Les sablières (1551) des bras du transept et des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras.
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Cet article fait suite à :
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Vous pourrez lire aussi, sur le sujet des sablières de Bretagne, les articles suivants :
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Les sablières (1506-1508) de la nef centrale de l'église Notre-Dame de Grâces (22).
Les sablières (1508) du bas-coté de l'église Notre-Dame de Grâces (22).
Les sablières et les blochets de la chapelle Notre-Dame-du-Tertre à Châtelaudren.
Les sablières et les blochets restaurés de l'église Notre-Dame de Brennilis.
Quelques sculptures de l'intérieur de l'église Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle à l'Hôpital-Camfrout.
Les sablières, les blochets et les statues de l'église de Le Tréhou. I.
La charpente sculptée de l'église Saint-Yves de La Roche-Maurice. Les abouts de poinçon du chœur.
Sablières, inscriptions et pardon de la chapelle Saint-Sébastien au Faouët (56). (1608)
L'enclos paroissial de Dirinon V. Les sablières (1623), les blochets et poinçons.
Les sablières et poinçons de l'église Notre-Dame et Saint-Michel de Quimperlé.
La charpente sculptée de l'église de Pleyben (1571) par le Maître de Pleyben : le transept sud.
L'intérieur de l'oratoire Notre-Dame de l'abbaye de Daoulas.
Quelques pièces sculptées de la charpente de l'église de Grâces à Guingamp. Les abouts de poinçons.
L'église de Guengat II : Statues, sablières et inscriptions.
Les sablières de la chapelle Notre-Dame-du-Tertre à Châtelaudren.
Vierges allaitantes VII: Lannelec à Pleyben (3) mobilier et statues.
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Pour les autres articles sur les sablières, tapez ce mot sur l'onglet "Rechercher".
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Voir la présentation générale dans le premier article, qui a décrit les sablières du coté nord de l'église de Loguivy-Plougras.
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Une partie des sablières du coté nord de la nef témoignait par ses cuirs découpés et ses médaillons du style Renaissance, et portait, pour "le bout du bois" ou extrémité (occidentale) de la charpente, la date de 1557, la signature d'un gouverneur, G. Lamyon et celle d'un charpentier, "G.P". Le reste des sablières de la nef, hormis un apport récent venant de Lannion, multipliait les dragons, les grylles et les lions, mais aussi une scène de chasse énigmatique, une scène de beuverie avec sirène, et autres drôleries, sous l' influence d'une verve médiévale auquel le Concile de Trente (1545-1563) mettra un terme.
Les sablières des bras du transept de ce qui était encore une chapelle rompt avec ces deux ensembles : les seigneurs de Plougras y manifestent leurs droits par leurs armoiries, par une oraison à la Vierge et par une inscription de fondation nous informant que la charpente a été posée en 1551. Nous sommes alors sous Henri II.
Les bas-cotés renouent avec les thèmes ludiques, animaliers et cynégétiques des sablières de la nef, avant de se conclure, à l'ouest, par une spectaculaire scène funéraire.
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I. LE BRAS NORD DU TRANSEPT : LA MARQUE DES COMMANDITAIRES.
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1°) Le coté est. Tr 1 et Tr 2.
Ses deux pièces séparées par l'entrait montrent les armes des seigneurs de Trogorre entre des lions et des dragons, puis deux dragons affrontés.
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Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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a) la pièce de droite : Tr 1.
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Tr 1. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Deux lions et deux dragons encadrant les armoiries des Plougras, seigneurs de Trogorre.
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Au centre est figurée une croix pattée peinte en rouge. Ce sont les armoiries de la famille de Poulgras seigneurs de Trogorre, certes semblables à celles des Templiers, mais se référant aussi à l'origine bretonne du nom Poulgras, "Ploe croes" ou "Ploe kroas", en latin "Plebe Crucis" la "paroisse de la croix".
La famille Plougras (seigneurs de Trogorre), aujourd'hui disparue et qui a donné son nom à la commune, existait dès le XIIIème siècle : Elle portait pour armes : d’argent à une croix pattée de gueules. On mentionne :
- Alanus de Plebe Crucis (en 1288),
- Maurice de Plougras (vers 1330),
- Guillaume de Plougras (en 1415 et en 1416),
- Alain I de Plougras (décédé en 1459),
- Alain II de Plougras (décédé en 1464),
- Alain III de Plougras seigneur de Trogorre (décédé en 1490), mariée avec Marie Le Rouge (fille de Guy Le Rouge et de Catherine Le Rouge, dame de Bourouguel). Ce sont eux qui ont fait construire dans les années 1470 la chapelle Saint-Yves à Loguivy-Plougras, chapelle qui porte les armes des Plougras et des Le Rouge
- François de Plougras (décédé en 1536), marié en décembre 1495 avec Gillette Kerouzy (d'or au lion de sable).
