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11 mars 2016 5 11 /03 /mars /2016 09:49

Le chevet de la cathédrale de Quimper comprend un chœur de quatre travées droites, accompagné d'un bas-coté et de chapelles rectangulaires, puis un rond-point à cinq pans, contourné par un déambulatoire desservant cinq chapelles rayonnantes. L'élévation est à trois niveaux : arcades, triforium, fenêtres hautes à réseaux rayonnant. (Y. Gallet, 2009).

Les vitraux de la cathédrale de Quimper peuvent être répartis en trois ensembles selon leur date : les vitraux des 13 fenêtres hautes du chœur (numérotées de 100 à 112) datant de  1417-1419 et commandités par le duc Jean V sous l'épiscopat de Gatien de Monceaux (1408-1416) puis de Bertrand de Rosmadec ; ceux des 16 fenêtres hautes du transept et de la nef, datant de 1495-1497 sous le règne de Charles VIII et d'Anne de Bretagne (n°113 à 116 et 118 à 132); et ceux des verrières basses, datant de la fin du XIXe et du XXe siècle (n° 0 à 35 ; 117 et 118).

Les vitraux du chœur appartiennent donc à la liste assez courte des vitraux bretons du début du XVe siècle, avec la maîtresse-vitre de Runan, la baie 1 de l'église Saint-Gilles de Malestroit,  la chapelle Saint-Jacques de Merléac, et des fragments inclus dans la nef de la Collégiale de Guerche-de-Bretagne.

Voir :

 

Ces verrières témoignent — à l'exception de celle de Merléac, commanditée par le connétable de France Olivier de Clisson et Marguerite de Rohan—du mécénat du duc Jean V. Sorti vainqueur de la Guerre de Succession qui l' opposait aux Penthièvre et au saint Charles de Blois, son père Jean IV de Monfort s'était montré fort déterminé à assurer son pouvoir politique par un vaste programme de construction de sanctuaires. Jean V et son épouse Jeanne de France poursuivirent ce projet. Soucieux d'affirmer un pouvoir quasi royal sur le duché de Bretagne, le duc impose partout son image  coiffé de la couronne d'or des rois de Bretagne, et revêtu de la parure d'hermine ; il place ses armoiries d'hermine plain en sommité des maîtresse-vitres (associées à celles aux fleur-de-lys de son épouse, fille du roi Charles VI). A Quimper, la cathédrale porte ses armoiries sur les trois portails. Sur le porche occidental,  son blason  tenu par le lion de Monfort casqué, est encadré par les armes de Jeanne de France, par celles de ses trois fils,  celles de l'évêque Bertrand de Rosmadec   et enfin celles de ses quatre principaux vassaux, les seigneurs de Nevet (Plogonnec), de Botigneau (Clohars-Fouesnant, de Guengat, et Du Quélennec (Le Faou). 

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Chœur de la cathédrale de Quimper. Les trois baies du "rond-point". Photographie lavieb-aile.

Chœur de la cathédrale de Quimper. Les trois baies du "rond-point". Photographie lavieb-aile.

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  Le programme iconographique des vitraux du chœur ne se comprend bien qu'en examinant d'abord comment les baies s'intègrent au réseau des  nervures de la voûte, à 20 mètres du sol, et surtout en s'intéressant aux clefs armoriés qui s'y trouvent réparties. En sommité, au point de convergence des huit nervures de l'abside, se trouve les armes du duc Jean V. Derrière elles, celles de son épouse la duchesse Jeanne. Puis, échelonnés en position plus basse sur les nervures rayonnantes, six armoiries, celles de l'évêque Gatien du Monceaux et de cinq de ses chanoines. Le pouvoir ducal s'affirme donc (en domination ou en protection) au dessus du pouvoir de l'évêque et de celui du chapitre cathédrale. J'ai repris la numérotation de Renè-François Le Men qui les a décrit ainsi en 1877 :

N° 1. Première clef de voûte à partir du rond-point : Targe d’hermines timbrée d’un casque taré de profil, sommé du lion de Montfort assis entre deux cornes de bœuf ; le casque orné de lambrequins ; l’écu soutenu par deux anges ; — Jean V de Montfort,, dit le Bon, duc de Bretagne (1399-1442), marié à l’âge de cinq ans à Jeanne de France, fille de Charles VI roi de France. 

 Autour des armoiries du souverain du pays sont groupés, sur les nervures secondaires de la voûte, les six écussons suivants, qui portent les armoiries de l’évêque qui occupait le siège de Quimper, lors de la construction des voûtes du chœur, et celles de cinq de ses chanoines.

N° 2. Écu triangulaire timbré d’une crosse et soutenu par un lion, portant : d’azur à la fasce d’argent accompagnée de trois étriers d’or ; — Gatien de Monceaux, évêque de Quimper. Cet écu est le plus rapproché de celui du duc Jean V.

N° 3. Écu triangulaire portant : trois têtes de renard. — Alain de Penquelennec, reçu chanoine en 1394, vicaire général et archidiacre de Cornouaille en 1400. Le manoir de Penquelennec, construction du XVe siècle, existe encore dans la commune de Pemeurit. Sur le manteau de la cheminée de la grande salle, est un écusson en relief portant les mêmes armes surmontées d’un lambel à trois pendants. Plusieurs chanoines de ce nom, entre autres Raoul de Penquelennec, reçu en 1399, figurent dans les titres du chapitre de Quimper, au XIVe et au XVe siècle.

N° 4. Écu triangulaire : pallé d’argent et d’azur de six pièces ; — Bertrand de Rosmadec, reçu chanoine de la cathédrale, en 1408 , et qui fut depuis évêque de Quimper, de 1416 à 1445.

N° 5. Écu triangulaire portant : une croix pattée, accompagnée à senestre de deux roses ou quintefeuilles ; sur le tout un lambel à trois pendants ; — Rolland de Lezongar, seigneur de Pratanras, chanoine en 1418.  Ces armes diffèrent peu de celles de la seigneurie de Pratanras, en la paroisse de Penhars, qui sont : d’azur à la croix d’or cantonnée à dextre d’une fleur de lys de même.

N° 6. Écu triangulaire : d’argent à la macle d’azur ; — Jean de Tréanna, chanoine en 1418.

N° 7. Écu triangulaire portant : d’argent au croissant de gueules accompagné de trois étoiles de même ; — Glazren de Pendreff (Penandreff), reçu chanoine le 29 janvier 1399.

N° 8. Écu triangulaire parti de Bretagne et de France, tenu par une femme dont on ne voit que, la tête et les mains ; — Jeanne de France, fille du roi Charles VI, femme de Jean V, duc de Bretagne.

 



 

 

 

Blasons des voûtes du chœur photographie lavieb-aile.

Blasons des voûtes du chœur photographie lavieb-aile.

Blason n°1 : Écu d’hermines timbré d’un casque taré de profil, sommé du lion de Montfort assis entre deux cornes de bœuf ; le casque orné de lambrequins ; l’écu soutenu par deux anges ; — Jean V de Montfort, dit le Bon, duc de Bretagne (1399-1442), photographie lavieb-aile.

Blason n°1 : Écu d’hermines timbré d’un casque taré de profil, sommé du lion de Montfort assis entre deux cornes de bœuf ; le casque orné de lambrequins ; l’écu soutenu par deux anges ; — Jean V de Montfort, dit le Bon, duc de Bretagne (1399-1442), photographie lavieb-aile.

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Armoiries de la duchesse de Bretagne Jeanne de France, parti de Bretagne et de France  : clé de voûte du chœur, photo lavieb-aile

Armoiries de la duchesse de Bretagne Jeanne de France, parti de Bretagne et de France : clé de voûte du chœur, photo lavieb-aile

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En poursuivant  la nervure médiane vers la nef, on trouve les armoiries de François, qui deviendra duc de Bretagne à la mort de sn père Jean V le 29 aoüt 1442. Puis viennent les armoiries de Kergloaguen puis ensuite la volumineuse clé de voûte portant l'écu échiqueté d’argent et de gueules, timbré sur son angle senestre d’un casque taré de profil, orné de lambrequins, et sommé de deux cornes de bœuf pour cimier de Jehan de Poulmic, gouverneur de Quimper en  1404 et pendant les années suivantes. Il trouva la mort le 6 mars 1426 lors du siège de St-James de Beuvron.

Armoiries de François, fils du duc Jean V : selon Le Men (1877)

 N° 9. Écu, triangulaire couché, portant d’hermines plein, tenu par un personnage dont on ne voit que la tête, les mains et les pieds ; — le prince François, âgé de deux à trois ans, fils de Jean V de Montfort, et de Jeanne de France, qui fut duc de Bretagne sous le nom de François Ier, de 1442 à 1450. 

L'archiviste de Quimper ne mentionne pas le lambel de gueules à trois pendants, placé en chef, caractéristique des armoiries du fils aîné du vivant de son père.

 

 

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Armoiries de François II de Bretagne  : clé de voûte du chœur, photo lavieb-aile

Armoiries de François II de Bretagne : clé de voûte du chœur, photo lavieb-aile

Blason échiqueté d'argent et de gueules,  timbré sur son angle senestre d’un casque taré de profil, orné de lambrequins, et sommé de deux cornes de bœuf pour cimier,  de Jehan, sire de Poulmic, gouverneur de Quimper en 1404 et les années suivantes. Photographie lavieb-aile

Blason échiqueté d'argent et de gueules, timbré sur son angle senestre d’un casque taré de profil, orné de lambrequins, et sommé de deux cornes de bœuf pour cimier, de Jehan, sire de Poulmic, gouverneur de Quimper en 1404 et les années suivantes. Photographie lavieb-aile


Le chœur à quatre travées droites avec bas-côté et chapelles latérales est prolongé par un rond-point avec déambulatoire ouvrant sur cinq chapelles rayonnantes et une chapelle axiale consacrée à la Vierge, le tout mesurant 30 mètres de long.  

"Le chœur ouvre sur ses bas-côtés par treize arcades en ogive portées sur de gros piliers cylindriques ou à pans coupés, les uns cantonnés, les autres enveloppés de colonnettes rondes engagées. Les cinq arcades du rond-point sont en lancette ; les huit autres sont des ogives équilatérales" (Le Men)

AncreAncre Les 13 verrières hautes du chœur relèvent du même parti-pris stylistique : "autour du grand Calvaire placé dans l'axe, une suite de niches blanches tendues de damas colorés devant lesquels sont campés des figures de saints. Ces personnages sont largement traités en grisaille et jaune d'argent sur verre blanc, avec un emploi dosé de verres teintés dans la masse pour certains vêtements et accessoires. Ceux du coté sud protègent les donateurs laïcs, [...] quelques membres du clergé dont un évêque sont agenouillés aux pieds de certains saints au nord " (Gatouillat, 2005 p.28). Nous trouverons donc au sud, du chœur vers la nef les familles du Juch, de Bodigneau, de Lezongar, de Tréanna de Trémic-Bodigneau, et au nord, l'évêque Bertrand de Rosmadec, les chanoine Olivier de l'Hôtellerie, Pierre du Quinquis, Jacques Buzic et Jean de Tréanna. Les armoiries de ces bienfaiteurs de la cathédrale ont occupés les  tympans des vitraux jusqu'aux destructions de 1793, et en leur absence, les identifications des personnages sont sujets à caution et incomplètes, basées sur les descriptions d'Aymar de Blois et de R-F. Le Men.

Parmi ces 13 verrières, les cinq arcades du rond-point accueillent cinq baies qui forment un sous-ensemble homogène, mais dans lequel il faut encore isoler les trois baies centrales, les seules qui soient visibles depuis la nef ou le transept :  la baie 100 au centre et les deux baies latérales 101 et 102 . Les trois verrières y donnent à voir le duc Jean V (à gauche) accompagné de son fils François et guidé par saint Corentin, et la duchesse Jeanne accompagnée de sa fille et précédée par la Vierge, encadrant une Crucifixion. 

 

La datation des verrières du chœur se fonde sur celle à laquelle la voûte a reçu sa polychromie, en août 1417 : on estime que les vitraux ont attendu cette peinture pour être mis en place. Françoise Gatouillat suggère qu'ils pourraient néanmoins être antérieurs de quelques années, en tenant compte par exemple de la présence présumée en baie  103 de la fille du duc Jean V, Anne : celle-ci est morte avant avril 1415.

 

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Plan de la cathédrale et de ses verrières numérotées (fenêtres hautes en vert) : le cadre rouge montre le rond-point. D'après Chaussepied, in Couffon et Le Bras.

Plan de la cathédrale et de ses verrières numérotées (fenêtres hautes en vert) : le cadre rouge montre le rond-point. D'après Chaussepied, in Couffon et Le Bras.

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Voûte et fenêtres hautes du chœur, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Voûte et fenêtres hautes du chœur, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Un autre préalable à la découverte des vitraux du chœur est la compréhension de la formidable aventure humaine qui mène de leur création vers 1417 aux verrières actuellement visibles. 

Le roman des trois verrières (d'après Gatouillat, 2005).

En 1842, le fond ancien des vitraux est comptabilisé : "sur les 47 lancettes du chœur, 34 possèdent encore leur panneau d'origine, et 3 autres peuvent être encore complétés". Quatorze  ans plus tard, la restauration des trois baies centrales, considérées comme prioritaires, est confiée au verrier tourangeau  Julien-Léopold Lobin. La baie 100 est presque entière (seul manque le panneau inférieur de la lancette de saint Jean), mais les verres sont trop altérés pour les moyens de restauration de l'époque.  Lobin décide de le déposer et de le remplacer par un sujet similaire. Quand aux baies 101 et 103, elles sont très mutilées, et Lobin les remplace également par des verrières neuves. Les vitraux originaux sont remisés dans les magasins de la cathédrale. 

Dix ans plus tard, afin de poursuivre les restaurations du chœur, la fabrique s'adresse à Antoine Lusson, le restaurateur de la Sainte-Chapelle ; mais, le travail achevé, on constate qu'il ne s'intègre pas avec le style du rond-point :

"M. Lobin de Tours exécuta trois verrières qui n'étaient point sans mérite, mais ne cadrèrent plus avec les vieux vitraux adjacents quand ceux-ci eurent été restaurés ; ces œuvres modernes furent données à la nouvelle église de Châteaulin et remplacées par les trois verrières que je viens de décrire ; celles-ci furent faites d'après les indications autrefois laissées par M. de Blois (de Morlaix). On s'accorde à en regarder l'exécution comme une très heureuse imitation du Moyen-Age. " (A. Thomas).

Lusson fait valoir qu'il est en mesure de produire des copies fidèles des verrières primitives mises en réserve, mieux accordées au  fond ancien que les œuvres de son confrère. Une seconde verrière du Calvaire est aussitôt réalisée pour la fenêtre centrale, datée de 1869 et explicitement signée, et ses deux voisines sont également refaites. L'architecte Bigot, qui dirige les travaux de la cathédrale, prévoit de remployer les verrières de Lobin à  l'église Saint-Idunet de Châteaulin, dont il vient de donner les plans. Seul le Calvaire de la baie n°100 y trouvera place, dans la grande baie du bras gauche du transept, et on ne sait ce qu'il est advenu des deux autres. 

 Lusson prend modèle sur les panneaux anciens déposés  et stockés dans la cathédrale, les reproduit par calques (actuellement conservés dans une tour de l'édifice), et les raccorde à des parties manquantes par des pièces de son invention. Le travail achevé, la fabrique lui abandonne , selon une pratique courante à l'époque, les panneaux et fragments non réutilisés, qui ont probablement fait partie du fonds d'atelier jusqu'à la disparition de l'entreprise. 

Au décès d'Antoine Lusson, en 1876, l'atelier est dirigé par Léon Lefèvre, puis, en 1880, par Pierre-Georges Bardon, mort en 1905 sans successeur signalé. Sans-doute est-ce à cette époque que les vitraux provenant de Quimper se sont trouvés dans le commerce d'art parisien. En 1986, le  chanteur de l'Opéra-Comique Jean Mouliérat  acquiert le château de Castelnau-Bretenoux, (Lot) et y accumule une importante collection d'art, qui sera léguée à l'État en 1936. Dans la chapelle du château ou "oratoire", il fait monter la Crucifixion de la baie axiale de Quimper, où elle est toujours admirée aujourd'hui par les visiteurs (diverses photographies en ligne). C'est Jean Lafond qui l'identifie en 1962 grâce aux dessins publiés par Ottin (qui travaillait avec Lusson) dans son ouvrage Le Vitrail de 1896.

En 1992-1993, à l'occasion de la restauration fondamentale menée sur le chœur entre 1989 et 1993 sous la direction de Benjamin Mouton, la restauration de la baie 100 et des baies nord 103 à 111 est confiée à l'atelier Le Bihan de Quimper, et celle de la baie 101 et des baies sud 102 à 112 à l'atelier de Michaël Messonnet ( élève d'Hubert de Sainte-Marie qui a repris l'atelier de Quintin). Jean-Pierre Le Bihan et son fils Antoine redécouvrent l'article de Jean Lafond, se rendent à Castelnau-Bretenoux où ils procèdent à un relevé photo de la baie dont "personne ne connaissait la provenance". Un second voyage permet de procéder aux calques de l'œuvre de 1417 ; j'emprunte ces photos au blog de Jean-Pierre Le Bihan, qui est aussi l'auteur d'un article sur cette restauration :

 http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-29890629.html

 

 

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Quatorze calques sont réalisés par Antoine Le Bihan ; une photo de détail du vitrail ancien est proposée sur le blog, permettant d'admirer la fidélité du travail qui va suivre.

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En effet, Antoine Le Bihan réalise alors pour la cathédrale une copie du vitrail : c'est celle-ci que nous pouvons admirer aujourd'hui. L'ancienne copie de Lusson est conservée en dépôt dans la salle de l'étage de la tour sud, avec tous les morceaux de plus de 10 cm en même temps retirés aux fenêtres voisines. 

 Résumé :

  • Vers 1417 : réalisation des verrières hautes du chœur.
  • 1842 : la baie 100 est presque intacte, les baies 101 et 102 sont très mutilées
  • 1856 : Lobin crée trois verrières neuves, librement "copiées" de l'ancien. L'ancienne baie 100 est conservée.
  • 1869 : Lusson dépose les vitraux de Lobin et les remplace par ses créations, copiées fidélement par calques des anciens. Les calques sont conservées.
  • 1941 : les vitraux de la cathédrale sont démontés et stockés dans la chapelle Saint-Guénolé d'Ergué-Gabéric. Ils sont remontés après la guerre.
  • 1987 : les vitraux du chœur sont tous déposés pour restauration.
  • 1993 : Antoine Le Bihan crée pour la baie 100 une copie fidèle du vitrail ancien, retrouvé à Castelnau-Bretenoux. La baie n°100 actuelle date donc de 1993 mais reproduit fidèlement le vitrail de 1417 (sauf le panneau inférieur de la lancette de saint Jean).

 http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/page/10

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Nota bene : dans un message de mars 2018, Anne Ripeau signale que c'est elle qui fut, au début des années 1990, chargée par Messonnet de peindre les panneaux  des baies 101 et 102.

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La suite du roman : les verrières des baies 101 et 102 

Rappel : les vitraux anciens, très mutilés, ont été remplacés par ceux de Lobin (actuellement perdus) puis ceux de Lusson. Des calques ont été publiés par Ottin en 1896 dans Le Vitrail

Les fragments anciens de l'ensemble des vitraux du chœur, conservés par Lusson, lui ont permis de confectionner des panneaux composites pour un antiquaire normand. Françoise Gatouillat les a identifié en 1993 dans des collections privées parisiennes (après un séjour  dans le château de Conches -en-Ouche jusqu'en 1942),  par confrontation aux calques d'Ottin et aux copies intégrées aux vitraux par Lusson. Il s'agit de six têtes de saints et donateurs provenant des baies sud et deux têtes des baies 101 et 102.

 

Ces dernières, de petite taille, sont vraisemblablement celles des enfants du duc Jean V. On y trouve aussi de menus débris d'architecture.

Ces pièces médiévales ont eu le mérite d'assurer que Lusson s'est montré scrupuleusement fidèle aux modèles originaux dans ses créations de 1867.

Hélas, la qualité de la grisaille employée au XIXe siècle s'est avérée bien moins résistante aux altérations que celle employée au début du XVe, et les ateliers Messonnet et Le Bihan ont du remplacer de nombreuses pièces des vitraux de Lusson, en s'attachant à conserver au maximum les éléments originaux.

En résumé, les baies actuelles 101 et 102 sont celles de Lusson en 1867, restaurées ou partiellement remplacées par Messonnet et Le Bihan et 1993, mais dont des éléments fragmentaires permettent de penser qu'elles sont le plus proche possible des vitraux d'origine. 

 

L. Ottin, Le Vitrail, figure 42 :https://archive.org/stream/levitrailsonhist00otti#page/42/mode/2up

Calque de la verrière d'origine de la baie n°100, tracé par Ottin en 1869.

Calque de la verrière d'origine de la baie n°100, tracé par Ottin en 1869.

Chœur de la cathédrale de Quimper. Les trois baies du "rond-point". Photographie lavieb-aile.

Chœur de la cathédrale de Quimper. Les trois baies du "rond-point". Photographie lavieb-aile.

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LA BAIE N°  100, FENÊTRE D'AXE : CRUCIFIXION.

Il s'agit donc de la copie en 1993 par Antoine Le Bihan du vitrail d'origine. 

Sur les fonds damassés inspirés des soieries dites lampas de Lucques, voir l'article cité en introduction.

Crucifixion, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.
Crucifixion, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

Crucifixion, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

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Crucifixion, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

Crucifixion, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

LANCETTE A : la Vierge.

La Vierge éplorée, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

La Vierge éplorée, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

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Calque tracé par Louis Ottin sur le vitrail de 1417, in Ottin 1896 figure 49.

Calque tracé par Louis Ottin sur le vitrail de 1417, in Ottin 1896 figure 49.

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Lancette B. Le Christ en croix.

Un cartel posé de biais sous la croix indique : Ministère de la culture / Restauration des verrières hautes / du c[h]œur //Nord, J.P. et A. Le Bihan / Quimper. // Sud, H.S.M. M. Messon[n]et / Quintin // Architecte B. Mouton // 1992.

 

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Crucifixion, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

Crucifixion, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

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Lancette C. Saint Jean.

Saint Jean, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

Saint Jean, Baie d'axe n°100, Chœur de la cathédrale de Quimper. Photographie lavieb-aile.

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Le tympan.

Style gothique flamboyant : 

On y voit des anges portant les instruments de la Passion : colonne de la Flagellation, échelle, couronne d'épines. Un ensemble associant le glaive de saint Pierre à la lame duquel est accroché l'oreille du serviteur du grand prêtre, le fouet de la Flagellation, trois clous et la lance. Et le soleil et la lune personnalisé. 

Ottin, dans sa description page 173, se contente de signaler "des anges tenant les instruments de la Passion" : ces astres étaient-ils présents sur le vitrail initial ?

Tympan de la baie n°100, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.
Tympan de la baie n°100, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Tympan de la baie n°100, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Tympan de la baie n°100, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Tympan de la baie n°100, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Le soleil et la lune sont semblables à ceux qui figurent sur une Crucifixion de l'église Saint-Georges de Chevrières (Oise), vitrail daté de 1545 et attribué à Nicolas Leprince. Il a été restauré en 1860 par Lefèvre, et c'est sans doute à cette occasion que Louis Ottin en a levé un calque qu'il reproduit à la page 4 de son ouvrage. 

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/0/0f/Chevri%C3%A8res_%2860%29%2C_%C3%A9glise_Saint-Georges%2C_verri%C3%A8re_n%C2%B0_0_-_Crucifixion_et_R%C3%A9surrection_du_Christ.JPG

Mais ce motif se trouve déjà chez Engrand Leprince en 1522 dans le Jugement Dernier de Saint-Étienne de Beauvais : 

Diaporama (cliquez):

Lune et soleil à Chevrières, in Louis Ottin, 1896,  Le Vitrail, page 4. // Engrand Leprince en 1522, Jugement Dernier de Saint-Étienne de Beauvais, photo lavieb-aile
Lune et soleil à Chevrières, in Louis Ottin, 1896,  Le Vitrail, page 4. // Engrand Leprince en 1522, Jugement Dernier de Saint-Étienne de Beauvais, photo lavieb-aile
Lune et soleil à Chevrières, in Louis Ottin, 1896,  Le Vitrail, page 4. // Engrand Leprince en 1522, Jugement Dernier de Saint-Étienne de Beauvais, photo lavieb-aile
Lune et soleil à Chevrières, in Louis Ottin, 1896,  Le Vitrail, page 4. // Engrand Leprince en 1522, Jugement Dernier de Saint-Étienne de Beauvais, photo lavieb-aile

Lune et soleil à Chevrières, in Louis Ottin, 1896, Le Vitrail, page 4. // Engrand Leprince en 1522, Jugement Dernier de Saint-Étienne de Beauvais, photo lavieb-aile

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LA BAIE 101 DU DUC DE BRETAGNE.

