un grand merci pour tous vos partages. Bien cordialement Anne-Claire Le Ber"
Le menuisier de l'atelier Le Ber a placé, en clin d'œil de la modernité de sa restauration, un sigle @ juste en dessous de ce singe.
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Blochet du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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S1 : masque crachant des feuilles.
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Toute la frise inférieure serait récente, puisqu'on ne l'observait pas en 2011.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté sud de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Blochet BS.2 : un homme ou ange pieds nus en tunique.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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S2: Volutes entrelacées et têtes animales.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté sud de La Roche -Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Troisième blochet BS.3. Homme caressant sa barbe.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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S3: deux hommes luttant au jeu du "bâton à bouillie" ou Baz yod ( 1552)
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Ce jeu courant en Bretagne jusqu'au XIXe siècle — une lutte au bâton unique tenu transversalement et par les deux extrémités par chaque adversaire —, est également représenté sur les sablières de la chapelle Saint-Sébastien de Le Faouët (Morbihan) qui portent la date de 1608. On le trouverait aussi selon S. Duhem dans la chapelle de la Trinité de Bieuzy (Morbihan), mais je ne retiens pas cette suggestion car les deux hommes, avalés par des dragons, se battent en tenant chacun un bâton, par sa poignée.
Cette représentation dont nous n'avons que deux exemples en Bretagne possède donc une forte valeur documentaire.
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Troisième travée : jeu de bâton breton, nef coté nord, chapelle Saint-Sébastien, Le Faouët. Photographie lavieb-aile.
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Mais à la différence de la chapelle Saint-Sébastien, où les concurrents sont figurés en costume XVIe siècle (à taillade pour l'un), les deux hommes de La Roche-Maurice sont nus, à la fois sur le dos et sur le ventre, les pieds tenus par des masques barbus, et, enfin, emplumés par des rubans, des volutes et des colliers de feuilles dépourvus de tout réalisme. Nous avons là une caractéristique stylistique, qui se retrouvera plus loin, de transformation du thème, au départ documentaire sur la vie rurale, en un décor fantastique. Nous trouvons aussi une dilution des frontières entre les trois mondes humain, animal et végétal, et une transformation de l'un en l'autre. Ces métamorphoses, ces passages se retrouveront plus tard — ou se retrouvaient déjà —dans les réalisations du Maître de Plomodiern (1544-1564) en Porzay et au Cap-Sizun.
La frise (la première qui soit d'origine) est également importante à considérer car les masques humains tiennent des volutes enlacées par des anneaux (sans modèle naturel notamment végétal) et donnant naissance à des épillets. C'est, typiquement, le vocabulaire de l'Ecole de Fontainebleau, comme on en trouve dans les stucs du Grand Salon du château de Fontainebleau. Et ce vocabulaire sera repris par le Maître de Pleyben, notamment pour les sablières de la chapelle du château de Kerjean.
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Nous voyons donc que le style de ce huchier n'est pas assimilable à celui d'autres ateliers, mais qu'il existe des points de contacts témoignant, en Bretagne, d'une sensibilité aux influences artistiques du moment.
Les visages se caractérisent par des nez aux fortes narines, par des lèvres inférieures épaisses et par une ligne sourcilière longue et puissante, sous un front court et des cheveux presque crépus. Ces visages viennent ainsi frôler la monstruosité.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BS.4. Buste nu de femme aux lèvres épaisses et à la poitrine développée.
Elle est coiffée d'un bandeau au dessus d'un voile qui serre son menton. Ce buste se greffe sur des éléments décoratifs en volute.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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S4: Homme serrant un tonnelet ( 1552).
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Le buveur, figure de l'intempérance, est encadré par deux grylles, personnages chimériques barbus à queue en feuille de lotus, dont la bouche crache une créature semblable.
Les exemples de ce type de tonneau, ou de figures d'ivrognes, ne manquent pas :
La frise alterne des volutes, des têtes reliées par des anneaux aux volutes, des sortes de monogramme,et des petits cuirs découpés (cuirs qui se développeront à Kerjean pour devenir une marque de fabrique du Maître de Pleyben, mais qui proviennent de l'École de Fontainebleau). Les masques aux yeux caves transpercés par des anneaux sont un nouvel exemple de la perte de réalisme. Ils se retrouvent en Sb4 sur les sablières de Bodilis (Maître de Pleyben,1574), juste a à coté de la scène d'ivrognerie.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BS.5 : une vache tenant un phylactère par ses sabots.
C'est peut-être un bœuf. Et pourquoi pas celui de saint Marc, si on y tient. Pas moi.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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S5: Musiciens (cornemuse et tambourin) ( 1552) et charrette de futailles.
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La scène à six personnages et deux animaux est riche, d'autant que la frise inférieure n'est plus strictement décorative.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Les musiciens.
Le regard est attiré d'abord par les deux musiciens. Celui de droite joue d'une cornemuse, dont le bourdon, orné d'une ruban en boucle, est posé sur l'épaule. Les deux mains sont posés sur le hautbois.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Sur la frise, un cheval est attelé à une charrette dont on a déchargé deux tonneaux.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Aux extrémités, deux renards montrent leur tête, mais là encore empanachée de feuilles-plumes.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BS.6. Ange tenant deux clous.
Pas de photo.
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S6 : Inscription "Jacques Le Men 1552" ( 1552).
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Entre deux gueules de chien ou de loups (au corps végétalisé), deux anges allongés et volants tiennent d'une main un phylactère, et de l'autre un blason au lion dressé.
L'inscription dit ;
PIL E LACLE LE MEN / LAN MVLII
ce que je transcris par "[Fiacre] Le Men l'an 1552".
Le déchiffrage des premiers mots, et notamment de LACLE, est difficile. Faut-il lire IACIE pour ce rapprocher de IACQUES ? Ou plutôt lire FIACRE LE MEN, en s'inspirant de l'inscription nord , et en assimilant le E (quatrième lettre) à un F ?
(La généalogie Brenéol rapporte un Fiacre le Menn, mais il est né à Plouvien en 1680)
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Nous retrouverons ce "Fiacr Menn" sur la sablière N6 sur une inscription où son nom est suivi d'un G qui le désigne comme gouverneur, chef de la fabrique paroissiale.
Je ne le retiendrais comme auteur des sculptures que si la mention " a fait faire" était présente. Dans le cas contraire, je le tiens pour le fabricien. Sa fonction était-elle précisée par le début "PIL E" ?
Un autre argument pour y voir un fabricien local est que le bénitier de kersanton du porche sud porte l'inscription A. MEN. Bien que, là encore, certains y voient le nom du sculpteur et d'autre celui d'un donateur, la présence du même patronyme sur deux chantiers différents, l'un en pierre, l'autre en bois, plaide pour deux fabriciens d'une même famille aisée de la paroisse. Le porche sud ne porte pas de date, mais on l'estime entre 1530 et 1540 (E. Le Seac'h), 1530 et 1550 (Abgrall 1183 et 1911) ou 1550 (Apève) : donc sans doute antérieur mais presque contemporain de ces sablières. Cela avait déjà été remarqué avant moi par L. Lécureux en 1914 ("un bénitier de granit à pans coupés , dont l' inscription en gothique A : MEN indique certainement le nom du donateur, que l' on retrouve, sur une sablière du bas-côté sud , orthographié Menn.") puis en 1919 "Nous noterons enfin, dans le bas-côté sud, au revers du trumeau de la porte, un bénitier en granit à pans coupés portant l'inscription en lettres gothiques A : MEN qui représente certainement le nom du donateur. Celui-ci est peut-être le même que Alaër Menn. — Alaer ou Alar est le nom d'un saint breton que l'on a fini par confondre avec saint Éloi — dont nous avons vu le nom figurer sur la sablière du bas-côté nord."
Si les archives ne permettent pas de retrouver des identités au XVIe siècle, le patronyme LE MEN ou LE MENN est attesté à Ploudiry (la paroisse à laquelle La Roche-Maurice appartient) sitôt que les généalogistes disposent d'actes . C'est bien le nom d'un paroissien.
Le blason montre les armoiries des seigneurs du Léon, dont les héritiers furent les vicomtes de Rohan.
La date est également problématique, en raison de l'avant-dernière lettre qui, en 2011, apparaissait comme un R. Néanmoins, cette date 1552 est donnée sur le site de l'entreprise Le Ber, qui, lors de la restauration, a pu faire la part entre les lettres réellement gravées, et les parties peintes postérieurement.
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Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Les photos de 2011.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
Sablières (1552) du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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UNE RUPTURE DE STYLE.
Au delà de la sixième pièce de sablière, ( correspondant, dans la nef, au franchissement du jubé), nous assistons à un changement de style, dont le critère le plus objectif est l'interruption de la frise inférieure. Il y a changement stylistique, et les scènes figurées complexes et fantasques laissent la place à des éléments ponctuels sur une pièce de bois non sculptée par ailleurs : bustes d'hommes ou d'anges, hommes au phylactère. Le changement d'atelier est manifeste.
La même rupture survient également sur le bas-coté nord au delà de la 6ème travée, qui reprend sans variété les mêmes anges et les mêmes hommes au phylactère.
Cela correspond-il à une réalisation plus tardive (ou antérieure au contraire) ?
Blochet du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2011.
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Blochet BS 8. Diable au phylactère.
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Blochet du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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S8 : Têtes d'hommes coiffés de bonnet carré.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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S9 : deux bustes d'anges.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BS.9. Aigle au phylactère.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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S10 : Deux bustes d' hommes présentant des phylactères.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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Blochet BS.10 : Ange au phylactère.
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Sablières du bas-coté sud de l'église de la Roche-Maurice. Photographie lavieb-aile 2017.
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SOURCES ET LIENS.
—BROUCKE (Paul-François), MAUGUIN ( Michel) ) 2006. Les prééminences armoriées des Rohan au tympan de la maîtresse-vitre de l'église Saint-Yves, La Roche-Maurice (Finistère), Bulletin de la Société archéologique du Finistère.
—BROUCKE (Paul-François), 2012, "L’emblématique de la maison de Léon aux XIIe-XIVe siècles et les prééminences de Daoulas et La Roche-Maurice aux XVe-XVIe siècles", Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne , Congrès de Brest SHAB pages 59-82. En ligne :
"Les sablières portent les inscriptions suivantes : " IA(N). LE. BOELL. G. AN. LAN. MIL VcLXI/A. ROLLAND. 1559/1561. H. H. ELAERE. LE. MEN. "
— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne, XVe-XVIIe s. ... Sophie Duhem ; préf. d'Alain Croix. Vue : ... Publication, Rennes :Presses universitaires de Rennes, 1997 : thèse de doctorat en histoire sous la direction d'Alain Croix soutenue à Rennes2 en 1997.
— LECLERC (Guy), 2012, La Roche-Maurice, église Saint-Yves et ossuaire, Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne , Congrès de Brest SHAB pages 699-711. En ligne :
Kerlaz est une ancienne trève de Plonévez-Porzay devenue paroisse en 1874, puis commune en 1932. L'origine du toponyme est d'autant plus discutée qu'on ne dispose pas d'attestation avant la forme Kerlaz de 1653, suivie de Kerlas en 1670, Ker-las en 1780 et Kerlas en 1815. La tentation est grande de rapprocher ce nom du nom latin Oppidium Occisionis, le chateau du meurtre (occidio, onis, f. assassinat), mentionnée le 26 juin 1518 dans une délibération écrite en latin (mais traduite du breton en usage) du Général (ou Conseil de Fabrique) de Plonévez-Porzay et d'y voir, comme Abgrall et Peyron en 1915 dans leur Notice du Bulletin diocésain, l'étymologie bretonne kêr-, lieu fortifié et -lazh, le meurtre. Ils reprenaient là les travaux de l'abbé Horellou, qui n'avait pas encore publié son "Kerlaz, son histoire, ses légendes, ses familles nobles" (1920) mais qui signalait que le nom ancien était Treffri, ou Treffriot, et qu'il avait été modifié pour garder la mémoire du jour où, à la suite d'une rixe entre l'équipe de foot (alors nommé la soule, avec un ballon en pierre...) du village du Juch et celle de la future Kerlaz, la saine émulation sportive chère au Baron de Coubertin se transforma en un sanglant pugilat.
"Non non,_ rétorquait le recteur de Plonevez-Porzay, Monsieur Pouchous, autre érudit local, ce n'est pas cela du tout, je vais vous raconter : c'était un dimanche, et voilà que les agents seigneuriaux s'en viennent tondre la laine des pauvres paroissiens et exiger d'eux le versement d'une nouvelle taxe ! Les kerlasiens voient rouge, ils lâchent le goupillon pour le sabre, ou pour la fourche ou le penn bazh, et massacrent les percepteurs indélicats (un dimanche, toud-même !). Monsieur le recteur voit tout-de-suite qu'ils viennent de commettre une grosse boulette, il prend lui-même la bannière dédiée à Sant Jermen et se met à la piétiner et la lacérer, puis il décroche la grande croix en argent, la fracasse contre le sol, la tord sur ses genoux, et réunit ses ouailles dégrisés pour leur déclarer : "on dira à M'sieur l'baron que ses gendarmes nous ont attaqué en pleine procession, qu'ils ont voulu s'emparer de nos reliques et de la bannière de Pardon, et que c'est pour défendre ces biens sacrés que nous avons affronté ses soldats !" Voyant qu'il ne pourrait contester une si sainte version, le seigneur (peut-être Yvon du Quelen, baron du Vieux-Chastel) trouva sage de se contenter d'exiger le versement de son champart, et de son cens et de son droit de moulin, du droit de four, ajouté aux arrérages du droit de pressoir, d'y adjoindre les novales sur les terres mises en friche, et de retrouver une facture impayée de quelques droits d'afforage sur des tonneaux mis en perce à la Saint-Jean et dont les droits de bouchon avaient été négligés. Pourvu qu'on n'oublie pas de lui apporter sa part des bénéfices du Pardon de juillet dernier, et il passait l'éponge. Ah, il ajoutait ceci : désormais, cet endroit se nommerait Kerlaz, et ce nom sinistre persécuterait les toponymistes de tout poil pendant des générations.