- Claude de Plougras (décédé en 1555), marié avec Françoise Benerven, dame de Trédiec,
- Jeanne de Plougras (ca 1520-1581) , dame de Trogorre. Elle épouse vers 1540 Hervé Le Rouge, seigneur de Kerdavid (1500-1571), puis vers 1560 Jean de Kermarquer (d'azur à la fasce d'or, chargé de trois molettes de sable)
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Voir Jules Lamare, 1869, Archives départementales des Côtes-du-Nord, page 282
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"— Aveux fournis, en 1540, à Claude de Ploëcroix, seigneur de Ploëcroix et de Trougor; en 1556, à Jean de Kerguesay, sieur de Guermorvan, propriétaire de la seigneurie de Trogorre; en 1566, à Pierre de Kerguesay, sieur de Coëtdisech et de Trogorre, pour des héritages situés dans les paroisses de Plougras, de Louargat et de Plounévez-Moëdec.
— Aveu rendu à la seigneurie de Guingamp, en 1583, par Jean de Kermarquer et Jeanne de Poulgroix, son épouse, pour le manoir de Trogore, avec le château dudit lieu en ruines, le fonds où est bâtie l'église de Loguivi-Plougras [chapelle Saint-Ivy], la chapelle de saint Emilion, près du bourg et la chapelle de saint Yves près du manoir; la haute juridiction avec les patibulaires à quatre piliers, les bois de haute futaie, deux moulins blanderets, un moulin foulleret et un moulin à tan sur la rivière du Léguer ; le lieu noble du Trescouët, la métairie de Saint-Emilion, un grand nombre de convenants dans les paroisses de Plougras et Loguivy sa trève , de Plounévez et de Plougonnec ; le fief de la cour et seigneurie de Poulgroix et de Trogorre s'étendant aux paroisses mentionnées ci-après : le lieu noble de Kerrouëc, la métairie de Crauguen, en Loguivy et en Plougras ; la métairie noble du Marquez,. en Plounévez; le lieu noble de Lisle, en Louargat ; des pièces de terre en Plougonver. "
La construction de la chapelle Saint-Emilion a débuté, comme l'atteste l'inscription lapidaire du porche, en 1516, mais le chantier fut sans doute interrompu puisque la charpente n' est posée qu'en 1551, complétée en 1557 et que le clocher-tour ne fut bâti qu'en 1566. On y travaillait encore le 26 juin 1583, comme l'atteste une note dans les aveux rendus à la seigneurie de Guingamp par Jean de Kermarquer et Jeanne de Poulgroix-Trogorre :
"Item au métairie et maison noble couverte d'ardoise appelée la métairie de Saint-Émilion que Jean Le Gal tient à titre de ferme porte jardin et courtil de jouxte avec deux petites maisons estants jouxte la rivière et où à présent travaillent les picotteurs et maistres ouvriers pour l'édifice de la tour de Saint-Émilion".
Les ouvriers travaillent donc dans les locaux existant le long de la Rivière de Saint-Émilion, qui provient de l'étang de Beffou et se jette dans le Guic arrosant Loc-Envel.
Cet aveu confirme le rôle de commanditaire du couple Jeanne de Plougras - Jean de Kermarquer. Ils firent appel en 1566 à l'architecte Jean Le Taillandier, actif dans la région de Morlaix dans la seconde moitié du XVIe siècle et qui a signé de son nom les tours-clochers des églises de Ploubezre (22) en 1577 et de Plougasnou (29) en 1582-1584 . Le style de ce dernier — dont le nom a été évoqué dans la réalisation du château de Kerjean, fortement inspiré par Philibert Delorme — est caractéristique de la Renaissance française, et se retrouve aussi dans le deuxième étage de la tour de Lampaul-Guimiliau et sur le bas de celle de Landivisiau (Millet 1996). En 1601, ce sera Fiacre de la Haye qui poursuivra la supervision des travaux.
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Tr 1.Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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La pièce de bois débute à gauche par le buste d'un homme de profil, remarquable par la taille de sa barbe, en collier se terminant par un bouc en bataille.
Puis vient un dragon, dont certains caractères rappellent ceux de la nef sud, comme des sortes d'ailes et de cornes en forme de feuilles aux prolongements en spirales.