 

Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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La lancette A: le futur duc François Ier présenté par saint François. 

 

Lancette A, le futur duc François II,  Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile
Lancette A, le futur duc François II,  Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Lancette A, le futur duc François II, Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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La lancette B : le duc Jean V présenté par saint Jean l'Évangéliste.

Lancette B, le duc Jean V,  Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile
Lancette B, le duc Jean V,  Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Lancette B, le duc Jean V, Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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Lancette B, le duc Jean V,  Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Lancette B, le duc Jean V, Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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Lancette C. Saint Corentin, patron de la cathédrale..

"Saint Corentin, d’abord solitaire, puis premier évêque de Quimper, et patron de la cathédrale. Sous ses pieds est représenté un poisson en fasce. Cet attribut rappelle un miracle opéré par ce saint et rapporté en ces termes, par Albert le Grand : « Pour sa nourriture et sustentation en ceste solitude, Dieu faisoit un miracle admirable et continuel : car, encore qu’il se contentast de quelques morceaux de gros pain, qu’il mendioit quelques fois es villages prochains, et quelques herbes et racines sauvages, que la terre produisoit d’elle-même, sans travail ny industrie, lui envoya un petit poisson en sa fontaine, lequel tous les matins se présentoit au saint qui le prenoit et en coupoit une pièce pour sa pitance, et le rejetoit dans  page l’eau, et tout à l’instant, il se trouvoit tout entier, sans lésion ni blessure, et ne manquoit tous les mati-ns, à se présenter à saint  Corentin, qui faisoit toujours de mesme. » (R-F. Le Men 1877 pages 24-25 ).

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Lancette c, saint Corentin tenant son poisson,  Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile
Lancette c, saint Corentin tenant son poisson,  Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Lancette c, saint Corentin tenant son poisson, Baie 101 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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Baie 102, verrière de la Duchesse Jeanne de France.

 Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile
 Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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Lancette A : la Vierge à l'Enfant.

Lancette A, Vierge à l'Enfant,  Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile
Lancette A, Vierge à l'Enfant,  Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Lancette A, Vierge à l'Enfant, Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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Lancette B. Jeanne de France, duchesse de Bretagne (1399-1433) présentée par saint Jean-Baptiste.

Lancette B. Jeanne de France, duchesse de Bretagne (1399-1433) présentée par saint Jean-Baptiste.Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile
Lancette B. Jeanne de France, duchesse de Bretagne (1399-1433) présentée par saint Jean-Baptiste.Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Lancette B. Jeanne de France, duchesse de Bretagne (1399-1433) présentée par saint Jean-Baptiste.Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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Lancette C. Anne de Bretagne présentée par sainte Anne.

L'atelier Lusson a repris ici le carton de la lancette précédente en l'adaptant pour figurer Anne de Bretagne, la fille aînée du duc Jean V et de Jeanne, présentée par une sainte . Cette dernière est identifiée comme sainte Anne par l'inscription S. ANNA. Elle tient une banderole où est écrit .S. anna ora pro nobis. Il  n'est pas attesté que sainte Anne figurait dans le vitrail original. Mais lorsque Lusson a réalisé cette lancette, le culte de sainte Anne était en plein développement, comme en témoigne par exemple la reconstruction de la chapelle de Sainte-Anne-La-Palud en 1864, et la construction de la basilique de Sainte-Anne-d'Auray de 1866 à 1872. 

Parmi les fragments des baies 101 et 102 conservés par Lusson et commercialisés, se trouve la tête d'une fillette correspondant selon toute vraisemblance à l'une des filles du couple ducal.

 

  •   Anne, l'ainée, est  née en 1409 mais décédée en avril 1415. Le 19 juillet 1412, un contrat de mariage fut conclut avec le fils aîné du duc de Bourbon.
  • Isabelle (1411 † 1442), 

  • Marguerite (1412 † 1421)

  • Catherine (1417 † ap. 1444)

​On ne peut donc exclure, et cela semble même beaucoup plus logique,  que la fillette peinte dans le vitrail d'origine soit plutôt Isabelle, âgée en 1417 de 6 ans, et qui épousera le 1er octobre 1430 Guy XIV de Laval, devenant ainsi comtesse de Laval, et baronne de Vitré . Elle est aussi désignée sous le nom d'Isabeau de Bretagne, qu'il ne faut pas confondre avec son homonyme fille du duc François II et sœur d'Anne de Bretagne.

Voici la tête ancienne, publiée par Françoise Gatouillat 2009.

 

In Gatouillat 2009 figure 8.

In Gatouillat 2009 figure 8.

Lancette C. Anne de Bretagne présentée par sainte Anne.  Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile
Lancette C. Anne de Bretagne présentée par sainte Anne.  Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Lancette C. Anne de Bretagne présentée par sainte Anne. Baie 102 du rond-point du chœur de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

 

 

 

 

SOURCES ET LIENS.

 

 

CATHÉDRALE SAINT-CORENTIN DE QUIMPER. INAUGURATION DU PORTAIL OCCIDENTAL, 12 décembre 2008   : http://www.sdap-finistere.culture.gouv.fr/fichiers/dossiers/mon8-fasciculecathedrale2008v2ds.pdf

ANDRÉ (Augustin), 1878, De la verrerie et des vitraux peints de l'ancienne province de Bretagne, Rennes, Plihon, in-8°, 281 p.  (Extr. des Mémoires de la Société archéologique du département d'Ille-et-Vilaine, t. XII.) page 299-304.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2077642/f326.image

 

— AYMAR DE BLOIS (1760-1852), vers 1820. On doit à ce neveu du chanoine de Boisbilly une description des vitraux vers 1820. 

A. de Blois, héritant de ce registre de Boisbilly, en fait don à l'évêque André, le 5 janvier 1804, mais le ré-annote en 1820 et 1821 et donne alors la description des vitraux et leur état. Il le remit de nouveau à l'évêque de Quimper, Mgr Graveran, le 5 septembre 1842 "pour l'usage de la cathédrale ". Il rajoute  "malade d'une fluxion, charge son fils Louis de le remettre à l'évêque". (J-P. Le Bihan)


 

— BOISBILLY (Jean-Jacques-Archibald le Provost de la Boexière ,Chanoine de), vers 1770, Registre de BoisbillyArch. Dioc. Quimper,  ,

 Jean-Jacques Archambault Provost de Boisbilly (1735-1786). Docteur en théologie de la Sorbonne, vicaire général du diocèse de Rennes, il était abbé commandataire du Tronchet et chanoine de Quimper. Il possédait une des plus érudites bibliothèques de Quimper et on lui doit par ailleurs un plan de la cathédrale dressé en 1770 qui est une des sources les plus importantes sur la cathédrale avant la Révolution. Il avait dessiné l'architecture des fenêtres de la cathédrale en pleine page de 1770 à 1772. Ce travail  devait être complété par la suite avec les dessins des vitraux, mais il fut malheureusement appelé à d'autres fonctions.

"La cathédrale de Quimper, qui figure au nombre des Monuments historiques du département du Finistère, n’a été jusqu’ici l’objet d’aucune publication de quelque importance. Vers l’année 1770, l’abbé de Boisbilly, syndic du chapitre de Quimper, avait, en vue d’une histoire de ce monument, réuni de nombreuses notes, et fait dresser un plan de l’église avec ses chapelles et ses autels. Dans sa réunion générale du 14 mai 1772, le chapitre le « pria de continuer l’ouvrage qu’il avait commencé sur la description détaillée de l’église cathédrale, » et décida « qu’il en serait fait un registre particulier. » (1)1 Sur ces entrefaites, l’abbé de Boisbilly fut appelé à Rennes pour prendre part aux travaux de la Commission intermédiaire des États de Bretagne dont il faisait partie. Les affaires importantes et multipliées de la Province ne lui permirent pas de mener à bonne fin son entreprise. Ses notes furent perdues, et il n’est resté comme souvenir du projet qu’il avait formé, qu’un registre grand in-folio, qui contient avec le plan de la cathédrale, les dessins au trait de ses fenêtres, dessins qui devaient être complétés par la peinture des vitraux. M. de Blois (de Morlaix), neveu de l’abbé de Boisbilly, a fait hommage de ce registre à Mgr l’évêque de Quimper, le 5 septembre 1849. Avant de s’en dessaisir, il avait pris le soin d’écrire au-dessous des dessins des fenêtres, une description sommaire des vitraux qu’elles contenaient encore en 1820 et 1821, mais à cette époque beaucoup étaient entièrement détruits. " (R-F. Le Men)

 

— BONNET (Philippe) 2003, Quimper, la cathédrale, Zodiaque, Paris 

— COUFFON (René), 1963,  « Etat des vitraux de la cathédrale Saint-Corentin au milieu du XIXe siècle par le baron de Gulhermy », Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, tome LXXXIX, p. XCVII-CII

COUFFON et LE BRAS,  http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/Quimper.pdf

— DANIEL (Tanguy), (dir.), Anne Brignandy, Yves-Pascal Castel, Jean Kerhervé et Jean-Pierre Le Bihan, 2005,  sous la direction de, Les vitraux de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper,  Presses Universitaires de Rennes / Société Archéologique du Finistère,  287 p. (ISBN 978-2-7535-0037-2).

GALLET (Yves), Les ducs, l’argent, les hommes ? Observations sur la date présumée du chevet rayonnant de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper (1239) p. 103-116 http://books.openedition.org/pur/5315

— GALLET (Yves), 2009, "Quimper, cathédrale Saint-Corentin. L'architecture, (XIIIe-XVe sièle)", " Actes du Congrès Archéologique de France  2007 de la Société Française d'Archéologie.

 — GATOUILLAT (Françoise), 2013,  "Les vitraux de la cathédrale" , in Quimper, la grâce d'une cathédrale, sous la direction de Philippe Bonnet et al.La Nuée Bleue, Strasbourg, page 185-203

 — GATOUILLAT (Françoise), 2009, "Quimper, cathédrale Saint-Corentin. Les vitraux anciens." Actes du Congrès  Archéologique de France 2007 de la Société Française d'Archéologie.

— GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2005,  Les vitraux de Bretagne, Corpus Vitrearum, France VII, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, p. 172.

— GUILHERMY (Ferdinand de), 1848-1862,  Notes sur les diverses localités de France, Bnf, Nouv. acquis. française 6106 folio 335v et suivantes.

Le baron de Guihermy, membre de la Commission des Arts, visita Quimper le 2 octobre 1848 et rédigea un mémoire d'après ses notes. Nommé membre de la Commission des Monuments Historiques en 1860, il entreprit un voyage en France et séjourna à Quimper du jeudi soir 28 octobre 1862 au samedi 30 à midi et compléta alors ses premières notes.  Les baies n'y sont pas numérotées et distribuées en cinq lieux : Vitraux de la chapelle des fonts, vitraux de la Nef, vitraux du transept, vitraux du chœur, vitraux de la chapelle terminale. 

LAFOND (Jean), 1962," Le Christ en croix de la cathédrale de Quimepr à Castelnau-Bretenoux",  Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France p. 36-38.

— LA VALLÉE, 1847,  "Essai sur les vitraux existant dans les églises du canton de Quimper", Bulletin archéologique de l'Association bretonne, t.I, p. 263-277.

 

— LE BIHAN (J.-P.), J.-F. Villard (dir.), 2005,  Archéologie de Quimper. Matériaux pour servir l’histoire, t. 1 : De la chute de l’Empire romain à la fin du Moyen Âge, Quimper, 2005.

— LE BIHAN (J.-P.) 1993,, -"Gravures de repère sur les vitraux bretons des XVe et XVIe." Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, T.CXXII

LE BIHAN (Jean-Pierre), 1995, « La restauration des verrières hautes de la cathédrale de Quimper, » Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, T.CXXIV, p.524-525

LE BIHAN (Jean-Pierre), 1997,« La verrière n°100 de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper », Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, T.CXXVI, p. 175-201.

LE BIHAN (Jean-Pierre), 2007,  Blog 

http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-7003763.html

 

 LE MEN (René-François), 1877, Monographie de la cathédrale de Quimper [XII-XVe siècle], Quimper. p.243-244,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/1e08593c46eb46336af146045b16d0f4.pdf

MACIAS-VALADEZ (Katia), 1997, "Les vitraux des fenêtres hautes de la cathédrale de Quimper : un chantier d'expérimentation et la définition d'un style quimpérois", Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne, t. LXXV, p. 204-242.

OTTIN (L.), Le Vitrail, son histoire, ses manifestations diverses à travers les âges et les peuples, Librairie Renouard, H. Laurens éditeur, Paris, s.d. [1896] In-4°, 376 pages,  4 planche en couleurs, 15 phototypies, 12 planches en teinte hors texte, 219 gravures, de signatures, marques et monogrammes. 

https://archive.org/stream/levitrailsonhist00otti#page/42/mode/2up

— THOMAS (Abbé Alexandre), 1892, Visite de la cathédrale de Quimper. Arsène de Kerangal, 170 pages,  p.117,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/c9d5dca31c276caf2782d0a4b99a85ce.pdf

 — THOMAS (Abbé Alexandre) 1904,  La cathédrale de Quimper, 1904, J. Salaun, 97 pages, p.51



 

 

LE MEN

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/1e08593c46eb46336af146045b16d0f4.pdf

 

 

N° 1. Première clef de voûte à partir du rond-point : Targe d’hermines timbrée d’un casque taré de profil, sommé du lion de Montfort assis entre deux cornes de bœuf ; le casque orné de lambrequins ; l’écu soutenu par deux anges ; — Jean V de Montfort,, dit le Bon, duc de Bretagne (1399-1442), marié à l’âge de cinq ans à Jeanne de France, fille de Charles VI roi de France. 22 (1) Il y a, entre ma description des armoiries des voûtes du chœur et leur état actuel, des différences très notables dans les émaux et même dans les pièces des écussons. Ces différences proviennent de ce que le peintre, chargé de leur restauration, au lieu de se conformer aux instructions qui lui étaient données de la part de Mgr Sergent, n’a pris le plus souvent pour guide que sa fantaisie. Autour des armoiries du souverain du pays sont groupés, sur les nervures secondaires de la voûte, les six écussons suivants, qui portent les armoiries de l’évêque qui occupait le siège de Quimper, lors de la construction des voûtes du chœur, et celles de cinq de ses chanoines. N° 2. Écu triangulaire timbré d’une crosse et soutenu par un lion, portant : d’azur à la fasce d’argent accompagnée de trois étriers d’or ; — Gatien de Monceaux, évêque de Quimper. Cet écu est le plus rapproché de celui du due Jean V. N° 3. Écu triangulaire portant : trois têtes de renard. — Alain de Penquelennec, reçu chanoine en 1394, vicaire général et archidiacre de Cornouaille en 1400. Le manoir de Penquelennec, construction du XVe siècle, existe encore dans la commune de Pemeurit. Sur le manteau de la cheminée de la grande salle, est un écusson en relief portant les mêmes armes surmontées d’un lambel à trois pendants. Plusieurs chanoines de ce nom, entre autres Raoul de Penquelennec, reçu en 1399, figurent dans les titres du chapitre de Quimper, au XIVe et au XVe siècle (1)23. N° 4. Écu triangulaire : pallé d’argent et d’azur de six pièces ; — Bertrand de Rosmadec, reçu chanoine de la cathédrale, en 1408 (2)24, et qui fut depuis évêque de Quimper, de 1416 à 1445.

N° 5. Écu triangulaire portant : une croix pattée, accompagnée à senestre de deux roses ou quintefeuilles ; sur le tout un lambel à trois pendants ; — Rolland de Lezongar, seigneur de Pratanras, chanoine en 1418. [p. 20] Ces armes diffèrent peu de celles de la seigneurie de Pratanras, en la paroisse de Penhars, qui sont : d’azur à la croix d’or cantonnée à dextre d’une fleur de lys de même. N° 6. Écu triangulaire : d’argent à la macle d’azur ; — Jean de Tréanna, chanoine en 1418.

N° 7. Écu triangulaire portant : d’argent au croissant de gueules accompagné de trois étoiles de même ; — Glazren de Pendreff (Penandreff), reçu chanoine le 29 janvier 1399 (1)25.

N° 8. Écu triangulaire parti de Bretagne et de France, tenu par une femme dont on ne voit que, la tête et les mains ; — Jeanne de France, fille du roi Charles VI, femme de Jean V, duc de Bretagne.

N° 9. Écu, triangulaire couché, portant d’hermines plein, tenu par un personnage dont on ne voit que la tête, les mains et les pieds ; — le prince François, âgé de deux à trois ans, fils de Jean V de Montfort, et de Jeanne de France, qui fut duc de Bretagne sous le nom de François Ier, de 1442 à 1450.

N° 10. Écu triangulaire lisse. No 11. Écu triangulaire lisse timbré d’une crosse — l’évêque Gatien de Monceaux.

N° 12. Écu couché arrondi à sa partie inférieure échiqueté d’argent et de gueules, timbré sur son angle senestre d’un casque taré de profil, orné de lambrequins, et sommé de deux cornes de bœuf pour cimier ; — Jehan, sire du Poulmic, gouverneur de Quimper en 1404 et pendant les années suivantes. N° 13. Écu carré fascé de six pièces d’argent et de sable ; — Jean de Kergroazez (Kergroadez), reçu chanoine en 1384 (2)26. N° 14. Sur la nervure voisine de cet écusson : écu semblable au n° 11. N° 15. Semblable au n° 7. 

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Published by jean-yves cordier - dans Quimper
11 mars 2016 5 11 /03 /mars /2016 04:22

Damien Roudeau et Nicolas Le Roy exposent à la bibliothèque de la Faculté Victor Segalen de Brest.

Voir aussi :

Lavieb-aile à Brest : 15 articles pour partager ma ville... et quelques autres.

Le 30 mai de l'année dernière, je vous ai raconté comment j'avais découvert Damien Roudeau :

Où je retrouve les remorqueurs, les bateaux-pilotes et les grues du port de commerce de Brest : Exposition "Frères du port" de Damien Roudeau à la Médiathèque de Bellevue à Brest. ​

J'avais souscrit avec enthousiasme au livre en préparation chez La Boite à Bulles, et j'ai rongé mon frein jusqu'à la parution de celui-ci.

Je pensais juste au plaisir de retrouver la qualité des illustrations qui m'avait séduites, mais je n'imaginais pas que j'allais découvrir un texte de grande qualité, dû à Nicolas Le Roy : ce fut une lecture choc, ma meilleure lecture depuis longtemps, et je fus convaincu qu'il s'agissait d'un des plus remarquables ouvrages parus sur le port de Brest, un document puissant qui allait faire date.

Je fréquente, par ailleurs, la bibliothèque de la faculté de Lettres Victor Segalen de l'Université de Bretagne Occidentale depuis longtemps (j'ai retrouvé récemment et rendu samedi un document que j'avais emprunté en...1987 ! ), et c'est grâce à l'efficacité et la disponibilité des personnes chargées de son service de prêt entre bibliothèque que, depuis 2009, je nourris la documentation des quelques 1000 articles de ce blog.

Lorsque je reçus une invitation au vernissage de l'exposition organisée par l'U.B.O et les deux auteurs, "le jeudi 10 mars à 18h", je ne me le suis pas fait dire deux fois.

Mon rôle n'est pas de présenter cette manifestation, les allocutions qui furent prononcées (la gentillesse attendrie des mots d'Alain Boulaire comparant les auteurs à Germaine Tillon et à Geneviève De Gaulle- Anthonioz !), ou de dresser un compte-rendu journalistique, et d'autres expliqueront que " pour comprendre les ports de Brest, Nicolas Le Roy, marin et sociologue, et Damien Roudeau, dessinateur, sont allés rencontrer ceux et celles qui y travaillent. Ils ont recueilli leurs témoignages et croqué leur vie au travail. Dockers, soudeurs, démineurs, pilotes, marins… Ils confient et racontent leur quotidien : le travail, la camaraderie, les peines et les espoirs. "

Je me suis juste offert le plaisir, un samedi matin au soleil levant, de laisser mon objectif flâner dans la grande galerie conçue en 1994 par l'architecte Massimiliano Fuksas. J'étais à l'écoute de mon cœur, je pensais aux griots dont on dit qu'ils sont les bibliothèques vivantes de l'Afrique : Nicolas Le Roy m'avait appris que chaque travailleur du port était aussi une mémoire incomparable, faite de données techniques, de gestes professionnels, de savoir-faire qui ne se transmettent à un "jeune", un "matelot" qu'au prix de longues années de compagnonnage.

C'est peut-être un lieu commun (je crois l'avoir lu ailleurs) de dire que dans une ville comme Brest, presque totalement détruite en 1944, le monument le plus remarquable, ce sont ses habitants. C'est néanmoins une vérité à laquelle les 312 pages et les innombrables illustrations de "Brest à quai" confèrent une profondeur singulière.

N.B La préface est d'Hervé Hamon, les ouvertures de chapitre sont de Josiane Gueguen et le dossier historique d'Alain Boulaire. Pas moins.

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I. IN SITU A L'U.B.O. 

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Il est temps de nous tourner

vers les panneaux exposés.

Demi-tour.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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LES DIX PORTS.

Dès la porte franchie, par un bel effort didactique, vous découvrez une partition de Brest en dix ports distincts, dont vous découvrez les localisations sur un plan.

Essayons de les découvrir d'ouest en est, comme un navire venant du large. Peu à peu, nous allons comprendre que cette division en dix ensembles n'est pas administrative ou conceptuelle, mais qu'elle recouvre dix tribus dont les codes, les parlers, les costumes, les figures ancestrales, les embarcations, les us et coutumes, sont aussi différentes que ceux de dix ethnies de Nouvelle-Guinée. Partons avec les auteurs comme des Argonautes du Port Atlantique Occidental, pour explorer cet exotisme du quotidien et de la proximité.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Le port militaire.

L'un des métiers (ou plutôt l'un des hommes) que j'ai découvert dans "Brest à quai" est celui de "Moniteur d'entrainement sportif et militaire" . Il illustre comment, dans ce Port, les corps et les esprits ont des particularités, des airs de famille, car ils bénéficient de programmes de mise en forme (j'entends soudain ce terme sous son sens propre), de gainage corporelle  et de techniques mentales approprié à aiguiser le sens de la combattivité.

Bref, nous feuilletons un album illustré de l'Esprit de corps. Pour découvrir plus tard que ce dernier n'est pas propre à la Marine, et que les neuf autres Ports sont aussi des Corps avec leur Esprit spécifique.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Le port de plaisance.

 

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Le port de liaison et le port de sécurité.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Le port de pêche.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Le port de commerce.

 

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Le port scientifique 

 

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Le port de réparation et le port des énergies marines.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.
Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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LA GUEULE DE L'EMPLOI.

Nicolas Le Roy et Damien Roudeau m'ont appris que les corps eux-mêmes devaient se former au métier exercé, et ces dessins montraient ces postures de travail criantes de vérité, cette incorporation du métier. Le corps d'un "voileux" se distingue de celui du marin-pêcheur, celui du marin-pompier de la Flotte de celui du réparateur naval comme on reconnaît le cormoran huppé du grand cormoran, la mouette tridactyle de la sterne Pierregarin. Rien d'inné pourtant, bien que la plupart des travailleurs interrogés étaient fils, petit-fils ou neveux d'un ou de plusieurs travailleurs du port, ou de marins. 

C'est le métier qui rentre!

Cette boutade est profondément juste : c'est à coup d'éreintement de fin de journée, à coups de blessures et de contusions, d'erreurs, d'égarements, de coup de gueule ou de regard critique mâtinés de conseils et d'exemples, c'est à coup d'ajustement du corps aux contraintes qu'il subit,  c'est en cherchant jour après jour à économiser sa dépense physique, à endurer la peine, à accompagner les mouvements d'un navire jusqu'à les épouser, c'est en apprenant à son regard à veiller aux dangers (dans la cale lors du chargement, c'est vers le haut), que le métier rentre. Non sans user les organes et altérer la santé.

