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23 mai 2012 3 23 /05 /mai /2012 10:31

 

Crozon, tourbières de St-Hernot et tourbières de Tromel, zone retrodunaire de Kerziginou.

Date : 22 mai 2012.

 

Le Damier de la succise Euphydrias eurinia (Rottembourg, 1775).

Présent dans les deux tourbières

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Le Petit Collier argenté Boloria (Clossiana) selene ([Denis & Schiffermüller], 1775).

   Rassemblement d'une colonie d'une dizaine de spécimens, voisinant avec un Damier de la succise sur les graminées d'un chemin très humide de Tromel.


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L'Hespérie de la mauve Pyrgus malvae (Linnaeus, 1758).

Dunes de Goulien

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  L'azuré commun ou Argus bleu Polyommatus icarus (Rottemburg, 1775).

Goulien

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Un coléoptère, la Cicindèle champêtre Cicindela campestris Linnaeus, 1758.

Tromel.

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Les larves creusent un terrier dont elles obstruent l'orifice par leur tête équipé d'un clapet. Ici, un terrier en cours de forage ? :

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Pour les orchidées observées ce jour là (Dactylorhiza maculata de St Hernot, Ophrys melifera de Kerziginou) voir  Orchidées de Crozon : mes débuts.

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Published by jean-yves cordier
21 mai 2012 1 21 /05 /mai /2012 15:37

              L'église de Trédrez

                  et son arbre de Jessé .

 

Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de Confort-Meilars.

L' arbre de Jessé de l'église de Saint-Aignan (56).

L'arbre de Jessé de l'église Notre-Dame de Saint-Thégonnec.

Le vitrail de l'Arbre de Jessé de l'église de la Sainte-Trinité à Kerfeunteun :

http://www.lavieb-aile.com/article-l-arbre-de-jesse-sculpte-de-l-eglise-de-locquirec-118346985.html

  L'arbre de Jessé de Trédrez est une oeuvre superbe qui mérite le voyage : je me suis donc rendu sur place, où j'ai découvert en outre bien d'autres beautés, dont une nouvelle statue d'Anne Trinitaire. La mairie m'a procuré un descriptif de deux pages dont je me suis inspiré pour le texte (© Mairie de Tredrez-Loquéméleau, 2000) : qu'elle trouve ici l'expression de mes remerciements.

     Tredrez ou Tref traez signifie "village de la grève", la Lieue de Grève de Saint-Michel. La paroisse de Tredrez, ancienne paroisse de l'évêché de Tréguier existait déjà en 1284, date à laquelle saint Yves en fut nommé recteur; Il y resta jusqu'en 1292. Jadis dédié à saint Laurent avant d'être voué à la Vierge, l'édifice gothique flamboyant est l'oeuvre de l'atelier Beaumanoir, comme en témoignent le clocher-mur flanqué d'une tourelle et l'abside à triple pignon commencés vers 1500. Le transept sud date de 1699, la chapelle des fonds baptismaux  de 1858, le bas-coté méridional de 1865, alors que le mur nord et la sacristie furent rebâtis en 1873, mais toutes ces transformations respectèrent le style gothique d'origine.

 

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  A l'Ouest s'élève le clocher-mur typique de la façon de Philippe Beaumanoir, caractérisé par ses contreforts, sa tourelle d'accès abritant un escalier à vis et surmonté d'un lanternon pyramidalorné d'un fleuron, sa plate-forme avec balustrade ouvragée supportant le beffroi surmonté d'une petite flèche et d'un pinacle.


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Le porche principal est surmonté d'une secrétairie où se réunissait le conseil de fabrique ; on y conservait également les archives. Plus tard, les agrandissements sud vinrent l'enclaver et l'entourer de deux fenêtres à trois lancettes. Cette secrétairerie est desservie par un escalier à vis contenu dans une tour circulaire massive attenante à la chapelle des fonts baptismaux et jadis apparente à l'extérieur.

  La croisée d'ogive de ce porche est ornée en clef de voûte des armes des seigneurs de Coatrédrez, "d'or à un lion de gueules". Alors qu'une statue du Christ en majesté se tient au dessus de la porte , on trouve de part et d'autre du porche les statues en bois polychrome des douze apôtres, datant du XVIIe siècle. A chaque angle, des angelots font mine de supporter la voûte.  Habillant les bancs de pierre, les bancs de bois ont été conservés.

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sculptures 4043c

 

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L'intérieur de l'église.

L'inscription gravée sur le premier pilier de la nef en moyen breton est la suivante : " Eu bloaz mil pemp cant an datan ti ma~n a renovelat", " En l'an mil cinq cent cette maison fut renouvelée". On note la division des jambages ascendants, les lettres conjointes (az de bloaz, da de datan), le tilde sur le a de man, la beauté du E majuscule.

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Vue de la porte ouest :

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      Vue du choeur :

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I. L'arbre de Jessé (1520).

  Placé dans l'aile sud du transept au dessus d'un autel ancien en granit, le retable abrité par une vitre porte le titre Marie, fleur de Jessé. C'est une oeuvre d'un artiste anonyme, en bois polychrome doré à la feuille quii date du premier quart du  XVIe siècle. Il a été restauré entre 1980 et 1984 par l'atelier Poilpré de Carnac.

  Le retable est un coffre rectangulaire en vue frontale et trapézoïdale en section, dont le fond est damassé en bleu et rouge et dont l'encadrement porte un rinceau de bois doré alternant des grappes et des pampres, alors que la partie supérieure se cintre sous l'effet d'un entrelac de rameaux renforçant la métaphore de l'arbre. Les couleurs prédominantes sont l'or, le rouge et le bleu, associées au rose des visages, au brun des barbes et des cheveux, à quelques détails verts et à l'argent réservé à la démone.

  La Vierge, au visage très fin, au front et aux sourcils épilés, les cheveux couverts d'un voile, est couronnée par trois anges alors qu'elle-même présente à l'Enfant-Jésus une fleur de lys. Elle est le personnage principal, elle est la fleur épanouie de l'arbre.

 Elle est vêtu d'un manteau bleu à revers écarlate qui recouvre une robe en or aux manches larges. Une autre robe ou aube blanche apparaît, dont les bords sont soulignés d'un galon d'or à l'encollure et aux manches.

  Ses deux pieds chaussés de souliers sombres sont posés sur le croissant lunaire en tant que Vierge de l'Apocalypse : "Un signe grandiose apparût dans le ciel. Une Femme ! Le soleil l'enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête", Apocalypse 12,1. Effectivement, les rayons solaires zèbrent une mandorle bleue dans laquelle elle s'inscrit.

 

   

         arbre-de-jesse-3894cc.jpg

 

Une vue rapprochée montre que les deux anges tiennent les instruments de la passion, les clous et la couronne d'épine. L'enfant, aux traits aussi fins que ceux de sa mère, très éveillé, les cheveux courts, portant une tunique d'or à galon bleu, tend la main vers la fleur de lys, symbole de pureté et de royauté, mais qui prend ici un autre sens allégorique en apparaissant comme la Fleur de Jessé, comme la plus fine floraison de l'arbre (généalogique) qui, à travers les générations des douze rois de Juda, est issu de Jessé.

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  La partie inférieure montre la Démone que la Vierge maîtrise du bout du pied. Elle est ici traitée comme un serpent au corps couvert d'écailles et aux quatre doigts animaux. Elle se cambre, elle relève la tête cornue, elle tend la pomme d'or, pomme fatale au genre humain qu'elle entraina dans le péché originel. Sa queue s'enroule en orbes maléfiques vers les puissances télluriques.

  Elle est à la fois une forme femelle du Démon, mais aussi l'Éve tentée par le serpent, l'Éve primitive dont la faute est renversée par la Nouvelle Éve qu'est Marie.  Et puis elle est peut-être aussi l'humanité pécamineuse qui exprime sa souffrance  et attend sa rédemption : ces démones des arbres de Jessé sont pétries de dualité et d'ambiguité, mi-humaines mi-monstrueuses, terrassées mais bien vivaces, féminines mais aux seins peu soulignés, animales de corps mais séduisantes de visage.  Elles sont tout à la fois le serpent, Éve et la pomme, et Satan sous son déguisement. Elles expriment aussi peut-être l'ambiguité de l'Église, voire de l'éspèce humaine, à l'égard de la féminité en  plaçant dans l'ombre de l'icone immaculée de la Pureté et de la Maternité idéale son antithèse tortueuse faite de dèsir et de séduction. 

   Rien n'interdirait effectivement certains, en un autre lieu, à se livrer à une lecture symbolique de la féminité divisée entre une part royale, solaire et ostensible, voire ostentatoire épanouie dans le triomphe de la Maternité et de la monade Mère-Fils, piétinant jusqu'à la nier une part sexuelle pourtant toujours vivace, et un géniteur devenu caduque, cette oeuvre religieuse devenant alors une belle icône de ce qui fut nommé le "matriarcat breton". Mais ne nous détournons pas.

  Jessé est allongé sur le coté gauche, appuyé sur le coude, la main soutenant sa tête, dans une attitude qui lui est si propre qu'elle mériterait de porter le nom de "Posture à la Jessé". A Trédrez, il n'est pas assoupi, mais seulement réveur, et on imagine facilement qu'il vient de lire la prophètie d'Isaïe 11,1 et qu'il se voit déjà donner naissance au tronc d'un arbre (Isaïe disait seulement "un rameau sortira de la souche de Jessé, un rejeton jaillira de ses racines", mais le "rejeton" lui paraît trop modeste), il voit tous ses fils, petit-fils et arrière-petit-fils habillés de soie et d'or, portant diadème et roulant en carrosse, non pas deux, trois, mais douze, douze rois de Juda nés de sa propre chair. Cela ne suffit pas, il voit, Jessé, une fleur suprème, régnant sur les astres et l'univers, l'apothèose, un sauveur pour son peuple, la réussite, quoi !

  Ses manches, sont, c'est amusant, de la même couleur que le corps de la Serpente.

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Les rois de Juda, coté gauche :

  Ils ne portent pas l'inscription de leur nom, et ils se ressemblent tous un peu, portant barbe, couronne et sceptre, courtes tunique d'or aux très larges manches sur haut de chausses et bottes ou longue robe ; l'un tient un livre. 

 

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Les rois de droite sont assez identiques, mais on reconnaît parmi eux David, le fils de Jessé, par la harpe qu'il tient.


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II. Bas-coté sud,  le Groupe d'Anne trinitaire.

 Ce bas-coté fut construit par Le Bellec, maçon à Trédrez, en 1865 : trois travées à arcades en voûtes angevines sont supportées par de fins piliers aux  beaux chapiteaux à décor végétal. On y trouve l'ancien maître-autel baroque à panneaux de faux-marbre vert et chérubins aux ailes d'or.

  Mais ce qui m'interesse avant tout, c'est un nouvel exemple d'Anne trinitaire, particulièrement original. C'est une oeuvre du XVe siècle. La mère et la fille sont assises, mais de manière moins hiératique que dans d'autres groupes ; Anne est reconnaissable par sa taille légèrement supérieure pour marquer qu'elle est la mère, et par le voile qu'elle porte habituellement, alors que Marie a les cheveux détachées seulement tenues sur le front par le cerclage d'une fine couronne. Comme je l'ai déjà observé ailleurs, les robes des deux femmes se confondent et fusionnent presque dans la partie basse. Les plis sont souples, certains serpentent à la taille ; les visages sont naturels et expressifs, quoique légèrement songeurs.

  C'est la façon dont Anne et Marie tiennent Jésus qui est originale ; un coussin rouge a été posé sur leurs cuisses, et l'enfant y est assis, le bras droit tenu par la grand-mère (dans une prise maladroite en supination ), le bras gauche par la maman. Il est vêtu d'une longue tunique laissant apparaître les pieds nus; les cheveux longs et bouclés sont redressés sur le front en une houppe.

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L'aile nord du transept.

L'autel associe des éléments baroques du XVII et XVIIIe. Dans des niches sont logés des statues en bois polychromes du XVe représentant saint Sébastien, saint Laurent, saint Eloi en évêque.

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      Saint Sébastien transpercé de sept flèches : 

 

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     Ce n'est pas ici le saint patron des amateurs de barbecue et autres amines hétérocycliques cancérigènes, mais  Saint Laurent en tenue de diacre manipulophore, et le grill de son supplice :

                              sculptures 3927c

      Saint Éloi en évêque bénissant, mais qui n'a pas lacher le marteau de maréchal-ferrant. Un fer à cheval a été placé en ex-voto.

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 Le devant d'autel porte un panneau représentant les Plaies du Christ, les instruments de la Passion et les symboles des outrages subis.

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            Ce sont : les pieds et les mains transpercés par les clous ; le coeur transpercé ; les clous ; la couronne d'épine ;  la lance de Longin qui perça le flanc droit, ou plutôt les lances des soldats romains ; la tunique que les soldats se disputèrent en la tirant au sort (Jean 19, 22-23) ; le coq du reniement de Pierre ; le glaive de Pierre sur lequel on voit l'oreille droite de Malchus, serviteur du Grand-Prêtre, tranché le jeudi au jardin de Gethsémani ;  les trente deniers (j'ai compté les pièces) pour lesquels Judas a livré Jésus, somme qui correspond environ à un mois de salaire moyen de l'époque ; et la main qui a souffleté le Christ.

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  Saint Jean l'évangéliste et son aigle

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  Saint Matthieu et son ange / homme : 

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La porte de la sacristie et la toile du Don du Rosaire (19e)

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 Le tableau de la réception du Rosaire.

La Vierge et son Fils remettent le rosaire à saint Dominique de Guzmán et à sainte Catherine de Sienne. Saint Dominique est représenté avec un chien mordant un flambeau , par allusion à un rêve que fit sa mère alors qu'elle était enceinte de lui : elle vit un chien tenant dans sa gueule une torche qui embrasait le monde entier. Mais les bûchers des autodafé de l'Inquisition ne s'allumèrent qu'après la mort de Dominique, et il faut interpréter l'embrasement canin comme le développement de l'Ordre des Prêcheurs (O.P), celui des Dominicains.

 On considère que la récitation du rosaire n'a pas été fondée par saint Dominique au XIIIe siècle, mais au siècle suivant par un dominicain breton, Alain de la Roche (Dinan, 1428-1475). Le terme "rosaire" désignait initialement au Moyen-Âge une collection de texte sacré (un florilège), puis après Alain de la Roche le Psautier de la Vierge Marie, recueil de louanges mariales. A la demande du duc de Bretagne François II, le pape Sixte IV promulgua le 12 mai 1479 une bulle approuvant la dévotion du rosaire et l'attribution d'indulgences, puis les confréries du Rosaire se développèrent dans chaque paroisse, où chaque église eut son retable et/ou sa chapelle et sa bannière dédiée à cette dévotion. Les membres de la confrérie s'engageaient à réciter le chapelet, "petit chapeau" de 50 petits grains correspondant aux Ave, et cinq gros grains (parfois en forme de tête de mort ou Memento mori) correspondant aux Pater et Gloria.

Le cadre date du XVIIe siècle. 

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Le choeur


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   Un lutrin du 17e siècle figure un pélican, symbole christique et eucharistique puisque cet oiseau était censé nourrir ses petits de sa propre chair, en se lacérant la poitrine de son bec. Cette figure, très originale pour un lutrin, est d'autant plus remarquable qu'il est ici de couleur noire. Ce n'est qu'en Syldavie que l'on peut trouver, sur le fond jaune du drapeau national, un pélican noir se substituer à l'aigle bicéphale, mais cet État de 642 000 habitant n'est accessible qu'en lisant Le Sceptre d'Ottokar des Aventures de Tintin.


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Deux statues aux angles du transept :


Saint Jean-Baptiste (17e) : 

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Saint Hyacinthe (17e)

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IV Les bannières.

1. Bannière du Sacré-Coeur

avec l'inscription Kalon Jésus Pedet ewidomp Coeur Sacré de Jésus, Priez pour nous.


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2. Bannière de Saint Quémeau, patron de l'église de Locqemeau qui dépend de Trédrez


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L'autre face est consacrée à Saint Yves, Zant Ervoan Pedet ewidomp

Les armoiries "d'or à la croix engrêlée de sable, accompagnée de quatre merlettes de même en chaque canton" ( ou : cantonnée de quatre alérion de même") sont celles d'Yves Hélory de Kermartin. Elles sont simplifiées en un écusson d'or à la croix engrêlée de sable lors des processions du pardon de saint Yves.

 

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3. Bannière datant du XVIIe siècle en velours et soie, brodée de fil d'argent .

Une face représente une Vierge à l'Enfant entourée de chérubins appariés,  et l'autre le Saint-Sacrement adoré par deux anges. Inutile d'insister sur le caractère exceptionnel de ce précieux travail de broderie.

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V. Les fonts baptismaux.

Les fonts eux-même sont en granit et datent du XIVe siècle. Ils sont surmontés par un baptistère en bois polychrome des premières années du XVIe siècle, qui est considéré comme le plus ancien de Bretagne et s'apparente aux jubés de Kerfons, Loc-Envel ou Locmaria qui sortent d'ateliers morlaisiens.

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Armoirie d'or à une fasce de gueules : ce ne sont pas les  armoiries de la famille Charruel,  de gueules à la fasce d'argent, mais celles de Penhoët (paroisse de St-Thegonnec), dont la devise est "Red eo".

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Armoiries des seigneurs de Coatrédrez, "d'or à un  lion de gueules".

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 Les pieds sont décorés de fleurs, d'hermines, de fleurs de lys ou de rubans entrelacés.

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  VI. La charpente, les sablières

    Les armoiries épiscopales et papales du choeur déterminent un créneau de datation entre 1862 et 1878: ils datent donc de la restauration de 1865.

     Armoiries de Mgr Augustin David, évêque du diocèse de Saint-Brieuc de 1862 à 1882, "d'azur à la tour crénelée d'argent mouvante d'ondes en courroux de même et surmontée d'une étoile d'or" Sa devise était Ruunt et stat, "ils se ruent et il tient". 

 

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Armoiries de Pie IX, pape de 1846 à 1878, Écartelé en 1 et 4 d'azur au lion couronné d'or et en 3 et 4 d'argent aux deux bandes de gueules.


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La nef est couverte par une charpente lambrissée en berceau brisé avec entraits à engoulants apparents et sablières sculptées.

Les sablières :

Elles ont été réalisées par le trégorrois Jean Jouhaff comme en atteste l'inscription des phylactères de la sablière nord : on y lit " Jouhaff / coeur et équerre entrelacés / h(o)c f(e)c(i)t MV(C) ihs (en entrelacs) Ma, "Jouhaff fit cela en 1500, Jésus Marie" (d'après René Couffon).

  Ces phylactères sont tenus par deux personnages dont l'un, malicieusement assis pour se faufiler dans le volume réduit de la poutre est habillé d'un chaperon à manches plissées alors que son compagnon, nu-tête, porte les cheveux longs. Entre eux, un troisième drôle à tête encapuchonnée tient les deux parties de la pancarte entre ses bras croisés (utilisation astucieuse du volume disponible) : de sa bouche sort, comme une bulle de nos B.D, la suite du texte. 

  Jehan Jouhaff est un charpentier sculpteur itinérant plein de verve dont on retrouve les oeuvres, portraits grimaçants, personnages aux postures acrobatiques et animaux imaginaires, dansles charpentes des églises de Rostrenen, Perros-Guirrec, Belle-Île -en-Terre,  

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 Le choeur :   


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  Un ange présente les armoiries couronnées, d'azur à quatre fasces d'or, de ???    