Tr 1. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Au centre, deux lions passants présentent les armoiries à croix pattée. Ils procèdent de la même exubérance que les dragons, avec une queue fleurie et des tiges et feuilles comblant les espaces vides.
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Tr 1. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Nous retrouvons à droite le dragon et un buste d'homme, ici imberbe.
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Tr 1. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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b) la pièce de gauche : Tr 2. Deux dragons entourés par un couple d'humains.
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Tr2. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Au centre, l'artiste a sculpté deux dragons affrontés réunis par une navette.
Ces dragons sont de même style que ceux de la nef sud, avec des queues se terminant par une tête de serpent, et avec des excroissances foliaires sur l'échine ou sur les pattes.
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Tr 2 Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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De chaque coté, deux personnages sont représentés. Faut-il y voir le couple des commanditaires ? À gauche, une femme en buste, de face. À droite, un homme de profil tient une épée.
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Tr 2. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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2°) Le coté ouest. Tr 3 et Tr 4.
En face des pièces précédentes, et en symétrie avec elles, nous trouvons ici les armoiries des Poulgras entre deux cerfs, et deux dragons atour d'un médaillon.
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Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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a) À droite : Tr 3. deux dragons autour d'un médaillon.
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Tr 3. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Deux dragons posent une patte sur la périphérie du médaillon, comme deux animaux héraldiques autour d'un blason. Le médaillon est élégant et habilement dessiné, reprenant la courbe des épaules pour tracer un cercle. Une femme au visage rond est représentée en buste, de face. Ses yeux sont ronds, sa bouche petite, dans le style de notre sculpteur. S'agit-il de Jeanne de Plougras ?
Les deux dragons sont encadrés par un couple.
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Tr 3.Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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À gauche, c'est un homme coiffé d'un casque. Sa barbe, qui est rasée sur les joues et forment un balai dru en dessous de la mandibule, évoque immédiatement celle du personnage de la sablière du coté est en Tr 1.
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Tr 3. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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b) Le coté gauche : Tr 4. Armoiries des Plougras entre deux cerfs.
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Oui, ce sont bien des cerfs comme l'attestent leurs bois, mais métissés avec des dragons ou traités de façon fantastique avec ces appendices foliaires poussant ici ou là, si caractéristiques du style de l'artiste Plougrasien (ou Loguivien).
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Tr 4. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 4. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 4. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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II. LE BRAS SUD DU TRANSEPT : INSCRIPTIONS ET MARQUES DES COMMANDITAIRES.
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1°) Les deux pièces de sablières du mur ouest. Tr 5 et Tr 6.
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Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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a) La pièce du coté droit : Tr 5. Inscription datée, sur un phylactère encadrée par un couple.
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Tr 5. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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L'inscription de fondation (1551).
LE XVI : IOUR : DAPRILL : LAN : MIL : [V]: CENTZ : CINCQUANTE : UNG : LE : BOIS : DE : CHAPELLE : A : ESTE : FAIT .
"Le seizième jour d'avril de l'an mil [cinq] cent cinquante et un (1551) le bois de cette chapelle a été fait".
Nous retrouvons l'usage du terme de "bois" pour désigner la charpente, comme cela a été discuté pour l'inscription de N4 du coté nord de la nef. Par rapport à cette dernière ( "Le bois du bout d'en bas de céans fait [par] Augte G. Lamyon Gouverneur à présent l'an mil cinq cent cinquante sept (1557)"), l'inscription concerne ici l'ensemble de la charpente. .
Tr 5. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 5. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 5. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 5. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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b) la pièce du coté gauche : Tr 6. Deux cerfs couchés encadrant les armoiries des Plougras.
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Tr 6. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 6. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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2°) Les sablières du coté est. Tr 7 et Tr 8.
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Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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a) la pièce de droite Tr 7 : deux cerfs couchés encadrant les armoiries des Plougras.
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Tr 7. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 7. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 7. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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b) la pièce de gauche : Tr 8. Inscription sacrée : oraisons (funèbres).
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Tr 8. Sablières du bras sud du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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. O MAT . DEI : MEM[E]NTO MEI : DOMINE : M : ISERE : SVPER : ISTO .
"Ô Mater Dei memento mei Domine misere[re] super isto"
Il s'agit de la succession de deux oraisons différentes.