Des regards.

Il y a aussi, dans ces dessins,  une  limpidité et une éloquence des regards qui, en photographie, ne s'obtient que si une qualité privilégiée de contact avait été établie. 

Beaucoup de ces dessins ont été réalisés sur du papier récupéré, couvert de calculs, de schémas et de cotes : il était  chargé de labeur, noirci par les travaux de construction, et le parallèle s'établissait ainsi pour dire combien les ouvriers, les marins, les ingénieurs et les employés des ports de Brest étaient leurs archives vivantes. 

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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LES NAVIRES.

 

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy  à l'UBO, photo lavieb-aile.

Exposition "Brest à quai" de Damien Roudeau et Nicolas Le Roy à l'UBO, photo lavieb-aile.

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Un grand merci aux auteurs et aux organisateurs pour cette grande exposition.

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8 mars 2016 2 08 /03 /mars /2016 09:21

L'Arbre de Jessé de la cathédrale Notre-Dame d'Évreux. Chapelle de la Mère de Dieu, vers 1470.

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Voir dans ce blog lavieb-aile des articles consacré aux Arbres de Jessé de Bretagne:

Les sculptures :

Et les vitraux :

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Et en comparaison avec les œuvres bretonnes :

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La chapelle absidiale dite de la Mère de Dieu fut construite entre 1461 et 1470 par l'évêque Jean La Bahue en commémoration du sacre de Louis XI. On y trouve une Vierge à l'enfant, statue de pierre polychrome, qui date du début du XVIe siècle. Hélas pour les amateurs de vitraux, cette statue s'oppose à l'accès à la Baie O et à sa verrière de l'Arbre de Jessé, d'autant que l'accès est entravé par une grille de clôture de l'autel : je n'ai réussi à prendre que des photographies de détails, en prise oblique.

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J'utilise donc en présentation la photographie  par Vassil disponible sur Wikipédia : là encore, la vue n'est que partielle. On se reportera ici pour une photo entière : http://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Evreux/Evreux-NotreDame_v12.htm

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Pour une photo du vitrail "en pied", je n'aurai que cela à vous offrir :

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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La baie 0 est formée de 3 lancettes trilobées et d'un tympan en forme de fleurs de lys ; elle mesure 5,80 m de haut sur 2 m de large. Elle est datée de 1467-1469 et relève d'un don de Louis XI. Elle a été restaurée en 1897 par Duhamel-Marette, et en 1999 par Tisserand qui a suuprimé les plombs de casse, collé de nombreuses pièces, qui en a doublé d'autres, avant de reposer le vitrage avec une verrière de doublage.

 

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Mes photos :

Le registre inférieur : Jessé entouré de deux prophètes.

On remarquera bien-sûr la robe damassée du patriarche Jessé, père du roi David et grand-père de Salomon : le fond rouge est envahi comme par un lierre ou une arborescence dorée, dont un examen rapproché montre qu'elle est faite de rinceaux, de feuilles de fougères, de fleurs d'œillets ou d'autres espèces, ou de pommes de pins. On peut y voir la puissance génératrice de l'ancêtre, et, par le choix de l'or, l'énergie spirituelle témoignant du fait que Jessé est mis au service de Dieu dans son plan d'Incarnation. On peut aussi y voir la place première du mot latin virga "rameau", qui va répondre, dans le registre supérieur, en sa fleur le mot virgo "vierge" et son fleuron l'Emmanuel selon la prophétie d'Isaïe 7:14 :

C'est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe, Voici, la jeune fille deviendra enceinte, elle enfantera un fils, Et elle lui donnera le nom d'Emmanuel. 

Le projet théologique des Arbres de Jessé est d'illustrer par une image mnémotechnique comment l'Ancien Testament contient les éléments qui annoncent et s'accomplissent dans le Nouveau Testament. Le premier Livre de Samuel ( Jessé y apparaît dans le chapitre 16 comme propriétaire de troupeau à Bethléem) est consacré à l'instauration d'une monarchie à la place du système des Juges, et raconte comment le pâtre David va recevoir la couronne royale du royaume de Juda et fonder une dynastie éternelle. Jésus, qui par sa généalogie énoncée dans l'incipit de l'évangile de Matthieu descend de Jessé et des douze rois de Juda, est le fondateur d'un Royaume éternel, et sa mère Marie reçoit la couronne comme Reine des cieux, reine des Anges, Vierge (virgo) qui accomplit la prophétie d'Isaïe. 

Sur le plan technique, les palmettes et rinceaux  du damas de cette robe ne sont pas peints mais montés au plomb . 

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Isaïe et sa prophétie.

Le prophète Isaïe (en bonnet orné de pierres précieuses) présente sa prophétie dans un phylactère : Egredietur virga de radice iesse et flos de radice eius ascendet.

Voir infra la traduction.

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Jessé sous sa tente, songeant à sa royale descendance.

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Second prophète. Jérémie (?).

Un second prophète prèsente son phylactère : Et requiescet super eum spiritus Domini 

Il est tentant d'y reconnaître le prophète Jérémie, mais cela n'est guère logique puisque les deux phylactères présentent les deux premiers versets du chapitre XI du Livre d'Isaïe :

Egredietur virga de radice Jesse, et flos de radice eius ascendet. Et requiescet super eum Spiritus Domini.  

Une tige sortira de la racine de Jessé, une fleur s’élèvera de ses racines. Et sur elle reposera l’Esprit du Seigneur. [Is. XI, 1-2] 

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Les registres supérieurs vont adopter une disposition qui rompt avec celle, linéaire, des premiers arbres du XIIe siècle  (ceux de Suger à Saint-Denis, de Chartres, de Troyes, du Mans, etc..) : selon un schéma en chandelier, la Vierge et l'Enfant occupe la place centrale au dessus de Jessé et les douze rois sont figurés sur des rameaux latéraux, en deux groupes de six, assis ou posés sur des bourgeons. 

Les rois portent le sceptre ; ils sont couronnés, mais leur couronne à fleuron est associée à un bonnet qui illustre qu'ils sont hébraïques et anté-testamentaires. Chacun d'eux témoigne, par sa gestuelle, de l'hommage qu'ils rendent à la Vierge et à son Fils, qu'ils reconnaissent comme la réalisation ultime de leur dynastie. L'un tend un index vers la Vierge, l'autre élève les deux mains, le troisième soulève son chapeau, etc...

Couleurs :

Le fond est un verre bleu uniforme, et cette couleur du ciel n'est reprise que pour le manteau de la Vierge (et la robe d'Isaïe). La seconde couleur est le jaune, c'est à dire le verre blanc peint à son avers de jaune d'argent plus ou moins concentré. Vient ensuite le rouge, puis le vieux rose ou le pourpre, et un pourpre très sombre. Le vert est décliné en deux teintes. On trouve aussi, pour des détails, un bleu turquoise pâle.

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Le roi David et sa harpe.

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Deuxième roi de Juda. Salomon ?

Sur le plan stylistique, notez la hampe du sceptre.

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Troisième et quatrième rois de Juda.

Lancette A, cinquième panneau.

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Cinquième et sixième rois de Juda.

Lancette C, cinquième panneau.

 

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Septième, huitième et neuvième rois de Juda.

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile
Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Dixième, onzième et douzième rois de Juda.

Lancette C, sixième et septième panneaux.

 

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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La Vierge à l'Enfant couronnée par trois anges.

On remarquera que la Vierge est debout sur le croissant qui se réfère à la Femme de l'Apocalypse. Ce détail fait de l'Arbre de Jessé une défense de l'Immaculée Conception.

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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Remarquez la couronne, montée "en chef-d'œuvre" . C'est aussi le cas de nombreuses pièces  d'ornements vestimentaires sur d'autres panneaux.

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Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

Baie 0 de l'Arbre de Jessé, (v. 1470), Chapelle de la Mère de Dieu, Cathédrale Notre-Dame d'Évreux, photographie lavieb-aile

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SOURCE ET LIENS.

— Site patrimoine-histoire.fr :

http://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Evreux/Evreux-Notre-Dame.htm

Professor Moriarty (2012):

http://professor-moriarty.com/info/fr/sec/vitraux/p%C3%A9riode-avant-19%C3%A8me-si%C3%A8cle/evreux-france/cath%C3%A9drale-notre-dame-d%C3%A9vreux-arbre-jess%C3%A9-chape

CALLIAS BEY (Martine), 2001, "Les vitraux de Haute-Normandie"  / Martine Callias Bey, Véronique Chaussé, Françoise Gatouillat, Michel Hérold ; éd. Comité français du Corpus Vitrearum, Laboratoire de recherche sur le patrimoine français. - Paris : CNRS éd. : Centre des monuments nationaux : Editions du Patrimoine, 2001. - 494 p. : ill., plans, cartes ; 33 cm. - (Corpus Vitrearum - Recensement des vitraux anciens de la France ; Vol. VI). Index p. 450-479." page 147.

 

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6 mars 2016 7 06 /03 /mars /2016 22:11

Orphano tu eris adiutor : des armoiries épiscopales dans la cathédrale de Quimper.

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Voir ici :

iconographie de saint Christophe dans les vitraux de la cathédrale de Quimper

Un petit article simple pour nous reposer. Chaque fidèle assistant à un office dans la cathédrale de Quimper, chaque visiteur se plaçant sous la croisée du transept voit, sur les deux piliers encadrant l'estrade où est placé l'autel, les deux armoiries qu'une crosse permet d'attribuer à un évêque. Sa devise est également inscrite : "Orphano tu eris adiutor". De quoi s'agit-il ?

 

Armoiries de l'évêque Jean de Lespervez, pilier gauche du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

Armoiries de l'évêque Jean de Lespervez, pilier gauche du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

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Armoiries de l'évêque Jean de Lespervez (1451-1472), pilier droit du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

Armoiries de l'évêque Jean de Lespervez (1451-1472), pilier droit du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

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La réponse se trouve dans la Monographie de la Cathédrale de Quimper de Renè-François Le Men, datant de 1877 :

page 118-119 : "Au-dessus de ces statues [de la Vierge et de saint Corentin] sont sculptés dans la pierre deux larges écussons carrés, ou en bannière, supportés par deux lions, et timbrés d’une mitre et d’une crosse, autour desquelles s’enroule sur un cartouche la devise : Orphano tu eris adjutor. Ces armoiries ayant été grattées pendant la Révolution, et la devise qui les accompagne n’étant pas connue il pouvait exister quelques doutes sur leur attribution, lorsque j’ai été assez heureux pour retrouver aux Archives du Finistère, au bas d’un testament de Jean de Lespervez, sur grand sceau en cire rouge, qui porte, avec la devise et les accessoires mentionnés plus haut, les armes de cet évêque qui sont : écartelé aux 1 et 4 : de sable à trois jumelles d’or, (Lespervez) ; au 2 d’or à deux fasces d’azur accompagnées de huit merlettes de gueules (Briquebec) ; au 3 : d’or au lion de sinople armé, lampassé et couronné de gueules (Painel-Hambye). À défaut d’autres renseignements, ces écussons prouveraient que cette partie de la cathédrale a été, faite par Jean de Lespervez, et non par Bertrand de Rosmadec, comme on le pensait généralement."

La source de la devise est facile à trouver : c'est le verset 38 du psaume 10  : ides quoniam tu laborem et dolorem consideras ut tradas eos in manus tuas tibi derelictus est pauper orfano tu eras adiutor

"Tu regardes cependant, car tu vois la peine et la souffrance, pour prendre en main leur cause ; c’est à toi que s’abandonne le malheureux, c’est toi qui viens en aide à l’orphelin."

Les mêmes armoiries, et la même devise, se voient aussi dans le tympan de la verrière de la baies 120, dans le bras sud du transept, coté ouest : voici sa description par Le Men (1877, id. page 138)

" Quatrième fenêtre (côté ouest). Quatre panneaux. 1er Panneau. — Notre-Seigneur Jésus-Christ. 2e Panneau. — Saint Jean l’Évangéliste présentant l’évêque placé dans le panneau suivant. 3e Panneau. — Un évêque à genoux devant un prie-dieu, sur lequel est un écusson portant : sable à trois jumelles d’or. — Jean de Lespervez, évêque de Quimper de 1451 à 1471. 4e Panneau. — Saint François d’Assise. Dans le compartiment supérieur du tympan, écusson triangulaire timbré d’une mitre et d’une crosse et portant les armes de l’évêque Jean de Lespervez, de sable à trois jumelles d’or. Au milieu du tympan, armoiries en bannière du même évêque, portant : écartelé aux 1 et 4, de sable à trois jumelles d’or ; au 2, d’or à deux fasces d’azur accompagnées de merlettes de gueules (de Briquebec) ; au 3, d’or au lion de sinople armé, lampassé et couronné de gueules (Painel-Hambie), l’écusson soutenu de deux lions d’or, timbré d’une mitre et d’une crosse, et accompagné d’un cartouche portant la devise de l’évêque Jean de Lespervez : Orphano tu eris adjutor. À l’exception du premier panneau, cette vitre a été entièrement refaite."

 

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Baie n°120, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

Baie n°120, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

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Jean de Lespervez succéda à son oncle Alain de Lespervez sur le trône épiscopal de Quimper et l'occupa de 1451 à 1472. Il était le fils de Charles de Lespervez, seigneur de Persquen conseiller du duc François Ier et premier président de la cour des comptes de Bretagne, et de Guillemette  Paynel, qui appartenait à la famille normande des barons d'Hambye (on admire encore l'abbaye d'Hambye dans la Manche) et de Bricquebec, sieurs de Bricqueville. Doyen de Dol à dix-sept ans (1441), chanoine et scholastique de Tréguier en 1444, doyen de Nantes la même année, archidiacre de Quimper en 1449, notaire apostolique,  il fut nommé à l’évêché de Quimper le 16 janvier 1451, sur la résignation d’Alain de Lespervez, son oncle ; comme il n'avait pas l'âge canonique il dut bénéficier d'une dispense pontificale (D'après Tanguy Daniel, Les Vitraux de la Cathédrale de Quimper, 2005, p. 95). 

Voir dans Le Men 1877 page 174-180 les pages consacrées à ce prélat "qui fut inhumé dans la chapelle de Saint Benoît, qui occupait le croisillon sud du transsept qu’il avait fait construire."

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/1e08593c46eb46336af146045b16d0f4.pdf 

Cet évêque fut, après Bertrand de Rosmadec, un de ceux qui firent le plus de bien à leur église. Outre le croisillon sud du transsept, qu’il fit construire, il contribua à l’achèvement de la nef et à son raccordement avec le chœur. Il ne  borna pas ses libéralités à la durée de son épiscopat, car il légua, par testament, à l’église de Quimper, tous ses biens, en réservant sur sa terre de Glomel, une somme de mille livres pour les réparations de sa cathédrale. 

Le site suivant donne une chronographie de la construction de la cathédrale :

http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/Quimper.pdf

CATHEDRALE ACTUELLE

Evêque RAINAUD 1218-1245

1239 Reconstruction du choeur avec le rattachement de la chapelle Notre-Dame de la Victoire qui devient abside.

Evêque YVES CABELLIC 1267-1280

1280 Bas-côté Nord. Le choeur est reconstruit.

Evêque ALAIN RIVELAIN 1290-1320 (dit Morel, de Riec)

1285-1295 Reconstruction de la chapelle absidiale. Consécration de l'autel.

Evêque ALAIN GONTIER 1334-1335 1335

Construction du collatéral Sud du choeur.

Evêque GATIEN DE MONCEAUX 1408-1416

1408-1416 Construction des voûtes du choeur.

Evêque BERTRAND DE ROSMADEC 1416-1444

1417 Peinture des voûtes par Jestin.

Pose de vitres "coloriées".

1424 Début construction de la NEF.

1424 Le 26 juillet pose de la 1ère pierre des tours.

Evêque JEAN DE LESPERVEZ 1451-1472

1460 Nef terminée.

1464 Voûtes des bas-côtés de la nef.

1467 Croisillon Sud du transept est couvert. Raccordement nef et choeur.

1469 Construction du clocher en bois recouvert de plomb. 50 pieds au dessus du transept.

Evêque THEBAUD DE RIEUX 1472-1479

1475 Début construction du croisillon Nord du transept, terminé en 1486.

Evêque ALAIN LE MAOUT 1484-1493

1487-1493 Construction des voûtes du transept et nef.

Evêque RAOUL LE MOEL 1493-1501

1494 Construction des meneaux des hautes fenêtres de nef, des balustres, des galeries, des pinacles, etc... Vers cette époque : Vitres peintes par Jean Sohier.

 

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Travaux pratiques pour demain : 

à quoi correspond cette sculpture du pilier du chœur, coté sud ?

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Cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

Cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile

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Published by jean-yves cordier - dans Quimper
1 mars 2016 2 01 /03 /mars /2016 16:12

Le Machaon Papilio machaon Linnaeus, 1758 ( (Papilionidae, Papilioninae/Papilionini ) de 1304 dans le Bréviaire à l'usage de Verdun, BM Verdun Ms 107.

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A Madame Colette Bitsch, avec toute ma gratitude.

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Voir :

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Les artistes rivalisent depuis longtemps pour représenter l'un de nos plus beaux papillons, le Machaon. Par exemple l'illustrateur allemand  Jacob Hübner (1761-1815), Das Kleine Schmetterlingsbuch, planche 17 n°3 et 4, ou Sammlung europäischer Schmetterling n°390-391:

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Quelles sont les premières représentations exactes (fidèles au modèle naturel) du Machaon ? Depuis juillet 2013, lorsque j'écrivais mon article de zoonymie (ou "origine du nom"), et où je découvrais les illustrations de Réaumur (1734), je n'ai cessé de repousser la date de cette première image. Je crus que c'était celle de Claude Aubriet, (1715-1735)

http://www.lavieb-aile.com/2015/11/claude-aubriet-et-les-papillons-les-velins-du-roy-museum-d-histoire-naturelle-1710-1735.html

 

 

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Claude Aubriet, Collection des Velins Volume 86 folio 2

Claude Aubriet, Collection des Velins Volume 86 folio 2

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Ou bien celle de Joris Hoefnagel, autre enlumineur (1575-1582) ?

 

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Ou bien Thomas Moffet, dans son Theatrum insectorum publié en 1634, mais dont les aquarelles du manuscrit original préparé sur les travaux de Thomas Penny et sur la collection de Gessner étaient réalisées une cinquantaine d'années auparavant :

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Ou bien la médiocre gravure publiée dans De Animalibus insectis d'Aldrovandi, le premier livre imprimé d'entomologie, en 1602 ?

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Bien-sûr, il y avait cette peinture de Jan Sanders dans laquelle les ailes de l'archange Saint Michel étaient celles d'un Machaon. Elle datait de 1535.

Était-ce là  l'exemple le plus ancien de ma collection ? 

Je me suis intéressé, à la suite de Vazrick Nazari, à explorer les pages des manuscrits médiévaux. Ce dernier auteur a interrogé les principales bibliothèques européennes à la recherche de papillons sur les manuscrits et il a obtenu 32 manuscrits , dont le plus ancien, le Bréviaire de Belleville, date de 1323-1326.   J'ai exploré pour ma part le site Mandragore de la Bnf, qui m'a sélectionné (Classement thématique/Zoologie/ autre insecte/ papillon) 767 légendes soit 681 images numérisées. Ah, j'avais le choix ! Je n'ai pas ouvert les 681 liens, car la très grande majorité des papillons des manuscrits ornaient des marges ("encadrements" et "décors marginaux"), ou des lettrines sous formes de papillons stylisés, imaginaires et stéréotypés. On reconnait parfois la Petite Tortue Aglais urticae.  

J'ai ensuite interrogé la base de données  Enluminure regroupant les manuscrits de Bibliothèques Municipales françaises. Là encore, je fus comblé, mais de même, parmi les 400 réponses (ce qui ne veut pas dire 400 manuscrits ou 400 images de papillons) d'Aix-en-Provence à Verdun,  je voyais se succéder des lépidoptères d'ornement, non identifiables, mais qui animaient souvent des drôleries, ou que des manants tentaient d'attraper. Après plusieurs heures passées à cliquer sur les images pour les copier, je me suis arrêté bien avant d'avoir atteint Paris, vers Clermont-Ferrand (Missel à l'usage de Clermont), à la 102ème image. On va bientôt comprendre que j'ai eu tort.

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J'ai longtemps pensé (et je le crois encore confusément) que nos semblables, pendant la période médiévale, ne VOYAIENT pas les différentes espèces de papillons, car ils ne disposaient pas de moyens pour les NOMMER (le premier à nommer le Machaon est James Petiver en 1699 avec Royal William, puis vient  Maria Sybilla Merian avec le Papillon Basse la Reine de 1730, et Réaumur avec son "papillon à queüe de la belle chenille du fenouil" de 1734). Linné ne donnera le nom de Machaon qu'en 1758 , mais en 1746, dans Fauna suecica page 240  il le désignait encore à l'aide d'une longue formule latine, la diagnose : papilio hexapus alis flavo nicroque variegatis : secundariis angulo subulato maculaque fulva. !

J'ai aussi pensé que nos ancêtres médiévaux étaient aveuglés, dans leur esprit si moyenâgeux, par les présupposés qui associaient les papillons soit avec les âmes qui s'échappent du corps lors de la mort, soit avec les miasmes, les pestes qui abimaient les vêtements et les biens. Ces animaux étaient trop suspects pour devenir objet de curiosité.

Mais il y a des exceptions à toute généralisation, c'est heureux. Madame Colette Bitsch, l'auteure de l'étude sur le Manuscrit Cocharelli ,  vient de m'en adresser la preuve, en m'offrant un superbe cadeau : la découverte du Bréviaire à l'usage de Verdun. Un manuscrit de 1304 conservé à la Bibliothèque Municipale de Verdun sous la cote Ms 107... C'est exactement la dernière des 400 images dont j'avais débuté la consultation !

Ai-je jamais lu le bréviaire avec un tel plaisir gourmand ? 

Un indiscutable Papilio machaon m'attendait au folio 18. (ou folio 1)

Il occupait le bas de la page, enchâssé dans l'orbe d'un rinceau, et un lièvre coiffé d'un bonnet doré et vêtu d'une cape rouge lui donnait lecture d'un ouvrage savant, comme dans un épisode d'Alice au pays des merveilles.

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Papilio machaon,  dans le Bréviaire à l'usage de Verdun, 1304,  BM Verdun Ms 107 . folio 1

Papilio machaon, dans le Bréviaire à l'usage de Verdun, 1304, BM Verdun Ms 107 . folio 1

Papilio machaon,  dans le Bréviaire à l'usage de Verdun, 1304,  BM Verdun Ms 107 folio 1.

Papilio machaon, dans le Bréviaire à l'usage de Verdun, 1304, BM Verdun Ms 107 folio 1.

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Le  Ms 107 de la BM de Verdun est le tome II d'un Bréviaire d'été,  fut enluminé à Metz vers 1302-1305 sur l'ordre de Marguerite de Bar pour son frère  Renaud de Bar, haut personnage allié à plusieurs grandes familles d'Europe. Il fut nommé chanoine à Reims, Laon, Verdun et Cambrai, puis, avant 1298, archidiacre à Bruxelles, puis archidiacre à Besançon en 1299. En 1301 il fut nommé chanoine et princier de Metz, puis en 1302 prévôt de la Madeleine à Verdun. Le folio 1 (ou folio 18) qui nous intéresse est précédé d'un calendrier de 12 pages paginées A à F. Le Bréviaire débute donc par notre folio 1 et porte en rubrique (c'est à dire à l'encre rouge) et en incipit le mot INVITATORIUML’invitatoire est l’exhortation à la louange et à la prière, généralement chantée, qui ouvre la première ‘heure’ de l’office divin de la journée.

Le texte est disposé en deux colonnes de 28 lignes : nous lisons ensuite Adoremus Dominum qui fecit nos ("Adorons Dieu qui nous fit"), puis Venite Servite. Vient ensuite la lettrine, ou lettre ornée, qui est le B majuscule initiant la phrase Beatus vir qui no[n] abiit  i[n] consilio impiorum et in via peccatorum non stetit et in via peccatoru[m] non stetit et in cathedra pestilentie non sedit. C'est le premier verset du psaume 1 : "Heureux l’homme qui ne marche pas selon le conseil des méchants, qui ne s’arrête pas sur la voie des pécheurs, et qui ne s’assied pas en compagnie des moqueurs". Un vermisseau bicéphale sert de bout-de-ligne . 