Mais les linguistes suggèrent qu'il puisse s'agir d'une forme mutée du breton kerglas ( à St Jean-du-Doigt un lieu-dit Kerlaz était noté Kerglas en 1543) qui signifie kêr-, village et -glas, "vert, bleu, gris". Ou bien -laz serait un nom de personne et Kerglaz serait "le village de Laz". Encore une fois, personne ne peut trancher le noeud gordien à défaut de forme attestée ancienne. On se consolera en pensant à la commune de Laz (13,5 km de Pleyben), qui ne parvient pas non plus à résoudre l'énigme de son nom, et qui, de guerre lasse, pense l'attribuer au vieux breton lath-, "baguette, lance", évoquant peut-être une borne ou un menhir.
L'église .
Ce qui est sûr, c'est que l'église est dédiée à Saint Germain, le mérovingien (380-448), qui fut un si dévoué agent impérial et qui participa si bien aux conciliations territoriales entre Francs et Bretons qu'il fut nommé évêque d'Auxerre en mai 418. Certains le croient breton parce qu'il est né en "Armorique", mais il s'agit de l'Armorique gallo-romaine du Ve siècle, qui inclut Auxerre dans les cinq provinces lyonnaises, sénonaises et d'Aquitaine. D'autres croient qu'il évangélisa la Bretagne parce que, en 429, Céléstin Ier l'envoya avec Saint-Loup de Troyes lutter contre l'hérésie pélagique qui sévissait outre-Manche, mais c'est, bien-sûr, de la Grande-Bretagne qu'il s'agit. C'est au cours de ce voyage que, s'arrétant à Nanterre, il décela les saintes dispositions d'une enfant nommée Geneviève, qu'il consacra : elle devint Sainte Geneviève.
Saint Germain est aussi le patron de l'église de Pleyben, de Laz et de Plogastel-Saint-Germain, des chapelles de Plougonven ou de Saint-Martin à Morlaix ou des chapelles du temps jadis à Crozon ou Clohars-Carnoet (René Couffon). Il est fété le 31 juillet. Il appartient à la série des saints exorciseurs et guérisseurs ; à Glomel, devant sa statue, des parents suspendaient leur enfant épileptique par les pieds au dessus des fonts baptismaux. Aucun témoignage de ce type à Kerlaz, tant à l'église qu'à la fontaine de saint Germain, Dour feunteun Sant Germen.
L'église conserve de sa construction au XVIe siècle son porche sud (1572, 1576), son ossuaire d'attache où ont été placés depuis les fonts baptismaux, et le chevet plat. Un arc de triomphe de 1558 donnait accès au cimetière, d'où des pierres tombales de 1539 ont été placées en dallage dans l'église.Au XVIIe, le pignon ouest a été reconstruit en 1620, 1630 et 1635 en l'ornant de colonnes supportant un fronton triangulaires. La chambre des cloches fut construite en 1635, la cloche date de 1644. L'une des deux tourelles d'escalier porte la date de 1677.
[1541 ?? maîtresse-vitre (détruite) : « L'AN.. M. D XLI. FUST. FAICT. CE PANNEAU ».] non vérifié
1558 : arc de triomphe du cimetière.
1566 : socle de la statue de la Vierge.
1567 : Fonts baptismaux.
1569 : socle de statue de saint Sébastien, blason Quelen/Vieux-Chastel
1572 : porche sud. blason Quelen/Vieux-Chastel.
[1576 : tympan du porche sud] Couffon, non vérifié
1588 : élévation nord
Interruption lors des guerres de la Ligue.
1603 et 1606 : élévation nord
1620 : fronton du portail ouest
1630 : Tour du clocher
1631 : galerie du clocher
1644 : cloche (disparue)
1660 et 1671 : flèche .
1675 : tourelle sud
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A l'extérieur :
1. Au dessus du portail ouest à fronton dans le cartouche supérieur gauche :
M:P : BOCER . P. DE PLONEVE & C
P. BRELIVET. FAB 1620
Horellou a lu : "M. P. BOCER : DE PLONIAFF. Y. LUCAS. F. BRELIVET. FA."
Je propose "Messire P. BOCER, recteur de Plonévez et P. BRELIVET, fabricien, 1620". Le nom des recteurs de Plonévez-Porzay est connu de 1517 à 1538 (Harlé de Quélen) puis en 1644 (Guillaume Vergoz) et à partir de 1657 (Jean Féburier de 1657 à 1665, Jean Corentin Billuart de 1666 à 1700, Charles Pezron de 1755 à 1763 et Mathurin Le Maître à partir de 1764).
BOCER est une forme de BOSSER. Le nom Bosser ou Le Bosser est courant à Plonevez-Porzay, et on peut retrouver par exemple un Guillaume le Bosser né en 1666. Brélivet est un anthroponyme attesté à Kerlaz, et qui figure toujours dans l'annuaire de cette commune.
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2. Sur la face ouest de la tour :
Y (?) LVCAS : F : 1630
Un Bernard Lucas a fait inscrire son nom en 1653 comme fabricien de l'année sur le calvaire du placître de la chapelle Sainte-Anne La Palud, qui dépend comme Kerlaz alors de la paroisse de Plonevez-Porzay. Le nom Lucas, toujours en vigueur à Kerlas, est ainsi attesté à Plonevez ; Sébastien Lucas est signalé à Kerlaz comme décédé avant 1760. Nous trouvons de nombreux Yves Lucas dans la paroisse, mais pas vers 1630.
Horellou décrit "un clocher à flèche élancée, portant la date de 1660, et flanquée de deux tourelles couronnées de pyramides aigües, dont l'une porte la date de 1671."
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Sur le linteau ouest de la chambre des cloches :
M.G. AVAN . RECTEVR .G.QUINIOV.F. 1631
Le seul nom compatible avec -AVAN me semble être PICHAVANT, attesté à Kerlaz et à Plonevez. (Un Jean Pichavant fut recteur de Meilars -Confort en 1691). J'ai bien conscience qu'il est difficile de transformer AVAN en Pichavant. La fontaine Saint-Germain (sur la route de Trezmalaouen) porte l'inscription bien lisible I. AVAN : F 1639 (avec un bel exemple de N rétrograde) : il ne peut donc s'agir d'une erreur. Mais nous apprenons qu'il s'agit du fabricien et non du recteur. Si le V se lit U, nous obtenons AUAN qui ne nous avance pas.
Je veux tenter l'hypothèse de lire KERAZAN, avec la graphie K/AZAN ; mais cela n'aboutit pas. Plus acrobatique, mais plus fructueuse, l'hypothèse K[ER]MAVAN renvoie à une famille dont Tanguy III épousa Aliette de Quelen, dame du Vieux-Chastel.
QUINIOU est un nom toujours en usage à Plonevez-Porzay.
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date de 1671.
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LES CLOCHES.
3. Sur la cloche ouest : "Nommée Marie-Françoise par François Marc et Marie-Anne Guidat--"...
4. Une cloche date de 1903 avec l'inscription S.S LEON XIII pape, Mgr Dubillard évêque de Quimper [1900-1907] , Abbé Charles Salou recteur, Guillaume Le Floch président Corentin Cornic trésorier. Elle a été fondue par Havard à Villedieu. Ornement : 2 coeurs enflammés, ceint de couronne d'épine.
5. L'autre date de 1879.
Une ancienne cloche datait de 1644. Elle portait l'inscription S, GERMAIN . KERLAZ . 1644. LORS . ETOIT . RECTEUR . M'. GUILLAUME . VERGOZ . M- . HENRI . KERSALE. CVRE . E . IEAN . CARADEC. FABRIQUE. Le nom de Guillaume Le Vergoz est également inscrit sur le calvaire de Sainte-Anne-La Palud, paroisse de Plonévez-Porzay dont il fut recteur de 1630 à 1656.
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LE PORCHE SUD : INSCRIPTIONS ET BLASONS.
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Illustration Bruno Pilorget
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6. L'inscription lapidaire (leucogranite) du porche sud et ses blasons.
Cette inscription est remarquable par son esthétique. Elle débute sur la moitié du mur de gauche, et fait retour sur l'angle pour indiquer la date, au dessus de l'ange présentant un blason.
La partie présente sur le mur occidental est sculpté en réserve sur trois blocs de pierre. Sa lecture n'est pas immédiate, d'autant qu'elle débute par le cartouche inférieur et se complète par un petit cartouche au dessus. Surtout, les lettres gothiques de belle taille, aux fûts s'achevant en losange ou en fourche, sont animés d'une liberté plus habituelle sous la plume d'un secrétaire de chancellerie que sous le biseau. L'artisan, après avoir étendu avec insouciance les premières lettres, semble s'être aperçu trop tard qu'il allait manquer de place pour le nom propre, qu'il a collé au deux-points, dont il a bricolé le début CA, avant de reporter la fin DEC au dessus. En outre, il place la ponctuation en plein milieu du nom : "CARA:DEC".
C'est bizarre, mais cela rend l'exploration de ces témoignages du passé passionnante, car on se prend à participer avec empathie aux difficultés du sculpteur. Ah, ce n'est pas son jour. Et je l'entends même jurer ou maugréer (ce qui est presque pareil, me dit madame CNRTL).
Bref, nous finissons par lire : PHILIBERT : CARA : DEC F
Nous nous tournons maintenant tous ensemble vers la droite et nous lisons la date : 1572. Facile !
D'où la transcription "Philibert Caradec, fabricien en 1572", sur laquelle nous pouvons désormais travailler.
Genenanet indique 277 occurrences de ce patronyme à Kerlaz, et 1171 à Douarnenez. Il vient du gallois Craddock.
Ce qui est plus intéressant, c'est que parmi les 6 nobles de Plonévez-Porzay présents à la Montre de Carhaix en 1481 figure Yvon Caradec, "archer en pal", et Henri Caradec, "en pal". La famille n'apparaît plus lors de la Montre de Quimper en 1562.
D'autre part, la cloche de 1644 portait l'inscription suivante : S, GERMAIN . KERLAZ . 1644. LORS . ETOIT . RECTEUR . M'. GUILLAUME . VERGOZ . M- . HENRI . KERSALE. CVRE . E . IEAN . CARADEC. FABRIQUE . Jean Caradec était donc fabrique ou fabricien en 1644. Cette fonction était confiée aux membres les plus aisés ou les plus notables d'une paroisse ou d'une trève.
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L'ange au blason sous la date de 1572.
Ce blason est muet. Il l'est peut-être depuis l'origine, faisant pendant à l'ange de droite.
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Vue générale de la porte intérieure.
C'est une porte moulurée, en plein cintre encadrée de pilastre et sommée d'une accolade à feuilles et fleurons. L'aisselle de l'accolade porte un visage en masque.
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Ange présentant le blason de Quelen-Vieux-Castel.
L'ange aux ailes éployées et à la tunique plissée présente un blason mi-parti .
En 1 (c'est à dire dans la moitié gauche), les armoiries de Quelen, qui sont burelé de dix pièces d'argent et de gueules.
En 2, les armoiries de Vieux-Chastel qui sont, et c'est amusant, presque semblable à trois fasces (ou burelles) accompagnées d'hermines 4, 3, 2, 1.
Il faudrait reprendre cette photo à lumière frisante pour vérifier la présence des hermines ou mouchetures, que je devine en partie haute. J'ai décrit les armoiries de Jehan du Vieux-Chastel, abbé de Landévennec, ici :
Nous savons qu'en 1300, Geoffroy était seigneur du Vieux-Chastel. Son fils, Guillaume du Vieux-Chastel épousa, en 1335, Pleuzou de Quintin, fille de Geffroy II, sir de Quintin, et leur fille Aliette du Vieux-Chastel épousa en 1372 Yvon (Eon) de Quélen, gouverneur de Carhaix. Puis viennent Conan IV et Typhaine Quelennec, puis Yvon II et Jeanne La Jeune du Chastel, puis Olivier (v1440-1521) et Marie de Berrien, puis Jean de Quelen (1490-1547) et Jeanne de Troguindy, puis René et Marie du Bot. Leur fils Pierre (dont les dates correspondent à celle de 1572 qui nous concerne), décéda en 1586 sans descendance. La branche aînée des Quélen, baron de Vieux-Chastel, a fini à leur fille Renée de Quélen, dame du Vieux-Chastel, qui épousa, vers 1590, Claude de Lannion, Sgr de Quinipilly. Pierre de Lannion, leur fils, prend le titre de baron de Vieux-Chastel ainsi que ses successeurs.
En conclusion, ce serait ici le blason affirmant, en 1572, les droits prééminenciers de la famille de Quelen-du Vieux-Chastel, du vivant de Pierre de Quelen.
Il correspond, en inversant les parti, à cette schématisation proposée par Michel Mauguin :
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Michel Mauguin : Histoire de Lez-kelen.