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Les armoiries des Coatredrez en alliance avec celles de Jeanne de Poulmic, échiqueté d'argent et de gueules de quatre tires.

  Yves de Coëtredrez épousa Jeanne de Poulmic, fille de Jean de Poulmic (+ 1426) et de Jeanne de Kersaliou (+ 1467) et en eut une fille, Marguerite de Coëtredrez.

  Le blason de Coatredrez ou Coëtredrez est aussi donné comme écartelé aux 1 et 4 de gueules à la fasce d'argent, qui est de Charruel ; aux 2 et 3 d'argent au lion de gueules qui est de Coëtredrez


 

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    Un autre blochet représente un ange tenant les armoiries de Coatrédrez en alliance avec celles de Marguerite Le Moine, alors que sur le premier pilier se trouvent les armoiries mi-parties de Coatrédrez et de Leizour, "de gueules à trois coquilles d'argent posées 2 et 1, avec un croissant montant d'or en abîme".

    Il est nécessaire de donner ici la généalogie des seigneurs de Coatrédrez , débutant au XIIIe siècle. Ils furent, au XVI et XVIIe siècle surtout, parmi les plus puissants de l'évêché de Tréguier. Le manoir actuel, à fonction agricole et d'habitation, date de la fin du XVe. 

  • Guyomar de Coatrédrez, v1280
  • Jean de C. (v 1305-)  // Jeanne de Lostanguern dame de Keroulas en Trédrez
  • Hervé de C. , sr de Keroulas (v 1325-v1389) // Anne de Kerenrais
  • Jean de C.  (v 1352-5.07.1392) // Isabeau de Launay
  • Roland de C. (v1380-), sire de Coatrédrez // Marguerite de Tyvarlen, dame de Pennault
  • Yves de C. I (v1417-1471) Sr de Pennault //  Jeanne de Poulmic (v 1426-après 1471),
  • Yves de C. , Sr de Coatrédrez (v 1475-1546) // Marie Le Moine, dame de Coëtudavel. Yves de Coatrédrez fut le meurtier du seigneur de Kerhervé en Ploubezre ; condamné à la prison puis au bannissement, il mourut à Paris. 
  • Pierre de C. (v 1550-16.03.1623), actif dans les combats de la Ligue contre de Fontenelle, et surnommé Pierre le Cruel pour ses exactions, comme celles que relatent deux guerz,Markik Trede et Pipi Coatrederz.
  • Yves de C., mort assasiné le 13 septembre 1623.

 

 

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Deux anges tiennent une pancarte dont je ne déchiffre que le nom petro.

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Au fond de la nef, les blochets datant de la construction de la chapelle des fonts baptismaux figurent des anges portant des inscriptions "Hegarat person" (ici), "Pius papa nonus", MDCCCLVI", soit "Hégarat recteur, "Pie IX pape", et "1858".

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Published by jean-yves cordier
20 mai 2012 7 20 /05 /mai /2012 22:03

           Basilique Sainte-Anne d'Auray :

                      les bannières.

 

I. La bannière Le Minor de 1954.

Voir :  Les bannières Le Minor.

  Cette date la place parmi les toutes premières bannières de la maison de Pont-l'Abbé, la première datant de 1953. J'ignore le nom du cartonnier.

Une face est consacrée à la Vierge à l'Enfant et porte cette inscription: Consécration de la Bretagne 26 juillet 1954.

  L'autre inscription est en breton : Revo Melet kalon glan Mari. 

  Dans l'histoire de la basilique de Sainte-Anne d'Auray, la consécration de la Bretagne au coeur immaculé de Marie fut un évènement majeur pour lequel 100 000 pèlerins convergèrent vers le sanctuaire. Le 26 juillet, le pape Pie XII adressa à la foule de ces fidèles un message radiodiffusé qu'il concluait ainsi : 

  "Aimez-la bien, cette bonne sainte Anne. Continuez à placer vos foyers sous sa protection. En mettant Marie au monde, elle a donné à l'humanité la plus merveilleuse des créatures, la plus sainte des femmes, le chef-d'oeuvre de Dieu. N'est-ce pas assez pour que vous l'aimiez et l'honoriez d'une manière unique ?

  "Implorant donc l'intercession de sainte Anne et de la Très sainte Vierge, Nous appelons sur vous tous, sur vos foyers, vos écoles, vos paroisses, vos diocèses, sur toute la Bretagne, l'effusion la plus abondante des grâces de Dieu, et du fond du choeur Nous vous en accordons pour gage Notre paternelle Bénédiction apostolique.

  " Revo Melet Kalon Glan Mari, Revo mélet Santez Anna Patronez vad er Vretoned !"

 


 

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  Le ciel est constellé de pièces de verroterie bleues, qui ornent aussi les couronnes, et le corsage de la Vierge. On observe que l'annulaire droit de la Vierge porte également une bague bleu émeraude, ce qui est à ma connaissance très rare dans l'iconographie mariale : comment interpréter cette bague sur le plan symbolique ou théologique ?

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      On admirera le travail de broderie, et la façon dont l'ornementation décline tout le vocabulaire des brodeurs bigouden, comme pour parer la Vierge du meilleur du savoir faire de l'art breton.

   bannieres 4314c

 

            bannieres 4315c

 

L'autre face est bien-sûr consacrée à sainte Anne :

  Elle porte la seconde partie de la citation papale : Revo Melet Santez Anna Patromez-Vat er Vretoned.

 Re vo melet en dialecte vannetais, ra vo meulet en breton unifié, signifie "Que soit loué" ; c'est le début du cantique suivant:

 

Ra vo meulet an Aotrou Doue
Ra vo meulet E Anv Santel
Ra vo meulet

Ra vo meulet Salver ar bed
Jezus, gwir Doue daet da vout den
Ra vo meulet

Ra vo meulet anv Jezus Krist
Ra vo meulet kalon Jezus
Ra vo meulet

Ra vo meulet berped Jezus
Er sakramant ag an Aoter
Ra vo meulet

Ra vo meulet Rouanez an neñv
santez Mari, mamm hon Salver
Ra vo meulet

Ra vo meulet ar Werc'hez c'hlan
Mari konsevet hep pec'hed
Ra vo meulet

Ra vo meulet da virviken
Anv kaer Mari, mamm ha gwerc'hez
Ra vo meulet

Ra vo meuletanv Sant Jojeb
Pried santel ar Werc'hez c'hlan
Ra vo meulet

Ra vo meulet Santez Anna
Patronez Vat ar Vretoned
Ra vo meulet

Ra vo meulet an Aotrou Doue
Get an holl sent hag an aeled
Ra vo meulet

 

 

            bannieres 4316c

 

II. Les autres bannières.

Bannière de saint Joseph:

 

                   bannieres 4318c

Bannière 1830-1930 :  

  Cette bannière célèbre sans-doute le centenaire de l'apparition de la Vierge dite "de la médaille miraculeuse"   à la novice des Filles de la Charité Catherine Labouré dans une chapelle de la rue du Bac à Paris. La médaille mérita cette appellation lors de l'épidémie de choléra de 1832 à Paris, où de nombreuses guérisons lui furent attribuées.

Le blason aux armes de la Bretagne porte la devise Potius mori quam foedari, "plutôt la mort que le deshonneur". 

                  bannieres 4319c

 

Au verso, le Sacré-Coeur et 5 blasons qui sont ceux des villes des cinq diocèses de Bretagne:

En haut, les armoiries de Saint-Brieuc (diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier), d'azur au griffon armé et lampassé de gueules, et  les armoiries  de la ville de Vannes , "de gueules à une hermine passante au naturel et son écharpe flottante d'hermine".

En dessous, nous trouvons les armes des villes de Nantes , Rennes (archidiocèse de Rennes) et  Quimper (diocèse de Quimper et Léon)

                bannieres 4319v

 


Bannière à sainte Anne :

 

                        bannieres 4321c

 

Bannière de la Congrégation des Enfants de Marie :

avec l'image de l'Immaculée Conception.

 

                bannieres 4322c  

 

 


Sainte Noyale

   Cette princesse de Cambrie, au nord-ouest de l'Angleterre, au VIe siècle, voulu fuir le mariage auquel la destinait son père et traversa la Manche sur une simple branche d'arbre , avec sa servante : arrivée à l'embouchure du Blavet, elle remonta la rivière. Mais près de Bignan, un potentat local du nom de Nizan se mit en tête de l'épouser. Elle refusa tout net, n'ayant pas traversé the Channel pour s'entendre conter fleurette alors qu'elle voulait seulement fonder un ermitage, comme tant de saint irlandais ou grand-breton. Son destin était autre, c'était celui d'une sainte Barbe ou d'une sainte Catherine, car Nizan fou d'amour mais dépité d'être rejeté comme un vieux décati la décapita. Elle n'en eut cure, prit sa tête sous le bras et continua à suivre son idée fixe, trouver un coin tranquille à l'abri des maris, elle le trouva dans un calme vallon où est érigée actuellement la chapelle de Noyale-Pontivy.

Inscription : Bugale santez Noaluen de santez Anna. (Les enfants de sainte Noyale à sainte Anne ?)

  La broderie et le travail de la soie montre parfaitement la sainte poursuivant son chemin en tenant sa tête auréolée, sa fidèle servante à genoux devant le miracle qui s'accomplit, mais je n'ai pas déchiffrer à qui correspond le personnage en costume qui tient respectueusement son chapeau.

                bannieres 4325c

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Published by jean-yves cordier
20 mai 2012 7 20 /05 /mai /2012 21:56

            Menyanthes trifoliata L.

                   le tréfle d'eau

Lieu : tourbières de Kerfontaine (56)

Date : 20 mai 2012  

  Le Menyanthe à trois folioles, plante aquatique vivace grâce à un rhyzome rampant dans la vase,  menacée sur le massif armoricain, colonise les sols détrempés, peu profonds, assez acides et souvent tourbeux. On le nomme aussi trèfle des castors ou trèfle des marais.

trefle-d-eau 1109

 

  Ses grappes de fleurs étoilées d'un blanc rosé sont remarquables par les barbes et laciniures des cinq divisions étalées de leur corolle. Ce sont des fleurs bisexuées, aux cinq étamines à anthères rouges violacées  sagittées et au pistil qui engendrera une capsule. Celle-ci s'ouvrira en deux valves qui libèreront leurs nombreuses graines. 

 

               trefle-d-eau 1104c

 

      Il possède des vertus médicinales semblables à celles de la Gentiane, et on apprécie ses qualités digestives, toniques et émmenagogues ou ses effets fébrifuges ou dépuratifs.


 

 

    trefle-d-eau 1105c

 

 


       trefle-d-eau 1110c


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Published by jean-yves cordier
14 mai 2012 1 14 /05 /mai /2012 14:29

Les trois Vierges couchées de Bretagne.

 

 

 

Voir aussi : 

A. LES VIERGES COUCHÉES. 7 articles.

 

http://www.lavieb-aile.com/article-les-vierges-couchees-de-bretagne-2-chapelle-du-yaudet-a-ploulec-h-105555217.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-3-chapelle-de-kergrist-a-paimpol-105604068.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierge-couchee-calvaire-de-tronoen-a-saint-jean-trolimon-29-110465874.html

http://www.lavieb-aile.com/article-la-vierge-couchee-dans-les-nativites-des-livres-d-heures-113263711.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-la-cathedrale-de-chartres-112103311.html

http://www.lavieb-aile.com/2016/06/les-deux-vierges-couchees-de-la-cathedrale-de-fribourg-allemagne.html

.

B. LES VIERGES ALLAITANTES. 12 articles.

http://www.lavieb-aile.com/article-virgo-lactens-ou-miss-nene-5-candidates-du-finistere-les-vierges-allaitantes-96615012.html

.

C. GROUPE DE SAINTE ANNE TRINITAIRE. 

Groupes dits de Sainte-Anne Trinitaire : l'ensemble de la vallée de l'Aulne

http://www.lavieb-aile.com/article-anne-trinitaire-de-la-vallee-de-l-aulne-102034812.html

Anne trinitaire de l'église de Guimaëc.

Anne trinitaire de l'église de Plougasnou.

Sainte-Anne trinitaire du Musée départemental de Quimper.

L'église du Vieux Bourg à Lothey : Anne trinitaire.

La chapelle Sainte-Anne à Daoulas.

Anne trinitaire de la cathédrale de Burgos

http://www.lavieb-aile.com/article-sainte-anne-trinitaire-de-burgos-118711405.html

 

.

.

 

 

I. Chapelle N.D du Guiaudet à Lanrivain (22).

Début XVIIIe ?   Vierges couchées de Bretagne (1) : Chapelle Notre-Dame-du-Guiaudet à Lanrivain

Caractéristiques :

  • Vierge allaitante + enfant
  • Anne et Joachim dans les niches latérales
  • Autres références à sainte Anne (bannière)
  • Triangle trinitaire au lieu de l'Esprit-Saint
  • Absence de Joseph (statue perdue ?)
  • Culte des femmes enceintes et parturientes.

​.

vierge 3614c

 

.

 

II. Chapelle du Yaudet à Ploulec'h (22).

Fin XVIIe ?

Les Vierges couchées de Bretagne (2) : Chapelle du Yaudet à Ploulec'h.

      Caractéristiques :

  • Vierge + enfant + Joseph + Esprit-Saint
  • Anne et Joachim dans les niches latérales
  • Autres référence à sainte Anne dans la chapelle (Bannière, cantique, ...)

 

 

 

vierge 3668c

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III. Chapelle de Kergrist à Paimpol (22),  N.D. du Yaudet. 

XVIIIe ?

Vierges couchées (3) : chapelle de Kergrist à Paimpol.

Caractéristiques :

  • Vierge en posture d'allaitement + Enfant + Joseph.
  • Anne et Joachim absent, mais le retable a été déplacé de sa position initiale

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kergrist-plounez-paimpol 3728c

.

IV. Commentaires.

1. Iconographie : les Vierges en gésine : 

  La Vierge Marie a été représentée de diverses façons dans son rôle de mère : pendant la grossesse, lors de la Nativité, allaitant,  présentant l'enfant, etc... J'ai présenté partiellement l'iconographie en Bretagne de la Vierge donnant le sein à son Fils dans une série d'articles :  Virgo lactans ou miss Néné ? Les candidates du Finistère. Les Vierges allaitantes., et l'iconographie bretonne du groupe familial Anne+Marie+ Jésus ici : 

Groupes de Sainte-Anne Trinitaire de la vallée de l'Aulne.

   Mais une autre représentation associe la scène de l'allaitement avec la représentation de la Vierge dans les tout premiers jours qui suivent l'accouchement, période du post-partum ou du retour de couche. Louis Réau, auteur d'un recensement exhaustif de l'art chrétien français (Iconographie de l'art chrétien, Presses Universitaires de France 1955) , désigne cette représentation sous le titre de "Vierge en gésine sur son lit d'accouchée" ou "Maria im Wochenbett". Cette désignation a le mérite d'être plus claire que celle de "Vierge couchée" qui est pourtant en usage en Bretagne, le qualificatif "couchée" ne désignant pas explicitement l'état de la femme "accouchée", "en couche", ou en gésine. Rappelons d'une part qu'une femme doit rester alitée pendant les premiers jours qui suivent l'accouchement en attendant le retour de couches, et d'autre part que selon la loi mosaïque, une femme juive après avoir enfanté d'un fils devait respecter une période de quarante jours au terme de laquelle elle se rendait au temple pour se purifier. Cela est à l'origine de la fête de la Présentation de Marie au Temple, fêtée le 21 novembre. 

   Ce motif a été couramment figuré pendant tout le Moyen-Âge, montrant Marie dans un lit d'osier et allaitant l'enfant, alors qu'accessoirement Joseph est assis au pied du lit. Les "Vierges en gésine" sont donc aussi parfois des Vierges au sein ou Vierges au lait. Ce thème relève d'un influence syrienne où, classiquement, la Vierge allongée semble épuisée, est entourée de deux sages-femmes qui lavent l'enfant, alors qu'à partir du XIVe siècle, notamment à la suite des Révélations de sainte Brigitte, on représente Marie et Joseph à genoux en adoration devant l'Enfant-Jésus placé sur de la paille entre eux deux, plaçant l'accent sur Jésus et non plus sur la Vierge.

Exemples de sculptures (et quelques vitraux fresques, enluminures et tapisseries) dans le désordre qui m'est cher:

  • Poitiers, Notre-Dame La Grande, façade, XIIe
  • Notre-Dame de Paris, portail droit, Nativité, XII-XIIIe
  • Chartres, cathédrale Notre-Dame, portail nord, Vierge de Nativité 1230/1260 link et vitrail de 1218 link
  • La Charité-sur-Loire, Prieuré, tympan, 1060.link  
  • Vezelay, Basilique Sainte-Madeleine,portail sud, 1145-1150 link
  • Laon, portail nord link
  • Reims, cathédrale Notre-Dame, XIIIe, vitrail
  • Maisoncelles-en-Brie, église Saint-Sulpice, retable, pierre, XIIIe
  • Dijon, Nativité, Musée archéologique de Dijon link
  • Pays-Bas méridionaux, Livre d'heure, enluminure par les maîtres de Guillebert de Mets, entre 1409 et 1419, Bnf link
  • Mouthiers-Vieillard de Poligny Église
  • Strasbourg, cathédrale, tapisserie de la Nativité v. 1639 link
  • Vesdun (Cher), Église de Saint-Cyr fresques du XII et XIIIe
  • Brioude, Auvergne Basilique Saint-Julien (dite Vierge parturiente) Vierge en gésine, XVe
  • Aigueperse en Auvergne, église 
  • Vignory en Champagne
  • Metz, église Saint-Martin, Nativité sur épitaphe en pierre, Vierge allaitante, XVe,  link
  • Une très belle collection iconographique est disponible sur la thèse suivante : Ikonografieder Mutterschaftsmystik, Brigitte Eleonore Zierhut-Boesch, 2007, Université de Vienne, en ligne ici : http://othes.univie.ac.at/407/2/Mutterschaftsmystik_nach_Korrektur.pdf avec quinze exemples de sculptures.

Le livre de Serge Laruë de Charlus La Nativité, les Vierges allongées, Ed. Les dossiers d'Aquitaine,2011 vient compléter la liste des sculptures: 

  • Bourg-Artensal tympan roman de l'église
  • Cathédrale Saint-Caprais d'Agen, chapiteau
  • Musée des Arts décoratifs de Paris, bas-relief d'albâtre du XIVe, et fragment de retable de bois polychrome du XIVe
  • Musée de Cluny à Paris, fragment de retable en albâtre, XVe
  • Musée Dell' Opera Del Duomo, Florence, Nativité, 1296-1298
  • Portail abbaye de Moissac, 
  • Lauzerte, église Saint-Barthélémy, retable du XVIIe, bois doré

Le même auteur donne également six exemples de fresques et de peintures : parmi celles-ci, une Nativité duXIVe siècle  de Melchior Broederlam à Anvers (Musée Mayer Van Den Bergh), et une Nativité de Guido da Siena consérvée au Louvre.

 Poitiers, Notre-Dame la Grande, XIIe, http://web.me.com/joel.jalladeau/images/page1/page1.html

La Charité-sur-Loire http://revue.shakti.pagesperso-orange.fr/charloir.htm

.