 

 

L'enluminure de la lettrine montre David jouant de la harpe à la Vierge, tandis que Renaud de Bar se tient agenouillé devant elle en position de donateur. Il est vêtu d'une tunique de clerc à capuche à ses couleurs et à ses armes, "'d'azur semé de croisettes au pied fiché d'or, à deux bars adossés du même, au lambel à trois pendants de gueules". La présence de David est parfaitement justifiée, puisque ce Bréviaire va largement faire appel à ses psaumes. La Vierge, couronnée, nimbée, cheveux longs, robe d'or et manteau bleu, tient une fleur (celle de la vertu et de la pureté ?) qu'elle tend à Renaud, qui vient peut-être de lui remettre en présent le luxueux manuscrit dont elle tient le codex sous le bras droit. Un ange nimbé, aux ailes vertes, lève les bras d'émerveillement, entre les deux voûtes ogivales.

Le texte du Psaume 1 se poursuit, seulement égayé par les bouts-de-ligne cocasses à hybrides anthropomorphes : 

Sed in lege Domini voluntas eius et in lege eius meditabitur die ac nocte

Et erit ta[m]quam lignum quod plantatum est secus decursus aquarum q[uo]d fructu[m] suum dabit in tempore suo.

Et folium eius n[on] defluet : / et omnia quecumq[ue] faciet prosperabuntur /

Non sic impii non sic; sed tamquam pulvis quem // proicit ventus a facie terrae.

"Mais qui trouve son plaisir dans la loi de l’Éternel, et qui la médite jour et nuit !

Il est comme un arbre planté près d’un courant d’eau, qui donne son fruit en sa saison, et dont le feuillage ne se flétrit point : tout ce qu’il fait lui réussit.

Il n’en est pas ainsi des méchants : ils sont comme la paille que le vent dissipe."

En bas de cette colonne de droite, nous trouvons les armoiries de Renaud de Bar, barrée d'une crosse épiscopale. Renaud de Bar fut le 67e évêque de Metz de 1302 à 1316. Il était fils de Thiébaut II, comte de Bar et de Jeanne de Toucy. 

Ideo non resurgent impii in iudicio neque peccatores in consilio iustorum

Quoniam novit Dominus viam iustorum et iter impiorum peribit

C’est pourquoi les méchants ne résistent pas au jour du jugement, ni les pécheurs dans l’assemblée des justes ;

Car l’Éternel connaît la voie des justes, et la voie des pécheurs mène à la ruine. 

 

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Bréviaire à l'usage de Verdun, 1304,  BM Verdun Ms 107 folio 1.

Bréviaire à l'usage de Verdun, 1304, BM Verdun Ms 107 folio 1.

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SOURCES ET LIENS.

— Site Enluminure , interrogé sur "papillon" :

http://www.enluminures.culture.fr/public/mistral/enlumine_fr?ACTION=RETROUVER_TITLE&LEVEL=1&GRP=0&REQ=%28%28papillon%29%20%3aTOUT%20%29&USRNAME=nobody&USRPWD=4%24%2534P&SPEC=9&FIELD_1=REFD&VALUE_1=&FIELD_2=Caut&VALUE_2=&FIELD_3=TITR&VALUE_3=&FIELD_4=SUJET&VALUE_4=&FIELD_5=DATDEB&VALUE_5=&FIELD_6=DATFIN&VALUE_6=&FIELD_7=ATTRIBUTION&VALUE_7=&FIELD_8=TOUT&VALUE_8=papillon&FIELD_9=DOMN&VALUE_9=%20&SYN=1&IMAGE_ONLY=&MAX1=1&MAX2=1&MAX3=100&DOM=All

 

http://www.enluminures.culture.fr/public/mistral/enlumine_fr?ACTION=RETROUVER&FIELD_98=POSS&VALUE_98=%20Renaud%20de%20Bar%20&NUMBER=32&GRP=0&REQ=((Renaud%20de%20Bar)%20%3APOSS%20)&USRNAME=nobody&USRPWD=4%24%2534P&SPEC=1&SYN=1&IMLY=&MAX1=1&MAX2=1&MAX3=100&DOM=All

http://www1.arkhenum.fr/images/dr_lorraine_ms/MS0107/index.html

NAZARI Vazrick, 2014, "Chasing butterflies in medieval Europ", Journal of the Lepidopterists' Society n°68-4

https://www.academia.edu/19623264/Chasing_Butterflies_in_Medieval_Europe, 

STONES Alison, 2010," Les Manuscrits de Renaud de Barpage" in  L'écrit et le livre peint en Lorraine de Saint Mihiel à Verdun  IX- XV e siècles , Actes du colloque de Saint Mihiel 25-26 octobre 2010  Sous la direction d'Anne-Orange Poilpré avec la collaboration de Marianne Besseyre Brepol pages 269-310

https://www.academia.edu/16293275/Les_manuscrits_de_Renaud_de_Bar

 

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Published by jean-yves cordier - dans Zoonymie des Rhopalocères.
22 février 2016 1 22 /02 /février /2016 18:29

A la chasse au papillon dans les manuscrits de la Bnf, je découvre ...une Fourmi Allégorique dans le Pèlerinage de vie humaine de Guillaume de Digulleville (v.1330).

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Les papillons dans les manuscrits ? une place marginale.

La base de données iconographiques du département des manuscrits de la Bibliothèque Nationale de France propose un classement thématique. Si ce dernier est consulté pour l'item "papillon" (Zoologie / autres invertébrés / papillons), il propose 767 légendes et 681 images numérisées. Les 200 premières données concernent le fond Français, les données suivantes le fond latin, dans lequel les Grandes Heures d'Anne de Bretagne (Latin 9474) et les Petites Heures de Jean de Berry (Latin 18014) se taillent une part royale. La quasi-totalité de ces papillons des manuscrits occupent les marges, et sont classées sous les rubriques "encadrement", "décor marginal" et plus rarement "lettrines". Ce sont des papillons idéalisés ou stylisés, sans rapport avec des espèces réelles, figurés parmi des fleurs qui sont, elles le plus souvent identifiables. Ils ont été étudiés, dans les manuscrits des bibliothèques européennes, par Vazrick Nazari dans son article Chasing Butterflies in Medieval Europe en 2014, un article dont j'ai donné ici la traduction.

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Quelques exceptions : des papillons en plein texte.

Les exceptions à cette situation marginale se comptent sur les doigts des mains, mais elles stimulent la curiosité : quel phénomène a pu être assez puissant pour inciter les artistes à arracher les lépidoptères de leur monde des bordures, où ils côtoient les singes et les petits lapins, les fleurs des champs et  les rinceaux, pour mériter de figurer dans l'espace sacré du texte principal ?

La première raison est fort logique : dans trois ou quatre enluminures illustrant la Création du Monde lors de la Genèse, les papillons figurent avec les oiseaux, les reptiles et les mammifères autour du Dieu créateur.

 C'est le cas dans le Fr. 160 ou dans le Speculum historiale de Vincent de Beauvais traduit par Jean de Vignay au XVe siècle 

 

 

 

(Français 308).

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Bnf Français 160 folio 6, source image Mandragore. Domaine public.

Bnf Français 160 folio 6, source image Mandragore. Domaine public.

On trouve encore d'autres exemples ponctuels, comme le Français 185 (une Vie des saints du 2ème quart du XIVe siècle de Jeanne et Richard de Montbaston ), où un papillon stylisé sur un arbre répond à un chardonneret sur un autre arbre pour illustrer  "S. Paul le simple quittant le monde" dans le folio 177v et "Abba jean et paesius" dans le folio 271. Le papillon et l'oiseau y représentent la Nature, par métonymie.

 

 Français 185 folio 177v et "Abba jean et paesius" folio 271.
 Français 185 folio 177v et "Abba jean et paesius" folio 271.

Français 185 folio 177v et "Abba jean et paesius" folio 271.

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Mais un autre exemple plus singulier retenait mon attention, car il se présentait comme une énigme ou un rébus. Une femme couronnée présentait à un homme une double roue. Au sommet de celle-ci était peint un papillon aux ailes aussi crénelées qu'un Robert-le-Diable ou Polygonia-c-album. Il ne semblait pas réellement posé, mais il frôlait la roue, et peut-être lui donnait-il une impulsion. La base Mandragore indiquait que cette enluminure était le folio 61v du "Français 829" et donnait comme légende : Guillaume de Digulleville devant la roue symbolique.

Mais l'image proposée était de qualité médiocre : les premières heures de mon enquête furent occupées à trouver des informations sur le manuscrit et, surtout, à découvrir sa numérisation accessible en ligne sur Gallica avec un définition satisfaisante. Je me perdais ensuite dans l'abondance arborescente des exemplaires de ce texte dont je découvrais le titre — le Pèlerinage de vie humaine—, dans ses éditions modernes, dans les études de lexicographie, dans les commentaires et autres travaux, et enfin dans les recherches sur la toile des mots "roue" ou "papillon" associés au titre ou à son auteur. Ce papillon posé sur sa roue avait disparu du Net, et après de longues soirées passées à arpenter la campagne numérique, je ne récoltais rien dans mon filet (l'épisode de la Roue symbolique n'appartient pas à la première version, la mieux étudiée, du Pèlerinage de Vie Humaine). Le récit de cette chasse  au papillon, et de ce fructueux pèlerinage dans la littérature en Moyen français va exiger un article particulier (à suivre).

 

 

 

Français 829, Pèlerinage de vie humaine 1400-1410, folio 61v. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84497167/f130.item.zoom

Français 829, Pèlerinage de vie humaine 1400-1410, folio 61v. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84497167/f130.item.zoom

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Je découvris  que l'enluminure illustrait le dialogue d'un pèlerin  et d'une dame nommée Grâce dieu.  Le manuscrit Fr. 829 réunissait deux titres du même auteur, Guillaume de Digulleville, Le Pèlerinage de vie humaine et le  Pèlerinage de l'âme,  et la Notice de la Bnf  était suffisamment complète pour m'apprendre que le manuscrit datait de 1400-1410, qu'il était écrit en batarde, ou que l'enlumineur était désigné sous le nom de Maître du Livre d’heures de Johannette Ravenelle. Il faisait partie des enlumineurs parisiens à la fin du XIVe  et au début du XVe siècles, et avait travaillé sur trois autres exemplaires des  Pèlerinages  de Guillaume de Digulleville, conservés aujourd’hui à la BnF : les mss. Français 377, 1647 et 12468. L'enluminure était qualifiée de "dessin en grisailles rehaussé de couleurs sur fonds peints", numérotée dans la marge, et je découvrais ainsi le chiffre LXVj à sa gauche.   

Avec ses 220 folios à 2 colonnes en vers octosyllabiques, le manuscrit contient la seconde rédaction du Pèlerinage de vie humaine achevée par Guillaume de Digulleville en 1355, et la version longue du Pèlerinage de l’âme composée entre 1355 et 1358. 

L'auteur parlait à la première personne et se désignait comme "le pèlerin". Car la vie humaine était comparable à un pèlerinage, auquel succédait après la mort "le pèlerinage de l'âme". La simple lecture des légendes des illustrations permettait de comprendre ces pérégrinations, qui débutaient par le songe de Guillaume de Digulleville et s'achevaient par son réveil (f.218). Le pèlerin rencontrait Grâce Dieu au folio 4, et j'aurais bien voulu être présenté aussi : elle me faisait rêver, et je lisais  avec ravissement au folio 5 "Guillaume de Digulleville chez Grâce" ;  Au  folio 12 survenait l' excommunication d’un cerisier. Puis la belle dame donnait au pèlerin son équipement: son bourdon, longuement décrit en termes allégoriques, sa besace, ses prières, son armure, son "gambeson" (un vêtement matelassé qui représente la Patience), son "haubergeon" (une armure de maille lui conférant la Force morale), le heaume de la Tempérance, la gorgière de la Sobriété, les gantelets de Continence, l'épée de Justice et son fourreau d'Humilité,  l'écharpe de la Loi aux douze clochettes etc... Il parvenait ensuite devant une Haie (la Pénitence) séparant deux voies : celle du Labeur à droite, et celle de l'Oisiveté à gauche. 

 Au folio 51v, l'enluminure est décrite ainsi : " Grace-dieu lui fait observer une  fourmi ". Selon Mandragore, on ne trouve cette illustration d'une leçon de morale entomologique que dans deux manuscrits, le Fr.829 et le Fr. 377. Je décidais de m'y intéresser, et de remettre à plus tard l'étude du papillon.

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Une fourmi allégorie de la Persévérance chez Guillaume de Digulleville.

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Les fourmis sont beaucoup plus rarement représentées sur les manuscrits médiévaux que les papillons, et la base Mandragore ne totalise, pour le département Estampes de la Bnf, que 54 légendes et 41 images ; si on ne considère que les manuscrits français (et non les 11 documents latins, les œuvres arabes, grecques, mexicaines, persanes et japonaises) il ne reste que 13 manuscrits. La plupart des illustrations sont des ornementations classées "flore, fourmi" , quatre illustrent une fable, l'une est une allégorie de la Prévoyance (Ms Fr. 1877 qui date de 1530) .

Les deux illustrations du Pèlerinage de Vie Humaine de Guillaume de Digulleville sont assez semblables : une femme couronnée, (Grace Dieu), montre de son index à un pèlerin (l'auteur), un monticule. Dans le Fr.829, qui date de 1400-1401,   une fourmi est bien visible en son sommet, et quelques points noirs peuvent témoigner des traces de son parcours. Grace Dieu (nimbée, jeune et belle, aux longs cheveux clairs, le ventre projeté en avant en conformité avec les canons de l'époque ) désigne la fourmi mais regarde son interlocuteur. Celui-ci est tonsuré (Guillaume de Digulleville était moine de l'abbaye cistercienne de Chaalis près de Senlis), il tient le bourdon, et porte la besace de son statut de pèlerin, et discute avec ardeur les propos qui lui sont adressés. Cette posture résume tout l'ouvrage, dans lequel l'auteur argumente sans concession les propositions du messager divin, qui tente de le mener vers la voie de la vie sainte et de le faire renoncer aux tentations et illusions d'une existence mondaine. 

Ici, c'est une leçon de persévérance qui lui est donnée, basée sur l'observation d'un insecte qui s'efforce de gravir un tas de sable. Ce sable s'éboule régulièrement et fait retomber l'insecte en l'aveuglant. Et régulièrement,"le" fourmi (le substantif est masculin en moyen français, jusqu'en 1680 selon CNRTL) repart à la conquête de la pente, jusqu'au moment où il réussit à atteindre le sommet.  

Le manuscrit Fr. 829 a été en possession de Jean de Berry (le commanditaire des Heures du duc de Berry par les frères Limbourg)  et porte l'ex-libris au feuillet de garde 1 : "Ce livre est au duc de Berry. JEHAN" : c'est un objet de grande valeur.  Chaque enluminure est encadrée par un filet bleu ou rouge, alternativement, et ce filet s'inscrit dans un cadre d'or bruni. Le fond est rouge, quadrillé par des traits d'or. Le sol, le tas de sable et son fourmi, le pèlerin et Grace Dieu sont dessinés à l'encre noire sur le velin blanc, mais les volumes sont rendus par des ombres grises selon la technique de la grisaille. La verticalité des personnages est accentuée par l'étroitesse relative de la  largeur des corps par rapport à leur hauteur, et par le rapport <1 de la taille du segment supérieur (tête et tronc) sur le segment inférieur (bassin et jambes). La direction des plis, et le bourdon accentue cette verticalité.

 

Français 829, Pèlerinage de vie humaine 1400-1410, folio 51v.

Français 829, Pèlerinage de vie humaine 1400-1410, folio 51v.

Je fus directement concerné par cet exemple d'opiniâtreté, puisque le texte de la deuxième version du Pèlerinage de Vie Humaine , le Livre du pèlerin de vie humaine (LPV) n'a été édité qu'en août 2015 par Philippe Maupeu aux éditions Lettres Gothiques Livre de Poche : j'ai cru qu'il n'existait aucune transcription en ligne du texte ; toutes les études critiques avaient porté sur la première version (d'abord éditée par Stürzinger en 1893). Comme je n'ai découvert que tardivement l'édition des Lettres Gothiques, j'ai —bêtement, c'est une leçon d'humilité— recopié / transcris le texte à partir des manuscrits en ligne. Au cinquième jour de mon travail, je trouvais...la version en ligne sur Google book du texte que j'avais transcris ! Révélant toutes mes erreurs ! Et l'adaptation en français moderne, me permettant de vérifier ma bonne compréhension du texte. Ah, merci le Fourmi, pour une leçon, c'en est une.

https://books.google.fr/books?id=MkhmCgAAQBAJ&pg=PA536&lpg=PA536&dq=suspediter&source=bl&ots=uwrJdUXWAW&sig=AbG5v9N9zArhEE61ttUOtnT7zug&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjep4XflpjLAhWFQBoKHb5GDxEQ6AEIJjAC#v=onepage&q=suspediter&f=false

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Ma tentative de transcription de l'épisode de la fourmi :

Elle s'appuie sur deux manuscrits, le Fr.829 et le Fr. 377 , et sur une édition imprimée par Antoine Vérard, le Pélerinage de l'Homme Bnf Res. Ye-24. :

—Fr.829 folio 51v :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84497167/f110.image

—Fr. 377 folio 42v

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90596276/f88.item

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Le folio 42v du Ms Fr. 377 et son enluminure :

http://visualiseur.bnf.fr/Visualiseur?Destination=Mandragore&O=10528613&E=90&I=35790&M=imageseule

 

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—Res. Ye-24 folio XL

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k722969/f84.item.zoom

 

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Je débuterai un peu en amont de l'enluminure, pour le plaisir du premier distique 

Chacun est fort sur son fumier

Et en sa terre se fait fier

Non pas que ce a ie te die

Pour toy mettre en fetardie

Quar se tu veulx sus son fumier

Se sien tu soes de leschequier

Tu li feras eschec et mat [eschat et mat Fr. 829]

Il a ni mettra tant de debat

Pou a boire et pou a mengier

Pou reposer bien travailler

Disciplines et battemens

Oroisons et gemissemens

Instrumens de penitance

Si ten feront droit et vengance

Il ten feront estre vinceur

Dueisse et ne veille a grant honneur

 

Et alons voir le sablon

Dont devant tay fait mention

Tu le vois bien, long il n'est pas

 

 

I. Description de la scène.

Grâce montre au  pèlerin une fourmi qui tente de gravir un tas de sable, mais elle retombe et est aveuglée par le sable. A force de répeter son effort, elle parvient au sommet.

 

 

Si parle le pelerin

La alasmes nous pas pour pas

Et me monstra tantost au doit

Un fourmi qui monter vouloit

En haut sur le tas de sablon

mais selon son entention

Et son vouloir pas ne faisoit

Car quant un pou monte estoit

Le sablon qui estoit coulant

Sec et menu et moliant

Sur yeulx et teste lui cheoit

Et ravaler ius le faisoit

Soutenoyes de nen vaincu

Nestoit le fourmi ius cheu

Car a ramper recommencoit

Et plus que devant sefforcoit

Maintes fois le vi cheoir ius

mais tant fist que tout au dessus

En la fin je le vi monter

Et la en droit se reposer

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II. Commentaire par Grâce.

Cette fourmi doit servir d'exemplaire (d'exemple moral) au pèlerin. La simple leçon de persévérance (recommencer plusieurs fois une tentative après un échec sans se décourager) est developpée dans un sens chrétien, dans lequel l'obstacle à vaincre est le corps (ton corps est de sablon un tas), qui n'hesiteras pas à faire chuter le moine . Le sable, en retombant, va aveugler son "entendement", sa volonté morale, car ce corps est "sablonneux et moliant", mou et dépourvu de fermeté. L'homme renversé par sa chute sera la proie des tentations.

 

Grace dieu

Or puez dist grace dieu veoir

La force de ton corps se voir

Et celle de toy tout aussi

A l exemplaire du fourmi

Sa chascune fois quest cheu

Vertueux ne se fust tenu

Enuis peust avoir recouvre

Destre iamais en hault monte

Sur lui fust tant sablon cheu

Quil eust manis de vertu.

Ton corps est de sablon un tas

Qui pour vray ne se faindra pas [[faindre : hésiter]]

Quant tu vouldois en hault monter

De toi faire bas reculer

Sus loeil de ton entendement

Pour toi aveugler prestement

Et toi ravaler au plus bas

Saches que tu le trouveras

Sablonneux et bon moliant

Et temptacions ravalant

Tant que se ne te tiens forment

Et ne resistes prestement

 

 

 

III. Recours à la fourmi biblique.

Pour appuyer son exemple, Grâce reprends à son compte une citation du Livre des Proverbes. Proverbes 6:6 vade ad formicam o piger et considera vias eius et disce sapientiam « Va vers la fourmi, paresseux ; regarde ses voies, et sois sage. Elle qui n'a ni chef, ni surveillant, ni gouverneur, elle prépare en été son pain, elle amasse pendant la moisson sa nourriture. Jusques à quand, paresseux, resteras-tu couché ? Quand te lèveras-tu de ton sommeil ? Un peu de sommeil, un peu d'assoupissement, un peu croiser les mains pour dormir… et ta pauvreté viendra comme un voyageur, et ton dénuement comme un homme armé » (Prov. 6 : 6-11). Cette référence est souligné dans l'édition Vérard par une note marginale : Exemplum de formica ascem bente in fabulo

Ce Livre est traditionnellement attribué à Salomon. L'auteur cite le passage (Vas ten paresceux au fourmi Dist le sage et aprens de li Afin que surpris tu ne soyes Sapience et ses voyes) et estime que Salomon avait médité sur le même tas de sable et la même fourmi grimpeuse.

 

Peril est que quant tu voudras

Si de legier ne montes pas

Vas ten paresceux au fourmi

Dist le sage et aprens de li

Afin que surpris tu ne soyes

Sapience et ses voyes

Bien avoit veu salomon 

En son temps ce tas de sablon

Et le fourmi qui y montoit.

.

IV. Glose de Grâces.

La sainte femme développe la citation : le pèlerin ne doit lutter contre la paresse. Son corps est son ennemi. Dans le discours qu'elle emploie, elle oppose "toi" et "ton corps" comme deux entités ennemies. L'adepte doit apprendre à "dompter" le corps et le "suppéditer", ce joli mot de moyen français qui signifie aujourd'hui (suppéditer CNRTL)  "procurer, fournir en abondance" mais qui signifiait alors "fouler aux pieds", voire "maltraiter, réduire à l'obéissance, détruire". La violence du dualisme est patente, mais ce qui est remarquable, c'est le recours aux images didactique servant à la mémorisation. Le corps doit être dominé comme l'archange saint Michel terrassant le Malin, saint Georges terrassant le dragon ou la Vierge de l'Apocalypse foulant la Bête, avec ces images de la statuaire montrant le pied du saint personnage posé sur l'animal monstrueux.  

Elle trace un tableau du corps comme un être paresseux, négligen, sommeilleux, cherchant le repos, la fuite face à la difficulté, préoccupé de manger, de rester à table ou allongé, faisant lentement ce qu'il faut faire, et retors avec ça, vicieux, cherchant à flatter et à tromper son propriétaire.

De même que la fourmi cherche à monter et à se placer au dessus du sable, le chrétien doit chercher à s'élever et doit redouter la chute : dans les marges du texte de l'édition Vérard se trouve cette citation de l'épitre de saint Paul aux Corinthiens 10:12 ... si [quis se existimat scire aliquid nondum cognovit quemadmodum oporteat ... itaque] qui se existimat stare videat ne cadat; "Ainsi donc, que celui qui croit être debout fasse attention à ne pas tomber!" (Trad.Louis Segond).