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LES INSCRIPTIONS INTÉRIEURES.
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7. Socle de la statue de Saint Sébastien : armoiries Quelen/Vieux-Chastel 1569.
La date de 1569 entourent dans un entrelacs les armoiries déjà découvertes sous le porche avec la date de 1572. C'est sans doute un ré-emploi. Là encore, un nouvel examen avec un éclairage adapté révélerait peut-être les hermines des Vieux-Chastel.
Quoiqu'il en soit, cela avance de 3 ans la date de construction de l'église.
En 1569, c'est le règne de Charles IX (1560-1574) qui a alors dix-neuf ans. Les guerres de religion aboutiront au massacre de la Saint-Barthélémy (24 août 1572). Puis viendront, de 1588 à 1598, les guerres de la Ligue en Bretagne, et les pillages de la Fontenelle, installé à l'île Tristan toute proche de Kerlaz.
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8. Sur le sol devant cette statue: 1539: la date la plus précoce de toute l'église ? Elle proviendrait d'une dalle funéraire du cimetière réemployée comme pavement . Mais selon Horellou, "Lors du dallage de l'église, du temps de M. Latreille, on dut transporter du cimetière de Plonévez-Porzay un grand nombre de vieilles pierres, tombales qu'on utilisa comme dalles à Kerlaz."
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9. Sur le mur intérieur nord de la nef :
IA : BRILIVET : FA 1603
Horellou a lu : "SEB. CAUNAN 1606. JEAN, BRELIVET. F. 1603"
Ce Jacques BRILIVET fabricien en 1603 renvoie au BRELIVET fabricien en 1620 et dont le nom est inscrit sur la tour.
Dans l'histoire de la construction de l'église, que ces inscriptions nous racontent, il y eut une première période en 1569-1572 et même 1588, puis une interruption liée aux violences de la Ligue, puis une reprise entre 1603 et 1620.
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10. Sur le même mur : une très belle inscription cachée par l'art saint-sulpicien, et par l'absence d'éclairage adéquat pour la mettre en valeur. Pourtant on voit les deux registres séparés par une barre, les lettres gothiques qui, au lieu d'être régulières, s'harmonisent avec le cadre, un beau R et un superbe H en onciale dont la hampe revient sous la ligne. Ici ce serait G.BOVRCH.1588 . Actuellement, c'est la forme Le Bourch qui est attestée à Plonevez-Porzay (annuaire Pages Blanches 2011).
La graphie ressemble à celle de l'inscription du porche sud qui porte PHILIBERT CARADEC F; 1572 .
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11. Sur le mur du bas-coté nord ont été ré-employées des pierres portant les inscriptions :
H. COBNAN en onciale, hormis le N central. Elle est lue de façon avisée "H. CONNAN" dans le Nouveau Répertoire de René Couffon et Alfred Le Bars. Le patronyme Cobnan n'est pas attesté, mais le premier N a la forme des lettres b ou h .
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12. A coté dans la même graphie malhabile : H. LORANS : F
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13. Les fonts baptismaux ont été placés dans l'ancien ossuaire d'attache. On lit tout autour de la cuve :LMVcLXVII. MOR : AVTRET : FAB , c'est-à-dire 1567 MOR : AUTRET : Fabricien. A comparer avec la date 1569 en chiffres arabes du socle de St Sébastien, et avec la graphie de la date LMVccLXVI (1566) du socle de la Vierge.
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14. Un bénitier : 1779 Y G dans un placard en creux, sur une cuve ornée de denticules et posée sur un fragment de colonne réemployé.
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II. LES STATUES :
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1°) Saint Germain :
Statue en granit polychrome du XVIe-XVIIe située à gauche du choeur dans une niche en bois du XVIIe (?) siècle. Inscription non déchiffrée sur le socle. Le commentaire des Monuments Historiques lors de l'enquête 1978 indique, sous la référence 29001214 que c'est l'oeuvre du même atelier que la Vierge qui lui fait face à droite du Choeur dans une niche analogue et avance une datation du XVIe assortie d'un point d'interrogation.
La niche associe, sur un beau travail de restauration de la menuiserie, des éléments classiques comme les colonnes cannelées à la base peinte en faux-marbre et les chapiteaux corinthiens, avec des rinceaux qui se rejoignent en encadrant des armoiries épiscopales stylisées. Il subsiste un pot à feu, symbole de charité qui voisine avec un décor floral.
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Le saint est représenté comme il se doit en évêque, bénissant de la main droite, tenant la crosse à gauche, coiffé de la mitre, revêtu d'une lourde chasuble à orfroi, portant l'étole au dessus d'une tunicelle et d'une soutane ou d'une robe violette.
Les deux fanons de la mitre, à frangés bouillon de cannetille or, encadrent le cou comme les barbes d'une coiffe bretonne.
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Il apparaît que la hampe de la crosse épiscopale est tenue par l'intermédiaire d'un linge. C'est le sudarium, parfois fixé à la hampe par un crochet aménagé par les motifs ornementaux . Il figure sur les armoiries des abbés et des prélats inférieurs aux évêques, qui ne portaient pas de gants initialement. Ce voile, autrement nommé velum ou panisellus, servait à éviter de toucher le bois ou le métal précieux avec des mains moites.
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Les gants épiscopaux ou chirothèques sont parfaitement représentés, avec l'anneau épiscopal (où un chrisme est ébauché) qui se porte au dessus, le motif doré en quatre-feuille sur le dos du gant, et le gland qui s'oppose aux plis de l'évasement sur le poignet. Mais quelque-chose ne va pas : un anneau épiscopal se porte à la main droite, et toujours sur l'annulaire alors que ce carré doré est placé sur les majeurs des deux mains. J'ai déjà noté cela à Plogonnec sur la statue de St Thurien Église de Plogonnec : statues et bannières. Les premiers chrétiens portaient de nombreux anneaux, ornés de symboles christiques comme le poisson, la nef, et les dignitaires reprenaient l'usage romain des annuli sigillarii ou annuli signatariipour frapper de leur sceau leurs documents : Clovis en confère le droit aux évêques, et saint Augustin fait allusion à cet usage. Les docteurs médiévaux portaient un anneau au pouce droit pour témoigner de leur doctorat.
L'anneau épiscopal est remis à l'évêque lors de sa consécration en signe de l'étroite alliance qu'il contracte avec l'Église comme un époux. Mais autrefois il ne pouvait le porter à l'annulaire droit que lorsqu'il célébrait la messe, et ils le plaçaient au pouce le reste du temps. Aucun autre écclesiastique ne peut porter un anneau, du moins durant la messe. (Abbé André, cours de droit canon, article "anneau", 1860).
Puisqu'il était porté au dessus du gant, il pouvait glisser, et il était parfois assuré par un deuxième anneau de sécurité.
Dans l'église de Cast, une statue de Saint évêque montre également le sudarium, et une main gauche portant une bague sur le majeur et sur l'auriculaire.
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2°) St Even :
Selon Wikipédia, qui sait tout, Saint Even ou Ewen n'est autre que Saint Ouen, plus simplement nommé Dadon mais néanmoins chancelier ou référendaire (garde du sceau) du roi Dagobert et donc collègue de l'orfèvre Éligius, dit Saint-Éloi.
Mais selon Monsieur Pouchous, le recteur de Plonevez-Porzay de 1832 à 1885 après avoir été celui de Rumengol, an aotrou person, ce Saint Even serait un ermite né à Quimper de parents nobles qui le chassèrent de leur manoir néobreton tant ils n'en pouvaient plus de le voir, à seize ans, réciter le chapelet au lieu d'aller jouer à la soule avec les autres, faire pénitence du samedi au jeudi en plus du vendredi réglementaire, donner aux mendiants l'argenterie armoriée familiale plutôt que de mettre le couvert, et regarder tristement sa mère en se signant lorsqu'elle allait danser. Maman lui donna son argent de poche et Papa le jeta dehors. Bien-sûr, Even commença par s'agenouiller pour se recommander à Notre-Dame et à Saint Corentin, puis chercha si bien qu'il trouva une famille éplorée pour distribuer ses économies, et le coeur et la bourse légère, il s'enfonça dans la forêt de Nevet (celle de Locronan) pour y camper et faire des feux de bois. Et selon les termes de M. Pouchous " il vécut saintement dans son ermitage, il y mourut vénéré des voisins" et cette vie exemplaire lui valu, non seulement une statue à Kerlaz, mais une chapelle à son nom, et son pardon le troisième dimanche de septembre. (voir Abgrall & Peyron, Notice, Bdha 1915, p. 17).
Indépendamment de cette tradition auriculaire précieusement recueillie par l'abbé, on peut aussi noter que Saint Even est le patron de la paroisse de Ploéven, Plou-Even, paroisse dont dépendait Kerlaz avant la création de celle de Plonevez-Porzay.
Dans les profondeurs de Koad-Nevet, ancien nemeton gaulois où tout baigne dans une mystérieuse ambiance druidique et sacrée se trouve la fontaine de saint Even, Feunteun Sant-Even, dont les eaux sont, c'est la moindre des choses, miraculeuses.
D'ailleurs, cette statue vient directement de la chapelle Saint-Even, tombée en ruine dans le bois de Nevet : c'est tout-à-fait lui, en habit monastique avec son bourdon de pélerin avec lequel il arpentait landes et taillis, garennes (Ar Waremm) et marais, empruntant hent-ar-Spern et hent-ar-Louarn, hent-ar-Maro et hent-ar-Kreiz, hent-ar-Stankou et hent-plas-ar-Lochou, tous ces chemins de Koad-Nevet.(http://www.ofis-bzh.org/upload/travail_fichier/fichier/69fichier.pdf) .
Elle est estimée datée du XVII-XVIIIe par les Monuments historiques, qui signalent une inscription de restauration à l'arrière : MARC F. 1885.
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3°) St Sébastien : (placé sur le socle daté 1569)
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... que les chanoines J.M. Abgrall et P. Peyron intitulèrent Ecce Homo pour un motif inexplicable, puisque les plaies sont celles des flèches du martyr de Saint Sébastien. A leur décharge, reconnaissons qu'il est inhabituel que les jambes du saint ne soient pas entravées et liées sur la colonne (aux allures de palmier) où les mains sont nouées, et encore plus inhabituel que l'éphèbe apollinien porte la barbe. J'ai pourtant un doute puisque les Monuments Historiques y ont vu aussi en 1994 (ref PM 29000385) un Christ de Pitié ! J'examine comme un médecin légiste les onze ou douze plaies sanguinolentes, elles sont punctiformes, arrondies, elles ne peuvent correspondre à une flagellation par fouet (fut-il muni de boules de plomb) ou par branches d'épineux, et sont celles crées par la sagittation. Enfin, aucune couronne d'épine n'est présente.
Mais (rien n'est simple) les mêmes services MH classent sous la référence IM29001220 avec une notice rédigée par Jean-Pierre Ducouret un Saint-Sébastien statue en bois repeint daté "limite 16e-17e siècle (?)" de 140 cm avec la "mention du classement : s'agirait-il du Christ de Pitié, statue en bois de 1569 ?" dont la taille était de 131cm.
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4°) Saint Michel terrassant le dragon : XVIe siècle.
Certainement l'une des belles pièces de l'église, cette statue en bois peint de 1,08 m représente le chef des milices célestes brandissant son épée de feu et tenant de la main gauche la balance avec laquelle il pèsera nos âmes le jour fatal des ultimes bilans. (Un sortilège du Malin a rendu cette balance invisible).
Cheveux longs à la mode du début XVIe, les lèvres peintes, il porte le manteau rouge à galon d'or qui le caractérise et dont il montre la doublure blanche à fleurs, au dessus de la courte armure Renaissance. N'étant pas expert, je ne m'aventurerai pas à décrire la tunique bleu-métal portant le christogramme IHS sans savoir s'il ne s'agit pas d'une brigandine, ce pourpoint de cuir recouvert de lames de métal superposées en tuiles et d'une finition extérieure en cuir, en velours ou en soie que tant de seigneurs bretons portent lors des Montres. Les canons d'avant-bras, les cubitières ou les genouillères rivetées sont peints de la même couleur métallique, alors que les cuissots, les grèves et solerets semblent remplacées par des chausses et des bas très ajustés sur de courtes chaussures. Les bandes dorées pourraient être damasquinées, ou seulement brodées.
Autour de la taille, une pièce protégeant bassin et trochanters réunit braconnière et tassettes en une petite jupette bien seyante.
Mais bien-sûr, la star involontaire est cet espèce de dobermann mâtiné de Pluto qui fait office de dragon et que son maître chatouille du pied, non sans provoquer moult aboiements et gémissements de plaisir.
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5°) Groupe de la crucifixion : la Vierge.
Cette statue en bois de la Vierge fait partie d'une Crucifixion dont les trois éléments, vierge, crucifix et saint Jean, ont été séparés.
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6°) Groupe de la crucifixion : Saint Jean.
Il indique qu'il est Jean l'évangéliste en tenant le livre de son évangile. D'habitude le manteau bleu est réservé à la Vierge et lui porte un manteau rouge, mais cette couleur est placée ici en doublure interne. Il est imberbe, comme tout Jean l'évangéliste qui se respecte, et comme c'était la mode à la fin du XVe avec la coiffure page et l'association menton rasé-cheveux longs qui allait s'inverser vers 1520. Le cheveu est taillé court sur le front en une curieuse épilation des golfes temporaux formant une pointe, avant de libérer les mèches bouclées.
La robe boutonnée comme une soutane est bordée en bas et aux manches de fourrure.