 

2. La tradition chrétienne sur la maternité de Marie.

   a) Les évangiles eux-mêmes ne sont guère diserts sur la naissance du Christ. Matthieu se contente d'écrire " Joseph ne la connut pas jusqu'au jour où elle enfanta un fils et il l'appela du nom de Jésus". Luc (2,7) est à peine plus prolixe en écrivant " Elle enfanta son fils premier-né, l'enveloppa de langes et le coucha dans une crèche car ils manquaient de place dans la salle."

  b) les textes apocryphes et les Pères de l'Église.

Cette concision posa problème lorsqu'il fallut à la fois répondre à la curiosité des fidèles sur la maternité virginale, et trouver une cohérence dans le débat sur la double nature du Christ ; lorsqu'il fallut aussi mettre en scène les textes évangéliques, sur les tréteaux des théâtres médiévaux ou sur les chapiteaux et tympan des églises. On fit alors appel aux textes apocryphes. Ce fut d'abord le Protévangile de Jacques (écrit en grec au milieu ou fin du IIe) puis l'évangile de l'enfance du Pseudo-Matthieu, compilation en latin du Protévangile de Jacques élaboré au V-VIe siècle, et enfin au IXe siècle Le Livre de la Nativité de Marie De Natiuitate Mariae de Paschase Radbert. Si ces textes apocryphes, bien accueillis dans le monde byzantin, rencontrèrent plus de réticence en Occident, c'est à eux que nous devons l'âne et le boeuf dans la crèche ainsi que l'épisode de "Marie et les deux sages-femmes".

    Ce dernier épisode aborde le point problématique de la virginité de Marie . Celle-ci, bien différente de l'Immaculèe Conception qui affirme que Marie a été préservée du péché originel, peut être abordée comme Conception virginale ( la conception de Jésus se déroulant en l'absence d'acte sexuel, comme le précise Matthieu dans la citation déjà évoquée), ou bien comme Naissance virginale ( l'Enfant sortant miraculeusement du ventre maternel sans passer par la filière génitale, ou en en préservant l'intégrité). Comme les docteurs de l'Église l' affirmèrent dogmatiquement, il s'agit d'une virginité  ante partum, in partu et post partum. A cette virginité organique vient s'ajouter le fait que, selon les théologiens, Marie avait fait le voeu  de sa virginité en se consacrant à Dieu avant que ne survienne l'Annonciation. Comme l'écrivait saint Bernard (Sermon à la louange de la Vierge), " La Vierge reçut le don de la virginité [...], vierge de corps, vierge d'esprit, vierge aussi par décision et engagement".

  Dans  les textes apocryphes, c'est Anne elle-même qui voue sa fille au service divin ; dans le Protévangile, Anne prend cette décision lorsqu'un ange lui annonce qu'elle sera enceinte après 20 ans de stérilité, disant "Que ce soit un garçon ou une fille que j'engendre, je l'offrirai au Seigneur, et il passera toute sa vie au service divin", et dans le  Pseudo-Matthieu, elle déclare s'être engagée dès le début de son mariage à confier son enfant au Temple. Effectivement, Marie sera placée à six mois dans un sanctuaire créé à cet effet dans la maison paternelle, puis conduite au Temple à trois ans, après avoir été sevrée, "pour qu'elle habitât avec les vierges qui passaient le jour et la nuit à louer Dieu". Rappelons que son père Joachim avait été chassé lui-même du Temple par les prêtres qui lui reprochaient la stérilité de son couple, preuve du désaveu de Dieu.

  La conception virginale de Marie par Anne, sans relation sexuelle avec Joachim, est clairement précisée par les textes apocryphes, préalable de la conception virginale de Jésus par Marie. Le baiser échangé entre les époux sous la Porte d'Or est lui-même postèrieur à la conception, survenue plus de trente jours auparavant.

   Dans le Pseudo-Matthieu, on relate que le prêtre Abiathar souhaite  réclame Marie  comme épouse pour son fils, mais que celle-ci refuse, déclarant "j'ai résolu dans mon coeur de ne jamais connaître d'hommes".

  A douze ans, elle ne peut rester plus longtemps au Temple, qui serait souillé par la présence d'une jeune fille réglée, et on recherche un veuf à qui la confier : les prêtres convoquent tous les veufs qui remettent chacun au grand-prêtre une baguette. Lorsque Zacharie rend à Joseph sa baguette, une colombe en sort pour se poser sur son épaule : Dieu l'a désigné pour accueillir Marie. Joseph s'offusque, il est trop vieux, elle a l'age de ses petits-enfants ! Mais il doit se plier au choix divin et accueillir Marie chez lui. Elle y  est chargée de tisser avec cinq autres filles  un voile pour le Temple ; et c'est à elle qu'échoit le fil de pourpre et d'écarlate

  On voit combien les problèmes de stérilité/fécondité et de virginité-pureté/nubilité/mariage sont au coeur de ces textes, qui donnent toutes les précisions nécessaires à combattre les propos malveillants des adversaires de la religion chrétienne qui considèrent que Jésus est le fils que Marie a eu de Joseph.

  Lorsque Marie devient enceinte après la visite de l'ange de l'Annonciation, et que Joseph, après neuf mois d'absence sur un chantier à Capharnaüm, s'en aperçoit, le récit détaille là encore comment on s'assura que ni Joseph ni la Vierge n'avaient fauté, par l'épreuve de l'eau qu'il faut boire en faisant sept fois le tour de l'autel : aucune marque n'apparait sur leur visage après cette épreuve, ce qui atteste de leur innocence. Et Marie renouvelle alors, devant la foule encore septique, son voeu de virginité.

  

  Je ne résiste pas à citer ici in extenso les chapitres XVIII à XX du Protévangile de Jacques (trad. d'après G. Brumet), tant j'en aime le texte : 

     Chap. XVIII.  Et trouvant en cet endroit une caverne, il y fit entrer Marie, et il laissa son fils pour la garder, et il s'en alla à Bethléem chercher une sage-femme. Et lorsqu'il était en marche, il vit le pôle que le ciel s'étaient arrêtés, que l'air était obscurci, et les oiseaux étaient arrêtés au milieu de leur vol. En regardant à terre, il vit une marmite pleine de viande préparée, et des ouvriers qui étaient couchés et dont les mains étaient dans les marmites. Et, au moment de manger, ils ne mangeaient pas, et ceux qui étendaient la main, ils ne prenaient rien, et ceux qui voulaient porter quelque chose à leur bouche n'y portaient rien, et tous tenaient leurs regards tournés vers le haut. Et les brebis étaient dispersées, qui ne marchaient point mais demeuraient immobiles. Et le pasteur, élevant la main pour les frapper de son bâton, sa main restait sans s'abaisser. Et regardant du coté du fleuve, il vit des boucs dont la bouche touchait l'eau, mais qui ne buvaient pas, car toutes choses étaient en ce moment détournées de leur cours.

     Chap. XIX.  Et voici qu'une femme descendant des montagnes lui dit : "Je te demande où tu vas". Et Joseph répondit : "Je cherche une sage-femme de la race des Hébreux." Et elle lui dit : "  Es-tu de la race d'Israël ? " Et il répondit que oui. Elle dit alors : " Et quelle est cette femme qui enfante dans cette caverne ? " Et  il répondit : " C'est celle qui est ma fiancée." Et elle dit :" Elle n'est pas ton épouse ? " Et Joseph dit : "Ce n'est pas mon épouse, mais c'est Marie qui a été élevée dans le temple du Seigneur, et qui a conçu du Saint-Esprit." Et la sage-femme lui dit : " Est-ce que c'est véritable ? Et il dit : "Viens le voir." Et la sage-femme alla avec lui. Et elle s'arréta quand elle fut devant la caverne. Voilà qu'une nuée lumineuse couvrait cette caverne, et la sage-femme dit : "Est-ce que c'est véritable?" Et il dit : "Viens le voir." Et la sage-femme alla avec lui. Et elle s'arréta quand elle fut devant la caverne. Voici qu'une nuée lumineuse couvrait cette caverne. Et la sage-femme dit :" Mon âme a été glorifiée aujourd'hui, car mes yeux ont vu des merveilles." Et tout d'un coup la caverne fut remplie d'une clarté si vive que l'oeil ne pouvait la contempler, et quand cette lumière se fut peu à peu dissipée, l'on vit l'enfant. Sa mère Marie lui donnait le sein. Et la sage-femme s'écria : "Ce jour est grand pour moi, car j'ai vu un grand spectacle." Et elle sortit de la caverne et Salomé fut au devant d'elle. Et la sage-femme dit à Salomé : "J'ai de grandes merveilles à te raconter ; une vierge a engendré, et elle reste vierge." Et Salomé dit : "Vive le Seigneur mon Dieu ; si je ne m'en assure pas moi-même, je ne croirai pas"

     Chap. XX. Et la sage-femme, rentrant dans la caverne, dit à Marie : "Couche-toi, car un grand combat t'est réservé." Et Salomé l'ayant touchée, sortit en disant : "malheur à moi, perfide et impie, car j'ai tenté le Dieu vivant. Et ma main brûlée d'un feu dévorant tombe et se sépare de mon bras." Et elle fléchit les genoux devant Dieu et elle dit : " Dieu de nos pères, souviens-toi de moi, car je sui de la race d'Abraham, d'Isaac et de Jacob.. Et ne me  confonds pas devant les enfants d'Israël, mais rends-moi à mes parents. Tu sais, Seigneur, qu'en ton nom j'accomplissais toutes mes cures et guérisons, et c'est de toi que je recevais une récompense." Et l'ange du Seigneur lui apparut et lui dit : " Salomé, Salomé, le Seigneur t'a entendue ; tends la main à l'enfant et porte -le. Il sera pour toi le salut et la joie." Et Salomé s'approcha de l'enfant et elle le porta dans ses bras en disant : "Je t'adorerai, car un grand roi est né en Israël." Et elle fut aussitôt guérie, et elle sortit de la caverne justifiée. Et une voix se fit entendre près d'elle, qui lui dit : " N'annonce pas les merveilles que tu as vues, jusqu'à ce que l'enfant soit entré à Jérusalem."

   A ce récit du Protévangile, le Pseudo-Matthieu ajoute :

  • le prénom de la première sage-femme, Zahel (ou Zélomi), 
  • le fait que Zahel procède d'abord à un examen gynécologique par lequel elle s'assure de la virginité organique de Marie avant de s'écrier : "Seigneur, grand pitié ! Jamais on n'a entendu ni même soupconné que des seins soient remplis de lait alors que le fils qui vient de naître manifeste la virginité de sa mère. Ce nouveau-né n'a connu nulle souillure de sang, l'accouchée n'a éprouvé nulle douleur. La vierge a enfanté et après l'enfantement continue à être vierge".

  L'absence de douleurs est un élément important puisque c'est après avoir commis le péché originel que Éve entendit la sentence de Dieu : "J'augmenterai les souffrances de tes grossesses, tu enfanteras dans la douleur".  Cet accouchement sans douleur, signifié dans les sculptures par le visage serein et détendu voire souriant de la Vierge, témoigne que Marie, Nouvelle Éve, est exempte du péché originel. Ce pouvoir de triompher de la malédiction des douleurs de l'accouchement est aussi  un élément important pour les femmes qui invoquent ces "Vierges en gésine".

 

 

Lire le Pseudo-évangile de Jacques : http://remacle.org/bloodwolf/apocryphes/jacques.htm

Lire l'évangile du Pseudo-Matthieu : http://seigneurjesus.free.fr/evangilepseudomatthieu.htm

c) La Légende Dorée de Jacques de Voragine.

   Elle est écrite en 1260 et suit les fêtes liturgiques. C'est au 8 septembre, fête de la Nativité de Marie, link que se trouve le récit de la naissance de Marie et le fait qu'elle soit vouée à la virginité, et c'est à la Nativité de Notre-Seigneur link que sont développès les arguments de cette virginité. Jacques de Voragine reprend, en détaillant les preuves de la virginité mariale, les textes apocryphes.

  Le propre de ces textes secondaires aux Évangiles est de placer en continuité la vie de sainte Anne et de son mari Joachim et l'enfance de Marie avec la naissance du Christ. La présence sur deux des retables bretons étudiés ici d'Anne et de Joachim doit être comprise par rapport à ces réferences littéraires. 

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3. Les Vierges Couchées de Bretagne    

Un inventaire des Vierges Couchées a été dressé par Georges Provost  (Un lieu saint et ses représentations, le Yaudet, Ann. Bret. Pays Ouest 110-2, 2003) :

On constate que six oeuvres sont de la même époque autour de 1450 ( entre 1425 et  1455):

  • Le Folgoet (29), Basilique, Tympan du porche, Kersantite, XVe siécle (1425 ou 1450)
  • La Martyre (29), église Saint-Salomon, Tympan du porche, Kersantite, XVe siécle (1450).
  • Morlaix (29), église Saint-Matthieu, anciennement N.D.-du.Mur, volet de statue ouvrante, bois, XVe siécle (ou : 1390).link
  • Saint.Hernin (29) Kerbreudeur, calvaire, pierre, 1450.link
  • Saint-Jean-Trolimon (29), chapelle de Tronoen, calvaire, pierre, 1450, link
  • Plouaret (22), église paroissiale, oeuvre disparue, bois, 1455.
  • Limerzel (56), chapelle Saint-Julien du Temple, retable du maitre-autel, pierre, XVe siècle. link
  • Plouguernevel (22), église paroissiale, statue isolée, pierre (schiste), XV-XVIe siècle?.
  • Landerneau (29), èglise Saint.Thomas, statue isolée, bois, XV-XVIe siècle
  • Landerneau (29), chapelle de la Fontaine-Blanche, oeuvre disparue, pierre (granit), mentionnée en 1794 par Jacques Cambry
  • Ploulec'h (22), chapelle Notre-Dame du Yaudet, retable maître-autel, bois, fin XVIIe ?
  • Lanrivain (22), chapelle Notre-Dame du Guiaudet, retable maître-autel, bois, début XVIIIe?
  • Paimpol (22), chapelle Notre-Dame de Kergrist à Plounez, retable du maître-autel, bois, XVIIIe siècle ?

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Le tympan du porche occidental de la basilique du Folgoet.

 

La scène représente la Nativité, l'Adoration des Mages et l'Annonce faite aux bergers.

Datée de 1425-1430 par René Couffon, ce serait alors l'oeuvre la plus ancienne conservée en kersantite ; mais Jean-Marie Guillouët (Congrès archéologique de France (Finistère-2007), 2009 pp. 166-176 link) penche pour une datation contemporaine du tympan, assez comparable, de La Martyre, qui date de 1450.

A gauche se tient Joseph, accroupi, tenant un bâton d'une main et  un pompon de l'oreiller de l'autre, puis la Vierge, adossée au coussin, en appui sur le coude, dominée par la tête de l'âne. Elle tient l'Enfant, mais ne semble pas l'allaiter, et celui-ci se redresse et se tourne vers le premier des rois mages, qui, prosterné, lui tend son présent. Debout, le second roi mage tend l'index vers l'étoile des Bergers, bien visible au dessus de la tête du premier roi. La partie de droite très dégradée montre un personnage debout, qui ne peut être que le troisième roi, puis au-dessous d'un phylactère, les moutons et les bergers.

  René Couffon a fait remarquer l'écharpe à clochettes en sautoir du second mage, écharpe suffisamment singulière dans l'art breton du XVe siècle pour qu'il y voit, dans cette sculpture attribuée aux "ateliers ducaux", l'influence des milieux "bourgeois" des pays de la Loire succédant à l'art "courtois" (cité par J.M. Guillouët).

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Le tympan du porche sud de l'église Saint-Salomon à La Martyre.

    Daté de 1450, il présente un grand intérêt à mes yeux si on le compare aux trois retables de maître-autel réalisés deux siècles plus tard. En effet, on y retrouve la même disposition d'un lit occupant plus de la moitié de l'espace, vu en profil strict, sur lequel la Vierge, allongée sur le flanc et adossée à un coussin, et dont la tête porte un long voile, allaite l'Enfant-Jésus qu'elle entoure de ses deux bras. C'est au XIXe siècle que la poitrine nue et l'Enfant furent martelée pour répondre aux convenances de l'époque. Saint Joseph, couvert d'un manteau et coiffé d'un bonnet, se tient assis, en vue frontale, le visage tourné vers la mère et l'enfant. La façon dont son fauteuil est plaqué contre le pied du lit, et la raideur ramassée de sa posture, sont très proches des retables de Ploulec'h et Plounez.

  Il semble possible qu'un personnage ait pu occuper le triangle qui ferme le porche à droite de Joseph.

  Au dessus, les têtes de l'âne et du boeuf apparaissent, dans une mangeoire, pour affirmer que nous sommes dans la crèche de la Nativité.

  Enfin, dans le coin gauche se trouve un petit personnage aux cheveux longs et vêtu d'une robe : selon toute vraisemblance, et en fidélité avec le Protévangile, il s'agit de l'une des deux sages-femmes qui ont attesté de la virginité corporelle du post-partum, Zelomi (Zahel) et Salomé. Le site Topic-topos se prononce pour Zelomi, celle qui a cru en la virginité de Marie sur la seule parole de Joseph, mais il se pourrait que Salomé ait été figurée dans le coin opposé.

   Par rapport à l'oeuvre précédente, nous constatons donc deux changements : la scène de l'allaitement et de l'alitement de Marie est traitée de manière autonome séparée du récit de l'Adoration des Mages et de l'Annonce aux bergers, avec l'accent mis sur le personnage de la Vierge plutôt que sur celui de l'Enfant, d'une part ; et à cette scène est intégré la légende des deux sages-femmes. Cela correspond, dans le Protévangile, aux versets 19,1 à 20,4.

  Autrement dit, bien que cette scène ne soit pas encore isolée d'un contexte sculptural traitant de la crêche et de la Nativité, nous avons plutôt affaire ici à une Virginité qu'à une Nativité.

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  Je peux proposer l'hypothèse que ce tympan de porche inaugure en Bretagne (peut-être précédé par d'autres oeuvres flamandes germaniques ou liguriennes) un nouveau thème ; alors qu'après le XIVe siècle les Nativités ne reprèsenteront plus la Vierge couchée, mais en adoration, le trio Vierge en gésine-Enfant-Joseph va abandonner les références à la crèche (disparition de l'âne et du boeuf, ou du lit en osier) alors qu'une colombe du Saint-Esprit va venir prendre une place centrale, et que Anne et Joachim feront leur apparition. Les sages-femmes ne seront plus là (pour répondre aux directives du Concile de Trente, mais les retables et sculptures ont pu être plus complet et perdre, comme semble l'attester la disparition de Joseph à Lanrivain, des personnages) mais le sujet sera bien celui-ci : le mystère de la Virginité mariale opéré par l'Esprit-Saint, mystère accentué par la capacité de la Vierge à allaiter.