Quant tels parolles il disoit

Si que ainsi gardes toy bien

Que paresceux ne soyes de rien

De ton ennemi corps dompter

Dessous toy et suppediter

de ses sablonneux temptemens

Et ennuyeux empeschemens

Et trespercier pour en hault monter

Et com victeur hault reposer

Et lors bien armer te pourras

Toutes les fois que tu voudras

Toutesfoyes tant ie te di

Que ne te fies point en li

Car souvent lauvas paresceux

Est negligent et someilleux

Longuement vouldra reposer

Et sur laultre coste tourneraient

Au mengier quant lauras assis

Tard se lievera enuis

Tost vouldra faire lentement

Pour toy livrer empeschement

Son point saura bien espier

Quant sera temps de toy flater

Et lors quant garde nen donras

 

V. Les conseils de Grâce.

Rester sur ses gardes, ne pas se fier au corps, car c'est le "mortel ennemi" du pèlerin, considérer l'existence comme un combat livré au corps avec les armes de la Foi et des vertus chrétiennes, tels sont les conseils de Grâce. On lit en marge du Res. Ye-24 : Accessum habemus ad deus per gratiam in qua stamus Romanorum V.Capitulo, "citation de l'épître de saint Paul aux Romains 5:2 ":  per quem et accessum habemus fide in gratiam istam in qua stamus et gloriamur in spe gloriae filiorum Dei "c'est aussi par son intermédiaire que nous avons accès par la foi à cette grâce, dans laquelle nous tenons ferme. " C'est bien-sûr les termes in qua stamus, qui sont requis pour illustrer l'importance de la verticalité, et du maintien d'une statique ferme dans la Foi.

Deceu tu ten trouveras

Si ques ie te lo bonnement

Que sur ta garde fermement

Te tiengnes sans fiance avoir

En lui car quant faiz son vouloir

Ou tout contre toy lenforcis

Et lui ministres les outils

Par lesquelx il te gueroye

Et te destourne de ta voye

Si que se bien mas entendu

Bien te puet estre congneu

Bien puet veoir que cest celui

Quest ton mortel ennemi

Or ten vas car temps est daler

Et de toy quant vouldras armer

Ie tay convoye longuement

Et assez tenu parlement.

.

Autres commentaires marginaux  de l'édition de Vérard

— Legitimus formica grana perforat ne germinet. Unde formica non solum dicitur ferens picas sed et ectam forans micas.

Allusion à la tradition selon laquelle les fourmis percent les grains pour les empêcher de germer.

—  Vade ad formicio piger et disce sapientia proverbiorum. VI.ca

Rappel abrégé du verset du Livre des Proverbes 6:6 "Va vers la fourmi toi qui est paresseux et sois sage."

— Nihil ergo nunc damnasionis est his qui sunt in christo iesu qui non secundum carnem ambulent. IC Romanorum VIII. capite.

: Épitre de saint Paul aux Romains 8:1 : "Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus Christ." [2 En effet, la loi de l'esprit de vie en Jésus Christ m'a affranchi de la loi du péché et de la mort.]

—  Maledictus homo qui confidit in homine, et ponit carnem brachium suum et a Domino recedit cor eius Hieremei XVII.ca

Jérémie chapitre 17 : "Maudit est l'homme qui met sa confiance en l'homme, qui se fait un bras de la chair, et dont le cœur se retire du Seigneur."

— Nolite confidere in verbis mendacii Hieremie. VII.ca. 

Jérémie 7:4 :  "Cessez de vous fier à ces paroles trompeuses: " 

— Non secundum carnem ambulamus sed secundum Spiritum /et/ nam prudentia carnis mors prudentia autem Spiritus vita et pax quoniam sapientia carnis inimicitia est in Deo. paulus ad romanos VII.

Romains 7:4-7 [et cela afin que la justice de la loi fût accomplie en nous, qui marchons,] non selon la chair, mais selon l'esprit.[ Ceux, en effet, qui vivent selon la chair, s'affectionnent aux choses de la chair, tandis que ceux qui vivent selon l'esprit s'affectionnent aux choses de l'esprit.] 6 Et l'affection de la chair, c'est la mort, tandis que l'affection de l'esprit, c'est la vie et la paix; 7 car l'affection de la chair est inimitié contre Dieu, parce qu'elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, et qu'elle ne le peut même pas.

 

 

 

 

 



 

 

 

DISCUSSION

En 1993, A. de Wolf dénombrait 53 personnifications et 60 réifications dans le pèlerinage de la Vie Humaine, et , pour définir le terme de "personnalification", cite Paul Zumthor : "l'Allégorie transforme un nom commun désignant quelque espèce naturelle ou rationnelle, en un nom autodéterminé qui renvoie, à la manière d'un prénom, au sujet d'actions réelles". Allégories ou personnifications ? L'article Wikipédia tente de distinguer les deux : "La personnification est une figure de style qui consiste à attribuer des propriétés humaines à un animal ou à une chose inanimée (objet concret ou abstraction) que l'on fait vouloir, parler, agir, à qui l'on s'adresse. L'allégorie également, souvent employée en concurrence avec la personnification, procède à partir d'une métaphore. On la distingue néanmoins de cette dernière par la nature du comparé ; dans l'allégorie le comparé est une notion abstraite (la Mort par exemple), prise de manière générale ou universelle. La personnification s'applique elle à donner vie à un animé non humain ou à un objet concret. l'allégorie suppose à la fois la personnification de réalités abstraites et le recours à une métaphore prolongée.". 

On peut simplifier en considérant que l'action de donner des noms propres aux vertus et aux vices est une personnification, comme Grace Dieu, Raison, Nature, Charité ou Pénitence, Mémoire et Rude entendement, Labour et Oiseuse, etc..

 

La réification (du latin res, chose) consiste à transformer ou à transposer une abstraction en un objet concret, à appréhender un concept comme une chose concrète. Le terme est aussi employé à propos des personnes vivantes.

Dans le Pèlerinage de Vie Humaine, la double roue de Sensualité du folio 61v (Fr 829) relève donc de ce procédé, bien que le papillon qui y est posé vienne compliquer les choses.

Mais quel statut donner à la Fourmi de Guillaume de Digulleville ? Elle n'est pas seulement le nom propre donnée à la persévérance, car la vertu qu'elle illustre est liée à l'action qui est mise en scène autour du tas de sable. Elle est l'héroïne d'une petite fable, et, en même temps, elle joue le rôle de le Fourmi de Salomon.

La Fourmi est depuis l'antiquité un exemple de travail, de prévoyance . Il est remarquable de constater que dans le texte du Pèlerinage, où le corps de l'homme est dévalorisé et suspect, l'animal ne partage pas ce sort, mais sert au contraire d'exemple de haute vertu, que ce soit, ici, la fourmi, ou, plus tard, le papillon.

Au  XIIIe siècle voit se multiplier les oeuvres de «vulgarisation", comme les lapidaires  ou les bestiaires, qui  se veulent des ouvrages de «sciences naturelles». En fait, les bestiaires, inspirés du Physiologus, composé en grec au IIe siècle après J. C., comme  De animalibus d'Albert le Grand, Speculum naturale de Vincent de Beauvais, De Bestiis et aliis rebus, attribué à Hugues de Saint-Victor) décrivent la «nature» des animaux réels ou imaginaires (phénix, licorne) en fonction des interprétations morales et religieuses. Le Bestiaire divin (1210), le plus long des bestiaires français en vers, dû à Guillaume le Clerc, atteste par son nom même l'insistance sur le symbolisme religieux. Tous les bestiaires portent la marque d'une vision du monde selon laquelle la nature, «livre de Dieu», peut se lire aussi sur le mode symbolique, et se  fondent  sur un système de «concordances» entre le monde des «semblances» et celui des «senefiances». 

 Guillaume le Clerc  écrit 5 pages à propos de la fourmi (p.219-223); je n'en donnerai que le début  :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8979h/f223.image

 

 

XI. DE FORHI.

Salemon dit au perecous

Que , se il veut estre rescous ,

De mauvestie et de perece ,

Si prenge garde a la proece

Del formi , qui tant est petiz.

Sages et prouz est li formi ;

Si se porveit el tens d'este,

Si qu'en yver a a plente ;

Et nul autre beste nel fet.

Quant il issent de lor recet,

Si vont moult ordeneement

L'un avant l'autre belement ,

Tant qu'il vienent au ble meur ,

La ou il est forme et dur ;

Et quant il sunt venu au grein ,

( De ce seiez trestuit certein ) ,

Par l'oudor del cbaume desoz ,

Savent quenoistre, tant sunt proz,

Se c'est orge , segle ou aveine.

Tôt par lor nature demaine

875 Les guerpissent, et avant vont,

Tant que au forment venu sont. (*)

Donc montent amont a l'espi.

Quant se sunt charchie et garni ,

A lor recet tornent arrière

Par une meisme chariere ;

Trestote jor vienent et vont.

(*) on notera que ce vers est cité presque textuellement par Guillaume de Digulleville dans l'extrait ci-dessus.  

« Les fourmis marchent en ordre; elles distinguent à l'odeur la nature du blé ; elles amassent des provisions pour l'hiver ; toutes, sans exception, travaillent ; elles fendent en deux les grains pour les empêcher de germer. » « Le devoir des chrétiens est de diviser le bon grain que leur offre l'Évangile; qu'ils ne s'attachent pas à la lettre qui tue , mais à l'esprit qui vivifie. » 

C. Hippeau, qui édite ce Bestiaire divin en 1852-1857, fait ces observations :

« Fade ad formicam o piger et meditare eam quae quum sit viribus infirmior, multum per œstatem frumentum reponit » C'est ainsi que Salomon, avant Élien et Horace (« Parvula nam exemplo est magni formica laboris. »), avait proposé à l'homme pour modèle ce petit animal , que l'antiquité tout entière a considéré comme le symbole de l'intelligence et du travail (Il ne faut pas tirer son nom, comme le fait saint Isidore, de ferre micas; mais bien du mot grec altéré par une simple permutation de consonnes. Son nom signifie prévoyance. L'habitude où elle est de partager les grains en deux parties est peut-être la cause de celui de nemalà (du verbe namal. couper) , que lui donnent les Hébreux ; de même que la finesse étonnante de son odorat lui avait fait donner par les Cbaldéens celui de sumsemana ).

Les propriétés dont parle ici Guillaume, sont celles qu'avait déjà notées l'auteur du Physiologus « Quand les fourmis qui sont chargées reviennent vers leurs retraites, dit-il, celles qui les rencontrent ne leur demandent point à partager leurs provisions ; elles vont droit au lieu où elles pourront s'en procurer elles-mêmes. » Et il complète la leçon , comme le fait Guillaume , au moyen de l'apologue des Vierges folles et des Vierges sages ( Saint Mathieu , chap. xx3) . Il veut aussi que le chrétien distingue les bonnes doctrines des mauvaises, à l'exemple de la fourmi qui ne confond point le froment avec l'orge. La précaution que prend la fourmi de diviser en deux les grains qu'elle a entassés dans ses greniers pour les mieux conserver , avait déjà donné lieu aux mêmes observations sur la distinction que le chrétien doit établir entre la lettre et l' esprit des Saintes-Écritures (Saint Augustio, De spiritu atque liiiera , ad Marcellinum ; saint Irénée, liv. IV , chap. 29 ; Tertallien , Contra Marcionem , lib. II.). Les auteurs mystiques ne pouvaient laisser échapper cette occasion de développer leur thèse favorite.

Il nous faudrait citer tous les naturalistes et presque tous les écrivains anciens , si nous voulions recueillir les textes qui ont pu servir d'autorités à nos Bestiaires. Les commentaires sur les paroles de Salomon formeraient un volume. II, n'est pas un seul des orateurs sacrés qui n'ait saisi l'occasion de célébrer la sagesse et l'activité de ce petit peuple, qui, ainsi que le dit l'auteur des Proverbes se livre à ses travaux sans avoir besoin d'être soumis à l'autorité d'un chef (3). Ce n'est pas seulement l'instinct que Cicéron accorde aux fourmis : elles sont douées, selon lui, de mémoire, d'intelligence et de raison. Plutarque trouve en elles toutes les vertus réunies (a Nu'.Ium natara maiimarum pulcherrimarumque reruro tam angustum habet spéculum ; sed , ut in pura gntlula , omnium In iii virtutum est imago. » Plutarc., De instinciu animalium. ). C'était l'opinion des Égyptiens.  Quand ils veulent écrire le mot connaissance, ils dessinent une fourmi, dit Horus. Les fourmis sont douées d'un sens divinatoire, ajoutent les écrivains arabes , qui se plaisent à célébrer les merveilles de leurs demeures souterraines.

Ce n'est qu'avec une sage mesure que nos auteurs ont puisé aux sources orientales. Ils leur ont cependant emprunté le conte narré assez longuement par Guillaume, de fourmis chercheuses d'or, ayant la taille d'un chien, dont avaient parlé déjà Hérodote , Solin , Pline et Strabon , et qui figurent dans les récits merveilleux qu'Arrien avait empruntés à Mégasthènes. "

RETOUR A L'ENLUMINURE.

Les travaux de Philippe Maupeu permettent de comprendre toute l'importance de l'illustration, au delà de sa valeur décorative. Cet auteur souligne sa fonction plastique et rythmique (alternance des couleurs bleu et rouge d'une vignette à l'autre) ; sa fonction structurante permettant de repèrer les récits et épisodes en l'absence de chapitres et de tables de matières ; sa fonction herméneutique modifiant parfois l'interprétation donnée au texte ; sa fonction poétique "donnant corps à l'univers fictionnel, à ses figures et à ses lieux".

Mais c'est surtout la fonction didactique qu'il excelle à argumenter : "l'image, dans la tradition des arts de mémoire antiques et médiévaux, est le support d'une mémorisation efficace de la lettre du texte et de sa signification allégorique".

Cela me paraît parfaitement le cas pour ce qui concerne notre courageuse fourmi. J'ai déjà oublié l'exactitude littérale des lignes que j'ai pourtant soigneusement recopiées, relues, comparées d'un manuscrit à l'autre. Mais le tas de sable, la fourmi qui en a atteint le sommet, et les deux personnages qui l'observent se sont gravés durablement dans ma mémoire, et le pouvoir d'évocation de l'image me fera retrouver le verset de Salomon "Va vers la fourmi, paresseux ; regarde ses voies, et sois sage",  il me fera penser au sable déboulant et aveuglant "les yeux de l'entendement" du pélerin, il me fera peut-être retrouver le mot que j'ai savouré aujourd'hui, ce "suppediter" que je consulte à nouveau avec gourmandise dans le dictionnaire de Godefroy  et dans le DMF de l'ATILF.

Car la fourmi de Digulleville n'est pas seulement une Allégorie de la Persévérance, une statue personnalisée et identifiable d'une Vertu placée dans le Théâtre de la Mémoire, c'est un personnage de ce Théâtre, qui y a tenu son rôle, est tombé vingt fois, a secoué vingt fois le sable de ses yeux, s'est remis vingt fois en route, et a triomphé la vingt-et-unième fois. C'est ce petit film d'animation, figé à sa dernière image, qui aura valeur allégorique, et non les seuls lettres du mot FOURMI. Je l'ai intériorisé , il se déroulera lorsque je verrai une fourmilière, lorsque je découperai un morceau de formica, que j'utiliserai de l'acide formique ou une préparation homéopathique de Formica rufa 5CH pour ma cystite ou mes rhumatismes, ou lorsque, tout bêtement, j'aurai des fourmis dans les jambes. Elle s'est installée, grâce à l'enluminure faite pour Jean de Berry, dans le Bestiaire de mon cœur.

.

 

 

La Fourmi, Bestiaire divin de Guillaume Le Clerc, Bnf Fr. 14970 (XIVe siècle), base Mandragore.

La Fourmi, Bestiaire divin de Guillaume Le Clerc, Bnf Fr. 14970 (XIVe siècle), base Mandragore.

SOURCES ET LIENS.

Guillaume de DIGULLEVILLE.

– Notice du Mss Français 829 : http://www.europeana.eu/portal/record/92099/BibliographicResource_1000157170691.html

--Version imprimée par Vérard :  Le Pélerinage de l'homme, ed. Antoine Vérard, 1511 . Bnf Res Ye-24. L'épisode de la fourmi débute à la page XL (vue 84/217 sur Gallica)

 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k722969 

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k722969/f84.item.zoom

STÜRZINGER , Jakob J. (ed.) 1893,  Le pèlerinage de la vie humaine; edited by J. J. Stürzinger. London: Printed for the Roxburghe Club [by] Nichols & Sons. 

— A modern prose translation of the ancient poem of Guillaume de Guileville entitled, The pylgrymage of man; 1859 A popular version by "Miss Katherine Isabella Cust" [afterwards Mrs. William Goode?] cf. Brit. mus. Catalogue of romances, v. 2, p. 563; Early Eng. texts soc., extra ser., LXXVII (1899) pt. 1, p. 5Topic: Bunyan, John, 1628-1688 

https://archive.org/details/modernprosetrans00guil

— DELACOTTE (Joseph), 1932 « Guillaume de Digulleville, poète normand. Trois romans-poèmes du xive siècle. Les pèlerinages et la divine comédie », Desclée de Brouwer et Cie, Paris, 1932, 286 pp.

Duval, Frédéric et Pomel, Fabienne (sous la direction de) « Guillaume de Digulleville. Les pèlerinages allégoriques. Actes du colloque international de Cerisy La Salle ». Presses universitaires de Rennes, 2008, 489 pp.

GUILLAUME , Clerc de Normandie Le bestiaire divin de Guillaume Clerc de Normandie,trouvère du XIIIe siècle publié d'après les manuscrits de la Bibliothèque Nationale (Reprod. en fac-sim.) / avec une introd. sur les bestiaires, volucraires et lapidaires du Moyen-âge considérés dans leurs rapports avec la symbolique chrétienne par C. Hippeau page 110

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8979h/f114.image

https://archive.org/stream/lebestiairedivi00hippgoog/lebestiairedivi00hippgoog_djvu.txt

 

MAUPEU (Philippe) 2009 Pèlerins de vie humaine. Autobiographie et allégorie narrative, de Guillaume de Deguileville à Octovien de Saint-Gelais, Paris, Champion (« Nouvelle bibliothèque du Moyen Âge » 115), 2009, 696p.

https://crm.revues.org/12772

MAUPEU (Philippe)  Thèse de doctorat, 2005 : Pèlerins de vie humaine. Autobiographie et allégorie, de Guillaume de Digulleville à Octovien de Saint-Gelais, dir. N. Dauvois, Toulouse-le Mirail.

FARAL , Edmond « Guillaume de Digulleville, moine de Chaalis ». Histoire littéraire de la France, Imprimerie nationale, Paris, 1962, tome 39, pp. 1-132.

STUMPF, Béatrice (2006) « Le moyen français clut et ses dérivés dans le Pèlerinage de vie humaine de Guillaume de Digulleville, un régionalisme? », Revue de Linguistique romane, vol. 70, 2006, pp. 181-208.

STUMPF, Béatrice (2008) « Étude de quelques régionalismes lexicaux dans les Pèlerinages de Guillaume de Digulleville », in Duval & Pomel, eds. (2008), pp. 253-280. Reproduitpp. 1381-1408 in Stumpf (2009).

STUMPF, Béatrice (2009) « Lexicographie et lexicologie historique du Français ». Thèse de doctorat sur travaux présentée par Béatrice Stumpf, Université de Nancy 2, 2009, 1 408 p.

https://halshs.archives-ouvertes.fr/file/index/docid/502081/filename/TheseBS.pdf

DOUDET (Estelle) 2008, « Guillaume de Digulleville. Les pèlerinages allégoriques, éd. Frédéric Duval et Fabienne Pomel », Cahiers de recherches médiévales et humanistes [En ligne], 2008, mis en ligne le 27 janvier 2009, consulté le 27 février 2016. URL : http://crm.revues.org/11353

— DE WOLF ( Anouk), 1993, Pratique de la personnification chez Guillaume de Digulleville et Philippe de MézièresÉcriture et mode de pensée au moyen âge (8e-15e siècle) / Boutet, D. [edit.]Paris : Presses de l'École normale supérieure, 1993 p. 125-147

 

 

 

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Published by jean-yves cordier - dans Zoonymie des Rhopalocères.
13 février 2016 6 13 /02 /février /2016 21:00

La mort de Corot et la mort de Bergotte.

Suite de mes réflexions sur le petit pan de mur jaune de Proust.

Voir aussi :

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CET ARTICLE EST LE MILLIÈME DE CE BLOG : je ne pouvais souhaiter mieux pour cet événement que d'accueillir la participation spéciale de Marcel Proust et de Jean-Baptise Corot.

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Résumé :

Pour décrire la mort de Bergotte, l'écrivain à succès d'A la Recherche du temps perdu, dans le tome V paru à titre posthume en 1923, Proust, dans une anticipation de sa propre mort, s'est inspiré de la description de la maladie digestive qui a emporté Corot , dans la biographie qui accompagne le Catalogue des œuvres de Corot (1905). Les déclarations de Corot recueillies par Alfred Robaut, "Il me semble que je n'ai jamais su faire un ciel ! Ce que j'ai devant moi est bien plus rose, plus profond, plus transparent ! " me semble une source évidente pour la fameuse pensée de Bergotte : "C'est ainsi que j'aurais dû écrire, disait-il. Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune."

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Depuis que j'ai écrit Pan, pan, pan, pan : ce que contient le précieux petit pan de mur jaune de Proust. sur les sept occurrences du petit pan de mur dans La Recherche, ce fameux petit pan me trotte dans la tête.

Repensant à l'œuvre de Corot (Jean-Baptiste Camille Corot, 1796-1875), et à ses peintures architecturales qui se sont toujours montrées spontanément à mon esprit lorsque je prononce le formule magique du petit pan de mur jaune, j'ai ré-emprunté à ma bibliothèque quelques ouvrages sur le peintre, et j'ai testé sur le moteur de recherche le résultat de l'association "Proust Corot" ou de "pan de mur Corot".

Le premier bénéfice de ce divertissement a été de renforcer ma conviction : Ces murs que Corot choisit de peindre, à Rome ou Volterra, à Chartres ou ailleurs, frappés par les premiers rayons matinaux du soleil sont, j'en suis sûr, je les reconnais avec le cœur, des "petits pans de murs jaunes" parfaitement proustiens.

Swann ne collectionnait-il pas les Corot ? 

"Elles furent plus intéressées quand la veille du jour où Swann devait venir dîner, et leur avait personnellement envoyé une caisse de vin d'Asti, ma tante, tenant un numéro du Figaro où à côté du nom d'un tableau qui était à une Exposition de Corot, il y avait ces mots : « de la collection de M. Charles Swann », nous dit : « Vous avez vu que Swann a « les honneurs » du Figaro ? » – « Mais je vous ai toujours dit qu'il avait beaucoup de goût », dit ma grand'mère. "

"[...] tante Flora, pour montrer qu'elle avait lu la phrase sur le Corot de Swann dans le Figaro. "

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La grand'mère n'avait-elle pas aussi "beaucoup de goût" ?

"Elle essayait de ruser et, sinon d'éliminer entièrement la banalité commerciale, du moins de la réduire, d'y substituer, pour la plus grande partie, de l'art encore, d'y introduire comme plusieurs « épaisseurs » d'art : au lieu de photographies de la Cathédrale de Chartres, des Grandes Eaux de Saint-Cloud, du Vésuve, elle se renseignait auprès de Swann si quelque grand peintre ne les avait pas représentés, et préférait me donner des photographies de la Cathédrale de Chartres par Corot, des Grandes Eaux de Saint-Cloud par Hubert Robert, du Vésuve par Turner, ce qui faisait un degré d'art de plus. "

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Proust n'avait-il pas, dans sa préface aux Propos sur les peintres, de David à Degas de Jacques-Emile Blanche (Paris, 1919), choisi de citer des passages dans lesquels Blanche décrivait "certaines fabriques de Corot sous un divin ciel bleu d'août qui éclaire d'un éternel rayon le cabinet dans lequel j'écris ces lignes" ?

Les "Fabriques", ce sont deux toiles, Soissons, maison d'habitation et fabrique de M.Henry, et Soissons fabrique de M. Henry.

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Car qu'est-ce-qu'un "pan de mur" ? Une façade. Et que montre Corot, sinon des façades, ou plutôt le jeu d'un soleil bas sur les couleurs et les volumes ?

Corot n'est-il pas l'un des (nombreux) modèles d'Elstir ?

Marcel Proust n'a-t-il pas écrit en 1899 un chapitre de Jean Santeuil intitulé "Un amateur de peinture. Monet-Sisley-Corot" ?  