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III. Les sablières et les blochets.
Elles valent à elles seules le détour, d'autant qu'elles ont été parfaitement restaurées en même temps sans-doute que le beau lambris de recouvrement de la charpente. Là, pas de boitier élécrique gris, pas de cables munis de cavaliers, pas de projecteurs mal placés, du beau travail. Ces sculptures de chêne datent de la deuxiéme moitié du XVIe siècle et sont donc contemporaines des différentes inscriptions et statues que nous avons vu.
A la croisée du transept, quatre personnages vêtus de bleus contemplent le choeur. Le fait qu'ils soient barbus, sauf un (Jean) me fait penser aux quatre évangélistes.
Cet apôtre (?) semble singer par une frise de visages qui font les acrobates entre des angelots.
Le personnage suivant subit la même dérision de voir son portrait démultiplié par un écho visuel semblable aux éclats capricants d'un vaste rire.
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Ici, c'est une figure ailée aux pommettes saillantes, chevelue, couronnée de feuilles, les mains jointes, à mi-chemin entre un chérubin et une renommée;
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Le mystère et l'étrangeté, qui sont les charmes des sablières de nos chapelles, s'accentuent face à cette sorte de rébus où un cuir ou un drap est présenté à droite par une femme dépoitraillée comme une Bacchante et à gauche par une ange : deux mains, deux pieds, un cœur C'est un cartouche à cuir découpé des Cinq plaies du Christ, comme ceux réalisés par le Maître de Pleyben à Pleyben, ou Sainte-Marie-du Ménez-Hom. On retrouve d'ailleurs, de ce Maître, la façon de faire tenir le coin du cartouche par un ange plein d'allant, comme celui de droite.
Mais là encore, le visage de la femme et celui de l'ange reprennent par ricochet ironique les traits du personnage qui se tient debout.
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Et que dire de ce visage coiffé d'un chapeau rond et que deux animaux écailleux encadrent ?
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On se retrouve plus serein face aux anges orants et adorants :
En forme de croix latine, elle comprend une nef irrégulière de trois travées avec bas-côtés séparée par un arc diaphragme d'un transept spacieux, et un choeur peu profond accosté de deux sacristies. Le porche ouvre directement sur la nef, réduisant le bas-côté sud à une seule travée. Elle date des XVIè et XVIIè siècles. Le chevet plat est percé d'une fenêtre dont le remplage est semblable à celui de la fenêtre du transept de Pont-Croix. En 1880, elle contenait encore quatre panneaux d'une verrière datée 1541.
Le vaisseau est du type à nef obscure. Les grandes arcades ont des archivoltes très gauches pénétrant directement dans les piliers. Le mur nord de la nef porte les inscriptions : "IA. BRELIVET. F. 1603" et "G. BOVRCH. 1588". Des sablières sculptées et des blochets subsistent dans le choeur et dans le transept. Le porche porte l'inscription en lettres gothiques : "PHILIBERT. CARA. /DEC. F." (mur latéral), la date 1572 (à gauche de la porte) et celle de 1576 (tympan). Le portail ouest à fronton porte l'inscription : "M. P. BOCER. P. DE/ PLONEVE & C/P. BRELIVET. FAB. 1620".
La tour, datée à l'ouest "Y. LVCAS. F. 1630", est flanquée de deux tourelles d'escalier et porte une flèche très élancée (1671 ou 1675 sur le pan sud). Sur le linteau ouest de la chambre des cloches, inscription :"M. G. AVAN. RECTEVR. G. QVINIOV. F. 1631." ; "IAN. DOARE. F. 1675" sur la tourelle sud ; "H. CONNAN" et "H. LORANS. F" sur le mur du bas-côté nord (pierres remployées)
Mobilier : Mobilier de style néo-gothique, fin du XIXe siècle : maître-autel, chaire transformée en ambon, un confessionnal, stalles. Un second confessionnal du début du XIXe siècle. Fonts baptismaux en granit (C.), dans l'ancien ossuaire d'attache ; inscription : "L. MVcLXVII. MOR. AVTRET. FAB". Bénitier de pierre portant l'inscription : "1779. Y. G.". Statues - en pierre polychrome : dans des niches en bois polychrome ornées de pilastres, saint Germain évêque, XVIe siècle (C.), et Vierge à l'Enfant dite Notre Dame de Tréguron, datée "L. MVccLXVI (GV) IDAL. FABRI..." sur la console (C.) ; - en bois polychrome : groupe de la Crucifixion (le crucifix est séparé de la Vierge et de saint Jean), saint Sébastien, sans lien avec la date de 1569 sur la console (C.), saint Michel terrassant le dragon, XVIe siècle (C.), saint Even ; - en bois naturel : Vierge de la Médaille miraculeuse, vers 1950 ; - en plâtre peint : groupe de la Sainte Famille. Vitraux de l'atelier Léglise, 1917-1918 : Education de la Vierge, prédication du père Maunoir à Kerlaz, saints locaux et, dans les trois fenêtres du baptistère, épisodes de la persécution religieuse sous la Révolution. Orfèvrerie : Calice et patène en argent, il aurait appartenu à J.C. Billouart (1660-1679).
Cloche de 1644, elle porte l'inscription : "S. GERMAIN. KERLAZ. 1644. LORS. ESTOIT. RECTEVR. Mre. GVILLAVME. VERGOS. Mre. HENRI. KSALE. CVRE. E. IEAN. CARADEC. FABRIQVE.".
Trois dalles funéraires remployées dans le pavé de l'église : sur l'une, date de 1539, - sur une autre, l'inscription : "NOBLE/ MI. IOSE/PH COR/ENTIN/ BILLOVA(RT)/ 1679", et, sur la troisième : "1731/ MISSIRE/ IEAN/ LE BOT/ CVRE." (Ces pierres proviendraient de l’église ou du cimetière de Plonévez).
* L'arc de triomphe du cimetière porte la date de 1558 (C.) ; dans des niches, statues en pierre de saint Yves et de saint Germain. La croix du cimetière est aussi datée : "HIEROSME LE CARO. F. 1645" (C.). Fontaine Saint-Germain, sur la route de Trezmalaouen ; sur le fronton, "1639. I. AVAN. F." ; statue en granit du saint.
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— ABGRALL (Jean-Marie), 1915, B.D.H.A. 1915 : Notice sur Kerlaz
KERLAZ. A l'interieur du porche: .. ;PHILlBERT. Aux fonts baptismaux : L : MVc LXVII : MaR AUTRET· FAB. Sur le mur- nord: H : conNAN " Y . KERSALE ', ,F . H . LORENS' F. Croix du cimetiere : H[EROSME' LE . CAROF . 1645. Arc de lriomphe : 1558.
— HORELLOU (abbé) v.1920 : Kerlaz, son histoire, ses légendes, ses familles nobles (Brest, vers 1920)
L'église de Kerlaz, sous le vocable de Saint-Germain-l'Auxerrois, a été construite à différentes reprises, à en juger d'après les différentes dates qu'on lit sur les murs. Elle est assez grande, mais irrégulière. Quoique d'ordre assez modeste, elle présente, dit M. le chanoine Abgrall, un caractère de noblesse et de distinction, surtout pour ce qui est de l'extérieur. Le portail ouest est surmonté d'un clocher à flèche élancée, portant la date de 1660, et flanquée de deux tourelles couronnées de pyramides aigües, dont l'une porte la date de 1671. Ces dates semblent en désaccord avec la physionomie gothique de tout cet ensemble, mais elles doivent cependant être vraies, car les profils de certaines moulures et des bandeaux horizontaux concordent avec le style de cette époque. La hauteur totale du clocher est de 40 mètres. La flèche est postérieure de plusieurs années à la base, sur laquelle on lit les dates de 1620 et 1630. Outre ces dates, le clocher porte diverses inscriptions. Au-dessus de la porte principale on lit : M. P. BOCER : DE PLONIAFF. Y. LUCAS. F. BRELIVET. FA. Les ouvriers de M. Gassis ont rendu plusieurs de ces inscriptions illisibles en voulant les rajeunir. Le clocher possédait jusqu'au rectorat de M. Salou une ancienne cloche portant l'inscription suivante : « 1644 : S. GERMAIN P. P. N. LORS ETAIT RECTEUR GUILLAUME VERGOZ ET HENRI KERSALE, CURE. J. CARADEC. F. ». Cette cloche était fêlée depuis longtemps et sa voix n'était guère harmonieuse ; malgré cela, la population était restée très attaché à cette relique de l'ancien temps, et lorsqu'il fut question de la remplacer, M. Salou, alors recteur de la paroisse, rencontra une opposition très sérieuse ; mais on se consola bien vite lorsqu'on entendit le nouveau carillon jeter aux quatre coins de la paroisse ses notes argentines et harmonieuses.
Sur la facade midi, fait saillie un porche qui est absolument dans la note gothique de la première moitié du XVIème siècle. A l'intérieur du porche, de chaque côté de la porte d'entrée de l'église, on voit des écussons portant les armoiries des Quélen-Vieux-Châtel. Sur le mur Ouest, à gauche quand on entre sous le porche, on lit le nom de PHILIBERT CARADEC. F. 1572.
Entre ce porche et l'angle de la façade ouest, était autrefois un petit ossuaire ajouré de deux baies moulurées, à cintres surbaissés. M. Latreille a transformé cet ossuaire en une élégante petite chapelle où se trouvent aujourd'hui les fonts baptismaux.
A l'intérieur de l'église, sur le mur nord, on lit : SEB. CAUNAN 1606. JEAN, BRELIVET. F. 1603 et plus loin la date de 1588.
L'église est pourvue d'un mobilier neuf, datant du temps de M. Latreille. Le maître-autel, les deux autels latéraux, la balustrade, la chaire à prêcher et le nouveau confessionnal sont en châtaignier sculpté et verni.
Les statues vénérées dans l'église sont saint Germain l'Auxerrois, patron de la paroisse, et Notre-Dame de Tréguron, qui est invoquée surtout par les mères et les nourrices qui ont besoin de lait pour leurs nourrissons. Outre ces deux grandes statues, on voit encore sur la façade Est, du côté de l'Epître, les statues de Jeanne d'Arc, de la Sainte-Famille, groupe bizarre et de mauvais goût, de saint Even et de saint Sébastien, que quelques-uns ont pris pour un Ecce Homo. Cette dernière porte sur son socle un écusson avec les armoiries des Quélen-Vieux-Châtel.
Sur la même façade, du côté de l'Evangile, on voit les statues du Sacré-Cœur, de saint Jean-Baptiste, de saint Michel terrassant un dragon, cette dernière provenant de la chapelle de Saint-Michel en Plonévez-Porzay. Plus loin, sur le mur nord, se trouve une autre statue très ancienne, ne portant pas de nom. On dit qu'elle est venue de la chapelle de Saint-Even.
On voyait, aussi autrefois, adossé au pilier midi, un groupe en pierre, très curieux et très primitif, représentant saint Hervé, le chanteur aveugle, guidé par son petit compagnon Guic'haran, qui conduit un loup en le menaçant d'un fouet armé de gros nœuds. Ce groupe provenait ide la chapelle de Saint-Mailhouarn, à Lesvren (Plonévez-Porzay). M. le chanoine Abgrall déplore à juste titre sa disparition de l'église de Kerlaz. Sous prétexte que c'était une œuvre de style un peu barbare, on a cédé, pour une destination profane, cette statue qui avait été vénérée pendant quatre siècles par les paroissiens de Kerlaz. En attendant sa rétrocession et sa réinstallation à la place qu'elle n'aurait jamais dû quitter, le R. P. Le Floch a eu la bonne et pieuse pensée de la reproduire aussi fidèlement que posible dans un des nouveaux vitraux.
La fenêtre absidale contenait autrefois, une maitresse-vitre qui a disparu. Elle était composée des sujets suivants : 1°) Couronnement d'épines ; 2° Notre Seigneur en croix entre deux larrons ; 3°) Descente de croix ; 4°) saint Jean-Baptiste présentant un chanoine donateur, avec un écusson portant « d'azur à trois poissons d'argent ». Au bas se trouvait cette inscription : « L'AN.. M. D XLI. FUST. FAICT. CE PANNEAU ». Le nouveau vitrail reproduit toutes ces scènes, à l'exception de la dernière.
Au milieu de la nef, en face de la chaire à prêcher, se trouvent deux pierres tombales qui pourraient faire croire au visiteur non averti qu'il y a là deux sépultures. La première porte l'inscription : « Jean Le Bot, curé de Kerlaz » ; la seconde : « Corentin Billova, etc. ». Le reste est illisible. D'après les renseignements fournis par M. l'abbé Briand, recteur de Plomeur, ce Corentin Billova est né à « Maner ar Goff », en Plomeur. Il fut pendant quelques années recteur de sa paroisse natale, d'où il fut transféré à Plonévez-Porzay, le 2 février 1666, et où il mourut le 11 juin 1700. La présence de cette pierre tombale à Kerlaz a fait croire à plusieurs que M. Billova y a été enterré. C'est une erreur. Cette pierre provient du cimetière de Plonévez-Porzay. Lors du dallage de l'église, du temps de M. Latreille, on dut transporter du cimetière de Plonévez-Porzay un grand nombre de vieilles pierres, tombales qu'on utilisa comme dalles à Kerlaz. La pierre tombale de M. Billova, qui méritait assurément un meilleur sort, se trouva du nombre. C'est ce qui explique sa présence à Kerlaz ; mais il ne faut pas en conclure autre chose, et croire, par exemple, que M. Billova, a été enterré à Kerlaz. L'autre pierre tombale vient du cimetière de Kerlaz, du tombeau de M. Le Bot, ancien curé de la trève.