   Il est bien naturel qu'à ce thème thèologique, noble choix des commanditaires, soit venu s'unir le besoin des femmes de pouvoir trouver une Vierge dédiée à leurs préoccupations quotidiennes de femmes parturientes et allaitantes et à leur recherche d'une puissance protectrice face aux dangers de l'accouchement et de ses suites immédiates. Si le risque vital des accouchements pour la mère dans les sociètès pré-modernes par dystocies, hémorragies, éclampsies ou infections doit être tempéré (Bertrand-Yves Mafart 2007 link) (Chiffre de mortalité per et post-partum : 0,1% actuellement en France, 0,7 % en Afrique de l'Ouest contemporaine, 1,5% au XVIIe siècle à Genève, 3% au maximum au Moyen-Âge ), il faut aussi considérer que dans la tradition scripturaire chrétienne, la Vierge a accouché sans douleur ni éffraction, et que la possibilité pour les femmes, de quelque époque que ce soit, d'invoquer Marie face aux souffrances du travail et de l'accouchement et face aux risques de délabrement répond à une nécessité très forte.

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  Conclusion.

  Les trois retables dits des Vierges couchées de N.D du Guiaudet, du Yaudet et de Kergrist en Côtes d'Armor possèdent des similitudes incitant à les étudier comme un ensemble. Ils ont été souvent mis en relation avec des influences prè-chrétiennes orientales et celtes, mais il est interessant de les confronter à l'évolution du christianisme au triple niveau théologique, scripturaire et iconographique. On relie alors ces oeuvres singulières à l'affirmation théologique de la virginité mariale d'une part, à la diffusion du Protévangile de Jacques avec ses récits de la Nativité et de la vérification de la virginité par les deux sages-femmes, et enfin à l'autonomisation en iconographie de "la Vierge en gésine sur son lit d'accouchée" comme représentation propre, avec apparition plus tardive du Saint-Esprit, opérateur de la conception et de la naissance virginale. Enfin, cette ligne de développement religieux vient rencontrer sur le plan médical et anthropologique la ligne de l'aspiration des femmes à trouver une puissance tutélaire dont le culte puisse les protéger des souffrances, des délabrements et des dangers de l'accouchement et de ses suites.

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Published by jean-yves cordier - dans Vierges couchées
14 mai 2012 1 14 /05 /mai /2012 11:46

La chapelle Notre-Dame-du Guiaudet à Lanrivain:

 

Voir aussi : 

A. LES VIERGES COUCHÉES. 6 articles.

 

http://www.lavieb-aile.com/article-les-vierges-couchees-de-bretagne-2-chapelle-du-yaudet-a-ploulec-h-105555217.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-3-chapelle-de-kergrist-a-paimpol-105604068.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierge-couchee-calvaire-de-tronoen-a-saint-jean-trolimon-29-110465874.html

http://www.lavieb-aile.com/article-la-vierge-couchee-dans-les-nativites-des-livres-d-heures-113263711.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-la-cathedrale-de-chartres-112103311.html

LES VIERGES ALLAITANTES. 12 articles.

http://www.lavieb-aile.com/article-virgo-lactens-ou-miss-nene-5-candidates-du-finistere-les-vierges-allaitantes-96615012.html

GROUPE DE SAINTE ANNE TRINITAIRE. 

Groupes dits de Sainte-Anne Trinitaire : l'ensemble de la vallée de l'Aulne

http://www.lavieb-aile.com/article-anne-trinitaire-de-la-vallee-de-l-aulne-102034812.html

Anne trinitaire de l'église de Guimaëc.

Anne trinitaire de l'église de Plougasnou.

Sainte-Anne trinitaire du Musée départemental de Quimper.

L'église du Vieux Bourg à Lothey : Anne trinitaire.

La chapelle Sainte-Anne à Daoulas.

Anne trinitaire de la cathédrale de Burgos

http://www.lavieb-aile.com/article-sainte-anne-trinitaire-de-burgos-118711405.html

 

 

 

Chapel ar Geoded : Grand pardon le premier dimanche de mai. Petit pardon le 15 août.

 

I. Présentation de la chapelle :

 1)  Selon le panneau bleu de l'entrée :

  En l'an 1692, la famine sévissait sur le pays.  Claude Alain pauvre tailleur du village de Coatcoustronnec, aujourd'hui "le Guiaudet", s'en allait avec ses dernières économies au moulin.

  Soudain la Vierge lui apparut et lui dit : "je veux qu'une chapelle soit bâtie en ce lieu en mon honneur". Claude Alain s'empressa de transmettre le message de Marie au recteur de Bothoa, Messire Grégoire Raoul.

  Par deux fois le meunier (?) fut éconduit comme un vulgaire illuminé. La troisième fois, il trouva le recteur aveugle. Il recouvre la vue sur le lieu des  apparitions où on venait de trouver une statue de Notre-Dame. On édifie alors un oratoire pour abriter la statue. A dater  de ce jour, le pèlerinage est fondé.

  En 1692, on commence la construction de la chapelle et en 1712, celle du clocher. En 1920, le campanile est reconstruit et en 1925, le carillon de seize cloches est installé. Une des principales caractéristiques est la représentation de la Vierge couchée au centre du retable principal. Le mot "guiaudet" signifierait "celle qui a enfanté".

2)   Selon les panneaux dans l'église :

  • 1695 : début de la construction par Guillaume Le Gall, "maistr architectque" de Peumerit-Quintin. Sur la façade est écrit cette inscription: "Monseigneur de Francheville évêque de Périgueux bienfaiteur insigne 1695".
  • 1712, fin de la construction de la chapelle
  • 1794 : le 6 février, les agents de la Révolution prennent les calices, les ciboires, les chandeliers (tous les effets d'or, d'argent et de plomb). Le 1er mars les deux cloches de la chapelle sont déposées à Guingamp où elles sont fondues. La chapelle est fermée jusqu'en 1802 et le culte interdit sous peine de mort.
  • 1853 : restauration de la chapelle et donation de nombreuses bannières. Les deux retables de l'Assomption et de l'Annonciation sont réalisées par Le Bourhis peintre à Guingamp.
  • 1899, construction des fontaines grâce au recteur Dom François Marie Daniel qui va mourir quatre mois après la fin des travaux (son gisant se trouve dans la chapelle).
  • 1920, le campanile est rehaussé d'un étage pour y loger d'autres cloches. Un petit édicule est construit sur le placître avec les restes des piliers de justice de Beaucours, près de Lanrivain.
  • 1925 : le carillon de Guiaudet compte seize cloches, d'un poids total de 1700 kg. Chacune a un prénom, un parrain et une marraine.
  • 1928 : bénédiction du chemin de croix extérieur, 14 stations en fonte portées de part et d'autres par des stèles de granite.

 3) Selon Maurice Dilasser (Patrimoine religieux en Bretagne, Le Télégramme, 2006), le terme Guéodet signifie "cité", et la chapelle de ce nom honore Notre-Dame qui veille sur elle.

  Selon le site Infobretagne, la Vierge est apparue à Claude Alain en un lieu relevant de la seigneurie de Pélinec, et c'est grâce à une donation du seigneur de Pélinec, Monseigneur de Francheville, que la chapelle fut construite. 

 

Portail : ITRON VARIA GWIODED PEDET EVIDOMP, Notre-Dame du Guiaudet priez pour nous.    

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Le clocher et les seize cloches de son carillon :

  "C'est le seul carillon en activité à jouer des airs typiquement breton dans notre région. Le campanile, reconstruit en 1916 par l'architecte Léon Cosson de Saint-Brieuc, possède alors quatre cloches. En 1922, cinq autres cloches acquises auprès de la fonderie Cornille-Havard de Villedieu-les-Poêles leur sont adjointes, suivies par sept nouvelles en 1924 pour constituer ce carillon unique en Bretagne.*

Lors de la construction du carillon, les battants étaient munis de fil de fer sur lesquels on tirait pour faire tinter les cloches. Cette manière de sonner était sportive, car agir successivement sur seize cloches étaient une tâche difficile qui n'était pas à la portée de n'importe quel sonneur !

Comme il n'était pas entretenu le mécanisme s'est détérioré si bien que depuis la guerre le carillon du Guiaudet était tombé dans l'oubli. En 1963 un système électrique est installé. Il permet la commande des cloches à partir d'un clavier dans la tribune. En 1992 et en 2001 le carillon est restauré. Les airs joués sur cette instrument puisent essentiellement dans le répertoire populaire. En introduisant une pièce de 2 Euros dans le monnayeur situé au fond de la chapelle vous pourrez entendre les célèbres cantiques Me Ho Salud Mari et Itron Varia Guiaudet."

(Affiché sur la porte d'entrée par l'Association pour la chapelle N.D. du Guiaudet)

* Cinq cloches proviennent de la chapelle Saint-Yves de Caranhuel, en ruine.

Pour entendre le carillon : DSCN0001 DSCN0001

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La fontaine double de la Vierge et de saint Jean-Baptiste : elle était fréquentée par les femmes enceintes.

L'inscription gravée sur le linteau au dessus de la Vierge à l'Enfant  est MONSTRA TE ESSE MATREM : c'est le début d'un motet en l'honneur de la Vierge : Monstra te esse matrem ; / Sumat per te preces, / qui pro nobis natus, / tulit esse tuus. Ou plus précisément c'est la quatrième strophe de l'Ave Mars Stella, Salut, Étoile de la mer : Montre-toi notre mère, / qu'il accueille par toi nos prières / Celui qui, né pour nous / Voulu être ton fils.

  C'est aussi l'invocation frappée sur les médailles miraculeuses remises aux Enfant de Marie.

  La traduction de l'hymne marial est : "Montre-toi en tant que mère", "témoigne de ta maternité" : c'est à la Vierge à l'Enfant que le fidèle s'adresse, et il la prie comme un petit enfant s'adresse à sa mère pour en obtenir protection, tendresse,soins et nutrition, certes comme intercetrice auprès de l'Enfant-Dieu mais aussi pour transférer sur le fidèle les trésors de maternité que Marie a déployé pour son Fils.

  Mais, placée au dessus d'une Vierge à l'Enfant d'une fontaine vénérée par les femmes enceintes, dominant le filet d'eau qui s'écoule et remplit le bassin dévotionnel, cette citation évoque aussi la lactation, parce que ce sont ces paroles que saint Bernard prononçait en adoration devant une statue de Marie à l'église de Saint-Vorles de Châtillon-sur-Seine lorsque, du sein de la Vierge allaitante sortit un jet de lait qui vint frapper les lèvres de saint Bernard ; et ces quatre mots latins font désormais référence à cette Sainte Lactation. 

  Donc, lorsque je découvre les explications fournis par l'Association de sauvegarde, qui mentionnent que "les mères qui ont du mal à obtenir du lait pour nourrir leurs enfants y viennent prier car ces fontaines sont réputées pour guérir ce mal", je ne suis pas surpris, et je peux parier qu'elles font bénéficier leur poitrine d'ablutions dévotes.

Par ailleurs, le jour du pardon, de nombreux fidèles se baignent les yeux pour se protéger (en pensant au recteur de Bothoa devenu aveugle mais qui fut guéri par la Vierge), alors que d'autres font des voeux en lançant une pièce : si elle tombe dans le trou percé dans la dalle au fond de la fontaine, ils seront exaucés. 

  Les bassins rectangulaires servent aux pèlerins à se baigner les pieds.

 

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      L'intérieur de la chapelle vers le choeur : 

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L'intérieur de la chapelle, vers la porte occidentale :

A gauche, prés de la porte d'entrée, le gisant du recteur F.M. Daniel (1805-19 juin 1881), né à Mousterus (Pédernec) et "recteur de Lanrivain où il passa 39 années de sa vie de prêtre".

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II. Le retable du maître-autel, La Sainte Famille.

  Si le retable lui-même date de la fin du XVIIe, il est associé à un tabernacle et à des décors floraux du XVIIIe, et à un autel qui porte l'inscription suivante : Donné par Monsieur Daniel recteur de Lanrivain 1872 sur sa face sud, et les signatures suivantes sur sa face nord : Philippe Le Merer et fils sculpteurs Lannion, Cotes du Nord, G. Merrien Père et Fils Peintres à Saint-Nicolas du Pelem Cotes du Nord 1875-1876.

  Il comporte sept personnages répartis en quatre étages, de haut en bas :

  • Dieu le Père
  • Le Christ bénissant entouré de saint Joachim à sa droite et sainte Anne à sa gauche
  • Saint Joseph et saint Jean-Baptiste
  • La Vierge couchée et son Fils, sous le triangle rouge de la Trinité

  Ces personnages sont regroupés sous le vocable de la Sainte Parenté regroupant les trois générations  des grands-parents Anne et Joachim, du couple de Marie et Joseph, puis de Jésus et de son cousin Jean-Baptiste. On désigne aussi sou le même terme les groupes trinitaires Anne = Marie = Jésus, ou encore les demi-frères du Christ selon la tradition des remariages de sainte Anne avec deux autres maris.

  Ce retable a été restauré en 1856 puis en 2000 par un groupe de huit catalans.

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Dieu le Père bénissant, entouré de deux anges ; un chérubin se détache de son manteau pourpre, alors que la colombe du Saint-Esprit, ailes étendues, réalise le trait d'union avec la statue du Christ.

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En dessous, trois niches reçoivent trois personnages : Saint Joachim, le Christ en Sauveur du Monde (Salvator Mundi tenant le globe et bénissant) et sainte Anne.

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Saint Joachim, a perdu l'attribut qu'il tenait dans la main droite. Les portraits traditionnels le montrent tenant une pelle. C'est le mari de sainte Anne et ce serait donc le père de Marie et le grand-père du Christ : ce registre présenterait Jésus entouré de ses deux grands-parents maternels. Mais il convient d'employer le conditionnel car la naissance de Marie, certes née du ventre de sainte Anne, est survenue miraculeusement après des années de stérilité par une grâce divine après que les époux aient échangé, selon le proto-évangile de Jacques, un simple baiser sous la Porte Dorée : un peu comme Joseph, Joachim serait peut-être un père-de-famille plutôt qu'un père biologique, Jésus et sa Mère se situant dans un écart des normalités biologiques...mais encore une fois le conditionnel s'impose.

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        Sainte Anne est représentée selon les critères habituels, la tête couverte par un voile, portant la guimpe de toile blanche et vêtue, comme son mari, d'un manteau vert à galon doré. Elle tient ses bras écartés, certes en signe d'accueil, mais ce geste reprend aussi celui par lequel elle enserre, dans les groupes trinitaires, la Vierge et l'Enfant : aussi cela m'évoque un geste en relation avec sa dimension de Mère primordiale.

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Saint Jean-Baptiste tient le livre, l'agneau et la croix : l'agneau fait référence à Jean 1, 29-31 : "Comme Jean Baptiste voyait Jésus venir à lui, il dit : "Voici l'Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde ; c'est de lui que j'ai dit : Derrière moi vient un homme qui a sa place devant moi, car avant moi il était."

  Jean Baptiste est le fils de Zacharie et d'Élisabeth, la cousine de Marie à qui l'archange est venue annoncer, comme à Marie, qu'elle allait enfanter.

  Il est vêtu sous son manteau d'une peau de bête pour rappeler qu'il vivait "caché dans le désert", se nourrissant "de sauterelles et de miel sauvage" (Mat. 3, 4), mais aussi pour signaler son statut d'être "à part", "à l'écart", qui est celui du nazir ou nazarien, juif qui fait voeu d'ascétisme et renonce à couper ses cheveux et sa barbe : c'était la longueur de sa chevelure qui conférait à Samson, autre nazir célèbre, sa force phénoménale : ici, les cheveux longs, la barbe et les poils de bête témoignent de la vigueur spirituelle de cet homme de Dieu.

 

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La Vierge allaitante  couchée.

On peut la nommer aussi Vierge parturiente (comme le fait le Service Régional de l'inventaire ; "parturiente : accouchée, qui accouche"), ou Vierge en couche. Mais on voit bien qu'il manque dans notre langue un terme (la médecine doit utiliser le terme latin de "post-partum") pour désigner la suite de couche, et que ce manque de mot témoigne de la nécessité de laisser dissimulé cette période de la vie féminine.

    Elle apparaît dans une niche de bois dorée qui forme une scène de petit théâtre en même temps qu'un baldaquin tendu d'un ciel de lit et de rideaux rouges galonnés d'or. Ces rideaux s'ouvrent sur un fond bleu ciel ; un triangle rouge frappé des lettres de Yahvé témoigne de la puissance divine aveuglante et surnaturelle rayonnant de tous ses feux à travers un cercle de nuées.

   Contrastant avec la dramaturgie impressionnante de ce décor, Marie est allongée dans un lit, tournée sur le coté droit, à demi relevée au moyen d'un bon coussin, et en se rapprochant, on constate qu'elle est en train d'allaiter son enfant ; elle a libéré quelques boutons de son corsage pour libérer le sein gauche, que l'enfant maintient de son petit bras.

  Il s'agit donc d'une jeune mère, dans les suites de couche, qui allaite en position allongée : rien, dans sa posture, ne relève d'un programme théologique, et on lit en 2012 dans les conseils données aux jeunes accouchées la description de ce moment : " Comment allaiter bébé ? Dans la position allongé, tournez-vous simplement sur le coté et installez votre petit face à vous, sa bouche à la hauteur du mamelon. Vous pouvez replier votre jambe supérieure pour ne pas basculer en avant et vous caler à l'aide d'un coussin dans le dos."

  Marie semble fatiguée, le regard pensif, fixe et triste, mais "cette fatigue ne doit pas inquiéter, elle concerne la totalité des femmes qui viennent d'accoucher". Au baby-blues se combine l'état "magique" de l'allaitement, petit bonheur intime mais aussi somnolence provoquée par la prolactine.

     C'est cela qui est troublant dans ce retable : le contraste entre une scène très familière mais très intime, que la plupart des mères n'exposent pas ostensiblement, et la grandiloquence des fastes lumineux du Sacré. Cette femme donnant le sein dans son lit peut déjà, en soi, offenser la pudeur. Placée sur un autel au dessus du tabernacle et en dessous des insignes les plus éclatants de la puissance divine, elle oblige le fidèle à un saut paradigmatique qui divinise les fonctions maternelles d'accouchement et d'allaitement comme conditions nécessaires et suffisantes de l'Incarnation.

  Face à cette présence inhabituelle, on évoque vite des influences pré-chrétiennes : culte égyptien d'Isis, cultes orientaux, traditions celtes... La présence de sainte Anne dans le registre supérieur vient rappeler que le culte breton rendu à Anne a été lui-même rattaché à ces influences.

  Le nom de Guiaudet interroge également : on peut souscrire à la proposition d'y voir une forme du breton signifiant "accoucher", mais cette étymologie est qualifiée de fantaisiste par les spécialistes, et il faut le rapprocher d'autres toponymes comme Yaudet, Guedet en Larré (Morbihan), Géodet (ancienne vierge allaitante de Quimper), Yeudet en Goudelin (22). 

   

  

 

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III. Le retable de l'Ascension de la chapelle sud :

restauré en décembre 1997.

  Autour d'un tableau représentant l'Ascension de la Vierge se trouvent, dans leurs niches respectives, deux statues du XVIIe siècle de saint Corentin et saint Isidore. 

 

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Saint Corentin 

est vêtu en saint évêque d'une dalmatique, d'un surplis et d'une robe sur laquelle est, maladroitement ou naïvement, fixé un poisson qui est son attribut. Nous ne sommes pas, pourtant, dans l'évêché de Quimper et du Léon, mais dans celui de Saint-Brieuc, mais jadis la paroisse de Lanrivain était une trève de Bothoa qui appartenait au diocèse de Cornouaille, dont Corentin est le patron.