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Petit pan de mur

 

Corot, Soissons, maison d'habitation et fabrique de M.Henry

Corot, Soissons, maison d'habitation et fabrique de M.Henry

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Petit pan de mur, petit pan de mur avec un auvent...

 

Corot

Corot

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Petit pan de mur, petit pan de mur, petit pan de mur jaune petit pan de mur avec un auvent...

Corot, Genève

Corot, Genève

Le petit pan se martele comme le boléro de Ravel : 

Pan de mur, pan de mur, petit pan de mur, petit pan de mur, petit pan de mur jaune petit pan de mur avec un auvent...

La mort de Corot et la mort de Bergotte .

Petepedemeje, petepedemeje, petitpapademamanjau, patapadamaja, pitipidimiji, puituipuiduimuijuif poitoipoidoimoi, rendre-ma phrase-en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune ce petit pan si bien peint en jaune peint en jaune peint en jaune. en jaune. 

Corot, la femme à la perle, détail.

Corot, la femme à la perle, détail.

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pommes de terre pas assez cuites, pommes de terre pas cuite, pommes de pommes de pommes de terre pas cuite en jaune

 

La mort de Corot et la mort de Bergotte .

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Corot, La Cathédrale de Chartres.

Corot, La Cathédrale de Chartres.

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pan de mur pan de mur pan de mur pan de

chemise

jaune

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Corot, autoportrait

Corot, autoportrait

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Parme Pontorson Pont-Aven Paris Temps Pan Pan Pan Mer Mer Mer petit pont de mer jean petit papa mère jeanne Proust jeanne jeune j'en sans tœil jaune .

 

Corot.

Corot.

J'en étais là de mes rêveries, feuilletant les livres d'art sur Corot en laissant mon imagination tisser les façades d'une Maison aux environs d'Orléans, de l'Île de San Bartolomeo, de la Vasque de la Villa Médicis, d'une Vue de Gêne, d'un Pont sur la Saône à Macon, lorsque, atteignant les derniers chapitres, je lus la description des derniers jours de Corot frappé d'une maladie digestive (un cancer de l'estomac) , et je lus cette phrase du peintre:  "Il me semble, dit-il, que je n'ai jamais su faire un ciel." (Camille Corot: un rêveur solitaire, 1796-1875 ,Jean Selz - 1996).

Bien sûr, tout lecteur de la Recherche pense aussitôt à la mort de Bergotte, et au moment où, devant le petit pan de mur de la Vue de Delft de Ver Meer, ce dernier est illuminé par une évidence esthétique : 

« C'est ainsi que j'aurais dû écrire, disait-il. Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune. » Cependant la gravité de ses étourdissements ne lui échappait pas. Dans une céleste balance lui apparaissait, chargeant l'un des plateaux, sa propre vie, tandis que l'autre contenait le petit pan de mur si bien peint en jaune. Il sentait qu'il avait imprudemment donné le premier pour le second. 

J'ai voulu en savoir plus. La déclaration de Corot était rapporté par un ouvrage de Gaëtan Picon Admirable tremblement du temps, Genève, Skira, 1970, page 24. Ce dernier me mena à la source véritable, la biographie de Corot par Moreau-Nélaton : L'oeuvre de Corot : catalogue raisonné et illustré. Précédé de L'histoire de Corot et de ses oeuvres. Tome 1  par Alfred Robaut et par Étienne Moreau-Nélaton . Paris, Floury, 1905.  Par chance, le texte était numérisé sur Gallica

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6515426v/f338.image.r=mort

La scène se passe dans l'atelier du 56 de la rue du Faubourg-Poissonnière (alors nommée Rue de Paradis-Poissonnière, Paris 10e) installé depuis 1853 et où il avait pris l'habitude de dormir et de recevoir ses amis.

Fond Château de Versailles et de Trianon.

 

Source image http://www.parisrevolutionnaire.com/spip.php?article277

 

Le 6 janvier, Corot se déclare dans une lettre "souffrant depuis deux mois", mais bien décidé à en tirer profit : "Courage, et mettons de tout ça dans nos peintures".  Puis Moreau-Nélaton retranscrit les notes prises par Alfred Robaut. Le peintre est clairement conscient de la sévérité du pronostic de sa maladie. Un régime "au lait de vache seul" —2 litres par jour—  ; le 28 janvier, le docteur Cambay (sic) "opère une ponction". 

"Vendredi 29 janvier 1875. M. Corot, étendu sur son lit, cause avec moi. « Vous n'avez pas idée de ce que je vois à faire de nouveau. J'aperçois des choses que je n'ai jamais vues. Il me semble que je n'ai jamais su faire un ciel ! Ce que j'ai devant moi est bien plus rose, plus profond, plus transparent ! Ah, que je voudrais vous montrer ces immenses horizons" Et, les yeux en l'air, il se passe l'index sur le front. "

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Le décès survient le lundi 22 février à 11heures.

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Alfred Robaut prend le 23 février deux croquis de la chambre mortuaire, aux murs couverts de tableaux . Les obsèques sont célébrées à l'église Saint-Eugène. "Après la messe, le char funèbre a pris le chemin du cimetière de l'Est, suivi par la même foule. Quatre paysagistes tenaient les cordons du poèle : MM. Jules Dupré, Oudinot, Lavieille et Karl Daubigny. Ce dernier remplaçait son père malade. M. de Chennevières, directeur des Beaux-arts, a prononcé sur la tombe d'éloquentes et nobles paroles" (p. 329).

Jean-Baptiste Corot est enterré au cimetière du Père-Lachaise, 24e division, près des tombes de Karl Daubigny et d'Honoré Daumier. La tombe de Marcel Proust (décédé le 18 novembre 1922) se trouve dans la 85è division.

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http://www.landrucimetieres.fr/spip/spip.php?article940

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Admirateur de Ruskin, traducteur de la Bible d'Amiens, auteur dans le Figaro du 16 août 1904 d'un article sur La mort des cathédrales,  Proust avait de bonnes raisons de s'intéresser à un écrivain tel qu'Étienne Moreau-Nélaton (1859-1927), l'auteur de Les églises de chez nous, 3 vol., 1913-1914, de La Cathédrale de Reims, 1915, et d'un essai sur la cathédrale de Soissons. D'autant qu'il partageait avec cet auteur la passion pour les peintres, et qu'il ne pouvait être indifférent à l'auteur de Histoire de Corot et de ses œuvres, d'après les documents recueillis par Alfred Robaut, 1905, Corot, biographie critique, 1913, Le Roman de Corot, 1914, mais aussi Delacroix raconté par lui-même, étude biographique d'après ses lettres, son journal, etc., 2 vol., 1916, Jongkind raconté par lui-même, 1918, Millet raconté par lui-même, 3 vol., 1921. 

Mais c'est le graveur et dessinateur Alfred Robaut (1830-1909) qui s'exprime, et qui est l'auteur du récit,  Moreau-Nélaton étant celui qui a poursuivi la publication du Catalogue entrepris par Robaut. 

Bergotte, Corot et Near Death Experience ?

Je suis alors incité à m'interroger sur la nature de la "vision", de l'"illumination", de l'"hallucination" , bref sur l'experience esthétique, onirique et visuelle vécue par Corot trois semaines avant sa mort.  Nous sommes presque fondés à la considérer comme une manifestation d'un état cérébral modifié, soit par l'anoxie (c'est le mécanisme suspecté pour les "Expériences de Mort Imminente") soit par la fièvre ou par la douleur, soit par trouble nutritionnel, etc.. Dans le cas des expériences de mort imminente E.M.I , le témoignage d'une perception lumineuse particulièrement apaisante voire mystique est fréquent.

Dans le cas de Corot, il est certain que lorsqu'il décrit  des choses qu'il n'a jamais vues, bien plus rose, plus profond, plus transparent , d' immenses horizons... il décrit une vision intérieure, et non des objets peints sur son plafond !

Si on applique cette expérience au cas de Bergotte, cela devrait nous inciter à réaliser que le "petit pan de mur jaune" ne doit pas être recherché (comme cela l'a été, en vain, par des générations de spécialistes) sur la Vue de Delft de Vermeer, où il ne se trouve pas, mais qu'il témoigne d'une vision intérieure de Bergotte. La phrase qui suit peut nous en convaincre : "Dans une céleste balance lui apparaissait, chargeant l'un des plateaux, sa propre vie, tandis que l'autre contenait le petit pan de mur si bien peint en jaune." L'écrivain voit se dérouler le film instantané de son passé, film qui apparaît "sur une balance" (comme celle du Jugement Dernier) c'est à dire qu'il soumet son existence à un examen de vie. Ce dernier est le 6ème critère du Weighted core experience index de Kenneth Ring pour valider une E.M.I. Dans le cas de Corot, ce jugement existentiel correspond à la phrase : "il me semble que je n'ai jamais su faire un ciel".

Note : Je ne cautionne bien-sûr ici aucune croyance ésotérique ou religieuse et je me fonde seulement sur les travaux des psychologues, tels qu'ils sont rapportés dans l'article Wikipédia sur ces expériences nommées EMI ou NDE.

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Je peux m'arrêter là, car le parallèle entre les deux scènes et les deux sentiments esthétiques me semble éloquent. Si besoin, on lira le chapitre XIII Les derniers jours et la mort (31 décembre 1874-22 février 1875) de Rodaut et Moreau-Nélaton en parallèle de la Mort de Bergotte, ou bien on le lira en se mettant à la place du lecteur Marcel Proust. Car je parie maintenant qu'il a lu ce récit, et, comme chacun de nous tend à le faire, qu'il a anticipé sa propre mort.

Mort à jamais ?

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SOURCES ET LIENS.

COMPAGNON (Antoine), Proust au musée, 

https://www.college-de-france.fr/media/antoine-compagnon/UPL18804_13_A.Compagnon_Proust_au_mus_e.pdf

KATO (Yashué),2000 "Elstir et Corot, la préface de Proust aux Propos de peintre de Jacques-Émile Blanche" in Proust et les peintres, publié par Sophie Berto,  page 49

MILLY (Jean), 1974, "Sur quelques noms proustiens"  Littérature  Année 1974  Volume 14  Numéro 2  pp. 65-82

MOREAU-NÉLATON (Etienne), 1905,  L'oeuvre de Corot : catalogue raisonné et illustré. Précédé de L'histoire de Corot et de ses oeuvres. Tome 1 avec Alfred Robaut , Paris, Floury, 1905 

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6515426v/f338.image.r=mort

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Published by jean-yves cordier - dans Proust
12 février 2016 5 12 /02 /février /2016 01:30

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Après mon étude baie par baie des cinq "saint Christophe" de la cathédrale de Quimper, je les réunis ici dans une synthèse facilitant la comparaison des lancettes entre elles.

 

Plan de la cathédrale avec les vitraux représentant saint Christophe.

Plan de la cathédrale avec les vitraux représentant saint Christophe.

 

La Baie 113, bras nord du transept.

 

Baie 113, bras nord du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile

Baie 113, bras nord du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile

Baie 114. Transept, bras sud. 

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Baie 115, bras nord du transept.

 

Baie 115, bras nord du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

Baie 115, bras nord du transept, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

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Baie 126, nef sud.

 

Baie 126, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile

Baie 126, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile

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Baie 128, nef sud.

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Baie 128, nef sud, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

Baie 128, nef sud, cathédrale de Quimper, photo lavieb-aile.

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Les six baies accueillant des lancettes consacrées à saint Christophe se trouvent dans les bras du transept pour trois d'entre elles (n° 113, 115 et 116), et dans le coté sud de la nef pour deux autres (n°126 et 128), la sixième qui occupait la façade occidentale (n°0100) ayant été détruite. Aucune n'occupe le chœur, qui avait été vitré trois-quart de siècle auparavant, entre 1417 et 1417. 

Ces verrières datent toutes de la même époque, la fin du XVe siècle (vers 1495-1497), sous le règne de Charles VIII et d'Anne de Bretagne et sous l'épiscopat de Raoul Le Moël (1493-1501), et elles ont toutes été restaurées, ou complétées par Antoine Lusson entre 1869 et 1874. Elles ont été (sans-doute) offertes par des donateurs qui se sont fait représentés , présentés par un saint qui intercède pour eux. Les donateurs qui ne peuvent être identifiés que par des armoiries, sont soit des chanoines du chapitre cathédrale, soit des seigneurs d'une des grandes familles nobles du diocèse, avec leur épouse. Les saints et saintes sont choisis soit en raison du prénom des donateurs, soit parmi les grands intercesseurs. 

I. INFORMATIONS APPORTÉES PAR LES LANCETTES ADJACENTES.

Les saints et donateurs présents dans les autres lancettes des cinq baies étudiées apportent-elles des indices pour mieux comprendre le culte rendu à saint Christophe ?

Les saints invoqués.

La Vierge à l'Enfant est représentée sur deux baies. Outre saint Christophe, sur ces cinq lancettes sont réunis 12 saints, 1 saint évêque et 2 saintes, . Parmi eux, 10 sont identifiables de manière fiable, Saint Jean-Baptiste 4 fois, saint Jean l'Évangéliste 2 fois, Saint Pierre, Saint Michel, saintes Barbe et Marguerite chacun 1 fois. Les autres identifications sont proposées par les auteurs du XIXe siècle : saint Corentin patron de la cathédrale, saint Maurice, saint Ronan et saint Vincent Ferrier. 

Les donateurs.

Ils sont au nombre de 13, dont trois femmes.Trois familles sont identifiées par leur armoiries (Le Baillif, Lezongar, Kerguelenen), une autre n'est que suspectée par leurs armoiries (de Poulpiquet). On compte 5 chanoines, trois couples de la noblesse bretonne, et 2 autres  chevaliers. 

– Les chanoines : ce sont  Jean Le Baillif, Jehan Le Baillif, chanoine de la cathédrale de 1468 à 1494,  Jean de Kerguelenen, chanoine  de la cathédrale de Quimper entre 1489 et 1498 et trois autres non identifiés.

– Les familles de la noblesse bretonne.

Il s'agit de trois membres de la famille de Lezongar, seigneur de Pratanras ; d'un couple de la famille de Kerguelenen, et d'un couple portant des armoiries d'azur à trois oiseaux compatible avec la famille de Poulpiquet.

En conclusion, l'élément le plus signifiant est sans-doute la forte association avec les deux saints Jean, mais surtout avec Jean-Baptiste, précurseur du Christ qui baptisait par immersion dans le Jourdain. En effet, saint Christophe est représenté les pieds dans les eaux du fleuve dont il est le passeur, au moment où il est frappé par le bouleversement de sa connaissance/reconnaissance de l'Enfant Sauveur du Monde, et qu'il se convertit. Les deux saints mettent donc en avant la valeur de la conversion, et le rôle des eaux comme métaphore d'un passage, d'un renversement, d'une renaissance, d'une rédemption. La présence dans deux baies d'une Vierge à l'Enfant, où l'Enfant bénit (deux cas) et porte le globe crucigère (dans un cas) participe de cette démonstration puisque c'est bien l'enfant Sauveur du Monde (Salvator Mundi) qui est dans les bras maternels.

II. RENSEIGNEMENTS APPORTÉS PAR LA COMPARAISON ICONOGRAPHIQUE;

Les cinq saints Christophe sont conformes au modèle iconographique diffusé à la même époque dans les enluminures des livres d'Heures dans les sculptures et les vitraux. Dans les cinq cas, Christophe traverse le fleuve, ses pas étant dirigés de la droite vers la gauche, ses jambes nues représentées dans l'eau (sauf n°114) ; des poissons y sont visibles dans un cas. La présence d'un bâton de marche est constante , vertical dans un cas, légèrement ou fortement oblique dans l'axe de la marche dans les quatre autre cas. Ce bâton n'est jamais porteur de feuillages (sauf peut-être dans la baie 128), le miracle de la reverdie attestant de la fiabilité de la parole de l'Enfant étant ici négligé. Le bandeau frontal, qui est le bandeau des martyrs, est présent dans quatre cas (et peut-être aussi dans le dernier, n°128). Dans trois cas, la tunique adopte la couleur verte qui témoigne du statut de Géant Vert, de divinité animiste païenne  (celle des eaux et des bois) qui se place au service de la nouvelle religion. Dans les deux autres cas, la couleur verte n'apparaît que par citation dans les revers de l'habit (n°128) et dans le fermail (n°115).

L'Enfant est figuré comme Salvator Mundi dans les cinq cas.  Il porte des cheveux longs blonds et bouclés, sauf dans la baie 114 où les cheveux sont ras. Il est à califourchon dans trois cas, sur l'épaule gauche dans un cas (n°113), la position étant douteuse dans la baie n°115. Il se tient droit et regarde devant lui, sauf dans la baie 128 où il se penche vers le saint. Inversement, Christophe tourne son visage vers le haut et la droite vers l'Enfant, sauf dans les deux baies où il présente un donateur (n°114 et 126).

Les aléas  des détériorations des verres d'origine  l'absence de données sur l'état des vitraux avant la Révolution et la faiblesse de la documentation sur la restauration par Lusson (les verres anciens étant refaits à neuf "à l'identique", puis revendus à des antiquaires) ne permettent pas d'approfondir d'avantage cette analyse dans le cadre qui est le mien (celui d'un amateur).

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III. COMPARAISON AVEC LES AUTRES EXEMPLES ICONOGRAPHIQUES.

1°) Les œuvres antérieures à celles de Quimper : influences ?

a) XIVe siècle.

—Si je cherche dans mon blog les œuvres qui précèdent celles de Quimper, je trouve pour le XIVe siècle la fresque de la cathédrale de Burgos, où Christophe est encore présenté frontalement,  dans sa fonction apotropaïque : on trouvait dans les cathédrales d'Espagne, peintes près d'une entrée, des figures monumentales de saint Christophe qui possédaient un pouvoir apotropaïque, c'est-à-dire protecteur contre la mort sans confession, les épidémies de pestes ou les dangers des voyages ou même tout franchissement périlleux de seuil (gué, pont, passage épineux) par la seule vision de son image et, en particulier, de son regard frontal, associé à la récitation ou la lecture d'une formule latine ou vernaculaire en vers léonin exprimant la réalité de cette protection.  Iconographie de saint Christophe : la cathédrale de Burgos. Fresque du XIVe siècle

—Je trouve aussi la fresque de la Collégiale de Sémur-en-Auxois, vers 1372, premier exemple du Christophe en marche dans sa traversée et sa conversion.   Iconographie de saint Christophe : Semur-en-Auxois (c.1372). ​

b) XVe siècle.

— Ma série des Christophe du XVe siècle concerne l'Ouest de la France. Elle débute à la cathédrale d'Angers où André Robin a peint en 1451 un saint qui mérite d'être comparé à celui de notre baie n°113 :

Iconographie de Saint Christophe : les vitraux de la cathédrale d'Angers, II. La baie 117 (1451)  /  Iconographie de saint Christophe à la cathédrale d'Angers II. La baie 117 d'André Robin. Saint Eustache et la traversée de rivière. (1451)

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Iconographie de saint Christophe dans les vitraux de la cathédrale de Quimper. I. La baie n°113.

 

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Puis j'arrive en Bretagne, où deux vitraux sont réalisés en 1470 (Tonquédec) et en 1480 (Ploermel), témoignant de l'importance que prend alors cette dévotion à la fin du XVe siècle auprès des commanditaires, les seigneurs et le clergé des paroisses concernées. 

 

Là encore, les parentés entre ces œuvres et celles de Quimper sont nombreuses, soit lorsque le saint présente une donatrice (Tonquédec, évêché de Tréguier), soit lorsqu'il est figuré seul (Ploermel, diocèse de Saint-Malo). 

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Saint Christophe, Ploermel, Baie 1, 1480, photographie lavieb-aile.

Saint Christophe, Ploermel, Baie 1, 1480, photographie lavieb-aile.

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En 1493, juste au moment où ces vitraux des baies de la cathédrale de Quimper sont commandées, un linteau de la chapelle du château d'Amboise montre saint Christophe franchissant le gué : ses commanditaires sont Charles VIII et Anne de Bretagne, couple royal dont la souveraineté s'étend maintenant sur Quimper : cela incite à réfléchir sur l'influence de la dévotion envers saint Christophe de la Duchesse de Bretagne.

Le linteau du château d'Amboise (1493)

Enfin, avant de quitter le XVe siècle citons le tableau conservé à Séville pour le chapitre de l'Ordre de Calatrava en 1480. 

Petite iconographie de Saint Christophe à Séville. I : le retable du couvent San Benito de Calatrava. (vers 1480)

On peut en conclure que saint Christophe a été choisi comme protecteur et intercesseur par les chanoines du chapitre de Quimper et seigneurs bretons en lien avec un mouvement plus général, attesté dans l'Ouest de la France, atteignant l'entourage de la Duchesse Anne ou du roi Charles VIII. On peut en rechercher le sens soit comme un recours face à un sentiment de peur à l'égard de  maladies ou de guerres, de mutation ou de déplacement sur les routes du pays (épidémies ; début des Guerres d'Italie), soit comme une réflexion spirituelle sur l'importance de la Foi, de la Conversion et du Baptème, puisque saint Christophe le passeur de gué protège des dangers des passages de fleuve et de pont, du franchissement de portes et de seuils, protège les pèlerins et les voyageurs lors de leurs parcours, mais étend sa protection aux grandes transitions, que ce soit celle de la naissance, celle du passage de la vie à la mort (dangers de la mort sans viatique), où celle des revirements de l'âme. Le recours concommitant et plus important encore à saint Jean-Baptiste —qui n'est pas un Saint Auxiliaire  protecteur des grands dangers— m'incite à donner plus de poids à cette dernière hypothèse et à envisager dans le choix du décor religieux de la cathédrale au seuil du XVIe siècle la possibilité d'une grande réflexion théologique sur le Salut.

Une autre possibilité, que j'ai envisagé lors de l'analyse du vitrail de la cathédrale de Beauvais par Engrand Le Prince, réalisé moins de trente ans plus tard pour un proche de la cour royale, est de considérer que saint Christophe est invoqué par l'élite quimpéroise des années 1590 comme un magnifique exemple de rencontre du Christ en face à face. Certes, le développement des Ecce Homo des Passions et des Christ de douleur sur des petits tableaux à usage de dévotion personnelle permettait une participation empathique aux souffrances du Christ, dans une évolution de la vie intérieure vers l'Imitatio Christi, mais on peut deviner combien le face à face d'un Christ enfant, et à la fois sauveur, peut orienter la réflexion et la sensibilté spirituelle vers un enrichissement de ces perspectives.
Le vitrail d'Engrand Leprince de la cathédrale de Beauvais : vitrail dit "de Roncherolles" dans la chapelle du Sacré-Cœur. Baie 25. II. Saint Christophe dévisagé. (1522)

 

 

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CONCLUSION.

Les vitraux de la cathédrale de Quimper ont été décrits de façon parfaite par les meilleurs spécialistes, mais il me semble qu'une reflexion sur le sens et les raisons des choix des thèmes iconographiques peut  être désormais entreprise, pour mieux comprendre la mentalité de nos prédecesseurs, de leurs croyances, de leur vision du monde, de leurs espérances ou de leurs frayeurs, juste avant la survenue de l'an 1500. Cela suppose une autre ampleur de vue que mes balbutiements . Serais-je l'index désignant la cible à atteindre ? A d'autres !

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SOURCES ET LIENS.

— AYMAR DE BLOIS (1760-1852), vers 1820. On doit à ce neveu du chanoine de Boisbilly une description des vitraux vers 1820. 

A. de Blois, héritant de ce registre de Boisbilly, en fait don à l'évêque André, le 5 janvier 1804, mais le ré-annote en 1820 et 1821 et donne alors la description des vitraux et leur état. Il le remit de nouveau à l'évêque de Quimper, Mgr Graveran, le 5 septembre 1842 "pour l'usage de la cathédrale ". Il rajoute  "malade d'une fluxion, charge son fils Louis de le remettre à l'évêque". (J-P. Le Bihan)

 

— BOISBILLY (Jean-Jacques-Archibald le Provost de la Boexière ,Chanoine de), vers 1770,Registre de BoisbillyArch. Dioc. Quimper,  ,

 Jean-Jacques Archambault Provost de Boisbilly (1735-1786). Docteur en théologie de la Sorbonne, vicaire général du diocèse de Rennes, il était abbé commandataire du Tronchet et chanoine de Quimper. Il possédait une des plus érudites bibliothèques de Quimper et on lui doit par ailleurs un plan de la cathédrale dressé en 1770 qui est une des sources les plus importantes sur la cathédrale avant la Révolution. Il avait dessiné l'architecture des fenêtres de la cathédrale en pleine page de 1770 à 1772. Ce travail  devait être complété par la suite avec les dessins des vitraux, mais il fut malheureusement appelé à d'autres fonctions.