Cimetière de Kerlaz.
Le cimetière de Kerlaz n'offre rien de particulier à signaler. C'est le vieux cimetière de campagne assis à l'ombre de l'église paroissiale. Kerlaz, quoique trève de Plonévez-Porzay, possédait de temps immémorial le privilège d'enterrer tous ceux qui mourraient dans la trève. Un petit arc de triomphe de tournure Renaissance, portant la date de 1558, donne entrée dans le cimetière. Deux niches renfermant deux anciennes statues en bois encadrent la porte d'entrée appelée « An or varo ». A l'angle sud se trouve un calvaire décapité. Au milieu du cimetière s'élève un autre calvaire d'une tournure plus artistique portant la date de 1645, avec, cette inscription : « HIERONYME CARO : F. ». Autrefois, dit M. Pouchous, on exposait les Reliques à toutes les foires de Pouldavid, sur la pierre qui est au-dessus de cette inscription, et qui était appelée pour cette raison : « Aoter ar Relegou », l'autel des Reliques. Au-dessous des pieds du Christ, il y a un écusson rongé par le temps, avec les armes de Lezarscoët. Le grand vitrail du transept Sud représente le P. Maunoir, debout sur les marches du Calvaire, prêchant aux paroisiens de Kerlaz la grande mission de 1658.
- Ass. Bret : Congrès de Douarnenez, 1965
— Dilasser (Maurice) : Locronan et sa région (Paris, 1979).
Chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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Parmi les sept sablières sculptées de l'église Sainte-Pitère du Tréhou, datant de 1555 environ, se trouve, dans la chapelle latérale sud, en face du retable, une pièce de bois représentant une scène de labour.
Cette dernière nécessite d'être montrée (c'est mon premier but), d'être décrite et analysée (mon deuxième but) avant d'être interprétée ou même comprise. Mais dans cette triple démarche, il est nécessaire de savoir que quatre scènes similaires, mais non identiques, ont été sculptées vers la même époque sur les sablières de Sainte-Marie-du Ménez-Hom, Bodilis, La Roche-Maurice, La Martyre et Pleyben. Les six paroisses se placent sur une ligne nord-sud de 60 km dans le Léon et la Cornouaille.
Dans cette paroisse qui doit sa richesse au commerce de la toile de lin, il serait logique d'y voir une expression du désir des habitants de témoigner de leur activité agricole. Cela va s'avérer plus compliqué.
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La scène elle même est encadrée à sa gauche par un masque de profil avec des tiges de fleurs et feuillages partant de sa bouche, puis un blochet (un ange présentant un phylactère muet). À sa droite, elle se termine contre un blochet d'angle représentant saint Augustin évêque d'Hippone. Je pars du postulat que ces éléments restent étrangers à cette scène du labour et je ne m'y attarde pas.
Voici la vue générale des deux pièces de bois de la sablière S1 :
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Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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Le semeur.
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A gauche, contre le blochet, un homme — un paysan — se tient de face, bras écartés. La main droite est posée sur un sac aussi haut que lui, et la main gauche tient un panier muni d'une barre servant de poignée.
Sophie Duhem y voit "un paysan [qui] sème des graines au Tréhou, derrière la charrue qu'entraîne le laboureur" (Duhem p.238) mais je ne retrouve pas ici le geste du semeur.
Il est vêtu d'une tunique ou veste (chupenn) rouge plissée sous la ceinture de cuir et de chausses blanches; ses cheveux sont serrés par un bandeau (ou recouverts d'un bonnet court).
Faut-il l'intégrer à la scène du labour ? Sans-doute.
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Le geste du semeur de lin est présenté à Quintin le 3 mai 2017 :
Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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La scène de labour.
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La culture des céréales se faisait au moyen d'instruments spécifiques préparant le sol avant d'y enfouir la graine . La première étape, celle de la préparation du sol, diffère peu selon la nature des cultures céréalières, seigle, épeautre , etc. , mais elle est fondamentale . Pour les petites surfaces cette préparation du sol s'effectuait avec des outils manuels, bêche , houe , et pour les autres avec des instruments aratoires tractés par l'animal, il s'agit alors de l'araire et de la charrue.
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Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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Le laboureur et sa charrue.
Le laboureur est penché en avant, un genou fléchi ; cette posture évoque l'effort exercé sur les manches de l'outil mais répond aussi aux exigences techniques d'une figuration sur une poutre étroite.
Il est vêtu d'une tunique courte, peinte ici en rouge, plissée dans sa moitié inférieure au dessous d'une ceinture jaune . Il porte un bonnet sans bords, très court au dessus de cheveux mi-longs. Ses jambes sont couverts par des bas-de-chausses, et le bas des jambes ainsi que les chaussures ne sont pas visibles puisque la partie basse de la sablière n'est pas conservée.
Il tient, par une prise manuelle inversée, les deux mancherons, dont l'écartement est maintenu par une traverse.
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Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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La charrue
Une charrue se distingue de l'araire par la présence d'un versoir, présence dont nous ne pouvons nous assurer ici. Le versoir est une pièce en bois, à l'origine placée d'un seul côté du soc, qui retourne la terre soulevée par celui-ci. Ce retournement ramène à la surface les couches profondes du sol et l'aère . Il enfouit en même temps la partie supérieure envahie de mauvaises herbes. C'est donc la présence ou non d'un versoir qui permet de distinguer les deux instruments et de connaître le degré de préparation du sol. Le coutre est pratiquement obligatoire dans le cas d'une charrue où sa fracture permet de bien séparer la partie du sol qui doit être retournée . La charrue est donc un instrument de travail dissymétrique , c'est la différence essentielle. Elle est généralement munie d'avant-train à roues car cela facilite le travail en donnant plus de possibilités, mais cela n'est pas obligatoire .
Il pourrait s'agir d'un "araire à avant-train à roues". La précision de la pièce sculptée est néanmoins suffisante pour reconnaître les mancherons et le timon. Ce timon est percé de trous et, pour le raccourcir, on modifie l'emplacement de la cheville de traction dans ces trous. Sur cette cheville est accroché un cordage de traction qui est relié avec l'avant-train grâce à une chaîne. La couleur bleu-métal indique le soc ainsi que le coutre.
Rappel :
L'araire est composé de plusieurs éléments : le soc en métal qui ouvre le sol; le sep ou dental, pièce de bois sur laquelle est fixé le soc. Cette partie glisse généralement dans le sol; le timon ou age , une longue tige de bois, droite ou courbe, qui assure la traction de l'ensemble , car il est relié soit au joug soit à l'avant-train; le ou les mancherons, parties en bois que le laboureur empoigne d'une ou de deux mains pour diriger l'instrument et modifier la profondeur du labour. Il est muni d'un coutre, une pièce en métal en forme de couteau fixée sur le timon de telle façon que la partie coupante se trouve près du soc . Il fend la terre en deux quand celle-ci est soulevée par le soc et facilite ainsi le travail de l'araire pour certains sols;
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L'araire.
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Le passage de l'araire à la charrue avec versoir et avant-train à roues s'est produit dans l'Europe du Sud-Est vers le VI-VIle siècle . Même si deux instruments ont été utilisés concurremment et ensemble jusqu'au XXe siècle selon les régions et la nature des travaux, partons du postulat qu'il s'agit d'une charrue, vu l'ampleur de son attelage.
Une araire : BnF Latin 14267, fol. 157, Décor marginal Petrus Lombardus (1095?-1160?). 1175-1200
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Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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La suite de la charrue : l'avant-train et son timon.
Le timon repose sur un avant-train à roues, sur lequel il pivote entre deux traverses verticales. L'effort de traction des animaux s'effectue sur cet avant-train. Un "timon d'avant-train" prend la suite, et se termine par une traverse en T permettant l'attelage de la première paire de bœufs grâce à des cordages.
Ces cordages arrivent de part et d'autre de la tête des bœufs, peut-être sur un collier, bien qu'un joug ait peut-être disparu.
Ensuite, le timon se poursuit, de façon moins analysable pour moi. Il passe, par l'intermédiaire sans doute d'un très gros câble dont nous voyons les brins torsadés et le sertissage bleu-métal. Il s'articule à un joug qui accouple la deuxième paire de bœufs.
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Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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Il faut étudier la charrue, mais aussi les hommes qui l'utilisent, et, pour cela, nous devons passer en revue les divers documents iconographiques. Outre le conducteur, les mains appuyées sur les mancherons, nous voyons parfois un guide, placé à coté des animaux qu'il dirige d'un fouet.
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La charrue peinte dans les Très Riches Heures du duc de Berry (1440), miniature du mois de mars, musée Condé, Chantilly, ms.65, f.3 :
Nicolas de Lyra, Postilles sur la Genèse, Italie, entre 1395 et 1402, Paris, BN. Ms. lat. 364, f° 9.
http://mandragore.bnf.fr/jsp/classementThema.jsp
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-BnF Français 598, fol. 11, Cérès . 1403. Giovanni Boccaccio, (Boccace (1313-1375). ) De Claris mulieribus, traduction anonyme en français Livre des femmes nobles et renommees par le Maître des cleres femmes (13..-14..). Enlumineur Maître du Couronnement de la Vierge.
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L'attelage à deux paires de bœufs , + un bœuf de tête.
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Un attelage est tiré soit par des chevaux (qui nécessitent une plantation d'avoine), soit, comme ici, par des bœufs.
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Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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La tête de l'attelage : l'accident.
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L'animal de tête (un bœuf a priori), attelé par un collier, est représenté incliné et comme soulevé tandis que ses pattes antérieures et son museau sont posés sur le bassin et le buste d'un personnage allongé, face tourné vers le haut.
Les bœufs tirent l'attelage en baisant la tête, ce qui justifie sans doute la présence d'un guide latéral ou de tête, et il est évident que celui (un valet de ferme) qui assure ce poste encoure de grands dangers. Ici, je pose l'hypothèse que l'homme a été renversé par le bœuf de tête, et qu'il a été grièvement blessé, ou qu'il a perdu la vie.
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Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
Sablière S1, mur ouest de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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Blochet : saint Augustin.
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Blochet de la chapelle latérale sud de l'église Sainte-Pitère, Le Tréhou (29). Photographie lavieb-aile septembre 2017.
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DISCUSSION.
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Nous constatons le regroupement spatial et temporel de 6 scènes de labourage sculptées sur des sablières dans le Finistère entre 1555 et 1575. Les 3 dernières sont attribuables au même artiste anonyme, désigné sous le nom de "maître de Pleyben". Les 6 paroisses sont situées en Haute-Cornouaille ou Bas-Léon, dans un rayon de 60 kms. Maps. La période correspond à l'âge d'or des Enclos Paroissiaux, âge d'or lui-même en relation avec la prospérité économique liée à la production, au tissage et et au commerce du lin et du chanvre. Les charrues sont de même type (un type qui n'a d'ailleurs connu d'évolution notable entre le Moyen-Âge et le XIXe) mais les attelages sont différents dans les 6 cas, par les animaux (chevaux ou bœufs) de trait ou par leur montage, procurant ainsi de précieuses données d'ethnologie rurale.
La raison d'être de ces scènes est, vraisemblablement, le désir des paroissiens de faire figurer leur activité et source d'enrichissement, désir accru par une émulation mimétique entre clochers.
Mais dans 3 cas (Le Tréhou, Sainte-Marie du Ménez-Hom et Pleyben), c'est un accident qui est montré, par lequel un des guides de l'attelage est écrasé par les animaux. Nous ignorons comment interpréter cela. Nous pouvons écarter l'interprétation donnée à Sainte-Marie du Ménez-Hom, certainement tardivement, et qui y voyait un miracle en lien avec le motif adjacent de cette sablière, une Fuite en Égypte. Ces trois scènes sont-elles commémoratives, soit d'un événement dramatique, soit d'une répétition locale de ce type d'accident.
Il serait précieux de s'assurer que ce thème n'a pas été représenté ailleurs en France, sur les sablières ou sur un autre support, ou décrit dans la littérature de l'époque.
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Récapitulatif du corpus.
a) Église du Tréhou v.1555. charrue à avant-train à roues, attelage de 2 paires de bœufs et 1 bœuf de tête, conducteur + 1 guide de tête, renversé par le bœuf.
b) Église Saint-Salomon de La Martyre (1560?).Charrue à avant-train à roues, et attelage à 2 chevaux + 2 bœufs + 2 chevaux +un maître d'attelage en tête. Pas d'accident.
c) église de La Roche-Maurice (vers 1560). Charrue à avant-train à roues, et attelage à 2 paires de chevaux +un maître d'attelage en tête. Pas d'accident ?.
d) Église de Bodilis. I. (Maître de Pleyben?, 1567).
Charrue à avant-train à roues, attelage à 4 chevaux. Un conducteur,1 guide de tête et un semeur en avant. Pas d'accident.
e) Chapelle Sainte-Marie du Ménez-Hom (Maître de Pleyben v.1575). Charrue à avant-train à roue, attelage de 4 chevaux un conducteur, 2 guides et un 3ème écrasé par l'attelage.
f) Église de Pleyben ( Maître de Pleyben vers 1571) : haut de la nef coté sud. Charrue à avant-train à roue, attelage à 2 chevaux en couple + 1 cheval de tête. Un conducteur + un guide latéral. Accident (emballement du cheval de tête et écrasement du guide.