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Saint Isidore :

  On sait qu'il s'agit du saint patron des cultivateurs, et on comprend sa présence dans cette chapelle rurale.  Il ne tient pas la faucille et une gerbe de blé, comme d'habitude, mais le long manche d'une sorte de binette ou de houe (le fer de cet instrument date de la restauration de 1997). On remarque l'absence de chapeau. Ses cheveux longs, ses braies larges ou bagou braz, ses guêtres et ses souliers de cuir sont ceux des paysans bretons, traits de la quasi totalité des statues de saint Isidore, mais sa veste longue mérite d'être détaillée. La statue datant du 17e siècle, elle témoigne du mode vestimentaire des paysans de Lanrivain.

  Cette veste longue est resserrée par une ceinture, elle se ferme par dix gros boutons de laiton en laissant libre les deux basques qui portent chacune une poche ; les manches s'évasent par une fente.

  L'encollure est remarquable mais je n'ai pas les compétences requises pour l'étudier. 

Saint Isidore en costume breton : Logonna -Daoulas.

Église de Brélès : anges musiciens et Isidore en costume breton.

 

 

 

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IV. Le retable de l'Assomption de la chapelle nord : 

restauré en avril 1997.

  Face à l'Ascension du coté sud, le tableau de l'Assomption continue à honorer la Vierge et les moments glorieux de sa vie. Comme son homologue, c'est une toile peinte en 1853 par Hubert Le Bourhis. Les chapelles latérales ne comportaient initialement que les retables du 17e, et c'est en 1876 qu'un autel et un fronton est venu compléter chaque retable, vraisemblablement par les mêmes artisans qui réalisèrent à la même époque le maître-autel, Le Merrer de Lannion et Merrien de Saint-Nicolas-du-Pelem.

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La vierge habillée : Notre-Dame de Guiaudet :

  Voilà une autre constatation sur laquelle je m'interroge : dans tous les sanctuaires où se trouve une Vierge allaitante ou une Vierge couchée, le culte est détourné vers une autre statue dépourvue de tout caractère choquant ou impudique et qui reçoit la dévotion des fidèles. Ici, c'est une statue de vierge à l'Enfant (et non un simple mannequin comme parfois) qui est habillée de la façon la plus prude avec une robe et un manteau qui remonte haut autour du cou et descend jusqu'aux pieds, englobant l'enfant dont seul la tête et le bras sont visibles. 

  Elle est présentée dans une niche portant le titre ITRON VARIA AR GUIAUDET , Notre-Dame du Guiaudet, laissant penser que c'est elle qui est la patronne de la chapelle, elle qui a été trouvée par Claude Alain et qui est à l'origine de la fondation de la chapelle ; or, la légende mentionne la découverte d'une vierge couchée.

  C'est elle, d'abord comme Vierge à l'Enfant puis comme Vierge habillée  qui est présentée sur les vitraux qui exposent les miracles qu'on lui attribue.

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  Curieux aussi de découvrir une autre statue, placée sur un brancard de procession et présentée sous un dais de drap bleu clair. J'ai cru qu'il s'agissait de la version portable de N.D. Du Guiaudet, mais il s'agit d'une Éducation de la Vierge, ou sainte Anne apprend à lire à sa fille.  On constate que sainte Anne est systématiquement associée au culte de N.D. du Guiaudet, ici au pied de l'autel nord, ou sur las bannières, ou au dessus du maître-autel.

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V. Les autres statues :

Saint Vincent Ferrier :

Bois polychrome à revers évidé du XVIe siècle. La main gauche tient un livre, la main droite un manche d'outil ou un bâton. H : 1m08.

 

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VI. Les bannières :

 

      Bannière de saint Jean l'évangéliste avec l'inscription Zant Ian Mignon Jezus que je traduis par saint Jean , disciple préféré de Jésus.

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      Initiales S J de Saint Jean (?)

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     2)  Bannière de Notre-Dame du Guiaudet :

a) Une face représente la statue de Vierge habillée et couronnée :

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b) L'autre face me semble plus ancienne, et, en tout cas, bien plus belle, bien qu'elle soit abimée.  C'est elle qui porte cette fois-ci le nom de N.D. Du Guiaudet, ce qui entretient l'ambiguité. 

On se rapportera à la bannière homologue de la chapelle du Yaudet : les représentations de Vierge Couchée étant rares, il faut porter toute son attention à cet exemple. Sous un baldaquin un rideau tiré dévoile la Vierge et son Fils, tous les deux allongés ou à demi-assis dans le lit sous le regard d'un troisième saint personnage qui ne peut être que saint Joseph. Celui-ci tient un livre, c'est bien-sûr l'Écriture Sainte dont il constate sous ses yeux la réalisation. "Voici que la Vierge concevra et enfantera un fils, et on l'appellera du nom d' Émmanuel." La colombe de l'Esprit-Saint domine le tableau.

 

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Inscription : M' HO SALUD MARI  et   ITRON AR GUIAUDET

                  Ecce Virgo concipiet / Guerch'ez ha mam

 1)  Les inscriptions du haut et du bas sont les titres des deux cantiques bretons que joue le carillon: Me ho salud Mari, "Je vous salue Marie", et Itron varia Geodet, "Notre-Dame du Guiaudet".

  2) Au milieu, en caractère plus petit, nous trouvons d'abord une citation biblique d'Isaïe 7, 14 qui est reconnue dans la tradition chrétienne comme annonçant la conception du Christ par la Vierge, ici illustrée par l'Annonciation, mais qui est aussi reprise dans les arbres de Jessé :Propter hoc dabit Dominus ipse vobis signum  Ecce Virgo concepiet et pariet filium et vocabitis nomen eus Emmanuhel / Butyrum et mel comedet ut sciat reprobare malum et eligere bonum : Voici qu'une Vierge concevra et enfantera d'un fils, qu'on appellera Emmanuel. Il se nourrira de beurre, jusqu'à ec qu'il sache rejeter le mal et choisir le bien" 

  Cette citation est aussi le titre d'un chant grégorien répandu.

3) Puis vient Guerch'ez ha mam, "Vierge et mère", cantique breton que je n'ai su retrouver.

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      ITRON AR GUIAUDET : 

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3) bannière Le Minor dédiée à saint Grégoire:

Les bannières Le Minor.

   Saint Grégoire est le patron de l'église paroissiale de Lanrivain. Comme l'indique le certificat d'authenticité, la bannière a été financée par l'Association de sauvegarde de N.D. du Guiaudet, brodée par Jean-Michel Pérennec et réalisée en 2006.

  Le blé et les feuilles et pampres de la vigne représentent bien-sûr l'eucharistie ; une face de la bannière représente un pape, il s'agirait donc de Grégoire le Grand, le Père de l'Église et le  père du grégorien, dont le pontificat s'étendit de 590 à 604. Au verso, on trouve un évêque brun et barbu qui tient une tête barbue et grise : s'agit-il de Grégoire de Nysse, de Grégoire de Langres, de Grégoire de Tours ? Aucun n'est céphalophore de tradition. J'aime bien les petits détails énigmatiques, et j'aime encore plus en trouver le sésame, tant-pis.

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Les vitraux de 1901:

8 baies soit 16 panneaux traités comme des scènes indépendantes autour de la légende, des miracles et du pélerinage de Notre-Dame du Guiaudet : ils sont précieux d'une part pour l'histoire du costume (costume breton et costrume écclésiastique) et pour les techniques utilisées. En outre, ils inscrivent de manière durable les noms des paroissiens donateurs.

  J'ai trouvé sur les panneaux explicatifs placés dans l'église les renseignements suivants :

L'histoire de la découverte de la statue :

Claude Alain, pauvre paysan, vient habiter Coatcoustronnec au lendemain de ses noces. En 1662, il est le père de 12 enfants, et s'inquiète de la dissette qui ne lui a pas permis de récolter suffisamment de blé. Il se rend au moulin de Goas-Salo avec les derniers sous qui lui restent pour acheter de la farine. Mais au moment où il va franchir le ruisseau (qui alimente les fontaines actuelles du Guiaudet), il voit la Vierge et entend sa douce voix lui dire : "Allez à Bothoa, rendez-vous auprés du recteur et dites-lui que je veux qu'une chapelle soit bâtie en ce lieu, en mon honneur, et de saint Jean, le disciple bien aimé de mon Fils. Afin que vous sachiez que c'est la Mère de Dieu qui vous parle, vous serez témoin aujourd'hui même d'un prodige : la minime quantité de farine qui reste dans votre jarre suffira à votre entretien et celui de votre famille pendant plusieurs jours".

   Le recteur de Gothoa Dom Raoult vient de renvoyer Claude Alain en le traitant de doux réveur illuminé : il referme la porte du presbytère et réalise qu'il est devenu aveugle. L'abbé Raoult est en soutane , le paysan / tailleur porte une veste courte, une ceinture de flanelle rouge, les braies bouffantes, des guêtres et des sabots, et le chapeau rond large.

1) Vitrail offert par les familles de Séré, Le Provost -Meurou.    

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Dans le village de Coatcoustrennec,près d'un cours d'eau bordé de saules, nous voyons Claude Alain avec son sac vide témoignant de la famine qui sévit ; la Vierge lui apparaît, tenant l'Enfant. En arrière plan, un édifice que je ne décrypte pas et deux fillettes, peut_être les enfants de Claude Alain.

 

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      2) Vitrail offert par Car. Pennec, J.M. Breton, Math. Maout, Y. Lucia, M. de Cuverville, Y. Oger.

  A la troisième apparition, devant l'incrédulité du recteur, la Vierge indique l'endroit exact où on découvre une statue en bois à son effigie

 

La statue de la Vierge, placée sur un rocher, reçoit les prières d'un groupe de personnes de la paroisse, en costume traditionnel : les hommes en veste, gilet, ceinture rouge, bragou braz, guêtres et sabots et les femmes en coiffe, robe et châle, tablier.)

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  A la fin  d'une procession où la statue récemment découverte est portée sur un brancard par deux diacres ou enfants de choeur en surplis rouge, l'abbè Grégoire Raoult, placé à coté de Claude Alain, recouvre la vue miraculeusement.

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      3) Vitrail offert par L. Derrien père, J. Lucia, Marguerite Cozler et P. Mahé.

 

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La signature de l'acte de concession du terrain par son propriètaire Monseigneur de Francheville.

L'évêque est assis à coté du recteur et devant les notaires Launay et Poulain. Debout le frère de Monseigneur de Francheville, avocat membre du Parlement de Bretagne, donne lecture de l'acte.

 Les armoiries épiscpales sont vraisemblablement celles de Mgr de Francheville.

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Vitrail offert par Léon Falher, vicaire, et la Fabrique de Lanrivain.

  Le vitrail donne à voir la célébration d'une messe des défunts, le prêtre portant sa chasuble noire. Les deux Vierges du Guiaudet sont visibles, à peu-près à la place actuelle.

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  C'est la scène qui précède le vitrail de l'office funèbre, c'est-à-dire l'administration à un mourant des derniers sacrements. 

 

 

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Vitrail offert par Y. Le Men, recteur.

Il célèbre un miracle survenu pendant la guerre de 1870 lors de la défense de Saint-Privat-la-Montagne en Moselle : lors des combats du 18 août 1870 où 27 000 soldats français tiennent tête à 100 000 soldats prussiens, un breton de Lanrivain, Thomas Le Cam, de Kérien, voit le canon de son fusil éclater sous l'effet d'éclat d'obus alors qu'il échappe lui-même à la mort parcequ'il invoquait N.D. du Guiaudet.

 

 

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Un autre exemple de miracle : des matelots dans une barque échappent à un naufrage.

 

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Offert par les paroissiens de Lanrivain.

Un accident de charette : Une charette a versé, peut-être après qu'un moyeu ait cédé, et le cheval a les quatre pattes en l'air. Un passager se remet de la commotion, adossé contre un arbre. Le pauvre conducteur est tout chaviré, mais pendant qu'un homme lui porte assistance, une religieuse a l'idée d'invoquer à genoux N.D. du Guiaudet.

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Une naissance :

La représentation d'une naissance dans une famille de la paroisse nous permet de retrouver ce moment particulier de la "femme en couche", alitée dans les suites de l'accouchement et qui témoigne par le geste de ses mains de son émerveillement devant le joyeux avénement d'un beau bébé. Trois femmes sont venues l'assister, l'une berce l'enfant, l'autre tient une bassine de cuivre, la troisième prépare des linges. Le père, bras croisé, se remet de ses émotions.

 

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Vitrail offert par Françoise Savéan et Thomas Savéan Kergreis

                                                            

Fête du deuxième centenaire de 1892 : la technique utilisée pour ce vitrail est particulière et donne l'impression que les visages des personnages proviennent de photographies; Monseigneur Fallières bénit les pélerins.

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Scéne rappellant les grandes Missions, ou le Pardon  : un prédicateur rappelle aux pélerins les voies de la sainteté tandis que quatre hommes portent le brancard avec la statue de la Vierge habillée. Un grand feu, le Tantad, est figuré ici .

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L'atelier Vermonet de Reims

Albert-Louis Vermonet (1853- ) ouvrit son atelier à Reims en 1880 ; il collabora avec Pommery de 1882 à 1897 (atelier Vermonet-Pommery) . 4000 édifices lui doivent leurs vitraux.    

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Published by jean-yves cordier - dans Vierges couchées
14 mai 2012 1 14 /05 /mai /2012 11:41

           Les Vierges couchées de Bretagne (2) :

            Chapelle du Yaudet à Ploulec'h (22).

 

Le pardon a lieu le troisième dimanche de mai.

 

I. Présentation.

    A trois kilomètres du bourg de Ploulec'h (22) et à 8 km de Lannion, la chapelle du Yaudet est établie sur un ancien éperon barré qui domine, comme on le constate sur le panneau placé sur le parking, la baie de la Vierge à gauche et la rivière de Lannion ou Leguer avec le port du Yaudet à droite. Il s'agit d'un site mesolithique (premières traces d'occupation vers 8000 av.J.C), mais aussi d'une ancienne place forte celte sous le nom de Koz Yeoded, puis d'un emplacement romain sous le nom de Vetus Civitatis; l'importance de ce lieu dans le controle du carrefour des voies Brest (Gesocribate)-Erquy et de celles allant vers Carhaix (Vorganium) ou vers Perros.

  Le toponyme Vetus Civitatis est retrouvé sous la forme "vieille cité" (1267) ou sous la forme bretonne Keodet ou Cozqueoudet (1638), puis on retrouve en 1707 "le lieu et mettrerie noble de Guéaudet ou La Vieille Cité" et en 1826 le toponyme Le Guyaudet sur le cadastre.

  


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      La chapelle est composée d'une nef et de deux collatéraux inscrits dans un plan rectangulaire, et d'un choeur fermé par une grille, placé dans le prolongement de la nef et terminé par un mur plat. Ce mur supporte sur toute sa largeur le retable du maître-autel, mais deux portes donnent accès à la sacristie à trois pans qui a été rapportée par la suite (vers 1950). 

   Elle a été édifiée en 1860 à la demande de la famille Kerninon après la destruction de la chapelle primitive, qui datait de la seconde moitié du XVe siècle (1483), mais en a conservé certains éléments (portes, fenestrage), dont le retable qui va maintenant nous intéresser. 

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http://www.histo.com/quotidienne/quotidienne2/01022006.pdf

http://www.sos-21.com/tl_files/SOS-21_Data-center/CG22/Sentier-decouverte_Yaudet-IV.pdf

 

 

 

II. Le retable du maître-autel.

     Il daterait du XVIIe siècle. Au dessus de l'autel et du tabernacle encadré de deux anges photophore, une alcôve au fond bleu, occupée presqu' entiérement par un lit blanc, est surmonté d'un fronton orné de guirlandes ; deux anges s'y accoudent et regardent l'assistance. De chaque coté trouvent place les niches qui abritent les statues des parents de la Vierge, sainte Anne et saint Jaochim. Le monogramme marial s'inscrit en lettres blanches sur fond bleu.



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1. Peinture du devant-d'autel : la Vierge couchée ? 

   C'est un panneau peint à la fin du XVIIIe en faux-marbre sur l'antependium, sur lequel s'inscrit un ovale d'où divergent des rayons dorés. Au centre, la Vierge (ou du moins une femme, sans auréole)  y est allongée, les mains jointes, la tête coiffée d'un voile ; trois personnages l'entourent, dont deux écartent les bras pour témoigner du prodige qu'ils constatent alors que l'homme du milieu, qui porte une étole et un livre, fait un geste de bénédiction. Il s'agit donc d'une Dormition, et non d'une nouvelle illustration de Vierge accouchée, et seul le décubitus marial s'accorde avec le sujet du retable. Cela montre que si les deux épisodes (Nativité et Dormition) sont deux moments de la vie de la Vierge totalement étrangers l'un à l'autre, la posture déclive les rapprochent et crée une parenté iconographique.


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 Le monogramme marial M A inversé , les guirlandes, les bouquets glorieux et les deux anges :

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 Sainte Anne.

  La présence des parents de la Vierge est retrouvée ici comme à Lanrivain pour le retable de Notre-Dame du Guiaudet, et ne répond pas à un hasard : le programme du commanditaire est dicté par un projet théologique, par une lecture des Écritures et des textes apocryphes pour conduire le fidèle à un approfondissement de sa contemplation de l'un des mystères joyeux, celui de la Nativité : Nativité de la Vierge (fêtée le 8 septembre) et Nativité du Seigneur. Il s'agit de mystères à méditer dans la mesure où le naturel et de la physiologie de l'enfantement s'unit au surnaturel de l'Incarnation de la Divinité, et dans la mesure où ces deux enfantements surviennent par une conception "immaculée".

  

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b ) Saint Joachim.

 

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c) les anges photophores :


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III.  La Vierge couchée.

  J'en arrive à ce qui motive ma visite, comme celle de nombreux visiteurs avant moi, cette curiosité d'art religieux, l'un des trois exemples bretons de Vierge couchée ou Vierge accouchée. L'effet est surprenant et le seul fait de voir un lit, un de ces lits si commun jadis avec leur épais matelas, leur édredon moelleux et leur couvre-lit d'étoffe blanche, ce mobilier si prosaïque et si intime de nos chambres à coucher hissé à trois mètres du sol au dessus des fastes du saint autel provoque un sentiment de familière étrangeté : l'incongruité du spectacle déstabilise l'esprit et crée la meilleure disposition à l'éveil spirituel qu'il soit : le questionnement. 

   Tout en effet opposeraient les certitudes religieuses qui affirment des réponses, avec l'ouverture spirituelle, qui pose des questions et stimule la méditation sur les mystères de l'existence. 

  Or le visiteur -ou le fidèle- n'est pas au terme de sa surprise quand il constate que dans ce lit de Grand-Mère de Chaperon rouge, seules émergent de la couette deux têtes couronnées comme des communiantes, celle de la Vierge et celle de l'Enfant. Les questions reprennent, on cherche à savoir s'il s'agit de deux statues entières, et, le cas échéant, quelle tenue les habille. La Mère est-elle (quoique que cela n'apparaisse pas) en cours d'allaitement comme à Lanrivain ? Bref, l'esprit curieux souhaiterait savoir comment c'est fait. Mais la réponse, qui doit être accessible au sacristain ou aux bonnes âmes de la paroisse qui viennent faire le lit, ou encore aux spécialistes d'art sacré de l' Inventaire Culturel, n'est donnée nulle-part (je le croyais : voir infra).