"La cathédrale de Quimper, qui figure au nombre des Monuments historiques du département du Finistère, n’a été jusqu’ici l’objet d’aucune publication de quelque importance. Vers l’année 1770, l’abbé de Boisbilly, syndic du chapitre de Quimper, avait, en vue d’une histoire de ce monument, réuni de nombreuses notes, et fait dresser un plan de l’église avec ses chapelles et ses autels. Dans sa réunion générale du 14 mai 1772, le chapitre le « pria de continuer l’ouvrage qu’il avait commencé sur la description détaillée de l’église cathédrale, » et décida « qu’il en serait fait un registre particulier. » (1)1 Sur ces entrefaites, l’abbé de Boisbilly fut appelé à Rennes pour prendre part aux travaux de la Commission intermédiaire des États de Bretagne dont il faisait partie. Les affaires importantes et multipliées de la Province ne lui permirent pas de mener à bonne fin son entreprise. Ses notes furent perdues, et il n’est resté comme souvenir du projet qu’il avait formé, qu’un registre grand in-folio, qui contient avec le plan de la cathédrale, les dessins au trait de ses fenêtres, dessins qui devaient être complétés par la peinture des vitraux. M. de Blois (de Morlaix), neveu de l’abbé de Boisbilly, a fait hommage de ce registre à Mgr l’évêque de Quimper, le 5 septembre 1849. Avant de s’en dessaisir, il avait pris le soin d’écrire au-dessous des dessins des fenêtres, une description sommaire des vitraux qu’elles contenaient encore en 1820 et 1821, mais à cette époque beaucoup étaient entièrement détruits. " (R-F. Le Men)

 

— BONNET (Philippe) 2003, Quimper, la cathédrale, Zodiaque, Paris 

— CUFFON . Buletin SAF, t.LXXXIX. 1963, p.xcvii et suivantes. 

— DANIEL (Tanguy), (dir.), Anne Brignandy, Yves-Pascal Castel, Jean Kerhervé et Jean-Pierre Le Bihan, 2005,  sous la direction de, Les vitraux de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper,  Presses Universitaires de Rennes / Société Archéologique du Finistère,  287 p. (ISBN 978-2-7535-0037-2).

— GALLET (Yves), Les ducs, l’argent, les hommes ? Observations sur la date présumée du chevet rayonnant de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper (1239) p. 103-116 http://books.openedition.org/pur/5315

 — GATOUILLAT (Françoise), 2013,  "Les vitraux de la cathédrale" , in Quimper, la grâce d'une cathédrale, sous la direction de Philippe Bonnet et al.,La Nuée Bleue, Strasbourg, page 185-203

— GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2005,  Les vitraux de Bretagne, Corpus Vitrearum, France VII, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, p. 172.

— GUILHERMY (Ferdinand de), 1848-1862,  Notes sur les diverses localités de France, Bnf, Nouv. acquis. française 6106 folio 335v et suivantes.

Le baron de Guihermy, membre de la Commission des Arts, visita Quimper le 2 octobre 1848 et rédigea un mémoire d'après ses notes. Nommé membre de la Commission des Monuments Historiques en 1860, il entreprit un voyage en France et séjourna à Quimper du jeudi soir 28 octobre 1862 au samedi 30 à midi et compléta alors ses premières notes.  Les baies n'y sont pas numérotées et distribuées en cinq lieux : Vitraux de la chapelle des fonts, vitraux de la Nef, vitraux du transept, vitraux du chœur, vitraux de la chapelle terminale. 

Concernant la baie 113, nous trouvons (J-P. L.B):

 un personnage debout, imberbe, coiffé d'une toque verte à plume blanche, portant une armure et pardessus une cotte d'azur à la croix d'or cantonnée de quatre fleurs de lys de même. Il tient de la main gauche une lance à banderole blanche et s'appuyant de la droite sur un bouclier blasonné comme la cotte. Ne serait-ce pas saint Louis ? Il s'agit de l'écuyer de Prat ar Rouz
Saint Michel vainqueur du démon ; saint évêque bénissant, décrit comme saint Corentin par Aymar de Blois, saint Christophe passant l'eau avec le Christ sur son épaule,

— LE BIHAN (J.-P.), J.-F. Villard (dir.), 2005,  Archéologie de Quimper. Matériaux pour servir l’histoire, t. 1 : De la chute de l’Empire romain à la fin du Moyen Âge, Quimper, 2005.

— LE BIHAN (J.-P.) 1993,, -"Gravures de repère sur les vitraux bretons des XVe et XVIe."Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, T.CXXII

— LE BIHAN (Jean-Pierre), 2007,  Blog 

http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-7003763.html

et baie 114 :

http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-5710978.html

 LE MEN (René-François), 1877, Monographie de la cathédrale de Quimper [XII-XVe siècle], Quimper. p.243-244,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/1e08593c46eb46336af146045b16d0f4.pdf

— THOMAS (Abbé Alexandre), 1892, Visite de la cathédrale de Quimper. Arsène de Kerangal, 170 pages,  p.117,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/c9d5dca31c276caf2782d0a4b99a85ce.pdf

  THOMAS (Abbé Alexandre) 1904,  La cathédrale de Quimper, 1904, J. Salaun, 97 pages, p.51

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Published by jean-yves cordier - dans Saint Christophe.
11 février 2016 4 11 /02 /février /2016 16:02

Iconographie de saint Christophe dans les vitraux de la cathédrale de Quimper. V .La baie n°128 , verrière dite "aux oiseaux". Nef, troisième travée, mur sud.

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L'intention de cette série de mon blog est de replacer chaque œuvre dans un ensemble iconographique étudiant les variations et les reprises du thème de saint Christophe traversant le gué en portant le Christ enfant sur ses épaules. Et de faire apparaître l'importance de ce culte au XVe et XVIe siècle.

A Quimper, le but est de souligner combien ce culte avait une place prépondérante, et d'inciter à réfléchir à sa signification, qui dépasse de loin l'image de saint-pour-porte-clef-et-garagiste qu'on pourrait avoir.

Saint Christophe sur les vitraux de la cathédrale de Quimper :

Autres exemples iconographiques :

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Introduction.

Les vitraux de la cathédrale de Quimper comptaient 6 représentations de saint Christophe, dont 5 sont encore visibles actuellement. Le saint porteur de l'Enfant-Christ vient ainsi à la sixième position des saints personnages représentés, après le Christ (25 occurences), la Vierge (13), de saints évêques (10), Jean-Baptiste (10), saint Jean (7), saint Pierre (7). Il précède saint Michel ou saint Jacques, saint Paul et sainte Catherine, et même saint Corentin, le patron de Quimper, qui sont figurés 4 fois chacun.

Cette sixième place est inattendue, car le culte voué à Christophe ne semble pas avoir eu une telle importance. Le prénom de Christophe est rarement rencontré parmi les noms des seigneurs bretons. Nous devons reconsidérer nos a priori et prendre toute la mesure de l'honneur qui a été rendu à ce saint, notamment au  XVe siècle, lorsque la cathédrale fut vitrée. Ajoutons que, outre ces six verrières, saint Christophe disposait d'une chapelle à son nom, décrite par R-F. Le Men .

Les vitraux de la cathédrale de Quimper ont été considérablement restaurés, ou même reconstruits au XIXe et au XXe siècle. Nous devrons être vigilants pour distinguer les verres d'origine, et les restaurations.

Les six verrières sont les suivantes :

  • Baie 0100. Offerte par  Alain Le Maout, évêque de 1484 à 1493. Détruite peu après 1821, et donc non décrite ici. Elle était décrite ainsi par Aymar de Blois : : ".. au milieu un crucifix, à sa droite Notre-Dame, et à sa gauche saint Jean l’Évangéliste ; à droite de Notre-Dame, saint Pierre à gauche de saint Jean, saint Paul ; sous le crucifix, saint Corentin et son poisson à ses pieds ; à sa droite saint Cosme et à sa gauche saint Christophe. Deux effigies d’évêques à genoux, mitrés, tenant leurs crosses d’argent, revêtus de chapes bleues, et beaucoup plus grandes que celles des saints, se font face l’une à l’autre à droite et à gauche, et remplacent, avec leur prie-Dieu, l’espace depuis la hauteur du milieu des saints du deuxième rang, jusqu’aux ornements peints qui forment la base du vitrail. L’écusson que l’on voit sur les prie-Dieu, est le même pour les deux figures qui se ressemblent. Il est d’argent au chevron d’azur liseré d’or ; ce sont les armes d’Alain Le Mout ou Le Maout, évêque de l’an 1484 à 1493." . Cette composition montre combien saint Christophe tenait l'une des premières places parmi les saints vénérés à Quimper à la fin du XVe siècle. 

  • Baie 113 . Transept bras nord, coté est. Vitrail de Jean le Baillif. Fin XVe siècle et vers 1874.

  • Baie 114. Transept bras sud, coté est. Vitrail de Pratanras. Fin  XVe et vers 1870.

  • Baie 115. Transept, bras nord. Baie du Gloria. Fin XVe et 1873.

  • Baie  126. Nef 2ème travée sud. Vitrail de Kerguelenen.  Fin XVe et vers 1870.

  • Baie 128.  Nef 3ème travée sud. Verrière  dite "aux oiseaux. Fin XVe, vers 1870, et 1999.

Alors que les vitraux du chœur ont été posés sous l'épiscopat de Bertrand de Rosmadec, entre 1417 et 1419, les verrières de la nef et du transept furent posées entre 1495 et 1497, alors que l'évêque était Raoul le Moël (1493-1501). La Bretagne était alors gouvernée par Anne de Bretagne, peu après qu'elle soit devenue reine de France en épousant (1491) Charles VIII. La disposition générale des 20 fenêtres du transept et de la nef est proche de celle adoptée pour le chœur au début du XVe, avec des niches gothiques, des saints intercesseurs (debout) et des donateurs ou commanditaires (à genoux). Ceux-ci sont en majorité des chanoines du chapitre cathédrale. Ce dernier était composé au XVe siècle d'un Doyen qui était, de Droit, l'Abbé de l'Abbaye de Daoulas, Ordre de St Augustin, qui, lorsqu'il était présent, avait son siège dans le choeur, en face de celui de l'Evêque. De cinq autres Dignitaires, qui étaient le Grand Archidiacre ou de Cornouaille, le Grand Chantre, le Trésorier, l'Archidiacre de Poher, et le Théologal ; de douze Chanoines qui avaient des Paroisses à leur présentation, et du Bas Choeur. Outre les chanoines, les grandes familles nobles sont aussi représentées sous forme de couples, identifiés par leurs armoiries. Les armes des donateurs figurent dans les lancettes, dans les tympans, et parfois sur les voûtes.

Ces verrières occupent les fenêtres hautes de la cathédrale, ce qui ne les rend ni bien visibles, ni facilement photographiables, d'autant que, au sol, des chaises en rang serrés interdisent l'accès aux bras du transept.

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Les verrières contenant saint Christophe. la baie 128 est cerclée. D'après un plan par Chaussepied in notice diocèse.

Les verrières contenant saint Christophe. la baie 128 est cerclée. D'après un plan par Chaussepied in notice diocèse.

La nef est éclairée  en partie haute par dix baies dont huit datent des années 1494 à 1500. Du coté sud, deux baies voisines renferment un saint Christophe : elles portent les numéros 126 et 128.

  La baie n° 128 comporte cinq lancettes désignées par les lettres A à E,  et un tympan à 9 ajours, recrée vers 1872. Hauteur 7,50 m, largeur 4,00 m. Elle est entièrement moderne (Lusson, 1869-1874), sauf quelques pièces.

J'utilise dans ma description les publications de R-F. Le Men (1877) page 140,  Françoise Gatouillat, (2005 page 181,  et 2013), et Yves-Pascal Castel (Daniel, 2005) page 128.

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Historique : 

Les verrières de la nef ont été restaurées par l'atelier manceau d'Antoine Lusson fils (le restaurateur de la Sainte-Chapelle)  de 1869 à 1874.  Les verrières hautes de la cathédrale ont été déposées en 1942, et reposées entre 1950 et 1964 par l'atelier Gruber sans modification notable.  Les baies ont été restaurées en 1992-93 par l'atelier Jean-Pierre Le Bihan.

La première description disponible est celle d'Aymar de Blois p.32 qui la situe alors (vers 1820) "2e vitre de la nef, coté évangile". Ce document permet d'attesté que Lusson a refait les vitres, mais en a respecté les sujets :

1°) L'image de saint Jean-Baptiste.

2°) Saint Christophe

3°) Un chanoine présenté par un saint qu'on n'a pas su distinguer.

4°) Un seigneur dont la cotte d'armes est blanche chargée de 3 oiseaux d'or ou d'argent. Il parait que ce sont les armes de Clécunan ou de Kernechulan, 

5°) Sa femme habillée, moitié des armes de son mari et moitié des siennes qui sont d'azur au cornet ou petit cor de chasse entre 3 besants le tout d'argent".

–Description (après restauration par Lusson ) de René-François Le Men 1877 page 140 :

 N° 90. Troisième fenêtre (sud). Cinq panneaux.

1er Panneau. — Saint Jean-Baptiste. On l’a placé à tort dans le cinquième panneau.

2e Panneau. — Saint Christophe.

3e Panneau. — Un chanoine en chape, à genoux devant un prie-dieu et présenté par un saint qu’on n’a pu reconnaître. il y a sur les drapées du prie-dieu un écusson portant d’azur, à trois oiseaux d’argent.

4e Panneau. — Un chevalier à genoux vêtu d’une cotte d’armes d’azur chargée de trois oiseaux d’argent. Présenté par saint Vincent-Ferrier.

5e Panneau. -— Une Dame à genoux dont la robe d’azur porte trois oiseaux d’argent et un greslier aussi d’argent accompagné de trois besants de même. Elle est présentée par saint Jean-Baptiste Le peintre a supprimé le greslier et remplacé les besants d’argent par des besants d’or. Ce panneau qui devait être le cinquième, a été mis a tort le premier. 

–En 1892, l'abbé A. Thomas donne page 123 une description semblable. Couffon la suit également. Gatouillat et Hérold 2005 précisent les verres anciens : quelques fragments dans la chape de la 3ème lancette ; dais de la 4ème "du même type qu'en baie 124" .

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Baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

 

– Pascal-Yves Castel donne plusieurs renseignements complémentaires :

Il fait remarquer le sol carrelé d'un damier noir et blanc des lancettes a, c, d, e, et les dais très riches à trois étages, aux bases de forme triangulaire.

Il mentionne "un cartouche avec un texte encadré de damas : " Elie Maillard août 1870" (peintre ou cartonnier de chez Lusson ? Ses initiales E et M apparaissent dans d'autres baies."

L'inscription se trouve en réalité sur le livre posé devant le chanoine de la lancette C (voir photo infra). Je lis le mot ANNÉE plutôt que le mot août.  On trouve dans Les graveurs du 19e siècle; guide de l'amateur d'estampes modernes une étude de tête par Alphonse Legros du "peintre Elie Maillard (qui se suicidera en 1887), in-4.". Et ailleurs (liste des peintres exposants au Salon de 1864)  la note suivante : " ELIE-MAILLARD (Auguste), né à Saint-Phal (Aube), élève de M. Lecoq, Rue de l'Est, 33"

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Signature d'Elie-Maillard année 1870, Lancette C, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Signature d'Elie-Maillard année 1870, Lancette C, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Lancette A. Saint Jean-Baptiste présentant une donatrice.

Rappel : Selon R-F. Le Men, qui tient compte de la description d'Aymar de Blois en 1822, "Une Dame à genoux dont la robe d’azur porte trois oiseaux d’argent et un greslier aussi d’argent accompagné de trois besants de même. Elle est présentée par saint Jean-Baptiste Le peintre a supprimé le greslier et remplacé les besants d’argent par des besants d’or. Ce panneau qui devait être le cinquième, a été mis a tort le premier." Aymar de Blois avait décrit la lancette D avec son donateur , puis " 5°) Sa femme habillée, moitié des armes de son mari et moitié des siennes qui sont d'azur au cornet ou petit cor de chasse entre 3 besants le tout d'argent"."

Discussion sur l'identification.

Le problème est donc d'identifier d'une part le propriétaire des armoiries aux trois oiseaux d'argent, et d'autre part la famille de la donatrice, au grelier d'argent.

a) Pour le donateur, Aymar de Blois indique "il paraît que ce sont les armes de Clécunan ou Kernerchulan". Les Clécunan (paroisse d'irvilac) portent de sable à trois huppes d'argent, becquées de gueules. Potier de Courcy indique : Clécunan (de), sr dudit lieu, par. d'Irvillac, — de Keranhoat, par. de Loperhet. Réf. et montres de 1426 à 1536, par. d'Irvillac, év. de Cornouaille. De sable à trois huppes d'argent, becquées de gueules, comme Kerguern. Fondu dans Rosnyvinen."

 Si on veut bien prendre ces oiseaux pour des huppes, on peut déplorer ici que la couleur de l'écu soit d'azur, et non de sable. Les armoiries des Poulpiquet sont d'azur à trois palerons ou pies de mer d'argent, bequées et membrées de gueules. Elles sont illustrées par les armoiries épiscopales de Jean-Marie de Poulpiquet de Brescanvel, évêque de Quimper de 1823 à 1840. Voir aussi dans D'Hozier

 

 

Ce sont donc les armoiries de Poulpiquet qui sont le plus conformes à celles qui figurent sur le vitrail. Le fief de cette famille se trouve à Locmaria-Plouzané (29).

b) pour l'épouse et donatrice, aucune armoiries ne sont d'azur à un greslier  d’argent accompagné de trois besants de même. La formule la plus proche me semble être celle des Kermorial de KermorvanD'azur à un greslier d'argent, accompagné de trois fleurs de lis du même, 2 en chef et 1 en pointe :

KERMORIAL (DE), Sr dudit lieu, par. de Baye, de Kermorvan, par. de Cuzon, de Poulfos, de la Porte-Neuve, par. de Riec, de Kervéno.

Anc. ext., réf. 1669, six gén.; réf. et montres de 1426 à 1562, par. de Baye, Saint-Colomban de Quimperlé et Querrien, év. de Cornouailles.

D'azur au greslier d'argent, accomp. de trois fleurs de lys de même. Devise : Sot ouc'h sot. (Sot contre sot.)

Thomas, vivant en 1481, père de Pierre, marié à Catherine Perrault; Jean, auteur de la branche de Kervéno, vivant en 1535, épouse Louise Louarnec; un lieutenant des maréchaux de France à Quimper en 1740.

La paroisse de Cuzon tient son nom d'un  plateau dominant la vallée de l'Odet, au nord-est de Quimper. Cuzon etait paroisse independante de Kerfeunteun jusqu'à la Révolution. . http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/Quimper.pdf

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Description du vitrail.

Saint Jean-Baptiste est identifiable par son vêtement en poil de chameau et par l'agneau qu'il présente ici sur un livre rouge.

Son voisinage avec saint Christophe était déjà notée dans la baie 113, et les rapports entre les deux saints ont été discutés à propos de la baie 115. J'avais alors signalé que Jean-Baptiste est représenté sur 10 vitraux anciens de la cathédrale, au troisième rang après le Christ et la Vierge. 

La donatrice est représentée avec tout le faste que le XIXe siècle sait conférer dans ces pastiches d'œuvres médiévales. On notera l'étoffe pourpre qui recouvre le prie-dieu, car au centre du cartouche en écu dont elle est décorée se déchiffre à l'envers des lettres qui évoquent le nom du peintre Elie-Maillard.

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Baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Lancette B. Saint Christophe.

Bien qu'il soit impossible de savoir à quoi ressemblaient les verres anciens qu'Aymar de Blois a brièvement décrit, on peut penser que Lusson en a repris la disposition générale, car celle-ci est conforme au schéma traditionnel que j'ai eu a décrire constamment dans cette iconographie, et par lequel Christophe dont les jambes sont résoluement tournées vers la gauche, tournoie sur lui-même et lève son visage vers l'Enfant qu'il porte à califourchon. Ses jambes nues, l'eau du fleuve, et (cas unique sur les 5 vitraux étudiés à Quimper) la rive à atteindre sont représentées. Le saint est vêtu d'une tunique courte dorée et damassée, à revers verts, et d'un manteau rouge. En dessous, il porte un tricot rayé. Son visage est barbu et souriant. Le bandeau frontal n'a pas été peint.

Le bâton est dessiné en diagonale, parallèle à l'axe épaule droite / jambe gauche.

L'Enfant porte le nimbe crucifère, bénit et tient le globe, comme dans les 4 autres vitraux, mais pour la première fois, il se penche (légèrement) vers le saint et leurs regards se croisent. 

L'élément insolite est celui-ci : le saint, au lieu de maintenir le bâton, lève la main et tend l'index vers l'Enfant. Deux pièces de verre blanc aux rayures grises  partent de la face latérale de l'index et se dressent en V.

S'agit-il d'un oiseau ? Mais que vient-il faire là ?

Je pense que le verrier restaurateur a mal compris le dessin du XVe siècle et a tenté de s'en débrouillé. Il pouvait s'agir initialement :

--soit d'un feuillage s'élevant de l'extrémité du bâton pour témoigner de sa reverdie, comme dans de nombreux exemples.

--soit des extrémités du bandeau frontal nouées derrière la tête.

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Saint Christophe, lancette B, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Saint Christophe, lancette B, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Saint Christophe, lancette B, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Saint Christophe, lancette B, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Lancette C. Chanoine présenté par saint Jean (?).

Le saint n'a pas été identifié par nos prédecesseurs, mais trois indices plaident pour y voir saint Jean : son visage imberbe ; son allure d'éphèbe ; son livre (Jean est l'auteur de son évangile, mais aussi de l'Apocalypse). Ajoutons que le trio Jean-Baptiste + Jean l'Évangéliste + saint Christophe est déjà réuni baie 115. 

Le donateur est un chanoine, de la famille de Poulpiquet si on tient compte des armoiries du prie-dieu haut placé dans la hiérarchie ou la dignité puisqu'il porte une chape aux bordures historiées qui, à elle seule, vaut une fortune. Il serait passionnant de savoir si elle était déjà présente telle quelle sur le vitrail du XVe. 

Cette chape m'évoque celle d'un vitrail de l'église de Saint-Nic (29) ; le donateur est également présenté par saint Jean. J'avais envisagé l'hypothèse d'y voir Jean de Largez, abbé de Daoulas de 1502 à 1519, et, par ce titre, doyen du chapitre cathédrale (armoiries d'argent au lion de sable, armé, lampassé de gueules). Il administra le diocèse de Quimper de 1501 à 1518 à la place de l'évêque en titre, Claude de Rohan, simple d'esprit. Il mourut le 6 novembre 1533 et fut enterré en son abbaye, où sa plaque tombale se trouve toujours. 

La chape de ce vitrail est en damas d'or, bordée de soie blanche brodée au fil d'or traçant un décor de niches réservées à des pieux personnages : cinq sont visibles à gauche et un à droite, ce sont des saints (nimbes) et des évêques ou abbés (crosses et mitres).

Une chape aussi somptueuse est représentée en baie n°121, mais, là encore, l'identité de celui qui la porte est inconnue. Même observation pour la baie 129 (avec saint Pierre et saint Paul dans les niches). En baie 116, Geoffroy de Treanna porte une chape portant sur l'orfroi Ave Maria Gratia Plena .

Les armoiries aux trois oiseaux ont pu être placées sur le prie-dieu pour se conformer aux armes des lancettes A et D.

 

Baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Lancette C (détail), baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Lancette C (détail), baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Lancette D. Donateur présenté par un saint.

Un saint tonsuré et tenant un livre , où on a pensé reconnaître le dominicain espagnol Vincent Ferrier (inhumé dans la cathédrale de Vannes), présente un jeune chevalier agenouillé en armure, et dont le tabard porte les armoiries d'azur à trois oiseaux d'argent que nous avons rapproché de celles de la famille de Poulpiquet. 