Sablières (1567) de la nef de l'église de Bodilis. Photographie lavieb-aile août 2017.
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Sablières de Sainte-Marie du Ménez-Hom. Photo lavieb-aile.
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Sablière (vers 1571) du haut de nef, coté sud, de l'église de Pleyben.
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ANNEXE.
Ma description de la sablières de Pleyben.
La mort accidentelle du paysan écrasé par son propre attelage .
c) Le motif. Après avoir observé les sablières de la chapelle Sainte-Marie-du-Ménez-Hom (Plomodiern), il est facile de reconnaître l'épisode de la mort accidentelle du paysan écrase par son attelage, qui côtoyait, là-bas, la Fuite en Égypte. Car la victime, étendue visage épouvanté tourné vers le ciel, était plus facilement identifiable. Ici, c'est par analogie que l'on comprend que l'homme qui lève les bras juste derrière les chevaux a les jambes écrasées par la roue de la charrue, coincé entre le palonnier et la roue, et que son collègue assiste au drame en témoignant de son impuissance par ses bras écartés. Cet accident a peut-être été causé par l'étourderie du chef d'attelage, qui, au lieu de regarder ce qu'il fait, s'est retourné vers l'arrière pour observer dans le ciel quelque chose (mais certainement pas le blochet, qui n'appartient pas à ce récit).
L'attelage à trois chevaux qui a été choisi associe deux chevaux de front, et le troisième devant les deux autres. Ce dernier, "qui marche dans la raie", et qui est trop éloigné pour être accessible au fouet du conducteur, n'est pas placé entre les deux chevaux noirs, mais sur le coté droit.
Les chevaux sont attelés grâce à un collier d'épaule. Ils n'ont pas de mors.
La charrue à roue.
Les parties métalliques sont peintes en gris anthracite. La charrue se compose du "coultre tranchant" qui ouvre la terre et coupe verticalement la tranche à renverser, frayant le chemin au soc. La bande de terre est alors tranchée par l'aile du soc, qui casse les tiges, puis basculée vers la droite par le versoir. La charrue est guidée par deux mancherons (comme à Sainte-Marie-du-Ménez-Hom) ou par un seul (comme ici). Le laboureur appuie dessus pour faire pénétrer le soc. Coultre et soc sont réunis à l'age, ou perche.
Le sillon, tranchée ouverte dans le sol par la charrue, se nomme "raie". Et on nomme "guéret" la partie non encore labourée.
On distingue dans l'avant-train des charrues la roue de raie et la roue de guéret . La première roulait dans la raie, la seconde sur la terre non encore fraîchement labourée, c'est-à-dire sur l'ancien guéret.
Il reste quelque chose à comprendre. Les trois chevaux ont au moins une patte posée sur un élément architectural polygonal grisâtre (qui n'existe pas à Plomodiern). Le cheval de tête, qui a franchi cet obstacle, s'est emballé. Le cheval noir redresse la tête et semble hennir.
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Le chanoine Abgrall avait indiqué, dans son analyse de cette scène à Sainte-Marie-du Ménez-Hom,, placée à coté de la Fuite en Égypte, "La tradition du pays dit que c'est la traduction d'une légende d'après laquelle ces gens, labourant leur champ, se seraient moqués de la Sainte Vierge et de saint Joseph fuyant en Égypte, et auraient été punis sur le coup et blessés par leur chevaux pris d'une terreur panique.". Mais cette explication, suscitée sans-doute a posteriori aux habitants par la proximité des deux motifs, ne tient plus à Pleyben, où la Fuite en Égypte n'est pas représentée. D'autre part, cette tradition locale n'a jamais été confirmée par une autre source.
A défaut de comprendre avec exactitude à quel récit ou quelle fable morale fait allusion ces deux scènes, je propose d'y voir l'illustration de la "mort accidentelle", telle qu'elle peut survenir pour frapper n'importe qui, menaçant d'emporter en Enfer un paroissien de Pleyben (en majorité des agriculteurs) s'il n'est en règle avec les exigences de l'Église.
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SOURCES ET LIENS.
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— APEVE
Sablières et statues : http://www.apeve.net/spip/spip.php?article141
"Le premier grand changement est apporté vers la fin du VIIIème siècle avec l'introduction de l'assolement triennal, en remplacement de l'assolement biennal pratiqué depuis l'Antiquité. Il fonctionne de manière collective avec l'aménagement d'un saltus – friche, terre non cultivée, réservée à l'élevage – en proximité des forêts. La terre se régénère sur une durée plus longue et est fertilisée par l'élevage. Associée à la charrue, qui apparaît vers la même période, le défrichement va connaître un essor sans précédant à la période carolingienne. Son usage est attesté dès le Ve siècle, mais c'est avec la révolution agraire qu'elle va vraiment se répandre dans toute l'Europe. Contrairement à l'araire qui ne fait que scarifier la terre, la charrue est munie d'un versoir latéral qui rejette la terre, la retournant et créant ainsi un sillon plus profond. Associée à l'utilisation du fumier, elle va permettre de réellement augmenter le rendement. Le joug réservé aux seules bêtes à cornes depuis l'Antiquité, va être adapté ainsi au cheval et l'attelage a évolué progressivement depuis la fin de l'Empire romain." (blog Les dits de Fardoise http://fardoise.eklablog.com/la-revolution-technologique-du-moyen-age-1-le-monde-rural-a114630558)
— DUHEM (Sophie), 1997, Les sablières sculptées en Bretagne: images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérité bretonne (XVe-XVIIe s.), Presses universitaires de Rennes, 1997 - 385 pages, pages 169, 220, 231 à 236, etc.
"Le corpus rend compte du grand changement qui s'opère dans l'habillement autour du second quart du XVIe siècle. Jusqu'à cette époque, les vêtements portés sont conformes aux modèles de la garde-robe bas-médiévale européenne.
Le vêtement que porte l'homme du peuple à la fin du Moyen Âge est assez stéréotypé : il s'agit presque toujours d'une chemise ou jaque à manches longues, portée assez près du corps, fermé sur le devant par de gros boutons : ces derniers sont représentés avec précision par Jean Jouhaff à Trédrez, et remplacés à Grâces-Guingamp (1506) par un système de lacets croisés. Cette chemise, en général retenue à la taille par une ceinture (à La Martyre, Plougras, Le Quillio, Trémel (Ch. De Locquéméau), entre autres exemples) où sont parfois glissés des objets (à Clohars-Fouesnant, La Roche-Maurice, Le Quilio), est portée sur une culotte serrée ou sur des collants « bas-de-chausses ».
Plusieurs modèles de chaussures apparaissent sur les décors. A Morlaix, un homme est chaussé de bootillons noués sur la cheville par des lacets, à Loc-Envel, un autre porte des souliers ouverts retenus par une bride passée sur le coup de pied, à Guimaëc, La Martyre et Ploërmel, les personnages ont des bottes hautes, dont l'usage était sans-doute plus fréquent chez les paysans aisés.
Chapeaux, bonnets, ceintures et chaussures sont les rares accessoires représentés sur les décors, en plus de deux exceptionnelles paires de lunettes sculptées sur les sablières conservées au Musée Dobrée à Nantes, et dans l'église de Loguivy-Plougras.
La plupart des individus sont coiffés de chapeaux à bords relevés, les autres de chaperons dont l'usage semble tardif comme en témoignent les petits pêcheurs des sablières de la chapelle Saint-Trémeur à Cléden-Cap-Sizun (1554) et le laboureur de l'église de Bodilis (1567). Nous n'avons d'ailleurs pas noté de changement notable dans cette tenue « de base » parfaitement adaptée aux travaux manuels et utilisée semble-t-il sans interruption jusqu'à la fin du XVIe siècle.
Un autre type de vêtement apparaît sur les frises, dont l'emploi paraît aussi répandu que celui de la précédente tenue. Plusieurs personnages portent une tunique longue, ou robe courte, serrée à la taille par une ceinture. Quelques exemples ont été relevés sur des reliefs bas-médiévaux, et sur plusieurs sablières datées du XVIe siècle, voire plus tardives : les hommes vêtus de la sorte sont des paysans ou des laboureurs sur les poutres de La oche-Maurice, du Tréhou, de Guengatet de Magoar, et des musiciens, à Callac, Pluméliau et Cléguérec.
Alors que le vêtement populaire, la « tenue de travail », ne semble pas connaître de grands changement d'aspect jusqu'à la fin du XVIe siècle, les vêtements portés par les représentants des classes privilégiées sont, au contraire, plus variés." S. Duhem 1997 Page 233-234 :
— ENLUMINURES : labour à la charrue ; labour et semailles
a) Sur Mandragore :
-Français 138, fol. 13, Jason semant les dents du dragon
-Français 331, fol. 106v, Jason semant les dents du dragon
-BnF Français 598, fol. 11, Cérès . 1403. Giovanni Boccaccio, (Boccace (1313-1375). ) De Claris mulieribus, traduction anonyme en français Livre des femmes nobles et renommees par le Maître des cleres femmes (13..-14..). Enlumineur Maître du Couronnement de la Vierge.
—POLGE (Henri), 1967, L'amélioration de l'attelage a-t-elle réellement fait reculer le servage ? Journal des Savants Année 1967 1 pp. 5-42 Fait partie d'un numéro thématique : Janvier-Mars 1967
"Tout charroi animal suppose en tout temps et en tout lieu :
1° une surface ou un périmètre de déplacement, exploitation agricole, carrière de marbre, cirque, rue, route x, etc. ;
2° une, deux ou plusieurs bêtes de trait, habituellement des solipèdes ou des bovidés, plus rarement des cervidés ou des caméliens, des chiens, etc. Animaux qui diffèrent entre eux par leurs aptitudes naturelles et aussi, le cas échéant, par l'idée que l'on s'en fait ;
3° un dispositif d'attelage (attache des animaux et attache du véhicule) ;
4° une, deux, trois ou quatre roues, exceptionnellement plus, et une charge plus ou moins bien disposée par rapport à elles ;
5° un, deux ou plusieurs véhicules (train) qui diffèrent de construction selon les époques et de conception selon les usages auxquels on les destine ;
6° un, deux ou plusieurs conducteurs qui ont pour mission de stimuler, de guider, de freiner et d'arrêter le véhicule, soit qu'ils marchent à côté (petites vitesses), soit qu'ils se fassent porter (plus grandes vitesses) ;
7° un dispositif de freinage permettant d'agir soit sur les bêtes de trait, soit sur la voiture, soit sur les deux à la fois ;
8° éventuellement des accessoires divers, actifs (comme un tortoir) ou passifs (comme un marche-pied, un porte-fainéant, un siège, etc.).
Pour tendre les traits, le bœuf baisse la tête ; s'il sent une résistance accrue, il appelle sur son avant-train la majeure partie de sa masse tandis que son train postérieur ne sert qu'à donner au corps l'impulsion progressive (en marche arrière il est mal à l'aise) ; au contraire le cheval emploie sa force musculaire à s'appuyer plus ou moins fortement sur la bricole ou le collier au point qu'il tombe en avant si les traits viennent à se rompre. Il s'appuie sur les pieds de devant, mais plus fortement encore sur ceux de derrière, si bien qu'à la limite de son effort les pieds de devant touchent à peine le sol et qu'il a tendance à se cabrer. Donc le joug pour le bœuf et le collier d'épaules pour le cheval semblent les instruments de tirage les mieux conditionnés.
En longueur un attelage trop étiré vire difficilement, surtout en montée, où les animaux intermédiaires, entre la tête et la queue, risquent d'être déportés sur la corde, tandis qu'en descente, sauf frein efficace agissant sur le véhicule, les bêtes de timon peuvent être amenées à bousculer les bêtes de volée "
— TRÉPOS (Pierre), 1961, Enquêtes sur le vocabulaire breton de la ferme , Annales de Bretagne Année 1961 Volume 68 Numéro 4 pp. 601-698
Le Tréhou est situé dans le centre nord du département du Finistère, à l'ouest des Monts d'Arrée ; les altitudes les plus élevées se trouvent dans la partie sud-est du finage communal, atteignant 172 mètres à l'est-nord-est de Bodénan, mais descendant jusqu'à 36 mètres dans la partie aval de la vallée du fleuve côtier la Mignonne (ce cours d'eau limite au nord la commune), à l'ouest de la commune ; le bourg est vers 97 mètres d'altitude. Les vallées de la Mignonne et de plusieurs de ses petits affluents de rive gauche, notamment le ruisseau du Moulin du Pont, qui ont leur source pour la plupart dans la commune, encaissées, échancrent assez profondément le territoire communal qui est très vallonné.
Le paysage rural est traditionnellement bocager avec un habitat dispersé en hameaux et fermes isolées.
Le nom de la commune apparaît au xive siècle. Le Tréhou est probablement issu du morcellement de la paroisse de Ploudiry. Le nom de la localité est attesté sous les formes Treffou vers 1330, Trevou en 1363, Treffvou en 1446, Treffou en 1467 et 1618, Treffuou en 1481 et Le Treffvou en 1521. Le Tréhou vient du breton trevou (« la paroisse »)
La paroisse du Tréhou faisait partie de l'archidiaconé de Léon relevant de l'évêché de Léon et était sous le vocable de Sainte-Pitère, sous le patronage de Sainte Piterre. Elle avait comme trèves Tréflévénez érigée en paroisse en 1801 et Tréveur (ou Trévéreur), qu'elle a absorbée.