 

 

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        Le visiteur trouve dans la chapelle un extrait du livre de l'abbé Le Clech, qui fut recteur de Ploulec'h de 1934 à 1956, dans lequel il défend la thèse d'un culte préchrétien voué à Cybèle, concession de l'occupant romain soucieux de flatter une population celte enseignée par les Druides et attendant "la Virgo paritura, la vierge qui doit enfanter". Dans un temple bâti sur l'emplacement de l'actuelle chapelle, on adorerait la Mère des dieux et la déesse de la terre sous forme d'une femme couchée allaitant son enfant. Puis lors de l'évangélisation de la région par des émigrants venant de la Bretagne insulaire (VIe siècle), les moines ou prêtres auraient repris ce culte d'une vierge allaitante et alitée pour représenter la Vierge et son Fils. Enfin, à la Renaissance, un retable aurait donner de cette Vierge  la représentation que nous connaissons.

        Mais Georges Provost , maître de conférence en histoire à Rennes 2 (Un lieu saint et ses représentations, le Yaudet Ann. Bret. Pays Ouest 110-2, 2003) a souligné les faiblesses scientifique de cette interprétation. Il indique aussi  que dès 1778, un clerc du Trégor écrivait que cette Vierge "pourrait être une effigie d'Isis".

     Surtout ce prêtre la décrit "couchée dans sa longueur, allaitant l'Enfant-Jésus, et toutes les marques caractéristiques d'une nourrice sont à découvert" Cela indique bien que ce couvre-lit n'est venu recouvrir jusque sous le menton la mère et l'enfant qu'après cette date, et qu'à l'époque, la Vierge donnait bien le sein à l'Enfant. L'auteur confirme son information lorsqu'il écrit : "Or, Isis ou la terre était ordinairement représentée sous la figure d'une femme en couche et d'une nourrice donnant la mamelle à son enfant". 

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Une vue rapprochée montre que les visages, malgré leurs yeux bleus, ne sont pas très beaux et que leur facture est assez grossière. On verra que saint Joseph, assis au pied du lit comme n'importe quel père dans une chambre de maternité, n'a pas l'oeil plus vif. Les trois personnages semblent plongés dans leur pensée, dans un monde onirique de lourd malaise. 

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  Celle qui est la plus gracieuse est la colombe qui vole au plafond, sous le ciel-de-lit. Elle ne surprend pas le spectateur, qui connaît les conventions et sait qu'il a affaire au Saint-Esprit, mais là encore pourtant, le volatile est un peu trop naturalisé, trop bien plumé pour être pris au sérieux: la ficelle est trop grosse, et une fois de plus l'esprit vacille face à un élément trop familier pour le conduire vers les sommets théologiques. L'effet de confusion et de trouble se poursuit.


 

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  Qui est le personnage assis ? Un  psychanalyste au pied du divan, absorbé en attention flottante dans l'écoute bienveillante de sa divine patiente avant de transcrire de son pencil phallique des notes sur son calepin ? Sans-doute pas.

 Les uns y voient Isaïe venu constater la réalisation de sa prophétie, "Voici qu'une Vierge enfantera...".

  Les autres, et notamment l'abbé Le Clech dans sa monographie, y voient Dieu-le-Père, assis sur un trône,  en royauté avec le sceptre, la couronne et le manteau de pourpre, tenant "le livre de la généalogie". Il compléterait ainsi la Trinité avec le Fils, dans le lit, et le Saint-Esprit, en vol.

  Néanmoins, en comparant ce retable avec celui de Lanrivain et celui de Kergrist, ou avec les Nativités à Vierge alitée de La Martyre ou du Folgoët, je pense que l'hypothèse qu'il s'agisse à l'origine de saint Joseph ne peut être écartée : la couronne a été manifestement rajouté au dessus d'un bonnet à poil court. Le sceptre n'est peut-être pas non plus d'origine. Dieu le Père aurait un visage plus noble, une barbe plus fleurie, une posture plus digne, et ne serait pas placé à une place subalterne sur cette scène. Et si on voit cette Vierge Couchée comme une forme de Nativité, la présence de Joseph est bien naturelle.

 Je fais observer que le personnage est placé, avec son fauteuil, sur un piedéstal d'une trentaine de centimètre et domine d'autant le plan du lit.



 

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La Vierge en couche en carte postale :

Deux cartes postales visibles en ligne nous montrent que la literie et l'encadrement de l'alcôve ont pu varier librement au cours du XXe siècle, avec un lit proche de la baignoire en sabot, bonne occasion d'étudier l'évolution des styles et du goût. ; mais dans tous les cas, la vierge en gésine et son enfant restent soigneusement emmitouflés: 

http://www.notrefamille.com/cartes-postales-photos/cartes-postales-photos-La-Vierge-couchee-22300-LE-YAUDET-22-cotes-d-armor-151406-67440-detail.html

Cartes Postales Photos La Vierge couchée du Yaudet 22300 LANNION cotes d'armor (22)

 

 

Cartes Postales Photos La Vierge couchée 22300 LE YAUDET cotes d'armor (22)

 

 

IV. Les autres statues de la Vierge.

  De même qu'à Lanrivain pour N.D. du Guiaudet ou à Kergrist, ce n'est pas la Vierge Couchée ancestrale et fondatrice qui reçoit la dévotion des fidèles, et Notre-Dame du Yaudet prête son nom, dans une dualité ambiguë, à l'une des trois vierges couronnées, voilées, debout, et très conformes aux stéréotypies et aux impératifs moraux du XIXe -début XXe que l'on découvre ici alignées sur leur brancard de procession. Ces productions sulpiciennes de plâtre ou de métal (pour la plus petite) piétinent un serpent de la faute originelle pour témoigner du dogme de l'Immaculée Conception.

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  Ce sont elles qui seront honorées lors du pardon, elles qui seront implorées, elles qui recevront les cantiques bretons qui leur sont dédiés et que l'on trouve affichés dans la chapelle :

Gwerz Koz ar Yeodet : Ni ho salud, Stereden-Vor / Mamm da Zoué , leun a enor : / Gloar d'ar Werc'hez er Goz-Yeodet / Heulodi d'he Mamm binniget ! Nous vous saluons, Étoile de la mer, Mère de Dieu, pleine de grâces. Gloire à la Vierge du Koz-Yeodet, Louange à sa mère bénie ! 

Kantik Neve En enor da Itron Varia-Yeodet : Itron Varia ar Yeodet, Biskoas deu aman neus pedet/ Neus ho pedet a galon vad / hep kaout diganec'h he veunad.

Ar Yeodet na vo biken paour / Ar Werc'hez gant he c'halon aour : / ar chom aman hag a chomo / vit hon enor ha mad ar Vro.

En l'honneur de Notre-Dame du Yaudet : Jamais personne ne pria ici, ne pria ici de tout son coeur Sans obtenir sa demande. Le Yaudet ne sera jamais pauvre, la Vierge avec son coeur d'or reste ici et restera pour notre honneur  et le bien du Pays.

 

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V. Les ex-voto :

http://www.ex-voto-marins.net/pages/lieupage22Ploulech-le-Yaudet.htm

 

1. Les maquettes de quatre navires à voiles de la première moitié du XXe siècle sont suspendues dans la nef, avec un dispositif permettant de les descendre pour les porter en procession.    

  Les maquettes ont été restaurées avec soin, si on compare ces images à celles, qui dateraient de 2004, de l'Inventaire Régional des Affaires Culturelles de Bretagne ici : http://patrimoine.region-bretagne.fr/sdx/sribzh/main.xsp?execute=show_document&id=PALISSYIM22004012

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Une goelette à huniers, armée de 22  canons en une batterie. Navire de grande pêche ou de cabotage.

 

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     Trois-mats barque à dunette armé de seize canons. Selon l'Inventaire régional il naviguerait à la grande pêche ou au cabotage.

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      Trois-mats goelette à cul rond, navire de grande pêche ou de cabotage portant l'inscription  MARIE LANNION

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   Seul navire du guerre, un trois-mats barque à trois ponts dont les batteries comptent de 11 à quatorze canons, soit 80 canons, (un vaisseau de ligne de 2ème rang ?)  doté d'un discret château arrière sur lequel est inscrit dans un cartouche à la place du nom et du quartier maritime les mots "Act A Ste VIERGE ".

   Restaurée en 1989 et utilisée comme maquette de procession lors du pardon, où elle est alors pavoisée et  portée par des marins de la Marine Nationale en uniforme. Les autres maquettes, également gréées du grand pavois, sont portées par des enfants ou des hommes, et les statues de la Vierge par des femmes.

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2.  Paquebot transatlantique (en service dans la première moitié du XXe siècle).

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3. Trois-mats barque à l'étrave inversée, en boite à vitrine .

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4. Dans la sacristie se trouverait aussi la maquette d'un trois-mats goelette à propulsion mixte sous un globe en verre.

VI. Les bannières :


1.) Bannière de sainte Anne et de N.D. de Yaudet:

Zantez Anna Mam ar Vretouned Pedet Evidomp, " Sainte Anne Grand-mère des Bretons Priez pour nous."

La bannière représente l'Éducation de la Vierge, où sainte Anne apprend à lire (et transmet les Saintes Écritures vétérotestamentaires) en présentant un livre ouvert à sa fille.

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Itron Varia Goz-Yeoded Diwallet Hon Zoudardet Hag Hon Varteloded.

  La bannière présente cet intéret de reprendre la représentation de la Vierge couchée du rétable, dans un lit à baldaquin dans l'ouverture duquel s'envole l'Esprit-Saint, alors que saint Joseph, assis au pied du lit et tenant un livre, regarde la mèer et son enfant. C'est donc un nouvel exemple iconographique de ce thème, traité de façon originale.

  Je ne peux dater cette bannière, mais la mention de Goz-Yeodet indique sans-dooute l'influence de l'abbé Le Clech, recteur de Ploulec'h depuis 1934, et auteur d'une monographie sur le Yaudet qui mentionne l'appellation celte Koz Yeoded (le vieux Yeodet) du site.

Je traduis l'inscription ainsi : "Sainte Marie du Yaudet Protectice des soldats et des marins".

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2) Bannière de saint Pierre et saint Paul.

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Détail de passementerie : 

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3) Bannière de sainte Anne

Ste Anne Protégez nous.

Sainte Anne, couronnée, se penche vers l'enfant couronné également (la Vierge, ou Jésus).

  Cette deuxième bannière vouée à sainte Anne souligne l'importance de ce culte étroitement associè à celui de la Vierge couchée : dans les deux cas, c'est la Maternité qui est célébrée.


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Monogramme A M.

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Published by jean-yves cordier
14 mai 2012 1 14 /05 /mai /2012 11:32

              Vierges couchées (3) :

         chapelle de Kergrist à Paimpol.

 

Voir aussi : 

A. LES VIERGES COUCHÉES. 6 articles.

 

http://www.lavieb-aile.com/article-les-vierges-couchees-de-bretagne-2-chapelle-du-yaudet-a-ploulec-h-105555217.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-3-chapelle-de-kergrist-a-paimpol-105604068.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierge-couchee-calvaire-de-tronoen-a-saint-jean-trolimon-29-110465874.html

http://www.lavieb-aile.com/article-la-vierge-couchee-dans-les-nativites-des-livres-d-heures-113263711.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-la-cathedrale-de-chartres-112103311.html

LES VIERGES ALLAITANTES. 12 articles.

http://www.lavieb-aile.com/article-virgo-lactens-ou-miss-nene-5-candidates-du-finistere-les-vierges-allaitantes-96615012.html

GROUPE DE SAINTE ANNE TRINITAIRE. 

Groupes dits de Sainte-Anne Trinitaire : l'ensemble de la vallée de l'Aulne

http://www.lavieb-aile.com/article-anne-trinitaire-de-la-vallee-de-l-aulne-102034812.html

Anne trinitaire de l'église de Guimaëc.

Anne trinitaire de l'église de Plougasnou.

Sainte-Anne trinitaire du Musée départemental de Quimper.

L'église du Vieux Bourg à Lothey : Anne trinitaire.

La chapelle Sainte-Anne à Daoulas.

Anne trinitaire de la cathédrale de Burgos

http://www.lavieb-aile.com/article-sainte-anne-trinitaire-de-burgos-118711405.html

 

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I. Présentation.

Le grand pardon est célébré en mai.

  La chapelle est connue des lecteurs de Pierre Loti puisqu'au chapitre XVII de Mon frère Yves, Loti, officier de La Sibylle, accompagne un ami matelot, Yves Kermadec, qui rentre chez lui à Plounez : sa chaumière est voisine de la chapelle de Kergrist : " Quand on est à la chapelle, disait-il, c'est tout près. On n'a plus qu'à tourner à gauche, deux cent pas, et on est chez nous".

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         La chapelle de Kergrist en Plounez, ancienne commune actuellement rattachée à Paimpol, date du XVe siècle mais elle a été restaurée en 1603, date où elle fut consacrée par l'évêque de Saint-Brieuc et l'abbé de Beauport, puis modifiée au XVIIIe siècle. Vendue à la Révolution, rendue au culte en 1807, bénéficiant d'une restauration importante en 1868, encore très endommagée à la fin de la guerre de 14-18, elle est alors remise en état par les paroissiens. En 1944, après avoir été touchée lors d'un raid aérien, elle doit être reconstruite. De son plan d'origine, elle a perdu son transept sud, ce qui explique en partie l'aspect encombré et mal agencé du retable que je viens visiter ici, celui de la Vierge couchée. En effet, les trois autels initiaux, ceux de Sainte Philomène, de N.D de Kergrist et de N.D du Yaudet, doivent trouver place sur la largeur de la nef et du transept nord, dont l'extrémité donne encore accès à la sacristie.

  Elle est entourée d'un placître doté d'un calvaire du XVIe siècle, et dispose d'une fontaine au nord-ouest

 


 

 

II. La Vierge couchée.

  Dans l'espace exigü qui lui est concédé, pas de retable monumental, pas de niche pour sainte Anne ou Joachim, tout juste un dais à guirlande et à deux pots-à-feu, trois angelots en couronnement, et dans l'ouverture de discrets rideaux de mousseline, deux blocs de bois sculptés aux couleurs blanches : l'un représente "la Vierge en gésine sur son lit d'accouchée", appuyée comme de coutume sur son coude droit et tournée (mais d'un quart) sur le coté dans la position des premiers allaitements, tandis que l'Enfant-Jésus ne nous montre que ses cheveux noirs afin de pouvoir téter. L'allaitement lui-même n'est pas visible, mais seulement nous voyons le beau geste de Marie prenant le menton de l'enfant et le guidant vers elle.

   L'autre bloc sculpté représente un personnage très proche de celui du Yaudet, mais ici dépourvu de couronne et de sceptre. Son manteau n'est plus peint en rouge et, en d'autres termes, saint Joseph (car c'est bien lui) n'est plus déguisé en roi ; il tourne son beau visage vers le ciel et semble rendre grâce, d'un geste de la main, pour cette naissance.

  Le naturel de cette posture, le joli mouvement des plis, la simplicité bonhomme des visages, l'absence de cette literie qui choquait, au Yaudet, par son coté kitch, l'absence même des fastes des retables, le dépouillement cistercien de la monochromie blanche confèrent à cette Nativité un charme émouvant. Inutile d'évoquer Isis, Cybèle ou la Virgo parturita gauloise pour comprendre que le mystère chrétien de l'avènement, dans une crèche de Béthléem, d'un Enfant-Dieu croise aussi, pour chaque être humain, l'émotion bouleversante de chaque naissance d'un petit d'homme, et la conviction qu'il se joue alors un évènement fabuleux qui le dépasse infiniment.

 

  

 

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  On trouve dans l'article de Georges Provost http://abpo.revues.org/1428 la reproduction d'une photographie qui montre une disposition des lieux très différente :

 

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III. Les statues et ex-voto.

 

L'autel consacré à sainte Philomène. 

Il porte des plaques votives avec la mention Merci à N.D. de Kergrist, témoignant de la confusion de l'ordonnancement. Ses niches reçoivent les statues d'un moine ou abbé  et de saint Yves.

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      Ex-voto : 

Cette goélette morutière de Paimpol (comme l'Étoile et la Belle Poule) porte l'inscription Kergrist PL.

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      Saint François ( selon l'inscription du socle)

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Sainte Philomène :

  Le culte de cette jeune vierge et martyre des premiers siècles s'est développé grâce à la dévotion du saint Curé-d'Ars en 1837, après que ses reliques aient été découvertes dans les catacombes de Priscilla puis transférées à Mugnano del Cardinale près de Naples. Son nom est issu d'une plaque qui portait la mention qualificative philomena theou, "aimée de Dieu".

  Sa présence dans cette chapelle est peut-être due au fait qu'elle soit la patronne du Rosaire Vivant et des Enfants de Marie Immaculé ; mais j'ignore la datation attribuée à cette oeuvre.

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Saint Yves :

 

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Notre-Dame de Kergrist.

Le maître autel qui prolonge la nef est encadré par la statue de N.D. de Kergrist, vraie patronne de la chapelle, et de saint ? à gauche, alors que la statue de sainte Marguerite est posée sur le coté gauche de l'autel.

 

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Sainte Marguerite .

  Elle sort de son dragon par la seule force de sa prière ; Shrek fait semblant de ne pas être dans la combine.

 

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Déploration :

 

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      Saint Sébastien :

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Statues dans la nef : 

Saint Éloi :

Dans sa tenue de maréchal-ferrant avec la tenaille et les clous.

 

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   Saint Julien.

 Cette statue, ainsi que d'autres, proviennent d'une ancienne chapelle Saint-Julien actuellement détruite. 

  Les lecteurs des Trois Contes de Flaubert connaissent la Légende de saint Julien l'Hospitalier, ce fils de seigneur qui s'adonnait à la chasse :

  "Il aimait, en sonnant de la trompe, à suivre ses chiens qui couraient sur le versant des collines, sautaient les ruisseaux, remontaient vers les bois ; et quand le cerf commençait à gémir sous les morsures, il l'abattait prestement, puis se délectait à la furie des mâtins qui le dévoraient, coupé en pièces sur sa peau fumante".

  Ils savent comment le chasseur, poursuivant un cerf, une biche et son faon, tue les deux derniers, puis enfin le grand cerf qui le maudit avant de succomber en disant "Maudit, maudit, maudit! Un jour , coeur féroce, tu assassineras ton père et ta mère !" Et comment, comme dans le mythe d'Oedipe, l'oracle se réalisera alors que Julien aura tout organisé pour le déjouer.

  La statue montre un homme vêtu d'une cuirasse et d'un manteau, tenant un épieu à gauche et un bouclier à droite. Mais celui-ci est orné d'une tête de cerf dans les bois de laquelle une tête apparaît: si cette tête est celle du Christ, il s'agit d'une contamination par les légendes de saint Eustache et de saint Hubert où les bois du cerf portent la croix du Christ. 

 

 

 

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IV. La bannière.

  Elle est dédiée à Notre-Dame de Kergrist et non à N.D du Yaudet, avec l'inscription Itron Varia Kergrist Pedet Evid-omp, sainte Vierge de Kergrist Priez pour nous. La Vierge de Kergrist est couronnée et présente l'Enfant-Jésus qui tient le globus crucigère.