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Lancette D, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Lancette D, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Le donateur, lancette D, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Le donateur, lancette D, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Lancette E. Saint Jean-Baptiste.

 

Jean-Baptiste est représenté une nouvelle fois, ce qui signale encore l'importance de la vénération dont il était l'objet de la part des chanoines du chapitre de Quimper, et le lien étroit qui l'associe à saint Christophe. Vêtu de sa fameuse tunique en poil de chameau de pilis camelorum, il porte sur un coussin rouge l'Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde. L'index droit, dirigé ici  vers l'Agneau, évoque immanquablement l'index peint par Léonard de Vinci en 1513 .

 

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Lancette E, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Lancette E, baie n°128, troisième travée sud de la nef, cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

 

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 SOURCES ET LIENS.

 

ANDRÉ (Augustin), 1878, De la verrerie et des vitraux peints de l'ancienne province de Bretagne, Rennes, Plihon, in-8°, 281 p.  (Extr. des Mémoires de la Société archéologique du département d'Ille-et-Vilaine, t. XII.) page 299-304.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2077642/f326.image

 

— AYMAR DE BLOIS (1760-1852), vers 1820. On doit à ce neveu du chanoine de Boisbilly une description des vitraux vers 1820.  Registre de Boisbilly, Arch. Dioc. Quimper, 8 L1 . Le folio 25 concerne la baie 114.

AncreAncre A. de Blois, héritant de ce registre de Boisbilly, en fait don à l'évêque André, le 5 janvier 1804, mais le ré-annote en 1820 et 1821 et donne alors la description des vitraux et leur état. Il le remit de nouveau à l'évêque de Quimper, Mgr Graveran, le 5 septembre 1842 "pour l'usage de la cathédrale ". Il rajoute  "malade d'une fluxion, charge son fils Louis de le remettre à l'évêque". (J-P. Le Bihan)

 

— BOISBILLY (Jean-Jacques-Archibald le Provost de la Boexière ,Chanoine de), vers 1770, Registre de Boisbilly, Arch. Dioc. Quimper, 8 L1 ,

 Jean-Jacques Archambault Provost de Boisbilly (1735-1786). Docteur en théologie de la Sorbonne, vicaire général du diocèse de Rennes, il était abbé commandataire du Tronchet et chanoine de Quimper. Il possédait une des plus érudites bibliothèques de Quimper et on lui doit par ailleurs un plan de la cathédrale dressé en 1770 qui est une des sources les plus importantes sur la cathédrale avant la Révolution. Il avait dessiné l'architecture des fenêtres de la cathédrale en pleine page de 1770 à 1772. Ce travail  devait être complété par la suite avec les dessins des vitraux, mais il fut malheureusement appelé à d'autres fonctions.

"La cathédrale de Quimper, qui figure au nombre des Monuments historiques du département du Finistère, n’a été jusqu’ici l’objet d’aucune publication de quelque importance. Vers l’année 1770, l’abbé de Boisbilly, syndic du chapitre de Quimper, avait, en vue d’une histoire de ce monument, réuni de nombreuses notes, et fait dresser un plan de l’église avec ses chapelles et ses autels. Dans sa réunion générale du 14 mai 1772, le chapitre le « pria de continuer l’ouvrage qu’il avait commencé sur la description détaillée de l’église cathédrale, » et décida « qu’il en serait fait un registre particulier. » (1)1 Sur ces entrefaites, l’abbé de Boisbilly fut appelé à Rennes pour prendre part aux travaux de la Commission intermédiaire des États de Bretagne dont il faisait partie. Les affaires importantes et multipliées de la Province ne lui permirent pas de mener à bonne fin son entreprise. Ses notes furent perdues, et il n’est resté comme souvenir du projet qu’il avait formé, qu’un registre grand in-folio, qui contient avec le plan de la cathédrale, les dessins au trait de ses fenêtres, dessins qui devaient être complétés par la peinture des vitraux. M. de Blois (de Morlaix), neveu de l’abbé de Boisbilly, a fait hommage de ce registre à Mgr l’évêque de Quimper, le 5 septembre 1849. Avant de s’en dessaisir, il avait pris le soin d’écrire au-dessous des dessins des fenêtres, une description sommaire des vitraux qu’elles contenaient encore en 1820 et 1821, mais à cette époque beaucoup étaient entièrement détruits. " (R-F. Le Men)

 

— BONNET (Philippe) 2003, Quimper, la cathédrale, Zodiaque, Paris 

— COUFFON . Bulletin SAF, t.LXXXIX. 1963, p.xcvii et suivantes. 

— COUFFON http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/Quimper.pdf

— DANIEL (Tanguy), (dir.), Anne Brignandy, Yves-Pascal Castel, Jean Kerhervé et Jean-Pierre Le Bihan, 2005,  sous la direction de, Les vitraux de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper,  Presses Universitaires de Rennes / Société Archéologique du Finistère,  287 p. (ISBN 978-2-7535-0037-2).

— GALLET (Yves), Les ducs, l’argent, les hommes ? Observations sur la date présumée du chevet rayonnant de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper (1239) p. 103-116 http://books.openedition.org/pur/5315

 — GATOUILLAT (Françoise), 2013,  "Les vitraux de la cathédrale" , in Quimper, la grâce d'une cathédrale, sous la direction de Philippe Bonnet et al.,La Nuée Bleue, Strasbourg, page 185-203, 

 GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2005,  Les vitraux de Bretagne, Corpus Vitrearum, France VII, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, p. 172.

— GUILHERMY (Ferdinand de), 1848-1862,  Notes sur les diverses localités de France, Bnf, Nouv. acquis. française 6106 folio 335v et suivantes.

Le baron de Guihermy, membre de la Commission des Arts, visita Quimper le 2 octobre 1848 et rédigea un mémoire d'après ses notes. Nommé membre de la Commission des Monuments Historiques en 1860, il entreprit un voyage en France et séjourna à Quimper du jeudi soir 28 octobre 1862 au samedi 30 à midi et compléta alors ses premières notes.  Les baies n'y sont pas numérotées et distribuées en cinq lieux : Vitraux de la chapelle des fonts, vitraux de la Nef, vitraux du transept, vitraux du chœur, vitraux de la chapelle terminale. 

 

 

— LA VALLÉE, 1847,  "Essai sur les vitraux existant dans les églises du canton de Quimper", Bulletin archéologique de l'Association bretonne, t.I, p. 263-277.

 

— LE BIHAN (J.-P.), J.-F. Villard (dir.), 2005,  Archéologie de Quimper. Matériaux pour servir l’histoire, t. 1 : De la chute de l’Empire romain à la fin du Moyen Âge, Quimper, 2005.

— LE BIHAN (J.-P.) 1993,, -"Gravures de repère sur les vitraux bretons des XVe et XVIe." Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, T.CXXII

— LE BIHAN (Jean-Pierre), 2007,  Blog  

http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-5674011.html

— LE MEN (René-François), 1877, Monographie de la cathédrale de Quimper [XII-XVe siècle], Quimper. p.243-244,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/1e08593c46eb46336af146045b16d0f4.pdf

— THOMAS (Abbé Alexandre), 1892, Visite de la cathédrale de Quimper. Arsène de Kerangal, 170 pages,  p.123,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/c9d5dca31c276caf2782d0a4b99a85ce.pdf

 — THOMAS (Abbé Alexandre) 1904,  La cathédrale de Quimper, 1904, J. Salaun, 97 pages, p.51

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11 février 2016 4 11 /02 /février /2016 15:39

Iconographie de saint Christophe dans les vitraux de la cathédrale de Quimper. IV.

La baie n°126 ou Verrière de Kerguelenen. Nef, deuxième travée, mur sud.

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L'intention de cette série de mon blog est de replacer chaque œuvre dans un ensemble iconographique étudiant les variations et les reprises du thème de saint Christophe traversant le gué en portant le Christ enfant sur ses épaules. Et de faire apparaître l'importance de ce culte au XVe et XVIe siècle.

A Quimper, le but est de souligner combien ce culte avait une place prépondérante, et d'inciter à réfléchir à sa signification, qui dépasse de loin l'image de saint-pour-porte-clef-et-garagiste qu'on pourrait avoir.

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Saint Christophe sur les vitraux de la cathédrale de Quimper :

Autres exemples iconographiques :

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La nef est éclairée  en partie haute par dix baies dont huit datent des années 1494 à 1500. Du coté sud, deux baies voisines renferment un saint Christophe : elles portent les numéros 126 et 128.

 

 La baie n° 126 comporte cinq lancettes désignées par les lettres A à E,  et un tympan à 9 ajours, recrée vers 1872. Hauteur 7,50 m, largeur 4,00 m.

 

J'utilise dans ma description les publications de R-F. Le Men (1877),  Françoise Gatouillat, (2005 et 2013), et Yves-Pascal Castel (Daniel, 2005).

Les vitraux anciens occupent les fenêtres hautes. Très très hautes pour le touriste photographe. 

 

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Historique : 

 

Les verrières de la nef ont été restaurées par l'atelier manceau d'Antoine Lusson fils (le restaurateur de la Sainte-Chapelle)  de 1869 à 1874.  Les verrières hautes de la cathédrale ont été déposées en 1942, et reposées entre 1950 et 1964 par l'atelier Gruber sans modification notable.  Les baies ont été restaurées en 1992-93 par l'atelier Jean-Pierre Le Bihan.

Seule la lancette centrale C (celle qui m'intéresse !) est encore partiellement de la fin du XVe.

 

Description de R-F. Le Men 1877 page 139 :

 — 1er Panneau. — Notre-Dame.

 — 2e Panneau. — Un chanoine en chape à genoux, devant un prie-dieu, dont les draperies portent un écusson armorié d’azur au lion d’argent chargé d’une macle d’or. Il est présenté par saint Julien, en ermite. Ce chanoine est N. de Kerguelenen, chanoine de Quimper, de 1489 à 1497. Les mêmes armes sont dans la voûte vis-à-vis de cette vitre (Voir p.125, n° 56 : Écu triangulaire : d’azur au lion rampant d’argent chargé d’une macle d’or, armé et lampassé de gueules. — Jean de Kerguelenen, chanoine de la cathédrale en 1489 et 1498, et recteur de la paroisse de Grandchamp. Il avait fondé dans la cathédrale, une chapellenie dont le patronage appartenait en 1540 à Alain de Kerguelenen, chevalier. La seigneurie de Kerguelenen était dans la paroisse de Pouldergat près Douarnenez. ).

 — 3e Panneau. — Un chevalier à genoux, présenté par saint Christophe, et portant sur sa cotte d’armes bleue, un lion d’argent armé et lampassé de gueules, chargé d’une macle d’or.

 — 4e Panneau. — Une dame à genoux présentée par sainte Barbe. Elle porte sur sa robe bleue un lion d’argent chargé d’une macle d’or, et un léopard d’or.

 — 5e Panneau. — On avait recommandé d’y placer saint Yves, M. Lusson en a fait un évêque (panneau neuf)."

En 1892, l'abbé A. Thomas donne une description semblable, sous le titre de Vitrail de Kerguelenen.

Couffon ajoute la précision suivante :  "-signé Lusson 1870 dans un prie-Dieu de Kerguelenen" 

 

Je trouve les renseignements suivants sur la famille de Kerguelenen :

   a) La famille :

  Jehan de Kerguélénen, décédé en 1483, avait eu de Béatrice du Hirgars (d'or à 3 pommes d'azur) deux fils dont de cadet fut chanoine de Quimper (1489-1509). L'aîné, Jehan de Kerguélénen, marié en 1474 à Marie Tuonmelin, fille d'Alain Tuonmelin, sgr de Botpodern (d’azur au lévrier passant d’argent) mourut en 1497, laissant plusieurs enfants. Alain de Kerguélénen qui lui succéda, vécut jusqu'en 1547. L'ancien manoir de Kerguelenen se situait à Pouldergat, paroisse dont l'église Saint-Ergat porte encore le blason familial sculpté dans la pierre.

 Entre 1489 et 1498, 

 

Potier de Courcy indique (Nobiliaire et Armorial Tome II, p. 93) : Kerguelenen, seigneur du Penquer, de Pennanneac'h, de Kerollain et de Kerstrat en la paroisse de Pouldergat.

b) Le chanoine Jean  :

– Jean de Kerguélénen, chanoine  de la cathédrale de Quimper entre 1489 et 1498, est également prieur de l'île Tristan à Douarnenez, ses armes figurant sur l'une des vitres de l'ancienne chapelle Sainte-Hélène, devenue chapelle prieurale.

–Documents : VILLE DE QUIMPER (Département du Finistère) REPERTOIRE NUMERIQUE DETAILLE DES ARCHIVES COMMUNALES ANTERIEURES A 1790 Série CC. FINANCES, IMPOTS ET COMPTABILITE. page 18 :  CC 59 1 cahier, parchemin, 14 fol. Couverture velin ancien manuscrit en réemploi

 

  1481* Apurement des comptes des miseurs : - compte de Jehan Le Baud naguère receveur des deniers de devoirs de billot en l’évêché de Cornouaille et miseur des murs, achèvements, réparations des édifices de la ville de Quimper Corentin conclus au mois de juin 1481. Dont apurement donné en la maison d’Olivier Le Baud en la Terre au Duc, clos et signé le 14 août 1500 par noble homme Hervé du Juch seigneur de Pratanroux capitaine dudit Quimper Corentin, maître Hervé de Lezongar, Jehan de Kerguelenen chanoine de l’église cathédrale de Monsieur Saint Corentin, maître Yves Dongoallen, Vincent de Kerguenozal, François Marion, Alain Rolland, Alain Le Garz, Henry Le Baud, Julien Morel, Prigent de Coetenezre, Jehan Le Douzic, Yvon Madec et plusieurs autres nobles et bourgeois de cette ville et tenu par Morice de Kerloaguen, Auditeur et François Le Saux, gens des comptes dudit duc de Bretagne. 

–On trouve dans le Cartulaire de Quimper  deux pages signées de Jean de Kerguelenen: in Bulletin diocèsain d'Histoire et d'Archéologie du Diocèse de Quimper Edité en 1906, page 151

 

 

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Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Lancette A. La Vierge à l'Enfant.

Oeuvre de l'atelier Lusson;

 

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Lancette B. Saint Julien l'Hospitalier présentant le chanoine Jehan de Kerguelenen.

Création de Lusson (1869 à 1874). Le saint, vêtu en ermite, est identifié comme saint Julien par René-François Le Men (1824-1880), archiviste du Finistère qui écrit en 1877, juste après la création du vitrail : non seulement il a du obtenir les renseignement du maître-verrier, mais il semble qu'il ait participé aux consignes qui lui furent données. 

Le chanoine, revêtu d'une chape damassée à large orfroi, est agenouillé devant un prie-dieu drapé des armoiries d'azur au lion d'argent chargé d'une macle d'or (Kerguelenen).

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Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Lancette C. Saint Christophe présentant un seigneur de Kerguelenen.

Parmi les éléments traditionnels de l'iconographie, on note :

–L'Enfant à califourchon sur les épaules du saint, tenant l'orbe crucigère et bénissant . 

– la couleur verte de la tunique du saint

– son bandeau frontal blanc.

– sa barbe et ses cheveux longs témoignant d'une ancienne nature d'homme des bois.

– son bâton, ici horizontal et particulièrement noueux et donc rustique. Ce bâton ne reverdit pas, et, comme les autres bâtons du saint sur les vitraux de Quimper, il ne témoigne donc pas de la reverdie miraculeuse qui attestera de la validité de la promesse faite par l'enfant au saint.

– la ceinture. On en profite pour remarquer le verre rouge gravé et doublé (la gravure est responsable des motifs blancs). Le même type de gravure est visible dans la bande qui passe derrière la tête de l'Enfant.

Par contrel la posture tête basse de Christophe est aypique : est-elle due à un restaurateur, ou bien s'explique-t-elle par l'attitude du saint présentant son protégé ?

De même, la moitiè inférieure permet de voir une jambe gauche nue, mais ne montre pas —ou de façon très simplifié— le cours d'eau traversé.

Le donateur.

Tête nue (cheveux coiffés selon la mode du temps), agenouillé devant le livre d'heures posé sur le prie-dieu, il porte l'armure de chevalier, sur laquelle il a endossé le tabard à ses armes. Le lion d'argent est parfaitement dessiné, rampant, et sa langue rouge montre qu'il est "  lampassé de gueules". 

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Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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Lancette D. Sainte Barbe présentant la donatrice.

Sainte Barbe n'a pas un visage très féminin, et on la confondrait facilement avec saint Jean (avec son manteau rouge), si elle ne tenait pas son attribut, la tour percée des trois fenêtres attestant de sa foi dans le dogme de la Trinité.

La donatrice porte sur sa robe les armes de Kerguelenen (le lion rampant et la macle d'or), mais cette macle contient un lion léopardé d'or. 

 

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Lancette E. Un saint évêque.

Renè-François Le Men laisse transparaître son mécontentement, car "on" (il ?) avait demandé au verrier de "faire" un saint Yves, et c'est un saint évêque parfaitement lambda qui a été réalisé, avec l'attirail des poncifs qui s'y attachent : mitre, crosse, chape et nimbe. C'est bien pieux, mais cela ne mène à rien, et cela n'a rien de breton. C'est pas grave, c'est bien peint quand même.

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

Baie 126, troisième travée sud de la nef de la cathédrale de Quimper, photographie lavieb-aile.

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 SOURCES ET LIENS.

 

ANDRÉ (Augustin), 1878, De la verrerie et des vitraux peints de l'ancienne province de Bretagne, Rennes, Plihon, in-8°, 281 p.  (Extr. des Mémoires de la Société archéologique du département d'Ille-et-Vilaine, t. XII.) page 299-304.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2077642/f326.image

 

— AYMAR DE BLOIS (1760-1852), vers 1820. On doit à ce neveu du chanoine de Boisbilly une description des vitraux vers 1820.  Registre de Boisbilly, Arch. Dioc. Quimper, 8 L1 . Le folio 25 concerne la baie 114.

AncreAncre A. de Blois, héritant de ce registre de Boisbilly, en fait don à l'évêque André, le 5 janvier 1804, mais le ré-annote en 1820 et 1821 et donne alors la description des vitraux et leur état. Il le remit de nouveau à l'évêque de Quimper, Mgr Graveran, le 5 septembre 1842 "pour l'usage de la cathédrale ". Il rajoute  "malade d'une fluxion, charge son fils Louis de le remettre à l'évêque". (J-P. Le Bihan)

 

— BOISBILLY (Jean-Jacques-Archibald le Provost de la Boexière ,Chanoine de), vers 1770, Registre de Boisbilly, Arch. Dioc. Quimper, 8 L1 ,

 Jean-Jacques Archambault Provost de Boisbilly (1735-1786). Docteur en théologie de la Sorbonne, vicaire général du diocèse de Rennes, il était abbé commandataire du Tronchet et chanoine de Quimper. Il possédait une des plus érudites bibliothèques de Quimper et on lui doit par ailleurs un plan de la cathédrale dressé en 1770 qui est une des sources les plus importantes sur la cathédrale avant la Révolution. Il avait dessiné l'architecture des fenêtres de la cathédrale en pleine page de 1770 à 1772. Ce travail  devait être complété par la suite avec les dessins des vitraux, mais il fut malheureusement appelé à d'autres fonctions.

"La cathédrale de Quimper, qui figure au nombre des Monuments historiques du département du Finistère, n’a été jusqu’ici l’objet d’aucune publication de quelque importance. Vers l’année 1770, l’abbé de Boisbilly, syndic du chapitre de Quimper, avait, en vue d’une histoire de ce monument, réuni de nombreuses notes, et fait dresser un plan de l’église avec ses chapelles et ses autels. Dans sa réunion générale du 14 mai 1772, le chapitre le « pria de continuer l’ouvrage qu’il avait commencé sur la description détaillée de l’église cathédrale, » et décida « qu’il en serait fait un registre particulier. » (1)1 Sur ces entrefaites, l’abbé de Boisbilly fut appelé à Rennes pour prendre part aux travaux de la Commission intermédiaire des États de Bretagne dont il faisait partie. Les affaires importantes et multipliées de la Province ne lui permirent pas de mener à bonne fin son entreprise. Ses notes furent perdues, et il n’est resté comme souvenir du projet qu’il avait formé, qu’un registre grand in-folio, qui contient avec le plan de la cathédrale, les dessins au trait de ses fenêtres, dessins qui devaient être complétés par la peinture des vitraux. M. de Blois (de Morlaix), neveu de l’abbé de Boisbilly, a fait hommage de ce registre à Mgr l’évêque de Quimper, le 5 septembre 1849. Avant de s’en dessaisir, il avait pris le soin d’écrire au-dessous des dessins des fenêtres, une description sommaire des vitraux qu’elles contenaient encore en 1820 et 1821, mais à cette époque beaucoup étaient entièrement détruits. " (R-F. Le Men)

 

— BONNET (Philippe) 2003, Quimper, la cathédrale, Zodiaque, Paris 

— COUFFON . Bulletin SAF, t.LXXXIX. 1963, p.xcvii et suivantes. 

— COUFFON http://diocese-quimper.fr/images/stories/bibliotheque/pdf/pdf-Couffon/Quimper.pdf

— DANIEL (Tanguy), (dir.), Anne Brignandy, Yves-Pascal Castel, Jean Kerhervé et Jean-Pierre Le Bihan, 2005,  sous la direction de, Les vitraux de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper,  Presses Universitaires de Rennes / Société Archéologique du Finistère,  287 p. (ISBN 978-2-7535-0037-2).

— GALLET (Yves), Les ducs, l’argent, les hommes ? Observations sur la date présumée du chevet rayonnant de la cathédrale Saint-Corentin de Quimper (1239) p. 103-116 http://books.openedition.org/pur/5315

 — GATOUILLAT (Françoise), 2013,  "Les vitraux de la cathédrale" , in Quimper, la grâce d'une cathédrale, sous la direction de Philippe Bonnet et al.,La Nuée Bleue, Strasbourg, page 185-203, 

 GATOUILLAT (Françoise), HÉROLD (Michel), 2005,  Les vitraux de Bretagne, Corpus Vitrearum, France VII, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, p. 172.

— GUILHERMY (Ferdinand de), 1848-1862,  Notes sur les diverses localités de France, Bnf, Nouv. acquis. française 6106 folio 335v et suivantes.

Le baron de Guihermy, membre de la Commission des Arts, visita Quimper le 2 octobre 1848 et rédigea un mémoire d'après ses notes. Nommé membre de la Commission des Monuments Historiques en 1860, il entreprit un voyage en France et séjourna à Quimper du jeudi soir 28 octobre 1862 au samedi 30 à midi et compléta alors ses premières notes.  Les baies n'y sont pas numérotées et distribuées en cinq lieux : Vitraux de la chapelle des fonts, vitraux de la Nef, vitraux du transept, vitraux du chœur, vitraux de la chapelle terminale. 

 

 

— LA VALLÉE, 1847,  "Essai sur les vitraux existant dans les églises du canton de Quimper", Bulletin archéologique de l'Association bretonne, t.I, p. 263-277.

 

— LE BIHAN (J.-P.), J.-F. Villard (dir.), 2005,  Archéologie de Quimper. Matériaux pour servir l’histoire, t. 1 : De la chute de l’Empire romain à la fin du Moyen Âge, Quimper, 2005.

— LE BIHAN (J.-P.) 1993,, -"Gravures de repère sur les vitraux bretons des XVe et XVIe." Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, T.CXXII

— LE BIHAN (Jean-Pierre), 2007,  Blog  

http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-5674011.html

— LE MEN (René-François), 1877, Monographie de la cathédrale de Quimper [XII-XVe siècle], Quimper. p.243-244,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/1e08593c46eb46336af146045b16d0f4.pdf

— THOMAS (Abbé Alexandre), 1892, Visite de la cathédrale de Quimper. Arsène de Kerangal, 170 pages,  p.123,

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/c9d5dca31c276caf2782d0a4b99a85ce.pdf

 — THOMAS (Abbé Alexandre) 1904,  La cathédrale de Quimper, 1904, J. Salaun, 97 pages, p.51

 


 

 

— LA VALLÉE, 1847,  "Essai sur les vitraux existant dans les églises du canton de Quimper", Bulletin archéologique de l'Association bretonne, t.I, p. 263-277.

 
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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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