L'une s'adresse à la Vierge et lui demande sa protection : Ô Mère de Dieu souvenez-vous de moi. R. de Belleval la trouve gravée sur des armures de la fin du XVe siècle. C'est la marque d'imprimeur de Guillaume Le Rouge à Paris. Nicolas Gombert (1495-1556), compositeur franco-flamand maître des enfants de chœur de Charles Quint, en composa un motet. L'invocation vient clore l'Ave Maria de Josquin des Prez datant de 1485. Plus tardivement, elle est récitée lors de l'Extrême-onction des Frères Mineurs.
La seconde ne se rencontre que sous la forme "Domine miserere super isto peccatore (vel peccatrice)", "Seigneur prends pitié de ce pécheur (de cette pécheresse)". Elle se prononce lors de funérailles au cours de l'Office des Morts.
Sont-elles placées ici par les donateurs en prévision de leur heure dernière, ou à l'attention d'un défunt ?
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Tr 8. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Tr 8. Sablières des bras du transept de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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LES BAS-COTÉS.
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Je suis tenté d'opposer les sablières du transept, vouées à une fonction honorifique et de demande de protection sur les commanditaires en retour de leurs dons, avec celles des bas-cotés, dont le caractère populaire et dérivatif est évident. Mais ce n'est peut-être pas si simple. Les armoiries des Plougras y figurent aussi en bonne place.
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BAS-COTÉ SUD.
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. Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Femme allongée, bras le long de la tête, seulement vêtue d'un pagne et coiffée d'un (?) diadème.
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BC 1. Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Homme (?) allongé sur le dos, bras le long de la tête, à cheveux longs, vêtus d'une veste et de chausse à crevés.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Homme la main à l'oreille, désignant de l'index la scène située à sa droite.
Brochet : Homme à la houppe.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Vue générale de l'extrémité du bas-coté sud.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Blochet : homme barbu encapuchonné.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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La scène qui se présente maintenant est difficile à interpréter. Un homme souffle dans une trompe et porte sa main droite contre une volumineuse tuméfaction de sa joue (ou bien, il tient contre sa joue un objet rond, fruit ou pain). Ses épaules sont couvertes par un col festonné. Il est allongé, comme les buveurs des scènes d'ivrognerie, si bien que je dois reconsidérer ma lecture du motif et estimer qu'il boit dans un hanap. Est-il le propriétaire de la main qui empoigne la corne ? Et, surtout, pourquoi une tête grimaçante montre-t-elle ses dents acérées?
À sa droite, un compagnons est coiffé d'un casque qui s'évase en corne ou en bonnet phrygien. Un oiseau vue de profil semble le regarder.
Le troisième homme est fort élégant avec sa tunique aux manches bouffantes à crevés, et son bonnet, mais pourquoi faut-il que la pointe de ce dernier se transforme en une tête tourné du coté opposé ?
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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L'homme aux oreilles en feuille de saule.
Cet acrobate ou ce scatophile est peut-être un clerc si on remarque sa coupe de cheveux qui ressemble à une tonsure.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Présentation des armoiries des Plougras par deux anges allongés.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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BAS-COTÉ SUD 2. CHASSE BURLESQUE.
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Vue générale. remarquez les armoiries à la croix pattée des entraits.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Chasse burlesque. Trois chiens se précipitent vers un homme qui lève les bras. Un chasseur tente de retenir un mâtin par la queue, tandis qu'un autre chevauche son chien.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Chasse burlesque au renard.
Un renard a attrapé une poule. Un veneur sonne de sa trompe. Un archer atteint de sa flèche un gibier (que je n'ai su identifier) tandis que son chien l'attrape par la patte.
La proie ressemble à un mouton. L'endroit où parvient la flèche relève bien-sûr de la recherche de renversement carnavalesque des valeurs. Les sablières jouent ici le rôle des marges dans les ouvrages pieux enluminés de drôleries.
Le sculpteur a utilisé pour le volume de ces quatre animaux et de ces deux chasseurs une technique de modelé par des traits de gouge parallèles.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Chasse loufoque, suite.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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C'est une chaîne de motifs amusants.
Un quadrupède pose une patte familière sur l'épaule d'un bipède. Ce dernier souffle dans une corne, qui pourrait être une trompe de chasse si son pavillon n'était pas dirigée sous la queue dressée d'un chien. Mettons, néanmoins, qu'il s'agit du maître veneur menant une chasse à cor et à cri.
Le chien, un solide mâtin, porte un collier. Il flaire la piste d'une biche dont le postérieur se trouve sous sa truffe. Le petit de la biche (ou de la daine, le sais-je ?) n'en mène pas large. Le petit de la biche, c'est un faon.