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  Le verso de cette bannière est traité de façon beaucoup plus originale et souligne, comme l'ex-voto vu précédemment, que cette chapelle dessert une population maritime. On y voit, encadrée par quatre ancres, une étoile et une fleur, un trois-mats gréé de trois voiles carrées et équipé non pas d'un gouvernail d'étambot, mais de deux avirons tribord et babord, ce qui correspondrait à un navire antérieur au XIIIe siècle. 

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V. Les tableaux.

 

  Je donne à ces deux tableaux toute mon estime, et je suis frappé par leur qualité, les trouvant dignes des grands musées. J'ai été étonné de ne pas les trouver très étudiés, mais simplement mentionnés sur les sites en ligne. Quels en sont les auteurs ? Qui est F. Vali ? D'où proviennent ces oeuvres? 

1) Saint Marc écrivant son Évangile, F. Vali, 1656

  Inscription F. Vali fecit 1656 Ste Marce Ora pro nob~

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2) la Nativité ou la Vierge au fourneau.

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Inscriptions :

On lit : aier alit natum....seph somnum et de l'autre cotè Angelus auras ex... ast munus reddit... utrisque puer .

 

Ces inscriptions ont été coupées lors du réencadrement, mais l'abbé Guillotin de Corson (Les sanctuaires du pays de Paimpol, Revue de Bretagne et Vendée, 1889 (1) p. 108 link) les a relevé ainsi : Mater alit natum, Joseph somnum, angelus auras (ex) ast munus reddit utrisque puer. Je tente de traduire par "La mère nourrit son nouveau-nè, Joseph songe / un ange souffle ? tandis que deux groupes d'enfants rendent grâce."

Le chanoine honoraire décrivait ainsi ce tableau comme une toile peinte qu'on dit être de l'école espagnole, et intitulée par le peuple comme le Ménage de la sainte Vierge : "on y voit Marie faisant elle-même de la bouillie dans un petit poêlon tandis que saint Joseph berce le divin Enfant ; plusieurs anges aident à la Sainte famille, l'un attise le feu, un autre le souffle, un troisième apporte du charbon."

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Published by jean-yves cordier - dans Vierges couchées
14 mai 2012 1 14 /05 /mai /2012 11:20

Chapelle de Tronoën à Saint-Jean-Trolimon.

             La vierge couchée du calvaire.

                   La bannière Le Minor.

                      La statuaire.

                    Saint Saturnin.

                  Les vitraux de Petit.

 

Voir aussi : 

A. LES VIERGES COUCHÉES. 6 articles.

 

http://www.lavieb-aile.com/article-les-vierges-couchees-de-bretagne-2-chapelle-du-yaudet-a-ploulec-h-105555217.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-3-chapelle-de-kergrist-a-paimpol-105604068.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierge-couchee-calvaire-de-tronoen-a-saint-jean-trolimon-29-110465874.html

http://www.lavieb-aile.com/article-la-vierge-couchee-dans-les-nativites-des-livres-d-heures-113263711.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-la-cathedrale-de-chartres-112103311.html

LES VIERGES ALLAITANTES. 12 articles.

http://www.lavieb-aile.com/article-virgo-lactens-ou-miss-nene-5-candidates-du-finistere-les-vierges-allaitantes-96615012.html

GROUPE DE SAINTE ANNE TRINITAIRE. 

Groupes dits de Sainte-Anne Trinitaire : l'ensemble de la vallée de l'Aulne

http://www.lavieb-aile.com/article-anne-trinitaire-de-la-vallee-de-l-aulne-102034812.html

Anne trinitaire de l'église de Guimaëc.

Anne trinitaire de l'église de Plougasnou.

Sainte-Anne trinitaire du Musée départemental de Quimper.

L'église du Vieux Bourg à Lothey : Anne trinitaire.

La chapelle Sainte-Anne à Daoulas.

Anne trinitaire de la cathédrale de Burgos

http://www.lavieb-aile.com/article-sainte-anne-trinitaire-de-burgos-118711405.html

 

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I. Le calvaire : la Vierge couchée de la Nativité.

  La représentation d'une Vierge couchée est ici d'autant plus interessante que Tronoën ou Tronoan ( Tro-an-aon, "trève ou lieu placé au bord d'une rivière") est un ancien lieu de culte dédié à Vénus à l'époque gallo-romaine : venant de l'oppidum de Tronoën,  le sol a livré des monnaies romaines et gauloises ainsi que de nombreuses figurines en terre cuite blanche représentant Vénus Anadyomène, exposées au musée de saint-Germain-en-Laye. Ce culte païen a disparu au VIe siècle avec l'arrivée de chrétiens venus de Grande-Bretagne

 

Musée départemental breton de Quimper :

 

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  La chapelle a été construite sur l'emplacement d'un ancien temple romain au milieu du XVe siècle par  des "moines soldats", les "Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem", après qu'ils aient été chassés de Palestine. Ils reçurent pour mission de défendre la côte de Penmarc'h à la Pointe de Raz.

 

Le calvaire à mace et frise est le plus ancien de Bretagne, mais on en ignore le commanditaire, et seul l'examen des costumes a permis de proposer la date de 1450 comme celle de son édification. Il faut l'imaginer dans sa polychromie d'origine, proposant aux fidèles un vrai Évangile de pierre qui se lit, à partir de l'Annonciation, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. 

  Mais je m'interesse aujourd'hui (un jour de pluie, peu favorable à mes photographies) à sa face nord consacrée, dans le registre inférieur, à la Nativité. Après la scène de la Visitation à gauche, on voit trois blocs de kersanton qui reprennent les éléments retrouvés dans les autre nativités à Vierge couchée. 

  

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  En effet, après le boeuf et l'âne dans leur étable, on voit saint Joseph dans sa posture songeuse ou endormie, le front sur la main et le coude sur le genou. Un bloc de pierre différent représente la Vierge, dont la tête repose sur un coussin. Le lit est figuré par un tressage d'osier ou de lattes, dans la partie inférieure et l'extrémité gauche. Les cheveux très longs sont disposés en deux nattes un peu naïves sur les épaules. Marie est nue, du moins jusqu'à la poitrine puisque les draps la recouvrent en dessous. Les deux bras, au dessus du drap, sont tendues, paumes vers le haut, vers l'Enfant-Jésus dont la précocité est rendue par l'artiste en le présentant comme un garçon de sept ans, pleinement conscientr de sa mission de Sauveur du Monde. Il en tient le globe dans la main gauche tandis qu'il désigne l'étage supérieur du calvaire où la croix de la Rédemption l'attend. 

  Le bloc de kersanton suivant est sculpté des trois rois mages : le premier est, c'est la tradition, le plus agé et il est barbu ; il a oté par respect sa couronne. Le suivant porte la couronne à fleuron et montre l'étoile qui les a guidés vers Bethléem. Il porte une tunique courte, mais fourrée, et aux manches très amples, au dessus de collants. Son voisin, également couronné, porte un manteau aux manches tombantes. Ce sont ces costumes, ainsi que les chauusures à poulaine visibles sur d'autres faces, qui ont permis la datation entre 1450 et 1470, sous Louis XI.

 

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II. La bannière le Minor.

 

1. Face consacrée au calvaire sous le titre TRONOEN avec l'inscription :

Ravo gant gwad Jezuz diwallet va ene evid ar vuhez peurbaduz. (Que le sang de Jésus protège mon âme une vie heureuse ?)

  En bas, on trouve les signatures Le Minor et Toulhoat.

  Six anges prennent soin du Christ agonisant, trois recueillant le Précieux Sang des cinq plaies dans  quatre calices, un épongeant le front ensanglanté par la couronne d'épine (sixième écoulement de sang), et deux présentant un écu : celui de la Bretagne (hermine) et l'autre de Saint-Jean-Trolimon? (croix pattée, qui figure sur les armoiries de la commune ).

 

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      2. Face consacrée à la paroisse de Saint-Jean-Trolimon.

Inscription PARREZ SANT YANN, Paroisse Saint-Jean, puis en bas AD1993 (Anno Dei 1993), et les signatures Le Minor et Toulhoat, et enfin Paoah. Sergent. Person.

 Image : la Vierge de l'Immaculée Conception, surplombant la représentation de la chapelle Notre-Dame de Tronoên et de son calvaire.

 

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 Cette bannère a été brodée en 1993 par Cécile le Roy de la maison Le Minor de Pont-L'Abbé sur un carton de Pierre Toulhoat, alors que l'abbé Sergent était recteur de Saint-Jean-Trolimon.

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Les statues.

 

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Saint Jean :

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Notre-Dame de Tronoën:

Cette Vierge à l'Enfant,  couronnée provient de l'ancien calvaire mutilé de Saint-Evy .

 

 

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Sainte Barbe 

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Anges adorateurs sur leur nuage.

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Lavieb-aile vous révèle la fixation de leurs ailes, que ces anges ôtent lorsqu'ils ne volent pas (j'avais cru d'abord qu'il s'agissait d'anges-tirelires, qu'on place près de la crèche et qui disent merci avec la tête) :

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      Saint Sernin (ou Saturnin).

On peut s'étonner de trouver ici la figure inhabituelle du premier évêque de Toulouse, vers 250.  Le site Topic-topos http://fr.topic-topos.com/saint-sernin-saint-jean-trolimon explique que c'est la Légende dorée qui a fait de Saturnin, martyr du IIIe siécle, un adolescent tenant la tunique du Christ lors de son baptème dans le Jourdain, puis que, par rapprochement phonétique possible avec le lieu-dit Santurnel, à Plomeur, son culte s'est répandu dans le pays bigouden, avec une statue dans l'église Saint-Jean-Baptiste (de Trolimon?), et une autre à Combrit.

  Mais la Légende dorée de Jacques de Voragine en 1266  mentionne Saturnin comme "ordonné évêque par les disciples des apôtres" et envoyé à Toulouse où il fut lié à la queue d'un taureau et précipité du haut de l'escalier du Capitole.http://www.abbaye-saint-benoit.ch/voragine/tome03/175.htm

  Je retrouve par contre, dans la Fleur des Vie des saints publiée en 1687 et 1712 par le père jésuite Ribadeneira link le récit où Saturnin, premier prélat de Toulouse, fils d'un roi de Péloponèse, et devenu disciple de saint Jean Baptiste, assista au baptème de Jésus : "et même il gardoit la robe de Nostre-Seigneur pendant que saint Jean le baptisoit". La source citée est le Livre 9, chapitre 6 de Bernard Guidonis (1261-1331), ou Bernard Gui, inquisiteur de Toulouse et évêque de Lodéve. L'ouvrage cité est le Speculum sanctorale de 1329 (Bibliothèque Municipale,Toulouse, ms.480, f° 248v-254).

  Il y eut d'abord, autour d'un personnage historique martyrisé lors de la persécution de Dèce en 250, puis la lègende transforma ce personnage en un disciple du temps des apôtres, un des discipuli apostolorum,  envoyé par saint Pierre en Gaules : cette modification daterait de Grégoire de Tours dans son Liber in gloria martyrium, et Césaire d'Arles (mort en 542) dans son De mysterio sanctae trinitatis. (le même phénomène "d'apostolisation" a concerné saint Denis, qui, de martyr parisien, est devenu contemporain des apôtres au fil de l'élaboration de sa légende)

  De fil en aiguille, je remonte l'hagiographie de saint Saturnin, découvrant les Gesta saturnini écrits en 900 : leur auteur, un clerc d'Auch, reprend chaque passage de l'évangile qui mentionne la présence d'un disciple autour du Christ, et soutient que c'était Saturnin, présent à la multiplication des pains, au lavement des pieds, à la Cène, à la Réssurection, lors des apparitions du Christ, etc...  A la même époque est écrit la Passion interpolée, où sont intercalées au récit de la Passion des miracles de Saturnin guérissant Austria, la fille du gouverneur Antonius en la trempant dans les fonts baptismaux ou la lépreuse Quiriace. Au début du Xe siècle est aussi écrite une Passion rimée, reprise un siècle plus tard par Borellus et décrivant la mission toulousaine du saint et son voyage en Espagne. Plus tard paraissent des libelli, petits livrets destinés aux fidèles, et vers le XIIIe siècle, le Corpus Saturnini est ainsi constitué, tel que Bernard Gui ("Guidonis") le reprendra et le complétera par le récit de la révélation des reliques au XIIIe siècle pour le lectionnaire des dominicains de Toulouse dans sa Vita et Passio saturnini. (Source : Thèse d'Anne-Véronique Gilles-Raynal link).

  Outre deux églises à Toulouse, de nombreuses églises lui sont consacrées dans le Midi, notamment dans le Quercy, mais un culte lui est aussi rendu à Tours, à Chartres, etc...

  Au Moyen-Âge, il est invoqué pour les étourdissements, ou pour soigner les moutons atteints de la maladie du tournis, pour la raison calembouresque que son nom populaire, Atorne ou Atournis, issue du latin Saturninus, s'y prête.

  En Bretagne, on trouve sa statue en évêque à Belz (église Saint-Saturnin). Par contre, ce motif iconographique de Saturnin en porteur de tunique semble très rare en France, où les sculptures montrent le plus souvent le supplice sur les marches du Capitole, ou le taureau. Je ne trouve comme autre exemple que la statue de Combrit (29) dans la chapelle Saint-Vennec.

 

 

                                     saint-jean-trolimon 8525c

 

On trouve aussi à Combrit, en la chapelle Notre-Dame de la Clarté, un bel exemple de statue de ce saint, dénommé Sant Urnel :

                         Notre-Dame-de-la-Clarte 2532c

 

 

 Ultérieurement, lors d'une visite de la cathédrale de Chartres et de son "tour de choeur" , cette découverte de la légende de saint Sernin/Saturnin me permit de décrypter immédiatement la scène du Baptème du Christ suivante :

 

 

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        Pourtant, Jacques Baudoin analyse cette oeuvre de Nicolas Guybert (v.1543) en y voyant "le Christ assisté d'un ange tenant sa tunique" (Normandie-Île-de-France, la sculpture flamboyante, p. 288). Effectivement, dans l'iconographie, on trouve des baptèmes du Christ où c'est un ange qui est le porteur de la tunique*, et, à contrario, lorsque le personnage est dépourvu d'ailes, comme ici, on estime qu'il s'agit d'un ange aptère ; mais n'est-ce-pas par méconnaissance de la légende de saint Saturnin ?

  A Chartres, en tout cas, saint Saturnin est représenté, tiré par le taureau sur les marches du Capitole, parmi les saints de la baie latérale gauche dite des Martyrs, du Portail Sud. 

*Bicci di Lorenzo (1373-1452), Le Baptème du Christ, Nantes, Musée des Beaux-Arts.

* Ottavio Vannini (1585-1643), Le Baptème du Christ, Nantes, Musée des Beaux-Arts.

Un exemple d'ange porteur de tunique : Livre d'heures de Catherine de Rohan et Françoise de Dinan, Rennes, Médiathèque Les Champs Libres, Ms0034 folio 72 : Le Baptème du Christ :

 

                      BIB-20080912-063.img

 

 

 

 

 Vitraux de Michel Petit (1990).

  Selon le blog de Jean-Pierre Le Bihan, ils ont remplacé, dans la maîtresse-vitre, des vitraux du peintre-verrier morlaisien Jean-Louis Nicolas (1816-1899).

  Michel Petit (Évreux 1934-.) est un maître-verrier diplomé des Beaux-Arts à Paris : c'est auprès de l'atelier de Jacques Le Chevallier qu'il se formera à l'art du vitrail, avant d'ouvrir en 1963 son atelier à Thivars, prés de Chartres. S'il est plus particulièrement connu pour ses restaurations de vitraux anciens dont ceux des  cathédrales de Chartres, Bourges, Coutances ou Tours, c'est aussi un créateur inovant dont la première réalisation fut en résine polyester à l'église Saint-Léger de Saint-Germain-en-Laye, avant d'employer la dalle de verre (Sainte-Bernadette à Angers) et de figurer parmi les précurseurs de la peinture du verre par thermoformage (Centre culturel de Ducey, Manche, 1998). Depuis 1970, il se consacre à la recherche de techniques de conservation et restauration de vitraux avec le Laboratoire des monuments historiques. 

  Parmi ses créations en verre antique, il faut citer l'église Saint-Gervais de Falaise et ses 200 m² de verrières sur le thème de la Jérusalem Céleste.

  Trés attentif à situer le fruit de son imagination  en cohérence avec l'histoire, l'architecture et le décor du lieu, mais aussi à sa lumière et à son environnement, il donne une importance particulière au théme du dialogue du ciel et de la mer (Thivars, 1986), de la course du soleil entre ciel et mer (église romane de Martinvast, Manche, 1993), tout en s'inspirant des cantiques spirituels ( cantique de Daniel "Béni sois-tu dans le firmament du ciel" à Martinvast, Ave Maris Stella à Rosnoën).

  Nous ne sommes donc pas surpris de lire le texte suivant,  dactylographié et affiché à l'intérieur de la chapelle avec la mention "M. Petit, maître-verrier 1990" :

  "La chapelle Notre-Dame de Tronoën était pourvue au XIXe siècle de vitreries géométriques incolores et aujourd'hui disparues; la lumière devait y être brutale. La restauration récente des polychromies imposait au Maître-Verrier une lumière diffuse neutre. Il y avait donc obligation d'emploi de verres incolores légèrement réchauffés de dorés pour assister la polychromie et créer l'équilibre avec les bleus dominants de la coloration des vitraux. L'iconographie dense, riche et souvent dramatique du célèbre calvaire accueille et retient l'attention de quiconque entre dans la chapelle, il ne semblait pas désirable de traiter les vitraux sur un mode figuratif, d'autant que la chapelle possède une statuaire très présente."

" Par contre cet édifice proche de la mer et dédié à la Vierge suggère naturellemnt le double thème de la Vierge et de la mer évoqué dans l'hymne Ave Maris Stella, Dei Mater alma "Salut Étoile de la mer, Mère de Dieu très pure, toujours vierge, heureuse porte des cieux".

"Enfin deux baies, l'une au nord, l'autre au sud, sont traitées dans des colorations plus chaudes pour s'accorder à la polychromie de l'édifice : fonds clairs, ocre rouge et coloration de points dorés et turquoise, couleurs complémentaires."

  "Les verres ont été peints une première fois pour développer les jaunes d'argent puis ont été peints à l'émail bleu turquoise ou jaune léger pour leur donner une vie plus intense. Ils ont été "bouillonés" ensuite afin de leur donner, à l'extérieur, une matière légèrement translucide diffusant une lumière nacrée.

"L'idée d'une présence discrète des vitraux en harmonie avec l'architecture, et la volonté de soutenir une prière mariale au coeur du visiteur en ont animé la création".

  

 

  

 

 

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Published by jean-yves cordier - dans Vierges couchées
14 mai 2012 1 14 /05 /mai /2012 11:13

             La Vierge couchée : occurrence dans les Nativités enluminées des Livres d'Heures manuscrits conservés à la Médiathèque de Rennes.

 

Voir aussi : 

A. LES VIERGES COUCHÉES. 6 articles.

 

http://www.lavieb-aile.com/article-les-vierges-couchees-de-bretagne-2-chapelle-du-yaudet-a-ploulec-h-105555217.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-3-chapelle-de-kergrist-a-paimpol-105604068.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierge-couchee-calvaire-de-tronoen-a-saint-jean-trolimon-29-110465874.html

http://www.lavieb-aile.com/article-la-vierge-couchee-dans-les-nativites-des-livres-d-heures-113263711.html

http://www.lavieb-aile.com/article-vierges-couchees-la-cathedrale-de-chartres-112103311.html

LES VIERGES ALLAITANTES. 12 articles.

http://www.lavieb-aile.com/article-virgo-lactens-ou-miss-nene-5-candidates-du-finistere-les-vierges-allaitantes-96615012.html

GROUPE DE SAINTE ANNE TRINITAIRE. Nombreux articles.