La culture du lin a été pendant longtemps la richesse du pays. Ce sont les juloded, paysans-marchands, producteurs du lin, qui dirigeaient la commune. Le Tréhou était au XVIIIe siècle au cœur de la zone toilière du Léon consacrée à la culture et à la transformation du lin et du chanvre : 27 kanndi y ont été dénombrés à ce jour ; selon les inventaires après décès la fréquence des métiers à tisser y était de 141,3 pour 100 inventaires, même si le lin n'y était apparemment assez peu cultivé et devait être souvent acheté ailleurs. Parmi les paysans-marchands, Guillaume Le Sanquer, de Leslurun, dont la fortune s'élève lors de son décès en 1727 à 23 738 livres selon son inventaire après décès ; celle d'un homonyme, décédé en 1733, s'élève à 27 788 livres et il donnait du travail à plusieurs tisserands.
Repérable dès le XVe siècle, cette zone connaît son apogée au début des années 1680. Aux XVIe et XVIIIe siècles, époque des grands commerces entre la Bretagne et l’Angleterre, la Hollande, l’Espagne et l’Amérique latine, alors que toutes les voiles des bateaux sont tissées en lin et en chanvre, les toiles crées, fabriquées dans le Haut-Léon, vont bénéficier d’un quasi-monopole sur le marché européen, créant ainsi une prospérité sans égale. Elle est le fait d’une petite caste de paysans-négociants, les juloded en breton, qui commercialisent leurs toiles essentiellement vers l’Angleterre via les ports de Morlaix principalement et de Landerneau. Par exemple en 1743, Morlaix reçoit 34 197 pièces de 100 aunes (soit 122 mètres) et Landerneau 10 027 ; en 1788, Morlaix en reçoit 18555 et Landerneau 2356.
Ils exploitent aussi des fermes dont la taille moyenne est de 15 à 40 ha alors que celle des autres paysans est alors, par exemple à Ploudiry, de 7 à 8 ha.
« La quasi-totalité de la production toilière est le fait de tisserands ruraux, et surtout de paysans-tisserands. Ceux-ci venaient prendre livraison du fil chez leur paysan-marchand, et ils revenaient quelques semaines plus tard rapporter leur pièce de toile. Il fallait environ un mois pour fabriquer une pièce de 122 mètres. En 1788, la zone toilière du Léon comptait un peu plus de 400 paysans-marchands et quelque 3 000 métiers à tisser (...) [Cette zone toilière] fabrique annuellement 80 000 pièces de toile de lin, soit près de 10 000 kilomètres. »
Les marchands toiliers constituent alors l’élite sociale de la région : les "julots" (en breton juloded), à l’imitation des marchands hollandais de Morlaix, les "Julius". Implantés uniquement dans le Léon méridional ou Haut-Léon, proche des Monts d'Arrée, cette aristocratie paysanne (on parle parfois de "demi-nobles"), pratiquaient une véritable caste à très forte endogamie et jouèrent un rôle important lors de la « Renaissance bretonne », construisant églises avec un riche mobilier, calvaires et enclos paroissiaux, y compris à Plounéour-Ménez, même si ceux de certaines paroisses voisines sont plus célèbres. Ce sont ces juloded enrichis qui ont financé la construction et la réalisation des enclos paroissiaux du Léon, manifestation la plus visible de leur prospérité.
"Le lin est en Bretagne une culture de printemps, semé traditionnellement aux alentours de la Saint-Georges (23 avril) ; il fleurit aux environs de la Saint-Pierre (sa fleur, couleur bleu lavande, ne dure guère plus d'une journée) et il est prêt à être récolté vers le 14 juillet. C'est une plante qui a besoin de beaucoup d'eau pour croître et qui aime des terres légèrement acides.
1ere année sarrazin semé en juin et récolté en septembre, 2ème année seigle ou froment semé en octobre ou novembre, 3ème année avoine
Dans le Léon, au Nord-Finistère, on peut toujours découvrir des maisons buanderies (ou kanndis) qui permettaient de blanchir les écheveaux de fils de lin. Il s'agissait de petites bâtisses en matériaux locaux, schistes ou granites. Elles comportaient un bassin alimenté en eau par un ruisseau et destiné à rincer le fil blanchi. Le blanchiment du fil de lin s'opérait avec de la cendre de hêtre, dans une cuve alimentée par de l'eau chauffée à la cheminée.
Environ 50 kanndis ont été retrouvés dans le pays de Landerneau- Daoulas et certains font l’objet d’un projet de restauration.
Dans les Côtes d'Armor, de nombreux villages recèlent encore des routoirs, bassins en pierre où l'on faisait rouir le lin. Ils étaient sur le trajet d'un cours d'eau et le rouissage avait lieu à ciel ouvert. Des pierres posées sur des planches permettaient de maintenir le lin immergé. Une quinzaine de jours suffisaient pour séparer les éléments fibreux et ligneux de la plante par dissolution de la pectine.
Au 19ème siècle, près de 3000 routoirs ont été dénombrés dans la région de Lannion. Depuis 2012, l'office de tourisme de la presqu'île de Lézardrieux propose des randonnées pédestres sur une boucle de 21 routoirs à lin.
Les musées présentent également de nombreux objets liés au lin: peignes à égrener le lin, brayes à lin pour broyer manuellement les tiges, broyeurs mécaniques ou moulins flamands, rouets, métiers à tisser, presses à lin, armoires à deux battants pour conserver les biens précieux de la maison dont certaines pièces de lin.
Un patrimoine bâti est toujours présent et témoigne d'un passé actif. On peut ainsi voir dans le Trégor des moulins à teiller le long des principaux cours d'eau: le Léguer, le Jaudy, le Trieux...
Enfin, le commerce des toiles a enrichi des négociants qui ont construit de belles demeures et contribué à la richesse du patrimoine religieux: chapelles, églises, enclos paroissiaux."
— WIKI-BREST : Histoire de la culture du lin dans le Pays de Landerneau
La charpente sculptée (sablières et abouts de poinçon vers 1535, 2 pièces de sablières par le Maître de la nef de Plomodiern au milieu du XVIe siècle) de la nef chapelle Saint-Tugen de Primelin.
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Voir :
—Sur les réalisations semblables à celles de l'église de Plomodiern en 1564 ("Jean Brellivet" ou maître de la nef de Plomodiern) :
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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PRÉSENTATION
Au lieu-dit Saint Tugen, sur le site d’une ancienne chapelle tréviale mentionnée en 1118, l'édifice actuel, long de 29m et large de 25m et dominé par une tour monumentale haute de 28m, a été construit vers 1535 par René du Menez seigneur de Lézurec et son épouse Marie du Fou. Devant l’affluence des pèlerins, il a été agrandi plusieurs fois entre 1610 et 1750. Marguerite d’Angoulême, sœur de François Ier et grand-mère d’Henri IV, y vint en pèlerinage. On trouve des dates inscrites, comme " 1584 " dans la chambre des cloches, ou "1595", sur une porte de la pièce nord de la tour, avec le nom du recteur Henri Capitaine. La tour porte aussi les dates (C. Toscer) de son commencement en 1569 ["K.C. 1659" sur la tourelle d'escalier selon Abgrall ]et de son achèvement en 1582.
La chapelle nord a été considérablement agrandie en 1611 par les soins de l'arrière-petit-fils du fondateur, Alain du Ménez, gouverneur d'Audierne et époux de Marie de Gourcuff, et nous trouvons les inscriptions à cette date avec les noms des fabriciens D. Mérour et F. Moal à l'extérieur de la porte nord . En 1663, Estienne Ansquer fait graver son nom sur le bois de la porte du porche avec son titre de fabricien. La sacristie fut construite en 1720-1721, et puis ensuite, de 1749, 1750, 1760 à 1773, la chapelle sud fut très remaniée ; le fabricien de 1750, Brénéol et celui de 1760 Yves Follic ou Follec y ont inscrit leur nom avec la mention "honoré homme".
Jean Brénéol, fabricien en 1766, a fait inscrire son nom dans la pierre à l'extérieur près de la porte.
Également à l'extérieur, sur le mur de la sacristie I. Brechonnet se signale, sans date, comme fabricien sous un buste d'homme surgissant de la façade.
Des lambris portent des peintures datées : un mariage porte la date de 1705 et le nom du "fabrique" Yves Poulhasan. Un Baptême porte l'inscription "Messire I. Gloaguen curé de Primelin en 1705 baptise cet enfant nay depuis un moment" Un cycle du Baptême du Christ, de la confirmation et de la confession sur la clôture des Fonts, datée de 1679 porte le nom du recteur Messire Yann Perennes et du fabricien Hervé Ploinec. Auparavant, en 1674, le même recteur Jean Pérénnès avait fait exécuter un ciel étoilé, Pierre Guéguen étant le fabricien de l'année. Et le même recteur a demander à un peintre Parader (Barader) une allégorie de la confirmation.
Le chanoine Abgrall signale aussi l'inscription Ian : Bitar : 1709 : F. sur le lambris
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Quand la chapelle fut classée le 23 juillet 1909, il était temps, car elle était alors, dit-on, dans un état lamentable. Elle fut restaurée avec le concours des fidèles et d'un ancien missionnaire à Haïti, l'abbé Yves Velly.
Le matériel héraldique est riche. Notamment, de nombreux blasons sont présents sur les abouts de poinçons : ceux des familles du Menez (seigneurs de Lézurec en Primelin) , Autret (seigneurs de Lézoualc'h en Goulien) , Keridiern (en Cléden-Cap-Sizun) , Saluden (seigneur de Kerazan en Cléden) , et d'autres non identifiés.
C'est un édifice de plan irrégulier précédé du massif de la tour, et comprenant un vaisseau de quatre travées avec bas-côtés et chevet plat. Au nord, au droit des trois dernières travées, une vaste chapelle en aile est recoupée transversalement par deux arcades. Au sud, au droit de la dernière travée, une chapelle en aile, sur laquelle s'ouvre la sacristie, est alignée à l'est, comme la chapelle nord, sur le chevet de la nef.
"La nef, du type obscur, est lambrissée sur toute sa longueur. Les grandes arcades en tiers-point, de hauteur et de largeur différentes, ont leurs voussures pénétrant directement dans les piliers octogonaux. Les deux arcades édifiées en 1611, transversalement à la nef, lors de l'agrandissement de l'aile nord, sont en plein cintre avec importante clef en console. Elles reposent sur de courtes colonnes ioniques montées sur de hautes bases à corniches saillantes. Les chapiteaux ont leur tailloir décoré de volutes très développées. La plupart des fenestrages flamboyants accusent le début du XVIe siècle, mais une petite fenêtre du XIVe a été remployée dans l'aile nord. " (R. Couffon)
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La datation de la construction de l'édifice est importante pour préciser celle des sablières. Or la date de 1535 communément donnée n'a pas (Tosquer) de confirmation écrite. Mais elle est épaulée par une pièce d'archive de 1539, qui mentionne la présence de cinq prêtres desservants la chapelle, preuve de son importance déjà grande, et de l'existence d'une couverture.
La charpente de la nef, à lambris peint, est rythmée par cinq entraits, à engoulants et nœuds sculptés, ainsi que par des nervures qui sont animées chacune par des abouts de poinçons en deux rangées latérales à mi-hauteur et un rang central. Je désignerai ces entraits de I à V d'est en ouest.
J'ai compté 23 ou 24 de ces nervures (on multipliera ce chiffre par 3 pour évaluer le grand nombre des abouts de poinçon, et le travail de bénédictin de leur description exhaustive reste à faire), mais leur régularité est interrompue, entre les entraits II et III par deux nervures jumelles (très rapprochées) qui correspondent à la présence d'un blochet des deux cotés. C'est précisément à partir de ces blochets que le style des sablières se modifie brièvement, vers l'ouest, pour deux pièces sculptées par le Maître de la nef de Plomodiern vers 1544. Tout le reste appartient au style à masques espacés, un peu plus précoce.
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Aucun des auteurs de monographies ou notices n'a décrit cet ensemble sculpté de la charpente : ni Chaussepied en 1809, ni Velly en 1930, Couffon en 1988 et, ni Cosquer en 1987.
Sophie Duhem, dans son étude des sablières de Bretagne, signale la chapelle Saint-Tugen à plusieurs reprises, mais ne donne pas de description détaillée de ses pièces. C'est néanmoins elle qui en ordonne le corpus en deux ensembles et qui attribue deux pièces à celui qu'elle nomme "Jean Brellivet" (maître de la nef de Plomodiern" pour moi), et c'est elle qui décrit les ateliers de menuisiers-sculpteurs de sablières très actifs en Finistère sud au début et milieu du XVIe siècle (cf. extraits infra).
Ma propre description ne sera que partielle, car basée sur des photos trop vite prises lors d'une excursion de la SAF.
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I. LES SABLIÈRES À MASQUES ESPACÉS ( VERS 1535 ).
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Au début du XVIe siècle, un artiste anonyme actif en Cornouaille adopte pour le décor sculpté des sablières un style où celles-ci ne sont sculptées que par intervalle, de masques et de feuillages sur la pièce de bois qui est, sans l'intervalle, lisse et simplement moulurée. On trouve des exemples de ce style tout près d'ici, dans la chapelle du Rosaire de l'église de Pont-Croix, mais aussi, selon S. Duhem, dans l'église de Combrit et , plus loin à l'est du Finistère, dans celle de Plonévez-du-Faou.