À l'opposé, un autre molosse accourt. Bientôt, on donnera aux chiens le cœur et les entrailles, ce sera la curée chaude ; et le forhu, et on sonnera les fanfares des plus fameux épisodes.
La chasse à courre est un loisir de seigneur : l'influence des chatelains de Trogorre reste vive.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Mais qui voici sous sa coiffe ? Jeanne de Poulgras ?
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Dans une autre scène cynégétique, un vigoureux veneur embouche sa trompe pour indiquer par sa fanfare l'action de chasse. Sans-doute souhaite-t-il signifier à Médor qu'il doit se retourner car il tourne le dos au gibier.
Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Notre Nemrod porte en bandoulière une trompette. Il a rasé sa barbe, pour ne garder qu'une barbichette que je trouve assez ridicule, mais que le sculpteur semble affectionner. Tout comme il affectionne les yeux en gros boutons de gendarmes, comme découpés à l'emporte-pièce, les cheveux ras, et les oreilles patte d'éph. Enfin sa collerette fraisée serait fort seyante, si elle ne ressemblait pas à un collier de dents de requin.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Puis vient un dragon ailé qui s'est trompé de sablière. À gauche, un gentilhomme porte la barbe et la fraise courte, deux accessoires de mode sous Henri II. Il tient en laisse un chien courant (à oreilles tombantes) à la queue en faucille, dont je ne peux certifier qu'il s'agisse d'un Briquet d'Artois.
Le lapin qui le précède est en train de faire le clown en le singeant.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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BAS-COTÉ NORD.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Encore un chien de chasse au solide collier.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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PREMIER BAS-COTÉ NORD.
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Les premières pièces sculptées du coté extérieur ressemblent aux sablières N2 et S2 de la nef. L'élément remarquable est la troisième pièce, près de la baie.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Cette troisième pièce sculptée représente un homme allongé, tandis que le blochet voisin montre un homme barbu, les bras pendants le log du corps, et la tête recouverte d'un capuchon.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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L'examen attentif de l'homme couché révèle qu'il s'agit d'un cadavre, aux yeux caves, au nez et à la bouche rongés, les organes génitaux dénudés. Ce qui ressemble aux plis des vêtements correspond sans doute à une tentative de dessiner les os de la jambe et les côtes du thorax.
Dans ce contexte, le blochet peut être interprété comme un personnage affligé par le deuil.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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C'est également ainsi que je comprends la pièce de bois montrant deux femmes désloées.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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De même, l'homme couché, portant tunique boutonnée, chausses et chaussures, une main sur la jambe et l'autre près du visage, doit témoigner de son désespoir, alors que les artistes se servent le plus souvent de la même posture pour représenter un buveur.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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La posture une main soutenant la tête est depuis longtemps celle du Mélancolique (ou du songeur, comme Jessé).
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Enfin, énigmatique et glaçant comme un tableau de Goya, une femme tient dans la main gauche une tête qu'elle nous désigne comme la préfiguration de sa propre mort, ou de la notre.
On notera aussi le blochet, où une femme, les mains sous les genoux, semblent accoucher, puisqu'une tête apparaît entre ses jambes.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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Sablières des bas-cotés de l'église Saint-Émilion de Loguivy-Plougras. Photographie lavieb-aile 16 septembre 2017.
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SOURCES ET LIENS.
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— COUFFON (René) 1939, Répertoire des églises et chapelles du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier, extrait des Mémoires de la Société d'émulation des Côtes-du-Nord, Saint-Brieuc, Les presses bretonnes, 1939, p. 233-235.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6562108b/f29.image
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6562108b/f46.image
— DUHEM (Sophie) 1998, « Quant li goupil happe les jélines... », ou les représentations de Renart dans la sculpture sur bois bretonne du XVe au XVIIe siècle, Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1998 105-1 pp. 53-69
http://www.persee.fr/doc/abpo_0399-0826_1998_num_105_1_3972
— DUHEM (Sophie) 1997, Sablières sculptées de Bretagne : images, ouvriers du bois et culture paroissiale au temps de la prospérite bretonne (XVe-XVIIe s.). Thèse de doctorat en Histoire. Sous la direction de Alain Croix. Soutenue en 1997. à Rennes 2 .
— DUHEM (Sophie) 1998, Les Sablières sculptées de Bretagne, Presses Universitaires de Rennes, 390 pages. Pages 66-69-72-183-232-233-266-267-277-278 :
— MILLET (Christian), CASTEL (Yves-Pascal), HUON (Michel), 1996, Jean Le Taillandier, architecte de la Renaissance", Bulletin de la Société archéologique du Finistère page 199-215.