Groupes dits de Sainte-Anne Trinitaire : l'ensemble de la vallée de l'Aulne

http://www.lavieb-aile.com/article-anne-trinitaire-de-la-vallee-de-l-aulne-102034812.html

Anne trinitaire de l'église de Guimaëc.

Anne trinitaire de l'église de Plougasnou.

Sainte-Anne trinitaire du Musée départemental de Quimper.

L'église du Vieux Bourg à Lothey : Anne trinitaire.

La chapelle Sainte-Anne à Daoulas.

Anne trinitaire de la cathédrale de Burgos

http://www.lavieb-aile.com/article-sainte-anne-trinitaire-de-burgos-118711405.html

 

.

 

      Aucune photographie ne m'est personnelle, elles proviennent toutes de la Médiathèque Les Champs Libres, par téléchargement des pages disponibles ici :http://www.bibliotheque-rennesmetropole.fr/actualite-des-collections/tresors/les-collections-numerisees/    

© Bibliothèque Rennes Métropole  

  Les images sont dues à Central Studio.

I. Livre d'Heures à l'usage de Dol.

      Nativité, Livre d'Heure à l'usage de Dol, XVe siècle, artiste inconnu, miniature mi-page, Rennes Ms 0028,  folio f.61.

 

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  La Vierge, enveloppée dans son manteau bleu qui recouvre sa tête, est allongée sur un lit tendu de rouge, adossée à des coussins, et à demi-tournée vers la gauche ; l'Enfant-Jèsus, au nimbe crucifère, nu à coté de sa mère, se tourne vers saint Joseph en lui tendant les bras. Celui-ci est, pour une fois, plus éveillé et moins mélancolique que d'habitude et il ébauche même un geste vers le couple mère-fils ; il reste néanmoins en retrait, séparé de la dyade par la diagonale rouge du lit, isolé dans le vert d'un pré aux fleurs stylisées, devant un paravent d'osier qui le sépare de l'âne et du bœuf. Son bonnet jaune indique son judaïsme. Un bassin et une cruche témoignent du fait que l'accouchement vient d'avoir lieu. Le vrai Père a pris l'aspect d'une pluie de rayons solaires dont il inonde avec bienveillance la scène.

Le début du Psaume de David Deus in aduitorium meum intende vient à la suite d'une lettrine D enluminée.

 

II. Livre d'Heures de la famille d'Epinay.

Nativité, Livre d'Heures de la famille d'Epinay, 1430-1450, miniature mi-page, artiste inconnu, Rennes MS0033, folio F.65. BIB2007.1030-016.

  Le Catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de France, Départements — Tome XXIV. Rennes, donne de ce manuscrit la description suivante : 190 feuillets (plus un feuillet liminaire A en papier)... Quatorze grandes miniatures à pleine page — Au verso du feuillet de garde 1, on lit, en caractères majuscules lapidaires : AN 1603. A MADAME : LA : MARQUISE : DE : VAUCOULLEUR : SES : HEVIRES : ENLVMINÉES : APPARTIENNENT : DONNÉES : PAR SON : FIDEL : MARY : CHARLES : DESPINAY : MARQUIS DE VAUCOULLEUR, SEIGNEUR D'YVEGNAC, PLUMAUGAT, LACHÈSE. JHESUS MARIA. (La Bibliothèque de Rennes possède un livre d'heures, imprimé par Gillet Hardouin en 1503, provenant de la même famille, et où on lit, folio 7, cette note marginale : « Ce quinziesme octobre 1600, hault et puissant mesyre Charles Despinay, marquis de Vaucoulleur, espoussa... Marye de Chachanay, à Duretal. Dieu leur doint des enfans. » C'est à cette Marie de Chachanay que le manuscrit fut offert en 1603. L'écusson de la famille d'Épinay, d'argent, au lion coupé de gueules et de sinople, est peint aux folio 27 ro , 28 ro , 52 vo , 64 vo , 71 ro , 101 ro ; ces armes figurent également dans un canton d'un écu peint à la fin du manuscrit, accompagnées des monogrammes  et  (double lambda). — Le premier feuillet de garde A, en papier, porte, au recto, l'inscription : « Dom Jan Mevel, recteur, prestre digne. 1673 »

Dimensions : 184 × 128 mm

Reliure : Reliure maroquin rouge, estampillée au dos et sur les plats, en lettres d'or, au double monogramme, alternant dans des losanges à cordelières. Coins et fermoirs en cuivre.

  Je ne parviens pas à retrouver des informations précises sur cette famille bretonne d'Epinay ou d'Espinay, dont un membre, Robert, fut Grand maître d'Hôtel de Bretagne à la cour du duc François Ier en 1448. Des monogrammes entrelacent les lettres V et A, les lettres doublées LL (lambda) avec AA. Je ne saurais même pas si la protectrice de Rousseau, Louise d' Epinay, en fait partie !

 

 

 

                                           BIB-20071030-016.wmg

                                           BIB-20071030-016.wmg détail

L'enluminure surmonte la citation partielle du Psaume 70 (69) Deus in adiutorium meum intende, Domine ad adiuvandum me festina; confundantur et revereantur qui quaerunt animam meam," Qu’ils soient honteux et confus, ceux qui en veulent à ma vie ! Qu’ils reculent et rougissent, ceux qui désirent ma perte !"

  La crèche est un enclos entouré d'une palissade d'osier, dans lequel un toit de chaume est supporté par quatre madriers. Joseph, l'air pensif, s'appuie sur une canne; la Vierge, vêtue d'une tunique rouge et de son manteau bleu qui la couvre sous la taille, est tournée sur le coté gauche vers son Fils, placé tête bêche, nu mais la tête cerné par une auréole crucifère, tendant les bras vers sa mère. Il est encadré par l'âne et le bœuf. Deux bergers, dans l'herbe tendre, lèvent les bras en signe d'émerveillement. Ces bergers sont repris à l'identique dans un médaillon de la marge, sous deux cigognes (ou hérons), mais aussi plus bas, dans un champ, tenant chacun un instrument aratoire, près d'un paon : on suppose, bien qu'ils lui tournent le dos, qu'ils répondent aux injonctions de l'ange aux ailes ocellées qui leur fait coucou en haut et à gauche. On trouve encore dans la marge des fraises des bois, des fleurs de bleuets, des acanthes, des sortes de faînes.

 

 

 

 

 

III . Livre d'Heures de Béatrice de Rieux, XIVe siècle.

La Nativité, Livre d'Heures de Béatrice de Rieux, XVe siècle, artiste inconnu, 1390. MS2044 folio F.57v. BIB 20080827-004.

  Le manuscrit Horae secundum usum Namnetensem vel Dolensem, France (Tours), ca 1390-1400, latin et français, parchemin 186x128 cm, 262 ff, 16 peintures,  a été exécuté pour Béatrice de rieux, fille de jean de Rieux, Maréchal de France et seigneur d'Issé, et de Jeanne de Rochefort. Elle épousa Jean de Rougé, seigneur du Theil de Bretagne, puis, devenu veuve en 1417, elle se retira à Issé.

  Ses armoiries, d'azur à neuf besants d'or, figurent sur la robe de la commanditaire, sur l'enluminure du folio 189v où elle est agenouillée devant la Vierge.

 

 

BIB-20080827-004.wmg corrigé

 

  Sur un fond à damier bleu, rouge et or semblable au fond de la Nativité précédente, la Vierge est allongée sur le coté droit, le visage appuyé sur la main droite, selon un schéma très habituel pour le thème des Vierges couchées ; elle porte une chemise rouge et le manteau bleu qui couvre la tête, cachant les cheveux. Elle tourne le dos à l'Enfant qui, langé, nimbé, se repose (un oeil ouvert) sur un haut berceau rectangulaire. L'âne et le bœuf veillent sur lui Une fois de plus, Joseph porte la canne, la barbe, le chapeau ou bonnet juif, et, toujours placé en écart, il médite. Les postures sont figées, et celle de la Vierge, notamment, évoque les représentations analogues des tympans des cathédrales (Chartres, Sens). 

 

      IV. Livre d'Heures du XVe siècle.

Adoration des bergers, Livre d'Heure du début du XVe siècle, produit en Bretagne, artiste inconnu. MS0029, Folio F.47.

                          BIB-20060406-026.wmg

 

  Cette scène diffère légèrement car il ne s'agit plus d'une Nativité, mais d'une Adoration des Bergers. Le Psaume est toujours le même, Deus in abuitorium, Ps 70.

  La Vierge est à demi-assise dans un vrai lit, dans de bons draps recouvert d'une couverture rouge frappée de motifs d'or, et ce lit semble trouver place dans la chambre d'un château ou d'une chapelle médiévale au style gothique, sous un riche dais, un ciel de lit rouge et or. Mais, curieusement, on a introduit ici deux animaux, l'âne et le bœuf, et on a dressé une palissade d'osier tressé pour que cela ressemble à une pauvre étable de campagne. 

  Personne ne s'y trompe, et la Vierge aux cheveux longs est habillée d'une robe bleue bien ajustée à ses formes, bien cintrée à la taille ; elle montre à l'Enfant le Livre, celui qu'il lui reste à accomplir, mais dont ils connaissent tous les deux les lignes ; c'est d'ailleurs un livre où, en palimpseste, se déchiffre l'Ancien Testament et ses préfigurations du temps à venir.

  L'Enfant a beau être nu, il est déjà très averti de cela, et il désigne à sa mère les bergers venus l'adorer, et que l'étoile envoyé par son Père a guidé jusqu'à eux ; et il les bénit, d'un geste assuré.

  Ce sont des bergers, mais bien vêtus d'une robe longue et d'une chape qui réchauffe leurs épaules ; leurs cheveux sont coupés à la mode du temps, raie médiane, nuque dégagée. L'un d'eux n'a pas quitté sa serfouette.

  Saint Joseph porte un costume assez identique, mais sa tête chenue est recouverte d'un capuchon. Sa canne en T et sa barbe grise en pointe ne le rajeunissent vraiment pas, et il est un peu ailleurs, regardant le bœuf qu'il caresse distraitement. J'éprouve pour lui une sympathie secrète et un peu apitoyée.

 

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  En conclusion, on découvre dans ces Nativités aux Vierges allongées du post-partum de nombreux points communs qui définissent un type iconographique, mais chaque scène est différente, sans stéréotypie, et l'une marque son originalité avec le Livre, l'autre avec l'allaitement, l'autre peint la pluie d'or de la Volonté divine, mais, dans tout les cas, le miracle d'une naissance virginale et sans conception laisse le pauvre Joseph ahuri, abasourdi, frappé de stupeur. C'est trop fort pour lui, ça le dépasse.

Je terminerai en m'attardant sur un manuscrit, le Livre d'heures de Prigent de Coëtivy.

IV. Livre d'Heures de Prigent de Coëtivy.

Livre d'Heures de Prigent de Coëtivy, manuscrit Rennes MS1511, vers 1400, artiste Le Maître de Troyes ; production en Champagne.

Folio F.45, La Nativité photo IRHT-CNRS BIB2008090920.

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1°) Prigent VII de Coëtivy (1399-1450).

  Les seigneurs de Coëtivy sont originaires de Plouvien (Bourg-Blanc), dans le Léon. (voir http://racineshistoire.free.fr/LGN/PDF/Coetivy.pdf)

Prigent VII est le fils d'Alain III de Coëtivy et de Catherine du Chastel, .

  Comme son oncle Tanguy du Chastel, et grâce à lui, Prigent devint un proche du roi Charles VII : conseiller et chambellan du roi, amiral de France en 1439, capitaine de la Rochelle et de Rochefort, il est aussi par son mariage avec Marie de Rais seigneur de Retz.

 

  Prigent appartient à une famille de bibliophiles.  Son frère Olivier est réputé par son Livre d'Heures qui a donné son nom à l'auteur parisien des enluminures, le maître des Heures de Coëtivy. Son autre frère Alain IV, surnommé le Cardinal d'Avignon, un personnage considérable, est un grand amateur de livres 

Lui-même possédait dans sa bibliothèque selon L. Delisle, outre ce Livre d'heures, la traduction du Miroir historial de Vincent de Beauvais par Jean de Vignay Livre XXV-XXXII (BNF, ms Fr 52) et Livre IX-XIV (Fonds Lansdowne n° 1179), le livre de Meliadus de Leonnois par Rusticien de Pise (BNF ms.fr. 340), le livre des cas des nobles hommes et femmes par Boccace (Chantilly, Bibl. du château, ms 0858), le Trésor des Histoires, les Chroniques de France, deux autres livres d'Heures (dont celui conservé à Dublin, Chester Beatty Library, W ms 82), le Livre de Tristan, le Livre de Lancelot et le Livre de Guyron le Courtois enluminés par Jean Haincelin, le Roman de la Rose, Boece, la légende Dorée, au total une vingtaine d'ouvrages précieux.

 

2°) Le Livre d'Heures de Prigent de Coëtivy.

 

 C'est la plus belle pièce acquise par la bibliothèque de Rennes. Ce manuscrit avait été examiné par Léopold Delisle link en 1897 avant qu'il ne soit acquis en Angleterre. Il en décrivait les 150 grandes miniatures, et notamment la trentaine consacrée à la Vierge, en écrivant "il faut, à coup sûr, les classer parmi les plus gracieuses productions de l'art français du milieu du XVe siècle". Il le datait d'avant 1444.

  Il renferme les devises de Prigent de Coëtivy, DAME SANS PER* parfois accompagné d'une feuille de fougère, et HÉLAS,BELLE MERCI tracé sur un disque blanc.

 *  Dame sans per est d'usage fréquent dans la poèsie et la chanson médiévale, de Christine du Pisan à Eustache Deschamps : ex : dame sans per, en qui est ma speranche.

  Le livre est remarquable par l'importance des "suffrages", ou invocation aux saints, puisqu'on compte une trentaine de saints.

Le manuscrit est passé à la mort de Prigent VII à sa veuve, puis à son frère Alain qui y a coiffé les armes de son chapeau de cardinal, puis à une famille Becmur ou Becmeur, de Basse-Bretagne. Il a été acheté à la fin du XIXe siècle par Henri Yates Thomson. Il a été acquis à l'Hôtel Drouot (catalogue de vente 10 décembre 1992).

  Sa reliure est de veau sur ais de bois, estampes à froid, décor de bandes verticales à la roulette, avec traces de fermoirs et de cabochons. (jadis, selon toute vraisemblance, elles étaient "couvertes de velours cramoisi brochées d'or, à fermoers ; mises en une bourse de cuyr rouge"... "doublée ladicte couverture de satin cramoisy"..."et sur icelles Heures, dix clous d'or en manière de rozes fermantes en un grant fermouer d'or en manière de roze." (Delisle)

  Les armoiries de Coëtivy, fascées d'or et de sable de six pièces sont peintes sur  les marges d'un grand nombre de pages (L.Delisle).

      Une enluminure montre (folio 251) le commanditaire (armoiries non identifiables) agenouillé devant saint Michel, une autre (f. 255) son épouse agenouillée devant saint Jean-Baptiste. Les saints et saintes représentés sont Pierre et Paul, Jean, Philippe, Barthélémy, Barnabé, Matthieu, Matthias, Jude Thaddée et Simon, Thomas, André,  Antoine, Claude de Besançon,   sainte Catherine d'Alexandrie, sainte Madeleine, Marguerite d'Antioche, sainte Anne avec la Vierge, les quatre évangélistes. L' ange Gabriel est aussi représenté. Ces personnages se détachent avec leur attribut sur divers fonds géométriques, soit à losanges bicolores et or, soit à grands carrés monochromes damassés ou tracés d'entrelacs d'or.

  Le texte s'organise  en deux étroites colonnes de 13 lignes au centre d'un encadrement de baguettes laissant place à de larges bordures. Dans le cadre central, sous la colonne de texte, des animaux (cerfs, chien, licorne, renard, belette, lievre) se pourchassent par deux derrière un arbre. Les bordures sont occupées par des rinceaux végétaux luxuriants, dont les tiges donnent abri à des anges musiciens et à de nombreux type d' oiseaux.

  

 

3°) L'auteur des enluminures : le Maître des Heures de Troyes.

 Alors que son frère Olivier fait réaliser ses heures par un enlumineur de Paris, influencé par l'art flamand, Prigent s'est adressé à un artiste de Troyes.

L' exposition Les Très riches heures de Champagne http://www.interbibly.fr/virtuelles/trhc/index.html donne les renseignements suivants sur le Maître des Heures de Troyes.

Cet artiste anonyme apparaît au début du XVe siècle ; installé à Troyes, il réalise le chef d'oeuvre qui lui vaut son nom, un luxueux livre d'Heures exécuté pour un couple de riches bourgeois, les Berthier. Etienne de Giry, évêque de Troyes jusqu'en 1426, lui confie la réalisation des enluminures de son Pontifical (BNF Ms latin 962), tandis qu'un bourgeois de Troyes fait réaliser un manuscrit conservé à la Médiathèque de Troyes (MAT ms 3713). Il travaille ensuite pour des mécènes de Sens et de Chalons et éxécute aussi le décor du Missel de l'église d'Ervy-le-Chatel (BNF ms latin 864).

  Dans ses compositions, il privilégie l'équilibre et l'harmonie des formes. Ses personnages, un peu statiques, sont impeccablement dessinés. Les figures, sans épaisseur ni modelés se détachent sur des fonds abstraits richement ornés ; il se remarque par un goût prononcé pour la profusion décorative, tapissant le fond de ses miniatures et le vêtement de ses personnages de motifs variés. Son style au graphisme fluide est encore influencé par l'enluminure parisienne de la fin du XIVe siècle. Il se distingue ainsi du Maître de Rohan, qui travaille à Troyes après 1420 mais dont le style influencé par le Maître de Boucicaut est tourmenté et expressionniste, ou du Maître du Missel de Troyes, au milieu du XVe siècle, au style réaliste influencé par l'art flamand.

 

 

3°) L'enluminure de la Nativité    

        On conviendra que ce qui frappe le spectateur, c'est, avant la Vierge, la figure de saint Joseph: assis à terre au pied du lit, endormi, les cheveux hirsutes, sans auréole, il ressemble presque à un animal placé devant une auge. Cette façon dépréciative de traiter Joseph est courante au Moyen-Âge par différents moyens, qu' on l'affuble de rayures ou de vêtements de couleur jaune ou que l'on souligne son judaïsme. 

     L'auvent arrondi au dessus de la tête de la Vierge est retrouvé dans la Nativité du Livre d'Heures du Maître de Troyes Troyes MAT ms 1317, mais aussi dans la Nativité des Heures à l'usage de Chalons conservé à Carpentras, Bibliothèque Inguimbertienne, MS 52 fol. 43 du maître du Walters 219, réalisé à Chalons vers 1420.

 La Vierge est allongée sur le coté droit, vêtue du manteau bleu qui recouvre sa tête, alors que Jésus, sur la paille d'un berceau en osier, semble vouloir attirer son attention par des gestes.


 

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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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