Ici, dans la chapelle Saint-Tugen de Primelin, ces masques correspondent à la retombée des nervures du lambris peint. Je numérote ces nervures, et donc ces masques, de 1 à 24 d'est vers l'ouest.
Les nombreux abouts de poinçon sont sans doute contemporains de ces sablières.
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Sud, nervure 1 : une rose.
Sud, nervure 2 : deux masques siamois
Sud, nervure 3 : une barque de pêche à trois matelots.
ENTRAIT I engoulé, décor à perforation. Poutre en deux portions assemblées par un trait de Jupiter. Poulie au centre.
Sud, nervure 4 : 2 masques barbus.
Sud, nervure 5 : feuille d'acanthe.
Sud, nervure 6 : une rose (4 sépales, 4 pétales, un cœur)
Sud, nervure 7 : un masque humain, coiffé d'un béret, bouche triste.
ENTRAIT II, engoulé; Noeud à deux dragons (perforations)..
Sud, nervure 8 : feuille.
Sud, nervure 9 : masque humain barbu.
Sud, nervure 10 : masque humain à coiffure en U inversé.
Sud, nervure 11 (jumelle) : blochet : tête de lion.
Sud, nervure 12 et 13 : deux dragons (style du Maître de la nef de Plomodiern)
Nord, nervure 10 contre le blochet : masque léonin, bandeau occipital.
Blochet : gueule de dragon, décor à perforations.
Nord, nervure 12 et 13 : deux dragons et médaillons (style du Maître de la nef de Plomodiern)
ENTRAIT III engoulé.
Nord, nervure 14 : feuille.
Nord, nervure 15 : écu.
Nord, nervure 16 : feuille à volutes latérales
ENTRAIT IV engoulé.
Nord, nervure 17 : à préciser
Nord, nervure 18 : à préciser
Nord, nervure 19 : masque de femme bouche ouverte.
Nord, nervure 20 : rose.
ENTRAIT V, engoulé.
Nord, nervure 20 sur l'entrait : feuille
Nord, nervure 21 masque humain cheveux en masses latérales.
Nord, nervure 22 : masque humain coiffé d'un bonnet.
Nord, nervure 23 contre le mur. Feuille d'acanthe.
Blochet : gueule de lion
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Les nervures 3 et 4 et leurs sablières.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sud, nervure 2 : deux masques humains accolés.
Ces gueules patibulaires à la bouche de travers et aux yeux torves sont néanmoins civilement coiffés d'un bonnet.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Une barque de pêche et trois pêcheurs.
C'est l'un des motifs les plus originaux de la chapelle, et un autre exemple a déjà été analysé dans le chevet de l'église de Pont-Croix (mais dans la partie créée par le Maître de la nef de Plomodiern, vers 1544).
Cette barque à clins, sans gouvernail visible, laisse apparaître les têtes de trois matelots, à qui les yeux exorbités (maladresse de sculpteur ou parti-pris ?) confèrent des allures de revenants. Elle relève, de la part des paroissiens commanditaires (représentés par le fabricien) du désir de souligner l'importance du milieu maritime dans leurs modes de vie, puisqu'à l'époque, et pour toute la région du Cap Caval de Penmarc'h à Audierne et Cap Sizun, le commerce par de forts rouliers, et la pêche permettent un développement économique considérable.
L'agrès visible à l'avant est vraisemblablement le mât, rabattu pour la pêche et visible également à Pont-Croix.
Les sablières de 1553 de la chapelle Saint-Trémeur de Cléden-Cap-Sizun en offrent également un exemple où l'on retrouve la barque à clins, les trois pêcheurs, le mât incliné (mais aussi des poissons):
Sablières (v. 1544) du chevet de l'église Notre-Dame de Roscudon à Pont-Croix. Photographie lavieb-aile.
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Sablières de Saint-Trémeur à Cléden-Cap-Sizun? Photo H. Moreau Wikipédia
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sud, nervure 7 : un masque humain, coiffé d'un béret, bouche triste.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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L'entrait n° II : engoulants et nœud sculpté.
Cet entrait est remarquable par les deux gueules de dragons ou engoulants, avec les perforations au foret qui rendent les verrucosités de leur pelage, mais surtout par le nœud (sculpture centrale) ou deux petits dragons s'affrontent gueule à gueule.
Leurs ailes aux pennes taillés à la gouge ronde, et les multiples perforations des sinuosités serpentines de leur corps fin entrainent une confusion dans la lecture des formes, confusion tout à fait conforme au projet global de l'artiste, qui jette le trouble dans nos esprits rationnels pour nous emmener dans un monde intermédiaire et autre.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sud, nervure 9 : masque humain barbu.
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Ce visage est encadré par une chevelure et une barbe dont les mèches identiques sont repoussés par un vent frontal pour former une véritable crinière de lion. Et la taille du bois pour rendre ces mèches, en forme de 9, sera utilisée aussi pour les lions qui apparaitront plus loin.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sud, nervure 10 : masque humain à coiffure en U inversé.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sud, nervure 15 : masque féminin sous une coiffe.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sud, nervure 18 : masque humain, femme échevelée.
C'est encore le même procédé d'animalisation de l'humain : le visage à l'ovale pur de la femme est encadré par des longues mèches enchevêtrées qui évoquent immanquablement des serpents.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sud, nervure 19 : feuille d'acanthe.
Cette élégante feuille aux bords frisés peut évoquer une étoile.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Le coté nord.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Nord, nervure 7 : masque humain crachant deux feuilles.
Bois polychrome, jaune pâle et bleu.
Cf infra.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Nord, nervure 5 : lion couché, tête tournée à gauche, queue revenant sur le dos.
Bois, polychromie jaune, bleu et rouge . La queue passe entre les pattes postérieures pour revenir sur le dos, où le fouet étale ses trois branches. La patte postérieure est marquée d'entailles de gouges pour rendre les mèches de pelage. La crinière est figurée par des rangées de volutes en 9999, dont le centre est peint de bleu. La gueule débonnaire du lion est ouverte sur une balle rosée qui est la langue. Il existe de fortes affinités entre cette façon de sculpter les lion, et celle utilisée par les tailleurs de pierre sur les façades et les crossettes des chapelles.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Nord, nervure 6 : ange souriant, tenant un phylactère.
Le phylactère portait peu-être quelques mots peints.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Nord, nervure 7 : masque humain crachant deux feuilles.
C'est encore un motif très habituel du vocabulaire des sculpteurs de sablière, et des sculpteurs sur pierre dès le XIIIe siècle sur les portails et chapiteaux romans. Il répond au goût de la métamorphose, et de l'alliance/confusion entre les genres animal (et humain) et végétal, accentué par le succès des Métamorphoses d'Ovide. C'est une variante du "masque feuillu", phytomorphe où le visage est encadré, en guise de chevelure ou de barbe, par des feuilles. Par son aspect fantastique, on peut lui prêter un rôle apotropaïque (conjurant le mauvais sort, ou les esprits mauvais), les sablières formant alors autour de l'espace sacré, liturgique, une ceinture de protection intérieure à laquelle répond, à l'extérieur, celle des crossettes.
L'alternance de feuilles et de masques humains sur ces sablières relèvent du même souci de fusion/confusion des genres, tout comme, plus loin, les masques anthropomorphes mais léonins.
L'homme est coiffé d'une casquette aux oreillettes relevées.
On remarquera ici, mais aussi ailleurs, une intervention de restauration par laquelle un coin très effilé de bois a été introduit, peut-être dans une fissure, puis resculptée.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Nord, nervure 8 sur l'entrait : masque humain à facies léonin.
La sculpture est traversée à mi-hauteur par une large pièce de bois taillée en sifflet et re-sculpée. Quoiqu'il soit difficile de faire la part des choses entre des fissures, cette pièce, et le décor, il semble que le pourtour du visage trace, en partie inférieure, des rayons, puis que vienne ensuite un bandeau occipital, et enfin une coiffure, ou plutôt une chevelure tirée en arrière.
Le bandeau occipital est fréquemment représenté en Finistère comme un accessoire qui rassemble les cheveux en arrière de la nuque avant de les laisser se répandre sur les épaules : on le vit sur des statues de la Vierge, de Marie-Madeleine ou plus rarement sur d'autres personnages. Est-ce cela que le sculpteur a figuré ici ?
L'aspect mi-humain mi-animal est dû aux lèvres épaisses (ce sera surtout le cas dans la sculpture suivante, au nez large et au menton fuyant, mais aussi à l'encadrement centrifuge du visage.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Bois polychrome jaune pâle et bleu. Troisième exemple du même motif, dans lequel les pommettes rondes et saillantes contrastent avec le petit menton en courge, avec un effet comique évident. Le fuseau de bois de réparation est ici plus bas.
Remarquez, sur le blochet, les perforations au foret utilisées pour rendre la peau verruqueuse du dragon, un procédé que reprendra le Maître de la nef de Plomodiern.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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II. LES SABLIÈRES À DRAGONS ET MÉDAILLONS (MAÎTRE DE LA NEF DE PLOMODIERN, VERS 1540 ? ).
Seule peut-être une expertise de la charpente, ou une compréhension de l'évolution du chantier (qui aurait selon C. Toscer débuté par le chevet) pourrait expliquer à la fois les deux nervures jumelles, la paire de blochet, et surtout la rupture de style dans deux pièces de sablières, qui abandonnent les masques et leurs répartitions sous les nervures pour un décor continu, associant dragons et médaillons. Ce décor est si caractéristique du sculpteur qui a réalisé la nef et le porche sud de l'église de Plomodiern qu'on peut les lui attribuer sans hésitation. On reconstitue donc le parcours d'un artisan qui a d'abord œuvré au Cap Sizun, dans cette chapelle Saint-Tugen (en 1535, ou vers 1540? ), pour le chevet de l'église de Roscudon vers 1544, et pour la chapelle Saint-Trémeur de Cléden-Cap-Sizun en 1553. Puis, il s'est rendu en Porzay 40 km plus au nord-est, pour orner la charpente de Plomodiern en 1564, ainsi que celle de la nef et du porche sud de l'église de Saint-Nic en 1562 et 1566.
Dans tous les cas, on retrouve des caractéristiques que j'ai déjà décrites pour les sites précédents.
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Vue d'ensemble, coté sud.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Les deux médaillons contiennent ce profil reconnaissable par son nez imposant, son œil d'horus, son casque (pour l'homme) et sa coiffe à perles (pour la femme), ainsi que le cercle du médaillon marqué à la gouge droite de I successifs et de perforations au foret
Les dragons sont aussi spécifiques par leurs feuilles-plumes attachés au corps par des anneaux, par leur grand œil de profil, leurs grandes oreilles, leur museau retroussé et, là encore, par les marques de gouge en C et en I, les perforations et les estafilades.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Du coté nord ; putto tenant les queues de deux dragons, encadré par deux médaillons de profil.
Pas de surprise pour celui qui traverse la nef et qui retrouve, comme à l'école, le même vocabulaire soigneusement récité sous le regard du même couple emblématique. L'enfant barbu nu, jambes écartées, coiffé de feuilles, retient les dragons par leur queue.
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Au nord ou au sud, il suffira d'observer les blochets ou les engoulants pour retrouver des coups de gouge et ses perforations au foret. Il n'y a pas de rupture de style entre ces dragons des poutres et ceux de ces pièces de sablières, ce qui incite à penser que ces dernières datent à peu près de la même époque, vers 1535-1540.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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QUELQUES ABOUTS DE POINÇON DE LA NEF.
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Un ange présentant un phylactère.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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L'acrobate en renversement postérieur.
Comme d'habitude, cet exercice, exécuté nu ou bien, comme ici, habillé, est l'occasion d'une exhibition virile. C'est aussi une expression du renversement des valeurs qui règne souvent sous les lambris, entre faîte et sablières, les abouts de poinçon étant vivement disputés entre les anges de toutes sortes (orants, chantants, musiciens, porteurs d'écu ou de phylactère, porteur d'instruments de la Passion), et d'un autre coté par des monstres, des humains difformes ou illustrant des vices, des musiciens, et des acrobates.
Le sujet est donc habituel, on en verra des exemples à Pleyben et à Grâces (cf liste de mes articles sur les sablières) .
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Un ange.
Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Un ange porteur d'un écu muet.
(dans une conversation, parlez "d'ange scutifère").
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Ange porteur d'écu.
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Abouts de poinçon dAbouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.e la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Acrobate coiffé d'un bonnet à oreilles, en renversement postérieur.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Ange présentant un écu muet.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Ange présentant un écu peint.
Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Ange porteur de phylactère.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Lion ou dragon.
Les perforations ornementales au foret, l'un des traits stylistiques de l'artiste auteur des sablières, blochets et entraits engoulés, sont reprises ici pour rendre les particularités du pelage. La découpe ovale doit correspondre à une réparation.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Deux roses.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Oiseau porteur d'écu.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Homme coiffé d'un bonnet, crachant des feuilles.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Homme tenant un arceau ou un phylactère ; à élucider.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Oiseau.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Feuilles.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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Homme buvant au tonnelet.
Je regrette que ma photo soit floue, car c'est l'un des abouts de poinçon les plus truculents. On verra ce type de tonneau individuel , et ce type d'ivrognes, sur les sablières de Grâces par exemple.
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Abouts de poinçon de la nef de la chapelle Saint-Tugen. Photographie lavieb-aile.
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LES SABLIÈRES DE LA CHAPELLE NORD.
Et / ou: photos en désordre.
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .
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Sablières de la chapelle Saint-Tugen de Primelin. Photographie lavieb-aile .